- Speaker #0
Bienvenue dans Le Juste Rythme, le podcast qui explore le cœur, le corps et la tête. Je suis Marion Béchade, une femme, une mère, une entrepreneuse passionnée mais souvent débordée,
- Speaker #1
en quête chaque jour d'un peu plus de sérénité. Un podcast pour se déculpabiliser et peut-être se donner une nouvelle impulsion.
- Speaker #0
Cet épisode du podcast Le Juste Rythme est soutenu par l'Auberge Basque, un hôtel-restaurant, relais et châteaux, un lieu unique au cœur du Pays Basque. qui invite à ralentir, à se reconnecter à ses cinq sens et à prendre un temps pour soi. L'endroit parfait pour retrouver son juste rythme. Dans cet épisode, j'ai eu la joie de recevoir Laura Issa-Astion, une femme multiple, autrice, mère et belle-mère qui écrit avec intensité et vérité. Avec Laura, nous avons parlé de la maternité, du postpartum, du féminisme, des injonctions qui pèsent encore sur les femmes. mais aussi du corps, de la création et de cette liberté qui traverse sa vie et son écriture. Elle s'est confiée sur la famille recomposée, qu'il faut parfois apprendre à apprivoiser, sur le rapport au sport, à l'alcool et sur cette quête d'équilibre entre les élans, les excès et la douceur de vivre dans l'instant présent désormais. Laura nous a ouvert les portes de son univers d'autrice, sur sa manière d'écrire pour comprendre, pour se relier, pour dire ce qui bouillonne à l'intérieur. Ici, au Pays Basque, où elle vit désormais, elle a trouvé un ancrage, un rythme à la fois instinctif, paisible et vibrant. Je vous laisse découvrir le juste rythme de Laura. Avant qu'on entre dans notre conversation, si tu devais me décrire ton rythme actuel en trois mots, lesquels choisirais-tu ?
- Speaker #1
Éreintant, joyeux et épanouissant.
- Speaker #0
Tu as écrit. J'écris parce que je ne sais pas tellement parler. Et pourtant, aujourd'hui, je te demande justement de parler. Est-ce que c'est OK ?
- Speaker #1
Je ne serai pas là sinon. Mais c'est vrai que ce n'est pas un exercice facile pour moi.
- Speaker #0
Comment est née l'envie d'écrire les murs ?
- Speaker #1
Moi, j'avais déjà écrit, j'ai lancé en 2019 Mag, qui était un blog sur lequel je partageais... Au départ, j'avais vraiment l'envie, après avoir travaillé dans la presse, de pouvoir dire ce que je voulais, d'écrire ce que je voulais, parce que c'est vrai que dans le journalisme, surtout dans le journalisme... féminin, il y a quand même pas mal de règles à respecter, que j'ai pris plaisir à respecter pendant un temps. Mais c'est vrai que quand je suis partie de la rédaction du ELLE, j'avais cette envie de pouvoir écrire vraiment comme je voulais. Donc j'ai lancé MAG, qui était un blog que j'ai d'abord fait comme un passe-temps, puis qui a pris quand même pas mal d'ampleur. Et donc après, les murs, c'est arrivé plus tard, mais dans une volonté aussi de pouvoir un peu gagner ma vie avec. Tout simplement parce que ça me prend du temps et que j'avais envie que ça devienne quelque chose de plus professionnel.
- Speaker #0
Et le nom Les Murs ?
- Speaker #1
Les Murs, c'était une chanson de ma grand-mère qui était chanteuse et qui s'appelait Les Murs. Je trouvais que ça englobait beaucoup de choses. Les murs sur lesquels on écrit, les murs de... De l'intimité, les murs ont des oreilles. Les murs, ça pouvait être beaucoup de choses. Les murs qu'on a envie de casser aussi, pour dire ce qu'on a envie de dire. Donc je trouvais ça chouette, assez facile à retenir. Et surtout, ça pouvait avoir plusieurs sens.
- Speaker #0
Moi, ça me faisait penser aux murs porteurs d'une maison aussi. Aussi,
- Speaker #1
voilà. Donc tout le monde peut y trouver aussi le sens qu'il a envie d'y trouver.
- Speaker #0
Tu as déjà un petit peu répondu, mais est-ce que c'est un espace où tu te sens plus libre qu'ailleurs ?
- Speaker #1
Oui. En tout cas, c'est un espace où j'arrive à dire facilement ce qui est plus difficile à dire pour moi à l'oral.
- Speaker #0
Ton écriture, elle est très incarnée. Comment est-ce que tu trouves la juste distance entre ta vie privée et ton texte ?
- Speaker #1
Je ne me pose pas tellement la question.
- Speaker #0
Oui, ça se ressent.
- Speaker #1
C'est le but. Et en plus de ça, je crois que c'est ce qui plaît aux gens qui me suivent. Si je dois parler de distance, là où je la mets, ce n'est pas tellement vis-à-vis de moi. C'est plus... J'essaye en tout cas, quand j'écris, de toujours me dire « Ok, les gens dont je vais parler, est-ce que ce que j'écris là peut les heurter, peut les déranger ? » Parce que je parle de mon intimité, mais forcément, elle englobe aussi mes proches, très souvent. Et ce qui est important pour moi, c'est dans ma liberté à moi de ne pas les impacter.
- Speaker #0
Est-ce que tu as un rituel d'écriture particulier ?
- Speaker #1
Pas vraiment. En fait, il y a des jours où je n'écris pas. Ça arrive même très souvent. Et puis, il y a des jours où je passe ma journée. On est derrière mon écran à écrire. Je n'ai pas de rituel particulier. Après, j'essaye quand même de m'imposer un rythme, puisqu'on est là pour parler de rythme. Et je ne laisse jamais passer une semaine sans avoir essayé d'écrire. Mais essayer ne veut pas dire écrire. Après, sur les murs, là où c'est un peu l'inconvénient... Enfin, inconvénient... La... contrainte que j'ai, que je n'avais pas avec Mag, c'est que comme Mag, c'était un blog libre et qu'il n'y avait pas d'abonnement, que les gens ne payaient pas, si je n'avais pas envie d'écrire une semaine, je n'écrivais pas une semaine. Là, j'ai deux papiers à publier tous les mois, plus l'incruste, qui est un nouveau format que j'ai créé sur les murs. J'essaye de respecter le timing de publication que je m'étais fixé. Il arrive que je ne sois pas toujours très assidue. Je ne sais pas. Après, je me dis toujours, peut-être que les gens, Laura, ne sont pas là devant leur boîte mail à mettre à jour.
- Speaker #0
C'est comme une petite surprise qui arrive, en fait.
- Speaker #1
Mais bon, ça fait partie aussi, j'imagine, de ce métier-là. C'est que parfois, je préfère ne pas écrire plutôt que d'écrire quelque chose qui ne va pas forcément me ressembler ou dans lequel on verra que j'ai écrit pour écrire et pas juste parce que j'avais envie.
- Speaker #0
Tu es plutôt ordinateur ou papier ? Ordinateur.
- Speaker #1
Je prends des notes sur papier, mais non, ordinateur.
- Speaker #0
Quand tu entres dans le flot de ton écriture, comment est-ce que tu sais que tu y es ?
- Speaker #1
Quand je pense à rien d'autre, en fait. Quand d'un coup, j'entends la machine bipper parce qu'elle est finie, mais que je ne me lève pas pour aller la vider. Ça va être ça.
- Speaker #0
Rattrapé par des détails du quotidien. Est-ce que tu le ressens physiquement ? Tu tapes frénétiquement sur ton ordinateur ?
- Speaker #1
Oui, oui. Oui, il y a vraiment des moments où ça déroule et d'un coup, je me dis « mais c'est vraiment ça que je dois faire ? » Et puis, il y a des jours où pas du tout et où je me dis « mais en fait, je fais complètement fausse route, il faut que je fasse autre chose. » Il n'y a pas un mois où je ne doute pas de ce que je fais.
- Speaker #0
Comme tout. Tu as longtemps travaillé dans la presse féminine. Aujourd'hui, ton écriture, elle s'affranchit de tout format. Est-ce qu'écrire en ton nom, sans filtre, c'est une forme d'émancipation ?
- Speaker #1
Ouais,
- Speaker #0
ouais,
- Speaker #1
ouais, clairement. En tout cas, ça m'a aidée à m'accepter, ça m'a aidée à assumer beaucoup de choses. Et donc oui, oui, c'est une forme d'émancipation, c'est à un moment donné de dire, bon ben voilà qui je suis, et ça plaît, ça plaît pas, mais...
- Speaker #0
Mais est-ce que ça fait du bien ?
- Speaker #1
Ouais, c'est thérapeutique, clairement.
- Speaker #0
Qu'est-ce que tu as envie que tes lecteurs ressentent quand on reçoit la lettre ?
- Speaker #1
J'ai envie qu'ils puissent se dire « Ah chouette, je vais encore me sentir moins seule » .
- Speaker #0
C'est un peu ça qu'on ressent effectivement. Sur tes réseaux sociaux, parfois tu prends la parole contre les violences faites aux femmes. Et tu passes aussi, tu aides à passer beaucoup d'appels à l'aide pour des enfants malades ou des familles en difficulté, et également pour les chiens.
- Speaker #1
Tout le monde dans le même panier.
- Speaker #0
Tout le monde dans le même panier. C'est trois sujets complètement différents. Mais qu'est-ce qui te pousse à partager ces trois sujets complètement différents ?
- Speaker #1
Je crois qu'il y a une énorme colère envers l'injustice. Mais depuis petite, j'ai toujours eu ça. Après, les violences faites aux femmes, c'est un sujet que vraiment, pour le coup, je mettrais à part. Enfin, pas à part des enfants et des familles en difficulté, c'est pas ça que je dis, mais en tout cas, les violences faites aux enfants, on pourrait les mettre évidemment dans la même case, s'il fallait parler de case. Mais je trouve que la France est tellement un pays en retard sur l'accompagnement, sur la prévention, sur la justice, tout simplement, c'est une catastrophe, en fait. une catastrophe. On n'en parle pas assez. Bref, on pourrait faire un podcast pour parler que de ça, tellement ça me met en colère et tous les jours, j'entends des infos, des faits divers, des choses qu'on se demande quand même si on n'est pas dans un état un peu complice.
- Speaker #0
Tu mets des choses en place quand même pour te préserver émotionnellement tout ça ? Ou la colère, c'est vraiment...
- Speaker #1
C'est mon moteur. Je te mens parce que je suis une éponge donc là j'ai vraiment mis en place des comment dire des gardes Ouais, clairement. Déjà, j'ai arrêté de suivre certains comptes parce que je me levais le matin et j'avais les infos tout de suite sur mon téléphone. J'ai enlevé toutes les alertes, l'actu Google, tout ça, j'ai enlevé parce qu'en fait, moi, je peux y penser toute la journée. Ça peut vraiment... Je ne sais pas si c'est mieux de quelque part faire l'autruche, mais je crois qu'en fait, c'était aussi une question de... Oui, mentale, à un moment donné. Et je vois, par exemple, avec mon mari, on est totalement opposés sur ça. Lui, si quelque chose ne le concerne pas directement, je ne dis pas que ça ne va pas le toucher, parce que ce n'est pas vrai. C'est quelqu'un de très empathique, mais en tout cas, ça ne va pas le toucher sur l'instant, mais après, il passe à autre chose. Moi, je peux ressasser quelque chose toute la journée. Je peux pleurer pendant deux heures et lui me dit, mais tu as un grain, il faut vraiment réussir à prendre un peu de recul, sinon tu ne peux pas, en fait. Et il a raison, parce que très souvent, ça me met dans des états où je me dis, mais si demain, ça arrive à ma famille, je fais comment ? Donc je suis obligée de me protéger un peu comme ça. Après, c'est vrai que cette colère-là dont tu parles, elle me nourrit quand même beaucoup, elle est motrice. Et je trouve que je suis encore un millième de ce que je pourrais faire pour pousser un coup de gueule, pour partager. J'ai même levé le pied vachement sur tous les faits de violence et tout. Je partage beaucoup moins sur mon compte Instagram. aussi parce que je crois qu'on est tellement inondé de trucs difficiles. Donc j'ai un peu envie aussi que les réseaux sociaux soient un lieu me concernant de légèreté, un peu.
- Speaker #0
Un peu plus léger.
- Speaker #1
Parfois c'est plus fort que moi, je continue de partager des choses et tout, mais quand même moins. Alors de mon côté, je donne à des associations qui sont très importantes pour moi. J'essaie de continuer à être... dans l'action à ma façon pour lutter contre tout ça. Mais j'ai un peu mis le pied sur le frein quand même, parce qu'au bout d'un moment, c'est trop.
- Speaker #0
Est-ce que tu te rappelles s'il y a un déclic qui t'est venu dans ton enfance ou dans ton adolescence, qui a fait que tu as cette colère avec ces combats-là ?
- Speaker #1
Par rapport aux violences faites aux femmes ? Oui. J'ai grandi comme une fille, et je pense que toutes les filles, à un moment donné, sont confrontées à la violence de l'homme. Quelle qu'elle soit, on y est toutes confrontées en tant que petites filles, filles, femmes. Et le curseur de la violence, on ne le met pas tout au même endroit, mais on y est toutes confrontées, je pense.
- Speaker #0
Est-ce que tu partages ça avec ta fille ? Est-ce que tu lui en parles ?
- Speaker #1
Oui, beaucoup.
- Speaker #0
Tu essaies de lui transmettre quelles armes ? Beaucoup.
- Speaker #1
J'essaie de lui transmettre la faculté à savoir poser ses limites. et à savoir les dessiner au bon endroit surtout, parce que parfois on a l'impression que nos limites sont bien plus loin. Parce qu'on a aussi été biberonnés à une forme de sexisme quand même, si on est la génération qui se réveille. Mais avant ça, sans que ce soit... violents, malveillants, c'était des codes, des mœurs qui font qu'on est habitué à raisonner d'une certaine manière. Et quand on prend un peu de hauteur aujourd'hui, on s'aperçoit que c'est pas du tout OK et qu'il faut pouvoir déplacer un peu ce curseur-là. Et c'est à nous maintenant, en tant que maman, je pense, de notre génération, de dire à nos filles, là, ce que nous, on nous disait qui était OK, en réalité, ça l'est pas du tout. Et voilà. Mais après, moi, la première, je pense que par moments, je dis des trucs à ma fille que je... Je le regrette d'en admirer. Je me dis, mais ça ne va pas de lui dire ça. Et parce que je pense que c'est ancré en nous, il y a des choses qui sont ancrées en nous. Parfois, je lui dis, tu sais que les garçons, ils n'aiment pas. Après, je me dis, mais ça ne va pas. Mais on s'en fout, ce n'est pas le sujet. Il faut qu'elle soit comme elle a envie d'être. Et puis, si ça ne plaît pas aux garçons, tant pis, ça plaira à celui qui sera pour elle. Et moi, la première, alors que pourtant, c'est un travail que je fais quotidien, je pense être plutôt déconstruite sur plein de sujets. Là, parfois... Il m'arrive de dire des choses et en m'entendant, je réalise à quel point il y a encore du taf.
- Speaker #0
Quelle place a le mot non dans ta vie aujourd'hui ?
- Speaker #1
Une grande place, une très grande place. Alors moins que dans la bouche de mon fils de deux ans. Il y a un terrible bonnet. Mais non, une grande place, ça y est, je sais dire non. Et pourtant, j'ai toujours eu un caractère assez affirmé. Mais pour autant, ce n'est pas quelque chose que je m'autorisais. Parce que j'avais l'impression que de dire non, c'était être dans l'opposition. C'était être... À contresens, alors que pas du tout, c'est juste savoir s'écouter. Alors je ne dis pas non à tout, évidemment, mais par contre, non maintenant, quand il y a quelque chose... Si tu veux, quand j'ai le choix de faire un truc ou pas, et que cette chose-là, je n'ai pas envie de la faire, je vais savoir dire non. Après, il y a d'autres choses que je fais, parce que je n'ai pas le choix, comme nous tous, on est tous réduits à ça, mais... Par contre, c'est quelque chose que j'ai appris à dire, et c'est très libérateur.
- Speaker #0
Ce qui frappe dans tes textes, c'est cette façon d'allier la force et la pudeur. Tu dis les choses frontalement, mais avec toujours une grande humanité. C'est donc la façon peut-être de transformer ta colère en moteur ?
- Speaker #1
Oui, parce que de toute façon, je suis convaincue que si on met trop de forme, si on est trop dans la rondeur, si c'est trop cotonneux, il ne se passe rien. C'est une caresse pour les gens. Oui, c'est ça. Ça ne bouge pas.
- Speaker #0
Caresse dans le sens du poids. On va parler du corps maintenant, ton corps, celui de la femme, de la mère, de la créatrice. Dans une de tes lettres, tu as dit « arrêter de manger comme une pré-ado du Kansas pendant ma semaine de SPM » . Mis à part le fait, comme moi, d'avoir super faim en SPM, est-ce que ton cycle influe sur ta créativité ?
- Speaker #1
Oui, parce qu'il influe sur mon humeur, il influe sur ma fatigue. Il influe sur mon état global, donc par ricochet, il influe forcément sur ma créativité. Parce que quand je suis en boule, dans mon lit, en train de pleurer parce que j'ai vu les infos, ou parce que mes enfants ont dit un truc qui m'a vexée, je ne suis pas la même personne d'une semaine à l'autre. Et même me le disent, parce qu'ils sont là. Tu as introduit le podcast en disant que j'étais maman, mais je suis aussi belle-maman. Et je vis quotidiennement avec un ado de 17 ans qui confrontait ça aussi à mes humeurs. Et je vois que parfois, dans son regard, il se dit « Mais elle est folle, en fait. » Ça,
- Speaker #0
on l'entend beaucoup. Moi aussi, j'ai le droit à être folle régulièrement.
- Speaker #1
Je crois qu'on est toutes folles à un moment donné dans le mois. C'est bien de le savoir. Mais du coup, je crois que maintenant, il a compris. J'ai l'impression, en plus de ça, que c'est de pire en pire. J'en parlais avec une amie, je lui disais, mais c'est un cauchemar. Depuis mes 35 ans, vraiment, le SPM, je le vis comme un... C'est une épreuve. Oui,
- Speaker #0
je te le confirme, après 40 ans, c'est encore pire.
- Speaker #1
Ah ouais, super cool, j'ai hâte.
- Speaker #0
Il y a plein d'autres choses cool après 40 ans, mais ça, il ne faut pas le vérifier, non. Est-ce que ton corps a un rôle à jouer dans ton écriture, dans ton rythme d'écriture ?
- Speaker #1
Mon corps en tant que tel, non. Mon bien-être général, oui. Je le vois les périodes où je fais un peu moins de sport, où je suis moins active, où je grignote. Je suis plus fatiguée, forcément. Donc, quand je suis plus fatiguée, je suis moins en forme. Quand je suis moins en forme, j'ai moins envie d'écrire. Ça rejoint un peu le concept du SPM. En fait, c'est mon état. ma forme générale va avoir un impact sur ma créativité.
- Speaker #0
La qualité de ta créativité. Là, tu viens de parler de sport. J'ai vu que tu t'étais remise à la course il y a très peu de temps. Est-ce que quand tu fais du sport, ça change tout, tu dirais ?
- Speaker #1
Beaucoup de choses.
- Speaker #0
Beaucoup de choses. Mentalement, physiquement ?
- Speaker #1
Les deux. Mais je dirais d'abord mentalement. Vraiment, je le fais d'ailleurs plus... pour le mental que pour le physique. Parce que... Et pourtant, je ne suis pas une sportive. Je vis avec un sportif, je sais ce que c'est d'être sportive, de vivre au sport. Moi, ce n'est pas du tout mon cas. Si je pouvais m'en passer, vraiment, je le ferais. Mais je réalise que je ne peux pas tellement m'en passer. Sans pour autant être une sportive. Je me force parce que je remarque que ça me fait beaucoup de bien.
- Speaker #0
Est-ce que tu es dans la souffrance tout le long du sport ? Ou quand même, il y a un moment où tu as du plaisir ?
- Speaker #1
Non, non. mais je déteste les sports où je souffre d'ailleurs je ne fais pas de sport où je souffre j'ai essayé de faire le cycling ça je ne peux pas, j'ai envie de crever, je déteste ça ne me met que en colère et la course à pied moi j'aime c'est difficile d'être au premier kilomètre mais après je trouve qu'il y a j'aime vraiment la course à pied après j'adore le pilates, le yoga je ne suis plus sur des disciplines comme ça je n'aime pas le crossfit et tous ces trucs là je ne peux pas faire parce que je souffre du début à la fin j'ai envie de buter tout le monde Moi, je n'ai pas cet effet que d'autres décrivent de « Ah, mais après, tu ne te sens pas trop bien. Non, après, j'ai vraiment envie de tous vous buter. Donc, je ne peux plus. » Non, et puis en plus de ça, je n'aime pas le corps que ça me fait pour nous. Mais ça,
- Speaker #0
c'est encore un autre sujet. C'est ton corps. Je vais te donner un conseil pour mieux le respecter. Je pense qu'il te dirait quoi ?
- Speaker #1
D'arrêter l'alcool.
- Speaker #0
Oui.
- Speaker #1
Je ne bois pas beaucoup, mais je pense qu'il me dirait quand même d'arrêter l'alcool. Et il me dirait de faire plus de sport aussi, parce que je suis quand même une grosse fainéante. Et de manger moins de sucre.
- Speaker #0
Au niveau de l'alcool ? Tu n'en bois pas beaucoup, mais je sais que tu as écrit une lettre à l'alcool. C'est quoi le rythme avec l'alcool ?
- Speaker #1
Il y a beaucoup changé. Avant, je buvais beaucoup. En réalité, je buvais facilement un verre de vin par jour. Le soir, c'était mon petit rituel, je buvais mon verre de vin sans me dire que c'était peut-être un peu problématique. Problématique pour moi, en tout cas. Après, je ne veux pas faire de généralité. Chacun fait ce qu'il veut. En tout cas, si je te dis un verre, ça pouvait être deux. Parce qu'au final, il reste ça de la bouteille. Et là, maintenant, je ne bois que le week-end. Et je te dis le week-end, ça, c'est si je fais vraiment quelque chose. Mais si on reste à la maison, je ne bois pas le week-end non plus.
- Speaker #0
Tu as remarqué une différence, du coup, de boire moins sur ton corps ?
- Speaker #1
Pas vraiment. Peut-être un peu sur ma peau.
- Speaker #0
Sur la peau, j'allais dire la qualité de la peau.
- Speaker #1
Sur la peau, peut-être la qualité du sommeil aussi. Et par contre, là où je vois la différence, c'est que quand je bois maintenant, ça me fracasse. Et c'est le lendemain quand je me réveille, je me dis, mais ça fait ça l'alcool en fait ? C'est un poison. Donc, bon. Mais je n'ai pas envie d'arrêter totalement l'alcool, je n'ai pas envie d'être radicale. De toute façon, je pense que tous les extrêmes ne sont pas forcément bénéfiques, mais je me réserve de boire un bon vin quand je fais un dîner ou quand je fais un apéro avec les copines, j'adore aussi. On s'ouvre une bonne bouteille ensemble, mais ce n'est plus un rituel en tout cas.
- Speaker #0
Ce n'est plus un rituel. Est-ce qu'écrire te reconnecte à ton corps ?
- Speaker #1
Là encore, je pense qu'on peut faire des liens partout. Quand j'écris, je me sens mieux. Quand j'arrive à trouver vraiment... Tout à l'heure, je te disais quand ça déroule. Alors là, quand ça déroule, c'est tellement galvanisant pour moi que oui, je pense que ça doit dégager quelque chose. Ça procure un bien-être. Nécessairement, si je vais bien, mon corps va bien aussi. Comme ça, je ne pourrais pas te dire que c'est une conséquence vraiment directe.
- Speaker #0
Est-ce que tu écris que pour toi ? Genre avec la mode du journaling ou des choses comme ça, ou pas du tout ?
- Speaker #1
Si j'ai un journal ? Oui, pas du tout.
- Speaker #0
Et tu n'écris pas que les murs ? Tu travailles aussi pour d'autres... marque ou autre projet, c'est pas le même processus créatif que pour les murs, j'imagine.
- Speaker #1
Oui, non, rien à voir.
- Speaker #0
Ça se passe comment ?
- Speaker #1
Quand j'écris pour les marques ? Oui. Ouais, alors là, c'est... Après, ça dépend de ce que tu parles, parce que j'écris pour les marques, je peux faire du rédactionnel vraiment pur pour les marques. Donc ça, c'est vraiment la partie alimentaire. Je peux pas parler de processus créatif pour ça, pour être tout à fait franche. Ça ne veut pas dire que je n'aime pas le faire, mais c'est juste que je ne passe pas du tout la même démarche. Tu as un cahier des charges bien établi. Exactement, et c'est de l'exécutif. Après, j'écris aussi pour les marques sur mon compte Instagram, donc ça, c'est des partenariats plus influence. Et dans ces cas-là, j'ai vraiment une liberté de ton qui va être un peu la même que celle que j'ai sur les murs, et auquel cas, là, c'est vraiment quelque chose que j'apprécie faire et qui s'apparente à ce que j'écris pour les murs, donc j'ai une grande liberté. Je ne choisis que des marques avec lesquelles j'ai une grande liberté, parce que ce n'est pas toujours évident. Et après, je suis en agence de cinéma maintenant, je suis scénariste. Je travaille sur des projets en tant que scénariste. Ça, c'est chouette, en espérant que les projets voient le jour. Mais en tout cas, ça y est, c'est quelque chose qui se concrétise pour moi.
- Speaker #0
Tu veux être garde à ton arc, ça.
- Speaker #1
Oui. Après, je fais aussi beaucoup de contenu privé, pour des gens qui me contactent. pour écrire des discours. Ça, c'est encore autre chose parce que du coup, là, il faut vraiment que je me mette dans la peau des gens et pas dans la mienne. Mais c'est un exercice qui est hyper sympa à faire et surtout, j'ai rencontré des gens vraiment chouettes par ce biais qui, du coup, maintenant, se sont obligées de me rappeler à chaque fois qu'ils ont un discours à faire parce que comme ils en ont fait un avec moi, Il y a un ton, je crois, qui sent un peu piégé.
- Speaker #0
Si on revient à la maternité, tu es devenue mère très jeune, puis une deuxième fois un peu plus tard. Qu'est-ce qui a changé dans ton expérience de la maternité entre ces deux grossesses ?
- Speaker #1
Tout. Tout aussi bien la grossesse en elle-même que l'après. Et ouais, tout, ma patience, mon rapport à l'enfant, mon rapport à moi. J'ai eu Romy, j'avais 23 ans. Le contexte n'était vraiment pas simple déjà, quand je l'ai eue. Donc je crois que je n'étais pas tellement épanouie par cette grossesse. Et en même temps, j'étais très heureuse d'avoir Romy quand elle est arrivée. Mais il a fallu que j'aille. En fait, j'étais encore un bébé. Je n'avais pas l'impression, à 23 ans, d'en être un. Mais maintenant, avec du recul et quand je vois les jeunes de 23 ans autour de moi... Parfois, ça m'arrive d'avoir des filles de 23 ans et quand elles me disent « j'ai 23 ans » , ce sont aujourd'hui des filles d'amis de mon mari, par exemple, que je côtoie comme si c'était vraiment des gamines pour moi. Et quand je les vois et que je me dis « alors là, j'étais maman » , ça me bouleverse un peu. Quand je les vois, je me dis « en fait, non, j'étais vraiment un bébé » . Mais bon, de fait, ça m'a propulsée dans une maturité un peu forcée. Mais pour revenir à ta question, je n'ai pas du tout vécu les choses de la même manière, sur tous les points. Et je culpabilise un peu de ça, d'ailleurs, parce qu'avec Orso, j'ai une patience que je n'avais pas avec Romy, j'ai un émerveillement que je n'avais pas avec Romy. Tout ce qu'il fait me fascine. Et je crois qu'elle le sait. Et ça, j'ai une grande culpabilité vis-à-vis de ça.
- Speaker #0
Il y a d'autres choses. Peut-être une complicité d'avoir une maman jeune.
- Speaker #1
Oui, c'est ce qu'elle me dit. Non, mais forcément, je pense que je n'ai pas tout mal fait avec elle, mais c'est différent.
- Speaker #0
Là, comment est-ce que tu as trouvé ton rythme avec un bébé maintenant ?
- Speaker #1
Déjà, je suis en les deux. Ça change tout. Et je me sens très alignée. J'ai un rythme de vie, de croisière qui n'est pas... Alors même si en effet c'est très fatigant parce qu'on a mille trucs à faire et qu'en plus on a toujours des nouveaux projets. En fait il se passe mille trucs et en même temps c'est rigolo parce que j'ai l'impression que tout est très calme et que tout va très lentement. Alors qu'à la fin de la journée je vais te dire que je suis épuisée, qu'on a fait mille trucs mais pour autant j'ai l'impression que tout va très lentement, qu'on prend le temps de faire les choses. On prend le temps, on est dans l'instant présent. J'ai vraiment changé de mentalité avec les années. Je ne suis plus du tout dans cette quête d'être partout au bon moment, de rien louper. Après, c'était Paris, c'était le métier que je faisais aussi. Tu as cette impression de devoir toujours être présente là où il faut, de rien louper. Et puis tu t'oublies, en fait, et tu passes complètement à côté de l'essentiel. Et en venant vivre ici, j'ai constaté que quand même, j'avais réussi à me recentrer sur ce qui était vraiment important pour moi.
- Speaker #0
Tu dirais que tu as trouvé ton juste rythme.
- Speaker #1
Exactement.
- Speaker #0
Comment est-ce que la maternité a changé ta façon de voir ? Alors, ton temps, on vient d'en parler, mais ton corps ?
- Speaker #1
Vrai sujet. Vrai sujet. Alors la maternité, quand j'ai eu Romy, en réalité je n'ai pas tellement de souvenirs. Je sais que j'avais déjà pris beaucoup de poids, mais que j'ai reperdu aussitôt. Mon corps n'a pas du tout souffert. Tu vois, j'ai récupéré mon corps très vite.
- Speaker #0
Oui, à 23 ans.
- Speaker #1
Oui, très vite. Ça n'a pas du tout été le cas pour Orso, qui est né il y a plus de deux ans maintenant et je n'ai toujours pas retrouvé mon corps d'avant Orso. À certains endroits, je ne le retrouverai jamais parce que mon ventre a quand même pas mal souffert. J'ai pris beaucoup de poids, j'avais un ventre énorme. J'ai fait un bébé de 4,6 kg. C'est compétitif.
- Speaker #0
J'ai fait trois bébés de 4,5 kg. Ah ouais, le truc.
- Speaker #1
Je ne vais pas se faire un câlin. Bref, honnêtement, ça a été très dur la première année. J'ai beaucoup pleuré. J'ai mis beaucoup de temps à me regarder dans un miroir. Il y en a qui ça va faire bondir, mais je pense qu'on est toutes très personnelles. Mais non, ça a été vraiment très difficile. Et déjà là, deux ans après, heureusement, les stigmates ne sont pas les mêmes. Je vois qu'il y a plein de choses qui reviennent et tant mieux. Mais pour autant, mon corps ne sera jamais le même que celui qu'il était avant que je tombe enceinte dorsaux. Et c'est OK.
- Speaker #0
C'est OK. Quand tu penses au mot rythme... Quelle émotion te vient immédiatement à l'esprit ?
- Speaker #1
L'anxiété, un peu, je crois.
- Speaker #0
J'aime pas ce mot.
- Speaker #1
Non, parce que j'aime pas ce mot « rythme » . Pour moi, il y a quelque chose d'assez réglementaire, protocolaire dans le mot « rythme » . OK. Mais en tout cas, si je devais trouver un mot positif... Qui aille avec rythme, pour moi, ce serait...
- Speaker #0
Moi, s'il n'y en a pas, il n'y en a pas. Anxiété,
- Speaker #1
on reste là-dessus. Non, l'anxiété. Non, parce que c'est le mot qui m'évoque ça. Mon rythme, à moi, ne me rend pas anxieuse. Mais le mot rythme, j'ai l'impression qu'il faut respecter quelque chose. C'est ça, plus.
- Speaker #0
Pour l'égide du juste rythme, c'est plutôt l'alignement. C'est plutôt ça. Sans juste rythme à soi,
- Speaker #1
comment est-ce qu'on est ? Pour moi, c'est d'arriver à sortir justement de ces codes qu'on a l'impression de devoir respecter quand on parle de rythme. C'est d'arriver à trouver le sien sans que ce soit balisé.
- Speaker #0
Exactement. C'est l'idée. Justement, si tu avais un seul conseil à donner à quelqu'un qui cherche son juste rythme, ce serait lequel ?
- Speaker #1
De s'écouter et de savoir dire non.
- Speaker #0
Intéressant, on va en parler plus tard du non. Après Paris, tu vis maintenant au Pays Basque, donc tu en as un petit peu parlé, mais qu'est-ce que cette région a changé dans ton rythme de vie ?
- Speaker #1
À peu près tout aussi. Je crois que j'ai découvert en arrivant ici ce que c'était que d'avoir un rythme de vie, un vrai rythme de vie qui assoit. Et de ne pas courir après ce qu'on attend de nous. Et à Paris, quand même, c'était beaucoup ça pour moi. J'étais prise dans un espèce de mouvement, dans une spirale, dans quelque chose qui m'aspirait vraiment. J'ai asphyxié. Et après, j'ai rencontré mon mari et ça a nettement accéléré ma venue ici. Mais c'est quelque chose que dans tous les cas, j'avais...
- Speaker #0
Tu avais envie de faire.
- Speaker #1
Oui. Et c'est quelque chose que j'aurais fini par faire. Alors, peut-être pas aussi vite, du coup, mais c'est quelque chose que j'avais en tête, oui.
- Speaker #0
Tu as dit à Paris ce qu'on attendait de moi. Là, du coup, au Pays Basque, tu ne fais plus du tout ce qu'on attend de toi.
- Speaker #1
Oui, alors, je dis ce qu'on attendait de moi. C'est ce que moi, j'imaginais. en réalité personne n'attendait quoi que ce soit de moi mais c'est ce que je me mettais en tête. Et oui, en arrivant ici, déjà, je suis tombée rapidement enceinte d'orceau, donc ça m'a obligée à lever le pied, ça m'a obligée à accepter d'être dans une bulle. Et ce qui, au départ, était quelque chose de relativement angoissant pour moi, est devenu hyper salvateur. Et aujourd'hui, je ne pourrais pas faire autrement.
- Speaker #0
Tu ne pourrais pas retourner à Paris ?
- Speaker #1
Impossible.
- Speaker #0
Impossible. Est-ce que le Pays Basque joue un rôle dans ton inspiration dans l'écriture ?
- Speaker #1
Le Pays Basque, pas nécessairement, mais en tout cas, l'alignement que j'ai réussi à trouver en arrivant ici.
- Speaker #0
Ton cadre de vie.
- Speaker #1
Mon cadre de vie, ma famille. Et puis aussi, cette famille recomposée que je n'avais pas. Et on s'est retrouvés assez nombreux d'un coup à devoir vivre sous le même toit. Moi qui suis quand même relativement sauvage. Et si ce n'est pas sauvage, en tout cas, c'est... Chiffre, sauvage, en fait. J'essaie de trouver un autre mot. J'ai agréé à ça, mais ça... Non,
- Speaker #0
mais sauvage, ça te va bien.
- Speaker #1
Oui, c'est ça. C'est qu'en fait, j'ai... J'ai besoin de décider des gens qui m'entourent, de décider avec qui j'ai envie d'être. Et c'est vrai que ça va peut-être paraître hyper violent, mais quand tu te mets en famille, quand tu fais une famille recomposée, il y a forcément des... C'est un challenge. Il y a des éléments que tu n'avais pas nécessairement pris en considération et puis tu es obligée de composer avec. Et en même temps, la personne en face de toi, elle n'a pas forcément décidé non plus. Je parle notamment des enfants de l'autre. C'est quand même un sujet aussi. Et aujourd'hui, j'ai énormément d'amour pour eux. Je crois qu'au départ, ce n'était pas le cas, parce que tu ne peux pas aimer quelqu'un que tu ne connais pas. Et pour autant, tu te dis que tu n'as pas le choix. Tu es obligée de les aimer. Donc, d'un coup, tu te mets des gens comme ça sous ton toit, avec qui tu manges tous les jours. On te dit qu'eux, il faut les aimer par contre. Et toi, tu es là, mais je ne sais pas faire.
- Speaker #0
Je ne sais pas, je ne te connais pas. Pas de madame Pau, pour ça.
- Speaker #1
Et donc, ça, je crois que ça a été un peu compliqué au départ. Et je ne sais plus quelle était la question de base. Mais en tout cas, voilà.
- Speaker #0
Le pays basque, mais du coup, on a dit le cas. Oui, pour l'écriture. Oui,
- Speaker #1
alors ça, pour l'écriture, ça m'a vachement nourrie. Le truc d'un coup de me dire, mais en fait, je suis où ? J'avais l'impression de devoir jouer un rôle. J'avais l'impression d'être actrice de ma propre vie, de me dire, OK, là, maintenant, je suis belle-mère, je suis épouse. J'ai un ventre rond, je vais à nouveau être maman. Mais en même temps, j'ai ma fille en préadolescence qui ne comprend pas ce qui lui arrive. Il faut que je m'occupe d'elle aussi. Tu as l'impression de devoir être parfaite à tous les endroits. Et à la fois, par moments, tu as envie de dire, mais tout se faire, je finirai pas cette phrase. Et voilà.
- Speaker #0
Pas s'oublier de toi. Enfin, toi, la femme, juste toi, Laura. Oui, juste moi,
- Speaker #1
Laura, et laissez-moi tranquille. Et c'est ce que je dis parfois à ma fille. Je dis, en fait, parce que parfois, on a forcément des tensions. Et elle me dit, mais tu peux pas dire ça, t'es ma mère. Je dis, ouais, mais en fait, je suis pas ta mère, là. Voilà, oublie que je suis ta mère. Là, laisse-moi un quart d'heure ou je ne suis pas ta mère, s'il te plaît. C'est vraiment pour moi, pour mon bien. Alors, c'est peut-être hyper égoïste, mais pendant un quart d'heure, je ne suis plus ta mère. Et parce que ça, on est obligé de s'oublier, vraiment de se mettre en retrait et de faire passer au premier plan le statut de maman, le statut de belle-mère, le statut de femme, le statut de... Et c'est vrai que c'est important aussi de pouvoir ne plus être tout ça.
- Speaker #0
Et comment est-ce que tu fais, justement, pour ne plus être tout ça, même pendant un quart d'heure ?
- Speaker #1
Je l'écris. Je l'écris et voilà. C'est mon exutoire. Et quand j'écris, parfois, je ne suis plus tout ça. Je suis juste moi, Laura, et je discute tout ce que j'ai à dire. Et ils en rigolent. Je ne publie rien sans leur accord quand ça parle d'eux. Mais ça les fait beaucoup rire. Je pense que c'est aussi un moyen pour eux de mieux me comprendre. Parce que je crois que quand même... Je me sens plus alignée ici que n'importe où. On parlait de Paris, mais je crois que c'est vraiment ici que je me sens le mieux.
- Speaker #0
Heureuse.
- Speaker #1
Oui, mais vraiment le mieux.
- Speaker #0
Est-ce que tu dirais que l'âge joue aussi, en plus de la destination ?
- Speaker #1
Je ne sais pas.
- Speaker #0
Non ?
- Speaker #1
Non, parce que je me suis toujours sentie bien ici. Moi, je suis née ici, mes parents, ça fait très longtemps qu'ils vivent ici maintenant. Et c'est toujours un endroit où je me suis sentie à ma place. Alors après, je crois que j'aurais été un... peu incapable plus jeune de vivre ici. Ça oui, parce que j'avais envie que ça bouge. Et Paris pour moi c'était la ville où il fallait être pour travailler. Donc je pense que je suis venue vivre ici au bon moment. Si j'avais vécu toute ma vie ici, je ne sais pas si j'aimerais autant être ici. Mais en tout cas oui, je m'y suis toujours sentie bien.
- Speaker #0
Du coup en ce moment tu déménages ? à Biarritz, si je ne dis pas de bêtises. Ta maison est en rénovation. Comment est-ce que tu mènes tout de front ? Écrire, rénover, aimer ?
- Speaker #1
Je ne sais pas. Je fais. On fait. Là, en plus de ça, on vit dans la maison pendant la rénovation. C'est vraiment un...
- Speaker #0
Dans la maison où il y a la rénovation ? Oui,
- Speaker #1
tout à fait. C'est très sport en ce moment, mais non, écoute, en même temps, on s'amuse. C'est hyper drôle. C'est vraiment le camping. On a envie de s'en retuer aussi souvent, mais on en gardera des très bons souvenirs, je pense. C'est une période où... Tu sais, ça fait partie de ces périodes où, quand tu les vis, t'es dedans. Et après, quand tu te retournes, tu te dis... C'était intense. Mais en même temps, quand t'es dedans, t'es pris dans le truc et tu...
- Speaker #0
T'as pas le choix.
- Speaker #1
Tu réfléchis pas. En fait, c'est ça. C'est on réfléchit pas.
- Speaker #0
Comment est-ce que tu trouves l'inspiration au milieu du chantier ?
- Speaker #1
Ça, c'est très compliqué, par contre. J'ai beaucoup de mal à écrire en ce moment. Déjà parce qu'il y a beaucoup de bruit. Et ça, en fait, je n'arrive pas à écrire quand il y a beaucoup de bruit. Alors, je pourrais aller ailleurs, mais... En fait, je n'arrive pas à écrire quand il y a des gens autour de moi. J'ai essayé d'aller... de me prendre un bureau dans un espèce de co-working et tout, mais je ne peux pas, en fait. Quand il y a des gens autour de moi, je n'arrive pas à... J'adore regarder les gens, donc je passe plus de temps à regarder ce qui se passe autour de moi qu'à écrire. Je ne sais pas faire. Donc non, là, en ce moment, ça justifie aussi le fait, et je ne dis pas ça pour me dédouaner, mais que j'ai du mal à publier sur les murs, c'est plus compliqué. Parce que je n'ai pas ma bulle.
- Speaker #0
C'est important, la bulle.
- Speaker #1
Oui, vraiment, surtout pour écrire.
- Speaker #0
Qu'est-ce que tu refuses de sacrifier, même quand tout s'accélère ?
- Speaker #1
Le temps passé avec ma famille.
- Speaker #0
Quel est le prix de cette vie créative ? Qu'est-ce qu'elle te donne en retour ?
- Speaker #1
Qu'est-ce qu'elle me donne en retour ou qu'est-ce qu'elle me coûte ?
- Speaker #0
Je ne sais pas. Les deux, alors je prends les deux réponses.
- Speaker #1
Elle me coûte une certaine forme d'instabilité, clairement.
- Speaker #0
Financière, tu veux dire ?
- Speaker #1
Oui, financière et puis même... Oui, financière déjà. Et puis l'instabilité aussi est très liée à ce que moi je suis capable de fournir. Émotionnellement. Oui, émotionnellement, l'instabilité émotionnelle, financière. Et en même temps, un énorme confort parce que je décide de... de comment je vis, de comment j'organise mes journées. Si j'ai envie de venir faire un podcast avec toi un vendredi à 11h, je peux. Et qu'est-ce qu'elle m'offre ? Elle m'offre un bien-être fou, le sentiment de vraiment faire ce que j'aime, et ça, c'est pas tout le monde, et je pense que c'est un grand luxe. Ouais, voilà, elle m'offre l'apaisement.
- Speaker #0
Quelle est la plus grande claque que le temps t'a mise ces dernières années ?
- Speaker #1
Il y en a deux, je dirais. Il y a celle que j'ai prise avec l'arrivée d'Orso, que je n'avais pas soupçonnée parce que tout était un projet magnifique et qu'on était très heureux d'avoir cet enfant. Je pense que, par contre, j'ai eu un postpartum un peu plus corsé que j'ai bien voulu l'admettre. Et c'est maintenant, deux ans après, que j'en prends conscience. Cette claque-là de la maternité qui arrive 12 ans après mon premier enfant est liée à la grande culpabilité dont je parlais tout à l'heure vis-à-vis de ma fille. Ça, ça a été quelque chose d'assez difficile à gérer parce que j'ai eu l'impression quelque part que je la trahissais en ayant Orso. Et l'impression du coup de vieillir, mais de vraiment vieillir. En fait, j'ai ressenti... Ce vieillissement dont on parle depuis des années, ma mère, en ayant Orso et en voyant dans le regard de ma fille que je n'étais plus juste sa maman, que j'étais aussi la maman de quelqu'un d'autre. Tout ça, je ne sais pas, il y a eu une espèce de... Tel molotov qui fait que je me suis réveillée un matin en me disant, moi j'avais 23 ans dans ma tête encore et en fait j'en ai 37. Et ouais, ce sentiment de vieillir. On vieillit tous. Ma fille sera plus vieille ce soir qu'elle ne l'était ce matin, mais la vraie impression d'être alors pas vieille, parce que je ne me sens pas vieille, mais d'avoir vieilli. Ça ouais.
- Speaker #0
Et tu l'acceptes ?
- Speaker #1
Oui, je l'accepte.
- Speaker #0
Et qu'est-ce que tu assumes maintenant que tu n'assumais pas il y a... 10 ans ?
- Speaker #1
Eh bien, de faire à mon rythme, comme on disait, de dire non. De savoir dire non, de dire non, j'ai pas envie de venir. Non, j'ai pas envie de faire ça. Non, je préfère faire ça aujourd'hui, en fait, et de faire comme je l'entends.
- Speaker #0
Avec quoi tu te fous la paix ?
- Speaker #1
Je crois que j'arrive aujourd'hui à me foutre la paix avec le regard des autres.
- Speaker #0
Pour toi, réussir sa vie, c'est quoi ?
- Speaker #1
Réussir sa vie, c'est se lever heureux et se couper.
- Speaker #0
Y a-t-il un projet que tu portes en toi et que tu n'as pas encore osé écrire ?
- Speaker #1
Que je suis en train d'écrire.
- Speaker #0
Si ton rythme naturel n'avait plus à s'adapter à celui des autres, qu'abandonnerais-tu en chemin ?
- Speaker #1
Je crois que j'ai envie de répondre ça aussi. Je n'aime pas tellement passer à table.
- Speaker #0
Ça doit être un truc de femme, parce que moi, je l'ai eu plusieurs fois. C'est vrai.
- Speaker #1
Pourtant, ce n'est pas moi qui cuisine. En plus, moi, je n'ai vraiment que le bon rôle. Mon mari cuisine hyper bien, moi, je suis une burne. Je cuisine très mal. En plus de ça, je pourrais me réjouir de passer à table, mais je crois qu'il y a un truc un peu d'enfant, ça m'embête. Et le vendredi, quand il n'est pas là, je peux très bien me faire un bol de céréales avec ma fille devant une série. Et là, je kiffe. Mais ça, je crois. Je crois ça. Et puis, oui, les... Ouais, non, ça.
- Speaker #0
Ça. Et du coup, qu'est-ce que tu retrouves quand tu fais un bol de céréales avec ta fille ? L'insouciance. Tu as écrit dans une lettre, souris, encore une injonction prêtée aux femmes, ça, en toute bonne foi et sans avoir l'intention de vous offrir un féminisme veuille. Il est de bon temps d'admettre qu'aucun homme ne s'est jamais entendu dire tu ne souris pas assez. Quelles sont les injonctions que tu ressens encore parfois autour de toi.
- Speaker #1
De devoir être mère avant tout. L'autre jour, je faisais des courses, et j'étais avec ma mère, et on faisait le magasin, et on croise une amie à elle, qui me dit, « Et le petit, il est où ? » Je dis, « Il est avec son père. » Elle me dit, « Il fait la nounou ? »
- Speaker #0
Je dis, « Non, il fait le père. » C'est du coup...
- Speaker #1
Elle, elle a pas du tout dit ça. C'est une autre génération. Et moi, j'ai répondu un peu sèchement, je crois, parce qu'en fait, c'était pas... Alors, à me le dire sous cet angle-là, c'était bien la première fois qu'on me disait « il fait la nounou » . J'allais me dire « non, c'est son papa. Donc, jusque-là, il peut s'en occuper au même titre que moi. Mais c'est souvent... Ou alors, quand je vais à Paris, je pars 5 jours à Paris, je dis pas tous, mais presque tous les gens que je vais croiser, ... me disent, et parmi eux, il y a des gens qui sont hyper déconstruits, il n'y a pas de problème, mais par contre, ça va sortir spontanément. Et c'est Jérôme qui s'occupe des enfants. Et quand tu pars, ça va, ça ne te stresse pas qu'il s'occupe des enfants ? Je dis, mais enfin ! Je ne comprends pas qu'on me pose cette question, lui. Quand il est à Paris, personne ne va le voir en lui disant,
- Speaker #0
et c'est Laura qui s'occupe des enfants. Personne ! Il m'a mal coupé que personne ne lui a jamais posé cette question. Mais par contre, moi, c'est quasiment systématique.
- Speaker #1
Donc ça, je constate quand même que c'est un truc, ça fait partie des injonctions encore, il faut être mère avant tout.
- Speaker #0
Une odeur qui te ramène à ton enfance ?
- Speaker #1
Le parfum de ma mère.
- Speaker #0
Un livre que tu aurais rêvé d'écrire ?
- Speaker #1
C'est une trop bonne question. Toutes les femmes sauf une de Maria Bourget.
- Speaker #0
Un objet ou un bijou qui te reconnecte à ta féminité ?
- Speaker #1
Mes bagues.
- Speaker #0
Un homme inspirant ?
- Speaker #1
Un homme inspirant mon mari.
- Speaker #0
Si tu étais un vêtement, lequel serais-tu ?
- Speaker #1
Si j'étais un vêtement... Une veste en jean.
- Speaker #0
Si tu étais une expression d'ado que tu entends beaucoup chez toi actuellement ?
- Speaker #1
T'es gênante.
- Speaker #0
Merci Laura, on va finir là-dessus, mais tu n'étais pas du tout gênante. Merci beaucoup.
- Speaker #1
Merci à toi.
- Speaker #0
Merci d'avoir partagé ce moment avec nous dans le juste rythme. J'espère que cet épisode vous a offert un souffle, un sourire ou une idée à glisser dans votre quotidien pour avancer un peu plus à votre rythme. Si cet échange vous a plu, parlez-en autour de vous et abonnez-vous à votre plateforme préférée. Laissez un commentaire, c'est ce qui permet au podcast de rayonner. Pour découvrir d'autres épisodes ou me contacter, rendez-vous sur le juste rythme. Et si une femme inspirante vous vient à l'esprit, écrivez-moi, vous pourrez être ma prochaine invitée. A très bientôt, et d'ici là, prenez soin de votre cœur, de votre corps et de votre tête.