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L'état d'esprit

L'état d'esprit de Jean-Baptiste Grangé, boulanger, patissier et chef d'entreprise béarnais

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23min |30/11/2025
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Description

Dans cet épisode de L’état d’esprit, on découvre le parcours singulier de Jean-Baptiste Grangé, artisan boulanger devenu champion d’Europe, enseignant, puis chef d’entreprise à la tête de plusieurs boutiques. Rien ne le destinait pourtant au pain… puisqu’il n’en mangeait même pas !
Guidé par un conseiller d’orientation, inspiré par son maître d’apprentissage et porté par le goût du défi, Jean-Baptiste révèle comment il a trouvé sa voie, construit son exigence, transmis sa passion et développé une entreprise artisanale qui emploie aujourd’hui plus de 50 collaborateurs.
Entre rigueur, transmission, ambition maîtrisée et amour du « fait maison », il partage son état d’esprit : faire toujours mieux, rester fidèle à ses valeurs et créer un environnement où chacun peut s’épanouir.


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Bonjour et bienvenue dans ce nouvel épisode de l'état d'esprit. Aujourd'hui on part à la rencontre de Jean-Baptiste Granger, un artisan boulanger qui a trouvé sa voie presque par hasard pour finalement devenir l'un des boulangers les plus talentueux de sa génération. Ancien champion d'Europe, enseignant à 21 ans, puis chef d'entreprise à la tête de plusieurs boutiques. Il incarne à la fois l'exigence, la transmission et l'envie de créer. Bonjour Jean-Baptiste, on se trouve où ici ?

  • Speaker #1

    Donc ici, on est au laboratoire de production des boulangeries et pâtisseries granger. Donc ça va faire deux ans maintenant qu'on est installé ici à Assat. Et tout ce que vous pouvez retrouver en boutique se fabrique ici. Donc c'est pour ça que ça sent aussi bon.

  • Speaker #0

    Alors j'ai lu, qu'enfin vous n'aimiez pas trop, on va dire, le pain ni les pâtes. Et pourtant, vous êtes devenu boulanger. Comment s'est opéré ce virage, on va dire ?

  • Speaker #1

    Alors ce virage très particulier, en fait c'est en fin de troisième, je suis parti en seconde mais sans grandes ambitions. Et au cours de ma seconde, ma scolarité ne se passait pas hyper bien, je n'avais pas trop envie d'étudier. C'est un conseiller d'orientation qui m'a aiguillé, qui m'a fait remplir un QCM tout à fait basique et où en est ressortie la boulangerie. Il m'a dit écoute l'année va être longue, il faut que tu fasses des stages, fais un stage en boulangerie, tu vois si ça te plaît. Et effectivement, je trouvais ça un peu surprenant parce que je ne mangeais pas de pain, pas de pâtes et je n'étais pas adepte à tous ces produits-là. Moi, je me suis dit que j'allais préférer ça que l'école. Donc, c'était aussi ça. Je n'étais pas un mauvais élève, mais je n'arrivais pas à rester en place, un peu comme maintenant. Et du coup, l'idée, c'était d'aller voir, de découvrir. Et c'est là où j'ai rencontré M. Chastel qui aura grandement contribué à ma réussite.

  • Speaker #0

    Justement, votre apprentissage, vous le faites chez Jean-François Chastel à Pontac. Vous dites avoir été accueilli comme un fils. Comment cette expérience vous a-t-elle façonné ? Déjà quand on arrive, parce que vous étiez jeune, quand on arrive comme ça dans un apprentissage, comment on est ?

  • Speaker #1

    On est un peu démuni face au métier parce qu'on ne connaît pas grand chose, voire rien. Donc déjà j'ai eu beaucoup de mal à rentrer chez lui parce que je n'arrivais pas à trouver de patron. C'est-à-dire qu'à cette époque-là, c'était aussi ça qui inquiétait mes parents, c'est que, ok, faire un appréciation... apprentissage en boulangerie mais je ne trouvais pas d'employeur et monsieur Chastel m'avait dit non une première fois et en revenant quelques mois après finalement il m'a dit écoute j'ai quelqu'un qui ne vient pas je vais te prendre donc je suis arrivé dans ce métier dans cette petite entreprise familiale où il était avec sa compagne Laetitia et de suite effectivement accueilli presque comme un fils parce que j'ai toujours été euh Bien constitué et très volontaire. J'ai de suite pris passion pour le métier. Et ça s'est enchaîné comme ça pendant quelques années.

  • Speaker #0

    Et ça vous plaît de suite ou pas ?

  • Speaker #1

    Oui, ça me plaît de suite. C'est étonnant parce que je ne connaissais pas trop, voire pas du tout le métier. On avait un ami qui était boulanger sur Coiraz. J'avais dû y aller peut-être quelques fois avec mon père, mais je n'en avais pas un souvenir non plus. Je ne m'étais jamais dit que c'est exactement ça que je veux faire. Et non, non, ça m'a plu. Et ce qui m'a plu, en fait, c'était le côté d'avoir l'impression de servir à quelque chose. Et donc, j'étais hyper content. Tous les matins, il me tardait d'aller au boulot, en fait. Donc, c'était ces choses assez rares. Mais j'étais hyper motivé et vite à la culture de vouloir faire bien le mieux possible tous les jours.

  • Speaker #0

    Et qu'est-ce qui vous a plu ? Qu'est-ce qui vous plaisait ? La matière ?

  • Speaker #1

    Ouais, la matière, le fait de transformer quelque chose, vraiment de servir à quelque chose, en fait. Et j'avais vraiment... l'impression de servir à quelque chose plus que sur un banc d'école où j'écoutais à moitié. Et donc, je transformais. Tous les jours, je voyais le père. C'est un métier qui est toujours fabuleux parce qu'on n'a rien quelques heures avant et on sort un produit en quelques heures. On fait quelque chose vraiment de concret. Et donc, j'ai tout de suite été pris de passion par le métier.

  • Speaker #0

    Après tout, vous êtes lancé dans les concours. Pourquoi ?

  • Speaker #1

    Alors pourquoi ? Ça vient de mon professeur en chambre des métiers, Didier Lalise, que j'embrasse. Et Didier, ça a été mon enseignant à la chambre des métiers de Pau. Et de suite, il m'a proposé de faire des concours quand j'étais en CAP, quand j'étais tout jeune. Et donc c'est lui qui m'a dit, écoute, il existe tel concours, tel concours. Donc j'ai commencé par faire les Olympiades des métiers en boulangerie, que j'avais remporté au niveau régional, en pâtisserie l'année d'après. Et ensuite, il m'a inscrit au concours de meilleur apprenti de France en 2011. Et donc là, grande aventure. Moi qui n'étais jamais parti de Montbéarn, je suis parti en Alsace, à Eschaux, dans un CFA, faire le concours de meilleur apprenti de France. C'est lui qui m'y avait préparé. Donc j'ai pris l'avion pour la première fois. Et je suis parti avec lui, pareil, un peu comme un père et son fils. On était hyper proches. Et du coup, j'ai remporté le titre de meilleur apprenti de France en 2011. Donc, c'était mon troisième concours, mais ça a été vraiment le déclic sur la partie compète et challenge.

  • Speaker #0

    Qu'est-ce qui vous plaisait là-dedans ?

  • Speaker #1

    Le côté très rigoureux, le côté de se challenger. En fait, vraiment, je suis un homme de challenge. Je m'ennuie assez vite et j'ai besoin de me donner des objectifs. Et donc, je trouvais ça hyper intéressant. Donc c'était en complémentarité avec mon employeur, M. Chastel. Je m'entraînais tout le temps, j'avais envie de faire toujours mieux, comme dans mon quotidien. Mais le côté concours, c'était des choses qu'on ne faisait pas au quotidien en entreprise. Donc c'est dur à expliquer parce que c'est presque une drogue.

  • Speaker #0

    Alors quand on est meilleur apprenti de France, qu'est-ce qu'on ressent ?

  • Speaker #1

    Déjà très fier, très content. C'était super parce que c'est quand même du sacrifice et cette période-là de... de ma vie était un peu entre parenthèses dans ma vie perso parce qu'au final je travaillais beaucoup. Je travaillais tous les dimanches, dès que j'avais du temps libre je m'entraînais ou j'allais en chambre des métiers pour m'entraîner. Donc c'était quand même une vraie réussite et une vraie reconnaissance. Mais donc du coup beaucoup de fierté aussi vis-à-vis de mes parents. Et après une petite sensation d'un peu trop aussi. Après cette période-là, ça devait faire 4 ou 5 ans que j'étais apprenti. J'avais beaucoup travaillé. Donc c'est là où mon parcours pro a basculé un peu après ces concours.

  • Speaker #0

    Très jeune, vous devenez enseignant. Pourquoi ? C'était une envie de transmettre ? C'était une envie de voir autre chose ?

  • Speaker #1

    J'ai enseigné l'année quasiment après avoir eu le titre de meilleur apprenti de France ou peut-être un an et demi après. Avec cette sensation d'avoir un peu trop donné et d'avoir un peu tiré sur la corde. Et donc, je me suis dit, prof, finalement, c'est le bon compromis. Je vais rester dans le métier, mais je ne travaillerai plus les vacances, plus les week-ends. Donc, j'avais idéalisé ça. Et du coup, je suis resté. Bon, j'ai enseigné un petit peu à Pau, un peu à Bayonne, avec des hauts, des bas, des déceptions. Parce que je me voyais rester dans l'enseignement. J'ai fait ça quelques années. Après, ça a été le lycée hôtelier de Morlaz pendant 2-3 ans. Et mon côté entrepreneurial. est arrivé et voilà, tout s'est bousculé un petit peu en 2015. Je suis toujours enseignant et l'idée me vient avec un copain boulanger à Nailles pour m'occuper clairement parce que moi faire 20 heures d'enseignement il me manquait quelque chose. Il fallait que je bouge un peu et du coup chez mes parents j'avais une arrière cuisine et je m'étais dit pourquoi pas faire des gâteaux et les commercialiser. Et donc mon copain boulanger à Nailles m'a dit écoute... si tu veux, moi j'en fais pas, fais-moi des gâteaux et vu que je sais pas faire les choses à moitié j'ai de suite voulu faire les choses bien donc ça marchait plutôt bien donc après je suis resté enseignant mais j'ai développé les points de vente enfin les points relais un peu comme j'appelais à l'époque et j'idéalisais ma vie comme ça, ce modèle comme ça en me disant je vais rester enseignant toute ma vie j'ai mon labo de production, j'avais un associé à l'époque et je me suis dit c'est super ont fait euh On fait un complément, c'est très très bien. Et après, toujours pareil, la vie fait que la vérité n'est plus du tout celle-là, mais aucun regret.

  • Speaker #0

    Donc là, vous continuez cette activité. Vous vous dites quoi ? Vous vous dites, je vais continuer longtemps ou j'ai encore besoin d'un challenge ?

  • Speaker #1

    Le fameux, toujours Didier, Didier Laliz me dit, écoute, j'étais à Morlaz enseignant, il me dit, j'ai un jeune. qui cherchent à faire une équipe pour la Coupe de France de boulangerie. Donc ce jeune-là, c'est Nicolas Gruel, mon copain. J'ai fait une année 2018 au taquet en mode entraînement, enseignement, mais aussi l'activité qui prenait de l'ampleur en parallèle. Donc une année encore un peu compliquée. Et début 2019, le concours. Donc on est parti à la Coupe de France sans trop savoir notre niveau. On s'était bien entraîné, mais très dur. c'est à dire que J'étais capable de m'entraîner de minuit à 7h et de faire ma journée d'enseignement classique de 7h à 14h-15h et l'après-midi de devoir retourner au labo pour faire une période rude. Mais au final, on a remporté la Coupe de France de boulangerie en 2019 avec Nicolas et Gaëtan qui étaient notre troisième partenaire. Et un peu la bis répétita on va dire, mais au final overdose. Trop, c'est un peu mon défaut, c'est-à-dire que je donne beaucoup, mais après, je suis capable d'exploser, donc là, j'apprends sur ça. Donc, j'ai quitté l'enseignement un peu avec perte et fracas courant 2019, parce que voilà, je... J'étais un peu perdu et je ne savais plus trop quoi faire. Donc on a gagné ce titre et c'est vrai que naturellement, on m'est venu l'envie après de me dire, il faut que je fasse quelque chose, il faut que j'entreprends. Donc j'ai passé une année un peu morose, on va dire. On était du coup qualifiés pour la Coupe d'Europe, la Coupe d'Europe de boulangerie. Donc on était tous les trois encore et on a remporté la Coupe d'Europe, donc fin 2019 et c'est là où vraiment ça a été le déclic. Avec un peu de chance, les planètes sont bien alignées, on m'a proposé de racheter la boulangerie Marsan, qui était un de nos clients en pâtisserie, qu'on servait depuis le petit laboratoire. Et donc tout s'est bien goupillé. Donc 2020 s'était acté et début 2021, on a ouvert notre première boutique en nom propre à Pau.

  • Speaker #0

    Et là, qu'est-ce qu'on se dit ? On se dit, on réfléchit, c'est le moment, c'est normal.

  • Speaker #1

    C'est le moment, en fait c'était le moment, j'en avais envie finalement, l'activité sur laquelle on servait les professionnels marchait bien, on devait être deux ou trois à travailler à cette époque-là, et on s'est dit allez c'est le moment, l'emplacement était super, Pau pour nous ça fait toujours, moi étant de Bénéjac, Pau c'était un peu notre capitale à nous, et d'être réinstallé à Pau c'est un peu le graal, donc je me suis dit plein centre-ville, l'occasion est trop belle de la laisser passer. Et donc, ma compagne m'a suivi dans le projet, elle m'a dit, écoute, allez, on y va. Si vraiment tu veux faire ça, je t'accompagne au moins une année. Et bon, là, elle est toujours avec moi et elle est toujours dans l'entreprise, mais c'était le bon moment. Il y a une peur,

  • Speaker #0

    il y a des craintes ?

  • Speaker #1

    La peur, c'était le Covid, parce que 2021, on a ouvert février 2021, on était en plein Covid. Donc effectivement, ce n'était pas l'idéal. On était, je crois, entre la deuxième ou troisième vague et on était un peu inquiets de ça. Et puis, on était habitués, nous, à gérer que de la livraison, à faire nos gâteaux, les livrer, être entre guillemets peinards et se dire on n'a pas la partie vente. Souvent, je fanfaronnais, je me disais moi, je n'ai pas de vente à gérer. Moi, je fais mes gâteaux, je les vends, ils sont livrés, ils sont facturés. Donc, on s'est retrouvé avec un nouveau métier. on a embauché 7 personnes qui étaient présentes sur place donc on s'est retrouvé d'être de 3 à 10 donc bon déjà nouvelle chose mais Mais déjà avec de l'ambition de vouloir faire les choses très bien. Et donc après, par la suite, on a constamment fait évoluer ce fonds de commerce.

  • Speaker #0

    Et comment on arrive à concilier ce parcours finalement ? Enseignant, ensuite petit atelier dans le garage. Ça fait penser à d'autres histoires. Et puis après, on devient chef d'entreprise, presque manager. On va parler même de ce que vous faites actuellement.

  • Speaker #1

    à ce moment là qu'est-ce que vous dites vous dites j'ai les épaules assez solides ou je n'y pense pas en fait je n'y pensais pas et même encore des fois j'ai du mal à regarder un peu dans le rétro parce que non je ne pensais pas à tout ça ce que je savais et que je sais toujours c'est que je voulais faire du mieux que possible donc en étant hyper exigeant et hyper rigoureux sur ce qu'on allait proposer donc on avait nos idées mais Merci. Entre les idées, les choses qu'on a idéalisées et la réalité, on s'est rendu compte que ça allait être difficile. Parce que moi, j'avais un savoir, mais de transmettre mon savoir à des collaborateurs qui allaient représenter mon image, ça a été quelque chose d'assez difficile au début. Mais pour autant, on était de suite quand même dans une mentalité d'être détaché de la production. Moi, finalement, j'ai peut-être été en production un mois maximum sur ma boutique. Parce qu'on avait quand même l'ambition et l'envie de se détacher pour gérer au mieux notre entreprise. Maintenant, c'est quelque chose qu'on fait au quotidien. Mais c'était quand même déjà être entrepreneur à demi-mot. On l'est beaucoup plus maintenant.

  • Speaker #0

    Et pourquoi ce choix justement de ne pas être la main dans le cambouis ou dans le pétrin ?

  • Speaker #1

    C'est une bonne question. Après, je ne sais pas comment l'expliquer parce que c'est vrai que j'adorais ça. Je sortais des concours, j'aimais beaucoup ça. Mais le fait d'avoir beaucoup donné en production, que ce soit pour m'entraîner pour les concours, pour mon apprentissage, je ne me voyais pas. Et puis, j'ai eu de la chance. En fait, je me suis nourri quand même beaucoup de mon expérience de prof parce que je rencontrais beaucoup de chefs d'entreprise chez qui on allait faire des visites. En fait, je ne me voyais pas toute ma vie me dire que ma boîte va être dépendante de moi, d'être tous les jours à faire le pétrin, moi, parce que ça sera bien fait. Donc j'ai de suite eu cette vision un peu de déléguer, mais comment on délègue pour que ce soit... soit représentatif de ce que je veux faire. Donc ça, je l'ai eu de suite. Et bon, maintenant, ça porte ses fruits, entre guillemets. Mais voilà, c'était vraiment notre façon de voir les choses qui a fait que je n'ai pas voulu être trop présent parce que sinon, je pense que la vie ne serait pas la même à l'heure actuelle.

  • Speaker #0

    Et comment on délègue ?

  • Speaker #1

    C'est une très bonne question. On délègue au début comme on peut. On pense toujours bien faire. On se trompe. On s'est souvent trompé. en étant un peu trop gentil. C'est vraiment quelque chose qui a été le plus dur pour nous et on est loin d'être les meilleurs là-dessus, mais on progresse tous les jours. On délègue surtout en faisant confiance, en ayant la chance de s'entourer des bonnes personnes aussi, mais la chance se provoque parce que le côté concours a fait qu'on arrivait à recruter assez facilement. On avait une image plutôt... plutôt positive auprès des jeunes et donc on s'est de suite entouré de très bons collaborateurs sur la partie production. Donc c'était quand même plus facile de transmettre à des gens qui étaient motivés et qui venaient travailler entre guillemets pour moi plus que pour une entreprise. Donc c'était assez fluide et ça s'est fait naturellement.

  • Speaker #0

    Actuellement, vous avez combien de salariés ?

  • Speaker #1

    Alors actuellement, les choses ont bien changé. On est 50 à l'heure actuelle. On a un nouveau projet. on en parlera peut-être tout à l'heure, mais logiquement, d'ici quelques mois, on sera 65. Et voilà, après, c'est un tout autre métier que j'aime autant que la boulangerie. Et c'est ce qui fait aussi que notre ambition devra s'arrêter vite parce qu'on veut rester dans la maîtrise et dans l'humain. Donc voilà, c'est des problèmes, mais ça en est quand même.

  • Speaker #0

    Justement, est-ce que ce n'est pas un risque, finalement, de grandir ? Et finalement, de perdre peut-être un peu son âme, alors c'est peut-être un grand mot, mais en tout cas, l'idée que vous aviez peut-être au départ ?

  • Speaker #1

    Effectivement, c'est un très bon sujet, parce que quand on voit les infrastructures et le nombre qu'on est, on peut avoir tendance à se dire que ça y est, c'est industriel, on a beaucoup de machines. L'idée, c'est que pas du tout. Au contraire, on est artisan, on transforme. Tous nos produits, 99,9%, on transforme, on fait tout maison. C'est aussi pour ça qu'on est très nombreux. On forme une dizaine d'apprentis par an entre les boulangers, les pâtissiers. Donc ça, c'est un souhait et ça, je veux le garder. C'est pour ça qu'on transforme beaucoup, mais on a d'un côté une réalité économique qui fait qu'on a des boutiques qui tournent très bien, où on passe beaucoup de quantités, donc on a automatisé certaines tâches qui n'avaient plus de valeur ajoutée. Donc maintenant, c'est un jeu de chaise musicale. Il faut arriver à trouver le bon équilibre entre faire maison, et ça, c'est notre ADN, c'est-à-dire que ça ne changera jamais. C'est pour ça que je te disais que finalement, notre ambition devra se canaliser un petit peu, avec un peu de frustration, bien sûr, mais parce que je tiens trop à mes collaborateurs et je veux qu'on reste, entre guillemets, familial, artisanal. C'est de 10 à 48, enfin à 50 maintenant. Il s'est passé plein de choses et notamment en 2023 où l'envie et la magie des concours est revenue avec la meilleure boulangerie de France qui nous a contactés. Ça faisait deux, trois ans que je n'avais pas fait de concours et c'était vraiment la bonne occasion d'y aller. Donc on a remporté la dixième saison de la meilleure boulangerie de France en binôme avec Antoine qui est mon chef pâtissier et qui est toujours là avec moi. Donc ça a été un gros tremplin, la boutique travaillait bien, mais là ça a vraiment été un gros tremplin, on est quasiment passé du simple au double en chiffres. Donc ça a été une période assez difficile à gérer, parce qu'on n'avait toujours pas l'outil de production ici, il est arrivé un tout petit peu après la diffusion de la finale. Donc on a grandi, on était vite 30, et en 2024, on a ouvert Nosti, notre deuxième point de vente. Voilà, parce qu'on était en place, on avait notre labo de prod qui était là, qui était disposé à faire un peu plus et on avait un tel engouement sur pot qu'on avait envie de dupliquer un peu le projet. Et comme j'ai toujours un peu les planètes qui s'alignent bien, j'avais dans mes clients professionnels une boulangerie à vendre sur la commune de Nosti. Et donc tout s'est bien enchaîné et on a ouvert en 2024 la boutique. Et maintenant, effectivement, un dernier projet. Alors, je dis un dernier, mais ma compagne me reprend toujours parce que je ne sais pas si ce sera le dernier, mais en tout cas, ce ne sera pas loin. Un projet d'ouverture sur la plaine de Nailles qui est chez moi. Et c'est un peu la façon de boucler la boucle, mais de revenir. Moi, j'ai fait un peu l'inverse souvent. Souvent, certains commencent à Nailles et finissent à Pau. Et moi, je suis content de revenir sur mes terrains.

  • Speaker #0

    Donc, comment on arrive à la fois à déléguer et à... continuer à être exigeant, comment on transmet cette exigence ?

  • Speaker #1

    Je suis très exigeant avec moi-même, avec mes collaborateurs aussi mais je suis un réel gentil donc j'ai beaucoup de mal à être exigeant, la solution la plus simple pour moi ça a été de m'entourer de personnes un peu stratégiques dans mon entourage pro notamment ma compagne qui est là au quotidien et Guillaume qui est notre directeur de boutique qui entre guillemets a le mauvais rôle, même si on n'est vraiment pas des méchants, mais c'est vrai que mes responsables de prod, mon entourage administratif m'aident beaucoup sur la partie que je n'aime pas trop, qui est dire ce qui ne va pas. Et honnêtement, dans les 50 collaborateurs, tout le monde commence à me connaître.

  • Speaker #0

    Ce podcast s'appelle « L'état d'esprit » . Quel est votre état d'esprit au quotidien ? Qu'est-ce qui vous anime ?

  • Speaker #1

    Ce que j'aime le plus, moi, en fait, c'est... Le coterie entrepreneurial, il est arrivé sur le tard parce que, de base, moi, mon métier, c'est la boulangerie, la pâtisserie. J'aime autant l'un que l'autre, on me pose souvent la question. Moi, ce qui m'anime, c'est de voir les boutiques bien rangées, bien remplies, de faire maison, de faire toujours mieux. Et on compare beaucoup, on regarde beaucoup ce que font les autres. Pas dans le sens compétition à proprement parler, mais ça nous booste et ça nous pousse à faire toujours mieux. Et c'est vrai que je ne laisse rien au hasard, que ce soit on essaye, je ne dis pas qu'on est... Moi j'ai souvent tendance à dire qu'on est nul parce que ça pique un peu les équipes, mais ils savent très bien que je ne le pense pas. Mais on veut que tout soit bien pensé, on veut que les gens... Quand ils viennent chez nous, que l'emballage, que le service client, on attache beaucoup d'importance au service client, on rappelle les gens qui sont mécontents, on fait très attention à ça. C'est ça mon quotidien, je veux que les gens soient contents de venir chez nous, que les gens se régalent et surtout que les gens qui travaillent pour moi soient fiers d'être là et surtout qu'ils se sentent bien au travail.

  • Speaker #0

    On va faire preuve un peu d'imagination, imaginons qu'un jeune Jean-Baptiste d'une quinzaine d'années vienne ici et se questionne. s'interroge sur la suite de sa vie ? Qu'est-ce que vous auriez envie de lui dire ?

  • Speaker #1

    Je ne suis pas trop du genre à dire croire en ses rêves ou des choses comme ça parce que je n'avais pas de rêve, je n'ai jamais idéalisé ça. Mais par contre, de faire les choses bien, je trouve dommage de ne pas aller au bout des choses. C'est-à-dire que, je n'aime pas ce mot, mais jusqu'au boutiste, c'est-à-dire que même quand je fais quelque chose chez moi, pas du bricolage parce que je n'aime pas ça, mais quand je vais cuisiner, j'ai envie de faire le mieux possible. Et souvent, Ce qui m'agace, c'est que de faire bien, ça ne prend pas plus de temps que de mal faire. Et donc, ça, c'est un peu ma façon de penser.

  • Speaker #0

    Et c'est le conseil que vous donneriez ?

  • Speaker #1

    Oui, de faire les choses du mieux possible et vraiment de faire attention à tout. La vie, elle est faite de plein de petits détails, mais c'est souvent ce qui fait la différence. Merci beaucoup, Jean-Baptiste. Merci à toi.

Description

Dans cet épisode de L’état d’esprit, on découvre le parcours singulier de Jean-Baptiste Grangé, artisan boulanger devenu champion d’Europe, enseignant, puis chef d’entreprise à la tête de plusieurs boutiques. Rien ne le destinait pourtant au pain… puisqu’il n’en mangeait même pas !
Guidé par un conseiller d’orientation, inspiré par son maître d’apprentissage et porté par le goût du défi, Jean-Baptiste révèle comment il a trouvé sa voie, construit son exigence, transmis sa passion et développé une entreprise artisanale qui emploie aujourd’hui plus de 50 collaborateurs.
Entre rigueur, transmission, ambition maîtrisée et amour du « fait maison », il partage son état d’esprit : faire toujours mieux, rester fidèle à ses valeurs et créer un environnement où chacun peut s’épanouir.


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Bonjour et bienvenue dans ce nouvel épisode de l'état d'esprit. Aujourd'hui on part à la rencontre de Jean-Baptiste Granger, un artisan boulanger qui a trouvé sa voie presque par hasard pour finalement devenir l'un des boulangers les plus talentueux de sa génération. Ancien champion d'Europe, enseignant à 21 ans, puis chef d'entreprise à la tête de plusieurs boutiques. Il incarne à la fois l'exigence, la transmission et l'envie de créer. Bonjour Jean-Baptiste, on se trouve où ici ?

  • Speaker #1

    Donc ici, on est au laboratoire de production des boulangeries et pâtisseries granger. Donc ça va faire deux ans maintenant qu'on est installé ici à Assat. Et tout ce que vous pouvez retrouver en boutique se fabrique ici. Donc c'est pour ça que ça sent aussi bon.

  • Speaker #0

    Alors j'ai lu, qu'enfin vous n'aimiez pas trop, on va dire, le pain ni les pâtes. Et pourtant, vous êtes devenu boulanger. Comment s'est opéré ce virage, on va dire ?

  • Speaker #1

    Alors ce virage très particulier, en fait c'est en fin de troisième, je suis parti en seconde mais sans grandes ambitions. Et au cours de ma seconde, ma scolarité ne se passait pas hyper bien, je n'avais pas trop envie d'étudier. C'est un conseiller d'orientation qui m'a aiguillé, qui m'a fait remplir un QCM tout à fait basique et où en est ressortie la boulangerie. Il m'a dit écoute l'année va être longue, il faut que tu fasses des stages, fais un stage en boulangerie, tu vois si ça te plaît. Et effectivement, je trouvais ça un peu surprenant parce que je ne mangeais pas de pain, pas de pâtes et je n'étais pas adepte à tous ces produits-là. Moi, je me suis dit que j'allais préférer ça que l'école. Donc, c'était aussi ça. Je n'étais pas un mauvais élève, mais je n'arrivais pas à rester en place, un peu comme maintenant. Et du coup, l'idée, c'était d'aller voir, de découvrir. Et c'est là où j'ai rencontré M. Chastel qui aura grandement contribué à ma réussite.

  • Speaker #0

    Justement, votre apprentissage, vous le faites chez Jean-François Chastel à Pontac. Vous dites avoir été accueilli comme un fils. Comment cette expérience vous a-t-elle façonné ? Déjà quand on arrive, parce que vous étiez jeune, quand on arrive comme ça dans un apprentissage, comment on est ?

  • Speaker #1

    On est un peu démuni face au métier parce qu'on ne connaît pas grand chose, voire rien. Donc déjà j'ai eu beaucoup de mal à rentrer chez lui parce que je n'arrivais pas à trouver de patron. C'est-à-dire qu'à cette époque-là, c'était aussi ça qui inquiétait mes parents, c'est que, ok, faire un appréciation... apprentissage en boulangerie mais je ne trouvais pas d'employeur et monsieur Chastel m'avait dit non une première fois et en revenant quelques mois après finalement il m'a dit écoute j'ai quelqu'un qui ne vient pas je vais te prendre donc je suis arrivé dans ce métier dans cette petite entreprise familiale où il était avec sa compagne Laetitia et de suite effectivement accueilli presque comme un fils parce que j'ai toujours été euh Bien constitué et très volontaire. J'ai de suite pris passion pour le métier. Et ça s'est enchaîné comme ça pendant quelques années.

  • Speaker #0

    Et ça vous plaît de suite ou pas ?

  • Speaker #1

    Oui, ça me plaît de suite. C'est étonnant parce que je ne connaissais pas trop, voire pas du tout le métier. On avait un ami qui était boulanger sur Coiraz. J'avais dû y aller peut-être quelques fois avec mon père, mais je n'en avais pas un souvenir non plus. Je ne m'étais jamais dit que c'est exactement ça que je veux faire. Et non, non, ça m'a plu. Et ce qui m'a plu, en fait, c'était le côté d'avoir l'impression de servir à quelque chose. Et donc, j'étais hyper content. Tous les matins, il me tardait d'aller au boulot, en fait. Donc, c'était ces choses assez rares. Mais j'étais hyper motivé et vite à la culture de vouloir faire bien le mieux possible tous les jours.

  • Speaker #0

    Et qu'est-ce qui vous a plu ? Qu'est-ce qui vous plaisait ? La matière ?

  • Speaker #1

    Ouais, la matière, le fait de transformer quelque chose, vraiment de servir à quelque chose, en fait. Et j'avais vraiment... l'impression de servir à quelque chose plus que sur un banc d'école où j'écoutais à moitié. Et donc, je transformais. Tous les jours, je voyais le père. C'est un métier qui est toujours fabuleux parce qu'on n'a rien quelques heures avant et on sort un produit en quelques heures. On fait quelque chose vraiment de concret. Et donc, j'ai tout de suite été pris de passion par le métier.

  • Speaker #0

    Après tout, vous êtes lancé dans les concours. Pourquoi ?

  • Speaker #1

    Alors pourquoi ? Ça vient de mon professeur en chambre des métiers, Didier Lalise, que j'embrasse. Et Didier, ça a été mon enseignant à la chambre des métiers de Pau. Et de suite, il m'a proposé de faire des concours quand j'étais en CAP, quand j'étais tout jeune. Et donc c'est lui qui m'a dit, écoute, il existe tel concours, tel concours. Donc j'ai commencé par faire les Olympiades des métiers en boulangerie, que j'avais remporté au niveau régional, en pâtisserie l'année d'après. Et ensuite, il m'a inscrit au concours de meilleur apprenti de France en 2011. Et donc là, grande aventure. Moi qui n'étais jamais parti de Montbéarn, je suis parti en Alsace, à Eschaux, dans un CFA, faire le concours de meilleur apprenti de France. C'est lui qui m'y avait préparé. Donc j'ai pris l'avion pour la première fois. Et je suis parti avec lui, pareil, un peu comme un père et son fils. On était hyper proches. Et du coup, j'ai remporté le titre de meilleur apprenti de France en 2011. Donc, c'était mon troisième concours, mais ça a été vraiment le déclic sur la partie compète et challenge.

  • Speaker #0

    Qu'est-ce qui vous plaisait là-dedans ?

  • Speaker #1

    Le côté très rigoureux, le côté de se challenger. En fait, vraiment, je suis un homme de challenge. Je m'ennuie assez vite et j'ai besoin de me donner des objectifs. Et donc, je trouvais ça hyper intéressant. Donc c'était en complémentarité avec mon employeur, M. Chastel. Je m'entraînais tout le temps, j'avais envie de faire toujours mieux, comme dans mon quotidien. Mais le côté concours, c'était des choses qu'on ne faisait pas au quotidien en entreprise. Donc c'est dur à expliquer parce que c'est presque une drogue.

  • Speaker #0

    Alors quand on est meilleur apprenti de France, qu'est-ce qu'on ressent ?

  • Speaker #1

    Déjà très fier, très content. C'était super parce que c'est quand même du sacrifice et cette période-là de... de ma vie était un peu entre parenthèses dans ma vie perso parce qu'au final je travaillais beaucoup. Je travaillais tous les dimanches, dès que j'avais du temps libre je m'entraînais ou j'allais en chambre des métiers pour m'entraîner. Donc c'était quand même une vraie réussite et une vraie reconnaissance. Mais donc du coup beaucoup de fierté aussi vis-à-vis de mes parents. Et après une petite sensation d'un peu trop aussi. Après cette période-là, ça devait faire 4 ou 5 ans que j'étais apprenti. J'avais beaucoup travaillé. Donc c'est là où mon parcours pro a basculé un peu après ces concours.

  • Speaker #0

    Très jeune, vous devenez enseignant. Pourquoi ? C'était une envie de transmettre ? C'était une envie de voir autre chose ?

  • Speaker #1

    J'ai enseigné l'année quasiment après avoir eu le titre de meilleur apprenti de France ou peut-être un an et demi après. Avec cette sensation d'avoir un peu trop donné et d'avoir un peu tiré sur la corde. Et donc, je me suis dit, prof, finalement, c'est le bon compromis. Je vais rester dans le métier, mais je ne travaillerai plus les vacances, plus les week-ends. Donc, j'avais idéalisé ça. Et du coup, je suis resté. Bon, j'ai enseigné un petit peu à Pau, un peu à Bayonne, avec des hauts, des bas, des déceptions. Parce que je me voyais rester dans l'enseignement. J'ai fait ça quelques années. Après, ça a été le lycée hôtelier de Morlaz pendant 2-3 ans. Et mon côté entrepreneurial. est arrivé et voilà, tout s'est bousculé un petit peu en 2015. Je suis toujours enseignant et l'idée me vient avec un copain boulanger à Nailles pour m'occuper clairement parce que moi faire 20 heures d'enseignement il me manquait quelque chose. Il fallait que je bouge un peu et du coup chez mes parents j'avais une arrière cuisine et je m'étais dit pourquoi pas faire des gâteaux et les commercialiser. Et donc mon copain boulanger à Nailles m'a dit écoute... si tu veux, moi j'en fais pas, fais-moi des gâteaux et vu que je sais pas faire les choses à moitié j'ai de suite voulu faire les choses bien donc ça marchait plutôt bien donc après je suis resté enseignant mais j'ai développé les points de vente enfin les points relais un peu comme j'appelais à l'époque et j'idéalisais ma vie comme ça, ce modèle comme ça en me disant je vais rester enseignant toute ma vie j'ai mon labo de production, j'avais un associé à l'époque et je me suis dit c'est super ont fait euh On fait un complément, c'est très très bien. Et après, toujours pareil, la vie fait que la vérité n'est plus du tout celle-là, mais aucun regret.

  • Speaker #0

    Donc là, vous continuez cette activité. Vous vous dites quoi ? Vous vous dites, je vais continuer longtemps ou j'ai encore besoin d'un challenge ?

  • Speaker #1

    Le fameux, toujours Didier, Didier Laliz me dit, écoute, j'étais à Morlaz enseignant, il me dit, j'ai un jeune. qui cherchent à faire une équipe pour la Coupe de France de boulangerie. Donc ce jeune-là, c'est Nicolas Gruel, mon copain. J'ai fait une année 2018 au taquet en mode entraînement, enseignement, mais aussi l'activité qui prenait de l'ampleur en parallèle. Donc une année encore un peu compliquée. Et début 2019, le concours. Donc on est parti à la Coupe de France sans trop savoir notre niveau. On s'était bien entraîné, mais très dur. c'est à dire que J'étais capable de m'entraîner de minuit à 7h et de faire ma journée d'enseignement classique de 7h à 14h-15h et l'après-midi de devoir retourner au labo pour faire une période rude. Mais au final, on a remporté la Coupe de France de boulangerie en 2019 avec Nicolas et Gaëtan qui étaient notre troisième partenaire. Et un peu la bis répétita on va dire, mais au final overdose. Trop, c'est un peu mon défaut, c'est-à-dire que je donne beaucoup, mais après, je suis capable d'exploser, donc là, j'apprends sur ça. Donc, j'ai quitté l'enseignement un peu avec perte et fracas courant 2019, parce que voilà, je... J'étais un peu perdu et je ne savais plus trop quoi faire. Donc on a gagné ce titre et c'est vrai que naturellement, on m'est venu l'envie après de me dire, il faut que je fasse quelque chose, il faut que j'entreprends. Donc j'ai passé une année un peu morose, on va dire. On était du coup qualifiés pour la Coupe d'Europe, la Coupe d'Europe de boulangerie. Donc on était tous les trois encore et on a remporté la Coupe d'Europe, donc fin 2019 et c'est là où vraiment ça a été le déclic. Avec un peu de chance, les planètes sont bien alignées, on m'a proposé de racheter la boulangerie Marsan, qui était un de nos clients en pâtisserie, qu'on servait depuis le petit laboratoire. Et donc tout s'est bien goupillé. Donc 2020 s'était acté et début 2021, on a ouvert notre première boutique en nom propre à Pau.

  • Speaker #0

    Et là, qu'est-ce qu'on se dit ? On se dit, on réfléchit, c'est le moment, c'est normal.

  • Speaker #1

    C'est le moment, en fait c'était le moment, j'en avais envie finalement, l'activité sur laquelle on servait les professionnels marchait bien, on devait être deux ou trois à travailler à cette époque-là, et on s'est dit allez c'est le moment, l'emplacement était super, Pau pour nous ça fait toujours, moi étant de Bénéjac, Pau c'était un peu notre capitale à nous, et d'être réinstallé à Pau c'est un peu le graal, donc je me suis dit plein centre-ville, l'occasion est trop belle de la laisser passer. Et donc, ma compagne m'a suivi dans le projet, elle m'a dit, écoute, allez, on y va. Si vraiment tu veux faire ça, je t'accompagne au moins une année. Et bon, là, elle est toujours avec moi et elle est toujours dans l'entreprise, mais c'était le bon moment. Il y a une peur,

  • Speaker #0

    il y a des craintes ?

  • Speaker #1

    La peur, c'était le Covid, parce que 2021, on a ouvert février 2021, on était en plein Covid. Donc effectivement, ce n'était pas l'idéal. On était, je crois, entre la deuxième ou troisième vague et on était un peu inquiets de ça. Et puis, on était habitués, nous, à gérer que de la livraison, à faire nos gâteaux, les livrer, être entre guillemets peinards et se dire on n'a pas la partie vente. Souvent, je fanfaronnais, je me disais moi, je n'ai pas de vente à gérer. Moi, je fais mes gâteaux, je les vends, ils sont livrés, ils sont facturés. Donc, on s'est retrouvé avec un nouveau métier. on a embauché 7 personnes qui étaient présentes sur place donc on s'est retrouvé d'être de 3 à 10 donc bon déjà nouvelle chose mais Mais déjà avec de l'ambition de vouloir faire les choses très bien. Et donc après, par la suite, on a constamment fait évoluer ce fonds de commerce.

  • Speaker #0

    Et comment on arrive à concilier ce parcours finalement ? Enseignant, ensuite petit atelier dans le garage. Ça fait penser à d'autres histoires. Et puis après, on devient chef d'entreprise, presque manager. On va parler même de ce que vous faites actuellement.

  • Speaker #1

    à ce moment là qu'est-ce que vous dites vous dites j'ai les épaules assez solides ou je n'y pense pas en fait je n'y pensais pas et même encore des fois j'ai du mal à regarder un peu dans le rétro parce que non je ne pensais pas à tout ça ce que je savais et que je sais toujours c'est que je voulais faire du mieux que possible donc en étant hyper exigeant et hyper rigoureux sur ce qu'on allait proposer donc on avait nos idées mais Merci. Entre les idées, les choses qu'on a idéalisées et la réalité, on s'est rendu compte que ça allait être difficile. Parce que moi, j'avais un savoir, mais de transmettre mon savoir à des collaborateurs qui allaient représenter mon image, ça a été quelque chose d'assez difficile au début. Mais pour autant, on était de suite quand même dans une mentalité d'être détaché de la production. Moi, finalement, j'ai peut-être été en production un mois maximum sur ma boutique. Parce qu'on avait quand même l'ambition et l'envie de se détacher pour gérer au mieux notre entreprise. Maintenant, c'est quelque chose qu'on fait au quotidien. Mais c'était quand même déjà être entrepreneur à demi-mot. On l'est beaucoup plus maintenant.

  • Speaker #0

    Et pourquoi ce choix justement de ne pas être la main dans le cambouis ou dans le pétrin ?

  • Speaker #1

    C'est une bonne question. Après, je ne sais pas comment l'expliquer parce que c'est vrai que j'adorais ça. Je sortais des concours, j'aimais beaucoup ça. Mais le fait d'avoir beaucoup donné en production, que ce soit pour m'entraîner pour les concours, pour mon apprentissage, je ne me voyais pas. Et puis, j'ai eu de la chance. En fait, je me suis nourri quand même beaucoup de mon expérience de prof parce que je rencontrais beaucoup de chefs d'entreprise chez qui on allait faire des visites. En fait, je ne me voyais pas toute ma vie me dire que ma boîte va être dépendante de moi, d'être tous les jours à faire le pétrin, moi, parce que ça sera bien fait. Donc j'ai de suite eu cette vision un peu de déléguer, mais comment on délègue pour que ce soit... soit représentatif de ce que je veux faire. Donc ça, je l'ai eu de suite. Et bon, maintenant, ça porte ses fruits, entre guillemets. Mais voilà, c'était vraiment notre façon de voir les choses qui a fait que je n'ai pas voulu être trop présent parce que sinon, je pense que la vie ne serait pas la même à l'heure actuelle.

  • Speaker #0

    Et comment on délègue ?

  • Speaker #1

    C'est une très bonne question. On délègue au début comme on peut. On pense toujours bien faire. On se trompe. On s'est souvent trompé. en étant un peu trop gentil. C'est vraiment quelque chose qui a été le plus dur pour nous et on est loin d'être les meilleurs là-dessus, mais on progresse tous les jours. On délègue surtout en faisant confiance, en ayant la chance de s'entourer des bonnes personnes aussi, mais la chance se provoque parce que le côté concours a fait qu'on arrivait à recruter assez facilement. On avait une image plutôt... plutôt positive auprès des jeunes et donc on s'est de suite entouré de très bons collaborateurs sur la partie production. Donc c'était quand même plus facile de transmettre à des gens qui étaient motivés et qui venaient travailler entre guillemets pour moi plus que pour une entreprise. Donc c'était assez fluide et ça s'est fait naturellement.

  • Speaker #0

    Actuellement, vous avez combien de salariés ?

  • Speaker #1

    Alors actuellement, les choses ont bien changé. On est 50 à l'heure actuelle. On a un nouveau projet. on en parlera peut-être tout à l'heure, mais logiquement, d'ici quelques mois, on sera 65. Et voilà, après, c'est un tout autre métier que j'aime autant que la boulangerie. Et c'est ce qui fait aussi que notre ambition devra s'arrêter vite parce qu'on veut rester dans la maîtrise et dans l'humain. Donc voilà, c'est des problèmes, mais ça en est quand même.

  • Speaker #0

    Justement, est-ce que ce n'est pas un risque, finalement, de grandir ? Et finalement, de perdre peut-être un peu son âme, alors c'est peut-être un grand mot, mais en tout cas, l'idée que vous aviez peut-être au départ ?

  • Speaker #1

    Effectivement, c'est un très bon sujet, parce que quand on voit les infrastructures et le nombre qu'on est, on peut avoir tendance à se dire que ça y est, c'est industriel, on a beaucoup de machines. L'idée, c'est que pas du tout. Au contraire, on est artisan, on transforme. Tous nos produits, 99,9%, on transforme, on fait tout maison. C'est aussi pour ça qu'on est très nombreux. On forme une dizaine d'apprentis par an entre les boulangers, les pâtissiers. Donc ça, c'est un souhait et ça, je veux le garder. C'est pour ça qu'on transforme beaucoup, mais on a d'un côté une réalité économique qui fait qu'on a des boutiques qui tournent très bien, où on passe beaucoup de quantités, donc on a automatisé certaines tâches qui n'avaient plus de valeur ajoutée. Donc maintenant, c'est un jeu de chaise musicale. Il faut arriver à trouver le bon équilibre entre faire maison, et ça, c'est notre ADN, c'est-à-dire que ça ne changera jamais. C'est pour ça que je te disais que finalement, notre ambition devra se canaliser un petit peu, avec un peu de frustration, bien sûr, mais parce que je tiens trop à mes collaborateurs et je veux qu'on reste, entre guillemets, familial, artisanal. C'est de 10 à 48, enfin à 50 maintenant. Il s'est passé plein de choses et notamment en 2023 où l'envie et la magie des concours est revenue avec la meilleure boulangerie de France qui nous a contactés. Ça faisait deux, trois ans que je n'avais pas fait de concours et c'était vraiment la bonne occasion d'y aller. Donc on a remporté la dixième saison de la meilleure boulangerie de France en binôme avec Antoine qui est mon chef pâtissier et qui est toujours là avec moi. Donc ça a été un gros tremplin, la boutique travaillait bien, mais là ça a vraiment été un gros tremplin, on est quasiment passé du simple au double en chiffres. Donc ça a été une période assez difficile à gérer, parce qu'on n'avait toujours pas l'outil de production ici, il est arrivé un tout petit peu après la diffusion de la finale. Donc on a grandi, on était vite 30, et en 2024, on a ouvert Nosti, notre deuxième point de vente. Voilà, parce qu'on était en place, on avait notre labo de prod qui était là, qui était disposé à faire un peu plus et on avait un tel engouement sur pot qu'on avait envie de dupliquer un peu le projet. Et comme j'ai toujours un peu les planètes qui s'alignent bien, j'avais dans mes clients professionnels une boulangerie à vendre sur la commune de Nosti. Et donc tout s'est bien enchaîné et on a ouvert en 2024 la boutique. Et maintenant, effectivement, un dernier projet. Alors, je dis un dernier, mais ma compagne me reprend toujours parce que je ne sais pas si ce sera le dernier, mais en tout cas, ce ne sera pas loin. Un projet d'ouverture sur la plaine de Nailles qui est chez moi. Et c'est un peu la façon de boucler la boucle, mais de revenir. Moi, j'ai fait un peu l'inverse souvent. Souvent, certains commencent à Nailles et finissent à Pau. Et moi, je suis content de revenir sur mes terrains.

  • Speaker #0

    Donc, comment on arrive à la fois à déléguer et à... continuer à être exigeant, comment on transmet cette exigence ?

  • Speaker #1

    Je suis très exigeant avec moi-même, avec mes collaborateurs aussi mais je suis un réel gentil donc j'ai beaucoup de mal à être exigeant, la solution la plus simple pour moi ça a été de m'entourer de personnes un peu stratégiques dans mon entourage pro notamment ma compagne qui est là au quotidien et Guillaume qui est notre directeur de boutique qui entre guillemets a le mauvais rôle, même si on n'est vraiment pas des méchants, mais c'est vrai que mes responsables de prod, mon entourage administratif m'aident beaucoup sur la partie que je n'aime pas trop, qui est dire ce qui ne va pas. Et honnêtement, dans les 50 collaborateurs, tout le monde commence à me connaître.

  • Speaker #0

    Ce podcast s'appelle « L'état d'esprit » . Quel est votre état d'esprit au quotidien ? Qu'est-ce qui vous anime ?

  • Speaker #1

    Ce que j'aime le plus, moi, en fait, c'est... Le coterie entrepreneurial, il est arrivé sur le tard parce que, de base, moi, mon métier, c'est la boulangerie, la pâtisserie. J'aime autant l'un que l'autre, on me pose souvent la question. Moi, ce qui m'anime, c'est de voir les boutiques bien rangées, bien remplies, de faire maison, de faire toujours mieux. Et on compare beaucoup, on regarde beaucoup ce que font les autres. Pas dans le sens compétition à proprement parler, mais ça nous booste et ça nous pousse à faire toujours mieux. Et c'est vrai que je ne laisse rien au hasard, que ce soit on essaye, je ne dis pas qu'on est... Moi j'ai souvent tendance à dire qu'on est nul parce que ça pique un peu les équipes, mais ils savent très bien que je ne le pense pas. Mais on veut que tout soit bien pensé, on veut que les gens... Quand ils viennent chez nous, que l'emballage, que le service client, on attache beaucoup d'importance au service client, on rappelle les gens qui sont mécontents, on fait très attention à ça. C'est ça mon quotidien, je veux que les gens soient contents de venir chez nous, que les gens se régalent et surtout que les gens qui travaillent pour moi soient fiers d'être là et surtout qu'ils se sentent bien au travail.

  • Speaker #0

    On va faire preuve un peu d'imagination, imaginons qu'un jeune Jean-Baptiste d'une quinzaine d'années vienne ici et se questionne. s'interroge sur la suite de sa vie ? Qu'est-ce que vous auriez envie de lui dire ?

  • Speaker #1

    Je ne suis pas trop du genre à dire croire en ses rêves ou des choses comme ça parce que je n'avais pas de rêve, je n'ai jamais idéalisé ça. Mais par contre, de faire les choses bien, je trouve dommage de ne pas aller au bout des choses. C'est-à-dire que, je n'aime pas ce mot, mais jusqu'au boutiste, c'est-à-dire que même quand je fais quelque chose chez moi, pas du bricolage parce que je n'aime pas ça, mais quand je vais cuisiner, j'ai envie de faire le mieux possible. Et souvent, Ce qui m'agace, c'est que de faire bien, ça ne prend pas plus de temps que de mal faire. Et donc, ça, c'est un peu ma façon de penser.

  • Speaker #0

    Et c'est le conseil que vous donneriez ?

  • Speaker #1

    Oui, de faire les choses du mieux possible et vraiment de faire attention à tout. La vie, elle est faite de plein de petits détails, mais c'est souvent ce qui fait la différence. Merci beaucoup, Jean-Baptiste. Merci à toi.

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Description

Dans cet épisode de L’état d’esprit, on découvre le parcours singulier de Jean-Baptiste Grangé, artisan boulanger devenu champion d’Europe, enseignant, puis chef d’entreprise à la tête de plusieurs boutiques. Rien ne le destinait pourtant au pain… puisqu’il n’en mangeait même pas !
Guidé par un conseiller d’orientation, inspiré par son maître d’apprentissage et porté par le goût du défi, Jean-Baptiste révèle comment il a trouvé sa voie, construit son exigence, transmis sa passion et développé une entreprise artisanale qui emploie aujourd’hui plus de 50 collaborateurs.
Entre rigueur, transmission, ambition maîtrisée et amour du « fait maison », il partage son état d’esprit : faire toujours mieux, rester fidèle à ses valeurs et créer un environnement où chacun peut s’épanouir.


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Bonjour et bienvenue dans ce nouvel épisode de l'état d'esprit. Aujourd'hui on part à la rencontre de Jean-Baptiste Granger, un artisan boulanger qui a trouvé sa voie presque par hasard pour finalement devenir l'un des boulangers les plus talentueux de sa génération. Ancien champion d'Europe, enseignant à 21 ans, puis chef d'entreprise à la tête de plusieurs boutiques. Il incarne à la fois l'exigence, la transmission et l'envie de créer. Bonjour Jean-Baptiste, on se trouve où ici ?

  • Speaker #1

    Donc ici, on est au laboratoire de production des boulangeries et pâtisseries granger. Donc ça va faire deux ans maintenant qu'on est installé ici à Assat. Et tout ce que vous pouvez retrouver en boutique se fabrique ici. Donc c'est pour ça que ça sent aussi bon.

  • Speaker #0

    Alors j'ai lu, qu'enfin vous n'aimiez pas trop, on va dire, le pain ni les pâtes. Et pourtant, vous êtes devenu boulanger. Comment s'est opéré ce virage, on va dire ?

  • Speaker #1

    Alors ce virage très particulier, en fait c'est en fin de troisième, je suis parti en seconde mais sans grandes ambitions. Et au cours de ma seconde, ma scolarité ne se passait pas hyper bien, je n'avais pas trop envie d'étudier. C'est un conseiller d'orientation qui m'a aiguillé, qui m'a fait remplir un QCM tout à fait basique et où en est ressortie la boulangerie. Il m'a dit écoute l'année va être longue, il faut que tu fasses des stages, fais un stage en boulangerie, tu vois si ça te plaît. Et effectivement, je trouvais ça un peu surprenant parce que je ne mangeais pas de pain, pas de pâtes et je n'étais pas adepte à tous ces produits-là. Moi, je me suis dit que j'allais préférer ça que l'école. Donc, c'était aussi ça. Je n'étais pas un mauvais élève, mais je n'arrivais pas à rester en place, un peu comme maintenant. Et du coup, l'idée, c'était d'aller voir, de découvrir. Et c'est là où j'ai rencontré M. Chastel qui aura grandement contribué à ma réussite.

  • Speaker #0

    Justement, votre apprentissage, vous le faites chez Jean-François Chastel à Pontac. Vous dites avoir été accueilli comme un fils. Comment cette expérience vous a-t-elle façonné ? Déjà quand on arrive, parce que vous étiez jeune, quand on arrive comme ça dans un apprentissage, comment on est ?

  • Speaker #1

    On est un peu démuni face au métier parce qu'on ne connaît pas grand chose, voire rien. Donc déjà j'ai eu beaucoup de mal à rentrer chez lui parce que je n'arrivais pas à trouver de patron. C'est-à-dire qu'à cette époque-là, c'était aussi ça qui inquiétait mes parents, c'est que, ok, faire un appréciation... apprentissage en boulangerie mais je ne trouvais pas d'employeur et monsieur Chastel m'avait dit non une première fois et en revenant quelques mois après finalement il m'a dit écoute j'ai quelqu'un qui ne vient pas je vais te prendre donc je suis arrivé dans ce métier dans cette petite entreprise familiale où il était avec sa compagne Laetitia et de suite effectivement accueilli presque comme un fils parce que j'ai toujours été euh Bien constitué et très volontaire. J'ai de suite pris passion pour le métier. Et ça s'est enchaîné comme ça pendant quelques années.

  • Speaker #0

    Et ça vous plaît de suite ou pas ?

  • Speaker #1

    Oui, ça me plaît de suite. C'est étonnant parce que je ne connaissais pas trop, voire pas du tout le métier. On avait un ami qui était boulanger sur Coiraz. J'avais dû y aller peut-être quelques fois avec mon père, mais je n'en avais pas un souvenir non plus. Je ne m'étais jamais dit que c'est exactement ça que je veux faire. Et non, non, ça m'a plu. Et ce qui m'a plu, en fait, c'était le côté d'avoir l'impression de servir à quelque chose. Et donc, j'étais hyper content. Tous les matins, il me tardait d'aller au boulot, en fait. Donc, c'était ces choses assez rares. Mais j'étais hyper motivé et vite à la culture de vouloir faire bien le mieux possible tous les jours.

  • Speaker #0

    Et qu'est-ce qui vous a plu ? Qu'est-ce qui vous plaisait ? La matière ?

  • Speaker #1

    Ouais, la matière, le fait de transformer quelque chose, vraiment de servir à quelque chose, en fait. Et j'avais vraiment... l'impression de servir à quelque chose plus que sur un banc d'école où j'écoutais à moitié. Et donc, je transformais. Tous les jours, je voyais le père. C'est un métier qui est toujours fabuleux parce qu'on n'a rien quelques heures avant et on sort un produit en quelques heures. On fait quelque chose vraiment de concret. Et donc, j'ai tout de suite été pris de passion par le métier.

  • Speaker #0

    Après tout, vous êtes lancé dans les concours. Pourquoi ?

  • Speaker #1

    Alors pourquoi ? Ça vient de mon professeur en chambre des métiers, Didier Lalise, que j'embrasse. Et Didier, ça a été mon enseignant à la chambre des métiers de Pau. Et de suite, il m'a proposé de faire des concours quand j'étais en CAP, quand j'étais tout jeune. Et donc c'est lui qui m'a dit, écoute, il existe tel concours, tel concours. Donc j'ai commencé par faire les Olympiades des métiers en boulangerie, que j'avais remporté au niveau régional, en pâtisserie l'année d'après. Et ensuite, il m'a inscrit au concours de meilleur apprenti de France en 2011. Et donc là, grande aventure. Moi qui n'étais jamais parti de Montbéarn, je suis parti en Alsace, à Eschaux, dans un CFA, faire le concours de meilleur apprenti de France. C'est lui qui m'y avait préparé. Donc j'ai pris l'avion pour la première fois. Et je suis parti avec lui, pareil, un peu comme un père et son fils. On était hyper proches. Et du coup, j'ai remporté le titre de meilleur apprenti de France en 2011. Donc, c'était mon troisième concours, mais ça a été vraiment le déclic sur la partie compète et challenge.

  • Speaker #0

    Qu'est-ce qui vous plaisait là-dedans ?

  • Speaker #1

    Le côté très rigoureux, le côté de se challenger. En fait, vraiment, je suis un homme de challenge. Je m'ennuie assez vite et j'ai besoin de me donner des objectifs. Et donc, je trouvais ça hyper intéressant. Donc c'était en complémentarité avec mon employeur, M. Chastel. Je m'entraînais tout le temps, j'avais envie de faire toujours mieux, comme dans mon quotidien. Mais le côté concours, c'était des choses qu'on ne faisait pas au quotidien en entreprise. Donc c'est dur à expliquer parce que c'est presque une drogue.

  • Speaker #0

    Alors quand on est meilleur apprenti de France, qu'est-ce qu'on ressent ?

  • Speaker #1

    Déjà très fier, très content. C'était super parce que c'est quand même du sacrifice et cette période-là de... de ma vie était un peu entre parenthèses dans ma vie perso parce qu'au final je travaillais beaucoup. Je travaillais tous les dimanches, dès que j'avais du temps libre je m'entraînais ou j'allais en chambre des métiers pour m'entraîner. Donc c'était quand même une vraie réussite et une vraie reconnaissance. Mais donc du coup beaucoup de fierté aussi vis-à-vis de mes parents. Et après une petite sensation d'un peu trop aussi. Après cette période-là, ça devait faire 4 ou 5 ans que j'étais apprenti. J'avais beaucoup travaillé. Donc c'est là où mon parcours pro a basculé un peu après ces concours.

  • Speaker #0

    Très jeune, vous devenez enseignant. Pourquoi ? C'était une envie de transmettre ? C'était une envie de voir autre chose ?

  • Speaker #1

    J'ai enseigné l'année quasiment après avoir eu le titre de meilleur apprenti de France ou peut-être un an et demi après. Avec cette sensation d'avoir un peu trop donné et d'avoir un peu tiré sur la corde. Et donc, je me suis dit, prof, finalement, c'est le bon compromis. Je vais rester dans le métier, mais je ne travaillerai plus les vacances, plus les week-ends. Donc, j'avais idéalisé ça. Et du coup, je suis resté. Bon, j'ai enseigné un petit peu à Pau, un peu à Bayonne, avec des hauts, des bas, des déceptions. Parce que je me voyais rester dans l'enseignement. J'ai fait ça quelques années. Après, ça a été le lycée hôtelier de Morlaz pendant 2-3 ans. Et mon côté entrepreneurial. est arrivé et voilà, tout s'est bousculé un petit peu en 2015. Je suis toujours enseignant et l'idée me vient avec un copain boulanger à Nailles pour m'occuper clairement parce que moi faire 20 heures d'enseignement il me manquait quelque chose. Il fallait que je bouge un peu et du coup chez mes parents j'avais une arrière cuisine et je m'étais dit pourquoi pas faire des gâteaux et les commercialiser. Et donc mon copain boulanger à Nailles m'a dit écoute... si tu veux, moi j'en fais pas, fais-moi des gâteaux et vu que je sais pas faire les choses à moitié j'ai de suite voulu faire les choses bien donc ça marchait plutôt bien donc après je suis resté enseignant mais j'ai développé les points de vente enfin les points relais un peu comme j'appelais à l'époque et j'idéalisais ma vie comme ça, ce modèle comme ça en me disant je vais rester enseignant toute ma vie j'ai mon labo de production, j'avais un associé à l'époque et je me suis dit c'est super ont fait euh On fait un complément, c'est très très bien. Et après, toujours pareil, la vie fait que la vérité n'est plus du tout celle-là, mais aucun regret.

  • Speaker #0

    Donc là, vous continuez cette activité. Vous vous dites quoi ? Vous vous dites, je vais continuer longtemps ou j'ai encore besoin d'un challenge ?

  • Speaker #1

    Le fameux, toujours Didier, Didier Laliz me dit, écoute, j'étais à Morlaz enseignant, il me dit, j'ai un jeune. qui cherchent à faire une équipe pour la Coupe de France de boulangerie. Donc ce jeune-là, c'est Nicolas Gruel, mon copain. J'ai fait une année 2018 au taquet en mode entraînement, enseignement, mais aussi l'activité qui prenait de l'ampleur en parallèle. Donc une année encore un peu compliquée. Et début 2019, le concours. Donc on est parti à la Coupe de France sans trop savoir notre niveau. On s'était bien entraîné, mais très dur. c'est à dire que J'étais capable de m'entraîner de minuit à 7h et de faire ma journée d'enseignement classique de 7h à 14h-15h et l'après-midi de devoir retourner au labo pour faire une période rude. Mais au final, on a remporté la Coupe de France de boulangerie en 2019 avec Nicolas et Gaëtan qui étaient notre troisième partenaire. Et un peu la bis répétita on va dire, mais au final overdose. Trop, c'est un peu mon défaut, c'est-à-dire que je donne beaucoup, mais après, je suis capable d'exploser, donc là, j'apprends sur ça. Donc, j'ai quitté l'enseignement un peu avec perte et fracas courant 2019, parce que voilà, je... J'étais un peu perdu et je ne savais plus trop quoi faire. Donc on a gagné ce titre et c'est vrai que naturellement, on m'est venu l'envie après de me dire, il faut que je fasse quelque chose, il faut que j'entreprends. Donc j'ai passé une année un peu morose, on va dire. On était du coup qualifiés pour la Coupe d'Europe, la Coupe d'Europe de boulangerie. Donc on était tous les trois encore et on a remporté la Coupe d'Europe, donc fin 2019 et c'est là où vraiment ça a été le déclic. Avec un peu de chance, les planètes sont bien alignées, on m'a proposé de racheter la boulangerie Marsan, qui était un de nos clients en pâtisserie, qu'on servait depuis le petit laboratoire. Et donc tout s'est bien goupillé. Donc 2020 s'était acté et début 2021, on a ouvert notre première boutique en nom propre à Pau.

  • Speaker #0

    Et là, qu'est-ce qu'on se dit ? On se dit, on réfléchit, c'est le moment, c'est normal.

  • Speaker #1

    C'est le moment, en fait c'était le moment, j'en avais envie finalement, l'activité sur laquelle on servait les professionnels marchait bien, on devait être deux ou trois à travailler à cette époque-là, et on s'est dit allez c'est le moment, l'emplacement était super, Pau pour nous ça fait toujours, moi étant de Bénéjac, Pau c'était un peu notre capitale à nous, et d'être réinstallé à Pau c'est un peu le graal, donc je me suis dit plein centre-ville, l'occasion est trop belle de la laisser passer. Et donc, ma compagne m'a suivi dans le projet, elle m'a dit, écoute, allez, on y va. Si vraiment tu veux faire ça, je t'accompagne au moins une année. Et bon, là, elle est toujours avec moi et elle est toujours dans l'entreprise, mais c'était le bon moment. Il y a une peur,

  • Speaker #0

    il y a des craintes ?

  • Speaker #1

    La peur, c'était le Covid, parce que 2021, on a ouvert février 2021, on était en plein Covid. Donc effectivement, ce n'était pas l'idéal. On était, je crois, entre la deuxième ou troisième vague et on était un peu inquiets de ça. Et puis, on était habitués, nous, à gérer que de la livraison, à faire nos gâteaux, les livrer, être entre guillemets peinards et se dire on n'a pas la partie vente. Souvent, je fanfaronnais, je me disais moi, je n'ai pas de vente à gérer. Moi, je fais mes gâteaux, je les vends, ils sont livrés, ils sont facturés. Donc, on s'est retrouvé avec un nouveau métier. on a embauché 7 personnes qui étaient présentes sur place donc on s'est retrouvé d'être de 3 à 10 donc bon déjà nouvelle chose mais Mais déjà avec de l'ambition de vouloir faire les choses très bien. Et donc après, par la suite, on a constamment fait évoluer ce fonds de commerce.

  • Speaker #0

    Et comment on arrive à concilier ce parcours finalement ? Enseignant, ensuite petit atelier dans le garage. Ça fait penser à d'autres histoires. Et puis après, on devient chef d'entreprise, presque manager. On va parler même de ce que vous faites actuellement.

  • Speaker #1

    à ce moment là qu'est-ce que vous dites vous dites j'ai les épaules assez solides ou je n'y pense pas en fait je n'y pensais pas et même encore des fois j'ai du mal à regarder un peu dans le rétro parce que non je ne pensais pas à tout ça ce que je savais et que je sais toujours c'est que je voulais faire du mieux que possible donc en étant hyper exigeant et hyper rigoureux sur ce qu'on allait proposer donc on avait nos idées mais Merci. Entre les idées, les choses qu'on a idéalisées et la réalité, on s'est rendu compte que ça allait être difficile. Parce que moi, j'avais un savoir, mais de transmettre mon savoir à des collaborateurs qui allaient représenter mon image, ça a été quelque chose d'assez difficile au début. Mais pour autant, on était de suite quand même dans une mentalité d'être détaché de la production. Moi, finalement, j'ai peut-être été en production un mois maximum sur ma boutique. Parce qu'on avait quand même l'ambition et l'envie de se détacher pour gérer au mieux notre entreprise. Maintenant, c'est quelque chose qu'on fait au quotidien. Mais c'était quand même déjà être entrepreneur à demi-mot. On l'est beaucoup plus maintenant.

  • Speaker #0

    Et pourquoi ce choix justement de ne pas être la main dans le cambouis ou dans le pétrin ?

  • Speaker #1

    C'est une bonne question. Après, je ne sais pas comment l'expliquer parce que c'est vrai que j'adorais ça. Je sortais des concours, j'aimais beaucoup ça. Mais le fait d'avoir beaucoup donné en production, que ce soit pour m'entraîner pour les concours, pour mon apprentissage, je ne me voyais pas. Et puis, j'ai eu de la chance. En fait, je me suis nourri quand même beaucoup de mon expérience de prof parce que je rencontrais beaucoup de chefs d'entreprise chez qui on allait faire des visites. En fait, je ne me voyais pas toute ma vie me dire que ma boîte va être dépendante de moi, d'être tous les jours à faire le pétrin, moi, parce que ça sera bien fait. Donc j'ai de suite eu cette vision un peu de déléguer, mais comment on délègue pour que ce soit... soit représentatif de ce que je veux faire. Donc ça, je l'ai eu de suite. Et bon, maintenant, ça porte ses fruits, entre guillemets. Mais voilà, c'était vraiment notre façon de voir les choses qui a fait que je n'ai pas voulu être trop présent parce que sinon, je pense que la vie ne serait pas la même à l'heure actuelle.

  • Speaker #0

    Et comment on délègue ?

  • Speaker #1

    C'est une très bonne question. On délègue au début comme on peut. On pense toujours bien faire. On se trompe. On s'est souvent trompé. en étant un peu trop gentil. C'est vraiment quelque chose qui a été le plus dur pour nous et on est loin d'être les meilleurs là-dessus, mais on progresse tous les jours. On délègue surtout en faisant confiance, en ayant la chance de s'entourer des bonnes personnes aussi, mais la chance se provoque parce que le côté concours a fait qu'on arrivait à recruter assez facilement. On avait une image plutôt... plutôt positive auprès des jeunes et donc on s'est de suite entouré de très bons collaborateurs sur la partie production. Donc c'était quand même plus facile de transmettre à des gens qui étaient motivés et qui venaient travailler entre guillemets pour moi plus que pour une entreprise. Donc c'était assez fluide et ça s'est fait naturellement.

  • Speaker #0

    Actuellement, vous avez combien de salariés ?

  • Speaker #1

    Alors actuellement, les choses ont bien changé. On est 50 à l'heure actuelle. On a un nouveau projet. on en parlera peut-être tout à l'heure, mais logiquement, d'ici quelques mois, on sera 65. Et voilà, après, c'est un tout autre métier que j'aime autant que la boulangerie. Et c'est ce qui fait aussi que notre ambition devra s'arrêter vite parce qu'on veut rester dans la maîtrise et dans l'humain. Donc voilà, c'est des problèmes, mais ça en est quand même.

  • Speaker #0

    Justement, est-ce que ce n'est pas un risque, finalement, de grandir ? Et finalement, de perdre peut-être un peu son âme, alors c'est peut-être un grand mot, mais en tout cas, l'idée que vous aviez peut-être au départ ?

  • Speaker #1

    Effectivement, c'est un très bon sujet, parce que quand on voit les infrastructures et le nombre qu'on est, on peut avoir tendance à se dire que ça y est, c'est industriel, on a beaucoup de machines. L'idée, c'est que pas du tout. Au contraire, on est artisan, on transforme. Tous nos produits, 99,9%, on transforme, on fait tout maison. C'est aussi pour ça qu'on est très nombreux. On forme une dizaine d'apprentis par an entre les boulangers, les pâtissiers. Donc ça, c'est un souhait et ça, je veux le garder. C'est pour ça qu'on transforme beaucoup, mais on a d'un côté une réalité économique qui fait qu'on a des boutiques qui tournent très bien, où on passe beaucoup de quantités, donc on a automatisé certaines tâches qui n'avaient plus de valeur ajoutée. Donc maintenant, c'est un jeu de chaise musicale. Il faut arriver à trouver le bon équilibre entre faire maison, et ça, c'est notre ADN, c'est-à-dire que ça ne changera jamais. C'est pour ça que je te disais que finalement, notre ambition devra se canaliser un petit peu, avec un peu de frustration, bien sûr, mais parce que je tiens trop à mes collaborateurs et je veux qu'on reste, entre guillemets, familial, artisanal. C'est de 10 à 48, enfin à 50 maintenant. Il s'est passé plein de choses et notamment en 2023 où l'envie et la magie des concours est revenue avec la meilleure boulangerie de France qui nous a contactés. Ça faisait deux, trois ans que je n'avais pas fait de concours et c'était vraiment la bonne occasion d'y aller. Donc on a remporté la dixième saison de la meilleure boulangerie de France en binôme avec Antoine qui est mon chef pâtissier et qui est toujours là avec moi. Donc ça a été un gros tremplin, la boutique travaillait bien, mais là ça a vraiment été un gros tremplin, on est quasiment passé du simple au double en chiffres. Donc ça a été une période assez difficile à gérer, parce qu'on n'avait toujours pas l'outil de production ici, il est arrivé un tout petit peu après la diffusion de la finale. Donc on a grandi, on était vite 30, et en 2024, on a ouvert Nosti, notre deuxième point de vente. Voilà, parce qu'on était en place, on avait notre labo de prod qui était là, qui était disposé à faire un peu plus et on avait un tel engouement sur pot qu'on avait envie de dupliquer un peu le projet. Et comme j'ai toujours un peu les planètes qui s'alignent bien, j'avais dans mes clients professionnels une boulangerie à vendre sur la commune de Nosti. Et donc tout s'est bien enchaîné et on a ouvert en 2024 la boutique. Et maintenant, effectivement, un dernier projet. Alors, je dis un dernier, mais ma compagne me reprend toujours parce que je ne sais pas si ce sera le dernier, mais en tout cas, ce ne sera pas loin. Un projet d'ouverture sur la plaine de Nailles qui est chez moi. Et c'est un peu la façon de boucler la boucle, mais de revenir. Moi, j'ai fait un peu l'inverse souvent. Souvent, certains commencent à Nailles et finissent à Pau. Et moi, je suis content de revenir sur mes terrains.

  • Speaker #0

    Donc, comment on arrive à la fois à déléguer et à... continuer à être exigeant, comment on transmet cette exigence ?

  • Speaker #1

    Je suis très exigeant avec moi-même, avec mes collaborateurs aussi mais je suis un réel gentil donc j'ai beaucoup de mal à être exigeant, la solution la plus simple pour moi ça a été de m'entourer de personnes un peu stratégiques dans mon entourage pro notamment ma compagne qui est là au quotidien et Guillaume qui est notre directeur de boutique qui entre guillemets a le mauvais rôle, même si on n'est vraiment pas des méchants, mais c'est vrai que mes responsables de prod, mon entourage administratif m'aident beaucoup sur la partie que je n'aime pas trop, qui est dire ce qui ne va pas. Et honnêtement, dans les 50 collaborateurs, tout le monde commence à me connaître.

  • Speaker #0

    Ce podcast s'appelle « L'état d'esprit » . Quel est votre état d'esprit au quotidien ? Qu'est-ce qui vous anime ?

  • Speaker #1

    Ce que j'aime le plus, moi, en fait, c'est... Le coterie entrepreneurial, il est arrivé sur le tard parce que, de base, moi, mon métier, c'est la boulangerie, la pâtisserie. J'aime autant l'un que l'autre, on me pose souvent la question. Moi, ce qui m'anime, c'est de voir les boutiques bien rangées, bien remplies, de faire maison, de faire toujours mieux. Et on compare beaucoup, on regarde beaucoup ce que font les autres. Pas dans le sens compétition à proprement parler, mais ça nous booste et ça nous pousse à faire toujours mieux. Et c'est vrai que je ne laisse rien au hasard, que ce soit on essaye, je ne dis pas qu'on est... Moi j'ai souvent tendance à dire qu'on est nul parce que ça pique un peu les équipes, mais ils savent très bien que je ne le pense pas. Mais on veut que tout soit bien pensé, on veut que les gens... Quand ils viennent chez nous, que l'emballage, que le service client, on attache beaucoup d'importance au service client, on rappelle les gens qui sont mécontents, on fait très attention à ça. C'est ça mon quotidien, je veux que les gens soient contents de venir chez nous, que les gens se régalent et surtout que les gens qui travaillent pour moi soient fiers d'être là et surtout qu'ils se sentent bien au travail.

  • Speaker #0

    On va faire preuve un peu d'imagination, imaginons qu'un jeune Jean-Baptiste d'une quinzaine d'années vienne ici et se questionne. s'interroge sur la suite de sa vie ? Qu'est-ce que vous auriez envie de lui dire ?

  • Speaker #1

    Je ne suis pas trop du genre à dire croire en ses rêves ou des choses comme ça parce que je n'avais pas de rêve, je n'ai jamais idéalisé ça. Mais par contre, de faire les choses bien, je trouve dommage de ne pas aller au bout des choses. C'est-à-dire que, je n'aime pas ce mot, mais jusqu'au boutiste, c'est-à-dire que même quand je fais quelque chose chez moi, pas du bricolage parce que je n'aime pas ça, mais quand je vais cuisiner, j'ai envie de faire le mieux possible. Et souvent, Ce qui m'agace, c'est que de faire bien, ça ne prend pas plus de temps que de mal faire. Et donc, ça, c'est un peu ma façon de penser.

  • Speaker #0

    Et c'est le conseil que vous donneriez ?

  • Speaker #1

    Oui, de faire les choses du mieux possible et vraiment de faire attention à tout. La vie, elle est faite de plein de petits détails, mais c'est souvent ce qui fait la différence. Merci beaucoup, Jean-Baptiste. Merci à toi.

Description

Dans cet épisode de L’état d’esprit, on découvre le parcours singulier de Jean-Baptiste Grangé, artisan boulanger devenu champion d’Europe, enseignant, puis chef d’entreprise à la tête de plusieurs boutiques. Rien ne le destinait pourtant au pain… puisqu’il n’en mangeait même pas !
Guidé par un conseiller d’orientation, inspiré par son maître d’apprentissage et porté par le goût du défi, Jean-Baptiste révèle comment il a trouvé sa voie, construit son exigence, transmis sa passion et développé une entreprise artisanale qui emploie aujourd’hui plus de 50 collaborateurs.
Entre rigueur, transmission, ambition maîtrisée et amour du « fait maison », il partage son état d’esprit : faire toujours mieux, rester fidèle à ses valeurs et créer un environnement où chacun peut s’épanouir.


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Bonjour et bienvenue dans ce nouvel épisode de l'état d'esprit. Aujourd'hui on part à la rencontre de Jean-Baptiste Granger, un artisan boulanger qui a trouvé sa voie presque par hasard pour finalement devenir l'un des boulangers les plus talentueux de sa génération. Ancien champion d'Europe, enseignant à 21 ans, puis chef d'entreprise à la tête de plusieurs boutiques. Il incarne à la fois l'exigence, la transmission et l'envie de créer. Bonjour Jean-Baptiste, on se trouve où ici ?

  • Speaker #1

    Donc ici, on est au laboratoire de production des boulangeries et pâtisseries granger. Donc ça va faire deux ans maintenant qu'on est installé ici à Assat. Et tout ce que vous pouvez retrouver en boutique se fabrique ici. Donc c'est pour ça que ça sent aussi bon.

  • Speaker #0

    Alors j'ai lu, qu'enfin vous n'aimiez pas trop, on va dire, le pain ni les pâtes. Et pourtant, vous êtes devenu boulanger. Comment s'est opéré ce virage, on va dire ?

  • Speaker #1

    Alors ce virage très particulier, en fait c'est en fin de troisième, je suis parti en seconde mais sans grandes ambitions. Et au cours de ma seconde, ma scolarité ne se passait pas hyper bien, je n'avais pas trop envie d'étudier. C'est un conseiller d'orientation qui m'a aiguillé, qui m'a fait remplir un QCM tout à fait basique et où en est ressortie la boulangerie. Il m'a dit écoute l'année va être longue, il faut que tu fasses des stages, fais un stage en boulangerie, tu vois si ça te plaît. Et effectivement, je trouvais ça un peu surprenant parce que je ne mangeais pas de pain, pas de pâtes et je n'étais pas adepte à tous ces produits-là. Moi, je me suis dit que j'allais préférer ça que l'école. Donc, c'était aussi ça. Je n'étais pas un mauvais élève, mais je n'arrivais pas à rester en place, un peu comme maintenant. Et du coup, l'idée, c'était d'aller voir, de découvrir. Et c'est là où j'ai rencontré M. Chastel qui aura grandement contribué à ma réussite.

  • Speaker #0

    Justement, votre apprentissage, vous le faites chez Jean-François Chastel à Pontac. Vous dites avoir été accueilli comme un fils. Comment cette expérience vous a-t-elle façonné ? Déjà quand on arrive, parce que vous étiez jeune, quand on arrive comme ça dans un apprentissage, comment on est ?

  • Speaker #1

    On est un peu démuni face au métier parce qu'on ne connaît pas grand chose, voire rien. Donc déjà j'ai eu beaucoup de mal à rentrer chez lui parce que je n'arrivais pas à trouver de patron. C'est-à-dire qu'à cette époque-là, c'était aussi ça qui inquiétait mes parents, c'est que, ok, faire un appréciation... apprentissage en boulangerie mais je ne trouvais pas d'employeur et monsieur Chastel m'avait dit non une première fois et en revenant quelques mois après finalement il m'a dit écoute j'ai quelqu'un qui ne vient pas je vais te prendre donc je suis arrivé dans ce métier dans cette petite entreprise familiale où il était avec sa compagne Laetitia et de suite effectivement accueilli presque comme un fils parce que j'ai toujours été euh Bien constitué et très volontaire. J'ai de suite pris passion pour le métier. Et ça s'est enchaîné comme ça pendant quelques années.

  • Speaker #0

    Et ça vous plaît de suite ou pas ?

  • Speaker #1

    Oui, ça me plaît de suite. C'est étonnant parce que je ne connaissais pas trop, voire pas du tout le métier. On avait un ami qui était boulanger sur Coiraz. J'avais dû y aller peut-être quelques fois avec mon père, mais je n'en avais pas un souvenir non plus. Je ne m'étais jamais dit que c'est exactement ça que je veux faire. Et non, non, ça m'a plu. Et ce qui m'a plu, en fait, c'était le côté d'avoir l'impression de servir à quelque chose. Et donc, j'étais hyper content. Tous les matins, il me tardait d'aller au boulot, en fait. Donc, c'était ces choses assez rares. Mais j'étais hyper motivé et vite à la culture de vouloir faire bien le mieux possible tous les jours.

  • Speaker #0

    Et qu'est-ce qui vous a plu ? Qu'est-ce qui vous plaisait ? La matière ?

  • Speaker #1

    Ouais, la matière, le fait de transformer quelque chose, vraiment de servir à quelque chose, en fait. Et j'avais vraiment... l'impression de servir à quelque chose plus que sur un banc d'école où j'écoutais à moitié. Et donc, je transformais. Tous les jours, je voyais le père. C'est un métier qui est toujours fabuleux parce qu'on n'a rien quelques heures avant et on sort un produit en quelques heures. On fait quelque chose vraiment de concret. Et donc, j'ai tout de suite été pris de passion par le métier.

  • Speaker #0

    Après tout, vous êtes lancé dans les concours. Pourquoi ?

  • Speaker #1

    Alors pourquoi ? Ça vient de mon professeur en chambre des métiers, Didier Lalise, que j'embrasse. Et Didier, ça a été mon enseignant à la chambre des métiers de Pau. Et de suite, il m'a proposé de faire des concours quand j'étais en CAP, quand j'étais tout jeune. Et donc c'est lui qui m'a dit, écoute, il existe tel concours, tel concours. Donc j'ai commencé par faire les Olympiades des métiers en boulangerie, que j'avais remporté au niveau régional, en pâtisserie l'année d'après. Et ensuite, il m'a inscrit au concours de meilleur apprenti de France en 2011. Et donc là, grande aventure. Moi qui n'étais jamais parti de Montbéarn, je suis parti en Alsace, à Eschaux, dans un CFA, faire le concours de meilleur apprenti de France. C'est lui qui m'y avait préparé. Donc j'ai pris l'avion pour la première fois. Et je suis parti avec lui, pareil, un peu comme un père et son fils. On était hyper proches. Et du coup, j'ai remporté le titre de meilleur apprenti de France en 2011. Donc, c'était mon troisième concours, mais ça a été vraiment le déclic sur la partie compète et challenge.

  • Speaker #0

    Qu'est-ce qui vous plaisait là-dedans ?

  • Speaker #1

    Le côté très rigoureux, le côté de se challenger. En fait, vraiment, je suis un homme de challenge. Je m'ennuie assez vite et j'ai besoin de me donner des objectifs. Et donc, je trouvais ça hyper intéressant. Donc c'était en complémentarité avec mon employeur, M. Chastel. Je m'entraînais tout le temps, j'avais envie de faire toujours mieux, comme dans mon quotidien. Mais le côté concours, c'était des choses qu'on ne faisait pas au quotidien en entreprise. Donc c'est dur à expliquer parce que c'est presque une drogue.

  • Speaker #0

    Alors quand on est meilleur apprenti de France, qu'est-ce qu'on ressent ?

  • Speaker #1

    Déjà très fier, très content. C'était super parce que c'est quand même du sacrifice et cette période-là de... de ma vie était un peu entre parenthèses dans ma vie perso parce qu'au final je travaillais beaucoup. Je travaillais tous les dimanches, dès que j'avais du temps libre je m'entraînais ou j'allais en chambre des métiers pour m'entraîner. Donc c'était quand même une vraie réussite et une vraie reconnaissance. Mais donc du coup beaucoup de fierté aussi vis-à-vis de mes parents. Et après une petite sensation d'un peu trop aussi. Après cette période-là, ça devait faire 4 ou 5 ans que j'étais apprenti. J'avais beaucoup travaillé. Donc c'est là où mon parcours pro a basculé un peu après ces concours.

  • Speaker #0

    Très jeune, vous devenez enseignant. Pourquoi ? C'était une envie de transmettre ? C'était une envie de voir autre chose ?

  • Speaker #1

    J'ai enseigné l'année quasiment après avoir eu le titre de meilleur apprenti de France ou peut-être un an et demi après. Avec cette sensation d'avoir un peu trop donné et d'avoir un peu tiré sur la corde. Et donc, je me suis dit, prof, finalement, c'est le bon compromis. Je vais rester dans le métier, mais je ne travaillerai plus les vacances, plus les week-ends. Donc, j'avais idéalisé ça. Et du coup, je suis resté. Bon, j'ai enseigné un petit peu à Pau, un peu à Bayonne, avec des hauts, des bas, des déceptions. Parce que je me voyais rester dans l'enseignement. J'ai fait ça quelques années. Après, ça a été le lycée hôtelier de Morlaz pendant 2-3 ans. Et mon côté entrepreneurial. est arrivé et voilà, tout s'est bousculé un petit peu en 2015. Je suis toujours enseignant et l'idée me vient avec un copain boulanger à Nailles pour m'occuper clairement parce que moi faire 20 heures d'enseignement il me manquait quelque chose. Il fallait que je bouge un peu et du coup chez mes parents j'avais une arrière cuisine et je m'étais dit pourquoi pas faire des gâteaux et les commercialiser. Et donc mon copain boulanger à Nailles m'a dit écoute... si tu veux, moi j'en fais pas, fais-moi des gâteaux et vu que je sais pas faire les choses à moitié j'ai de suite voulu faire les choses bien donc ça marchait plutôt bien donc après je suis resté enseignant mais j'ai développé les points de vente enfin les points relais un peu comme j'appelais à l'époque et j'idéalisais ma vie comme ça, ce modèle comme ça en me disant je vais rester enseignant toute ma vie j'ai mon labo de production, j'avais un associé à l'époque et je me suis dit c'est super ont fait euh On fait un complément, c'est très très bien. Et après, toujours pareil, la vie fait que la vérité n'est plus du tout celle-là, mais aucun regret.

  • Speaker #0

    Donc là, vous continuez cette activité. Vous vous dites quoi ? Vous vous dites, je vais continuer longtemps ou j'ai encore besoin d'un challenge ?

  • Speaker #1

    Le fameux, toujours Didier, Didier Laliz me dit, écoute, j'étais à Morlaz enseignant, il me dit, j'ai un jeune. qui cherchent à faire une équipe pour la Coupe de France de boulangerie. Donc ce jeune-là, c'est Nicolas Gruel, mon copain. J'ai fait une année 2018 au taquet en mode entraînement, enseignement, mais aussi l'activité qui prenait de l'ampleur en parallèle. Donc une année encore un peu compliquée. Et début 2019, le concours. Donc on est parti à la Coupe de France sans trop savoir notre niveau. On s'était bien entraîné, mais très dur. c'est à dire que J'étais capable de m'entraîner de minuit à 7h et de faire ma journée d'enseignement classique de 7h à 14h-15h et l'après-midi de devoir retourner au labo pour faire une période rude. Mais au final, on a remporté la Coupe de France de boulangerie en 2019 avec Nicolas et Gaëtan qui étaient notre troisième partenaire. Et un peu la bis répétita on va dire, mais au final overdose. Trop, c'est un peu mon défaut, c'est-à-dire que je donne beaucoup, mais après, je suis capable d'exploser, donc là, j'apprends sur ça. Donc, j'ai quitté l'enseignement un peu avec perte et fracas courant 2019, parce que voilà, je... J'étais un peu perdu et je ne savais plus trop quoi faire. Donc on a gagné ce titre et c'est vrai que naturellement, on m'est venu l'envie après de me dire, il faut que je fasse quelque chose, il faut que j'entreprends. Donc j'ai passé une année un peu morose, on va dire. On était du coup qualifiés pour la Coupe d'Europe, la Coupe d'Europe de boulangerie. Donc on était tous les trois encore et on a remporté la Coupe d'Europe, donc fin 2019 et c'est là où vraiment ça a été le déclic. Avec un peu de chance, les planètes sont bien alignées, on m'a proposé de racheter la boulangerie Marsan, qui était un de nos clients en pâtisserie, qu'on servait depuis le petit laboratoire. Et donc tout s'est bien goupillé. Donc 2020 s'était acté et début 2021, on a ouvert notre première boutique en nom propre à Pau.

  • Speaker #0

    Et là, qu'est-ce qu'on se dit ? On se dit, on réfléchit, c'est le moment, c'est normal.

  • Speaker #1

    C'est le moment, en fait c'était le moment, j'en avais envie finalement, l'activité sur laquelle on servait les professionnels marchait bien, on devait être deux ou trois à travailler à cette époque-là, et on s'est dit allez c'est le moment, l'emplacement était super, Pau pour nous ça fait toujours, moi étant de Bénéjac, Pau c'était un peu notre capitale à nous, et d'être réinstallé à Pau c'est un peu le graal, donc je me suis dit plein centre-ville, l'occasion est trop belle de la laisser passer. Et donc, ma compagne m'a suivi dans le projet, elle m'a dit, écoute, allez, on y va. Si vraiment tu veux faire ça, je t'accompagne au moins une année. Et bon, là, elle est toujours avec moi et elle est toujours dans l'entreprise, mais c'était le bon moment. Il y a une peur,

  • Speaker #0

    il y a des craintes ?

  • Speaker #1

    La peur, c'était le Covid, parce que 2021, on a ouvert février 2021, on était en plein Covid. Donc effectivement, ce n'était pas l'idéal. On était, je crois, entre la deuxième ou troisième vague et on était un peu inquiets de ça. Et puis, on était habitués, nous, à gérer que de la livraison, à faire nos gâteaux, les livrer, être entre guillemets peinards et se dire on n'a pas la partie vente. Souvent, je fanfaronnais, je me disais moi, je n'ai pas de vente à gérer. Moi, je fais mes gâteaux, je les vends, ils sont livrés, ils sont facturés. Donc, on s'est retrouvé avec un nouveau métier. on a embauché 7 personnes qui étaient présentes sur place donc on s'est retrouvé d'être de 3 à 10 donc bon déjà nouvelle chose mais Mais déjà avec de l'ambition de vouloir faire les choses très bien. Et donc après, par la suite, on a constamment fait évoluer ce fonds de commerce.

  • Speaker #0

    Et comment on arrive à concilier ce parcours finalement ? Enseignant, ensuite petit atelier dans le garage. Ça fait penser à d'autres histoires. Et puis après, on devient chef d'entreprise, presque manager. On va parler même de ce que vous faites actuellement.

  • Speaker #1

    à ce moment là qu'est-ce que vous dites vous dites j'ai les épaules assez solides ou je n'y pense pas en fait je n'y pensais pas et même encore des fois j'ai du mal à regarder un peu dans le rétro parce que non je ne pensais pas à tout ça ce que je savais et que je sais toujours c'est que je voulais faire du mieux que possible donc en étant hyper exigeant et hyper rigoureux sur ce qu'on allait proposer donc on avait nos idées mais Merci. Entre les idées, les choses qu'on a idéalisées et la réalité, on s'est rendu compte que ça allait être difficile. Parce que moi, j'avais un savoir, mais de transmettre mon savoir à des collaborateurs qui allaient représenter mon image, ça a été quelque chose d'assez difficile au début. Mais pour autant, on était de suite quand même dans une mentalité d'être détaché de la production. Moi, finalement, j'ai peut-être été en production un mois maximum sur ma boutique. Parce qu'on avait quand même l'ambition et l'envie de se détacher pour gérer au mieux notre entreprise. Maintenant, c'est quelque chose qu'on fait au quotidien. Mais c'était quand même déjà être entrepreneur à demi-mot. On l'est beaucoup plus maintenant.

  • Speaker #0

    Et pourquoi ce choix justement de ne pas être la main dans le cambouis ou dans le pétrin ?

  • Speaker #1

    C'est une bonne question. Après, je ne sais pas comment l'expliquer parce que c'est vrai que j'adorais ça. Je sortais des concours, j'aimais beaucoup ça. Mais le fait d'avoir beaucoup donné en production, que ce soit pour m'entraîner pour les concours, pour mon apprentissage, je ne me voyais pas. Et puis, j'ai eu de la chance. En fait, je me suis nourri quand même beaucoup de mon expérience de prof parce que je rencontrais beaucoup de chefs d'entreprise chez qui on allait faire des visites. En fait, je ne me voyais pas toute ma vie me dire que ma boîte va être dépendante de moi, d'être tous les jours à faire le pétrin, moi, parce que ça sera bien fait. Donc j'ai de suite eu cette vision un peu de déléguer, mais comment on délègue pour que ce soit... soit représentatif de ce que je veux faire. Donc ça, je l'ai eu de suite. Et bon, maintenant, ça porte ses fruits, entre guillemets. Mais voilà, c'était vraiment notre façon de voir les choses qui a fait que je n'ai pas voulu être trop présent parce que sinon, je pense que la vie ne serait pas la même à l'heure actuelle.

  • Speaker #0

    Et comment on délègue ?

  • Speaker #1

    C'est une très bonne question. On délègue au début comme on peut. On pense toujours bien faire. On se trompe. On s'est souvent trompé. en étant un peu trop gentil. C'est vraiment quelque chose qui a été le plus dur pour nous et on est loin d'être les meilleurs là-dessus, mais on progresse tous les jours. On délègue surtout en faisant confiance, en ayant la chance de s'entourer des bonnes personnes aussi, mais la chance se provoque parce que le côté concours a fait qu'on arrivait à recruter assez facilement. On avait une image plutôt... plutôt positive auprès des jeunes et donc on s'est de suite entouré de très bons collaborateurs sur la partie production. Donc c'était quand même plus facile de transmettre à des gens qui étaient motivés et qui venaient travailler entre guillemets pour moi plus que pour une entreprise. Donc c'était assez fluide et ça s'est fait naturellement.

  • Speaker #0

    Actuellement, vous avez combien de salariés ?

  • Speaker #1

    Alors actuellement, les choses ont bien changé. On est 50 à l'heure actuelle. On a un nouveau projet. on en parlera peut-être tout à l'heure, mais logiquement, d'ici quelques mois, on sera 65. Et voilà, après, c'est un tout autre métier que j'aime autant que la boulangerie. Et c'est ce qui fait aussi que notre ambition devra s'arrêter vite parce qu'on veut rester dans la maîtrise et dans l'humain. Donc voilà, c'est des problèmes, mais ça en est quand même.

  • Speaker #0

    Justement, est-ce que ce n'est pas un risque, finalement, de grandir ? Et finalement, de perdre peut-être un peu son âme, alors c'est peut-être un grand mot, mais en tout cas, l'idée que vous aviez peut-être au départ ?

  • Speaker #1

    Effectivement, c'est un très bon sujet, parce que quand on voit les infrastructures et le nombre qu'on est, on peut avoir tendance à se dire que ça y est, c'est industriel, on a beaucoup de machines. L'idée, c'est que pas du tout. Au contraire, on est artisan, on transforme. Tous nos produits, 99,9%, on transforme, on fait tout maison. C'est aussi pour ça qu'on est très nombreux. On forme une dizaine d'apprentis par an entre les boulangers, les pâtissiers. Donc ça, c'est un souhait et ça, je veux le garder. C'est pour ça qu'on transforme beaucoup, mais on a d'un côté une réalité économique qui fait qu'on a des boutiques qui tournent très bien, où on passe beaucoup de quantités, donc on a automatisé certaines tâches qui n'avaient plus de valeur ajoutée. Donc maintenant, c'est un jeu de chaise musicale. Il faut arriver à trouver le bon équilibre entre faire maison, et ça, c'est notre ADN, c'est-à-dire que ça ne changera jamais. C'est pour ça que je te disais que finalement, notre ambition devra se canaliser un petit peu, avec un peu de frustration, bien sûr, mais parce que je tiens trop à mes collaborateurs et je veux qu'on reste, entre guillemets, familial, artisanal. C'est de 10 à 48, enfin à 50 maintenant. Il s'est passé plein de choses et notamment en 2023 où l'envie et la magie des concours est revenue avec la meilleure boulangerie de France qui nous a contactés. Ça faisait deux, trois ans que je n'avais pas fait de concours et c'était vraiment la bonne occasion d'y aller. Donc on a remporté la dixième saison de la meilleure boulangerie de France en binôme avec Antoine qui est mon chef pâtissier et qui est toujours là avec moi. Donc ça a été un gros tremplin, la boutique travaillait bien, mais là ça a vraiment été un gros tremplin, on est quasiment passé du simple au double en chiffres. Donc ça a été une période assez difficile à gérer, parce qu'on n'avait toujours pas l'outil de production ici, il est arrivé un tout petit peu après la diffusion de la finale. Donc on a grandi, on était vite 30, et en 2024, on a ouvert Nosti, notre deuxième point de vente. Voilà, parce qu'on était en place, on avait notre labo de prod qui était là, qui était disposé à faire un peu plus et on avait un tel engouement sur pot qu'on avait envie de dupliquer un peu le projet. Et comme j'ai toujours un peu les planètes qui s'alignent bien, j'avais dans mes clients professionnels une boulangerie à vendre sur la commune de Nosti. Et donc tout s'est bien enchaîné et on a ouvert en 2024 la boutique. Et maintenant, effectivement, un dernier projet. Alors, je dis un dernier, mais ma compagne me reprend toujours parce que je ne sais pas si ce sera le dernier, mais en tout cas, ce ne sera pas loin. Un projet d'ouverture sur la plaine de Nailles qui est chez moi. Et c'est un peu la façon de boucler la boucle, mais de revenir. Moi, j'ai fait un peu l'inverse souvent. Souvent, certains commencent à Nailles et finissent à Pau. Et moi, je suis content de revenir sur mes terrains.

  • Speaker #0

    Donc, comment on arrive à la fois à déléguer et à... continuer à être exigeant, comment on transmet cette exigence ?

  • Speaker #1

    Je suis très exigeant avec moi-même, avec mes collaborateurs aussi mais je suis un réel gentil donc j'ai beaucoup de mal à être exigeant, la solution la plus simple pour moi ça a été de m'entourer de personnes un peu stratégiques dans mon entourage pro notamment ma compagne qui est là au quotidien et Guillaume qui est notre directeur de boutique qui entre guillemets a le mauvais rôle, même si on n'est vraiment pas des méchants, mais c'est vrai que mes responsables de prod, mon entourage administratif m'aident beaucoup sur la partie que je n'aime pas trop, qui est dire ce qui ne va pas. Et honnêtement, dans les 50 collaborateurs, tout le monde commence à me connaître.

  • Speaker #0

    Ce podcast s'appelle « L'état d'esprit » . Quel est votre état d'esprit au quotidien ? Qu'est-ce qui vous anime ?

  • Speaker #1

    Ce que j'aime le plus, moi, en fait, c'est... Le coterie entrepreneurial, il est arrivé sur le tard parce que, de base, moi, mon métier, c'est la boulangerie, la pâtisserie. J'aime autant l'un que l'autre, on me pose souvent la question. Moi, ce qui m'anime, c'est de voir les boutiques bien rangées, bien remplies, de faire maison, de faire toujours mieux. Et on compare beaucoup, on regarde beaucoup ce que font les autres. Pas dans le sens compétition à proprement parler, mais ça nous booste et ça nous pousse à faire toujours mieux. Et c'est vrai que je ne laisse rien au hasard, que ce soit on essaye, je ne dis pas qu'on est... Moi j'ai souvent tendance à dire qu'on est nul parce que ça pique un peu les équipes, mais ils savent très bien que je ne le pense pas. Mais on veut que tout soit bien pensé, on veut que les gens... Quand ils viennent chez nous, que l'emballage, que le service client, on attache beaucoup d'importance au service client, on rappelle les gens qui sont mécontents, on fait très attention à ça. C'est ça mon quotidien, je veux que les gens soient contents de venir chez nous, que les gens se régalent et surtout que les gens qui travaillent pour moi soient fiers d'être là et surtout qu'ils se sentent bien au travail.

  • Speaker #0

    On va faire preuve un peu d'imagination, imaginons qu'un jeune Jean-Baptiste d'une quinzaine d'années vienne ici et se questionne. s'interroge sur la suite de sa vie ? Qu'est-ce que vous auriez envie de lui dire ?

  • Speaker #1

    Je ne suis pas trop du genre à dire croire en ses rêves ou des choses comme ça parce que je n'avais pas de rêve, je n'ai jamais idéalisé ça. Mais par contre, de faire les choses bien, je trouve dommage de ne pas aller au bout des choses. C'est-à-dire que, je n'aime pas ce mot, mais jusqu'au boutiste, c'est-à-dire que même quand je fais quelque chose chez moi, pas du bricolage parce que je n'aime pas ça, mais quand je vais cuisiner, j'ai envie de faire le mieux possible. Et souvent, Ce qui m'agace, c'est que de faire bien, ça ne prend pas plus de temps que de mal faire. Et donc, ça, c'est un peu ma façon de penser.

  • Speaker #0

    Et c'est le conseil que vous donneriez ?

  • Speaker #1

    Oui, de faire les choses du mieux possible et vraiment de faire attention à tout. La vie, elle est faite de plein de petits détails, mais c'est souvent ce qui fait la différence. Merci beaucoup, Jean-Baptiste. Merci à toi.

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