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Valentine - De la salle de naissance à la naissance d’une startup 🚀 Faire évoluer la santé des femmes cover
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🎙️La voie des sages-femmes

Valentine - De la salle de naissance à la naissance d’une startup 🚀 Faire évoluer la santé des femmes

Valentine - De la salle de naissance à la naissance d’une startup 🚀 Faire évoluer la santé des femmes

34min |27/02/2025
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Description

🛋️Tout est parti d'une discussion sur le canapé.

Valentine, sage-femme à la maternité des Bluets, et Isabelle, sa colocataire, échangent sur l’offre de soins actuelle et rêvent d’un lieu de santé pensé par et pour les femmes.

Mais entre l’envie et la réalité, il y a un monde : celui des levées de fonds, des investisseurs et du cadre juridique, bien loin des couloirs de la maternité.


Dans cet épisode, plongez dans l’histoire captivante de Valentine, sage-femme engagée qui a osé braver ses doutes et sortir de sa zone de confort pour concrétiser un projet ambitieux : Jeen, un grand centre de santé pluriprofessionnel en plein Paris dédié à la santé des femmes, proposant des parcours de soin complets, continus et 100% adaptés à leurs besoins.


Du premier déclic à la concrétisation, nous découvrons les coulisses de cette aventure, entre défis relevés, apprentissages précieux et joie du collectif.


🎧 Un témoignage inspirant pour toutes celles et ceux qui souhaitent donner vie à leurs projets et faire évoluer la santé des femmes.


Produit par Alice de Maieuticapp


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Valentine

    Oh waouh ! On ne se rendait pas compte de l'ampleur de ce qu'on allait découvrir. Je dis tout ce qui n'arrivait qu'à mes copains, en fait, pourrait m'arriver. J'étais pire qu'une primipare qui vient d'avoir son premier bébé et qui ne parle que de ça. Je découvre ce que c'est qu'une levée de fonds, je découvre ce que c'est qu'un investisseur. Je suis pétrifiée de stress de ce que je suis en train de faire, donc j'ai eu des gros moments de panique. Cette aventure m'a profondément changée. Je me connais beaucoup mieux. Je n'ai jamais eu le sentiment d'être cette pauvre petite sage-femme perdue dans le milieu entrepreneurial.

  • Alice

    Nous sommes plongées en plein cœur du 11e arrondissement à Paris, dans les locaux de Jeen, un centre pluriprofessionnel dédié à la santé des femmes. C'est dans une salle d'attente chaleureuse, aux murs colorés, au canapé Cosy et dont la bibliothèque est remplie d'ouvrages sur la santé féminine que Valentine nous accueille.

  • Valentine

    C'est toujours la tentation principale et là on a vraiment imaginé une tentation qui ne ressemble pas à un truc hospitalier, on a cassé un peu avec les codes du médical, austère, froid.

  • Alice

    Valentine a cofondé Jeen en 2021 avec Isabelle, sa colocataire, alors qu'elle était sage-femme hospitalière à la maternité des Bluets. Tout est parti de leur discussion canapé. Au fil de leurs réflexions et de leurs recherches, le soir, en rentrant du boulot, elles se rendent compte de tout ce qu'il manque pour prendre soin de la santé des femmes. Ainsi, en regroupant tous les acteurs dédiés à la santé des femmes sous un même toit, l'objectif est de proposer des parcours de soins complets, continus et 100% adaptés à leurs besoins. Mais il n'y a pas que des consultations au sein de ce centre de plus de 300 m2. Les patientes peuvent assister aussi à des conférences, participer à des ateliers et même prendre des cours de yoga.

  • Valentine

    Et c'est là aussi où on fait deux masterclass par mois. Ça peut être sages-femmes, médecins, et ils viennent faire une espèce de masterclass apéro interactif, mais autour d'un sujet lié à la santé des femmes. Donc ça, on le fait ici, on rajoute plein de chaises, et ça ne s'y prête pas trop.

  • Alice

    Ainsi, dans ce deuxième épisode du podcast La Voix des Sages-Femmes, nous allons entendre Valentine nous raconter comment aller passer de jeune sage-femme hospitalière à entrepreneuse d'une start-up pleine de succès qui lève plus d'un million d'euros au service de la santé des femmes.

  • Valentine

    Moi, c'est Valentine Burucoa, je suis sage-femme, j'ai 31 ans et depuis 3 ans maintenant, je suis sur le projet Jeen, donc je suis cofondatrice de Jeen et sage-femme depuis bientôt 8 ans. J'ai jamais su répondre à la question de quand ai-je voulu devenir sage-femme parce que je ne m'en souviens pas, c'est un peu comme si ça avait toujours été, en tout cas il y a un peu un mythe dans la famille de « on a toujours su que c'est ça que tu ferais ». Toute petite, j'avais un attrait pour ces ventres qui s'arrondissent. J'étais toujours super intriguée et attirée par les femmes enceintes. Puis beaucoup aussi par les nouveau-nés. Alors que finalement, notre métier, ce n'est pas tant de s'occuper des nouveau-nés. Mais la femme enceinte et le nouveau-né, c'était un peu une obsession. Et je pense que j'ai compris bien plus tard. Et puis parce que ça a pas mal évolué depuis. Mais ce que c'était qu'une sage-femme et que c'était bien plus large que ça. Je commençais à saisir au lycée qu'il y avait ce côté accompagnement humain. Mon tout premier stage en tant qu'étudiante sage-femme, c'était à la maternité des Bluets. Symbolique parce que c'est là où encore aujourd'hui je travaille et j'ai jamais travaillé dans un autre hôpital. Donc ça m'a fait découvrir quand même le métier, l'ambiance en salle de naissance. Et puis, assez rapidement, ça m'a fait découvrir les Bluets tout court et mon coup de cœur Bluets date de là. Donc je crois qu'assez rapidement, je me suis dit, il faut que je me débrouille pour que chaque année d'études, je mette un pied aux Bluets pour être sûre d'y atterrir un jour. Alors pourquoi un coup de cœur pour les Bluets ? Déjà, je trouvais que cette façon de s'adresser aux femmes et aux couples était différente de ce que j'avais imaginé à l'hôpital. Je trouvais qu'il y avait une accessibilité de la part des soignants. Puis après, plein de petits détails qui n'en sont pas, en fait, mais qui, selon moi, donnent pas mal d'autonomie aux femmes pour ce jour si particulier. La dernière année, j'avais du coup ce fameux stage long qu'on a en fin de cursus au Bluet. J'avais réussi à l'avoir là-bas. Et donc, je n'avais pas trop de doutes parce que je savais que je m'entendais quand même bien avec les équipes, que pour eux, c'est quand même canon de recruter quelqu'un qui connaît déjà les logiciels, les protocoles, etc. Mais bon, tu as toujours une petite... de pointe de « et si j'étais pas prise ? » Je me souviens très bien d'être de garde ensuite de couche et d'être l'étudiante de Anna Roy qui est une sage-femme que l'on connaît pas mal dans le milieu puisqu'elle fait pas mal de choses et se bat pas mal pour la profession. Et bien ce jour-là, j'étais de garde avec Anna qui j'ai dit que j'attendais un peu une réponse de ma cadre et avec son énergie et son franc-parler habituel, ni une ni deux, elle m'a dit « je reviens » . Elle a descendu deux étages, elle est allée voir la cadre. Quand elle est remontée, elle m'a dit « Bon bah, descends la voir, c'est bon, tu vas signer ton contrat. » Mais je me souviens pas mal de ce jour où ça y est, c'était check. Je savais qu'à la rentrée, je serais sa femme titulaire au Bluet. Et j'ai eu la chance que ça démarre d'emblée par un CDI. Donc c'était bloqué. Les débuts en tant que sage-femme, je m'en souviens bien, parce que j'ai trouvé ça pas évident. Je trouve que les deux premiers mois, tu as un vrai syndrome de l'imposteur, où tu as du mal à rentrer dans la pièce en te présentant, en disant que tu es sage-femme. Tout d'un coup, tu dois te sentir sage-femme. Donc je me souviens que les deux premiers mois, c'était un mélange d'excitation et de bon vertige. Mais que, ceci dit, assez rapidement, au bout de deux mois, déjà, tu te sens plus légitime. Et après, je trouvais ça fou la première année, de voir le nombre de trucs que tu apprends. J'étais presque excitée d'avoir une hémorragie de la délivrance. Je me battais pour avoir l'accouchement sans péril. Tu as cette énergie du début et une vraie envie d'apprendre et tu te vois progresser à grande vitesse. Donc je trouve ça assez grisant. J'en ai un bon souvenir de la première année. J'ai beaucoup, beaucoup été en salle de naissance. J'ai tourné un peu ailleurs en consultation, en suite de couche. Et après, c'est ce truc particulier en tant que sage-femme, c'est un peu en train de changer. Mais tu gagnes en expérience, mais tu as pas vraiment de carrière en fait. Ça a l'avantage de tu prends jamais d'habitude et il n'y a pas vraiment de routine parce que c'est différent à chaque fois. Mais tu as pas vraiment de perspective d'évolution. Donc je pense que c'est le seul truc qui a commencé à me titiller un peu au bout de deux, trois ans, de me dire « Ok, du coup, ça y est, je suis là, je suis au Bluet, c'est là où j'ai envie d'être et où je me sens bien. » Mais « What's next ? » Je pense que j'avais un peu un sentiment de « Ah, ça va peut-être pas me suffire » , alors que je me suis toujours dit que globalement, une fois que j'aurai un pied à l'hôpital et qui plus est au Bluet, j'y ferai ma vie. Mais ouais, je pense qu'un peu un paradoxe hyper épanouie et pourtant, de l'autre côté, petit sentiment de manque. Et pour autant, c'est mon premier amour et j'en suis jamais revenue. J'y suis encore aujourd'hui. Alors aujourd'hui, je suis vacataire et je fais deux gardes par mois. Mais c'est mes soupapes de décompression. C'est mes moments, mes deux gardes par mois et aucune envie d'arrêter. Même si les équipes ont pas mal évolué, l'activité n'est plus du tout la même non plus. Donc, il y a plein de choses qui changent, mais je continue à trouver cet endroit quand même assez magnifique. Et du coup, j'ai un peu commencé à essayer de m'investir au sein de la maternité pour améliorer un peu des choses, donner des petits coups de main, monter des projets. Puis là, ça a été un peu la désillusion quand même, parce que ça reste l'hôpital, donc c'est une grosse institution, manque de moyens humains, manque de moyens financiers, et puis surtout lenteur d'un énorme organisme. Et là, j'ai une copine médecin généraliste qui m'a parlé d'un projet qui s'appelle NABLA. C'était l'équivalent de ce qu'on connaît un peu plus aujourd'hui qui s'appelle MEI. C'est une application dédiée à la santé des femmes. Et le concept, c'était que les femmes sur l'application pouvaient retrouver du contenu intéressant, écrit par des soignants. Et puis, elles pouvaient poser toutes leurs questions à des professionnels de santé sur l'application. Et donc, j'ai commencé à travailler pour eux en parallèle des Bluets. Et je faisais partie des sages-femmes qui répondaient aux questions des femmes. Et du coup, c'était la première fois que j'avais une expérience plus en entreprise et même en start-up, en fait. J'ai vu vraiment le projet émerger et puis du coup j'ai découvert ce concept de tester, itérer tu testes un truc, tu déconstruis tu retentes et puis hyper collaboratif on pouvait donner notre avis on voyait le truc être hyper modulable donc c'était quand même assez grisant et puis idéal pour compléter ma vie en tant que sage-femme parce que du coup je pouvais le faire de chez moi, à domicile, avec des horaires assez souples, donc compatibles avec mes repos de garde. Je crois que j'ai jamais fait uniquement mon métier de sage-femme en tant que telle. Déjà quand j'étais étudiante sage-femme ... Il y avait une nana des promos d'avant qui avait mis en place une adresse mail à destination des jeunes parents qui pouvaient chercher de l'aide la nuit quand ils rentraient à la maison. Et donc moi qui adore les nouveau-nés et un peu frustrée parce qu'en fait en tant que sage-femme, tu t'en occupes pas tant que ça. Quand j'ai su qu'il y avait ça qui existait, j'ai su direct que moi j'avais envie de faire plein de nuits chez plein de gens. Et donc j'ai commencé quand j'étais étudiante sage-femme. D'ailleurs j'étais pas la plus assidue et concentrée en cours parce que du coup je faisais tellement de nuits chez des gens que je m'endormais quand même régulièrement en cours. Et quand j'ai commencé à devenir sage-femme, ce qui était du coup ce petit job étudiant, j'avais quand même envie de le conserver. Ça m'apportait plein d'autres trucs, même sur ma vision du postpartum. Tu rentres quand même dans l'intimité des gens et dans le quotidien des gens pendant plusieurs mois. Ça pouvait être des gens qui ont des prématurés, des jumeaux, des triplés, ou qui ont la chance d'avoir l'argent de demander un peu d'aide une nuit de temps en temps en postpartum. Donc je voyais plein de familles différentes, plein de problématiques différentes. Et je me sentais vraiment utile, tu ne te sens pas juste « babysitter » . Puis je me suis régalée, j'en ai tellement gardé, je me suis régalée. Et donc j'ai continué quand j'étais sage-femme, mais j'avais quand même mon temps plein au bluet. Donc du coup, je ne pouvais plus en faire autant qu'avant. Et puis, mon nom commençait à tourner dans les familles parisiennes qui avaient besoin. Du coup, j'avais beaucoup, beaucoup de demandes et je n'arrivais pas à y répondre. Et en même temps, je ne sais pas dire non. Et donc du coup, ce que j'ai commencé à faire, c'est proposer les nuits que je ne pouvais pas faire à des étudiants de sage-femme ou à des auxiliaires de puériculture, des puéricultrices. Et donc, mes premières années en tant que sage-femme, c'était ça. J'avais mon temps plein, mais j'avais toujours mes nuits. Plus, je bidouillais un peu pour déléguer des nuits que je ne pouvais pas faire. Puis jusqu'à ce que j'ai des proches qui me disent « mais en fait, si tu fais ça et que ça devient chronophage, tu pourrais monter un truc un peu plus officiel » . Et du coup, avec une de mes très bonnes copines de lycée, qui n'est pas du milieu médical, on s'est dit « alors créons une plateforme de mise en relation entre des jeunes parents qui ont besoin et des étudiants de sages-femmes, enfin en tout cas des personnes qui travaillent dans la périnatalité et des personnes sûres pour des gardes de nuits de nouveau-nés à domicile » . Et donc, on a commencé à créer un site et à créer des process un peu plus carrés que ce que je faisais jusque-là. Et donc, on a fait ça pendant un an. Ça devait faire quatre ans que j'étais au Bluet. Et du coup, c'était mon projet à côté, qui était à la fois très cool et à la fois, en fait, une fois que ça a commencé à se professionnaliser et que je commençais à plus du tout connaître les gens qui faisaient appel à nos services, entre guillemets. Là, j'ai commencé à pas trop aimer l'expérience. J'avais l'impression que les gens qui nous contactaient étaient de plus en plus riches et nous prenaient vraiment comme une main d'œuvre. De plus en plus riche n'est pas un problème, mais de plus en plus riche et de plus en plus exigeant. Et je n'aimais pas ce qu'on était en train de faire. Et je commençais à me dire qu'en tout cas, ça m'avait prouvé que je pouvais faire d'autres choses, toujours en lien avec la santé, mais faire autre chose. Et je me disais par contre, si je gardais un peu un projet à côté de mon temps plein à l'hôpital, je voulais que ce soit un truc qui ait un peu plus d'impact à mes yeux. Donc au bout d'un an, on a arrêté et au moment où j'ai arrêté, j'étais en colocation avec Isabelle, qui est la personne avec qui j'ai monté Jeen. Isabelle, j'en parle comme si c'était la fin de ma vie, mais c'est presque ça, associée. Et du coup, on s'est rencontrés en étant en colocation ensemble. Quand je rentrais de garde, j'avais quand même pas mal besoin de déverser un peu. Les trucs cool, mais aussi mes frustrations, justement, de voir des choses qui ne bougent pas, alors que moi j'aimerais que ça bouge. Je lui racontais Nabla, enfin bon, je lui racontais un peu ma vie. Et puis elle, dans l'autre sens, c'est aussi une femme entourée de femmes, donc évidemment, on partageait. des histoires classiques, santé, gynéco, femmes. Elle, elle n'est pas du tout le même profil. Elle a fait une prépa, une école de commerce. Elle faisait du conseil à ce moment-là. Du coup, c'est vraiment nos discussions canapé qui ont fait un peu émerger des questionnements sur la façon d'accompagner les femmes en France. Moi, je me questionnais du coup quand même pas mal sur "est-ce que mon temps plein au Bluet, c'est vraiment ce que j'ai envie de faire ?". Aucun doute sur le fait d'avoir envie de continuer, mais peut-être... pas à temps plein. Et Nabla me donnait envie de faire autre chose. En fait, ça m'a un peu mis ces expériences-là le pied à l'étrier d'expériences un peu entrepreneuriales ou d'une vie en entreprise qui commençaient à me donner un peu envie. Je voyais aussi tout ce que la vie en entreprise apporte que l'hôpital t'apporte pas. À l'hôpital, on est quand même pas vraiment managé. On a des cadres qui ont déjà pas mal de boulot. On a la direction et on a les RH, mais en fait, t'es un numéro parmi mille. Il y a personne qui cherche vraiment à te faire évoluer et qui t'apporte de l'expérience. Tu te formes quand même par toi-même ou autour de tes collègues. Mais voilà, donc je trouvais qu'il y avait zéro management, zéro carrière possible, ce que je disais tout à l'heure, mais tu ne peux pas avoir d'ambition. Quand tu es sage-femme, tu peux te rajouter plein de cordes à ton arc, tu peux faire plein de DU, ce qui est déjà canonissime, mais tu n'as pas de perspective d'évolution. Et ce n'était pas tant une ambition en version snob et élitiste. Je ne me disais pas que je voulais monter en grade, je me disais juste que j'avais envie de... de me dire que mon boulot pouvait changer ou que tu pouvais avoir d'autres opportunités. Et puis le dernier truc qui me semble être le principal, c'est que je trouve que le côté plus RH, le côté un peu sympa d'une vie en entreprise, tu l'as pas à l'hôpital. Si t'as de la chance d'être dans une équipe qui s'entend bien, c'est trop cool, mais on ne se voit pas forcément à l'extérieur sauf une initiative personnelle. T'as jamais un séminaire d'organisé, les formations qu'on te donne, c'est des formations obligatoires où tout le monde a envie de se pendre plutôt que de'y aller. Donc tout ce côté vie d'équipe, on ne l'a pas. Et même, j'ai plutôt tendance à penser qu'avec l'activité qu'il y a à l'hôpital et les conditions de travail difficiles, on a plutôt tendance à beaucoup se plaindre et à pas mal critiquer le travail des uns des autres. C'est pas hyper sain non plus comme environnement de travail, ce qui est hyper paradoxal parce qu'on est les gens qui soignons, mais en fait, on prend pas vraiment soin de nous. C'est la phrase préférée d'Isabelle, c'est prendre soin des gens qui prennent soin. Et du coup, je commence à découvrir un peu ce qui se passe en plus, chez Nabla, ambiance start-up. Et là, tu découvres une énergie folle, les afterworks. Du coup, tout ce qui n'arrivait qu'à mes copains, en fait, pourrait m'arriver. Et je pense que ça a un look et un truc dans ma tête que je ne suis pas forcément obligée de passer toute ma vie à temps plein à l'hôpital. Et en fait, ces trucs-là que je trouve trop cool dans les vies des autres hors médicales, ça pourrait exister chez moi aussi. Peut-être que je peux faire autre chose. Et en tout cas, ce qui est sûr, c'est que j'ai envie d'autre chose. L'idée de Jeen est née dans ma tête forcément plus au début via le pan périnatalité parce que c'est surtout ça que je connaissais. Et donc là, je faisais un peu le constat de, on ne manque pas de professionnels de santé parce qu'il y en a plein, des ostéos, des sages-femmes, des psys, des gynécos. Mais il n'y a pas du tout de liant entre eux. Une fois que tu mets le pied dans l'hôpital, le parcours, il existe. Mais en dehors, il n'y a pas tant de parcours de soins en tant que tel qui existe. Donc ça, je commençais à trouver ça bizarre. Et puis, je regardais un peu du coup ce qui existait à l'hôpital en libéral, en me disant si je vais en libéral, qu'est-ce que ça va m'apporter de plus et qu'est-ce que ça apportera aux femmes de différents ? Parce que j'avais quelques collègues qui partaient des Bluets. Effectivement, elles avaient une relation avec leurs patientes qui était en fait assez épanouissante parce que tu les suis vraiment sur la durée et tu leur apportes presque plus que ce que t'apportes à l'hôpital, en tout cas différemment. Je me suis rendu compte aussi que, concernant les sages-femmes, on pouvait faire 10 000 milliards de trucs en libéral. Mais sur ce côté très "femmes", je me disais pour les femmes, c'est très flou. Le suivi en ville, il n'y a pas de parcours. Donc je racontais ça un peu à Isabelle et notamment, je me souviens qu'à ce moment-là, j'étais un peu obsédée par le sujet du postpartum. Je me disais, une fois qu'elle rentre chez elle, c'est le no man's land, il se passe plein de trucs pendant la grossesse, mais en postpartum, pas du tout. Il y a ok les visites de sages-femmes à domicile, si tant est qu'elle trouve une sage-femme qui vient à domicile. Mais sinon, en attendant la rééduc, elles sont quand même pas mal livrées elles-mêmes. Et je dis les femmes, mais enfin les couples au global. Alors, OK, il y a des parcours de soins cools pendant la grossesse, mais encore qu'il y a des choses à faire. Et puis en postpartum, ça n'existe pas, les parcours de soins. Il n'y a pas du tout d'équipe présente pour elle. Puis après, en discutant avec Isabelle, elle et moi, d'ailleurs, nous n'avons pas d'enfant. Et donc, du coup, on pensait aussi pas mal à ce qu'on connaissait. Donc, plus le suivi gynéco, entre guillemets, classique. Et rien que là, on rigolait au début en se disant, nous deux, on cumule sept moyens contraceptifs sur les dix dernières années. Et puis, on avait toutes les deux pas de gynéco attitré. Et donc là, on a commencé à interroger des femmes sur leur suivi de santé. Donc on avait quand même un petit bagage qui nous prouvait qu'effectivement, il y avait ce vrai manque de parcours de soins. Plus les interviews qu'on faisait à côté, on faisait des petites interviews aussi de professionnels de santé pour ne pas se baser que sur mes ressentis. Ça a bien duré six mois où on a creusé. Et plus on creusait, plus on s'étonnait de découvrir à quel point il y avait un manque de considération depuis plusieurs années, voire plusieurs siècles, de la santé féminine. Ça fait des siècles que la santé a été imaginée par des hommes. Et puis, à partir du corps masculin, on a vraiment calqué ce qu'on connaissait de la santé des hommes sur la santé des femmes, comme si c'était corps identique, symptômes identiques, etc. Et aujourd'hui, on sait évidemment que non. Et donc, même moi, j'ai découvert que ça ne fait pas si longtemps que les femmes sont incluses dans les essais cliniques, les recherches. On ne se rendait pas compte de l'ampleur de ce qu'on allait découvrir. Mais il y a en plus tous les enjeux qui sont spécifiques aux femmes, à la santé féminine : endométriose, SOPK, les sujets de fertilité, la ménopause. Et là, on se disait, oui, en fait, il n'y a pas 10 000 ressources, il n'y a pas beaucoup d'infos faites auprès des femmes. Bref, étendu de, oh, waouh, il y a du boulot, il y a tellement de trucs à faire, on commence par quoi ? Et du coup, moi, c'est comme ça que j'ai commencé à vraiment me mettre dedans. Et en fait, Isabelle aussi, on s'est embarquées un peu l'une l'autre dans ces longues discussions pendant plusieurs mois. C'est six mois de recherche, réflexion. Si ça n'avait dépendu... que de moi, je crois qu'il ne se serait pas passé grand-chose de plus. Je savais que j'avais envie d'en faire quelque chose, mais alors, énorme syndrome de l'imposteur et puis sentiment d'une maxi-montagne en face de toi. En fait, je commence par quoi ? De toute façon, je suis à temps plein à l'hôpital. Et c'est là où force de l'association, mais Isabelle, du fait de son parcours, il y avait quand même un peu plus d'évidence en elle que c'était possible. Elle avait fait son master entrepreneur en certain d'écoles de commerce. Donc, elle savait presque depuis toujours qu'à un moment, elle montrait son propre projet. Donc, elle m'a quand même un peu tirée là-dedans. Et Isabelle, du coup, pour ça, a été ultra structurant. Enfin, on sent qu'elle avait les études qu'il fallait et l'expérience qu'il fallait pour construire tout ça. Du coup, on a commencé à vraiment ficeler un peu notre solution, entre guillemets. Et donc, on s'est dit, on veut des lieux. On s'est dit, on va mettre au même endroit une équipe, un vrai collectif de soignants pluridisciplinaires qui vont tous... avoir une expertise autour de la santé des femmes et comme ça, vraiment se compléter. Donc pour eux, beaucoup plus enrichissant et puis ça répond au problème de la solitude du praticien libéral. Et pour les femmes, trop canon, parce que du coup, une fois qu'elles mettent un pied dans le lieu, elles peuvent construire leur parcours de soins au même endroit. Donc on partait un peu là-dessus en se disant, waouh, rêve ultime si on a un lieu avec tout. Il faut du médical, mais il faut aussi du paramédical, il faudrait des médecines complémentaires, il faudrait des masterclass pour redonner de l'info, il faudrait des ateliers un peu plus sportifs. Parce que l'activité physique a une énorme place dans la santé. Puis après, on s'est quand même confrontés à la réalité de la santé en France, qui est passionnante mais intense. C'est le côté juridique. On a dû faire tout un travail juridique pour voir au-delà de ce qu'on avait envie de faire, ce qu'on avait le droit de faire. Puis une fois qu'on avait validé le côté juridique, tu veux monter un lieu, mais du coup, il faut de l'argent. Et là, on s'est dit, du coup, on va aller voir les banques. Mais les banques, elles te demandent d'avoir un apport, qu'évidemment, du haut de nos même pas 30 ans à l'époque, nous n'avions pas. Donc, on a dû aussi réfléchir comment on va aller chercher des financements. Donc, tout ça, c'est l'étape de... À partir du moment où on a commencé à interroger les gens jusqu'à « Ok, on se lance, on a la structure juridique, on comprend comment on va devoir aller chercher l'argent. Bon, bah, go ! » Et donc là, Isabelle, elle a quitté son boulot. Elle a obtenu une rupture conventionnelle, elle est partie de son boulot. Et là, c'était plutôt à moi de me prendre une petite claque dans la figure. Je crois qu'on parlait de tout ça depuis plusieurs mois. Et j'étais trop emballée par ce qu'on se disait, mais je ne réalisais pas vraiment. Par ailleurs, elle, elle avait pu partir avec une rupture conventionnelle et donc toucher le chômage. Mais à l'hôpital, ça, ça n'existe pas. Comment j'allais gagner ma vie, c'était un sujet. Donc, il y a eu quand même un petit moment de flou de mon côté. Du coup, par rapport à Isabelle, j'étais quand même beaucoup moins investie. Et heureusement qu'elle n'a pas lâché. Quand j'ai compris qu'elle y allait vraiment avec ou sans moi, là, je me suis dit, il faut que tu te bouges. Et du coup, j'ai demandé un mi-temps au Bluet. Et du coup, on a commencé à bosser sur le projet vraiment avec Isabelle à temps plein et moi à mi-temps. Découverte d'un tout autre univers, d'un coup. Je découvre ce que c'est qu'une levée de fonds, je découvre ce que c'est qu'un investisseur, je découvre plein de mots que je ne connais pas. C'est un peu comme quand tu apprends une nouvelle langue, je n'essayais même pas de l'interrompre à chaque fois, je prenais le sens global. Franchement, j'ai appris sur le tas. C'est là où je suis super consciente d'avoir une associée en or, c'est qu'elle a toujours été super patiente, pas du tout condescendante, elle m'a toujours tout expliqué. Je n'ai jamais eu le sentiment, à côté d'elle, d'être cette pauvre petite sage-femme perdue dans le milieu entrepreneurial. Et puis, j'ai trouvé l'accueil de tous les entrepreneurs qu'on rencontrait, même dans le cadre de la levée de fonds. J'avais un peu peur qu'on me prenne pour que la sage-femme et qu'on regarde beaucoup Isabelle. Et je ne l'ai pas du tout ressenti. Je ne me suis pas du tout sentie lésée quand on racontait notre projet, quand on essayait de convaincre, d'embarquer les gens. Au contraire, je trouvais qu'on donnait de la vraie valeur au fait que dans le duo, il y ait quelqu'un du milieu médical. Donc, j'ai vraiment appris sur le tas au fur et à mesure. Maintenant, je souris en regardant comment je parlais, comment j'ai appris qu'on pouvait ranger une boîte mail. j'ai jamais trié mes mails avant, à utiliser un Google Agenda, du truc le plus B à bas au truc le plus pointu de la levée de fonds, on y est allé step by step toutes les deux. Et pas que toutes les deux, assez rapidement, on s'est fait accompagner par ce qu'on appelle donc un incubateur. On s'est fait même accompagner par deux incubateurs en parallèle qu'on avait bien choisis, qui étaient vraiment un spécialiste dans la santé et l'autre dans ce qu'on appelle l'impact. Donc, ils ne suivent que des projets qui ont un impact social ou écologique. On n'est pas allé voir le côté trop start-up nation qui n'a rien à voir avec ce qu'on faisait. Et je pense que c'est une de nos qualités avec Isabelle, c'est de beaucoup savoir s'entourer. Je pense que j'ai mis un peu du temps à en parler vraiment. Déjà parce que quand même, dans le milieu médical, tu as l'impression de monter sa boîte et en plus, lever des fonds, c'est hyper dark. Je ne voulais pas avoir l'air d'être la connasse entrepreneuse, j'ai pas d'autre mot. Celui qui, pour le coup, m'a pas mal soutenue, mais n'en pouvait plus d'entendre parler, c'était mon copain. J'étais, je pense, pire qu'une primipare qui vient d'avoir son premier bébé et qui parle que de ça. J'étais en boucle, mais parce que j'apprenais tellement de trucs et tout était tellement nouveau, j'étais traversée de tellement d'émotions, autant excitation que stress, vertige, que le soir, il fallait que j'en parle. Et puis après, j'ai pris un coach. En gros, un psy pour ta vie pro, qui par ailleurs a fait un effort financier parce qu'elle avait vraiment envie de m'accompagner et que nous, on n'avait quand même pas vraiment de moyens, on ne se payait pas. J'avais mon mi-temps débuté, mais ça ne faisait pas beaucoup, beaucoup. Le temps que du coup on ait les financements, qu'on lève ces fonds-là, qu'on débloque le prêt bancaire, une fois qu'on avait de la trésorerie, et donc c'est là où j'ai démissionné de mon poste à la maternité, et où je me rends compte de ma chance, mais ils ont bien voulu que je continue à prendre des vacations. Et donc du coup, c'est comme ça que pour l'instant j'ai ritualisé mes deux gardes par mois. J'ai réalisé que c'était concret, et que ça allait vraiment avoir lieu quand j'ai commencé à recruter les praticiens. Ouais, là c'était parti. Je me suis quand même fait des bons moments de panique. Je me souviens que trois mois avant l'ouverture du centre, je me revois allongée sur un tapis, je ne pouvais plus bouger, je pleurais. Je devais avoir l'air folle, mais pétrifiée de stress, de ce que je suis en train de faire. Donc j'ai eu des gros moments de panique. Globalement, le premier mois post-ouverture, J'ai plutôt ce souvenir qu'on ne dormait pas trop, qu'on était en train de défaire les cartons, on a monté tous les meubles nous-mêmes, qu'on terminait un peu des trucs le week-end dans le rush. On découvrait tout, ça a été un enfer Internet, ça a été un enfer de te comprendre quel logiciel il fallait utiliser. Ça a été un enfer. En fait, être entrepreneur, c'est aimer les problèmes. Et puis, tous les praticiens arrivaient progressivement. C'est quand même beaucoup de gens qui étaient déjà en libéral. Donc, eux étaient hyper smooth, hyper aidants. Pour Isabelle et moi, ça a dépassé même nos espérances. On avait vraiment envie de créer un collectif de soignants engagés qui montent un peu le truc avec nous. Et du coup, dès qu'on avait des idées, dès qu'on avait envie de faire des trucs, dès qu'on propose quelque chose, ils sont toujours à fond. Eux, ils proposent plein de trucs aussi. Assez rapidement, on a fait notre premier séminaire. On est partis à 20, tous ensemble, au vert. Tous ces trucs que je voyais dans les autres entreprises, qui ne sont pas des entreprises dans la santé, me donnaient trop envie. Je me dis pourquoi pas nous ? Donc, Donc eux-mêmes, ils étaient morts de rire. On a un séminaire, ça semblait lunaire à tout le monde. Et ouais, nos rituels commençaient à se créer. Donc tous les premiers mercredis du mois, on a un mercredi. Donc c'est apéro tous ensemble. Mais pendant une heure, on traite un sujet médical. Grâce à eux, quand même, ça s'est vite goupillé. On a vite pris nos marques. À partir du moment où tu mets tes agendas en ligne, il y a un tel manque de consultations, même à Paris, que les praticiens ont ouvert leurs consultations. Et c'est parti, quoi. Donc ça a très vite roulé et on est très vite arrivé à 1000 patientes par mois, 1500, 2000. Et puis c'était cool de voir la réaction des gens dans le centre. On s'est quand même vraiment donné du mal pour faire un truc qui n'est pas à l'air trop froid, qui ne ressemble pas à un centre médical. Donc chez Jeen, on a du coup deux parties. Il y a une partie avec tout ce qui est dit réglementé. Donc il y a du médical avec pléthore de sages-femmes. On est sept sages-femmes dans le centre, avec plein de casquettes différentes. Que ce soit suivi gynéco, périnatalité, acupuncture, orthogénie, fertilité. Et puis à côté de ça, du coup, on a kiné, ostéo, chiropracteur, gynéco bien sûr, médecin généraliste. Tous les professionnels de santé sont indépendants, mais travaillent ensemble et sous le même toit. Et le centre qui est juste à côté, là, on a toute la partie non réglementée. Et du coup, on a une doula, une hypnothérapeute, une sophrologue. Et c'est là où on a une grande salle d'atelier aussi, où on fait du yoga, du pilates pour accompagner les femmes. Par exemple, endométriose, SOPK, ménopause. On a des psychologues, évidemment, indispensables, qui n'ont même plus assez de place pour voir tout le monde. Voilà, donc ça fait quand même un pool d'une vingtaine de praticiens en tout. Au-delà des consultations et des ateliers collectifs, on va mettre en place des ateliers nutrition, parce que ça manque pas mal dans les parcours de soins aussi. Et on fait depuis l'ouverture deux masterclass par mois. Et donc là, c'est un professionnel de santé qui vient parler d'un sujet de santé. Et donc, ça va être sur le postpartum, ça va être sur la congélation des ovocytes, sur la ménopause.. Et puis même entre elles, c'est assez riche en témoignages, donc elles s'entraident pas mal. Donc du coup, on a ces trois pôles, en fait. On a consultation, masterclass et atelier collectif. Et on a créé une plateforme en ligne, Jeen. Et le concept, du coup, c'est que des articles autour de la santé des femmes, des médias, il commence à y en avoir vraiment beaucoup. Il y a quand même pas mal de contenu en ligne, mais presque trop, en fait. C'est pas facile quand t'es une femme de trouver ce qui est vraiment fiable là-dedans. Et on s'est dit, du coup, on va plutôt faire de la curation de contenu. on va demander à chacun des praticiens et nous on va regarder quels sont les articles, les vidéos, les livres, les podcasts qui nous semblent vraiment pertinents et on va se contenter d'en recommander quelques-uns en fonction des problématiques. Donc on a commencé à mettre ça en ligne. Et ce qu'on est en train de construire par ailleurs, là c'est plutôt pour les professionnels de santé. Il y a plein de choses que tu racontes pendant ta consultation, mais le patient ne peut pas tout retenir et donc quand il ressort, il a retenu un tiers de ce que tu racontes. Ou alors toi tu voudrais aller plus loin mais tu n'as pas le temps en tant que consultant. Pour toutes ces petites choses-là, il y a mille trucs qu'on répète en permanence. Je vais te donner un exemple très sage-femme. Pendant la grossesse, on explique ce que c'est que la préparation à la naissance, les huit cours remboursés par la sécu, ce que ça contient, etc. Mais éventuellement, elles ne retiennent pas tout. L'idée, c'est que du coup, il y ait un petit PDF de ces explications-là qu'elles puissent retrouver sur la plateforme de leurs praticiens. Moi, je m'occupe d'aller recruter les praticiens. Je passe pas mal de temps à rencontrer des professionnels de santé divers et variés. Je m'occupe de tout le côté onboarding, donc leur expliquer tout le fonctionnement du centre, des logiciels, nos rituels. Faire en sorte qu'ils aient tout ce qu'il faut pour travailler chez Jeen, acheter le bon matériel, etc. Je m'occupe de tout le côté partenariat. Du coup, là, par exemple, on est en train de mettre en place un partenariat avec les Bluets. Je m'occupe de la com de Jeen. Pendant un an, je me suis pas mal occupée des ateliers et des cours. L'idée, c'est vraiment que moi, je me focus sur tout ce qui va être plutôt médical. Justement, les parcours de soins en interne les rendent hyper lisibles tant pour les femmes que pour les praticiens. Donc, tout ce côté expérience pour les professionnels de santé et pour les femmes, les patientes qui rentrent chez Jeen. En gros, si je dois résumer, je dirais tout ce qui touche au médical, c'est moi, la com. Et Isabelle, de façon assez logique et complémentaire, elle va gérer tout le côté financement, relations investisseurs, développement du projet. Elle est un peu notre chef d'orchestre. Ce que je préfère aujourd'hui dans ce que je fais, de très loin, c'est l'animation de ce collectif de soignants. Tout ce côté humain, je fais des rencontres de folie, je découvre des métiers que je ne connaissais pas. J'adore l'idée de travailler pour qu'ils soient plus épanouis dans leurs pratiques, de leur faciliter un peu les choses, de les faire travailler ensemble. Tout ce côté où je me dis waouh c'est fou à quel point ça n'existe pas à l'hôpital, et bien ça je suis trop contente de cette amination de communautés. C'est moi qui organise les mercredis, entre autres les séminaires, et ça, ça me grise totalement, c'est un truc que je ne lâcherai pas. Et quand même le côté com, écrire la newsletter par exemple, j'y prends un certain plaisir, donc dans une certaine mesure c'est quand même hyper chronophage. Je me suis surprise à aimer la com. Quand on a su qu'on allait ouvrir le centre, je me suis dit direct que je voulais consulter au sein de Jeen. D'une, j'avais envie de comprendre en interne ce que c'était que le libéral, donc il y avait un peu ce côté besoin de crédibilité, de légitimité. Puis, curiosité de sage-femme, par ailleurs, j'ai envie de comprendre ce que c'est le libéral et j'ai envie de le vivre. J'ai plutôt fait jusque-là une journée de sage-femme toutes les deux semaines. Donc du coup, je ne suis pas beaucoup de patientes, mais suffisamment pour comprendre ce que c'est de coter ces consultations et comprendre ce que ça apporte d'avoir ses propres patientes. Et comme je sais qu'on va ouvrir un autre centre, je suis consciente que je vais devoir faire un peu des choix. Cette aventure en vrai m'a profondément changée. Je me connais beaucoup mieux, à force de coaching, à force de larmes, tout ça, mais je comprends beaucoup mieux quelles sont mes forces et mes faiblesses. Oui, il y a un côté assez introspectif dans l'entrepreneuriat, tu es tellement sans filet et un peu face à toi-même, que j'ai l'impression que je me connais beaucoup mieux. Je dirais que j'ai plus confiance en mes capacités, et en même temps, paradoxalement, je connais mieux mes limites aussi, mais j'ai l'impression d'avoir beaucoup plus confiance en moi. En tout cas, il y a une ouverture des possibles que je ressens beaucoup plus. Et d'ailleurs, c'est... La raison numéro un pour laquelle je t'ai dit oui direct pour le podcast, c'est que je sais qu'il est à destination des sages-femmes et qu'il y a un peu un déclic de « on n'est pas faite que pour ça, on peut faire plein de trucs » . On a quand même un peu cette réputation, vachement moins maintenant, je trouve qu'on a un métier qui a vraiment le vent en poupe, mais on est facilement les filles un peu cuculs, petits oiseaux, en rose, coincées dans la périnatalité. Du coup, moi, je me dis non, en vrai, notre métier, il est incroyable. Ce qu'on peut faire, c'est fou. Et en plus, même, je pense qu'on ne se rend pas compte de l'étendue des possibles, de tout ce qu'on peut faire. Du coup, ça me donne la niaque pour transmettre ma niaque aux autres sages-femmes. Et pas forcément, tout le monde n'aura pas du tout envie de monter le projet que je monte là, mais pour mille autres projets. Donc, voilà, c'est un peu le message de détermination que j'ai envie de faire passer.

  • Alice

    Je remercie Valentine pour son témoignage stimulant et très encourageant, recueilli sur place au sein du centre de santé Jeen qu'elle a confondé et ouvert depuis 2023. Un projet au fort impact pour la santé des femmes et qui continue de grandir, puisqu'un deuxième centre va s'ouvrir très prochainement à Paris. Suite à cette interview, j'ai découvert que GYM était le nom du personnage principal du célèbre roman Le cœur des femmes de Martha Winkler. Un récit qui raconte tout le cheminement d'une médecin gynécologue défendant une approche... à l'écoute et respectueuse de la santé des femmes. C'était le deuxième épisode du podcast La Voix des Sages-Femmes et je vous donne rendez-vous pour d'autres rencontres audio, au contenu et format varié, des interviews et échanges instructifs comme des récits plus intimes. A très bientôt pour un nouvel épisode.

Description

🛋️Tout est parti d'une discussion sur le canapé.

Valentine, sage-femme à la maternité des Bluets, et Isabelle, sa colocataire, échangent sur l’offre de soins actuelle et rêvent d’un lieu de santé pensé par et pour les femmes.

Mais entre l’envie et la réalité, il y a un monde : celui des levées de fonds, des investisseurs et du cadre juridique, bien loin des couloirs de la maternité.


Dans cet épisode, plongez dans l’histoire captivante de Valentine, sage-femme engagée qui a osé braver ses doutes et sortir de sa zone de confort pour concrétiser un projet ambitieux : Jeen, un grand centre de santé pluriprofessionnel en plein Paris dédié à la santé des femmes, proposant des parcours de soin complets, continus et 100% adaptés à leurs besoins.


Du premier déclic à la concrétisation, nous découvrons les coulisses de cette aventure, entre défis relevés, apprentissages précieux et joie du collectif.


🎧 Un témoignage inspirant pour toutes celles et ceux qui souhaitent donner vie à leurs projets et faire évoluer la santé des femmes.


Produit par Alice de Maieuticapp


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Valentine

    Oh waouh ! On ne se rendait pas compte de l'ampleur de ce qu'on allait découvrir. Je dis tout ce qui n'arrivait qu'à mes copains, en fait, pourrait m'arriver. J'étais pire qu'une primipare qui vient d'avoir son premier bébé et qui ne parle que de ça. Je découvre ce que c'est qu'une levée de fonds, je découvre ce que c'est qu'un investisseur. Je suis pétrifiée de stress de ce que je suis en train de faire, donc j'ai eu des gros moments de panique. Cette aventure m'a profondément changée. Je me connais beaucoup mieux. Je n'ai jamais eu le sentiment d'être cette pauvre petite sage-femme perdue dans le milieu entrepreneurial.

  • Alice

    Nous sommes plongées en plein cœur du 11e arrondissement à Paris, dans les locaux de Jeen, un centre pluriprofessionnel dédié à la santé des femmes. C'est dans une salle d'attente chaleureuse, aux murs colorés, au canapé Cosy et dont la bibliothèque est remplie d'ouvrages sur la santé féminine que Valentine nous accueille.

  • Valentine

    C'est toujours la tentation principale et là on a vraiment imaginé une tentation qui ne ressemble pas à un truc hospitalier, on a cassé un peu avec les codes du médical, austère, froid.

  • Alice

    Valentine a cofondé Jeen en 2021 avec Isabelle, sa colocataire, alors qu'elle était sage-femme hospitalière à la maternité des Bluets. Tout est parti de leur discussion canapé. Au fil de leurs réflexions et de leurs recherches, le soir, en rentrant du boulot, elles se rendent compte de tout ce qu'il manque pour prendre soin de la santé des femmes. Ainsi, en regroupant tous les acteurs dédiés à la santé des femmes sous un même toit, l'objectif est de proposer des parcours de soins complets, continus et 100% adaptés à leurs besoins. Mais il n'y a pas que des consultations au sein de ce centre de plus de 300 m2. Les patientes peuvent assister aussi à des conférences, participer à des ateliers et même prendre des cours de yoga.

  • Valentine

    Et c'est là aussi où on fait deux masterclass par mois. Ça peut être sages-femmes, médecins, et ils viennent faire une espèce de masterclass apéro interactif, mais autour d'un sujet lié à la santé des femmes. Donc ça, on le fait ici, on rajoute plein de chaises, et ça ne s'y prête pas trop.

  • Alice

    Ainsi, dans ce deuxième épisode du podcast La Voix des Sages-Femmes, nous allons entendre Valentine nous raconter comment aller passer de jeune sage-femme hospitalière à entrepreneuse d'une start-up pleine de succès qui lève plus d'un million d'euros au service de la santé des femmes.

  • Valentine

    Moi, c'est Valentine Burucoa, je suis sage-femme, j'ai 31 ans et depuis 3 ans maintenant, je suis sur le projet Jeen, donc je suis cofondatrice de Jeen et sage-femme depuis bientôt 8 ans. J'ai jamais su répondre à la question de quand ai-je voulu devenir sage-femme parce que je ne m'en souviens pas, c'est un peu comme si ça avait toujours été, en tout cas il y a un peu un mythe dans la famille de « on a toujours su que c'est ça que tu ferais ». Toute petite, j'avais un attrait pour ces ventres qui s'arrondissent. J'étais toujours super intriguée et attirée par les femmes enceintes. Puis beaucoup aussi par les nouveau-nés. Alors que finalement, notre métier, ce n'est pas tant de s'occuper des nouveau-nés. Mais la femme enceinte et le nouveau-né, c'était un peu une obsession. Et je pense que j'ai compris bien plus tard. Et puis parce que ça a pas mal évolué depuis. Mais ce que c'était qu'une sage-femme et que c'était bien plus large que ça. Je commençais à saisir au lycée qu'il y avait ce côté accompagnement humain. Mon tout premier stage en tant qu'étudiante sage-femme, c'était à la maternité des Bluets. Symbolique parce que c'est là où encore aujourd'hui je travaille et j'ai jamais travaillé dans un autre hôpital. Donc ça m'a fait découvrir quand même le métier, l'ambiance en salle de naissance. Et puis, assez rapidement, ça m'a fait découvrir les Bluets tout court et mon coup de cœur Bluets date de là. Donc je crois qu'assez rapidement, je me suis dit, il faut que je me débrouille pour que chaque année d'études, je mette un pied aux Bluets pour être sûre d'y atterrir un jour. Alors pourquoi un coup de cœur pour les Bluets ? Déjà, je trouvais que cette façon de s'adresser aux femmes et aux couples était différente de ce que j'avais imaginé à l'hôpital. Je trouvais qu'il y avait une accessibilité de la part des soignants. Puis après, plein de petits détails qui n'en sont pas, en fait, mais qui, selon moi, donnent pas mal d'autonomie aux femmes pour ce jour si particulier. La dernière année, j'avais du coup ce fameux stage long qu'on a en fin de cursus au Bluet. J'avais réussi à l'avoir là-bas. Et donc, je n'avais pas trop de doutes parce que je savais que je m'entendais quand même bien avec les équipes, que pour eux, c'est quand même canon de recruter quelqu'un qui connaît déjà les logiciels, les protocoles, etc. Mais bon, tu as toujours une petite... de pointe de « et si j'étais pas prise ? » Je me souviens très bien d'être de garde ensuite de couche et d'être l'étudiante de Anna Roy qui est une sage-femme que l'on connaît pas mal dans le milieu puisqu'elle fait pas mal de choses et se bat pas mal pour la profession. Et bien ce jour-là, j'étais de garde avec Anna qui j'ai dit que j'attendais un peu une réponse de ma cadre et avec son énergie et son franc-parler habituel, ni une ni deux, elle m'a dit « je reviens » . Elle a descendu deux étages, elle est allée voir la cadre. Quand elle est remontée, elle m'a dit « Bon bah, descends la voir, c'est bon, tu vas signer ton contrat. » Mais je me souviens pas mal de ce jour où ça y est, c'était check. Je savais qu'à la rentrée, je serais sa femme titulaire au Bluet. Et j'ai eu la chance que ça démarre d'emblée par un CDI. Donc c'était bloqué. Les débuts en tant que sage-femme, je m'en souviens bien, parce que j'ai trouvé ça pas évident. Je trouve que les deux premiers mois, tu as un vrai syndrome de l'imposteur, où tu as du mal à rentrer dans la pièce en te présentant, en disant que tu es sage-femme. Tout d'un coup, tu dois te sentir sage-femme. Donc je me souviens que les deux premiers mois, c'était un mélange d'excitation et de bon vertige. Mais que, ceci dit, assez rapidement, au bout de deux mois, déjà, tu te sens plus légitime. Et après, je trouvais ça fou la première année, de voir le nombre de trucs que tu apprends. J'étais presque excitée d'avoir une hémorragie de la délivrance. Je me battais pour avoir l'accouchement sans péril. Tu as cette énergie du début et une vraie envie d'apprendre et tu te vois progresser à grande vitesse. Donc je trouve ça assez grisant. J'en ai un bon souvenir de la première année. J'ai beaucoup, beaucoup été en salle de naissance. J'ai tourné un peu ailleurs en consultation, en suite de couche. Et après, c'est ce truc particulier en tant que sage-femme, c'est un peu en train de changer. Mais tu gagnes en expérience, mais tu as pas vraiment de carrière en fait. Ça a l'avantage de tu prends jamais d'habitude et il n'y a pas vraiment de routine parce que c'est différent à chaque fois. Mais tu as pas vraiment de perspective d'évolution. Donc je pense que c'est le seul truc qui a commencé à me titiller un peu au bout de deux, trois ans, de me dire « Ok, du coup, ça y est, je suis là, je suis au Bluet, c'est là où j'ai envie d'être et où je me sens bien. » Mais « What's next ? » Je pense que j'avais un peu un sentiment de « Ah, ça va peut-être pas me suffire » , alors que je me suis toujours dit que globalement, une fois que j'aurai un pied à l'hôpital et qui plus est au Bluet, j'y ferai ma vie. Mais ouais, je pense qu'un peu un paradoxe hyper épanouie et pourtant, de l'autre côté, petit sentiment de manque. Et pour autant, c'est mon premier amour et j'en suis jamais revenue. J'y suis encore aujourd'hui. Alors aujourd'hui, je suis vacataire et je fais deux gardes par mois. Mais c'est mes soupapes de décompression. C'est mes moments, mes deux gardes par mois et aucune envie d'arrêter. Même si les équipes ont pas mal évolué, l'activité n'est plus du tout la même non plus. Donc, il y a plein de choses qui changent, mais je continue à trouver cet endroit quand même assez magnifique. Et du coup, j'ai un peu commencé à essayer de m'investir au sein de la maternité pour améliorer un peu des choses, donner des petits coups de main, monter des projets. Puis là, ça a été un peu la désillusion quand même, parce que ça reste l'hôpital, donc c'est une grosse institution, manque de moyens humains, manque de moyens financiers, et puis surtout lenteur d'un énorme organisme. Et là, j'ai une copine médecin généraliste qui m'a parlé d'un projet qui s'appelle NABLA. C'était l'équivalent de ce qu'on connaît un peu plus aujourd'hui qui s'appelle MEI. C'est une application dédiée à la santé des femmes. Et le concept, c'était que les femmes sur l'application pouvaient retrouver du contenu intéressant, écrit par des soignants. Et puis, elles pouvaient poser toutes leurs questions à des professionnels de santé sur l'application. Et donc, j'ai commencé à travailler pour eux en parallèle des Bluets. Et je faisais partie des sages-femmes qui répondaient aux questions des femmes. Et du coup, c'était la première fois que j'avais une expérience plus en entreprise et même en start-up, en fait. J'ai vu vraiment le projet émerger et puis du coup j'ai découvert ce concept de tester, itérer tu testes un truc, tu déconstruis tu retentes et puis hyper collaboratif on pouvait donner notre avis on voyait le truc être hyper modulable donc c'était quand même assez grisant et puis idéal pour compléter ma vie en tant que sage-femme parce que du coup je pouvais le faire de chez moi, à domicile, avec des horaires assez souples, donc compatibles avec mes repos de garde. Je crois que j'ai jamais fait uniquement mon métier de sage-femme en tant que telle. Déjà quand j'étais étudiante sage-femme ... Il y avait une nana des promos d'avant qui avait mis en place une adresse mail à destination des jeunes parents qui pouvaient chercher de l'aide la nuit quand ils rentraient à la maison. Et donc moi qui adore les nouveau-nés et un peu frustrée parce qu'en fait en tant que sage-femme, tu t'en occupes pas tant que ça. Quand j'ai su qu'il y avait ça qui existait, j'ai su direct que moi j'avais envie de faire plein de nuits chez plein de gens. Et donc j'ai commencé quand j'étais étudiante sage-femme. D'ailleurs j'étais pas la plus assidue et concentrée en cours parce que du coup je faisais tellement de nuits chez des gens que je m'endormais quand même régulièrement en cours. Et quand j'ai commencé à devenir sage-femme, ce qui était du coup ce petit job étudiant, j'avais quand même envie de le conserver. Ça m'apportait plein d'autres trucs, même sur ma vision du postpartum. Tu rentres quand même dans l'intimité des gens et dans le quotidien des gens pendant plusieurs mois. Ça pouvait être des gens qui ont des prématurés, des jumeaux, des triplés, ou qui ont la chance d'avoir l'argent de demander un peu d'aide une nuit de temps en temps en postpartum. Donc je voyais plein de familles différentes, plein de problématiques différentes. Et je me sentais vraiment utile, tu ne te sens pas juste « babysitter » . Puis je me suis régalée, j'en ai tellement gardé, je me suis régalée. Et donc j'ai continué quand j'étais sage-femme, mais j'avais quand même mon temps plein au bluet. Donc du coup, je ne pouvais plus en faire autant qu'avant. Et puis, mon nom commençait à tourner dans les familles parisiennes qui avaient besoin. Du coup, j'avais beaucoup, beaucoup de demandes et je n'arrivais pas à y répondre. Et en même temps, je ne sais pas dire non. Et donc du coup, ce que j'ai commencé à faire, c'est proposer les nuits que je ne pouvais pas faire à des étudiants de sage-femme ou à des auxiliaires de puériculture, des puéricultrices. Et donc, mes premières années en tant que sage-femme, c'était ça. J'avais mon temps plein, mais j'avais toujours mes nuits. Plus, je bidouillais un peu pour déléguer des nuits que je ne pouvais pas faire. Puis jusqu'à ce que j'ai des proches qui me disent « mais en fait, si tu fais ça et que ça devient chronophage, tu pourrais monter un truc un peu plus officiel » . Et du coup, avec une de mes très bonnes copines de lycée, qui n'est pas du milieu médical, on s'est dit « alors créons une plateforme de mise en relation entre des jeunes parents qui ont besoin et des étudiants de sages-femmes, enfin en tout cas des personnes qui travaillent dans la périnatalité et des personnes sûres pour des gardes de nuits de nouveau-nés à domicile » . Et donc, on a commencé à créer un site et à créer des process un peu plus carrés que ce que je faisais jusque-là. Et donc, on a fait ça pendant un an. Ça devait faire quatre ans que j'étais au Bluet. Et du coup, c'était mon projet à côté, qui était à la fois très cool et à la fois, en fait, une fois que ça a commencé à se professionnaliser et que je commençais à plus du tout connaître les gens qui faisaient appel à nos services, entre guillemets. Là, j'ai commencé à pas trop aimer l'expérience. J'avais l'impression que les gens qui nous contactaient étaient de plus en plus riches et nous prenaient vraiment comme une main d'œuvre. De plus en plus riche n'est pas un problème, mais de plus en plus riche et de plus en plus exigeant. Et je n'aimais pas ce qu'on était en train de faire. Et je commençais à me dire qu'en tout cas, ça m'avait prouvé que je pouvais faire d'autres choses, toujours en lien avec la santé, mais faire autre chose. Et je me disais par contre, si je gardais un peu un projet à côté de mon temps plein à l'hôpital, je voulais que ce soit un truc qui ait un peu plus d'impact à mes yeux. Donc au bout d'un an, on a arrêté et au moment où j'ai arrêté, j'étais en colocation avec Isabelle, qui est la personne avec qui j'ai monté Jeen. Isabelle, j'en parle comme si c'était la fin de ma vie, mais c'est presque ça, associée. Et du coup, on s'est rencontrés en étant en colocation ensemble. Quand je rentrais de garde, j'avais quand même pas mal besoin de déverser un peu. Les trucs cool, mais aussi mes frustrations, justement, de voir des choses qui ne bougent pas, alors que moi j'aimerais que ça bouge. Je lui racontais Nabla, enfin bon, je lui racontais un peu ma vie. Et puis elle, dans l'autre sens, c'est aussi une femme entourée de femmes, donc évidemment, on partageait. des histoires classiques, santé, gynéco, femmes. Elle, elle n'est pas du tout le même profil. Elle a fait une prépa, une école de commerce. Elle faisait du conseil à ce moment-là. Du coup, c'est vraiment nos discussions canapé qui ont fait un peu émerger des questionnements sur la façon d'accompagner les femmes en France. Moi, je me questionnais du coup quand même pas mal sur "est-ce que mon temps plein au Bluet, c'est vraiment ce que j'ai envie de faire ?". Aucun doute sur le fait d'avoir envie de continuer, mais peut-être... pas à temps plein. Et Nabla me donnait envie de faire autre chose. En fait, ça m'a un peu mis ces expériences-là le pied à l'étrier d'expériences un peu entrepreneuriales ou d'une vie en entreprise qui commençaient à me donner un peu envie. Je voyais aussi tout ce que la vie en entreprise apporte que l'hôpital t'apporte pas. À l'hôpital, on est quand même pas vraiment managé. On a des cadres qui ont déjà pas mal de boulot. On a la direction et on a les RH, mais en fait, t'es un numéro parmi mille. Il y a personne qui cherche vraiment à te faire évoluer et qui t'apporte de l'expérience. Tu te formes quand même par toi-même ou autour de tes collègues. Mais voilà, donc je trouvais qu'il y avait zéro management, zéro carrière possible, ce que je disais tout à l'heure, mais tu ne peux pas avoir d'ambition. Quand tu es sage-femme, tu peux te rajouter plein de cordes à ton arc, tu peux faire plein de DU, ce qui est déjà canonissime, mais tu n'as pas de perspective d'évolution. Et ce n'était pas tant une ambition en version snob et élitiste. Je ne me disais pas que je voulais monter en grade, je me disais juste que j'avais envie de... de me dire que mon boulot pouvait changer ou que tu pouvais avoir d'autres opportunités. Et puis le dernier truc qui me semble être le principal, c'est que je trouve que le côté plus RH, le côté un peu sympa d'une vie en entreprise, tu l'as pas à l'hôpital. Si t'as de la chance d'être dans une équipe qui s'entend bien, c'est trop cool, mais on ne se voit pas forcément à l'extérieur sauf une initiative personnelle. T'as jamais un séminaire d'organisé, les formations qu'on te donne, c'est des formations obligatoires où tout le monde a envie de se pendre plutôt que de'y aller. Donc tout ce côté vie d'équipe, on ne l'a pas. Et même, j'ai plutôt tendance à penser qu'avec l'activité qu'il y a à l'hôpital et les conditions de travail difficiles, on a plutôt tendance à beaucoup se plaindre et à pas mal critiquer le travail des uns des autres. C'est pas hyper sain non plus comme environnement de travail, ce qui est hyper paradoxal parce qu'on est les gens qui soignons, mais en fait, on prend pas vraiment soin de nous. C'est la phrase préférée d'Isabelle, c'est prendre soin des gens qui prennent soin. Et du coup, je commence à découvrir un peu ce qui se passe en plus, chez Nabla, ambiance start-up. Et là, tu découvres une énergie folle, les afterworks. Du coup, tout ce qui n'arrivait qu'à mes copains, en fait, pourrait m'arriver. Et je pense que ça a un look et un truc dans ma tête que je ne suis pas forcément obligée de passer toute ma vie à temps plein à l'hôpital. Et en fait, ces trucs-là que je trouve trop cool dans les vies des autres hors médicales, ça pourrait exister chez moi aussi. Peut-être que je peux faire autre chose. Et en tout cas, ce qui est sûr, c'est que j'ai envie d'autre chose. L'idée de Jeen est née dans ma tête forcément plus au début via le pan périnatalité parce que c'est surtout ça que je connaissais. Et donc là, je faisais un peu le constat de, on ne manque pas de professionnels de santé parce qu'il y en a plein, des ostéos, des sages-femmes, des psys, des gynécos. Mais il n'y a pas du tout de liant entre eux. Une fois que tu mets le pied dans l'hôpital, le parcours, il existe. Mais en dehors, il n'y a pas tant de parcours de soins en tant que tel qui existe. Donc ça, je commençais à trouver ça bizarre. Et puis, je regardais un peu du coup ce qui existait à l'hôpital en libéral, en me disant si je vais en libéral, qu'est-ce que ça va m'apporter de plus et qu'est-ce que ça apportera aux femmes de différents ? Parce que j'avais quelques collègues qui partaient des Bluets. Effectivement, elles avaient une relation avec leurs patientes qui était en fait assez épanouissante parce que tu les suis vraiment sur la durée et tu leur apportes presque plus que ce que t'apportes à l'hôpital, en tout cas différemment. Je me suis rendu compte aussi que, concernant les sages-femmes, on pouvait faire 10 000 milliards de trucs en libéral. Mais sur ce côté très "femmes", je me disais pour les femmes, c'est très flou. Le suivi en ville, il n'y a pas de parcours. Donc je racontais ça un peu à Isabelle et notamment, je me souviens qu'à ce moment-là, j'étais un peu obsédée par le sujet du postpartum. Je me disais, une fois qu'elle rentre chez elle, c'est le no man's land, il se passe plein de trucs pendant la grossesse, mais en postpartum, pas du tout. Il y a ok les visites de sages-femmes à domicile, si tant est qu'elle trouve une sage-femme qui vient à domicile. Mais sinon, en attendant la rééduc, elles sont quand même pas mal livrées elles-mêmes. Et je dis les femmes, mais enfin les couples au global. Alors, OK, il y a des parcours de soins cools pendant la grossesse, mais encore qu'il y a des choses à faire. Et puis en postpartum, ça n'existe pas, les parcours de soins. Il n'y a pas du tout d'équipe présente pour elle. Puis après, en discutant avec Isabelle, elle et moi, d'ailleurs, nous n'avons pas d'enfant. Et donc, du coup, on pensait aussi pas mal à ce qu'on connaissait. Donc, plus le suivi gynéco, entre guillemets, classique. Et rien que là, on rigolait au début en se disant, nous deux, on cumule sept moyens contraceptifs sur les dix dernières années. Et puis, on avait toutes les deux pas de gynéco attitré. Et donc là, on a commencé à interroger des femmes sur leur suivi de santé. Donc on avait quand même un petit bagage qui nous prouvait qu'effectivement, il y avait ce vrai manque de parcours de soins. Plus les interviews qu'on faisait à côté, on faisait des petites interviews aussi de professionnels de santé pour ne pas se baser que sur mes ressentis. Ça a bien duré six mois où on a creusé. Et plus on creusait, plus on s'étonnait de découvrir à quel point il y avait un manque de considération depuis plusieurs années, voire plusieurs siècles, de la santé féminine. Ça fait des siècles que la santé a été imaginée par des hommes. Et puis, à partir du corps masculin, on a vraiment calqué ce qu'on connaissait de la santé des hommes sur la santé des femmes, comme si c'était corps identique, symptômes identiques, etc. Et aujourd'hui, on sait évidemment que non. Et donc, même moi, j'ai découvert que ça ne fait pas si longtemps que les femmes sont incluses dans les essais cliniques, les recherches. On ne se rendait pas compte de l'ampleur de ce qu'on allait découvrir. Mais il y a en plus tous les enjeux qui sont spécifiques aux femmes, à la santé féminine : endométriose, SOPK, les sujets de fertilité, la ménopause. Et là, on se disait, oui, en fait, il n'y a pas 10 000 ressources, il n'y a pas beaucoup d'infos faites auprès des femmes. Bref, étendu de, oh, waouh, il y a du boulot, il y a tellement de trucs à faire, on commence par quoi ? Et du coup, moi, c'est comme ça que j'ai commencé à vraiment me mettre dedans. Et en fait, Isabelle aussi, on s'est embarquées un peu l'une l'autre dans ces longues discussions pendant plusieurs mois. C'est six mois de recherche, réflexion. Si ça n'avait dépendu... que de moi, je crois qu'il ne se serait pas passé grand-chose de plus. Je savais que j'avais envie d'en faire quelque chose, mais alors, énorme syndrome de l'imposteur et puis sentiment d'une maxi-montagne en face de toi. En fait, je commence par quoi ? De toute façon, je suis à temps plein à l'hôpital. Et c'est là où force de l'association, mais Isabelle, du fait de son parcours, il y avait quand même un peu plus d'évidence en elle que c'était possible. Elle avait fait son master entrepreneur en certain d'écoles de commerce. Donc, elle savait presque depuis toujours qu'à un moment, elle montrait son propre projet. Donc, elle m'a quand même un peu tirée là-dedans. Et Isabelle, du coup, pour ça, a été ultra structurant. Enfin, on sent qu'elle avait les études qu'il fallait et l'expérience qu'il fallait pour construire tout ça. Du coup, on a commencé à vraiment ficeler un peu notre solution, entre guillemets. Et donc, on s'est dit, on veut des lieux. On s'est dit, on va mettre au même endroit une équipe, un vrai collectif de soignants pluridisciplinaires qui vont tous... avoir une expertise autour de la santé des femmes et comme ça, vraiment se compléter. Donc pour eux, beaucoup plus enrichissant et puis ça répond au problème de la solitude du praticien libéral. Et pour les femmes, trop canon, parce que du coup, une fois qu'elles mettent un pied dans le lieu, elles peuvent construire leur parcours de soins au même endroit. Donc on partait un peu là-dessus en se disant, waouh, rêve ultime si on a un lieu avec tout. Il faut du médical, mais il faut aussi du paramédical, il faudrait des médecines complémentaires, il faudrait des masterclass pour redonner de l'info, il faudrait des ateliers un peu plus sportifs. Parce que l'activité physique a une énorme place dans la santé. Puis après, on s'est quand même confrontés à la réalité de la santé en France, qui est passionnante mais intense. C'est le côté juridique. On a dû faire tout un travail juridique pour voir au-delà de ce qu'on avait envie de faire, ce qu'on avait le droit de faire. Puis une fois qu'on avait validé le côté juridique, tu veux monter un lieu, mais du coup, il faut de l'argent. Et là, on s'est dit, du coup, on va aller voir les banques. Mais les banques, elles te demandent d'avoir un apport, qu'évidemment, du haut de nos même pas 30 ans à l'époque, nous n'avions pas. Donc, on a dû aussi réfléchir comment on va aller chercher des financements. Donc, tout ça, c'est l'étape de... À partir du moment où on a commencé à interroger les gens jusqu'à « Ok, on se lance, on a la structure juridique, on comprend comment on va devoir aller chercher l'argent. Bon, bah, go ! » Et donc là, Isabelle, elle a quitté son boulot. Elle a obtenu une rupture conventionnelle, elle est partie de son boulot. Et là, c'était plutôt à moi de me prendre une petite claque dans la figure. Je crois qu'on parlait de tout ça depuis plusieurs mois. Et j'étais trop emballée par ce qu'on se disait, mais je ne réalisais pas vraiment. Par ailleurs, elle, elle avait pu partir avec une rupture conventionnelle et donc toucher le chômage. Mais à l'hôpital, ça, ça n'existe pas. Comment j'allais gagner ma vie, c'était un sujet. Donc, il y a eu quand même un petit moment de flou de mon côté. Du coup, par rapport à Isabelle, j'étais quand même beaucoup moins investie. Et heureusement qu'elle n'a pas lâché. Quand j'ai compris qu'elle y allait vraiment avec ou sans moi, là, je me suis dit, il faut que tu te bouges. Et du coup, j'ai demandé un mi-temps au Bluet. Et du coup, on a commencé à bosser sur le projet vraiment avec Isabelle à temps plein et moi à mi-temps. Découverte d'un tout autre univers, d'un coup. Je découvre ce que c'est qu'une levée de fonds, je découvre ce que c'est qu'un investisseur, je découvre plein de mots que je ne connais pas. C'est un peu comme quand tu apprends une nouvelle langue, je n'essayais même pas de l'interrompre à chaque fois, je prenais le sens global. Franchement, j'ai appris sur le tas. C'est là où je suis super consciente d'avoir une associée en or, c'est qu'elle a toujours été super patiente, pas du tout condescendante, elle m'a toujours tout expliqué. Je n'ai jamais eu le sentiment, à côté d'elle, d'être cette pauvre petite sage-femme perdue dans le milieu entrepreneurial. Et puis, j'ai trouvé l'accueil de tous les entrepreneurs qu'on rencontrait, même dans le cadre de la levée de fonds. J'avais un peu peur qu'on me prenne pour que la sage-femme et qu'on regarde beaucoup Isabelle. Et je ne l'ai pas du tout ressenti. Je ne me suis pas du tout sentie lésée quand on racontait notre projet, quand on essayait de convaincre, d'embarquer les gens. Au contraire, je trouvais qu'on donnait de la vraie valeur au fait que dans le duo, il y ait quelqu'un du milieu médical. Donc, j'ai vraiment appris sur le tas au fur et à mesure. Maintenant, je souris en regardant comment je parlais, comment j'ai appris qu'on pouvait ranger une boîte mail. j'ai jamais trié mes mails avant, à utiliser un Google Agenda, du truc le plus B à bas au truc le plus pointu de la levée de fonds, on y est allé step by step toutes les deux. Et pas que toutes les deux, assez rapidement, on s'est fait accompagner par ce qu'on appelle donc un incubateur. On s'est fait même accompagner par deux incubateurs en parallèle qu'on avait bien choisis, qui étaient vraiment un spécialiste dans la santé et l'autre dans ce qu'on appelle l'impact. Donc, ils ne suivent que des projets qui ont un impact social ou écologique. On n'est pas allé voir le côté trop start-up nation qui n'a rien à voir avec ce qu'on faisait. Et je pense que c'est une de nos qualités avec Isabelle, c'est de beaucoup savoir s'entourer. Je pense que j'ai mis un peu du temps à en parler vraiment. Déjà parce que quand même, dans le milieu médical, tu as l'impression de monter sa boîte et en plus, lever des fonds, c'est hyper dark. Je ne voulais pas avoir l'air d'être la connasse entrepreneuse, j'ai pas d'autre mot. Celui qui, pour le coup, m'a pas mal soutenue, mais n'en pouvait plus d'entendre parler, c'était mon copain. J'étais, je pense, pire qu'une primipare qui vient d'avoir son premier bébé et qui parle que de ça. J'étais en boucle, mais parce que j'apprenais tellement de trucs et tout était tellement nouveau, j'étais traversée de tellement d'émotions, autant excitation que stress, vertige, que le soir, il fallait que j'en parle. Et puis après, j'ai pris un coach. En gros, un psy pour ta vie pro, qui par ailleurs a fait un effort financier parce qu'elle avait vraiment envie de m'accompagner et que nous, on n'avait quand même pas vraiment de moyens, on ne se payait pas. J'avais mon mi-temps débuté, mais ça ne faisait pas beaucoup, beaucoup. Le temps que du coup on ait les financements, qu'on lève ces fonds-là, qu'on débloque le prêt bancaire, une fois qu'on avait de la trésorerie, et donc c'est là où j'ai démissionné de mon poste à la maternité, et où je me rends compte de ma chance, mais ils ont bien voulu que je continue à prendre des vacations. Et donc du coup, c'est comme ça que pour l'instant j'ai ritualisé mes deux gardes par mois. J'ai réalisé que c'était concret, et que ça allait vraiment avoir lieu quand j'ai commencé à recruter les praticiens. Ouais, là c'était parti. Je me suis quand même fait des bons moments de panique. Je me souviens que trois mois avant l'ouverture du centre, je me revois allongée sur un tapis, je ne pouvais plus bouger, je pleurais. Je devais avoir l'air folle, mais pétrifiée de stress, de ce que je suis en train de faire. Donc j'ai eu des gros moments de panique. Globalement, le premier mois post-ouverture, J'ai plutôt ce souvenir qu'on ne dormait pas trop, qu'on était en train de défaire les cartons, on a monté tous les meubles nous-mêmes, qu'on terminait un peu des trucs le week-end dans le rush. On découvrait tout, ça a été un enfer Internet, ça a été un enfer de te comprendre quel logiciel il fallait utiliser. Ça a été un enfer. En fait, être entrepreneur, c'est aimer les problèmes. Et puis, tous les praticiens arrivaient progressivement. C'est quand même beaucoup de gens qui étaient déjà en libéral. Donc, eux étaient hyper smooth, hyper aidants. Pour Isabelle et moi, ça a dépassé même nos espérances. On avait vraiment envie de créer un collectif de soignants engagés qui montent un peu le truc avec nous. Et du coup, dès qu'on avait des idées, dès qu'on avait envie de faire des trucs, dès qu'on propose quelque chose, ils sont toujours à fond. Eux, ils proposent plein de trucs aussi. Assez rapidement, on a fait notre premier séminaire. On est partis à 20, tous ensemble, au vert. Tous ces trucs que je voyais dans les autres entreprises, qui ne sont pas des entreprises dans la santé, me donnaient trop envie. Je me dis pourquoi pas nous ? Donc, Donc eux-mêmes, ils étaient morts de rire. On a un séminaire, ça semblait lunaire à tout le monde. Et ouais, nos rituels commençaient à se créer. Donc tous les premiers mercredis du mois, on a un mercredi. Donc c'est apéro tous ensemble. Mais pendant une heure, on traite un sujet médical. Grâce à eux, quand même, ça s'est vite goupillé. On a vite pris nos marques. À partir du moment où tu mets tes agendas en ligne, il y a un tel manque de consultations, même à Paris, que les praticiens ont ouvert leurs consultations. Et c'est parti, quoi. Donc ça a très vite roulé et on est très vite arrivé à 1000 patientes par mois, 1500, 2000. Et puis c'était cool de voir la réaction des gens dans le centre. On s'est quand même vraiment donné du mal pour faire un truc qui n'est pas à l'air trop froid, qui ne ressemble pas à un centre médical. Donc chez Jeen, on a du coup deux parties. Il y a une partie avec tout ce qui est dit réglementé. Donc il y a du médical avec pléthore de sages-femmes. On est sept sages-femmes dans le centre, avec plein de casquettes différentes. Que ce soit suivi gynéco, périnatalité, acupuncture, orthogénie, fertilité. Et puis à côté de ça, du coup, on a kiné, ostéo, chiropracteur, gynéco bien sûr, médecin généraliste. Tous les professionnels de santé sont indépendants, mais travaillent ensemble et sous le même toit. Et le centre qui est juste à côté, là, on a toute la partie non réglementée. Et du coup, on a une doula, une hypnothérapeute, une sophrologue. Et c'est là où on a une grande salle d'atelier aussi, où on fait du yoga, du pilates pour accompagner les femmes. Par exemple, endométriose, SOPK, ménopause. On a des psychologues, évidemment, indispensables, qui n'ont même plus assez de place pour voir tout le monde. Voilà, donc ça fait quand même un pool d'une vingtaine de praticiens en tout. Au-delà des consultations et des ateliers collectifs, on va mettre en place des ateliers nutrition, parce que ça manque pas mal dans les parcours de soins aussi. Et on fait depuis l'ouverture deux masterclass par mois. Et donc là, c'est un professionnel de santé qui vient parler d'un sujet de santé. Et donc, ça va être sur le postpartum, ça va être sur la congélation des ovocytes, sur la ménopause.. Et puis même entre elles, c'est assez riche en témoignages, donc elles s'entraident pas mal. Donc du coup, on a ces trois pôles, en fait. On a consultation, masterclass et atelier collectif. Et on a créé une plateforme en ligne, Jeen. Et le concept, du coup, c'est que des articles autour de la santé des femmes, des médias, il commence à y en avoir vraiment beaucoup. Il y a quand même pas mal de contenu en ligne, mais presque trop, en fait. C'est pas facile quand t'es une femme de trouver ce qui est vraiment fiable là-dedans. Et on s'est dit, du coup, on va plutôt faire de la curation de contenu. on va demander à chacun des praticiens et nous on va regarder quels sont les articles, les vidéos, les livres, les podcasts qui nous semblent vraiment pertinents et on va se contenter d'en recommander quelques-uns en fonction des problématiques. Donc on a commencé à mettre ça en ligne. Et ce qu'on est en train de construire par ailleurs, là c'est plutôt pour les professionnels de santé. Il y a plein de choses que tu racontes pendant ta consultation, mais le patient ne peut pas tout retenir et donc quand il ressort, il a retenu un tiers de ce que tu racontes. Ou alors toi tu voudrais aller plus loin mais tu n'as pas le temps en tant que consultant. Pour toutes ces petites choses-là, il y a mille trucs qu'on répète en permanence. Je vais te donner un exemple très sage-femme. Pendant la grossesse, on explique ce que c'est que la préparation à la naissance, les huit cours remboursés par la sécu, ce que ça contient, etc. Mais éventuellement, elles ne retiennent pas tout. L'idée, c'est que du coup, il y ait un petit PDF de ces explications-là qu'elles puissent retrouver sur la plateforme de leurs praticiens. Moi, je m'occupe d'aller recruter les praticiens. Je passe pas mal de temps à rencontrer des professionnels de santé divers et variés. Je m'occupe de tout le côté onboarding, donc leur expliquer tout le fonctionnement du centre, des logiciels, nos rituels. Faire en sorte qu'ils aient tout ce qu'il faut pour travailler chez Jeen, acheter le bon matériel, etc. Je m'occupe de tout le côté partenariat. Du coup, là, par exemple, on est en train de mettre en place un partenariat avec les Bluets. Je m'occupe de la com de Jeen. Pendant un an, je me suis pas mal occupée des ateliers et des cours. L'idée, c'est vraiment que moi, je me focus sur tout ce qui va être plutôt médical. Justement, les parcours de soins en interne les rendent hyper lisibles tant pour les femmes que pour les praticiens. Donc, tout ce côté expérience pour les professionnels de santé et pour les femmes, les patientes qui rentrent chez Jeen. En gros, si je dois résumer, je dirais tout ce qui touche au médical, c'est moi, la com. Et Isabelle, de façon assez logique et complémentaire, elle va gérer tout le côté financement, relations investisseurs, développement du projet. Elle est un peu notre chef d'orchestre. Ce que je préfère aujourd'hui dans ce que je fais, de très loin, c'est l'animation de ce collectif de soignants. Tout ce côté humain, je fais des rencontres de folie, je découvre des métiers que je ne connaissais pas. J'adore l'idée de travailler pour qu'ils soient plus épanouis dans leurs pratiques, de leur faciliter un peu les choses, de les faire travailler ensemble. Tout ce côté où je me dis waouh c'est fou à quel point ça n'existe pas à l'hôpital, et bien ça je suis trop contente de cette amination de communautés. C'est moi qui organise les mercredis, entre autres les séminaires, et ça, ça me grise totalement, c'est un truc que je ne lâcherai pas. Et quand même le côté com, écrire la newsletter par exemple, j'y prends un certain plaisir, donc dans une certaine mesure c'est quand même hyper chronophage. Je me suis surprise à aimer la com. Quand on a su qu'on allait ouvrir le centre, je me suis dit direct que je voulais consulter au sein de Jeen. D'une, j'avais envie de comprendre en interne ce que c'était que le libéral, donc il y avait un peu ce côté besoin de crédibilité, de légitimité. Puis, curiosité de sage-femme, par ailleurs, j'ai envie de comprendre ce que c'est le libéral et j'ai envie de le vivre. J'ai plutôt fait jusque-là une journée de sage-femme toutes les deux semaines. Donc du coup, je ne suis pas beaucoup de patientes, mais suffisamment pour comprendre ce que c'est de coter ces consultations et comprendre ce que ça apporte d'avoir ses propres patientes. Et comme je sais qu'on va ouvrir un autre centre, je suis consciente que je vais devoir faire un peu des choix. Cette aventure en vrai m'a profondément changée. Je me connais beaucoup mieux, à force de coaching, à force de larmes, tout ça, mais je comprends beaucoup mieux quelles sont mes forces et mes faiblesses. Oui, il y a un côté assez introspectif dans l'entrepreneuriat, tu es tellement sans filet et un peu face à toi-même, que j'ai l'impression que je me connais beaucoup mieux. Je dirais que j'ai plus confiance en mes capacités, et en même temps, paradoxalement, je connais mieux mes limites aussi, mais j'ai l'impression d'avoir beaucoup plus confiance en moi. En tout cas, il y a une ouverture des possibles que je ressens beaucoup plus. Et d'ailleurs, c'est... La raison numéro un pour laquelle je t'ai dit oui direct pour le podcast, c'est que je sais qu'il est à destination des sages-femmes et qu'il y a un peu un déclic de « on n'est pas faite que pour ça, on peut faire plein de trucs » . On a quand même un peu cette réputation, vachement moins maintenant, je trouve qu'on a un métier qui a vraiment le vent en poupe, mais on est facilement les filles un peu cuculs, petits oiseaux, en rose, coincées dans la périnatalité. Du coup, moi, je me dis non, en vrai, notre métier, il est incroyable. Ce qu'on peut faire, c'est fou. Et en plus, même, je pense qu'on ne se rend pas compte de l'étendue des possibles, de tout ce qu'on peut faire. Du coup, ça me donne la niaque pour transmettre ma niaque aux autres sages-femmes. Et pas forcément, tout le monde n'aura pas du tout envie de monter le projet que je monte là, mais pour mille autres projets. Donc, voilà, c'est un peu le message de détermination que j'ai envie de faire passer.

  • Alice

    Je remercie Valentine pour son témoignage stimulant et très encourageant, recueilli sur place au sein du centre de santé Jeen qu'elle a confondé et ouvert depuis 2023. Un projet au fort impact pour la santé des femmes et qui continue de grandir, puisqu'un deuxième centre va s'ouvrir très prochainement à Paris. Suite à cette interview, j'ai découvert que GYM était le nom du personnage principal du célèbre roman Le cœur des femmes de Martha Winkler. Un récit qui raconte tout le cheminement d'une médecin gynécologue défendant une approche... à l'écoute et respectueuse de la santé des femmes. C'était le deuxième épisode du podcast La Voix des Sages-Femmes et je vous donne rendez-vous pour d'autres rencontres audio, au contenu et format varié, des interviews et échanges instructifs comme des récits plus intimes. A très bientôt pour un nouvel épisode.

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Description

🛋️Tout est parti d'une discussion sur le canapé.

Valentine, sage-femme à la maternité des Bluets, et Isabelle, sa colocataire, échangent sur l’offre de soins actuelle et rêvent d’un lieu de santé pensé par et pour les femmes.

Mais entre l’envie et la réalité, il y a un monde : celui des levées de fonds, des investisseurs et du cadre juridique, bien loin des couloirs de la maternité.


Dans cet épisode, plongez dans l’histoire captivante de Valentine, sage-femme engagée qui a osé braver ses doutes et sortir de sa zone de confort pour concrétiser un projet ambitieux : Jeen, un grand centre de santé pluriprofessionnel en plein Paris dédié à la santé des femmes, proposant des parcours de soin complets, continus et 100% adaptés à leurs besoins.


Du premier déclic à la concrétisation, nous découvrons les coulisses de cette aventure, entre défis relevés, apprentissages précieux et joie du collectif.


🎧 Un témoignage inspirant pour toutes celles et ceux qui souhaitent donner vie à leurs projets et faire évoluer la santé des femmes.


Produit par Alice de Maieuticapp


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Valentine

    Oh waouh ! On ne se rendait pas compte de l'ampleur de ce qu'on allait découvrir. Je dis tout ce qui n'arrivait qu'à mes copains, en fait, pourrait m'arriver. J'étais pire qu'une primipare qui vient d'avoir son premier bébé et qui ne parle que de ça. Je découvre ce que c'est qu'une levée de fonds, je découvre ce que c'est qu'un investisseur. Je suis pétrifiée de stress de ce que je suis en train de faire, donc j'ai eu des gros moments de panique. Cette aventure m'a profondément changée. Je me connais beaucoup mieux. Je n'ai jamais eu le sentiment d'être cette pauvre petite sage-femme perdue dans le milieu entrepreneurial.

  • Alice

    Nous sommes plongées en plein cœur du 11e arrondissement à Paris, dans les locaux de Jeen, un centre pluriprofessionnel dédié à la santé des femmes. C'est dans une salle d'attente chaleureuse, aux murs colorés, au canapé Cosy et dont la bibliothèque est remplie d'ouvrages sur la santé féminine que Valentine nous accueille.

  • Valentine

    C'est toujours la tentation principale et là on a vraiment imaginé une tentation qui ne ressemble pas à un truc hospitalier, on a cassé un peu avec les codes du médical, austère, froid.

  • Alice

    Valentine a cofondé Jeen en 2021 avec Isabelle, sa colocataire, alors qu'elle était sage-femme hospitalière à la maternité des Bluets. Tout est parti de leur discussion canapé. Au fil de leurs réflexions et de leurs recherches, le soir, en rentrant du boulot, elles se rendent compte de tout ce qu'il manque pour prendre soin de la santé des femmes. Ainsi, en regroupant tous les acteurs dédiés à la santé des femmes sous un même toit, l'objectif est de proposer des parcours de soins complets, continus et 100% adaptés à leurs besoins. Mais il n'y a pas que des consultations au sein de ce centre de plus de 300 m2. Les patientes peuvent assister aussi à des conférences, participer à des ateliers et même prendre des cours de yoga.

  • Valentine

    Et c'est là aussi où on fait deux masterclass par mois. Ça peut être sages-femmes, médecins, et ils viennent faire une espèce de masterclass apéro interactif, mais autour d'un sujet lié à la santé des femmes. Donc ça, on le fait ici, on rajoute plein de chaises, et ça ne s'y prête pas trop.

  • Alice

    Ainsi, dans ce deuxième épisode du podcast La Voix des Sages-Femmes, nous allons entendre Valentine nous raconter comment aller passer de jeune sage-femme hospitalière à entrepreneuse d'une start-up pleine de succès qui lève plus d'un million d'euros au service de la santé des femmes.

  • Valentine

    Moi, c'est Valentine Burucoa, je suis sage-femme, j'ai 31 ans et depuis 3 ans maintenant, je suis sur le projet Jeen, donc je suis cofondatrice de Jeen et sage-femme depuis bientôt 8 ans. J'ai jamais su répondre à la question de quand ai-je voulu devenir sage-femme parce que je ne m'en souviens pas, c'est un peu comme si ça avait toujours été, en tout cas il y a un peu un mythe dans la famille de « on a toujours su que c'est ça que tu ferais ». Toute petite, j'avais un attrait pour ces ventres qui s'arrondissent. J'étais toujours super intriguée et attirée par les femmes enceintes. Puis beaucoup aussi par les nouveau-nés. Alors que finalement, notre métier, ce n'est pas tant de s'occuper des nouveau-nés. Mais la femme enceinte et le nouveau-né, c'était un peu une obsession. Et je pense que j'ai compris bien plus tard. Et puis parce que ça a pas mal évolué depuis. Mais ce que c'était qu'une sage-femme et que c'était bien plus large que ça. Je commençais à saisir au lycée qu'il y avait ce côté accompagnement humain. Mon tout premier stage en tant qu'étudiante sage-femme, c'était à la maternité des Bluets. Symbolique parce que c'est là où encore aujourd'hui je travaille et j'ai jamais travaillé dans un autre hôpital. Donc ça m'a fait découvrir quand même le métier, l'ambiance en salle de naissance. Et puis, assez rapidement, ça m'a fait découvrir les Bluets tout court et mon coup de cœur Bluets date de là. Donc je crois qu'assez rapidement, je me suis dit, il faut que je me débrouille pour que chaque année d'études, je mette un pied aux Bluets pour être sûre d'y atterrir un jour. Alors pourquoi un coup de cœur pour les Bluets ? Déjà, je trouvais que cette façon de s'adresser aux femmes et aux couples était différente de ce que j'avais imaginé à l'hôpital. Je trouvais qu'il y avait une accessibilité de la part des soignants. Puis après, plein de petits détails qui n'en sont pas, en fait, mais qui, selon moi, donnent pas mal d'autonomie aux femmes pour ce jour si particulier. La dernière année, j'avais du coup ce fameux stage long qu'on a en fin de cursus au Bluet. J'avais réussi à l'avoir là-bas. Et donc, je n'avais pas trop de doutes parce que je savais que je m'entendais quand même bien avec les équipes, que pour eux, c'est quand même canon de recruter quelqu'un qui connaît déjà les logiciels, les protocoles, etc. Mais bon, tu as toujours une petite... de pointe de « et si j'étais pas prise ? » Je me souviens très bien d'être de garde ensuite de couche et d'être l'étudiante de Anna Roy qui est une sage-femme que l'on connaît pas mal dans le milieu puisqu'elle fait pas mal de choses et se bat pas mal pour la profession. Et bien ce jour-là, j'étais de garde avec Anna qui j'ai dit que j'attendais un peu une réponse de ma cadre et avec son énergie et son franc-parler habituel, ni une ni deux, elle m'a dit « je reviens » . Elle a descendu deux étages, elle est allée voir la cadre. Quand elle est remontée, elle m'a dit « Bon bah, descends la voir, c'est bon, tu vas signer ton contrat. » Mais je me souviens pas mal de ce jour où ça y est, c'était check. Je savais qu'à la rentrée, je serais sa femme titulaire au Bluet. Et j'ai eu la chance que ça démarre d'emblée par un CDI. Donc c'était bloqué. Les débuts en tant que sage-femme, je m'en souviens bien, parce que j'ai trouvé ça pas évident. Je trouve que les deux premiers mois, tu as un vrai syndrome de l'imposteur, où tu as du mal à rentrer dans la pièce en te présentant, en disant que tu es sage-femme. Tout d'un coup, tu dois te sentir sage-femme. Donc je me souviens que les deux premiers mois, c'était un mélange d'excitation et de bon vertige. Mais que, ceci dit, assez rapidement, au bout de deux mois, déjà, tu te sens plus légitime. Et après, je trouvais ça fou la première année, de voir le nombre de trucs que tu apprends. J'étais presque excitée d'avoir une hémorragie de la délivrance. Je me battais pour avoir l'accouchement sans péril. Tu as cette énergie du début et une vraie envie d'apprendre et tu te vois progresser à grande vitesse. Donc je trouve ça assez grisant. J'en ai un bon souvenir de la première année. J'ai beaucoup, beaucoup été en salle de naissance. J'ai tourné un peu ailleurs en consultation, en suite de couche. Et après, c'est ce truc particulier en tant que sage-femme, c'est un peu en train de changer. Mais tu gagnes en expérience, mais tu as pas vraiment de carrière en fait. Ça a l'avantage de tu prends jamais d'habitude et il n'y a pas vraiment de routine parce que c'est différent à chaque fois. Mais tu as pas vraiment de perspective d'évolution. Donc je pense que c'est le seul truc qui a commencé à me titiller un peu au bout de deux, trois ans, de me dire « Ok, du coup, ça y est, je suis là, je suis au Bluet, c'est là où j'ai envie d'être et où je me sens bien. » Mais « What's next ? » Je pense que j'avais un peu un sentiment de « Ah, ça va peut-être pas me suffire » , alors que je me suis toujours dit que globalement, une fois que j'aurai un pied à l'hôpital et qui plus est au Bluet, j'y ferai ma vie. Mais ouais, je pense qu'un peu un paradoxe hyper épanouie et pourtant, de l'autre côté, petit sentiment de manque. Et pour autant, c'est mon premier amour et j'en suis jamais revenue. J'y suis encore aujourd'hui. Alors aujourd'hui, je suis vacataire et je fais deux gardes par mois. Mais c'est mes soupapes de décompression. C'est mes moments, mes deux gardes par mois et aucune envie d'arrêter. Même si les équipes ont pas mal évolué, l'activité n'est plus du tout la même non plus. Donc, il y a plein de choses qui changent, mais je continue à trouver cet endroit quand même assez magnifique. Et du coup, j'ai un peu commencé à essayer de m'investir au sein de la maternité pour améliorer un peu des choses, donner des petits coups de main, monter des projets. Puis là, ça a été un peu la désillusion quand même, parce que ça reste l'hôpital, donc c'est une grosse institution, manque de moyens humains, manque de moyens financiers, et puis surtout lenteur d'un énorme organisme. Et là, j'ai une copine médecin généraliste qui m'a parlé d'un projet qui s'appelle NABLA. C'était l'équivalent de ce qu'on connaît un peu plus aujourd'hui qui s'appelle MEI. C'est une application dédiée à la santé des femmes. Et le concept, c'était que les femmes sur l'application pouvaient retrouver du contenu intéressant, écrit par des soignants. Et puis, elles pouvaient poser toutes leurs questions à des professionnels de santé sur l'application. Et donc, j'ai commencé à travailler pour eux en parallèle des Bluets. Et je faisais partie des sages-femmes qui répondaient aux questions des femmes. Et du coup, c'était la première fois que j'avais une expérience plus en entreprise et même en start-up, en fait. J'ai vu vraiment le projet émerger et puis du coup j'ai découvert ce concept de tester, itérer tu testes un truc, tu déconstruis tu retentes et puis hyper collaboratif on pouvait donner notre avis on voyait le truc être hyper modulable donc c'était quand même assez grisant et puis idéal pour compléter ma vie en tant que sage-femme parce que du coup je pouvais le faire de chez moi, à domicile, avec des horaires assez souples, donc compatibles avec mes repos de garde. Je crois que j'ai jamais fait uniquement mon métier de sage-femme en tant que telle. Déjà quand j'étais étudiante sage-femme ... Il y avait une nana des promos d'avant qui avait mis en place une adresse mail à destination des jeunes parents qui pouvaient chercher de l'aide la nuit quand ils rentraient à la maison. Et donc moi qui adore les nouveau-nés et un peu frustrée parce qu'en fait en tant que sage-femme, tu t'en occupes pas tant que ça. Quand j'ai su qu'il y avait ça qui existait, j'ai su direct que moi j'avais envie de faire plein de nuits chez plein de gens. Et donc j'ai commencé quand j'étais étudiante sage-femme. D'ailleurs j'étais pas la plus assidue et concentrée en cours parce que du coup je faisais tellement de nuits chez des gens que je m'endormais quand même régulièrement en cours. Et quand j'ai commencé à devenir sage-femme, ce qui était du coup ce petit job étudiant, j'avais quand même envie de le conserver. Ça m'apportait plein d'autres trucs, même sur ma vision du postpartum. Tu rentres quand même dans l'intimité des gens et dans le quotidien des gens pendant plusieurs mois. Ça pouvait être des gens qui ont des prématurés, des jumeaux, des triplés, ou qui ont la chance d'avoir l'argent de demander un peu d'aide une nuit de temps en temps en postpartum. Donc je voyais plein de familles différentes, plein de problématiques différentes. Et je me sentais vraiment utile, tu ne te sens pas juste « babysitter » . Puis je me suis régalée, j'en ai tellement gardé, je me suis régalée. Et donc j'ai continué quand j'étais sage-femme, mais j'avais quand même mon temps plein au bluet. Donc du coup, je ne pouvais plus en faire autant qu'avant. Et puis, mon nom commençait à tourner dans les familles parisiennes qui avaient besoin. Du coup, j'avais beaucoup, beaucoup de demandes et je n'arrivais pas à y répondre. Et en même temps, je ne sais pas dire non. Et donc du coup, ce que j'ai commencé à faire, c'est proposer les nuits que je ne pouvais pas faire à des étudiants de sage-femme ou à des auxiliaires de puériculture, des puéricultrices. Et donc, mes premières années en tant que sage-femme, c'était ça. J'avais mon temps plein, mais j'avais toujours mes nuits. Plus, je bidouillais un peu pour déléguer des nuits que je ne pouvais pas faire. Puis jusqu'à ce que j'ai des proches qui me disent « mais en fait, si tu fais ça et que ça devient chronophage, tu pourrais monter un truc un peu plus officiel » . Et du coup, avec une de mes très bonnes copines de lycée, qui n'est pas du milieu médical, on s'est dit « alors créons une plateforme de mise en relation entre des jeunes parents qui ont besoin et des étudiants de sages-femmes, enfin en tout cas des personnes qui travaillent dans la périnatalité et des personnes sûres pour des gardes de nuits de nouveau-nés à domicile » . Et donc, on a commencé à créer un site et à créer des process un peu plus carrés que ce que je faisais jusque-là. Et donc, on a fait ça pendant un an. Ça devait faire quatre ans que j'étais au Bluet. Et du coup, c'était mon projet à côté, qui était à la fois très cool et à la fois, en fait, une fois que ça a commencé à se professionnaliser et que je commençais à plus du tout connaître les gens qui faisaient appel à nos services, entre guillemets. Là, j'ai commencé à pas trop aimer l'expérience. J'avais l'impression que les gens qui nous contactaient étaient de plus en plus riches et nous prenaient vraiment comme une main d'œuvre. De plus en plus riche n'est pas un problème, mais de plus en plus riche et de plus en plus exigeant. Et je n'aimais pas ce qu'on était en train de faire. Et je commençais à me dire qu'en tout cas, ça m'avait prouvé que je pouvais faire d'autres choses, toujours en lien avec la santé, mais faire autre chose. Et je me disais par contre, si je gardais un peu un projet à côté de mon temps plein à l'hôpital, je voulais que ce soit un truc qui ait un peu plus d'impact à mes yeux. Donc au bout d'un an, on a arrêté et au moment où j'ai arrêté, j'étais en colocation avec Isabelle, qui est la personne avec qui j'ai monté Jeen. Isabelle, j'en parle comme si c'était la fin de ma vie, mais c'est presque ça, associée. Et du coup, on s'est rencontrés en étant en colocation ensemble. Quand je rentrais de garde, j'avais quand même pas mal besoin de déverser un peu. Les trucs cool, mais aussi mes frustrations, justement, de voir des choses qui ne bougent pas, alors que moi j'aimerais que ça bouge. Je lui racontais Nabla, enfin bon, je lui racontais un peu ma vie. Et puis elle, dans l'autre sens, c'est aussi une femme entourée de femmes, donc évidemment, on partageait. des histoires classiques, santé, gynéco, femmes. Elle, elle n'est pas du tout le même profil. Elle a fait une prépa, une école de commerce. Elle faisait du conseil à ce moment-là. Du coup, c'est vraiment nos discussions canapé qui ont fait un peu émerger des questionnements sur la façon d'accompagner les femmes en France. Moi, je me questionnais du coup quand même pas mal sur "est-ce que mon temps plein au Bluet, c'est vraiment ce que j'ai envie de faire ?". Aucun doute sur le fait d'avoir envie de continuer, mais peut-être... pas à temps plein. Et Nabla me donnait envie de faire autre chose. En fait, ça m'a un peu mis ces expériences-là le pied à l'étrier d'expériences un peu entrepreneuriales ou d'une vie en entreprise qui commençaient à me donner un peu envie. Je voyais aussi tout ce que la vie en entreprise apporte que l'hôpital t'apporte pas. À l'hôpital, on est quand même pas vraiment managé. On a des cadres qui ont déjà pas mal de boulot. On a la direction et on a les RH, mais en fait, t'es un numéro parmi mille. Il y a personne qui cherche vraiment à te faire évoluer et qui t'apporte de l'expérience. Tu te formes quand même par toi-même ou autour de tes collègues. Mais voilà, donc je trouvais qu'il y avait zéro management, zéro carrière possible, ce que je disais tout à l'heure, mais tu ne peux pas avoir d'ambition. Quand tu es sage-femme, tu peux te rajouter plein de cordes à ton arc, tu peux faire plein de DU, ce qui est déjà canonissime, mais tu n'as pas de perspective d'évolution. Et ce n'était pas tant une ambition en version snob et élitiste. Je ne me disais pas que je voulais monter en grade, je me disais juste que j'avais envie de... de me dire que mon boulot pouvait changer ou que tu pouvais avoir d'autres opportunités. Et puis le dernier truc qui me semble être le principal, c'est que je trouve que le côté plus RH, le côté un peu sympa d'une vie en entreprise, tu l'as pas à l'hôpital. Si t'as de la chance d'être dans une équipe qui s'entend bien, c'est trop cool, mais on ne se voit pas forcément à l'extérieur sauf une initiative personnelle. T'as jamais un séminaire d'organisé, les formations qu'on te donne, c'est des formations obligatoires où tout le monde a envie de se pendre plutôt que de'y aller. Donc tout ce côté vie d'équipe, on ne l'a pas. Et même, j'ai plutôt tendance à penser qu'avec l'activité qu'il y a à l'hôpital et les conditions de travail difficiles, on a plutôt tendance à beaucoup se plaindre et à pas mal critiquer le travail des uns des autres. C'est pas hyper sain non plus comme environnement de travail, ce qui est hyper paradoxal parce qu'on est les gens qui soignons, mais en fait, on prend pas vraiment soin de nous. C'est la phrase préférée d'Isabelle, c'est prendre soin des gens qui prennent soin. Et du coup, je commence à découvrir un peu ce qui se passe en plus, chez Nabla, ambiance start-up. Et là, tu découvres une énergie folle, les afterworks. Du coup, tout ce qui n'arrivait qu'à mes copains, en fait, pourrait m'arriver. Et je pense que ça a un look et un truc dans ma tête que je ne suis pas forcément obligée de passer toute ma vie à temps plein à l'hôpital. Et en fait, ces trucs-là que je trouve trop cool dans les vies des autres hors médicales, ça pourrait exister chez moi aussi. Peut-être que je peux faire autre chose. Et en tout cas, ce qui est sûr, c'est que j'ai envie d'autre chose. L'idée de Jeen est née dans ma tête forcément plus au début via le pan périnatalité parce que c'est surtout ça que je connaissais. Et donc là, je faisais un peu le constat de, on ne manque pas de professionnels de santé parce qu'il y en a plein, des ostéos, des sages-femmes, des psys, des gynécos. Mais il n'y a pas du tout de liant entre eux. Une fois que tu mets le pied dans l'hôpital, le parcours, il existe. Mais en dehors, il n'y a pas tant de parcours de soins en tant que tel qui existe. Donc ça, je commençais à trouver ça bizarre. Et puis, je regardais un peu du coup ce qui existait à l'hôpital en libéral, en me disant si je vais en libéral, qu'est-ce que ça va m'apporter de plus et qu'est-ce que ça apportera aux femmes de différents ? Parce que j'avais quelques collègues qui partaient des Bluets. Effectivement, elles avaient une relation avec leurs patientes qui était en fait assez épanouissante parce que tu les suis vraiment sur la durée et tu leur apportes presque plus que ce que t'apportes à l'hôpital, en tout cas différemment. Je me suis rendu compte aussi que, concernant les sages-femmes, on pouvait faire 10 000 milliards de trucs en libéral. Mais sur ce côté très "femmes", je me disais pour les femmes, c'est très flou. Le suivi en ville, il n'y a pas de parcours. Donc je racontais ça un peu à Isabelle et notamment, je me souviens qu'à ce moment-là, j'étais un peu obsédée par le sujet du postpartum. Je me disais, une fois qu'elle rentre chez elle, c'est le no man's land, il se passe plein de trucs pendant la grossesse, mais en postpartum, pas du tout. Il y a ok les visites de sages-femmes à domicile, si tant est qu'elle trouve une sage-femme qui vient à domicile. Mais sinon, en attendant la rééduc, elles sont quand même pas mal livrées elles-mêmes. Et je dis les femmes, mais enfin les couples au global. Alors, OK, il y a des parcours de soins cools pendant la grossesse, mais encore qu'il y a des choses à faire. Et puis en postpartum, ça n'existe pas, les parcours de soins. Il n'y a pas du tout d'équipe présente pour elle. Puis après, en discutant avec Isabelle, elle et moi, d'ailleurs, nous n'avons pas d'enfant. Et donc, du coup, on pensait aussi pas mal à ce qu'on connaissait. Donc, plus le suivi gynéco, entre guillemets, classique. Et rien que là, on rigolait au début en se disant, nous deux, on cumule sept moyens contraceptifs sur les dix dernières années. Et puis, on avait toutes les deux pas de gynéco attitré. Et donc là, on a commencé à interroger des femmes sur leur suivi de santé. Donc on avait quand même un petit bagage qui nous prouvait qu'effectivement, il y avait ce vrai manque de parcours de soins. Plus les interviews qu'on faisait à côté, on faisait des petites interviews aussi de professionnels de santé pour ne pas se baser que sur mes ressentis. Ça a bien duré six mois où on a creusé. Et plus on creusait, plus on s'étonnait de découvrir à quel point il y avait un manque de considération depuis plusieurs années, voire plusieurs siècles, de la santé féminine. Ça fait des siècles que la santé a été imaginée par des hommes. Et puis, à partir du corps masculin, on a vraiment calqué ce qu'on connaissait de la santé des hommes sur la santé des femmes, comme si c'était corps identique, symptômes identiques, etc. Et aujourd'hui, on sait évidemment que non. Et donc, même moi, j'ai découvert que ça ne fait pas si longtemps que les femmes sont incluses dans les essais cliniques, les recherches. On ne se rendait pas compte de l'ampleur de ce qu'on allait découvrir. Mais il y a en plus tous les enjeux qui sont spécifiques aux femmes, à la santé féminine : endométriose, SOPK, les sujets de fertilité, la ménopause. Et là, on se disait, oui, en fait, il n'y a pas 10 000 ressources, il n'y a pas beaucoup d'infos faites auprès des femmes. Bref, étendu de, oh, waouh, il y a du boulot, il y a tellement de trucs à faire, on commence par quoi ? Et du coup, moi, c'est comme ça que j'ai commencé à vraiment me mettre dedans. Et en fait, Isabelle aussi, on s'est embarquées un peu l'une l'autre dans ces longues discussions pendant plusieurs mois. C'est six mois de recherche, réflexion. Si ça n'avait dépendu... que de moi, je crois qu'il ne se serait pas passé grand-chose de plus. Je savais que j'avais envie d'en faire quelque chose, mais alors, énorme syndrome de l'imposteur et puis sentiment d'une maxi-montagne en face de toi. En fait, je commence par quoi ? De toute façon, je suis à temps plein à l'hôpital. Et c'est là où force de l'association, mais Isabelle, du fait de son parcours, il y avait quand même un peu plus d'évidence en elle que c'était possible. Elle avait fait son master entrepreneur en certain d'écoles de commerce. Donc, elle savait presque depuis toujours qu'à un moment, elle montrait son propre projet. Donc, elle m'a quand même un peu tirée là-dedans. Et Isabelle, du coup, pour ça, a été ultra structurant. Enfin, on sent qu'elle avait les études qu'il fallait et l'expérience qu'il fallait pour construire tout ça. Du coup, on a commencé à vraiment ficeler un peu notre solution, entre guillemets. Et donc, on s'est dit, on veut des lieux. On s'est dit, on va mettre au même endroit une équipe, un vrai collectif de soignants pluridisciplinaires qui vont tous... avoir une expertise autour de la santé des femmes et comme ça, vraiment se compléter. Donc pour eux, beaucoup plus enrichissant et puis ça répond au problème de la solitude du praticien libéral. Et pour les femmes, trop canon, parce que du coup, une fois qu'elles mettent un pied dans le lieu, elles peuvent construire leur parcours de soins au même endroit. Donc on partait un peu là-dessus en se disant, waouh, rêve ultime si on a un lieu avec tout. Il faut du médical, mais il faut aussi du paramédical, il faudrait des médecines complémentaires, il faudrait des masterclass pour redonner de l'info, il faudrait des ateliers un peu plus sportifs. Parce que l'activité physique a une énorme place dans la santé. Puis après, on s'est quand même confrontés à la réalité de la santé en France, qui est passionnante mais intense. C'est le côté juridique. On a dû faire tout un travail juridique pour voir au-delà de ce qu'on avait envie de faire, ce qu'on avait le droit de faire. Puis une fois qu'on avait validé le côté juridique, tu veux monter un lieu, mais du coup, il faut de l'argent. Et là, on s'est dit, du coup, on va aller voir les banques. Mais les banques, elles te demandent d'avoir un apport, qu'évidemment, du haut de nos même pas 30 ans à l'époque, nous n'avions pas. Donc, on a dû aussi réfléchir comment on va aller chercher des financements. Donc, tout ça, c'est l'étape de... À partir du moment où on a commencé à interroger les gens jusqu'à « Ok, on se lance, on a la structure juridique, on comprend comment on va devoir aller chercher l'argent. Bon, bah, go ! » Et donc là, Isabelle, elle a quitté son boulot. Elle a obtenu une rupture conventionnelle, elle est partie de son boulot. Et là, c'était plutôt à moi de me prendre une petite claque dans la figure. Je crois qu'on parlait de tout ça depuis plusieurs mois. Et j'étais trop emballée par ce qu'on se disait, mais je ne réalisais pas vraiment. Par ailleurs, elle, elle avait pu partir avec une rupture conventionnelle et donc toucher le chômage. Mais à l'hôpital, ça, ça n'existe pas. Comment j'allais gagner ma vie, c'était un sujet. Donc, il y a eu quand même un petit moment de flou de mon côté. Du coup, par rapport à Isabelle, j'étais quand même beaucoup moins investie. Et heureusement qu'elle n'a pas lâché. Quand j'ai compris qu'elle y allait vraiment avec ou sans moi, là, je me suis dit, il faut que tu te bouges. Et du coup, j'ai demandé un mi-temps au Bluet. Et du coup, on a commencé à bosser sur le projet vraiment avec Isabelle à temps plein et moi à mi-temps. Découverte d'un tout autre univers, d'un coup. Je découvre ce que c'est qu'une levée de fonds, je découvre ce que c'est qu'un investisseur, je découvre plein de mots que je ne connais pas. C'est un peu comme quand tu apprends une nouvelle langue, je n'essayais même pas de l'interrompre à chaque fois, je prenais le sens global. Franchement, j'ai appris sur le tas. C'est là où je suis super consciente d'avoir une associée en or, c'est qu'elle a toujours été super patiente, pas du tout condescendante, elle m'a toujours tout expliqué. Je n'ai jamais eu le sentiment, à côté d'elle, d'être cette pauvre petite sage-femme perdue dans le milieu entrepreneurial. Et puis, j'ai trouvé l'accueil de tous les entrepreneurs qu'on rencontrait, même dans le cadre de la levée de fonds. J'avais un peu peur qu'on me prenne pour que la sage-femme et qu'on regarde beaucoup Isabelle. Et je ne l'ai pas du tout ressenti. Je ne me suis pas du tout sentie lésée quand on racontait notre projet, quand on essayait de convaincre, d'embarquer les gens. Au contraire, je trouvais qu'on donnait de la vraie valeur au fait que dans le duo, il y ait quelqu'un du milieu médical. Donc, j'ai vraiment appris sur le tas au fur et à mesure. Maintenant, je souris en regardant comment je parlais, comment j'ai appris qu'on pouvait ranger une boîte mail. j'ai jamais trié mes mails avant, à utiliser un Google Agenda, du truc le plus B à bas au truc le plus pointu de la levée de fonds, on y est allé step by step toutes les deux. Et pas que toutes les deux, assez rapidement, on s'est fait accompagner par ce qu'on appelle donc un incubateur. On s'est fait même accompagner par deux incubateurs en parallèle qu'on avait bien choisis, qui étaient vraiment un spécialiste dans la santé et l'autre dans ce qu'on appelle l'impact. Donc, ils ne suivent que des projets qui ont un impact social ou écologique. On n'est pas allé voir le côté trop start-up nation qui n'a rien à voir avec ce qu'on faisait. Et je pense que c'est une de nos qualités avec Isabelle, c'est de beaucoup savoir s'entourer. Je pense que j'ai mis un peu du temps à en parler vraiment. Déjà parce que quand même, dans le milieu médical, tu as l'impression de monter sa boîte et en plus, lever des fonds, c'est hyper dark. Je ne voulais pas avoir l'air d'être la connasse entrepreneuse, j'ai pas d'autre mot. Celui qui, pour le coup, m'a pas mal soutenue, mais n'en pouvait plus d'entendre parler, c'était mon copain. J'étais, je pense, pire qu'une primipare qui vient d'avoir son premier bébé et qui parle que de ça. J'étais en boucle, mais parce que j'apprenais tellement de trucs et tout était tellement nouveau, j'étais traversée de tellement d'émotions, autant excitation que stress, vertige, que le soir, il fallait que j'en parle. Et puis après, j'ai pris un coach. En gros, un psy pour ta vie pro, qui par ailleurs a fait un effort financier parce qu'elle avait vraiment envie de m'accompagner et que nous, on n'avait quand même pas vraiment de moyens, on ne se payait pas. J'avais mon mi-temps débuté, mais ça ne faisait pas beaucoup, beaucoup. Le temps que du coup on ait les financements, qu'on lève ces fonds-là, qu'on débloque le prêt bancaire, une fois qu'on avait de la trésorerie, et donc c'est là où j'ai démissionné de mon poste à la maternité, et où je me rends compte de ma chance, mais ils ont bien voulu que je continue à prendre des vacations. Et donc du coup, c'est comme ça que pour l'instant j'ai ritualisé mes deux gardes par mois. J'ai réalisé que c'était concret, et que ça allait vraiment avoir lieu quand j'ai commencé à recruter les praticiens. Ouais, là c'était parti. Je me suis quand même fait des bons moments de panique. Je me souviens que trois mois avant l'ouverture du centre, je me revois allongée sur un tapis, je ne pouvais plus bouger, je pleurais. Je devais avoir l'air folle, mais pétrifiée de stress, de ce que je suis en train de faire. Donc j'ai eu des gros moments de panique. Globalement, le premier mois post-ouverture, J'ai plutôt ce souvenir qu'on ne dormait pas trop, qu'on était en train de défaire les cartons, on a monté tous les meubles nous-mêmes, qu'on terminait un peu des trucs le week-end dans le rush. On découvrait tout, ça a été un enfer Internet, ça a été un enfer de te comprendre quel logiciel il fallait utiliser. Ça a été un enfer. En fait, être entrepreneur, c'est aimer les problèmes. Et puis, tous les praticiens arrivaient progressivement. C'est quand même beaucoup de gens qui étaient déjà en libéral. Donc, eux étaient hyper smooth, hyper aidants. Pour Isabelle et moi, ça a dépassé même nos espérances. On avait vraiment envie de créer un collectif de soignants engagés qui montent un peu le truc avec nous. Et du coup, dès qu'on avait des idées, dès qu'on avait envie de faire des trucs, dès qu'on propose quelque chose, ils sont toujours à fond. Eux, ils proposent plein de trucs aussi. Assez rapidement, on a fait notre premier séminaire. On est partis à 20, tous ensemble, au vert. Tous ces trucs que je voyais dans les autres entreprises, qui ne sont pas des entreprises dans la santé, me donnaient trop envie. Je me dis pourquoi pas nous ? Donc, Donc eux-mêmes, ils étaient morts de rire. On a un séminaire, ça semblait lunaire à tout le monde. Et ouais, nos rituels commençaient à se créer. Donc tous les premiers mercredis du mois, on a un mercredi. Donc c'est apéro tous ensemble. Mais pendant une heure, on traite un sujet médical. Grâce à eux, quand même, ça s'est vite goupillé. On a vite pris nos marques. À partir du moment où tu mets tes agendas en ligne, il y a un tel manque de consultations, même à Paris, que les praticiens ont ouvert leurs consultations. Et c'est parti, quoi. Donc ça a très vite roulé et on est très vite arrivé à 1000 patientes par mois, 1500, 2000. Et puis c'était cool de voir la réaction des gens dans le centre. On s'est quand même vraiment donné du mal pour faire un truc qui n'est pas à l'air trop froid, qui ne ressemble pas à un centre médical. Donc chez Jeen, on a du coup deux parties. Il y a une partie avec tout ce qui est dit réglementé. Donc il y a du médical avec pléthore de sages-femmes. On est sept sages-femmes dans le centre, avec plein de casquettes différentes. Que ce soit suivi gynéco, périnatalité, acupuncture, orthogénie, fertilité. Et puis à côté de ça, du coup, on a kiné, ostéo, chiropracteur, gynéco bien sûr, médecin généraliste. Tous les professionnels de santé sont indépendants, mais travaillent ensemble et sous le même toit. Et le centre qui est juste à côté, là, on a toute la partie non réglementée. Et du coup, on a une doula, une hypnothérapeute, une sophrologue. Et c'est là où on a une grande salle d'atelier aussi, où on fait du yoga, du pilates pour accompagner les femmes. Par exemple, endométriose, SOPK, ménopause. On a des psychologues, évidemment, indispensables, qui n'ont même plus assez de place pour voir tout le monde. Voilà, donc ça fait quand même un pool d'une vingtaine de praticiens en tout. Au-delà des consultations et des ateliers collectifs, on va mettre en place des ateliers nutrition, parce que ça manque pas mal dans les parcours de soins aussi. Et on fait depuis l'ouverture deux masterclass par mois. Et donc là, c'est un professionnel de santé qui vient parler d'un sujet de santé. Et donc, ça va être sur le postpartum, ça va être sur la congélation des ovocytes, sur la ménopause.. Et puis même entre elles, c'est assez riche en témoignages, donc elles s'entraident pas mal. Donc du coup, on a ces trois pôles, en fait. On a consultation, masterclass et atelier collectif. Et on a créé une plateforme en ligne, Jeen. Et le concept, du coup, c'est que des articles autour de la santé des femmes, des médias, il commence à y en avoir vraiment beaucoup. Il y a quand même pas mal de contenu en ligne, mais presque trop, en fait. C'est pas facile quand t'es une femme de trouver ce qui est vraiment fiable là-dedans. Et on s'est dit, du coup, on va plutôt faire de la curation de contenu. on va demander à chacun des praticiens et nous on va regarder quels sont les articles, les vidéos, les livres, les podcasts qui nous semblent vraiment pertinents et on va se contenter d'en recommander quelques-uns en fonction des problématiques. Donc on a commencé à mettre ça en ligne. Et ce qu'on est en train de construire par ailleurs, là c'est plutôt pour les professionnels de santé. Il y a plein de choses que tu racontes pendant ta consultation, mais le patient ne peut pas tout retenir et donc quand il ressort, il a retenu un tiers de ce que tu racontes. Ou alors toi tu voudrais aller plus loin mais tu n'as pas le temps en tant que consultant. Pour toutes ces petites choses-là, il y a mille trucs qu'on répète en permanence. Je vais te donner un exemple très sage-femme. Pendant la grossesse, on explique ce que c'est que la préparation à la naissance, les huit cours remboursés par la sécu, ce que ça contient, etc. Mais éventuellement, elles ne retiennent pas tout. L'idée, c'est que du coup, il y ait un petit PDF de ces explications-là qu'elles puissent retrouver sur la plateforme de leurs praticiens. Moi, je m'occupe d'aller recruter les praticiens. Je passe pas mal de temps à rencontrer des professionnels de santé divers et variés. Je m'occupe de tout le côté onboarding, donc leur expliquer tout le fonctionnement du centre, des logiciels, nos rituels. Faire en sorte qu'ils aient tout ce qu'il faut pour travailler chez Jeen, acheter le bon matériel, etc. Je m'occupe de tout le côté partenariat. Du coup, là, par exemple, on est en train de mettre en place un partenariat avec les Bluets. Je m'occupe de la com de Jeen. Pendant un an, je me suis pas mal occupée des ateliers et des cours. L'idée, c'est vraiment que moi, je me focus sur tout ce qui va être plutôt médical. Justement, les parcours de soins en interne les rendent hyper lisibles tant pour les femmes que pour les praticiens. Donc, tout ce côté expérience pour les professionnels de santé et pour les femmes, les patientes qui rentrent chez Jeen. En gros, si je dois résumer, je dirais tout ce qui touche au médical, c'est moi, la com. Et Isabelle, de façon assez logique et complémentaire, elle va gérer tout le côté financement, relations investisseurs, développement du projet. Elle est un peu notre chef d'orchestre. Ce que je préfère aujourd'hui dans ce que je fais, de très loin, c'est l'animation de ce collectif de soignants. Tout ce côté humain, je fais des rencontres de folie, je découvre des métiers que je ne connaissais pas. J'adore l'idée de travailler pour qu'ils soient plus épanouis dans leurs pratiques, de leur faciliter un peu les choses, de les faire travailler ensemble. Tout ce côté où je me dis waouh c'est fou à quel point ça n'existe pas à l'hôpital, et bien ça je suis trop contente de cette amination de communautés. C'est moi qui organise les mercredis, entre autres les séminaires, et ça, ça me grise totalement, c'est un truc que je ne lâcherai pas. Et quand même le côté com, écrire la newsletter par exemple, j'y prends un certain plaisir, donc dans une certaine mesure c'est quand même hyper chronophage. Je me suis surprise à aimer la com. Quand on a su qu'on allait ouvrir le centre, je me suis dit direct que je voulais consulter au sein de Jeen. D'une, j'avais envie de comprendre en interne ce que c'était que le libéral, donc il y avait un peu ce côté besoin de crédibilité, de légitimité. Puis, curiosité de sage-femme, par ailleurs, j'ai envie de comprendre ce que c'est le libéral et j'ai envie de le vivre. J'ai plutôt fait jusque-là une journée de sage-femme toutes les deux semaines. Donc du coup, je ne suis pas beaucoup de patientes, mais suffisamment pour comprendre ce que c'est de coter ces consultations et comprendre ce que ça apporte d'avoir ses propres patientes. Et comme je sais qu'on va ouvrir un autre centre, je suis consciente que je vais devoir faire un peu des choix. Cette aventure en vrai m'a profondément changée. Je me connais beaucoup mieux, à force de coaching, à force de larmes, tout ça, mais je comprends beaucoup mieux quelles sont mes forces et mes faiblesses. Oui, il y a un côté assez introspectif dans l'entrepreneuriat, tu es tellement sans filet et un peu face à toi-même, que j'ai l'impression que je me connais beaucoup mieux. Je dirais que j'ai plus confiance en mes capacités, et en même temps, paradoxalement, je connais mieux mes limites aussi, mais j'ai l'impression d'avoir beaucoup plus confiance en moi. En tout cas, il y a une ouverture des possibles que je ressens beaucoup plus. Et d'ailleurs, c'est... La raison numéro un pour laquelle je t'ai dit oui direct pour le podcast, c'est que je sais qu'il est à destination des sages-femmes et qu'il y a un peu un déclic de « on n'est pas faite que pour ça, on peut faire plein de trucs » . On a quand même un peu cette réputation, vachement moins maintenant, je trouve qu'on a un métier qui a vraiment le vent en poupe, mais on est facilement les filles un peu cuculs, petits oiseaux, en rose, coincées dans la périnatalité. Du coup, moi, je me dis non, en vrai, notre métier, il est incroyable. Ce qu'on peut faire, c'est fou. Et en plus, même, je pense qu'on ne se rend pas compte de l'étendue des possibles, de tout ce qu'on peut faire. Du coup, ça me donne la niaque pour transmettre ma niaque aux autres sages-femmes. Et pas forcément, tout le monde n'aura pas du tout envie de monter le projet que je monte là, mais pour mille autres projets. Donc, voilà, c'est un peu le message de détermination que j'ai envie de faire passer.

  • Alice

    Je remercie Valentine pour son témoignage stimulant et très encourageant, recueilli sur place au sein du centre de santé Jeen qu'elle a confondé et ouvert depuis 2023. Un projet au fort impact pour la santé des femmes et qui continue de grandir, puisqu'un deuxième centre va s'ouvrir très prochainement à Paris. Suite à cette interview, j'ai découvert que GYM était le nom du personnage principal du célèbre roman Le cœur des femmes de Martha Winkler. Un récit qui raconte tout le cheminement d'une médecin gynécologue défendant une approche... à l'écoute et respectueuse de la santé des femmes. C'était le deuxième épisode du podcast La Voix des Sages-Femmes et je vous donne rendez-vous pour d'autres rencontres audio, au contenu et format varié, des interviews et échanges instructifs comme des récits plus intimes. A très bientôt pour un nouvel épisode.

Description

🛋️Tout est parti d'une discussion sur le canapé.

Valentine, sage-femme à la maternité des Bluets, et Isabelle, sa colocataire, échangent sur l’offre de soins actuelle et rêvent d’un lieu de santé pensé par et pour les femmes.

Mais entre l’envie et la réalité, il y a un monde : celui des levées de fonds, des investisseurs et du cadre juridique, bien loin des couloirs de la maternité.


Dans cet épisode, plongez dans l’histoire captivante de Valentine, sage-femme engagée qui a osé braver ses doutes et sortir de sa zone de confort pour concrétiser un projet ambitieux : Jeen, un grand centre de santé pluriprofessionnel en plein Paris dédié à la santé des femmes, proposant des parcours de soin complets, continus et 100% adaptés à leurs besoins.


Du premier déclic à la concrétisation, nous découvrons les coulisses de cette aventure, entre défis relevés, apprentissages précieux et joie du collectif.


🎧 Un témoignage inspirant pour toutes celles et ceux qui souhaitent donner vie à leurs projets et faire évoluer la santé des femmes.


Produit par Alice de Maieuticapp


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Valentine

    Oh waouh ! On ne se rendait pas compte de l'ampleur de ce qu'on allait découvrir. Je dis tout ce qui n'arrivait qu'à mes copains, en fait, pourrait m'arriver. J'étais pire qu'une primipare qui vient d'avoir son premier bébé et qui ne parle que de ça. Je découvre ce que c'est qu'une levée de fonds, je découvre ce que c'est qu'un investisseur. Je suis pétrifiée de stress de ce que je suis en train de faire, donc j'ai eu des gros moments de panique. Cette aventure m'a profondément changée. Je me connais beaucoup mieux. Je n'ai jamais eu le sentiment d'être cette pauvre petite sage-femme perdue dans le milieu entrepreneurial.

  • Alice

    Nous sommes plongées en plein cœur du 11e arrondissement à Paris, dans les locaux de Jeen, un centre pluriprofessionnel dédié à la santé des femmes. C'est dans une salle d'attente chaleureuse, aux murs colorés, au canapé Cosy et dont la bibliothèque est remplie d'ouvrages sur la santé féminine que Valentine nous accueille.

  • Valentine

    C'est toujours la tentation principale et là on a vraiment imaginé une tentation qui ne ressemble pas à un truc hospitalier, on a cassé un peu avec les codes du médical, austère, froid.

  • Alice

    Valentine a cofondé Jeen en 2021 avec Isabelle, sa colocataire, alors qu'elle était sage-femme hospitalière à la maternité des Bluets. Tout est parti de leur discussion canapé. Au fil de leurs réflexions et de leurs recherches, le soir, en rentrant du boulot, elles se rendent compte de tout ce qu'il manque pour prendre soin de la santé des femmes. Ainsi, en regroupant tous les acteurs dédiés à la santé des femmes sous un même toit, l'objectif est de proposer des parcours de soins complets, continus et 100% adaptés à leurs besoins. Mais il n'y a pas que des consultations au sein de ce centre de plus de 300 m2. Les patientes peuvent assister aussi à des conférences, participer à des ateliers et même prendre des cours de yoga.

  • Valentine

    Et c'est là aussi où on fait deux masterclass par mois. Ça peut être sages-femmes, médecins, et ils viennent faire une espèce de masterclass apéro interactif, mais autour d'un sujet lié à la santé des femmes. Donc ça, on le fait ici, on rajoute plein de chaises, et ça ne s'y prête pas trop.

  • Alice

    Ainsi, dans ce deuxième épisode du podcast La Voix des Sages-Femmes, nous allons entendre Valentine nous raconter comment aller passer de jeune sage-femme hospitalière à entrepreneuse d'une start-up pleine de succès qui lève plus d'un million d'euros au service de la santé des femmes.

  • Valentine

    Moi, c'est Valentine Burucoa, je suis sage-femme, j'ai 31 ans et depuis 3 ans maintenant, je suis sur le projet Jeen, donc je suis cofondatrice de Jeen et sage-femme depuis bientôt 8 ans. J'ai jamais su répondre à la question de quand ai-je voulu devenir sage-femme parce que je ne m'en souviens pas, c'est un peu comme si ça avait toujours été, en tout cas il y a un peu un mythe dans la famille de « on a toujours su que c'est ça que tu ferais ». Toute petite, j'avais un attrait pour ces ventres qui s'arrondissent. J'étais toujours super intriguée et attirée par les femmes enceintes. Puis beaucoup aussi par les nouveau-nés. Alors que finalement, notre métier, ce n'est pas tant de s'occuper des nouveau-nés. Mais la femme enceinte et le nouveau-né, c'était un peu une obsession. Et je pense que j'ai compris bien plus tard. Et puis parce que ça a pas mal évolué depuis. Mais ce que c'était qu'une sage-femme et que c'était bien plus large que ça. Je commençais à saisir au lycée qu'il y avait ce côté accompagnement humain. Mon tout premier stage en tant qu'étudiante sage-femme, c'était à la maternité des Bluets. Symbolique parce que c'est là où encore aujourd'hui je travaille et j'ai jamais travaillé dans un autre hôpital. Donc ça m'a fait découvrir quand même le métier, l'ambiance en salle de naissance. Et puis, assez rapidement, ça m'a fait découvrir les Bluets tout court et mon coup de cœur Bluets date de là. Donc je crois qu'assez rapidement, je me suis dit, il faut que je me débrouille pour que chaque année d'études, je mette un pied aux Bluets pour être sûre d'y atterrir un jour. Alors pourquoi un coup de cœur pour les Bluets ? Déjà, je trouvais que cette façon de s'adresser aux femmes et aux couples était différente de ce que j'avais imaginé à l'hôpital. Je trouvais qu'il y avait une accessibilité de la part des soignants. Puis après, plein de petits détails qui n'en sont pas, en fait, mais qui, selon moi, donnent pas mal d'autonomie aux femmes pour ce jour si particulier. La dernière année, j'avais du coup ce fameux stage long qu'on a en fin de cursus au Bluet. J'avais réussi à l'avoir là-bas. Et donc, je n'avais pas trop de doutes parce que je savais que je m'entendais quand même bien avec les équipes, que pour eux, c'est quand même canon de recruter quelqu'un qui connaît déjà les logiciels, les protocoles, etc. Mais bon, tu as toujours une petite... de pointe de « et si j'étais pas prise ? » Je me souviens très bien d'être de garde ensuite de couche et d'être l'étudiante de Anna Roy qui est une sage-femme que l'on connaît pas mal dans le milieu puisqu'elle fait pas mal de choses et se bat pas mal pour la profession. Et bien ce jour-là, j'étais de garde avec Anna qui j'ai dit que j'attendais un peu une réponse de ma cadre et avec son énergie et son franc-parler habituel, ni une ni deux, elle m'a dit « je reviens » . Elle a descendu deux étages, elle est allée voir la cadre. Quand elle est remontée, elle m'a dit « Bon bah, descends la voir, c'est bon, tu vas signer ton contrat. » Mais je me souviens pas mal de ce jour où ça y est, c'était check. Je savais qu'à la rentrée, je serais sa femme titulaire au Bluet. Et j'ai eu la chance que ça démarre d'emblée par un CDI. Donc c'était bloqué. Les débuts en tant que sage-femme, je m'en souviens bien, parce que j'ai trouvé ça pas évident. Je trouve que les deux premiers mois, tu as un vrai syndrome de l'imposteur, où tu as du mal à rentrer dans la pièce en te présentant, en disant que tu es sage-femme. Tout d'un coup, tu dois te sentir sage-femme. Donc je me souviens que les deux premiers mois, c'était un mélange d'excitation et de bon vertige. Mais que, ceci dit, assez rapidement, au bout de deux mois, déjà, tu te sens plus légitime. Et après, je trouvais ça fou la première année, de voir le nombre de trucs que tu apprends. J'étais presque excitée d'avoir une hémorragie de la délivrance. Je me battais pour avoir l'accouchement sans péril. Tu as cette énergie du début et une vraie envie d'apprendre et tu te vois progresser à grande vitesse. Donc je trouve ça assez grisant. J'en ai un bon souvenir de la première année. J'ai beaucoup, beaucoup été en salle de naissance. J'ai tourné un peu ailleurs en consultation, en suite de couche. Et après, c'est ce truc particulier en tant que sage-femme, c'est un peu en train de changer. Mais tu gagnes en expérience, mais tu as pas vraiment de carrière en fait. Ça a l'avantage de tu prends jamais d'habitude et il n'y a pas vraiment de routine parce que c'est différent à chaque fois. Mais tu as pas vraiment de perspective d'évolution. Donc je pense que c'est le seul truc qui a commencé à me titiller un peu au bout de deux, trois ans, de me dire « Ok, du coup, ça y est, je suis là, je suis au Bluet, c'est là où j'ai envie d'être et où je me sens bien. » Mais « What's next ? » Je pense que j'avais un peu un sentiment de « Ah, ça va peut-être pas me suffire » , alors que je me suis toujours dit que globalement, une fois que j'aurai un pied à l'hôpital et qui plus est au Bluet, j'y ferai ma vie. Mais ouais, je pense qu'un peu un paradoxe hyper épanouie et pourtant, de l'autre côté, petit sentiment de manque. Et pour autant, c'est mon premier amour et j'en suis jamais revenue. J'y suis encore aujourd'hui. Alors aujourd'hui, je suis vacataire et je fais deux gardes par mois. Mais c'est mes soupapes de décompression. C'est mes moments, mes deux gardes par mois et aucune envie d'arrêter. Même si les équipes ont pas mal évolué, l'activité n'est plus du tout la même non plus. Donc, il y a plein de choses qui changent, mais je continue à trouver cet endroit quand même assez magnifique. Et du coup, j'ai un peu commencé à essayer de m'investir au sein de la maternité pour améliorer un peu des choses, donner des petits coups de main, monter des projets. Puis là, ça a été un peu la désillusion quand même, parce que ça reste l'hôpital, donc c'est une grosse institution, manque de moyens humains, manque de moyens financiers, et puis surtout lenteur d'un énorme organisme. Et là, j'ai une copine médecin généraliste qui m'a parlé d'un projet qui s'appelle NABLA. C'était l'équivalent de ce qu'on connaît un peu plus aujourd'hui qui s'appelle MEI. C'est une application dédiée à la santé des femmes. Et le concept, c'était que les femmes sur l'application pouvaient retrouver du contenu intéressant, écrit par des soignants. Et puis, elles pouvaient poser toutes leurs questions à des professionnels de santé sur l'application. Et donc, j'ai commencé à travailler pour eux en parallèle des Bluets. Et je faisais partie des sages-femmes qui répondaient aux questions des femmes. Et du coup, c'était la première fois que j'avais une expérience plus en entreprise et même en start-up, en fait. J'ai vu vraiment le projet émerger et puis du coup j'ai découvert ce concept de tester, itérer tu testes un truc, tu déconstruis tu retentes et puis hyper collaboratif on pouvait donner notre avis on voyait le truc être hyper modulable donc c'était quand même assez grisant et puis idéal pour compléter ma vie en tant que sage-femme parce que du coup je pouvais le faire de chez moi, à domicile, avec des horaires assez souples, donc compatibles avec mes repos de garde. Je crois que j'ai jamais fait uniquement mon métier de sage-femme en tant que telle. Déjà quand j'étais étudiante sage-femme ... Il y avait une nana des promos d'avant qui avait mis en place une adresse mail à destination des jeunes parents qui pouvaient chercher de l'aide la nuit quand ils rentraient à la maison. Et donc moi qui adore les nouveau-nés et un peu frustrée parce qu'en fait en tant que sage-femme, tu t'en occupes pas tant que ça. Quand j'ai su qu'il y avait ça qui existait, j'ai su direct que moi j'avais envie de faire plein de nuits chez plein de gens. Et donc j'ai commencé quand j'étais étudiante sage-femme. D'ailleurs j'étais pas la plus assidue et concentrée en cours parce que du coup je faisais tellement de nuits chez des gens que je m'endormais quand même régulièrement en cours. Et quand j'ai commencé à devenir sage-femme, ce qui était du coup ce petit job étudiant, j'avais quand même envie de le conserver. Ça m'apportait plein d'autres trucs, même sur ma vision du postpartum. Tu rentres quand même dans l'intimité des gens et dans le quotidien des gens pendant plusieurs mois. Ça pouvait être des gens qui ont des prématurés, des jumeaux, des triplés, ou qui ont la chance d'avoir l'argent de demander un peu d'aide une nuit de temps en temps en postpartum. Donc je voyais plein de familles différentes, plein de problématiques différentes. Et je me sentais vraiment utile, tu ne te sens pas juste « babysitter » . Puis je me suis régalée, j'en ai tellement gardé, je me suis régalée. Et donc j'ai continué quand j'étais sage-femme, mais j'avais quand même mon temps plein au bluet. Donc du coup, je ne pouvais plus en faire autant qu'avant. Et puis, mon nom commençait à tourner dans les familles parisiennes qui avaient besoin. Du coup, j'avais beaucoup, beaucoup de demandes et je n'arrivais pas à y répondre. Et en même temps, je ne sais pas dire non. Et donc du coup, ce que j'ai commencé à faire, c'est proposer les nuits que je ne pouvais pas faire à des étudiants de sage-femme ou à des auxiliaires de puériculture, des puéricultrices. Et donc, mes premières années en tant que sage-femme, c'était ça. J'avais mon temps plein, mais j'avais toujours mes nuits. Plus, je bidouillais un peu pour déléguer des nuits que je ne pouvais pas faire. Puis jusqu'à ce que j'ai des proches qui me disent « mais en fait, si tu fais ça et que ça devient chronophage, tu pourrais monter un truc un peu plus officiel » . Et du coup, avec une de mes très bonnes copines de lycée, qui n'est pas du milieu médical, on s'est dit « alors créons une plateforme de mise en relation entre des jeunes parents qui ont besoin et des étudiants de sages-femmes, enfin en tout cas des personnes qui travaillent dans la périnatalité et des personnes sûres pour des gardes de nuits de nouveau-nés à domicile » . Et donc, on a commencé à créer un site et à créer des process un peu plus carrés que ce que je faisais jusque-là. Et donc, on a fait ça pendant un an. Ça devait faire quatre ans que j'étais au Bluet. Et du coup, c'était mon projet à côté, qui était à la fois très cool et à la fois, en fait, une fois que ça a commencé à se professionnaliser et que je commençais à plus du tout connaître les gens qui faisaient appel à nos services, entre guillemets. Là, j'ai commencé à pas trop aimer l'expérience. J'avais l'impression que les gens qui nous contactaient étaient de plus en plus riches et nous prenaient vraiment comme une main d'œuvre. De plus en plus riche n'est pas un problème, mais de plus en plus riche et de plus en plus exigeant. Et je n'aimais pas ce qu'on était en train de faire. Et je commençais à me dire qu'en tout cas, ça m'avait prouvé que je pouvais faire d'autres choses, toujours en lien avec la santé, mais faire autre chose. Et je me disais par contre, si je gardais un peu un projet à côté de mon temps plein à l'hôpital, je voulais que ce soit un truc qui ait un peu plus d'impact à mes yeux. Donc au bout d'un an, on a arrêté et au moment où j'ai arrêté, j'étais en colocation avec Isabelle, qui est la personne avec qui j'ai monté Jeen. Isabelle, j'en parle comme si c'était la fin de ma vie, mais c'est presque ça, associée. Et du coup, on s'est rencontrés en étant en colocation ensemble. Quand je rentrais de garde, j'avais quand même pas mal besoin de déverser un peu. Les trucs cool, mais aussi mes frustrations, justement, de voir des choses qui ne bougent pas, alors que moi j'aimerais que ça bouge. Je lui racontais Nabla, enfin bon, je lui racontais un peu ma vie. Et puis elle, dans l'autre sens, c'est aussi une femme entourée de femmes, donc évidemment, on partageait. des histoires classiques, santé, gynéco, femmes. Elle, elle n'est pas du tout le même profil. Elle a fait une prépa, une école de commerce. Elle faisait du conseil à ce moment-là. Du coup, c'est vraiment nos discussions canapé qui ont fait un peu émerger des questionnements sur la façon d'accompagner les femmes en France. Moi, je me questionnais du coup quand même pas mal sur "est-ce que mon temps plein au Bluet, c'est vraiment ce que j'ai envie de faire ?". Aucun doute sur le fait d'avoir envie de continuer, mais peut-être... pas à temps plein. Et Nabla me donnait envie de faire autre chose. En fait, ça m'a un peu mis ces expériences-là le pied à l'étrier d'expériences un peu entrepreneuriales ou d'une vie en entreprise qui commençaient à me donner un peu envie. Je voyais aussi tout ce que la vie en entreprise apporte que l'hôpital t'apporte pas. À l'hôpital, on est quand même pas vraiment managé. On a des cadres qui ont déjà pas mal de boulot. On a la direction et on a les RH, mais en fait, t'es un numéro parmi mille. Il y a personne qui cherche vraiment à te faire évoluer et qui t'apporte de l'expérience. Tu te formes quand même par toi-même ou autour de tes collègues. Mais voilà, donc je trouvais qu'il y avait zéro management, zéro carrière possible, ce que je disais tout à l'heure, mais tu ne peux pas avoir d'ambition. Quand tu es sage-femme, tu peux te rajouter plein de cordes à ton arc, tu peux faire plein de DU, ce qui est déjà canonissime, mais tu n'as pas de perspective d'évolution. Et ce n'était pas tant une ambition en version snob et élitiste. Je ne me disais pas que je voulais monter en grade, je me disais juste que j'avais envie de... de me dire que mon boulot pouvait changer ou que tu pouvais avoir d'autres opportunités. Et puis le dernier truc qui me semble être le principal, c'est que je trouve que le côté plus RH, le côté un peu sympa d'une vie en entreprise, tu l'as pas à l'hôpital. Si t'as de la chance d'être dans une équipe qui s'entend bien, c'est trop cool, mais on ne se voit pas forcément à l'extérieur sauf une initiative personnelle. T'as jamais un séminaire d'organisé, les formations qu'on te donne, c'est des formations obligatoires où tout le monde a envie de se pendre plutôt que de'y aller. Donc tout ce côté vie d'équipe, on ne l'a pas. Et même, j'ai plutôt tendance à penser qu'avec l'activité qu'il y a à l'hôpital et les conditions de travail difficiles, on a plutôt tendance à beaucoup se plaindre et à pas mal critiquer le travail des uns des autres. C'est pas hyper sain non plus comme environnement de travail, ce qui est hyper paradoxal parce qu'on est les gens qui soignons, mais en fait, on prend pas vraiment soin de nous. C'est la phrase préférée d'Isabelle, c'est prendre soin des gens qui prennent soin. Et du coup, je commence à découvrir un peu ce qui se passe en plus, chez Nabla, ambiance start-up. Et là, tu découvres une énergie folle, les afterworks. Du coup, tout ce qui n'arrivait qu'à mes copains, en fait, pourrait m'arriver. Et je pense que ça a un look et un truc dans ma tête que je ne suis pas forcément obligée de passer toute ma vie à temps plein à l'hôpital. Et en fait, ces trucs-là que je trouve trop cool dans les vies des autres hors médicales, ça pourrait exister chez moi aussi. Peut-être que je peux faire autre chose. Et en tout cas, ce qui est sûr, c'est que j'ai envie d'autre chose. L'idée de Jeen est née dans ma tête forcément plus au début via le pan périnatalité parce que c'est surtout ça que je connaissais. Et donc là, je faisais un peu le constat de, on ne manque pas de professionnels de santé parce qu'il y en a plein, des ostéos, des sages-femmes, des psys, des gynécos. Mais il n'y a pas du tout de liant entre eux. Une fois que tu mets le pied dans l'hôpital, le parcours, il existe. Mais en dehors, il n'y a pas tant de parcours de soins en tant que tel qui existe. Donc ça, je commençais à trouver ça bizarre. Et puis, je regardais un peu du coup ce qui existait à l'hôpital en libéral, en me disant si je vais en libéral, qu'est-ce que ça va m'apporter de plus et qu'est-ce que ça apportera aux femmes de différents ? Parce que j'avais quelques collègues qui partaient des Bluets. Effectivement, elles avaient une relation avec leurs patientes qui était en fait assez épanouissante parce que tu les suis vraiment sur la durée et tu leur apportes presque plus que ce que t'apportes à l'hôpital, en tout cas différemment. Je me suis rendu compte aussi que, concernant les sages-femmes, on pouvait faire 10 000 milliards de trucs en libéral. Mais sur ce côté très "femmes", je me disais pour les femmes, c'est très flou. Le suivi en ville, il n'y a pas de parcours. Donc je racontais ça un peu à Isabelle et notamment, je me souviens qu'à ce moment-là, j'étais un peu obsédée par le sujet du postpartum. Je me disais, une fois qu'elle rentre chez elle, c'est le no man's land, il se passe plein de trucs pendant la grossesse, mais en postpartum, pas du tout. Il y a ok les visites de sages-femmes à domicile, si tant est qu'elle trouve une sage-femme qui vient à domicile. Mais sinon, en attendant la rééduc, elles sont quand même pas mal livrées elles-mêmes. Et je dis les femmes, mais enfin les couples au global. Alors, OK, il y a des parcours de soins cools pendant la grossesse, mais encore qu'il y a des choses à faire. Et puis en postpartum, ça n'existe pas, les parcours de soins. Il n'y a pas du tout d'équipe présente pour elle. Puis après, en discutant avec Isabelle, elle et moi, d'ailleurs, nous n'avons pas d'enfant. Et donc, du coup, on pensait aussi pas mal à ce qu'on connaissait. Donc, plus le suivi gynéco, entre guillemets, classique. Et rien que là, on rigolait au début en se disant, nous deux, on cumule sept moyens contraceptifs sur les dix dernières années. Et puis, on avait toutes les deux pas de gynéco attitré. Et donc là, on a commencé à interroger des femmes sur leur suivi de santé. Donc on avait quand même un petit bagage qui nous prouvait qu'effectivement, il y avait ce vrai manque de parcours de soins. Plus les interviews qu'on faisait à côté, on faisait des petites interviews aussi de professionnels de santé pour ne pas se baser que sur mes ressentis. Ça a bien duré six mois où on a creusé. Et plus on creusait, plus on s'étonnait de découvrir à quel point il y avait un manque de considération depuis plusieurs années, voire plusieurs siècles, de la santé féminine. Ça fait des siècles que la santé a été imaginée par des hommes. Et puis, à partir du corps masculin, on a vraiment calqué ce qu'on connaissait de la santé des hommes sur la santé des femmes, comme si c'était corps identique, symptômes identiques, etc. Et aujourd'hui, on sait évidemment que non. Et donc, même moi, j'ai découvert que ça ne fait pas si longtemps que les femmes sont incluses dans les essais cliniques, les recherches. On ne se rendait pas compte de l'ampleur de ce qu'on allait découvrir. Mais il y a en plus tous les enjeux qui sont spécifiques aux femmes, à la santé féminine : endométriose, SOPK, les sujets de fertilité, la ménopause. Et là, on se disait, oui, en fait, il n'y a pas 10 000 ressources, il n'y a pas beaucoup d'infos faites auprès des femmes. Bref, étendu de, oh, waouh, il y a du boulot, il y a tellement de trucs à faire, on commence par quoi ? Et du coup, moi, c'est comme ça que j'ai commencé à vraiment me mettre dedans. Et en fait, Isabelle aussi, on s'est embarquées un peu l'une l'autre dans ces longues discussions pendant plusieurs mois. C'est six mois de recherche, réflexion. Si ça n'avait dépendu... que de moi, je crois qu'il ne se serait pas passé grand-chose de plus. Je savais que j'avais envie d'en faire quelque chose, mais alors, énorme syndrome de l'imposteur et puis sentiment d'une maxi-montagne en face de toi. En fait, je commence par quoi ? De toute façon, je suis à temps plein à l'hôpital. Et c'est là où force de l'association, mais Isabelle, du fait de son parcours, il y avait quand même un peu plus d'évidence en elle que c'était possible. Elle avait fait son master entrepreneur en certain d'écoles de commerce. Donc, elle savait presque depuis toujours qu'à un moment, elle montrait son propre projet. Donc, elle m'a quand même un peu tirée là-dedans. Et Isabelle, du coup, pour ça, a été ultra structurant. Enfin, on sent qu'elle avait les études qu'il fallait et l'expérience qu'il fallait pour construire tout ça. Du coup, on a commencé à vraiment ficeler un peu notre solution, entre guillemets. Et donc, on s'est dit, on veut des lieux. On s'est dit, on va mettre au même endroit une équipe, un vrai collectif de soignants pluridisciplinaires qui vont tous... avoir une expertise autour de la santé des femmes et comme ça, vraiment se compléter. Donc pour eux, beaucoup plus enrichissant et puis ça répond au problème de la solitude du praticien libéral. Et pour les femmes, trop canon, parce que du coup, une fois qu'elles mettent un pied dans le lieu, elles peuvent construire leur parcours de soins au même endroit. Donc on partait un peu là-dessus en se disant, waouh, rêve ultime si on a un lieu avec tout. Il faut du médical, mais il faut aussi du paramédical, il faudrait des médecines complémentaires, il faudrait des masterclass pour redonner de l'info, il faudrait des ateliers un peu plus sportifs. Parce que l'activité physique a une énorme place dans la santé. Puis après, on s'est quand même confrontés à la réalité de la santé en France, qui est passionnante mais intense. C'est le côté juridique. On a dû faire tout un travail juridique pour voir au-delà de ce qu'on avait envie de faire, ce qu'on avait le droit de faire. Puis une fois qu'on avait validé le côté juridique, tu veux monter un lieu, mais du coup, il faut de l'argent. Et là, on s'est dit, du coup, on va aller voir les banques. Mais les banques, elles te demandent d'avoir un apport, qu'évidemment, du haut de nos même pas 30 ans à l'époque, nous n'avions pas. Donc, on a dû aussi réfléchir comment on va aller chercher des financements. Donc, tout ça, c'est l'étape de... À partir du moment où on a commencé à interroger les gens jusqu'à « Ok, on se lance, on a la structure juridique, on comprend comment on va devoir aller chercher l'argent. Bon, bah, go ! » Et donc là, Isabelle, elle a quitté son boulot. Elle a obtenu une rupture conventionnelle, elle est partie de son boulot. Et là, c'était plutôt à moi de me prendre une petite claque dans la figure. Je crois qu'on parlait de tout ça depuis plusieurs mois. Et j'étais trop emballée par ce qu'on se disait, mais je ne réalisais pas vraiment. Par ailleurs, elle, elle avait pu partir avec une rupture conventionnelle et donc toucher le chômage. Mais à l'hôpital, ça, ça n'existe pas. Comment j'allais gagner ma vie, c'était un sujet. Donc, il y a eu quand même un petit moment de flou de mon côté. Du coup, par rapport à Isabelle, j'étais quand même beaucoup moins investie. Et heureusement qu'elle n'a pas lâché. Quand j'ai compris qu'elle y allait vraiment avec ou sans moi, là, je me suis dit, il faut que tu te bouges. Et du coup, j'ai demandé un mi-temps au Bluet. Et du coup, on a commencé à bosser sur le projet vraiment avec Isabelle à temps plein et moi à mi-temps. Découverte d'un tout autre univers, d'un coup. Je découvre ce que c'est qu'une levée de fonds, je découvre ce que c'est qu'un investisseur, je découvre plein de mots que je ne connais pas. C'est un peu comme quand tu apprends une nouvelle langue, je n'essayais même pas de l'interrompre à chaque fois, je prenais le sens global. Franchement, j'ai appris sur le tas. C'est là où je suis super consciente d'avoir une associée en or, c'est qu'elle a toujours été super patiente, pas du tout condescendante, elle m'a toujours tout expliqué. Je n'ai jamais eu le sentiment, à côté d'elle, d'être cette pauvre petite sage-femme perdue dans le milieu entrepreneurial. Et puis, j'ai trouvé l'accueil de tous les entrepreneurs qu'on rencontrait, même dans le cadre de la levée de fonds. J'avais un peu peur qu'on me prenne pour que la sage-femme et qu'on regarde beaucoup Isabelle. Et je ne l'ai pas du tout ressenti. Je ne me suis pas du tout sentie lésée quand on racontait notre projet, quand on essayait de convaincre, d'embarquer les gens. Au contraire, je trouvais qu'on donnait de la vraie valeur au fait que dans le duo, il y ait quelqu'un du milieu médical. Donc, j'ai vraiment appris sur le tas au fur et à mesure. Maintenant, je souris en regardant comment je parlais, comment j'ai appris qu'on pouvait ranger une boîte mail. j'ai jamais trié mes mails avant, à utiliser un Google Agenda, du truc le plus B à bas au truc le plus pointu de la levée de fonds, on y est allé step by step toutes les deux. Et pas que toutes les deux, assez rapidement, on s'est fait accompagner par ce qu'on appelle donc un incubateur. On s'est fait même accompagner par deux incubateurs en parallèle qu'on avait bien choisis, qui étaient vraiment un spécialiste dans la santé et l'autre dans ce qu'on appelle l'impact. Donc, ils ne suivent que des projets qui ont un impact social ou écologique. On n'est pas allé voir le côté trop start-up nation qui n'a rien à voir avec ce qu'on faisait. Et je pense que c'est une de nos qualités avec Isabelle, c'est de beaucoup savoir s'entourer. Je pense que j'ai mis un peu du temps à en parler vraiment. Déjà parce que quand même, dans le milieu médical, tu as l'impression de monter sa boîte et en plus, lever des fonds, c'est hyper dark. Je ne voulais pas avoir l'air d'être la connasse entrepreneuse, j'ai pas d'autre mot. Celui qui, pour le coup, m'a pas mal soutenue, mais n'en pouvait plus d'entendre parler, c'était mon copain. J'étais, je pense, pire qu'une primipare qui vient d'avoir son premier bébé et qui parle que de ça. J'étais en boucle, mais parce que j'apprenais tellement de trucs et tout était tellement nouveau, j'étais traversée de tellement d'émotions, autant excitation que stress, vertige, que le soir, il fallait que j'en parle. Et puis après, j'ai pris un coach. En gros, un psy pour ta vie pro, qui par ailleurs a fait un effort financier parce qu'elle avait vraiment envie de m'accompagner et que nous, on n'avait quand même pas vraiment de moyens, on ne se payait pas. J'avais mon mi-temps débuté, mais ça ne faisait pas beaucoup, beaucoup. Le temps que du coup on ait les financements, qu'on lève ces fonds-là, qu'on débloque le prêt bancaire, une fois qu'on avait de la trésorerie, et donc c'est là où j'ai démissionné de mon poste à la maternité, et où je me rends compte de ma chance, mais ils ont bien voulu que je continue à prendre des vacations. Et donc du coup, c'est comme ça que pour l'instant j'ai ritualisé mes deux gardes par mois. J'ai réalisé que c'était concret, et que ça allait vraiment avoir lieu quand j'ai commencé à recruter les praticiens. Ouais, là c'était parti. Je me suis quand même fait des bons moments de panique. Je me souviens que trois mois avant l'ouverture du centre, je me revois allongée sur un tapis, je ne pouvais plus bouger, je pleurais. Je devais avoir l'air folle, mais pétrifiée de stress, de ce que je suis en train de faire. Donc j'ai eu des gros moments de panique. Globalement, le premier mois post-ouverture, J'ai plutôt ce souvenir qu'on ne dormait pas trop, qu'on était en train de défaire les cartons, on a monté tous les meubles nous-mêmes, qu'on terminait un peu des trucs le week-end dans le rush. On découvrait tout, ça a été un enfer Internet, ça a été un enfer de te comprendre quel logiciel il fallait utiliser. Ça a été un enfer. En fait, être entrepreneur, c'est aimer les problèmes. Et puis, tous les praticiens arrivaient progressivement. C'est quand même beaucoup de gens qui étaient déjà en libéral. Donc, eux étaient hyper smooth, hyper aidants. Pour Isabelle et moi, ça a dépassé même nos espérances. On avait vraiment envie de créer un collectif de soignants engagés qui montent un peu le truc avec nous. Et du coup, dès qu'on avait des idées, dès qu'on avait envie de faire des trucs, dès qu'on propose quelque chose, ils sont toujours à fond. Eux, ils proposent plein de trucs aussi. Assez rapidement, on a fait notre premier séminaire. On est partis à 20, tous ensemble, au vert. Tous ces trucs que je voyais dans les autres entreprises, qui ne sont pas des entreprises dans la santé, me donnaient trop envie. Je me dis pourquoi pas nous ? Donc, Donc eux-mêmes, ils étaient morts de rire. On a un séminaire, ça semblait lunaire à tout le monde. Et ouais, nos rituels commençaient à se créer. Donc tous les premiers mercredis du mois, on a un mercredi. Donc c'est apéro tous ensemble. Mais pendant une heure, on traite un sujet médical. Grâce à eux, quand même, ça s'est vite goupillé. On a vite pris nos marques. À partir du moment où tu mets tes agendas en ligne, il y a un tel manque de consultations, même à Paris, que les praticiens ont ouvert leurs consultations. Et c'est parti, quoi. Donc ça a très vite roulé et on est très vite arrivé à 1000 patientes par mois, 1500, 2000. Et puis c'était cool de voir la réaction des gens dans le centre. On s'est quand même vraiment donné du mal pour faire un truc qui n'est pas à l'air trop froid, qui ne ressemble pas à un centre médical. Donc chez Jeen, on a du coup deux parties. Il y a une partie avec tout ce qui est dit réglementé. Donc il y a du médical avec pléthore de sages-femmes. On est sept sages-femmes dans le centre, avec plein de casquettes différentes. Que ce soit suivi gynéco, périnatalité, acupuncture, orthogénie, fertilité. Et puis à côté de ça, du coup, on a kiné, ostéo, chiropracteur, gynéco bien sûr, médecin généraliste. Tous les professionnels de santé sont indépendants, mais travaillent ensemble et sous le même toit. Et le centre qui est juste à côté, là, on a toute la partie non réglementée. Et du coup, on a une doula, une hypnothérapeute, une sophrologue. Et c'est là où on a une grande salle d'atelier aussi, où on fait du yoga, du pilates pour accompagner les femmes. Par exemple, endométriose, SOPK, ménopause. On a des psychologues, évidemment, indispensables, qui n'ont même plus assez de place pour voir tout le monde. Voilà, donc ça fait quand même un pool d'une vingtaine de praticiens en tout. Au-delà des consultations et des ateliers collectifs, on va mettre en place des ateliers nutrition, parce que ça manque pas mal dans les parcours de soins aussi. Et on fait depuis l'ouverture deux masterclass par mois. Et donc là, c'est un professionnel de santé qui vient parler d'un sujet de santé. Et donc, ça va être sur le postpartum, ça va être sur la congélation des ovocytes, sur la ménopause.. Et puis même entre elles, c'est assez riche en témoignages, donc elles s'entraident pas mal. Donc du coup, on a ces trois pôles, en fait. On a consultation, masterclass et atelier collectif. Et on a créé une plateforme en ligne, Jeen. Et le concept, du coup, c'est que des articles autour de la santé des femmes, des médias, il commence à y en avoir vraiment beaucoup. Il y a quand même pas mal de contenu en ligne, mais presque trop, en fait. C'est pas facile quand t'es une femme de trouver ce qui est vraiment fiable là-dedans. Et on s'est dit, du coup, on va plutôt faire de la curation de contenu. on va demander à chacun des praticiens et nous on va regarder quels sont les articles, les vidéos, les livres, les podcasts qui nous semblent vraiment pertinents et on va se contenter d'en recommander quelques-uns en fonction des problématiques. Donc on a commencé à mettre ça en ligne. Et ce qu'on est en train de construire par ailleurs, là c'est plutôt pour les professionnels de santé. Il y a plein de choses que tu racontes pendant ta consultation, mais le patient ne peut pas tout retenir et donc quand il ressort, il a retenu un tiers de ce que tu racontes. Ou alors toi tu voudrais aller plus loin mais tu n'as pas le temps en tant que consultant. Pour toutes ces petites choses-là, il y a mille trucs qu'on répète en permanence. Je vais te donner un exemple très sage-femme. Pendant la grossesse, on explique ce que c'est que la préparation à la naissance, les huit cours remboursés par la sécu, ce que ça contient, etc. Mais éventuellement, elles ne retiennent pas tout. L'idée, c'est que du coup, il y ait un petit PDF de ces explications-là qu'elles puissent retrouver sur la plateforme de leurs praticiens. Moi, je m'occupe d'aller recruter les praticiens. Je passe pas mal de temps à rencontrer des professionnels de santé divers et variés. Je m'occupe de tout le côté onboarding, donc leur expliquer tout le fonctionnement du centre, des logiciels, nos rituels. Faire en sorte qu'ils aient tout ce qu'il faut pour travailler chez Jeen, acheter le bon matériel, etc. Je m'occupe de tout le côté partenariat. Du coup, là, par exemple, on est en train de mettre en place un partenariat avec les Bluets. Je m'occupe de la com de Jeen. Pendant un an, je me suis pas mal occupée des ateliers et des cours. L'idée, c'est vraiment que moi, je me focus sur tout ce qui va être plutôt médical. Justement, les parcours de soins en interne les rendent hyper lisibles tant pour les femmes que pour les praticiens. Donc, tout ce côté expérience pour les professionnels de santé et pour les femmes, les patientes qui rentrent chez Jeen. En gros, si je dois résumer, je dirais tout ce qui touche au médical, c'est moi, la com. Et Isabelle, de façon assez logique et complémentaire, elle va gérer tout le côté financement, relations investisseurs, développement du projet. Elle est un peu notre chef d'orchestre. Ce que je préfère aujourd'hui dans ce que je fais, de très loin, c'est l'animation de ce collectif de soignants. Tout ce côté humain, je fais des rencontres de folie, je découvre des métiers que je ne connaissais pas. J'adore l'idée de travailler pour qu'ils soient plus épanouis dans leurs pratiques, de leur faciliter un peu les choses, de les faire travailler ensemble. Tout ce côté où je me dis waouh c'est fou à quel point ça n'existe pas à l'hôpital, et bien ça je suis trop contente de cette amination de communautés. C'est moi qui organise les mercredis, entre autres les séminaires, et ça, ça me grise totalement, c'est un truc que je ne lâcherai pas. Et quand même le côté com, écrire la newsletter par exemple, j'y prends un certain plaisir, donc dans une certaine mesure c'est quand même hyper chronophage. Je me suis surprise à aimer la com. Quand on a su qu'on allait ouvrir le centre, je me suis dit direct que je voulais consulter au sein de Jeen. D'une, j'avais envie de comprendre en interne ce que c'était que le libéral, donc il y avait un peu ce côté besoin de crédibilité, de légitimité. Puis, curiosité de sage-femme, par ailleurs, j'ai envie de comprendre ce que c'est le libéral et j'ai envie de le vivre. J'ai plutôt fait jusque-là une journée de sage-femme toutes les deux semaines. Donc du coup, je ne suis pas beaucoup de patientes, mais suffisamment pour comprendre ce que c'est de coter ces consultations et comprendre ce que ça apporte d'avoir ses propres patientes. Et comme je sais qu'on va ouvrir un autre centre, je suis consciente que je vais devoir faire un peu des choix. Cette aventure en vrai m'a profondément changée. Je me connais beaucoup mieux, à force de coaching, à force de larmes, tout ça, mais je comprends beaucoup mieux quelles sont mes forces et mes faiblesses. Oui, il y a un côté assez introspectif dans l'entrepreneuriat, tu es tellement sans filet et un peu face à toi-même, que j'ai l'impression que je me connais beaucoup mieux. Je dirais que j'ai plus confiance en mes capacités, et en même temps, paradoxalement, je connais mieux mes limites aussi, mais j'ai l'impression d'avoir beaucoup plus confiance en moi. En tout cas, il y a une ouverture des possibles que je ressens beaucoup plus. Et d'ailleurs, c'est... La raison numéro un pour laquelle je t'ai dit oui direct pour le podcast, c'est que je sais qu'il est à destination des sages-femmes et qu'il y a un peu un déclic de « on n'est pas faite que pour ça, on peut faire plein de trucs » . On a quand même un peu cette réputation, vachement moins maintenant, je trouve qu'on a un métier qui a vraiment le vent en poupe, mais on est facilement les filles un peu cuculs, petits oiseaux, en rose, coincées dans la périnatalité. Du coup, moi, je me dis non, en vrai, notre métier, il est incroyable. Ce qu'on peut faire, c'est fou. Et en plus, même, je pense qu'on ne se rend pas compte de l'étendue des possibles, de tout ce qu'on peut faire. Du coup, ça me donne la niaque pour transmettre ma niaque aux autres sages-femmes. Et pas forcément, tout le monde n'aura pas du tout envie de monter le projet que je monte là, mais pour mille autres projets. Donc, voilà, c'est un peu le message de détermination que j'ai envie de faire passer.

  • Alice

    Je remercie Valentine pour son témoignage stimulant et très encourageant, recueilli sur place au sein du centre de santé Jeen qu'elle a confondé et ouvert depuis 2023. Un projet au fort impact pour la santé des femmes et qui continue de grandir, puisqu'un deuxième centre va s'ouvrir très prochainement à Paris. Suite à cette interview, j'ai découvert que GYM était le nom du personnage principal du célèbre roman Le cœur des femmes de Martha Winkler. Un récit qui raconte tout le cheminement d'une médecin gynécologue défendant une approche... à l'écoute et respectueuse de la santé des femmes. C'était le deuxième épisode du podcast La Voix des Sages-Femmes et je vous donne rendez-vous pour d'autres rencontres audio, au contenu et format varié, des interviews et échanges instructifs comme des récits plus intimes. A très bientôt pour un nouvel épisode.

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