- Introduction
Emploi, orientation, formation, Lampe de poche, le podcast qui éclaire votre quotidien pro. Le podcast qui éclaire votre quotidien pro.
- Extrait humoristique
C'est pas possible, ça va jamais s'arrêter, c'est qui lui ? Comment tu t'appelles mon grand ? Je vous présente Embarras, l'interaction sociale et la communication, c'est pas son truc, mais c'est un gentil gros géant. Super, bienvenue dans le quartier cérébral Embarras !
- Floriane (animatrice)
Avez-vous déjà remarqué que l'on prenait la plupart de nos décisions d'instinct ? Eh bien, ce n'est pas parce que certaines décisions sont plus faciles à prendre que d'autres, mais bien parce que notre cerveau possède deux modes de pensée. C'est ce que le prix Nobel Daniel Kahneman a étudié, les systèmes 1 et 2 de notre pensée. Si le système 1 fougueux fonctionne automatiquement et rapidement avec peu ou pas d'efforts, le système 2, plus paresseux, accorde de l'attention aux activités mentales contraignantes qu'il nécessite. Dans l'accompagnement des publics, les émotions, souvent liées à ce système 1, jouent un rôle crucial, que ce soit en orientation, formation ou insertion. elles orientent notre cheminement personnel et professionnel. Il est donc essentiel de ne pas les négliger lorsque l'on guide des individus vers leurs objectifs. Pour explorer ce sujet fascinant, nous recevons aujourd'hui une personne qui a un pied dans le domaine de la formation et l'autre dans celui de l'orientation, Christine Petiot, coordinatrice pédagogique chez Avenir Actifs en région Auvergne-Rhône-Alpes. Bonjour Christine.
- Christine (invitée)
Bonjour.
- Floriane (animatrice)
Pour commencer, pourrais-tu nous préciser peut-être ce qu'est Avenir Actifs ? Car si ton rôle de coordinatrice pédagogique explique le rapport à la formation, peut-être que tout le monde ne sait pas ce qu'est Avenir Actifs.
- Christine (invitée)
Alors, Avenir Actifs, c'est l'opérateur du CEP pour le public salarié et indépendant. Donc, nos conseillers en évolution professionnelle vont accompagner exclusivement le public salarié et indépendant dans tous leurs questionnements liés au travail, que ce soit une évolution interne, externe, pour une volonté de se former, une reconversion sur toutes les questions liées au professionnel. Donc, ce public-là va être accompagné par Avenir Actifs.
- Floriane (animatrice)
Et aujourd'hui, tu nous as retrouvés pour que l'on questionne le pouvoir et l'influence des émotions, car le sujet est d'actualité. Il me semble que tu as contribué à un groupe de travail sur le sujet il y a peu. Est-ce que la question de la prise en compte des émotions est nouvelle ?
- Christine (invitée)
Alors en fait, c'est un groupe de travail qui a été constitué de plusieurs conseillers qui se sont portés volontaires, qui ont été accompagnés par un maître d'université et qui ont mené une recherche d'action. Donc, ils sont partis du terrain pour en tirer des conclusions. Pour rebondir sur ta question, effectivement, ils se sont aperçus que si la question des émotions avait été beaucoup traitée dans la littérature grise, dans tout ce qui est théorique, ça avait été assez peu traité professionnellement et dans la mission des conseillers.
- Floriane (animatrice)
Alors, dans quelle mesure les professionnels sont impactés par la question des émotions dans leur accompagnement ?
- Christine (invitée)
Ils sont impactés à plusieurs niveaux. D'une part, lorsqu'ils débutent l'accompagnement avec les bénéficiaires, ils réalisent ce qu'on appelle une analyse partagée de situations. L'objectif de cette analyse, ça va être de comprendre tout l'environnement du bénéficiaire professionnellement, tout le reste aussi, et également comment il se perçoit, comment il vit sa situation et comment il a vécu ses situations précédentes. Donc ça, ça va passer par la compréhension de l'expression des émotions du bénéficiaire. Plus l'intelligence émotionnelle du conseiller sera forte, plus son écoute sera bonne, plus il comprendra, au-delà de ce que dit le bénéficiaire, la manière dont il a vécu, dont il a ressenti les situations. Donc il y a l'émotion du bénéficiaire qui est importante, il y a aussi l'émotion du conseiller qui est importante. S'il est trop submergé par exemple par l'émotion du conseiller, il va s'épuiser et puis son accompagnement pourrait être moins bon aussi. Donc il faut quand même qu'il maîtrise son émotion. Le conseiller est aussi dans une posture de soutien à l'autonomie. Donc par exemple, s'il est dans une posture trop compatissante, il va pouvoir vouloir faire à la place du bénéficiaire et l'accompagnement pourra perdre aussi en qualité. Donc c'est une posture à avoir. Mais effectivement, les conseillers, le travail de recherche qui a été fait le relève, les conseillers vivent beaucoup d'émotions dans les accompagnements.
- Floriane (animatrice)
Les conseillers du CEP doivent respecter les valeurs de neutralité et de co-construction donc, c'est lié au cadre défini par le CEP, mais peut-on généraliser les constats que tu viens de faire aux autres professionnels de l'accompagnement ?
- Christine (invitée)
Alors oui, je pense qu'on peut le généraliser. Les conseillers en évolution professionnelle doivent effectivement respecter les valeurs de neutralité et de co-construction. Ils ne doivent pas porter de jugement sur le projet du bénéficiaire. Ils doivent le laisser mener sa propre réflexion, tout en l'accompagnant. Ils doivent l'accompagner aussi pour qu'il avance à son rythme. En fait, il ne doit pas être envahi dans les émotions dans le sens où il ne doit pas porter de jugement, il ne doit pas devenir impatient, avec un bénéficiaire qui serait très lent, il doit respecter son rythme. Il ne doit pas faire à sa place. Par exemple, un conseiller qui serait trop envahi par les émotions aurait tendance à accélérer le processus et faire à la place du bénéficiaire, par compassion par exemple. Et de même, par exemple, dans une situation où le bénéficiaire voudrait une réponse immédiate, le conseiller ne va pas toujours pouvoir répondre immédiatement à la question, donc il doit prendre de la distance et il faut qu'ils réfléchissent à deux et prennent le temps de la réflexion. Effectivement, ça va s'appliquer à tout type d'accompagnement.
- Floriane (animatrice)
Est-ce qu'il y a un nom pour ce type d'accompagnement
- Christine (invitée)
C'est un accompagnement dont les valeurs sont issues, notamment la théorie sur l'écoute active. C'est un accompagnement qui se veut personnalisé, neutre. Le conseiller est un facilitateur et la valeur de co-construction est très importante. Donc le conseiller est en soutien à l'autonomie du bénéficiaire.
- Floriane (animatrice)
Là, tu nous as énuméré un certain nombre de situations où le conseiller est soumis aux émotions, il doit y faire très attention. Est-ce qu'il y a d'autres situations identifiées pour les bénéficiaires, que ce soit pour le CEP ou d'autres situations plus généralement, où les émotions prennent le pas et comment est-ce qu'on peut les anticiper ?
- Christine (invitée)
De ce que nous remontent les conseillers, il y a deux situations importantes où les émotions prennent le pas. Il y a le récit de vie, lorsque c'est un récit de vie très difficile, et notamment si ça fait écho à ce qu'aurait pu vivre le conseiller aussi. Donc il y a des récits de vie difficiles, par exemple des récits de violence. Il y a aussi beaucoup des récits de mal-être au travail, dans lesquels les bénéficiaires peuvent être englués, et qui créent aussi des émotions chez le bénéficiaire, lorsque c'est des situations difficiles. Tous les récits de vie familiaux, difficiles, etc., qui vont créer des émotions chez le conseiller. Une autre situation qui crée une émotion, c'est l'acceptation ou le refus du financement. Ça, ça crée soit de la tristesse, soit de la joie. Donc quand, par exemple, il y a un refus, là, il y a une déception à la fois du bénéficiaire et du conseiller. Ça, c'est une des situations d'émotion qui est beaucoup remontée. Et inversement, quand il y a une acceptation sur un projet qui a été beaucoup travaillé, donc là, il y a de la joie des deux côtés et ça booste le conseiller.
- Floriane (animatrice)
Donc, est-ce qu'il faut les anticiper, ces émotions, est-ce qu'il faut les contrôler ?
- Christine (invitée)
Sur les questions, par exemple, des acceptations, il y en a beaucoup qui anticipent un possible refus. En parlant avant le bénéficiaire, en lui disant peut-être que ce sera refusé, il faut prévoir. Et il anticipe en prévoyant un second plan. C'est une manière déjà d'anticiper. Après, sur le premier point que j'évoquais, par exemple, les récits de vie difficile, le conseiller, il offre justement un cadre neutre et confidentiel au bénéficiaire. Ça peut être le point de départ d'une alliance de travail, justement, en confiance.
- Floriane (animatrice)
Et est-ce que tu connaîtrais, est-ce que tu pourrais partager avec nous un exercice ou une activité qui permettrait justement de mieux gérer ses émotions, que les professionnels pourraient mettre en œuvre ?
- Christine (invitée)
Ce qui est mis en œuvre, c'est des analyses de pratiques. Les conseillers vont pouvoir parler entre pairs de ce qui se passe pendant l'accompagnement. C'est quelque chose que les conseillers apprécient beaucoup, notamment eu égard aux émotions. Donc ça leur permet de parler de ce qu'ils vivent. Ce que relèvent les conseillers, c'est que c'est très important de pouvoir parler à leurs collègues de ce qu'ils ressentent. Donc les sites où il y a un conseiller seul, c'est beaucoup plus difficile de vivre des émotions parce qu'il ne les partage pas. Par ailleurs, nous mettons en place au niveau régional une formation sur la gestion émotionnelle parce que le travail mené par les conseillers a révélé que justement les émotions n'étaient pas assez prises en compte et que plus les conseillers étaient à même de gérer au mieux les émotions, meilleur l'accompagnement serait. Le point important aussi, c'est préserver le bien-être des conseillers.
- Floriane (animatrice)
Est-ce qu'il y a des petites techniques, des exercices que tu utilises ou qu'eux utilisent en plus de l'analyse de pratique ?
- Christine (invitée)
Oui, certaines techniques pour accompagner leurs bénéficiaires quand ils ont des émotions trop fortes ou pour les aider à faire le point sur leurs émotions. Donc ils utilisent des outils tels que tout simplement l'écriture. Ils peuvent utiliser des outils tels que la roue des émotions qui va permettre aux bénéficiaires de se positionner. Donc voilà, il y a des conseillers qui nous remontent qu'eux, dans leur pratique, ils utilisent, quand ils l'estiment nécessaire, des outils de ce type.
- Floriane (animatrice)
Enfin, Si tu n'avais que trois mots pour résumer la question de la place des émotions dans l'accompagnement, lesquels seraient-ce ?
- Christine (invitée)
J'ai pensé aux trois mots suivants. Richesse, parce que les émotions sont une richesse pour les uns et pour les autres. Et c'est aussi une manière de communiquer, de se comprendre mieux. Équilibre, c'est justement, il faut pouvoir garder l'équilibre et la distance. Mais équilibre, c'est un plus joli mot. Et le dernier mot, ce serait le mot action. Parce que ce qui est important aussi, c'est de pouvoir passer après à l'action.
- Floriane (animatrice)
Christine, merci pour ce temps d'échange où les émotions auront été une source d'énergie stimulante pour notre réflexion du jour. Nous allons à présent éteindre notre lampe de poche et laisser les étincelles finir de parcourir nos neurones pour y imprimer quelques nouvelles idées durables.
- Conclusion
Vous accéderez aux infos pratiques et ressources liées à notre discussion du jour dans la description de cet épisode et en attendant de vous retrouver autour d'un prochain sujet, nous vous invitons à nous suivre sur LinkedIn et sur notre site internet via-compétences.fr qui regorge d'infos et de pépites pour les professionnels de l'orientation, de la formation et de l'emploi.