#84 La stratégie Bambou - Alain Bloch cover
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La Khôlle

#84 La stratégie Bambou - Alain Bloch

#84 La stratégie Bambou - Alain Bloch

1h33 |14/03/2025|

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#84 La stratégie Bambou - Alain Bloch

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1h33 |14/03/2025|

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Description

Dans l'épisode 84, La Khôlle reçoit Alain Bloch, entrepreneur aguerri, professeur émérite à HEC Paris et co-auteur de « La Stratégie du Bambou ». Cette conversation captivante révèle comment cette approche novatrice peut transformer votre vision de l'entreprise et redéfinir vos méthodes d'innovation.


La stratégie du bambou, inspirée des caractéristiques exceptionnelles de cette plante, s'articule autour de trois principes fondamentaux : l'enracinement profond dans vos compétences distinctives, la souplesse d'une expansion contrôlée vers de nouveaux marchés, et une prolifération stratégique permettant de conquérir durablement votre territoire économique.


Contrairement aux modèles traditionnels souvent trop rigides, cette approche favorise une diversification ambitieuse tout en maintenant une identité forte et cohérente. Alain Bloch partage des méthodes concrètes pour identifier, renforcer et exploiter vos racines stratégiques afin de développer votre entreprise de façon durable et innovante.


Un épisode essentiel pour les décideurs souhaitant enrichir leur réflexion stratégique et transformer leur organisation en un acteur à la fois agile, robuste et résilient face aux défis contemporains. Bonne écoute !


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Bienvenue dans la colle. Vous êtes curieux ? Vous avez soif de comprendre le monde qui vous entoure ? Alors vous êtes au bon endroit. Si vous aimez vous remettre en question, que comme moi vous pensez qu'on n'a jamais fini d'apprendre, alors la colle est faite pour vous. Sans se prendre au sérieux, je vous propose à chaque épisode de partir ensemble à la découverte de nouveaux horizons, de profils et d'idées inspirantes. Je suis Pierre Barraud, j'ai créé, édité et produit ce podcast. Je suis également directeur général du Campus Orléans de l'ISC Paris, école de commerce, membre de la conférence des grandes écoles. Mon mantra, vis comme si tu devais mourir demain, apprends comme si tu devais vivre toujours. Je suis preneur de tous vos commentaires, suggestions, remarques, ils sont tous bienvenus. Et bien évidemment, je compte sur vous pour placer 5 étoiles et des commentaires sur toutes les plateformes. Allez, c'est parti, bonne écoute ! Chers amis, bienvenue dans ce nouvel épisode de La Colle. Aujourd'hui, on va parler stratégie, entrepreneuriat, avec... avec un ami, j'ose le dire, Alain Bloch. Salut Alain.

  • Speaker #1

    Salut Pierre.

  • Speaker #0

    Alors Alain, pour tous ceux qui ne le connaîtraient pas, il est Saint-Syrien. Alors ça, voilà, déjà ça pose le gars. Docteur de l'université de Paris-Dauphine, en informatique étonnamment, mais on reviendra informatique des organisations. Et puis carrière militaire, carrière d'entrepreneur et carrière de... professeur, puisque monsieur est professeur émérite d'HEC. Mais enfin voilà, tout ça c'est plein de belles choses et surtout aujourd'hui on va parler d'un ouvrage que tu as commis avec Véronique Nguyen, qui est elle aussi prof à HEC si je me trompe.

  • Speaker #1

    Oui, professeur à HEC Paris,

  • Speaker #0

    qui s'appelle la stratégie du bambou. Après cette courte introduction, Alain, est-ce qu'en quelques heures, mots, tu veux bien te présenter, parce que moi j'ai pris les éléments que j'avais, mais voilà.

  • Speaker #1

    Alors écoute, tu as très très bien dit, j'ai eu la chance effectivement dans ma carrière de faire les trois plus beaux métiers du monde, le métier des armes, officier, le métier effectivement d'entrepreneur, qui est celui qui probablement m'a le plus marqué et probablement aussi enthousiasmé. Et puis, depuis longtemps maintenant, le métier de professeur, effectivement, métier que je fais d'ailleurs plus comme un éducateur que comme un chercheur, même si je fais comme beaucoup de profs. Je publie, bien sûr, mais je publie plein de livres que personne ne lit d'ailleurs, mais d'une façon générale.

  • Speaker #0

    Il y a une bibliographie impressionnante quand même. Tu en as six ou quelque chose comme ça.

  • Speaker #1

    Oui, j'en ai même écrit 14, mais peu importe, puisque je me demande même encore comment les éditeurs me publient, puisque je trouve qu'on n'en vend pas beaucoup. Ça va changer avec la stratégie du bon boulot. Éducateur, parce qu'au fond, oui, je pense que quand on est officier, on est forcément un peu éducateur de ses hommes. Quand on est entrepreneur, on est aussi un peu éducateur de ses... de ses collaborateurs, de ses associés. Et puis, quand on est prof, il y a effectivement cette façon de transmettre qui est peut-être plus dans l'éducation au sens où dans l'entrepreneuriat, forcément, puisque j'enseigne l'entrepreneuriat, on travaille beaucoup sur les comportements, les savoir-faire, plus que finalement les connaissances explicites. Et donc, voilà. Donc, les trois plus beaux métiers du monde. officier, entrepreneur et professeur. D'ailleurs, je voudrais qu'on écrive ça sur ma tombe.

  • Speaker #0

    C'est pas mal comme épitaphe. Rentrons dans le vif du sujet. Parle-nous un peu de la stratégie du bambou. Mais qu'est-ce que ça fait ?

  • Speaker #1

    La stratégie du bambou, c'est d'abord l'histoire d'une très belle rencontre avec Véronique Nguyen. Véronique Nguyen, évidemment, c'est une professeure de stratégie d'HEC. On s'était croisés beaucoup de fois. On se parlait, je l'aimais beaucoup, je crois qu'elle m'apprécie aussi. Puis un jour, on fait effectivement une formation ensemble pour un public d'adultes sur la stratégie en général. C'est moi d'ailleurs, je dirigeais ce programme dans lequel je l'avais invité à faire un cours. Et puis, je découvre qu'elle parle de cette stratégie bambou parce que l'idée originelle lui revient. Et je suis admiratif, fasciné par ce qu'elle raconte, que je trouve à la fois très original, très juste, assez… Voilà. pas du tout galvaudé, que cette métaphore du bambou a beaucoup de signification, je vais y revenir. Et donc, je lui dis, mais Méranique, c'est fou, c'est génial ton truc, pourquoi tu n'écris pas un bouquin ? Elle me dit, mais si, etc., j'ai ça sur le... mais je n'y arrive pas, beaucoup de temps, je travaille trop, machin, bon. Et donc, je lui dis, écoute, si je... je peux contribuer d'une façon ou d'une autre, moi je serais ravi, je trouve que c'est une très belle idée, etc. Et donc on a effectivement conçu le projet d'écrire le livre. On a commencé par écrire des papiers ensemble, plusieurs articles, et puis effectivement on a convenu d'écrire ce livre dans lequel je ferais au fond un espèce de chapitre introductif un peu durti pour à la fois expliquer notre rencontre, mais dans lequel il est complètement prévu que ce soit... elle qui fasse l'essentiel parce que je ne veux pas du tout donner le sentiment que je lui pique l'idée tu vois mais je suis un grand défenseur de cette idée, de cette vision sur laquelle je peux effectivement développer comme tu dis.

  • Speaker #0

    Oui c'est intéressant parce que en plus de ça c'est pas le sous-titre mais la baseline en dessous du titre du livre c'est en gros remplacer Porter et la stratégration bleue.

  • Speaker #1

    Oui, c'est ça.

  • Speaker #0

    Vous faites du marketing aussi, c'est un peu du teasing quand même. En gros, parce que Porter, c'est quand même Harvard, la stratégie océan bleu, c'est l'INSEAD.

  • Speaker #1

    C'est l'INSEAD,

  • Speaker #0

    oui. On se pose quoi, HEC se pose là.

  • Speaker #1

    Non, mais alors, c'est clair qu'au fond, sur le plan un peu conceptuel, l'idée, c'est qu'effectivement, il y a eu entre le grand succès de stratégie océan bleu et les grands succès de Michael Porter, il y a eu un espèce de trou noir en termes de livres, de publications, je dirais, grand public, alors qu'il y a une théorie extrêmement importante qui est la théorie des ressources distinctives qui en fait se situe un peu chronologiquement entre les deux. ces deux courants stratégiques, le courant portairien et puis le courant d'Océan Bleu, qui est d'ailleurs un prolongement du courant portairien, parce qu'au fond, qu'est-ce que nous disent les auteurs de stratégie Océan Bleu ? Ils nous disent que le mieux, c'est d'éviter la concurrence, thème de portaire, en finalement recherchant l'innovation maximum, c'est-à-dire effectivement... en étant le premier, en ouvrant cet océan bleu dont il nous parle, et en évitant effectivement que les concurrents s'y engouffrent, pour éviter que ça devienne à son tour un océan rouge. Donc c'est une idée très originale, qui est intéressante, mais qui au fond ne dit qu'une chose, c'est que plus tu innoves et plus ton innovation rencontre le marché avant tous les autres. plus effectivement tu as de facilité à te développer. Bon, je caricature un peu, c'est un petit peu plus sophistiqué que ça, ils en écrivent 700 pages, donc si c'était aussi simple que ça, bien sûr ça ne serait pas… Mais grosso modo, c'est juste pour dire que c'est quand même assez porterien dans la vision, puisque au fond, Porter travaille beaucoup sur l'avantage concurrentiel, donc la concurrence et… les auteurs de stratégie océan bleu finalement disent c'est encore mieux quand il n'y a pas de concurrence du tout grâce à l'innovation. Entre les deux il y a eu un courant très important mais qui n'a pas donné lieu à des publications grand public ou en tout cas pas du tout en Europe et pas traduite, probablement quelques unes aux Etats-Unis mais qui n'ont pas du tout le même type de succès que les bouquins de Porter et stratégie océan bleu. qui a cette théorie des ressources distinctives. Qu'est-ce qu'elle dit finalement ? Cette théorie dit qu'effectivement, ce qui constitue la force la plus importante d'une entreprise, c'est ce que cette théorie appelle ses ressources distinctives, qui lui donne un avantage concurrentiel, mais qui n'est pas décrit par Porter, puisque Porter s'intéresse à la différenciation ou la stratégie de prix, qui n'est pas décrit. par porteur et qui consiste à se dire finalement qu'est-ce que je fais mieux que tout le monde ? C'est la question finalement que doit se poser le manager s'il veut s'inspirer de cette théorie des ressources distinctives. Qu'est-ce que je fais mieux que tout le monde et comment je peux essayer de m'organiser pour ne faire en quelque sorte que ça ? Et c'est ce qui a conduit à à la fin du siècle dernier, ce grand mouvement d'externalisation, puisque c'est ça qui a construit le corps business. Voilà, on se centre sur ce qu'on sait le mieux faire et tout le reste, on l'externalise. Donc, c'était quand même très inspiré par cette théorie des ressources distinctives. Qu'est-ce qui vraiment fait dans mes compétences ? On parle quelquefois de compétences distinctives aussi. Qu'est-ce qui fait ma différence ? Donc en fait, la stratégie du bambou, c'est une stratégie qui s'inspire beaucoup de cette théorie des compétences distinctives, mais qui ne se limite pas à ça. C'est parti finalement d'un constat qui est que les grands modèles de la stratégie décrivent assez mal les plus grands succès des dernières années des plus grandes entreprises du monde, c'est-à-dire que les fameuses GAFA, Google, Amazon et les autres, quand tu regardes sur longue période, il y a un peu de portaire, il y a un peu de stratégie océan bleu, mais au total, les modèles portairiens et le modèle océan bleu ne permettent pas. pas d'analyser en finesse et en profondeur le succès de ces très grandes entreprises. Et donc, ça part un peu de ce constat et l'idée clé de Véronique, c'est de se dire mais au fond, ces entreprises, elles ont une trajectoire très particulière qui effectivement se déroule en fait en trois temps. Un premier temps. Elles enracinent très profondément ces fameuses compétences distinctives, elles les analysent et elles les consolident en les enracinant très profondément.

  • Speaker #0

    C'est ce que vous appelez le concept de racine mère, c'est ça ?

  • Speaker #1

    Voilà, c'est ça. Et donc ces racines mères qui sont les compétences distinctives particulièrement bien consolidées, enrichi éventuellement par des acquisitions, etc., qui permettent ce que finalement le discours stratégique en principe interdit, c'est-à-dire le foisonnement tous azimuts. En fait, la doxa stratégique, c'est quand même de dire qu'il faut se concentrer sur son core business et ne faire que ce qu'on sait faire bien. Et au fond, ce n'est pas ce que font les GAFA. Les GAFA, effectivement, Ils ont une compétence distinctive qu'ils défendent et qu'ils enrichissent tout au long de l'existence, mais cette compétence distinctive leur permet d'aborder des champs extrêmement différents. Quand tu prends Google, ça passe de grand succès de Gmail à aujourd'hui Waze ou d'autres. Quel est le lien entre toutes ces compétences ? tout ce qu'on appellerait des formes de diversification. Alors justement, ce ne sont pas des vraies diversifications, c'est en fait un foisonnement qui est nourri par ces compétences distinctives enracinées. Donc le premier moment de la stratégie du bambou, c'est d'identifier clairement ces fameuses compétences distinctives, ce qui n'est pas toujours facile, et puis de les enraciner en les consolidant au maximum, en les rendant. à la fois unique et indestructible.

  • Speaker #0

    Ça me fait penser à Amazon, qui à la base est un e-commerçant et qui en fait, en compétences distinctives, a développé en... interne pour ses besoins propres, la capacité d'avoir des serveurs qui vont scaler les volumes, etc. qui vont derrière se dire, c'est quand même bizarre, on a le savoir-faire, on a les infrastructures, sauf qu'on l'utilise qu'à fond une fois par an, allons-y, on va peut-être essayer d'en faire un business. Et c'est la naissance d'Amazon Web Services qui aujourd'hui, dans mon souvenir, doit faire plus de 30% de la marge Oui,

  • Speaker #1

    absolument. C'est un très bon exemple qu'on développe d'ailleurs dans nos cours, puisque Véronique et moi, et chacun séparément, on fait ces interventions sur la stratégie pour vous. Amazon est un très bon exemple de compétences distinctives qui est très enracinée. On peut dire que, grosso modo, la compétence, c'est la capacité de traitement des données de façon très élaborée sur les clients. couplé à la logistique, c'est les deux compétences hautement distinctives qui ont été extrêmement consolidées par Amazon et qui lui ont permis effectivement non seulement d'être le premier distributeur du monde à égalité avec Walmart, mais aussi un offreur de services pour effectivement le cloud, etc. Et on pourrait multiplier les exemples Google, Apple, Apple qui... dont la compétence distinctive est principalement l'interface homme-machine, qui est quelque chose qu'ils ont su construire avec un système d'exploitation d'ordinateurs extrêmement innovant et unique, qui est encore aujourd'hui, qui bataille sérieusement contre Windows, mais aussi l'interface homme-machine dans les iPhones, etc. les montres aujourd'hui, une compétence distinctive qui lui permet également de foisonner et d'aborder des sujets aussi variés que la musique, effectivement l'horlogerie, une horlogerie qui est évidemment totalement numérique, mais pour montrer que là encore il y a un vrai foisonnement et que derrière ce foisonnement en réalité il y a une compétence distinctive ou plusieurs compétences distinctives qui sont vraiment... c'est pour ça qu'elles sont distinctives, et qui sont profondément cultivées et enracinées, et qui permettent ce foisonnement un peu énigmatique, parce que finalement ce foisonnement, il faut beaucoup creuser pour lui voir un fil conducteur, il y en a en général un, mais je dirais que ce foisonnement est un peu, en théorie, condamné par... Par la doxa stratégique. Il y a un troisième temps, si tu me permets, parce que ce troisième temps est celui qui est peut-être le plus borderline en termes même juridiques. C'est le moment de l'étouffement. Et c'est là qu'on retrouve la force de la métaphore du bambou. Le bambou, effectivement, pour quiconque a eu dans son jardin un bambou, il serait carrément indestructible, parce que pour l'arracher, tu te donnes du mal et puis ça repart. poussent aussi secs, que ça foisonne beaucoup, c'est-à-dire que si tu n'y prends garde, ton jardin est assez vite envahi et que ça étouffe effectivement tout ce qui pousse autour. Et ça, c'est le côté un petit peu noir du développement des GAFA. On sait tous qu'ils cherchent, d'une certaine façon, à tuer la concurrence, alors pas forcément la tuer… en l'asphyxiant, quelquefois en la rachetant, etc. Mais en tout cas, il y a cette volonté, on retrouve là un peu l'océan bleu, il y a cette volonté d'étouffer tout ce qui pourrait perturber cet envahissement par un foisonnement d'activités. Et donc là encore, on retrouve cette métaphore du bambou. Les racines qui sont très profondes, ce foisonnement qui paraît invincible et extraordinairement multiple, et puis cet étouffement progressif de tout ce qui pousse dans la zone, et qui est un point sur lequel on a beaucoup critiqué les GAFA, qui se donnent bonne figure en achetant beaucoup de startups qu'ils intéressent, à leur groupe, mais en vérité, ça cache souvent des asphyxies. qui ne se conclut pas toujours par un rachat. Il y a des tas de boîtes qui meurent parce que Google change tout d'un coup brutalement les règles du jeu, parce que Amazon met des conditions plus ou moins exorbitantes dans ses conditions de vente. Donc, une face qui n'est peut-être pas la plus glorieuse des GAFA, mais qui aujourd'hui leur donne ce statut de premières entreprises du monde. Donc, au fond... La métaphore fonctionne bien, et cette métaphore était très naturelle pour Véronique, puisque Véronique est d'origine vietnamienne, elle est particulièrement inspirée par l'Asie, et donc le bambou lui allait très bien. Et donc cette stratégie bambou, elle a la force de la simplicité, mais elle a quand même une clé très importante, qui sont cette analyse subtile. des ressources distinctives, des compétences distinctives. Je peux donner un exemple qui est moins connu que les GAFA, c'est le formidable exemple de Fuji. Fuji, dans le domaine de la photo argentique, est un brillant outsider derrière Kodak, mais il sent venir de façon beaucoup plus probablement forte le vent de la photo numérique. Il sent que... Les choses vont mal tourner pour lui et contrairement à Kodak qui a fini sous le chapeau du chapter 11 pour rebondir ensuite, mais Fuji a opéré une reconversion absolument étonnante puisqu'aujourd'hui la première activité du groupe Fuji c'est la pharmacie. Et donc ils sont passés de la photographie à la pharmacie en… travaillant en profondeur une compétence distinctif qui était la chimie, qui a été profondément travaillée par deux dirigeants successifs, dont l'un d'entre eux a d'ailleurs écrit un livre là-dessus qui s'appelle Le Miracle Fuji, mais qui fait qu'aujourd'hui le groupe Fuji est très largement devant le groupe Kodak. C'est un groupe qui est encore dans la photo, mais qui est très largement diversifié et dont la principale source de revenus... Et la pharmacie, ce qui ne...

  • Speaker #0

    C'est pas une histoire de folagène aussi ?

  • Speaker #1

    Alors oui, il y a plusieurs éléments, je ne rentre pas trop dans le détail, mais c'est juste pour illustrer que ça n'est pas quand même que les GAFA et qu'il y a des entreprises qui ont eu ce type de stratégie bambou. Parce que derrière cette analyse en profondeur de ce qui constituait une compétence distinctive, Fuji a aussi foisonné, puisqu'ils sont toujours dans la photo, mais ils sont dans la santé. Donc ils ont des tas d'activités aujourd'hui. qui paraissent très éloignées les unes des autres, mais qui en réalité ont pour point commun ces fameuses compétences distinctives.

  • Speaker #0

    Pour résumer, il y a trois étapes. S'enraciner, foisonner, proliférer, conquérir.

  • Speaker #1

    Oui, on va dire ça.

  • Speaker #0

    Avec une logique effectivement de l'agressivité du bambou. Si je comprends bien... Effectivement, c'est les compétences distinctives qui, dans cette analogie biologique, seraient les racines.

  • Speaker #1

    Oui.

  • Speaker #0

    Le foisonnement, c'est les X business units qu'on va pouvoir construire sur ces racines. Et la prolifération, c'est l'extension du domaine de la lutte. On va dire ça comme ça.

  • Speaker #1

    L'extension, exactement. Avec quand même cette tentation permanente d'une certaine forme d'étouffement, plus ou moins voulue, plus ou moins naturelle. plus ou moins anti-concurrentiel. Là-dessus, les autorités concurrentielles du monde entier se penchent régulièrement sur le comportement des GAFA à ce sujet-là. Mais voilà, c'est une propension assez naturelle dans la stratégie du bambou, puisque ce foisonnement, cette prolifération, par nature, a tendance à étouffer toute forme de concurrence.

  • Speaker #0

    Sauf que... Alors ça se heurte à un truc qui est que les entreprises ont tendance à continuer à faire ce qu'elles font et on va dire que l'innovation, l'agilité, tout ça même si tout le monde s'en gargarise, c'est pas toujours le cas et de toute façon aussi les allocations budgétaires ne vont pas au foisonnement. Comment on fait pour avoir une organisation Bamboo compatible ? C'est une très bonne question parce qu'en fait, je dirais qu'il y a la stratégie bambou, mais Véronique a aussi l'idée qu'il faudrait écrire un livre sur les organisations bambou, parce que la question que tu poses est très juste. Et d'ailleurs, il y en a un exemple qui est absolument criant, puisqu'on a parlé de Google, c'est la tétanie de Google. la tétanie qui n'a pas duré très longtemps mais qui a quand même été très marquée devant l'intelligence artificielle. Google a été pris de court et ça c'était parce qu'ils avaient effectivement une compétence distinctive en matière de recherche sur le web qu'ils ont su effectivement transformer sous plein d'aspects mais au fond ils n'ont pas été capables de remettre en cause ce modèle dominant qui constituait effectivement leurs ressources distinctives, leurs compétences distinctives principales, et ils ont été pris de court par cette nouvelle technologie. Ils sont en train de réagir, de s'y adapter, ils ont beaucoup de moyens. Mais ça a été quand même un moment où on a bien vu qu'il y avait une remise en cause en profondeur du modèle. Et là, pour le coup, on retrouve un peu… un peu stratégie océan bleu, parce que c'est vrai qu'au départ, l'intelligence artificielle et notamment ChatGPT, OpenAI, ont créé un océan bleu dans lequel personne n'avait rien vu venir. Tout le monde était à peu près prêt,

  • Speaker #1

    mais personne n'était sorti.

  • Speaker #0

    Voilà, exactement. Et alors, malheureusement pour ChatGPT... Et OpenAI, on n'est plus du tout dans l'océan bleu et tout le monde s'est engouffré, donc c'est en train de devenir un océan rouge vif. Donc ça, c'est très difficile et d'ailleurs, Kim et Mauborgne, les deux auteurs de ce stratégie océan bleu, c'est un sujet sur lequel ils consacrent les plus longs développements. C'est comment est-ce qu'on préserve son océan bleu parce que c'est ça qui est le plus difficile finalement. Ce n'est pas d'innover au départ, c'est d'arriver à maintenir. des barrières à l'entrée suffisantes pour que son innovation de départ continue à nourrir le à nourrir le développement de l'entreprise sans que la concurrence puisse vraiment rivaliser. Bon donc clairement la stratégie bambou elle n'entend pas être un modèle dominant, portaire à des vertus, stratégie océan bleu à des vertus, il y avait un espèce de trou. entre les deux, qui est vraiment lié à cette théorie des compétences distinctives, qui n'était pas convenablement vulgarisée en quelque sorte. Et le mérite de Véronique, c'est effectivement d'avoir trouvé cette métaphore qui est très parlante et qui convient parfaitement à cette forme de stratégie et qui peut permettre, je dirais, au plus grand nombre, c'est-à-dire au manager, de comprendre. comment on peut faire pour finalement avoir ce type de développement sans risquer la catastrophe. Parce qu'il faut bien voir que le foisonnement, quand il n'est pas suffisamment enraciné dans une compétence distinctive, il t'expose effectivement à la catastrophe. C'est-à-dire que s'il n'y a pas un fil conducteur clair…

  • Speaker #1

    Un peu par terre dans ton essence, oui.

  • Speaker #0

    Voilà, exactement. S'il n'y a pas un fil conducteur clair et des compétences distinctives qui sont ce fil conducteur clair, alors c'est clair que… Évident que les stratégies de conglomérat sont en général assez nocives. Elles sont d'ailleurs assez fortement sanctionnées par les bourses. Mais elles peuvent avoir une explication patrimoniale. Mais grosso modo, sur le plan strictement industriel, c'est rarement un succès. Il y a des entreprises qui font des stratégies bambou sans qu'on le voit vraiment. Par exemple, le groupe Michelin, on se dit qu'ils font des pneus. Oui, sauf que faire des pneus de vélo, faire des pneus de tracteur et faire des pneus d'avion… effectivement c'est toujours des pneus mais les technologies n'ont rigoureusement rien à voir. Et clairement, en réalité, les compétences distinctives qui sont essentiellement la chimie du caoutchouc, les alliages, etc., tout ce qui ont permis à Michelin d'être le géant qui... qu'il est et c'est une forme de stratégie bambou, on pourrait presque dire cachée, parce qu'au fond, à l'œil nu, quand on regarde de l'extérieur, on se dit, ben oui, ils font des pneus, et donc ils font tous les pneus possibles et imaginables, mais en réalité, ce n'est pas aussi simple que ça, et ça suppose effectivement de bien comprendre quelles sont ces compétences distinctives pour être capable justement de faire tous ces pneus qui sont en réalité très différents les uns des autres.

  • Speaker #1

    Puis effectivement, ça pose des questions d'organisation qui sont capables d'accepter ça. Ça pose des questions de culture de ces organisations aussi. Enfin voilà, parce qu'aujourd'hui, beaucoup restent sur une idée. C'est un truc que j'ai encore entendu très récemment sur la bonne stratégie, c'est more. pour 70%, Better pour 20% et New pour 10%. C'est-à-dire, on fait plus de ce qui marche et là, on y met 70% du budget. On améliore les process et on y met 20% de notre budget et on fait du New pour 10%, histoire de s'assurer pour l'avenir. Là, la logique du bambou, c'est quand même, quand on parle de prolifération et l'image du bambou pour ça est très bien trouvée, parce que ça part effectivement, des tiges de bambou,

  • Speaker #0

    il y en a plein. Exactement, et effectivement, on parlait d'organisation bambou, on a moins creusé le sujet, mais c'est clair qu'il y a des organisations qui savent faire ça et d'autres moins, parce que ça nécessite effectivement dans l'entreprise. une forme d'agilité qui va très au-delà des théories agiles, etc. C'est-à-dire qu'il faut vraiment, tu vois, quand on fait à la fois de la photo et du médicament, c'est quand même arriver à réconcilier ça sous une même culture, sous des organisations compatibles, etc. C'est effectivement difficile. Et je pense qu'il y a un vrai sujet de réflexion sur quelles sont les organisations qui sont compatibles. capables de supporter ça on retrouve d'ailleurs des grands débats de du management et de la stratégie 1 c'est le dilemme explorer exploitation exploration comment est-ce qu'on concilie dans le quotidien comme l'a soulevé james march le l'excellence dans l'exploitation c'est à dire dans l'opéra dans les opérations et puis L'excellence dans l'exploration, c'est-à-dire dans l'innovation, dans la découverte des métiers futurs, etc. James March, il y a déjà longtemps, dans les années 90, a souligné que ça mobilisait des compétences stratégiques justement à ses opposés. Et donc cette question de l'organisation Bambou, comment faire pour supporter ce foisonnement, se pose. Et moi je suis très frappé, tu sais, je vais tous les ans. dans la Silicon Valley avec la promotion d'HEC Entrepreneur. Et donc j'ai eu la chance, ça fait 14 ans que j'y vais, j'ai eu la chance de voir certaines entreprises, pas complètement à leur début, mais en tout cas beaucoup plus petites qu'elles ne le sont aujourd'hui, étaient quand même très frappées de voir celles qui restent finalement. entrepreneurial, on pourrait dire, parce qu'on voit, parce que quelque part, derrière ce foisonnement, il faut garder une espèce de dynamisme entrepreneurial et celles qui, petit à petit, sont contaminées par l'effet de taille et deviennent plus ou moins des bureaucraties. C'est assez frappant.

  • Speaker #1

    Il y en a une qui te vient à l'esprit où tu te dis, tiens, celle-là, elle est restée dans l'esprit startup ?

  • Speaker #0

    Alors... Alors, je trouve que jusqu'à une période assez récente, Google était vraiment resté dans une forme d'esprit start-up et ils étaient très obsédés par l'idée qu'il ne fallait surtout pas qu'ils deviennent une bureaucratie malgré leur taille. Ça a été un peu bousculé par les débats sur l'intelligence artificielle, aussi par… les attaques régulières dont a fait l'objet Google par les autorités concurrentielles du monde entier. Et donc, je n'ai pas eu de contact récent avec Google pour savoir si... Mais tu vois, par exemple, il y a une entreprise qui m'a beaucoup frappé dans la Silicon Valley qui était LinkedIn. LinkedIn, c'était au départ, j'ai eu la chance de voir LinkedIn relativement au tout début. Et je me rappelle d'un... Une rencontre avec le CTO de LinkedIn, le tout premier, qui était un des 20 premiers salariés de la boîte et qui était évidemment aussi un associé et qui était incroyablement entrepreneurial, enfin qui était vraiment presque la caricature de l'entreprise. Il était d'origine coréenne et il était la caricature de... de l'américain, de la côte ouest, originaire d'Asie, extraordinairement dynamique, etc. Et aujourd'hui, quand je visite LinkedIn, qui a été, comme tu le sais, racheté par Microsoft, je suis frappé de voir à quel point c'est devenu une bureaucratie. Alors, il faut reconnaître qu'eux, ils ont cet effet réseau qui fait qu'effectivement, alors pour le coup, ils sont dans la stratégie océan bleu, c'est-à-dire qu'il n'y a pas de concurrents, ils sont vraiment dans une espèce de situation de monopole. qui devient d'ailleurs très compliqué à challenger parce que c'est difficile d'avoir un deuxième LinkedIn, via Deo en son temps s'y est cassé les dents. Mais malheureusement, cette position de monopole, c'est un sujet que ne traite pas non plus complètement Kim et Mauborgne dans Stratégie Océan Bleu. Quand on arrive à se prémunir finalement, soit par la technologie, soit par d'autres... de procédés, soit presque naturellement par l'effet réseau comme c'est le cas de LinkedIn, quand on arrive à se protéger de la concurrence et qu'on reste dans cette situation de monopole, le Kim et Mubar ne nous disent pas comment on fait pour éviter de s'installer dans cette position confortable et de devenir progressivement une bureaucratie qui perd, parce que c'est clair que c'est quand même la concurrence qui est à tout moment de stimule et t'empêche de t'encrouter. dans une forme de bureaucratie et là tu vois je pense que là aussi il ya matière pour réfléchir à ce que c'est qu'une organisation qui resterait dans son océan bleu mais tout en restant très très innovante et sans sombrer dans une forme de bureaucratie donc la question de l'organisation elle est toujours assez présente derrière la réflexion stratégique qu'est ce qui permet finalement comment une organisation arrive à supporter la stratégie gagnante qu'elle a trouvée. Donc, c'est une question importante du management.

  • Speaker #1

    Dans votre ouvrage, est-ce que vous détaillez soit des outils ou des process très opérationnels ? Tu vois, typiquement, on parlait des compétences distinctives. des racines. Est-ce que vous avez un process de didération, de recherche pour essayer de les identifier ?

  • Speaker #0

    Est-ce que vous avez développé des matrices ? Là-dessus, Véronique a beaucoup plus travaillé que moi. C'est le sujet essentiel. C'est comment tu identifies ces compétences distinctives et comment tu les durcis. Elle a développé pas mal d'outils. Il y a pas mal d'outils. pas d'outils magiques, il n'y a pas de matrice. C'est hyper décevant. On est très convaincus, Véronique et moi, que si tout se résumait dans la stratégie par des petits outils magiques, avec des tableaux et des trucs...

  • Speaker #1

    Une jolie matrice, tu poses des points et c'est bon,

  • Speaker #0

    tu l'as. On serait tous riches, puisqu'il suffirait d'appliquer la matrice pour réussir, ce qui malheureusement n'est pas tout à fait aussi simple. Bon, voilà. Mais on donne en quelque sorte un peu des fils conducteurs ou en tout cas des contre-exemples pour montrer que cette analyse des compétences distinctives ne va pas de soi et que bien les comprendre, c'est un travail qui peut être long et compliqué. Moi j'ai un exemple d'ailleurs dont je me souviendrai toujours, j'intervenais dans une... PME qui existe toujours, qui faisait des emballages pour des emballages monodoses pour des échantillons publicitaires. Et les échantillons publicitaires, les publicitaires rivalisent évidemment quand il s'agit de parfums, de produits de beauté etc. d'imagination pour faire effectivement l'emballage monodose le plus spectaculaire, celui qui celui qu'on retient au moment où on le reçoit. Et derrière ça, il y a évidemment des sujets techniques qui sont souvent compliqués, de thermoformage, qui ne sont pas simples. Et cette chef d'entreprise, quand je lui demandais de formuler, c'était une femme, quand je lui demandais de formuler quel était son avantage concurrentiel, elle me disait « nous, on trouve toujours la solution » . Quand on nous pose un problème particulièrement compliqué que les autres n'arrivent pas, on trouve toujours la solution. Alors je lui dis, oui, mais la question c'est un peu comment vous la trouvez ? Parce que dire on trouve toujours la solution, c'est sympathique, mais comment vous faites ? Et donc elle était incapable de répondre à cette question. Et donc moi je me suis attaqué à cette question, et effectivement c'est une PME, et donc j'ai été dans l'atelier, j'ai essayé de comprendre comment, quand il recevait une commande complexe, Comment ils trouvaient cette fameuse solution ? Et cette compétence distinctive, elle se constituait autour d'un trio dont je me souviens très bien de trois hommes. Il y avait un régleur machine, un ingénieur et un troisième larron. Je ne me souviens plus exactement quelle était sa fonction. Mais en tout cas, il y avait un espèce de petit trio qui effectivement... parce qu'ils fonctionnaient bien ensemble, parce qu'ils avaient des compétences très complémentaires, trouvaient des solutions innovantes aux problèmes que posait le client. Et donc, une fois que j'avais fait ce constat, j'ai dit, écoute, je crois que j'ai trouvé ce fameux endroit où ça se passe dans l'entreprise, là où on trouve cette solution miracle qui fait ton avantage concurrentiel. Mais ça m'inquiète beaucoup parce que finalement, ça repose sur trois individus qui demain matin peuvent disparaître. qui demain matin peuvent décider de quitter l'entreprise, etc., de partir en retraite ou je ne sais quoi. Et donc, cette question de ton avantage concurrentiel qui se formule en disant on trouve toujours la solution me paraît incroyablement fragile parce que reposer sur les épaules de trois individus brillants qui fonctionnent bien, mais jusqu'à quand ? Et donc, c'était un exemple. Pour expliquer que quelquefois, la compétence distinctive, puisqu'en fait, cet avantage concurrentiel s'enracinait dans cette compétence distinctive, je sais trouver une solution innovante au problème, au cahier des charges que pose le client pour son emballage monodose public promotionnel, ça reposait sur, en quelque sorte, le savoir-faire de trois individus qui se combinaient harmonieusement. et qui était donc très difficilement reproductible. Et donc, souvent, quand on identifie comme ça des compétences distinctives, la bonne question, c'est de se dire, c'est distinctif, d'accord, mais est-ce reproductible ? Et tu vois, c'est une question, distinctif, c'est le plus important, mais en réalité, il faut arriver à se convaincre que c'est reproductible. Et dans le cas que je cite, Cette compétence distinctive, elle était bien réelle, c'est ce qui faisait le succès de l'entreprise. Elle n'était pas reproductible, elle était difficilement reproductible et elle était donc fragile. Et donc, enraciner la compétence distinctive, ça veut dire, dans cet exemple-là, effectivement construire le système qui permet à chacun de ces trois individus d'avoir un successeur, d'être capable de... de combiner la génération suivante d'arrivée, et donc de combiner à nouveau des compétences de formation, des compétences de recrutement, etc., qui, au fond, étaient un peu cachées. Pour consolider cette compétence distinctive qui existait dans cette organisation, il fallait en cultiver d'autres, qualité du recrutement, qualité de la formation interne, etc., dont on n'avait pas d'ailleurs forcément les moyens, cette petite entreprise. Et c'est ça que ça veut dire, consolider, enraciner ces compétences distinctives. C'est vraiment l'idée de les rendre indestructibles. Or, dans le cas que je cite, qui me revient à l'esprit, elles étaient loin d'être indestructibles puisqu'elles étaient vulnérables au départ d'un des trois. Et donc, finalement, quand on dit identifier ces compétences distinctives, ce n'est pas toujours simple. Quand ma chef d'entreprise disait, on trouve toujours la solution, ben oui, mais comment ? Et deuxièmement, consolider, ça veut dire une fois qu'on a compris comment finalement ça se constituait, cette compétence distinctive, en l'occurrence cette alchimie un peu mystérieuse entre trois individus, comment tu la perpétues, c'est-à-dire finalement comment tu la rends indestructible, comment tu la rends transmissible. Et ça c'est difficile.

  • Speaker #1

    Ok, vous l'aurez compris, tu dis la stratégie du bambou ou la stratégie bambou ?

  • Speaker #0

    C'est un peu les deux. J'ai la stratégie bambou parce que la traduction en anglais c'est bambou strategy et donc voilà du coup on dit stratégie bambou.

  • Speaker #1

    Parce que tu vois je me suis amusé avant de commencer à regarder les caractéristiques des bambous. Croissance rapide, très résistant, s'adapte à tous les environnements, agressivité de prolifération. Et un truc intéressant c'est qu'il y a plus de 1000 espèces de bambous. Et je trouve que pour un outil de stratégie, dire que finalement, oui, il y a une grande famille qui peut être la stratégie bambou, mais qui peut se décliner sur 1000 business case,

  • Speaker #0

    ça donne quelque chose d'intéressant. Et tu vois, entre l'exemple de cette petite PME Amazon et Fuji, c'est effectivement des types de bambou qui sont très différents.

  • Speaker #1

    Ok, ça me va. Donc, courez vers tous les bons livraires pour acheter cet excellent ouvrage. Si tu veux bien, on prend un petit peu de temps pour parler de toi. Déjà, comment ça se fait que tu as atterri à Saint-Cyr ? C'est quoi l'histoire derrière ça ?

  • Speaker #0

    Alors écoute, Saint-Cyr, c'est je pense une histoire de vocation. Il y a un côté... assez simple qui était que j'avais pas envie d'être dans un bureau, j'avais pas envie d'être ingénieur, je rêvais de grand air et de mouvement comme on dit. Bon alors il n'y a pas que l'armée pour effectivement ça, mais simultanément, moi j'ai vécu en mai 68 une période assez étonnante, j'étais au lycée Saint-Louis, à Paris, donc en plein cœur du quartier latin, et j'ai vu ma génération envoyer des pavés, rêver d'avoir cette espèce de révolution existentielle qui s'est terminée au mois de juin, mais qui a été suivie d'un épisode qu'on oublie un petit peu, mais qui était quelques semaines plus tard, l'envahissement de la Tchécoslovaquie par les chars russes, à la suite de l'équivalent du printemps de mai 68, le fameux printemps de Prague qui a été noyé dans le sang par les soviétiques de l'époque, les russes d'aujourd'hui. Et ça, ça m'a beaucoup frappé. Je me suis dit, nous on lance des pavés, On dit sous les pavés la plage, on a cette espèce de rêve existentiel, etc. Et pendant ce temps-là, à grosso modo 800 km de Strasbourg, il y a des chars soviétiques qui écrasent les libertés, des gens meurent pour défendre leurs libertés, etc. Et ce décalage m'a paru incroyablement étonnant. et au fond a été probablement le fait déclencheur de ma vocation militaire. Je me suis dit, on ne peut pas faire ce constat et s'en contenter. Il y a un moment donné où si tu fais ce constat, tu te dis, bon, ok, qu'est-ce que je fais maintenant ? Alors, il y a plusieurs voies, il n'y a pas que la voie militaire, tu peux aussi te lancer dans l'action politique.

  • Speaker #1

    Non, mais c'est une voie qui a du sens.

  • Speaker #0

    Oui. de lancer dans la voie politique et dire je vais attirer l'attention du monde entier sur le danger que constitue, etc. Mais la façon la plus simple, c'est de se dire, si je fais ce constat-là, la première chose qu'il faut faire, c'est mettre sa peau au bout de ses idées, comme disait le capitaine Sergent. C'était une formule qu'il utilisait, mettre sa peau au bout de ses idées. Et donc, ça a été un peu mon réflexe.

  • Speaker #1

    Et ça a été quoi, ta carrière militaire, alors ?

  • Speaker #0

    Alors, écoute... J'ai fait une carrière militaire assez courte, puisque je suis parti comme jeune capitaine. Donc, j'ai fait Saint-Cyr, puis mon école d'application dans l'artillerie, et ensuite mon temps de commandement.

  • Speaker #1

    Artillerie comme Napoléon, grand stratège, si vous en avez.

  • Speaker #0

    Mais oui, exactement. Alors, je suis parti pour une raison d'ailleurs tout à fait claire. Ce que je voulais, c'était être pilote d'hélicoptère. Donc, à l'époque... pour être pilote d'hélicoptère il fallait commencer par choisir une arme. En l'occurrence, j'ai choisi l'artillerie et puis ensuite on basculait vers l'aviation légère de l'armée de terre, les hélicos, ce qui n'est plus le cas aujourd'hui. Aujourd'hui on peut choisir la latte, l'aviation légère de l'armée de terre, les hélicos comme une arme à part entière dès la sortie de l'école. Ce n'était pas le cas de mon temps. Et donc, je suis arrivé à l'école de Dax, qui, comme jeune capitaine, qui est l'école de formation des pilotes. Et là, j'ai eu un épisode malheureux, vocation un peu contrariée, puisque j'ai fait un épisode d'hypertension artérielle. Donc, j'étais inapte médicale pour cause d'hypertension artérielle. Bon, j'ai essayé de faire ce qu'il fallait pour... Et puis ça n'a pas fonctionné, on ne traitait pas aussi bien probablement qu'aujourd'hui l'hypertension artérielle à l'époque. Et puis j'ai un peu passé mon tour parce que si tu veux dans ce système, chaque promotion de Saint-Cyr amenait son lot de pilotes potentiels. Et donc je ne pouvais pas reprendre le train l'année suivante. Et donc j'ai sur cette... déception j'ai décidé de quitter l'armée en me disant bon ben voilà j'ai l'artillerie c'est bien mais je me vois pas artilleurs toute ma carrière j'avais ce rêve de pilote d'hélico ça se fait pas bon ben il faut il faut en tirer les compétitions et voilà et donc j'ai alors j'ai appris à piloter un les hélicos depuis bon j'ai voilà je suis devenu pilote d'hélico sur le tard puisqu'en fait c'est de chc un beau jour sur le Au coup de mes 65 balais, ou 64, je ne sais plus, je me suis dit, quand même... Tu en es à 64 ans ! Je ne vais pas rester sur cette frustration. J'ai tout su le noble qui est juste à côté d'HEC. Je vais aller faire un tour, voir si on peut. Puis finalement, j'ai appris à piloter. C'est génial ! Tu sais, j'ai eu ce drame personnel qui est... avec mon meilleur ami d'enfance, Olivier Dassault, s'est tué, lui, aux commandes de son hélicoptère. Et donc, ça m'a un peu refroidi. Et du coup, j'ai appris. Et donc, je ne suis pas resté sur cette frustration. J'avais eu la chance d'apprendre à piloter les avions dans l'armée parce que dans la perspective de la latte, on avait des facilités pour... pour passer le brevet avion avant de rejoindre l'école de Dax. Ce que j'ai fait, j'ai continué à pas mal piloter les avions, mais effectivement, je n'avais pas passé ce...

  • Speaker #1

    En tout cas, il n'est jamais trop tard. Voilà, il n'est jamais trop tard.

  • Speaker #0

    Il n'est jamais trop tard. Ça, c'est un grand principe.

  • Speaker #1

    On entend souvent dire que les entrepreneurs, les dirigeants d'entreprises doivent ou pourraient s'inspirer des militaires. Toi, tu en penses quoi ? Qui a été les deux ?

  • Speaker #0

    Oui, oui, oui, je pense qu'effectivement, il y a des analogies. D'abord, la stratégie, la stratégie elle-même, c'est d'abord une science militaire. Et les grands auteurs, les grands auteurs sont effectivement, parlent de la guerre, que ce soit Clausewitz, le plus connu, mais plein d'autres qui... On parlait de la stratégie et la stratégie d'entreprise est née à la suite de la Deuxième Guerre mondiale, comme tu le sais, parce que les chefs d'entreprise américains ont été très impressionnés par la capacité des militaires à gérer des grandes opérations comme celle du débarquement, etc. Et se sont dit, il faut absolument qu'on arrive à gérer nos entreprises de la même façon. Donc oui, il y a une filiation assez claire entre... entre l'art militaire, si on l'appelle comme ça, et le management. Je pense qu'il y a effectivement, on pourrait tout à fait classer quelques grands auteurs, comme bien sûr Clausewitz, mais aussi dans une certaine mesure Machiavel, dans les grands auteurs, dans les grands penseurs du management, parce qu'en réalité, qu'est-ce que c'est que le management ? Le management, c'est conduire l'action collective. Et conduire l'action collective dans une situation très particulière qui est celle de la guerre, c'est quand même le métier des militaires. Donc la conduite de l'action collective, c'est le point commun entre le manager et le militaire.

  • Speaker #1

    Et puis ils ont quelques années d'expérience en la matière. Et puis c'est pas prêt de s'arrêter a priori, vu ce qu'on entend en ce moment. Donc après, tu retournes à l'éthique.

  • Speaker #0

    Alors du coup, après, tu sais, la vie est toujours finalement un enchaînement de circonstances et de choses un petit peu étonnantes. Après, en sortant de l'armée, j'avais la chance d'avoir Olivier Dassault, le petit-fils de Marcel Dassault, comme copain d'enfance. Lui avait fait l'école de l'air pendant que moi, je... Je faisais Saint-Cyr, voilà, et donc son grand-père, Marcel Dassault, qui aimait beaucoup son petit-fils, avait aussi un peu de tendresse et d'affection pour moi, qui considérait que j'étais un peu le bon génie de son petit-fils préféré, parce que c'est moi qui lui avais suggéré de faire l'école de l'air, ce qu'il avait trouvé une très très bonne idée. Et donc assez vite, il m'a dit, mais... Voilà, si vous quittez l'armée, venez donc travailler avec Olivier et la famille. Et donc, effectivement, j'ai rejoint le groupe Dassault. Et ça a été ma première rencontre déterminante avec l'entrepreneuriat. Parce que d'abord, tu as 28 ans.

  • Speaker #1

    Parce que tu as commis beaucoup d'ouvrages autour de l'entreprise familiale.

  • Speaker #0

    Oui, oui, oui, absolument. Et alors, ça a été effectivement cet épisode, ce premier épisode de ma carrière, on va dire, civile, m'a fait à la fois découvrir un entrepreneur totalement hors normes, qui était Marcel Dassault, m'a fait moi-même passer à l'action, puisqu'avec Olivier, on a créé une première entreprise dans le domaine de la communication. On s'est transformé, lui et moi, en entrepreneur. Et puis, il m'a fait aussi découvrir effectivement les entreprises familiales, ce souci de la pérennité des entreprises familiales.

  • Speaker #1

    Parce que dans les 14 bouquins, il y en a quelques-uns là-dessus.

  • Speaker #0

    Oui, absolument. Ce modèle de… Oui, parce que si tu veux, je pense que la pérennité, cet objectif de pérennité que… poursuivent assez naturellement les entreprises familiales, mais qui n'est pas réservé aux entreprises familiales. Il y a des entreprises auxquelles j'ai consacré un livre aussi qui ne sont pas des entreprises familiales et qui appliquent un peu ce modèle de la pérennité. Pour moi, la pérennité, ça dessine un modèle de capitalisme différent, un modèle de capitalisme qu'on pourrait baptiser durable au sens strict du terme. Parce que quand tu te donnes comme objectif non pas la performance à court terme, mais la pérennité à long terme, ce qui n'est d'ailleurs pas incompatible, on a besoin de la performance à court terme pour nourrir la pérennité à long terme, mais c'est une question de hiérarchie des priorités. Si tu priorises la pérennité à long terme, alors clairement tu as forcément un comportement avec tes parties prenantes. que ce soit tes salariés, que ce soit tes fournisseurs, que ce soit l'environnement, qui est profondément différent et qui est marqué au saut du respect. Parce que finalement, si tu t'inscris dans le temps long, tu respectes et tes salariés, et tes fournisseurs, ton environnement, parce que tu sais que ton projet, c'est de durer autour de ces parties. C'est compatible ?

  • Speaker #1

    Pardon ? C'est compatible, tu penses, justement, avec une logique de stratégie bambou ?

  • Speaker #0

    Alors, oui. On va couper plusieurs bouquins ensemble. C'est un débat que j'ai avec Véronique. Pour moi, les organisations bambou, en réalité, cachent des organisations pérennes, des organisations qui priorisent la pérennité. Parce que finalement, le bambou, c'est, tu vois, à la différence de l'océan bleu qui cherche un peu à défendre le territoire non concurrentiel, la stratégie bambou, elle vise... au fond, davantage à être indestructible. Et quelque part, c'est une autre façon de dire qu'on vise la pérennité. Et donc, j'ai effectivement, moi, écrit un livre récemment, le dernier en date, qui s'appelle « La pierre et l'édifice » , où je pars de l'épisode de l'incendie de Notre-Dame pour faire une descente en profondeur dans l'organisation de la brigade des sapeurs-pompiers de Paris. et montrer comment cette organisation a su cultiver tous les ingrédients de la pérennité. Et c'était intéressant de partir d'une organisation non marchande pour montrer que cette question de la pérennité dépassait en réalité la sphère strictement commerciale et marchande, et était quelque part un peu, entre guillemets, sociétale. Et oui, c'est un débat que j'ai avec Véronique. Je lui ai dit, je pense que si tu... Si on creuse ensemble ou si tu creuses toi toute seule les caractéristiques de ces organisations bambou, elles vont ressembler comme deux gouttes d'eau aux organisations telles que j'essaye de les démonter, qui sont les organisations qui visent cette pérennité, sachant que dans ce livre, La pierre et l'édifice, on a cherché avec mon co-auteur à véritablement donner des outils pour le coup, pour ce... Pour s'étalonner sur le champ de la pérennité, il y a neuf dimensions managériales qui permettent vraiment de durcir cette pérennité. Et on a vraiment essayé de montrer comment on pouvait, autour de ces neuf dimensions de la pérennité, construire durablement finalement l'édifice de l'entreprise pérenne.

  • Speaker #1

    À un moment va arriver l'opportunité de co-fonder, pas facile à dire, XHEC Entrepreneur.

  • Speaker #0

    Alors avant, il y a quand même tout l'épisode, si tu permets, d'entrepreneur. C'est-à-dire que j'ai créé... Oui,

  • Speaker #1

    mais là, tu as du temps ? Moi, j'ai du temps.

  • Speaker #0

    Non, mais juste pour rappeler que j'ai été entrepreneur ensuite tout seul. Je l'ai été d'abord avec Olivier. Et puis ensuite, quelques années après, j'ai créé effectivement une entreprise appelée l'Annuaire Soleil, qui était une entreprise qui a eu l'hôtel des annuaires du téléphone. Quand je raconte ça aux étudiants, ça me donne instantanément un coup de vieux. Je suis désolé,

  • Speaker #1

    mais oui.

  • Speaker #0

    Les annuaires du téléphone ont été créées.

  • Speaker #1

    Tu as appris à piloter un hélicoptère à 62 ans, 63 ans ?

  • Speaker #0

    Oui, c'est ça.

  • Speaker #1

    C'est bon, tout le monde a compris que tu n'avais pas 18 ans.

  • Speaker #0

    Donc Google a effectivement tué cette activité des pages jaunes. C'est 90% du chiffre d'affaires mondial des pages jaunes en 2005 qui était de 50 milliards de dollars à peu près de recettes publicitaires. Aujourd'hui, 90% de l'équivalent sont dans les comptes de Google. Google, quand tu réfléchis, c'est exactement des pages jaunes. Tu cherches sur les cartes. les coordonnées, c'est vraiment des pages jaunes électroniques. Nous, en France, on avait inventé le Minitel, mais Google a fait quand même beaucoup mieux, évidemment. Et donc, j'ai eu cette expérience très complète de création de boîte, en levant des fonds, en affrontant la concurrence de France Télécom de l'époque qui est devenue orange. en vendant mes actions au bout du compte au groupe Bouy quand il est rentré dans les télécoms. Donc, j'ai fait ce parcours avant de devenir prof, puisque l'histoire, c'est qu'en 1996, j'ai 45 ans et j'ai effectivement fait ce parcours entrepreneurial très intense.

  • Speaker #1

    Tu as vendu au bon moment quand même, non ?

  • Speaker #0

    Oui, alors effectivement, oui, gagner.

  • Speaker #1

    Cinq ans plus tard, ça commençait à vraiment pas sentir bon.

  • Speaker #0

    Un peu plus, parce que j'ai un de mes associés qui s'appelait Olivier Vincent, qui était un jeune étudiant que j'avais croisé justement à HEC, qui lui a refait l'annuaire soleil, ou l'équivalent à Vancouver au Canada, puisqu'en fait, il a été entre-temps le patron des opérations d'annuaire du... téléphone de la compagnie GTI, qui était l'équivalent de France Télécom en Colombie-Britannique. Et ensuite, il lui a fait concurrence, donc il a un peu reproduit le modèle. Et lui a vendu très bien sa boîte, mieux que je ne l'ai fait d'ailleurs à Bouygues, en 2005. Donc, le vrai moment du retournement, c'était 2006-2007, où on a commencé à comprendre. Et donc, c'est vraiment lui qui a vendu le meilleur moment, parce que je pense qu'après, c'était compliqué. Et donc, 1995... Il n'y avait pas encore Internet, j'avais aucune envie d'être salarié, je n'avais pas trop d'idées de création de boîte, j'avais quand même pas mal souffert, c'était un parcours très intense, et donc j'avais toujours enseigné en amateur, bon, HEC Entrepreneur déjà, parce que Robert Papin, le fondateur de ce programme, nous avait recruté, Olivier Dassault et moi, à la suite de notre première création, en disant, mais j'ai... venez encadrer des équipes, etc. Donc, j'ai connu HEC Entrepreneur, je dirais, du côté des entrepreneurs qui sont les tuteurs de nos étudiants dans notre pédagogie distinctive qui est cette pédagogie Learning by Doing que nous déployons depuis maintenant 45 ans. Et donc, je suis effectivement devenu presque par hasard prof professionnel, je suis passé de la catégorie amateur à la catégorie professionnelle, grâce à une première maison pour laquelle j'ai beaucoup d'affection et de reconnaissance, qui était le Conservatoire national des arts et métiers. Le Conservatoire national des arts et métiers a mis au concours une chaire de marketing et de vente, à laquelle j'ai postulé à la sortie de mon... L'aventure Annuaire Soleil qui était une aventure très orientée vente. J'avais une force de vente d'une cinquantaine de vendeurs. Quand j'étais le patron des pages jaunes de France Télécom, avant de créer l'Annuaire Soleil, la boîte concurrente, j'avais une force de vente, j'ai dirigé une force de vente qui comportait 1500 vendeurs. Donc de temps en temps, je rencontrais mes copains de Saint-Cyr, je leur disais, écoutez, moi je... Je ne commande pas de régiment, mais je commande une armée de vendeurs. Et donc, j'ai été effectivement élu sur cette chaire nouvellement créée de marketing et de vente. Et je suis devenu en quelque sorte un vrai prof à ce moment-là. Et grâce au CNAM, ce que je n'oublie pas, j'ai enseigné au CNAM pendant 20 ans. Et j'ai beaucoup appris, y compris... la recherche, parce que les professeurs du CNAM sont, pour la plupart d'entre eux, des professionnels qui intègrent l'enseignement supérieur à mi parcours professionnel, mais on est entouré, une chaire, c'est une équipe avec des maîtres de conférences, et on fait de la recherche, et donc, c'est un peu, c'est assez drôle d'ailleurs, parce qu'au CNAM, c'est un peu les maîtres de conf, les maîtres de conférences qui forment les profs, parce que finalement, les profs...

  • Speaker #1

    Avec l'expérience, c'est rare.

  • Speaker #0

    Ils viennent avec leur expérience du business, mais ils sont ignorants de beaucoup d'éléments en matière de recherche académique en gestion, alors qu'il y a une espèce d'échange fertile qui se fait avec les jeunes profs maîtres de conférences et les plus vieux profs titulaires de chair comme je l'étais. J'ai eu beaucoup de bonheur à enseigner au CNAM, on enseigne à des adultes en cours du soir, des adultes qui sont souvent dans... dans des situations un petit peu compliquées professionnellement, pour qui le CNAM est une planche de salut, c'est souvent leur deuxième chance professionnelle, et c'est un auditoire très agréable. Je disais souvent quand j'étais à HEC et aussi au CNAM, puisque je me suis plusieurs années partagé entre les deux, que finalement je faisais... deux fois le métier de prof, mais que le CNAM était en quelque sorte l'antithèse d'HEC. C'est-à-dire que HEC c'est à la campagne, sur le campus de Jouy, le CNAM c'est en plein centre-ville, HEC c'est plutôt une institution qui est orientée vers le matin, on fait cours le matin alors que le CNAM c'est le soir, et surtout la grande différence c'est que la population d'HEC est quand même constituée de jeunes gens à la tête bien faite, mais plutôt issus des classes socialisées. Alors que le CNAM est peuplé de gens qui essayent de s'élever dans la société justement par la connaissance et l'apprentissage. Donc des expériences qui étaient bien...

  • Speaker #1

    Même côté HEC Entrepreneur, c'est le cas ? Ou est-ce qu'il y a un peu plus de diversité sociale sur HEC Entrepreneur qu'ailleurs ?

  • Speaker #0

    Alors c'est probablement un des programmes dans lequel il y a le plus de diversité sociale, mais on ne peut quand même pas dire que ce soit la diversité la plus... La plus frappante. Donc oui, je pense qu'il y a une vraie diversité professionnelle et puis on se donne beaucoup de mal d'ailleurs pour la nourrir parce qu'on pense que dans notre pédagogie, les étudiants travaillent beaucoup en équipe et on cherche toujours à constituer des équipes avec des cultures différentes. C'est-à-dire qu'on a un peu trois tiers dans nos promotions d'XHEC Entrepreneurs, un tiers qui vient de la grande école HEC. et un deuxième tiers qui sont des ingénieurs dont certains viennent de l'IX, mais d'un peu toutes les écoles d'ingénieurs, et puis un troisième tiers dans lequel il y a une population très diverse, d'étudiants étrangers, d'avocats, des formations tout à fait différentes, et on est très en demande de cette diversité de... de ce troisième tiers qui s'éloigne du moule des grandes écoles. Et on a toujours cherché à nourrir ce troisième tiers avec effectivement des étudiants venant des universités et de préférence ayant effectivement des origines sociales de type boursier, etc. Parce que finalement, c'est dans les échanges ensuite qui se constituent tout au long de l'année entre les étudiants. espèce de fertilisation croisée qui existe entre ces trois populations de commerçants, HEC, d'ingénieurs, et de ces troisièmes horizons universitaires ou étrangers, sont très clairement très fertiles.

  • Speaker #1

    Je pense que ça doit être une expérience assez incroyable, justement, déjà de le développer. de le fonder parce que des projets entrepreneurs, là pour le coup, t'en as vu si ce n'est des centaines beaucoup écoute,

  • Speaker #0

    on a un outil de communication entre les promos d'HEC Entrepreneur, on a un Slack inter-promotion dans lequel il y a un peu moins de 2000 étudiants qui sont en ligne et là Là-dedans, on a recensé à peu près 250 boîtes vivantes. Donc effectivement, oui, j'en ai vu passer, je dirais qu'en 14 ans, puisque j'ai dirigé ce programme pendant 14 ans, en 14 ans, à concurrence, dans les bonnes années d'une haute vingtaine de projets par an, alors certes, certains évidemment s'arrêtant. Et dans les mauvaises années d'une demi-douzaine, oui, j'ai vu passer probablement entre 200 et 300 boîtes et projets dont certains font ma fierté. J'y suis pas pour grand-chose d'ailleurs, parce que là-dedans... Non,

  • Speaker #1

    mais tu es un accompagnateur, c'est ce qu'on disait.

  • Speaker #0

    Oui, un accoucheur en fait, tu vois. Je suis un amalutite de la startup. Oui, exactement. Vraiment, le patron d'HEC Entrepreneur, c'est un mailloticien. Il fait accoucher les projets et il y en a effectivement qui font ma fierté, comme Doctolib, comme Front. On a quand même accouché d'une demi-douzaine de licornes, ce qui dans le paysage français n'est pas si mal.

  • Speaker #1

    Il y en avait dans lesquels tu ne croyais pas du tout et où vous faites tout le temps ?

  • Speaker #0

    Ah oui, alors là, je vais te dire… J'ai un nombre d'erreurs, c'est absolument impressionnant. J'ai d'ailleurs une étudiante que j'adore qui poste assez régulièrement, qui s'appelle Graffi Ramato. qui a un nom donc imprononçable, Sri Lankaise d'origine, et qui a créé une boîte qui marche très très bien qui s'appelle Paris New York, qui fait des burgers PNY, je ne sais pas comment elle prononce, mais en tout cas elle fait des burgers formidables, elle a maintenant 14 restaurants, elle fait près de 20 millions d'euros de chiffre d'affaires, c'est vraiment une... une très belle réussite dans le domaine du food. Elle a publié récemment, graphie, un post dans lequel elle raconte, parce que c'est vrai, que quand elle était HEC entrepreneur, je passais ma vie à dire que c'était une erreur de casting. Je disais, mais qu'est-ce que c'est que cette fille dont je n'ai pas entendu une seule fois le son de la voix, parce qu'elle était un peu timide, de toute l'année ? Comment on a pu recruter une fille comme ça ? Et donc, elle a fait un post sur LinkedIn en disant, quand j'étais HEC entrepreneur, Alain Bloch disait que j'étais une erreur de casting. Et maintenant, quand il m'accueille, parce qu'effectivement, je l'accueille régulièrement. Tu l'embrasse sur les deux joues. Oui, il m'accueille en me disant que je suis son erreur de casting préférée. C'est gentil. Effectivement, c'est un assez bon exemple où, franchement, je n'aurais pas mis un centime sur la carrière entrepreneuriale de graphie et c'était une grossière erreur. Je n'ai pas non plus vu venir le formidable succès de... d'Octolib, Mathilde Collin qui est la fondatrice de Front, une autre de nos licornes, a encore aujourd'hui l'air d'une jeune étudiante attardée. Elle a des longs cheveux comme elle avait quand elle était encore sur le campus alors que maintenant elle est mère de deux enfants et qu'elle a conduit cette boîte aux Etats-Unis de façon absolument exemplaire. Donc, j'ai vraiment pris l'habitude de considérer que les archétypes qu'on avait en tête sur les entrepreneurs et ceux qui étaient susceptibles de réussir étaient en général faux. Et qu'il fallait se méfier de ces archétypes.

  • Speaker #1

    Ah, tu as vu passer Pauline Légnaud aussi ?

  • Speaker #0

    Oui, oui, oui, absolument. De Gémio. Et son formidable projet Gémio et puis son formidable blog. J'espère qu'après la colle, je serai enfin invité par Pauline qui ne m'a jamais invité.

  • Speaker #1

    Pauline sur le... sur le podcast de Pauline, qui est effectivement un peu plus retentissant que la colle, mais tu vas voir, justement, c'est un marche-pied. Oui, bien sûr. Il y a beaucoup de discours qui glorifient l'échec comme une étape essentielle du succès. Toi, t'en dirais quoi, toi ?

  • Speaker #0

    Oui, glorifier l'échec, je ne sais pas s'il faut glorifier l'échec, mais il faut considérer que l'échec fait partie du parcours. et que si on n'est pas prêt à faire face à l'échec et éventuellement à le subir, il ne faut pas faire ce métier. Et d'ailleurs, nous, on a dans notre pédagogie et dans le parcours de nos étudiants ce fameux séminaire mission redressement dans lequel on immerge nos étudiants pendant cinq semaines dans une entreprise qui a effectivement déclarer sa cessation des paiements, qui est en période d'observation. Les étudiants travaillent aux côtés du dirigeant et de l'administrateur judiciaire à la construction d'un plan de redressement. Ça les amène à... On ne fait pas ça pour leur faire peur, on fait ça justement pour qu'ils regardent l'échec en face, d'une part, et d'autre part, qu'ils aient les bons réflexes, si la situation se présente et si, effectivement, ils sont confrontés à ce type de... à ce type de situation, puisque aujourd'hui, on peut quand même dire que la loi française est une loi qui est assez favorable à ceux qui savent anticiper, assez favorable aux entrepreneurs qui font face à des difficultés.

  • Speaker #1

    Ça m'amène à la... question ChatGPT parce que ça c'est toute nouveauté je fais screener par mes invités par ChatGPT, alors c'est pas vraiment ChatGPT, là c'est Perplexity en l'occurrence Perplexity que j'aime beaucoup d'ailleurs et je lui demande de trouver moi une question un peu soit touchy etc mais auquel j'aurais pas pensé et donc la question de Perplexity en l'occurrence ou de l'IA de manière générale ... a été. Alain, vous avez été juge au tribunal de commerce de Paris pendant près de deux décennies. Pensez-vous que le système judiciaire français est réellement adapté pour accompagner les entrepreneurs en difficulté ou favorise-t-il une approche punitive ?

  • Speaker #0

    Vas-y, débrouille pas avec ça !

  • Speaker #1

    C'est une très bonne question. C'est une question qui est particulièrement pertinente en ce qui me concerne, puisque dans mon parcours de juge, puis de président de chambre au Tribunal de commerce de Paris, j'ai effectivement eu l'honneur de présider la chambre qui était spécialisée dans les sanctions des dirigeants, et donc qui effectivement était ce volet répressif et punitif. Mais je dis avec beaucoup de force qu'aujourd'hui nous avons un dispositif qui n'est pas majoritairement punitif, qui est vraiment un dispositif qui permet aux entrepreneurs d'affronter les difficultés et de les surmonter. Bien sûr, il faut un dispositif punitif parce qu'il y a quand même des gens qui abusent du système et des gens qui déposent le bilan. après avoir encaissé des accomptes et qui disparaissent, qui remontent des boîtes, etc. Donc, on est bien obligé d'avoir effectivement un arsenal un peu répressif pour sortir du jeu ces entrepreneurs sans scrupules ou même empêcher de nuire des entrepreneurs particulièrement incompétents. dans leur propre intérêt quand on interdit de gérer. Non mais quand on interdit de gérer, il y a vraiment des gens qui ne sont pas faits pour ça, qui se lancent là quelquefois par nécessité parce qu'ils sont chômeurs de longue durée. Enfin bref, ils veulent s'en sortir, ce qui est très respectable. Mais clairement, de temps en temps, on se dit qu'il vaudrait mieux qu'ils fassent autre chose. Voilà. Et donc... Ce volet répressif, ce n'est sûrement pas le plus sympathique. Je suis devenu président de cette chambre de sanctions à Arculon parce qu'on ne rentre pas au tribunal de commerce pour sanctionner ses pairs. Mais j'avais un brief du président du tribunal qui était formidable, qui était de dire qu'on est trop répressif. Et donc, je te demande, toi qui as justement été entrepreneur, d'appliquer la loi avec... discernement et de construire un socle de jurisprudence qui permette d'être suffisamment répressif quand il le faut et qui ouvre la porte du rebond dans tous les autres cas. Voilà, donc fort de ce brief, effectivement, j'étais très content de présider cette chambre et je dis aujourd'hui très clairement que le dispositif... législatif de la loi de 2004 est un dispositif qui est bien utilisé, permet vraiment d'anticiper les difficultés, de les surmonter. C'est un outil formidable qui est très différent de la solution des anglo-saxons, le Chapter 11, qui a été, ce dispositif français a été critiqué parce que, on a considéré qu'il était un dispositif qui était très différent de la solution des anglo-saxons. tord toujours un peu le bras aux créanciers et singulièrement aux créanciers financiers les banquiers mais au total il je trouve qu'il permet quand même vraiment aux dirigeants de qui sait anticiper les difficultés et qui n'a pas peur du tribunal c'est à dire qu'ils osent franchir la porte du tribunal et tu sais que que dans le cours que je fais à lier c paris sur le campus d'orléans que tu diriges je fais un cours sur justement le leadership face aux difficultés qui se termine par une visite du tribunal de commerce de Paris, parce que je pense qu'il faut dédramatiser en quelque sorte ce lieu pour les futurs entrepreneurs. Je pense vraiment que la loi actuelle est très efficace pour surmonter les difficultés.

  • Speaker #0

    Ok, merci. Je transmettrai à Perplexity sa réponse.

  • Speaker #1

    Absolument.

  • Speaker #0

    Justement, moi j'ai un avis, je pense qu'il est assez partagé, c'est qu'aujourd'hui on vit une période d'opportunité pour l'entrepreneuriat grâce à l'IA. Est-ce que tu le penses aussi ? Et comment tu vois les prochaines années ?

  • Speaker #1

    Alors écoute, je ne suis pas devin et je pense que l'exercice prospectif, est un exercice à très haut risque, surtout aujourd'hui avec la rapidité avec laquelle se développent ces technologies, c'est quand même très très impressionnant dans ce secteur. Et donc je me garderais bien de faire un pronostic parce que comme tout outil technologique... complètement révolutionnaire, outil qui est finalement un aboutissement. Parce que moi, je me rappelle que dans ma thèse d'informatique, tu disais que j'étais docteur en informatique. Effectivement, je suis docteur en informatique. J'ai fait cette thèse à l'Université Paris-Dauphine juste après avoir quitté l'armée. Et en fait, je me rappelle que mon directeur de thèse, c'était le professeur Shekhroun, qui a porté effectivement à Dauphine les... premiers enseignements en informatique des organisations. Ils rêvaient qu'on fasse un espèce de tableau de bord de l'entreprise, un tableau de bord automatique. Ils disaient qu'il faudrait que les managers aient comme les pilotes d'avion des indicateurs permanents qui leur permettent. Donc ils rêvaient de ces outils un peu magiques, faits de traitement des données, d'intelligence des données, etc. qui deviennent presque d'actualité aujourd'hui, mais c'est quand même 40 ans plus tard. Et donc, c'est une forme de continuité, de continuation de toutes ces technologies, de l'information, l'intelligence artificielle, mais c'est effectivement un aboutissement, un aboutissement qui peut faire peur, je n'ai pas rentré dans ce débat, mais qui est un formidable outil, parce que bien sûr, Quand on interroge Perplexity, quand on utilise ChatGPT ou Cloud ou n'importe quel autre pour se faciliter le travail, c'est formidable. Mais il faut mesurer que l'intelligence artificielle appliquée par exemple au domaine de la santé ouvre des perspectives absolument inouïes. J'ai eu la chance il y a deux ans dans le voyage que je fais tous les ans dans la Silicon Valley d'être sur le campus de Stanford avec mes étudiants et d'assister à la conférence de deux. profs successifs de médecine qui étaient des experts de l'intelligence artificielle appliquée à la médecine qui étaient d'ailleurs des vieux messieurs qui avaient plus de 80 ans et l'un et l'autre qui étaient à l'américaine toujours profs, toujours chercheurs patrons de start-up tout à fait à l'américaine mais qui nous ont fait un exposé qui était absolument inouï sur le échec les perspectives de l'intelligence artificielle en matière de santé. Et là, ça ouvre des horizons totalement vertigineux, parce que s'il y a des maladies qu'on arrive à vaincre, on va clairement allonger la durée de vie humaine, mais ce faisant, on va aussi déstabiliser complètement nos systèmes de santé, le coût de nos systèmes de santé, nos systèmes de retraite. Enfin bref, si tu veux, je trouve qu'aujourd'hui, dessiner un horizon crédible, est un exercice à très haut risque.

  • Speaker #0

    D'accord. Mais est-ce que tu es d'accord avec moi qu'on vit une époque incroyable d'opportunités ?

  • Speaker #1

    Ah oui, une époque formidable. Non mais moi, je suis enthousiaste. Tu sais, j'ai fait écrire à Claude, à I, moi c'est l'intelligence artificielle que j'utilise le plus, Claude, et je lui ai fait écrire des poèmes. Je lui ai fait écrire un poème sur la détresse de l'entrepreneur confronté à l'échec, puisque tu parlais de ça. Et je lui ai demandé d'écrire ce poème à la façon de Baudelaire. Et je peux te dire que ce poème, il est inouï. Il est inouï de beauté, il est inouï de modernisme, il est incroyable. Et donc, évidemment, c'est un défi, parce qu'on se dit mais comment derrière ça un poète peut trouver finalement, peut arriver à trouver. Mais je trouve que c'est justement incroyable. Ça oblige l'homme à aller jusqu'au bout du bout de son véritable apport. C'est-à-dire cette créativité dont on n'est pas encore capable. Parce que là, en fait, quand Claude écrit un poème, il l'imite. Et donc, il combine des ressources qu'il a digérées. Et donc, l'intelligence humaine, c'est autre chose. Et donc... Donc, je crois que ça nous oblige à une réflexion sur ce que c'est que l'intelligence humaine, ce que c'est que la créativité humaine, comment la cultiver, comment éventuellement l'outiller avec la machine, mais en lui gardant son côté si spécifique, qui fait la spécificité de la nature humaine.

  • Speaker #0

    Allez, c'est parti pour les sept dernières questions.

  • Speaker #1

    D'accord.

  • Speaker #0

    Alain, dis-nous, quel est ton mot préféré ?

  • Speaker #1

    Alors moi, c'est clairement le mot beauté. Je suis fasciné par la beauté. Je trouve que la beauté de ce monde, malgré ses horreurs et la misère du monde, je trouve qu'il y a une forme de beauté du monde, une forme de beauté, de l'amour. On avait un directeur général à HEC qui s'appelait Bernard Ramanansou qui terminait toujours ses discours sur le thème de l'amour en expliquant que finalement, c'était la chose la plus importante, y compris dans le management, la chose la plus importante dans la condition humaine. Et ça va un peu de concert avec cette idée de la beauté. Donc, j'aime beaucoup le mot beauté.

  • Speaker #0

    Alors, à contrario, quel mot détestes-tu ?

  • Speaker #1

    A contrario, pour un militaire, c'est évidemment un peu étonnant, mais le mot que je déteste le plus, c'est le mot conflit. Je déteste le mot conflit parce que je n'aime pas le conflit en réalité.

  • Speaker #0

    La paix est par la guerre, donc le militaire est là pour éviter la guerre.

  • Speaker #1

    Exactement. Et donc, je déteste le mot conflit et je n'aime pas d'une façon générale le conflit.

  • Speaker #0

    Civis pacem par abellum, pour ceux qui se poseraient la question.

  • Speaker #1

    Exactement.

  • Speaker #0

    Le son, le bruit que tu aimes ?

  • Speaker #1

    Alors, j'ai une tendresse particulière pour le bruit de l'eau qui coule.

  • Speaker #0

    Ouais,

  • Speaker #1

    ok. De l'eau qui coule, que ce soit dans la nature, le torrent, mais que ce soit aussi...

  • Speaker #0

    Un peu plus dans le maquillage tard.

  • Speaker #1

    Cette petite musique de l'eau qui coule, je trouve que c'est un peu la musique de la vie quand même. Et donc, j'ai une tendresse particulière pour ce son.

  • Speaker #0

    Ouais, qui s'écoule. Le son ou le bruit que tu détestes ?

  • Speaker #1

    Je déteste par-dessus tout les éclats de voix. Je suis très agressé par les éclats de voix, que ce soit des éclats de voix d'ailleurs de gaieté, quand on parle dans les transports publics, il y a des gens qui hurlent parce qu'ils sont contents, etc. Ça m'agresse, je n'aime pas les éclats de voix. Et de façon générale, c'est vraiment un truc, alors ça va peut-être avec justement le conflit, parce qu'en général, quand il y a conflit, il y a éclat de voix, mais finalement, l'eau qui coule est aussi une forme de beauté, donc tu vois, il y a une certaine cohérence entre mes choix.

  • Speaker #0

    Tu as réussi à avoir un management sans éclat de voix.

  • Speaker #1

    Écoute, je m'y suis employé.

  • Speaker #0

    Celui qui n'a jamais péché me jette la première pierre.

  • Speaker #1

    J'ai eu des colères comme tout le monde. Je pense que la colère, il faut de temps en temps être en colère. Mais oui, j'ai quand même essayé toujours d'éviter les éclats de voix.

  • Speaker #0

    Ton juron gros mot ou blasphème favori ?

  • Speaker #1

    Écoute, c'est très simple. c'est « fais chier bordel » . Quand quelque chose m'énerve ou me résiste, « fais chier bordel » .

  • Speaker #0

    Tu n'en as pas gardé un de ta carrière militaire ?

  • Speaker #1

    Non, mais dans l'armée, ça arrive aussi de dire « fais chier bordel » .

  • Speaker #0

    Plus souvent que de raison, effectivement. La citation que tu aurais aimé avoir prononcée ?

  • Speaker #1

    Alors, écoute... quand tu m'as dit qu'on posait ces sept questions à la fin, j'ai un peu réfléchi. Et au fond, je me suis dit que j'allais te proposer, parce que c'est ce que je trouve, un vers d'Aragon, de Louis Aragon, dans son merveilleux poème Les yeux d'Elsa, qui est pour moi probablement le vers le plus beau de la littérature. française c'est ce vers qui dit tes yeux lorsqu'une larme iluit tes yeux rendent jaloux le ciel d'après la pluie et je trouve que c'est que ce verre dit à la fois à la fois l'amour à la fois la beauté ce verre il est il est extraordinairement musical tu vois d'ailleurs jean ferrat on a fait une chanson tes yeux lorsqu'une larme iluit tes yeux rendent jaloux le ciel d'après la pluie moi je trouve que quand on a écrit ça On peut mourir.

  • Speaker #0

    Non, c'est beau. C'est beau, je ne connaissais pas. Dernière question. Si Dieu existe, qu'aimerais-tu, après ta mort, l'entendre te dire ?

  • Speaker #1

    Bienvenue.

  • Speaker #0

    Bienvenue, juste friendly welcome.

  • Speaker #1

    Ben oui, parce que s'il me dit bienvenue, c'est plutôt bon signe. Ça veut dire, un, qu'il existe,

  • Speaker #0

    deux,

  • Speaker #1

    qu'il considère que je ne vais pas tomber. C'est plutôt une bonne nouvelle que tu arrives,

  • Speaker #0

    on va prendre l'apéro.

  • Speaker #1

    Franchement, bienvenue, ça m'irait. Ok,

  • Speaker #0

    très bien, ça marche. Écoute Alain, merci beaucoup de ce temps que tu nous as consacré, c'était super intéressant.

  • Speaker #1

    C'était très sympa.

  • Speaker #0

    Et puis... Je vous rappelle à tous la stratégie Bamboo dans toutes les bonnes librairies. Il est en précommande seulement sur Amazon. Oui,

  • Speaker #1

    il est en précommande parce qu'il n'est pas encore sorti. Il est en parution.

  • Speaker #0

    Parce qu'il est référencé un peu partout. Ça, c'est clair. Donc, allez précommander sur Amazon. C'est qui ton éditeur ?

  • Speaker #1

    C'est Pearson. Pearson,

  • Speaker #0

    ok. Donc voilà, vous allez chez Pearson directement. Même si on a parlé de la stratégie d'Amazon, ce n'est pas la question. Donc un grand merci Alain. Merci à toi. On se revoit bientôt à Orléans ou à Paris.

  • Speaker #1

    Exactement. Merci beaucoup.

  • Speaker #0

    C'était la colle d'Alain Bloch. Bravo, vous avez tenu jusque là. Merci de votre écoute. Si vous avez aimé cet épisode, partagez-le sur les réseaux sociaux, allez mettre 5 étoiles et des commentaires sur les plateformes de podcast. Abonnez-vous, abonnez-vous à notre newsletter. Et dans tous les cas, à très bientôt pour un prochain épisode de La Colle. Et n'oubliez pas, tout est possible à qui rêve, ose, travaille et n'abandonne jamais.

  • Speaker #2

    Merci.

Description

Dans l'épisode 84, La Khôlle reçoit Alain Bloch, entrepreneur aguerri, professeur émérite à HEC Paris et co-auteur de « La Stratégie du Bambou ». Cette conversation captivante révèle comment cette approche novatrice peut transformer votre vision de l'entreprise et redéfinir vos méthodes d'innovation.


La stratégie du bambou, inspirée des caractéristiques exceptionnelles de cette plante, s'articule autour de trois principes fondamentaux : l'enracinement profond dans vos compétences distinctives, la souplesse d'une expansion contrôlée vers de nouveaux marchés, et une prolifération stratégique permettant de conquérir durablement votre territoire économique.


Contrairement aux modèles traditionnels souvent trop rigides, cette approche favorise une diversification ambitieuse tout en maintenant une identité forte et cohérente. Alain Bloch partage des méthodes concrètes pour identifier, renforcer et exploiter vos racines stratégiques afin de développer votre entreprise de façon durable et innovante.


Un épisode essentiel pour les décideurs souhaitant enrichir leur réflexion stratégique et transformer leur organisation en un acteur à la fois agile, robuste et résilient face aux défis contemporains. Bonne écoute !


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Bienvenue dans la colle. Vous êtes curieux ? Vous avez soif de comprendre le monde qui vous entoure ? Alors vous êtes au bon endroit. Si vous aimez vous remettre en question, que comme moi vous pensez qu'on n'a jamais fini d'apprendre, alors la colle est faite pour vous. Sans se prendre au sérieux, je vous propose à chaque épisode de partir ensemble à la découverte de nouveaux horizons, de profils et d'idées inspirantes. Je suis Pierre Barraud, j'ai créé, édité et produit ce podcast. Je suis également directeur général du Campus Orléans de l'ISC Paris, école de commerce, membre de la conférence des grandes écoles. Mon mantra, vis comme si tu devais mourir demain, apprends comme si tu devais vivre toujours. Je suis preneur de tous vos commentaires, suggestions, remarques, ils sont tous bienvenus. Et bien évidemment, je compte sur vous pour placer 5 étoiles et des commentaires sur toutes les plateformes. Allez, c'est parti, bonne écoute ! Chers amis, bienvenue dans ce nouvel épisode de La Colle. Aujourd'hui, on va parler stratégie, entrepreneuriat, avec... avec un ami, j'ose le dire, Alain Bloch. Salut Alain.

  • Speaker #1

    Salut Pierre.

  • Speaker #0

    Alors Alain, pour tous ceux qui ne le connaîtraient pas, il est Saint-Syrien. Alors ça, voilà, déjà ça pose le gars. Docteur de l'université de Paris-Dauphine, en informatique étonnamment, mais on reviendra informatique des organisations. Et puis carrière militaire, carrière d'entrepreneur et carrière de... professeur, puisque monsieur est professeur émérite d'HEC. Mais enfin voilà, tout ça c'est plein de belles choses et surtout aujourd'hui on va parler d'un ouvrage que tu as commis avec Véronique Nguyen, qui est elle aussi prof à HEC si je me trompe.

  • Speaker #1

    Oui, professeur à HEC Paris,

  • Speaker #0

    qui s'appelle la stratégie du bambou. Après cette courte introduction, Alain, est-ce qu'en quelques heures, mots, tu veux bien te présenter, parce que moi j'ai pris les éléments que j'avais, mais voilà.

  • Speaker #1

    Alors écoute, tu as très très bien dit, j'ai eu la chance effectivement dans ma carrière de faire les trois plus beaux métiers du monde, le métier des armes, officier, le métier effectivement d'entrepreneur, qui est celui qui probablement m'a le plus marqué et probablement aussi enthousiasmé. Et puis, depuis longtemps maintenant, le métier de professeur, effectivement, métier que je fais d'ailleurs plus comme un éducateur que comme un chercheur, même si je fais comme beaucoup de profs. Je publie, bien sûr, mais je publie plein de livres que personne ne lit d'ailleurs, mais d'une façon générale.

  • Speaker #0

    Il y a une bibliographie impressionnante quand même. Tu en as six ou quelque chose comme ça.

  • Speaker #1

    Oui, j'en ai même écrit 14, mais peu importe, puisque je me demande même encore comment les éditeurs me publient, puisque je trouve qu'on n'en vend pas beaucoup. Ça va changer avec la stratégie du bon boulot. Éducateur, parce qu'au fond, oui, je pense que quand on est officier, on est forcément un peu éducateur de ses hommes. Quand on est entrepreneur, on est aussi un peu éducateur de ses... de ses collaborateurs, de ses associés. Et puis, quand on est prof, il y a effectivement cette façon de transmettre qui est peut-être plus dans l'éducation au sens où dans l'entrepreneuriat, forcément, puisque j'enseigne l'entrepreneuriat, on travaille beaucoup sur les comportements, les savoir-faire, plus que finalement les connaissances explicites. Et donc, voilà. Donc, les trois plus beaux métiers du monde. officier, entrepreneur et professeur. D'ailleurs, je voudrais qu'on écrive ça sur ma tombe.

  • Speaker #0

    C'est pas mal comme épitaphe. Rentrons dans le vif du sujet. Parle-nous un peu de la stratégie du bambou. Mais qu'est-ce que ça fait ?

  • Speaker #1

    La stratégie du bambou, c'est d'abord l'histoire d'une très belle rencontre avec Véronique Nguyen. Véronique Nguyen, évidemment, c'est une professeure de stratégie d'HEC. On s'était croisés beaucoup de fois. On se parlait, je l'aimais beaucoup, je crois qu'elle m'apprécie aussi. Puis un jour, on fait effectivement une formation ensemble pour un public d'adultes sur la stratégie en général. C'est moi d'ailleurs, je dirigeais ce programme dans lequel je l'avais invité à faire un cours. Et puis, je découvre qu'elle parle de cette stratégie bambou parce que l'idée originelle lui revient. Et je suis admiratif, fasciné par ce qu'elle raconte, que je trouve à la fois très original, très juste, assez… Voilà. pas du tout galvaudé, que cette métaphore du bambou a beaucoup de signification, je vais y revenir. Et donc, je lui dis, mais Méranique, c'est fou, c'est génial ton truc, pourquoi tu n'écris pas un bouquin ? Elle me dit, mais si, etc., j'ai ça sur le... mais je n'y arrive pas, beaucoup de temps, je travaille trop, machin, bon. Et donc, je lui dis, écoute, si je... je peux contribuer d'une façon ou d'une autre, moi je serais ravi, je trouve que c'est une très belle idée, etc. Et donc on a effectivement conçu le projet d'écrire le livre. On a commencé par écrire des papiers ensemble, plusieurs articles, et puis effectivement on a convenu d'écrire ce livre dans lequel je ferais au fond un espèce de chapitre introductif un peu durti pour à la fois expliquer notre rencontre, mais dans lequel il est complètement prévu que ce soit... elle qui fasse l'essentiel parce que je ne veux pas du tout donner le sentiment que je lui pique l'idée tu vois mais je suis un grand défenseur de cette idée, de cette vision sur laquelle je peux effectivement développer comme tu dis.

  • Speaker #0

    Oui c'est intéressant parce que en plus de ça c'est pas le sous-titre mais la baseline en dessous du titre du livre c'est en gros remplacer Porter et la stratégration bleue.

  • Speaker #1

    Oui, c'est ça.

  • Speaker #0

    Vous faites du marketing aussi, c'est un peu du teasing quand même. En gros, parce que Porter, c'est quand même Harvard, la stratégie océan bleu, c'est l'INSEAD.

  • Speaker #1

    C'est l'INSEAD,

  • Speaker #0

    oui. On se pose quoi, HEC se pose là.

  • Speaker #1

    Non, mais alors, c'est clair qu'au fond, sur le plan un peu conceptuel, l'idée, c'est qu'effectivement, il y a eu entre le grand succès de stratégie océan bleu et les grands succès de Michael Porter, il y a eu un espèce de trou noir en termes de livres, de publications, je dirais, grand public, alors qu'il y a une théorie extrêmement importante qui est la théorie des ressources distinctives qui en fait se situe un peu chronologiquement entre les deux. ces deux courants stratégiques, le courant portairien et puis le courant d'Océan Bleu, qui est d'ailleurs un prolongement du courant portairien, parce qu'au fond, qu'est-ce que nous disent les auteurs de stratégie Océan Bleu ? Ils nous disent que le mieux, c'est d'éviter la concurrence, thème de portaire, en finalement recherchant l'innovation maximum, c'est-à-dire effectivement... en étant le premier, en ouvrant cet océan bleu dont il nous parle, et en évitant effectivement que les concurrents s'y engouffrent, pour éviter que ça devienne à son tour un océan rouge. Donc c'est une idée très originale, qui est intéressante, mais qui au fond ne dit qu'une chose, c'est que plus tu innoves et plus ton innovation rencontre le marché avant tous les autres. plus effectivement tu as de facilité à te développer. Bon, je caricature un peu, c'est un petit peu plus sophistiqué que ça, ils en écrivent 700 pages, donc si c'était aussi simple que ça, bien sûr ça ne serait pas… Mais grosso modo, c'est juste pour dire que c'est quand même assez porterien dans la vision, puisque au fond, Porter travaille beaucoup sur l'avantage concurrentiel, donc la concurrence et… les auteurs de stratégie océan bleu finalement disent c'est encore mieux quand il n'y a pas de concurrence du tout grâce à l'innovation. Entre les deux il y a eu un courant très important mais qui n'a pas donné lieu à des publications grand public ou en tout cas pas du tout en Europe et pas traduite, probablement quelques unes aux Etats-Unis mais qui n'ont pas du tout le même type de succès que les bouquins de Porter et stratégie océan bleu. qui a cette théorie des ressources distinctives. Qu'est-ce qu'elle dit finalement ? Cette théorie dit qu'effectivement, ce qui constitue la force la plus importante d'une entreprise, c'est ce que cette théorie appelle ses ressources distinctives, qui lui donne un avantage concurrentiel, mais qui n'est pas décrit par Porter, puisque Porter s'intéresse à la différenciation ou la stratégie de prix, qui n'est pas décrit. par porteur et qui consiste à se dire finalement qu'est-ce que je fais mieux que tout le monde ? C'est la question finalement que doit se poser le manager s'il veut s'inspirer de cette théorie des ressources distinctives. Qu'est-ce que je fais mieux que tout le monde et comment je peux essayer de m'organiser pour ne faire en quelque sorte que ça ? Et c'est ce qui a conduit à à la fin du siècle dernier, ce grand mouvement d'externalisation, puisque c'est ça qui a construit le corps business. Voilà, on se centre sur ce qu'on sait le mieux faire et tout le reste, on l'externalise. Donc, c'était quand même très inspiré par cette théorie des ressources distinctives. Qu'est-ce qui vraiment fait dans mes compétences ? On parle quelquefois de compétences distinctives aussi. Qu'est-ce qui fait ma différence ? Donc en fait, la stratégie du bambou, c'est une stratégie qui s'inspire beaucoup de cette théorie des compétences distinctives, mais qui ne se limite pas à ça. C'est parti finalement d'un constat qui est que les grands modèles de la stratégie décrivent assez mal les plus grands succès des dernières années des plus grandes entreprises du monde, c'est-à-dire que les fameuses GAFA, Google, Amazon et les autres, quand tu regardes sur longue période, il y a un peu de portaire, il y a un peu de stratégie océan bleu, mais au total, les modèles portairiens et le modèle océan bleu ne permettent pas. pas d'analyser en finesse et en profondeur le succès de ces très grandes entreprises. Et donc, ça part un peu de ce constat et l'idée clé de Véronique, c'est de se dire mais au fond, ces entreprises, elles ont une trajectoire très particulière qui effectivement se déroule en fait en trois temps. Un premier temps. Elles enracinent très profondément ces fameuses compétences distinctives, elles les analysent et elles les consolident en les enracinant très profondément.

  • Speaker #0

    C'est ce que vous appelez le concept de racine mère, c'est ça ?

  • Speaker #1

    Voilà, c'est ça. Et donc ces racines mères qui sont les compétences distinctives particulièrement bien consolidées, enrichi éventuellement par des acquisitions, etc., qui permettent ce que finalement le discours stratégique en principe interdit, c'est-à-dire le foisonnement tous azimuts. En fait, la doxa stratégique, c'est quand même de dire qu'il faut se concentrer sur son core business et ne faire que ce qu'on sait faire bien. Et au fond, ce n'est pas ce que font les GAFA. Les GAFA, effectivement, Ils ont une compétence distinctive qu'ils défendent et qu'ils enrichissent tout au long de l'existence, mais cette compétence distinctive leur permet d'aborder des champs extrêmement différents. Quand tu prends Google, ça passe de grand succès de Gmail à aujourd'hui Waze ou d'autres. Quel est le lien entre toutes ces compétences ? tout ce qu'on appellerait des formes de diversification. Alors justement, ce ne sont pas des vraies diversifications, c'est en fait un foisonnement qui est nourri par ces compétences distinctives enracinées. Donc le premier moment de la stratégie du bambou, c'est d'identifier clairement ces fameuses compétences distinctives, ce qui n'est pas toujours facile, et puis de les enraciner en les consolidant au maximum, en les rendant. à la fois unique et indestructible.

  • Speaker #0

    Ça me fait penser à Amazon, qui à la base est un e-commerçant et qui en fait, en compétences distinctives, a développé en... interne pour ses besoins propres, la capacité d'avoir des serveurs qui vont scaler les volumes, etc. qui vont derrière se dire, c'est quand même bizarre, on a le savoir-faire, on a les infrastructures, sauf qu'on l'utilise qu'à fond une fois par an, allons-y, on va peut-être essayer d'en faire un business. Et c'est la naissance d'Amazon Web Services qui aujourd'hui, dans mon souvenir, doit faire plus de 30% de la marge Oui,

  • Speaker #1

    absolument. C'est un très bon exemple qu'on développe d'ailleurs dans nos cours, puisque Véronique et moi, et chacun séparément, on fait ces interventions sur la stratégie pour vous. Amazon est un très bon exemple de compétences distinctives qui est très enracinée. On peut dire que, grosso modo, la compétence, c'est la capacité de traitement des données de façon très élaborée sur les clients. couplé à la logistique, c'est les deux compétences hautement distinctives qui ont été extrêmement consolidées par Amazon et qui lui ont permis effectivement non seulement d'être le premier distributeur du monde à égalité avec Walmart, mais aussi un offreur de services pour effectivement le cloud, etc. Et on pourrait multiplier les exemples Google, Apple, Apple qui... dont la compétence distinctive est principalement l'interface homme-machine, qui est quelque chose qu'ils ont su construire avec un système d'exploitation d'ordinateurs extrêmement innovant et unique, qui est encore aujourd'hui, qui bataille sérieusement contre Windows, mais aussi l'interface homme-machine dans les iPhones, etc. les montres aujourd'hui, une compétence distinctive qui lui permet également de foisonner et d'aborder des sujets aussi variés que la musique, effectivement l'horlogerie, une horlogerie qui est évidemment totalement numérique, mais pour montrer que là encore il y a un vrai foisonnement et que derrière ce foisonnement en réalité il y a une compétence distinctive ou plusieurs compétences distinctives qui sont vraiment... c'est pour ça qu'elles sont distinctives, et qui sont profondément cultivées et enracinées, et qui permettent ce foisonnement un peu énigmatique, parce que finalement ce foisonnement, il faut beaucoup creuser pour lui voir un fil conducteur, il y en a en général un, mais je dirais que ce foisonnement est un peu, en théorie, condamné par... Par la doxa stratégique. Il y a un troisième temps, si tu me permets, parce que ce troisième temps est celui qui est peut-être le plus borderline en termes même juridiques. C'est le moment de l'étouffement. Et c'est là qu'on retrouve la force de la métaphore du bambou. Le bambou, effectivement, pour quiconque a eu dans son jardin un bambou, il serait carrément indestructible, parce que pour l'arracher, tu te donnes du mal et puis ça repart. poussent aussi secs, que ça foisonne beaucoup, c'est-à-dire que si tu n'y prends garde, ton jardin est assez vite envahi et que ça étouffe effectivement tout ce qui pousse autour. Et ça, c'est le côté un petit peu noir du développement des GAFA. On sait tous qu'ils cherchent, d'une certaine façon, à tuer la concurrence, alors pas forcément la tuer… en l'asphyxiant, quelquefois en la rachetant, etc. Mais en tout cas, il y a cette volonté, on retrouve là un peu l'océan bleu, il y a cette volonté d'étouffer tout ce qui pourrait perturber cet envahissement par un foisonnement d'activités. Et donc là encore, on retrouve cette métaphore du bambou. Les racines qui sont très profondes, ce foisonnement qui paraît invincible et extraordinairement multiple, et puis cet étouffement progressif de tout ce qui pousse dans la zone, et qui est un point sur lequel on a beaucoup critiqué les GAFA, qui se donnent bonne figure en achetant beaucoup de startups qu'ils intéressent, à leur groupe, mais en vérité, ça cache souvent des asphyxies. qui ne se conclut pas toujours par un rachat. Il y a des tas de boîtes qui meurent parce que Google change tout d'un coup brutalement les règles du jeu, parce que Amazon met des conditions plus ou moins exorbitantes dans ses conditions de vente. Donc, une face qui n'est peut-être pas la plus glorieuse des GAFA, mais qui aujourd'hui leur donne ce statut de premières entreprises du monde. Donc, au fond... La métaphore fonctionne bien, et cette métaphore était très naturelle pour Véronique, puisque Véronique est d'origine vietnamienne, elle est particulièrement inspirée par l'Asie, et donc le bambou lui allait très bien. Et donc cette stratégie bambou, elle a la force de la simplicité, mais elle a quand même une clé très importante, qui sont cette analyse subtile. des ressources distinctives, des compétences distinctives. Je peux donner un exemple qui est moins connu que les GAFA, c'est le formidable exemple de Fuji. Fuji, dans le domaine de la photo argentique, est un brillant outsider derrière Kodak, mais il sent venir de façon beaucoup plus probablement forte le vent de la photo numérique. Il sent que... Les choses vont mal tourner pour lui et contrairement à Kodak qui a fini sous le chapeau du chapter 11 pour rebondir ensuite, mais Fuji a opéré une reconversion absolument étonnante puisqu'aujourd'hui la première activité du groupe Fuji c'est la pharmacie. Et donc ils sont passés de la photographie à la pharmacie en… travaillant en profondeur une compétence distinctif qui était la chimie, qui a été profondément travaillée par deux dirigeants successifs, dont l'un d'entre eux a d'ailleurs écrit un livre là-dessus qui s'appelle Le Miracle Fuji, mais qui fait qu'aujourd'hui le groupe Fuji est très largement devant le groupe Kodak. C'est un groupe qui est encore dans la photo, mais qui est très largement diversifié et dont la principale source de revenus... Et la pharmacie, ce qui ne...

  • Speaker #0

    C'est pas une histoire de folagène aussi ?

  • Speaker #1

    Alors oui, il y a plusieurs éléments, je ne rentre pas trop dans le détail, mais c'est juste pour illustrer que ça n'est pas quand même que les GAFA et qu'il y a des entreprises qui ont eu ce type de stratégie bambou. Parce que derrière cette analyse en profondeur de ce qui constituait une compétence distinctive, Fuji a aussi foisonné, puisqu'ils sont toujours dans la photo, mais ils sont dans la santé. Donc ils ont des tas d'activités aujourd'hui. qui paraissent très éloignées les unes des autres, mais qui en réalité ont pour point commun ces fameuses compétences distinctives.

  • Speaker #0

    Pour résumer, il y a trois étapes. S'enraciner, foisonner, proliférer, conquérir.

  • Speaker #1

    Oui, on va dire ça.

  • Speaker #0

    Avec une logique effectivement de l'agressivité du bambou. Si je comprends bien... Effectivement, c'est les compétences distinctives qui, dans cette analogie biologique, seraient les racines.

  • Speaker #1

    Oui.

  • Speaker #0

    Le foisonnement, c'est les X business units qu'on va pouvoir construire sur ces racines. Et la prolifération, c'est l'extension du domaine de la lutte. On va dire ça comme ça.

  • Speaker #1

    L'extension, exactement. Avec quand même cette tentation permanente d'une certaine forme d'étouffement, plus ou moins voulue, plus ou moins naturelle. plus ou moins anti-concurrentiel. Là-dessus, les autorités concurrentielles du monde entier se penchent régulièrement sur le comportement des GAFA à ce sujet-là. Mais voilà, c'est une propension assez naturelle dans la stratégie du bambou, puisque ce foisonnement, cette prolifération, par nature, a tendance à étouffer toute forme de concurrence.

  • Speaker #0

    Sauf que... Alors ça se heurte à un truc qui est que les entreprises ont tendance à continuer à faire ce qu'elles font et on va dire que l'innovation, l'agilité, tout ça même si tout le monde s'en gargarise, c'est pas toujours le cas et de toute façon aussi les allocations budgétaires ne vont pas au foisonnement. Comment on fait pour avoir une organisation Bamboo compatible ? C'est une très bonne question parce qu'en fait, je dirais qu'il y a la stratégie bambou, mais Véronique a aussi l'idée qu'il faudrait écrire un livre sur les organisations bambou, parce que la question que tu poses est très juste. Et d'ailleurs, il y en a un exemple qui est absolument criant, puisqu'on a parlé de Google, c'est la tétanie de Google. la tétanie qui n'a pas duré très longtemps mais qui a quand même été très marquée devant l'intelligence artificielle. Google a été pris de court et ça c'était parce qu'ils avaient effectivement une compétence distinctive en matière de recherche sur le web qu'ils ont su effectivement transformer sous plein d'aspects mais au fond ils n'ont pas été capables de remettre en cause ce modèle dominant qui constituait effectivement leurs ressources distinctives, leurs compétences distinctives principales, et ils ont été pris de court par cette nouvelle technologie. Ils sont en train de réagir, de s'y adapter, ils ont beaucoup de moyens. Mais ça a été quand même un moment où on a bien vu qu'il y avait une remise en cause en profondeur du modèle. Et là, pour le coup, on retrouve un peu… un peu stratégie océan bleu, parce que c'est vrai qu'au départ, l'intelligence artificielle et notamment ChatGPT, OpenAI, ont créé un océan bleu dans lequel personne n'avait rien vu venir. Tout le monde était à peu près prêt,

  • Speaker #1

    mais personne n'était sorti.

  • Speaker #0

    Voilà, exactement. Et alors, malheureusement pour ChatGPT... Et OpenAI, on n'est plus du tout dans l'océan bleu et tout le monde s'est engouffré, donc c'est en train de devenir un océan rouge vif. Donc ça, c'est très difficile et d'ailleurs, Kim et Mauborgne, les deux auteurs de ce stratégie océan bleu, c'est un sujet sur lequel ils consacrent les plus longs développements. C'est comment est-ce qu'on préserve son océan bleu parce que c'est ça qui est le plus difficile finalement. Ce n'est pas d'innover au départ, c'est d'arriver à maintenir. des barrières à l'entrée suffisantes pour que son innovation de départ continue à nourrir le à nourrir le développement de l'entreprise sans que la concurrence puisse vraiment rivaliser. Bon donc clairement la stratégie bambou elle n'entend pas être un modèle dominant, portaire à des vertus, stratégie océan bleu à des vertus, il y avait un espèce de trou. entre les deux, qui est vraiment lié à cette théorie des compétences distinctives, qui n'était pas convenablement vulgarisée en quelque sorte. Et le mérite de Véronique, c'est effectivement d'avoir trouvé cette métaphore qui est très parlante et qui convient parfaitement à cette forme de stratégie et qui peut permettre, je dirais, au plus grand nombre, c'est-à-dire au manager, de comprendre. comment on peut faire pour finalement avoir ce type de développement sans risquer la catastrophe. Parce qu'il faut bien voir que le foisonnement, quand il n'est pas suffisamment enraciné dans une compétence distinctive, il t'expose effectivement à la catastrophe. C'est-à-dire que s'il n'y a pas un fil conducteur clair…

  • Speaker #1

    Un peu par terre dans ton essence, oui.

  • Speaker #0

    Voilà, exactement. S'il n'y a pas un fil conducteur clair et des compétences distinctives qui sont ce fil conducteur clair, alors c'est clair que… Évident que les stratégies de conglomérat sont en général assez nocives. Elles sont d'ailleurs assez fortement sanctionnées par les bourses. Mais elles peuvent avoir une explication patrimoniale. Mais grosso modo, sur le plan strictement industriel, c'est rarement un succès. Il y a des entreprises qui font des stratégies bambou sans qu'on le voit vraiment. Par exemple, le groupe Michelin, on se dit qu'ils font des pneus. Oui, sauf que faire des pneus de vélo, faire des pneus de tracteur et faire des pneus d'avion… effectivement c'est toujours des pneus mais les technologies n'ont rigoureusement rien à voir. Et clairement, en réalité, les compétences distinctives qui sont essentiellement la chimie du caoutchouc, les alliages, etc., tout ce qui ont permis à Michelin d'être le géant qui... qu'il est et c'est une forme de stratégie bambou, on pourrait presque dire cachée, parce qu'au fond, à l'œil nu, quand on regarde de l'extérieur, on se dit, ben oui, ils font des pneus, et donc ils font tous les pneus possibles et imaginables, mais en réalité, ce n'est pas aussi simple que ça, et ça suppose effectivement de bien comprendre quelles sont ces compétences distinctives pour être capable justement de faire tous ces pneus qui sont en réalité très différents les uns des autres.

  • Speaker #1

    Puis effectivement, ça pose des questions d'organisation qui sont capables d'accepter ça. Ça pose des questions de culture de ces organisations aussi. Enfin voilà, parce qu'aujourd'hui, beaucoup restent sur une idée. C'est un truc que j'ai encore entendu très récemment sur la bonne stratégie, c'est more. pour 70%, Better pour 20% et New pour 10%. C'est-à-dire, on fait plus de ce qui marche et là, on y met 70% du budget. On améliore les process et on y met 20% de notre budget et on fait du New pour 10%, histoire de s'assurer pour l'avenir. Là, la logique du bambou, c'est quand même, quand on parle de prolifération et l'image du bambou pour ça est très bien trouvée, parce que ça part effectivement, des tiges de bambou,

  • Speaker #0

    il y en a plein. Exactement, et effectivement, on parlait d'organisation bambou, on a moins creusé le sujet, mais c'est clair qu'il y a des organisations qui savent faire ça et d'autres moins, parce que ça nécessite effectivement dans l'entreprise. une forme d'agilité qui va très au-delà des théories agiles, etc. C'est-à-dire qu'il faut vraiment, tu vois, quand on fait à la fois de la photo et du médicament, c'est quand même arriver à réconcilier ça sous une même culture, sous des organisations compatibles, etc. C'est effectivement difficile. Et je pense qu'il y a un vrai sujet de réflexion sur quelles sont les organisations qui sont compatibles. capables de supporter ça on retrouve d'ailleurs des grands débats de du management et de la stratégie 1 c'est le dilemme explorer exploitation exploration comment est-ce qu'on concilie dans le quotidien comme l'a soulevé james march le l'excellence dans l'exploitation c'est à dire dans l'opéra dans les opérations et puis L'excellence dans l'exploration, c'est-à-dire dans l'innovation, dans la découverte des métiers futurs, etc. James March, il y a déjà longtemps, dans les années 90, a souligné que ça mobilisait des compétences stratégiques justement à ses opposés. Et donc cette question de l'organisation Bambou, comment faire pour supporter ce foisonnement, se pose. Et moi je suis très frappé, tu sais, je vais tous les ans. dans la Silicon Valley avec la promotion d'HEC Entrepreneur. Et donc j'ai eu la chance, ça fait 14 ans que j'y vais, j'ai eu la chance de voir certaines entreprises, pas complètement à leur début, mais en tout cas beaucoup plus petites qu'elles ne le sont aujourd'hui, étaient quand même très frappées de voir celles qui restent finalement. entrepreneurial, on pourrait dire, parce qu'on voit, parce que quelque part, derrière ce foisonnement, il faut garder une espèce de dynamisme entrepreneurial et celles qui, petit à petit, sont contaminées par l'effet de taille et deviennent plus ou moins des bureaucraties. C'est assez frappant.

  • Speaker #1

    Il y en a une qui te vient à l'esprit où tu te dis, tiens, celle-là, elle est restée dans l'esprit startup ?

  • Speaker #0

    Alors... Alors, je trouve que jusqu'à une période assez récente, Google était vraiment resté dans une forme d'esprit start-up et ils étaient très obsédés par l'idée qu'il ne fallait surtout pas qu'ils deviennent une bureaucratie malgré leur taille. Ça a été un peu bousculé par les débats sur l'intelligence artificielle, aussi par… les attaques régulières dont a fait l'objet Google par les autorités concurrentielles du monde entier. Et donc, je n'ai pas eu de contact récent avec Google pour savoir si... Mais tu vois, par exemple, il y a une entreprise qui m'a beaucoup frappé dans la Silicon Valley qui était LinkedIn. LinkedIn, c'était au départ, j'ai eu la chance de voir LinkedIn relativement au tout début. Et je me rappelle d'un... Une rencontre avec le CTO de LinkedIn, le tout premier, qui était un des 20 premiers salariés de la boîte et qui était évidemment aussi un associé et qui était incroyablement entrepreneurial, enfin qui était vraiment presque la caricature de l'entreprise. Il était d'origine coréenne et il était la caricature de... de l'américain, de la côte ouest, originaire d'Asie, extraordinairement dynamique, etc. Et aujourd'hui, quand je visite LinkedIn, qui a été, comme tu le sais, racheté par Microsoft, je suis frappé de voir à quel point c'est devenu une bureaucratie. Alors, il faut reconnaître qu'eux, ils ont cet effet réseau qui fait qu'effectivement, alors pour le coup, ils sont dans la stratégie océan bleu, c'est-à-dire qu'il n'y a pas de concurrents, ils sont vraiment dans une espèce de situation de monopole. qui devient d'ailleurs très compliqué à challenger parce que c'est difficile d'avoir un deuxième LinkedIn, via Deo en son temps s'y est cassé les dents. Mais malheureusement, cette position de monopole, c'est un sujet que ne traite pas non plus complètement Kim et Mauborgne dans Stratégie Océan Bleu. Quand on arrive à se prémunir finalement, soit par la technologie, soit par d'autres... de procédés, soit presque naturellement par l'effet réseau comme c'est le cas de LinkedIn, quand on arrive à se protéger de la concurrence et qu'on reste dans cette situation de monopole, le Kim et Mubar ne nous disent pas comment on fait pour éviter de s'installer dans cette position confortable et de devenir progressivement une bureaucratie qui perd, parce que c'est clair que c'est quand même la concurrence qui est à tout moment de stimule et t'empêche de t'encrouter. dans une forme de bureaucratie et là tu vois je pense que là aussi il ya matière pour réfléchir à ce que c'est qu'une organisation qui resterait dans son océan bleu mais tout en restant très très innovante et sans sombrer dans une forme de bureaucratie donc la question de l'organisation elle est toujours assez présente derrière la réflexion stratégique qu'est ce qui permet finalement comment une organisation arrive à supporter la stratégie gagnante qu'elle a trouvée. Donc, c'est une question importante du management.

  • Speaker #1

    Dans votre ouvrage, est-ce que vous détaillez soit des outils ou des process très opérationnels ? Tu vois, typiquement, on parlait des compétences distinctives. des racines. Est-ce que vous avez un process de didération, de recherche pour essayer de les identifier ?

  • Speaker #0

    Est-ce que vous avez développé des matrices ? Là-dessus, Véronique a beaucoup plus travaillé que moi. C'est le sujet essentiel. C'est comment tu identifies ces compétences distinctives et comment tu les durcis. Elle a développé pas mal d'outils. Il y a pas mal d'outils. pas d'outils magiques, il n'y a pas de matrice. C'est hyper décevant. On est très convaincus, Véronique et moi, que si tout se résumait dans la stratégie par des petits outils magiques, avec des tableaux et des trucs...

  • Speaker #1

    Une jolie matrice, tu poses des points et c'est bon,

  • Speaker #0

    tu l'as. On serait tous riches, puisqu'il suffirait d'appliquer la matrice pour réussir, ce qui malheureusement n'est pas tout à fait aussi simple. Bon, voilà. Mais on donne en quelque sorte un peu des fils conducteurs ou en tout cas des contre-exemples pour montrer que cette analyse des compétences distinctives ne va pas de soi et que bien les comprendre, c'est un travail qui peut être long et compliqué. Moi j'ai un exemple d'ailleurs dont je me souviendrai toujours, j'intervenais dans une... PME qui existe toujours, qui faisait des emballages pour des emballages monodoses pour des échantillons publicitaires. Et les échantillons publicitaires, les publicitaires rivalisent évidemment quand il s'agit de parfums, de produits de beauté etc. d'imagination pour faire effectivement l'emballage monodose le plus spectaculaire, celui qui celui qu'on retient au moment où on le reçoit. Et derrière ça, il y a évidemment des sujets techniques qui sont souvent compliqués, de thermoformage, qui ne sont pas simples. Et cette chef d'entreprise, quand je lui demandais de formuler, c'était une femme, quand je lui demandais de formuler quel était son avantage concurrentiel, elle me disait « nous, on trouve toujours la solution » . Quand on nous pose un problème particulièrement compliqué que les autres n'arrivent pas, on trouve toujours la solution. Alors je lui dis, oui, mais la question c'est un peu comment vous la trouvez ? Parce que dire on trouve toujours la solution, c'est sympathique, mais comment vous faites ? Et donc elle était incapable de répondre à cette question. Et donc moi je me suis attaqué à cette question, et effectivement c'est une PME, et donc j'ai été dans l'atelier, j'ai essayé de comprendre comment, quand il recevait une commande complexe, Comment ils trouvaient cette fameuse solution ? Et cette compétence distinctive, elle se constituait autour d'un trio dont je me souviens très bien de trois hommes. Il y avait un régleur machine, un ingénieur et un troisième larron. Je ne me souviens plus exactement quelle était sa fonction. Mais en tout cas, il y avait un espèce de petit trio qui effectivement... parce qu'ils fonctionnaient bien ensemble, parce qu'ils avaient des compétences très complémentaires, trouvaient des solutions innovantes aux problèmes que posait le client. Et donc, une fois que j'avais fait ce constat, j'ai dit, écoute, je crois que j'ai trouvé ce fameux endroit où ça se passe dans l'entreprise, là où on trouve cette solution miracle qui fait ton avantage concurrentiel. Mais ça m'inquiète beaucoup parce que finalement, ça repose sur trois individus qui demain matin peuvent disparaître. qui demain matin peuvent décider de quitter l'entreprise, etc., de partir en retraite ou je ne sais quoi. Et donc, cette question de ton avantage concurrentiel qui se formule en disant on trouve toujours la solution me paraît incroyablement fragile parce que reposer sur les épaules de trois individus brillants qui fonctionnent bien, mais jusqu'à quand ? Et donc, c'était un exemple. Pour expliquer que quelquefois, la compétence distinctive, puisqu'en fait, cet avantage concurrentiel s'enracinait dans cette compétence distinctive, je sais trouver une solution innovante au problème, au cahier des charges que pose le client pour son emballage monodose public promotionnel, ça reposait sur, en quelque sorte, le savoir-faire de trois individus qui se combinaient harmonieusement. et qui était donc très difficilement reproductible. Et donc, souvent, quand on identifie comme ça des compétences distinctives, la bonne question, c'est de se dire, c'est distinctif, d'accord, mais est-ce reproductible ? Et tu vois, c'est une question, distinctif, c'est le plus important, mais en réalité, il faut arriver à se convaincre que c'est reproductible. Et dans le cas que je cite, Cette compétence distinctive, elle était bien réelle, c'est ce qui faisait le succès de l'entreprise. Elle n'était pas reproductible, elle était difficilement reproductible et elle était donc fragile. Et donc, enraciner la compétence distinctive, ça veut dire, dans cet exemple-là, effectivement construire le système qui permet à chacun de ces trois individus d'avoir un successeur, d'être capable de... de combiner la génération suivante d'arrivée, et donc de combiner à nouveau des compétences de formation, des compétences de recrutement, etc., qui, au fond, étaient un peu cachées. Pour consolider cette compétence distinctive qui existait dans cette organisation, il fallait en cultiver d'autres, qualité du recrutement, qualité de la formation interne, etc., dont on n'avait pas d'ailleurs forcément les moyens, cette petite entreprise. Et c'est ça que ça veut dire, consolider, enraciner ces compétences distinctives. C'est vraiment l'idée de les rendre indestructibles. Or, dans le cas que je cite, qui me revient à l'esprit, elles étaient loin d'être indestructibles puisqu'elles étaient vulnérables au départ d'un des trois. Et donc, finalement, quand on dit identifier ces compétences distinctives, ce n'est pas toujours simple. Quand ma chef d'entreprise disait, on trouve toujours la solution, ben oui, mais comment ? Et deuxièmement, consolider, ça veut dire une fois qu'on a compris comment finalement ça se constituait, cette compétence distinctive, en l'occurrence cette alchimie un peu mystérieuse entre trois individus, comment tu la perpétues, c'est-à-dire finalement comment tu la rends indestructible, comment tu la rends transmissible. Et ça c'est difficile.

  • Speaker #1

    Ok, vous l'aurez compris, tu dis la stratégie du bambou ou la stratégie bambou ?

  • Speaker #0

    C'est un peu les deux. J'ai la stratégie bambou parce que la traduction en anglais c'est bambou strategy et donc voilà du coup on dit stratégie bambou.

  • Speaker #1

    Parce que tu vois je me suis amusé avant de commencer à regarder les caractéristiques des bambous. Croissance rapide, très résistant, s'adapte à tous les environnements, agressivité de prolifération. Et un truc intéressant c'est qu'il y a plus de 1000 espèces de bambous. Et je trouve que pour un outil de stratégie, dire que finalement, oui, il y a une grande famille qui peut être la stratégie bambou, mais qui peut se décliner sur 1000 business case,

  • Speaker #0

    ça donne quelque chose d'intéressant. Et tu vois, entre l'exemple de cette petite PME Amazon et Fuji, c'est effectivement des types de bambou qui sont très différents.

  • Speaker #1

    Ok, ça me va. Donc, courez vers tous les bons livraires pour acheter cet excellent ouvrage. Si tu veux bien, on prend un petit peu de temps pour parler de toi. Déjà, comment ça se fait que tu as atterri à Saint-Cyr ? C'est quoi l'histoire derrière ça ?

  • Speaker #0

    Alors écoute, Saint-Cyr, c'est je pense une histoire de vocation. Il y a un côté... assez simple qui était que j'avais pas envie d'être dans un bureau, j'avais pas envie d'être ingénieur, je rêvais de grand air et de mouvement comme on dit. Bon alors il n'y a pas que l'armée pour effectivement ça, mais simultanément, moi j'ai vécu en mai 68 une période assez étonnante, j'étais au lycée Saint-Louis, à Paris, donc en plein cœur du quartier latin, et j'ai vu ma génération envoyer des pavés, rêver d'avoir cette espèce de révolution existentielle qui s'est terminée au mois de juin, mais qui a été suivie d'un épisode qu'on oublie un petit peu, mais qui était quelques semaines plus tard, l'envahissement de la Tchécoslovaquie par les chars russes, à la suite de l'équivalent du printemps de mai 68, le fameux printemps de Prague qui a été noyé dans le sang par les soviétiques de l'époque, les russes d'aujourd'hui. Et ça, ça m'a beaucoup frappé. Je me suis dit, nous on lance des pavés, On dit sous les pavés la plage, on a cette espèce de rêve existentiel, etc. Et pendant ce temps-là, à grosso modo 800 km de Strasbourg, il y a des chars soviétiques qui écrasent les libertés, des gens meurent pour défendre leurs libertés, etc. Et ce décalage m'a paru incroyablement étonnant. et au fond a été probablement le fait déclencheur de ma vocation militaire. Je me suis dit, on ne peut pas faire ce constat et s'en contenter. Il y a un moment donné où si tu fais ce constat, tu te dis, bon, ok, qu'est-ce que je fais maintenant ? Alors, il y a plusieurs voies, il n'y a pas que la voie militaire, tu peux aussi te lancer dans l'action politique.

  • Speaker #1

    Non, mais c'est une voie qui a du sens.

  • Speaker #0

    Oui. de lancer dans la voie politique et dire je vais attirer l'attention du monde entier sur le danger que constitue, etc. Mais la façon la plus simple, c'est de se dire, si je fais ce constat-là, la première chose qu'il faut faire, c'est mettre sa peau au bout de ses idées, comme disait le capitaine Sergent. C'était une formule qu'il utilisait, mettre sa peau au bout de ses idées. Et donc, ça a été un peu mon réflexe.

  • Speaker #1

    Et ça a été quoi, ta carrière militaire, alors ?

  • Speaker #0

    Alors, écoute... J'ai fait une carrière militaire assez courte, puisque je suis parti comme jeune capitaine. Donc, j'ai fait Saint-Cyr, puis mon école d'application dans l'artillerie, et ensuite mon temps de commandement.

  • Speaker #1

    Artillerie comme Napoléon, grand stratège, si vous en avez.

  • Speaker #0

    Mais oui, exactement. Alors, je suis parti pour une raison d'ailleurs tout à fait claire. Ce que je voulais, c'était être pilote d'hélicoptère. Donc, à l'époque... pour être pilote d'hélicoptère il fallait commencer par choisir une arme. En l'occurrence, j'ai choisi l'artillerie et puis ensuite on basculait vers l'aviation légère de l'armée de terre, les hélicos, ce qui n'est plus le cas aujourd'hui. Aujourd'hui on peut choisir la latte, l'aviation légère de l'armée de terre, les hélicos comme une arme à part entière dès la sortie de l'école. Ce n'était pas le cas de mon temps. Et donc, je suis arrivé à l'école de Dax, qui, comme jeune capitaine, qui est l'école de formation des pilotes. Et là, j'ai eu un épisode malheureux, vocation un peu contrariée, puisque j'ai fait un épisode d'hypertension artérielle. Donc, j'étais inapte médicale pour cause d'hypertension artérielle. Bon, j'ai essayé de faire ce qu'il fallait pour... Et puis ça n'a pas fonctionné, on ne traitait pas aussi bien probablement qu'aujourd'hui l'hypertension artérielle à l'époque. Et puis j'ai un peu passé mon tour parce que si tu veux dans ce système, chaque promotion de Saint-Cyr amenait son lot de pilotes potentiels. Et donc je ne pouvais pas reprendre le train l'année suivante. Et donc j'ai sur cette... déception j'ai décidé de quitter l'armée en me disant bon ben voilà j'ai l'artillerie c'est bien mais je me vois pas artilleurs toute ma carrière j'avais ce rêve de pilote d'hélico ça se fait pas bon ben il faut il faut en tirer les compétitions et voilà et donc j'ai alors j'ai appris à piloter un les hélicos depuis bon j'ai voilà je suis devenu pilote d'hélico sur le tard puisqu'en fait c'est de chc un beau jour sur le Au coup de mes 65 balais, ou 64, je ne sais plus, je me suis dit, quand même... Tu en es à 64 ans ! Je ne vais pas rester sur cette frustration. J'ai tout su le noble qui est juste à côté d'HEC. Je vais aller faire un tour, voir si on peut. Puis finalement, j'ai appris à piloter. C'est génial ! Tu sais, j'ai eu ce drame personnel qui est... avec mon meilleur ami d'enfance, Olivier Dassault, s'est tué, lui, aux commandes de son hélicoptère. Et donc, ça m'a un peu refroidi. Et du coup, j'ai appris. Et donc, je ne suis pas resté sur cette frustration. J'avais eu la chance d'apprendre à piloter les avions dans l'armée parce que dans la perspective de la latte, on avait des facilités pour... pour passer le brevet avion avant de rejoindre l'école de Dax. Ce que j'ai fait, j'ai continué à pas mal piloter les avions, mais effectivement, je n'avais pas passé ce...

  • Speaker #1

    En tout cas, il n'est jamais trop tard. Voilà, il n'est jamais trop tard.

  • Speaker #0

    Il n'est jamais trop tard. Ça, c'est un grand principe.

  • Speaker #1

    On entend souvent dire que les entrepreneurs, les dirigeants d'entreprises doivent ou pourraient s'inspirer des militaires. Toi, tu en penses quoi ? Qui a été les deux ?

  • Speaker #0

    Oui, oui, oui, je pense qu'effectivement, il y a des analogies. D'abord, la stratégie, la stratégie elle-même, c'est d'abord une science militaire. Et les grands auteurs, les grands auteurs sont effectivement, parlent de la guerre, que ce soit Clausewitz, le plus connu, mais plein d'autres qui... On parlait de la stratégie et la stratégie d'entreprise est née à la suite de la Deuxième Guerre mondiale, comme tu le sais, parce que les chefs d'entreprise américains ont été très impressionnés par la capacité des militaires à gérer des grandes opérations comme celle du débarquement, etc. Et se sont dit, il faut absolument qu'on arrive à gérer nos entreprises de la même façon. Donc oui, il y a une filiation assez claire entre... entre l'art militaire, si on l'appelle comme ça, et le management. Je pense qu'il y a effectivement, on pourrait tout à fait classer quelques grands auteurs, comme bien sûr Clausewitz, mais aussi dans une certaine mesure Machiavel, dans les grands auteurs, dans les grands penseurs du management, parce qu'en réalité, qu'est-ce que c'est que le management ? Le management, c'est conduire l'action collective. Et conduire l'action collective dans une situation très particulière qui est celle de la guerre, c'est quand même le métier des militaires. Donc la conduite de l'action collective, c'est le point commun entre le manager et le militaire.

  • Speaker #1

    Et puis ils ont quelques années d'expérience en la matière. Et puis c'est pas prêt de s'arrêter a priori, vu ce qu'on entend en ce moment. Donc après, tu retournes à l'éthique.

  • Speaker #0

    Alors du coup, après, tu sais, la vie est toujours finalement un enchaînement de circonstances et de choses un petit peu étonnantes. Après, en sortant de l'armée, j'avais la chance d'avoir Olivier Dassault, le petit-fils de Marcel Dassault, comme copain d'enfance. Lui avait fait l'école de l'air pendant que moi, je... Je faisais Saint-Cyr, voilà, et donc son grand-père, Marcel Dassault, qui aimait beaucoup son petit-fils, avait aussi un peu de tendresse et d'affection pour moi, qui considérait que j'étais un peu le bon génie de son petit-fils préféré, parce que c'est moi qui lui avais suggéré de faire l'école de l'air, ce qu'il avait trouvé une très très bonne idée. Et donc assez vite, il m'a dit, mais... Voilà, si vous quittez l'armée, venez donc travailler avec Olivier et la famille. Et donc, effectivement, j'ai rejoint le groupe Dassault. Et ça a été ma première rencontre déterminante avec l'entrepreneuriat. Parce que d'abord, tu as 28 ans.

  • Speaker #1

    Parce que tu as commis beaucoup d'ouvrages autour de l'entreprise familiale.

  • Speaker #0

    Oui, oui, oui, absolument. Et alors, ça a été effectivement cet épisode, ce premier épisode de ma carrière, on va dire, civile, m'a fait à la fois découvrir un entrepreneur totalement hors normes, qui était Marcel Dassault, m'a fait moi-même passer à l'action, puisqu'avec Olivier, on a créé une première entreprise dans le domaine de la communication. On s'est transformé, lui et moi, en entrepreneur. Et puis, il m'a fait aussi découvrir effectivement les entreprises familiales, ce souci de la pérennité des entreprises familiales.

  • Speaker #1

    Parce que dans les 14 bouquins, il y en a quelques-uns là-dessus.

  • Speaker #0

    Oui, absolument. Ce modèle de… Oui, parce que si tu veux, je pense que la pérennité, cet objectif de pérennité que… poursuivent assez naturellement les entreprises familiales, mais qui n'est pas réservé aux entreprises familiales. Il y a des entreprises auxquelles j'ai consacré un livre aussi qui ne sont pas des entreprises familiales et qui appliquent un peu ce modèle de la pérennité. Pour moi, la pérennité, ça dessine un modèle de capitalisme différent, un modèle de capitalisme qu'on pourrait baptiser durable au sens strict du terme. Parce que quand tu te donnes comme objectif non pas la performance à court terme, mais la pérennité à long terme, ce qui n'est d'ailleurs pas incompatible, on a besoin de la performance à court terme pour nourrir la pérennité à long terme, mais c'est une question de hiérarchie des priorités. Si tu priorises la pérennité à long terme, alors clairement tu as forcément un comportement avec tes parties prenantes. que ce soit tes salariés, que ce soit tes fournisseurs, que ce soit l'environnement, qui est profondément différent et qui est marqué au saut du respect. Parce que finalement, si tu t'inscris dans le temps long, tu respectes et tes salariés, et tes fournisseurs, ton environnement, parce que tu sais que ton projet, c'est de durer autour de ces parties. C'est compatible ?

  • Speaker #1

    Pardon ? C'est compatible, tu penses, justement, avec une logique de stratégie bambou ?

  • Speaker #0

    Alors, oui. On va couper plusieurs bouquins ensemble. C'est un débat que j'ai avec Véronique. Pour moi, les organisations bambou, en réalité, cachent des organisations pérennes, des organisations qui priorisent la pérennité. Parce que finalement, le bambou, c'est, tu vois, à la différence de l'océan bleu qui cherche un peu à défendre le territoire non concurrentiel, la stratégie bambou, elle vise... au fond, davantage à être indestructible. Et quelque part, c'est une autre façon de dire qu'on vise la pérennité. Et donc, j'ai effectivement, moi, écrit un livre récemment, le dernier en date, qui s'appelle « La pierre et l'édifice » , où je pars de l'épisode de l'incendie de Notre-Dame pour faire une descente en profondeur dans l'organisation de la brigade des sapeurs-pompiers de Paris. et montrer comment cette organisation a su cultiver tous les ingrédients de la pérennité. Et c'était intéressant de partir d'une organisation non marchande pour montrer que cette question de la pérennité dépassait en réalité la sphère strictement commerciale et marchande, et était quelque part un peu, entre guillemets, sociétale. Et oui, c'est un débat que j'ai avec Véronique. Je lui ai dit, je pense que si tu... Si on creuse ensemble ou si tu creuses toi toute seule les caractéristiques de ces organisations bambou, elles vont ressembler comme deux gouttes d'eau aux organisations telles que j'essaye de les démonter, qui sont les organisations qui visent cette pérennité, sachant que dans ce livre, La pierre et l'édifice, on a cherché avec mon co-auteur à véritablement donner des outils pour le coup, pour ce... Pour s'étalonner sur le champ de la pérennité, il y a neuf dimensions managériales qui permettent vraiment de durcir cette pérennité. Et on a vraiment essayé de montrer comment on pouvait, autour de ces neuf dimensions de la pérennité, construire durablement finalement l'édifice de l'entreprise pérenne.

  • Speaker #1

    À un moment va arriver l'opportunité de co-fonder, pas facile à dire, XHEC Entrepreneur.

  • Speaker #0

    Alors avant, il y a quand même tout l'épisode, si tu permets, d'entrepreneur. C'est-à-dire que j'ai créé... Oui,

  • Speaker #1

    mais là, tu as du temps ? Moi, j'ai du temps.

  • Speaker #0

    Non, mais juste pour rappeler que j'ai été entrepreneur ensuite tout seul. Je l'ai été d'abord avec Olivier. Et puis ensuite, quelques années après, j'ai créé effectivement une entreprise appelée l'Annuaire Soleil, qui était une entreprise qui a eu l'hôtel des annuaires du téléphone. Quand je raconte ça aux étudiants, ça me donne instantanément un coup de vieux. Je suis désolé,

  • Speaker #1

    mais oui.

  • Speaker #0

    Les annuaires du téléphone ont été créées.

  • Speaker #1

    Tu as appris à piloter un hélicoptère à 62 ans, 63 ans ?

  • Speaker #0

    Oui, c'est ça.

  • Speaker #1

    C'est bon, tout le monde a compris que tu n'avais pas 18 ans.

  • Speaker #0

    Donc Google a effectivement tué cette activité des pages jaunes. C'est 90% du chiffre d'affaires mondial des pages jaunes en 2005 qui était de 50 milliards de dollars à peu près de recettes publicitaires. Aujourd'hui, 90% de l'équivalent sont dans les comptes de Google. Google, quand tu réfléchis, c'est exactement des pages jaunes. Tu cherches sur les cartes. les coordonnées, c'est vraiment des pages jaunes électroniques. Nous, en France, on avait inventé le Minitel, mais Google a fait quand même beaucoup mieux, évidemment. Et donc, j'ai eu cette expérience très complète de création de boîte, en levant des fonds, en affrontant la concurrence de France Télécom de l'époque qui est devenue orange. en vendant mes actions au bout du compte au groupe Bouy quand il est rentré dans les télécoms. Donc, j'ai fait ce parcours avant de devenir prof, puisque l'histoire, c'est qu'en 1996, j'ai 45 ans et j'ai effectivement fait ce parcours entrepreneurial très intense.

  • Speaker #1

    Tu as vendu au bon moment quand même, non ?

  • Speaker #0

    Oui, alors effectivement, oui, gagner.

  • Speaker #1

    Cinq ans plus tard, ça commençait à vraiment pas sentir bon.

  • Speaker #0

    Un peu plus, parce que j'ai un de mes associés qui s'appelait Olivier Vincent, qui était un jeune étudiant que j'avais croisé justement à HEC, qui lui a refait l'annuaire soleil, ou l'équivalent à Vancouver au Canada, puisqu'en fait, il a été entre-temps le patron des opérations d'annuaire du... téléphone de la compagnie GTI, qui était l'équivalent de France Télécom en Colombie-Britannique. Et ensuite, il lui a fait concurrence, donc il a un peu reproduit le modèle. Et lui a vendu très bien sa boîte, mieux que je ne l'ai fait d'ailleurs à Bouygues, en 2005. Donc, le vrai moment du retournement, c'était 2006-2007, où on a commencé à comprendre. Et donc, c'est vraiment lui qui a vendu le meilleur moment, parce que je pense qu'après, c'était compliqué. Et donc, 1995... Il n'y avait pas encore Internet, j'avais aucune envie d'être salarié, je n'avais pas trop d'idées de création de boîte, j'avais quand même pas mal souffert, c'était un parcours très intense, et donc j'avais toujours enseigné en amateur, bon, HEC Entrepreneur déjà, parce que Robert Papin, le fondateur de ce programme, nous avait recruté, Olivier Dassault et moi, à la suite de notre première création, en disant, mais j'ai... venez encadrer des équipes, etc. Donc, j'ai connu HEC Entrepreneur, je dirais, du côté des entrepreneurs qui sont les tuteurs de nos étudiants dans notre pédagogie distinctive qui est cette pédagogie Learning by Doing que nous déployons depuis maintenant 45 ans. Et donc, je suis effectivement devenu presque par hasard prof professionnel, je suis passé de la catégorie amateur à la catégorie professionnelle, grâce à une première maison pour laquelle j'ai beaucoup d'affection et de reconnaissance, qui était le Conservatoire national des arts et métiers. Le Conservatoire national des arts et métiers a mis au concours une chaire de marketing et de vente, à laquelle j'ai postulé à la sortie de mon... L'aventure Annuaire Soleil qui était une aventure très orientée vente. J'avais une force de vente d'une cinquantaine de vendeurs. Quand j'étais le patron des pages jaunes de France Télécom, avant de créer l'Annuaire Soleil, la boîte concurrente, j'avais une force de vente, j'ai dirigé une force de vente qui comportait 1500 vendeurs. Donc de temps en temps, je rencontrais mes copains de Saint-Cyr, je leur disais, écoutez, moi je... Je ne commande pas de régiment, mais je commande une armée de vendeurs. Et donc, j'ai été effectivement élu sur cette chaire nouvellement créée de marketing et de vente. Et je suis devenu en quelque sorte un vrai prof à ce moment-là. Et grâce au CNAM, ce que je n'oublie pas, j'ai enseigné au CNAM pendant 20 ans. Et j'ai beaucoup appris, y compris... la recherche, parce que les professeurs du CNAM sont, pour la plupart d'entre eux, des professionnels qui intègrent l'enseignement supérieur à mi parcours professionnel, mais on est entouré, une chaire, c'est une équipe avec des maîtres de conférences, et on fait de la recherche, et donc, c'est un peu, c'est assez drôle d'ailleurs, parce qu'au CNAM, c'est un peu les maîtres de conf, les maîtres de conférences qui forment les profs, parce que finalement, les profs...

  • Speaker #1

    Avec l'expérience, c'est rare.

  • Speaker #0

    Ils viennent avec leur expérience du business, mais ils sont ignorants de beaucoup d'éléments en matière de recherche académique en gestion, alors qu'il y a une espèce d'échange fertile qui se fait avec les jeunes profs maîtres de conférences et les plus vieux profs titulaires de chair comme je l'étais. J'ai eu beaucoup de bonheur à enseigner au CNAM, on enseigne à des adultes en cours du soir, des adultes qui sont souvent dans... dans des situations un petit peu compliquées professionnellement, pour qui le CNAM est une planche de salut, c'est souvent leur deuxième chance professionnelle, et c'est un auditoire très agréable. Je disais souvent quand j'étais à HEC et aussi au CNAM, puisque je me suis plusieurs années partagé entre les deux, que finalement je faisais... deux fois le métier de prof, mais que le CNAM était en quelque sorte l'antithèse d'HEC. C'est-à-dire que HEC c'est à la campagne, sur le campus de Jouy, le CNAM c'est en plein centre-ville, HEC c'est plutôt une institution qui est orientée vers le matin, on fait cours le matin alors que le CNAM c'est le soir, et surtout la grande différence c'est que la population d'HEC est quand même constituée de jeunes gens à la tête bien faite, mais plutôt issus des classes socialisées. Alors que le CNAM est peuplé de gens qui essayent de s'élever dans la société justement par la connaissance et l'apprentissage. Donc des expériences qui étaient bien...

  • Speaker #1

    Même côté HEC Entrepreneur, c'est le cas ? Ou est-ce qu'il y a un peu plus de diversité sociale sur HEC Entrepreneur qu'ailleurs ?

  • Speaker #0

    Alors c'est probablement un des programmes dans lequel il y a le plus de diversité sociale, mais on ne peut quand même pas dire que ce soit la diversité la plus... La plus frappante. Donc oui, je pense qu'il y a une vraie diversité professionnelle et puis on se donne beaucoup de mal d'ailleurs pour la nourrir parce qu'on pense que dans notre pédagogie, les étudiants travaillent beaucoup en équipe et on cherche toujours à constituer des équipes avec des cultures différentes. C'est-à-dire qu'on a un peu trois tiers dans nos promotions d'XHEC Entrepreneurs, un tiers qui vient de la grande école HEC. et un deuxième tiers qui sont des ingénieurs dont certains viennent de l'IX, mais d'un peu toutes les écoles d'ingénieurs, et puis un troisième tiers dans lequel il y a une population très diverse, d'étudiants étrangers, d'avocats, des formations tout à fait différentes, et on est très en demande de cette diversité de... de ce troisième tiers qui s'éloigne du moule des grandes écoles. Et on a toujours cherché à nourrir ce troisième tiers avec effectivement des étudiants venant des universités et de préférence ayant effectivement des origines sociales de type boursier, etc. Parce que finalement, c'est dans les échanges ensuite qui se constituent tout au long de l'année entre les étudiants. espèce de fertilisation croisée qui existe entre ces trois populations de commerçants, HEC, d'ingénieurs, et de ces troisièmes horizons universitaires ou étrangers, sont très clairement très fertiles.

  • Speaker #1

    Je pense que ça doit être une expérience assez incroyable, justement, déjà de le développer. de le fonder parce que des projets entrepreneurs, là pour le coup, t'en as vu si ce n'est des centaines beaucoup écoute,

  • Speaker #0

    on a un outil de communication entre les promos d'HEC Entrepreneur, on a un Slack inter-promotion dans lequel il y a un peu moins de 2000 étudiants qui sont en ligne et là Là-dedans, on a recensé à peu près 250 boîtes vivantes. Donc effectivement, oui, j'en ai vu passer, je dirais qu'en 14 ans, puisque j'ai dirigé ce programme pendant 14 ans, en 14 ans, à concurrence, dans les bonnes années d'une haute vingtaine de projets par an, alors certes, certains évidemment s'arrêtant. Et dans les mauvaises années d'une demi-douzaine, oui, j'ai vu passer probablement entre 200 et 300 boîtes et projets dont certains font ma fierté. J'y suis pas pour grand-chose d'ailleurs, parce que là-dedans... Non,

  • Speaker #1

    mais tu es un accompagnateur, c'est ce qu'on disait.

  • Speaker #0

    Oui, un accoucheur en fait, tu vois. Je suis un amalutite de la startup. Oui, exactement. Vraiment, le patron d'HEC Entrepreneur, c'est un mailloticien. Il fait accoucher les projets et il y en a effectivement qui font ma fierté, comme Doctolib, comme Front. On a quand même accouché d'une demi-douzaine de licornes, ce qui dans le paysage français n'est pas si mal.

  • Speaker #1

    Il y en avait dans lesquels tu ne croyais pas du tout et où vous faites tout le temps ?

  • Speaker #0

    Ah oui, alors là, je vais te dire… J'ai un nombre d'erreurs, c'est absolument impressionnant. J'ai d'ailleurs une étudiante que j'adore qui poste assez régulièrement, qui s'appelle Graffi Ramato. qui a un nom donc imprononçable, Sri Lankaise d'origine, et qui a créé une boîte qui marche très très bien qui s'appelle Paris New York, qui fait des burgers PNY, je ne sais pas comment elle prononce, mais en tout cas elle fait des burgers formidables, elle a maintenant 14 restaurants, elle fait près de 20 millions d'euros de chiffre d'affaires, c'est vraiment une... une très belle réussite dans le domaine du food. Elle a publié récemment, graphie, un post dans lequel elle raconte, parce que c'est vrai, que quand elle était HEC entrepreneur, je passais ma vie à dire que c'était une erreur de casting. Je disais, mais qu'est-ce que c'est que cette fille dont je n'ai pas entendu une seule fois le son de la voix, parce qu'elle était un peu timide, de toute l'année ? Comment on a pu recruter une fille comme ça ? Et donc, elle a fait un post sur LinkedIn en disant, quand j'étais HEC entrepreneur, Alain Bloch disait que j'étais une erreur de casting. Et maintenant, quand il m'accueille, parce qu'effectivement, je l'accueille régulièrement. Tu l'embrasse sur les deux joues. Oui, il m'accueille en me disant que je suis son erreur de casting préférée. C'est gentil. Effectivement, c'est un assez bon exemple où, franchement, je n'aurais pas mis un centime sur la carrière entrepreneuriale de graphie et c'était une grossière erreur. Je n'ai pas non plus vu venir le formidable succès de... d'Octolib, Mathilde Collin qui est la fondatrice de Front, une autre de nos licornes, a encore aujourd'hui l'air d'une jeune étudiante attardée. Elle a des longs cheveux comme elle avait quand elle était encore sur le campus alors que maintenant elle est mère de deux enfants et qu'elle a conduit cette boîte aux Etats-Unis de façon absolument exemplaire. Donc, j'ai vraiment pris l'habitude de considérer que les archétypes qu'on avait en tête sur les entrepreneurs et ceux qui étaient susceptibles de réussir étaient en général faux. Et qu'il fallait se méfier de ces archétypes.

  • Speaker #1

    Ah, tu as vu passer Pauline Légnaud aussi ?

  • Speaker #0

    Oui, oui, oui, absolument. De Gémio. Et son formidable projet Gémio et puis son formidable blog. J'espère qu'après la colle, je serai enfin invité par Pauline qui ne m'a jamais invité.

  • Speaker #1

    Pauline sur le... sur le podcast de Pauline, qui est effectivement un peu plus retentissant que la colle, mais tu vas voir, justement, c'est un marche-pied. Oui, bien sûr. Il y a beaucoup de discours qui glorifient l'échec comme une étape essentielle du succès. Toi, t'en dirais quoi, toi ?

  • Speaker #0

    Oui, glorifier l'échec, je ne sais pas s'il faut glorifier l'échec, mais il faut considérer que l'échec fait partie du parcours. et que si on n'est pas prêt à faire face à l'échec et éventuellement à le subir, il ne faut pas faire ce métier. Et d'ailleurs, nous, on a dans notre pédagogie et dans le parcours de nos étudiants ce fameux séminaire mission redressement dans lequel on immerge nos étudiants pendant cinq semaines dans une entreprise qui a effectivement déclarer sa cessation des paiements, qui est en période d'observation. Les étudiants travaillent aux côtés du dirigeant et de l'administrateur judiciaire à la construction d'un plan de redressement. Ça les amène à... On ne fait pas ça pour leur faire peur, on fait ça justement pour qu'ils regardent l'échec en face, d'une part, et d'autre part, qu'ils aient les bons réflexes, si la situation se présente et si, effectivement, ils sont confrontés à ce type de... à ce type de situation, puisque aujourd'hui, on peut quand même dire que la loi française est une loi qui est assez favorable à ceux qui savent anticiper, assez favorable aux entrepreneurs qui font face à des difficultés.

  • Speaker #1

    Ça m'amène à la... question ChatGPT parce que ça c'est toute nouveauté je fais screener par mes invités par ChatGPT, alors c'est pas vraiment ChatGPT, là c'est Perplexity en l'occurrence Perplexity que j'aime beaucoup d'ailleurs et je lui demande de trouver moi une question un peu soit touchy etc mais auquel j'aurais pas pensé et donc la question de Perplexity en l'occurrence ou de l'IA de manière générale ... a été. Alain, vous avez été juge au tribunal de commerce de Paris pendant près de deux décennies. Pensez-vous que le système judiciaire français est réellement adapté pour accompagner les entrepreneurs en difficulté ou favorise-t-il une approche punitive ?

  • Speaker #0

    Vas-y, débrouille pas avec ça !

  • Speaker #1

    C'est une très bonne question. C'est une question qui est particulièrement pertinente en ce qui me concerne, puisque dans mon parcours de juge, puis de président de chambre au Tribunal de commerce de Paris, j'ai effectivement eu l'honneur de présider la chambre qui était spécialisée dans les sanctions des dirigeants, et donc qui effectivement était ce volet répressif et punitif. Mais je dis avec beaucoup de force qu'aujourd'hui nous avons un dispositif qui n'est pas majoritairement punitif, qui est vraiment un dispositif qui permet aux entrepreneurs d'affronter les difficultés et de les surmonter. Bien sûr, il faut un dispositif punitif parce qu'il y a quand même des gens qui abusent du système et des gens qui déposent le bilan. après avoir encaissé des accomptes et qui disparaissent, qui remontent des boîtes, etc. Donc, on est bien obligé d'avoir effectivement un arsenal un peu répressif pour sortir du jeu ces entrepreneurs sans scrupules ou même empêcher de nuire des entrepreneurs particulièrement incompétents. dans leur propre intérêt quand on interdit de gérer. Non mais quand on interdit de gérer, il y a vraiment des gens qui ne sont pas faits pour ça, qui se lancent là quelquefois par nécessité parce qu'ils sont chômeurs de longue durée. Enfin bref, ils veulent s'en sortir, ce qui est très respectable. Mais clairement, de temps en temps, on se dit qu'il vaudrait mieux qu'ils fassent autre chose. Voilà. Et donc... Ce volet répressif, ce n'est sûrement pas le plus sympathique. Je suis devenu président de cette chambre de sanctions à Arculon parce qu'on ne rentre pas au tribunal de commerce pour sanctionner ses pairs. Mais j'avais un brief du président du tribunal qui était formidable, qui était de dire qu'on est trop répressif. Et donc, je te demande, toi qui as justement été entrepreneur, d'appliquer la loi avec... discernement et de construire un socle de jurisprudence qui permette d'être suffisamment répressif quand il le faut et qui ouvre la porte du rebond dans tous les autres cas. Voilà, donc fort de ce brief, effectivement, j'étais très content de présider cette chambre et je dis aujourd'hui très clairement que le dispositif... législatif de la loi de 2004 est un dispositif qui est bien utilisé, permet vraiment d'anticiper les difficultés, de les surmonter. C'est un outil formidable qui est très différent de la solution des anglo-saxons, le Chapter 11, qui a été, ce dispositif français a été critiqué parce que, on a considéré qu'il était un dispositif qui était très différent de la solution des anglo-saxons. tord toujours un peu le bras aux créanciers et singulièrement aux créanciers financiers les banquiers mais au total il je trouve qu'il permet quand même vraiment aux dirigeants de qui sait anticiper les difficultés et qui n'a pas peur du tribunal c'est à dire qu'ils osent franchir la porte du tribunal et tu sais que que dans le cours que je fais à lier c paris sur le campus d'orléans que tu diriges je fais un cours sur justement le leadership face aux difficultés qui se termine par une visite du tribunal de commerce de Paris, parce que je pense qu'il faut dédramatiser en quelque sorte ce lieu pour les futurs entrepreneurs. Je pense vraiment que la loi actuelle est très efficace pour surmonter les difficultés.

  • Speaker #0

    Ok, merci. Je transmettrai à Perplexity sa réponse.

  • Speaker #1

    Absolument.

  • Speaker #0

    Justement, moi j'ai un avis, je pense qu'il est assez partagé, c'est qu'aujourd'hui on vit une période d'opportunité pour l'entrepreneuriat grâce à l'IA. Est-ce que tu le penses aussi ? Et comment tu vois les prochaines années ?

  • Speaker #1

    Alors écoute, je ne suis pas devin et je pense que l'exercice prospectif, est un exercice à très haut risque, surtout aujourd'hui avec la rapidité avec laquelle se développent ces technologies, c'est quand même très très impressionnant dans ce secteur. Et donc je me garderais bien de faire un pronostic parce que comme tout outil technologique... complètement révolutionnaire, outil qui est finalement un aboutissement. Parce que moi, je me rappelle que dans ma thèse d'informatique, tu disais que j'étais docteur en informatique. Effectivement, je suis docteur en informatique. J'ai fait cette thèse à l'Université Paris-Dauphine juste après avoir quitté l'armée. Et en fait, je me rappelle que mon directeur de thèse, c'était le professeur Shekhroun, qui a porté effectivement à Dauphine les... premiers enseignements en informatique des organisations. Ils rêvaient qu'on fasse un espèce de tableau de bord de l'entreprise, un tableau de bord automatique. Ils disaient qu'il faudrait que les managers aient comme les pilotes d'avion des indicateurs permanents qui leur permettent. Donc ils rêvaient de ces outils un peu magiques, faits de traitement des données, d'intelligence des données, etc. qui deviennent presque d'actualité aujourd'hui, mais c'est quand même 40 ans plus tard. Et donc, c'est une forme de continuité, de continuation de toutes ces technologies, de l'information, l'intelligence artificielle, mais c'est effectivement un aboutissement, un aboutissement qui peut faire peur, je n'ai pas rentré dans ce débat, mais qui est un formidable outil, parce que bien sûr, Quand on interroge Perplexity, quand on utilise ChatGPT ou Cloud ou n'importe quel autre pour se faciliter le travail, c'est formidable. Mais il faut mesurer que l'intelligence artificielle appliquée par exemple au domaine de la santé ouvre des perspectives absolument inouïes. J'ai eu la chance il y a deux ans dans le voyage que je fais tous les ans dans la Silicon Valley d'être sur le campus de Stanford avec mes étudiants et d'assister à la conférence de deux. profs successifs de médecine qui étaient des experts de l'intelligence artificielle appliquée à la médecine qui étaient d'ailleurs des vieux messieurs qui avaient plus de 80 ans et l'un et l'autre qui étaient à l'américaine toujours profs, toujours chercheurs patrons de start-up tout à fait à l'américaine mais qui nous ont fait un exposé qui était absolument inouï sur le échec les perspectives de l'intelligence artificielle en matière de santé. Et là, ça ouvre des horizons totalement vertigineux, parce que s'il y a des maladies qu'on arrive à vaincre, on va clairement allonger la durée de vie humaine, mais ce faisant, on va aussi déstabiliser complètement nos systèmes de santé, le coût de nos systèmes de santé, nos systèmes de retraite. Enfin bref, si tu veux, je trouve qu'aujourd'hui, dessiner un horizon crédible, est un exercice à très haut risque.

  • Speaker #0

    D'accord. Mais est-ce que tu es d'accord avec moi qu'on vit une époque incroyable d'opportunités ?

  • Speaker #1

    Ah oui, une époque formidable. Non mais moi, je suis enthousiaste. Tu sais, j'ai fait écrire à Claude, à I, moi c'est l'intelligence artificielle que j'utilise le plus, Claude, et je lui ai fait écrire des poèmes. Je lui ai fait écrire un poème sur la détresse de l'entrepreneur confronté à l'échec, puisque tu parlais de ça. Et je lui ai demandé d'écrire ce poème à la façon de Baudelaire. Et je peux te dire que ce poème, il est inouï. Il est inouï de beauté, il est inouï de modernisme, il est incroyable. Et donc, évidemment, c'est un défi, parce qu'on se dit mais comment derrière ça un poète peut trouver finalement, peut arriver à trouver. Mais je trouve que c'est justement incroyable. Ça oblige l'homme à aller jusqu'au bout du bout de son véritable apport. C'est-à-dire cette créativité dont on n'est pas encore capable. Parce que là, en fait, quand Claude écrit un poème, il l'imite. Et donc, il combine des ressources qu'il a digérées. Et donc, l'intelligence humaine, c'est autre chose. Et donc... Donc, je crois que ça nous oblige à une réflexion sur ce que c'est que l'intelligence humaine, ce que c'est que la créativité humaine, comment la cultiver, comment éventuellement l'outiller avec la machine, mais en lui gardant son côté si spécifique, qui fait la spécificité de la nature humaine.

  • Speaker #0

    Allez, c'est parti pour les sept dernières questions.

  • Speaker #1

    D'accord.

  • Speaker #0

    Alain, dis-nous, quel est ton mot préféré ?

  • Speaker #1

    Alors moi, c'est clairement le mot beauté. Je suis fasciné par la beauté. Je trouve que la beauté de ce monde, malgré ses horreurs et la misère du monde, je trouve qu'il y a une forme de beauté du monde, une forme de beauté, de l'amour. On avait un directeur général à HEC qui s'appelait Bernard Ramanansou qui terminait toujours ses discours sur le thème de l'amour en expliquant que finalement, c'était la chose la plus importante, y compris dans le management, la chose la plus importante dans la condition humaine. Et ça va un peu de concert avec cette idée de la beauté. Donc, j'aime beaucoup le mot beauté.

  • Speaker #0

    Alors, à contrario, quel mot détestes-tu ?

  • Speaker #1

    A contrario, pour un militaire, c'est évidemment un peu étonnant, mais le mot que je déteste le plus, c'est le mot conflit. Je déteste le mot conflit parce que je n'aime pas le conflit en réalité.

  • Speaker #0

    La paix est par la guerre, donc le militaire est là pour éviter la guerre.

  • Speaker #1

    Exactement. Et donc, je déteste le mot conflit et je n'aime pas d'une façon générale le conflit.

  • Speaker #0

    Civis pacem par abellum, pour ceux qui se poseraient la question.

  • Speaker #1

    Exactement.

  • Speaker #0

    Le son, le bruit que tu aimes ?

  • Speaker #1

    Alors, j'ai une tendresse particulière pour le bruit de l'eau qui coule.

  • Speaker #0

    Ouais,

  • Speaker #1

    ok. De l'eau qui coule, que ce soit dans la nature, le torrent, mais que ce soit aussi...

  • Speaker #0

    Un peu plus dans le maquillage tard.

  • Speaker #1

    Cette petite musique de l'eau qui coule, je trouve que c'est un peu la musique de la vie quand même. Et donc, j'ai une tendresse particulière pour ce son.

  • Speaker #0

    Ouais, qui s'écoule. Le son ou le bruit que tu détestes ?

  • Speaker #1

    Je déteste par-dessus tout les éclats de voix. Je suis très agressé par les éclats de voix, que ce soit des éclats de voix d'ailleurs de gaieté, quand on parle dans les transports publics, il y a des gens qui hurlent parce qu'ils sont contents, etc. Ça m'agresse, je n'aime pas les éclats de voix. Et de façon générale, c'est vraiment un truc, alors ça va peut-être avec justement le conflit, parce qu'en général, quand il y a conflit, il y a éclat de voix, mais finalement, l'eau qui coule est aussi une forme de beauté, donc tu vois, il y a une certaine cohérence entre mes choix.

  • Speaker #0

    Tu as réussi à avoir un management sans éclat de voix.

  • Speaker #1

    Écoute, je m'y suis employé.

  • Speaker #0

    Celui qui n'a jamais péché me jette la première pierre.

  • Speaker #1

    J'ai eu des colères comme tout le monde. Je pense que la colère, il faut de temps en temps être en colère. Mais oui, j'ai quand même essayé toujours d'éviter les éclats de voix.

  • Speaker #0

    Ton juron gros mot ou blasphème favori ?

  • Speaker #1

    Écoute, c'est très simple. c'est « fais chier bordel » . Quand quelque chose m'énerve ou me résiste, « fais chier bordel » .

  • Speaker #0

    Tu n'en as pas gardé un de ta carrière militaire ?

  • Speaker #1

    Non, mais dans l'armée, ça arrive aussi de dire « fais chier bordel » .

  • Speaker #0

    Plus souvent que de raison, effectivement. La citation que tu aurais aimé avoir prononcée ?

  • Speaker #1

    Alors, écoute... quand tu m'as dit qu'on posait ces sept questions à la fin, j'ai un peu réfléchi. Et au fond, je me suis dit que j'allais te proposer, parce que c'est ce que je trouve, un vers d'Aragon, de Louis Aragon, dans son merveilleux poème Les yeux d'Elsa, qui est pour moi probablement le vers le plus beau de la littérature. française c'est ce vers qui dit tes yeux lorsqu'une larme iluit tes yeux rendent jaloux le ciel d'après la pluie et je trouve que c'est que ce verre dit à la fois à la fois l'amour à la fois la beauté ce verre il est il est extraordinairement musical tu vois d'ailleurs jean ferrat on a fait une chanson tes yeux lorsqu'une larme iluit tes yeux rendent jaloux le ciel d'après la pluie moi je trouve que quand on a écrit ça On peut mourir.

  • Speaker #0

    Non, c'est beau. C'est beau, je ne connaissais pas. Dernière question. Si Dieu existe, qu'aimerais-tu, après ta mort, l'entendre te dire ?

  • Speaker #1

    Bienvenue.

  • Speaker #0

    Bienvenue, juste friendly welcome.

  • Speaker #1

    Ben oui, parce que s'il me dit bienvenue, c'est plutôt bon signe. Ça veut dire, un, qu'il existe,

  • Speaker #0

    deux,

  • Speaker #1

    qu'il considère que je ne vais pas tomber. C'est plutôt une bonne nouvelle que tu arrives,

  • Speaker #0

    on va prendre l'apéro.

  • Speaker #1

    Franchement, bienvenue, ça m'irait. Ok,

  • Speaker #0

    très bien, ça marche. Écoute Alain, merci beaucoup de ce temps que tu nous as consacré, c'était super intéressant.

  • Speaker #1

    C'était très sympa.

  • Speaker #0

    Et puis... Je vous rappelle à tous la stratégie Bamboo dans toutes les bonnes librairies. Il est en précommande seulement sur Amazon. Oui,

  • Speaker #1

    il est en précommande parce qu'il n'est pas encore sorti. Il est en parution.

  • Speaker #0

    Parce qu'il est référencé un peu partout. Ça, c'est clair. Donc, allez précommander sur Amazon. C'est qui ton éditeur ?

  • Speaker #1

    C'est Pearson. Pearson,

  • Speaker #0

    ok. Donc voilà, vous allez chez Pearson directement. Même si on a parlé de la stratégie d'Amazon, ce n'est pas la question. Donc un grand merci Alain. Merci à toi. On se revoit bientôt à Orléans ou à Paris.

  • Speaker #1

    Exactement. Merci beaucoup.

  • Speaker #0

    C'était la colle d'Alain Bloch. Bravo, vous avez tenu jusque là. Merci de votre écoute. Si vous avez aimé cet épisode, partagez-le sur les réseaux sociaux, allez mettre 5 étoiles et des commentaires sur les plateformes de podcast. Abonnez-vous, abonnez-vous à notre newsletter. Et dans tous les cas, à très bientôt pour un prochain épisode de La Colle. Et n'oubliez pas, tout est possible à qui rêve, ose, travaille et n'abandonne jamais.

  • Speaker #2

    Merci.

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Description

Dans l'épisode 84, La Khôlle reçoit Alain Bloch, entrepreneur aguerri, professeur émérite à HEC Paris et co-auteur de « La Stratégie du Bambou ». Cette conversation captivante révèle comment cette approche novatrice peut transformer votre vision de l'entreprise et redéfinir vos méthodes d'innovation.


La stratégie du bambou, inspirée des caractéristiques exceptionnelles de cette plante, s'articule autour de trois principes fondamentaux : l'enracinement profond dans vos compétences distinctives, la souplesse d'une expansion contrôlée vers de nouveaux marchés, et une prolifération stratégique permettant de conquérir durablement votre territoire économique.


Contrairement aux modèles traditionnels souvent trop rigides, cette approche favorise une diversification ambitieuse tout en maintenant une identité forte et cohérente. Alain Bloch partage des méthodes concrètes pour identifier, renforcer et exploiter vos racines stratégiques afin de développer votre entreprise de façon durable et innovante.


Un épisode essentiel pour les décideurs souhaitant enrichir leur réflexion stratégique et transformer leur organisation en un acteur à la fois agile, robuste et résilient face aux défis contemporains. Bonne écoute !


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Bienvenue dans la colle. Vous êtes curieux ? Vous avez soif de comprendre le monde qui vous entoure ? Alors vous êtes au bon endroit. Si vous aimez vous remettre en question, que comme moi vous pensez qu'on n'a jamais fini d'apprendre, alors la colle est faite pour vous. Sans se prendre au sérieux, je vous propose à chaque épisode de partir ensemble à la découverte de nouveaux horizons, de profils et d'idées inspirantes. Je suis Pierre Barraud, j'ai créé, édité et produit ce podcast. Je suis également directeur général du Campus Orléans de l'ISC Paris, école de commerce, membre de la conférence des grandes écoles. Mon mantra, vis comme si tu devais mourir demain, apprends comme si tu devais vivre toujours. Je suis preneur de tous vos commentaires, suggestions, remarques, ils sont tous bienvenus. Et bien évidemment, je compte sur vous pour placer 5 étoiles et des commentaires sur toutes les plateformes. Allez, c'est parti, bonne écoute ! Chers amis, bienvenue dans ce nouvel épisode de La Colle. Aujourd'hui, on va parler stratégie, entrepreneuriat, avec... avec un ami, j'ose le dire, Alain Bloch. Salut Alain.

  • Speaker #1

    Salut Pierre.

  • Speaker #0

    Alors Alain, pour tous ceux qui ne le connaîtraient pas, il est Saint-Syrien. Alors ça, voilà, déjà ça pose le gars. Docteur de l'université de Paris-Dauphine, en informatique étonnamment, mais on reviendra informatique des organisations. Et puis carrière militaire, carrière d'entrepreneur et carrière de... professeur, puisque monsieur est professeur émérite d'HEC. Mais enfin voilà, tout ça c'est plein de belles choses et surtout aujourd'hui on va parler d'un ouvrage que tu as commis avec Véronique Nguyen, qui est elle aussi prof à HEC si je me trompe.

  • Speaker #1

    Oui, professeur à HEC Paris,

  • Speaker #0

    qui s'appelle la stratégie du bambou. Après cette courte introduction, Alain, est-ce qu'en quelques heures, mots, tu veux bien te présenter, parce que moi j'ai pris les éléments que j'avais, mais voilà.

  • Speaker #1

    Alors écoute, tu as très très bien dit, j'ai eu la chance effectivement dans ma carrière de faire les trois plus beaux métiers du monde, le métier des armes, officier, le métier effectivement d'entrepreneur, qui est celui qui probablement m'a le plus marqué et probablement aussi enthousiasmé. Et puis, depuis longtemps maintenant, le métier de professeur, effectivement, métier que je fais d'ailleurs plus comme un éducateur que comme un chercheur, même si je fais comme beaucoup de profs. Je publie, bien sûr, mais je publie plein de livres que personne ne lit d'ailleurs, mais d'une façon générale.

  • Speaker #0

    Il y a une bibliographie impressionnante quand même. Tu en as six ou quelque chose comme ça.

  • Speaker #1

    Oui, j'en ai même écrit 14, mais peu importe, puisque je me demande même encore comment les éditeurs me publient, puisque je trouve qu'on n'en vend pas beaucoup. Ça va changer avec la stratégie du bon boulot. Éducateur, parce qu'au fond, oui, je pense que quand on est officier, on est forcément un peu éducateur de ses hommes. Quand on est entrepreneur, on est aussi un peu éducateur de ses... de ses collaborateurs, de ses associés. Et puis, quand on est prof, il y a effectivement cette façon de transmettre qui est peut-être plus dans l'éducation au sens où dans l'entrepreneuriat, forcément, puisque j'enseigne l'entrepreneuriat, on travaille beaucoup sur les comportements, les savoir-faire, plus que finalement les connaissances explicites. Et donc, voilà. Donc, les trois plus beaux métiers du monde. officier, entrepreneur et professeur. D'ailleurs, je voudrais qu'on écrive ça sur ma tombe.

  • Speaker #0

    C'est pas mal comme épitaphe. Rentrons dans le vif du sujet. Parle-nous un peu de la stratégie du bambou. Mais qu'est-ce que ça fait ?

  • Speaker #1

    La stratégie du bambou, c'est d'abord l'histoire d'une très belle rencontre avec Véronique Nguyen. Véronique Nguyen, évidemment, c'est une professeure de stratégie d'HEC. On s'était croisés beaucoup de fois. On se parlait, je l'aimais beaucoup, je crois qu'elle m'apprécie aussi. Puis un jour, on fait effectivement une formation ensemble pour un public d'adultes sur la stratégie en général. C'est moi d'ailleurs, je dirigeais ce programme dans lequel je l'avais invité à faire un cours. Et puis, je découvre qu'elle parle de cette stratégie bambou parce que l'idée originelle lui revient. Et je suis admiratif, fasciné par ce qu'elle raconte, que je trouve à la fois très original, très juste, assez… Voilà. pas du tout galvaudé, que cette métaphore du bambou a beaucoup de signification, je vais y revenir. Et donc, je lui dis, mais Méranique, c'est fou, c'est génial ton truc, pourquoi tu n'écris pas un bouquin ? Elle me dit, mais si, etc., j'ai ça sur le... mais je n'y arrive pas, beaucoup de temps, je travaille trop, machin, bon. Et donc, je lui dis, écoute, si je... je peux contribuer d'une façon ou d'une autre, moi je serais ravi, je trouve que c'est une très belle idée, etc. Et donc on a effectivement conçu le projet d'écrire le livre. On a commencé par écrire des papiers ensemble, plusieurs articles, et puis effectivement on a convenu d'écrire ce livre dans lequel je ferais au fond un espèce de chapitre introductif un peu durti pour à la fois expliquer notre rencontre, mais dans lequel il est complètement prévu que ce soit... elle qui fasse l'essentiel parce que je ne veux pas du tout donner le sentiment que je lui pique l'idée tu vois mais je suis un grand défenseur de cette idée, de cette vision sur laquelle je peux effectivement développer comme tu dis.

  • Speaker #0

    Oui c'est intéressant parce que en plus de ça c'est pas le sous-titre mais la baseline en dessous du titre du livre c'est en gros remplacer Porter et la stratégration bleue.

  • Speaker #1

    Oui, c'est ça.

  • Speaker #0

    Vous faites du marketing aussi, c'est un peu du teasing quand même. En gros, parce que Porter, c'est quand même Harvard, la stratégie océan bleu, c'est l'INSEAD.

  • Speaker #1

    C'est l'INSEAD,

  • Speaker #0

    oui. On se pose quoi, HEC se pose là.

  • Speaker #1

    Non, mais alors, c'est clair qu'au fond, sur le plan un peu conceptuel, l'idée, c'est qu'effectivement, il y a eu entre le grand succès de stratégie océan bleu et les grands succès de Michael Porter, il y a eu un espèce de trou noir en termes de livres, de publications, je dirais, grand public, alors qu'il y a une théorie extrêmement importante qui est la théorie des ressources distinctives qui en fait se situe un peu chronologiquement entre les deux. ces deux courants stratégiques, le courant portairien et puis le courant d'Océan Bleu, qui est d'ailleurs un prolongement du courant portairien, parce qu'au fond, qu'est-ce que nous disent les auteurs de stratégie Océan Bleu ? Ils nous disent que le mieux, c'est d'éviter la concurrence, thème de portaire, en finalement recherchant l'innovation maximum, c'est-à-dire effectivement... en étant le premier, en ouvrant cet océan bleu dont il nous parle, et en évitant effectivement que les concurrents s'y engouffrent, pour éviter que ça devienne à son tour un océan rouge. Donc c'est une idée très originale, qui est intéressante, mais qui au fond ne dit qu'une chose, c'est que plus tu innoves et plus ton innovation rencontre le marché avant tous les autres. plus effectivement tu as de facilité à te développer. Bon, je caricature un peu, c'est un petit peu plus sophistiqué que ça, ils en écrivent 700 pages, donc si c'était aussi simple que ça, bien sûr ça ne serait pas… Mais grosso modo, c'est juste pour dire que c'est quand même assez porterien dans la vision, puisque au fond, Porter travaille beaucoup sur l'avantage concurrentiel, donc la concurrence et… les auteurs de stratégie océan bleu finalement disent c'est encore mieux quand il n'y a pas de concurrence du tout grâce à l'innovation. Entre les deux il y a eu un courant très important mais qui n'a pas donné lieu à des publications grand public ou en tout cas pas du tout en Europe et pas traduite, probablement quelques unes aux Etats-Unis mais qui n'ont pas du tout le même type de succès que les bouquins de Porter et stratégie océan bleu. qui a cette théorie des ressources distinctives. Qu'est-ce qu'elle dit finalement ? Cette théorie dit qu'effectivement, ce qui constitue la force la plus importante d'une entreprise, c'est ce que cette théorie appelle ses ressources distinctives, qui lui donne un avantage concurrentiel, mais qui n'est pas décrit par Porter, puisque Porter s'intéresse à la différenciation ou la stratégie de prix, qui n'est pas décrit. par porteur et qui consiste à se dire finalement qu'est-ce que je fais mieux que tout le monde ? C'est la question finalement que doit se poser le manager s'il veut s'inspirer de cette théorie des ressources distinctives. Qu'est-ce que je fais mieux que tout le monde et comment je peux essayer de m'organiser pour ne faire en quelque sorte que ça ? Et c'est ce qui a conduit à à la fin du siècle dernier, ce grand mouvement d'externalisation, puisque c'est ça qui a construit le corps business. Voilà, on se centre sur ce qu'on sait le mieux faire et tout le reste, on l'externalise. Donc, c'était quand même très inspiré par cette théorie des ressources distinctives. Qu'est-ce qui vraiment fait dans mes compétences ? On parle quelquefois de compétences distinctives aussi. Qu'est-ce qui fait ma différence ? Donc en fait, la stratégie du bambou, c'est une stratégie qui s'inspire beaucoup de cette théorie des compétences distinctives, mais qui ne se limite pas à ça. C'est parti finalement d'un constat qui est que les grands modèles de la stratégie décrivent assez mal les plus grands succès des dernières années des plus grandes entreprises du monde, c'est-à-dire que les fameuses GAFA, Google, Amazon et les autres, quand tu regardes sur longue période, il y a un peu de portaire, il y a un peu de stratégie océan bleu, mais au total, les modèles portairiens et le modèle océan bleu ne permettent pas. pas d'analyser en finesse et en profondeur le succès de ces très grandes entreprises. Et donc, ça part un peu de ce constat et l'idée clé de Véronique, c'est de se dire mais au fond, ces entreprises, elles ont une trajectoire très particulière qui effectivement se déroule en fait en trois temps. Un premier temps. Elles enracinent très profondément ces fameuses compétences distinctives, elles les analysent et elles les consolident en les enracinant très profondément.

  • Speaker #0

    C'est ce que vous appelez le concept de racine mère, c'est ça ?

  • Speaker #1

    Voilà, c'est ça. Et donc ces racines mères qui sont les compétences distinctives particulièrement bien consolidées, enrichi éventuellement par des acquisitions, etc., qui permettent ce que finalement le discours stratégique en principe interdit, c'est-à-dire le foisonnement tous azimuts. En fait, la doxa stratégique, c'est quand même de dire qu'il faut se concentrer sur son core business et ne faire que ce qu'on sait faire bien. Et au fond, ce n'est pas ce que font les GAFA. Les GAFA, effectivement, Ils ont une compétence distinctive qu'ils défendent et qu'ils enrichissent tout au long de l'existence, mais cette compétence distinctive leur permet d'aborder des champs extrêmement différents. Quand tu prends Google, ça passe de grand succès de Gmail à aujourd'hui Waze ou d'autres. Quel est le lien entre toutes ces compétences ? tout ce qu'on appellerait des formes de diversification. Alors justement, ce ne sont pas des vraies diversifications, c'est en fait un foisonnement qui est nourri par ces compétences distinctives enracinées. Donc le premier moment de la stratégie du bambou, c'est d'identifier clairement ces fameuses compétences distinctives, ce qui n'est pas toujours facile, et puis de les enraciner en les consolidant au maximum, en les rendant. à la fois unique et indestructible.

  • Speaker #0

    Ça me fait penser à Amazon, qui à la base est un e-commerçant et qui en fait, en compétences distinctives, a développé en... interne pour ses besoins propres, la capacité d'avoir des serveurs qui vont scaler les volumes, etc. qui vont derrière se dire, c'est quand même bizarre, on a le savoir-faire, on a les infrastructures, sauf qu'on l'utilise qu'à fond une fois par an, allons-y, on va peut-être essayer d'en faire un business. Et c'est la naissance d'Amazon Web Services qui aujourd'hui, dans mon souvenir, doit faire plus de 30% de la marge Oui,

  • Speaker #1

    absolument. C'est un très bon exemple qu'on développe d'ailleurs dans nos cours, puisque Véronique et moi, et chacun séparément, on fait ces interventions sur la stratégie pour vous. Amazon est un très bon exemple de compétences distinctives qui est très enracinée. On peut dire que, grosso modo, la compétence, c'est la capacité de traitement des données de façon très élaborée sur les clients. couplé à la logistique, c'est les deux compétences hautement distinctives qui ont été extrêmement consolidées par Amazon et qui lui ont permis effectivement non seulement d'être le premier distributeur du monde à égalité avec Walmart, mais aussi un offreur de services pour effectivement le cloud, etc. Et on pourrait multiplier les exemples Google, Apple, Apple qui... dont la compétence distinctive est principalement l'interface homme-machine, qui est quelque chose qu'ils ont su construire avec un système d'exploitation d'ordinateurs extrêmement innovant et unique, qui est encore aujourd'hui, qui bataille sérieusement contre Windows, mais aussi l'interface homme-machine dans les iPhones, etc. les montres aujourd'hui, une compétence distinctive qui lui permet également de foisonner et d'aborder des sujets aussi variés que la musique, effectivement l'horlogerie, une horlogerie qui est évidemment totalement numérique, mais pour montrer que là encore il y a un vrai foisonnement et que derrière ce foisonnement en réalité il y a une compétence distinctive ou plusieurs compétences distinctives qui sont vraiment... c'est pour ça qu'elles sont distinctives, et qui sont profondément cultivées et enracinées, et qui permettent ce foisonnement un peu énigmatique, parce que finalement ce foisonnement, il faut beaucoup creuser pour lui voir un fil conducteur, il y en a en général un, mais je dirais que ce foisonnement est un peu, en théorie, condamné par... Par la doxa stratégique. Il y a un troisième temps, si tu me permets, parce que ce troisième temps est celui qui est peut-être le plus borderline en termes même juridiques. C'est le moment de l'étouffement. Et c'est là qu'on retrouve la force de la métaphore du bambou. Le bambou, effectivement, pour quiconque a eu dans son jardin un bambou, il serait carrément indestructible, parce que pour l'arracher, tu te donnes du mal et puis ça repart. poussent aussi secs, que ça foisonne beaucoup, c'est-à-dire que si tu n'y prends garde, ton jardin est assez vite envahi et que ça étouffe effectivement tout ce qui pousse autour. Et ça, c'est le côté un petit peu noir du développement des GAFA. On sait tous qu'ils cherchent, d'une certaine façon, à tuer la concurrence, alors pas forcément la tuer… en l'asphyxiant, quelquefois en la rachetant, etc. Mais en tout cas, il y a cette volonté, on retrouve là un peu l'océan bleu, il y a cette volonté d'étouffer tout ce qui pourrait perturber cet envahissement par un foisonnement d'activités. Et donc là encore, on retrouve cette métaphore du bambou. Les racines qui sont très profondes, ce foisonnement qui paraît invincible et extraordinairement multiple, et puis cet étouffement progressif de tout ce qui pousse dans la zone, et qui est un point sur lequel on a beaucoup critiqué les GAFA, qui se donnent bonne figure en achetant beaucoup de startups qu'ils intéressent, à leur groupe, mais en vérité, ça cache souvent des asphyxies. qui ne se conclut pas toujours par un rachat. Il y a des tas de boîtes qui meurent parce que Google change tout d'un coup brutalement les règles du jeu, parce que Amazon met des conditions plus ou moins exorbitantes dans ses conditions de vente. Donc, une face qui n'est peut-être pas la plus glorieuse des GAFA, mais qui aujourd'hui leur donne ce statut de premières entreprises du monde. Donc, au fond... La métaphore fonctionne bien, et cette métaphore était très naturelle pour Véronique, puisque Véronique est d'origine vietnamienne, elle est particulièrement inspirée par l'Asie, et donc le bambou lui allait très bien. Et donc cette stratégie bambou, elle a la force de la simplicité, mais elle a quand même une clé très importante, qui sont cette analyse subtile. des ressources distinctives, des compétences distinctives. Je peux donner un exemple qui est moins connu que les GAFA, c'est le formidable exemple de Fuji. Fuji, dans le domaine de la photo argentique, est un brillant outsider derrière Kodak, mais il sent venir de façon beaucoup plus probablement forte le vent de la photo numérique. Il sent que... Les choses vont mal tourner pour lui et contrairement à Kodak qui a fini sous le chapeau du chapter 11 pour rebondir ensuite, mais Fuji a opéré une reconversion absolument étonnante puisqu'aujourd'hui la première activité du groupe Fuji c'est la pharmacie. Et donc ils sont passés de la photographie à la pharmacie en… travaillant en profondeur une compétence distinctif qui était la chimie, qui a été profondément travaillée par deux dirigeants successifs, dont l'un d'entre eux a d'ailleurs écrit un livre là-dessus qui s'appelle Le Miracle Fuji, mais qui fait qu'aujourd'hui le groupe Fuji est très largement devant le groupe Kodak. C'est un groupe qui est encore dans la photo, mais qui est très largement diversifié et dont la principale source de revenus... Et la pharmacie, ce qui ne...

  • Speaker #0

    C'est pas une histoire de folagène aussi ?

  • Speaker #1

    Alors oui, il y a plusieurs éléments, je ne rentre pas trop dans le détail, mais c'est juste pour illustrer que ça n'est pas quand même que les GAFA et qu'il y a des entreprises qui ont eu ce type de stratégie bambou. Parce que derrière cette analyse en profondeur de ce qui constituait une compétence distinctive, Fuji a aussi foisonné, puisqu'ils sont toujours dans la photo, mais ils sont dans la santé. Donc ils ont des tas d'activités aujourd'hui. qui paraissent très éloignées les unes des autres, mais qui en réalité ont pour point commun ces fameuses compétences distinctives.

  • Speaker #0

    Pour résumer, il y a trois étapes. S'enraciner, foisonner, proliférer, conquérir.

  • Speaker #1

    Oui, on va dire ça.

  • Speaker #0

    Avec une logique effectivement de l'agressivité du bambou. Si je comprends bien... Effectivement, c'est les compétences distinctives qui, dans cette analogie biologique, seraient les racines.

  • Speaker #1

    Oui.

  • Speaker #0

    Le foisonnement, c'est les X business units qu'on va pouvoir construire sur ces racines. Et la prolifération, c'est l'extension du domaine de la lutte. On va dire ça comme ça.

  • Speaker #1

    L'extension, exactement. Avec quand même cette tentation permanente d'une certaine forme d'étouffement, plus ou moins voulue, plus ou moins naturelle. plus ou moins anti-concurrentiel. Là-dessus, les autorités concurrentielles du monde entier se penchent régulièrement sur le comportement des GAFA à ce sujet-là. Mais voilà, c'est une propension assez naturelle dans la stratégie du bambou, puisque ce foisonnement, cette prolifération, par nature, a tendance à étouffer toute forme de concurrence.

  • Speaker #0

    Sauf que... Alors ça se heurte à un truc qui est que les entreprises ont tendance à continuer à faire ce qu'elles font et on va dire que l'innovation, l'agilité, tout ça même si tout le monde s'en gargarise, c'est pas toujours le cas et de toute façon aussi les allocations budgétaires ne vont pas au foisonnement. Comment on fait pour avoir une organisation Bamboo compatible ? C'est une très bonne question parce qu'en fait, je dirais qu'il y a la stratégie bambou, mais Véronique a aussi l'idée qu'il faudrait écrire un livre sur les organisations bambou, parce que la question que tu poses est très juste. Et d'ailleurs, il y en a un exemple qui est absolument criant, puisqu'on a parlé de Google, c'est la tétanie de Google. la tétanie qui n'a pas duré très longtemps mais qui a quand même été très marquée devant l'intelligence artificielle. Google a été pris de court et ça c'était parce qu'ils avaient effectivement une compétence distinctive en matière de recherche sur le web qu'ils ont su effectivement transformer sous plein d'aspects mais au fond ils n'ont pas été capables de remettre en cause ce modèle dominant qui constituait effectivement leurs ressources distinctives, leurs compétences distinctives principales, et ils ont été pris de court par cette nouvelle technologie. Ils sont en train de réagir, de s'y adapter, ils ont beaucoup de moyens. Mais ça a été quand même un moment où on a bien vu qu'il y avait une remise en cause en profondeur du modèle. Et là, pour le coup, on retrouve un peu… un peu stratégie océan bleu, parce que c'est vrai qu'au départ, l'intelligence artificielle et notamment ChatGPT, OpenAI, ont créé un océan bleu dans lequel personne n'avait rien vu venir. Tout le monde était à peu près prêt,

  • Speaker #1

    mais personne n'était sorti.

  • Speaker #0

    Voilà, exactement. Et alors, malheureusement pour ChatGPT... Et OpenAI, on n'est plus du tout dans l'océan bleu et tout le monde s'est engouffré, donc c'est en train de devenir un océan rouge vif. Donc ça, c'est très difficile et d'ailleurs, Kim et Mauborgne, les deux auteurs de ce stratégie océan bleu, c'est un sujet sur lequel ils consacrent les plus longs développements. C'est comment est-ce qu'on préserve son océan bleu parce que c'est ça qui est le plus difficile finalement. Ce n'est pas d'innover au départ, c'est d'arriver à maintenir. des barrières à l'entrée suffisantes pour que son innovation de départ continue à nourrir le à nourrir le développement de l'entreprise sans que la concurrence puisse vraiment rivaliser. Bon donc clairement la stratégie bambou elle n'entend pas être un modèle dominant, portaire à des vertus, stratégie océan bleu à des vertus, il y avait un espèce de trou. entre les deux, qui est vraiment lié à cette théorie des compétences distinctives, qui n'était pas convenablement vulgarisée en quelque sorte. Et le mérite de Véronique, c'est effectivement d'avoir trouvé cette métaphore qui est très parlante et qui convient parfaitement à cette forme de stratégie et qui peut permettre, je dirais, au plus grand nombre, c'est-à-dire au manager, de comprendre. comment on peut faire pour finalement avoir ce type de développement sans risquer la catastrophe. Parce qu'il faut bien voir que le foisonnement, quand il n'est pas suffisamment enraciné dans une compétence distinctive, il t'expose effectivement à la catastrophe. C'est-à-dire que s'il n'y a pas un fil conducteur clair…

  • Speaker #1

    Un peu par terre dans ton essence, oui.

  • Speaker #0

    Voilà, exactement. S'il n'y a pas un fil conducteur clair et des compétences distinctives qui sont ce fil conducteur clair, alors c'est clair que… Évident que les stratégies de conglomérat sont en général assez nocives. Elles sont d'ailleurs assez fortement sanctionnées par les bourses. Mais elles peuvent avoir une explication patrimoniale. Mais grosso modo, sur le plan strictement industriel, c'est rarement un succès. Il y a des entreprises qui font des stratégies bambou sans qu'on le voit vraiment. Par exemple, le groupe Michelin, on se dit qu'ils font des pneus. Oui, sauf que faire des pneus de vélo, faire des pneus de tracteur et faire des pneus d'avion… effectivement c'est toujours des pneus mais les technologies n'ont rigoureusement rien à voir. Et clairement, en réalité, les compétences distinctives qui sont essentiellement la chimie du caoutchouc, les alliages, etc., tout ce qui ont permis à Michelin d'être le géant qui... qu'il est et c'est une forme de stratégie bambou, on pourrait presque dire cachée, parce qu'au fond, à l'œil nu, quand on regarde de l'extérieur, on se dit, ben oui, ils font des pneus, et donc ils font tous les pneus possibles et imaginables, mais en réalité, ce n'est pas aussi simple que ça, et ça suppose effectivement de bien comprendre quelles sont ces compétences distinctives pour être capable justement de faire tous ces pneus qui sont en réalité très différents les uns des autres.

  • Speaker #1

    Puis effectivement, ça pose des questions d'organisation qui sont capables d'accepter ça. Ça pose des questions de culture de ces organisations aussi. Enfin voilà, parce qu'aujourd'hui, beaucoup restent sur une idée. C'est un truc que j'ai encore entendu très récemment sur la bonne stratégie, c'est more. pour 70%, Better pour 20% et New pour 10%. C'est-à-dire, on fait plus de ce qui marche et là, on y met 70% du budget. On améliore les process et on y met 20% de notre budget et on fait du New pour 10%, histoire de s'assurer pour l'avenir. Là, la logique du bambou, c'est quand même, quand on parle de prolifération et l'image du bambou pour ça est très bien trouvée, parce que ça part effectivement, des tiges de bambou,

  • Speaker #0

    il y en a plein. Exactement, et effectivement, on parlait d'organisation bambou, on a moins creusé le sujet, mais c'est clair qu'il y a des organisations qui savent faire ça et d'autres moins, parce que ça nécessite effectivement dans l'entreprise. une forme d'agilité qui va très au-delà des théories agiles, etc. C'est-à-dire qu'il faut vraiment, tu vois, quand on fait à la fois de la photo et du médicament, c'est quand même arriver à réconcilier ça sous une même culture, sous des organisations compatibles, etc. C'est effectivement difficile. Et je pense qu'il y a un vrai sujet de réflexion sur quelles sont les organisations qui sont compatibles. capables de supporter ça on retrouve d'ailleurs des grands débats de du management et de la stratégie 1 c'est le dilemme explorer exploitation exploration comment est-ce qu'on concilie dans le quotidien comme l'a soulevé james march le l'excellence dans l'exploitation c'est à dire dans l'opéra dans les opérations et puis L'excellence dans l'exploration, c'est-à-dire dans l'innovation, dans la découverte des métiers futurs, etc. James March, il y a déjà longtemps, dans les années 90, a souligné que ça mobilisait des compétences stratégiques justement à ses opposés. Et donc cette question de l'organisation Bambou, comment faire pour supporter ce foisonnement, se pose. Et moi je suis très frappé, tu sais, je vais tous les ans. dans la Silicon Valley avec la promotion d'HEC Entrepreneur. Et donc j'ai eu la chance, ça fait 14 ans que j'y vais, j'ai eu la chance de voir certaines entreprises, pas complètement à leur début, mais en tout cas beaucoup plus petites qu'elles ne le sont aujourd'hui, étaient quand même très frappées de voir celles qui restent finalement. entrepreneurial, on pourrait dire, parce qu'on voit, parce que quelque part, derrière ce foisonnement, il faut garder une espèce de dynamisme entrepreneurial et celles qui, petit à petit, sont contaminées par l'effet de taille et deviennent plus ou moins des bureaucraties. C'est assez frappant.

  • Speaker #1

    Il y en a une qui te vient à l'esprit où tu te dis, tiens, celle-là, elle est restée dans l'esprit startup ?

  • Speaker #0

    Alors... Alors, je trouve que jusqu'à une période assez récente, Google était vraiment resté dans une forme d'esprit start-up et ils étaient très obsédés par l'idée qu'il ne fallait surtout pas qu'ils deviennent une bureaucratie malgré leur taille. Ça a été un peu bousculé par les débats sur l'intelligence artificielle, aussi par… les attaques régulières dont a fait l'objet Google par les autorités concurrentielles du monde entier. Et donc, je n'ai pas eu de contact récent avec Google pour savoir si... Mais tu vois, par exemple, il y a une entreprise qui m'a beaucoup frappé dans la Silicon Valley qui était LinkedIn. LinkedIn, c'était au départ, j'ai eu la chance de voir LinkedIn relativement au tout début. Et je me rappelle d'un... Une rencontre avec le CTO de LinkedIn, le tout premier, qui était un des 20 premiers salariés de la boîte et qui était évidemment aussi un associé et qui était incroyablement entrepreneurial, enfin qui était vraiment presque la caricature de l'entreprise. Il était d'origine coréenne et il était la caricature de... de l'américain, de la côte ouest, originaire d'Asie, extraordinairement dynamique, etc. Et aujourd'hui, quand je visite LinkedIn, qui a été, comme tu le sais, racheté par Microsoft, je suis frappé de voir à quel point c'est devenu une bureaucratie. Alors, il faut reconnaître qu'eux, ils ont cet effet réseau qui fait qu'effectivement, alors pour le coup, ils sont dans la stratégie océan bleu, c'est-à-dire qu'il n'y a pas de concurrents, ils sont vraiment dans une espèce de situation de monopole. qui devient d'ailleurs très compliqué à challenger parce que c'est difficile d'avoir un deuxième LinkedIn, via Deo en son temps s'y est cassé les dents. Mais malheureusement, cette position de monopole, c'est un sujet que ne traite pas non plus complètement Kim et Mauborgne dans Stratégie Océan Bleu. Quand on arrive à se prémunir finalement, soit par la technologie, soit par d'autres... de procédés, soit presque naturellement par l'effet réseau comme c'est le cas de LinkedIn, quand on arrive à se protéger de la concurrence et qu'on reste dans cette situation de monopole, le Kim et Mubar ne nous disent pas comment on fait pour éviter de s'installer dans cette position confortable et de devenir progressivement une bureaucratie qui perd, parce que c'est clair que c'est quand même la concurrence qui est à tout moment de stimule et t'empêche de t'encrouter. dans une forme de bureaucratie et là tu vois je pense que là aussi il ya matière pour réfléchir à ce que c'est qu'une organisation qui resterait dans son océan bleu mais tout en restant très très innovante et sans sombrer dans une forme de bureaucratie donc la question de l'organisation elle est toujours assez présente derrière la réflexion stratégique qu'est ce qui permet finalement comment une organisation arrive à supporter la stratégie gagnante qu'elle a trouvée. Donc, c'est une question importante du management.

  • Speaker #1

    Dans votre ouvrage, est-ce que vous détaillez soit des outils ou des process très opérationnels ? Tu vois, typiquement, on parlait des compétences distinctives. des racines. Est-ce que vous avez un process de didération, de recherche pour essayer de les identifier ?

  • Speaker #0

    Est-ce que vous avez développé des matrices ? Là-dessus, Véronique a beaucoup plus travaillé que moi. C'est le sujet essentiel. C'est comment tu identifies ces compétences distinctives et comment tu les durcis. Elle a développé pas mal d'outils. Il y a pas mal d'outils. pas d'outils magiques, il n'y a pas de matrice. C'est hyper décevant. On est très convaincus, Véronique et moi, que si tout se résumait dans la stratégie par des petits outils magiques, avec des tableaux et des trucs...

  • Speaker #1

    Une jolie matrice, tu poses des points et c'est bon,

  • Speaker #0

    tu l'as. On serait tous riches, puisqu'il suffirait d'appliquer la matrice pour réussir, ce qui malheureusement n'est pas tout à fait aussi simple. Bon, voilà. Mais on donne en quelque sorte un peu des fils conducteurs ou en tout cas des contre-exemples pour montrer que cette analyse des compétences distinctives ne va pas de soi et que bien les comprendre, c'est un travail qui peut être long et compliqué. Moi j'ai un exemple d'ailleurs dont je me souviendrai toujours, j'intervenais dans une... PME qui existe toujours, qui faisait des emballages pour des emballages monodoses pour des échantillons publicitaires. Et les échantillons publicitaires, les publicitaires rivalisent évidemment quand il s'agit de parfums, de produits de beauté etc. d'imagination pour faire effectivement l'emballage monodose le plus spectaculaire, celui qui celui qu'on retient au moment où on le reçoit. Et derrière ça, il y a évidemment des sujets techniques qui sont souvent compliqués, de thermoformage, qui ne sont pas simples. Et cette chef d'entreprise, quand je lui demandais de formuler, c'était une femme, quand je lui demandais de formuler quel était son avantage concurrentiel, elle me disait « nous, on trouve toujours la solution » . Quand on nous pose un problème particulièrement compliqué que les autres n'arrivent pas, on trouve toujours la solution. Alors je lui dis, oui, mais la question c'est un peu comment vous la trouvez ? Parce que dire on trouve toujours la solution, c'est sympathique, mais comment vous faites ? Et donc elle était incapable de répondre à cette question. Et donc moi je me suis attaqué à cette question, et effectivement c'est une PME, et donc j'ai été dans l'atelier, j'ai essayé de comprendre comment, quand il recevait une commande complexe, Comment ils trouvaient cette fameuse solution ? Et cette compétence distinctive, elle se constituait autour d'un trio dont je me souviens très bien de trois hommes. Il y avait un régleur machine, un ingénieur et un troisième larron. Je ne me souviens plus exactement quelle était sa fonction. Mais en tout cas, il y avait un espèce de petit trio qui effectivement... parce qu'ils fonctionnaient bien ensemble, parce qu'ils avaient des compétences très complémentaires, trouvaient des solutions innovantes aux problèmes que posait le client. Et donc, une fois que j'avais fait ce constat, j'ai dit, écoute, je crois que j'ai trouvé ce fameux endroit où ça se passe dans l'entreprise, là où on trouve cette solution miracle qui fait ton avantage concurrentiel. Mais ça m'inquiète beaucoup parce que finalement, ça repose sur trois individus qui demain matin peuvent disparaître. qui demain matin peuvent décider de quitter l'entreprise, etc., de partir en retraite ou je ne sais quoi. Et donc, cette question de ton avantage concurrentiel qui se formule en disant on trouve toujours la solution me paraît incroyablement fragile parce que reposer sur les épaules de trois individus brillants qui fonctionnent bien, mais jusqu'à quand ? Et donc, c'était un exemple. Pour expliquer que quelquefois, la compétence distinctive, puisqu'en fait, cet avantage concurrentiel s'enracinait dans cette compétence distinctive, je sais trouver une solution innovante au problème, au cahier des charges que pose le client pour son emballage monodose public promotionnel, ça reposait sur, en quelque sorte, le savoir-faire de trois individus qui se combinaient harmonieusement. et qui était donc très difficilement reproductible. Et donc, souvent, quand on identifie comme ça des compétences distinctives, la bonne question, c'est de se dire, c'est distinctif, d'accord, mais est-ce reproductible ? Et tu vois, c'est une question, distinctif, c'est le plus important, mais en réalité, il faut arriver à se convaincre que c'est reproductible. Et dans le cas que je cite, Cette compétence distinctive, elle était bien réelle, c'est ce qui faisait le succès de l'entreprise. Elle n'était pas reproductible, elle était difficilement reproductible et elle était donc fragile. Et donc, enraciner la compétence distinctive, ça veut dire, dans cet exemple-là, effectivement construire le système qui permet à chacun de ces trois individus d'avoir un successeur, d'être capable de... de combiner la génération suivante d'arrivée, et donc de combiner à nouveau des compétences de formation, des compétences de recrutement, etc., qui, au fond, étaient un peu cachées. Pour consolider cette compétence distinctive qui existait dans cette organisation, il fallait en cultiver d'autres, qualité du recrutement, qualité de la formation interne, etc., dont on n'avait pas d'ailleurs forcément les moyens, cette petite entreprise. Et c'est ça que ça veut dire, consolider, enraciner ces compétences distinctives. C'est vraiment l'idée de les rendre indestructibles. Or, dans le cas que je cite, qui me revient à l'esprit, elles étaient loin d'être indestructibles puisqu'elles étaient vulnérables au départ d'un des trois. Et donc, finalement, quand on dit identifier ces compétences distinctives, ce n'est pas toujours simple. Quand ma chef d'entreprise disait, on trouve toujours la solution, ben oui, mais comment ? Et deuxièmement, consolider, ça veut dire une fois qu'on a compris comment finalement ça se constituait, cette compétence distinctive, en l'occurrence cette alchimie un peu mystérieuse entre trois individus, comment tu la perpétues, c'est-à-dire finalement comment tu la rends indestructible, comment tu la rends transmissible. Et ça c'est difficile.

  • Speaker #1

    Ok, vous l'aurez compris, tu dis la stratégie du bambou ou la stratégie bambou ?

  • Speaker #0

    C'est un peu les deux. J'ai la stratégie bambou parce que la traduction en anglais c'est bambou strategy et donc voilà du coup on dit stratégie bambou.

  • Speaker #1

    Parce que tu vois je me suis amusé avant de commencer à regarder les caractéristiques des bambous. Croissance rapide, très résistant, s'adapte à tous les environnements, agressivité de prolifération. Et un truc intéressant c'est qu'il y a plus de 1000 espèces de bambous. Et je trouve que pour un outil de stratégie, dire que finalement, oui, il y a une grande famille qui peut être la stratégie bambou, mais qui peut se décliner sur 1000 business case,

  • Speaker #0

    ça donne quelque chose d'intéressant. Et tu vois, entre l'exemple de cette petite PME Amazon et Fuji, c'est effectivement des types de bambou qui sont très différents.

  • Speaker #1

    Ok, ça me va. Donc, courez vers tous les bons livraires pour acheter cet excellent ouvrage. Si tu veux bien, on prend un petit peu de temps pour parler de toi. Déjà, comment ça se fait que tu as atterri à Saint-Cyr ? C'est quoi l'histoire derrière ça ?

  • Speaker #0

    Alors écoute, Saint-Cyr, c'est je pense une histoire de vocation. Il y a un côté... assez simple qui était que j'avais pas envie d'être dans un bureau, j'avais pas envie d'être ingénieur, je rêvais de grand air et de mouvement comme on dit. Bon alors il n'y a pas que l'armée pour effectivement ça, mais simultanément, moi j'ai vécu en mai 68 une période assez étonnante, j'étais au lycée Saint-Louis, à Paris, donc en plein cœur du quartier latin, et j'ai vu ma génération envoyer des pavés, rêver d'avoir cette espèce de révolution existentielle qui s'est terminée au mois de juin, mais qui a été suivie d'un épisode qu'on oublie un petit peu, mais qui était quelques semaines plus tard, l'envahissement de la Tchécoslovaquie par les chars russes, à la suite de l'équivalent du printemps de mai 68, le fameux printemps de Prague qui a été noyé dans le sang par les soviétiques de l'époque, les russes d'aujourd'hui. Et ça, ça m'a beaucoup frappé. Je me suis dit, nous on lance des pavés, On dit sous les pavés la plage, on a cette espèce de rêve existentiel, etc. Et pendant ce temps-là, à grosso modo 800 km de Strasbourg, il y a des chars soviétiques qui écrasent les libertés, des gens meurent pour défendre leurs libertés, etc. Et ce décalage m'a paru incroyablement étonnant. et au fond a été probablement le fait déclencheur de ma vocation militaire. Je me suis dit, on ne peut pas faire ce constat et s'en contenter. Il y a un moment donné où si tu fais ce constat, tu te dis, bon, ok, qu'est-ce que je fais maintenant ? Alors, il y a plusieurs voies, il n'y a pas que la voie militaire, tu peux aussi te lancer dans l'action politique.

  • Speaker #1

    Non, mais c'est une voie qui a du sens.

  • Speaker #0

    Oui. de lancer dans la voie politique et dire je vais attirer l'attention du monde entier sur le danger que constitue, etc. Mais la façon la plus simple, c'est de se dire, si je fais ce constat-là, la première chose qu'il faut faire, c'est mettre sa peau au bout de ses idées, comme disait le capitaine Sergent. C'était une formule qu'il utilisait, mettre sa peau au bout de ses idées. Et donc, ça a été un peu mon réflexe.

  • Speaker #1

    Et ça a été quoi, ta carrière militaire, alors ?

  • Speaker #0

    Alors, écoute... J'ai fait une carrière militaire assez courte, puisque je suis parti comme jeune capitaine. Donc, j'ai fait Saint-Cyr, puis mon école d'application dans l'artillerie, et ensuite mon temps de commandement.

  • Speaker #1

    Artillerie comme Napoléon, grand stratège, si vous en avez.

  • Speaker #0

    Mais oui, exactement. Alors, je suis parti pour une raison d'ailleurs tout à fait claire. Ce que je voulais, c'était être pilote d'hélicoptère. Donc, à l'époque... pour être pilote d'hélicoptère il fallait commencer par choisir une arme. En l'occurrence, j'ai choisi l'artillerie et puis ensuite on basculait vers l'aviation légère de l'armée de terre, les hélicos, ce qui n'est plus le cas aujourd'hui. Aujourd'hui on peut choisir la latte, l'aviation légère de l'armée de terre, les hélicos comme une arme à part entière dès la sortie de l'école. Ce n'était pas le cas de mon temps. Et donc, je suis arrivé à l'école de Dax, qui, comme jeune capitaine, qui est l'école de formation des pilotes. Et là, j'ai eu un épisode malheureux, vocation un peu contrariée, puisque j'ai fait un épisode d'hypertension artérielle. Donc, j'étais inapte médicale pour cause d'hypertension artérielle. Bon, j'ai essayé de faire ce qu'il fallait pour... Et puis ça n'a pas fonctionné, on ne traitait pas aussi bien probablement qu'aujourd'hui l'hypertension artérielle à l'époque. Et puis j'ai un peu passé mon tour parce que si tu veux dans ce système, chaque promotion de Saint-Cyr amenait son lot de pilotes potentiels. Et donc je ne pouvais pas reprendre le train l'année suivante. Et donc j'ai sur cette... déception j'ai décidé de quitter l'armée en me disant bon ben voilà j'ai l'artillerie c'est bien mais je me vois pas artilleurs toute ma carrière j'avais ce rêve de pilote d'hélico ça se fait pas bon ben il faut il faut en tirer les compétitions et voilà et donc j'ai alors j'ai appris à piloter un les hélicos depuis bon j'ai voilà je suis devenu pilote d'hélico sur le tard puisqu'en fait c'est de chc un beau jour sur le Au coup de mes 65 balais, ou 64, je ne sais plus, je me suis dit, quand même... Tu en es à 64 ans ! Je ne vais pas rester sur cette frustration. J'ai tout su le noble qui est juste à côté d'HEC. Je vais aller faire un tour, voir si on peut. Puis finalement, j'ai appris à piloter. C'est génial ! Tu sais, j'ai eu ce drame personnel qui est... avec mon meilleur ami d'enfance, Olivier Dassault, s'est tué, lui, aux commandes de son hélicoptère. Et donc, ça m'a un peu refroidi. Et du coup, j'ai appris. Et donc, je ne suis pas resté sur cette frustration. J'avais eu la chance d'apprendre à piloter les avions dans l'armée parce que dans la perspective de la latte, on avait des facilités pour... pour passer le brevet avion avant de rejoindre l'école de Dax. Ce que j'ai fait, j'ai continué à pas mal piloter les avions, mais effectivement, je n'avais pas passé ce...

  • Speaker #1

    En tout cas, il n'est jamais trop tard. Voilà, il n'est jamais trop tard.

  • Speaker #0

    Il n'est jamais trop tard. Ça, c'est un grand principe.

  • Speaker #1

    On entend souvent dire que les entrepreneurs, les dirigeants d'entreprises doivent ou pourraient s'inspirer des militaires. Toi, tu en penses quoi ? Qui a été les deux ?

  • Speaker #0

    Oui, oui, oui, je pense qu'effectivement, il y a des analogies. D'abord, la stratégie, la stratégie elle-même, c'est d'abord une science militaire. Et les grands auteurs, les grands auteurs sont effectivement, parlent de la guerre, que ce soit Clausewitz, le plus connu, mais plein d'autres qui... On parlait de la stratégie et la stratégie d'entreprise est née à la suite de la Deuxième Guerre mondiale, comme tu le sais, parce que les chefs d'entreprise américains ont été très impressionnés par la capacité des militaires à gérer des grandes opérations comme celle du débarquement, etc. Et se sont dit, il faut absolument qu'on arrive à gérer nos entreprises de la même façon. Donc oui, il y a une filiation assez claire entre... entre l'art militaire, si on l'appelle comme ça, et le management. Je pense qu'il y a effectivement, on pourrait tout à fait classer quelques grands auteurs, comme bien sûr Clausewitz, mais aussi dans une certaine mesure Machiavel, dans les grands auteurs, dans les grands penseurs du management, parce qu'en réalité, qu'est-ce que c'est que le management ? Le management, c'est conduire l'action collective. Et conduire l'action collective dans une situation très particulière qui est celle de la guerre, c'est quand même le métier des militaires. Donc la conduite de l'action collective, c'est le point commun entre le manager et le militaire.

  • Speaker #1

    Et puis ils ont quelques années d'expérience en la matière. Et puis c'est pas prêt de s'arrêter a priori, vu ce qu'on entend en ce moment. Donc après, tu retournes à l'éthique.

  • Speaker #0

    Alors du coup, après, tu sais, la vie est toujours finalement un enchaînement de circonstances et de choses un petit peu étonnantes. Après, en sortant de l'armée, j'avais la chance d'avoir Olivier Dassault, le petit-fils de Marcel Dassault, comme copain d'enfance. Lui avait fait l'école de l'air pendant que moi, je... Je faisais Saint-Cyr, voilà, et donc son grand-père, Marcel Dassault, qui aimait beaucoup son petit-fils, avait aussi un peu de tendresse et d'affection pour moi, qui considérait que j'étais un peu le bon génie de son petit-fils préféré, parce que c'est moi qui lui avais suggéré de faire l'école de l'air, ce qu'il avait trouvé une très très bonne idée. Et donc assez vite, il m'a dit, mais... Voilà, si vous quittez l'armée, venez donc travailler avec Olivier et la famille. Et donc, effectivement, j'ai rejoint le groupe Dassault. Et ça a été ma première rencontre déterminante avec l'entrepreneuriat. Parce que d'abord, tu as 28 ans.

  • Speaker #1

    Parce que tu as commis beaucoup d'ouvrages autour de l'entreprise familiale.

  • Speaker #0

    Oui, oui, oui, absolument. Et alors, ça a été effectivement cet épisode, ce premier épisode de ma carrière, on va dire, civile, m'a fait à la fois découvrir un entrepreneur totalement hors normes, qui était Marcel Dassault, m'a fait moi-même passer à l'action, puisqu'avec Olivier, on a créé une première entreprise dans le domaine de la communication. On s'est transformé, lui et moi, en entrepreneur. Et puis, il m'a fait aussi découvrir effectivement les entreprises familiales, ce souci de la pérennité des entreprises familiales.

  • Speaker #1

    Parce que dans les 14 bouquins, il y en a quelques-uns là-dessus.

  • Speaker #0

    Oui, absolument. Ce modèle de… Oui, parce que si tu veux, je pense que la pérennité, cet objectif de pérennité que… poursuivent assez naturellement les entreprises familiales, mais qui n'est pas réservé aux entreprises familiales. Il y a des entreprises auxquelles j'ai consacré un livre aussi qui ne sont pas des entreprises familiales et qui appliquent un peu ce modèle de la pérennité. Pour moi, la pérennité, ça dessine un modèle de capitalisme différent, un modèle de capitalisme qu'on pourrait baptiser durable au sens strict du terme. Parce que quand tu te donnes comme objectif non pas la performance à court terme, mais la pérennité à long terme, ce qui n'est d'ailleurs pas incompatible, on a besoin de la performance à court terme pour nourrir la pérennité à long terme, mais c'est une question de hiérarchie des priorités. Si tu priorises la pérennité à long terme, alors clairement tu as forcément un comportement avec tes parties prenantes. que ce soit tes salariés, que ce soit tes fournisseurs, que ce soit l'environnement, qui est profondément différent et qui est marqué au saut du respect. Parce que finalement, si tu t'inscris dans le temps long, tu respectes et tes salariés, et tes fournisseurs, ton environnement, parce que tu sais que ton projet, c'est de durer autour de ces parties. C'est compatible ?

  • Speaker #1

    Pardon ? C'est compatible, tu penses, justement, avec une logique de stratégie bambou ?

  • Speaker #0

    Alors, oui. On va couper plusieurs bouquins ensemble. C'est un débat que j'ai avec Véronique. Pour moi, les organisations bambou, en réalité, cachent des organisations pérennes, des organisations qui priorisent la pérennité. Parce que finalement, le bambou, c'est, tu vois, à la différence de l'océan bleu qui cherche un peu à défendre le territoire non concurrentiel, la stratégie bambou, elle vise... au fond, davantage à être indestructible. Et quelque part, c'est une autre façon de dire qu'on vise la pérennité. Et donc, j'ai effectivement, moi, écrit un livre récemment, le dernier en date, qui s'appelle « La pierre et l'édifice » , où je pars de l'épisode de l'incendie de Notre-Dame pour faire une descente en profondeur dans l'organisation de la brigade des sapeurs-pompiers de Paris. et montrer comment cette organisation a su cultiver tous les ingrédients de la pérennité. Et c'était intéressant de partir d'une organisation non marchande pour montrer que cette question de la pérennité dépassait en réalité la sphère strictement commerciale et marchande, et était quelque part un peu, entre guillemets, sociétale. Et oui, c'est un débat que j'ai avec Véronique. Je lui ai dit, je pense que si tu... Si on creuse ensemble ou si tu creuses toi toute seule les caractéristiques de ces organisations bambou, elles vont ressembler comme deux gouttes d'eau aux organisations telles que j'essaye de les démonter, qui sont les organisations qui visent cette pérennité, sachant que dans ce livre, La pierre et l'édifice, on a cherché avec mon co-auteur à véritablement donner des outils pour le coup, pour ce... Pour s'étalonner sur le champ de la pérennité, il y a neuf dimensions managériales qui permettent vraiment de durcir cette pérennité. Et on a vraiment essayé de montrer comment on pouvait, autour de ces neuf dimensions de la pérennité, construire durablement finalement l'édifice de l'entreprise pérenne.

  • Speaker #1

    À un moment va arriver l'opportunité de co-fonder, pas facile à dire, XHEC Entrepreneur.

  • Speaker #0

    Alors avant, il y a quand même tout l'épisode, si tu permets, d'entrepreneur. C'est-à-dire que j'ai créé... Oui,

  • Speaker #1

    mais là, tu as du temps ? Moi, j'ai du temps.

  • Speaker #0

    Non, mais juste pour rappeler que j'ai été entrepreneur ensuite tout seul. Je l'ai été d'abord avec Olivier. Et puis ensuite, quelques années après, j'ai créé effectivement une entreprise appelée l'Annuaire Soleil, qui était une entreprise qui a eu l'hôtel des annuaires du téléphone. Quand je raconte ça aux étudiants, ça me donne instantanément un coup de vieux. Je suis désolé,

  • Speaker #1

    mais oui.

  • Speaker #0

    Les annuaires du téléphone ont été créées.

  • Speaker #1

    Tu as appris à piloter un hélicoptère à 62 ans, 63 ans ?

  • Speaker #0

    Oui, c'est ça.

  • Speaker #1

    C'est bon, tout le monde a compris que tu n'avais pas 18 ans.

  • Speaker #0

    Donc Google a effectivement tué cette activité des pages jaunes. C'est 90% du chiffre d'affaires mondial des pages jaunes en 2005 qui était de 50 milliards de dollars à peu près de recettes publicitaires. Aujourd'hui, 90% de l'équivalent sont dans les comptes de Google. Google, quand tu réfléchis, c'est exactement des pages jaunes. Tu cherches sur les cartes. les coordonnées, c'est vraiment des pages jaunes électroniques. Nous, en France, on avait inventé le Minitel, mais Google a fait quand même beaucoup mieux, évidemment. Et donc, j'ai eu cette expérience très complète de création de boîte, en levant des fonds, en affrontant la concurrence de France Télécom de l'époque qui est devenue orange. en vendant mes actions au bout du compte au groupe Bouy quand il est rentré dans les télécoms. Donc, j'ai fait ce parcours avant de devenir prof, puisque l'histoire, c'est qu'en 1996, j'ai 45 ans et j'ai effectivement fait ce parcours entrepreneurial très intense.

  • Speaker #1

    Tu as vendu au bon moment quand même, non ?

  • Speaker #0

    Oui, alors effectivement, oui, gagner.

  • Speaker #1

    Cinq ans plus tard, ça commençait à vraiment pas sentir bon.

  • Speaker #0

    Un peu plus, parce que j'ai un de mes associés qui s'appelait Olivier Vincent, qui était un jeune étudiant que j'avais croisé justement à HEC, qui lui a refait l'annuaire soleil, ou l'équivalent à Vancouver au Canada, puisqu'en fait, il a été entre-temps le patron des opérations d'annuaire du... téléphone de la compagnie GTI, qui était l'équivalent de France Télécom en Colombie-Britannique. Et ensuite, il lui a fait concurrence, donc il a un peu reproduit le modèle. Et lui a vendu très bien sa boîte, mieux que je ne l'ai fait d'ailleurs à Bouygues, en 2005. Donc, le vrai moment du retournement, c'était 2006-2007, où on a commencé à comprendre. Et donc, c'est vraiment lui qui a vendu le meilleur moment, parce que je pense qu'après, c'était compliqué. Et donc, 1995... Il n'y avait pas encore Internet, j'avais aucune envie d'être salarié, je n'avais pas trop d'idées de création de boîte, j'avais quand même pas mal souffert, c'était un parcours très intense, et donc j'avais toujours enseigné en amateur, bon, HEC Entrepreneur déjà, parce que Robert Papin, le fondateur de ce programme, nous avait recruté, Olivier Dassault et moi, à la suite de notre première création, en disant, mais j'ai... venez encadrer des équipes, etc. Donc, j'ai connu HEC Entrepreneur, je dirais, du côté des entrepreneurs qui sont les tuteurs de nos étudiants dans notre pédagogie distinctive qui est cette pédagogie Learning by Doing que nous déployons depuis maintenant 45 ans. Et donc, je suis effectivement devenu presque par hasard prof professionnel, je suis passé de la catégorie amateur à la catégorie professionnelle, grâce à une première maison pour laquelle j'ai beaucoup d'affection et de reconnaissance, qui était le Conservatoire national des arts et métiers. Le Conservatoire national des arts et métiers a mis au concours une chaire de marketing et de vente, à laquelle j'ai postulé à la sortie de mon... L'aventure Annuaire Soleil qui était une aventure très orientée vente. J'avais une force de vente d'une cinquantaine de vendeurs. Quand j'étais le patron des pages jaunes de France Télécom, avant de créer l'Annuaire Soleil, la boîte concurrente, j'avais une force de vente, j'ai dirigé une force de vente qui comportait 1500 vendeurs. Donc de temps en temps, je rencontrais mes copains de Saint-Cyr, je leur disais, écoutez, moi je... Je ne commande pas de régiment, mais je commande une armée de vendeurs. Et donc, j'ai été effectivement élu sur cette chaire nouvellement créée de marketing et de vente. Et je suis devenu en quelque sorte un vrai prof à ce moment-là. Et grâce au CNAM, ce que je n'oublie pas, j'ai enseigné au CNAM pendant 20 ans. Et j'ai beaucoup appris, y compris... la recherche, parce que les professeurs du CNAM sont, pour la plupart d'entre eux, des professionnels qui intègrent l'enseignement supérieur à mi parcours professionnel, mais on est entouré, une chaire, c'est une équipe avec des maîtres de conférences, et on fait de la recherche, et donc, c'est un peu, c'est assez drôle d'ailleurs, parce qu'au CNAM, c'est un peu les maîtres de conf, les maîtres de conférences qui forment les profs, parce que finalement, les profs...

  • Speaker #1

    Avec l'expérience, c'est rare.

  • Speaker #0

    Ils viennent avec leur expérience du business, mais ils sont ignorants de beaucoup d'éléments en matière de recherche académique en gestion, alors qu'il y a une espèce d'échange fertile qui se fait avec les jeunes profs maîtres de conférences et les plus vieux profs titulaires de chair comme je l'étais. J'ai eu beaucoup de bonheur à enseigner au CNAM, on enseigne à des adultes en cours du soir, des adultes qui sont souvent dans... dans des situations un petit peu compliquées professionnellement, pour qui le CNAM est une planche de salut, c'est souvent leur deuxième chance professionnelle, et c'est un auditoire très agréable. Je disais souvent quand j'étais à HEC et aussi au CNAM, puisque je me suis plusieurs années partagé entre les deux, que finalement je faisais... deux fois le métier de prof, mais que le CNAM était en quelque sorte l'antithèse d'HEC. C'est-à-dire que HEC c'est à la campagne, sur le campus de Jouy, le CNAM c'est en plein centre-ville, HEC c'est plutôt une institution qui est orientée vers le matin, on fait cours le matin alors que le CNAM c'est le soir, et surtout la grande différence c'est que la population d'HEC est quand même constituée de jeunes gens à la tête bien faite, mais plutôt issus des classes socialisées. Alors que le CNAM est peuplé de gens qui essayent de s'élever dans la société justement par la connaissance et l'apprentissage. Donc des expériences qui étaient bien...

  • Speaker #1

    Même côté HEC Entrepreneur, c'est le cas ? Ou est-ce qu'il y a un peu plus de diversité sociale sur HEC Entrepreneur qu'ailleurs ?

  • Speaker #0

    Alors c'est probablement un des programmes dans lequel il y a le plus de diversité sociale, mais on ne peut quand même pas dire que ce soit la diversité la plus... La plus frappante. Donc oui, je pense qu'il y a une vraie diversité professionnelle et puis on se donne beaucoup de mal d'ailleurs pour la nourrir parce qu'on pense que dans notre pédagogie, les étudiants travaillent beaucoup en équipe et on cherche toujours à constituer des équipes avec des cultures différentes. C'est-à-dire qu'on a un peu trois tiers dans nos promotions d'XHEC Entrepreneurs, un tiers qui vient de la grande école HEC. et un deuxième tiers qui sont des ingénieurs dont certains viennent de l'IX, mais d'un peu toutes les écoles d'ingénieurs, et puis un troisième tiers dans lequel il y a une population très diverse, d'étudiants étrangers, d'avocats, des formations tout à fait différentes, et on est très en demande de cette diversité de... de ce troisième tiers qui s'éloigne du moule des grandes écoles. Et on a toujours cherché à nourrir ce troisième tiers avec effectivement des étudiants venant des universités et de préférence ayant effectivement des origines sociales de type boursier, etc. Parce que finalement, c'est dans les échanges ensuite qui se constituent tout au long de l'année entre les étudiants. espèce de fertilisation croisée qui existe entre ces trois populations de commerçants, HEC, d'ingénieurs, et de ces troisièmes horizons universitaires ou étrangers, sont très clairement très fertiles.

  • Speaker #1

    Je pense que ça doit être une expérience assez incroyable, justement, déjà de le développer. de le fonder parce que des projets entrepreneurs, là pour le coup, t'en as vu si ce n'est des centaines beaucoup écoute,

  • Speaker #0

    on a un outil de communication entre les promos d'HEC Entrepreneur, on a un Slack inter-promotion dans lequel il y a un peu moins de 2000 étudiants qui sont en ligne et là Là-dedans, on a recensé à peu près 250 boîtes vivantes. Donc effectivement, oui, j'en ai vu passer, je dirais qu'en 14 ans, puisque j'ai dirigé ce programme pendant 14 ans, en 14 ans, à concurrence, dans les bonnes années d'une haute vingtaine de projets par an, alors certes, certains évidemment s'arrêtant. Et dans les mauvaises années d'une demi-douzaine, oui, j'ai vu passer probablement entre 200 et 300 boîtes et projets dont certains font ma fierté. J'y suis pas pour grand-chose d'ailleurs, parce que là-dedans... Non,

  • Speaker #1

    mais tu es un accompagnateur, c'est ce qu'on disait.

  • Speaker #0

    Oui, un accoucheur en fait, tu vois. Je suis un amalutite de la startup. Oui, exactement. Vraiment, le patron d'HEC Entrepreneur, c'est un mailloticien. Il fait accoucher les projets et il y en a effectivement qui font ma fierté, comme Doctolib, comme Front. On a quand même accouché d'une demi-douzaine de licornes, ce qui dans le paysage français n'est pas si mal.

  • Speaker #1

    Il y en avait dans lesquels tu ne croyais pas du tout et où vous faites tout le temps ?

  • Speaker #0

    Ah oui, alors là, je vais te dire… J'ai un nombre d'erreurs, c'est absolument impressionnant. J'ai d'ailleurs une étudiante que j'adore qui poste assez régulièrement, qui s'appelle Graffi Ramato. qui a un nom donc imprononçable, Sri Lankaise d'origine, et qui a créé une boîte qui marche très très bien qui s'appelle Paris New York, qui fait des burgers PNY, je ne sais pas comment elle prononce, mais en tout cas elle fait des burgers formidables, elle a maintenant 14 restaurants, elle fait près de 20 millions d'euros de chiffre d'affaires, c'est vraiment une... une très belle réussite dans le domaine du food. Elle a publié récemment, graphie, un post dans lequel elle raconte, parce que c'est vrai, que quand elle était HEC entrepreneur, je passais ma vie à dire que c'était une erreur de casting. Je disais, mais qu'est-ce que c'est que cette fille dont je n'ai pas entendu une seule fois le son de la voix, parce qu'elle était un peu timide, de toute l'année ? Comment on a pu recruter une fille comme ça ? Et donc, elle a fait un post sur LinkedIn en disant, quand j'étais HEC entrepreneur, Alain Bloch disait que j'étais une erreur de casting. Et maintenant, quand il m'accueille, parce qu'effectivement, je l'accueille régulièrement. Tu l'embrasse sur les deux joues. Oui, il m'accueille en me disant que je suis son erreur de casting préférée. C'est gentil. Effectivement, c'est un assez bon exemple où, franchement, je n'aurais pas mis un centime sur la carrière entrepreneuriale de graphie et c'était une grossière erreur. Je n'ai pas non plus vu venir le formidable succès de... d'Octolib, Mathilde Collin qui est la fondatrice de Front, une autre de nos licornes, a encore aujourd'hui l'air d'une jeune étudiante attardée. Elle a des longs cheveux comme elle avait quand elle était encore sur le campus alors que maintenant elle est mère de deux enfants et qu'elle a conduit cette boîte aux Etats-Unis de façon absolument exemplaire. Donc, j'ai vraiment pris l'habitude de considérer que les archétypes qu'on avait en tête sur les entrepreneurs et ceux qui étaient susceptibles de réussir étaient en général faux. Et qu'il fallait se méfier de ces archétypes.

  • Speaker #1

    Ah, tu as vu passer Pauline Légnaud aussi ?

  • Speaker #0

    Oui, oui, oui, absolument. De Gémio. Et son formidable projet Gémio et puis son formidable blog. J'espère qu'après la colle, je serai enfin invité par Pauline qui ne m'a jamais invité.

  • Speaker #1

    Pauline sur le... sur le podcast de Pauline, qui est effectivement un peu plus retentissant que la colle, mais tu vas voir, justement, c'est un marche-pied. Oui, bien sûr. Il y a beaucoup de discours qui glorifient l'échec comme une étape essentielle du succès. Toi, t'en dirais quoi, toi ?

  • Speaker #0

    Oui, glorifier l'échec, je ne sais pas s'il faut glorifier l'échec, mais il faut considérer que l'échec fait partie du parcours. et que si on n'est pas prêt à faire face à l'échec et éventuellement à le subir, il ne faut pas faire ce métier. Et d'ailleurs, nous, on a dans notre pédagogie et dans le parcours de nos étudiants ce fameux séminaire mission redressement dans lequel on immerge nos étudiants pendant cinq semaines dans une entreprise qui a effectivement déclarer sa cessation des paiements, qui est en période d'observation. Les étudiants travaillent aux côtés du dirigeant et de l'administrateur judiciaire à la construction d'un plan de redressement. Ça les amène à... On ne fait pas ça pour leur faire peur, on fait ça justement pour qu'ils regardent l'échec en face, d'une part, et d'autre part, qu'ils aient les bons réflexes, si la situation se présente et si, effectivement, ils sont confrontés à ce type de... à ce type de situation, puisque aujourd'hui, on peut quand même dire que la loi française est une loi qui est assez favorable à ceux qui savent anticiper, assez favorable aux entrepreneurs qui font face à des difficultés.

  • Speaker #1

    Ça m'amène à la... question ChatGPT parce que ça c'est toute nouveauté je fais screener par mes invités par ChatGPT, alors c'est pas vraiment ChatGPT, là c'est Perplexity en l'occurrence Perplexity que j'aime beaucoup d'ailleurs et je lui demande de trouver moi une question un peu soit touchy etc mais auquel j'aurais pas pensé et donc la question de Perplexity en l'occurrence ou de l'IA de manière générale ... a été. Alain, vous avez été juge au tribunal de commerce de Paris pendant près de deux décennies. Pensez-vous que le système judiciaire français est réellement adapté pour accompagner les entrepreneurs en difficulté ou favorise-t-il une approche punitive ?

  • Speaker #0

    Vas-y, débrouille pas avec ça !

  • Speaker #1

    C'est une très bonne question. C'est une question qui est particulièrement pertinente en ce qui me concerne, puisque dans mon parcours de juge, puis de président de chambre au Tribunal de commerce de Paris, j'ai effectivement eu l'honneur de présider la chambre qui était spécialisée dans les sanctions des dirigeants, et donc qui effectivement était ce volet répressif et punitif. Mais je dis avec beaucoup de force qu'aujourd'hui nous avons un dispositif qui n'est pas majoritairement punitif, qui est vraiment un dispositif qui permet aux entrepreneurs d'affronter les difficultés et de les surmonter. Bien sûr, il faut un dispositif punitif parce qu'il y a quand même des gens qui abusent du système et des gens qui déposent le bilan. après avoir encaissé des accomptes et qui disparaissent, qui remontent des boîtes, etc. Donc, on est bien obligé d'avoir effectivement un arsenal un peu répressif pour sortir du jeu ces entrepreneurs sans scrupules ou même empêcher de nuire des entrepreneurs particulièrement incompétents. dans leur propre intérêt quand on interdit de gérer. Non mais quand on interdit de gérer, il y a vraiment des gens qui ne sont pas faits pour ça, qui se lancent là quelquefois par nécessité parce qu'ils sont chômeurs de longue durée. Enfin bref, ils veulent s'en sortir, ce qui est très respectable. Mais clairement, de temps en temps, on se dit qu'il vaudrait mieux qu'ils fassent autre chose. Voilà. Et donc... Ce volet répressif, ce n'est sûrement pas le plus sympathique. Je suis devenu président de cette chambre de sanctions à Arculon parce qu'on ne rentre pas au tribunal de commerce pour sanctionner ses pairs. Mais j'avais un brief du président du tribunal qui était formidable, qui était de dire qu'on est trop répressif. Et donc, je te demande, toi qui as justement été entrepreneur, d'appliquer la loi avec... discernement et de construire un socle de jurisprudence qui permette d'être suffisamment répressif quand il le faut et qui ouvre la porte du rebond dans tous les autres cas. Voilà, donc fort de ce brief, effectivement, j'étais très content de présider cette chambre et je dis aujourd'hui très clairement que le dispositif... législatif de la loi de 2004 est un dispositif qui est bien utilisé, permet vraiment d'anticiper les difficultés, de les surmonter. C'est un outil formidable qui est très différent de la solution des anglo-saxons, le Chapter 11, qui a été, ce dispositif français a été critiqué parce que, on a considéré qu'il était un dispositif qui était très différent de la solution des anglo-saxons. tord toujours un peu le bras aux créanciers et singulièrement aux créanciers financiers les banquiers mais au total il je trouve qu'il permet quand même vraiment aux dirigeants de qui sait anticiper les difficultés et qui n'a pas peur du tribunal c'est à dire qu'ils osent franchir la porte du tribunal et tu sais que que dans le cours que je fais à lier c paris sur le campus d'orléans que tu diriges je fais un cours sur justement le leadership face aux difficultés qui se termine par une visite du tribunal de commerce de Paris, parce que je pense qu'il faut dédramatiser en quelque sorte ce lieu pour les futurs entrepreneurs. Je pense vraiment que la loi actuelle est très efficace pour surmonter les difficultés.

  • Speaker #0

    Ok, merci. Je transmettrai à Perplexity sa réponse.

  • Speaker #1

    Absolument.

  • Speaker #0

    Justement, moi j'ai un avis, je pense qu'il est assez partagé, c'est qu'aujourd'hui on vit une période d'opportunité pour l'entrepreneuriat grâce à l'IA. Est-ce que tu le penses aussi ? Et comment tu vois les prochaines années ?

  • Speaker #1

    Alors écoute, je ne suis pas devin et je pense que l'exercice prospectif, est un exercice à très haut risque, surtout aujourd'hui avec la rapidité avec laquelle se développent ces technologies, c'est quand même très très impressionnant dans ce secteur. Et donc je me garderais bien de faire un pronostic parce que comme tout outil technologique... complètement révolutionnaire, outil qui est finalement un aboutissement. Parce que moi, je me rappelle que dans ma thèse d'informatique, tu disais que j'étais docteur en informatique. Effectivement, je suis docteur en informatique. J'ai fait cette thèse à l'Université Paris-Dauphine juste après avoir quitté l'armée. Et en fait, je me rappelle que mon directeur de thèse, c'était le professeur Shekhroun, qui a porté effectivement à Dauphine les... premiers enseignements en informatique des organisations. Ils rêvaient qu'on fasse un espèce de tableau de bord de l'entreprise, un tableau de bord automatique. Ils disaient qu'il faudrait que les managers aient comme les pilotes d'avion des indicateurs permanents qui leur permettent. Donc ils rêvaient de ces outils un peu magiques, faits de traitement des données, d'intelligence des données, etc. qui deviennent presque d'actualité aujourd'hui, mais c'est quand même 40 ans plus tard. Et donc, c'est une forme de continuité, de continuation de toutes ces technologies, de l'information, l'intelligence artificielle, mais c'est effectivement un aboutissement, un aboutissement qui peut faire peur, je n'ai pas rentré dans ce débat, mais qui est un formidable outil, parce que bien sûr, Quand on interroge Perplexity, quand on utilise ChatGPT ou Cloud ou n'importe quel autre pour se faciliter le travail, c'est formidable. Mais il faut mesurer que l'intelligence artificielle appliquée par exemple au domaine de la santé ouvre des perspectives absolument inouïes. J'ai eu la chance il y a deux ans dans le voyage que je fais tous les ans dans la Silicon Valley d'être sur le campus de Stanford avec mes étudiants et d'assister à la conférence de deux. profs successifs de médecine qui étaient des experts de l'intelligence artificielle appliquée à la médecine qui étaient d'ailleurs des vieux messieurs qui avaient plus de 80 ans et l'un et l'autre qui étaient à l'américaine toujours profs, toujours chercheurs patrons de start-up tout à fait à l'américaine mais qui nous ont fait un exposé qui était absolument inouï sur le échec les perspectives de l'intelligence artificielle en matière de santé. Et là, ça ouvre des horizons totalement vertigineux, parce que s'il y a des maladies qu'on arrive à vaincre, on va clairement allonger la durée de vie humaine, mais ce faisant, on va aussi déstabiliser complètement nos systèmes de santé, le coût de nos systèmes de santé, nos systèmes de retraite. Enfin bref, si tu veux, je trouve qu'aujourd'hui, dessiner un horizon crédible, est un exercice à très haut risque.

  • Speaker #0

    D'accord. Mais est-ce que tu es d'accord avec moi qu'on vit une époque incroyable d'opportunités ?

  • Speaker #1

    Ah oui, une époque formidable. Non mais moi, je suis enthousiaste. Tu sais, j'ai fait écrire à Claude, à I, moi c'est l'intelligence artificielle que j'utilise le plus, Claude, et je lui ai fait écrire des poèmes. Je lui ai fait écrire un poème sur la détresse de l'entrepreneur confronté à l'échec, puisque tu parlais de ça. Et je lui ai demandé d'écrire ce poème à la façon de Baudelaire. Et je peux te dire que ce poème, il est inouï. Il est inouï de beauté, il est inouï de modernisme, il est incroyable. Et donc, évidemment, c'est un défi, parce qu'on se dit mais comment derrière ça un poète peut trouver finalement, peut arriver à trouver. Mais je trouve que c'est justement incroyable. Ça oblige l'homme à aller jusqu'au bout du bout de son véritable apport. C'est-à-dire cette créativité dont on n'est pas encore capable. Parce que là, en fait, quand Claude écrit un poème, il l'imite. Et donc, il combine des ressources qu'il a digérées. Et donc, l'intelligence humaine, c'est autre chose. Et donc... Donc, je crois que ça nous oblige à une réflexion sur ce que c'est que l'intelligence humaine, ce que c'est que la créativité humaine, comment la cultiver, comment éventuellement l'outiller avec la machine, mais en lui gardant son côté si spécifique, qui fait la spécificité de la nature humaine.

  • Speaker #0

    Allez, c'est parti pour les sept dernières questions.

  • Speaker #1

    D'accord.

  • Speaker #0

    Alain, dis-nous, quel est ton mot préféré ?

  • Speaker #1

    Alors moi, c'est clairement le mot beauté. Je suis fasciné par la beauté. Je trouve que la beauté de ce monde, malgré ses horreurs et la misère du monde, je trouve qu'il y a une forme de beauté du monde, une forme de beauté, de l'amour. On avait un directeur général à HEC qui s'appelait Bernard Ramanansou qui terminait toujours ses discours sur le thème de l'amour en expliquant que finalement, c'était la chose la plus importante, y compris dans le management, la chose la plus importante dans la condition humaine. Et ça va un peu de concert avec cette idée de la beauté. Donc, j'aime beaucoup le mot beauté.

  • Speaker #0

    Alors, à contrario, quel mot détestes-tu ?

  • Speaker #1

    A contrario, pour un militaire, c'est évidemment un peu étonnant, mais le mot que je déteste le plus, c'est le mot conflit. Je déteste le mot conflit parce que je n'aime pas le conflit en réalité.

  • Speaker #0

    La paix est par la guerre, donc le militaire est là pour éviter la guerre.

  • Speaker #1

    Exactement. Et donc, je déteste le mot conflit et je n'aime pas d'une façon générale le conflit.

  • Speaker #0

    Civis pacem par abellum, pour ceux qui se poseraient la question.

  • Speaker #1

    Exactement.

  • Speaker #0

    Le son, le bruit que tu aimes ?

  • Speaker #1

    Alors, j'ai une tendresse particulière pour le bruit de l'eau qui coule.

  • Speaker #0

    Ouais,

  • Speaker #1

    ok. De l'eau qui coule, que ce soit dans la nature, le torrent, mais que ce soit aussi...

  • Speaker #0

    Un peu plus dans le maquillage tard.

  • Speaker #1

    Cette petite musique de l'eau qui coule, je trouve que c'est un peu la musique de la vie quand même. Et donc, j'ai une tendresse particulière pour ce son.

  • Speaker #0

    Ouais, qui s'écoule. Le son ou le bruit que tu détestes ?

  • Speaker #1

    Je déteste par-dessus tout les éclats de voix. Je suis très agressé par les éclats de voix, que ce soit des éclats de voix d'ailleurs de gaieté, quand on parle dans les transports publics, il y a des gens qui hurlent parce qu'ils sont contents, etc. Ça m'agresse, je n'aime pas les éclats de voix. Et de façon générale, c'est vraiment un truc, alors ça va peut-être avec justement le conflit, parce qu'en général, quand il y a conflit, il y a éclat de voix, mais finalement, l'eau qui coule est aussi une forme de beauté, donc tu vois, il y a une certaine cohérence entre mes choix.

  • Speaker #0

    Tu as réussi à avoir un management sans éclat de voix.

  • Speaker #1

    Écoute, je m'y suis employé.

  • Speaker #0

    Celui qui n'a jamais péché me jette la première pierre.

  • Speaker #1

    J'ai eu des colères comme tout le monde. Je pense que la colère, il faut de temps en temps être en colère. Mais oui, j'ai quand même essayé toujours d'éviter les éclats de voix.

  • Speaker #0

    Ton juron gros mot ou blasphème favori ?

  • Speaker #1

    Écoute, c'est très simple. c'est « fais chier bordel » . Quand quelque chose m'énerve ou me résiste, « fais chier bordel » .

  • Speaker #0

    Tu n'en as pas gardé un de ta carrière militaire ?

  • Speaker #1

    Non, mais dans l'armée, ça arrive aussi de dire « fais chier bordel » .

  • Speaker #0

    Plus souvent que de raison, effectivement. La citation que tu aurais aimé avoir prononcée ?

  • Speaker #1

    Alors, écoute... quand tu m'as dit qu'on posait ces sept questions à la fin, j'ai un peu réfléchi. Et au fond, je me suis dit que j'allais te proposer, parce que c'est ce que je trouve, un vers d'Aragon, de Louis Aragon, dans son merveilleux poème Les yeux d'Elsa, qui est pour moi probablement le vers le plus beau de la littérature. française c'est ce vers qui dit tes yeux lorsqu'une larme iluit tes yeux rendent jaloux le ciel d'après la pluie et je trouve que c'est que ce verre dit à la fois à la fois l'amour à la fois la beauté ce verre il est il est extraordinairement musical tu vois d'ailleurs jean ferrat on a fait une chanson tes yeux lorsqu'une larme iluit tes yeux rendent jaloux le ciel d'après la pluie moi je trouve que quand on a écrit ça On peut mourir.

  • Speaker #0

    Non, c'est beau. C'est beau, je ne connaissais pas. Dernière question. Si Dieu existe, qu'aimerais-tu, après ta mort, l'entendre te dire ?

  • Speaker #1

    Bienvenue.

  • Speaker #0

    Bienvenue, juste friendly welcome.

  • Speaker #1

    Ben oui, parce que s'il me dit bienvenue, c'est plutôt bon signe. Ça veut dire, un, qu'il existe,

  • Speaker #0

    deux,

  • Speaker #1

    qu'il considère que je ne vais pas tomber. C'est plutôt une bonne nouvelle que tu arrives,

  • Speaker #0

    on va prendre l'apéro.

  • Speaker #1

    Franchement, bienvenue, ça m'irait. Ok,

  • Speaker #0

    très bien, ça marche. Écoute Alain, merci beaucoup de ce temps que tu nous as consacré, c'était super intéressant.

  • Speaker #1

    C'était très sympa.

  • Speaker #0

    Et puis... Je vous rappelle à tous la stratégie Bamboo dans toutes les bonnes librairies. Il est en précommande seulement sur Amazon. Oui,

  • Speaker #1

    il est en précommande parce qu'il n'est pas encore sorti. Il est en parution.

  • Speaker #0

    Parce qu'il est référencé un peu partout. Ça, c'est clair. Donc, allez précommander sur Amazon. C'est qui ton éditeur ?

  • Speaker #1

    C'est Pearson. Pearson,

  • Speaker #0

    ok. Donc voilà, vous allez chez Pearson directement. Même si on a parlé de la stratégie d'Amazon, ce n'est pas la question. Donc un grand merci Alain. Merci à toi. On se revoit bientôt à Orléans ou à Paris.

  • Speaker #1

    Exactement. Merci beaucoup.

  • Speaker #0

    C'était la colle d'Alain Bloch. Bravo, vous avez tenu jusque là. Merci de votre écoute. Si vous avez aimé cet épisode, partagez-le sur les réseaux sociaux, allez mettre 5 étoiles et des commentaires sur les plateformes de podcast. Abonnez-vous, abonnez-vous à notre newsletter. Et dans tous les cas, à très bientôt pour un prochain épisode de La Colle. Et n'oubliez pas, tout est possible à qui rêve, ose, travaille et n'abandonne jamais.

  • Speaker #2

    Merci.

Description

Dans l'épisode 84, La Khôlle reçoit Alain Bloch, entrepreneur aguerri, professeur émérite à HEC Paris et co-auteur de « La Stratégie du Bambou ». Cette conversation captivante révèle comment cette approche novatrice peut transformer votre vision de l'entreprise et redéfinir vos méthodes d'innovation.


La stratégie du bambou, inspirée des caractéristiques exceptionnelles de cette plante, s'articule autour de trois principes fondamentaux : l'enracinement profond dans vos compétences distinctives, la souplesse d'une expansion contrôlée vers de nouveaux marchés, et une prolifération stratégique permettant de conquérir durablement votre territoire économique.


Contrairement aux modèles traditionnels souvent trop rigides, cette approche favorise une diversification ambitieuse tout en maintenant une identité forte et cohérente. Alain Bloch partage des méthodes concrètes pour identifier, renforcer et exploiter vos racines stratégiques afin de développer votre entreprise de façon durable et innovante.


Un épisode essentiel pour les décideurs souhaitant enrichir leur réflexion stratégique et transformer leur organisation en un acteur à la fois agile, robuste et résilient face aux défis contemporains. Bonne écoute !


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Bienvenue dans la colle. Vous êtes curieux ? Vous avez soif de comprendre le monde qui vous entoure ? Alors vous êtes au bon endroit. Si vous aimez vous remettre en question, que comme moi vous pensez qu'on n'a jamais fini d'apprendre, alors la colle est faite pour vous. Sans se prendre au sérieux, je vous propose à chaque épisode de partir ensemble à la découverte de nouveaux horizons, de profils et d'idées inspirantes. Je suis Pierre Barraud, j'ai créé, édité et produit ce podcast. Je suis également directeur général du Campus Orléans de l'ISC Paris, école de commerce, membre de la conférence des grandes écoles. Mon mantra, vis comme si tu devais mourir demain, apprends comme si tu devais vivre toujours. Je suis preneur de tous vos commentaires, suggestions, remarques, ils sont tous bienvenus. Et bien évidemment, je compte sur vous pour placer 5 étoiles et des commentaires sur toutes les plateformes. Allez, c'est parti, bonne écoute ! Chers amis, bienvenue dans ce nouvel épisode de La Colle. Aujourd'hui, on va parler stratégie, entrepreneuriat, avec... avec un ami, j'ose le dire, Alain Bloch. Salut Alain.

  • Speaker #1

    Salut Pierre.

  • Speaker #0

    Alors Alain, pour tous ceux qui ne le connaîtraient pas, il est Saint-Syrien. Alors ça, voilà, déjà ça pose le gars. Docteur de l'université de Paris-Dauphine, en informatique étonnamment, mais on reviendra informatique des organisations. Et puis carrière militaire, carrière d'entrepreneur et carrière de... professeur, puisque monsieur est professeur émérite d'HEC. Mais enfin voilà, tout ça c'est plein de belles choses et surtout aujourd'hui on va parler d'un ouvrage que tu as commis avec Véronique Nguyen, qui est elle aussi prof à HEC si je me trompe.

  • Speaker #1

    Oui, professeur à HEC Paris,

  • Speaker #0

    qui s'appelle la stratégie du bambou. Après cette courte introduction, Alain, est-ce qu'en quelques heures, mots, tu veux bien te présenter, parce que moi j'ai pris les éléments que j'avais, mais voilà.

  • Speaker #1

    Alors écoute, tu as très très bien dit, j'ai eu la chance effectivement dans ma carrière de faire les trois plus beaux métiers du monde, le métier des armes, officier, le métier effectivement d'entrepreneur, qui est celui qui probablement m'a le plus marqué et probablement aussi enthousiasmé. Et puis, depuis longtemps maintenant, le métier de professeur, effectivement, métier que je fais d'ailleurs plus comme un éducateur que comme un chercheur, même si je fais comme beaucoup de profs. Je publie, bien sûr, mais je publie plein de livres que personne ne lit d'ailleurs, mais d'une façon générale.

  • Speaker #0

    Il y a une bibliographie impressionnante quand même. Tu en as six ou quelque chose comme ça.

  • Speaker #1

    Oui, j'en ai même écrit 14, mais peu importe, puisque je me demande même encore comment les éditeurs me publient, puisque je trouve qu'on n'en vend pas beaucoup. Ça va changer avec la stratégie du bon boulot. Éducateur, parce qu'au fond, oui, je pense que quand on est officier, on est forcément un peu éducateur de ses hommes. Quand on est entrepreneur, on est aussi un peu éducateur de ses... de ses collaborateurs, de ses associés. Et puis, quand on est prof, il y a effectivement cette façon de transmettre qui est peut-être plus dans l'éducation au sens où dans l'entrepreneuriat, forcément, puisque j'enseigne l'entrepreneuriat, on travaille beaucoup sur les comportements, les savoir-faire, plus que finalement les connaissances explicites. Et donc, voilà. Donc, les trois plus beaux métiers du monde. officier, entrepreneur et professeur. D'ailleurs, je voudrais qu'on écrive ça sur ma tombe.

  • Speaker #0

    C'est pas mal comme épitaphe. Rentrons dans le vif du sujet. Parle-nous un peu de la stratégie du bambou. Mais qu'est-ce que ça fait ?

  • Speaker #1

    La stratégie du bambou, c'est d'abord l'histoire d'une très belle rencontre avec Véronique Nguyen. Véronique Nguyen, évidemment, c'est une professeure de stratégie d'HEC. On s'était croisés beaucoup de fois. On se parlait, je l'aimais beaucoup, je crois qu'elle m'apprécie aussi. Puis un jour, on fait effectivement une formation ensemble pour un public d'adultes sur la stratégie en général. C'est moi d'ailleurs, je dirigeais ce programme dans lequel je l'avais invité à faire un cours. Et puis, je découvre qu'elle parle de cette stratégie bambou parce que l'idée originelle lui revient. Et je suis admiratif, fasciné par ce qu'elle raconte, que je trouve à la fois très original, très juste, assez… Voilà. pas du tout galvaudé, que cette métaphore du bambou a beaucoup de signification, je vais y revenir. Et donc, je lui dis, mais Méranique, c'est fou, c'est génial ton truc, pourquoi tu n'écris pas un bouquin ? Elle me dit, mais si, etc., j'ai ça sur le... mais je n'y arrive pas, beaucoup de temps, je travaille trop, machin, bon. Et donc, je lui dis, écoute, si je... je peux contribuer d'une façon ou d'une autre, moi je serais ravi, je trouve que c'est une très belle idée, etc. Et donc on a effectivement conçu le projet d'écrire le livre. On a commencé par écrire des papiers ensemble, plusieurs articles, et puis effectivement on a convenu d'écrire ce livre dans lequel je ferais au fond un espèce de chapitre introductif un peu durti pour à la fois expliquer notre rencontre, mais dans lequel il est complètement prévu que ce soit... elle qui fasse l'essentiel parce que je ne veux pas du tout donner le sentiment que je lui pique l'idée tu vois mais je suis un grand défenseur de cette idée, de cette vision sur laquelle je peux effectivement développer comme tu dis.

  • Speaker #0

    Oui c'est intéressant parce que en plus de ça c'est pas le sous-titre mais la baseline en dessous du titre du livre c'est en gros remplacer Porter et la stratégration bleue.

  • Speaker #1

    Oui, c'est ça.

  • Speaker #0

    Vous faites du marketing aussi, c'est un peu du teasing quand même. En gros, parce que Porter, c'est quand même Harvard, la stratégie océan bleu, c'est l'INSEAD.

  • Speaker #1

    C'est l'INSEAD,

  • Speaker #0

    oui. On se pose quoi, HEC se pose là.

  • Speaker #1

    Non, mais alors, c'est clair qu'au fond, sur le plan un peu conceptuel, l'idée, c'est qu'effectivement, il y a eu entre le grand succès de stratégie océan bleu et les grands succès de Michael Porter, il y a eu un espèce de trou noir en termes de livres, de publications, je dirais, grand public, alors qu'il y a une théorie extrêmement importante qui est la théorie des ressources distinctives qui en fait se situe un peu chronologiquement entre les deux. ces deux courants stratégiques, le courant portairien et puis le courant d'Océan Bleu, qui est d'ailleurs un prolongement du courant portairien, parce qu'au fond, qu'est-ce que nous disent les auteurs de stratégie Océan Bleu ? Ils nous disent que le mieux, c'est d'éviter la concurrence, thème de portaire, en finalement recherchant l'innovation maximum, c'est-à-dire effectivement... en étant le premier, en ouvrant cet océan bleu dont il nous parle, et en évitant effectivement que les concurrents s'y engouffrent, pour éviter que ça devienne à son tour un océan rouge. Donc c'est une idée très originale, qui est intéressante, mais qui au fond ne dit qu'une chose, c'est que plus tu innoves et plus ton innovation rencontre le marché avant tous les autres. plus effectivement tu as de facilité à te développer. Bon, je caricature un peu, c'est un petit peu plus sophistiqué que ça, ils en écrivent 700 pages, donc si c'était aussi simple que ça, bien sûr ça ne serait pas… Mais grosso modo, c'est juste pour dire que c'est quand même assez porterien dans la vision, puisque au fond, Porter travaille beaucoup sur l'avantage concurrentiel, donc la concurrence et… les auteurs de stratégie océan bleu finalement disent c'est encore mieux quand il n'y a pas de concurrence du tout grâce à l'innovation. Entre les deux il y a eu un courant très important mais qui n'a pas donné lieu à des publications grand public ou en tout cas pas du tout en Europe et pas traduite, probablement quelques unes aux Etats-Unis mais qui n'ont pas du tout le même type de succès que les bouquins de Porter et stratégie océan bleu. qui a cette théorie des ressources distinctives. Qu'est-ce qu'elle dit finalement ? Cette théorie dit qu'effectivement, ce qui constitue la force la plus importante d'une entreprise, c'est ce que cette théorie appelle ses ressources distinctives, qui lui donne un avantage concurrentiel, mais qui n'est pas décrit par Porter, puisque Porter s'intéresse à la différenciation ou la stratégie de prix, qui n'est pas décrit. par porteur et qui consiste à se dire finalement qu'est-ce que je fais mieux que tout le monde ? C'est la question finalement que doit se poser le manager s'il veut s'inspirer de cette théorie des ressources distinctives. Qu'est-ce que je fais mieux que tout le monde et comment je peux essayer de m'organiser pour ne faire en quelque sorte que ça ? Et c'est ce qui a conduit à à la fin du siècle dernier, ce grand mouvement d'externalisation, puisque c'est ça qui a construit le corps business. Voilà, on se centre sur ce qu'on sait le mieux faire et tout le reste, on l'externalise. Donc, c'était quand même très inspiré par cette théorie des ressources distinctives. Qu'est-ce qui vraiment fait dans mes compétences ? On parle quelquefois de compétences distinctives aussi. Qu'est-ce qui fait ma différence ? Donc en fait, la stratégie du bambou, c'est une stratégie qui s'inspire beaucoup de cette théorie des compétences distinctives, mais qui ne se limite pas à ça. C'est parti finalement d'un constat qui est que les grands modèles de la stratégie décrivent assez mal les plus grands succès des dernières années des plus grandes entreprises du monde, c'est-à-dire que les fameuses GAFA, Google, Amazon et les autres, quand tu regardes sur longue période, il y a un peu de portaire, il y a un peu de stratégie océan bleu, mais au total, les modèles portairiens et le modèle océan bleu ne permettent pas. pas d'analyser en finesse et en profondeur le succès de ces très grandes entreprises. Et donc, ça part un peu de ce constat et l'idée clé de Véronique, c'est de se dire mais au fond, ces entreprises, elles ont une trajectoire très particulière qui effectivement se déroule en fait en trois temps. Un premier temps. Elles enracinent très profondément ces fameuses compétences distinctives, elles les analysent et elles les consolident en les enracinant très profondément.

  • Speaker #0

    C'est ce que vous appelez le concept de racine mère, c'est ça ?

  • Speaker #1

    Voilà, c'est ça. Et donc ces racines mères qui sont les compétences distinctives particulièrement bien consolidées, enrichi éventuellement par des acquisitions, etc., qui permettent ce que finalement le discours stratégique en principe interdit, c'est-à-dire le foisonnement tous azimuts. En fait, la doxa stratégique, c'est quand même de dire qu'il faut se concentrer sur son core business et ne faire que ce qu'on sait faire bien. Et au fond, ce n'est pas ce que font les GAFA. Les GAFA, effectivement, Ils ont une compétence distinctive qu'ils défendent et qu'ils enrichissent tout au long de l'existence, mais cette compétence distinctive leur permet d'aborder des champs extrêmement différents. Quand tu prends Google, ça passe de grand succès de Gmail à aujourd'hui Waze ou d'autres. Quel est le lien entre toutes ces compétences ? tout ce qu'on appellerait des formes de diversification. Alors justement, ce ne sont pas des vraies diversifications, c'est en fait un foisonnement qui est nourri par ces compétences distinctives enracinées. Donc le premier moment de la stratégie du bambou, c'est d'identifier clairement ces fameuses compétences distinctives, ce qui n'est pas toujours facile, et puis de les enraciner en les consolidant au maximum, en les rendant. à la fois unique et indestructible.

  • Speaker #0

    Ça me fait penser à Amazon, qui à la base est un e-commerçant et qui en fait, en compétences distinctives, a développé en... interne pour ses besoins propres, la capacité d'avoir des serveurs qui vont scaler les volumes, etc. qui vont derrière se dire, c'est quand même bizarre, on a le savoir-faire, on a les infrastructures, sauf qu'on l'utilise qu'à fond une fois par an, allons-y, on va peut-être essayer d'en faire un business. Et c'est la naissance d'Amazon Web Services qui aujourd'hui, dans mon souvenir, doit faire plus de 30% de la marge Oui,

  • Speaker #1

    absolument. C'est un très bon exemple qu'on développe d'ailleurs dans nos cours, puisque Véronique et moi, et chacun séparément, on fait ces interventions sur la stratégie pour vous. Amazon est un très bon exemple de compétences distinctives qui est très enracinée. On peut dire que, grosso modo, la compétence, c'est la capacité de traitement des données de façon très élaborée sur les clients. couplé à la logistique, c'est les deux compétences hautement distinctives qui ont été extrêmement consolidées par Amazon et qui lui ont permis effectivement non seulement d'être le premier distributeur du monde à égalité avec Walmart, mais aussi un offreur de services pour effectivement le cloud, etc. Et on pourrait multiplier les exemples Google, Apple, Apple qui... dont la compétence distinctive est principalement l'interface homme-machine, qui est quelque chose qu'ils ont su construire avec un système d'exploitation d'ordinateurs extrêmement innovant et unique, qui est encore aujourd'hui, qui bataille sérieusement contre Windows, mais aussi l'interface homme-machine dans les iPhones, etc. les montres aujourd'hui, une compétence distinctive qui lui permet également de foisonner et d'aborder des sujets aussi variés que la musique, effectivement l'horlogerie, une horlogerie qui est évidemment totalement numérique, mais pour montrer que là encore il y a un vrai foisonnement et que derrière ce foisonnement en réalité il y a une compétence distinctive ou plusieurs compétences distinctives qui sont vraiment... c'est pour ça qu'elles sont distinctives, et qui sont profondément cultivées et enracinées, et qui permettent ce foisonnement un peu énigmatique, parce que finalement ce foisonnement, il faut beaucoup creuser pour lui voir un fil conducteur, il y en a en général un, mais je dirais que ce foisonnement est un peu, en théorie, condamné par... Par la doxa stratégique. Il y a un troisième temps, si tu me permets, parce que ce troisième temps est celui qui est peut-être le plus borderline en termes même juridiques. C'est le moment de l'étouffement. Et c'est là qu'on retrouve la force de la métaphore du bambou. Le bambou, effectivement, pour quiconque a eu dans son jardin un bambou, il serait carrément indestructible, parce que pour l'arracher, tu te donnes du mal et puis ça repart. poussent aussi secs, que ça foisonne beaucoup, c'est-à-dire que si tu n'y prends garde, ton jardin est assez vite envahi et que ça étouffe effectivement tout ce qui pousse autour. Et ça, c'est le côté un petit peu noir du développement des GAFA. On sait tous qu'ils cherchent, d'une certaine façon, à tuer la concurrence, alors pas forcément la tuer… en l'asphyxiant, quelquefois en la rachetant, etc. Mais en tout cas, il y a cette volonté, on retrouve là un peu l'océan bleu, il y a cette volonté d'étouffer tout ce qui pourrait perturber cet envahissement par un foisonnement d'activités. Et donc là encore, on retrouve cette métaphore du bambou. Les racines qui sont très profondes, ce foisonnement qui paraît invincible et extraordinairement multiple, et puis cet étouffement progressif de tout ce qui pousse dans la zone, et qui est un point sur lequel on a beaucoup critiqué les GAFA, qui se donnent bonne figure en achetant beaucoup de startups qu'ils intéressent, à leur groupe, mais en vérité, ça cache souvent des asphyxies. qui ne se conclut pas toujours par un rachat. Il y a des tas de boîtes qui meurent parce que Google change tout d'un coup brutalement les règles du jeu, parce que Amazon met des conditions plus ou moins exorbitantes dans ses conditions de vente. Donc, une face qui n'est peut-être pas la plus glorieuse des GAFA, mais qui aujourd'hui leur donne ce statut de premières entreprises du monde. Donc, au fond... La métaphore fonctionne bien, et cette métaphore était très naturelle pour Véronique, puisque Véronique est d'origine vietnamienne, elle est particulièrement inspirée par l'Asie, et donc le bambou lui allait très bien. Et donc cette stratégie bambou, elle a la force de la simplicité, mais elle a quand même une clé très importante, qui sont cette analyse subtile. des ressources distinctives, des compétences distinctives. Je peux donner un exemple qui est moins connu que les GAFA, c'est le formidable exemple de Fuji. Fuji, dans le domaine de la photo argentique, est un brillant outsider derrière Kodak, mais il sent venir de façon beaucoup plus probablement forte le vent de la photo numérique. Il sent que... Les choses vont mal tourner pour lui et contrairement à Kodak qui a fini sous le chapeau du chapter 11 pour rebondir ensuite, mais Fuji a opéré une reconversion absolument étonnante puisqu'aujourd'hui la première activité du groupe Fuji c'est la pharmacie. Et donc ils sont passés de la photographie à la pharmacie en… travaillant en profondeur une compétence distinctif qui était la chimie, qui a été profondément travaillée par deux dirigeants successifs, dont l'un d'entre eux a d'ailleurs écrit un livre là-dessus qui s'appelle Le Miracle Fuji, mais qui fait qu'aujourd'hui le groupe Fuji est très largement devant le groupe Kodak. C'est un groupe qui est encore dans la photo, mais qui est très largement diversifié et dont la principale source de revenus... Et la pharmacie, ce qui ne...

  • Speaker #0

    C'est pas une histoire de folagène aussi ?

  • Speaker #1

    Alors oui, il y a plusieurs éléments, je ne rentre pas trop dans le détail, mais c'est juste pour illustrer que ça n'est pas quand même que les GAFA et qu'il y a des entreprises qui ont eu ce type de stratégie bambou. Parce que derrière cette analyse en profondeur de ce qui constituait une compétence distinctive, Fuji a aussi foisonné, puisqu'ils sont toujours dans la photo, mais ils sont dans la santé. Donc ils ont des tas d'activités aujourd'hui. qui paraissent très éloignées les unes des autres, mais qui en réalité ont pour point commun ces fameuses compétences distinctives.

  • Speaker #0

    Pour résumer, il y a trois étapes. S'enraciner, foisonner, proliférer, conquérir.

  • Speaker #1

    Oui, on va dire ça.

  • Speaker #0

    Avec une logique effectivement de l'agressivité du bambou. Si je comprends bien... Effectivement, c'est les compétences distinctives qui, dans cette analogie biologique, seraient les racines.

  • Speaker #1

    Oui.

  • Speaker #0

    Le foisonnement, c'est les X business units qu'on va pouvoir construire sur ces racines. Et la prolifération, c'est l'extension du domaine de la lutte. On va dire ça comme ça.

  • Speaker #1

    L'extension, exactement. Avec quand même cette tentation permanente d'une certaine forme d'étouffement, plus ou moins voulue, plus ou moins naturelle. plus ou moins anti-concurrentiel. Là-dessus, les autorités concurrentielles du monde entier se penchent régulièrement sur le comportement des GAFA à ce sujet-là. Mais voilà, c'est une propension assez naturelle dans la stratégie du bambou, puisque ce foisonnement, cette prolifération, par nature, a tendance à étouffer toute forme de concurrence.

  • Speaker #0

    Sauf que... Alors ça se heurte à un truc qui est que les entreprises ont tendance à continuer à faire ce qu'elles font et on va dire que l'innovation, l'agilité, tout ça même si tout le monde s'en gargarise, c'est pas toujours le cas et de toute façon aussi les allocations budgétaires ne vont pas au foisonnement. Comment on fait pour avoir une organisation Bamboo compatible ? C'est une très bonne question parce qu'en fait, je dirais qu'il y a la stratégie bambou, mais Véronique a aussi l'idée qu'il faudrait écrire un livre sur les organisations bambou, parce que la question que tu poses est très juste. Et d'ailleurs, il y en a un exemple qui est absolument criant, puisqu'on a parlé de Google, c'est la tétanie de Google. la tétanie qui n'a pas duré très longtemps mais qui a quand même été très marquée devant l'intelligence artificielle. Google a été pris de court et ça c'était parce qu'ils avaient effectivement une compétence distinctive en matière de recherche sur le web qu'ils ont su effectivement transformer sous plein d'aspects mais au fond ils n'ont pas été capables de remettre en cause ce modèle dominant qui constituait effectivement leurs ressources distinctives, leurs compétences distinctives principales, et ils ont été pris de court par cette nouvelle technologie. Ils sont en train de réagir, de s'y adapter, ils ont beaucoup de moyens. Mais ça a été quand même un moment où on a bien vu qu'il y avait une remise en cause en profondeur du modèle. Et là, pour le coup, on retrouve un peu… un peu stratégie océan bleu, parce que c'est vrai qu'au départ, l'intelligence artificielle et notamment ChatGPT, OpenAI, ont créé un océan bleu dans lequel personne n'avait rien vu venir. Tout le monde était à peu près prêt,

  • Speaker #1

    mais personne n'était sorti.

  • Speaker #0

    Voilà, exactement. Et alors, malheureusement pour ChatGPT... Et OpenAI, on n'est plus du tout dans l'océan bleu et tout le monde s'est engouffré, donc c'est en train de devenir un océan rouge vif. Donc ça, c'est très difficile et d'ailleurs, Kim et Mauborgne, les deux auteurs de ce stratégie océan bleu, c'est un sujet sur lequel ils consacrent les plus longs développements. C'est comment est-ce qu'on préserve son océan bleu parce que c'est ça qui est le plus difficile finalement. Ce n'est pas d'innover au départ, c'est d'arriver à maintenir. des barrières à l'entrée suffisantes pour que son innovation de départ continue à nourrir le à nourrir le développement de l'entreprise sans que la concurrence puisse vraiment rivaliser. Bon donc clairement la stratégie bambou elle n'entend pas être un modèle dominant, portaire à des vertus, stratégie océan bleu à des vertus, il y avait un espèce de trou. entre les deux, qui est vraiment lié à cette théorie des compétences distinctives, qui n'était pas convenablement vulgarisée en quelque sorte. Et le mérite de Véronique, c'est effectivement d'avoir trouvé cette métaphore qui est très parlante et qui convient parfaitement à cette forme de stratégie et qui peut permettre, je dirais, au plus grand nombre, c'est-à-dire au manager, de comprendre. comment on peut faire pour finalement avoir ce type de développement sans risquer la catastrophe. Parce qu'il faut bien voir que le foisonnement, quand il n'est pas suffisamment enraciné dans une compétence distinctive, il t'expose effectivement à la catastrophe. C'est-à-dire que s'il n'y a pas un fil conducteur clair…

  • Speaker #1

    Un peu par terre dans ton essence, oui.

  • Speaker #0

    Voilà, exactement. S'il n'y a pas un fil conducteur clair et des compétences distinctives qui sont ce fil conducteur clair, alors c'est clair que… Évident que les stratégies de conglomérat sont en général assez nocives. Elles sont d'ailleurs assez fortement sanctionnées par les bourses. Mais elles peuvent avoir une explication patrimoniale. Mais grosso modo, sur le plan strictement industriel, c'est rarement un succès. Il y a des entreprises qui font des stratégies bambou sans qu'on le voit vraiment. Par exemple, le groupe Michelin, on se dit qu'ils font des pneus. Oui, sauf que faire des pneus de vélo, faire des pneus de tracteur et faire des pneus d'avion… effectivement c'est toujours des pneus mais les technologies n'ont rigoureusement rien à voir. Et clairement, en réalité, les compétences distinctives qui sont essentiellement la chimie du caoutchouc, les alliages, etc., tout ce qui ont permis à Michelin d'être le géant qui... qu'il est et c'est une forme de stratégie bambou, on pourrait presque dire cachée, parce qu'au fond, à l'œil nu, quand on regarde de l'extérieur, on se dit, ben oui, ils font des pneus, et donc ils font tous les pneus possibles et imaginables, mais en réalité, ce n'est pas aussi simple que ça, et ça suppose effectivement de bien comprendre quelles sont ces compétences distinctives pour être capable justement de faire tous ces pneus qui sont en réalité très différents les uns des autres.

  • Speaker #1

    Puis effectivement, ça pose des questions d'organisation qui sont capables d'accepter ça. Ça pose des questions de culture de ces organisations aussi. Enfin voilà, parce qu'aujourd'hui, beaucoup restent sur une idée. C'est un truc que j'ai encore entendu très récemment sur la bonne stratégie, c'est more. pour 70%, Better pour 20% et New pour 10%. C'est-à-dire, on fait plus de ce qui marche et là, on y met 70% du budget. On améliore les process et on y met 20% de notre budget et on fait du New pour 10%, histoire de s'assurer pour l'avenir. Là, la logique du bambou, c'est quand même, quand on parle de prolifération et l'image du bambou pour ça est très bien trouvée, parce que ça part effectivement, des tiges de bambou,

  • Speaker #0

    il y en a plein. Exactement, et effectivement, on parlait d'organisation bambou, on a moins creusé le sujet, mais c'est clair qu'il y a des organisations qui savent faire ça et d'autres moins, parce que ça nécessite effectivement dans l'entreprise. une forme d'agilité qui va très au-delà des théories agiles, etc. C'est-à-dire qu'il faut vraiment, tu vois, quand on fait à la fois de la photo et du médicament, c'est quand même arriver à réconcilier ça sous une même culture, sous des organisations compatibles, etc. C'est effectivement difficile. Et je pense qu'il y a un vrai sujet de réflexion sur quelles sont les organisations qui sont compatibles. capables de supporter ça on retrouve d'ailleurs des grands débats de du management et de la stratégie 1 c'est le dilemme explorer exploitation exploration comment est-ce qu'on concilie dans le quotidien comme l'a soulevé james march le l'excellence dans l'exploitation c'est à dire dans l'opéra dans les opérations et puis L'excellence dans l'exploration, c'est-à-dire dans l'innovation, dans la découverte des métiers futurs, etc. James March, il y a déjà longtemps, dans les années 90, a souligné que ça mobilisait des compétences stratégiques justement à ses opposés. Et donc cette question de l'organisation Bambou, comment faire pour supporter ce foisonnement, se pose. Et moi je suis très frappé, tu sais, je vais tous les ans. dans la Silicon Valley avec la promotion d'HEC Entrepreneur. Et donc j'ai eu la chance, ça fait 14 ans que j'y vais, j'ai eu la chance de voir certaines entreprises, pas complètement à leur début, mais en tout cas beaucoup plus petites qu'elles ne le sont aujourd'hui, étaient quand même très frappées de voir celles qui restent finalement. entrepreneurial, on pourrait dire, parce qu'on voit, parce que quelque part, derrière ce foisonnement, il faut garder une espèce de dynamisme entrepreneurial et celles qui, petit à petit, sont contaminées par l'effet de taille et deviennent plus ou moins des bureaucraties. C'est assez frappant.

  • Speaker #1

    Il y en a une qui te vient à l'esprit où tu te dis, tiens, celle-là, elle est restée dans l'esprit startup ?

  • Speaker #0

    Alors... Alors, je trouve que jusqu'à une période assez récente, Google était vraiment resté dans une forme d'esprit start-up et ils étaient très obsédés par l'idée qu'il ne fallait surtout pas qu'ils deviennent une bureaucratie malgré leur taille. Ça a été un peu bousculé par les débats sur l'intelligence artificielle, aussi par… les attaques régulières dont a fait l'objet Google par les autorités concurrentielles du monde entier. Et donc, je n'ai pas eu de contact récent avec Google pour savoir si... Mais tu vois, par exemple, il y a une entreprise qui m'a beaucoup frappé dans la Silicon Valley qui était LinkedIn. LinkedIn, c'était au départ, j'ai eu la chance de voir LinkedIn relativement au tout début. Et je me rappelle d'un... Une rencontre avec le CTO de LinkedIn, le tout premier, qui était un des 20 premiers salariés de la boîte et qui était évidemment aussi un associé et qui était incroyablement entrepreneurial, enfin qui était vraiment presque la caricature de l'entreprise. Il était d'origine coréenne et il était la caricature de... de l'américain, de la côte ouest, originaire d'Asie, extraordinairement dynamique, etc. Et aujourd'hui, quand je visite LinkedIn, qui a été, comme tu le sais, racheté par Microsoft, je suis frappé de voir à quel point c'est devenu une bureaucratie. Alors, il faut reconnaître qu'eux, ils ont cet effet réseau qui fait qu'effectivement, alors pour le coup, ils sont dans la stratégie océan bleu, c'est-à-dire qu'il n'y a pas de concurrents, ils sont vraiment dans une espèce de situation de monopole. qui devient d'ailleurs très compliqué à challenger parce que c'est difficile d'avoir un deuxième LinkedIn, via Deo en son temps s'y est cassé les dents. Mais malheureusement, cette position de monopole, c'est un sujet que ne traite pas non plus complètement Kim et Mauborgne dans Stratégie Océan Bleu. Quand on arrive à se prémunir finalement, soit par la technologie, soit par d'autres... de procédés, soit presque naturellement par l'effet réseau comme c'est le cas de LinkedIn, quand on arrive à se protéger de la concurrence et qu'on reste dans cette situation de monopole, le Kim et Mubar ne nous disent pas comment on fait pour éviter de s'installer dans cette position confortable et de devenir progressivement une bureaucratie qui perd, parce que c'est clair que c'est quand même la concurrence qui est à tout moment de stimule et t'empêche de t'encrouter. dans une forme de bureaucratie et là tu vois je pense que là aussi il ya matière pour réfléchir à ce que c'est qu'une organisation qui resterait dans son océan bleu mais tout en restant très très innovante et sans sombrer dans une forme de bureaucratie donc la question de l'organisation elle est toujours assez présente derrière la réflexion stratégique qu'est ce qui permet finalement comment une organisation arrive à supporter la stratégie gagnante qu'elle a trouvée. Donc, c'est une question importante du management.

  • Speaker #1

    Dans votre ouvrage, est-ce que vous détaillez soit des outils ou des process très opérationnels ? Tu vois, typiquement, on parlait des compétences distinctives. des racines. Est-ce que vous avez un process de didération, de recherche pour essayer de les identifier ?

  • Speaker #0

    Est-ce que vous avez développé des matrices ? Là-dessus, Véronique a beaucoup plus travaillé que moi. C'est le sujet essentiel. C'est comment tu identifies ces compétences distinctives et comment tu les durcis. Elle a développé pas mal d'outils. Il y a pas mal d'outils. pas d'outils magiques, il n'y a pas de matrice. C'est hyper décevant. On est très convaincus, Véronique et moi, que si tout se résumait dans la stratégie par des petits outils magiques, avec des tableaux et des trucs...

  • Speaker #1

    Une jolie matrice, tu poses des points et c'est bon,

  • Speaker #0

    tu l'as. On serait tous riches, puisqu'il suffirait d'appliquer la matrice pour réussir, ce qui malheureusement n'est pas tout à fait aussi simple. Bon, voilà. Mais on donne en quelque sorte un peu des fils conducteurs ou en tout cas des contre-exemples pour montrer que cette analyse des compétences distinctives ne va pas de soi et que bien les comprendre, c'est un travail qui peut être long et compliqué. Moi j'ai un exemple d'ailleurs dont je me souviendrai toujours, j'intervenais dans une... PME qui existe toujours, qui faisait des emballages pour des emballages monodoses pour des échantillons publicitaires. Et les échantillons publicitaires, les publicitaires rivalisent évidemment quand il s'agit de parfums, de produits de beauté etc. d'imagination pour faire effectivement l'emballage monodose le plus spectaculaire, celui qui celui qu'on retient au moment où on le reçoit. Et derrière ça, il y a évidemment des sujets techniques qui sont souvent compliqués, de thermoformage, qui ne sont pas simples. Et cette chef d'entreprise, quand je lui demandais de formuler, c'était une femme, quand je lui demandais de formuler quel était son avantage concurrentiel, elle me disait « nous, on trouve toujours la solution » . Quand on nous pose un problème particulièrement compliqué que les autres n'arrivent pas, on trouve toujours la solution. Alors je lui dis, oui, mais la question c'est un peu comment vous la trouvez ? Parce que dire on trouve toujours la solution, c'est sympathique, mais comment vous faites ? Et donc elle était incapable de répondre à cette question. Et donc moi je me suis attaqué à cette question, et effectivement c'est une PME, et donc j'ai été dans l'atelier, j'ai essayé de comprendre comment, quand il recevait une commande complexe, Comment ils trouvaient cette fameuse solution ? Et cette compétence distinctive, elle se constituait autour d'un trio dont je me souviens très bien de trois hommes. Il y avait un régleur machine, un ingénieur et un troisième larron. Je ne me souviens plus exactement quelle était sa fonction. Mais en tout cas, il y avait un espèce de petit trio qui effectivement... parce qu'ils fonctionnaient bien ensemble, parce qu'ils avaient des compétences très complémentaires, trouvaient des solutions innovantes aux problèmes que posait le client. Et donc, une fois que j'avais fait ce constat, j'ai dit, écoute, je crois que j'ai trouvé ce fameux endroit où ça se passe dans l'entreprise, là où on trouve cette solution miracle qui fait ton avantage concurrentiel. Mais ça m'inquiète beaucoup parce que finalement, ça repose sur trois individus qui demain matin peuvent disparaître. qui demain matin peuvent décider de quitter l'entreprise, etc., de partir en retraite ou je ne sais quoi. Et donc, cette question de ton avantage concurrentiel qui se formule en disant on trouve toujours la solution me paraît incroyablement fragile parce que reposer sur les épaules de trois individus brillants qui fonctionnent bien, mais jusqu'à quand ? Et donc, c'était un exemple. Pour expliquer que quelquefois, la compétence distinctive, puisqu'en fait, cet avantage concurrentiel s'enracinait dans cette compétence distinctive, je sais trouver une solution innovante au problème, au cahier des charges que pose le client pour son emballage monodose public promotionnel, ça reposait sur, en quelque sorte, le savoir-faire de trois individus qui se combinaient harmonieusement. et qui était donc très difficilement reproductible. Et donc, souvent, quand on identifie comme ça des compétences distinctives, la bonne question, c'est de se dire, c'est distinctif, d'accord, mais est-ce reproductible ? Et tu vois, c'est une question, distinctif, c'est le plus important, mais en réalité, il faut arriver à se convaincre que c'est reproductible. Et dans le cas que je cite, Cette compétence distinctive, elle était bien réelle, c'est ce qui faisait le succès de l'entreprise. Elle n'était pas reproductible, elle était difficilement reproductible et elle était donc fragile. Et donc, enraciner la compétence distinctive, ça veut dire, dans cet exemple-là, effectivement construire le système qui permet à chacun de ces trois individus d'avoir un successeur, d'être capable de... de combiner la génération suivante d'arrivée, et donc de combiner à nouveau des compétences de formation, des compétences de recrutement, etc., qui, au fond, étaient un peu cachées. Pour consolider cette compétence distinctive qui existait dans cette organisation, il fallait en cultiver d'autres, qualité du recrutement, qualité de la formation interne, etc., dont on n'avait pas d'ailleurs forcément les moyens, cette petite entreprise. Et c'est ça que ça veut dire, consolider, enraciner ces compétences distinctives. C'est vraiment l'idée de les rendre indestructibles. Or, dans le cas que je cite, qui me revient à l'esprit, elles étaient loin d'être indestructibles puisqu'elles étaient vulnérables au départ d'un des trois. Et donc, finalement, quand on dit identifier ces compétences distinctives, ce n'est pas toujours simple. Quand ma chef d'entreprise disait, on trouve toujours la solution, ben oui, mais comment ? Et deuxièmement, consolider, ça veut dire une fois qu'on a compris comment finalement ça se constituait, cette compétence distinctive, en l'occurrence cette alchimie un peu mystérieuse entre trois individus, comment tu la perpétues, c'est-à-dire finalement comment tu la rends indestructible, comment tu la rends transmissible. Et ça c'est difficile.

  • Speaker #1

    Ok, vous l'aurez compris, tu dis la stratégie du bambou ou la stratégie bambou ?

  • Speaker #0

    C'est un peu les deux. J'ai la stratégie bambou parce que la traduction en anglais c'est bambou strategy et donc voilà du coup on dit stratégie bambou.

  • Speaker #1

    Parce que tu vois je me suis amusé avant de commencer à regarder les caractéristiques des bambous. Croissance rapide, très résistant, s'adapte à tous les environnements, agressivité de prolifération. Et un truc intéressant c'est qu'il y a plus de 1000 espèces de bambous. Et je trouve que pour un outil de stratégie, dire que finalement, oui, il y a une grande famille qui peut être la stratégie bambou, mais qui peut se décliner sur 1000 business case,

  • Speaker #0

    ça donne quelque chose d'intéressant. Et tu vois, entre l'exemple de cette petite PME Amazon et Fuji, c'est effectivement des types de bambou qui sont très différents.

  • Speaker #1

    Ok, ça me va. Donc, courez vers tous les bons livraires pour acheter cet excellent ouvrage. Si tu veux bien, on prend un petit peu de temps pour parler de toi. Déjà, comment ça se fait que tu as atterri à Saint-Cyr ? C'est quoi l'histoire derrière ça ?

  • Speaker #0

    Alors écoute, Saint-Cyr, c'est je pense une histoire de vocation. Il y a un côté... assez simple qui était que j'avais pas envie d'être dans un bureau, j'avais pas envie d'être ingénieur, je rêvais de grand air et de mouvement comme on dit. Bon alors il n'y a pas que l'armée pour effectivement ça, mais simultanément, moi j'ai vécu en mai 68 une période assez étonnante, j'étais au lycée Saint-Louis, à Paris, donc en plein cœur du quartier latin, et j'ai vu ma génération envoyer des pavés, rêver d'avoir cette espèce de révolution existentielle qui s'est terminée au mois de juin, mais qui a été suivie d'un épisode qu'on oublie un petit peu, mais qui était quelques semaines plus tard, l'envahissement de la Tchécoslovaquie par les chars russes, à la suite de l'équivalent du printemps de mai 68, le fameux printemps de Prague qui a été noyé dans le sang par les soviétiques de l'époque, les russes d'aujourd'hui. Et ça, ça m'a beaucoup frappé. Je me suis dit, nous on lance des pavés, On dit sous les pavés la plage, on a cette espèce de rêve existentiel, etc. Et pendant ce temps-là, à grosso modo 800 km de Strasbourg, il y a des chars soviétiques qui écrasent les libertés, des gens meurent pour défendre leurs libertés, etc. Et ce décalage m'a paru incroyablement étonnant. et au fond a été probablement le fait déclencheur de ma vocation militaire. Je me suis dit, on ne peut pas faire ce constat et s'en contenter. Il y a un moment donné où si tu fais ce constat, tu te dis, bon, ok, qu'est-ce que je fais maintenant ? Alors, il y a plusieurs voies, il n'y a pas que la voie militaire, tu peux aussi te lancer dans l'action politique.

  • Speaker #1

    Non, mais c'est une voie qui a du sens.

  • Speaker #0

    Oui. de lancer dans la voie politique et dire je vais attirer l'attention du monde entier sur le danger que constitue, etc. Mais la façon la plus simple, c'est de se dire, si je fais ce constat-là, la première chose qu'il faut faire, c'est mettre sa peau au bout de ses idées, comme disait le capitaine Sergent. C'était une formule qu'il utilisait, mettre sa peau au bout de ses idées. Et donc, ça a été un peu mon réflexe.

  • Speaker #1

    Et ça a été quoi, ta carrière militaire, alors ?

  • Speaker #0

    Alors, écoute... J'ai fait une carrière militaire assez courte, puisque je suis parti comme jeune capitaine. Donc, j'ai fait Saint-Cyr, puis mon école d'application dans l'artillerie, et ensuite mon temps de commandement.

  • Speaker #1

    Artillerie comme Napoléon, grand stratège, si vous en avez.

  • Speaker #0

    Mais oui, exactement. Alors, je suis parti pour une raison d'ailleurs tout à fait claire. Ce que je voulais, c'était être pilote d'hélicoptère. Donc, à l'époque... pour être pilote d'hélicoptère il fallait commencer par choisir une arme. En l'occurrence, j'ai choisi l'artillerie et puis ensuite on basculait vers l'aviation légère de l'armée de terre, les hélicos, ce qui n'est plus le cas aujourd'hui. Aujourd'hui on peut choisir la latte, l'aviation légère de l'armée de terre, les hélicos comme une arme à part entière dès la sortie de l'école. Ce n'était pas le cas de mon temps. Et donc, je suis arrivé à l'école de Dax, qui, comme jeune capitaine, qui est l'école de formation des pilotes. Et là, j'ai eu un épisode malheureux, vocation un peu contrariée, puisque j'ai fait un épisode d'hypertension artérielle. Donc, j'étais inapte médicale pour cause d'hypertension artérielle. Bon, j'ai essayé de faire ce qu'il fallait pour... Et puis ça n'a pas fonctionné, on ne traitait pas aussi bien probablement qu'aujourd'hui l'hypertension artérielle à l'époque. Et puis j'ai un peu passé mon tour parce que si tu veux dans ce système, chaque promotion de Saint-Cyr amenait son lot de pilotes potentiels. Et donc je ne pouvais pas reprendre le train l'année suivante. Et donc j'ai sur cette... déception j'ai décidé de quitter l'armée en me disant bon ben voilà j'ai l'artillerie c'est bien mais je me vois pas artilleurs toute ma carrière j'avais ce rêve de pilote d'hélico ça se fait pas bon ben il faut il faut en tirer les compétitions et voilà et donc j'ai alors j'ai appris à piloter un les hélicos depuis bon j'ai voilà je suis devenu pilote d'hélico sur le tard puisqu'en fait c'est de chc un beau jour sur le Au coup de mes 65 balais, ou 64, je ne sais plus, je me suis dit, quand même... Tu en es à 64 ans ! Je ne vais pas rester sur cette frustration. J'ai tout su le noble qui est juste à côté d'HEC. Je vais aller faire un tour, voir si on peut. Puis finalement, j'ai appris à piloter. C'est génial ! Tu sais, j'ai eu ce drame personnel qui est... avec mon meilleur ami d'enfance, Olivier Dassault, s'est tué, lui, aux commandes de son hélicoptère. Et donc, ça m'a un peu refroidi. Et du coup, j'ai appris. Et donc, je ne suis pas resté sur cette frustration. J'avais eu la chance d'apprendre à piloter les avions dans l'armée parce que dans la perspective de la latte, on avait des facilités pour... pour passer le brevet avion avant de rejoindre l'école de Dax. Ce que j'ai fait, j'ai continué à pas mal piloter les avions, mais effectivement, je n'avais pas passé ce...

  • Speaker #1

    En tout cas, il n'est jamais trop tard. Voilà, il n'est jamais trop tard.

  • Speaker #0

    Il n'est jamais trop tard. Ça, c'est un grand principe.

  • Speaker #1

    On entend souvent dire que les entrepreneurs, les dirigeants d'entreprises doivent ou pourraient s'inspirer des militaires. Toi, tu en penses quoi ? Qui a été les deux ?

  • Speaker #0

    Oui, oui, oui, je pense qu'effectivement, il y a des analogies. D'abord, la stratégie, la stratégie elle-même, c'est d'abord une science militaire. Et les grands auteurs, les grands auteurs sont effectivement, parlent de la guerre, que ce soit Clausewitz, le plus connu, mais plein d'autres qui... On parlait de la stratégie et la stratégie d'entreprise est née à la suite de la Deuxième Guerre mondiale, comme tu le sais, parce que les chefs d'entreprise américains ont été très impressionnés par la capacité des militaires à gérer des grandes opérations comme celle du débarquement, etc. Et se sont dit, il faut absolument qu'on arrive à gérer nos entreprises de la même façon. Donc oui, il y a une filiation assez claire entre... entre l'art militaire, si on l'appelle comme ça, et le management. Je pense qu'il y a effectivement, on pourrait tout à fait classer quelques grands auteurs, comme bien sûr Clausewitz, mais aussi dans une certaine mesure Machiavel, dans les grands auteurs, dans les grands penseurs du management, parce qu'en réalité, qu'est-ce que c'est que le management ? Le management, c'est conduire l'action collective. Et conduire l'action collective dans une situation très particulière qui est celle de la guerre, c'est quand même le métier des militaires. Donc la conduite de l'action collective, c'est le point commun entre le manager et le militaire.

  • Speaker #1

    Et puis ils ont quelques années d'expérience en la matière. Et puis c'est pas prêt de s'arrêter a priori, vu ce qu'on entend en ce moment. Donc après, tu retournes à l'éthique.

  • Speaker #0

    Alors du coup, après, tu sais, la vie est toujours finalement un enchaînement de circonstances et de choses un petit peu étonnantes. Après, en sortant de l'armée, j'avais la chance d'avoir Olivier Dassault, le petit-fils de Marcel Dassault, comme copain d'enfance. Lui avait fait l'école de l'air pendant que moi, je... Je faisais Saint-Cyr, voilà, et donc son grand-père, Marcel Dassault, qui aimait beaucoup son petit-fils, avait aussi un peu de tendresse et d'affection pour moi, qui considérait que j'étais un peu le bon génie de son petit-fils préféré, parce que c'est moi qui lui avais suggéré de faire l'école de l'air, ce qu'il avait trouvé une très très bonne idée. Et donc assez vite, il m'a dit, mais... Voilà, si vous quittez l'armée, venez donc travailler avec Olivier et la famille. Et donc, effectivement, j'ai rejoint le groupe Dassault. Et ça a été ma première rencontre déterminante avec l'entrepreneuriat. Parce que d'abord, tu as 28 ans.

  • Speaker #1

    Parce que tu as commis beaucoup d'ouvrages autour de l'entreprise familiale.

  • Speaker #0

    Oui, oui, oui, absolument. Et alors, ça a été effectivement cet épisode, ce premier épisode de ma carrière, on va dire, civile, m'a fait à la fois découvrir un entrepreneur totalement hors normes, qui était Marcel Dassault, m'a fait moi-même passer à l'action, puisqu'avec Olivier, on a créé une première entreprise dans le domaine de la communication. On s'est transformé, lui et moi, en entrepreneur. Et puis, il m'a fait aussi découvrir effectivement les entreprises familiales, ce souci de la pérennité des entreprises familiales.

  • Speaker #1

    Parce que dans les 14 bouquins, il y en a quelques-uns là-dessus.

  • Speaker #0

    Oui, absolument. Ce modèle de… Oui, parce que si tu veux, je pense que la pérennité, cet objectif de pérennité que… poursuivent assez naturellement les entreprises familiales, mais qui n'est pas réservé aux entreprises familiales. Il y a des entreprises auxquelles j'ai consacré un livre aussi qui ne sont pas des entreprises familiales et qui appliquent un peu ce modèle de la pérennité. Pour moi, la pérennité, ça dessine un modèle de capitalisme différent, un modèle de capitalisme qu'on pourrait baptiser durable au sens strict du terme. Parce que quand tu te donnes comme objectif non pas la performance à court terme, mais la pérennité à long terme, ce qui n'est d'ailleurs pas incompatible, on a besoin de la performance à court terme pour nourrir la pérennité à long terme, mais c'est une question de hiérarchie des priorités. Si tu priorises la pérennité à long terme, alors clairement tu as forcément un comportement avec tes parties prenantes. que ce soit tes salariés, que ce soit tes fournisseurs, que ce soit l'environnement, qui est profondément différent et qui est marqué au saut du respect. Parce que finalement, si tu t'inscris dans le temps long, tu respectes et tes salariés, et tes fournisseurs, ton environnement, parce que tu sais que ton projet, c'est de durer autour de ces parties. C'est compatible ?

  • Speaker #1

    Pardon ? C'est compatible, tu penses, justement, avec une logique de stratégie bambou ?

  • Speaker #0

    Alors, oui. On va couper plusieurs bouquins ensemble. C'est un débat que j'ai avec Véronique. Pour moi, les organisations bambou, en réalité, cachent des organisations pérennes, des organisations qui priorisent la pérennité. Parce que finalement, le bambou, c'est, tu vois, à la différence de l'océan bleu qui cherche un peu à défendre le territoire non concurrentiel, la stratégie bambou, elle vise... au fond, davantage à être indestructible. Et quelque part, c'est une autre façon de dire qu'on vise la pérennité. Et donc, j'ai effectivement, moi, écrit un livre récemment, le dernier en date, qui s'appelle « La pierre et l'édifice » , où je pars de l'épisode de l'incendie de Notre-Dame pour faire une descente en profondeur dans l'organisation de la brigade des sapeurs-pompiers de Paris. et montrer comment cette organisation a su cultiver tous les ingrédients de la pérennité. Et c'était intéressant de partir d'une organisation non marchande pour montrer que cette question de la pérennité dépassait en réalité la sphère strictement commerciale et marchande, et était quelque part un peu, entre guillemets, sociétale. Et oui, c'est un débat que j'ai avec Véronique. Je lui ai dit, je pense que si tu... Si on creuse ensemble ou si tu creuses toi toute seule les caractéristiques de ces organisations bambou, elles vont ressembler comme deux gouttes d'eau aux organisations telles que j'essaye de les démonter, qui sont les organisations qui visent cette pérennité, sachant que dans ce livre, La pierre et l'édifice, on a cherché avec mon co-auteur à véritablement donner des outils pour le coup, pour ce... Pour s'étalonner sur le champ de la pérennité, il y a neuf dimensions managériales qui permettent vraiment de durcir cette pérennité. Et on a vraiment essayé de montrer comment on pouvait, autour de ces neuf dimensions de la pérennité, construire durablement finalement l'édifice de l'entreprise pérenne.

  • Speaker #1

    À un moment va arriver l'opportunité de co-fonder, pas facile à dire, XHEC Entrepreneur.

  • Speaker #0

    Alors avant, il y a quand même tout l'épisode, si tu permets, d'entrepreneur. C'est-à-dire que j'ai créé... Oui,

  • Speaker #1

    mais là, tu as du temps ? Moi, j'ai du temps.

  • Speaker #0

    Non, mais juste pour rappeler que j'ai été entrepreneur ensuite tout seul. Je l'ai été d'abord avec Olivier. Et puis ensuite, quelques années après, j'ai créé effectivement une entreprise appelée l'Annuaire Soleil, qui était une entreprise qui a eu l'hôtel des annuaires du téléphone. Quand je raconte ça aux étudiants, ça me donne instantanément un coup de vieux. Je suis désolé,

  • Speaker #1

    mais oui.

  • Speaker #0

    Les annuaires du téléphone ont été créées.

  • Speaker #1

    Tu as appris à piloter un hélicoptère à 62 ans, 63 ans ?

  • Speaker #0

    Oui, c'est ça.

  • Speaker #1

    C'est bon, tout le monde a compris que tu n'avais pas 18 ans.

  • Speaker #0

    Donc Google a effectivement tué cette activité des pages jaunes. C'est 90% du chiffre d'affaires mondial des pages jaunes en 2005 qui était de 50 milliards de dollars à peu près de recettes publicitaires. Aujourd'hui, 90% de l'équivalent sont dans les comptes de Google. Google, quand tu réfléchis, c'est exactement des pages jaunes. Tu cherches sur les cartes. les coordonnées, c'est vraiment des pages jaunes électroniques. Nous, en France, on avait inventé le Minitel, mais Google a fait quand même beaucoup mieux, évidemment. Et donc, j'ai eu cette expérience très complète de création de boîte, en levant des fonds, en affrontant la concurrence de France Télécom de l'époque qui est devenue orange. en vendant mes actions au bout du compte au groupe Bouy quand il est rentré dans les télécoms. Donc, j'ai fait ce parcours avant de devenir prof, puisque l'histoire, c'est qu'en 1996, j'ai 45 ans et j'ai effectivement fait ce parcours entrepreneurial très intense.

  • Speaker #1

    Tu as vendu au bon moment quand même, non ?

  • Speaker #0

    Oui, alors effectivement, oui, gagner.

  • Speaker #1

    Cinq ans plus tard, ça commençait à vraiment pas sentir bon.

  • Speaker #0

    Un peu plus, parce que j'ai un de mes associés qui s'appelait Olivier Vincent, qui était un jeune étudiant que j'avais croisé justement à HEC, qui lui a refait l'annuaire soleil, ou l'équivalent à Vancouver au Canada, puisqu'en fait, il a été entre-temps le patron des opérations d'annuaire du... téléphone de la compagnie GTI, qui était l'équivalent de France Télécom en Colombie-Britannique. Et ensuite, il lui a fait concurrence, donc il a un peu reproduit le modèle. Et lui a vendu très bien sa boîte, mieux que je ne l'ai fait d'ailleurs à Bouygues, en 2005. Donc, le vrai moment du retournement, c'était 2006-2007, où on a commencé à comprendre. Et donc, c'est vraiment lui qui a vendu le meilleur moment, parce que je pense qu'après, c'était compliqué. Et donc, 1995... Il n'y avait pas encore Internet, j'avais aucune envie d'être salarié, je n'avais pas trop d'idées de création de boîte, j'avais quand même pas mal souffert, c'était un parcours très intense, et donc j'avais toujours enseigné en amateur, bon, HEC Entrepreneur déjà, parce que Robert Papin, le fondateur de ce programme, nous avait recruté, Olivier Dassault et moi, à la suite de notre première création, en disant, mais j'ai... venez encadrer des équipes, etc. Donc, j'ai connu HEC Entrepreneur, je dirais, du côté des entrepreneurs qui sont les tuteurs de nos étudiants dans notre pédagogie distinctive qui est cette pédagogie Learning by Doing que nous déployons depuis maintenant 45 ans. Et donc, je suis effectivement devenu presque par hasard prof professionnel, je suis passé de la catégorie amateur à la catégorie professionnelle, grâce à une première maison pour laquelle j'ai beaucoup d'affection et de reconnaissance, qui était le Conservatoire national des arts et métiers. Le Conservatoire national des arts et métiers a mis au concours une chaire de marketing et de vente, à laquelle j'ai postulé à la sortie de mon... L'aventure Annuaire Soleil qui était une aventure très orientée vente. J'avais une force de vente d'une cinquantaine de vendeurs. Quand j'étais le patron des pages jaunes de France Télécom, avant de créer l'Annuaire Soleil, la boîte concurrente, j'avais une force de vente, j'ai dirigé une force de vente qui comportait 1500 vendeurs. Donc de temps en temps, je rencontrais mes copains de Saint-Cyr, je leur disais, écoutez, moi je... Je ne commande pas de régiment, mais je commande une armée de vendeurs. Et donc, j'ai été effectivement élu sur cette chaire nouvellement créée de marketing et de vente. Et je suis devenu en quelque sorte un vrai prof à ce moment-là. Et grâce au CNAM, ce que je n'oublie pas, j'ai enseigné au CNAM pendant 20 ans. Et j'ai beaucoup appris, y compris... la recherche, parce que les professeurs du CNAM sont, pour la plupart d'entre eux, des professionnels qui intègrent l'enseignement supérieur à mi parcours professionnel, mais on est entouré, une chaire, c'est une équipe avec des maîtres de conférences, et on fait de la recherche, et donc, c'est un peu, c'est assez drôle d'ailleurs, parce qu'au CNAM, c'est un peu les maîtres de conf, les maîtres de conférences qui forment les profs, parce que finalement, les profs...

  • Speaker #1

    Avec l'expérience, c'est rare.

  • Speaker #0

    Ils viennent avec leur expérience du business, mais ils sont ignorants de beaucoup d'éléments en matière de recherche académique en gestion, alors qu'il y a une espèce d'échange fertile qui se fait avec les jeunes profs maîtres de conférences et les plus vieux profs titulaires de chair comme je l'étais. J'ai eu beaucoup de bonheur à enseigner au CNAM, on enseigne à des adultes en cours du soir, des adultes qui sont souvent dans... dans des situations un petit peu compliquées professionnellement, pour qui le CNAM est une planche de salut, c'est souvent leur deuxième chance professionnelle, et c'est un auditoire très agréable. Je disais souvent quand j'étais à HEC et aussi au CNAM, puisque je me suis plusieurs années partagé entre les deux, que finalement je faisais... deux fois le métier de prof, mais que le CNAM était en quelque sorte l'antithèse d'HEC. C'est-à-dire que HEC c'est à la campagne, sur le campus de Jouy, le CNAM c'est en plein centre-ville, HEC c'est plutôt une institution qui est orientée vers le matin, on fait cours le matin alors que le CNAM c'est le soir, et surtout la grande différence c'est que la population d'HEC est quand même constituée de jeunes gens à la tête bien faite, mais plutôt issus des classes socialisées. Alors que le CNAM est peuplé de gens qui essayent de s'élever dans la société justement par la connaissance et l'apprentissage. Donc des expériences qui étaient bien...

  • Speaker #1

    Même côté HEC Entrepreneur, c'est le cas ? Ou est-ce qu'il y a un peu plus de diversité sociale sur HEC Entrepreneur qu'ailleurs ?

  • Speaker #0

    Alors c'est probablement un des programmes dans lequel il y a le plus de diversité sociale, mais on ne peut quand même pas dire que ce soit la diversité la plus... La plus frappante. Donc oui, je pense qu'il y a une vraie diversité professionnelle et puis on se donne beaucoup de mal d'ailleurs pour la nourrir parce qu'on pense que dans notre pédagogie, les étudiants travaillent beaucoup en équipe et on cherche toujours à constituer des équipes avec des cultures différentes. C'est-à-dire qu'on a un peu trois tiers dans nos promotions d'XHEC Entrepreneurs, un tiers qui vient de la grande école HEC. et un deuxième tiers qui sont des ingénieurs dont certains viennent de l'IX, mais d'un peu toutes les écoles d'ingénieurs, et puis un troisième tiers dans lequel il y a une population très diverse, d'étudiants étrangers, d'avocats, des formations tout à fait différentes, et on est très en demande de cette diversité de... de ce troisième tiers qui s'éloigne du moule des grandes écoles. Et on a toujours cherché à nourrir ce troisième tiers avec effectivement des étudiants venant des universités et de préférence ayant effectivement des origines sociales de type boursier, etc. Parce que finalement, c'est dans les échanges ensuite qui se constituent tout au long de l'année entre les étudiants. espèce de fertilisation croisée qui existe entre ces trois populations de commerçants, HEC, d'ingénieurs, et de ces troisièmes horizons universitaires ou étrangers, sont très clairement très fertiles.

  • Speaker #1

    Je pense que ça doit être une expérience assez incroyable, justement, déjà de le développer. de le fonder parce que des projets entrepreneurs, là pour le coup, t'en as vu si ce n'est des centaines beaucoup écoute,

  • Speaker #0

    on a un outil de communication entre les promos d'HEC Entrepreneur, on a un Slack inter-promotion dans lequel il y a un peu moins de 2000 étudiants qui sont en ligne et là Là-dedans, on a recensé à peu près 250 boîtes vivantes. Donc effectivement, oui, j'en ai vu passer, je dirais qu'en 14 ans, puisque j'ai dirigé ce programme pendant 14 ans, en 14 ans, à concurrence, dans les bonnes années d'une haute vingtaine de projets par an, alors certes, certains évidemment s'arrêtant. Et dans les mauvaises années d'une demi-douzaine, oui, j'ai vu passer probablement entre 200 et 300 boîtes et projets dont certains font ma fierté. J'y suis pas pour grand-chose d'ailleurs, parce que là-dedans... Non,

  • Speaker #1

    mais tu es un accompagnateur, c'est ce qu'on disait.

  • Speaker #0

    Oui, un accoucheur en fait, tu vois. Je suis un amalutite de la startup. Oui, exactement. Vraiment, le patron d'HEC Entrepreneur, c'est un mailloticien. Il fait accoucher les projets et il y en a effectivement qui font ma fierté, comme Doctolib, comme Front. On a quand même accouché d'une demi-douzaine de licornes, ce qui dans le paysage français n'est pas si mal.

  • Speaker #1

    Il y en avait dans lesquels tu ne croyais pas du tout et où vous faites tout le temps ?

  • Speaker #0

    Ah oui, alors là, je vais te dire… J'ai un nombre d'erreurs, c'est absolument impressionnant. J'ai d'ailleurs une étudiante que j'adore qui poste assez régulièrement, qui s'appelle Graffi Ramato. qui a un nom donc imprononçable, Sri Lankaise d'origine, et qui a créé une boîte qui marche très très bien qui s'appelle Paris New York, qui fait des burgers PNY, je ne sais pas comment elle prononce, mais en tout cas elle fait des burgers formidables, elle a maintenant 14 restaurants, elle fait près de 20 millions d'euros de chiffre d'affaires, c'est vraiment une... une très belle réussite dans le domaine du food. Elle a publié récemment, graphie, un post dans lequel elle raconte, parce que c'est vrai, que quand elle était HEC entrepreneur, je passais ma vie à dire que c'était une erreur de casting. Je disais, mais qu'est-ce que c'est que cette fille dont je n'ai pas entendu une seule fois le son de la voix, parce qu'elle était un peu timide, de toute l'année ? Comment on a pu recruter une fille comme ça ? Et donc, elle a fait un post sur LinkedIn en disant, quand j'étais HEC entrepreneur, Alain Bloch disait que j'étais une erreur de casting. Et maintenant, quand il m'accueille, parce qu'effectivement, je l'accueille régulièrement. Tu l'embrasse sur les deux joues. Oui, il m'accueille en me disant que je suis son erreur de casting préférée. C'est gentil. Effectivement, c'est un assez bon exemple où, franchement, je n'aurais pas mis un centime sur la carrière entrepreneuriale de graphie et c'était une grossière erreur. Je n'ai pas non plus vu venir le formidable succès de... d'Octolib, Mathilde Collin qui est la fondatrice de Front, une autre de nos licornes, a encore aujourd'hui l'air d'une jeune étudiante attardée. Elle a des longs cheveux comme elle avait quand elle était encore sur le campus alors que maintenant elle est mère de deux enfants et qu'elle a conduit cette boîte aux Etats-Unis de façon absolument exemplaire. Donc, j'ai vraiment pris l'habitude de considérer que les archétypes qu'on avait en tête sur les entrepreneurs et ceux qui étaient susceptibles de réussir étaient en général faux. Et qu'il fallait se méfier de ces archétypes.

  • Speaker #1

    Ah, tu as vu passer Pauline Légnaud aussi ?

  • Speaker #0

    Oui, oui, oui, absolument. De Gémio. Et son formidable projet Gémio et puis son formidable blog. J'espère qu'après la colle, je serai enfin invité par Pauline qui ne m'a jamais invité.

  • Speaker #1

    Pauline sur le... sur le podcast de Pauline, qui est effectivement un peu plus retentissant que la colle, mais tu vas voir, justement, c'est un marche-pied. Oui, bien sûr. Il y a beaucoup de discours qui glorifient l'échec comme une étape essentielle du succès. Toi, t'en dirais quoi, toi ?

  • Speaker #0

    Oui, glorifier l'échec, je ne sais pas s'il faut glorifier l'échec, mais il faut considérer que l'échec fait partie du parcours. et que si on n'est pas prêt à faire face à l'échec et éventuellement à le subir, il ne faut pas faire ce métier. Et d'ailleurs, nous, on a dans notre pédagogie et dans le parcours de nos étudiants ce fameux séminaire mission redressement dans lequel on immerge nos étudiants pendant cinq semaines dans une entreprise qui a effectivement déclarer sa cessation des paiements, qui est en période d'observation. Les étudiants travaillent aux côtés du dirigeant et de l'administrateur judiciaire à la construction d'un plan de redressement. Ça les amène à... On ne fait pas ça pour leur faire peur, on fait ça justement pour qu'ils regardent l'échec en face, d'une part, et d'autre part, qu'ils aient les bons réflexes, si la situation se présente et si, effectivement, ils sont confrontés à ce type de... à ce type de situation, puisque aujourd'hui, on peut quand même dire que la loi française est une loi qui est assez favorable à ceux qui savent anticiper, assez favorable aux entrepreneurs qui font face à des difficultés.

  • Speaker #1

    Ça m'amène à la... question ChatGPT parce que ça c'est toute nouveauté je fais screener par mes invités par ChatGPT, alors c'est pas vraiment ChatGPT, là c'est Perplexity en l'occurrence Perplexity que j'aime beaucoup d'ailleurs et je lui demande de trouver moi une question un peu soit touchy etc mais auquel j'aurais pas pensé et donc la question de Perplexity en l'occurrence ou de l'IA de manière générale ... a été. Alain, vous avez été juge au tribunal de commerce de Paris pendant près de deux décennies. Pensez-vous que le système judiciaire français est réellement adapté pour accompagner les entrepreneurs en difficulté ou favorise-t-il une approche punitive ?

  • Speaker #0

    Vas-y, débrouille pas avec ça !

  • Speaker #1

    C'est une très bonne question. C'est une question qui est particulièrement pertinente en ce qui me concerne, puisque dans mon parcours de juge, puis de président de chambre au Tribunal de commerce de Paris, j'ai effectivement eu l'honneur de présider la chambre qui était spécialisée dans les sanctions des dirigeants, et donc qui effectivement était ce volet répressif et punitif. Mais je dis avec beaucoup de force qu'aujourd'hui nous avons un dispositif qui n'est pas majoritairement punitif, qui est vraiment un dispositif qui permet aux entrepreneurs d'affronter les difficultés et de les surmonter. Bien sûr, il faut un dispositif punitif parce qu'il y a quand même des gens qui abusent du système et des gens qui déposent le bilan. après avoir encaissé des accomptes et qui disparaissent, qui remontent des boîtes, etc. Donc, on est bien obligé d'avoir effectivement un arsenal un peu répressif pour sortir du jeu ces entrepreneurs sans scrupules ou même empêcher de nuire des entrepreneurs particulièrement incompétents. dans leur propre intérêt quand on interdit de gérer. Non mais quand on interdit de gérer, il y a vraiment des gens qui ne sont pas faits pour ça, qui se lancent là quelquefois par nécessité parce qu'ils sont chômeurs de longue durée. Enfin bref, ils veulent s'en sortir, ce qui est très respectable. Mais clairement, de temps en temps, on se dit qu'il vaudrait mieux qu'ils fassent autre chose. Voilà. Et donc... Ce volet répressif, ce n'est sûrement pas le plus sympathique. Je suis devenu président de cette chambre de sanctions à Arculon parce qu'on ne rentre pas au tribunal de commerce pour sanctionner ses pairs. Mais j'avais un brief du président du tribunal qui était formidable, qui était de dire qu'on est trop répressif. Et donc, je te demande, toi qui as justement été entrepreneur, d'appliquer la loi avec... discernement et de construire un socle de jurisprudence qui permette d'être suffisamment répressif quand il le faut et qui ouvre la porte du rebond dans tous les autres cas. Voilà, donc fort de ce brief, effectivement, j'étais très content de présider cette chambre et je dis aujourd'hui très clairement que le dispositif... législatif de la loi de 2004 est un dispositif qui est bien utilisé, permet vraiment d'anticiper les difficultés, de les surmonter. C'est un outil formidable qui est très différent de la solution des anglo-saxons, le Chapter 11, qui a été, ce dispositif français a été critiqué parce que, on a considéré qu'il était un dispositif qui était très différent de la solution des anglo-saxons. tord toujours un peu le bras aux créanciers et singulièrement aux créanciers financiers les banquiers mais au total il je trouve qu'il permet quand même vraiment aux dirigeants de qui sait anticiper les difficultés et qui n'a pas peur du tribunal c'est à dire qu'ils osent franchir la porte du tribunal et tu sais que que dans le cours que je fais à lier c paris sur le campus d'orléans que tu diriges je fais un cours sur justement le leadership face aux difficultés qui se termine par une visite du tribunal de commerce de Paris, parce que je pense qu'il faut dédramatiser en quelque sorte ce lieu pour les futurs entrepreneurs. Je pense vraiment que la loi actuelle est très efficace pour surmonter les difficultés.

  • Speaker #0

    Ok, merci. Je transmettrai à Perplexity sa réponse.

  • Speaker #1

    Absolument.

  • Speaker #0

    Justement, moi j'ai un avis, je pense qu'il est assez partagé, c'est qu'aujourd'hui on vit une période d'opportunité pour l'entrepreneuriat grâce à l'IA. Est-ce que tu le penses aussi ? Et comment tu vois les prochaines années ?

  • Speaker #1

    Alors écoute, je ne suis pas devin et je pense que l'exercice prospectif, est un exercice à très haut risque, surtout aujourd'hui avec la rapidité avec laquelle se développent ces technologies, c'est quand même très très impressionnant dans ce secteur. Et donc je me garderais bien de faire un pronostic parce que comme tout outil technologique... complètement révolutionnaire, outil qui est finalement un aboutissement. Parce que moi, je me rappelle que dans ma thèse d'informatique, tu disais que j'étais docteur en informatique. Effectivement, je suis docteur en informatique. J'ai fait cette thèse à l'Université Paris-Dauphine juste après avoir quitté l'armée. Et en fait, je me rappelle que mon directeur de thèse, c'était le professeur Shekhroun, qui a porté effectivement à Dauphine les... premiers enseignements en informatique des organisations. Ils rêvaient qu'on fasse un espèce de tableau de bord de l'entreprise, un tableau de bord automatique. Ils disaient qu'il faudrait que les managers aient comme les pilotes d'avion des indicateurs permanents qui leur permettent. Donc ils rêvaient de ces outils un peu magiques, faits de traitement des données, d'intelligence des données, etc. qui deviennent presque d'actualité aujourd'hui, mais c'est quand même 40 ans plus tard. Et donc, c'est une forme de continuité, de continuation de toutes ces technologies, de l'information, l'intelligence artificielle, mais c'est effectivement un aboutissement, un aboutissement qui peut faire peur, je n'ai pas rentré dans ce débat, mais qui est un formidable outil, parce que bien sûr, Quand on interroge Perplexity, quand on utilise ChatGPT ou Cloud ou n'importe quel autre pour se faciliter le travail, c'est formidable. Mais il faut mesurer que l'intelligence artificielle appliquée par exemple au domaine de la santé ouvre des perspectives absolument inouïes. J'ai eu la chance il y a deux ans dans le voyage que je fais tous les ans dans la Silicon Valley d'être sur le campus de Stanford avec mes étudiants et d'assister à la conférence de deux. profs successifs de médecine qui étaient des experts de l'intelligence artificielle appliquée à la médecine qui étaient d'ailleurs des vieux messieurs qui avaient plus de 80 ans et l'un et l'autre qui étaient à l'américaine toujours profs, toujours chercheurs patrons de start-up tout à fait à l'américaine mais qui nous ont fait un exposé qui était absolument inouï sur le échec les perspectives de l'intelligence artificielle en matière de santé. Et là, ça ouvre des horizons totalement vertigineux, parce que s'il y a des maladies qu'on arrive à vaincre, on va clairement allonger la durée de vie humaine, mais ce faisant, on va aussi déstabiliser complètement nos systèmes de santé, le coût de nos systèmes de santé, nos systèmes de retraite. Enfin bref, si tu veux, je trouve qu'aujourd'hui, dessiner un horizon crédible, est un exercice à très haut risque.

  • Speaker #0

    D'accord. Mais est-ce que tu es d'accord avec moi qu'on vit une époque incroyable d'opportunités ?

  • Speaker #1

    Ah oui, une époque formidable. Non mais moi, je suis enthousiaste. Tu sais, j'ai fait écrire à Claude, à I, moi c'est l'intelligence artificielle que j'utilise le plus, Claude, et je lui ai fait écrire des poèmes. Je lui ai fait écrire un poème sur la détresse de l'entrepreneur confronté à l'échec, puisque tu parlais de ça. Et je lui ai demandé d'écrire ce poème à la façon de Baudelaire. Et je peux te dire que ce poème, il est inouï. Il est inouï de beauté, il est inouï de modernisme, il est incroyable. Et donc, évidemment, c'est un défi, parce qu'on se dit mais comment derrière ça un poète peut trouver finalement, peut arriver à trouver. Mais je trouve que c'est justement incroyable. Ça oblige l'homme à aller jusqu'au bout du bout de son véritable apport. C'est-à-dire cette créativité dont on n'est pas encore capable. Parce que là, en fait, quand Claude écrit un poème, il l'imite. Et donc, il combine des ressources qu'il a digérées. Et donc, l'intelligence humaine, c'est autre chose. Et donc... Donc, je crois que ça nous oblige à une réflexion sur ce que c'est que l'intelligence humaine, ce que c'est que la créativité humaine, comment la cultiver, comment éventuellement l'outiller avec la machine, mais en lui gardant son côté si spécifique, qui fait la spécificité de la nature humaine.

  • Speaker #0

    Allez, c'est parti pour les sept dernières questions.

  • Speaker #1

    D'accord.

  • Speaker #0

    Alain, dis-nous, quel est ton mot préféré ?

  • Speaker #1

    Alors moi, c'est clairement le mot beauté. Je suis fasciné par la beauté. Je trouve que la beauté de ce monde, malgré ses horreurs et la misère du monde, je trouve qu'il y a une forme de beauté du monde, une forme de beauté, de l'amour. On avait un directeur général à HEC qui s'appelait Bernard Ramanansou qui terminait toujours ses discours sur le thème de l'amour en expliquant que finalement, c'était la chose la plus importante, y compris dans le management, la chose la plus importante dans la condition humaine. Et ça va un peu de concert avec cette idée de la beauté. Donc, j'aime beaucoup le mot beauté.

  • Speaker #0

    Alors, à contrario, quel mot détestes-tu ?

  • Speaker #1

    A contrario, pour un militaire, c'est évidemment un peu étonnant, mais le mot que je déteste le plus, c'est le mot conflit. Je déteste le mot conflit parce que je n'aime pas le conflit en réalité.

  • Speaker #0

    La paix est par la guerre, donc le militaire est là pour éviter la guerre.

  • Speaker #1

    Exactement. Et donc, je déteste le mot conflit et je n'aime pas d'une façon générale le conflit.

  • Speaker #0

    Civis pacem par abellum, pour ceux qui se poseraient la question.

  • Speaker #1

    Exactement.

  • Speaker #0

    Le son, le bruit que tu aimes ?

  • Speaker #1

    Alors, j'ai une tendresse particulière pour le bruit de l'eau qui coule.

  • Speaker #0

    Ouais,

  • Speaker #1

    ok. De l'eau qui coule, que ce soit dans la nature, le torrent, mais que ce soit aussi...

  • Speaker #0

    Un peu plus dans le maquillage tard.

  • Speaker #1

    Cette petite musique de l'eau qui coule, je trouve que c'est un peu la musique de la vie quand même. Et donc, j'ai une tendresse particulière pour ce son.

  • Speaker #0

    Ouais, qui s'écoule. Le son ou le bruit que tu détestes ?

  • Speaker #1

    Je déteste par-dessus tout les éclats de voix. Je suis très agressé par les éclats de voix, que ce soit des éclats de voix d'ailleurs de gaieté, quand on parle dans les transports publics, il y a des gens qui hurlent parce qu'ils sont contents, etc. Ça m'agresse, je n'aime pas les éclats de voix. Et de façon générale, c'est vraiment un truc, alors ça va peut-être avec justement le conflit, parce qu'en général, quand il y a conflit, il y a éclat de voix, mais finalement, l'eau qui coule est aussi une forme de beauté, donc tu vois, il y a une certaine cohérence entre mes choix.

  • Speaker #0

    Tu as réussi à avoir un management sans éclat de voix.

  • Speaker #1

    Écoute, je m'y suis employé.

  • Speaker #0

    Celui qui n'a jamais péché me jette la première pierre.

  • Speaker #1

    J'ai eu des colères comme tout le monde. Je pense que la colère, il faut de temps en temps être en colère. Mais oui, j'ai quand même essayé toujours d'éviter les éclats de voix.

  • Speaker #0

    Ton juron gros mot ou blasphème favori ?

  • Speaker #1

    Écoute, c'est très simple. c'est « fais chier bordel » . Quand quelque chose m'énerve ou me résiste, « fais chier bordel » .

  • Speaker #0

    Tu n'en as pas gardé un de ta carrière militaire ?

  • Speaker #1

    Non, mais dans l'armée, ça arrive aussi de dire « fais chier bordel » .

  • Speaker #0

    Plus souvent que de raison, effectivement. La citation que tu aurais aimé avoir prononcée ?

  • Speaker #1

    Alors, écoute... quand tu m'as dit qu'on posait ces sept questions à la fin, j'ai un peu réfléchi. Et au fond, je me suis dit que j'allais te proposer, parce que c'est ce que je trouve, un vers d'Aragon, de Louis Aragon, dans son merveilleux poème Les yeux d'Elsa, qui est pour moi probablement le vers le plus beau de la littérature. française c'est ce vers qui dit tes yeux lorsqu'une larme iluit tes yeux rendent jaloux le ciel d'après la pluie et je trouve que c'est que ce verre dit à la fois à la fois l'amour à la fois la beauté ce verre il est il est extraordinairement musical tu vois d'ailleurs jean ferrat on a fait une chanson tes yeux lorsqu'une larme iluit tes yeux rendent jaloux le ciel d'après la pluie moi je trouve que quand on a écrit ça On peut mourir.

  • Speaker #0

    Non, c'est beau. C'est beau, je ne connaissais pas. Dernière question. Si Dieu existe, qu'aimerais-tu, après ta mort, l'entendre te dire ?

  • Speaker #1

    Bienvenue.

  • Speaker #0

    Bienvenue, juste friendly welcome.

  • Speaker #1

    Ben oui, parce que s'il me dit bienvenue, c'est plutôt bon signe. Ça veut dire, un, qu'il existe,

  • Speaker #0

    deux,

  • Speaker #1

    qu'il considère que je ne vais pas tomber. C'est plutôt une bonne nouvelle que tu arrives,

  • Speaker #0

    on va prendre l'apéro.

  • Speaker #1

    Franchement, bienvenue, ça m'irait. Ok,

  • Speaker #0

    très bien, ça marche. Écoute Alain, merci beaucoup de ce temps que tu nous as consacré, c'était super intéressant.

  • Speaker #1

    C'était très sympa.

  • Speaker #0

    Et puis... Je vous rappelle à tous la stratégie Bamboo dans toutes les bonnes librairies. Il est en précommande seulement sur Amazon. Oui,

  • Speaker #1

    il est en précommande parce qu'il n'est pas encore sorti. Il est en parution.

  • Speaker #0

    Parce qu'il est référencé un peu partout. Ça, c'est clair. Donc, allez précommander sur Amazon. C'est qui ton éditeur ?

  • Speaker #1

    C'est Pearson. Pearson,

  • Speaker #0

    ok. Donc voilà, vous allez chez Pearson directement. Même si on a parlé de la stratégie d'Amazon, ce n'est pas la question. Donc un grand merci Alain. Merci à toi. On se revoit bientôt à Orléans ou à Paris.

  • Speaker #1

    Exactement. Merci beaucoup.

  • Speaker #0

    C'était la colle d'Alain Bloch. Bravo, vous avez tenu jusque là. Merci de votre écoute. Si vous avez aimé cet épisode, partagez-le sur les réseaux sociaux, allez mettre 5 étoiles et des commentaires sur les plateformes de podcast. Abonnez-vous, abonnez-vous à notre newsletter. Et dans tous les cas, à très bientôt pour un prochain épisode de La Colle. Et n'oubliez pas, tout est possible à qui rêve, ose, travaille et n'abandonne jamais.

  • Speaker #2

    Merci.

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