#83 Juliette JARRY - DG HUGGY - Recrutement Circulaire cover
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La Khôlle

#83 Juliette JARRY - DG HUGGY - Recrutement Circulaire

#83 Juliette JARRY - DG HUGGY - Recrutement Circulaire

1h13 |01/03/2025|

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Description

Juliette Jarry, une entrepreneuse visionnaire passée par l’action publique avant de revenir à l’innovation sociale avec Huggy et le concept du recrutement circulaire.


Juliette nous partage son parcours fascinant :
✅ La création de son entreprise d’aide à domicile à seulement 24 ans, en repensant totalement le modèle du secteur.
✅ Son expérience comme vice-présidente de la région Auvergne-Rhône-Alpes, où elle a mené la transformation numérique d’un territoire de 8 millions d’habitants.
✅ Son engagement actuel dans une révolution du recrutement avec Huggy, une plateforme qui valorise et recycle les talents en leur évitant de repartir de zéro.


💡 Pourquoi cet épisode est incontournable ?
👉 Parce qu’on y parle d’audace, d’innovation et de comment changer le monde à son échelle.
👉 Parce que Juliette brise les clichés sur l’entrepreneuriat et la politique avec authenticité et pragmatisme.
👉 Parce que le recrutement circulaire pourrait bien être l’avenir du marché du travail !

🔥 Une conversation passionnante, inspirante et pleine de vérités sur l’entrepreneuriat, la politique et la tech.

📢 Écoutez, partagez, et surtout, osez !


Juliette sur linkedin : https://www.linkedin.com/in/jarry-juliette/

Site web Huggy : https://www.huggy-recrutement.com/




Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Pierre

    Bienvenue dans la Khôlle. Vous êtes curieux ? Vous avez soif de comprendre le monde qui vous entoure ? Alors vous êtes au bon endroit. Si vous aimez vous remettre en question, que comme moi vous pensez qu'on n'a jamais fini d'apprendre, alors la colle est faite pour vous. Sans se prendre au sérieux, je vous propose à chaque épisode de partir ensemble à la découverte de nouveaux horizons, de profils et d'idées inspirantes. Je suis Pierre Barraud, j'ai créé, édité et produit ce podcast. Je suis également directeur général du Campus Orléans de l'ISC Paris, école de commerce, membre de la Conférence des Grandes Écoles. Mon mantra ? Vis comme si tu devais mourir demain, apprends comme si tu devais vivre toujours. Je suis preneur de tous vos commentaires, suggestions, remarques, ils sont tous bienvenus. Et bien évidemment, je compte sur vous pour placer 5 étoiles et des commentaires sur toutes les plateformes. Allez, c'est parti, bonne écoute ! Bonjour et bienvenue dans ce nouvel épisode de La Khôlle. Aujourd'hui, j'ai l'immense honneur d'accueillir Juliette Jarry. Salut Juliette !

  • Juliette

    Bonjour Pierre !

  • Pierre

    Ça me fait très plaisir de pouvoir discuter avec toi parce que tu es une entrepreneuse, tu as plein de trucs, tu as eu mille vies en fait, on peut dire ça et ça va être juste super intéressant. Mais justement, pour tous ceux qui ne te connaîtraient pas encore, est-ce que tu peux te présenter en quelques mots ?

  • Juliette

    Oui bien sûr, avec plaisir. Bonjour à tous, je m'appelle Julie JARRY, j'ai 43 ans, j'ai deux enfants. J'aime bien dire que je suis bilingue publique et privée, puisque j'ai à la fois un parcours en effet de chef d'entreprise. J'ai créé ma première entreprise à 24 ans, à la fin de mes études de sciences politiques. Donc c'est une entreprise... Tu étais précoce,

  • Pierre

    dis donc ! Pardon ? Tu étais précoce ! Non, parce que créer son entreprise directement en sortie d'études, ce n'est pas tout le monde.

  • Juliette

    Oui, on pourra y revenir, parce que c'est vrai que c'était un contexte qui était intéressant. Moi, la patience n'a jamais été la première de mes qualités. Et c'est vrai que j'ai adoré mes études à Sciences Po. J'ai pris beaucoup de plaisir. J'ai vraiment eu l'impression d'arriver dans un univers et un environnement où le fait d'apprendre, d'être curieux, tout ça a été valorisé. Donc, j'ai adoré ça. Mais j'ai été confrontée à la fin de mes cinq années d'études. principe de réalité que j'avais pas vraiment anticipé, à vrai dire. Et qui était qu'en fait, il fallait travailler après.

  • Pierre

    Oh mon Dieu !

  • Juliette

    Et oui, c'est ça. Et donc, je me suis dit, mais en fait, qu'est-ce que j'ai envie de faire ? Et qu'est-ce que tu sais faire à la fin de Sciences Po ? Enfin, c'est une formation qui est géniale et t'apprends plein de choses. Mais contrairement à un médecin qui sait qu'il va être médecin, quand tu fais Sciences Po, ça reste une formation qui est hyper généraliste, mais comme les écoles de commerce, ou comme un type de formation. et qui peuvent potentiellement t'ouvrir à plein de choses, mais à rien de bien défini à la base. Et c'est vrai que moi, à l'époque, ce qui m'intéressait beaucoup, c'était l'évaluation des politiques publiques. Je pense que c'était un peu précurseur à l'époque. Ça l'est encore un peu.

  • Pierre

    Ouais, ouais, ouais. Et puis, avec la tendance muskienne qui arrive là, je ne sais pas. Mais ouais, il y a un truc, en tout cas.

  • Juliette

    Là, en l'occurrence, on était, tu vois... 2005, donc c'était un petit peu tôt. Donc, j'ai cherché du travail pendant peut-être trois ou quatre mois et j'ai très rapidement eu une frustration qu'on me dise que j'avais un beau parcours, que j'avais fait des jolies choses, mais que j'étais trop jeune.

  • Pierre

    Pas d'expérience, tout ça.

  • Juliette

    Voilà, il ne fallait pas qu'ils s'inquiètent, ça n'allait pas durer. Mais ces quelques mois de recherche m'ont beaucoup frustrée. Alors, on rentre directement dans le vif du sujet, mais allons-y. Mais à cette époque, ma grand-mère était en perte d'autonomie. Et en fait, la conjonction des deux, de cette situation personnelle et de ma recherche d'emploi, m'a amenée à me dire, mais pourquoi pas créer une entreprise d'aide à domicile spécialisée autour de la notion de lien intergénérationnel. Et donc, à la fin de mes cinq ans d'études de sciences politiques, j'ai fait une formation à la création d'entreprises pendant six mois pour valider mon projet.

  • Pierre

    Dans quel cadre ? Dans... Avec un organisme ?

  • Juliette

    En fait, c'était un organisme qui était mis en place par Pôle emploi à l'époque. OK. Donc, ils m'ont proposé ça. Et là aussi, pareil. Donc, normalement, je devais rentrer sur la session d'après, mais ça ne m'allait pas du tout. Donc, j'ai fait un peu de forcing pour recommencer la formation tout de suite. Et j'ai validé, en fait, tous les aspects fiscaux, juridiques, sociaux de mon projet. Et donc, je me suis lancée à l'école. Et ce qui était... Alors, très souvent, on me disait « Ah, c'est super courageux ! » Je dis « Non, en fait, c'est très inconscient. »

  • Pierre

    C'est un peu ça, oui.

  • Juliette

    Il en faut beaucoup quand tu crées une entreprise. Parce qu'effectivement, je n'avais pas de réseau dans ce secteur-là. C'est un secteur que je ne connaissais pas.

  • Pierre

    Le modèle aide à la personne, c'est ça ?

  • Juliette

    Oui, donc en fait c'est une entreprise qui au début était basée sur ce type de lien intergénérationnel, c'est-à-dire comment est-ce qu'on peut considérer les personnes âgées, nous pas uniquement sous l'angle de leurs incapacités à faire, mais de ce qu'elles pourraient transmettre à quelqu'un de plus jeune, donc avoir une relation d'aide qui n'est pas à sens unique, mais qui soit vraiment dans cette notion aussi de partage et d'échange. Et donc, ça m'a amenée à travailler dès le début avec des étudiants en fin de cursus en psychologie, moniteur éducateur, éducateur spécialisé, médecin, etc. Donc, avec des profils. En fait, ce que j'ai adoré dans cette expérience, c'était prendre le contre-pied de tout ce qui existait sur le marché. Je n'avais pas envie de créer la 150e entreprise d'aide à la douceur de l'église. J'avais vraiment envie d'apporter une valeur ajoutée différente. Et donc, c'était un peu un ovni dans le secteur puisque... Si on caricature un petit peu, en général, les salariés dans l'aide à domicile sont plutôt des femmes qui ont 46 ans, qui ont élevé des enfants, qui n'ont pas de diplôme et qui souhaitent reprendre une activité professionnelle à temps partiel, etc. Alors, c'est vraiment une grosse caricature.

  • Pierre

    Oui, c'est pas loin de la vérité, je pense.

  • Juliette

    Et du coup, chez ADA Présence, qui est une entreprise, nous, on avait une moyenne d'âge qui était de 23 à 24 ans, niveau moyen de diplôme, bac plus 4.

  • Pierre

    et puis comment t'allais les chercher ?

  • Juliette

    et bien en fait on bénéficiait d'une aberration du système à l'époque, notamment chez les étudiants en psychologie qui était que tu avais un jury de sélection qui était très pointu pour passer du master 1 au master 2, il y avait en gros 80-85% des étudiants de psychologie qui ne passaient pas du premier cours de l'un à l'autre et donc ils se retrouvaient sur une année de césure ou sur une année si tu veux où ils allaient en profiter pour acquérir de l'expérience Et pour nous, c'était génial parce que ça nous amenait des profils qui étaient vraiment force de proposition. Et ce qui fait que progressivement… Toi,

  • Pierre

    tu faisais la sortie des jurys, c'est ça ?

  • Juliette

    Au fil du temps, on a commencé à être plutôt connus. Oui,

  • Pierre

    des petites réputations.

  • Juliette

    Exactement. Et du coup, l'entreprise a progressivement évolué sur l'accompagnement, donc non seulement de personnes âgées, mais aussi d'enfants et d'adultes en situation de handicap. Et tout particulièrement sur des pathologies complexes. Donc, on est devenu spécialiste de la prise en charge de l'autisme, des séquelles de trauma crânien, des maladies neurodégénératives comme Alzheimer, etc. Et ce qui était hyper intéressant aussi dans cette entreprise, c'est qu'on avait vraiment cet axe très fort sur le développement et le maintien de l'autonomie.

  • Pierre

    Alors, une question qui me vient, je suis désolé, ce n'est pas très humaniste comme approche, mais... Dans ces business models, c'est très people intensive et les people, ça coûte cher. Comment on arrive à trouver un équilibre économique à tout ça ?

  • Juliette

    C'est une très bonne question. Effectivement, moi, dès le début, je me suis dit qu'il fallait que j'automatise tout ce qui était à faible valeur ajoutée. Donc, on a vraiment... Et c'est en ça aussi que l'entreprise était un peu en ovni. C'est qu'en 2006, quand je lance l'entreprise, je commence déjà à réfléchir à... à faire un cahier des charges pour développer un extra net à façon qui me permettrait d'avoir aussi un modèle de fonctionnement interne qui est très basé sur ce qu'on appelle à l'époque les nouvelles technologies. Donc, par exemple, nous, on ne passait pas notre vie à appeler les intervenants pour leur dire est-ce que vous êtes disponible pour aller chez Madame X ou Monsieur Y. Ils avaient accès en fait à la liste de toutes les missions à pourvoir sur cet extra net et se positionnaient sur les missions qui les intéressaient. Ce qui avait un double avantage, c'est qu'on était sur une logique de co-construction de planning. On savait que quand ils acceptaient une mission, c'est aussi que c'est une mission qui les intéressait. Et puis du coup, ça limitait aussi notre charge en termes de coordination, parce qu'on n'avait plus qu'à effectuer la mission aux intervenants. Donc il y avait ça. C'était aussi un extra net sur lequel ils allaient pouvoir rédiger leur compte rendu de façon automatique. Je ne voulais pas les faire passer à l'agence toutes les semaines, déposer leur feuille de papier, etc.

  • Pierre

    Non mais t'as raison, t'es génial !

  • Juliette

    On avait mis en place de l'AI formation, ils pouvaient emprunter des ouvrages, ils pouvaient emprunter des jeux. Tout ça était intégré dans cette extra nette et qui était vraiment le cœur de fonctionnement de l'entreprise de manière un peu native.

  • Pierre

    C'est quoi ta plus grande fierté dans tout ça, de cette expérience-là ? Parce que ce n'est que la première qu'on prenait.

  • Juliette

    Oui, il y a plein de... plein de moments forts et de choses dont on peut collectivement être fière dans cette entreprise, mais moi je pense qu'un des moments les plus émouvants que j'ai vécu c'est de voir une maman d'un jeune en situation de handicap arriver au bureau en pleurs et en me disant mais vous ne vous rendez pas compte, grâce à vous on va pouvoir aller avec mon mari au restaurant ça fait des années que ça ne nous est pas fait et je pense que au-delà de cette histoire il y avait une âme dans cette entreprise, c'était ça qui était très très chouette ... C'était une entreprise où on apportait des solutions qui étaient très concrètes et très tangibles. avec une façon de le faire, je crois, qui était très, très humaine.

  • Pierre

    Alors, il y a eu un petit bug dans la matrice où le truc s'est coupé, mais ce n'est pas grave. On continue et je reprends sur ma question qui était que j'avais fait mon boulot, j'avais regardé ce qu'on pouvait dire sur toi, notamment sur cette expérience-là. Et un journaliste notait une approche très humaniste de ton management, ce qui résonne avec ce que tu vas faire plus tard, d'ailleurs. Pourquoi est-ce qu'il a écrit ça, à ton avis ?

  • Juliette

    Je pense que c'est vraiment lié à cette âme dont je parlais dans l'entreprise. J'avais aussi quelque chose qui était très fort chez moi, c'était la volonté que la pérennité de l'entreprise ne repose pas sur mes seules épaules. Et donc, je pense que tous les collaborateurs se sont très rapidement sentis aussi... porteur de cette entreprise, de ses valeurs, de ce qui en faisait vraiment les spécificités. Donc je pense que c'est probablement lié aussi à ce qu'il a ressenti de cette aventure collective. On était dans un secteur qui non seulement était effectivement très humain, mais je pense que ce que j'ai adoré, ce que j'ai essayé de faire, c'est aussi de permettre aux collaborateurs qui m'ont rejoint dans cette aventure de la vivre et de grandir avec. Et ça, je pense que c'est effectivement quelque chose qui me tient très à cœur.

  • Pierre

    Pourquoi ? Alors, essaie de me donner la vraie raison. Pourquoi tu as finalement décidé de revendre cette entreprise ? Alors ça, c'est ma première question. Et deuxième question qui est immédiate, qui est, est-ce qu'on vend une entreprise à mission comme on vend n'importe quelle autre entreprise ?

  • Juliette

    Alors, je vais te donner la vraie raison pour laquelle j'ai vendu cette entreprise. Je ne comptais pas t'en donner une fausse. Tout simplement parce que j'avais fait le tour et que je considérais que je n'étais plus la bonne personne pour continuer à la développer. Je pense que... Je ne sais pas si on peut dire ça comme ça, mais je pense avoir une forme de lucidité sur ce que je peux apporter à un projet. Et en l'occurrence, là, c'était... Voilà, c'était plus moi, tout simplement, qui pouvait porter l'entreprise plus loin. Et je n'en avais plus l'envie profonde. Il fallait aussi que je fasse autre chose. J'y ai passé 11 ans dans cette entreprise, ce qui est quand même relativement long. J'ai commencé à ressentir un petit peu ce besoin d'autre chose, je pense, au bout de 7-8 ans. Et il se trouve que c'était aussi un moment où mes enfants étaient tout petits, donc je me suis laissé le temps aussi...

  • Pierre

    On se fait rattraper par la vie.

  • Juliette

    Exactement. Et puis, à un moment donné, je me suis dit, ok, maintenant, c'est le moment. Je pense qu'il faut passer la main et apporter aussi une énergie nouvelle, un regard nouveau sur cette entreprise.

  • Pierre

    Tu penses justement, ce n'est pas un jugement, mais qu'en fonction des profils entrepreneurs, tu as des profils qui font le zéro à un.

  • Juliette

    Et puis,

  • Pierre

    ceux qui font le 1 à 10, le 10 à 100, etc.

  • Juliette

    Oui, complètement. Moi, je ne suis pas du tout une gestionnaire. Moi, ce qui me plaît, c'est de monter des projets, c'est de les penser différemment, c'est de les optimiser au début. Mais une fois que ça roule et que c'est… C'est chiant,

  • Pierre

    d'accord. C'est plus beau. Il faut toujours des trucs nouveaux, un peu excitants.

  • Juliette

    Je ne sais pas si c'est chiant, mais effectivement, je pense que ça correspond à des personnalités différentes. Et… Et il faut être lucide sur ce qu'on aime faire, sur là où on est bon, là où on ne l'est pas. Et en l'occurrence, moi, j'ai adoré penser complètement différemment ce projet. Mais je pense que c'est un peu le fil rouge. Et du coup, je n'ai pas du tout terminé mon introduction, mais ce n'est pas grave. Ce n'est pas grave.

  • Pierre

    C'est une introduction d'une heure. La colle, c'est le principe. Et en fait, c'est un peu le fil rouge, je crois, de ma vie professionnelle. C'est ce que j'aime, c'est l'innovation dans des secteurs qui sont très variés. Et pas toujours une innovation ultra technologique. Au contraire, c'est souvent une innovation sociale ou sociétale que j'aime apporter. Et c'est un peu, on le verra plus tard probablement, c'est un peu le point commun entre AD à présent, cette première entreprise, et puis celle dont je suis aujourd'hui directrice générale, et puis mon expérience aussi. Absolument. Puis on va voir que la techno, quand même, a une part de responsabilité dans tout ça aussi. Mais faisons un petit retour en arrière. Qu'est-ce qui explique qu'à 17 ans, on va pas remonter trop loin, t'as décidé d'aller vers Sciences Po ? Pourquoi à ce moment-là de ta vie, tu t'es dit, tiens, c'est un chemin intéressant pour moi ?

  • Juliette

    Alors, à vrai dire, je ne me suis jamais posé la question. C'est-à-dire que ça s'est imposé comme une évidence pour moi.

  • Pierre

    Ok. Mais il y avait des exemples dans ta famille ? Non,

  • Juliette

    pas du tout. Non, absolument pas. Mais pour moi, Sciences Po, c'était vraiment l'endroit où j'allais pouvoir me nourrir, où il y avait ce regard très pluridisciplinaire sur plein de sujets. Et je t'avoue qu'à aucun moment, je n'ai fait un tableau des plus et des moins. Tu n'as pas eu de doute ? Pas une seconde. J'ai eu mon bac, j'ai préparé le concours de Sciences Po, je suis rentrée à Sciences Po direct. Je ne me suis même pas posé la question.

  • Pierre

    Alors, ceci nous amène à la... deuxième partie de ta vie mouvementée, qui est que à un moment, alors ça doit être après avoir vendu ta boîte, tu rentres en politique quelque part ?

  • Juliette

    Non, c'est avant la vente de mon entreprise.

  • Pierre

    Ah, il y a un truc concomitant alors.

  • Juliette

    Exactement. J'ai fait les deux en parallèle pendant 18 mois, ce qui était de la folie.

  • Pierre

    Comment ça s'est passé ? Raconte-nous tout ça. Madame la vice-présidente de la région en Alpes.

  • Juliette

    Auvergne, Ronald, tu vas te faire taper sur les doigts. Auvergne,

  • Pierre

    Ronald. Oh là là, OK.

  • Juliette

    Comment ça se passe ? Écoute, on est en septembre 2015. Je suis en train de faire faire du toboggan à ma fille qui a un an dans le jardin. Et je reçois un coup de fil en me disant Laurent Wauquiez aimerait bien vous rencontrer. Moi, je dis Laurent qui ?

  • Pierre

    Laurent Wauquiez ?

  • Juliette

    Bon, je plaisante un petit peu, mais... C'est con,

  • Pierre

    t'aurais pu finir aux grosses têtes. Voilà, c'est ça.

  • Juliette

    Non, ça a bifurqué un petit peu à ce moment-là. Et donc, on m'explique qu'il veut se lancer dans la course aux élections régionales, qu'il cherche quelqu'un pour prendre la tête de la liste sur la métropole de Lyon et qu'il souhaiterait me rencontrer dans ce cadre-là. Et comme je suis curieuse...

  • Pierre

    Tu sais comment t'étais arrivé sur son radar ?

  • Juliette

    Oui, alors il se trouve que j'avais été invitée à petit déjeuner à l'Elysée dans le cadre de la journée des droits des femmes. Un peu de temps avant que j'avais eu un trophée national de la tribune, la Women's Award, et puis que j'avais eu aussi un trophée de la CPME pour aller à présent. Donc je pense qu'il y avait eu à la fois la conjonction un peu de tout ça, et puis peut-être, comme j'étais un petit peu dans les milieux entrepreneuriaux, mon nom qui était peut-être ressorti deux ou trois fois. Et donc, comme je suis curieuse, effectivement, je vais prendre un café avec lui. Il m'explique quel est son projet. Et je dis merci beaucoup. Mais en fait, moi, ça ne fait pas du tout partie.

  • Pierre

    Merci, monsieur. Au revoir, monsieur.

  • Juliette

    Oui, c'est ça. Merci, monsieur. C'est tellement éloigné de mon quotidien, de mes préoccupations du moment, que ce n'est pas du tout... OK. Donc, je lui dis que...

  • Pierre

    Oui, puis c'est out of the blue. Tu n'y avais jamais pensé plus que ça. Donc, voilà.

  • Juliette

    C'est ça, c'est ça. Et il me demande d'y réfléchir quand même. Et je dis, bon, écoutez, je vais prendre un petit moment, je vais y réfléchir. Et puis, je rentre à la maison et je me dis, c'est... Voilà, c'est vrai que c'est un peu paradoxal. J'ai fait Sciences Po, je suis fière d'entreprise. Et pour autant, je me sens très éloignée du monde politique. Je trouve que le personnel politique... n'incarne pas du tout. On est avant l'arrivée quand même de Macron, avant une certaine forme de renouvellement aussi, notamment à l'Assemblée. Et à l'époque, moi, je me dis, je ne vois pas de jeunes, je ne vois pas de chefs d'entreprise, je ne vois pas beaucoup de femmes. Et quelque part, je dis, si je dis non, je ne pourrai plus jamais râler. Je ne pourrai plus jamais me plaindre parce qu'à un moment donné, on me donne aussi l'opportunité d'amener... d'amener ma petite pierre à l'édifice et d'amener aussi une image un peu différente de ce que peut être un élu. Mais à ce moment-là, j'accepte de prendre la tête de la liste aussi parce que je trouve ça passionnant de voir comment se déroule. Exactement, de voir les coulisses, je me dis que c'est une expérience qui est quand même assez géniale.

  • Pierre

    T'es diplômée de Sciences Po, dans Sciences Po, il y a pas de politique quand même.

  • Juliette

    Oui, c'est ça. Donc, l'expérience est géniale. Et puis, ça permet effectivement de voir comment ça se passe. Puis alors, je lui dis, par contre, moi, la prise de parole en public, ce n'est pas du tout mon truc. Il me dit, oui, ne t'inquiète pas, ne t'inquiète pas. Bon, premier meeting de campagne, salle 3000. Donc, ça s'appelle une salle 3000 parce qu'il y a 3000 places. OK. Et bien, Bibi sur scène. Voilà, donc, baptême. Bonjour.

  • Pierre

    Bonjour.

  • Juliette

    Exactement. Et... Et puis donc la campagne se passe.

  • Pierre

    A été dure la campagne ? Parce que honnêtement dans toutes les campagnes il y a des coups bas.

  • Juliette

    Oui mais elle n'a pas été dure pour moi dans le sens où on avait une figure politique qui prenait quand même... C'est elle qui prenait tous les coups. Oui qui prenait tous les coups. Donc moi ma campagne ça a été plus une campagne vraiment de terrain. Donc c'était une campagne politique mais pas au sens... il n'y avait pas eu cette violence là à ce moment là. Et donc, à ce moment-là, quand j'accepte la campagne, je mets quand même des conditions. Je me dis, moi, je ne suis pas encartée, je ne le serai jamais. Et puis, si je m'engage, il y a un moment donné, c'est quand même aussi pour pouvoir faire des choses. Mais à ce moment-là, je prends la tête de l'aise sur la métropole, mais je me dis, si on gagne, je serai conseillère régionale. Je n'envisage à aucun moment autre chose. Et là arrive le mois de décembre et on gagne les élections régionales.

  • Pierre

    Alors, vous ne la voyez pas, mais elle a l'air surprise d'avoir gagné. C'était une surprise vraiment ou non ? Tu jouais pour la gagne, de toute façon.

  • Juliette

    Oui, de toute façon, on y va pour la gagne, mais en même temps, le résultat, il est toujours jusqu'au dernier moment. Tant que tu n'as pas gagné, tu n'as pas gagné. Et donc, on gagne les élections. Et Laurent Wauquiez me rappelle quelques jours plus tard en me disant, qu'est-ce qui t'intéresse comme sujet ? Et je lui dis, écoute, il y a un projet dont on a parlé pendant la campagne que je trouve passionnant et que j'aimerais vraiment avoir l'occasion de suivre. C'est le projet de campus numérique. qui est à ce moment-là un projet qui est une idée.

  • Pierre

    Rien de concret pour l'instant.

  • Juliette

    Exactement. Mais je dis ça en disant j'aimerais être tenue informée. Et il revient vers moi un ou deux jours plus tard en me disant écoute, j'ai deux propositions à te faire. Soit tu es conseillère déléguée au campus. Soit tu es vice-présidente, déléguée à l'économie de proximité, au commerce, à l'artisanat, aux professions libérales, à l'ESS et au numérique.

  • Pierre

    Oh, oh, oh, ça en fait des trucs !

  • Juliette

    Wow ! Wow ! Et donc, à ce moment-là, j'appelle des amis qui sont un peu plus dans cet univers que moi. Ils me disent « Ben voilà, il se passe ça, qu'est-ce que vous en pensez ? » Là, ils me disent « Ben en fait, c'est simple, soit t'es conseillère déléguée, t'as ta carte de visite, mais... » Pas plus de pouvoir que ça.

  • Pierre

    Ton plan d'action est plus réduit.

  • Juliette

    C'est ça. Et si tu es vice-président, tu fais partie de l'exécutif, tu as un budget, tu as des services. Ce n'est pas du tout la même histoire. Après, tu dis à un chef d'entreprise, tu veux plutôt être...

  • Pierre

    Oui, c'est vrai.

  • Juliette

    ...peau de fleur ou tu veux plutôt pouvoir faire bouger les choses ? Là, je dis OK. Je dis OK,

  • Pierre

    mais sachant que tu es encore dégé de ta boîte.

  • Juliette

    Oui.

  • Pierre

    T'as dû faire des semaines de fou furieux.

  • Juliette

    Ouais, donc je suis dirigeante d'une entreprise d'une cinquantaine de personnes. Et accessoirement, j'ai deux enfants, dont ma fille qui a un an et mon grand qui en a quatre. Oh là là.

  • Pierre

    Ouais, 24 heures, c'est pas beaucoup finalement.

  • Juliette

    Non, c'est pas beaucoup, je confirme. Et c'est surtout quand t'arrêtes que tu te dis que c'était un rythme de fou. C'était un rythme de fou.

  • Pierre

    Mais parce qu'à cette époque-là, t'as 34 ans. Donc, tu t'apprêtes à diriger la politique numérique d'une région à 8 millions d'habitants ? Un truc comme ça ?

  • Juliette

    C'est ça.

  • Pierre

    Syndrome de l'imposteur ou pas du tout ?

  • Juliette

    Oh, punaise, oui, t'arrives. En plus, c'est un secteur qui n'est pas mon secteur de compétence, entre guillemets. Je rappelle, je viens quand même d'une entreprise d'aide à domicile. Alors, même si le numérique a toujours été quelque chose qui m'a passionnée et qui a été un vrai levier de croissance dans mon entreprise, Je ne suis pas une technicienne du numérique. Et donc, je me souviens très bien du premier discours que je dois faire. Donc, j'ai été nommée le 4 janvier 2016. Et le 10 janvier 2016, je dois faire un discours devant le CIEL, qui est le syndicat d'initiative qui déploie la fibre dans la Loire. Et dans le trajet entre Lyon et Saint-Etienne, j'ai ma directrice de service qui m'explique ce qu'est une délégation à faire mot concessif, tous les termes techniques avec le déploiement de la fibre, etc. Donc, je suis là. J'ingurgite tout ça et je me retrouve, et ça a été la première et la seule fois de tout mon mandat où j'ai lu un discours que je n'ai pas écrit. En croisant les doigts et en me disant, pourvu qu'il ne m'ait pas mis des pots de bananes.

  • Pierre

    Et qu'on ne me pose pas trop de questions.

  • Juliette

    Et pourvu que je ne sois pas en train de raconter n'importe quoi. Je fais mon discours, pas super sereine quand même. Je retourne m'asseoir et je me dis c'est la dernière fois. Et je rentre à la région, je convoque tout le monde et je dis là maintenant, vous sortez tous les dossiers, vous m'expliquez tout. Il faut que j'apprenne, il faut que je comprenne. Et donc tu passes en phase d'apprentissage accélérée. D'autant plus que, ce que je disais tout à l'heure, en fait j'ai une double délégation, c'est-à-dire que je m'occupe aussi bien Mes interlocuteurs, à ce moment-là, sont aussi bien les syndicats de profession libérale qu'Orange ou SFR, si tu veux. Donc, c'est un peu le grand échange. On est dans un contexte, en plus, de fusion des deux régions. Donc, Auvergne d'un côté, Ronald de l'autre. Donc, en fait, il y a tout à mettre à plat, tout à harmoniser. Il y a les équipes à reconstituer. Le numérique est une délégation qui n'existe pas en tant que telle à l'époque. Donc, wow ! Et puis, tu découvres, en fait, tu arrives... Moi, je dis souvent que c'est une expérience anthropologique, parce que tu passes d'une PME de 50 personnes à une institution de 9000 agents avec une double chaîne de commandement, à la fois public, privé... Enfin, pardon, administratif et politique. Et tu passes du privé au public avec des fonctionnements qui sont très différents.

  • Pierre

    Et tu as une puissance de feu qui est sans commune mesure par rapport à ce que tu as pu connaître. C'est-à-dire qu'il y a du budget. Ça veut dire que tu es en capacité d'engager...

  • Juliette

    Chef de file en matière économique. Depuis la loi NOTRe, c'est vraiment la collectivité qui a été positionnée comme pivot sur ces questions-là. Donc, tu te retrouves effectivement avec des moyens, avec... La nécessité aussi de poser des stratégies, des ambitions. Donc ça, c'est ce que j'essaye d'apporter aussi, et ce qui à la fois moi me structure et structure les équipes, c'est que dès le début, je dis on va rédiger une feuille de route. On va rédiger notre feuille de route stratégique pour poser un petit peu quels sont nos objectifs, quels sont les moyens qu'on va mobiliser. Donc on fait un état des lieux au niveau de la région aussi, de ce qui existe. Et là où c'est difficile, c'est que le numérique est une délégation. éminemment transverses. Donc, tu dois aller solliciter les autres délégations. Et parfois, avec tout ce que ça peut générer, tu vois, de frictions où tu viens un peu percuter aussi les précarés, où les uns et les autres pensaient être...

  • Pierre

    Il y a deux, trois baronies à aller secouer.

  • Juliette

    C'est ça, exactement. Donc ça aussi, c'est un exercice qui est...

  • Pierre

    Formateur ! ...

  • Juliette

    d'apprentissage. exactement et là tu te dis d'une part que tu as un enjeu de comprendre les codes sans en prendre les travers d'arriver à comprendre un petit peu ce qui se passe ce qui se joue quand on te dit ça ou ça ce qui se joue derrière et puis dire à un moment donné soit je je Soit je fais plier un peu le fonctionnement, soit c'est moi qui me fait...

  • Pierre

    Qui te fait plier.

  • Juliette

    Ouais, c'est ça.

  • Pierre

    Tu crois qu'il y a une incapacité structurelle des institutions à se réformer en profondeur ?

  • Juliette

    Non, parce que c'est une question de personnes. C'est toujours une question de personnes.

  • Pierre

    Ça se joue aux people.

  • Juliette

    Ouais.

  • Pierre

    J'adore, je pense que ça a dû être une expérience juste incroyable. Est-ce qu'à un moment donné, ton stylo a tremblé au moment de signer une décision ? Alors, dans le cadre de mon mandat ?

  • Juliette

    Oui. Non, je ne dirais pas ça comme ça, parce qu'on a la chance quand même, et ça, je voudrais vraiment le souligner, parce qu'on fait souvent un peu du fonctionnaire bashing, mais on a la chance dans ces collectivités d'avoir des agents qui sont d'une compétence et d'un dévouement qui est quand même hyper appréciable. Donc, je sais que j'ai autour de moi quand même des gens qui, et notamment moi dans ma délégation, des gens que j'ai choisis, etc., quand ils me font une proposition... ils l'ont quand même travaillé, etc. Mais par contre, oui, tu doutes forcément toujours de... Est-ce que j'ai, moi, bien pris en compte toutes les incidences ? Est-ce que je suis bien en train de me projeter, non pas uniquement sur les six mois qui viennent, mais sur les cinq, dix, trente ans ? Et puis, en même temps, tu as une forme de latitude, mais tu es quand même enfermée, malgré tout, dans un fonctionnement qui reste... qui reste un peu rigide pour plein de raisons, parce que tu as un code des marchés publics, parce que c'est ce que je te dis, c'est ce mélange en fait entre les contraintes liées à l'administration et les contraintes liées au fonctionnement politique aussi. Donc tu navigues dans cet espace de liberté que tu essayes progressivement aussi d'agrandir, mais en ayant toujours quand même, malgré tout, ces contraintes que tu dois prendre en compte.

  • Pierre

    Là encore, j'ai fait ce que je devais faire. Donc, je suis allé lire des articles sur toi sur cette période. Et tu as cette phrase, ouvrez les guillemets. Ce fut une parenthèse à la fois dure, violente, mais passionnante. Le côté passionnant, on l'a vu. Pourquoi c'était dur et violent ? Tu vois, c'est des mots particuliers là.

  • Juliette

    Oui, bien sûr, mais ils ne sont pas utilisés pour rien. C'est un monde de rapports de force. C'est un monde de rapports de force et la politique est un système très féodal. C'est-à-dire que quand tu es en politique, et ça je pense que quelque part ça a été ma chance aussi, c'est qu'avec le président on a toujours eu une relation interpersonnelle. C'est-à-dire qu'il est venu me chercher, que quand on devait échanger on le faisait très directement tous les deux. Mais la politique de manière générale est féodale dans le sens où tu acceptes d'échanger une protection contre ta liberté. Et je dis, moi, encore une fois, la chance que j'ai eue, c'est que j'étais chef d'entreprise et que j'avais aussi mon entreprise. J'avais potentiellement d'autres projets et surtout quelque chose de très important, c'est que j'avais toujours dit que je ne ferais qu'un seul mandat.

  • Pierre

    Ah, ok.

  • Juliette

    Et je pense que ça, pour le coup...

  • Pierre

    Pourquoi ?

  • Juliette

    Parce que j'avais conscience de ce que j'avais envie d'y laisser ou pas. Et quand je dis que c'est un univers qui est dur et violent, c'est vrai. Déjà, la région, en l'occurrence, toutes les régions sont plus ou moins grandes, mais la région au Verne-en-Alpes est très grande, donc tu te déplaces beaucoup. Tu as quand même des responsabilités qui sont importantes. Et puis, tu as ce que je disais, ce mode de fonctionnement qui est quand même très basé sur le rapport de force, sur une forme de baronnie, sur des territoires. Sur des... Donc, il faut aussi apprendre à faire avec tout ça. Donc, tu peux, pendant un certain temps, le faire. Moi, je n'avais pas forcément envie de faire plus qu'un mandat pour ces raisons-là. Mais encore une fois, je le redis parce que c'est important, ça a été passionnant. Ça m'a permis de faire des choses, de voir des personnes, de découvrir des sujets que je n'aurais pas eu l'opportunité sinon de découvrir ou de rencontrer. De ce point de vue-là, j'ai absolument... aucun regret. Mais il faut avoir conscience quand même de ce que ça implique en termes d'engagement personnel.

  • Pierre

    Oui, en termes de dévouement à la cause aussi, clairement. T'as hésité à remettre le couvert quand même ? Même si tu t'es dit, non, j'y vais qu'une fois ?

  • Juliette

    Non, non, j'ai jamais hésité. Comme pour si on se pose, tu vois, la question c'est pas posée pour moi. Je pense, objectivement, que j'aurais pu le faire si j'avais voulu. Mais c'est J'ai quand même eu la chance, et tu le soulignais tout à l'heure, d'être vice-présidente de la deuxième région de France à 34 ans.

  • Pierre

    Mais oui, c'est énorme ! Juliette, sur ton CV, je suis désolé, ça claque.

  • Juliette

    Et sur une délégation qui était entrepreneuriale, c'est-à-dire qui avait une feuille blanche au début et que j'ai eu la confiance du président pour mener cette tâche à bien, ce qui était ultra précieux. Et donc, je me suis dit, si je fais un deuxième mandat, est-ce que j'aurais des conditions aussi incroyables de mandat ? et j'en étais pas sûre et je pense que de la même façon j'étais arrivée au bout d'un cycle, moi je crois beaucoup à cette notion de cycle et j'avais envie profondément de retourner vers l'entrepreneuriat

  • Pierre

    Ce qui nous amène à la troisième partie de ton introduction qui est Huggy Oui, le recrutement circulaire. Exactement on va parler économie circulaire, recrutement circulaire, etc. Mais voilà Parle-nous un peu de la genèse de tout ça, comment c'est né, à quel moment aussi, est-ce que là aussi il y a eu une zone de recoupement entre ton poste de vice-présidente et finalement la mise en œuvre de ce nouveau projet ? Enfin voilà, raconte-nous un peu.

  • Juliette

    Non, donc en fait à la fin de mon mandat, je ne veux pas tout de suite retourner en première ligne. Je décide dans un premier temps d'accompagner un certain nombre de projets, donc à la fois des entreprises industrielles, des groupes d'enseignement supérieur, des start-up, plutôt sur des fonctions de conseil. Et c'est en fait dans ce contexte-là qu'au bout de quelques mois, je re-rencontre Baptiste Privé, qui est le fondateur de Guy et du mouvement du recrutement circulaire. Et dans un premier temps, j'aide Baptiste plutôt en lui... en lui faisant des connexions, en lui ouvrant un peu quelques...

  • Pierre

    L'aide à évangéliser un petit peu.

  • Juliette

    Exactement, exactement. Mais c'est vrai qu'au fur et à mesure des rencontres, des échanges, des réunions qu'on fait ensemble, je me dis j'adore ce projet, j'adore l'équipe et je m'implique de plus en plus dans Hugui. Et au bout de quelques mois, en fait, on convient avec Baptiste que je prenne la direction générale de l'entreprise à ses côtés. Donc, je m'implique de façon plus opérationnelle. Et en fait, peut-être pour dire quand même ce qu'est Huggy et ce que fait Huggy.

  • Pierre

    Oui, c'est ça. Il y a un sujet là et c'est super intéressant.

  • Juliette

    Il y a un vrai sujet et c'est, je pense, aussi pour ça que j'ai eu ce coup de cœur parce qu'on en revient sur l'idée un peu de l'innovation sociale ou sociétale. Huggy est une entreprise à mission qui est à l'origine du mouvement du recrutement circulaire. Et l'objectif, c'est... d'amener les entreprises à envisager complètement différemment la question du recrutement. Si tu veux, quand on veut être provocateur dans notre façon de présenter les choses et pour bien faire comprendre les enjeux qu'il y a derrière, on dit qu'aujourd'hui, on traite mieux les déchets qu'on ne traite les candidats puisqu'au moins les premiers, on les revalorise.

  • Pierre

    Oui, ce n'est pas faux. Alors, candidats non retenus.

  • Juliette

    Oui, les candidats l'ont retenu. Exactement. Et donc, si tu regardes aujourd'hui sur France Travail ou sur LinkedIn, tu as 1,2 millions d'offres qui sont ouvertes. Ça veut dire que tu vas avoir 1,2 millions de processus de recrutement qui vont être menés dans les prochains jours en silo, en parallèle, et où à chaque fois, chaque entreprise va faire la même chose, c'est-à-dire qu'elle va publier une offre, attendre les candidatures, trier les candidatures, faire des entretiens téléphoniques, faire des entretiens physiques. Et recommencer ça inlassablement. Et on sait que le recrutement, c'est un processus en entonnoir. C'est-à-dire que tu vas avoir un certain nombre de candidats au début. Et puis, au fur et à mesure du processus, tu vas affiner chez un certain nombre de candidats des aptitudes, des compétences, de savoir-être, etc. Tu fais ta shortlist. Et tu te retrouves chez...

  • Pierre

    Pardon ? Tu fais ta shortlist, tout ça,

  • Juliette

    tout ça. Tu fais ta shortlist, exactement. Et tu te retrouves à la fin, on va dire statistiquement, avec deux, trois bons candidats. Sauf que tu n'as qu'un post-op pour voir. Donc, il va falloir que tu choisisses. et parfois le choix va se jouer à rien du tout. Tu peux avoir un préavis qui est un peu plus court chez l'un que chez l'autre, un fit relationnel avec un recruteur qui est un peu meilleur qu'avec un candidat. Tu peux avoir une compétence spécifique qui est un peu mieux maîtrisée. Mais pour autant, les candidats qui ne sont pas retenus, ce ne sont pas des mauvais candidats. Ils sont arrivés en shortlist, tu as quand même préqualifié énormément de choses chez eux. Et puis, on sait très bien que le numéro 1, à un moment donné, chez l'un, peut être le numéro 2 chez l'autre. Et inversement, c'est vraiment aussi une question de... Oui,

  • Pierre

    puis si le numéro 1 sur ta liste dit non, tu prendras le numéro 2, ce qui prouve bien que le numéro 2 est complètement valable.

  • Juliette

    Exactement, exactement. Et donc l'idée c'est de dire, on va en fait basculer d'une logique qui est aujourd'hui très guerrière dans le secteur du recrutement. Quand tu réfléchis, on parle quand même de chasse de tête, on parle de guerre des talents, c'est quand même assez violent comme vocabulaire.

  • Pierre

    C'est pas faux, c'est pas faux.

  • Juliette

    Et dire, comment est-ce qu'on peut basculer d'une logique de compétition à ce qu'on appelle de la coopétition, c'est-à-dire de la collaboration entre concurrents. Et donc ça, on le fait à travers quoi ? On le fait à travers le fait de faire rentrer la bonne pratique de la recommandation au sein des entreprises. C'est-à-dire, vous avez vu un bon candidat, vous l'avez qualifié, il y a un certain nombre de compétences, d'aptitudes, de savoir-être.

  • Pierre

    Il faut screener intégralement.

  • Juliette

    Et donc ça, vous prenez une minute trente à la fin de votre processus de recrutement pour recommander. ce bon candidat que vous avez apprécié et que vous n'avez pas pu prendre et lui permet de ne pas rebondir de zéro dans une nouvelle recherche et au contraire de rebondir vers une autre entreprise qui a un besoin similaire au même moment sur le même territoire. Et par extension, donc à la demande des entreprises qui participent, on applique ça aussi à des stagiaires, à des alternants, à des personnes en fin de CDD. voire à des collaborateurs en CDI, par exemple, qui doivent rejoindre un conjoint dans une autre région et tu veux l'aider à trouver son prochain job, tu peux le recommander sur la plateforme. Pareil, tu as eu un super alternant pendant deux ans, tu veux l'aider à décrocher plus facilement son premier emploi, tu peux le recommander sur la plateforme. Et l'idée, en fait, c'est que l'entreprise, à un instant T, elle fait cet acte qui est vertueux, qui est bienveillant. Mais comme on est dans une logique de circularité, quand elle adhère au mouvement, elle peut aussi bénéficier des recommandations de ses pairs pour diminuer sensiblement ses temps de sourcing et ses coûts de recrutement.

  • Pierre

    Vous êtes arrivée à le valoriser, à le mesurer, la diminution du temps de recrutement ?

  • Juliette

    Oui, alors le mouvement est jeune puisqu'il ne date que de septembre 2023. Mais sur les chiffres qu'on a pour l'instant, si on prend par exemple les profils cadres, La dernière étude de l'APEC dit qu'aujourd'hui, sur un profil cadre, le délai moyen d'un recrutement, c'est entre 12 et 15 semaines. Quand tu es dans la logique du recrutement circulaire, tu es sur 5.

  • Pierre

    Ah ouais ? Ok, donc divisé par 3. Oui,

  • Juliette

    entre 2 et 3. Ce qui est logique quand tu réfléchis, puisque tu bénéficies d'un travail qui a déjà été fait.

  • Pierre

    Complètement. Le process est, je ne veux pas dire complètement bouclé, mais tu élimines énormément de choses dans le process. Donc ça, c'est intéressant. Tu l'évoquais dans ta présentation, c'est que il y a le côté compétition. Alors j'entends. Comment on t'arrive à convaincre, je ne sais pas, Bouygues ? que ces candidats malheureux peuvent bénéficier à Vinci.

  • Juliette

    C'est une très bonne question. En fait, Bouygues ne recommandera jamais directement à Vinci ou Coca ne recommandera jamais directement à Pepsi. Par contre, ils vont recommander un candidat pour l'aider. Et on va dire à une entreprise, en fait, si vous ne le prenez pas, vous n'allez pas non plus l'empêcher de trouver un nouveau job. Non,

  • Pierre

    oui. Donc,

  • Juliette

    il n'y a pas que faire. En fait, le candidat, s'il est bon, il va trouver. Sauf que si vous faites cette recommandation, vous allez l'aider à trouver plus rapidement. Et donc, potentiellement, vous allez améliorer votre marque employeur. C'est un candidat qui va parler positivement de vous. Et en plus, on s'est rendu compte de quelque chose. C'est que les recruteurs nous disent que c'est beaucoup plus facile de dire non quand ils sont inscrits dans cette logique de recrutement circulaire. Parce que quand tu as fait venir un candidat trois fois, cinq fois, huit fois en entretien, qu'il est en shortlist et que tu dois l'appeler pour lui dire « je suis désolée, ce ne sera pas vous » , c'est beaucoup plus facile de lui dire « je suis désolée, on ne va pas vous prendre, mais par contre, on va faire quelque chose de bien pour vous, on va vous recommander » .

  • Pierre

    Aujourd'hui, tu disais que c'était septembre 2023, c'est ça ?

  • Juliette

    Oui.

  • Pierre

    Justement, c'est quoi ? Quoi le feedback que vous avez ? Est-ce la hype qu'il peut y avoir autour de ça ?

  • Juliette

    En fait, depuis septembre 2023, on a plus de 1400 entreprises et employeurs publics qui contribuent en recommandant des profils sur la plateforme. Ça va de toutes petites entreprises jusqu'à des Bouygues, des Décathlon, des Siemens, la Caisse des dépôts et consignations, Van Cleef & Arpel.

  • Pierre

    Des gros employés. Oui,

  • Juliette

    des très très gros. Donc en fait, c'est très varié à la fois en termes d'entreprises qui peuvent recommander, c'est aussi très varié en termes de profils qui sont recommandés sur la plateforme parce que ça va aussi bien sur un jeune qui vient de terminer son alternance. comme un membre de COMEX et un opérateur dans l'industrie, comme un DAF ou un DRH. Oui,

  • Pierre

    et autant des fonctions support que des fonctions techniques, toutes fonctions confondues. Oui,

  • Juliette

    parce que le mouvement a vraiment une visée universelle. En fait, ce que je disais, on est entreprise à mission. Vraiment, notre mission, c'est de contribuer à fluidifier le marché de l'emploi. Et on aura vraiment réussi dans ce sens-là, quand on aura... La recommandation est très... culturelle sur des profils, comme je disais, sur des membres de COMEX ou sur des fonctions support.

  • Pierre

    Ça se fait par cooptation, souvent, d'ailleurs.

  • Juliette

    Oui, complètement. Et quand on aura autant de recommandations dans l'industrie, on considérera qu'on aura vraiment réussi notre challenge.

  • Pierre

    Le client qui était le plus dur à convaincre ?

  • Juliette

    C'est une bonne question.

  • Pierre

    Sur les 1400 ?

  • Juliette

    Alors, on n'a pas 1 400 clients. Les 1 400, c'est vraiment ceux qui contribuent. Donc, on peut recommander sans être adhérent du mouvement. Après, ceux qui sont adhérents, c'est vraiment ceux qui souhaitent bénéficier de cette boucle vertueuse pour pouvoir…

  • Pierre

    Eux, ils peuvent piocher…

  • Juliette

    Exactement, communiquer sur leur marque employeur, avoir des attestations RSE. En fait, le recrutement circulaire a été reconnu comme une externalité positive du recrutement et c'est donc contributif à toutes les obligations extra-financières. Donc, tu sais, tout ce qui est CSRD, etc.

  • Pierre

    Ouais, ok.

  • Juliette

    Donc, tous les adhérents du mouvement bénéficient en fait de tous ces...

  • Pierre

    C'est un sacré avantage pour vous, ça.

  • Juliette

    Oui, complètement. Et on a des grandes entreprises qui sont venues aussi vers nous parce qu'elles souhaitaient pouvoir indiquer qu'elles étaient engagées dans le mouvement du recrutement circulaire dans leur réponse aux appels d'offres.

  • Pierre

    Alors, pourquoi est-ce qu'on n'en entend pas plus parler ?

  • Juliette

    Parce que tu lis pas assez la presse ? Ah c'est peut-être ça !

  • Pierre

    Non mais vraiment tu vois, c'est en en discutant avec toi, etc. Et en fait, il y a un moment, en t'écoutant, je me suis dit mais c'est juste génial comme truc. Et je suis désolé, oui, peut-être que je lis pas assez la presse. Je regarde trop TikTok, c'est une certitude. Mais tu vois, par exemple sur TikTok, on n'en parle pas. en tout cas pas pour l'instant et je me dis que là il y a un vrai truc il y a une vraie matière parce que je sais pas vous qui nous écoutez mais voilà les process de recrutement ils peuvent quand même être longs, pénibles etc. on gagne pas à tous les coups si on a des portes de sortie positives c'est quand même super bien il y a un effet vertueux y compris pour les entreprises, c'est ce que tu évoquais enfin voilà je vois pas pourquoi tout Toutes les entreprises ne se mettent pas sur ces logiques-là.

  • Juliette

    Oui, tu as raison. Alors, il y a plusieurs explications. Donc, effectivement, je disais, en plaisantant par rapport à la presse, on a eu la chance d'avoir beaucoup d'articles dans Le Monde, Les Echos, la Harvard Business Review, etc. Mais encore une fois, le mouvement est très, très jeune. Donc, ça ne fait même pas un an et demi. Il y a toujours une inertie sur des innovations. Ça prend toujours un petit peu de temps aussi. Ce qu'on essaie de faire, nous, vraiment, c'est d'identifier les pionniers, les visionnaires, ceux qui sont capables de comprendre, de percevoir tout de suite à quel point le monde du recrutement est en train de changer et à quel point cette approche régénérative peut être intéressante, donc à la fois pour le candidat et pour les entreprises elles-mêmes. Mais quand tu me demandais quel est le client qui a été le plus difficile à convaincre, je pense que ce qui est le plus difficile pour nous, ce sont les habitudes en fait c'est la force de l'habitude et aujourd'hui tout notre travail quelque part c'est de faire comprendre de faire de la pédagogie pour expliquer exactement ce qu'est ce mouvement là et on a même des personnes qui nous disent c'est trop beau pour être vrai en fait qu'est-ce qui se cache derrière où est le loup et en fait c'est On passe beaucoup de temps à expliquer ce qu'est le mouvement, à expliquer à quel point ça peut être vertueux à différents niveaux. Donc, moi, je te suis. Je pense que toutes les entreprises devraient passer au recrutement circulaire parce que c'est quelque chose... Tu vois, on parle énormément d'économie circulaire de manière générale. On parle de recyclage, de revalorisation. En fait, on a juste oublié qu'on appliquait ça aux choses, mais qu'on ne l'applique pas aux humains.

  • Pierre

    Non, mais moi, je suis hyper convaincu, en fait. Mais justement, tiens... On va dire qu'il y a plusieurs centaines de dirigeants d'entreprise qui écoutent la colle. Ils ont envie d'y passer. C'est quoi ? Comment ils font ? C'est quoi le process ? Ils contactent Huggy ? Ils font quoi ?

  • Juliette

    On fait quoi ? C'est hyper simple. Ils peuvent me mettre un petit mot sur LinkedIn. Ils peuvent nous contacter sur le site internet de Huggy ou du recrutement circulaire. On en fait toujours un petit temps d'échange pour expliquer exactement comment ça se passe, pour présenter la plateforme aussi derrière. Et puis, quand une entreprise est adhérente du mouvement, on a toujours ce qu'on appelle un onboarding, en bon français. Donc, un temps vraiment d'accueil avec la personne qui sera leur interlocutrice dédiée dans l'entreprise. Donc, toute entreprise qui est adhérente, tout employeur qui est adhérent à, chez Eugie, il y a un... Un interlocuteur qui lui est dédié et qui va l'accompagner dans la prise en main de la plateforme, dans la mise en place de ses offres d'emploi, dans sa stratégie de marque employeur. Et puis après, c'est très simple. La plateforme est hyper intuitive. Les premières recommandations peuvent se faire très facilement. Je dis ça prend moins de deux minutes de faire une recommandation. Et on a plein d'exemples où ça a changé les vies. Une recommandation... permis à quelqu'un de...

  • Pierre

    De créer des opportunités.

  • Juliette

    De créer des opportunités. En fait, une recommandation amène un relief à un profil qui est sans commune mesure avec un CV qui est une page à quatre à plat.

  • Pierre

    Tu es vesté, comme on dit en bon français là aussi. Non, non, mais ça donne effectivement un relief. J'aime bien ce terme. Toi qui es... Alors, chez Huggy, je pense, mais aussi de manière plus générale, sur le recrutement et dans les RH. On parlait de monde qui change, patins, couffins, etc. Il y a la tarte à la crème de l'IA et donc du tsunami qui arrive. Un, comment vous, vous l'avez intégré ? Comment vous allez surfer sur cette vague ? Et derrière, plus généralement, comment tu vois ça dans les DRH ?

  • Juliette

    Oui, alors l'IA, évidemment, c'est un sujet que j'ai beaucoup suivi depuis très longtemps. Je suis... Comment te dire ? Je considère... Pour nous, notre travail, c'est de réhumaniser le recrutement. Justement, l'IA peut apporter effectivement énormément de choses, mais pour nous, ça doit être complètement transparent. C'est-à-dire qu'on a une grande partie de ce qu'on appelle les matchs, c'est-à-dire les mises en relation qui sont... algorithmé ou automatique, dans le sens où quelqu'un qui est commercial, qui cherche un job de commercial face à une offre de commercial, on n'a pas besoin d'intervenir, si tu veux. Là, la connexion va se faire automatiquement. Par contre, on considère qu'une grosse partie de notre travail chez Eugie, c'est de faire les choses non seulement à la main, mais surtout à l'humain. C'est-à-dire qu'il y a toute une partie des matchs, ce qu'on appelle nous des matchs atypiques. qui se font parce qu'il faut avoir une détection assez fine des valeurs, des envies, des souhaits de reconversion, des choses comme ça. Et tout ça, ça reste quand même l'humain qui peut l'apporter. Donc je pense qu'il y a énormément de choses qu'on peut mettre en place grâce au numérique de manière générale et à l'IA, mais qu'on doit toujours s'en servir comme d'un outil. Nous, par exemple, ça nous fait gagner beaucoup de temps sur des comptes rendus, sur la génération de comptes rendus, de réunions ou de choses comme ça. Donc, évidemment que ces outils, on les intègre, qui font partie prenante du fonctionnement de l'entreprise. Mais pour autant, dans ce qui reste notre cœur d'activité, c'est-à-dire des connexions, des mises en relation, tout ce qui fait quand même le sel de la vie, tout ce qui fait la densité, tout ça. On aime quand même penser qu'il y a une bonne partie qui reste de l'humain et ça, ça ne doit pas changer. Donc, on a un rapport assez équilibré à ce qui est en train de se passer.

  • Pierre

    Après, ça m'amène sur un sujet qui est vrai pour les humains comme pour les machines. Après, je ne sais pas, il peut y avoir un vrai débat, mais c'est sur les biais qu'on peut avoir. Comment, justement, dans l'algorithmie que vous avez pu mettre en place, comment vous arrivez à ne pas finalement reproduire des biais que pourraient avoir les humains, ne serait-ce que sur les problématiques de genre, etc. C'est aussi bête que ça.

  • Juliette

    Oui, complètement. Alors ça, j'allais dire, c'est presque un sujet philosophique. Et c'est quelque chose qui est en réflexion permanente chez nous, c'est-à-dire qu'il n'y a pas à ce stade une réponse unique là-dessus. On travaille beaucoup avec nos développeurs sur la façon dont on peut intégrer ça, dont on peut éviter de tomber dans des pièges, dont on peut être le plus fin possible. Est-ce qu'en fait, toute la difficulté, elle se trouve là-dedans ? C'est comment est-ce que tu normalises, standardises, fais rentrer dans des cases ? quelque chose qui est de l'ordre de la finesse. Et je pense que c'est toute la réflexion, en fait, philosophique presque qu'il y a derrière. Et si tu veux, je vais te donner un exemple qui est assez parlant. On travaille beaucoup avec les banques qui cherchent des chargés de relations clientèles. Tu prends la fiche de poste, la fiche de poste, c'est exactement la même, chargé de relations clientèles d'une banque à l'autre. Sauf qu'il y a une banque, tu arrives, tu sors de l'ascenseur. tu as des écrans qui clignotent de partout en disant encore 50 appels avant d'être le meilleur vendeur du mois, les objectifs, etc. Tu sors de l'ascenseur dans l'autre banque, le seul objectif de l'année, c'est d'avoir contacté tous tes clients au moins une fois. Si tu veux, ça, dans la fiche de poste, ça ne transparaît pas forcément. Et ça, dans une IA, c'est quelque chose qui est assez difficile quand même à retranscrire. Et donc, tout l'intérêt, c'est comment est-ce que tu peux arriver à, sur des... des choses, oui, encore une fois, qui relèvent de la finesse, qui relèvent des valeurs, qui relèvent de quelque chose de très humain, finalement, de l'environnement de travail. Comment est-ce que tu vas arriver à rendre compte de ça d'une façon normée, tu vois ? Donc, c'est un petit peu tous les enjeux qu'il y a derrière sur la structuration de la donnée, sur comment est-ce que tu fais en sorte que ta donnée, elle reproduise le plus fidèlement possible toutes ces nuances-là. de la vie, tout simplement, de la vie, de la personnalité. C'est un sujet qui est passionnant.

  • Pierre

    Oui, complexe, complexe. Complexe. Passionnant. Je me faisais la réflexion en t'écoutant, si jamais on a des candidats qui nous écoutent, parce que... De ce que j'ai compris là, finalement, tu rentres dans la logique de Huggy et du recrutement circulaire que si tu es déjà finalement dans des process de recrutement. À un moment, il y a un point d'entrée. Je vais changer de boulot. Je viens de voir. Je pose mon CV chez toi.

  • Juliette

    Alors, en fait, tu as deux possibilités d'être sur la plateforme. Soit tu es recommandé. par quelqu'un, donc ça peut être effectivement à la fin d'un processus de recrutement. Tu peux être recommandé par le recruteur. Voilà, tu n'es pas pris, mais il dit, je vais jamais te donner un coup de pouce. Tu peux être recommandé par le recruteur sur la plateforme. Soit tu peux te préinscrire sur Eguy et demander une recommandation à postériori. Et à ce moment-là, ton profil n'est actif que quand tu as ta première recommandation.

  • Pierre

    D'accord, ok.

  • Juliette

    En fait, ce qui est intéressant dans le modèle, c'est qu'il y a énormément de profils hors marché. qui sont sur la plateforme, parce qu'en fait, ça n'est ni un job board, ni une CV tech. Un candidat n'est visible d'une entreprise qu'à partir du moment où il a accepté un match avec cette entreprise. Donc en fait, c'est vraiment cette logique de match, mais on aime bien dire en plaisantant qu'on a un peu le Tinder ou le mythique de l'emploi. C'est vraiment qu'il faut qu'il y ait rencontre entre candidats et entreprises pour que le candidat soit visible. Et donc, ça nous permet, sur des secteurs pénuriques, d'avoir pas mal de candidats qui en ont marre d'être démarchés, qui n'ont plus envie d'être sollicités, qui veulent reprendre... qui veulent reprendre la main sur leur recherche d'emploi et n'être mis en contact qu'avec des entreprises, des opportunités qui les intéressent.

  • Pierre

    Et oui, parce que pour certains jobs, effectivement, ils se font chasser trois fois par jour.

  • Juliette

    Exactement.

  • Pierre

    Beaucoup sur des profils très techniques d'ailleurs. Ok, c'est quoi le principal obstacle au développement de Guy ?

  • Juliette

    La durée des journées ? Non, après, ce que je te disais, c'est vraiment de faire ce travail-là qui est inhérent à toute innovation. Tu as toujours un temps un peu d'inertie pour aller expliquer, pour faire comprendre, pour faire bouger un petit peu les lignes. Donc, c'est principalement ça pour l'instant. Après, nous, on n'a quasiment que des demandes entrantes pour l'instant. Donc, c'est plutôt...

  • Pierre

    C'est génial, attends ! Franchement, c'est tout... C'est confort !

  • Juliette

    Et puis, ce qui est très chouette aussi, c'est qu'on a beaucoup d'adhérents qui sont des vrais ambassadeurs du mouvement, qui communiquent dessus sur leurs réseaux sociaux, qui mettent dans leurs offres d'emploi, qui sont engagés dans le mouvement du recrutement circulaire. Donc, en fait, c'est quelque chose qui est un peu incrémental, qui va au fur et à mesure...

  • Pierre

    Oui, et puis tu... Tu les places dans un cercle vertueux, donc c'est au-delà de plein de bénéfices qu'il peut y avoir. C'est pas mal du tout. Mais toi, Juliette, dans tout ça ? on se reparle dans dix ans tu y es toujours ou pas ? Je ne peux pas te dire parce que j'ai toujours fonctionné aux opportunités, aux rencontres, en disant pour moi c'est un horizon qui est super...

  • Juliette

    Spécialement très très loin.

  • Pierre

    Qui est super lointain, exactement. Donc je ne sais pas, mais aujourd'hui mon quotidien c'est ça, et en tout cas pour les prochaines années c'est ça. On a quand même des objectifs assez ambitieux de croissance et de développement au niveau de Guy. On en est au... au tout début, même s'il y a des signaux qui sont très agréables et très positifs. Mais...

  • Juliette

    Tu t'éclates.

  • Pierre

    Oui, complètement. Et puis, on a une équipe qui est vraiment géniale. Ça a du sens. Moi, c'est vraiment ce que je cherchais. C'est-à-dire que quand j'ai quitté la région, dans mes réflexions sur ce qui était un peu mes moteurs, pour mon prochain projet entrepreneurial, Je voulais qu'il y ait trois choses. Je voulais qu'il y ait une équipe avec laquelle ça se passe bien. C'est toujours pareil, les hommes et les femmes, c'est ce qui est vraiment les projets. Je voulais qu'il y ait du sens. Et ça, pareil, ça a toujours été le fil rouge de l'introduction.

  • Juliette

    Oui, c'est le fil rouge de cette introduction. C'est qu'il y a du sens à tous les étages, franchement.

  • Pierre

    Oui, je crois, oui. Et puis, le troisième point, c'est que je voulais vraiment un impact, c'est-à-dire un projet ambitieux qui soit un facteur de transformation. J'aime bien cette idée qu'on peut être un facteur de transformation du monde, enfin au moins du monde autour de soi.

  • Juliette

    Oui, c'est beau. C'est quoi la question que j'aurais dû te poser et que je n'ai pas posée jusqu'à maintenant ?

  • Pierre

    C'est une conversation qui peut être très très longue. On a plein de questions.

  • Juliette

    Tiens, si j'en ai une. Pourquoi Huggy s'appelle Huggy ?

  • Pierre

    Alors, il y a deux raisons. La première, c'est une question générationnelle. Tu sais, c'est Huggy les bons tuyaux.

  • Juliette

    Oula, ouais. Cherchez loin, d'accord.

  • Pierre

    Ou plus ou moins, ça, c'est la deuxième, c'est la petite blague. Et la première, c'est cette notion, tu vois, du hug, de la bienveillance. C'est ça qu'il y avait derrière dans cette idée-là.

  • Juliette

    Ok.

  • Pierre

    Ouais, de la communauté, du partage.

  • Juliette

    Ok, super. Bon, en tout cas, vous l'avez compris, vous qui nous écoutez, je crois qu'il y a un vrai truc autour du recrutement circulaire. Enfin, moi, je me demande pourquoi ça n'avait pas été fait avant, d'ailleurs. T'as une idée toi ? Parce que, alors, je veux bien me faire le chantre de l'innovation, mais c'est une idée qui est frappée au coin du bon sens. Pourquoi personne l'a fait avant ?

  • Pierre

    Alors, bon, je... Il y a probablement plusieurs explications. Déjà, la première, c'est qu'on le fait tous un peu naturellement, individuellement. Quand tu as vu quelqu'un de super, un bon candidat que tu ne peux pas donner suite, tu vas avoir tendance à contacter ton réseau, etc. Là, l'idée, c'est de dire comment est-ce qu'on industrialise, comment est-ce qu'on passe à l'échelle. Ça se retrouve aussi un petit peu dans l'idée de cooptation. Sauf que la cooptation, c'est du N-A. 1 et là on est sur du N à N et puis je pense que il fallait que ce soit un projet qui parte de zéro, c'est à dire que je pense que tu ne pouvais pas forcément intégrer ça dans quelque chose déjà existant, il fallait vraiment commencer from scratch du début ok, ça me va et puis je pense qu'après on a capacité aujourd'hui maintenant avec justement ces outils de plus en plus performants à ... à pouvoir plateformiser assez rapidement des idées comme ça. Parce qu'encore une fois, l'idée est une chose, mais...

  • Juliette

    Ils en ont un.

  • Pierre

    C'est vraiment une exécution.

  • Juliette

    Tu m'étonnes. Avant de passer aux sept dernières questions, Juliette, j'ai fait passer ton profil dans Charge EPT. Et je lui ai demandé de me poser, de me trouver une question. Un peu tricky que je pourrais te poser. Donc, voici la question que te pose ChatGPT. Pourquoi avoir implanté Huggy à Vez plutôt qu'à la part d'yeux, symbole de la tech lyonnaise ? J'ai trouvé la question intéressante.

  • Pierre

    Alors, parce qu'à Vez, on a une magnifique vue sur la Saône qui coule et c'est extrêmement inspirant pour réfléchir.

  • Juliette

    Donc, c'est vraiment le contexte de l'écosystème naturel de Vez. Oui,

  • Pierre

    alors après, on a aussi la chance d'être hébergé chez Babola. Et chez Babola, on a un magnifique toit terrasse où on peut déjeuner dès qu'il fait beau. Ça a été un gros critère de choix.

  • Juliette

    Non, je me doute. Et puis, ce n'est peut-être pas les mêmes tarifs à Vez qu'au niveau de la part Dieu, non ? Pour les locaux, etc.

  • Pierre

    Oui, après, il y avait des questions aussi d'accessibilité en fonction de là où étaient les uns et les autres. Et Vez, pour le coup, était un bon compromis. Donc, c'est une réponse un peu plus triviale.

  • Juliette

    Le pari centre des collaborateurs.

  • Pierre

    Exactement. Et puis après, tu sais, les rencontres avec les membres de la tech. Moi, je pourrais te dire qu'un des gros écosystèmes de la tech aussi sur Lyon, c'est à confluence avec H7. Donc, tu retrouves plusieurs centres.

  • Juliette

    Non, mais ne m'engueule pas, c'est déjà du GPT là pour le coup. Tu lui apporteras. J'ai une question. Ça marche. Allez, Juliette, c'est parti. pour les sept dernières questions. Juliette, dis-nous quel est ton mot préféré ?

  • Pierre

    Pour sa sonorité, c'est l'ultra crépit d'arianisme.

  • Juliette

    Ouah ! Alors là, il faut une définition.

  • Pierre

    En fait, l'ultra-crépidarianisme, c'est le fait de vouloir donner son avis sur tout sans avoir aucune compétence.

  • Juliette

    Oh, j'en connais plein des comme ça.

  • Pierre

    Ben voilà, oui, oui. C'est une... Je l'aime pour la sonorité. Après, pour le sens, je pense qu'il y a bataille entre énergie et optimisme.

  • Juliette

    Ok. Ouais, c'est plus consensuel. Mais j'aime bien le premier. J'aime bien le premier. Je vais le retrouver. Je le mettrai dans les notes de l'épisode. Ce sera sympa. Quel est le mot que tu détestes ?

  • Pierre

    Je déteste le mot lâcheté. Je le trouve très moche.

  • Juliette

    Hum, ouais. J'essaie de faire un truc politiquement correct justement sur la lâcheté, mais j'y arrive pas. Mais des lâches, oui, il y en a pas mal. Alors je sais pas, c'est peut-être parce que je vieillis aussi, mais je trouve que des gens avec du courage, il y en a de moins en moins. Mais bon. C'est un avis très personnel qui n'engage que moi. Le son ou le bruit que tu aimes ?

  • Pierre

    Alors, j'ai eu la chance, plus jeune, de faire beaucoup de voiles avec mes parents. Et je t'avoue qu'il y a un son qui m'apaise particulièrement, c'est celui des vagues, tu vois, quand tu navigues, de l'eau qui...

  • Juliette

    Tu fends les vagues ?

  • Pierre

    Oui, qui est contre la coque du bateau. Et je trouve que c'est un son qui amène particulièrement à la contemplation ou à la réflexion. Je trouve que ça te permet de te reconnecter aussi sur ton rythme à toi. C'est un son que j'aime beaucoup. Et il y en a peut-être un deuxième aussi. Je dirais que c'est l'hiver de Vivaldi qui me transporte littéralement à chaque fois.

  • Juliette

    Ok,

  • Pierre

    d'accord. C'est le seul moment où j'aime l'hiver, c'est avec Vivaldi.

  • Juliette

    D'accord, classe. Le son ou le bruit que tu détestes ?

  • Pierre

    Les grincements de manière générale.

  • Juliette

    La craie sur un tableau ? Oui,

  • Pierre

    hyper sensible aux sons, aux odeurs, etc. Donc les grincements, ça peut vite m'agresser.

  • Juliette

    Le papier alu ?

  • Pierre

    Oui.

  • Juliette

    Bon d'accord, on est pareil. Alors, Madame Jarry, votre juron, gros mot ou blasphème favori ?

  • Pierre

    Un très classique putain.

  • Juliette

    Ouais. Il n'y en a pas un plus exotique ?

  • Pierre

    Il y a un bordel à cul de mon grand-père.

  • Juliette

    J'aime bien celui-là. Je prends celui de ton grand-père. La citation que tu aurais aimé avoir prononcée ?

  • Pierre

    Ne nous prenons pas au sérieux, il n'y aura aucun survivant. D'Alphonse Allais.

  • Juliette

    Oh, joli. Ça me fait penser à un truc, par ta position, alors par tes positions de directeur général, etc., par ta position de vice-présidente, t'as eu à maintes reprises l'occasion de prendre la parole. Déjà, alors tu l'as dit, au moins au début de ton expérience politique, c'est pas forcément un truc que t'aimais particulièrement. Est-ce que t'as appris à aimer cette expérience-là ?

  • Pierre

    Oui. En fait, j'ai commencé à aimer prendre la parole en public quand je me suis détachée du côté technique. Parce qu'au début, c'est ce que je t'expliquais tout à l'heure, il y a eu une phase d'apprentissage qui a quand même été assez intense. Et je me disais que je ne serais légitime que quand je maîtriserais parfaitement mes dossiers. Et donc, j'essayais d'être assez pointue, etc. Et quand j'ai réussi à me détacher de ça, c'est-à-dire d'atteindre un niveau de connaissance et de maîtrise suffisant, j'ai pu me détacher de ça pour vraiment basculer sur l'émotion, sur la vision, sur le fait d'embarquer aussi un auditoire avec toi. Et là, oui, j'ai commencé à prendre vraiment du plaisir. Et puis à partager aussi, tu vois, à jouer avec l'audience. à susciter un peu des réactions. Et là, ça commence à devenir super.

  • Juliette

    Puisque quand tu sens que ton discours porte, quand tu sens que tu commences à embarquer les gens avec toi, il y a une puissance de la parole qui est juste incroyable.

  • Pierre

    Oui, et je pense que ça te permet à ce moment-là de te connecter aussi à une forme d'authenticité chez toi. Parce que ce qui est très compliqué, si tu veux, quand tu es... élu, quand tu es sur ces fonctions-là, c'est qu'en fait, tu es toujours en représentation. Donc, quand tu es quelque part, ce n'est pas Juliette qui prend la parole, c'est la vice-présidente de la région Vernier-Rhône-Alpes. Donc, tu incarnes quelque chose qui te dépasse. Et donc, c'est toujours aussi cet exercice qui est parfois un peu compliqué, fragile, périlleux de te dire qu'est-ce qui, dans cette prise de parole... est à moi et qu'est-ce qui est un exercice de style un peu imposé. Mais je trouve que quand tu arrives à te reconnecter à une forme d'authenticité, là aussi, ça vient donner une puissance à ton discours qui est très sympa.

  • Juliette

    Clairement. Et puisqu'on parle d'authenticité, on arrive à la dernière question. Si Dieu existe, qu'aimerais-tu, après ta mort, l'entendre te dire ?

  • Pierre

    On a un rapport assez distancié tous les deux, je le sollicite assez peu pour déconseiller des miracles.

  • Juliette

    Joliment dit !

  • Pierre

    S'il existe et qu'on doit se croiser après ma mort, peut-être que j'aimerais qu'il me dise sans rancune.

  • Juliette

    Sans rancune ? Parce que tu devrais être rancunière vis-à-vis de lui, tu penses ? Ah, lui ! Ok, d'accord, je comprends. Ça marche. Bon, c'est joli tout ça. Juliette, il m'est à te remercier. Je l'ai dit, mais vraiment, et je l'aurai dit en toute sincérité, là aussi. Je trouve que l'idée même du recrutement circulaire est géniale, vertueuse, tout ce qu'on veut. pour tous ceux qui nous écoutent, allez regarder ça d'encore plus près que ce qu'on a pu faire aujourd'hui. Vous verrez que je pense qu'il y a un vrai truc derrière ça. C'est aussi pour ça que j'ai voulu avoir Juliette avec nous aujourd'hui. Donc, merci beaucoup. Merci beaucoup, Juliette.

  • Pierre

    Merci à toi,

  • Juliette

    Pierre. On se revoit dans dix ans pour refaire un point. sur l'avancement de tout ça. OK ?

  • Pierre

    Avant, j'espère.

  • Juliette

    C'était la Khôlle de Juliette Jarry. Merci, Juliette.

  • Pierre

    Merci beaucoup.

  • Juliette

    Bravo, vous avez tenu jusque-là. Merci de votre écoute. Si vous avez aimé cet épisode, partagez-le sur les réseaux sociaux, allez mettre 5 étoiles et des commentaires sur les plateformes de podcast. Abonnez-vous, abonnez-vous à notre newsletter et dans tous les cas, à tout le monde. A très bientôt pour un prochain épisode de La Khôlle. Et n'oubliez pas, tout est possible à qui rêve, ose, travaille et n'abandonne jamais.

Description

Juliette Jarry, une entrepreneuse visionnaire passée par l’action publique avant de revenir à l’innovation sociale avec Huggy et le concept du recrutement circulaire.


Juliette nous partage son parcours fascinant :
✅ La création de son entreprise d’aide à domicile à seulement 24 ans, en repensant totalement le modèle du secteur.
✅ Son expérience comme vice-présidente de la région Auvergne-Rhône-Alpes, où elle a mené la transformation numérique d’un territoire de 8 millions d’habitants.
✅ Son engagement actuel dans une révolution du recrutement avec Huggy, une plateforme qui valorise et recycle les talents en leur évitant de repartir de zéro.


💡 Pourquoi cet épisode est incontournable ?
👉 Parce qu’on y parle d’audace, d’innovation et de comment changer le monde à son échelle.
👉 Parce que Juliette brise les clichés sur l’entrepreneuriat et la politique avec authenticité et pragmatisme.
👉 Parce que le recrutement circulaire pourrait bien être l’avenir du marché du travail !

🔥 Une conversation passionnante, inspirante et pleine de vérités sur l’entrepreneuriat, la politique et la tech.

📢 Écoutez, partagez, et surtout, osez !


Juliette sur linkedin : https://www.linkedin.com/in/jarry-juliette/

Site web Huggy : https://www.huggy-recrutement.com/




Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Pierre

    Bienvenue dans la Khôlle. Vous êtes curieux ? Vous avez soif de comprendre le monde qui vous entoure ? Alors vous êtes au bon endroit. Si vous aimez vous remettre en question, que comme moi vous pensez qu'on n'a jamais fini d'apprendre, alors la colle est faite pour vous. Sans se prendre au sérieux, je vous propose à chaque épisode de partir ensemble à la découverte de nouveaux horizons, de profils et d'idées inspirantes. Je suis Pierre Barraud, j'ai créé, édité et produit ce podcast. Je suis également directeur général du Campus Orléans de l'ISC Paris, école de commerce, membre de la Conférence des Grandes Écoles. Mon mantra ? Vis comme si tu devais mourir demain, apprends comme si tu devais vivre toujours. Je suis preneur de tous vos commentaires, suggestions, remarques, ils sont tous bienvenus. Et bien évidemment, je compte sur vous pour placer 5 étoiles et des commentaires sur toutes les plateformes. Allez, c'est parti, bonne écoute ! Bonjour et bienvenue dans ce nouvel épisode de La Khôlle. Aujourd'hui, j'ai l'immense honneur d'accueillir Juliette Jarry. Salut Juliette !

  • Juliette

    Bonjour Pierre !

  • Pierre

    Ça me fait très plaisir de pouvoir discuter avec toi parce que tu es une entrepreneuse, tu as plein de trucs, tu as eu mille vies en fait, on peut dire ça et ça va être juste super intéressant. Mais justement, pour tous ceux qui ne te connaîtraient pas encore, est-ce que tu peux te présenter en quelques mots ?

  • Juliette

    Oui bien sûr, avec plaisir. Bonjour à tous, je m'appelle Julie JARRY, j'ai 43 ans, j'ai deux enfants. J'aime bien dire que je suis bilingue publique et privée, puisque j'ai à la fois un parcours en effet de chef d'entreprise. J'ai créé ma première entreprise à 24 ans, à la fin de mes études de sciences politiques. Donc c'est une entreprise... Tu étais précoce,

  • Pierre

    dis donc ! Pardon ? Tu étais précoce ! Non, parce que créer son entreprise directement en sortie d'études, ce n'est pas tout le monde.

  • Juliette

    Oui, on pourra y revenir, parce que c'est vrai que c'était un contexte qui était intéressant. Moi, la patience n'a jamais été la première de mes qualités. Et c'est vrai que j'ai adoré mes études à Sciences Po. J'ai pris beaucoup de plaisir. J'ai vraiment eu l'impression d'arriver dans un univers et un environnement où le fait d'apprendre, d'être curieux, tout ça a été valorisé. Donc, j'ai adoré ça. Mais j'ai été confrontée à la fin de mes cinq années d'études. principe de réalité que j'avais pas vraiment anticipé, à vrai dire. Et qui était qu'en fait, il fallait travailler après.

  • Pierre

    Oh mon Dieu !

  • Juliette

    Et oui, c'est ça. Et donc, je me suis dit, mais en fait, qu'est-ce que j'ai envie de faire ? Et qu'est-ce que tu sais faire à la fin de Sciences Po ? Enfin, c'est une formation qui est géniale et t'apprends plein de choses. Mais contrairement à un médecin qui sait qu'il va être médecin, quand tu fais Sciences Po, ça reste une formation qui est hyper généraliste, mais comme les écoles de commerce, ou comme un type de formation. et qui peuvent potentiellement t'ouvrir à plein de choses, mais à rien de bien défini à la base. Et c'est vrai que moi, à l'époque, ce qui m'intéressait beaucoup, c'était l'évaluation des politiques publiques. Je pense que c'était un peu précurseur à l'époque. Ça l'est encore un peu.

  • Pierre

    Ouais, ouais, ouais. Et puis, avec la tendance muskienne qui arrive là, je ne sais pas. Mais ouais, il y a un truc, en tout cas.

  • Juliette

    Là, en l'occurrence, on était, tu vois... 2005, donc c'était un petit peu tôt. Donc, j'ai cherché du travail pendant peut-être trois ou quatre mois et j'ai très rapidement eu une frustration qu'on me dise que j'avais un beau parcours, que j'avais fait des jolies choses, mais que j'étais trop jeune.

  • Pierre

    Pas d'expérience, tout ça.

  • Juliette

    Voilà, il ne fallait pas qu'ils s'inquiètent, ça n'allait pas durer. Mais ces quelques mois de recherche m'ont beaucoup frustrée. Alors, on rentre directement dans le vif du sujet, mais allons-y. Mais à cette époque, ma grand-mère était en perte d'autonomie. Et en fait, la conjonction des deux, de cette situation personnelle et de ma recherche d'emploi, m'a amenée à me dire, mais pourquoi pas créer une entreprise d'aide à domicile spécialisée autour de la notion de lien intergénérationnel. Et donc, à la fin de mes cinq ans d'études de sciences politiques, j'ai fait une formation à la création d'entreprises pendant six mois pour valider mon projet.

  • Pierre

    Dans quel cadre ? Dans... Avec un organisme ?

  • Juliette

    En fait, c'était un organisme qui était mis en place par Pôle emploi à l'époque. OK. Donc, ils m'ont proposé ça. Et là aussi, pareil. Donc, normalement, je devais rentrer sur la session d'après, mais ça ne m'allait pas du tout. Donc, j'ai fait un peu de forcing pour recommencer la formation tout de suite. Et j'ai validé, en fait, tous les aspects fiscaux, juridiques, sociaux de mon projet. Et donc, je me suis lancée à l'école. Et ce qui était... Alors, très souvent, on me disait « Ah, c'est super courageux ! » Je dis « Non, en fait, c'est très inconscient. »

  • Pierre

    C'est un peu ça, oui.

  • Juliette

    Il en faut beaucoup quand tu crées une entreprise. Parce qu'effectivement, je n'avais pas de réseau dans ce secteur-là. C'est un secteur que je ne connaissais pas.

  • Pierre

    Le modèle aide à la personne, c'est ça ?

  • Juliette

    Oui, donc en fait c'est une entreprise qui au début était basée sur ce type de lien intergénérationnel, c'est-à-dire comment est-ce qu'on peut considérer les personnes âgées, nous pas uniquement sous l'angle de leurs incapacités à faire, mais de ce qu'elles pourraient transmettre à quelqu'un de plus jeune, donc avoir une relation d'aide qui n'est pas à sens unique, mais qui soit vraiment dans cette notion aussi de partage et d'échange. Et donc, ça m'a amenée à travailler dès le début avec des étudiants en fin de cursus en psychologie, moniteur éducateur, éducateur spécialisé, médecin, etc. Donc, avec des profils. En fait, ce que j'ai adoré dans cette expérience, c'était prendre le contre-pied de tout ce qui existait sur le marché. Je n'avais pas envie de créer la 150e entreprise d'aide à la douceur de l'église. J'avais vraiment envie d'apporter une valeur ajoutée différente. Et donc, c'était un peu un ovni dans le secteur puisque... Si on caricature un petit peu, en général, les salariés dans l'aide à domicile sont plutôt des femmes qui ont 46 ans, qui ont élevé des enfants, qui n'ont pas de diplôme et qui souhaitent reprendre une activité professionnelle à temps partiel, etc. Alors, c'est vraiment une grosse caricature.

  • Pierre

    Oui, c'est pas loin de la vérité, je pense.

  • Juliette

    Et du coup, chez ADA Présence, qui est une entreprise, nous, on avait une moyenne d'âge qui était de 23 à 24 ans, niveau moyen de diplôme, bac plus 4.

  • Pierre

    et puis comment t'allais les chercher ?

  • Juliette

    et bien en fait on bénéficiait d'une aberration du système à l'époque, notamment chez les étudiants en psychologie qui était que tu avais un jury de sélection qui était très pointu pour passer du master 1 au master 2, il y avait en gros 80-85% des étudiants de psychologie qui ne passaient pas du premier cours de l'un à l'autre et donc ils se retrouvaient sur une année de césure ou sur une année si tu veux où ils allaient en profiter pour acquérir de l'expérience Et pour nous, c'était génial parce que ça nous amenait des profils qui étaient vraiment force de proposition. Et ce qui fait que progressivement… Toi,

  • Pierre

    tu faisais la sortie des jurys, c'est ça ?

  • Juliette

    Au fil du temps, on a commencé à être plutôt connus. Oui,

  • Pierre

    des petites réputations.

  • Juliette

    Exactement. Et du coup, l'entreprise a progressivement évolué sur l'accompagnement, donc non seulement de personnes âgées, mais aussi d'enfants et d'adultes en situation de handicap. Et tout particulièrement sur des pathologies complexes. Donc, on est devenu spécialiste de la prise en charge de l'autisme, des séquelles de trauma crânien, des maladies neurodégénératives comme Alzheimer, etc. Et ce qui était hyper intéressant aussi dans cette entreprise, c'est qu'on avait vraiment cet axe très fort sur le développement et le maintien de l'autonomie.

  • Pierre

    Alors, une question qui me vient, je suis désolé, ce n'est pas très humaniste comme approche, mais... Dans ces business models, c'est très people intensive et les people, ça coûte cher. Comment on arrive à trouver un équilibre économique à tout ça ?

  • Juliette

    C'est une très bonne question. Effectivement, moi, dès le début, je me suis dit qu'il fallait que j'automatise tout ce qui était à faible valeur ajoutée. Donc, on a vraiment... Et c'est en ça aussi que l'entreprise était un peu en ovni. C'est qu'en 2006, quand je lance l'entreprise, je commence déjà à réfléchir à... à faire un cahier des charges pour développer un extra net à façon qui me permettrait d'avoir aussi un modèle de fonctionnement interne qui est très basé sur ce qu'on appelle à l'époque les nouvelles technologies. Donc, par exemple, nous, on ne passait pas notre vie à appeler les intervenants pour leur dire est-ce que vous êtes disponible pour aller chez Madame X ou Monsieur Y. Ils avaient accès en fait à la liste de toutes les missions à pourvoir sur cet extra net et se positionnaient sur les missions qui les intéressaient. Ce qui avait un double avantage, c'est qu'on était sur une logique de co-construction de planning. On savait que quand ils acceptaient une mission, c'est aussi que c'est une mission qui les intéressait. Et puis du coup, ça limitait aussi notre charge en termes de coordination, parce qu'on n'avait plus qu'à effectuer la mission aux intervenants. Donc il y avait ça. C'était aussi un extra net sur lequel ils allaient pouvoir rédiger leur compte rendu de façon automatique. Je ne voulais pas les faire passer à l'agence toutes les semaines, déposer leur feuille de papier, etc.

  • Pierre

    Non mais t'as raison, t'es génial !

  • Juliette

    On avait mis en place de l'AI formation, ils pouvaient emprunter des ouvrages, ils pouvaient emprunter des jeux. Tout ça était intégré dans cette extra nette et qui était vraiment le cœur de fonctionnement de l'entreprise de manière un peu native.

  • Pierre

    C'est quoi ta plus grande fierté dans tout ça, de cette expérience-là ? Parce que ce n'est que la première qu'on prenait.

  • Juliette

    Oui, il y a plein de... plein de moments forts et de choses dont on peut collectivement être fière dans cette entreprise, mais moi je pense qu'un des moments les plus émouvants que j'ai vécu c'est de voir une maman d'un jeune en situation de handicap arriver au bureau en pleurs et en me disant mais vous ne vous rendez pas compte, grâce à vous on va pouvoir aller avec mon mari au restaurant ça fait des années que ça ne nous est pas fait et je pense que au-delà de cette histoire il y avait une âme dans cette entreprise, c'était ça qui était très très chouette ... C'était une entreprise où on apportait des solutions qui étaient très concrètes et très tangibles. avec une façon de le faire, je crois, qui était très, très humaine.

  • Pierre

    Alors, il y a eu un petit bug dans la matrice où le truc s'est coupé, mais ce n'est pas grave. On continue et je reprends sur ma question qui était que j'avais fait mon boulot, j'avais regardé ce qu'on pouvait dire sur toi, notamment sur cette expérience-là. Et un journaliste notait une approche très humaniste de ton management, ce qui résonne avec ce que tu vas faire plus tard, d'ailleurs. Pourquoi est-ce qu'il a écrit ça, à ton avis ?

  • Juliette

    Je pense que c'est vraiment lié à cette âme dont je parlais dans l'entreprise. J'avais aussi quelque chose qui était très fort chez moi, c'était la volonté que la pérennité de l'entreprise ne repose pas sur mes seules épaules. Et donc, je pense que tous les collaborateurs se sont très rapidement sentis aussi... porteur de cette entreprise, de ses valeurs, de ce qui en faisait vraiment les spécificités. Donc je pense que c'est probablement lié aussi à ce qu'il a ressenti de cette aventure collective. On était dans un secteur qui non seulement était effectivement très humain, mais je pense que ce que j'ai adoré, ce que j'ai essayé de faire, c'est aussi de permettre aux collaborateurs qui m'ont rejoint dans cette aventure de la vivre et de grandir avec. Et ça, je pense que c'est effectivement quelque chose qui me tient très à cœur.

  • Pierre

    Pourquoi ? Alors, essaie de me donner la vraie raison. Pourquoi tu as finalement décidé de revendre cette entreprise ? Alors ça, c'est ma première question. Et deuxième question qui est immédiate, qui est, est-ce qu'on vend une entreprise à mission comme on vend n'importe quelle autre entreprise ?

  • Juliette

    Alors, je vais te donner la vraie raison pour laquelle j'ai vendu cette entreprise. Je ne comptais pas t'en donner une fausse. Tout simplement parce que j'avais fait le tour et que je considérais que je n'étais plus la bonne personne pour continuer à la développer. Je pense que... Je ne sais pas si on peut dire ça comme ça, mais je pense avoir une forme de lucidité sur ce que je peux apporter à un projet. Et en l'occurrence, là, c'était... Voilà, c'était plus moi, tout simplement, qui pouvait porter l'entreprise plus loin. Et je n'en avais plus l'envie profonde. Il fallait aussi que je fasse autre chose. J'y ai passé 11 ans dans cette entreprise, ce qui est quand même relativement long. J'ai commencé à ressentir un petit peu ce besoin d'autre chose, je pense, au bout de 7-8 ans. Et il se trouve que c'était aussi un moment où mes enfants étaient tout petits, donc je me suis laissé le temps aussi...

  • Pierre

    On se fait rattraper par la vie.

  • Juliette

    Exactement. Et puis, à un moment donné, je me suis dit, ok, maintenant, c'est le moment. Je pense qu'il faut passer la main et apporter aussi une énergie nouvelle, un regard nouveau sur cette entreprise.

  • Pierre

    Tu penses justement, ce n'est pas un jugement, mais qu'en fonction des profils entrepreneurs, tu as des profils qui font le zéro à un.

  • Juliette

    Et puis,

  • Pierre

    ceux qui font le 1 à 10, le 10 à 100, etc.

  • Juliette

    Oui, complètement. Moi, je ne suis pas du tout une gestionnaire. Moi, ce qui me plaît, c'est de monter des projets, c'est de les penser différemment, c'est de les optimiser au début. Mais une fois que ça roule et que c'est… C'est chiant,

  • Pierre

    d'accord. C'est plus beau. Il faut toujours des trucs nouveaux, un peu excitants.

  • Juliette

    Je ne sais pas si c'est chiant, mais effectivement, je pense que ça correspond à des personnalités différentes. Et… Et il faut être lucide sur ce qu'on aime faire, sur là où on est bon, là où on ne l'est pas. Et en l'occurrence, moi, j'ai adoré penser complètement différemment ce projet. Mais je pense que c'est un peu le fil rouge. Et du coup, je n'ai pas du tout terminé mon introduction, mais ce n'est pas grave. Ce n'est pas grave.

  • Pierre

    C'est une introduction d'une heure. La colle, c'est le principe. Et en fait, c'est un peu le fil rouge, je crois, de ma vie professionnelle. C'est ce que j'aime, c'est l'innovation dans des secteurs qui sont très variés. Et pas toujours une innovation ultra technologique. Au contraire, c'est souvent une innovation sociale ou sociétale que j'aime apporter. Et c'est un peu, on le verra plus tard probablement, c'est un peu le point commun entre AD à présent, cette première entreprise, et puis celle dont je suis aujourd'hui directrice générale, et puis mon expérience aussi. Absolument. Puis on va voir que la techno, quand même, a une part de responsabilité dans tout ça aussi. Mais faisons un petit retour en arrière. Qu'est-ce qui explique qu'à 17 ans, on va pas remonter trop loin, t'as décidé d'aller vers Sciences Po ? Pourquoi à ce moment-là de ta vie, tu t'es dit, tiens, c'est un chemin intéressant pour moi ?

  • Juliette

    Alors, à vrai dire, je ne me suis jamais posé la question. C'est-à-dire que ça s'est imposé comme une évidence pour moi.

  • Pierre

    Ok. Mais il y avait des exemples dans ta famille ? Non,

  • Juliette

    pas du tout. Non, absolument pas. Mais pour moi, Sciences Po, c'était vraiment l'endroit où j'allais pouvoir me nourrir, où il y avait ce regard très pluridisciplinaire sur plein de sujets. Et je t'avoue qu'à aucun moment, je n'ai fait un tableau des plus et des moins. Tu n'as pas eu de doute ? Pas une seconde. J'ai eu mon bac, j'ai préparé le concours de Sciences Po, je suis rentrée à Sciences Po direct. Je ne me suis même pas posé la question.

  • Pierre

    Alors, ceci nous amène à la... deuxième partie de ta vie mouvementée, qui est que à un moment, alors ça doit être après avoir vendu ta boîte, tu rentres en politique quelque part ?

  • Juliette

    Non, c'est avant la vente de mon entreprise.

  • Pierre

    Ah, il y a un truc concomitant alors.

  • Juliette

    Exactement. J'ai fait les deux en parallèle pendant 18 mois, ce qui était de la folie.

  • Pierre

    Comment ça s'est passé ? Raconte-nous tout ça. Madame la vice-présidente de la région en Alpes.

  • Juliette

    Auvergne, Ronald, tu vas te faire taper sur les doigts. Auvergne,

  • Pierre

    Ronald. Oh là là, OK.

  • Juliette

    Comment ça se passe ? Écoute, on est en septembre 2015. Je suis en train de faire faire du toboggan à ma fille qui a un an dans le jardin. Et je reçois un coup de fil en me disant Laurent Wauquiez aimerait bien vous rencontrer. Moi, je dis Laurent qui ?

  • Pierre

    Laurent Wauquiez ?

  • Juliette

    Bon, je plaisante un petit peu, mais... C'est con,

  • Pierre

    t'aurais pu finir aux grosses têtes. Voilà, c'est ça.

  • Juliette

    Non, ça a bifurqué un petit peu à ce moment-là. Et donc, on m'explique qu'il veut se lancer dans la course aux élections régionales, qu'il cherche quelqu'un pour prendre la tête de la liste sur la métropole de Lyon et qu'il souhaiterait me rencontrer dans ce cadre-là. Et comme je suis curieuse...

  • Pierre

    Tu sais comment t'étais arrivé sur son radar ?

  • Juliette

    Oui, alors il se trouve que j'avais été invitée à petit déjeuner à l'Elysée dans le cadre de la journée des droits des femmes. Un peu de temps avant que j'avais eu un trophée national de la tribune, la Women's Award, et puis que j'avais eu aussi un trophée de la CPME pour aller à présent. Donc je pense qu'il y avait eu à la fois la conjonction un peu de tout ça, et puis peut-être, comme j'étais un petit peu dans les milieux entrepreneuriaux, mon nom qui était peut-être ressorti deux ou trois fois. Et donc, comme je suis curieuse, effectivement, je vais prendre un café avec lui. Il m'explique quel est son projet. Et je dis merci beaucoup. Mais en fait, moi, ça ne fait pas du tout partie.

  • Pierre

    Merci, monsieur. Au revoir, monsieur.

  • Juliette

    Oui, c'est ça. Merci, monsieur. C'est tellement éloigné de mon quotidien, de mes préoccupations du moment, que ce n'est pas du tout... OK. Donc, je lui dis que...

  • Pierre

    Oui, puis c'est out of the blue. Tu n'y avais jamais pensé plus que ça. Donc, voilà.

  • Juliette

    C'est ça, c'est ça. Et il me demande d'y réfléchir quand même. Et je dis, bon, écoutez, je vais prendre un petit moment, je vais y réfléchir. Et puis, je rentre à la maison et je me dis, c'est... Voilà, c'est vrai que c'est un peu paradoxal. J'ai fait Sciences Po, je suis fière d'entreprise. Et pour autant, je me sens très éloignée du monde politique. Je trouve que le personnel politique... n'incarne pas du tout. On est avant l'arrivée quand même de Macron, avant une certaine forme de renouvellement aussi, notamment à l'Assemblée. Et à l'époque, moi, je me dis, je ne vois pas de jeunes, je ne vois pas de chefs d'entreprise, je ne vois pas beaucoup de femmes. Et quelque part, je dis, si je dis non, je ne pourrai plus jamais râler. Je ne pourrai plus jamais me plaindre parce qu'à un moment donné, on me donne aussi l'opportunité d'amener... d'amener ma petite pierre à l'édifice et d'amener aussi une image un peu différente de ce que peut être un élu. Mais à ce moment-là, j'accepte de prendre la tête de la liste aussi parce que je trouve ça passionnant de voir comment se déroule. Exactement, de voir les coulisses, je me dis que c'est une expérience qui est quand même assez géniale.

  • Pierre

    T'es diplômée de Sciences Po, dans Sciences Po, il y a pas de politique quand même.

  • Juliette

    Oui, c'est ça. Donc, l'expérience est géniale. Et puis, ça permet effectivement de voir comment ça se passe. Puis alors, je lui dis, par contre, moi, la prise de parole en public, ce n'est pas du tout mon truc. Il me dit, oui, ne t'inquiète pas, ne t'inquiète pas. Bon, premier meeting de campagne, salle 3000. Donc, ça s'appelle une salle 3000 parce qu'il y a 3000 places. OK. Et bien, Bibi sur scène. Voilà, donc, baptême. Bonjour.

  • Pierre

    Bonjour.

  • Juliette

    Exactement. Et... Et puis donc la campagne se passe.

  • Pierre

    A été dure la campagne ? Parce que honnêtement dans toutes les campagnes il y a des coups bas.

  • Juliette

    Oui mais elle n'a pas été dure pour moi dans le sens où on avait une figure politique qui prenait quand même... C'est elle qui prenait tous les coups. Oui qui prenait tous les coups. Donc moi ma campagne ça a été plus une campagne vraiment de terrain. Donc c'était une campagne politique mais pas au sens... il n'y avait pas eu cette violence là à ce moment là. Et donc, à ce moment-là, quand j'accepte la campagne, je mets quand même des conditions. Je me dis, moi, je ne suis pas encartée, je ne le serai jamais. Et puis, si je m'engage, il y a un moment donné, c'est quand même aussi pour pouvoir faire des choses. Mais à ce moment-là, je prends la tête de l'aise sur la métropole, mais je me dis, si on gagne, je serai conseillère régionale. Je n'envisage à aucun moment autre chose. Et là arrive le mois de décembre et on gagne les élections régionales.

  • Pierre

    Alors, vous ne la voyez pas, mais elle a l'air surprise d'avoir gagné. C'était une surprise vraiment ou non ? Tu jouais pour la gagne, de toute façon.

  • Juliette

    Oui, de toute façon, on y va pour la gagne, mais en même temps, le résultat, il est toujours jusqu'au dernier moment. Tant que tu n'as pas gagné, tu n'as pas gagné. Et donc, on gagne les élections. Et Laurent Wauquiez me rappelle quelques jours plus tard en me disant, qu'est-ce qui t'intéresse comme sujet ? Et je lui dis, écoute, il y a un projet dont on a parlé pendant la campagne que je trouve passionnant et que j'aimerais vraiment avoir l'occasion de suivre. C'est le projet de campus numérique. qui est à ce moment-là un projet qui est une idée.

  • Pierre

    Rien de concret pour l'instant.

  • Juliette

    Exactement. Mais je dis ça en disant j'aimerais être tenue informée. Et il revient vers moi un ou deux jours plus tard en me disant écoute, j'ai deux propositions à te faire. Soit tu es conseillère déléguée au campus. Soit tu es vice-présidente, déléguée à l'économie de proximité, au commerce, à l'artisanat, aux professions libérales, à l'ESS et au numérique.

  • Pierre

    Oh, oh, oh, ça en fait des trucs !

  • Juliette

    Wow ! Wow ! Et donc, à ce moment-là, j'appelle des amis qui sont un peu plus dans cet univers que moi. Ils me disent « Ben voilà, il se passe ça, qu'est-ce que vous en pensez ? » Là, ils me disent « Ben en fait, c'est simple, soit t'es conseillère déléguée, t'as ta carte de visite, mais... » Pas plus de pouvoir que ça.

  • Pierre

    Ton plan d'action est plus réduit.

  • Juliette

    C'est ça. Et si tu es vice-président, tu fais partie de l'exécutif, tu as un budget, tu as des services. Ce n'est pas du tout la même histoire. Après, tu dis à un chef d'entreprise, tu veux plutôt être...

  • Pierre

    Oui, c'est vrai.

  • Juliette

    ...peau de fleur ou tu veux plutôt pouvoir faire bouger les choses ? Là, je dis OK. Je dis OK,

  • Pierre

    mais sachant que tu es encore dégé de ta boîte.

  • Juliette

    Oui.

  • Pierre

    T'as dû faire des semaines de fou furieux.

  • Juliette

    Ouais, donc je suis dirigeante d'une entreprise d'une cinquantaine de personnes. Et accessoirement, j'ai deux enfants, dont ma fille qui a un an et mon grand qui en a quatre. Oh là là.

  • Pierre

    Ouais, 24 heures, c'est pas beaucoup finalement.

  • Juliette

    Non, c'est pas beaucoup, je confirme. Et c'est surtout quand t'arrêtes que tu te dis que c'était un rythme de fou. C'était un rythme de fou.

  • Pierre

    Mais parce qu'à cette époque-là, t'as 34 ans. Donc, tu t'apprêtes à diriger la politique numérique d'une région à 8 millions d'habitants ? Un truc comme ça ?

  • Juliette

    C'est ça.

  • Pierre

    Syndrome de l'imposteur ou pas du tout ?

  • Juliette

    Oh, punaise, oui, t'arrives. En plus, c'est un secteur qui n'est pas mon secteur de compétence, entre guillemets. Je rappelle, je viens quand même d'une entreprise d'aide à domicile. Alors, même si le numérique a toujours été quelque chose qui m'a passionnée et qui a été un vrai levier de croissance dans mon entreprise, Je ne suis pas une technicienne du numérique. Et donc, je me souviens très bien du premier discours que je dois faire. Donc, j'ai été nommée le 4 janvier 2016. Et le 10 janvier 2016, je dois faire un discours devant le CIEL, qui est le syndicat d'initiative qui déploie la fibre dans la Loire. Et dans le trajet entre Lyon et Saint-Etienne, j'ai ma directrice de service qui m'explique ce qu'est une délégation à faire mot concessif, tous les termes techniques avec le déploiement de la fibre, etc. Donc, je suis là. J'ingurgite tout ça et je me retrouve, et ça a été la première et la seule fois de tout mon mandat où j'ai lu un discours que je n'ai pas écrit. En croisant les doigts et en me disant, pourvu qu'il ne m'ait pas mis des pots de bananes.

  • Pierre

    Et qu'on ne me pose pas trop de questions.

  • Juliette

    Et pourvu que je ne sois pas en train de raconter n'importe quoi. Je fais mon discours, pas super sereine quand même. Je retourne m'asseoir et je me dis c'est la dernière fois. Et je rentre à la région, je convoque tout le monde et je dis là maintenant, vous sortez tous les dossiers, vous m'expliquez tout. Il faut que j'apprenne, il faut que je comprenne. Et donc tu passes en phase d'apprentissage accélérée. D'autant plus que, ce que je disais tout à l'heure, en fait j'ai une double délégation, c'est-à-dire que je m'occupe aussi bien Mes interlocuteurs, à ce moment-là, sont aussi bien les syndicats de profession libérale qu'Orange ou SFR, si tu veux. Donc, c'est un peu le grand échange. On est dans un contexte, en plus, de fusion des deux régions. Donc, Auvergne d'un côté, Ronald de l'autre. Donc, en fait, il y a tout à mettre à plat, tout à harmoniser. Il y a les équipes à reconstituer. Le numérique est une délégation qui n'existe pas en tant que telle à l'époque. Donc, wow ! Et puis, tu découvres, en fait, tu arrives... Moi, je dis souvent que c'est une expérience anthropologique, parce que tu passes d'une PME de 50 personnes à une institution de 9000 agents avec une double chaîne de commandement, à la fois public, privé... Enfin, pardon, administratif et politique. Et tu passes du privé au public avec des fonctionnements qui sont très différents.

  • Pierre

    Et tu as une puissance de feu qui est sans commune mesure par rapport à ce que tu as pu connaître. C'est-à-dire qu'il y a du budget. Ça veut dire que tu es en capacité d'engager...

  • Juliette

    Chef de file en matière économique. Depuis la loi NOTRe, c'est vraiment la collectivité qui a été positionnée comme pivot sur ces questions-là. Donc, tu te retrouves effectivement avec des moyens, avec... La nécessité aussi de poser des stratégies, des ambitions. Donc ça, c'est ce que j'essaye d'apporter aussi, et ce qui à la fois moi me structure et structure les équipes, c'est que dès le début, je dis on va rédiger une feuille de route. On va rédiger notre feuille de route stratégique pour poser un petit peu quels sont nos objectifs, quels sont les moyens qu'on va mobiliser. Donc on fait un état des lieux au niveau de la région aussi, de ce qui existe. Et là où c'est difficile, c'est que le numérique est une délégation. éminemment transverses. Donc, tu dois aller solliciter les autres délégations. Et parfois, avec tout ce que ça peut générer, tu vois, de frictions où tu viens un peu percuter aussi les précarés, où les uns et les autres pensaient être...

  • Pierre

    Il y a deux, trois baronies à aller secouer.

  • Juliette

    C'est ça, exactement. Donc ça aussi, c'est un exercice qui est...

  • Pierre

    Formateur ! ...

  • Juliette

    d'apprentissage. exactement et là tu te dis d'une part que tu as un enjeu de comprendre les codes sans en prendre les travers d'arriver à comprendre un petit peu ce qui se passe ce qui se joue quand on te dit ça ou ça ce qui se joue derrière et puis dire à un moment donné soit je je Soit je fais plier un peu le fonctionnement, soit c'est moi qui me fait...

  • Pierre

    Qui te fait plier.

  • Juliette

    Ouais, c'est ça.

  • Pierre

    Tu crois qu'il y a une incapacité structurelle des institutions à se réformer en profondeur ?

  • Juliette

    Non, parce que c'est une question de personnes. C'est toujours une question de personnes.

  • Pierre

    Ça se joue aux people.

  • Juliette

    Ouais.

  • Pierre

    J'adore, je pense que ça a dû être une expérience juste incroyable. Est-ce qu'à un moment donné, ton stylo a tremblé au moment de signer une décision ? Alors, dans le cadre de mon mandat ?

  • Juliette

    Oui. Non, je ne dirais pas ça comme ça, parce qu'on a la chance quand même, et ça, je voudrais vraiment le souligner, parce qu'on fait souvent un peu du fonctionnaire bashing, mais on a la chance dans ces collectivités d'avoir des agents qui sont d'une compétence et d'un dévouement qui est quand même hyper appréciable. Donc, je sais que j'ai autour de moi quand même des gens qui, et notamment moi dans ma délégation, des gens que j'ai choisis, etc., quand ils me font une proposition... ils l'ont quand même travaillé, etc. Mais par contre, oui, tu doutes forcément toujours de... Est-ce que j'ai, moi, bien pris en compte toutes les incidences ? Est-ce que je suis bien en train de me projeter, non pas uniquement sur les six mois qui viennent, mais sur les cinq, dix, trente ans ? Et puis, en même temps, tu as une forme de latitude, mais tu es quand même enfermée, malgré tout, dans un fonctionnement qui reste... qui reste un peu rigide pour plein de raisons, parce que tu as un code des marchés publics, parce que c'est ce que je te dis, c'est ce mélange en fait entre les contraintes liées à l'administration et les contraintes liées au fonctionnement politique aussi. Donc tu navigues dans cet espace de liberté que tu essayes progressivement aussi d'agrandir, mais en ayant toujours quand même, malgré tout, ces contraintes que tu dois prendre en compte.

  • Pierre

    Là encore, j'ai fait ce que je devais faire. Donc, je suis allé lire des articles sur toi sur cette période. Et tu as cette phrase, ouvrez les guillemets. Ce fut une parenthèse à la fois dure, violente, mais passionnante. Le côté passionnant, on l'a vu. Pourquoi c'était dur et violent ? Tu vois, c'est des mots particuliers là.

  • Juliette

    Oui, bien sûr, mais ils ne sont pas utilisés pour rien. C'est un monde de rapports de force. C'est un monde de rapports de force et la politique est un système très féodal. C'est-à-dire que quand tu es en politique, et ça je pense que quelque part ça a été ma chance aussi, c'est qu'avec le président on a toujours eu une relation interpersonnelle. C'est-à-dire qu'il est venu me chercher, que quand on devait échanger on le faisait très directement tous les deux. Mais la politique de manière générale est féodale dans le sens où tu acceptes d'échanger une protection contre ta liberté. Et je dis, moi, encore une fois, la chance que j'ai eue, c'est que j'étais chef d'entreprise et que j'avais aussi mon entreprise. J'avais potentiellement d'autres projets et surtout quelque chose de très important, c'est que j'avais toujours dit que je ne ferais qu'un seul mandat.

  • Pierre

    Ah, ok.

  • Juliette

    Et je pense que ça, pour le coup...

  • Pierre

    Pourquoi ?

  • Juliette

    Parce que j'avais conscience de ce que j'avais envie d'y laisser ou pas. Et quand je dis que c'est un univers qui est dur et violent, c'est vrai. Déjà, la région, en l'occurrence, toutes les régions sont plus ou moins grandes, mais la région au Verne-en-Alpes est très grande, donc tu te déplaces beaucoup. Tu as quand même des responsabilités qui sont importantes. Et puis, tu as ce que je disais, ce mode de fonctionnement qui est quand même très basé sur le rapport de force, sur une forme de baronnie, sur des territoires. Sur des... Donc, il faut aussi apprendre à faire avec tout ça. Donc, tu peux, pendant un certain temps, le faire. Moi, je n'avais pas forcément envie de faire plus qu'un mandat pour ces raisons-là. Mais encore une fois, je le redis parce que c'est important, ça a été passionnant. Ça m'a permis de faire des choses, de voir des personnes, de découvrir des sujets que je n'aurais pas eu l'opportunité sinon de découvrir ou de rencontrer. De ce point de vue-là, j'ai absolument... aucun regret. Mais il faut avoir conscience quand même de ce que ça implique en termes d'engagement personnel.

  • Pierre

    Oui, en termes de dévouement à la cause aussi, clairement. T'as hésité à remettre le couvert quand même ? Même si tu t'es dit, non, j'y vais qu'une fois ?

  • Juliette

    Non, non, j'ai jamais hésité. Comme pour si on se pose, tu vois, la question c'est pas posée pour moi. Je pense, objectivement, que j'aurais pu le faire si j'avais voulu. Mais c'est J'ai quand même eu la chance, et tu le soulignais tout à l'heure, d'être vice-présidente de la deuxième région de France à 34 ans.

  • Pierre

    Mais oui, c'est énorme ! Juliette, sur ton CV, je suis désolé, ça claque.

  • Juliette

    Et sur une délégation qui était entrepreneuriale, c'est-à-dire qui avait une feuille blanche au début et que j'ai eu la confiance du président pour mener cette tâche à bien, ce qui était ultra précieux. Et donc, je me suis dit, si je fais un deuxième mandat, est-ce que j'aurais des conditions aussi incroyables de mandat ? et j'en étais pas sûre et je pense que de la même façon j'étais arrivée au bout d'un cycle, moi je crois beaucoup à cette notion de cycle et j'avais envie profondément de retourner vers l'entrepreneuriat

  • Pierre

    Ce qui nous amène à la troisième partie de ton introduction qui est Huggy Oui, le recrutement circulaire. Exactement on va parler économie circulaire, recrutement circulaire, etc. Mais voilà Parle-nous un peu de la genèse de tout ça, comment c'est né, à quel moment aussi, est-ce que là aussi il y a eu une zone de recoupement entre ton poste de vice-présidente et finalement la mise en œuvre de ce nouveau projet ? Enfin voilà, raconte-nous un peu.

  • Juliette

    Non, donc en fait à la fin de mon mandat, je ne veux pas tout de suite retourner en première ligne. Je décide dans un premier temps d'accompagner un certain nombre de projets, donc à la fois des entreprises industrielles, des groupes d'enseignement supérieur, des start-up, plutôt sur des fonctions de conseil. Et c'est en fait dans ce contexte-là qu'au bout de quelques mois, je re-rencontre Baptiste Privé, qui est le fondateur de Guy et du mouvement du recrutement circulaire. Et dans un premier temps, j'aide Baptiste plutôt en lui... en lui faisant des connexions, en lui ouvrant un peu quelques...

  • Pierre

    L'aide à évangéliser un petit peu.

  • Juliette

    Exactement, exactement. Mais c'est vrai qu'au fur et à mesure des rencontres, des échanges, des réunions qu'on fait ensemble, je me dis j'adore ce projet, j'adore l'équipe et je m'implique de plus en plus dans Hugui. Et au bout de quelques mois, en fait, on convient avec Baptiste que je prenne la direction générale de l'entreprise à ses côtés. Donc, je m'implique de façon plus opérationnelle. Et en fait, peut-être pour dire quand même ce qu'est Huggy et ce que fait Huggy.

  • Pierre

    Oui, c'est ça. Il y a un sujet là et c'est super intéressant.

  • Juliette

    Il y a un vrai sujet et c'est, je pense, aussi pour ça que j'ai eu ce coup de cœur parce qu'on en revient sur l'idée un peu de l'innovation sociale ou sociétale. Huggy est une entreprise à mission qui est à l'origine du mouvement du recrutement circulaire. Et l'objectif, c'est... d'amener les entreprises à envisager complètement différemment la question du recrutement. Si tu veux, quand on veut être provocateur dans notre façon de présenter les choses et pour bien faire comprendre les enjeux qu'il y a derrière, on dit qu'aujourd'hui, on traite mieux les déchets qu'on ne traite les candidats puisqu'au moins les premiers, on les revalorise.

  • Pierre

    Oui, ce n'est pas faux. Alors, candidats non retenus.

  • Juliette

    Oui, les candidats l'ont retenu. Exactement. Et donc, si tu regardes aujourd'hui sur France Travail ou sur LinkedIn, tu as 1,2 millions d'offres qui sont ouvertes. Ça veut dire que tu vas avoir 1,2 millions de processus de recrutement qui vont être menés dans les prochains jours en silo, en parallèle, et où à chaque fois, chaque entreprise va faire la même chose, c'est-à-dire qu'elle va publier une offre, attendre les candidatures, trier les candidatures, faire des entretiens téléphoniques, faire des entretiens physiques. Et recommencer ça inlassablement. Et on sait que le recrutement, c'est un processus en entonnoir. C'est-à-dire que tu vas avoir un certain nombre de candidats au début. Et puis, au fur et à mesure du processus, tu vas affiner chez un certain nombre de candidats des aptitudes, des compétences, de savoir-être, etc. Tu fais ta shortlist. Et tu te retrouves chez...

  • Pierre

    Pardon ? Tu fais ta shortlist, tout ça,

  • Juliette

    tout ça. Tu fais ta shortlist, exactement. Et tu te retrouves à la fin, on va dire statistiquement, avec deux, trois bons candidats. Sauf que tu n'as qu'un post-op pour voir. Donc, il va falloir que tu choisisses. et parfois le choix va se jouer à rien du tout. Tu peux avoir un préavis qui est un peu plus court chez l'un que chez l'autre, un fit relationnel avec un recruteur qui est un peu meilleur qu'avec un candidat. Tu peux avoir une compétence spécifique qui est un peu mieux maîtrisée. Mais pour autant, les candidats qui ne sont pas retenus, ce ne sont pas des mauvais candidats. Ils sont arrivés en shortlist, tu as quand même préqualifié énormément de choses chez eux. Et puis, on sait très bien que le numéro 1, à un moment donné, chez l'un, peut être le numéro 2 chez l'autre. Et inversement, c'est vraiment aussi une question de... Oui,

  • Pierre

    puis si le numéro 1 sur ta liste dit non, tu prendras le numéro 2, ce qui prouve bien que le numéro 2 est complètement valable.

  • Juliette

    Exactement, exactement. Et donc l'idée c'est de dire, on va en fait basculer d'une logique qui est aujourd'hui très guerrière dans le secteur du recrutement. Quand tu réfléchis, on parle quand même de chasse de tête, on parle de guerre des talents, c'est quand même assez violent comme vocabulaire.

  • Pierre

    C'est pas faux, c'est pas faux.

  • Juliette

    Et dire, comment est-ce qu'on peut basculer d'une logique de compétition à ce qu'on appelle de la coopétition, c'est-à-dire de la collaboration entre concurrents. Et donc ça, on le fait à travers quoi ? On le fait à travers le fait de faire rentrer la bonne pratique de la recommandation au sein des entreprises. C'est-à-dire, vous avez vu un bon candidat, vous l'avez qualifié, il y a un certain nombre de compétences, d'aptitudes, de savoir-être.

  • Pierre

    Il faut screener intégralement.

  • Juliette

    Et donc ça, vous prenez une minute trente à la fin de votre processus de recrutement pour recommander. ce bon candidat que vous avez apprécié et que vous n'avez pas pu prendre et lui permet de ne pas rebondir de zéro dans une nouvelle recherche et au contraire de rebondir vers une autre entreprise qui a un besoin similaire au même moment sur le même territoire. Et par extension, donc à la demande des entreprises qui participent, on applique ça aussi à des stagiaires, à des alternants, à des personnes en fin de CDD. voire à des collaborateurs en CDI, par exemple, qui doivent rejoindre un conjoint dans une autre région et tu veux l'aider à trouver son prochain job, tu peux le recommander sur la plateforme. Pareil, tu as eu un super alternant pendant deux ans, tu veux l'aider à décrocher plus facilement son premier emploi, tu peux le recommander sur la plateforme. Et l'idée, en fait, c'est que l'entreprise, à un instant T, elle fait cet acte qui est vertueux, qui est bienveillant. Mais comme on est dans une logique de circularité, quand elle adhère au mouvement, elle peut aussi bénéficier des recommandations de ses pairs pour diminuer sensiblement ses temps de sourcing et ses coûts de recrutement.

  • Pierre

    Vous êtes arrivée à le valoriser, à le mesurer, la diminution du temps de recrutement ?

  • Juliette

    Oui, alors le mouvement est jeune puisqu'il ne date que de septembre 2023. Mais sur les chiffres qu'on a pour l'instant, si on prend par exemple les profils cadres, La dernière étude de l'APEC dit qu'aujourd'hui, sur un profil cadre, le délai moyen d'un recrutement, c'est entre 12 et 15 semaines. Quand tu es dans la logique du recrutement circulaire, tu es sur 5.

  • Pierre

    Ah ouais ? Ok, donc divisé par 3. Oui,

  • Juliette

    entre 2 et 3. Ce qui est logique quand tu réfléchis, puisque tu bénéficies d'un travail qui a déjà été fait.

  • Pierre

    Complètement. Le process est, je ne veux pas dire complètement bouclé, mais tu élimines énormément de choses dans le process. Donc ça, c'est intéressant. Tu l'évoquais dans ta présentation, c'est que il y a le côté compétition. Alors j'entends. Comment on t'arrive à convaincre, je ne sais pas, Bouygues ? que ces candidats malheureux peuvent bénéficier à Vinci.

  • Juliette

    C'est une très bonne question. En fait, Bouygues ne recommandera jamais directement à Vinci ou Coca ne recommandera jamais directement à Pepsi. Par contre, ils vont recommander un candidat pour l'aider. Et on va dire à une entreprise, en fait, si vous ne le prenez pas, vous n'allez pas non plus l'empêcher de trouver un nouveau job. Non,

  • Pierre

    oui. Donc,

  • Juliette

    il n'y a pas que faire. En fait, le candidat, s'il est bon, il va trouver. Sauf que si vous faites cette recommandation, vous allez l'aider à trouver plus rapidement. Et donc, potentiellement, vous allez améliorer votre marque employeur. C'est un candidat qui va parler positivement de vous. Et en plus, on s'est rendu compte de quelque chose. C'est que les recruteurs nous disent que c'est beaucoup plus facile de dire non quand ils sont inscrits dans cette logique de recrutement circulaire. Parce que quand tu as fait venir un candidat trois fois, cinq fois, huit fois en entretien, qu'il est en shortlist et que tu dois l'appeler pour lui dire « je suis désolée, ce ne sera pas vous » , c'est beaucoup plus facile de lui dire « je suis désolée, on ne va pas vous prendre, mais par contre, on va faire quelque chose de bien pour vous, on va vous recommander » .

  • Pierre

    Aujourd'hui, tu disais que c'était septembre 2023, c'est ça ?

  • Juliette

    Oui.

  • Pierre

    Justement, c'est quoi ? Quoi le feedback que vous avez ? Est-ce la hype qu'il peut y avoir autour de ça ?

  • Juliette

    En fait, depuis septembre 2023, on a plus de 1400 entreprises et employeurs publics qui contribuent en recommandant des profils sur la plateforme. Ça va de toutes petites entreprises jusqu'à des Bouygues, des Décathlon, des Siemens, la Caisse des dépôts et consignations, Van Cleef & Arpel.

  • Pierre

    Des gros employés. Oui,

  • Juliette

    des très très gros. Donc en fait, c'est très varié à la fois en termes d'entreprises qui peuvent recommander, c'est aussi très varié en termes de profils qui sont recommandés sur la plateforme parce que ça va aussi bien sur un jeune qui vient de terminer son alternance. comme un membre de COMEX et un opérateur dans l'industrie, comme un DAF ou un DRH. Oui,

  • Pierre

    et autant des fonctions support que des fonctions techniques, toutes fonctions confondues. Oui,

  • Juliette

    parce que le mouvement a vraiment une visée universelle. En fait, ce que je disais, on est entreprise à mission. Vraiment, notre mission, c'est de contribuer à fluidifier le marché de l'emploi. Et on aura vraiment réussi dans ce sens-là, quand on aura... La recommandation est très... culturelle sur des profils, comme je disais, sur des membres de COMEX ou sur des fonctions support.

  • Pierre

    Ça se fait par cooptation, souvent, d'ailleurs.

  • Juliette

    Oui, complètement. Et quand on aura autant de recommandations dans l'industrie, on considérera qu'on aura vraiment réussi notre challenge.

  • Pierre

    Le client qui était le plus dur à convaincre ?

  • Juliette

    C'est une bonne question.

  • Pierre

    Sur les 1400 ?

  • Juliette

    Alors, on n'a pas 1 400 clients. Les 1 400, c'est vraiment ceux qui contribuent. Donc, on peut recommander sans être adhérent du mouvement. Après, ceux qui sont adhérents, c'est vraiment ceux qui souhaitent bénéficier de cette boucle vertueuse pour pouvoir…

  • Pierre

    Eux, ils peuvent piocher…

  • Juliette

    Exactement, communiquer sur leur marque employeur, avoir des attestations RSE. En fait, le recrutement circulaire a été reconnu comme une externalité positive du recrutement et c'est donc contributif à toutes les obligations extra-financières. Donc, tu sais, tout ce qui est CSRD, etc.

  • Pierre

    Ouais, ok.

  • Juliette

    Donc, tous les adhérents du mouvement bénéficient en fait de tous ces...

  • Pierre

    C'est un sacré avantage pour vous, ça.

  • Juliette

    Oui, complètement. Et on a des grandes entreprises qui sont venues aussi vers nous parce qu'elles souhaitaient pouvoir indiquer qu'elles étaient engagées dans le mouvement du recrutement circulaire dans leur réponse aux appels d'offres.

  • Pierre

    Alors, pourquoi est-ce qu'on n'en entend pas plus parler ?

  • Juliette

    Parce que tu lis pas assez la presse ? Ah c'est peut-être ça !

  • Pierre

    Non mais vraiment tu vois, c'est en en discutant avec toi, etc. Et en fait, il y a un moment, en t'écoutant, je me suis dit mais c'est juste génial comme truc. Et je suis désolé, oui, peut-être que je lis pas assez la presse. Je regarde trop TikTok, c'est une certitude. Mais tu vois, par exemple sur TikTok, on n'en parle pas. en tout cas pas pour l'instant et je me dis que là il y a un vrai truc il y a une vraie matière parce que je sais pas vous qui nous écoutez mais voilà les process de recrutement ils peuvent quand même être longs, pénibles etc. on gagne pas à tous les coups si on a des portes de sortie positives c'est quand même super bien il y a un effet vertueux y compris pour les entreprises, c'est ce que tu évoquais enfin voilà je vois pas pourquoi tout Toutes les entreprises ne se mettent pas sur ces logiques-là.

  • Juliette

    Oui, tu as raison. Alors, il y a plusieurs explications. Donc, effectivement, je disais, en plaisantant par rapport à la presse, on a eu la chance d'avoir beaucoup d'articles dans Le Monde, Les Echos, la Harvard Business Review, etc. Mais encore une fois, le mouvement est très, très jeune. Donc, ça ne fait même pas un an et demi. Il y a toujours une inertie sur des innovations. Ça prend toujours un petit peu de temps aussi. Ce qu'on essaie de faire, nous, vraiment, c'est d'identifier les pionniers, les visionnaires, ceux qui sont capables de comprendre, de percevoir tout de suite à quel point le monde du recrutement est en train de changer et à quel point cette approche régénérative peut être intéressante, donc à la fois pour le candidat et pour les entreprises elles-mêmes. Mais quand tu me demandais quel est le client qui a été le plus difficile à convaincre, je pense que ce qui est le plus difficile pour nous, ce sont les habitudes en fait c'est la force de l'habitude et aujourd'hui tout notre travail quelque part c'est de faire comprendre de faire de la pédagogie pour expliquer exactement ce qu'est ce mouvement là et on a même des personnes qui nous disent c'est trop beau pour être vrai en fait qu'est-ce qui se cache derrière où est le loup et en fait c'est On passe beaucoup de temps à expliquer ce qu'est le mouvement, à expliquer à quel point ça peut être vertueux à différents niveaux. Donc, moi, je te suis. Je pense que toutes les entreprises devraient passer au recrutement circulaire parce que c'est quelque chose... Tu vois, on parle énormément d'économie circulaire de manière générale. On parle de recyclage, de revalorisation. En fait, on a juste oublié qu'on appliquait ça aux choses, mais qu'on ne l'applique pas aux humains.

  • Pierre

    Non, mais moi, je suis hyper convaincu, en fait. Mais justement, tiens... On va dire qu'il y a plusieurs centaines de dirigeants d'entreprise qui écoutent la colle. Ils ont envie d'y passer. C'est quoi ? Comment ils font ? C'est quoi le process ? Ils contactent Huggy ? Ils font quoi ?

  • Juliette

    On fait quoi ? C'est hyper simple. Ils peuvent me mettre un petit mot sur LinkedIn. Ils peuvent nous contacter sur le site internet de Huggy ou du recrutement circulaire. On en fait toujours un petit temps d'échange pour expliquer exactement comment ça se passe, pour présenter la plateforme aussi derrière. Et puis, quand une entreprise est adhérente du mouvement, on a toujours ce qu'on appelle un onboarding, en bon français. Donc, un temps vraiment d'accueil avec la personne qui sera leur interlocutrice dédiée dans l'entreprise. Donc, toute entreprise qui est adhérente, tout employeur qui est adhérent à, chez Eugie, il y a un... Un interlocuteur qui lui est dédié et qui va l'accompagner dans la prise en main de la plateforme, dans la mise en place de ses offres d'emploi, dans sa stratégie de marque employeur. Et puis après, c'est très simple. La plateforme est hyper intuitive. Les premières recommandations peuvent se faire très facilement. Je dis ça prend moins de deux minutes de faire une recommandation. Et on a plein d'exemples où ça a changé les vies. Une recommandation... permis à quelqu'un de...

  • Pierre

    De créer des opportunités.

  • Juliette

    De créer des opportunités. En fait, une recommandation amène un relief à un profil qui est sans commune mesure avec un CV qui est une page à quatre à plat.

  • Pierre

    Tu es vesté, comme on dit en bon français là aussi. Non, non, mais ça donne effectivement un relief. J'aime bien ce terme. Toi qui es... Alors, chez Huggy, je pense, mais aussi de manière plus générale, sur le recrutement et dans les RH. On parlait de monde qui change, patins, couffins, etc. Il y a la tarte à la crème de l'IA et donc du tsunami qui arrive. Un, comment vous, vous l'avez intégré ? Comment vous allez surfer sur cette vague ? Et derrière, plus généralement, comment tu vois ça dans les DRH ?

  • Juliette

    Oui, alors l'IA, évidemment, c'est un sujet que j'ai beaucoup suivi depuis très longtemps. Je suis... Comment te dire ? Je considère... Pour nous, notre travail, c'est de réhumaniser le recrutement. Justement, l'IA peut apporter effectivement énormément de choses, mais pour nous, ça doit être complètement transparent. C'est-à-dire qu'on a une grande partie de ce qu'on appelle les matchs, c'est-à-dire les mises en relation qui sont... algorithmé ou automatique, dans le sens où quelqu'un qui est commercial, qui cherche un job de commercial face à une offre de commercial, on n'a pas besoin d'intervenir, si tu veux. Là, la connexion va se faire automatiquement. Par contre, on considère qu'une grosse partie de notre travail chez Eugie, c'est de faire les choses non seulement à la main, mais surtout à l'humain. C'est-à-dire qu'il y a toute une partie des matchs, ce qu'on appelle nous des matchs atypiques. qui se font parce qu'il faut avoir une détection assez fine des valeurs, des envies, des souhaits de reconversion, des choses comme ça. Et tout ça, ça reste quand même l'humain qui peut l'apporter. Donc je pense qu'il y a énormément de choses qu'on peut mettre en place grâce au numérique de manière générale et à l'IA, mais qu'on doit toujours s'en servir comme d'un outil. Nous, par exemple, ça nous fait gagner beaucoup de temps sur des comptes rendus, sur la génération de comptes rendus, de réunions ou de choses comme ça. Donc, évidemment que ces outils, on les intègre, qui font partie prenante du fonctionnement de l'entreprise. Mais pour autant, dans ce qui reste notre cœur d'activité, c'est-à-dire des connexions, des mises en relation, tout ce qui fait quand même le sel de la vie, tout ce qui fait la densité, tout ça. On aime quand même penser qu'il y a une bonne partie qui reste de l'humain et ça, ça ne doit pas changer. Donc, on a un rapport assez équilibré à ce qui est en train de se passer.

  • Pierre

    Après, ça m'amène sur un sujet qui est vrai pour les humains comme pour les machines. Après, je ne sais pas, il peut y avoir un vrai débat, mais c'est sur les biais qu'on peut avoir. Comment, justement, dans l'algorithmie que vous avez pu mettre en place, comment vous arrivez à ne pas finalement reproduire des biais que pourraient avoir les humains, ne serait-ce que sur les problématiques de genre, etc. C'est aussi bête que ça.

  • Juliette

    Oui, complètement. Alors ça, j'allais dire, c'est presque un sujet philosophique. Et c'est quelque chose qui est en réflexion permanente chez nous, c'est-à-dire qu'il n'y a pas à ce stade une réponse unique là-dessus. On travaille beaucoup avec nos développeurs sur la façon dont on peut intégrer ça, dont on peut éviter de tomber dans des pièges, dont on peut être le plus fin possible. Est-ce qu'en fait, toute la difficulté, elle se trouve là-dedans ? C'est comment est-ce que tu normalises, standardises, fais rentrer dans des cases ? quelque chose qui est de l'ordre de la finesse. Et je pense que c'est toute la réflexion, en fait, philosophique presque qu'il y a derrière. Et si tu veux, je vais te donner un exemple qui est assez parlant. On travaille beaucoup avec les banques qui cherchent des chargés de relations clientèles. Tu prends la fiche de poste, la fiche de poste, c'est exactement la même, chargé de relations clientèles d'une banque à l'autre. Sauf qu'il y a une banque, tu arrives, tu sors de l'ascenseur. tu as des écrans qui clignotent de partout en disant encore 50 appels avant d'être le meilleur vendeur du mois, les objectifs, etc. Tu sors de l'ascenseur dans l'autre banque, le seul objectif de l'année, c'est d'avoir contacté tous tes clients au moins une fois. Si tu veux, ça, dans la fiche de poste, ça ne transparaît pas forcément. Et ça, dans une IA, c'est quelque chose qui est assez difficile quand même à retranscrire. Et donc, tout l'intérêt, c'est comment est-ce que tu peux arriver à, sur des... des choses, oui, encore une fois, qui relèvent de la finesse, qui relèvent des valeurs, qui relèvent de quelque chose de très humain, finalement, de l'environnement de travail. Comment est-ce que tu vas arriver à rendre compte de ça d'une façon normée, tu vois ? Donc, c'est un petit peu tous les enjeux qu'il y a derrière sur la structuration de la donnée, sur comment est-ce que tu fais en sorte que ta donnée, elle reproduise le plus fidèlement possible toutes ces nuances-là. de la vie, tout simplement, de la vie, de la personnalité. C'est un sujet qui est passionnant.

  • Pierre

    Oui, complexe, complexe. Complexe. Passionnant. Je me faisais la réflexion en t'écoutant, si jamais on a des candidats qui nous écoutent, parce que... De ce que j'ai compris là, finalement, tu rentres dans la logique de Huggy et du recrutement circulaire que si tu es déjà finalement dans des process de recrutement. À un moment, il y a un point d'entrée. Je vais changer de boulot. Je viens de voir. Je pose mon CV chez toi.

  • Juliette

    Alors, en fait, tu as deux possibilités d'être sur la plateforme. Soit tu es recommandé. par quelqu'un, donc ça peut être effectivement à la fin d'un processus de recrutement. Tu peux être recommandé par le recruteur. Voilà, tu n'es pas pris, mais il dit, je vais jamais te donner un coup de pouce. Tu peux être recommandé par le recruteur sur la plateforme. Soit tu peux te préinscrire sur Eguy et demander une recommandation à postériori. Et à ce moment-là, ton profil n'est actif que quand tu as ta première recommandation.

  • Pierre

    D'accord, ok.

  • Juliette

    En fait, ce qui est intéressant dans le modèle, c'est qu'il y a énormément de profils hors marché. qui sont sur la plateforme, parce qu'en fait, ça n'est ni un job board, ni une CV tech. Un candidat n'est visible d'une entreprise qu'à partir du moment où il a accepté un match avec cette entreprise. Donc en fait, c'est vraiment cette logique de match, mais on aime bien dire en plaisantant qu'on a un peu le Tinder ou le mythique de l'emploi. C'est vraiment qu'il faut qu'il y ait rencontre entre candidats et entreprises pour que le candidat soit visible. Et donc, ça nous permet, sur des secteurs pénuriques, d'avoir pas mal de candidats qui en ont marre d'être démarchés, qui n'ont plus envie d'être sollicités, qui veulent reprendre... qui veulent reprendre la main sur leur recherche d'emploi et n'être mis en contact qu'avec des entreprises, des opportunités qui les intéressent.

  • Pierre

    Et oui, parce que pour certains jobs, effectivement, ils se font chasser trois fois par jour.

  • Juliette

    Exactement.

  • Pierre

    Beaucoup sur des profils très techniques d'ailleurs. Ok, c'est quoi le principal obstacle au développement de Guy ?

  • Juliette

    La durée des journées ? Non, après, ce que je te disais, c'est vraiment de faire ce travail-là qui est inhérent à toute innovation. Tu as toujours un temps un peu d'inertie pour aller expliquer, pour faire comprendre, pour faire bouger un petit peu les lignes. Donc, c'est principalement ça pour l'instant. Après, nous, on n'a quasiment que des demandes entrantes pour l'instant. Donc, c'est plutôt...

  • Pierre

    C'est génial, attends ! Franchement, c'est tout... C'est confort !

  • Juliette

    Et puis, ce qui est très chouette aussi, c'est qu'on a beaucoup d'adhérents qui sont des vrais ambassadeurs du mouvement, qui communiquent dessus sur leurs réseaux sociaux, qui mettent dans leurs offres d'emploi, qui sont engagés dans le mouvement du recrutement circulaire. Donc, en fait, c'est quelque chose qui est un peu incrémental, qui va au fur et à mesure...

  • Pierre

    Oui, et puis tu... Tu les places dans un cercle vertueux, donc c'est au-delà de plein de bénéfices qu'il peut y avoir. C'est pas mal du tout. Mais toi, Juliette, dans tout ça ? on se reparle dans dix ans tu y es toujours ou pas ? Je ne peux pas te dire parce que j'ai toujours fonctionné aux opportunités, aux rencontres, en disant pour moi c'est un horizon qui est super...

  • Juliette

    Spécialement très très loin.

  • Pierre

    Qui est super lointain, exactement. Donc je ne sais pas, mais aujourd'hui mon quotidien c'est ça, et en tout cas pour les prochaines années c'est ça. On a quand même des objectifs assez ambitieux de croissance et de développement au niveau de Guy. On en est au... au tout début, même s'il y a des signaux qui sont très agréables et très positifs. Mais...

  • Juliette

    Tu t'éclates.

  • Pierre

    Oui, complètement. Et puis, on a une équipe qui est vraiment géniale. Ça a du sens. Moi, c'est vraiment ce que je cherchais. C'est-à-dire que quand j'ai quitté la région, dans mes réflexions sur ce qui était un peu mes moteurs, pour mon prochain projet entrepreneurial, Je voulais qu'il y ait trois choses. Je voulais qu'il y ait une équipe avec laquelle ça se passe bien. C'est toujours pareil, les hommes et les femmes, c'est ce qui est vraiment les projets. Je voulais qu'il y ait du sens. Et ça, pareil, ça a toujours été le fil rouge de l'introduction.

  • Juliette

    Oui, c'est le fil rouge de cette introduction. C'est qu'il y a du sens à tous les étages, franchement.

  • Pierre

    Oui, je crois, oui. Et puis, le troisième point, c'est que je voulais vraiment un impact, c'est-à-dire un projet ambitieux qui soit un facteur de transformation. J'aime bien cette idée qu'on peut être un facteur de transformation du monde, enfin au moins du monde autour de soi.

  • Juliette

    Oui, c'est beau. C'est quoi la question que j'aurais dû te poser et que je n'ai pas posée jusqu'à maintenant ?

  • Pierre

    C'est une conversation qui peut être très très longue. On a plein de questions.

  • Juliette

    Tiens, si j'en ai une. Pourquoi Huggy s'appelle Huggy ?

  • Pierre

    Alors, il y a deux raisons. La première, c'est une question générationnelle. Tu sais, c'est Huggy les bons tuyaux.

  • Juliette

    Oula, ouais. Cherchez loin, d'accord.

  • Pierre

    Ou plus ou moins, ça, c'est la deuxième, c'est la petite blague. Et la première, c'est cette notion, tu vois, du hug, de la bienveillance. C'est ça qu'il y avait derrière dans cette idée-là.

  • Juliette

    Ok.

  • Pierre

    Ouais, de la communauté, du partage.

  • Juliette

    Ok, super. Bon, en tout cas, vous l'avez compris, vous qui nous écoutez, je crois qu'il y a un vrai truc autour du recrutement circulaire. Enfin, moi, je me demande pourquoi ça n'avait pas été fait avant, d'ailleurs. T'as une idée toi ? Parce que, alors, je veux bien me faire le chantre de l'innovation, mais c'est une idée qui est frappée au coin du bon sens. Pourquoi personne l'a fait avant ?

  • Pierre

    Alors, bon, je... Il y a probablement plusieurs explications. Déjà, la première, c'est qu'on le fait tous un peu naturellement, individuellement. Quand tu as vu quelqu'un de super, un bon candidat que tu ne peux pas donner suite, tu vas avoir tendance à contacter ton réseau, etc. Là, l'idée, c'est de dire comment est-ce qu'on industrialise, comment est-ce qu'on passe à l'échelle. Ça se retrouve aussi un petit peu dans l'idée de cooptation. Sauf que la cooptation, c'est du N-A. 1 et là on est sur du N à N et puis je pense que il fallait que ce soit un projet qui parte de zéro, c'est à dire que je pense que tu ne pouvais pas forcément intégrer ça dans quelque chose déjà existant, il fallait vraiment commencer from scratch du début ok, ça me va et puis je pense qu'après on a capacité aujourd'hui maintenant avec justement ces outils de plus en plus performants à ... à pouvoir plateformiser assez rapidement des idées comme ça. Parce qu'encore une fois, l'idée est une chose, mais...

  • Juliette

    Ils en ont un.

  • Pierre

    C'est vraiment une exécution.

  • Juliette

    Tu m'étonnes. Avant de passer aux sept dernières questions, Juliette, j'ai fait passer ton profil dans Charge EPT. Et je lui ai demandé de me poser, de me trouver une question. Un peu tricky que je pourrais te poser. Donc, voici la question que te pose ChatGPT. Pourquoi avoir implanté Huggy à Vez plutôt qu'à la part d'yeux, symbole de la tech lyonnaise ? J'ai trouvé la question intéressante.

  • Pierre

    Alors, parce qu'à Vez, on a une magnifique vue sur la Saône qui coule et c'est extrêmement inspirant pour réfléchir.

  • Juliette

    Donc, c'est vraiment le contexte de l'écosystème naturel de Vez. Oui,

  • Pierre

    alors après, on a aussi la chance d'être hébergé chez Babola. Et chez Babola, on a un magnifique toit terrasse où on peut déjeuner dès qu'il fait beau. Ça a été un gros critère de choix.

  • Juliette

    Non, je me doute. Et puis, ce n'est peut-être pas les mêmes tarifs à Vez qu'au niveau de la part Dieu, non ? Pour les locaux, etc.

  • Pierre

    Oui, après, il y avait des questions aussi d'accessibilité en fonction de là où étaient les uns et les autres. Et Vez, pour le coup, était un bon compromis. Donc, c'est une réponse un peu plus triviale.

  • Juliette

    Le pari centre des collaborateurs.

  • Pierre

    Exactement. Et puis après, tu sais, les rencontres avec les membres de la tech. Moi, je pourrais te dire qu'un des gros écosystèmes de la tech aussi sur Lyon, c'est à confluence avec H7. Donc, tu retrouves plusieurs centres.

  • Juliette

    Non, mais ne m'engueule pas, c'est déjà du GPT là pour le coup. Tu lui apporteras. J'ai une question. Ça marche. Allez, Juliette, c'est parti. pour les sept dernières questions. Juliette, dis-nous quel est ton mot préféré ?

  • Pierre

    Pour sa sonorité, c'est l'ultra crépit d'arianisme.

  • Juliette

    Ouah ! Alors là, il faut une définition.

  • Pierre

    En fait, l'ultra-crépidarianisme, c'est le fait de vouloir donner son avis sur tout sans avoir aucune compétence.

  • Juliette

    Oh, j'en connais plein des comme ça.

  • Pierre

    Ben voilà, oui, oui. C'est une... Je l'aime pour la sonorité. Après, pour le sens, je pense qu'il y a bataille entre énergie et optimisme.

  • Juliette

    Ok. Ouais, c'est plus consensuel. Mais j'aime bien le premier. J'aime bien le premier. Je vais le retrouver. Je le mettrai dans les notes de l'épisode. Ce sera sympa. Quel est le mot que tu détestes ?

  • Pierre

    Je déteste le mot lâcheté. Je le trouve très moche.

  • Juliette

    Hum, ouais. J'essaie de faire un truc politiquement correct justement sur la lâcheté, mais j'y arrive pas. Mais des lâches, oui, il y en a pas mal. Alors je sais pas, c'est peut-être parce que je vieillis aussi, mais je trouve que des gens avec du courage, il y en a de moins en moins. Mais bon. C'est un avis très personnel qui n'engage que moi. Le son ou le bruit que tu aimes ?

  • Pierre

    Alors, j'ai eu la chance, plus jeune, de faire beaucoup de voiles avec mes parents. Et je t'avoue qu'il y a un son qui m'apaise particulièrement, c'est celui des vagues, tu vois, quand tu navigues, de l'eau qui...

  • Juliette

    Tu fends les vagues ?

  • Pierre

    Oui, qui est contre la coque du bateau. Et je trouve que c'est un son qui amène particulièrement à la contemplation ou à la réflexion. Je trouve que ça te permet de te reconnecter aussi sur ton rythme à toi. C'est un son que j'aime beaucoup. Et il y en a peut-être un deuxième aussi. Je dirais que c'est l'hiver de Vivaldi qui me transporte littéralement à chaque fois.

  • Juliette

    Ok,

  • Pierre

    d'accord. C'est le seul moment où j'aime l'hiver, c'est avec Vivaldi.

  • Juliette

    D'accord, classe. Le son ou le bruit que tu détestes ?

  • Pierre

    Les grincements de manière générale.

  • Juliette

    La craie sur un tableau ? Oui,

  • Pierre

    hyper sensible aux sons, aux odeurs, etc. Donc les grincements, ça peut vite m'agresser.

  • Juliette

    Le papier alu ?

  • Pierre

    Oui.

  • Juliette

    Bon d'accord, on est pareil. Alors, Madame Jarry, votre juron, gros mot ou blasphème favori ?

  • Pierre

    Un très classique putain.

  • Juliette

    Ouais. Il n'y en a pas un plus exotique ?

  • Pierre

    Il y a un bordel à cul de mon grand-père.

  • Juliette

    J'aime bien celui-là. Je prends celui de ton grand-père. La citation que tu aurais aimé avoir prononcée ?

  • Pierre

    Ne nous prenons pas au sérieux, il n'y aura aucun survivant. D'Alphonse Allais.

  • Juliette

    Oh, joli. Ça me fait penser à un truc, par ta position, alors par tes positions de directeur général, etc., par ta position de vice-présidente, t'as eu à maintes reprises l'occasion de prendre la parole. Déjà, alors tu l'as dit, au moins au début de ton expérience politique, c'est pas forcément un truc que t'aimais particulièrement. Est-ce que t'as appris à aimer cette expérience-là ?

  • Pierre

    Oui. En fait, j'ai commencé à aimer prendre la parole en public quand je me suis détachée du côté technique. Parce qu'au début, c'est ce que je t'expliquais tout à l'heure, il y a eu une phase d'apprentissage qui a quand même été assez intense. Et je me disais que je ne serais légitime que quand je maîtriserais parfaitement mes dossiers. Et donc, j'essayais d'être assez pointue, etc. Et quand j'ai réussi à me détacher de ça, c'est-à-dire d'atteindre un niveau de connaissance et de maîtrise suffisant, j'ai pu me détacher de ça pour vraiment basculer sur l'émotion, sur la vision, sur le fait d'embarquer aussi un auditoire avec toi. Et là, oui, j'ai commencé à prendre vraiment du plaisir. Et puis à partager aussi, tu vois, à jouer avec l'audience. à susciter un peu des réactions. Et là, ça commence à devenir super.

  • Juliette

    Puisque quand tu sens que ton discours porte, quand tu sens que tu commences à embarquer les gens avec toi, il y a une puissance de la parole qui est juste incroyable.

  • Pierre

    Oui, et je pense que ça te permet à ce moment-là de te connecter aussi à une forme d'authenticité chez toi. Parce que ce qui est très compliqué, si tu veux, quand tu es... élu, quand tu es sur ces fonctions-là, c'est qu'en fait, tu es toujours en représentation. Donc, quand tu es quelque part, ce n'est pas Juliette qui prend la parole, c'est la vice-présidente de la région Vernier-Rhône-Alpes. Donc, tu incarnes quelque chose qui te dépasse. Et donc, c'est toujours aussi cet exercice qui est parfois un peu compliqué, fragile, périlleux de te dire qu'est-ce qui, dans cette prise de parole... est à moi et qu'est-ce qui est un exercice de style un peu imposé. Mais je trouve que quand tu arrives à te reconnecter à une forme d'authenticité, là aussi, ça vient donner une puissance à ton discours qui est très sympa.

  • Juliette

    Clairement. Et puisqu'on parle d'authenticité, on arrive à la dernière question. Si Dieu existe, qu'aimerais-tu, après ta mort, l'entendre te dire ?

  • Pierre

    On a un rapport assez distancié tous les deux, je le sollicite assez peu pour déconseiller des miracles.

  • Juliette

    Joliment dit !

  • Pierre

    S'il existe et qu'on doit se croiser après ma mort, peut-être que j'aimerais qu'il me dise sans rancune.

  • Juliette

    Sans rancune ? Parce que tu devrais être rancunière vis-à-vis de lui, tu penses ? Ah, lui ! Ok, d'accord, je comprends. Ça marche. Bon, c'est joli tout ça. Juliette, il m'est à te remercier. Je l'ai dit, mais vraiment, et je l'aurai dit en toute sincérité, là aussi. Je trouve que l'idée même du recrutement circulaire est géniale, vertueuse, tout ce qu'on veut. pour tous ceux qui nous écoutent, allez regarder ça d'encore plus près que ce qu'on a pu faire aujourd'hui. Vous verrez que je pense qu'il y a un vrai truc derrière ça. C'est aussi pour ça que j'ai voulu avoir Juliette avec nous aujourd'hui. Donc, merci beaucoup. Merci beaucoup, Juliette.

  • Pierre

    Merci à toi,

  • Juliette

    Pierre. On se revoit dans dix ans pour refaire un point. sur l'avancement de tout ça. OK ?

  • Pierre

    Avant, j'espère.

  • Juliette

    C'était la Khôlle de Juliette Jarry. Merci, Juliette.

  • Pierre

    Merci beaucoup.

  • Juliette

    Bravo, vous avez tenu jusque-là. Merci de votre écoute. Si vous avez aimé cet épisode, partagez-le sur les réseaux sociaux, allez mettre 5 étoiles et des commentaires sur les plateformes de podcast. Abonnez-vous, abonnez-vous à notre newsletter et dans tous les cas, à tout le monde. A très bientôt pour un prochain épisode de La Khôlle. Et n'oubliez pas, tout est possible à qui rêve, ose, travaille et n'abandonne jamais.

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Description

Juliette Jarry, une entrepreneuse visionnaire passée par l’action publique avant de revenir à l’innovation sociale avec Huggy et le concept du recrutement circulaire.


Juliette nous partage son parcours fascinant :
✅ La création de son entreprise d’aide à domicile à seulement 24 ans, en repensant totalement le modèle du secteur.
✅ Son expérience comme vice-présidente de la région Auvergne-Rhône-Alpes, où elle a mené la transformation numérique d’un territoire de 8 millions d’habitants.
✅ Son engagement actuel dans une révolution du recrutement avec Huggy, une plateforme qui valorise et recycle les talents en leur évitant de repartir de zéro.


💡 Pourquoi cet épisode est incontournable ?
👉 Parce qu’on y parle d’audace, d’innovation et de comment changer le monde à son échelle.
👉 Parce que Juliette brise les clichés sur l’entrepreneuriat et la politique avec authenticité et pragmatisme.
👉 Parce que le recrutement circulaire pourrait bien être l’avenir du marché du travail !

🔥 Une conversation passionnante, inspirante et pleine de vérités sur l’entrepreneuriat, la politique et la tech.

📢 Écoutez, partagez, et surtout, osez !


Juliette sur linkedin : https://www.linkedin.com/in/jarry-juliette/

Site web Huggy : https://www.huggy-recrutement.com/




Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Pierre

    Bienvenue dans la Khôlle. Vous êtes curieux ? Vous avez soif de comprendre le monde qui vous entoure ? Alors vous êtes au bon endroit. Si vous aimez vous remettre en question, que comme moi vous pensez qu'on n'a jamais fini d'apprendre, alors la colle est faite pour vous. Sans se prendre au sérieux, je vous propose à chaque épisode de partir ensemble à la découverte de nouveaux horizons, de profils et d'idées inspirantes. Je suis Pierre Barraud, j'ai créé, édité et produit ce podcast. Je suis également directeur général du Campus Orléans de l'ISC Paris, école de commerce, membre de la Conférence des Grandes Écoles. Mon mantra ? Vis comme si tu devais mourir demain, apprends comme si tu devais vivre toujours. Je suis preneur de tous vos commentaires, suggestions, remarques, ils sont tous bienvenus. Et bien évidemment, je compte sur vous pour placer 5 étoiles et des commentaires sur toutes les plateformes. Allez, c'est parti, bonne écoute ! Bonjour et bienvenue dans ce nouvel épisode de La Khôlle. Aujourd'hui, j'ai l'immense honneur d'accueillir Juliette Jarry. Salut Juliette !

  • Juliette

    Bonjour Pierre !

  • Pierre

    Ça me fait très plaisir de pouvoir discuter avec toi parce que tu es une entrepreneuse, tu as plein de trucs, tu as eu mille vies en fait, on peut dire ça et ça va être juste super intéressant. Mais justement, pour tous ceux qui ne te connaîtraient pas encore, est-ce que tu peux te présenter en quelques mots ?

  • Juliette

    Oui bien sûr, avec plaisir. Bonjour à tous, je m'appelle Julie JARRY, j'ai 43 ans, j'ai deux enfants. J'aime bien dire que je suis bilingue publique et privée, puisque j'ai à la fois un parcours en effet de chef d'entreprise. J'ai créé ma première entreprise à 24 ans, à la fin de mes études de sciences politiques. Donc c'est une entreprise... Tu étais précoce,

  • Pierre

    dis donc ! Pardon ? Tu étais précoce ! Non, parce que créer son entreprise directement en sortie d'études, ce n'est pas tout le monde.

  • Juliette

    Oui, on pourra y revenir, parce que c'est vrai que c'était un contexte qui était intéressant. Moi, la patience n'a jamais été la première de mes qualités. Et c'est vrai que j'ai adoré mes études à Sciences Po. J'ai pris beaucoup de plaisir. J'ai vraiment eu l'impression d'arriver dans un univers et un environnement où le fait d'apprendre, d'être curieux, tout ça a été valorisé. Donc, j'ai adoré ça. Mais j'ai été confrontée à la fin de mes cinq années d'études. principe de réalité que j'avais pas vraiment anticipé, à vrai dire. Et qui était qu'en fait, il fallait travailler après.

  • Pierre

    Oh mon Dieu !

  • Juliette

    Et oui, c'est ça. Et donc, je me suis dit, mais en fait, qu'est-ce que j'ai envie de faire ? Et qu'est-ce que tu sais faire à la fin de Sciences Po ? Enfin, c'est une formation qui est géniale et t'apprends plein de choses. Mais contrairement à un médecin qui sait qu'il va être médecin, quand tu fais Sciences Po, ça reste une formation qui est hyper généraliste, mais comme les écoles de commerce, ou comme un type de formation. et qui peuvent potentiellement t'ouvrir à plein de choses, mais à rien de bien défini à la base. Et c'est vrai que moi, à l'époque, ce qui m'intéressait beaucoup, c'était l'évaluation des politiques publiques. Je pense que c'était un peu précurseur à l'époque. Ça l'est encore un peu.

  • Pierre

    Ouais, ouais, ouais. Et puis, avec la tendance muskienne qui arrive là, je ne sais pas. Mais ouais, il y a un truc, en tout cas.

  • Juliette

    Là, en l'occurrence, on était, tu vois... 2005, donc c'était un petit peu tôt. Donc, j'ai cherché du travail pendant peut-être trois ou quatre mois et j'ai très rapidement eu une frustration qu'on me dise que j'avais un beau parcours, que j'avais fait des jolies choses, mais que j'étais trop jeune.

  • Pierre

    Pas d'expérience, tout ça.

  • Juliette

    Voilà, il ne fallait pas qu'ils s'inquiètent, ça n'allait pas durer. Mais ces quelques mois de recherche m'ont beaucoup frustrée. Alors, on rentre directement dans le vif du sujet, mais allons-y. Mais à cette époque, ma grand-mère était en perte d'autonomie. Et en fait, la conjonction des deux, de cette situation personnelle et de ma recherche d'emploi, m'a amenée à me dire, mais pourquoi pas créer une entreprise d'aide à domicile spécialisée autour de la notion de lien intergénérationnel. Et donc, à la fin de mes cinq ans d'études de sciences politiques, j'ai fait une formation à la création d'entreprises pendant six mois pour valider mon projet.

  • Pierre

    Dans quel cadre ? Dans... Avec un organisme ?

  • Juliette

    En fait, c'était un organisme qui était mis en place par Pôle emploi à l'époque. OK. Donc, ils m'ont proposé ça. Et là aussi, pareil. Donc, normalement, je devais rentrer sur la session d'après, mais ça ne m'allait pas du tout. Donc, j'ai fait un peu de forcing pour recommencer la formation tout de suite. Et j'ai validé, en fait, tous les aspects fiscaux, juridiques, sociaux de mon projet. Et donc, je me suis lancée à l'école. Et ce qui était... Alors, très souvent, on me disait « Ah, c'est super courageux ! » Je dis « Non, en fait, c'est très inconscient. »

  • Pierre

    C'est un peu ça, oui.

  • Juliette

    Il en faut beaucoup quand tu crées une entreprise. Parce qu'effectivement, je n'avais pas de réseau dans ce secteur-là. C'est un secteur que je ne connaissais pas.

  • Pierre

    Le modèle aide à la personne, c'est ça ?

  • Juliette

    Oui, donc en fait c'est une entreprise qui au début était basée sur ce type de lien intergénérationnel, c'est-à-dire comment est-ce qu'on peut considérer les personnes âgées, nous pas uniquement sous l'angle de leurs incapacités à faire, mais de ce qu'elles pourraient transmettre à quelqu'un de plus jeune, donc avoir une relation d'aide qui n'est pas à sens unique, mais qui soit vraiment dans cette notion aussi de partage et d'échange. Et donc, ça m'a amenée à travailler dès le début avec des étudiants en fin de cursus en psychologie, moniteur éducateur, éducateur spécialisé, médecin, etc. Donc, avec des profils. En fait, ce que j'ai adoré dans cette expérience, c'était prendre le contre-pied de tout ce qui existait sur le marché. Je n'avais pas envie de créer la 150e entreprise d'aide à la douceur de l'église. J'avais vraiment envie d'apporter une valeur ajoutée différente. Et donc, c'était un peu un ovni dans le secteur puisque... Si on caricature un petit peu, en général, les salariés dans l'aide à domicile sont plutôt des femmes qui ont 46 ans, qui ont élevé des enfants, qui n'ont pas de diplôme et qui souhaitent reprendre une activité professionnelle à temps partiel, etc. Alors, c'est vraiment une grosse caricature.

  • Pierre

    Oui, c'est pas loin de la vérité, je pense.

  • Juliette

    Et du coup, chez ADA Présence, qui est une entreprise, nous, on avait une moyenne d'âge qui était de 23 à 24 ans, niveau moyen de diplôme, bac plus 4.

  • Pierre

    et puis comment t'allais les chercher ?

  • Juliette

    et bien en fait on bénéficiait d'une aberration du système à l'époque, notamment chez les étudiants en psychologie qui était que tu avais un jury de sélection qui était très pointu pour passer du master 1 au master 2, il y avait en gros 80-85% des étudiants de psychologie qui ne passaient pas du premier cours de l'un à l'autre et donc ils se retrouvaient sur une année de césure ou sur une année si tu veux où ils allaient en profiter pour acquérir de l'expérience Et pour nous, c'était génial parce que ça nous amenait des profils qui étaient vraiment force de proposition. Et ce qui fait que progressivement… Toi,

  • Pierre

    tu faisais la sortie des jurys, c'est ça ?

  • Juliette

    Au fil du temps, on a commencé à être plutôt connus. Oui,

  • Pierre

    des petites réputations.

  • Juliette

    Exactement. Et du coup, l'entreprise a progressivement évolué sur l'accompagnement, donc non seulement de personnes âgées, mais aussi d'enfants et d'adultes en situation de handicap. Et tout particulièrement sur des pathologies complexes. Donc, on est devenu spécialiste de la prise en charge de l'autisme, des séquelles de trauma crânien, des maladies neurodégénératives comme Alzheimer, etc. Et ce qui était hyper intéressant aussi dans cette entreprise, c'est qu'on avait vraiment cet axe très fort sur le développement et le maintien de l'autonomie.

  • Pierre

    Alors, une question qui me vient, je suis désolé, ce n'est pas très humaniste comme approche, mais... Dans ces business models, c'est très people intensive et les people, ça coûte cher. Comment on arrive à trouver un équilibre économique à tout ça ?

  • Juliette

    C'est une très bonne question. Effectivement, moi, dès le début, je me suis dit qu'il fallait que j'automatise tout ce qui était à faible valeur ajoutée. Donc, on a vraiment... Et c'est en ça aussi que l'entreprise était un peu en ovni. C'est qu'en 2006, quand je lance l'entreprise, je commence déjà à réfléchir à... à faire un cahier des charges pour développer un extra net à façon qui me permettrait d'avoir aussi un modèle de fonctionnement interne qui est très basé sur ce qu'on appelle à l'époque les nouvelles technologies. Donc, par exemple, nous, on ne passait pas notre vie à appeler les intervenants pour leur dire est-ce que vous êtes disponible pour aller chez Madame X ou Monsieur Y. Ils avaient accès en fait à la liste de toutes les missions à pourvoir sur cet extra net et se positionnaient sur les missions qui les intéressaient. Ce qui avait un double avantage, c'est qu'on était sur une logique de co-construction de planning. On savait que quand ils acceptaient une mission, c'est aussi que c'est une mission qui les intéressait. Et puis du coup, ça limitait aussi notre charge en termes de coordination, parce qu'on n'avait plus qu'à effectuer la mission aux intervenants. Donc il y avait ça. C'était aussi un extra net sur lequel ils allaient pouvoir rédiger leur compte rendu de façon automatique. Je ne voulais pas les faire passer à l'agence toutes les semaines, déposer leur feuille de papier, etc.

  • Pierre

    Non mais t'as raison, t'es génial !

  • Juliette

    On avait mis en place de l'AI formation, ils pouvaient emprunter des ouvrages, ils pouvaient emprunter des jeux. Tout ça était intégré dans cette extra nette et qui était vraiment le cœur de fonctionnement de l'entreprise de manière un peu native.

  • Pierre

    C'est quoi ta plus grande fierté dans tout ça, de cette expérience-là ? Parce que ce n'est que la première qu'on prenait.

  • Juliette

    Oui, il y a plein de... plein de moments forts et de choses dont on peut collectivement être fière dans cette entreprise, mais moi je pense qu'un des moments les plus émouvants que j'ai vécu c'est de voir une maman d'un jeune en situation de handicap arriver au bureau en pleurs et en me disant mais vous ne vous rendez pas compte, grâce à vous on va pouvoir aller avec mon mari au restaurant ça fait des années que ça ne nous est pas fait et je pense que au-delà de cette histoire il y avait une âme dans cette entreprise, c'était ça qui était très très chouette ... C'était une entreprise où on apportait des solutions qui étaient très concrètes et très tangibles. avec une façon de le faire, je crois, qui était très, très humaine.

  • Pierre

    Alors, il y a eu un petit bug dans la matrice où le truc s'est coupé, mais ce n'est pas grave. On continue et je reprends sur ma question qui était que j'avais fait mon boulot, j'avais regardé ce qu'on pouvait dire sur toi, notamment sur cette expérience-là. Et un journaliste notait une approche très humaniste de ton management, ce qui résonne avec ce que tu vas faire plus tard, d'ailleurs. Pourquoi est-ce qu'il a écrit ça, à ton avis ?

  • Juliette

    Je pense que c'est vraiment lié à cette âme dont je parlais dans l'entreprise. J'avais aussi quelque chose qui était très fort chez moi, c'était la volonté que la pérennité de l'entreprise ne repose pas sur mes seules épaules. Et donc, je pense que tous les collaborateurs se sont très rapidement sentis aussi... porteur de cette entreprise, de ses valeurs, de ce qui en faisait vraiment les spécificités. Donc je pense que c'est probablement lié aussi à ce qu'il a ressenti de cette aventure collective. On était dans un secteur qui non seulement était effectivement très humain, mais je pense que ce que j'ai adoré, ce que j'ai essayé de faire, c'est aussi de permettre aux collaborateurs qui m'ont rejoint dans cette aventure de la vivre et de grandir avec. Et ça, je pense que c'est effectivement quelque chose qui me tient très à cœur.

  • Pierre

    Pourquoi ? Alors, essaie de me donner la vraie raison. Pourquoi tu as finalement décidé de revendre cette entreprise ? Alors ça, c'est ma première question. Et deuxième question qui est immédiate, qui est, est-ce qu'on vend une entreprise à mission comme on vend n'importe quelle autre entreprise ?

  • Juliette

    Alors, je vais te donner la vraie raison pour laquelle j'ai vendu cette entreprise. Je ne comptais pas t'en donner une fausse. Tout simplement parce que j'avais fait le tour et que je considérais que je n'étais plus la bonne personne pour continuer à la développer. Je pense que... Je ne sais pas si on peut dire ça comme ça, mais je pense avoir une forme de lucidité sur ce que je peux apporter à un projet. Et en l'occurrence, là, c'était... Voilà, c'était plus moi, tout simplement, qui pouvait porter l'entreprise plus loin. Et je n'en avais plus l'envie profonde. Il fallait aussi que je fasse autre chose. J'y ai passé 11 ans dans cette entreprise, ce qui est quand même relativement long. J'ai commencé à ressentir un petit peu ce besoin d'autre chose, je pense, au bout de 7-8 ans. Et il se trouve que c'était aussi un moment où mes enfants étaient tout petits, donc je me suis laissé le temps aussi...

  • Pierre

    On se fait rattraper par la vie.

  • Juliette

    Exactement. Et puis, à un moment donné, je me suis dit, ok, maintenant, c'est le moment. Je pense qu'il faut passer la main et apporter aussi une énergie nouvelle, un regard nouveau sur cette entreprise.

  • Pierre

    Tu penses justement, ce n'est pas un jugement, mais qu'en fonction des profils entrepreneurs, tu as des profils qui font le zéro à un.

  • Juliette

    Et puis,

  • Pierre

    ceux qui font le 1 à 10, le 10 à 100, etc.

  • Juliette

    Oui, complètement. Moi, je ne suis pas du tout une gestionnaire. Moi, ce qui me plaît, c'est de monter des projets, c'est de les penser différemment, c'est de les optimiser au début. Mais une fois que ça roule et que c'est… C'est chiant,

  • Pierre

    d'accord. C'est plus beau. Il faut toujours des trucs nouveaux, un peu excitants.

  • Juliette

    Je ne sais pas si c'est chiant, mais effectivement, je pense que ça correspond à des personnalités différentes. Et… Et il faut être lucide sur ce qu'on aime faire, sur là où on est bon, là où on ne l'est pas. Et en l'occurrence, moi, j'ai adoré penser complètement différemment ce projet. Mais je pense que c'est un peu le fil rouge. Et du coup, je n'ai pas du tout terminé mon introduction, mais ce n'est pas grave. Ce n'est pas grave.

  • Pierre

    C'est une introduction d'une heure. La colle, c'est le principe. Et en fait, c'est un peu le fil rouge, je crois, de ma vie professionnelle. C'est ce que j'aime, c'est l'innovation dans des secteurs qui sont très variés. Et pas toujours une innovation ultra technologique. Au contraire, c'est souvent une innovation sociale ou sociétale que j'aime apporter. Et c'est un peu, on le verra plus tard probablement, c'est un peu le point commun entre AD à présent, cette première entreprise, et puis celle dont je suis aujourd'hui directrice générale, et puis mon expérience aussi. Absolument. Puis on va voir que la techno, quand même, a une part de responsabilité dans tout ça aussi. Mais faisons un petit retour en arrière. Qu'est-ce qui explique qu'à 17 ans, on va pas remonter trop loin, t'as décidé d'aller vers Sciences Po ? Pourquoi à ce moment-là de ta vie, tu t'es dit, tiens, c'est un chemin intéressant pour moi ?

  • Juliette

    Alors, à vrai dire, je ne me suis jamais posé la question. C'est-à-dire que ça s'est imposé comme une évidence pour moi.

  • Pierre

    Ok. Mais il y avait des exemples dans ta famille ? Non,

  • Juliette

    pas du tout. Non, absolument pas. Mais pour moi, Sciences Po, c'était vraiment l'endroit où j'allais pouvoir me nourrir, où il y avait ce regard très pluridisciplinaire sur plein de sujets. Et je t'avoue qu'à aucun moment, je n'ai fait un tableau des plus et des moins. Tu n'as pas eu de doute ? Pas une seconde. J'ai eu mon bac, j'ai préparé le concours de Sciences Po, je suis rentrée à Sciences Po direct. Je ne me suis même pas posé la question.

  • Pierre

    Alors, ceci nous amène à la... deuxième partie de ta vie mouvementée, qui est que à un moment, alors ça doit être après avoir vendu ta boîte, tu rentres en politique quelque part ?

  • Juliette

    Non, c'est avant la vente de mon entreprise.

  • Pierre

    Ah, il y a un truc concomitant alors.

  • Juliette

    Exactement. J'ai fait les deux en parallèle pendant 18 mois, ce qui était de la folie.

  • Pierre

    Comment ça s'est passé ? Raconte-nous tout ça. Madame la vice-présidente de la région en Alpes.

  • Juliette

    Auvergne, Ronald, tu vas te faire taper sur les doigts. Auvergne,

  • Pierre

    Ronald. Oh là là, OK.

  • Juliette

    Comment ça se passe ? Écoute, on est en septembre 2015. Je suis en train de faire faire du toboggan à ma fille qui a un an dans le jardin. Et je reçois un coup de fil en me disant Laurent Wauquiez aimerait bien vous rencontrer. Moi, je dis Laurent qui ?

  • Pierre

    Laurent Wauquiez ?

  • Juliette

    Bon, je plaisante un petit peu, mais... C'est con,

  • Pierre

    t'aurais pu finir aux grosses têtes. Voilà, c'est ça.

  • Juliette

    Non, ça a bifurqué un petit peu à ce moment-là. Et donc, on m'explique qu'il veut se lancer dans la course aux élections régionales, qu'il cherche quelqu'un pour prendre la tête de la liste sur la métropole de Lyon et qu'il souhaiterait me rencontrer dans ce cadre-là. Et comme je suis curieuse...

  • Pierre

    Tu sais comment t'étais arrivé sur son radar ?

  • Juliette

    Oui, alors il se trouve que j'avais été invitée à petit déjeuner à l'Elysée dans le cadre de la journée des droits des femmes. Un peu de temps avant que j'avais eu un trophée national de la tribune, la Women's Award, et puis que j'avais eu aussi un trophée de la CPME pour aller à présent. Donc je pense qu'il y avait eu à la fois la conjonction un peu de tout ça, et puis peut-être, comme j'étais un petit peu dans les milieux entrepreneuriaux, mon nom qui était peut-être ressorti deux ou trois fois. Et donc, comme je suis curieuse, effectivement, je vais prendre un café avec lui. Il m'explique quel est son projet. Et je dis merci beaucoup. Mais en fait, moi, ça ne fait pas du tout partie.

  • Pierre

    Merci, monsieur. Au revoir, monsieur.

  • Juliette

    Oui, c'est ça. Merci, monsieur. C'est tellement éloigné de mon quotidien, de mes préoccupations du moment, que ce n'est pas du tout... OK. Donc, je lui dis que...

  • Pierre

    Oui, puis c'est out of the blue. Tu n'y avais jamais pensé plus que ça. Donc, voilà.

  • Juliette

    C'est ça, c'est ça. Et il me demande d'y réfléchir quand même. Et je dis, bon, écoutez, je vais prendre un petit moment, je vais y réfléchir. Et puis, je rentre à la maison et je me dis, c'est... Voilà, c'est vrai que c'est un peu paradoxal. J'ai fait Sciences Po, je suis fière d'entreprise. Et pour autant, je me sens très éloignée du monde politique. Je trouve que le personnel politique... n'incarne pas du tout. On est avant l'arrivée quand même de Macron, avant une certaine forme de renouvellement aussi, notamment à l'Assemblée. Et à l'époque, moi, je me dis, je ne vois pas de jeunes, je ne vois pas de chefs d'entreprise, je ne vois pas beaucoup de femmes. Et quelque part, je dis, si je dis non, je ne pourrai plus jamais râler. Je ne pourrai plus jamais me plaindre parce qu'à un moment donné, on me donne aussi l'opportunité d'amener... d'amener ma petite pierre à l'édifice et d'amener aussi une image un peu différente de ce que peut être un élu. Mais à ce moment-là, j'accepte de prendre la tête de la liste aussi parce que je trouve ça passionnant de voir comment se déroule. Exactement, de voir les coulisses, je me dis que c'est une expérience qui est quand même assez géniale.

  • Pierre

    T'es diplômée de Sciences Po, dans Sciences Po, il y a pas de politique quand même.

  • Juliette

    Oui, c'est ça. Donc, l'expérience est géniale. Et puis, ça permet effectivement de voir comment ça se passe. Puis alors, je lui dis, par contre, moi, la prise de parole en public, ce n'est pas du tout mon truc. Il me dit, oui, ne t'inquiète pas, ne t'inquiète pas. Bon, premier meeting de campagne, salle 3000. Donc, ça s'appelle une salle 3000 parce qu'il y a 3000 places. OK. Et bien, Bibi sur scène. Voilà, donc, baptême. Bonjour.

  • Pierre

    Bonjour.

  • Juliette

    Exactement. Et... Et puis donc la campagne se passe.

  • Pierre

    A été dure la campagne ? Parce que honnêtement dans toutes les campagnes il y a des coups bas.

  • Juliette

    Oui mais elle n'a pas été dure pour moi dans le sens où on avait une figure politique qui prenait quand même... C'est elle qui prenait tous les coups. Oui qui prenait tous les coups. Donc moi ma campagne ça a été plus une campagne vraiment de terrain. Donc c'était une campagne politique mais pas au sens... il n'y avait pas eu cette violence là à ce moment là. Et donc, à ce moment-là, quand j'accepte la campagne, je mets quand même des conditions. Je me dis, moi, je ne suis pas encartée, je ne le serai jamais. Et puis, si je m'engage, il y a un moment donné, c'est quand même aussi pour pouvoir faire des choses. Mais à ce moment-là, je prends la tête de l'aise sur la métropole, mais je me dis, si on gagne, je serai conseillère régionale. Je n'envisage à aucun moment autre chose. Et là arrive le mois de décembre et on gagne les élections régionales.

  • Pierre

    Alors, vous ne la voyez pas, mais elle a l'air surprise d'avoir gagné. C'était une surprise vraiment ou non ? Tu jouais pour la gagne, de toute façon.

  • Juliette

    Oui, de toute façon, on y va pour la gagne, mais en même temps, le résultat, il est toujours jusqu'au dernier moment. Tant que tu n'as pas gagné, tu n'as pas gagné. Et donc, on gagne les élections. Et Laurent Wauquiez me rappelle quelques jours plus tard en me disant, qu'est-ce qui t'intéresse comme sujet ? Et je lui dis, écoute, il y a un projet dont on a parlé pendant la campagne que je trouve passionnant et que j'aimerais vraiment avoir l'occasion de suivre. C'est le projet de campus numérique. qui est à ce moment-là un projet qui est une idée.

  • Pierre

    Rien de concret pour l'instant.

  • Juliette

    Exactement. Mais je dis ça en disant j'aimerais être tenue informée. Et il revient vers moi un ou deux jours plus tard en me disant écoute, j'ai deux propositions à te faire. Soit tu es conseillère déléguée au campus. Soit tu es vice-présidente, déléguée à l'économie de proximité, au commerce, à l'artisanat, aux professions libérales, à l'ESS et au numérique.

  • Pierre

    Oh, oh, oh, ça en fait des trucs !

  • Juliette

    Wow ! Wow ! Et donc, à ce moment-là, j'appelle des amis qui sont un peu plus dans cet univers que moi. Ils me disent « Ben voilà, il se passe ça, qu'est-ce que vous en pensez ? » Là, ils me disent « Ben en fait, c'est simple, soit t'es conseillère déléguée, t'as ta carte de visite, mais... » Pas plus de pouvoir que ça.

  • Pierre

    Ton plan d'action est plus réduit.

  • Juliette

    C'est ça. Et si tu es vice-président, tu fais partie de l'exécutif, tu as un budget, tu as des services. Ce n'est pas du tout la même histoire. Après, tu dis à un chef d'entreprise, tu veux plutôt être...

  • Pierre

    Oui, c'est vrai.

  • Juliette

    ...peau de fleur ou tu veux plutôt pouvoir faire bouger les choses ? Là, je dis OK. Je dis OK,

  • Pierre

    mais sachant que tu es encore dégé de ta boîte.

  • Juliette

    Oui.

  • Pierre

    T'as dû faire des semaines de fou furieux.

  • Juliette

    Ouais, donc je suis dirigeante d'une entreprise d'une cinquantaine de personnes. Et accessoirement, j'ai deux enfants, dont ma fille qui a un an et mon grand qui en a quatre. Oh là là.

  • Pierre

    Ouais, 24 heures, c'est pas beaucoup finalement.

  • Juliette

    Non, c'est pas beaucoup, je confirme. Et c'est surtout quand t'arrêtes que tu te dis que c'était un rythme de fou. C'était un rythme de fou.

  • Pierre

    Mais parce qu'à cette époque-là, t'as 34 ans. Donc, tu t'apprêtes à diriger la politique numérique d'une région à 8 millions d'habitants ? Un truc comme ça ?

  • Juliette

    C'est ça.

  • Pierre

    Syndrome de l'imposteur ou pas du tout ?

  • Juliette

    Oh, punaise, oui, t'arrives. En plus, c'est un secteur qui n'est pas mon secteur de compétence, entre guillemets. Je rappelle, je viens quand même d'une entreprise d'aide à domicile. Alors, même si le numérique a toujours été quelque chose qui m'a passionnée et qui a été un vrai levier de croissance dans mon entreprise, Je ne suis pas une technicienne du numérique. Et donc, je me souviens très bien du premier discours que je dois faire. Donc, j'ai été nommée le 4 janvier 2016. Et le 10 janvier 2016, je dois faire un discours devant le CIEL, qui est le syndicat d'initiative qui déploie la fibre dans la Loire. Et dans le trajet entre Lyon et Saint-Etienne, j'ai ma directrice de service qui m'explique ce qu'est une délégation à faire mot concessif, tous les termes techniques avec le déploiement de la fibre, etc. Donc, je suis là. J'ingurgite tout ça et je me retrouve, et ça a été la première et la seule fois de tout mon mandat où j'ai lu un discours que je n'ai pas écrit. En croisant les doigts et en me disant, pourvu qu'il ne m'ait pas mis des pots de bananes.

  • Pierre

    Et qu'on ne me pose pas trop de questions.

  • Juliette

    Et pourvu que je ne sois pas en train de raconter n'importe quoi. Je fais mon discours, pas super sereine quand même. Je retourne m'asseoir et je me dis c'est la dernière fois. Et je rentre à la région, je convoque tout le monde et je dis là maintenant, vous sortez tous les dossiers, vous m'expliquez tout. Il faut que j'apprenne, il faut que je comprenne. Et donc tu passes en phase d'apprentissage accélérée. D'autant plus que, ce que je disais tout à l'heure, en fait j'ai une double délégation, c'est-à-dire que je m'occupe aussi bien Mes interlocuteurs, à ce moment-là, sont aussi bien les syndicats de profession libérale qu'Orange ou SFR, si tu veux. Donc, c'est un peu le grand échange. On est dans un contexte, en plus, de fusion des deux régions. Donc, Auvergne d'un côté, Ronald de l'autre. Donc, en fait, il y a tout à mettre à plat, tout à harmoniser. Il y a les équipes à reconstituer. Le numérique est une délégation qui n'existe pas en tant que telle à l'époque. Donc, wow ! Et puis, tu découvres, en fait, tu arrives... Moi, je dis souvent que c'est une expérience anthropologique, parce que tu passes d'une PME de 50 personnes à une institution de 9000 agents avec une double chaîne de commandement, à la fois public, privé... Enfin, pardon, administratif et politique. Et tu passes du privé au public avec des fonctionnements qui sont très différents.

  • Pierre

    Et tu as une puissance de feu qui est sans commune mesure par rapport à ce que tu as pu connaître. C'est-à-dire qu'il y a du budget. Ça veut dire que tu es en capacité d'engager...

  • Juliette

    Chef de file en matière économique. Depuis la loi NOTRe, c'est vraiment la collectivité qui a été positionnée comme pivot sur ces questions-là. Donc, tu te retrouves effectivement avec des moyens, avec... La nécessité aussi de poser des stratégies, des ambitions. Donc ça, c'est ce que j'essaye d'apporter aussi, et ce qui à la fois moi me structure et structure les équipes, c'est que dès le début, je dis on va rédiger une feuille de route. On va rédiger notre feuille de route stratégique pour poser un petit peu quels sont nos objectifs, quels sont les moyens qu'on va mobiliser. Donc on fait un état des lieux au niveau de la région aussi, de ce qui existe. Et là où c'est difficile, c'est que le numérique est une délégation. éminemment transverses. Donc, tu dois aller solliciter les autres délégations. Et parfois, avec tout ce que ça peut générer, tu vois, de frictions où tu viens un peu percuter aussi les précarés, où les uns et les autres pensaient être...

  • Pierre

    Il y a deux, trois baronies à aller secouer.

  • Juliette

    C'est ça, exactement. Donc ça aussi, c'est un exercice qui est...

  • Pierre

    Formateur ! ...

  • Juliette

    d'apprentissage. exactement et là tu te dis d'une part que tu as un enjeu de comprendre les codes sans en prendre les travers d'arriver à comprendre un petit peu ce qui se passe ce qui se joue quand on te dit ça ou ça ce qui se joue derrière et puis dire à un moment donné soit je je Soit je fais plier un peu le fonctionnement, soit c'est moi qui me fait...

  • Pierre

    Qui te fait plier.

  • Juliette

    Ouais, c'est ça.

  • Pierre

    Tu crois qu'il y a une incapacité structurelle des institutions à se réformer en profondeur ?

  • Juliette

    Non, parce que c'est une question de personnes. C'est toujours une question de personnes.

  • Pierre

    Ça se joue aux people.

  • Juliette

    Ouais.

  • Pierre

    J'adore, je pense que ça a dû être une expérience juste incroyable. Est-ce qu'à un moment donné, ton stylo a tremblé au moment de signer une décision ? Alors, dans le cadre de mon mandat ?

  • Juliette

    Oui. Non, je ne dirais pas ça comme ça, parce qu'on a la chance quand même, et ça, je voudrais vraiment le souligner, parce qu'on fait souvent un peu du fonctionnaire bashing, mais on a la chance dans ces collectivités d'avoir des agents qui sont d'une compétence et d'un dévouement qui est quand même hyper appréciable. Donc, je sais que j'ai autour de moi quand même des gens qui, et notamment moi dans ma délégation, des gens que j'ai choisis, etc., quand ils me font une proposition... ils l'ont quand même travaillé, etc. Mais par contre, oui, tu doutes forcément toujours de... Est-ce que j'ai, moi, bien pris en compte toutes les incidences ? Est-ce que je suis bien en train de me projeter, non pas uniquement sur les six mois qui viennent, mais sur les cinq, dix, trente ans ? Et puis, en même temps, tu as une forme de latitude, mais tu es quand même enfermée, malgré tout, dans un fonctionnement qui reste... qui reste un peu rigide pour plein de raisons, parce que tu as un code des marchés publics, parce que c'est ce que je te dis, c'est ce mélange en fait entre les contraintes liées à l'administration et les contraintes liées au fonctionnement politique aussi. Donc tu navigues dans cet espace de liberté que tu essayes progressivement aussi d'agrandir, mais en ayant toujours quand même, malgré tout, ces contraintes que tu dois prendre en compte.

  • Pierre

    Là encore, j'ai fait ce que je devais faire. Donc, je suis allé lire des articles sur toi sur cette période. Et tu as cette phrase, ouvrez les guillemets. Ce fut une parenthèse à la fois dure, violente, mais passionnante. Le côté passionnant, on l'a vu. Pourquoi c'était dur et violent ? Tu vois, c'est des mots particuliers là.

  • Juliette

    Oui, bien sûr, mais ils ne sont pas utilisés pour rien. C'est un monde de rapports de force. C'est un monde de rapports de force et la politique est un système très féodal. C'est-à-dire que quand tu es en politique, et ça je pense que quelque part ça a été ma chance aussi, c'est qu'avec le président on a toujours eu une relation interpersonnelle. C'est-à-dire qu'il est venu me chercher, que quand on devait échanger on le faisait très directement tous les deux. Mais la politique de manière générale est féodale dans le sens où tu acceptes d'échanger une protection contre ta liberté. Et je dis, moi, encore une fois, la chance que j'ai eue, c'est que j'étais chef d'entreprise et que j'avais aussi mon entreprise. J'avais potentiellement d'autres projets et surtout quelque chose de très important, c'est que j'avais toujours dit que je ne ferais qu'un seul mandat.

  • Pierre

    Ah, ok.

  • Juliette

    Et je pense que ça, pour le coup...

  • Pierre

    Pourquoi ?

  • Juliette

    Parce que j'avais conscience de ce que j'avais envie d'y laisser ou pas. Et quand je dis que c'est un univers qui est dur et violent, c'est vrai. Déjà, la région, en l'occurrence, toutes les régions sont plus ou moins grandes, mais la région au Verne-en-Alpes est très grande, donc tu te déplaces beaucoup. Tu as quand même des responsabilités qui sont importantes. Et puis, tu as ce que je disais, ce mode de fonctionnement qui est quand même très basé sur le rapport de force, sur une forme de baronnie, sur des territoires. Sur des... Donc, il faut aussi apprendre à faire avec tout ça. Donc, tu peux, pendant un certain temps, le faire. Moi, je n'avais pas forcément envie de faire plus qu'un mandat pour ces raisons-là. Mais encore une fois, je le redis parce que c'est important, ça a été passionnant. Ça m'a permis de faire des choses, de voir des personnes, de découvrir des sujets que je n'aurais pas eu l'opportunité sinon de découvrir ou de rencontrer. De ce point de vue-là, j'ai absolument... aucun regret. Mais il faut avoir conscience quand même de ce que ça implique en termes d'engagement personnel.

  • Pierre

    Oui, en termes de dévouement à la cause aussi, clairement. T'as hésité à remettre le couvert quand même ? Même si tu t'es dit, non, j'y vais qu'une fois ?

  • Juliette

    Non, non, j'ai jamais hésité. Comme pour si on se pose, tu vois, la question c'est pas posée pour moi. Je pense, objectivement, que j'aurais pu le faire si j'avais voulu. Mais c'est J'ai quand même eu la chance, et tu le soulignais tout à l'heure, d'être vice-présidente de la deuxième région de France à 34 ans.

  • Pierre

    Mais oui, c'est énorme ! Juliette, sur ton CV, je suis désolé, ça claque.

  • Juliette

    Et sur une délégation qui était entrepreneuriale, c'est-à-dire qui avait une feuille blanche au début et que j'ai eu la confiance du président pour mener cette tâche à bien, ce qui était ultra précieux. Et donc, je me suis dit, si je fais un deuxième mandat, est-ce que j'aurais des conditions aussi incroyables de mandat ? et j'en étais pas sûre et je pense que de la même façon j'étais arrivée au bout d'un cycle, moi je crois beaucoup à cette notion de cycle et j'avais envie profondément de retourner vers l'entrepreneuriat

  • Pierre

    Ce qui nous amène à la troisième partie de ton introduction qui est Huggy Oui, le recrutement circulaire. Exactement on va parler économie circulaire, recrutement circulaire, etc. Mais voilà Parle-nous un peu de la genèse de tout ça, comment c'est né, à quel moment aussi, est-ce que là aussi il y a eu une zone de recoupement entre ton poste de vice-présidente et finalement la mise en œuvre de ce nouveau projet ? Enfin voilà, raconte-nous un peu.

  • Juliette

    Non, donc en fait à la fin de mon mandat, je ne veux pas tout de suite retourner en première ligne. Je décide dans un premier temps d'accompagner un certain nombre de projets, donc à la fois des entreprises industrielles, des groupes d'enseignement supérieur, des start-up, plutôt sur des fonctions de conseil. Et c'est en fait dans ce contexte-là qu'au bout de quelques mois, je re-rencontre Baptiste Privé, qui est le fondateur de Guy et du mouvement du recrutement circulaire. Et dans un premier temps, j'aide Baptiste plutôt en lui... en lui faisant des connexions, en lui ouvrant un peu quelques...

  • Pierre

    L'aide à évangéliser un petit peu.

  • Juliette

    Exactement, exactement. Mais c'est vrai qu'au fur et à mesure des rencontres, des échanges, des réunions qu'on fait ensemble, je me dis j'adore ce projet, j'adore l'équipe et je m'implique de plus en plus dans Hugui. Et au bout de quelques mois, en fait, on convient avec Baptiste que je prenne la direction générale de l'entreprise à ses côtés. Donc, je m'implique de façon plus opérationnelle. Et en fait, peut-être pour dire quand même ce qu'est Huggy et ce que fait Huggy.

  • Pierre

    Oui, c'est ça. Il y a un sujet là et c'est super intéressant.

  • Juliette

    Il y a un vrai sujet et c'est, je pense, aussi pour ça que j'ai eu ce coup de cœur parce qu'on en revient sur l'idée un peu de l'innovation sociale ou sociétale. Huggy est une entreprise à mission qui est à l'origine du mouvement du recrutement circulaire. Et l'objectif, c'est... d'amener les entreprises à envisager complètement différemment la question du recrutement. Si tu veux, quand on veut être provocateur dans notre façon de présenter les choses et pour bien faire comprendre les enjeux qu'il y a derrière, on dit qu'aujourd'hui, on traite mieux les déchets qu'on ne traite les candidats puisqu'au moins les premiers, on les revalorise.

  • Pierre

    Oui, ce n'est pas faux. Alors, candidats non retenus.

  • Juliette

    Oui, les candidats l'ont retenu. Exactement. Et donc, si tu regardes aujourd'hui sur France Travail ou sur LinkedIn, tu as 1,2 millions d'offres qui sont ouvertes. Ça veut dire que tu vas avoir 1,2 millions de processus de recrutement qui vont être menés dans les prochains jours en silo, en parallèle, et où à chaque fois, chaque entreprise va faire la même chose, c'est-à-dire qu'elle va publier une offre, attendre les candidatures, trier les candidatures, faire des entretiens téléphoniques, faire des entretiens physiques. Et recommencer ça inlassablement. Et on sait que le recrutement, c'est un processus en entonnoir. C'est-à-dire que tu vas avoir un certain nombre de candidats au début. Et puis, au fur et à mesure du processus, tu vas affiner chez un certain nombre de candidats des aptitudes, des compétences, de savoir-être, etc. Tu fais ta shortlist. Et tu te retrouves chez...

  • Pierre

    Pardon ? Tu fais ta shortlist, tout ça,

  • Juliette

    tout ça. Tu fais ta shortlist, exactement. Et tu te retrouves à la fin, on va dire statistiquement, avec deux, trois bons candidats. Sauf que tu n'as qu'un post-op pour voir. Donc, il va falloir que tu choisisses. et parfois le choix va se jouer à rien du tout. Tu peux avoir un préavis qui est un peu plus court chez l'un que chez l'autre, un fit relationnel avec un recruteur qui est un peu meilleur qu'avec un candidat. Tu peux avoir une compétence spécifique qui est un peu mieux maîtrisée. Mais pour autant, les candidats qui ne sont pas retenus, ce ne sont pas des mauvais candidats. Ils sont arrivés en shortlist, tu as quand même préqualifié énormément de choses chez eux. Et puis, on sait très bien que le numéro 1, à un moment donné, chez l'un, peut être le numéro 2 chez l'autre. Et inversement, c'est vraiment aussi une question de... Oui,

  • Pierre

    puis si le numéro 1 sur ta liste dit non, tu prendras le numéro 2, ce qui prouve bien que le numéro 2 est complètement valable.

  • Juliette

    Exactement, exactement. Et donc l'idée c'est de dire, on va en fait basculer d'une logique qui est aujourd'hui très guerrière dans le secteur du recrutement. Quand tu réfléchis, on parle quand même de chasse de tête, on parle de guerre des talents, c'est quand même assez violent comme vocabulaire.

  • Pierre

    C'est pas faux, c'est pas faux.

  • Juliette

    Et dire, comment est-ce qu'on peut basculer d'une logique de compétition à ce qu'on appelle de la coopétition, c'est-à-dire de la collaboration entre concurrents. Et donc ça, on le fait à travers quoi ? On le fait à travers le fait de faire rentrer la bonne pratique de la recommandation au sein des entreprises. C'est-à-dire, vous avez vu un bon candidat, vous l'avez qualifié, il y a un certain nombre de compétences, d'aptitudes, de savoir-être.

  • Pierre

    Il faut screener intégralement.

  • Juliette

    Et donc ça, vous prenez une minute trente à la fin de votre processus de recrutement pour recommander. ce bon candidat que vous avez apprécié et que vous n'avez pas pu prendre et lui permet de ne pas rebondir de zéro dans une nouvelle recherche et au contraire de rebondir vers une autre entreprise qui a un besoin similaire au même moment sur le même territoire. Et par extension, donc à la demande des entreprises qui participent, on applique ça aussi à des stagiaires, à des alternants, à des personnes en fin de CDD. voire à des collaborateurs en CDI, par exemple, qui doivent rejoindre un conjoint dans une autre région et tu veux l'aider à trouver son prochain job, tu peux le recommander sur la plateforme. Pareil, tu as eu un super alternant pendant deux ans, tu veux l'aider à décrocher plus facilement son premier emploi, tu peux le recommander sur la plateforme. Et l'idée, en fait, c'est que l'entreprise, à un instant T, elle fait cet acte qui est vertueux, qui est bienveillant. Mais comme on est dans une logique de circularité, quand elle adhère au mouvement, elle peut aussi bénéficier des recommandations de ses pairs pour diminuer sensiblement ses temps de sourcing et ses coûts de recrutement.

  • Pierre

    Vous êtes arrivée à le valoriser, à le mesurer, la diminution du temps de recrutement ?

  • Juliette

    Oui, alors le mouvement est jeune puisqu'il ne date que de septembre 2023. Mais sur les chiffres qu'on a pour l'instant, si on prend par exemple les profils cadres, La dernière étude de l'APEC dit qu'aujourd'hui, sur un profil cadre, le délai moyen d'un recrutement, c'est entre 12 et 15 semaines. Quand tu es dans la logique du recrutement circulaire, tu es sur 5.

  • Pierre

    Ah ouais ? Ok, donc divisé par 3. Oui,

  • Juliette

    entre 2 et 3. Ce qui est logique quand tu réfléchis, puisque tu bénéficies d'un travail qui a déjà été fait.

  • Pierre

    Complètement. Le process est, je ne veux pas dire complètement bouclé, mais tu élimines énormément de choses dans le process. Donc ça, c'est intéressant. Tu l'évoquais dans ta présentation, c'est que il y a le côté compétition. Alors j'entends. Comment on t'arrive à convaincre, je ne sais pas, Bouygues ? que ces candidats malheureux peuvent bénéficier à Vinci.

  • Juliette

    C'est une très bonne question. En fait, Bouygues ne recommandera jamais directement à Vinci ou Coca ne recommandera jamais directement à Pepsi. Par contre, ils vont recommander un candidat pour l'aider. Et on va dire à une entreprise, en fait, si vous ne le prenez pas, vous n'allez pas non plus l'empêcher de trouver un nouveau job. Non,

  • Pierre

    oui. Donc,

  • Juliette

    il n'y a pas que faire. En fait, le candidat, s'il est bon, il va trouver. Sauf que si vous faites cette recommandation, vous allez l'aider à trouver plus rapidement. Et donc, potentiellement, vous allez améliorer votre marque employeur. C'est un candidat qui va parler positivement de vous. Et en plus, on s'est rendu compte de quelque chose. C'est que les recruteurs nous disent que c'est beaucoup plus facile de dire non quand ils sont inscrits dans cette logique de recrutement circulaire. Parce que quand tu as fait venir un candidat trois fois, cinq fois, huit fois en entretien, qu'il est en shortlist et que tu dois l'appeler pour lui dire « je suis désolée, ce ne sera pas vous » , c'est beaucoup plus facile de lui dire « je suis désolée, on ne va pas vous prendre, mais par contre, on va faire quelque chose de bien pour vous, on va vous recommander » .

  • Pierre

    Aujourd'hui, tu disais que c'était septembre 2023, c'est ça ?

  • Juliette

    Oui.

  • Pierre

    Justement, c'est quoi ? Quoi le feedback que vous avez ? Est-ce la hype qu'il peut y avoir autour de ça ?

  • Juliette

    En fait, depuis septembre 2023, on a plus de 1400 entreprises et employeurs publics qui contribuent en recommandant des profils sur la plateforme. Ça va de toutes petites entreprises jusqu'à des Bouygues, des Décathlon, des Siemens, la Caisse des dépôts et consignations, Van Cleef & Arpel.

  • Pierre

    Des gros employés. Oui,

  • Juliette

    des très très gros. Donc en fait, c'est très varié à la fois en termes d'entreprises qui peuvent recommander, c'est aussi très varié en termes de profils qui sont recommandés sur la plateforme parce que ça va aussi bien sur un jeune qui vient de terminer son alternance. comme un membre de COMEX et un opérateur dans l'industrie, comme un DAF ou un DRH. Oui,

  • Pierre

    et autant des fonctions support que des fonctions techniques, toutes fonctions confondues. Oui,

  • Juliette

    parce que le mouvement a vraiment une visée universelle. En fait, ce que je disais, on est entreprise à mission. Vraiment, notre mission, c'est de contribuer à fluidifier le marché de l'emploi. Et on aura vraiment réussi dans ce sens-là, quand on aura... La recommandation est très... culturelle sur des profils, comme je disais, sur des membres de COMEX ou sur des fonctions support.

  • Pierre

    Ça se fait par cooptation, souvent, d'ailleurs.

  • Juliette

    Oui, complètement. Et quand on aura autant de recommandations dans l'industrie, on considérera qu'on aura vraiment réussi notre challenge.

  • Pierre

    Le client qui était le plus dur à convaincre ?

  • Juliette

    C'est une bonne question.

  • Pierre

    Sur les 1400 ?

  • Juliette

    Alors, on n'a pas 1 400 clients. Les 1 400, c'est vraiment ceux qui contribuent. Donc, on peut recommander sans être adhérent du mouvement. Après, ceux qui sont adhérents, c'est vraiment ceux qui souhaitent bénéficier de cette boucle vertueuse pour pouvoir…

  • Pierre

    Eux, ils peuvent piocher…

  • Juliette

    Exactement, communiquer sur leur marque employeur, avoir des attestations RSE. En fait, le recrutement circulaire a été reconnu comme une externalité positive du recrutement et c'est donc contributif à toutes les obligations extra-financières. Donc, tu sais, tout ce qui est CSRD, etc.

  • Pierre

    Ouais, ok.

  • Juliette

    Donc, tous les adhérents du mouvement bénéficient en fait de tous ces...

  • Pierre

    C'est un sacré avantage pour vous, ça.

  • Juliette

    Oui, complètement. Et on a des grandes entreprises qui sont venues aussi vers nous parce qu'elles souhaitaient pouvoir indiquer qu'elles étaient engagées dans le mouvement du recrutement circulaire dans leur réponse aux appels d'offres.

  • Pierre

    Alors, pourquoi est-ce qu'on n'en entend pas plus parler ?

  • Juliette

    Parce que tu lis pas assez la presse ? Ah c'est peut-être ça !

  • Pierre

    Non mais vraiment tu vois, c'est en en discutant avec toi, etc. Et en fait, il y a un moment, en t'écoutant, je me suis dit mais c'est juste génial comme truc. Et je suis désolé, oui, peut-être que je lis pas assez la presse. Je regarde trop TikTok, c'est une certitude. Mais tu vois, par exemple sur TikTok, on n'en parle pas. en tout cas pas pour l'instant et je me dis que là il y a un vrai truc il y a une vraie matière parce que je sais pas vous qui nous écoutez mais voilà les process de recrutement ils peuvent quand même être longs, pénibles etc. on gagne pas à tous les coups si on a des portes de sortie positives c'est quand même super bien il y a un effet vertueux y compris pour les entreprises, c'est ce que tu évoquais enfin voilà je vois pas pourquoi tout Toutes les entreprises ne se mettent pas sur ces logiques-là.

  • Juliette

    Oui, tu as raison. Alors, il y a plusieurs explications. Donc, effectivement, je disais, en plaisantant par rapport à la presse, on a eu la chance d'avoir beaucoup d'articles dans Le Monde, Les Echos, la Harvard Business Review, etc. Mais encore une fois, le mouvement est très, très jeune. Donc, ça ne fait même pas un an et demi. Il y a toujours une inertie sur des innovations. Ça prend toujours un petit peu de temps aussi. Ce qu'on essaie de faire, nous, vraiment, c'est d'identifier les pionniers, les visionnaires, ceux qui sont capables de comprendre, de percevoir tout de suite à quel point le monde du recrutement est en train de changer et à quel point cette approche régénérative peut être intéressante, donc à la fois pour le candidat et pour les entreprises elles-mêmes. Mais quand tu me demandais quel est le client qui a été le plus difficile à convaincre, je pense que ce qui est le plus difficile pour nous, ce sont les habitudes en fait c'est la force de l'habitude et aujourd'hui tout notre travail quelque part c'est de faire comprendre de faire de la pédagogie pour expliquer exactement ce qu'est ce mouvement là et on a même des personnes qui nous disent c'est trop beau pour être vrai en fait qu'est-ce qui se cache derrière où est le loup et en fait c'est On passe beaucoup de temps à expliquer ce qu'est le mouvement, à expliquer à quel point ça peut être vertueux à différents niveaux. Donc, moi, je te suis. Je pense que toutes les entreprises devraient passer au recrutement circulaire parce que c'est quelque chose... Tu vois, on parle énormément d'économie circulaire de manière générale. On parle de recyclage, de revalorisation. En fait, on a juste oublié qu'on appliquait ça aux choses, mais qu'on ne l'applique pas aux humains.

  • Pierre

    Non, mais moi, je suis hyper convaincu, en fait. Mais justement, tiens... On va dire qu'il y a plusieurs centaines de dirigeants d'entreprise qui écoutent la colle. Ils ont envie d'y passer. C'est quoi ? Comment ils font ? C'est quoi le process ? Ils contactent Huggy ? Ils font quoi ?

  • Juliette

    On fait quoi ? C'est hyper simple. Ils peuvent me mettre un petit mot sur LinkedIn. Ils peuvent nous contacter sur le site internet de Huggy ou du recrutement circulaire. On en fait toujours un petit temps d'échange pour expliquer exactement comment ça se passe, pour présenter la plateforme aussi derrière. Et puis, quand une entreprise est adhérente du mouvement, on a toujours ce qu'on appelle un onboarding, en bon français. Donc, un temps vraiment d'accueil avec la personne qui sera leur interlocutrice dédiée dans l'entreprise. Donc, toute entreprise qui est adhérente, tout employeur qui est adhérent à, chez Eugie, il y a un... Un interlocuteur qui lui est dédié et qui va l'accompagner dans la prise en main de la plateforme, dans la mise en place de ses offres d'emploi, dans sa stratégie de marque employeur. Et puis après, c'est très simple. La plateforme est hyper intuitive. Les premières recommandations peuvent se faire très facilement. Je dis ça prend moins de deux minutes de faire une recommandation. Et on a plein d'exemples où ça a changé les vies. Une recommandation... permis à quelqu'un de...

  • Pierre

    De créer des opportunités.

  • Juliette

    De créer des opportunités. En fait, une recommandation amène un relief à un profil qui est sans commune mesure avec un CV qui est une page à quatre à plat.

  • Pierre

    Tu es vesté, comme on dit en bon français là aussi. Non, non, mais ça donne effectivement un relief. J'aime bien ce terme. Toi qui es... Alors, chez Huggy, je pense, mais aussi de manière plus générale, sur le recrutement et dans les RH. On parlait de monde qui change, patins, couffins, etc. Il y a la tarte à la crème de l'IA et donc du tsunami qui arrive. Un, comment vous, vous l'avez intégré ? Comment vous allez surfer sur cette vague ? Et derrière, plus généralement, comment tu vois ça dans les DRH ?

  • Juliette

    Oui, alors l'IA, évidemment, c'est un sujet que j'ai beaucoup suivi depuis très longtemps. Je suis... Comment te dire ? Je considère... Pour nous, notre travail, c'est de réhumaniser le recrutement. Justement, l'IA peut apporter effectivement énormément de choses, mais pour nous, ça doit être complètement transparent. C'est-à-dire qu'on a une grande partie de ce qu'on appelle les matchs, c'est-à-dire les mises en relation qui sont... algorithmé ou automatique, dans le sens où quelqu'un qui est commercial, qui cherche un job de commercial face à une offre de commercial, on n'a pas besoin d'intervenir, si tu veux. Là, la connexion va se faire automatiquement. Par contre, on considère qu'une grosse partie de notre travail chez Eugie, c'est de faire les choses non seulement à la main, mais surtout à l'humain. C'est-à-dire qu'il y a toute une partie des matchs, ce qu'on appelle nous des matchs atypiques. qui se font parce qu'il faut avoir une détection assez fine des valeurs, des envies, des souhaits de reconversion, des choses comme ça. Et tout ça, ça reste quand même l'humain qui peut l'apporter. Donc je pense qu'il y a énormément de choses qu'on peut mettre en place grâce au numérique de manière générale et à l'IA, mais qu'on doit toujours s'en servir comme d'un outil. Nous, par exemple, ça nous fait gagner beaucoup de temps sur des comptes rendus, sur la génération de comptes rendus, de réunions ou de choses comme ça. Donc, évidemment que ces outils, on les intègre, qui font partie prenante du fonctionnement de l'entreprise. Mais pour autant, dans ce qui reste notre cœur d'activité, c'est-à-dire des connexions, des mises en relation, tout ce qui fait quand même le sel de la vie, tout ce qui fait la densité, tout ça. On aime quand même penser qu'il y a une bonne partie qui reste de l'humain et ça, ça ne doit pas changer. Donc, on a un rapport assez équilibré à ce qui est en train de se passer.

  • Pierre

    Après, ça m'amène sur un sujet qui est vrai pour les humains comme pour les machines. Après, je ne sais pas, il peut y avoir un vrai débat, mais c'est sur les biais qu'on peut avoir. Comment, justement, dans l'algorithmie que vous avez pu mettre en place, comment vous arrivez à ne pas finalement reproduire des biais que pourraient avoir les humains, ne serait-ce que sur les problématiques de genre, etc. C'est aussi bête que ça.

  • Juliette

    Oui, complètement. Alors ça, j'allais dire, c'est presque un sujet philosophique. Et c'est quelque chose qui est en réflexion permanente chez nous, c'est-à-dire qu'il n'y a pas à ce stade une réponse unique là-dessus. On travaille beaucoup avec nos développeurs sur la façon dont on peut intégrer ça, dont on peut éviter de tomber dans des pièges, dont on peut être le plus fin possible. Est-ce qu'en fait, toute la difficulté, elle se trouve là-dedans ? C'est comment est-ce que tu normalises, standardises, fais rentrer dans des cases ? quelque chose qui est de l'ordre de la finesse. Et je pense que c'est toute la réflexion, en fait, philosophique presque qu'il y a derrière. Et si tu veux, je vais te donner un exemple qui est assez parlant. On travaille beaucoup avec les banques qui cherchent des chargés de relations clientèles. Tu prends la fiche de poste, la fiche de poste, c'est exactement la même, chargé de relations clientèles d'une banque à l'autre. Sauf qu'il y a une banque, tu arrives, tu sors de l'ascenseur. tu as des écrans qui clignotent de partout en disant encore 50 appels avant d'être le meilleur vendeur du mois, les objectifs, etc. Tu sors de l'ascenseur dans l'autre banque, le seul objectif de l'année, c'est d'avoir contacté tous tes clients au moins une fois. Si tu veux, ça, dans la fiche de poste, ça ne transparaît pas forcément. Et ça, dans une IA, c'est quelque chose qui est assez difficile quand même à retranscrire. Et donc, tout l'intérêt, c'est comment est-ce que tu peux arriver à, sur des... des choses, oui, encore une fois, qui relèvent de la finesse, qui relèvent des valeurs, qui relèvent de quelque chose de très humain, finalement, de l'environnement de travail. Comment est-ce que tu vas arriver à rendre compte de ça d'une façon normée, tu vois ? Donc, c'est un petit peu tous les enjeux qu'il y a derrière sur la structuration de la donnée, sur comment est-ce que tu fais en sorte que ta donnée, elle reproduise le plus fidèlement possible toutes ces nuances-là. de la vie, tout simplement, de la vie, de la personnalité. C'est un sujet qui est passionnant.

  • Pierre

    Oui, complexe, complexe. Complexe. Passionnant. Je me faisais la réflexion en t'écoutant, si jamais on a des candidats qui nous écoutent, parce que... De ce que j'ai compris là, finalement, tu rentres dans la logique de Huggy et du recrutement circulaire que si tu es déjà finalement dans des process de recrutement. À un moment, il y a un point d'entrée. Je vais changer de boulot. Je viens de voir. Je pose mon CV chez toi.

  • Juliette

    Alors, en fait, tu as deux possibilités d'être sur la plateforme. Soit tu es recommandé. par quelqu'un, donc ça peut être effectivement à la fin d'un processus de recrutement. Tu peux être recommandé par le recruteur. Voilà, tu n'es pas pris, mais il dit, je vais jamais te donner un coup de pouce. Tu peux être recommandé par le recruteur sur la plateforme. Soit tu peux te préinscrire sur Eguy et demander une recommandation à postériori. Et à ce moment-là, ton profil n'est actif que quand tu as ta première recommandation.

  • Pierre

    D'accord, ok.

  • Juliette

    En fait, ce qui est intéressant dans le modèle, c'est qu'il y a énormément de profils hors marché. qui sont sur la plateforme, parce qu'en fait, ça n'est ni un job board, ni une CV tech. Un candidat n'est visible d'une entreprise qu'à partir du moment où il a accepté un match avec cette entreprise. Donc en fait, c'est vraiment cette logique de match, mais on aime bien dire en plaisantant qu'on a un peu le Tinder ou le mythique de l'emploi. C'est vraiment qu'il faut qu'il y ait rencontre entre candidats et entreprises pour que le candidat soit visible. Et donc, ça nous permet, sur des secteurs pénuriques, d'avoir pas mal de candidats qui en ont marre d'être démarchés, qui n'ont plus envie d'être sollicités, qui veulent reprendre... qui veulent reprendre la main sur leur recherche d'emploi et n'être mis en contact qu'avec des entreprises, des opportunités qui les intéressent.

  • Pierre

    Et oui, parce que pour certains jobs, effectivement, ils se font chasser trois fois par jour.

  • Juliette

    Exactement.

  • Pierre

    Beaucoup sur des profils très techniques d'ailleurs. Ok, c'est quoi le principal obstacle au développement de Guy ?

  • Juliette

    La durée des journées ? Non, après, ce que je te disais, c'est vraiment de faire ce travail-là qui est inhérent à toute innovation. Tu as toujours un temps un peu d'inertie pour aller expliquer, pour faire comprendre, pour faire bouger un petit peu les lignes. Donc, c'est principalement ça pour l'instant. Après, nous, on n'a quasiment que des demandes entrantes pour l'instant. Donc, c'est plutôt...

  • Pierre

    C'est génial, attends ! Franchement, c'est tout... C'est confort !

  • Juliette

    Et puis, ce qui est très chouette aussi, c'est qu'on a beaucoup d'adhérents qui sont des vrais ambassadeurs du mouvement, qui communiquent dessus sur leurs réseaux sociaux, qui mettent dans leurs offres d'emploi, qui sont engagés dans le mouvement du recrutement circulaire. Donc, en fait, c'est quelque chose qui est un peu incrémental, qui va au fur et à mesure...

  • Pierre

    Oui, et puis tu... Tu les places dans un cercle vertueux, donc c'est au-delà de plein de bénéfices qu'il peut y avoir. C'est pas mal du tout. Mais toi, Juliette, dans tout ça ? on se reparle dans dix ans tu y es toujours ou pas ? Je ne peux pas te dire parce que j'ai toujours fonctionné aux opportunités, aux rencontres, en disant pour moi c'est un horizon qui est super...

  • Juliette

    Spécialement très très loin.

  • Pierre

    Qui est super lointain, exactement. Donc je ne sais pas, mais aujourd'hui mon quotidien c'est ça, et en tout cas pour les prochaines années c'est ça. On a quand même des objectifs assez ambitieux de croissance et de développement au niveau de Guy. On en est au... au tout début, même s'il y a des signaux qui sont très agréables et très positifs. Mais...

  • Juliette

    Tu t'éclates.

  • Pierre

    Oui, complètement. Et puis, on a une équipe qui est vraiment géniale. Ça a du sens. Moi, c'est vraiment ce que je cherchais. C'est-à-dire que quand j'ai quitté la région, dans mes réflexions sur ce qui était un peu mes moteurs, pour mon prochain projet entrepreneurial, Je voulais qu'il y ait trois choses. Je voulais qu'il y ait une équipe avec laquelle ça se passe bien. C'est toujours pareil, les hommes et les femmes, c'est ce qui est vraiment les projets. Je voulais qu'il y ait du sens. Et ça, pareil, ça a toujours été le fil rouge de l'introduction.

  • Juliette

    Oui, c'est le fil rouge de cette introduction. C'est qu'il y a du sens à tous les étages, franchement.

  • Pierre

    Oui, je crois, oui. Et puis, le troisième point, c'est que je voulais vraiment un impact, c'est-à-dire un projet ambitieux qui soit un facteur de transformation. J'aime bien cette idée qu'on peut être un facteur de transformation du monde, enfin au moins du monde autour de soi.

  • Juliette

    Oui, c'est beau. C'est quoi la question que j'aurais dû te poser et que je n'ai pas posée jusqu'à maintenant ?

  • Pierre

    C'est une conversation qui peut être très très longue. On a plein de questions.

  • Juliette

    Tiens, si j'en ai une. Pourquoi Huggy s'appelle Huggy ?

  • Pierre

    Alors, il y a deux raisons. La première, c'est une question générationnelle. Tu sais, c'est Huggy les bons tuyaux.

  • Juliette

    Oula, ouais. Cherchez loin, d'accord.

  • Pierre

    Ou plus ou moins, ça, c'est la deuxième, c'est la petite blague. Et la première, c'est cette notion, tu vois, du hug, de la bienveillance. C'est ça qu'il y avait derrière dans cette idée-là.

  • Juliette

    Ok.

  • Pierre

    Ouais, de la communauté, du partage.

  • Juliette

    Ok, super. Bon, en tout cas, vous l'avez compris, vous qui nous écoutez, je crois qu'il y a un vrai truc autour du recrutement circulaire. Enfin, moi, je me demande pourquoi ça n'avait pas été fait avant, d'ailleurs. T'as une idée toi ? Parce que, alors, je veux bien me faire le chantre de l'innovation, mais c'est une idée qui est frappée au coin du bon sens. Pourquoi personne l'a fait avant ?

  • Pierre

    Alors, bon, je... Il y a probablement plusieurs explications. Déjà, la première, c'est qu'on le fait tous un peu naturellement, individuellement. Quand tu as vu quelqu'un de super, un bon candidat que tu ne peux pas donner suite, tu vas avoir tendance à contacter ton réseau, etc. Là, l'idée, c'est de dire comment est-ce qu'on industrialise, comment est-ce qu'on passe à l'échelle. Ça se retrouve aussi un petit peu dans l'idée de cooptation. Sauf que la cooptation, c'est du N-A. 1 et là on est sur du N à N et puis je pense que il fallait que ce soit un projet qui parte de zéro, c'est à dire que je pense que tu ne pouvais pas forcément intégrer ça dans quelque chose déjà existant, il fallait vraiment commencer from scratch du début ok, ça me va et puis je pense qu'après on a capacité aujourd'hui maintenant avec justement ces outils de plus en plus performants à ... à pouvoir plateformiser assez rapidement des idées comme ça. Parce qu'encore une fois, l'idée est une chose, mais...

  • Juliette

    Ils en ont un.

  • Pierre

    C'est vraiment une exécution.

  • Juliette

    Tu m'étonnes. Avant de passer aux sept dernières questions, Juliette, j'ai fait passer ton profil dans Charge EPT. Et je lui ai demandé de me poser, de me trouver une question. Un peu tricky que je pourrais te poser. Donc, voici la question que te pose ChatGPT. Pourquoi avoir implanté Huggy à Vez plutôt qu'à la part d'yeux, symbole de la tech lyonnaise ? J'ai trouvé la question intéressante.

  • Pierre

    Alors, parce qu'à Vez, on a une magnifique vue sur la Saône qui coule et c'est extrêmement inspirant pour réfléchir.

  • Juliette

    Donc, c'est vraiment le contexte de l'écosystème naturel de Vez. Oui,

  • Pierre

    alors après, on a aussi la chance d'être hébergé chez Babola. Et chez Babola, on a un magnifique toit terrasse où on peut déjeuner dès qu'il fait beau. Ça a été un gros critère de choix.

  • Juliette

    Non, je me doute. Et puis, ce n'est peut-être pas les mêmes tarifs à Vez qu'au niveau de la part Dieu, non ? Pour les locaux, etc.

  • Pierre

    Oui, après, il y avait des questions aussi d'accessibilité en fonction de là où étaient les uns et les autres. Et Vez, pour le coup, était un bon compromis. Donc, c'est une réponse un peu plus triviale.

  • Juliette

    Le pari centre des collaborateurs.

  • Pierre

    Exactement. Et puis après, tu sais, les rencontres avec les membres de la tech. Moi, je pourrais te dire qu'un des gros écosystèmes de la tech aussi sur Lyon, c'est à confluence avec H7. Donc, tu retrouves plusieurs centres.

  • Juliette

    Non, mais ne m'engueule pas, c'est déjà du GPT là pour le coup. Tu lui apporteras. J'ai une question. Ça marche. Allez, Juliette, c'est parti. pour les sept dernières questions. Juliette, dis-nous quel est ton mot préféré ?

  • Pierre

    Pour sa sonorité, c'est l'ultra crépit d'arianisme.

  • Juliette

    Ouah ! Alors là, il faut une définition.

  • Pierre

    En fait, l'ultra-crépidarianisme, c'est le fait de vouloir donner son avis sur tout sans avoir aucune compétence.

  • Juliette

    Oh, j'en connais plein des comme ça.

  • Pierre

    Ben voilà, oui, oui. C'est une... Je l'aime pour la sonorité. Après, pour le sens, je pense qu'il y a bataille entre énergie et optimisme.

  • Juliette

    Ok. Ouais, c'est plus consensuel. Mais j'aime bien le premier. J'aime bien le premier. Je vais le retrouver. Je le mettrai dans les notes de l'épisode. Ce sera sympa. Quel est le mot que tu détestes ?

  • Pierre

    Je déteste le mot lâcheté. Je le trouve très moche.

  • Juliette

    Hum, ouais. J'essaie de faire un truc politiquement correct justement sur la lâcheté, mais j'y arrive pas. Mais des lâches, oui, il y en a pas mal. Alors je sais pas, c'est peut-être parce que je vieillis aussi, mais je trouve que des gens avec du courage, il y en a de moins en moins. Mais bon. C'est un avis très personnel qui n'engage que moi. Le son ou le bruit que tu aimes ?

  • Pierre

    Alors, j'ai eu la chance, plus jeune, de faire beaucoup de voiles avec mes parents. Et je t'avoue qu'il y a un son qui m'apaise particulièrement, c'est celui des vagues, tu vois, quand tu navigues, de l'eau qui...

  • Juliette

    Tu fends les vagues ?

  • Pierre

    Oui, qui est contre la coque du bateau. Et je trouve que c'est un son qui amène particulièrement à la contemplation ou à la réflexion. Je trouve que ça te permet de te reconnecter aussi sur ton rythme à toi. C'est un son que j'aime beaucoup. Et il y en a peut-être un deuxième aussi. Je dirais que c'est l'hiver de Vivaldi qui me transporte littéralement à chaque fois.

  • Juliette

    Ok,

  • Pierre

    d'accord. C'est le seul moment où j'aime l'hiver, c'est avec Vivaldi.

  • Juliette

    D'accord, classe. Le son ou le bruit que tu détestes ?

  • Pierre

    Les grincements de manière générale.

  • Juliette

    La craie sur un tableau ? Oui,

  • Pierre

    hyper sensible aux sons, aux odeurs, etc. Donc les grincements, ça peut vite m'agresser.

  • Juliette

    Le papier alu ?

  • Pierre

    Oui.

  • Juliette

    Bon d'accord, on est pareil. Alors, Madame Jarry, votre juron, gros mot ou blasphème favori ?

  • Pierre

    Un très classique putain.

  • Juliette

    Ouais. Il n'y en a pas un plus exotique ?

  • Pierre

    Il y a un bordel à cul de mon grand-père.

  • Juliette

    J'aime bien celui-là. Je prends celui de ton grand-père. La citation que tu aurais aimé avoir prononcée ?

  • Pierre

    Ne nous prenons pas au sérieux, il n'y aura aucun survivant. D'Alphonse Allais.

  • Juliette

    Oh, joli. Ça me fait penser à un truc, par ta position, alors par tes positions de directeur général, etc., par ta position de vice-présidente, t'as eu à maintes reprises l'occasion de prendre la parole. Déjà, alors tu l'as dit, au moins au début de ton expérience politique, c'est pas forcément un truc que t'aimais particulièrement. Est-ce que t'as appris à aimer cette expérience-là ?

  • Pierre

    Oui. En fait, j'ai commencé à aimer prendre la parole en public quand je me suis détachée du côté technique. Parce qu'au début, c'est ce que je t'expliquais tout à l'heure, il y a eu une phase d'apprentissage qui a quand même été assez intense. Et je me disais que je ne serais légitime que quand je maîtriserais parfaitement mes dossiers. Et donc, j'essayais d'être assez pointue, etc. Et quand j'ai réussi à me détacher de ça, c'est-à-dire d'atteindre un niveau de connaissance et de maîtrise suffisant, j'ai pu me détacher de ça pour vraiment basculer sur l'émotion, sur la vision, sur le fait d'embarquer aussi un auditoire avec toi. Et là, oui, j'ai commencé à prendre vraiment du plaisir. Et puis à partager aussi, tu vois, à jouer avec l'audience. à susciter un peu des réactions. Et là, ça commence à devenir super.

  • Juliette

    Puisque quand tu sens que ton discours porte, quand tu sens que tu commences à embarquer les gens avec toi, il y a une puissance de la parole qui est juste incroyable.

  • Pierre

    Oui, et je pense que ça te permet à ce moment-là de te connecter aussi à une forme d'authenticité chez toi. Parce que ce qui est très compliqué, si tu veux, quand tu es... élu, quand tu es sur ces fonctions-là, c'est qu'en fait, tu es toujours en représentation. Donc, quand tu es quelque part, ce n'est pas Juliette qui prend la parole, c'est la vice-présidente de la région Vernier-Rhône-Alpes. Donc, tu incarnes quelque chose qui te dépasse. Et donc, c'est toujours aussi cet exercice qui est parfois un peu compliqué, fragile, périlleux de te dire qu'est-ce qui, dans cette prise de parole... est à moi et qu'est-ce qui est un exercice de style un peu imposé. Mais je trouve que quand tu arrives à te reconnecter à une forme d'authenticité, là aussi, ça vient donner une puissance à ton discours qui est très sympa.

  • Juliette

    Clairement. Et puisqu'on parle d'authenticité, on arrive à la dernière question. Si Dieu existe, qu'aimerais-tu, après ta mort, l'entendre te dire ?

  • Pierre

    On a un rapport assez distancié tous les deux, je le sollicite assez peu pour déconseiller des miracles.

  • Juliette

    Joliment dit !

  • Pierre

    S'il existe et qu'on doit se croiser après ma mort, peut-être que j'aimerais qu'il me dise sans rancune.

  • Juliette

    Sans rancune ? Parce que tu devrais être rancunière vis-à-vis de lui, tu penses ? Ah, lui ! Ok, d'accord, je comprends. Ça marche. Bon, c'est joli tout ça. Juliette, il m'est à te remercier. Je l'ai dit, mais vraiment, et je l'aurai dit en toute sincérité, là aussi. Je trouve que l'idée même du recrutement circulaire est géniale, vertueuse, tout ce qu'on veut. pour tous ceux qui nous écoutent, allez regarder ça d'encore plus près que ce qu'on a pu faire aujourd'hui. Vous verrez que je pense qu'il y a un vrai truc derrière ça. C'est aussi pour ça que j'ai voulu avoir Juliette avec nous aujourd'hui. Donc, merci beaucoup. Merci beaucoup, Juliette.

  • Pierre

    Merci à toi,

  • Juliette

    Pierre. On se revoit dans dix ans pour refaire un point. sur l'avancement de tout ça. OK ?

  • Pierre

    Avant, j'espère.

  • Juliette

    C'était la Khôlle de Juliette Jarry. Merci, Juliette.

  • Pierre

    Merci beaucoup.

  • Juliette

    Bravo, vous avez tenu jusque-là. Merci de votre écoute. Si vous avez aimé cet épisode, partagez-le sur les réseaux sociaux, allez mettre 5 étoiles et des commentaires sur les plateformes de podcast. Abonnez-vous, abonnez-vous à notre newsletter et dans tous les cas, à tout le monde. A très bientôt pour un prochain épisode de La Khôlle. Et n'oubliez pas, tout est possible à qui rêve, ose, travaille et n'abandonne jamais.

Description

Juliette Jarry, une entrepreneuse visionnaire passée par l’action publique avant de revenir à l’innovation sociale avec Huggy et le concept du recrutement circulaire.


Juliette nous partage son parcours fascinant :
✅ La création de son entreprise d’aide à domicile à seulement 24 ans, en repensant totalement le modèle du secteur.
✅ Son expérience comme vice-présidente de la région Auvergne-Rhône-Alpes, où elle a mené la transformation numérique d’un territoire de 8 millions d’habitants.
✅ Son engagement actuel dans une révolution du recrutement avec Huggy, une plateforme qui valorise et recycle les talents en leur évitant de repartir de zéro.


💡 Pourquoi cet épisode est incontournable ?
👉 Parce qu’on y parle d’audace, d’innovation et de comment changer le monde à son échelle.
👉 Parce que Juliette brise les clichés sur l’entrepreneuriat et la politique avec authenticité et pragmatisme.
👉 Parce que le recrutement circulaire pourrait bien être l’avenir du marché du travail !

🔥 Une conversation passionnante, inspirante et pleine de vérités sur l’entrepreneuriat, la politique et la tech.

📢 Écoutez, partagez, et surtout, osez !


Juliette sur linkedin : https://www.linkedin.com/in/jarry-juliette/

Site web Huggy : https://www.huggy-recrutement.com/




Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Pierre

    Bienvenue dans la Khôlle. Vous êtes curieux ? Vous avez soif de comprendre le monde qui vous entoure ? Alors vous êtes au bon endroit. Si vous aimez vous remettre en question, que comme moi vous pensez qu'on n'a jamais fini d'apprendre, alors la colle est faite pour vous. Sans se prendre au sérieux, je vous propose à chaque épisode de partir ensemble à la découverte de nouveaux horizons, de profils et d'idées inspirantes. Je suis Pierre Barraud, j'ai créé, édité et produit ce podcast. Je suis également directeur général du Campus Orléans de l'ISC Paris, école de commerce, membre de la Conférence des Grandes Écoles. Mon mantra ? Vis comme si tu devais mourir demain, apprends comme si tu devais vivre toujours. Je suis preneur de tous vos commentaires, suggestions, remarques, ils sont tous bienvenus. Et bien évidemment, je compte sur vous pour placer 5 étoiles et des commentaires sur toutes les plateformes. Allez, c'est parti, bonne écoute ! Bonjour et bienvenue dans ce nouvel épisode de La Khôlle. Aujourd'hui, j'ai l'immense honneur d'accueillir Juliette Jarry. Salut Juliette !

  • Juliette

    Bonjour Pierre !

  • Pierre

    Ça me fait très plaisir de pouvoir discuter avec toi parce que tu es une entrepreneuse, tu as plein de trucs, tu as eu mille vies en fait, on peut dire ça et ça va être juste super intéressant. Mais justement, pour tous ceux qui ne te connaîtraient pas encore, est-ce que tu peux te présenter en quelques mots ?

  • Juliette

    Oui bien sûr, avec plaisir. Bonjour à tous, je m'appelle Julie JARRY, j'ai 43 ans, j'ai deux enfants. J'aime bien dire que je suis bilingue publique et privée, puisque j'ai à la fois un parcours en effet de chef d'entreprise. J'ai créé ma première entreprise à 24 ans, à la fin de mes études de sciences politiques. Donc c'est une entreprise... Tu étais précoce,

  • Pierre

    dis donc ! Pardon ? Tu étais précoce ! Non, parce que créer son entreprise directement en sortie d'études, ce n'est pas tout le monde.

  • Juliette

    Oui, on pourra y revenir, parce que c'est vrai que c'était un contexte qui était intéressant. Moi, la patience n'a jamais été la première de mes qualités. Et c'est vrai que j'ai adoré mes études à Sciences Po. J'ai pris beaucoup de plaisir. J'ai vraiment eu l'impression d'arriver dans un univers et un environnement où le fait d'apprendre, d'être curieux, tout ça a été valorisé. Donc, j'ai adoré ça. Mais j'ai été confrontée à la fin de mes cinq années d'études. principe de réalité que j'avais pas vraiment anticipé, à vrai dire. Et qui était qu'en fait, il fallait travailler après.

  • Pierre

    Oh mon Dieu !

  • Juliette

    Et oui, c'est ça. Et donc, je me suis dit, mais en fait, qu'est-ce que j'ai envie de faire ? Et qu'est-ce que tu sais faire à la fin de Sciences Po ? Enfin, c'est une formation qui est géniale et t'apprends plein de choses. Mais contrairement à un médecin qui sait qu'il va être médecin, quand tu fais Sciences Po, ça reste une formation qui est hyper généraliste, mais comme les écoles de commerce, ou comme un type de formation. et qui peuvent potentiellement t'ouvrir à plein de choses, mais à rien de bien défini à la base. Et c'est vrai que moi, à l'époque, ce qui m'intéressait beaucoup, c'était l'évaluation des politiques publiques. Je pense que c'était un peu précurseur à l'époque. Ça l'est encore un peu.

  • Pierre

    Ouais, ouais, ouais. Et puis, avec la tendance muskienne qui arrive là, je ne sais pas. Mais ouais, il y a un truc, en tout cas.

  • Juliette

    Là, en l'occurrence, on était, tu vois... 2005, donc c'était un petit peu tôt. Donc, j'ai cherché du travail pendant peut-être trois ou quatre mois et j'ai très rapidement eu une frustration qu'on me dise que j'avais un beau parcours, que j'avais fait des jolies choses, mais que j'étais trop jeune.

  • Pierre

    Pas d'expérience, tout ça.

  • Juliette

    Voilà, il ne fallait pas qu'ils s'inquiètent, ça n'allait pas durer. Mais ces quelques mois de recherche m'ont beaucoup frustrée. Alors, on rentre directement dans le vif du sujet, mais allons-y. Mais à cette époque, ma grand-mère était en perte d'autonomie. Et en fait, la conjonction des deux, de cette situation personnelle et de ma recherche d'emploi, m'a amenée à me dire, mais pourquoi pas créer une entreprise d'aide à domicile spécialisée autour de la notion de lien intergénérationnel. Et donc, à la fin de mes cinq ans d'études de sciences politiques, j'ai fait une formation à la création d'entreprises pendant six mois pour valider mon projet.

  • Pierre

    Dans quel cadre ? Dans... Avec un organisme ?

  • Juliette

    En fait, c'était un organisme qui était mis en place par Pôle emploi à l'époque. OK. Donc, ils m'ont proposé ça. Et là aussi, pareil. Donc, normalement, je devais rentrer sur la session d'après, mais ça ne m'allait pas du tout. Donc, j'ai fait un peu de forcing pour recommencer la formation tout de suite. Et j'ai validé, en fait, tous les aspects fiscaux, juridiques, sociaux de mon projet. Et donc, je me suis lancée à l'école. Et ce qui était... Alors, très souvent, on me disait « Ah, c'est super courageux ! » Je dis « Non, en fait, c'est très inconscient. »

  • Pierre

    C'est un peu ça, oui.

  • Juliette

    Il en faut beaucoup quand tu crées une entreprise. Parce qu'effectivement, je n'avais pas de réseau dans ce secteur-là. C'est un secteur que je ne connaissais pas.

  • Pierre

    Le modèle aide à la personne, c'est ça ?

  • Juliette

    Oui, donc en fait c'est une entreprise qui au début était basée sur ce type de lien intergénérationnel, c'est-à-dire comment est-ce qu'on peut considérer les personnes âgées, nous pas uniquement sous l'angle de leurs incapacités à faire, mais de ce qu'elles pourraient transmettre à quelqu'un de plus jeune, donc avoir une relation d'aide qui n'est pas à sens unique, mais qui soit vraiment dans cette notion aussi de partage et d'échange. Et donc, ça m'a amenée à travailler dès le début avec des étudiants en fin de cursus en psychologie, moniteur éducateur, éducateur spécialisé, médecin, etc. Donc, avec des profils. En fait, ce que j'ai adoré dans cette expérience, c'était prendre le contre-pied de tout ce qui existait sur le marché. Je n'avais pas envie de créer la 150e entreprise d'aide à la douceur de l'église. J'avais vraiment envie d'apporter une valeur ajoutée différente. Et donc, c'était un peu un ovni dans le secteur puisque... Si on caricature un petit peu, en général, les salariés dans l'aide à domicile sont plutôt des femmes qui ont 46 ans, qui ont élevé des enfants, qui n'ont pas de diplôme et qui souhaitent reprendre une activité professionnelle à temps partiel, etc. Alors, c'est vraiment une grosse caricature.

  • Pierre

    Oui, c'est pas loin de la vérité, je pense.

  • Juliette

    Et du coup, chez ADA Présence, qui est une entreprise, nous, on avait une moyenne d'âge qui était de 23 à 24 ans, niveau moyen de diplôme, bac plus 4.

  • Pierre

    et puis comment t'allais les chercher ?

  • Juliette

    et bien en fait on bénéficiait d'une aberration du système à l'époque, notamment chez les étudiants en psychologie qui était que tu avais un jury de sélection qui était très pointu pour passer du master 1 au master 2, il y avait en gros 80-85% des étudiants de psychologie qui ne passaient pas du premier cours de l'un à l'autre et donc ils se retrouvaient sur une année de césure ou sur une année si tu veux où ils allaient en profiter pour acquérir de l'expérience Et pour nous, c'était génial parce que ça nous amenait des profils qui étaient vraiment force de proposition. Et ce qui fait que progressivement… Toi,

  • Pierre

    tu faisais la sortie des jurys, c'est ça ?

  • Juliette

    Au fil du temps, on a commencé à être plutôt connus. Oui,

  • Pierre

    des petites réputations.

  • Juliette

    Exactement. Et du coup, l'entreprise a progressivement évolué sur l'accompagnement, donc non seulement de personnes âgées, mais aussi d'enfants et d'adultes en situation de handicap. Et tout particulièrement sur des pathologies complexes. Donc, on est devenu spécialiste de la prise en charge de l'autisme, des séquelles de trauma crânien, des maladies neurodégénératives comme Alzheimer, etc. Et ce qui était hyper intéressant aussi dans cette entreprise, c'est qu'on avait vraiment cet axe très fort sur le développement et le maintien de l'autonomie.

  • Pierre

    Alors, une question qui me vient, je suis désolé, ce n'est pas très humaniste comme approche, mais... Dans ces business models, c'est très people intensive et les people, ça coûte cher. Comment on arrive à trouver un équilibre économique à tout ça ?

  • Juliette

    C'est une très bonne question. Effectivement, moi, dès le début, je me suis dit qu'il fallait que j'automatise tout ce qui était à faible valeur ajoutée. Donc, on a vraiment... Et c'est en ça aussi que l'entreprise était un peu en ovni. C'est qu'en 2006, quand je lance l'entreprise, je commence déjà à réfléchir à... à faire un cahier des charges pour développer un extra net à façon qui me permettrait d'avoir aussi un modèle de fonctionnement interne qui est très basé sur ce qu'on appelle à l'époque les nouvelles technologies. Donc, par exemple, nous, on ne passait pas notre vie à appeler les intervenants pour leur dire est-ce que vous êtes disponible pour aller chez Madame X ou Monsieur Y. Ils avaient accès en fait à la liste de toutes les missions à pourvoir sur cet extra net et se positionnaient sur les missions qui les intéressaient. Ce qui avait un double avantage, c'est qu'on était sur une logique de co-construction de planning. On savait que quand ils acceptaient une mission, c'est aussi que c'est une mission qui les intéressait. Et puis du coup, ça limitait aussi notre charge en termes de coordination, parce qu'on n'avait plus qu'à effectuer la mission aux intervenants. Donc il y avait ça. C'était aussi un extra net sur lequel ils allaient pouvoir rédiger leur compte rendu de façon automatique. Je ne voulais pas les faire passer à l'agence toutes les semaines, déposer leur feuille de papier, etc.

  • Pierre

    Non mais t'as raison, t'es génial !

  • Juliette

    On avait mis en place de l'AI formation, ils pouvaient emprunter des ouvrages, ils pouvaient emprunter des jeux. Tout ça était intégré dans cette extra nette et qui était vraiment le cœur de fonctionnement de l'entreprise de manière un peu native.

  • Pierre

    C'est quoi ta plus grande fierté dans tout ça, de cette expérience-là ? Parce que ce n'est que la première qu'on prenait.

  • Juliette

    Oui, il y a plein de... plein de moments forts et de choses dont on peut collectivement être fière dans cette entreprise, mais moi je pense qu'un des moments les plus émouvants que j'ai vécu c'est de voir une maman d'un jeune en situation de handicap arriver au bureau en pleurs et en me disant mais vous ne vous rendez pas compte, grâce à vous on va pouvoir aller avec mon mari au restaurant ça fait des années que ça ne nous est pas fait et je pense que au-delà de cette histoire il y avait une âme dans cette entreprise, c'était ça qui était très très chouette ... C'était une entreprise où on apportait des solutions qui étaient très concrètes et très tangibles. avec une façon de le faire, je crois, qui était très, très humaine.

  • Pierre

    Alors, il y a eu un petit bug dans la matrice où le truc s'est coupé, mais ce n'est pas grave. On continue et je reprends sur ma question qui était que j'avais fait mon boulot, j'avais regardé ce qu'on pouvait dire sur toi, notamment sur cette expérience-là. Et un journaliste notait une approche très humaniste de ton management, ce qui résonne avec ce que tu vas faire plus tard, d'ailleurs. Pourquoi est-ce qu'il a écrit ça, à ton avis ?

  • Juliette

    Je pense que c'est vraiment lié à cette âme dont je parlais dans l'entreprise. J'avais aussi quelque chose qui était très fort chez moi, c'était la volonté que la pérennité de l'entreprise ne repose pas sur mes seules épaules. Et donc, je pense que tous les collaborateurs se sont très rapidement sentis aussi... porteur de cette entreprise, de ses valeurs, de ce qui en faisait vraiment les spécificités. Donc je pense que c'est probablement lié aussi à ce qu'il a ressenti de cette aventure collective. On était dans un secteur qui non seulement était effectivement très humain, mais je pense que ce que j'ai adoré, ce que j'ai essayé de faire, c'est aussi de permettre aux collaborateurs qui m'ont rejoint dans cette aventure de la vivre et de grandir avec. Et ça, je pense que c'est effectivement quelque chose qui me tient très à cœur.

  • Pierre

    Pourquoi ? Alors, essaie de me donner la vraie raison. Pourquoi tu as finalement décidé de revendre cette entreprise ? Alors ça, c'est ma première question. Et deuxième question qui est immédiate, qui est, est-ce qu'on vend une entreprise à mission comme on vend n'importe quelle autre entreprise ?

  • Juliette

    Alors, je vais te donner la vraie raison pour laquelle j'ai vendu cette entreprise. Je ne comptais pas t'en donner une fausse. Tout simplement parce que j'avais fait le tour et que je considérais que je n'étais plus la bonne personne pour continuer à la développer. Je pense que... Je ne sais pas si on peut dire ça comme ça, mais je pense avoir une forme de lucidité sur ce que je peux apporter à un projet. Et en l'occurrence, là, c'était... Voilà, c'était plus moi, tout simplement, qui pouvait porter l'entreprise plus loin. Et je n'en avais plus l'envie profonde. Il fallait aussi que je fasse autre chose. J'y ai passé 11 ans dans cette entreprise, ce qui est quand même relativement long. J'ai commencé à ressentir un petit peu ce besoin d'autre chose, je pense, au bout de 7-8 ans. Et il se trouve que c'était aussi un moment où mes enfants étaient tout petits, donc je me suis laissé le temps aussi...

  • Pierre

    On se fait rattraper par la vie.

  • Juliette

    Exactement. Et puis, à un moment donné, je me suis dit, ok, maintenant, c'est le moment. Je pense qu'il faut passer la main et apporter aussi une énergie nouvelle, un regard nouveau sur cette entreprise.

  • Pierre

    Tu penses justement, ce n'est pas un jugement, mais qu'en fonction des profils entrepreneurs, tu as des profils qui font le zéro à un.

  • Juliette

    Et puis,

  • Pierre

    ceux qui font le 1 à 10, le 10 à 100, etc.

  • Juliette

    Oui, complètement. Moi, je ne suis pas du tout une gestionnaire. Moi, ce qui me plaît, c'est de monter des projets, c'est de les penser différemment, c'est de les optimiser au début. Mais une fois que ça roule et que c'est… C'est chiant,

  • Pierre

    d'accord. C'est plus beau. Il faut toujours des trucs nouveaux, un peu excitants.

  • Juliette

    Je ne sais pas si c'est chiant, mais effectivement, je pense que ça correspond à des personnalités différentes. Et… Et il faut être lucide sur ce qu'on aime faire, sur là où on est bon, là où on ne l'est pas. Et en l'occurrence, moi, j'ai adoré penser complètement différemment ce projet. Mais je pense que c'est un peu le fil rouge. Et du coup, je n'ai pas du tout terminé mon introduction, mais ce n'est pas grave. Ce n'est pas grave.

  • Pierre

    C'est une introduction d'une heure. La colle, c'est le principe. Et en fait, c'est un peu le fil rouge, je crois, de ma vie professionnelle. C'est ce que j'aime, c'est l'innovation dans des secteurs qui sont très variés. Et pas toujours une innovation ultra technologique. Au contraire, c'est souvent une innovation sociale ou sociétale que j'aime apporter. Et c'est un peu, on le verra plus tard probablement, c'est un peu le point commun entre AD à présent, cette première entreprise, et puis celle dont je suis aujourd'hui directrice générale, et puis mon expérience aussi. Absolument. Puis on va voir que la techno, quand même, a une part de responsabilité dans tout ça aussi. Mais faisons un petit retour en arrière. Qu'est-ce qui explique qu'à 17 ans, on va pas remonter trop loin, t'as décidé d'aller vers Sciences Po ? Pourquoi à ce moment-là de ta vie, tu t'es dit, tiens, c'est un chemin intéressant pour moi ?

  • Juliette

    Alors, à vrai dire, je ne me suis jamais posé la question. C'est-à-dire que ça s'est imposé comme une évidence pour moi.

  • Pierre

    Ok. Mais il y avait des exemples dans ta famille ? Non,

  • Juliette

    pas du tout. Non, absolument pas. Mais pour moi, Sciences Po, c'était vraiment l'endroit où j'allais pouvoir me nourrir, où il y avait ce regard très pluridisciplinaire sur plein de sujets. Et je t'avoue qu'à aucun moment, je n'ai fait un tableau des plus et des moins. Tu n'as pas eu de doute ? Pas une seconde. J'ai eu mon bac, j'ai préparé le concours de Sciences Po, je suis rentrée à Sciences Po direct. Je ne me suis même pas posé la question.

  • Pierre

    Alors, ceci nous amène à la... deuxième partie de ta vie mouvementée, qui est que à un moment, alors ça doit être après avoir vendu ta boîte, tu rentres en politique quelque part ?

  • Juliette

    Non, c'est avant la vente de mon entreprise.

  • Pierre

    Ah, il y a un truc concomitant alors.

  • Juliette

    Exactement. J'ai fait les deux en parallèle pendant 18 mois, ce qui était de la folie.

  • Pierre

    Comment ça s'est passé ? Raconte-nous tout ça. Madame la vice-présidente de la région en Alpes.

  • Juliette

    Auvergne, Ronald, tu vas te faire taper sur les doigts. Auvergne,

  • Pierre

    Ronald. Oh là là, OK.

  • Juliette

    Comment ça se passe ? Écoute, on est en septembre 2015. Je suis en train de faire faire du toboggan à ma fille qui a un an dans le jardin. Et je reçois un coup de fil en me disant Laurent Wauquiez aimerait bien vous rencontrer. Moi, je dis Laurent qui ?

  • Pierre

    Laurent Wauquiez ?

  • Juliette

    Bon, je plaisante un petit peu, mais... C'est con,

  • Pierre

    t'aurais pu finir aux grosses têtes. Voilà, c'est ça.

  • Juliette

    Non, ça a bifurqué un petit peu à ce moment-là. Et donc, on m'explique qu'il veut se lancer dans la course aux élections régionales, qu'il cherche quelqu'un pour prendre la tête de la liste sur la métropole de Lyon et qu'il souhaiterait me rencontrer dans ce cadre-là. Et comme je suis curieuse...

  • Pierre

    Tu sais comment t'étais arrivé sur son radar ?

  • Juliette

    Oui, alors il se trouve que j'avais été invitée à petit déjeuner à l'Elysée dans le cadre de la journée des droits des femmes. Un peu de temps avant que j'avais eu un trophée national de la tribune, la Women's Award, et puis que j'avais eu aussi un trophée de la CPME pour aller à présent. Donc je pense qu'il y avait eu à la fois la conjonction un peu de tout ça, et puis peut-être, comme j'étais un petit peu dans les milieux entrepreneuriaux, mon nom qui était peut-être ressorti deux ou trois fois. Et donc, comme je suis curieuse, effectivement, je vais prendre un café avec lui. Il m'explique quel est son projet. Et je dis merci beaucoup. Mais en fait, moi, ça ne fait pas du tout partie.

  • Pierre

    Merci, monsieur. Au revoir, monsieur.

  • Juliette

    Oui, c'est ça. Merci, monsieur. C'est tellement éloigné de mon quotidien, de mes préoccupations du moment, que ce n'est pas du tout... OK. Donc, je lui dis que...

  • Pierre

    Oui, puis c'est out of the blue. Tu n'y avais jamais pensé plus que ça. Donc, voilà.

  • Juliette

    C'est ça, c'est ça. Et il me demande d'y réfléchir quand même. Et je dis, bon, écoutez, je vais prendre un petit moment, je vais y réfléchir. Et puis, je rentre à la maison et je me dis, c'est... Voilà, c'est vrai que c'est un peu paradoxal. J'ai fait Sciences Po, je suis fière d'entreprise. Et pour autant, je me sens très éloignée du monde politique. Je trouve que le personnel politique... n'incarne pas du tout. On est avant l'arrivée quand même de Macron, avant une certaine forme de renouvellement aussi, notamment à l'Assemblée. Et à l'époque, moi, je me dis, je ne vois pas de jeunes, je ne vois pas de chefs d'entreprise, je ne vois pas beaucoup de femmes. Et quelque part, je dis, si je dis non, je ne pourrai plus jamais râler. Je ne pourrai plus jamais me plaindre parce qu'à un moment donné, on me donne aussi l'opportunité d'amener... d'amener ma petite pierre à l'édifice et d'amener aussi une image un peu différente de ce que peut être un élu. Mais à ce moment-là, j'accepte de prendre la tête de la liste aussi parce que je trouve ça passionnant de voir comment se déroule. Exactement, de voir les coulisses, je me dis que c'est une expérience qui est quand même assez géniale.

  • Pierre

    T'es diplômée de Sciences Po, dans Sciences Po, il y a pas de politique quand même.

  • Juliette

    Oui, c'est ça. Donc, l'expérience est géniale. Et puis, ça permet effectivement de voir comment ça se passe. Puis alors, je lui dis, par contre, moi, la prise de parole en public, ce n'est pas du tout mon truc. Il me dit, oui, ne t'inquiète pas, ne t'inquiète pas. Bon, premier meeting de campagne, salle 3000. Donc, ça s'appelle une salle 3000 parce qu'il y a 3000 places. OK. Et bien, Bibi sur scène. Voilà, donc, baptême. Bonjour.

  • Pierre

    Bonjour.

  • Juliette

    Exactement. Et... Et puis donc la campagne se passe.

  • Pierre

    A été dure la campagne ? Parce que honnêtement dans toutes les campagnes il y a des coups bas.

  • Juliette

    Oui mais elle n'a pas été dure pour moi dans le sens où on avait une figure politique qui prenait quand même... C'est elle qui prenait tous les coups. Oui qui prenait tous les coups. Donc moi ma campagne ça a été plus une campagne vraiment de terrain. Donc c'était une campagne politique mais pas au sens... il n'y avait pas eu cette violence là à ce moment là. Et donc, à ce moment-là, quand j'accepte la campagne, je mets quand même des conditions. Je me dis, moi, je ne suis pas encartée, je ne le serai jamais. Et puis, si je m'engage, il y a un moment donné, c'est quand même aussi pour pouvoir faire des choses. Mais à ce moment-là, je prends la tête de l'aise sur la métropole, mais je me dis, si on gagne, je serai conseillère régionale. Je n'envisage à aucun moment autre chose. Et là arrive le mois de décembre et on gagne les élections régionales.

  • Pierre

    Alors, vous ne la voyez pas, mais elle a l'air surprise d'avoir gagné. C'était une surprise vraiment ou non ? Tu jouais pour la gagne, de toute façon.

  • Juliette

    Oui, de toute façon, on y va pour la gagne, mais en même temps, le résultat, il est toujours jusqu'au dernier moment. Tant que tu n'as pas gagné, tu n'as pas gagné. Et donc, on gagne les élections. Et Laurent Wauquiez me rappelle quelques jours plus tard en me disant, qu'est-ce qui t'intéresse comme sujet ? Et je lui dis, écoute, il y a un projet dont on a parlé pendant la campagne que je trouve passionnant et que j'aimerais vraiment avoir l'occasion de suivre. C'est le projet de campus numérique. qui est à ce moment-là un projet qui est une idée.

  • Pierre

    Rien de concret pour l'instant.

  • Juliette

    Exactement. Mais je dis ça en disant j'aimerais être tenue informée. Et il revient vers moi un ou deux jours plus tard en me disant écoute, j'ai deux propositions à te faire. Soit tu es conseillère déléguée au campus. Soit tu es vice-présidente, déléguée à l'économie de proximité, au commerce, à l'artisanat, aux professions libérales, à l'ESS et au numérique.

  • Pierre

    Oh, oh, oh, ça en fait des trucs !

  • Juliette

    Wow ! Wow ! Et donc, à ce moment-là, j'appelle des amis qui sont un peu plus dans cet univers que moi. Ils me disent « Ben voilà, il se passe ça, qu'est-ce que vous en pensez ? » Là, ils me disent « Ben en fait, c'est simple, soit t'es conseillère déléguée, t'as ta carte de visite, mais... » Pas plus de pouvoir que ça.

  • Pierre

    Ton plan d'action est plus réduit.

  • Juliette

    C'est ça. Et si tu es vice-président, tu fais partie de l'exécutif, tu as un budget, tu as des services. Ce n'est pas du tout la même histoire. Après, tu dis à un chef d'entreprise, tu veux plutôt être...

  • Pierre

    Oui, c'est vrai.

  • Juliette

    ...peau de fleur ou tu veux plutôt pouvoir faire bouger les choses ? Là, je dis OK. Je dis OK,

  • Pierre

    mais sachant que tu es encore dégé de ta boîte.

  • Juliette

    Oui.

  • Pierre

    T'as dû faire des semaines de fou furieux.

  • Juliette

    Ouais, donc je suis dirigeante d'une entreprise d'une cinquantaine de personnes. Et accessoirement, j'ai deux enfants, dont ma fille qui a un an et mon grand qui en a quatre. Oh là là.

  • Pierre

    Ouais, 24 heures, c'est pas beaucoup finalement.

  • Juliette

    Non, c'est pas beaucoup, je confirme. Et c'est surtout quand t'arrêtes que tu te dis que c'était un rythme de fou. C'était un rythme de fou.

  • Pierre

    Mais parce qu'à cette époque-là, t'as 34 ans. Donc, tu t'apprêtes à diriger la politique numérique d'une région à 8 millions d'habitants ? Un truc comme ça ?

  • Juliette

    C'est ça.

  • Pierre

    Syndrome de l'imposteur ou pas du tout ?

  • Juliette

    Oh, punaise, oui, t'arrives. En plus, c'est un secteur qui n'est pas mon secteur de compétence, entre guillemets. Je rappelle, je viens quand même d'une entreprise d'aide à domicile. Alors, même si le numérique a toujours été quelque chose qui m'a passionnée et qui a été un vrai levier de croissance dans mon entreprise, Je ne suis pas une technicienne du numérique. Et donc, je me souviens très bien du premier discours que je dois faire. Donc, j'ai été nommée le 4 janvier 2016. Et le 10 janvier 2016, je dois faire un discours devant le CIEL, qui est le syndicat d'initiative qui déploie la fibre dans la Loire. Et dans le trajet entre Lyon et Saint-Etienne, j'ai ma directrice de service qui m'explique ce qu'est une délégation à faire mot concessif, tous les termes techniques avec le déploiement de la fibre, etc. Donc, je suis là. J'ingurgite tout ça et je me retrouve, et ça a été la première et la seule fois de tout mon mandat où j'ai lu un discours que je n'ai pas écrit. En croisant les doigts et en me disant, pourvu qu'il ne m'ait pas mis des pots de bananes.

  • Pierre

    Et qu'on ne me pose pas trop de questions.

  • Juliette

    Et pourvu que je ne sois pas en train de raconter n'importe quoi. Je fais mon discours, pas super sereine quand même. Je retourne m'asseoir et je me dis c'est la dernière fois. Et je rentre à la région, je convoque tout le monde et je dis là maintenant, vous sortez tous les dossiers, vous m'expliquez tout. Il faut que j'apprenne, il faut que je comprenne. Et donc tu passes en phase d'apprentissage accélérée. D'autant plus que, ce que je disais tout à l'heure, en fait j'ai une double délégation, c'est-à-dire que je m'occupe aussi bien Mes interlocuteurs, à ce moment-là, sont aussi bien les syndicats de profession libérale qu'Orange ou SFR, si tu veux. Donc, c'est un peu le grand échange. On est dans un contexte, en plus, de fusion des deux régions. Donc, Auvergne d'un côté, Ronald de l'autre. Donc, en fait, il y a tout à mettre à plat, tout à harmoniser. Il y a les équipes à reconstituer. Le numérique est une délégation qui n'existe pas en tant que telle à l'époque. Donc, wow ! Et puis, tu découvres, en fait, tu arrives... Moi, je dis souvent que c'est une expérience anthropologique, parce que tu passes d'une PME de 50 personnes à une institution de 9000 agents avec une double chaîne de commandement, à la fois public, privé... Enfin, pardon, administratif et politique. Et tu passes du privé au public avec des fonctionnements qui sont très différents.

  • Pierre

    Et tu as une puissance de feu qui est sans commune mesure par rapport à ce que tu as pu connaître. C'est-à-dire qu'il y a du budget. Ça veut dire que tu es en capacité d'engager...

  • Juliette

    Chef de file en matière économique. Depuis la loi NOTRe, c'est vraiment la collectivité qui a été positionnée comme pivot sur ces questions-là. Donc, tu te retrouves effectivement avec des moyens, avec... La nécessité aussi de poser des stratégies, des ambitions. Donc ça, c'est ce que j'essaye d'apporter aussi, et ce qui à la fois moi me structure et structure les équipes, c'est que dès le début, je dis on va rédiger une feuille de route. On va rédiger notre feuille de route stratégique pour poser un petit peu quels sont nos objectifs, quels sont les moyens qu'on va mobiliser. Donc on fait un état des lieux au niveau de la région aussi, de ce qui existe. Et là où c'est difficile, c'est que le numérique est une délégation. éminemment transverses. Donc, tu dois aller solliciter les autres délégations. Et parfois, avec tout ce que ça peut générer, tu vois, de frictions où tu viens un peu percuter aussi les précarés, où les uns et les autres pensaient être...

  • Pierre

    Il y a deux, trois baronies à aller secouer.

  • Juliette

    C'est ça, exactement. Donc ça aussi, c'est un exercice qui est...

  • Pierre

    Formateur ! ...

  • Juliette

    d'apprentissage. exactement et là tu te dis d'une part que tu as un enjeu de comprendre les codes sans en prendre les travers d'arriver à comprendre un petit peu ce qui se passe ce qui se joue quand on te dit ça ou ça ce qui se joue derrière et puis dire à un moment donné soit je je Soit je fais plier un peu le fonctionnement, soit c'est moi qui me fait...

  • Pierre

    Qui te fait plier.

  • Juliette

    Ouais, c'est ça.

  • Pierre

    Tu crois qu'il y a une incapacité structurelle des institutions à se réformer en profondeur ?

  • Juliette

    Non, parce que c'est une question de personnes. C'est toujours une question de personnes.

  • Pierre

    Ça se joue aux people.

  • Juliette

    Ouais.

  • Pierre

    J'adore, je pense que ça a dû être une expérience juste incroyable. Est-ce qu'à un moment donné, ton stylo a tremblé au moment de signer une décision ? Alors, dans le cadre de mon mandat ?

  • Juliette

    Oui. Non, je ne dirais pas ça comme ça, parce qu'on a la chance quand même, et ça, je voudrais vraiment le souligner, parce qu'on fait souvent un peu du fonctionnaire bashing, mais on a la chance dans ces collectivités d'avoir des agents qui sont d'une compétence et d'un dévouement qui est quand même hyper appréciable. Donc, je sais que j'ai autour de moi quand même des gens qui, et notamment moi dans ma délégation, des gens que j'ai choisis, etc., quand ils me font une proposition... ils l'ont quand même travaillé, etc. Mais par contre, oui, tu doutes forcément toujours de... Est-ce que j'ai, moi, bien pris en compte toutes les incidences ? Est-ce que je suis bien en train de me projeter, non pas uniquement sur les six mois qui viennent, mais sur les cinq, dix, trente ans ? Et puis, en même temps, tu as une forme de latitude, mais tu es quand même enfermée, malgré tout, dans un fonctionnement qui reste... qui reste un peu rigide pour plein de raisons, parce que tu as un code des marchés publics, parce que c'est ce que je te dis, c'est ce mélange en fait entre les contraintes liées à l'administration et les contraintes liées au fonctionnement politique aussi. Donc tu navigues dans cet espace de liberté que tu essayes progressivement aussi d'agrandir, mais en ayant toujours quand même, malgré tout, ces contraintes que tu dois prendre en compte.

  • Pierre

    Là encore, j'ai fait ce que je devais faire. Donc, je suis allé lire des articles sur toi sur cette période. Et tu as cette phrase, ouvrez les guillemets. Ce fut une parenthèse à la fois dure, violente, mais passionnante. Le côté passionnant, on l'a vu. Pourquoi c'était dur et violent ? Tu vois, c'est des mots particuliers là.

  • Juliette

    Oui, bien sûr, mais ils ne sont pas utilisés pour rien. C'est un monde de rapports de force. C'est un monde de rapports de force et la politique est un système très féodal. C'est-à-dire que quand tu es en politique, et ça je pense que quelque part ça a été ma chance aussi, c'est qu'avec le président on a toujours eu une relation interpersonnelle. C'est-à-dire qu'il est venu me chercher, que quand on devait échanger on le faisait très directement tous les deux. Mais la politique de manière générale est féodale dans le sens où tu acceptes d'échanger une protection contre ta liberté. Et je dis, moi, encore une fois, la chance que j'ai eue, c'est que j'étais chef d'entreprise et que j'avais aussi mon entreprise. J'avais potentiellement d'autres projets et surtout quelque chose de très important, c'est que j'avais toujours dit que je ne ferais qu'un seul mandat.

  • Pierre

    Ah, ok.

  • Juliette

    Et je pense que ça, pour le coup...

  • Pierre

    Pourquoi ?

  • Juliette

    Parce que j'avais conscience de ce que j'avais envie d'y laisser ou pas. Et quand je dis que c'est un univers qui est dur et violent, c'est vrai. Déjà, la région, en l'occurrence, toutes les régions sont plus ou moins grandes, mais la région au Verne-en-Alpes est très grande, donc tu te déplaces beaucoup. Tu as quand même des responsabilités qui sont importantes. Et puis, tu as ce que je disais, ce mode de fonctionnement qui est quand même très basé sur le rapport de force, sur une forme de baronnie, sur des territoires. Sur des... Donc, il faut aussi apprendre à faire avec tout ça. Donc, tu peux, pendant un certain temps, le faire. Moi, je n'avais pas forcément envie de faire plus qu'un mandat pour ces raisons-là. Mais encore une fois, je le redis parce que c'est important, ça a été passionnant. Ça m'a permis de faire des choses, de voir des personnes, de découvrir des sujets que je n'aurais pas eu l'opportunité sinon de découvrir ou de rencontrer. De ce point de vue-là, j'ai absolument... aucun regret. Mais il faut avoir conscience quand même de ce que ça implique en termes d'engagement personnel.

  • Pierre

    Oui, en termes de dévouement à la cause aussi, clairement. T'as hésité à remettre le couvert quand même ? Même si tu t'es dit, non, j'y vais qu'une fois ?

  • Juliette

    Non, non, j'ai jamais hésité. Comme pour si on se pose, tu vois, la question c'est pas posée pour moi. Je pense, objectivement, que j'aurais pu le faire si j'avais voulu. Mais c'est J'ai quand même eu la chance, et tu le soulignais tout à l'heure, d'être vice-présidente de la deuxième région de France à 34 ans.

  • Pierre

    Mais oui, c'est énorme ! Juliette, sur ton CV, je suis désolé, ça claque.

  • Juliette

    Et sur une délégation qui était entrepreneuriale, c'est-à-dire qui avait une feuille blanche au début et que j'ai eu la confiance du président pour mener cette tâche à bien, ce qui était ultra précieux. Et donc, je me suis dit, si je fais un deuxième mandat, est-ce que j'aurais des conditions aussi incroyables de mandat ? et j'en étais pas sûre et je pense que de la même façon j'étais arrivée au bout d'un cycle, moi je crois beaucoup à cette notion de cycle et j'avais envie profondément de retourner vers l'entrepreneuriat

  • Pierre

    Ce qui nous amène à la troisième partie de ton introduction qui est Huggy Oui, le recrutement circulaire. Exactement on va parler économie circulaire, recrutement circulaire, etc. Mais voilà Parle-nous un peu de la genèse de tout ça, comment c'est né, à quel moment aussi, est-ce que là aussi il y a eu une zone de recoupement entre ton poste de vice-présidente et finalement la mise en œuvre de ce nouveau projet ? Enfin voilà, raconte-nous un peu.

  • Juliette

    Non, donc en fait à la fin de mon mandat, je ne veux pas tout de suite retourner en première ligne. Je décide dans un premier temps d'accompagner un certain nombre de projets, donc à la fois des entreprises industrielles, des groupes d'enseignement supérieur, des start-up, plutôt sur des fonctions de conseil. Et c'est en fait dans ce contexte-là qu'au bout de quelques mois, je re-rencontre Baptiste Privé, qui est le fondateur de Guy et du mouvement du recrutement circulaire. Et dans un premier temps, j'aide Baptiste plutôt en lui... en lui faisant des connexions, en lui ouvrant un peu quelques...

  • Pierre

    L'aide à évangéliser un petit peu.

  • Juliette

    Exactement, exactement. Mais c'est vrai qu'au fur et à mesure des rencontres, des échanges, des réunions qu'on fait ensemble, je me dis j'adore ce projet, j'adore l'équipe et je m'implique de plus en plus dans Hugui. Et au bout de quelques mois, en fait, on convient avec Baptiste que je prenne la direction générale de l'entreprise à ses côtés. Donc, je m'implique de façon plus opérationnelle. Et en fait, peut-être pour dire quand même ce qu'est Huggy et ce que fait Huggy.

  • Pierre

    Oui, c'est ça. Il y a un sujet là et c'est super intéressant.

  • Juliette

    Il y a un vrai sujet et c'est, je pense, aussi pour ça que j'ai eu ce coup de cœur parce qu'on en revient sur l'idée un peu de l'innovation sociale ou sociétale. Huggy est une entreprise à mission qui est à l'origine du mouvement du recrutement circulaire. Et l'objectif, c'est... d'amener les entreprises à envisager complètement différemment la question du recrutement. Si tu veux, quand on veut être provocateur dans notre façon de présenter les choses et pour bien faire comprendre les enjeux qu'il y a derrière, on dit qu'aujourd'hui, on traite mieux les déchets qu'on ne traite les candidats puisqu'au moins les premiers, on les revalorise.

  • Pierre

    Oui, ce n'est pas faux. Alors, candidats non retenus.

  • Juliette

    Oui, les candidats l'ont retenu. Exactement. Et donc, si tu regardes aujourd'hui sur France Travail ou sur LinkedIn, tu as 1,2 millions d'offres qui sont ouvertes. Ça veut dire que tu vas avoir 1,2 millions de processus de recrutement qui vont être menés dans les prochains jours en silo, en parallèle, et où à chaque fois, chaque entreprise va faire la même chose, c'est-à-dire qu'elle va publier une offre, attendre les candidatures, trier les candidatures, faire des entretiens téléphoniques, faire des entretiens physiques. Et recommencer ça inlassablement. Et on sait que le recrutement, c'est un processus en entonnoir. C'est-à-dire que tu vas avoir un certain nombre de candidats au début. Et puis, au fur et à mesure du processus, tu vas affiner chez un certain nombre de candidats des aptitudes, des compétences, de savoir-être, etc. Tu fais ta shortlist. Et tu te retrouves chez...

  • Pierre

    Pardon ? Tu fais ta shortlist, tout ça,

  • Juliette

    tout ça. Tu fais ta shortlist, exactement. Et tu te retrouves à la fin, on va dire statistiquement, avec deux, trois bons candidats. Sauf que tu n'as qu'un post-op pour voir. Donc, il va falloir que tu choisisses. et parfois le choix va se jouer à rien du tout. Tu peux avoir un préavis qui est un peu plus court chez l'un que chez l'autre, un fit relationnel avec un recruteur qui est un peu meilleur qu'avec un candidat. Tu peux avoir une compétence spécifique qui est un peu mieux maîtrisée. Mais pour autant, les candidats qui ne sont pas retenus, ce ne sont pas des mauvais candidats. Ils sont arrivés en shortlist, tu as quand même préqualifié énormément de choses chez eux. Et puis, on sait très bien que le numéro 1, à un moment donné, chez l'un, peut être le numéro 2 chez l'autre. Et inversement, c'est vraiment aussi une question de... Oui,

  • Pierre

    puis si le numéro 1 sur ta liste dit non, tu prendras le numéro 2, ce qui prouve bien que le numéro 2 est complètement valable.

  • Juliette

    Exactement, exactement. Et donc l'idée c'est de dire, on va en fait basculer d'une logique qui est aujourd'hui très guerrière dans le secteur du recrutement. Quand tu réfléchis, on parle quand même de chasse de tête, on parle de guerre des talents, c'est quand même assez violent comme vocabulaire.

  • Pierre

    C'est pas faux, c'est pas faux.

  • Juliette

    Et dire, comment est-ce qu'on peut basculer d'une logique de compétition à ce qu'on appelle de la coopétition, c'est-à-dire de la collaboration entre concurrents. Et donc ça, on le fait à travers quoi ? On le fait à travers le fait de faire rentrer la bonne pratique de la recommandation au sein des entreprises. C'est-à-dire, vous avez vu un bon candidat, vous l'avez qualifié, il y a un certain nombre de compétences, d'aptitudes, de savoir-être.

  • Pierre

    Il faut screener intégralement.

  • Juliette

    Et donc ça, vous prenez une minute trente à la fin de votre processus de recrutement pour recommander. ce bon candidat que vous avez apprécié et que vous n'avez pas pu prendre et lui permet de ne pas rebondir de zéro dans une nouvelle recherche et au contraire de rebondir vers une autre entreprise qui a un besoin similaire au même moment sur le même territoire. Et par extension, donc à la demande des entreprises qui participent, on applique ça aussi à des stagiaires, à des alternants, à des personnes en fin de CDD. voire à des collaborateurs en CDI, par exemple, qui doivent rejoindre un conjoint dans une autre région et tu veux l'aider à trouver son prochain job, tu peux le recommander sur la plateforme. Pareil, tu as eu un super alternant pendant deux ans, tu veux l'aider à décrocher plus facilement son premier emploi, tu peux le recommander sur la plateforme. Et l'idée, en fait, c'est que l'entreprise, à un instant T, elle fait cet acte qui est vertueux, qui est bienveillant. Mais comme on est dans une logique de circularité, quand elle adhère au mouvement, elle peut aussi bénéficier des recommandations de ses pairs pour diminuer sensiblement ses temps de sourcing et ses coûts de recrutement.

  • Pierre

    Vous êtes arrivée à le valoriser, à le mesurer, la diminution du temps de recrutement ?

  • Juliette

    Oui, alors le mouvement est jeune puisqu'il ne date que de septembre 2023. Mais sur les chiffres qu'on a pour l'instant, si on prend par exemple les profils cadres, La dernière étude de l'APEC dit qu'aujourd'hui, sur un profil cadre, le délai moyen d'un recrutement, c'est entre 12 et 15 semaines. Quand tu es dans la logique du recrutement circulaire, tu es sur 5.

  • Pierre

    Ah ouais ? Ok, donc divisé par 3. Oui,

  • Juliette

    entre 2 et 3. Ce qui est logique quand tu réfléchis, puisque tu bénéficies d'un travail qui a déjà été fait.

  • Pierre

    Complètement. Le process est, je ne veux pas dire complètement bouclé, mais tu élimines énormément de choses dans le process. Donc ça, c'est intéressant. Tu l'évoquais dans ta présentation, c'est que il y a le côté compétition. Alors j'entends. Comment on t'arrive à convaincre, je ne sais pas, Bouygues ? que ces candidats malheureux peuvent bénéficier à Vinci.

  • Juliette

    C'est une très bonne question. En fait, Bouygues ne recommandera jamais directement à Vinci ou Coca ne recommandera jamais directement à Pepsi. Par contre, ils vont recommander un candidat pour l'aider. Et on va dire à une entreprise, en fait, si vous ne le prenez pas, vous n'allez pas non plus l'empêcher de trouver un nouveau job. Non,

  • Pierre

    oui. Donc,

  • Juliette

    il n'y a pas que faire. En fait, le candidat, s'il est bon, il va trouver. Sauf que si vous faites cette recommandation, vous allez l'aider à trouver plus rapidement. Et donc, potentiellement, vous allez améliorer votre marque employeur. C'est un candidat qui va parler positivement de vous. Et en plus, on s'est rendu compte de quelque chose. C'est que les recruteurs nous disent que c'est beaucoup plus facile de dire non quand ils sont inscrits dans cette logique de recrutement circulaire. Parce que quand tu as fait venir un candidat trois fois, cinq fois, huit fois en entretien, qu'il est en shortlist et que tu dois l'appeler pour lui dire « je suis désolée, ce ne sera pas vous » , c'est beaucoup plus facile de lui dire « je suis désolée, on ne va pas vous prendre, mais par contre, on va faire quelque chose de bien pour vous, on va vous recommander » .

  • Pierre

    Aujourd'hui, tu disais que c'était septembre 2023, c'est ça ?

  • Juliette

    Oui.

  • Pierre

    Justement, c'est quoi ? Quoi le feedback que vous avez ? Est-ce la hype qu'il peut y avoir autour de ça ?

  • Juliette

    En fait, depuis septembre 2023, on a plus de 1400 entreprises et employeurs publics qui contribuent en recommandant des profils sur la plateforme. Ça va de toutes petites entreprises jusqu'à des Bouygues, des Décathlon, des Siemens, la Caisse des dépôts et consignations, Van Cleef & Arpel.

  • Pierre

    Des gros employés. Oui,

  • Juliette

    des très très gros. Donc en fait, c'est très varié à la fois en termes d'entreprises qui peuvent recommander, c'est aussi très varié en termes de profils qui sont recommandés sur la plateforme parce que ça va aussi bien sur un jeune qui vient de terminer son alternance. comme un membre de COMEX et un opérateur dans l'industrie, comme un DAF ou un DRH. Oui,

  • Pierre

    et autant des fonctions support que des fonctions techniques, toutes fonctions confondues. Oui,

  • Juliette

    parce que le mouvement a vraiment une visée universelle. En fait, ce que je disais, on est entreprise à mission. Vraiment, notre mission, c'est de contribuer à fluidifier le marché de l'emploi. Et on aura vraiment réussi dans ce sens-là, quand on aura... La recommandation est très... culturelle sur des profils, comme je disais, sur des membres de COMEX ou sur des fonctions support.

  • Pierre

    Ça se fait par cooptation, souvent, d'ailleurs.

  • Juliette

    Oui, complètement. Et quand on aura autant de recommandations dans l'industrie, on considérera qu'on aura vraiment réussi notre challenge.

  • Pierre

    Le client qui était le plus dur à convaincre ?

  • Juliette

    C'est une bonne question.

  • Pierre

    Sur les 1400 ?

  • Juliette

    Alors, on n'a pas 1 400 clients. Les 1 400, c'est vraiment ceux qui contribuent. Donc, on peut recommander sans être adhérent du mouvement. Après, ceux qui sont adhérents, c'est vraiment ceux qui souhaitent bénéficier de cette boucle vertueuse pour pouvoir…

  • Pierre

    Eux, ils peuvent piocher…

  • Juliette

    Exactement, communiquer sur leur marque employeur, avoir des attestations RSE. En fait, le recrutement circulaire a été reconnu comme une externalité positive du recrutement et c'est donc contributif à toutes les obligations extra-financières. Donc, tu sais, tout ce qui est CSRD, etc.

  • Pierre

    Ouais, ok.

  • Juliette

    Donc, tous les adhérents du mouvement bénéficient en fait de tous ces...

  • Pierre

    C'est un sacré avantage pour vous, ça.

  • Juliette

    Oui, complètement. Et on a des grandes entreprises qui sont venues aussi vers nous parce qu'elles souhaitaient pouvoir indiquer qu'elles étaient engagées dans le mouvement du recrutement circulaire dans leur réponse aux appels d'offres.

  • Pierre

    Alors, pourquoi est-ce qu'on n'en entend pas plus parler ?

  • Juliette

    Parce que tu lis pas assez la presse ? Ah c'est peut-être ça !

  • Pierre

    Non mais vraiment tu vois, c'est en en discutant avec toi, etc. Et en fait, il y a un moment, en t'écoutant, je me suis dit mais c'est juste génial comme truc. Et je suis désolé, oui, peut-être que je lis pas assez la presse. Je regarde trop TikTok, c'est une certitude. Mais tu vois, par exemple sur TikTok, on n'en parle pas. en tout cas pas pour l'instant et je me dis que là il y a un vrai truc il y a une vraie matière parce que je sais pas vous qui nous écoutez mais voilà les process de recrutement ils peuvent quand même être longs, pénibles etc. on gagne pas à tous les coups si on a des portes de sortie positives c'est quand même super bien il y a un effet vertueux y compris pour les entreprises, c'est ce que tu évoquais enfin voilà je vois pas pourquoi tout Toutes les entreprises ne se mettent pas sur ces logiques-là.

  • Juliette

    Oui, tu as raison. Alors, il y a plusieurs explications. Donc, effectivement, je disais, en plaisantant par rapport à la presse, on a eu la chance d'avoir beaucoup d'articles dans Le Monde, Les Echos, la Harvard Business Review, etc. Mais encore une fois, le mouvement est très, très jeune. Donc, ça ne fait même pas un an et demi. Il y a toujours une inertie sur des innovations. Ça prend toujours un petit peu de temps aussi. Ce qu'on essaie de faire, nous, vraiment, c'est d'identifier les pionniers, les visionnaires, ceux qui sont capables de comprendre, de percevoir tout de suite à quel point le monde du recrutement est en train de changer et à quel point cette approche régénérative peut être intéressante, donc à la fois pour le candidat et pour les entreprises elles-mêmes. Mais quand tu me demandais quel est le client qui a été le plus difficile à convaincre, je pense que ce qui est le plus difficile pour nous, ce sont les habitudes en fait c'est la force de l'habitude et aujourd'hui tout notre travail quelque part c'est de faire comprendre de faire de la pédagogie pour expliquer exactement ce qu'est ce mouvement là et on a même des personnes qui nous disent c'est trop beau pour être vrai en fait qu'est-ce qui se cache derrière où est le loup et en fait c'est On passe beaucoup de temps à expliquer ce qu'est le mouvement, à expliquer à quel point ça peut être vertueux à différents niveaux. Donc, moi, je te suis. Je pense que toutes les entreprises devraient passer au recrutement circulaire parce que c'est quelque chose... Tu vois, on parle énormément d'économie circulaire de manière générale. On parle de recyclage, de revalorisation. En fait, on a juste oublié qu'on appliquait ça aux choses, mais qu'on ne l'applique pas aux humains.

  • Pierre

    Non, mais moi, je suis hyper convaincu, en fait. Mais justement, tiens... On va dire qu'il y a plusieurs centaines de dirigeants d'entreprise qui écoutent la colle. Ils ont envie d'y passer. C'est quoi ? Comment ils font ? C'est quoi le process ? Ils contactent Huggy ? Ils font quoi ?

  • Juliette

    On fait quoi ? C'est hyper simple. Ils peuvent me mettre un petit mot sur LinkedIn. Ils peuvent nous contacter sur le site internet de Huggy ou du recrutement circulaire. On en fait toujours un petit temps d'échange pour expliquer exactement comment ça se passe, pour présenter la plateforme aussi derrière. Et puis, quand une entreprise est adhérente du mouvement, on a toujours ce qu'on appelle un onboarding, en bon français. Donc, un temps vraiment d'accueil avec la personne qui sera leur interlocutrice dédiée dans l'entreprise. Donc, toute entreprise qui est adhérente, tout employeur qui est adhérent à, chez Eugie, il y a un... Un interlocuteur qui lui est dédié et qui va l'accompagner dans la prise en main de la plateforme, dans la mise en place de ses offres d'emploi, dans sa stratégie de marque employeur. Et puis après, c'est très simple. La plateforme est hyper intuitive. Les premières recommandations peuvent se faire très facilement. Je dis ça prend moins de deux minutes de faire une recommandation. Et on a plein d'exemples où ça a changé les vies. Une recommandation... permis à quelqu'un de...

  • Pierre

    De créer des opportunités.

  • Juliette

    De créer des opportunités. En fait, une recommandation amène un relief à un profil qui est sans commune mesure avec un CV qui est une page à quatre à plat.

  • Pierre

    Tu es vesté, comme on dit en bon français là aussi. Non, non, mais ça donne effectivement un relief. J'aime bien ce terme. Toi qui es... Alors, chez Huggy, je pense, mais aussi de manière plus générale, sur le recrutement et dans les RH. On parlait de monde qui change, patins, couffins, etc. Il y a la tarte à la crème de l'IA et donc du tsunami qui arrive. Un, comment vous, vous l'avez intégré ? Comment vous allez surfer sur cette vague ? Et derrière, plus généralement, comment tu vois ça dans les DRH ?

  • Juliette

    Oui, alors l'IA, évidemment, c'est un sujet que j'ai beaucoup suivi depuis très longtemps. Je suis... Comment te dire ? Je considère... Pour nous, notre travail, c'est de réhumaniser le recrutement. Justement, l'IA peut apporter effectivement énormément de choses, mais pour nous, ça doit être complètement transparent. C'est-à-dire qu'on a une grande partie de ce qu'on appelle les matchs, c'est-à-dire les mises en relation qui sont... algorithmé ou automatique, dans le sens où quelqu'un qui est commercial, qui cherche un job de commercial face à une offre de commercial, on n'a pas besoin d'intervenir, si tu veux. Là, la connexion va se faire automatiquement. Par contre, on considère qu'une grosse partie de notre travail chez Eugie, c'est de faire les choses non seulement à la main, mais surtout à l'humain. C'est-à-dire qu'il y a toute une partie des matchs, ce qu'on appelle nous des matchs atypiques. qui se font parce qu'il faut avoir une détection assez fine des valeurs, des envies, des souhaits de reconversion, des choses comme ça. Et tout ça, ça reste quand même l'humain qui peut l'apporter. Donc je pense qu'il y a énormément de choses qu'on peut mettre en place grâce au numérique de manière générale et à l'IA, mais qu'on doit toujours s'en servir comme d'un outil. Nous, par exemple, ça nous fait gagner beaucoup de temps sur des comptes rendus, sur la génération de comptes rendus, de réunions ou de choses comme ça. Donc, évidemment que ces outils, on les intègre, qui font partie prenante du fonctionnement de l'entreprise. Mais pour autant, dans ce qui reste notre cœur d'activité, c'est-à-dire des connexions, des mises en relation, tout ce qui fait quand même le sel de la vie, tout ce qui fait la densité, tout ça. On aime quand même penser qu'il y a une bonne partie qui reste de l'humain et ça, ça ne doit pas changer. Donc, on a un rapport assez équilibré à ce qui est en train de se passer.

  • Pierre

    Après, ça m'amène sur un sujet qui est vrai pour les humains comme pour les machines. Après, je ne sais pas, il peut y avoir un vrai débat, mais c'est sur les biais qu'on peut avoir. Comment, justement, dans l'algorithmie que vous avez pu mettre en place, comment vous arrivez à ne pas finalement reproduire des biais que pourraient avoir les humains, ne serait-ce que sur les problématiques de genre, etc. C'est aussi bête que ça.

  • Juliette

    Oui, complètement. Alors ça, j'allais dire, c'est presque un sujet philosophique. Et c'est quelque chose qui est en réflexion permanente chez nous, c'est-à-dire qu'il n'y a pas à ce stade une réponse unique là-dessus. On travaille beaucoup avec nos développeurs sur la façon dont on peut intégrer ça, dont on peut éviter de tomber dans des pièges, dont on peut être le plus fin possible. Est-ce qu'en fait, toute la difficulté, elle se trouve là-dedans ? C'est comment est-ce que tu normalises, standardises, fais rentrer dans des cases ? quelque chose qui est de l'ordre de la finesse. Et je pense que c'est toute la réflexion, en fait, philosophique presque qu'il y a derrière. Et si tu veux, je vais te donner un exemple qui est assez parlant. On travaille beaucoup avec les banques qui cherchent des chargés de relations clientèles. Tu prends la fiche de poste, la fiche de poste, c'est exactement la même, chargé de relations clientèles d'une banque à l'autre. Sauf qu'il y a une banque, tu arrives, tu sors de l'ascenseur. tu as des écrans qui clignotent de partout en disant encore 50 appels avant d'être le meilleur vendeur du mois, les objectifs, etc. Tu sors de l'ascenseur dans l'autre banque, le seul objectif de l'année, c'est d'avoir contacté tous tes clients au moins une fois. Si tu veux, ça, dans la fiche de poste, ça ne transparaît pas forcément. Et ça, dans une IA, c'est quelque chose qui est assez difficile quand même à retranscrire. Et donc, tout l'intérêt, c'est comment est-ce que tu peux arriver à, sur des... des choses, oui, encore une fois, qui relèvent de la finesse, qui relèvent des valeurs, qui relèvent de quelque chose de très humain, finalement, de l'environnement de travail. Comment est-ce que tu vas arriver à rendre compte de ça d'une façon normée, tu vois ? Donc, c'est un petit peu tous les enjeux qu'il y a derrière sur la structuration de la donnée, sur comment est-ce que tu fais en sorte que ta donnée, elle reproduise le plus fidèlement possible toutes ces nuances-là. de la vie, tout simplement, de la vie, de la personnalité. C'est un sujet qui est passionnant.

  • Pierre

    Oui, complexe, complexe. Complexe. Passionnant. Je me faisais la réflexion en t'écoutant, si jamais on a des candidats qui nous écoutent, parce que... De ce que j'ai compris là, finalement, tu rentres dans la logique de Huggy et du recrutement circulaire que si tu es déjà finalement dans des process de recrutement. À un moment, il y a un point d'entrée. Je vais changer de boulot. Je viens de voir. Je pose mon CV chez toi.

  • Juliette

    Alors, en fait, tu as deux possibilités d'être sur la plateforme. Soit tu es recommandé. par quelqu'un, donc ça peut être effectivement à la fin d'un processus de recrutement. Tu peux être recommandé par le recruteur. Voilà, tu n'es pas pris, mais il dit, je vais jamais te donner un coup de pouce. Tu peux être recommandé par le recruteur sur la plateforme. Soit tu peux te préinscrire sur Eguy et demander une recommandation à postériori. Et à ce moment-là, ton profil n'est actif que quand tu as ta première recommandation.

  • Pierre

    D'accord, ok.

  • Juliette

    En fait, ce qui est intéressant dans le modèle, c'est qu'il y a énormément de profils hors marché. qui sont sur la plateforme, parce qu'en fait, ça n'est ni un job board, ni une CV tech. Un candidat n'est visible d'une entreprise qu'à partir du moment où il a accepté un match avec cette entreprise. Donc en fait, c'est vraiment cette logique de match, mais on aime bien dire en plaisantant qu'on a un peu le Tinder ou le mythique de l'emploi. C'est vraiment qu'il faut qu'il y ait rencontre entre candidats et entreprises pour que le candidat soit visible. Et donc, ça nous permet, sur des secteurs pénuriques, d'avoir pas mal de candidats qui en ont marre d'être démarchés, qui n'ont plus envie d'être sollicités, qui veulent reprendre... qui veulent reprendre la main sur leur recherche d'emploi et n'être mis en contact qu'avec des entreprises, des opportunités qui les intéressent.

  • Pierre

    Et oui, parce que pour certains jobs, effectivement, ils se font chasser trois fois par jour.

  • Juliette

    Exactement.

  • Pierre

    Beaucoup sur des profils très techniques d'ailleurs. Ok, c'est quoi le principal obstacle au développement de Guy ?

  • Juliette

    La durée des journées ? Non, après, ce que je te disais, c'est vraiment de faire ce travail-là qui est inhérent à toute innovation. Tu as toujours un temps un peu d'inertie pour aller expliquer, pour faire comprendre, pour faire bouger un petit peu les lignes. Donc, c'est principalement ça pour l'instant. Après, nous, on n'a quasiment que des demandes entrantes pour l'instant. Donc, c'est plutôt...

  • Pierre

    C'est génial, attends ! Franchement, c'est tout... C'est confort !

  • Juliette

    Et puis, ce qui est très chouette aussi, c'est qu'on a beaucoup d'adhérents qui sont des vrais ambassadeurs du mouvement, qui communiquent dessus sur leurs réseaux sociaux, qui mettent dans leurs offres d'emploi, qui sont engagés dans le mouvement du recrutement circulaire. Donc, en fait, c'est quelque chose qui est un peu incrémental, qui va au fur et à mesure...

  • Pierre

    Oui, et puis tu... Tu les places dans un cercle vertueux, donc c'est au-delà de plein de bénéfices qu'il peut y avoir. C'est pas mal du tout. Mais toi, Juliette, dans tout ça ? on se reparle dans dix ans tu y es toujours ou pas ? Je ne peux pas te dire parce que j'ai toujours fonctionné aux opportunités, aux rencontres, en disant pour moi c'est un horizon qui est super...

  • Juliette

    Spécialement très très loin.

  • Pierre

    Qui est super lointain, exactement. Donc je ne sais pas, mais aujourd'hui mon quotidien c'est ça, et en tout cas pour les prochaines années c'est ça. On a quand même des objectifs assez ambitieux de croissance et de développement au niveau de Guy. On en est au... au tout début, même s'il y a des signaux qui sont très agréables et très positifs. Mais...

  • Juliette

    Tu t'éclates.

  • Pierre

    Oui, complètement. Et puis, on a une équipe qui est vraiment géniale. Ça a du sens. Moi, c'est vraiment ce que je cherchais. C'est-à-dire que quand j'ai quitté la région, dans mes réflexions sur ce qui était un peu mes moteurs, pour mon prochain projet entrepreneurial, Je voulais qu'il y ait trois choses. Je voulais qu'il y ait une équipe avec laquelle ça se passe bien. C'est toujours pareil, les hommes et les femmes, c'est ce qui est vraiment les projets. Je voulais qu'il y ait du sens. Et ça, pareil, ça a toujours été le fil rouge de l'introduction.

  • Juliette

    Oui, c'est le fil rouge de cette introduction. C'est qu'il y a du sens à tous les étages, franchement.

  • Pierre

    Oui, je crois, oui. Et puis, le troisième point, c'est que je voulais vraiment un impact, c'est-à-dire un projet ambitieux qui soit un facteur de transformation. J'aime bien cette idée qu'on peut être un facteur de transformation du monde, enfin au moins du monde autour de soi.

  • Juliette

    Oui, c'est beau. C'est quoi la question que j'aurais dû te poser et que je n'ai pas posée jusqu'à maintenant ?

  • Pierre

    C'est une conversation qui peut être très très longue. On a plein de questions.

  • Juliette

    Tiens, si j'en ai une. Pourquoi Huggy s'appelle Huggy ?

  • Pierre

    Alors, il y a deux raisons. La première, c'est une question générationnelle. Tu sais, c'est Huggy les bons tuyaux.

  • Juliette

    Oula, ouais. Cherchez loin, d'accord.

  • Pierre

    Ou plus ou moins, ça, c'est la deuxième, c'est la petite blague. Et la première, c'est cette notion, tu vois, du hug, de la bienveillance. C'est ça qu'il y avait derrière dans cette idée-là.

  • Juliette

    Ok.

  • Pierre

    Ouais, de la communauté, du partage.

  • Juliette

    Ok, super. Bon, en tout cas, vous l'avez compris, vous qui nous écoutez, je crois qu'il y a un vrai truc autour du recrutement circulaire. Enfin, moi, je me demande pourquoi ça n'avait pas été fait avant, d'ailleurs. T'as une idée toi ? Parce que, alors, je veux bien me faire le chantre de l'innovation, mais c'est une idée qui est frappée au coin du bon sens. Pourquoi personne l'a fait avant ?

  • Pierre

    Alors, bon, je... Il y a probablement plusieurs explications. Déjà, la première, c'est qu'on le fait tous un peu naturellement, individuellement. Quand tu as vu quelqu'un de super, un bon candidat que tu ne peux pas donner suite, tu vas avoir tendance à contacter ton réseau, etc. Là, l'idée, c'est de dire comment est-ce qu'on industrialise, comment est-ce qu'on passe à l'échelle. Ça se retrouve aussi un petit peu dans l'idée de cooptation. Sauf que la cooptation, c'est du N-A. 1 et là on est sur du N à N et puis je pense que il fallait que ce soit un projet qui parte de zéro, c'est à dire que je pense que tu ne pouvais pas forcément intégrer ça dans quelque chose déjà existant, il fallait vraiment commencer from scratch du début ok, ça me va et puis je pense qu'après on a capacité aujourd'hui maintenant avec justement ces outils de plus en plus performants à ... à pouvoir plateformiser assez rapidement des idées comme ça. Parce qu'encore une fois, l'idée est une chose, mais...

  • Juliette

    Ils en ont un.

  • Pierre

    C'est vraiment une exécution.

  • Juliette

    Tu m'étonnes. Avant de passer aux sept dernières questions, Juliette, j'ai fait passer ton profil dans Charge EPT. Et je lui ai demandé de me poser, de me trouver une question. Un peu tricky que je pourrais te poser. Donc, voici la question que te pose ChatGPT. Pourquoi avoir implanté Huggy à Vez plutôt qu'à la part d'yeux, symbole de la tech lyonnaise ? J'ai trouvé la question intéressante.

  • Pierre

    Alors, parce qu'à Vez, on a une magnifique vue sur la Saône qui coule et c'est extrêmement inspirant pour réfléchir.

  • Juliette

    Donc, c'est vraiment le contexte de l'écosystème naturel de Vez. Oui,

  • Pierre

    alors après, on a aussi la chance d'être hébergé chez Babola. Et chez Babola, on a un magnifique toit terrasse où on peut déjeuner dès qu'il fait beau. Ça a été un gros critère de choix.

  • Juliette

    Non, je me doute. Et puis, ce n'est peut-être pas les mêmes tarifs à Vez qu'au niveau de la part Dieu, non ? Pour les locaux, etc.

  • Pierre

    Oui, après, il y avait des questions aussi d'accessibilité en fonction de là où étaient les uns et les autres. Et Vez, pour le coup, était un bon compromis. Donc, c'est une réponse un peu plus triviale.

  • Juliette

    Le pari centre des collaborateurs.

  • Pierre

    Exactement. Et puis après, tu sais, les rencontres avec les membres de la tech. Moi, je pourrais te dire qu'un des gros écosystèmes de la tech aussi sur Lyon, c'est à confluence avec H7. Donc, tu retrouves plusieurs centres.

  • Juliette

    Non, mais ne m'engueule pas, c'est déjà du GPT là pour le coup. Tu lui apporteras. J'ai une question. Ça marche. Allez, Juliette, c'est parti. pour les sept dernières questions. Juliette, dis-nous quel est ton mot préféré ?

  • Pierre

    Pour sa sonorité, c'est l'ultra crépit d'arianisme.

  • Juliette

    Ouah ! Alors là, il faut une définition.

  • Pierre

    En fait, l'ultra-crépidarianisme, c'est le fait de vouloir donner son avis sur tout sans avoir aucune compétence.

  • Juliette

    Oh, j'en connais plein des comme ça.

  • Pierre

    Ben voilà, oui, oui. C'est une... Je l'aime pour la sonorité. Après, pour le sens, je pense qu'il y a bataille entre énergie et optimisme.

  • Juliette

    Ok. Ouais, c'est plus consensuel. Mais j'aime bien le premier. J'aime bien le premier. Je vais le retrouver. Je le mettrai dans les notes de l'épisode. Ce sera sympa. Quel est le mot que tu détestes ?

  • Pierre

    Je déteste le mot lâcheté. Je le trouve très moche.

  • Juliette

    Hum, ouais. J'essaie de faire un truc politiquement correct justement sur la lâcheté, mais j'y arrive pas. Mais des lâches, oui, il y en a pas mal. Alors je sais pas, c'est peut-être parce que je vieillis aussi, mais je trouve que des gens avec du courage, il y en a de moins en moins. Mais bon. C'est un avis très personnel qui n'engage que moi. Le son ou le bruit que tu aimes ?

  • Pierre

    Alors, j'ai eu la chance, plus jeune, de faire beaucoup de voiles avec mes parents. Et je t'avoue qu'il y a un son qui m'apaise particulièrement, c'est celui des vagues, tu vois, quand tu navigues, de l'eau qui...

  • Juliette

    Tu fends les vagues ?

  • Pierre

    Oui, qui est contre la coque du bateau. Et je trouve que c'est un son qui amène particulièrement à la contemplation ou à la réflexion. Je trouve que ça te permet de te reconnecter aussi sur ton rythme à toi. C'est un son que j'aime beaucoup. Et il y en a peut-être un deuxième aussi. Je dirais que c'est l'hiver de Vivaldi qui me transporte littéralement à chaque fois.

  • Juliette

    Ok,

  • Pierre

    d'accord. C'est le seul moment où j'aime l'hiver, c'est avec Vivaldi.

  • Juliette

    D'accord, classe. Le son ou le bruit que tu détestes ?

  • Pierre

    Les grincements de manière générale.

  • Juliette

    La craie sur un tableau ? Oui,

  • Pierre

    hyper sensible aux sons, aux odeurs, etc. Donc les grincements, ça peut vite m'agresser.

  • Juliette

    Le papier alu ?

  • Pierre

    Oui.

  • Juliette

    Bon d'accord, on est pareil. Alors, Madame Jarry, votre juron, gros mot ou blasphème favori ?

  • Pierre

    Un très classique putain.

  • Juliette

    Ouais. Il n'y en a pas un plus exotique ?

  • Pierre

    Il y a un bordel à cul de mon grand-père.

  • Juliette

    J'aime bien celui-là. Je prends celui de ton grand-père. La citation que tu aurais aimé avoir prononcée ?

  • Pierre

    Ne nous prenons pas au sérieux, il n'y aura aucun survivant. D'Alphonse Allais.

  • Juliette

    Oh, joli. Ça me fait penser à un truc, par ta position, alors par tes positions de directeur général, etc., par ta position de vice-présidente, t'as eu à maintes reprises l'occasion de prendre la parole. Déjà, alors tu l'as dit, au moins au début de ton expérience politique, c'est pas forcément un truc que t'aimais particulièrement. Est-ce que t'as appris à aimer cette expérience-là ?

  • Pierre

    Oui. En fait, j'ai commencé à aimer prendre la parole en public quand je me suis détachée du côté technique. Parce qu'au début, c'est ce que je t'expliquais tout à l'heure, il y a eu une phase d'apprentissage qui a quand même été assez intense. Et je me disais que je ne serais légitime que quand je maîtriserais parfaitement mes dossiers. Et donc, j'essayais d'être assez pointue, etc. Et quand j'ai réussi à me détacher de ça, c'est-à-dire d'atteindre un niveau de connaissance et de maîtrise suffisant, j'ai pu me détacher de ça pour vraiment basculer sur l'émotion, sur la vision, sur le fait d'embarquer aussi un auditoire avec toi. Et là, oui, j'ai commencé à prendre vraiment du plaisir. Et puis à partager aussi, tu vois, à jouer avec l'audience. à susciter un peu des réactions. Et là, ça commence à devenir super.

  • Juliette

    Puisque quand tu sens que ton discours porte, quand tu sens que tu commences à embarquer les gens avec toi, il y a une puissance de la parole qui est juste incroyable.

  • Pierre

    Oui, et je pense que ça te permet à ce moment-là de te connecter aussi à une forme d'authenticité chez toi. Parce que ce qui est très compliqué, si tu veux, quand tu es... élu, quand tu es sur ces fonctions-là, c'est qu'en fait, tu es toujours en représentation. Donc, quand tu es quelque part, ce n'est pas Juliette qui prend la parole, c'est la vice-présidente de la région Vernier-Rhône-Alpes. Donc, tu incarnes quelque chose qui te dépasse. Et donc, c'est toujours aussi cet exercice qui est parfois un peu compliqué, fragile, périlleux de te dire qu'est-ce qui, dans cette prise de parole... est à moi et qu'est-ce qui est un exercice de style un peu imposé. Mais je trouve que quand tu arrives à te reconnecter à une forme d'authenticité, là aussi, ça vient donner une puissance à ton discours qui est très sympa.

  • Juliette

    Clairement. Et puisqu'on parle d'authenticité, on arrive à la dernière question. Si Dieu existe, qu'aimerais-tu, après ta mort, l'entendre te dire ?

  • Pierre

    On a un rapport assez distancié tous les deux, je le sollicite assez peu pour déconseiller des miracles.

  • Juliette

    Joliment dit !

  • Pierre

    S'il existe et qu'on doit se croiser après ma mort, peut-être que j'aimerais qu'il me dise sans rancune.

  • Juliette

    Sans rancune ? Parce que tu devrais être rancunière vis-à-vis de lui, tu penses ? Ah, lui ! Ok, d'accord, je comprends. Ça marche. Bon, c'est joli tout ça. Juliette, il m'est à te remercier. Je l'ai dit, mais vraiment, et je l'aurai dit en toute sincérité, là aussi. Je trouve que l'idée même du recrutement circulaire est géniale, vertueuse, tout ce qu'on veut. pour tous ceux qui nous écoutent, allez regarder ça d'encore plus près que ce qu'on a pu faire aujourd'hui. Vous verrez que je pense qu'il y a un vrai truc derrière ça. C'est aussi pour ça que j'ai voulu avoir Juliette avec nous aujourd'hui. Donc, merci beaucoup. Merci beaucoup, Juliette.

  • Pierre

    Merci à toi,

  • Juliette

    Pierre. On se revoit dans dix ans pour refaire un point. sur l'avancement de tout ça. OK ?

  • Pierre

    Avant, j'espère.

  • Juliette

    C'était la Khôlle de Juliette Jarry. Merci, Juliette.

  • Pierre

    Merci beaucoup.

  • Juliette

    Bravo, vous avez tenu jusque-là. Merci de votre écoute. Si vous avez aimé cet épisode, partagez-le sur les réseaux sociaux, allez mettre 5 étoiles et des commentaires sur les plateformes de podcast. Abonnez-vous, abonnez-vous à notre newsletter et dans tous les cas, à tout le monde. A très bientôt pour un prochain épisode de La Khôlle. Et n'oubliez pas, tout est possible à qui rêve, ose, travaille et n'abandonne jamais.

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