- Speaker #0
On est dans une situation d'addiction. Le mot est gros. Le retard de langage qu'on observe est un retard de langage qui présente des aspects, des ressemblances avec un tableau autistique. Les enfants, en réalité, aiment la télé parce que c'est la télé qu'ils ont par défaut. Pour beaucoup de personnes, jusqu'à aujourd'hui, c'est un truc de blanc, l'orthophonie. L'ennui, aujourd'hui, c'est l'une des plus grandes peurs que les parents ont. Il vaut mieux entendre patiente trop tôt. que c'est trop tard plus tard Hello,
- Speaker #1
hello, hello les incroyaux et les incroyables bleus ! Parce que je me suis dit que ça serait bien de dire les incroyaux et les incroyables bleus, messieurs, mesdames. Bienvenue dans un nouvel épisode du Off Show, que vous nous écoutiez sur les plateformes des cours ou que vous nous regardez sur YouTube ou sur Spotify. Installez-vous confortablement et bienvenue, bienvenue à tous les nouveaux abonnés sur la chaîne. Je vous vois, je vous vois, je vous vois. Et aujourd'hui, c'est un épisode spécial parce que je reçois... D'abord un ami. Je reçois un ancien beatmaker avec qui j'ai fait un son qui s'appelle Ma Bonne Étoile. Je reçois un professionnel de la santé. Il est orthophoniste. Je reçois Monsieur Christian dans le Offshore. Bienvenue.
- Speaker #0
C'est une intro de ouf.
- Speaker #1
T'as vu ?
- Speaker #0
Je me suis rappelé de certaines choses que j'avais oubliées. Génial. J'ai jamais eu une aussi belle présentation.
- Speaker #1
Non, t'as vu ? C'est vrai que dans ton domaine, on ne doit pas te présenter comme ça. T'as l'air très trop de colère. Mais là, on est à la maison. On est à la maison, on est tranquille. Bien installé ?
- Speaker #0
Super. Très bien. Tout va en forme ? Merci pour l'invitation.
- Speaker #1
C'est un plaisir de te recevoir. C'est un épisode un petit peu... Je veux dire très différent de ce que je fais d'habitude. Je vous place dans le cadre, les amis, tout de suite. Parce qu'aujourd'hui, on n'est pas... Certes, on va parler de parcours. On va parler de parcours de vie. On va parler de ce que tu fais. Mais c'est un épisode où on va plus parler de situations qui nous touchent un petit peu tous aujourd'hui. Qu'on soit parent, non-parent, qu'on soit tonton, tata, cousin, cousin. Et on va parler de langage aujourd'hui. On va parler de langage aujourd'hui. On va parler de ton travail. Donc toi, tu es orthophoniste ici à Dakar et tu vas nous expliquer un petit peu ce que tu fais, tout ce que tu rencontres au quotidien et essaie de nous donner des tips pour nous améliorer dans ce qu'on fait. Mais d'abord, est-ce que tu peux te présenter pour les gens qui ne te connaissent pas ?
- Speaker #0
Je m'appelle Christian Nanga, je suis orthophoniste. J'ai la chance d'être orthophoniste, c'est le plus beau métier du monde. Je suis spécialiste du langage, on va dire ça comme ça. Je suis professionnel du langage et de la rééducation du langage. J'évolue à Dakar depuis quelques années maintenant. Voilà un peu.
- Speaker #1
Ok, ça c'est la petite présentation pour se mettre en couche. Mais toi Christian, toi tu es un boy Dakar d'abord. De base. C'est ça qu'il faut qu'on explique aux gens, tu es un boy Dakar. Toi tu es né ici ?
- Speaker #0
Né ici, grandi ici, j'ai fait mes classes ici, mariste. Et où j'ai eu le bac. Et je suis parti, j'ai eu un bac en économie. Ouais. Rien à voir avec ce que je fais aujourd'hui. Ouais. Et d'où je suis parti pour la France au début, pour Toulouse.
- Speaker #1
Toulouse, 31 maths. Voilà, ceux qui savent, savent.
- Speaker #0
Et où j'ai été à l'université, licence, master en sciences du langage. Et puis ensuite, j'ai bougé un peu à droite, à gauche.
- Speaker #1
Ok. Attends, il ne faut pas aller trop vite. Il faut prendre le temps, il ne faut pas aller trop vite. J'ai deux questions qui viennent tout de suite. Est-ce que dans ta famille, il y avait déjà des gens dans le domaine médical qui t'ont influencé à faire ce que tu fais ? Et la deuxième question, parce que tu dis qu'à Toulouse, donc tu t'orientes déjà vers ce que tu fais aujourd'hui. Vu que tu as dit que tu étais en sciences du langage.
- Speaker #0
Oui.
- Speaker #1
Est-ce que quand tu as ton bac, tu sais déjà ? que tu veux devenir ? Absolument pas. Absolument pas. D'accord. Dans ta famille, est-ce qu'il y avait des gens dans le domaine médical ?
- Speaker #0
Les médecins, oui, mais je n'ai pas été du tout influencé. D'accord. Alors, pour répondre à la question, je n'ai pas été influencé du tout, en tout cas pas à ce moment là science du langage c'est un C'est un grand hasard, mais en fait, ce n'est pas un hasard, c'est le bon Dieu qui avait tracé ça comme ça. Et avec du recul, ça me fait un peu sourire aujourd'hui, parce que quand je m'engage en sciences du langage, à la base, quand j'arrive à Toulouse, même à la base, je veux faire des études de communication. Je suis intéressé par la communication et la publicité. Et à l'époque, mon père me dit, enfin mes parents trouvent que ce n'est pas très spécifique, la communication, c'est très global, c'est très général. Et je ne connais pas l'orthophonie en fait. Je n'ai pas choisi d'être orthophoniste du tout. Quand tout à l'heure je disais que je fais le plus beau métier du monde et je me sens vraiment sincèrement chanceux, j'ai j'ai pas choisi, c'est que pour te raconter un peu l'histoire, on est un jour à la cantine, parce que toutes les bonnes histoires commencent à la cantine en général.
- Speaker #1
Autour d'un bon plat.
- Speaker #0
Exact.
- Speaker #1
Bon, à la cantine, c'était pas toujours des bons plats,
- Speaker #0
mais bon bref. On était à la cantine à Toulouse, en fait, et on était pendant un repas, je sais plus, je pense que c'était entre deux cours, et quelqu'un qui est là, je suis avec un ami, Je suis avec un groupe de potes, en fait, et quelqu'un qui est là commence à parler du métier d'orthophoniste. Quelqu'un que je ne connais pas. Et qui, lui, était en train de s'orienter vers cette profession. Et cette personne commence à parler du métier d'orthophoniste. Et en réalité, plus que parler du métier d'orthophoniste, cette personne décrit ce qu'est un orthophoniste. En tant que personne, en tant qu'être humain. D'accord. On oublie souvent, on est spécialiste, on est professionnel, mais on est avant tout des êtres humains. Et en fait, l'être humain que cette personne décrit... moi qui suis juste à côté, qui ne suis même pas dans la conversation en réalité, je me rends compte, j'ai l'impression que c'est moi qu'on décrit tout simplement.
- Speaker #1
Parce qu'il décrit quoi ? C'est quoi un orthophoniste ? Quand il te le décrit à ce moment-là ?
- Speaker #0
Un orthophoniste, c'est un être humain qui, avant tout, a envie d'apporter aux gens qui sont autour de lui. pas qu'aux enfants, d'apporter aux gens qui sont autour de lui, a envie de rééduquer, a envie de redresser, a envie de contribuer, est plein d'empathie, est patient, et c'est quelqu'un qui a envie de bien faire, de base. dans un domaine qui est plus spécifique. Mais en tant qu'être humain, c'est quelqu'un qui a cette intention d'impacter. Et pas seulement de faire des rééducations, de jouer au Uno, de jouer au Double. C'est quelqu'un qui a envie d'impacter. Et ce n'est pas seulement impacter des enfants, on en parlera après, mais c'est impacter aussi et apporter quelque chose à des parents et à des familles entières, dans le contexte sénégalo-sénégalais dans lequel on est.
- Speaker #1
Et donc, quand tu entends cette description-là,
- Speaker #0
Je me reconnais. Je me reconnais parce qu'il y avait le truc d'aller vers l'autre, en fait. Il y avait le truc d'aller vers l'autre, et c'est quelque chose que j'ai toujours eu, parce qu'il y a un moment où j'ai eu l'impression que j'en ai manqué, en réalité. Ce n'est pas très grave, ce n'est pas la fin du monde, mais il y a eu un moment où j'ai eu l'impression d'en manquer, ou en tout cas, le gamin que j'étais avant d'avoir le bac et autres. se posaient beaucoup de questions par rapport à ça.
- Speaker #1
Ok.
- Speaker #0
Et par rapport à la notion de solitude, par rapport à l'ennui, par rapport aux amis, par rapport à qui est proche de toi, qui n'est pas proche de toi. Et à un moment donné, en fait, quand tu vis ces choses sans tomber, sans vouloir tomber non plus dans le cliché de...
- Speaker #1
Non, je peux comprendre ce que tu veux dire. Ce n'est pas un cliché, parce que je pense que ce que tu dis, je l'ai un peu vécu aussi.
- Speaker #0
En tant qu'ado ?
- Speaker #1
En tant qu'adolescent. Où je me suis à un moment senti, malgré qu'on était dans une maison, où on était... 2, 4, 5, je me sentais seul.
- Speaker #0
C'est ça.
- Speaker #1
Je me sentais incompris parce que je n'avais pas de communication dans la maison. Et donc, sur toute cette période d'adolescence où tu es dans beaucoup de questionnements, j'avais l'impression d'être tout seul et perdu. Donc, je peux comprendre ce que tu veux dire et je peux comprendre en fait que quand tu entends que toi, tu peux être capable d'être solution pour des gens qui sont dans cette situation-là, ça puisse te donner envie d'orienter vers ça.
- Speaker #0
Et puis, quand on parle de solitude, on parle de la maison, mais moi, c'était l'école, c'était la vie de tous les jours. Et c'est aussi parce que je me posais des questions à l'époque qui n'étaient absolument pas les questions que mes amis se posaient. J'étais intéressé par des choses, je rêvais en fait, j'étais déjà un gros rêveur à l'époque.
- Speaker #1
Par l'élevage de crevettes, par exemple ?
- Speaker #0
Oui, non, ça t'y arrive après. C'est une insight. Mais pour le coup, l'élevage de crevettes, ça t'y arrive après. Mais pour le coup, en fait, j'étais déjà très passionné. pas passionné par une chose, mais c'est un trait de caractère que j'ai. C'est-à-dire que si aujourd'hui, tu me montres cette tasse et que tu me dis qu'elle a été fabriquée avec tel matériau et que pour une raison ou une autre qu'on ignore, je suis intéressé, il y a de fortes chances que d'ici une trentaine de jours, je sois en train de programmer une formation pour me donner des tasses comme ça. Donc voilà comment j'étais. Après, voilà, moi j'entends cette description un peu et elle fait sens en fait, il y a quelque chose qui soit dans moi, c'est pas un cliché mais... J'ai mon appel à ce moment-là, en fait.
- Speaker #1
Un peu comme tu viens de dire l'exemple de la tasse.
- Speaker #0
Oui.
- Speaker #1
Quand tu entends cette description, tu vas chercher c'est quoi être un orthophoniste et comment tu deviens orthophoniste ? Non.
- Speaker #0
Non ? Non. En fait, c'est là que c'est dingue. Quand il y a cette conversation, ce n'est même pas une conversation parce que je ne suis pas dans la conversation. Moi, je suis là, j'entends. Moi, je finis mon dessert.
- Speaker #1
Tu es passif.
- Speaker #0
Je suis passif, je mange mon dessert. Moi, je suis là, je les écoute. Et ça fait son chemin entre le mirail, le métro entre le métro du Mireille et Rangueil, c'est quand même long. T'as le temps de réfléchir. Et quand j'arrive à la maison, je me rappelle, je crois que c'est le soir, j'ai mon père au téléphone ce jour-là, et on n'était pas loin des fêtes de Noël, je crois. Et je lui dis, de manière très décidée, je lui dis ça et je sais ce que je vais faire. Et il me dit quoi ? Je lui dis orthophoniste. Et il me dit mais c'est génial, ça a l'air très spécifique tout ça. Et bravo, il faudra t'accrocher. Dis-moi un peu plus sur le métier. Qu'est-ce que c'est ? Moi, je ne sais pas. Pourquoi tu veux être... Je ne sais pas. Et là, il me dit, mais tu ne peux pas me dire que tu veux être orthophoniste, Christian. Tu vois ? Et je lui explique, je lui dis, papa, quelqu'un a parlé du métier et a décrit ce qu'est un orthophoniste.
- Speaker #1
Et ça a décrit...
- Speaker #0
C'est moi dont il parlait. C'est moi, c'est tout. De là, par contre, il faut quand même savoir ce que c'est. Je pense que deux mois plus tard, j'étais à Dakar. Je ne sais plus si c'était à Noël ou si c'était pendant l'été. Mais deux mois plus tard, j'étais à Dakar et on s'est débrouillé pour faire un stage chez une orthophoniste qui était là à l'époque et qui a eu la gentillesse de me recevoir en stage d'observation, en réalité. Pendant, je pense que c'était une semaine, dix jours, quelque chose comme ça. Je suis arrivé un lundi, j'ai fait la première journée avec elle, qui était en réalité une matinée. Et puis le mardi, en partant à 13-14 heures, c'était bon dans ma tête.
- Speaker #1
Après, les gens vont le découvrir dans la discussion, mais pour moi, ce moment explique pourquoi tu es aussi passionné aujourd'hui, par ce que tu fais. T'imagines que d'une discussion où toi tu es passif, où tu n'es pas dedans, comment ça a changé tout le cours de ta vie aujourd'hui ? Parce que tu ne savais pas ce que c'était ce métier, tu n'en avais jamais entendu parler, tu entends ça, tu vas appeler ton père et tu lui dis « Papa, c'est ça que je veux faire » . Alors que toi-même, tu ne sais même pas combien d'années d'études ça prend, tu ne sais pas ce que ça engage, mais tu sais que c'est ça que tu veux faire.
- Speaker #0
Je sais que c'est ce que je veux faire. et c'est même pas savoir On peut parler sur le plan conscient, ce n'est pas juste sur le plan conscient, c'est qu'au fond de toi, tu es marié à cet objectif. Donc, ce n'est même plus une histoire de j'espère que ce n'est pas dur, combien de temps ça va durer ? Ce n'est pas ça la question. C'est juste, c'est ce que je vais faire, point. À partir de là, le questionnement pour moi n'est pas comment je vais y arriver. Même ça, j'y suis pas. À partir de là, bon, il y a tout le chemin des études et autres, et des classes que tu choisis et autres, mais moi, à partir de là, la réflexion qui commence, c'est quel type d'orthophoniste je veux être. Je sais que je serai orthophoniste. Dans ma tête, je sais, je suis convaincu, j'ai prié pour ça, voilà. Mais c'est quel type d'orthophoniste je veux être, et quel type d'être humain dans ce métier je serai, parce que pour moi, c'est hyper, hyper, hyper important. Et pour moi, le vrai chemin, il commence là, en fait. Et ce chemin, il m'a mené... Enfin, j'ai suivi ce chemin. J'ai eu la chance d'avoir une famille extraordinaire qui m'a accompagné. Ça n'a pas été facile. Il y a eu de gros moments de doute. Il y a eu des moments où je me suis demandé si... Si j'arrêtais pas, quoi. Parce que c'était pas facile.
- Speaker #1
Parce que pour que les gens comprennent, c'est un cursus de combien d'années ?
- Speaker #0
C'est un cursus qui peut se faire en... Alors, en France, à l'université, en 5 ans.
- Speaker #1
OK.
- Speaker #0
Donc en master, en fait. C'est un cursus qui peut se faire en Belgique, où moi je suis passé, à Liège, en 3 ans. D'accord. En haute école. D'accord. Ce qu'il faut savoir, c'est qu'en haute école, les trois années sont concentrées. Quand je dis concentrées, c'est-à-dire que c'est rythmé. On a eu, moi j'ai, malheureusement, c'est important de le souligner, parce que même dans la vie de tous les jours aujourd'hui, on rencontre ces cas-là encore. Mais moi, je me rappelle avoir eu des personnes avec qui j'ai cheminé qui se sont arrêtées en cours de route parce que burn-out, parce que fatigue, parce que c'est hyper intense.
- Speaker #1
Si tu me dis qu'en France, c'est cinq ans et qu'en Belgique, c'est trois ans, c'est qu'effectivement il doit y avoir une... condensation.
- Speaker #0
C'est hard. Et en fait, à la fin de ça, quand tu es diplômé, c'est bizarre parce que c'est aussi un sentiment qui... qui moi m'anime encore aujourd'hui et me donne envie de continuer, me donne faim en fait, parce que pour moi, il faut rester affamé quand tu fais ce genre de métier, c'est que quand tu as ton diplôme en main, tu commences à pratiquer et en réalité, tu te rends compte que tu ne connais rien.
- Speaker #1
Ah ouais ?
- Speaker #0
Ouais.
- Speaker #1
Pourquoi ?
- Speaker #0
Parce que c'est un monde entier, c'est une galaxie à part. En fait,
- Speaker #1
entre ce que tu apprends sur les bancs de l'école et ce qu'il y a dans la vie de tous les jours, c'est...
- Speaker #0
En fait, ce que tu apprends dans les bancs de l'école te permet de survivre et de comprendre ce qu'il y a dans la vie de tous les jours. Mais si on parle de rééduquer et d'impacter, tu dois aller chercher plus loin. Donc tu ne peux pas être une personne qui se satisfait de ce qu'elle a connu. Pour une raison très simple, la société évolue, les troubles évoluent, et la rééducation doit évoluer. Et les personnes qui donnent cette rééducation doivent accepter aussi d'évoluer.
- Speaker #1
Donc tu es en apprentissage finalement.
- Speaker #0
Constant.
- Speaker #1
L'école te donne les bases, et après la vie en tant que professionnel t'apprend. tu apprends le métier tous les jours.
- Speaker #0
Si tu l'acceptes.
- Speaker #1
Si tu l'acceptes. Parce qu'il y a des professionnels qui...
- Speaker #0
Disons qu'en tant qu'être humain, si tu reçois des leçons et que tu continues à t'acharner, à mal faire, tu n'acceptes pas. Si tu l'acceptes, c'est... Moi, j'ai eu... des moments où j'ai un patient qui me vient en tête, on en parlera peut-être un peu plus tard, qui m'a appris des choses en fait. Parce que les gens nous voient comme des thérapeutes, oui c'est ce qu'on est, comme des professionnels, oui c'est ce qu'on est. J'insiste, je le dis depuis tout à l'heure, on est des êtres humains en fait, on vit la même chose que tout le monde. Le soir on est fatigué quand on rentre chez nous, Le soir, parfois, on a envie de parler à personne. Le matin, il y a des jours où c'est dur de se lever. Maintenant, quand on arrive et qu'on voit une salle d'attente, qu'on voit les gens qui sont là, qu'on voit les parents et qu'on se rappelle pourquoi on fait ce métier, on a envie d'y aller juste. T'as mal, mais tu retournes sur le terrain. C'est comme ça.
- Speaker #1
Non, c'est sûr, ça ne doit pas être, comme tu dis, et puis ça doit être très énergivore. Les gens ne se rendent pas compte de l'énergie que ça doit te prendre au quotidien. De toute façon, comme tu as dit, Dans la discussion, on va avancer. Tu vas nous expliquer, toi, ce que tu as mis en place, justement, pour garder ton énergie et tout, pour te protéger, finalement, de séparer la vie du professionnel de santé et séparer la vie de Christian, qui est dehors. Tu vas nous dire comment tu as mis en place ces choses-là. Mais donc, toi, tu vas en Belgique.
- Speaker #0
Oui.
- Speaker #1
Tu fais tes trois ans en Belgique.
- Speaker #0
Après Toulouse.
- Speaker #1
Après Toulouse. Donc, tu commences déjà la formation pour être orthophoniste.
- Speaker #0
En fait, je fais science du langage. Ouais. Alors, science du langage à Toulouse, à la base, c'est pour faire communication. D'accord. Pas du tout pour être orthophoniste.
- Speaker #1
Tu fais combien de temps ?
- Speaker #0
Je fais trois ans de licence et je fais un master. Je fais la première année de master. Et en fait, après ça, c'est même pas la Belgique. Après ça, il y a une tentative en Belgique qui se solde par un échec parce qu'à l'époque, c'était le tirage au sort. D'accord. Donc, je ne suis pas pris. D'accord. Et je... Qu'est-ce qui se passe après ça ? Au moment où il y a le... En même temps qu'il y a le tirage au sort où je ne suis pas pris. Je pense que deux, trois semaines plus tard, je tente vraiment, j'envoie mon dossier à Genève, à l'université. Mon dossier est pris, il était plutôt bon. Et là, en fait, il y a une deuxième révélation qui m'arrive, ou plutôt la confirmation de quelque chose que j'avais en tête. Et l'étape de Genève, pour moi, est hyper importante en tant que personne. Genève, en fait, je comprends que je vais être orthophoniste, mais à Genève, on diplôme d'abord un psychologue. Quand je dis on diplôme d'abord un psychologue, c'est qu'on nous fait passer par le cursus de licence en psychologie. Quand moi, on me l'annonce au début et qu'on me l'annonce presque en me disant « Ah, mais désolé, monsieur Nanga, ça va être un peu plus long parce que… » Je dis « Mais non, non, absolument pas. » Et garde en tête, enfin, je ne l'ai pas dit, mais… À la base, moi, j'avais dit à mon père, je vais faire des études courtes.
- Speaker #1
Ah, OK.
- Speaker #0
J'avais dit, moi, deux, trois ans, et puis c'est bon,
- Speaker #1
quoi. Et puis, je rentre à Dakar.
- Speaker #0
Et puis, je rentre à Dakar. Mais là, déjà, à Genève, j'arrive, j'ai quatre ans. Ouais. Je suis trois ans encore à Genève, où je découvre la psychologie et où je comprends à quel point la compréhension de l'être humain et la compréhension de nous-mêmes est importante si on veut aider les autres.
- Speaker #1
Mais donc, pour que je comprenne bien, ça veut dire qu'en gros, si tu avais été pris. En Belgique, ce côté psychologique,
- Speaker #0
je ne l'aurais pas eu.
- Speaker #1
Tu ne l'aurais pas eu.
- Speaker #0
Ou j'aurais été le rechercher plus tard peut-être. Aujourd'hui, des gens se complètent. Mais en tout cas, moi, dans mon parcours, je ne l'aurais pas eu. J'ai eu ce côté en psychologie, cet enseignement en psychologie, le tronc commun en psychologie avant. D'accord. Et puis, Genève, grand moment, parce que c'est aussi là où je découvre le sacrifice. Le sacrifice dans le sens où, à l'époque, je faisais du sport à côté. Et c'est vraiment... en parallèle du sport, du foot américain à l'époque, que je comprends en fait physiquement. C'est bizarre ce que je vais dire, mais la douleur que j'éprouve physiquement, à un moment donné, m'amène à un niveau où la peur de l'échec à l'école, aux examens, n'existe plus. Et à partir de ce moment, c'est pour ça que je dis que Genève était hyper important pour moi, je sais que je suis en mission. Là, pour moi, je suis clairement en mission. D'accord. Et je ne suis toujours pas dans la finalité de ma formation en orthophonie. Là, je suis encore en psychologie. mais dans ma tête je sais clairement que je suis en mission et la Belgique arrive juste après parce que je ne continue pas à Genève la procédure m'amène en haute école à Liège Liège où ça n'avait pas marché avant donc comme on dit vraiment quand le bon Dieu décide et qu'il a son timing il faut juste suivre quoi et là par contre quand il applaudit il faut que tu danses effectivement donc moi je me retrouve là avec les mêmes têtes que j'avais laissées Je reconnais des gens qui étaient quand je faisais la file pour le tirage au sort qui étaient là. Je reconnais le même personnel et j'y arrive un peu, j'allais dire comme un cheveu sur la soupe parce qu'il y avait peu d'hommes, peu de garçons. Des noirs, il n'y en avait pas beaucoup. Et je découvre une école et des gens formidables. Pareil. Et je me jette à fond parce qu'à ce moment-là, pour moi, c'est ma chance qui est là. Et je me jette à fond dedans, tout simplement.
- Speaker #1
Mais c'est fou que... Moi, ce qui me... Je veux dire, ce qui est fou, c'est que ça part d'une simple discussion que tu écoutes à côté. C'est comment ça t'amène et que ça t'anime et que c'est un feu qui est en toi, alors que c'est quelque chose que tu ne connaissais, que tu n'avais jamais entendu parler avant et tout. Oui. Et tous les voyages, tous les efforts.
- Speaker #0
Oui, parce qu'il y a des sacrifices de dingue.
- Speaker #1
Parce que même de se dire que, attends, j'ai fait quatre ans d'études à Toulouse, et c'est un petit peu comme si finalement tu te dis, ces études, elles ne me servent à rien.
- Speaker #0
Alors, tu as tout à fait raison. Et le pire, c'est que Liège, donc la Belgique, à l'époque, moi, quand je sors de Genève, pourquoi est-ce que je vais à Liège ? Parce que je ne l'ai pas dit. Pourquoi je vais à Liège ? Parce que je ne suis pas pris, en fait, à la suite du parcours. après la psychologie. Et à Genève, où ça se passait très bien, où je ne m'étais jamais aussi bien senti humainement, émotionnellement, tout ce que tu veux, j'ai la possibilité de rester, en fait. Mais si je reste, en tant qu'étranger, puisque je suis Sénégalais, si je reste, c'est pour faire un master en psychologie clinique.
- Speaker #1
Et pas en orthophonie.
- Speaker #0
Mais si je reste, je continue à jouer au foot avec mes potes, j'ai un boulot dans trois ans, je fais de la recherche, j'avais déjà commencé un peu la recherche, je m'y intéressais déjà un peu. Il y a un parcours qui est tracé là.
- Speaker #1
C'est-à-dire que là, tu peux t'élancer.
- Speaker #0
Oui, non, mais là, je peux juste dire, c'est même pas lancé, je peux dire, ok, voilà, je fais mes deux années, et je vais pas plus loin, et je suis bien ici. Mais c'est pas ce que je voulais faire, c'était pas ça la mission, en fait. Donc, je dois continuer. Et je me rappelle encore, je prends les résultats à Genève des examens, je comprends que je suis pas pris après le... Parce que ça, c'est bien, on parle de la réussite, mais c'est bien de parler de l'échec et de nos relations à l'échec. Je comprends que je ne suis pas pris à la suite au master en logopédie, puisque là-bas, ça s'appelle comme ça.
- Speaker #1
Logopédie, c'est quoi ?
- Speaker #0
C'est l'orthophonie. C'est la même chose. D'accord. En Belgique et en Suisse, c'est la logopédie. Dans la Suisse, tu es logopédiste et en Belgique, tu es logopède.
- Speaker #1
Ça veut dire quoi ?
- Speaker #0
Pourquoi le logo ? Parce que logo, c'est une racine grecque qui concerne le langage. Exactement.
- Speaker #1
D'accord. Donc, moi, j'allais te faire une blague, merde. Moi, je connais le logo B, tu vois. Bref. Allez, Olivier, merci.
- Speaker #0
Après, tu sais, toi, tu parles de ça, mais moi, quand je dis aux gens que je suis logopède au début, ils me demandent si je m'occupe des pieds, par exemple. Ah,
- Speaker #1
mais bien sûr. Moi, si tu viens et tu me dis, oui, Olivier, je suis logopède, moi, intuitivement, je vais penser pieds.
- Speaker #0
On prend rendez-vous.
- Speaker #1
Pourquoi ? À cause de comment j'ai bagué, là ? Oh là là ! Je suis fatigué ! Il est 21h38, j'ai une longue journée, Christian !
- Speaker #0
En tout cas, voilà comment ça s'est passé. En Suisse, donc,
- Speaker #1
quand j'ai la... J'arrive à le réaliser.
- Speaker #0
Je sais que c'est très sérieux, mais j'y arrive pas toujours. Mais en Suisse, quand j'ai le résultat, je m'en rappelle encore, je suis dans l'Arche, à Genève, à l'Université de Genève, et il y a... 10-15 minutes à pied, entre là et chez moi. Je ne prends pas le tram. Je vais à pied, je me sers un chocolat. Parce que le café à cette heure-là, ce n'était pas possible, surtout avec ce que je venais d'apprendre.
- Speaker #1
C'est ça, parce que toi, tu es déçu à ce moment-là.
- Speaker #0
Je n'ai pas le temps d'être déçu. En fait, c'est plus tard que j'ai compris que je n'avais pas le temps d'être déçu. Sur le coup, j'encaisse un truc qui est très dur. Et je me dis... En fait, c'est comme si c'était... Une partie du chemin. Une part du plan. Ok. Je vais faire une analogie. Alors, je vais me risquer un... Coupe du Monde 2002. Parce que j'ai eu le même sentiment, en fait. Coupe du Monde 2002, le Sénégal joue... Désolé pour le hors-sujet, mais pour le coup, c'est la meilleure...
- Speaker #1
Image.
- Speaker #0
Ouais. Le Sénégal joue, je pense, la... Norvège, je pense, un pays nordique.
- Speaker #1
Oui, oui. Henri Camara, deux buts, je peux vous le dire.
- Speaker #0
Mais on prend un but d'abord. Oui,
- Speaker #1
on prend un but.
- Speaker #0
Et moi, je me rappelle de mon sentiment à ce moment, et c'est le même sentiment que j'ai en fait, parce qu'au moment où j'apprends cette nouvelle-là... C'est à ça que je pense. Ma référence, elle est là. Et le but qu'on encaisse, parce que si tu te rappelles, la Coupe du Monde à l'époque, en plus, c'était au Japon. Donc nous, on veillait en plus. On se l'a, on se l'a hyper tôt.
- Speaker #1
En tout cas, c'était très tôt.
- Speaker #0
Et ce but ne m'a rien fait. Ce but ne m'a rien fait parce que c'est comme si...
- Speaker #1
Tu savais qu'ils allaient revenir.
- Speaker #0
Non, je savais qu'ils allaient gagner. c'est pas revenir, c'est gagner Ok, vous avez votre but, dansez, faites vos trucs, bravo les Vikings, c'est bien. Mais nous on revient. Non mais c'est vrai, c'était ça. Et quand j'encaisse cette nouvelle, je me sers juste un chocolat chaud,
- Speaker #1
parce que tu sais que toi,
- Speaker #0
je me tourne, je sors, je fais le trajet, et sur le trajet, c'est quoi le plan B, c'est quoi le plan C ? C'est quoi la suite ? J'arrive à la maison, j'appelle mon père, ce brave homme. Et je lui dis, je ne suis pas pris. Là, il me dit, enfin, il me demande, tu dois être déçu, mais comment on fait la suite ? En fait, le temps qu'il continue, je lui dis, on va en Belgique.
- Speaker #1
OK. Oui, non, je comprends ce que tu veux dire.
- Speaker #0
On va en Belgique.
- Speaker #1
La mission continue en Belgique.
- Speaker #0
Oui. Et il me dit, oui, mais tu le sens bien, la Belgique ? Je lui dis, non, j'ai les infos déjà. Donc moi, en fait, je suis arrivé à la maison. Le temps du chemin, il y avait de la déception. Donc sur la première moitié du chemin, j'ai été un peu déçu. Mais après, c'est bon, la vie continue. Je n'ai pas le temps de rester là. Moi, je suis en mission. Tu veux que je fasse quoi ? Que je pleure ? Je ne l'ai pas. Je continue, quoi. Donc j'arrive, je prends les infos. Et je me rappelle qu'en Belgique, l'admission... À l'époque, donc, ça change, ce n'est plus le tirage, il me semble que ce n'était plus le tirage au sort, je ne suis plus très sûr, mais je peux envoyer mon dossier par la poste. Pourquoi je te dis ça ? Parce que... J'envoie rien du tout par la poste. Je prends mon dossier et deux jours plus tard, je prends le train à 5h du matin et je débarque. Si tu as faim, tu vas manger. Tu ne vas pas rester là à la poste, machin, le truc. J'envoie des mails.
- Speaker #1
Tu vas provoquer ta chance.
- Speaker #0
Tu vas la chercher. En fait, non, tu vas provoquer ta chance. Et je me rappelle qu'à l'époque, à l'école... J'ai eu cette remarque de beaucoup de personnes qui me disaient « Ah, Jean, t'aimes bien, t'as de la chance. » J'ai dit « Mais oui, j'ai de la chance, mais je l'assume complètement. » Parce que quelque part, moi, je sais d'où elle vient cette chance. Elle a été provoquée. Et donc, je fais ce chemin en Belgique qui n'est pas facile parce que les cours sont condensés. Je suis aussi... À un moment donné, je fais face à la difficulté et même à l'échec en première année dans certaines matières qui sont hyper importantes pour continuer. Mais pareil, j'ai la chance de rencontrer certaines personnes. Il y a une personne à qui je pense qui était ma première maître de stage, hyper respectée, qui faisait peur et qui me regarde droit dans les yeux un jour et qui me dit, écoute, ton CV est très impressionnant, c'est bien, c'est génial, tu es diplômé de ci, tu es diplômé de ça, mais nous, on forme des techniciens. J'ai pris une gifle ce jour-là. Mon égo a pris une gifle. Je suis rentré chez moi et je me suis juste fait la promesse que c'était la dernière fois que quelqu'un me parlait comme ça. Pas qu'elle m'avait manqué de respect, mais que quelqu'un me disait que je n'étais pas à la hauteur.
- Speaker #1
Juste pour que je comprenne, parce que tu sais, moi je suis très loin de ce métier-là, donc il y a des trucs que j'ai besoin de saisir plus. Quand elle dit on forme des techniciens, ça veut dire quoi dans son langage ?
- Speaker #0
Ça veut dire qu'en fait, la formation belge est une formation pratique.
- Speaker #1
D'accord.
- Speaker #0
Ça veut dire qu'il y a moins de théorie, en tout cas il y a de la théorie, mais il y a énormément de pratiques.
- Speaker #1
D'accord.
- Speaker #0
Donc, beaucoup d'heures de stage, beaucoup, beaucoup, beaucoup, beaucoup, beaucoup d'heures de stage. Dès la première année, on allait en stage d'observation, mais en deuxième année, on pratiquait déjà. D'accord. Dans un cadre surveillé, dans un cadre adapté, voilà, on prenait toutes les précautions, mais on progressait déjà.
- Speaker #1
Mais quand elle te dit donc qu'on forme des techniciens, c'est parce que quoi ? Elle jugeait que toi, tu avais trop ce que tu faisais ?
- Speaker #0
Elle jugeait que j'étais théorique, en fait. Merci. D'accord. Voilà, je viens de la formation à la française, j'ai fait une licence et un master. Genève, c'était encore beaucoup de théories. Alors qu'à Genève, l'université ne m'avait pas demandé, mais moi j'avais été voir en plus des orthophonistes à l'époque, des logopèdes. des logopédistes en Suisse. Donc, pareil, j'allais provoquer un peu ma chance comme ça. Et puis, je me rappelle même que l'une de ces personnes, un monsieur génial, je suis rentré en contact avec lui par le foot américain parce que j'avais un coach qui avait un fils qui allait chez lui et voilà. Donc, moi, je pensais que j'étais déjà dans la technique. D'accord. Non, je n'étais absolument pas dans la technique. D'accord. Ça ne suffisait pas. Et quand elle me dit ça, cette dame, elle ne se rend pas compte. Et à ce jour, elle ne se rend toujours pas compte. Ça fait mal, mais ça fait partie des choses qui m'ont bousculé, en fait. Et j'avais besoin de ça. Non pas que je dormais, mais j'avais besoin de prendre la mesure et de me dire, il faut plus. Tu penses que tu as fait plus ? Non, il faut encore plus. Donc, tu fais quoi ? Est-ce que tu t'arrêtes là ou est-ce que tu continues ? Et j'ai continué. Et je me rappelle encore que le jour où je suis diplômé, cette personne, donc on avait un tableau avec les noms, et cette personne est... Non, pas le jour où je suis diplômé, c'est l'année que je passe. Un passage en année supérieure, cette personne, en fait, je la vois rentrer dans la salle des profs et ouvrir et regarder juste et fermer. Elle regarde avec plein de bienveillance. Et cette bienveillance, c'est ce que je retiens aujourd'hui dans la pratique du métier de tous les jours. Et en fait, je vais la voir en lui disant, mais ça, c'est pour vous. Ça, c'est vous.
- Speaker #1
C'est vous qui m'avez permis de...
- Speaker #0
C'est hyper important. Pour moi, ça fait partie des choses à dire. Pour moi, c'est l'un des plus beaux mots à dire merci. On ne le dit pas assez, d'ailleurs. Et moi, sur le chemin que j'ai eu, j'ai beaucoup dit merci. Je dis encore beaucoup merci. Et c'est important parce que ce qu'on a, on a souvent une espèce de tendance à penser qu'on y a droit, que c'est comme ça, on le prend un peu pour acquis. Non, ce n'est pas vrai. Moi, je suis là, je suis invité chez toi pour parler d'orthophonie parce que je... parce que clairement, parce que je ne l'ai pas dit, parce que clairement, ce jour à la cantine, le dessert était bon et que je suis resté.
- Speaker #1
Clairement.
- Speaker #0
Le dessert, il n'est pas bon ce jour-là.
- Speaker #1
Et tu t'en vas et tu loupes la discussion.
- Speaker #0
Mais je suis même portophoniste. Et d'ailleurs, je n'ai absolument aucune idée aujourd'hui de ce que j'aurais pu faire d'autre.
- Speaker #1
Oui, bien sûr. Quel aurait été le parcours si tu n'avais pas...
- Speaker #0
Je ne sais pas. Je ne sais pas. Je ne sais pas.
- Speaker #1
Moi, la question qui me vient quand tu me parles de beaucoup plus de pratiques en Belgique, c'est la question que je ne t'ai pas posée. Ta première mise en pratique, ta première consultation, la première fois au Christian qui justement se dit « Ok, j'ai trouvé ce que je veux faire, je vais me former pour ce que je veux faire. » Et là, je suis en contact avec la profession. J'ai des patients devant moi. Ça y est, l'impact que je voulais avoir, je peux déclencher ça. Ça t'a fait quoi quand tu sors de ta première journée ? où tu es avec des patients, comment tu rentres ?
- Speaker #0
Ça dépend. Tu parles de là, par exemple ?
- Speaker #1
Avant d'avoir ton cabinet,
- Speaker #0
en stage.
- Speaker #1
En stage, oui. Est-ce que tu te rappelles ?
- Speaker #0
Oui. J'essaie de trouver les mots. Parce que c'est un truc qui est drôle. Tu es content. Voilà, j'ai trouvé. En fait, c'est très personnel. D'autres l'ont vécu peut-être autrement. Moi, j'ai été content parce que, enfin, j'étais en face d'un enfant, d'un patient et que je pouvais un peu agir, être dans l'action. Mais je me dis, de toute façon, ta première séance, elle n'était pas trop... Ouais,
- Speaker #1
c'est ça. À mon avis, c'est comme... Je vais faire moi aussi une analogie. Moi, je sais que c'est très... Comme toi, sport, c'est comme si la première fois où tu joues, tu as regardé des matchs, tu as envie d'être Ronaldo.
- Speaker #0
Oui,
- Speaker #1
oui. Et tu arrives sur le terrain, tu loupes tous tes tirs, tous tes trucs. Tu l'appuies.
- Speaker #0
Tu es un peu de Ronaldo. Tu es zéro.
- Speaker #1
Tu dois te dire, ça y est, je suis sur le terrain, mais je n'ai pas encore fait ce que je voulais faire.
- Speaker #0
Mais le truc qui est intéressant, c'est que quand ça arrive, alors comme on avait beaucoup de pratiques, j'y retourne, je pense, deux jours plus tard, j'y retourne. Et là, sur cette journée, j'ai vu plusieurs enfants. j'en ai pas vu qu'un donc tu as pas tant le temps que ça de tu vois de sentimentaliser le soir quand tu rentres chez toi tu es quand même content tu vois tu touches du doigt un truc réel moi je me rappelle par contre tu vois je me rappelle m'être dit une chose c'est enfin c'est fini la théorie ouais j'étais fatigué moi de la théorie j'ai fait je sais pas j'ai fait beaucoup d'école quand même
- Speaker #1
c'était non non mais je te pose la question parce que c'est ça je me dis vu l'envie que tu avais au fond de toi vu le le désir ardent que tu avais d'être ça c'est ça je me dis pour moi forcément dans ma tête je me dis Ça a dû être quand même une joie pour toi.
- Speaker #0
Oui,
- Speaker #1
bien sûr. Le matin, en marchant pour aller te dire aujourd'hui,
- Speaker #0
c'est le premier jour. Absolument. Et il y a un autre truc, c'est que tu dis, vu l'envie, le désir, pardon et tout ça, mais ce désir, il n'a fait que grandir en plus.
- Speaker #1
Oui, ça, on va y arriver.
- Speaker #0
C'est dingue, en fait. Mais oui, la première fois, tu te dis... OK, c'était ça. C'était ça que je cherchais. Et là, tu as juste envie de t'accrocher au rêve et de continuer. Et de continuer, coûte que coûte.
- Speaker #1
Donc, tu finis à Liège. Tu es diplômé. Le jour du diplôme, on te dit ça y est, tu es officiellement orthophoniste. C'est quoi le sentiment pour toi qui avait ce rêve il y a quelques années ?
- Speaker #0
J'appelle ma mère et je lui dis je rentre à la maison. C'est ce que je fais.
- Speaker #1
C'est ton premier réflexe ? Oui. Tu sais tout de suite que tu veux rentrer à Dakar ?
- Speaker #0
Je rentre à la maison ? Non, très bonne question. Non, quand je dis je rentre à la maison, c'est... Maman, c'est fini tout ça. Ça y est, j'ai fini. Je reviens. Mais je reviens... Alors, je ne reviens même pas à la maison, parce que, en fait, si, je retournais à Dakar pour les vacances, pour m'arrêter, mais ce qui est intéressant, c'est qu'à ce moment-là, moi, j'ai eu une entente pour retourner en Suisse. Tu te rappelles, j'ai adoré la Suisse.
- Speaker #1
Tu avais des bons contacts.
- Speaker #0
Plus que des bons contacts. Mon président de club, à l'époque, je me rappelle, m'a presque pris par le col en me disant, on va te laisser aller chez les Belges finir ton truc. S'ils nous écoutent...
- Speaker #1
S'ils nous écoutent, qu'ils le mettent en commentaire.
- Speaker #0
On va te laisser aller chez les Belges finir ton truc, mais c'est ici, chez toi.
- Speaker #1
Donc, tu sais que toi, Tu as une place dorée qui t'attend en Suisse, si tu veux.
- Speaker #0
Je ne sais pas si elle est dorée, mais en tout cas, j'ai une belle place. La Suisse, c'est pas mal d'or. J'ai une belle place parce que je suis quand même avec des gens que j'aime, que j'apprécie énormément, des gens qui ont compté et qui comptent encore, même si on ne se parle pas beaucoup parce que la vie, voilà. Et en fait, quand je pars, je pense que je fais la première année. Il y a un truc qui est assez drôle, c'est que je fais la première année et je reviens de temps en temps à Genève. officiellement officiellement, je reviens pour faire la fête.
- Speaker #1
D'accord.
- Speaker #0
C'est faux. Je reviens parce que la personne avec qui j'ai ce projet, qui était à l'époque, qui est aujourd'hui encore la compagne d'un de mes coéquipiers, en fait, m'a proposé... un boulot, un job, en fait, dans son futur cabinet qu'elle est en train de monter. Donc moi, quand je reviens... Ok,
- Speaker #1
donc toi, tu as déjà une proposition ferme.
- Speaker #0
J'ai une proposition ferme. Moi, c'est tu pars de Suisse, mais tu reviens. Tu pars juste pour le diplôme. Quand il me dit tu reviens, c'est ici chez toi, il y a tout un plan. Tu vas revenir jouer, tu vas... Je ne sais pas, tu seras très proche de l'équipe, machin, machin. Donc moi, je reviens. Dans ma tête, je reviens.
- Speaker #1
Donc tu as le côté professionnel orthophoniste, où tu as déjà... Oui. Tu as le côté sportif. parce que tu es un passionné de football américain où tu peux t'épanouir avec tes imprimes et tu as une beauté sociale tu retrouves tout donc pour toi aujourd'hui, quelqu'un qui te regarde de l'extérieur et se dit bah lui l'indirectrice c'est qu'il retourne en Suisse mais oui et puis il faut se dire les choses j'imagine que d'un point de vue financier est-ce que ça tu vas me corriger si je me trompe mais est-ce que peut-être même en Suisse parce que les gens ont une image de la Suisse où effectivement peut-être c'est mieux payé ou des trucs comme ça Est-ce que c'est mieux payé aussi ?
- Speaker #0
On rend grâce à Dieu.
- Speaker #1
Mais donc, tu vois,
- Speaker #0
c'est ça. En fait, non, pour faire simple, pour être pérenne, tout est aligné et tu peux vivre décemment correctement. Voilà. Pour moi, tout était aligné. Sauf que quand la musique manque de rythme, il faut changer de musique.
- Speaker #1
C'est ce genre de punchline qu'on aime dans le podcast.
- Speaker #0
Non, pour moi, tout est aligné. et et Tout me dirige vers la main.
- Speaker #1
Mais toi, tu dis à ta maman, je rentre à la maison.
- Speaker #0
Mais moi, quand je lui dis je rentre à la maison, c'est parce que mes parents m'ont dit, écoute, ça fait longtemps que t'es parti, reviens pas en vacances. Mais même eux, ils savent que je pars en Suisse après ça. Mon contrat, j'ai le contrat en fait.
- Speaker #1
Donc toi, dans ta tête.
- Speaker #0
Dans ma tête, je pars.
- Speaker #1
Tu pars en Suisse.
- Speaker #0
Mon contrat, je l'ai depuis la deuxième année.
- Speaker #1
Tes parents te disent, Christian,
- Speaker #0
pars en Suisse.
- Speaker #1
Pour tout le monde dans ton entourage, je vais en Suisse. Christian,
- Speaker #0
Suisse. il va en Suisse Genève tu viens à Dakar en vacances qu'est-ce qui se passe ? c'est Dieu qui sait
- Speaker #1
Non, c'est toi qui sais, tu vas nous dire.
- Speaker #0
Non, aujourd'hui, je sais, mais quand je dis c'est Dieu qui sait.
- Speaker #1
Qu'est-ce qui chamboule ce plan ? Qui est parfait ?
- Speaker #0
Rien de chamboule, en fait, parce que le vrai plan, c'était juste pas d'aller en Suisse. Mais en fait, moi, je reviens à Dakar et dans ma tête, je suis là à Dakar en vacances. Et j'ai mon contrat, je l'ai signé, je l'envoie. Et puis là, tu commences à rencontrer des pots de bananes administratifs qui n'existaient pas. Et tu te dis, mais ce n'est pas possible, il y a telle chose, il y a telle chose. On ne veut pas que j'aille en Suisse ou quoi ?
- Speaker #1
C'est quoi donc des pots de bananes en Suisse ?
- Speaker #0
En Suisse.
- Speaker #1
D'accord.
- Speaker #0
Ça commence à traîner.
- Speaker #1
D'accord. Alors, pour faire simple,
- Speaker #0
c'est l'histoire du titre de... Ce n'est pas le titre de séjour, c'est le permis de travail en Suisse. Ils te font un permis de travail. Et là, ça commence à traîner. D'accord. Alors qu'on ne comprend pas pourquoi, puisque c'est une profession qui est demandée. Moi, j'ai fait une partie de ma formation là-bas. Il n'y avait pas de raison.
- Speaker #1
Tu as un contrat de travail, tu as tout.
- Speaker #0
Exact. C'est un CDI que j'ai dès le début. Il n'y a pas de raison, en fait, que ça bloque. Et je me rappelle que c'est un truc qui me revient, qui m'est revenu il n'y a pas longtemps. C'est une période très, très, très dure pour moi, émotionnellement et psychologiquement. Et je commence même à bégayer dans cette période-là. Dans ce court laps de temps, je bégais. Ça a duré peut-être... Un mois et demi, quelque chose comme ça.
- Speaker #1
Tu bégais alors que tu n'as jamais bégé ?
- Speaker #0
Je n'ai jamais bégé de toute ma vie.
- Speaker #1
OK.
- Speaker #0
Et le pire, c'est que tu bégais, et tu bégais en disant, mais moi, je suis orthophoniste, en fait.
- Speaker #1
Oui, c'est ça, en plus.
- Speaker #0
Donc, ça accentue le truc. Et ce qui se passe, c'est qu'on a une discussion avec mon père, qui me... qui a toujours été très présent. Mon père et ma mère ont toujours été très présents et très proches de moi par rapport à ces choix-là.
- Speaker #1
Non, on l'entend parce que depuis tout à l'heure, à chaque fois qu'il y a les moments de grande décision, tu parles d'eux.
- Speaker #0
Tu peux avoir ta décision. Tu peux savoir où tu vas. Mais prends l'avis quand même de tes parents. Même si tu ne fais pas comme...
- Speaker #1
Comme ils voudraient.
- Speaker #0
Comme ils voudraient.
- Speaker #1
Mais tu as besoin d'entendre leur avis. C'est ça.
- Speaker #0
C'est important. Donc, à ce moment-là, mon père me dit un truc. Il me dit, mais pourquoi tu ne te renseignes pas ? Pourquoi tu ne veux pas regarder un peu comment ça se fait ici ? Et moi, depuis le début, ah non, papa, mais non, ce n'est pas la peine. Moi, c'est la Suisse. Donc, ce n'est même pas que je ne veux pas être à Dakar. C'est que Dakar n'a jamais été une petite...
- Speaker #1
Ça n'a pas été une option.
- Speaker #0
Exactement. Et à un moment donné, je vais sur les réseaux sociaux, je rencontre, je parle et je demande s'il y a des orthophonistes à Dakar. Je rencontre une orthophoniste qui est là, on échange et je comprends le besoin. et c'est comme ça que je m'installe à Dakar en fait. Au moment où je m'installe, je suis encore en train de dire « Oui, mais moi, si la Suisse m'appelle, je pars. » La seule chose, c'est qu'on était en février. Je dis à la personne « Si la Suisse m'appelle, je pars. » Je ne partirai pas tout de suite. Je finirai mon année parce que j'ai donné ma parole et je m'engage et je pars. D'accord. Olivier, j'ai fait deux semaines. Dix jours. Au bout de dix jours.
- Speaker #1
On est en quelle année quand ça se passe, ça ?
- Speaker #0
On est en... J'aurais dû vérifier ça avant. Non,
- Speaker #1
t'inquiète. Tu peux te tromper à une.
- Speaker #0
On est en 2017,
- Speaker #1
je pense. À peu près 2017.
- Speaker #0
2016-2017.
- Speaker #1
OK, d'accord.
- Speaker #0
Et je reste. Et un jour, je dis 10 jours, c'est même beaucoup. Dans la première semaine, première semaine, à la pause d'un jour, on va manger. Toutes les grandes décisions, c'est important d'avoir les parents à côté ou d'avoir des gens proches. Mais toutes les grandes inspirations, si ton assiette n'est pas remplie, tu vas te tromper. On va au restaurant à la pause.
- Speaker #1
Toujours le restaurant.
- Speaker #0
Toujours l'un des deux. Petite corniche. Petite corniche, là. L'un des endroits, là. Je ne vais pas faire de pub gratuite. L'un de ces endroits. Et je... Pareil, c'est encore le flashback que j'ai. Je commande un plat. Le temps que ce soit prêt, en fait, je suis en sandales. Dans l'eau. En fait, assis avec les pieds dans l'eau. Le plat arrive. La dame me siffle. Tu es vraiment à la maison.
- Speaker #1
Tu vois ce que je veux dire. C'est pas monsieur.
- Speaker #0
Elle a sifflé. Ton poisson est prêt. Viens, fiston. Et donc, je viens manger. Et là, je me dis, mais... J'aurais jamais ça en Europe, en fait. Ça, pour moi, c'est ça le bien-être, en fait. Dans la simplicité absolue. C'est un plat de caldou. un morceau de poisson, de l'huile de palme et un peu de bissac. Pieds nus.
- Speaker #1
Dans l'eau.
- Speaker #0
Là, je dis non, je ne peux pas partir.
- Speaker #1
C'est vraiment ça qui chamboule tout.
- Speaker #0
Ce n'est pas des blagues. Ce n'est pas une blague. Et en fait, quand je prends cette décision, bien entendu, avant, on a eu l'opportunité, j'ai eu l'opportunité de m'installer et il y a eu une discussion importante où je me suis assis et où j'ai clairement compris. Je me suis dit, voilà, ce n'est pas possible qu'après... Parce qu'il y a eu des années de sacrifice, il y a eu beaucoup de travail, et je suis croyant, je me suis dit, le bon Dieu ne m'a pas oublié, c'est pas possible. Donc là où il y a une porte qui se ferme, ça veut dire qu'il y a une fenêtre qui va s'ouvrir quelque part,
- Speaker #1
forcément.
- Speaker #0
Donc, il faut que tu sois encore plus ancré dans ce en quoi tu crois, dans ta foi, dans ta religion, dans ta relation avec tes proches. Il faut que tu sois accroché et prêt spirituellement, que tu sois accroché, prêt, que tu sois motivé, que tu sois prêt, parce qu'au moment où cette opportunité va se présenter, la porte, on a dit qu'elle se ferme, mais au moment où la porte va s'ouvrir, tu dois comprendre tout de suite. Et là, ça devient comme au foot américain. Il n'y a pas le temps de réfléchir. Il y a un espace, tu rentres.
- Speaker #1
Tu passes.
- Speaker #0
Et moi, c'est comme ça que j'ai eu cette... Je refais la référence au foot américain parce que c'est comme ça que j'ai beaucoup compris certaines choses aussi en termes d'images et dans la manière de les vivre, en termes d'intensité. Donc c'est comme ça que j'ai pris ma décision. Mais de la même façon, on est sur une histoire de plat de poisson quand je dis, je ne veux pas partir parce qu'à ce moment-là, la simplicité et le bonheur que j'ai et ce que je ressens, je ne veux plus m'éloigner de ça. Et pour moi, en fait, quand je retourne travailler à la pause, Oui, dans ma tête, c'est bon, je vais pleurer en Suisse.
- Speaker #1
Ah ouais, donc en plus, ce moment-là, pendant une pause, c'est-à-dire que le matin, tu as travaillé. J'ai travaillé. À midi, tu vas manger ce caldou.
- Speaker #0
Et je reviens.
- Speaker #1
Et tu reviens et tu dis, en fait, je suis bien là, en fait. Oui,
- Speaker #0
mais en fait, même pendant le repas. D'où tu vas ? Moi, je réfléchis. C'est ça,
- Speaker #1
d'où tu vas à la pause et tu es à les pieds dans l'eau ?
- Speaker #0
Et ton caldou, il y a des crevettes et du bissab et tout ça. Tu vas trouver ça où ? Non. non mais tu vas trouver un caldou en Europe oui non il n'y aura pas ça oui non bien sûr bien sûr
- Speaker #1
C'est ce moment qui te fait...
- Speaker #0
Complètement. En fait, j'ai eu des moments comme ça dans la vie qui m'ont permis de comprendre certaines choses. Ce n'était pas des grandes discussions.
- Speaker #1
Oui.
- Speaker #0
C'est comme ça. Et puis, voilà, on réajuste le chemin. Et c'est de là, en fait, que je prends mon... que je m'ancre à Dakar. Et l'un des trucs les plus beaux, c'est qu'à l'époque... Alors, quand je dis à l'époque, on n'était pas dans les années 60 non plus. Parce que les gens vont regarder en se demandant j'ai quel âge. Surtout que j'ai dit que j'ai duré à l'école. J'ai pas 40 ans. Que ce soit clair.
- Speaker #1
Que ce soit clair, Ed. Vous avez bien entendu.
- Speaker #0
J'ai pas 40 ans. Je suis jeune. Ma barbe, il n'y a pas de poils blancs ou quoi, quoi, quoi. Ça,
- Speaker #1
c'est ma vraie barbe.
- Speaker #0
C'est ma vraie barbe. Bref. J'ai des moments comme ça où j'ai des décisions qui... En fait, je me sens juste aidé. On parle d'inspiration, toi tu sais ce que c'est, mais c'est comme si c'était là et que tu étais en condition pour le recevoir, pour avoir l'information. Et je sais que je dois aller dans cette direction. D'accord, il n'y a pas de retour en arrière, il n'y a pas d'hésitation. Donc on tranche et puis on va dans cette direction. Donc c'est Dakar. Et comme je disais tout à l'heure, le truc qui est beau à Dakar, c'est qu'à ce moment-là, on est dans un contexte où... La profession, en tout cas, le besoin existe, est très important, même si les gens ne s'en rendent pas compte encore. D'accord. Et c'est dans ça que j'arrive, moi. Et être Sénégalais, avoir la possibilité d'exercer dans trois langues différentes, comprendre la culture du pays, il a fallu que je me réadapte. Je suis parti longtemps, même si j'ai grandi ici, je me réadapte. Ça ne veut pas dire que je ne comprenais pas comment Sénégal... Oui,
- Speaker #1
mais il y a des codes qui changent vite.
- Speaker #0
Non, mais c'est surtout que je reviens en tant qu'homme. Moi, j'ai parti, j'avais 17-18 ans. Quand je reviens, j'ai beaucoup plus. donc Tu comprends certaines choses. Il y a ta relation à ton pays qui est importante aussi. Tu as vu beaucoup de choses qui fonctionnent bien à l'extérieur. Tu arrives, tu vois des choses ici qui ne fonctionnent pas. Et tu es, je pense, comme beaucoup de personnes qui ont fait ce chemin-là, ou en tout cas qui ont fait ce chassé-croisé entre les deux pays, ou en tout cas entre les deux espaces, où tu te dis, mais pourquoi est-ce qu'ici rien ne fonctionne ? Et le truc qui est dangereux à ce moment-là, c'est que tu peux commencer à développer une relation ambivalente avec ton propre pays. Tu commences à reprocher plein de choses à ton pays. Mais on va aller plus loin. Tu commences à reprocher des choses à des gens de ta couleur, de ton pays, à tes compatriotes. Et tu commences à être le donneur de leçons. Et ça peut être hyper dangereux. Et il y a eu un moment où j'ai vraiment dû m'asseoir et accepter. D'abord comprendre et ensuite accepter que ce que j'ai vu fonctionner en Europe, c'était en Europe. Mais que ce n'est pas parce qu'on est en Afrique qu'il n'y a pas des choses qui ne fonctionnent pas ici. Il y a des choses qu'on fait mieux ici que là-bas.
- Speaker #1
Tout à fait.
- Speaker #0
Et tant qu'on ne comprend pas ça, on ne se prend pas en charge. Et tant qu'on est encore en train de penser que tout se fait correctement là-bas, on se donne aussi une excuse de ne rien faire correctement ici. On parlait de compétences tout à l'heure. Ce n'est pas parce qu'on est au Sénégal, ce n'est pas parce qu'on est en Afrique qu'on ne peut pas être carré dans nos projets. Je ne parle pas d'orthophonie,
- Speaker #1
je parle juste de la vie en général.
- Speaker #0
Ce n'est pas ça. Et ce n'est pas parce qu'on a étudié en Europe... qu'on est carré. Moi, je connais des gens qui n'ont jamais quitté l'Afrique, mais ils sont tarés comme il faut. Donc, on oublie ça aussi. Et moi, à un moment donné, de prendre conscience de ça, réellement, et de prendre conscience aussi du fait que je ne vais pas changer le monde, je ne vais absolument pas changer le monde, mais que je peux contribuer. à une part du changement, même si je ne suis pas là demain pour voir la grande évolution, la victoire, la réussite, mais comprendre que juste être une part de ce changement, c'est tout aussi important, ça m'a donné la possibilité de comprendre la place que j'avais dans ce paysage-là. Et à partir du moment où tu trouves ta place, tu es un peu plus en paix avec toi. Ou en tout cas, tu es sur le chemin de la paix.
- Speaker #1
De la paix avec toi-même. Oui, bien sûr. Donc, quand tu as ce déclic-là, Tu arrêtes tout de suite les démarches pour la Suisse ? Est-ce que c'est comme quand tu as la conversation,
- Speaker #0
tu penses ? Oui, je réponds d'action, oui. De toute façon, il y avait des appels qui étaient en cours. Des appels parce qu'on te refuse une décision et tu peux faire appel à l'autre. Donc il y avait des appels qui étaient en cours. Mais moi, quand j'ai ce truc-là, moi, dans ma tête, c'est clair. Et je crois que je laisse passer la semaine. Je pense que j'ai laissé passer la... Je ne sais plus si j'ai laissé passer la semaine ou quoi. Mais les gens qui tentaient de bonne foi en plus, qui tentaient derrière de faire fonctionner la chose, à un moment, je leur dis laissez tomber. Et tout le monde ne comprend pas. Je sais que certaines personnes m'en ont voulu. Je le sais très clairement. Mais vous ne pouvez pas aller forcer le destin ou vouloir écrire une page Quand ce n'est pas votre tour d'écrire. Ce n'est pas possible, en fait. Et moi, la page qui devait s'écrire pour moi, elle commençait juste deux, trois pages plus loin. Donc, il fallait juste attendre, tu vois, que le vent tourne les pages et que j'arrive à celle qui était prévue pour moi pour pouvoir commencer mon histoire. Ce que ça m'a appris à ce moment-là, parce que c'est un moment... J'arrête de bégayer entre-temps, je ne me rends même pas compte, je ne me rends absolument pas compte, mais ce que ça m'apprend à ce moment-là, c'est que... C'est le terme qui est très à la mode, qu'on utilise beaucoup aujourd'hui, la résilience. Ça, comprendre que tant que ton heure n'est pas venue, ton heure n'est pas venue, mais qu'il faut que tu patientes, accepter, tout à l'heure je disais que accepter c'était bien, mais qu'il fallait comprendre aussi, je fais cette expérience-là. Et quand tu te retrouves devant, maintenant, on parle du cadre orthophonique, devant des parents, qui sont en difficulté avec leurs enfants, devant des patients, adultes ou autres, qui souffrent, qui ont fait un AVC ou qui essaient de retrouver la parole et qui attendent, qui cherchent, qui essaient de retrouver quelque chose qu'ils ont perdu. Si tu n'as pas vécu ces échecs-là avant, si tu n'as pas vécu ces frustrations-là avant, si tu n'as pas vécu ces temps de latence, ces moments de doute, Comment tu veux comprendre les personnes qui vivent ces choses-là ?
- Speaker #1
Bien sûr. Comment tu veux les remotiver ? Comment tu veux les booster dans le travail qu'ils font ? C'est ça.
- Speaker #0
Bien sûr. Tu dois, quelque part, avoir cette compréhension. Alors, on n'est pas en train de dire qu'il faut tout comprendre, qu'on sait ce qu'ils vivent. Non. Non, mais...
- Speaker #1
Mais assez de recul pour pouvoir au moins, comme tu dis, ne pas comprendre, mais avoir une image un petit peu de ce par quoi ils passent. et même pouvoir même leur donner des mots pour leur dire parce que toi tu as ce vécu là et leur dire moi aussi je sais par quoi vous passez parce que j'ai vécu ça et ça et ça et qu'ils se mettent en perspective par rapport à toi qui est le professionnel mais qui leur montre que tu restes comme tu disais tout à l'heure humain il y
- Speaker #0
a une chose que je vis très souvent avec beaucoup d'émotions d'ailleurs eux ils le savent pas maintenant qu'ils voient l'épisode ils le savent mais Merci. avec beaucoup, beaucoup, beaucoup d'émotions, c'est quand je retrouve certains jeunes, certains enfants qui, moi je les regarde, traversent un peu une période de leur vie, par exemple l'adolescence, et la meilleure image que je puisse avoir, c'est qu'ils ont la tête dans un nuage en fait, ils vivent, en fait ils ne vivent même pas, ils encaissent des trucs, ils sont passifs dans leur vie, les parents mettent la pression, les parents veulent qu'ils grandissent plus vite, il y a des choix sur l'orientation à faire. Ça ne va pas bien à l'école, ils n'ont pas d'amis, enfin, ou ils ont des amis, mais ils ne se rendent pas compte. Et eux, ils sont perchés loin, là-haut, comme ça. Moi, je me revois.
- Speaker #1
Oui, bien sûr.
- Speaker #0
Et quand tu es capable de te... Ça aussi, c'est hyper important. Quand tu es capable de te... En tant que thérapeute, en tout cas, dans ma discipline. Quand tu es capable de te reconnecter avec l'enfant que tu as été et d'accepter ce qu'il était en comprenant que tu as évolué, mais qu'il est là encore au fond, quand tu es capable de ça, quand tu y arrives, tu te connectes avec ces enfants.
- Speaker #1
Bien sûr. Parce que tu es un petit peu un miroir pour eux.
- Speaker #0
Ce qu'ils ne savent pas, c'est qu'eux sont un miroir aussi.
- Speaker #1
Bien sûr. Et eux te permettent de faire même ta propre thérapie aussi de toi, de ce que tu n'as pas pu sortir. À l'adolescence.
- Speaker #0
Alors ça, c'est intéressant parce que j'allais te dire, après, l'aspect professionnel veut que tu saches quand même t'arrêter là où tu dois t'arrêter. Parce qu'il y a quand même un travail. Ces gens viennent vers toi pour un travail. Mais quelque part...
- Speaker #1
Mais même si ça s'arrête dans le niveau professionnel, quand ils sont partis, toi, t'as des réflexions après le soir. T'as des trucs. Donc forcément, toi, même si le travail s'arrête une fois que le cabinet est fermé il n'est jamais vraiment fermé parce que toi tu rentres à la maison mais tu réfléchis,
- Speaker #0
tu cogites encore tout à l'heure tu parles juste avant de thérapie c'est là que je vais peut-être surprendre certaines personnes mais c'est là que beaucoup de thérapeutes ont besoin d'un thérapeute aussi non t'inquiète,
- Speaker #1
va pas trop vite,
- Speaker #0
on va en parler au moment où tu rentres à la maison à nouveau ça c'est mon process à moi au moment où je rentre à la maison l'exercice alors Quand j'étais tout seul avant, sans la famille, ce n'était pas un exercice que j'avais à faire. Parce que quand tu es tout seul chez toi, tu es encore quelque part dans cette énergie du boulot. Mais quand tu rentres chez toi et qu'il y a des préoccupations, occupations complètement différentes avec la famille que tu as fondée.
- Speaker #1
Ça te permet un peu de te détacher du...
- Speaker #0
Je ne sais pas si c'est ça qui te permet, mais moi, pour ma part, au moment où j'arrive à la maison, je coupe. Je coupe et je le fais très bien.
- Speaker #1
Non, t'inquiète, ça on va y arriver. Mais pour comprendre, tu prends ta décision de rester à Dakar. À Dakar, tu as dit que tu travaillais déjà dans un cabinet pendant cette période-là. Combien de temps ça met pour que tu lances ton... Parce que maintenant,
- Speaker #0
tu as ton cabinet depuis quand ?
- Speaker #1
Parce que tu as dit qu'on était en 2016-2017, tu as cette période-là.
- Speaker #0
2019, je crois. Je crois que je reste deux ans. Et en fait, je rachète le cabinet. Et à partir de là, j'imprime ma vision, la façon dont je vois. L'entreprise, parce que c'est une entreprise. Bien sûr. Évoluer. En tout cas, je mets les rails un peu de ce que je commence à voir. Et puis voilà, là, j'ai mon bébé.
- Speaker #1
La dernière question que j'aimerais te poser par rapport au parcours, par rapport à tout ça, avant d'arriver à aujourd'hui, je vais dire un petit peu les constats que tu fais, ce que tu fais aujourd'hui. Quand tu rachètes le cabinet, que tu mets ta plaque, ou je ne sais pas, ou j'ai fait la plaque, dans ce cas, que tu te dis, ça y est, j'ai mon cabinet à moi. C'est moi, l'orthophoniste, c'est moi. Je ne suis pas associé. Est-ce que tu prends le temps quand même de revenir au Christian qui prend cette décision-là et qui se dit, je vais devenir orthophoniste et qui se dit, ça y est, j'y suis. Est-ce que tu as le temps de savourer ? Pas du tout. Tu es déjà dans l'action et de ce que tu dois faire demain.
- Speaker #0
C'est drôle que tu me... En fait, non, je me suis... C'est drôle que tu me poses la question parce que je me suis jamais spécialement...
- Speaker #1
Posé la question ? Ouais. Parce que c'est difficile, parce que t'es déjà depuis deux ans en train de travailler, finalement. Donc oui, tout ce qui change, c'est que toi, tu mets juste peut-être... Tu changes juste un nom ou un truc comme ça sur peut-être une sonne.
- Speaker #0
Tu as parlé de la plaque juste, parce que pour moi, ça, c'est important. J'ai pas de plaque.
- Speaker #1
Ok.
- Speaker #0
J'ai pas de plaque. Il faut que ça arrive d'ailleurs, au passage. Parce que les gens ont besoin de se retrouver. Mais la raison pour laquelle je n'ai pas de plaque, c'est conscient, c'est que au moment où je récupère le cabinet, je reste dans l'idée, ça va paraître peut-être très bizarre, que je ne suis rien.
- Speaker #1
Ok.
- Speaker #0
Le fantasme du jeune diplômé qui ouvre son cabinet, c'est d'avoir son nom imprimé quelque part. Oui, c'est ça. C'est d'exister.
- Speaker #1
Parce que moi, en tant que patient ou en tant que personne qui bat ça, c'est ça, tu vois la plaque du gars. Oui,
- Speaker #0
voilà. Mais ça, c'est la perspective du patient, qui est tout à fait valide au passage. Tout à fait valide. Et puis, pour des raisons juste pratiques, en fait. Mais moi, à ce moment-là, l'idée... C'est de dire, reste bien accroché au sol. Moi, je peux te parler, tu me parles la première fois que j'ai fait ma... La première fois que j'ai exercé, la première fois que j'ai eu un patient. Moi, je me rappelle la première fois que j'ai vu mon nom sur Internet, ce que ça m'a fait. La première fois que tu avais ton nom sur Internet,
- Speaker #1
dans une liste d'ordophonistes. J'étais pas bien.
- Speaker #0
Pourquoi ?
- Speaker #1
J'étais pas bien parce que c'était la première fois que je voyais mon nom sur Internet. Et Internet, tu te dis, on connaît pas vie, c'est pas tout ça, cette histoire. Et je sais plus avec qui je dis, je me dis mais c'est génial. Et je dis, mais moi, je suis pas bien. Mais pourquoi tu es pas bien ? Et la personne avec qui je parle, je lui dis, mais en fait, j'ai peur. J'ai vraiment eu peur. Pareil, c'est aussi un moment charnière pour moi. J'ai eu peur de l'ego. L'ego, pourquoi ? Parce que... Tu vois, tu vois ton nom, tu mousses un peu.
- Speaker #0
Ça y est, je suis orthophoniste, je suis dans la liste.
- Speaker #1
Je suis là, je suis au milieu de tout le monde, c'est moi. Majuscule, gras, souligné, police 12.
- Speaker #0
Times New Roman.
- Speaker #1
Je suis personne. Et ce qui m'a, je pense, pendant très longtemps... sauvé, ce qui m'a maintenu affamé, ce qui m'a maintenu, ce qui me maintient encore, je pense, les pieds sur terre, c'est l'idée de me dire je ne suis personne. Je ne suis personne sans les personnes que je reçois. Je suis là pour elles. Et en réalité, le titre, la reconnaissance, et la reconnaissance aussi bien humaine que des compétences, vient de ces personnes. Moi, je ne suis personne. Rappelle-toi, Christian. Tu es là à cause d'un dessert que tu as aimé. Ouais.
- Speaker #0
Reste cool. Ouais.
- Speaker #1
Et la plaque, c'est pour ça qu'elle n'existe pas. Bon, après le podcast, par contre, on va commencer à faire cette plaque, parce que bon, quand même, à un moment donné, les gens, ils ont bien envie de savoir où est-ce qu'ils vont, tu vois. Donc ça, je comprends. Mais c'est juste pour expliquer comment, en fait, dans ma tête, ça se passe.
- Speaker #0
Comment ça fonctionne.
- Speaker #1
D'accord. Et pareil, quand je vois mon nom, en réalité, c'est là que je prends conscience, en fait. OK, là, c'est réel. Là, il y a des gens qui sont chez eux, qui vont cliquer, qui vont inscrire Internet. Il y a ton nom qui va apparaître. Tu es reconnu aux yeux du monde en tant qu'orthophoniste. Tu le sais comme moi. Avant, c'était pas ça. C'était autre chose. On te connaissait pour autre chose, sous un autre nom. Là, orthophoniste. Et c'est réel. Tu payes tes factures avec ça. Moi, c'est à ce moment-là que j'ai un peu mon... Ce moment de prise de conscience. C'est vraiment ça.
- Speaker #0
Et donc depuis 2019, tu as ton cabinet ici à Dakar. Et c'est là où je pense qu'on rentre vraiment dans le vif de la conversation. C'est quoi aujourd'hui ? ton plus grand constat. Aujourd'hui, c'est quoi ton travail au quotidien ? Quelles sont les... Est-ce qu'on dit des pathologies ?
- Speaker #1
On peut parler des pathologies.
- Speaker #0
C'est quoi les pathologies les plus récurrentes que tu traites aujourd'hui ? Et est-ce qu'aujourd'hui, il y a un sujet qui nous parle beaucoup ?
- Speaker #1
Aujourd'hui, en
- Speaker #0
2025. Oui, en 2025. Parce que là, tu as plus d'une dizaine d'années d'expérience. Parce que oui, tu as ton cabinet depuis 2019, mais tu as de l'expérience avant. Tu as une dizaine d'années d'expérience sur le terrain, ici à Dakar. Il y a quelque chose qui est très intéressant, que tu as dit tout à l'heure, c'est le fait de pouvoir parler trois langues. Tu vois, je trouve que, effectivement, est-ce que, tu vois, même dans les langues, parce qu'est-ce qu'il y a-t-il des différences ? de pathologie chez des enfants qui ne parlent que français, que des enfants qui parlent peut-être plusieurs langues. Tu vois, là, mon cerveau est en train de chauffer de tous les côtés. Mais aujourd'hui, on parle aussi beaucoup du sujet des enfants face aux écrans. Et pour moi, c'était le gros centre de notre discussion. Tu vois, donc c'est ça. C'est un petit peu, quel est le bilan que tu fais aujourd'hui ? de ces dizaines d'années ici au Sénégal ? Qu'est-ce que tu vois ? Les récurrences que tu vois ? Et on va rentrer un petit peu dans tout ça.
- Speaker #1
Je vais introduire la chose de cette façon. La reconnaissance de l'orthophonie, c'est une profession qui est jeune. C'est une profession qui est encore très très jeune. Les gens s'intéressent au métier aujourd'hui. Tout à l'heure, j'expliquais que le besoin existait déjà avant, mais on ne s'en rendait pas nécessairement compte. J'ai eu des parents qui ont eu à me dire... Ou à me faire gentiment la remarquer. Ah, mais vous savez, c'est à la mode aujourd'hui. Non, c'est pas que c'est à la mode. C'est juste qu'on est aujourd'hui en mesure, nous sommes aujourd'hui en mesure, de remarquer, de relever, de diagnostiquer des choses qu'on ne connaissait pas avant.
- Speaker #0
Quand tu dis que c'est jeune, tu dirais que l'orthophonie, c'est reconnu depuis combien d'années ?
- Speaker #1
Moi, j'ai envie de te dire, le premier orthophoniste ici, c'est la première trace d'orthophoniste.
- Speaker #0
Au Sénégal ?
- Speaker #1
Au Sénégal. Début des années 90.
- Speaker #0
D'accord. Alors que peut-être dans des pays européens, c'est depuis combien d'années que tu dirais ?
- Speaker #1
C'était pas... C'était guerre... c'est pas...
- Speaker #0
Beaucoup plus... Non, c'est à peu près les mêmes périodes.
- Speaker #1
On dirait ça. Ouais, d'accord. C'est les années 80,
- Speaker #0
si tu veux. D'accord. Donc, c'est un métier, je dirais, qui a... Très jeune. Il y a moins d'une trentaine d'années, à peu près. On est en 2025, 90.
- Speaker #1
Plus,
- Speaker #0
à peine.
- Speaker #1
Quelque chose comme ça. Ce n'est pas quelque chose de... Alors après, je vois le débat arriver. Oui, mais non, c'est 50 ans, c'est 60 ans. Non, on parle de globalement. Globalement, ce n'est pas assez. Dans les années 90, ce n'était pas spécialement connu. D'accord. Mais là, on est en 2025. Même dans les années 2000, on parlait d'orthophonistes. Il y en avait combien ici ?
- Speaker #0
D'accord.
- Speaker #1
Les gens qui étaient orthophonistes, qui exerçaient, ils avaient combien de patients sur une population de combien de personnes au Sénégal ? Qui connaissait cette pratique ? Qui connaissait cette profession ? Pas grand monde. C'est une profession que les gens connaissent parce qu'ils en ont besoin. Si tu n'en as pas besoin, la réalité est que tu ne connais pas. Oui,
- Speaker #0
si tu n'en as pas besoin, tu ne vas pas aller chercher.
- Speaker #1
Tu ne vas pas chercher, voilà. Donc aujourd'hui, la chose qui change, c'est qu'on essaie de faire un peu plus de prévention, on essaie d'en parler plus, parce qu'en réalité, on a la possibilité... grâce à la prévention et à la sensibilisation, de prendre en charge certaines choses, certains troubles, avant qu'ils ne soient, je ne vais pas dire avant qu'ils ne soient trop tard, mais avant que ces troubles soient plus pesants dans le coup. C'est ça en fait. Alors, pour moi, ça, c'est la première chose. Donc, le rapport de l'orthophonie à la population. Il y a autre chose aussi qui est importante, au Sénégal comme en Afrique, on va le dire comme c'est, c'est pas la peine de faire semblant. Pour beaucoup de personnes, jusqu'à aujourd'hui, c'est un truc de blanc, l'orthophonie. Oui. Pour beaucoup de gens, les troubles dont on parle, non, c'est ton enfant, il est juste mal élevé.
- Speaker #0
Non.
- Speaker #1
L'éducation a un rôle à jouer, mais très souvent, on parle de l'éducation des enfants, on ne parle pas de l'éducation des parents. L'éducation des parents fait partie aussi. Et c'est un sujet intéressant aussi. Mais ces choses-là font aujourd'hui que, en tout cas, les deux choses que je viens de citer, le lien entre les personnes, en dépassant Le fait que les personnes pensent que c'est quelque chose qui vient de l'Occident, qui ne concerne que les Blancs, et le fait que ce ne soit pas spécialement connu, déjà, ces deux critères, ces deux valeurs-là, font que la manière dont on va pratiquer l'orthophonie ici est très différente de ce qui se fait en Europe.
- Speaker #0
C'est comme, j'imagine, des psychologues ici. Exactement. Des psychologues, on va dire, c'est pour les Blancs, on ne va pas aller voir un psychologue.
- Speaker #1
Alors que oui, tout le monde en a besoin. Donc, c'est un peu ça.
- Speaker #0
Et un truc que je veux aussi peut-être corriger dans ma manière de parler un petit peu de l'orthophonie depuis tout à l'heure, c'est aussi, parce que tu as dit quelque chose de très important, ce n'est pas que pour les enfants. Non. Parce que tu as dit, il y a des gens qui ont eu peut-être un arrêt cardiaque, un AVC, peuvent avoir des difficultés après à parler. Et donc, tu fais de la rééducation aussi pour ces gens-là. Et c'est pour ça que pour moi, c'est important de comprendre quels sont les... Je ne vais pas dire les pathologies, les choses de ton quotidien. Qu'est-ce que tu fais au quotidien ?
- Speaker #1
Moi, personnellement, je vais recevoir beaucoup d'enfants pour des troubles du langage oral, des retards de langage ou de parole, pour des troubles de l'articulation, pour ce qu'on appelle les troubles myofonctionnels. Donc, c'est tout ce qui est positionnement de la langue, déglutition, ce genre de choses. Je vais avoir des patients AVC, qui sont en train de remonter la pente après un événement aussi dur que l'AVC. On va avoir au niveau du cabinet du traitement de la prise en charge des troubles autistiques. Et quoi d'autre encore ? Je n'ai pas oublié quelque chose. Du bégaiement, bien entendu, il y a du bégaiement aussi. Alors ça, on ne le fait pas nécessairement. Moi, je n'en fais pas beaucoup, mais chez les nourrissons, tu as aussi un suivi qui peut exister. après la période néonate, en fait.
- Speaker #0
OK.
- Speaker #1
Pour tout ce qui est troubles de la sucion, par exemple, pour s'assurer que le nourrisson est-être correctement,
- Speaker #0
ce genre de choses. D'accord.
- Speaker #1
Ça compte aussi. Donc, on ne s'occupe pas que d'une catégorie d'âge.
- Speaker #0
Et ce n'est pas que la parole. Parce que comme tu parles des nourrissons, avec la sucion,
- Speaker #1
ce n'est pas que la parole.
- Speaker #0
Parce que ça, beaucoup de gens vont penser que l'orthophonie,
- Speaker #1
c'est juste la parole.
- Speaker #0
C'est juste la parole. Non,
- Speaker #1
ça peut toucher à la déglutition, par exemple. Tout à l'heure, je parlais de la déglutition chez les adultes. mais quand on parle des troubles de la succion Chez le non-vissuant, c'est l'alimentation aussi.
- Speaker #0
Ok.
- Speaker #1
Donc, on s'en occupe aussi.
- Speaker #0
D'accord. Et moi, la question aussi que je voulais te poser, c'est parce que tu commences à pratiquer avant 2020.
- Speaker #1
Avant le Covid. Oui, oui,
- Speaker #0
oui. J'imagine que pour votre profession, parce que c'est un des sujets, c'est comme je dis, je le répète, c'est le sujet qui m'intéresse vraiment beaucoup, parce qu'on parle beaucoup de ça depuis quelques années, les enfants face aux écrans. J'imagine inconsciemment qu'entre avant Covid et cette année où les gens restent enfermés, et encore, bon, je veux dire, nous au Sénégal, on n'a pas vécu ça comme les autres pays, mais est-ce que tu vois un avant et après Covid dans ton cabinet ?
- Speaker #1
Absolument.
- Speaker #0
Et c'est quoi le avant et c'est quoi le après ?
- Speaker #1
Je vais aller même plus loin. Au moment où le Covid arrive, Avec certains collègues, on a la discussion. Tout le monde n'est pas d'accord, mais on a cette discussion.
- Speaker #0
Déjà ? Oui. Vous le savez que vous devez anticiper qu'il va se passer quelque chose ?
- Speaker #1
En fait, anticiper, je ne sais pas comment tu anticipes, mais en tout cas, tu te dis qu'il y a des chances que quelque chose arrive. Oui. De différent.
- Speaker #0
Oui.
- Speaker #1
Quand on se fait cette remarque, en fait, ça part d'un constat très simple. Comme je disais tout à l'heure, la société évolue. nos modes de consommation évoluent et les troubles évoluent. À partir du moment où les troubles évoluent, les diagnostics et la rééducation évoluent. Et si, en tant que thérapeute, en tant que professionnel, on n'est pas en phase avec ces évolutions, on ne peut pas suivre. Qu'est-ce qui se passe ? Je vais donner un exemple très concret concernant l'avant-après-Covid. Quand on parle d'avant-après-Covid, on ne va pas faire semblant, on ne va pas teaser plus longtemps, mais on parle souvent des écrans. Parce que là où on observe un impact des écrans qui ont été beaucoup plus utilisés dans la période du Covid du fait de la structuration des familles, du fait du mode de fonctionnement des couples et des familles, on a un impact sur la parole. Donc, en réalité, les enfants qui sont nés dans cette période du Covid et qui arrivent, on va dire en 2020, qui arrivent en fin 2021, je vais même dire 2022, 2022 et 2023, sont les enfants qui sont en âge de parler. On se rend compte à ce moment-là que ces enfants... présentent de plus en plus les signes de retard de langage.
- Speaker #0
D'accord.
- Speaker #1
Mais ce qui est intéressant, ou en tout cas ce qui est assez frappant, c'est que ce n'est pas, en tout cas moi c'est mon sentiment, ce n'est pas un retard de langage comme on l'a vu avant. Ok. Le retard de langage qu'on observe est un retard de langage qui présente... dans beaucoup de situations, des aspects, des ressemblances avec un tableau autistique.
- Speaker #0
D'accord.
- Speaker #1
L'erreur qu'on peut tous commettre à ce moment-là, c'est de penser que ces enfants sont juste autistes.
- Speaker #0
Ok. Alors, pour le grand public, parce que tu veux dire que nous, on a besoin de comprendre. C'est-à-dire qu'avant, un enfant qui venait te voir avant le Covid, qui avait des troubles de langage, Comment tu discernes qu'il a des troubles de langage ? Quels sont les marqueurs pour qu'un parent sache qu'il a un trouble de langage ?
- Speaker #1
Ça peut être déjà un retard ou ça peut être un trouble, c'est deux choses différentes. Tu as une évolution, une évolution chronologique. Donc de zéro à deux ans, de zéro à un an, de zéro à quelques mois, il y a quelque chose. À partir d'un certain âge, en termes de mois, l'enfant va gazouiller. Ensuite, il va commencer à faire des syllabes. Ensuite, il va commencer à essayer de prononcer des mots. Et puis petit à petit, il va te présenter des productions qui ont une structure de phrases, même si ce ne sont pas des phrases complètes. D'accord. Mais avec des mots qui sont construits, mais qui ne sont pas bien articulés. ou produit correctement et petit à petit ça change et autre.
- Speaker #0
D'accord.
- Speaker #1
Là où nous on arrive à faire ce discernement et à poser un diagnostic, c'est à travers la pratique de ce qu'on appelle le bilan orthophonique. Donc on reçoit un parent, c'est la première chose qu'on fait. On reçoit un patient en général, on fait un bilan orthophonique. Le principe du bilan orthophonique c'est de faire un état des lieux de ce qu'on observe par rapport au stade développemental du patient. D'accord. L'enfant que j'ai devant moi à tel âge, à tel âge, je sais qu'il est censé se situer à tel niveau. D'accord. Il est ici, il est là, et là, on a une idée. D'accord. Est-ce qu'il est dans la moyenne ? Est-ce qu'il est dans la moyenne positive, négative ? Est-ce qu'il est légèrement en dessous ? Est-ce que c'est faible ? Est-ce que c'est déficitaire ? Et à partir du moment où c'est déficitaire, c'est chiffré, tout ça c'est avec des écarts-types, c'est avec des tests métrés À partir du moment où on est dans la déficience, on est dans le trouble. D'accord. Donc, c'est là qu'on va faire la différence entre le retard, le retard simple ou léger, et le trouble.
- Speaker #0
D'accord. Mais quelle est la différence entre ce que vous voyez là et... Ce qui fait que là, on approche de troubles, comme tu as dit, à caractère autistique, c'est ça ?
- Speaker #1
Tu vas avoir, par exemple, des enfants qui vont présenter des retards de langage. Donc, on parle des enfants qui sont exposés aux écrans. Tu vas avoir des enfants qui vont présenter un retard de langage, mais tu auras aussi une espèce de composante... Je ne sais pas si je peux dire comportemental, mais tu vas avoir des enfants qui vont criser, par exemple, quand tu vas éteindre la télé. Tu vas avoir des enfants qui, quand je parlais du tableau clinique de l'autisme, je ne vais pas citer tous les traits, mais des enfants qui ne vont pas te regarder dans les yeux, des enfants qui ne vont pas répondre quand tu les appelleras, des enfants qui vont être dans leur bulle, qui ne vont pas parler. Alors que les parents vont t'expliquer, et ça en fait même au téléphone, on le détecte quand les parents appellent pour prendre le rendez-vous, le parent va te dire, c'est bien que je le dise comme ça d'ailleurs, le parent va t'appeler en te disant, je ne comprends pas, mon enfant, il a un retard de langage, il ne parle pas. Mais par contre, il connaît tout l'alphabet, il sait compter en russe, il connaît tous les épisodes de Dorale Exploratrice, il connaît toutes ses chansons. Quand il y a des chansons, il les répète. Et moi, en fait, sur ces éléments-là, je me dis, mais en fait, je suis en présence d'un parent qui est en train de m'expliquer que son enfant reproduit ce qu'il regarde. C'est tout.
- Speaker #0
Alors, c'est là où ça m'intéresse beaucoup. Parce que, moi, je vais te parler de mon cas concret. 2020, on a notre fille. Je me rappelle, on est, comme tous les parents, non, notre enfant, on ne va pas la mettre devant les écrans avant 3 ans, non, on va éloigner les écrans. Et pour que les gens comprennent bien, Karel est dans la pièce. Karel est en train d'écouter le podcast. Vous ne l'entendez pas, mais elle est là, elle est là dans la pièce, donc elle peut interagir à n'importe quel moment. Mais donc, on est ce type de parents. Mais moi, je me rappelle parfaitement du jour où je laisse... Kélina, devant un écran. Parce que cet écran me sauve à ce moment-là. Quand je dis il me sauve, c'est-à-dire que je suis seul avec elle dans la maison. Je ne sais plus, je pense que Karel avait voyagé pour le travail et tout. Je dois me doucher. Je dois me doucher. Ça fait depuis 6h30, 7h du matin que je suis debout. Je dois me doucher et je cherche comment faire pour que ma fille, je puisse avoir un 10 minutes. même pas un 10 minutes, un 5 minutes, pour pouvoir aller me doucher très rapidement. Elle a un parc. Donc je sais que dans le parc, elle est dans un univers sécurisé. Elle ne va pas sortir. Mais qu'est-ce que je fais pour qu'elle soit attentive à quelque chose ? Et dans ma tête, c'est je lui chante toujours un siphon, fond, fond, un siphon, fond, fond. Peut-être que si je mets ça à la télé, ça va la captiver et elle va me laisser ce 5 minutes. Je teste. Je vais dans la douche, je laisse toutes les portes ouvertes. Je suis dans la douche, mais toutes les 30 secondes, je sors la tête pour vérifier que tout va bien et elle se douche. Et là, je me dis, OK, j'ai trouvé une astuce pour que ma fille soit... J'ai pu savoir un petit temps. J'ai aussi le truc de... Comme tu dis, elle évolue et je vois qu'effectivement, elle commence à... Moi, je me rappelle un jour, Kélina, elle est en train de marcher dans le couloir et elle dit 1, 2, 3, 4, 5, car elle qui crie, qui me dit, mais Olivier, Kélina, elle a compté. On ne lui a pas appris à compter. Donc, nous, on sait qu'il y a des choses... que la télé, que les écrans lui ont appris. On n'a jamais été, effectivement, on a toujours essayé de faire attention à comment on l'expose face aux écrans. On a toujours été à faire attention à, non, il ne faut pas trop qu'elle regarde trop, il ne faut pas qu'elle regarde trop. Mais regarde, on est au salon, il y a la télé. Carrément, on est sur nos téléphones, elle nous voit sur nos téléphones. On ne veut pas qu'elle fasse, mais elle nous voit tout le temps. sur le téléphone et encore plus que nous, parce que nous, c'est notre activité, c'est notre travail. Et on sait que quand même... Donc, ce que tu me disais là tout de suite, c'est que finalement, ce que nous, parents, on pense que la télé lui apprend, en fait, elle ne lui apprend pas. Elle fait juste de la répétition. Et c'est là où l'erreur que les parents... Il ne faut pas se faire, c'est de se dire que la télé lui apprend quelque chose.
- Speaker #1
Exactement. Par rapport à l'aspect de la répétition, c'est super important et c'est très intéressant. La télé mène l'enfant à la répétition, certes, mais nous, ce qu'on veut, c'est un enfant qui communique. Là, on est en train de communiquer. Je parle, tu es en train d'écouter, après tu parles et moi j'écoute, et ainsi de suite. La télé ne fait pas ça. La télé...
- Speaker #0
La télé ou le téléphone...
- Speaker #1
La télé ou le téléphone, les écrans. Tu fais bien de relever d'ailleurs, merci. Ne fait pas ça. La télé donne, l'enfant absorbe, et c'est tout. Et il n'y a pas d'utilisation ou de répétition. de ce que l'enfant... Il n'y a pas d'utilisation de répétition de ce que l'enfant entend qui est fait correctement dans un contexte de communication par la suite. Donc on n'est pas dans la communication. Et à partir du moment où on n'est pas dans la communication, à partir du moment, pour revenir juste à l'exemple d'avant, où on a un enfant qui ne parle pas, qui est au milieu de gens, qui ne parle pas, qui ne s'exprime pas, mais qui est capable de reproduire... nous, on se rend compte qu'on est face à un retard, on est sur quelque chose au niveau du langage, et que c'est la télé qui est impliquée. Et ce type de choses, en fait, s'ils existaient avant, n'existaient pas autant qu'aujourd'hui. Donc ça fait partie de ce qu'on voit aujourd'hui.
- Speaker #0
D'accord.
- Speaker #1
La notion de la télé qui apprend des choses aux enfants, parce que tu comprends, ce sont des programmes éducatifs et autres, des programmes éducatifs, pardon, et autres, C'est pas quelque chose qui est... Comment dire ? C'est pas quelque chose qui est nouveau. Alors, avant d'aller plus loin, il y a une chose qui est importante que je fais souvent quand on a ce type de discussion, c'est de dire voilà, le but c'est pas de culpabiliser des parents. Le but c'est pas... Parce qu'être parent c'est très difficile.
- Speaker #0
Ah non, c'est pas simple.
- Speaker #1
C'est très très très difficile. Le but c'est pas de culpabiliser des parents. Le but c'est pas de dire à des parents qu'ils font mal les choses. Le but c'est juste de... réajuster certains comportements. Tout à l'heure, on a parlé d'éducation des enfants, moi je parle d'éducation des parents. Dans l'exemple que tu donnes quand tu dis les parents sont sur le téléphone, c'est l'une des premières choses à arrêter. C'est l'une des premières choses à arrêter pour une raison très simple. On a aujourd'hui une chose qui, pour moi, en 2025, est la monnaie la plus chère au monde. C'est le temps. On court tous après le temps. On n'a jamais le temps. On est sur nos téléphones parce qu'on travaille, parce qu'on n'a pas le temps. Parce qu'après, il faut faire la cuisine, parce qu'après, il faut aller dormir, parce qu'après, il faut se lever parce qu'on n'a pas le temps. Il faut aller travailler et autres. Je comprends. Mais il faut trouver du temps. Et ça commence par mettre les téléphones de côté et profiter du temps qu'on a en famille. Je vais parler de la relation aux enfants. Les enfants, en réalité... aiment la télé parce que c'est la télé qu'ils ont par défaut. Mais un enfant qui n'a pas plongé encore dedans préférera toujours faire autre chose avec ses parents, ou jouer, ou s'amuser, qu'être devant la télé. C'est nous qui en avons fait une nounou par défaut.
- Speaker #0
C'est ça, c'est nous qui créons ce besoin-là chez l'enfant.
- Speaker #1
Quelque part. Et puis, on est aussi on est aussi encouragé quelque part par une société de consommation dans laquelle quand on regarde aujourd'hui l'offre, je ne parle même pas de l'offre de chaînes télévisées, avec des chaînes de dessin animé 24 heures sur 24, avec la possibilité pour ces enfants d'avoir iPad, tablette, téléphone, écran dans tous les sens. On n'avait pas ça. Bien sûr. Alors, quand je dis on n'avait pas ça, je ne suis pas là en train de parler comme le vieux qui n'est pas content. Non, c'est qu'on fonctionnait différemment. Il y a une remarque qui m'a été faite, qui était très intéressante par un papa. à qui j'exposais justement quelque chose concernant son enfant qui se retrouvait dans une situation de retard de langage, dans un contexte de ce qu'on appelle aujourd'hui le syndrome épais, le syndrome épais, E-P-E-E, et l'exposition précoce aux écrans.
- Speaker #0
D'accord. Précoce, c'est à partir de quel âge ? C'est quoi ? vous, vous recommandez qu'un enfant peut commencer à consommer, entre guillemets, de l'écran à partir de quel âge ?
- Speaker #1
Nous, on ne recommande même pas qu'un enfant consomme de l'écran.
- Speaker #0
Oui,
- Speaker #1
j'imagine. Pour moi, c'est important de le spécifier comme ça, mais par contre, alors, les gens vont te dire que l'OMS dit à partir de 3 ans, moi j'ai tendance à dire à partir de 4 ans, d'avant. Pour une raison très simple.
- Speaker #0
C'est parce que c'est tellement dur. C'est-à-dire que... Toi, tu recommandes aujourd'hui à des parents, si vous pouvez éviter que votre enfant consomme de l'écran jusqu'à 4 ans, qu'il évite tout écran. C'est-à-dire que même vous, en tant que parent, quand vous regardez le journal télé ou des choses comme ça, qu'il ne consomme pas.
- Speaker #1
Je ne regarde pas la Ligue des champions. Je ne regarde plus la Ligue des champions. Tu sais pourquoi ? Parce qu'on a une règle à la maison. Il n'y a pas de télé.
- Speaker #0
J'allais te demander justement, comment toi, orthophoniste,
- Speaker #1
comment tu fais avec ça ? C'est une excellente question. Ce que je vis, enfin, je ne prêche pas un truc que je ne fais pas. À la maison, il n'y a pas de télé. D'accord. Pardon, attends, je rectifie. Sauf le mardi soir.
- Speaker #0
OK.
- Speaker #1
Parce que la patronne de la maison a droit à son programme.
- Speaker #0
Salut la patronne, je vais pas dire, on se sait, on se sait.
- Speaker #1
Mais,
- Speaker #0
c'est quoi son programme ?
- Speaker #1
C'est Koh-Lanta.
- Speaker #0
Oh, je savais en plus !
- Speaker #1
Est-ce que tu t'imagines que... Moi,
- Speaker #0
j'ai interdit la Ligue des Champions pour...
- Speaker #1
Non, elle ne m'interdit pas. Non, moi, j'ai juste dit, elle était d'accord, on ne regarde pas la télé à table. On ne regarde pas la télé à table. On n'a pas grandi avec la télé à table. D'accord. Mais, bon, Koh-Lanta... Elle regarde Koh-Lanta, ce n'est pas bien grave. Alors, je suis en train de dire non, non, non aux écrans, et là, je dis, ce n'est pas bien grave. C'est quoi la différence ? enfin la différence où se situe la tolérance à partir du moment où ton enfant 3 ans, 4 ans à mon sens tout ce que je dis n'allez pas dire que j'ai dit que c'est moi qui parle je peux me tromper voilà c'est pas les orthophonistes du monde c'est Christian Nanga non parce que les gens les gens sont rapides sur les mots il a dit que dans 10 ans on va dire que j'avais dit que dans 10 ans ça aura évolué pardon doucement Donc, à partir du moment, pour moi, où on a un enfant qui est capable de circuler dans une pièce pendant que des adultes regardent un programme qui est adapté, au passage, et qui vit sa vie, qui fait ses jeux, qui circule et qui n'est pas obnubilé par l'école, et qui ne regarde même pas l'école,
- Speaker #0
qui ne reste pas statique et arrière,
- Speaker #1
que ça ne l'intéresse pas. vous avez réussi quelque chose d'intéressant. Vous avez réussi en fait à lui donner une option différente que la plupart du temps, il préférera à la télé.
- Speaker #0
D'accord, parce que c'est très intéressant ce que tu dis. Excuse-moi de te demander, mais c'est parce que concrètement, nous, c'est ce qu'on vit à la maison. C'est-à-dire que Kélina, quand elle rentre de l'école, elle rentre de l'école, je regarde ESPN en anglais. Basket, nous a... Elle n'en a rien à faire. Elle ne s'assoit même pas pour regarder, elle ne me pose pas de questions par rapport à ça. Elle fait la roue, 400 roues dans le salon. Elle me fatigue 10 000 fois pour me dire « Papa, donne-moi une feuille, des crayons, parce que je veux faire ci, des trucs comme ça. » Même finalement, je constate, même quand des fois, elle nous demande, parce que bon, tu vas me taper peut-être sur les doigts, elle a 4 ans et demi, elle a une tablette. Mais elle a une tablette, elle a le droit de la regarder que le week-end, pas la semaine, et voilà. Mais elle a quand même une tablette. Mais quand elle a sa tablette... Même quand on lui donne, elle va regarder 5 minutes et elle va aller faire autre chose. Tu vas lui dire, on éteint la tablette, vu que tu ne la regardes pas. Elle va dire, non, je la regarde. Elle va revenir 2 minutes et elle va partir, elle va faire autre chose, tout et tout. Il n'y a que quand elle mange, si jamais tu lui laisses la tablette pendant qu'elle mange, ou là par contre, elle est focus sur la tablette. Tu vois ? Mais aujourd'hui, je regarde, elle a sa petite sœur qui est là. Moi, c'est la petite sœur qui me fait peur. Pourquoi ça me fait peur ? Parce que la petite sœur, ça va être encore pire parce qu'elle voit les parents sur le téléphone et elle voit sa sœur sur la tablette. Et moi, je me demande, c'est plus elle que j'ai peur de comment la protéger face aux écrans. Tu vois ?
- Speaker #1
On va reprendre juste, tu as parlé de toi qui arrives. qui est devant ESPN. Et elle, elle fait quoi ?
- Speaker #0
Elle fait la roue. Elle me demande des feuilles. Elle me dit, papa, je veux jouer avec toi. Je veux jouer.
- Speaker #1
C'est là que j'arrivais, en fait. En fait, il faut comprendre que dans ces moments-là, ce n'est pas parce que nous... Je vais le dire autrement. Je répète, c'est dur d'être parent. C'est vrai, ce n'est pas facile. Mais la réalité est que... Et si on y arrive, on réussit un grand truc. On réussit. C'est la Ligue des champions. Si vous êtes dans votre espace en train de regarder la télé et que votre enfant arrive et qu'il a ce comportement-là, comprenez qu'il y a un appel en fait. Alors qui plus est quand elle est capable de verbaliser. Et ciao ESPN quoi. C'est hyper important. Pourquoi ? Parce qu'à partir du moment où elle a cette relation que tu continues de nourrir dans le jeu avec elle, Tu prends ta place en fait en tant que parent. Pas toi spécifiquement, le parent prend sa place. Ça fait partie des premiers, enfin des premières, ça fait partie des outils ou des moyens d'endiguement du phénomène. La tablette à table pour moi, c'est un moment de convivialité, c'est le moment où on se nourrit. Les diététiciens et les nutritionnistes t'en parleront en te disant que ce n'est pas top même pour la fonction nutritionnelle, on va dire. et puis derrière, c'est le week-end, tu parles de... Elle allume, elle regarde, elle va faire autre chose. Et en fait, quand tu lui dis que tu vas éteindre, non, j'en ai besoin encore. Elle n'en a réellement pas besoin, en fait. À partir du moment où elle n'en a pas réellement besoin, pour moi, ça n'a pas lieu d'être là. Là, littéralement, ta fille te montre qu'elle est capable de faire autre chose, qu'elle est intéressée réellement par d'autres choses. Donc, c'est...
- Speaker #0
c'est positif, parce que ça veut dire qu'elle s'intéresse à des choses différentes, mais on va avoir des situations dans lesquelles certains parents n'ont pas la possibilité, n'ont pas la chance, entre guillemets, d'avoir un enfant qui va s'intéresser à d'autres jeux. Et eux, c'est la tablette tout le temps. Et le problème, c'est quoi ? C'est que quand tu dis il faut arrêter, on te dit oui, mais il va faire des crises. Ouais. Écoutez, vous avez le choix. Soit on arrête et on fait les crises maintenant, soit on continue, mais on parle d'un avenir qui sera un peu plus compliqué. D'accord.
- Speaker #1
Donc, un premier signe d'avertissement pour un parent, c'est que si quand tu retires... la tablette ou l'écran à l'enfant et qu'il se met à faire une crise, c'est un warning.
- Speaker #0
Mais on est dans une situation d'addiction. Le mot est gros. Tu lui as retiré un truc, il roule. ils roulent,
- Speaker #1
ils crient c'est quoi les warnings pour les parents donc la crise que peut faire un enfant on est déjà important il y a des warnings après ça ?
- Speaker #0
le fait qu'il y ait une télé, que ton enfant soit là complètement absorbé par la télé tu l'appelles, il répond pas c'est pareil, ça doit pas arriver c'est compliqué mais il faut pas que ça arrive à quoi d'autre je peux penser ? le fait que le fait tiens j'en ai un autre le fait que ton enfant qui parle pas encore sache scroller ok Je m'excuse de le dire comme ça. Ce n'est pas un talent. J'allais dire que ce n'est pas un motif de fierté. Ce n'est pas un talent. Ce n'est pas génial. Il sait scroller, il ne sait pas parler. Ça veut dire qu'il est beaucoup avec le téléphone.
- Speaker #1
Ça veut dire qu'il a développé une habitude.
- Speaker #0
Soit il a développé une habitude, soit il t'a beaucoup vu scroller. Mais en tout cas, ça va, il sait le faire. Donc, ce n'est pas top. Et puis... À quoi est-ce que je pense ? Je ne sais pas si j'ai d'autres choses, peut-être qu'en commentaire ou des gens la remarquent ou te reposeront là. Mais ça,
- Speaker #1
c'est déjà des signes, en tout cas, où en tant que parent, tu dois te remettre peut-être en question ou tu dois faire attention et te dire il y a peut-être trop de consommation et il faut peut-être couper.
- Speaker #0
Et puis, autre chose, les dessins animés avec l'idée que c'est éducatif, non, c'est un piège, ça, pour moi. C'est un vrai grand piège. Il y a... Alors, je vois... Tout à l'heure, j'avais commencé à parler de ça, mais je ne sais pas pourquoi j'ai rebondi sur autre chose. J'ai reçu un parent dont l'enfant était concerné par cette situation. Et quand j'ai commencé à lui parler des écrans, il m'a fait une remarque. Il m'a dit, oui, mais les enfants d'avant, mes enfants, donc les plus grands, les enfants à des grands-frères et grandes-sœurs, les plus grands n'ont pas eu ce problème-là et pourtant, ils regardaient la télé. D'accord, mais ce n'est pas parce qu'un comportement, ce n'est pas parce qu'un mauvais comportement... ne vous a pas impacté durement.
- Speaker #1
Ça ne peut pas arriver au deuxième.
- Speaker #0
Exactement.
- Speaker #1
C'est pour ça que je te dis que moi, pour notre deuxième fille, ça me fait peur.
- Speaker #0
Mais là où, dans le cas de ta deuxième fille, ce qui est important, ou plutôt ce à quoi il faut faire attention, c'est qu'elle, elle va arriver, elle est déjà dans un environnement où tout le monde a un écran autour. C'est ça.
- Speaker #1
C'est pour ça que ça me fait peur.
- Speaker #0
Et alors, on va commencer par une chose très simple. Si on veut endiguer, là... On fait disparaître les écrans. C'est la première chose. On fait disparaître les écrans complètement. C'est très compliqué, je sais bien. Voilà, c'est très compliqué, mais je vais te donner un exemple. Maison, repas, pas de télé. La télé, elle s'allume quand l'enfant n'est plus là. OK, ça c'est un... J'ai eu... Alors après, tu vas avoir... Je ne suis pas là pour taper sur les doigts des gens. Tu as peut-être des moments où tu vas regarder la télé avec ton enfant. Si tu as... Un enfant qui se rapproche ou qui est en âge de regarder la télé, il y a des règles, il y a des façons de regarder la télé. D'abord, c'est regarder un programme adapté, ça c'est la première chose. De préférence de type Ligue des champions et NFL. Et NBA, bien entendu.
- Speaker #1
C'est très important.
- Speaker #0
On a des projets, on va sur nos retraites quand même.
- Speaker #1
Oui, des fois, on diverge, on diverge, ne vous inquiétez pas. Non, mais c'est vrai, mais tu vois aujourd'hui, Moi, quand je mets mon basket, je me dis que ça ne l'intéresse pas. Est-ce que c'est un piège ? Ça, pour justement entendre les parents.
- Speaker #0
Le truc, l'enfant qui est plus ou moins en âge, vous regardez ensemble, tu es censé communiquer avec lui. Au moment où tu communiques, je vais te donner un exemple concret. Tu regardes la finale de la Ligue des Champions, tu regardes une finale NBA, et tu es avec ta fille ou ton fils, et tu regardes avec lui, et littéralement, tu dis tout ce qui se passe. Tu commandes, en fait.
- Speaker #1
Ok.
- Speaker #0
Tu commandes, d'accord ? À ce moment-là, tu es dans une situation où tu crées une situation de communication avec ton enfant. D'accord. À ce moment-là... La télé devient un outil.
- Speaker #1
D'accord.
- Speaker #0
Elle n'a pas la fonction toute puissante qu'elle a quand elle règne dans la pièce toute seule et qu'elle parle toute seule et que c'est elle que tout le monde regarde et que point barre. Ça, c'est une chose. Maintenant, ce n'est pas pour autant qu'il faut aller se mettre devant la télé et dire je vais commenter tout ce qui passe et puis ça ira très bien. Non.
- Speaker #1
Mais moi, ce que je me dis, c'est que tu vois, il y a beaucoup de parents qui doivent se dire regarder un match de foot, regarder un match de basket, ça ne va pas l'intéresser l'enfant. Il n'y a pas de couleur, il n'y a pas de bruit. Est-ce que c'est un piège de penser comme ça ? De penser qu'il n'y a que des dessins animés, qu'il n'y a que des choses qui vont les intéresser, vu que ce n'est pas de leur âge, ils ne regarderont pas ?
- Speaker #0
Tu peux réfléchir comme ça, mais quelque part, pour moi, ça reste un piège. Tout à l'heure, tu parlais des couleurs. Aujourd'hui, il y a une chose... Je fais un comparatif. J'ai regardé la télé récemment avec un petit, qui était en âge de regarder la télé, et qui me... Donc je lui dis, je vais te montrer, on va regarder un dessin animé que moi je regardais quand j'étais plus jeune. Et on met un dessin animé, je dirais pas c'est quoi le dessin animé, mais on met un dessin animé, et moi je me fais un... Je fais un constat.
- Speaker #1
Est-ce que c'est un dessin animé où les bonhommes ont les cheveux qui deviennent jaunes à un moment ?
- Speaker #0
Non, c'est pas ça. C'est plus ancien que ça. En fait, c'est une émission, vraiment. On regarde l'émission, donc avec des épisodes, et on regarde un épisode de cette émission, et à la fin, je me fais une remarque, je me dis, tiens, l'émission a duré 12-13 minutes. En 12-13 minutes ? On a regardé deux dessins animés dans cette émission et la marionnette entre les dessins animés, deux, trois dessins animés, et il y avait une marionnette qui parlait avec une animatrice. Et donc moi, à ce moment-là, je me dis, purée, on regardait des programmes entiers de 12 minutes, là où aujourd'hui, les enfants vont regarder 45 minutes à une heure de temps chaque jour. Et une heure de temps, c'est peu. D'accord ? Deuxième chose. Les programmes que nous nous regardions, quand tu regardes par exemple la composition en termes de couleurs et autres, n'ont rien à voir avec ce qu'on regarde aujourd'hui. Dernière chose, les écrans sur lesquels on regardait la télé n'ont rien à voir avec les écrans sur lesquels on regarde la télé aujourd'hui. Nous, nos téléphones, les smartphones ont tous une fonction filtre bleu. Oui. Ok ? On va en parler 30 secondes parce que c'est important. Quand tu vas te coucher le soir ? Enfin, même pas quand tu vas te coucher, à 22h. Tu la mets, la fonction filtre bleu, par exemple ? Tu peux ? Pourquoi est-ce que tu la mets ? Je ne sais pas si tu la mets. Bon, les gens qui la mettent, la plupart du temps, c'est parce qu'ils veulent... Donc, cette fonction est censée atténuer pas les reflets, mais l'impact de la luminosité et diminuer et permettre de ne pas exciter le cerveau parce que dans la lumière qui arrive, je ne vais pas rentrer dans les caractéristiques techniques maintenant, mais dans la lumière qui est absorbée par notre cerveau, on va avoir des éléments qui vont juste l'exciter. Donc au moment d'aller dormir, on n'est pas censé les avoir, on n'est pas censé être confronté à ces éléments. Donc ça, ça nous dit qu'au moment où on crée le téléphone, au moment où on commercialise nos jolis téléphones, les constructeurs prennent ça en considération. D'accord ? Pour nos cerveaux, pour nos cerveaux d'adultes. Et vous allez imaginer... que si sur nos cerveaux d'adultes, cette lumière, cet écran, a un impact au point où on crée une fonction pour l'atténuer...
- Speaker #1
Imagine sur le cerveau d'un enfant qui n'est pas formé, qui n'est pas fini. Oui, effectivement.
- Speaker #0
Tu vois ? Donc, à partir de ce moment, tu commences à regarder le truc différemment et à te dire, ce n'est peut-être pas tant le programme, c'est peut-être l'objet en réalité. Et là, la discussion, elle shift, et tu commences à te dire, OK, c'est l'objet qu'il faut bannir. Le programme, je n'ai rien contre, mais c'est l'objet qu'il faut bannir. Maintenant, si on est dans on est à un âge comme j'ai dit tout à l'heure on peut regarder on a des règles à mettre en place on a eu à en parler on a fait une on a communiqué pas mal sur les écrans sur les réseaux sociaux en ce sens et les infos sont encore là est dispo mais tu as un âge petit on va te dire que voilà l'enfant il ya quand même une période où on estimait que 20 minutes sur 20 ou 30 minutes sur deux trois jours c'était déjà pas mal ok aujourd'hui quand tu regardes les parents moi qui me parle de des difficultés qu'ils ont avec les écrans il leur enfant il regarde pas 30 minutes sur trois jours. et regarde, plus de 30 minutes. C'est beaucoup plus. Donc, on a aussi une notion de comment est-ce qu'on leur fait consommer ça.
- Speaker #1
Alors, idéalement, aujourd'hui, dans un monde parfait, comme tu as dit, de 0 à 4 ans,
- Speaker #0
il ne faut pas de télé.
- Speaker #1
Un enfant qui a 4 ans, au-dessus de 4 ans, c'est quoi que tu pré-cotises aujourd'hui ?
- Speaker #0
Je ne sais pas, je dirais qu'il peut regarder la télé
- Speaker #1
Parce que le cerveau est en construction jusqu'à quel âge ?
- Speaker #0
Il continue pendant longtemps. Mais déjà, je dirais que l'enfant peut regarder déjà à la télé. Parce qu'il y a des moments aussi pour regarder à la télé. Donc je dirais en rentrant de l'école. Ça ne me choque pas. Pas tous les jours. Et je dirais... 20 minutes, c'est très bien.
- Speaker #1
Ça, ça serait au-dessus de 4 ans.
- Speaker #0
Oui. Et après, bien entendu, au fur et à mesure que tu vas grandir en âge, tu vas pouvoir regarder un peu plus. La notion qui est importante au-delà de la notion... La notion qui est importante à relever au-delà de la notion de... De durée. Voilà, de temps d'écran, c'est la fréquence. Si c'est tous les jours, c'est pas top. Tu me dis que voilà, bon, écoute, mon gamin, il a 6 ans, il a regardé 40 minutes de... J'allais dire Goldorak, mais non. 30-40 minutes d'un programme, mais qu'il ne regarde jamais la télé, que c'est arrivé une fois, on ne va pas... Oui,
- Speaker #1
mais tant que ça ne devient pas une habitude et une récurrence...
- Speaker #0
Le problème, c'est l'habitude et la récurrence, justement.
- Speaker #1
Mais il y a aussi, tu vois, le cas où... Comme tu dis, papa et maman travaillent. Papa et maman sont à l'extérieur. Cet enfant, il est à la maison, il est avec les nounous. La nounou n'a pas le lien du parent. La nounou n'a pas, tu vois, je vais dire, la patience du parent. Il faut aussi,
- Speaker #0
parfois même le parent n'a pas la patience. Oui,
- Speaker #1
parfois le parent n'a pas la patience de la nounou, mais tu vois. Il faut aussi, donc finalement, imposer aussi des règles. Parce que le personnel de maison... Oui,
- Speaker #0
il faut imposer des règles.
- Speaker #1
Dès qu'ils ont des temps morts, ils sont sur leur téléphone.
- Speaker #0
Il faut imposer des règles, en tout cas par rapport aux enfants. Il y a autre chose, quand tu dis ça, ça me fait penser à quelque chose qui me vient là. Plus on va prendre l'habitude très tôt de passer du temps avec nos enfants et de les exposer à des choses différentes des écrans. Les livres, les jeux, l'ennui. Oui, je répète, l'ennui.
- Speaker #1
Car elle le dit beaucoup justement à Kélina, elle lui dit l'ennui, c'est très bien. Parce que ça te permet justement de créer des choses dans ta tête. Regarde là, il me fait un pouce derrière. C'est de vrai, vous ne la voyez pas, elle est derrière, elle est comme ça.
- Speaker #0
J'ai un pouce dans le miroir. Non, mais alors, est-ce qu'on peut s'arrêter une minute sur l'ennui ? Oui, bien sûr. L'ennui, aujourd'hui, c'est... Moi, je vois l'ennui comme l'une des plus grandes peurs que les parents ont. Je vais faire un parallèle. L'ennui, c'est quand, par exemple, un parent... Pardon, la peur de l'ennui, c'est quand, par exemple, un parent, une semaine avant des vacances scolaires, est en stress parce qu'il doit trouver des activités pour ses enfants. Laisse ton gamin s'ennuyer. Est-ce qu'il peut être dans un endroit sécurisé ? Est-ce qu'il peut être avec d'autres enfants ? Est-ce qu'il peut être juste à la maison ? Est-ce qu'il est assez grand pour s'occuper tout seul ? Si oui, laisse-le s'occuper tout seul. Laisse-le s'ennuyer. Ou alors, mets-le avec ses amis quelque part. Pareil, sécurité assurée. Mais laisse-les s'ennuyer. L'idée, tu sais... Ça m'est arrivé de voir des emplois du temps d'enfants, parce que les enfants ont des emplois du temps, mais c'est extraordinaire.
- Speaker #1
Il a activité judo, cheval, basket,
- Speaker #0
poney sur gazon, golf sur la dune, foot sur glace, des activités que moi j'ai. Yoga au plafond, enfin arrêtez les gars. On crée trop de choses, et derrière ça, au passage, ça a une autre conséquence. on crée Tellement de choses pour occuper nos enfants qu'en fait, à aucun moment, on ne permet à nos enfants d'aimer quelque chose. Je vais le redire.
- Speaker #1
Oui, non, je dis.
- Speaker #0
OK.
- Speaker #1
Tu peux le redire.
- Speaker #0
Attends, je cherche les mots. Non, mais c'est vrai. On crée tellement d'occupations à nos enfants, on crée tellement d'occupations à nos enfants qu'à aucun moment on ne leur donne la possibilité de savourer et de tomber amoureux de certaines choses et d'aimer certaines choses, de développer des passions. Une passion, c'est quelque chose qu'on a fait... qu'on a aimé et qui nous rend heureux et qu'on fait et qu'on refait et qu'on refait. On donne des occupations à nos enfants. En fait, nos enfants consomment des occupations.
- Speaker #1
Ils n'ont plus de plaisir à l'occupation. C'est comme du travail, finalement.
- Speaker #0
Ils consomment des occupations pour faire quoi ? Pour faire passer le temps dont on parlait tout à l'heure.
- Speaker #1
Parce que les parents ont la crainte qu'ils s'ennuient.
- Speaker #0
Exactement. Et très souvent... Comme Carrelle dit, du coup, je suis complètement d'accord. L'ennui, ça a une fonction extraordinaire de créativité et d'imaginaire. Moi, je me rappelle m'être ennuyé en regardant le plafond. Mais toi, juste, est-ce que toi, ça t'est arrivé de t'ennuyer chez toi ?
- Speaker #1
Oui, plein de fois.
- Speaker #0
Est-ce que ça t'arrive ? Et c'est intéressant que les parents, parce que là, on parle des enfants, mais l'éducation des parents, à nouveau. Ce ne sont pas des enfants qui regardent le podcast. Demandez-vous si vous avez... Je vais essayer de le formuler de la manière la moins bizarre possible, parce que je vais me faire juger, sinon... c'est pas grave les gens sont dans le chute c'est pas ma vie je sais pas ce que tu vas dire mais j'ai peur moi ça m'est arrivé je vais te donner un exemple tout le monde est couché je suis tout seul mon téléphone est volontairement loin de moi sur la table la télécommande est à côté la télé est éteinte je pourrais l'allumer il y a les rediffusions là on est mardi soir il y a la rediffusion du match qui est passée voilà la télé est éteinte je prends un verre d'eau et je regarde le plafond Et j'attends. Et je me donne juste 3, 4, 5 minutes à ne rien faire. Ça fait un bien fou. Et tu te rends souvent compte de là où il faut refaire la peinture.
- Speaker #1
Finalement, tu ne fais pas rien alors. Finalement, tu ne fais pas rien.
- Speaker #0
Tu regardes, tu vois, il y a une toile d'araignée. Il y avait une prise ici. Ma femme a mis un tableau là, je ne savais pas.
- Speaker #1
Non, c'est vrai.
- Speaker #0
Et en fait, pourquoi je trouve ce truc intéressant ? Parce que tout simplement, tu arrives à te déconnecter de tout. Tu arrives à être tout seul. Tu es dans le silence. Ce dont on a beaucoup peur, parce qu'en réalité, pendant le silence, on se parle, la conscience nous parle, mais on ne veut pas toujours l'entendre, mais ça, c'est encore un autre débat. Et surtout, en fait, on se laisse la possibilité et le droit de s'ennuyer un tout petit peu. Et quand tu t'ennuies un tout petit peu, tu crées aussi une envie d'aller chercher quelque chose, d'aller chercher une activité.
- Speaker #1
D'aller chercher à faire quelque chose.
- Speaker #0
Si tu fais tout le temps quelque chose, à quel moment tu as envie réellement de faire quelque chose ? Tu n'as plus envie, en fait. Tu es avec quelqu'un que tu aimes bien et tu le vois tout le temps, cette personne. Tu n'as plus envie. Donc, c'est important d'avoir ces temps pour nous. Et à partir du moment où on a ces temps-là, moi, je suis convaincu qu'on en ressent le bien fondé. On laisse nos enfants s'ennuyer.
- Speaker #1
Donc, un parent qui a un enfant à la maison qui dit « Papa, maman, je m'ennuie » , il ne faut pas qu'il voit ça comme... Il faut absolument que je trouve quelque chose à apprendre. Que mon enfant fasse quelque chose. Que je lui fasse faire quelque chose.
- Speaker #0
Tu peux t'ennuyer avec ton enfant, si tu veux.
- Speaker #1
Mais moi, je voulais te poser par rapport à l'écran, par exemple. Tu vois ton enfant qui a un talent pour faire du dessin. Tu vois que ton enfant délivre bien. Tu vois qu'il a des skids sur ça et tout. tu lui mets des... Parce que tu disais que l'écran n'apprend rien. Mais si, par exemple, je vais prendre le cas de Kélina, parce que c'est le cas à la maison. Je vois que Kélina, elle aime dessiner, elle dessine bien, et elle nous a déjà surpris à redessiner des choses qu'elle voit sur l'écran. Tu vois ? Donc moi, au carrel, ce qu'on va peut-être faire, c'est qu'elle va nous dire « Tiens, je vais apprendre à dessiner un lapin. » Je vais aller sur YouTube, je vais me mettre « Comment apprendre à dessiner un lapin pour un enfant ? » Tu vois ? Et je vais lui mettre… Et je vois qu'elle se concentre, elle a quand même ce côté… En tout cas, je pense que c'est de la concentration et elle essaye de reproduire tout. Est-ce que malgré ça, ce n'est pas de l'apprentissage ? Est-ce que c'est une « bonne manière » de consommer de l'écran ou pas du tout ça ?
- Speaker #0
Pensons la chose autrement. essayons de sortir dans l'idée de bon ou mauvais. Parce que bon ou mauvais, clairement, on est encore un peu... On a du mal encore un peu. Mais par contre, pensons à est-ce qu'il existe une meilleure manière de le faire ? Oui,
- Speaker #1
bien sûr. Moi, j'aimerais trouver un professeur.
- Speaker #0
Je te donne un exemple très simple. Sans professeur, ça ne te coûtera pas cher.
- Speaker #1
Un professeur d'art plastique. Tu peux,
- Speaker #0
mais tu peux aussi acheter des livres de dessin avec des pointillés, tu sais.
- Speaker #1
Oui, effectivement.
- Speaker #0
Elle peut faire du piquage. On n'en fait plus, d'ailleurs, en maternelle. Si on a des jardins d'enfants qui nous regardent, où est le piquage ? Je ne sais pas si tu as fait du piquage. Je ne sais pas. Le piquage... Oh là là, on est vieux.
- Speaker #1
C'est quoi, le piquage ? Parce que moi, je vois ce que tu veux dire avec les...
- Speaker #0
Le piquage, c'est... Je suis en train de parler de piquage.
- Speaker #1
Si vous aussi, vous ne savez pas c'est quoi de l'engagement,
- Speaker #0
le piquage, c'est quand tu as un dessin, tu as un papier... Un papier imprimé. Tu sais que pendant que je suis en train d'expliquer ça, je suis en train de me demander est-ce que je ne fais pas un atelier piquage pour les parents bientôt ?
- Speaker #1
Vas-y, moi je suis chaud.
- Speaker #0
Bon, le piquage c'est quoi ? c'est que tu as un dessin imprimé.
- Speaker #1
Ouais.
- Speaker #0
Tu as un modèle en noir et blanc. Le plus important, ce sont les traits. Il est posé sur un support qui est un minimum mou. Et en fait, tu as un poinçon, tout simplement.
- Speaker #1
Et tu piques. Tu piques pour refaire la forme.
- Speaker #0
Et en fait, tu vas détacher le dessin. Qui est souvent dans un truc cartonné un peu. Oui,
- Speaker #1
je comprends ce que tu veux dire.
- Speaker #0
On est sur la mise en place des prérequis au graphisme. On est sur tout ce qui est technique de préhension. On est sur la force dans les doigts. On est sur la concentration, sur la mémorisation, sur le repérage. L'orientation spatiale, c'est bien le piquage.
- Speaker #1
D'accord.
- Speaker #0
On parlait de dessins. Alors, j'ai pensé au piquage parce que ceux que moi, je voyais, ce sont aussi les carnets de vacances. Oui. Mais dedans, tu as des dessins avec des numéros. Bien sûr. Où tu reproduis, tu vois.
- Speaker #1
Oui, mais numéros, on parle d'enfants qui savent quand même déjà, entre guillemets, lire, qui ont la notion de 1, 2, 3, 4. Oui. Tu vois, ils sont plus développés.
- Speaker #0
Je veux dire, si... On peut retirer les numéros. Si l'enfant a 4 ans, il est déjà dans la conscience de ça. Oui, bien sûr. Mais si on veut retirer la question des numéros, des points, des tirés, des pointillés. En fait, tant qu'on peut éliminer les écrans, pour moi, il y aura toujours une solution. Est-ce que les écrans, c'est plus facile ? Oui. Est-ce que ça a l'air plus pratique ? Oui, on ne va pas se mentir. Est-ce qu'on peut avoir mieux ? Oui. C'est comme ça qu'il faut le voir. Il y a une question que je reçois souvent. En tout cas, j'entends beaucoup de parents, si je puis me permettre, je ne sais pas si ça sort de ce dont on parlait, mais les parents qui te disent comment on fait, qu'est-ce qu'on fait, on veut arrêter. Éteignez la télé. Ça, c'est la première chose.
- Speaker #1
Éteignez la télé, éloignez les téléphones, éteignez les téléphones, même pendant le temps où les enfants sont là. Éteignez les tablettes.
- Speaker #0
Et vous, déconnectez-vous. déconnectez-vous du monde extérieur et reconnectez-vous avec vos enfants. Et il y a un principe que je trouve formidable, que j'ai eu à expérimenter même au cabinet, c'est la négociation.
- Speaker #1
C'est-à-dire ?
- Speaker #0
C'est la négociation. On a des enfants de 3 ans, 2 ans, on négocie. Donc, on va partir de ce principe. L'enfant, tu veux lui retirer un écran. Donne-lui autre chose. Comme je dis, un enfant n'est pas programmé pour aimer les écrans. Oui. Maintenant, si à partir d'un certain âge, il n'arrive plus à s'en passer, c'est parce que tu l'as sûrement « reprogrammé » . Si je retire, parce que c'est difficile, si je retire les écrans,
- Speaker #1
par quoi je le...
- Speaker #0
Je remplace par autre chose. Mais ce autre chose, qu'est-ce que c'est ? Une activité du temps avec papa et maman, sortir...
- Speaker #1
De l'ennui.
- Speaker #0
De l'ennui, faire la cuisine, faire des gâteaux. Il y a des choses à faire. Bye. tout à l'heure tu parlais aussi d'une chose par rapport au nounou, comment on fait, est-ce qu'on interdit il n'y a pas que ça on interdit à la maison, on met en place des règles strictes mais est-ce qu'à un moment donné on peut aussi penser à cultiver l'amour des enfants pour autre chose le livre par exemple On n'est pas obligé d'attendre, au passage, on n'est pas obligé d'attendre que nos enfants soient en âge de lire pour aimer les livres.
- Speaker #1
Je suis d'accord. Un parent qui prend le temps de lire des histoires et qui prend le temps de raconter des histoires va déjà créer un engouement pour ça.
- Speaker #0
Mais il y a un autre moyen très simple. Moi, je vois... L'enfant, il a six mois, il est dans son berceau. On a des petits livres un peu embourrés comme ça. À cet âge, l'enfant,
- Speaker #1
il développe plus du toucher.
- Speaker #0
Mais en fait, il se familiarise surtout avec l'objet. Il est en contact avec l'objet dès le début. Donc c'est un truc avec lequel il grandit.
- Speaker #1
J'ai une autre question par rapport aux écrans. Parce que tu vois...
- Speaker #0
Profite, c'est gratuit.
- Speaker #1
Non, je profite, je fais toutes mes questions personnelles en même temps.
- Speaker #0
Le gars m'a appelé, c'est une consultation. Ah oui,
- Speaker #1
c'est une consultation, t'as vu ? Au calme.
- Speaker #0
T'as tout à fait raison.
- Speaker #1
Mais regarde, nous aujourd'hui, nos parents sont à l'extérieur. Tu vois ? Nos parents sont à l'étranger. Nos parents ont envie de voir leurs petits-enfants. On s'appelle quasiment une fois tous les deux jours, si ce n'est pas tous les jours. FaceTime, WhatsApp vidéo. Bon, après, ce n'est pas des longs temps d'exposition à l'écran. C'est déjà de façon... Kélina, elle va parler deux minutes, elle va partir. Et la petite, l'autre, elle est trop petite. C'est juste qu'il la voit deux minutes, un truc comme ça. Mais tu vois, c'est là où je disais que j'ai peur des écrans, parce que c'est déjà une habitude qu'elle prend de regarder l'écran et de créer ce lien avec l'écran. mais comment on fait ? Tu vois, par exemple, nous, en tant que parents, qui ont de la famille à l'extérieur et qui appellent et qui veulent voir. Et là, je te parle des grands-parents, mais il y a les tatas, les tontons qui veulent appeler. Donc finalement,
- Speaker #0
c'est ça. La première chose, c'est un tout petit peu dur, mais attention à ne pas créer des excuses pour consommer des écrans. Attention à ça, c'est la première chose.
- Speaker #1
Le dire ça à ma mère, c'est une excuse. Tu vas dire, moi, je veux voir ma petite fille.
- Speaker #0
J'ai dit... Tu ne vas pas me mettre dans le pain aujourd'hui. Attention à ça. L'autre chose est la suivante. Quand on est dans ce contexte-là de communication, qu'est-ce qui se passe ?
- Speaker #1
Il y a un échange. Ah, c'est ça que tu m'as dit tout à l'heure. Effectivement.
- Speaker #0
Troisième point.
- Speaker #1
Tu vois, je suis.
- Speaker #0
Je sais que tu suis. Troisième point. Et là, moi, je pose juste une question. Attention, ne vous fâchez pas. Pas de problème. Mais nous, quand on était plus jeunes, quand on avait leurs âges, on avait de la famille, nous aussi. On avait des grands-parents, des tatas et des tontons. Oui. Ils faisaient comment ?
- Speaker #1
Oui, mais on n'avait pas FaceTime, on n'avait pas WhatsApp vidéo, donc on était obligé de fonctionner avec ce qu'il y avait à disposition. C'était le téléphone. Ce n'est pas parce que c'est à disposition que tu dois l'utiliser.
- Speaker #0
Ouais,
- Speaker #1
mais comment tu veux que je dise ?
- Speaker #0
Les deux choses que tu as dit, on commençait par oui, mais.
- Speaker #1
Comment tu veux que je dise à ma maman ? Non,
- Speaker #0
non, non, non, non. Attention, je ne suis pas en train de dire qu'il ne faut pas montrer les enfants qu'ils ne peuvent pas parler. Il y a la notion d'échange.
- Speaker #1
Ma mère va arriver pour toi en commentaire, Christian. Elle va dire, votre gars qui est là, moi je dois appeler tous les jours.
- Speaker #0
Il y a la notion d'échange, ça c'est une chose. Coucou maman. si Bonjour tata Voilà Non il y a la notion d'échange c'est important mais si à un moment donné l'enfant intègre que cet écran, cet appareil est un outil de communication et rien de plus ça s'arrête là On n'a pas ce problème de dérive après bien entendu oui faire attention à la fréquence parce que ce dont on parlait tout à l'heure l'exposition, la lumière et tout ça bon D'accord, mais si on est sur une question de communication, ça s'entend. Ça n'empêche qu'il faut faire attention. Mais sur une question de communication, ça peut s'entendre. Mais je répète, attention à ne pas créer des excuses pour légitimer l'utilisation des écrans.
- Speaker #1
Ok. Je pourrais parler très très longtemps avec toi de ce sujet-là. Mais il faut, malheureusement, on arrive à essayer de mettre un terme à cette discussion. Mais je pense que ce serait intéressant que peut-être tu reviennes et qu'on reparle de ça, parce qu'il y a beaucoup de choses à dire. J'aurais peut-être encore deux ou trois questions pour toi. La première question, c'est, on reste quand même dans une société, nous, au Sénégal, On vit beaucoup déjà en famille nombreuse. Quand je dis famille nombreuse, ce n'est pas forcément qu'il y a plein d'enfants, mais il y a souvent peut-être une tata, un tonton à la maison, tout et tout. Et on reste quand même dans une société où je pense, en tout cas, on fait encore beaucoup de choses ensemble. Est-ce que la situation, justement, post... Covid est quand même peut-être moins pire dans ce que tu vois dans les chiffres ou dans les trucs par rapport à peut-être des situations qui ont pu se passer en Europe parce qu'en Europe pendant le Covid les gens étaient vraiment en télétravail à la maison avec leurs enfants les enfants seuls toi tu dois travailler t'es en télétravail et t'avais que comme seule peut-être solution de les mettre devant les écrans et je sais qu'il y a eu des choses vraiment très il y a eu beaucoup de retours très durs après la vie entre guillemets normale après le Covid Est-ce que nous, au Sénégal et je veux dire en Afrique peut-être, de l'Ouest en général, est-ce que quand même les effets sont beaucoup moindres quand vous voyez les chiffres, quand vous voyez les résultats aujourd'hui, parce qu'on est quand même cinq ans après le Covid, donc j'imagine que vous devez voir vraiment l'impact encore plus aujourd'hui. Et ma deuxième question pour toi, c'est... Parce qu'aujourd'hui, il y a l'IA qui arrive. Je pense que ça peut être encore quelque chose qui va créer des choses peut-être plus dangereuses et autres, parce que moi, je viens de découvrir que tu peux discuter.
- Speaker #0
avec ChatGPT, mais des discussions qui font peur parce que la machine te fait même des hésitations, fait des « euh » tu vois, où tu as vraiment l'impression que c'est un humain qui est en train de parler. Donc ça, je pense que c'est peut-être trop jeune pour que vous puissiez voir peut-être déjà des répercussions de ça. Et ma dernière question, c'est est-ce que tu as une belle histoire ? à nous raconter peut-être d'un patient, d'une patiente, d'un enfant qui t'a marqué aujourd'hui, toi, en tant qu'orthophoniste, que tu as peut-être vu et que tu as vu évoluer, que tu vois aujourd'hui évoluer et qui t'a marqué dans ce que tu fais.
- Speaker #1
Ok.
- Speaker #0
Beaucoup de questions.
- Speaker #1
Je me rappelle des deux dernières.
- Speaker #0
La première, c'était, est-ce qu'entre nous, notre situation, je veux dire au Sénégal et en Afrique, est-ce que vous voyez quand même une différence ?
- Speaker #1
Comparé à quoi ? À ce qui se fait en Occident ?
- Speaker #0
Comparé à l'impact qu'a pu avoir justement surtout le Covid, je vais dire, des enfants face aux écrans, est-ce que vous avez des données qui montrent un petit peu notre situation par rapport à...
- Speaker #1
Je vais être honnête, je n'ai pas regardé beaucoup. Je ne vais pas commencer à t'inventer des statistiques, je n'ai pas regardé énormément. Il y a une chose qui est à prendre en compte quand on essaie d'apprécier ce type de situation, c'est qu'il faut voir aussi la... Un, l'accès aux soins qu'on a ici. Et deux, la possibilité de suivre ces enfants-là. Trois, la capacité ou le degré d'information que les parents ont par rapport au phénomène. Pour moi, ce sont les trois filtres ou les trois critères qui vont permettre d'observer ou d'apprécier la gravité de la situation. On est dans une situation ici où je trouve qu'on manque encore cruellement, malgré tout ce qui se fait sur les réseaux sociaux, on manque encore de... Enfin, on pourrait faire mieux en termes de prévention. Ça passerait par plus de passages dans les écoles, ça passerait par plus d'écoles qui nous sollicitent aussi, parce que beaucoup d'entre nous sont vraiment prêts à participer. ça passerait par se renseigner un peu plus aussi sur la discipline et dépasser l'idée qu'on n'y va que quand on en a besoin. Donc ça, ça concerne l'aspect de la prévention. J'essaie de m'en rappeler des deux autres points que j'avais relevé.
- Speaker #0
Mais tu constates que quand même, finalement, les gens ne voient plus aujourd'hui ton métier comme quelque chose qui est pour les Blancs. Les gens comprennent...
- Speaker #1
Ça existe encore. Oui,
- Speaker #0
le cliché reste encore.
- Speaker #1
Le cliché reste encore. Est-ce qu'il est moins présent qu'il y a 5 ans, il y a 10 ans ? Sûrement. Mais il l'est encore. Il est encore présent. Il est encore présent parce qu'il faut se dire la vérité aussi. C'est un métier qui va être à la portée d'une certaine catégorie de personnes. Quand bien même ça se démocratise, il y a un gros travail et de grandes discussions à avoir avec les assurances encore parce que ce n'est pas complètement mis en place. On a eu, moi je me rappelle avoir tenté des choses. Quand j'ai commencé, quand j'étais plus jeune et que je commençais justement, et les gens n'ont pas suivi. Et nous, ce qu'on disait, quand on allait voir les assurances avec lesquelles on discutait, c'était mais attention, parce qu'il y a un besoin qui existe et les gens vont se rendre compte. Donc il y a des choses à faire. Bon, ça ne s'est pas fait à ce moment-là. Bon, je pense qu'il est toujours temps de... de corriger un peu le tir. Donc ça, le fait qu'on ait une prise en charge qui est un peu plus, j'allais dire un peu plus dissipée en fait, qui est plus complexe parce que on est peut-être un peu moins nombreux aussi face à une demande importante. encore faut-il savoir qu'on en a besoin ? Parce que t'as des gens qui en ont besoin.
- Speaker #0
C'est ça. Parce que si tu dis qu'il y a déjà une demande importante, alors qu'en même temps, tu dis que plein de gens ne savent pas que ce métier existe, parce que, tu vois, je veux dire, aujourd'hui, c'est les gens qui ont un certain niveau d'éducation.
- Speaker #1
Qui comprennent.
- Speaker #0
Qui ne savent pas forcément même comprendre le métier. Ils savent que ce métier existe. Parce que si tu ne donnes pas l'option à quelqu'un de savoir que ce métier existe, Il ne va jamais penser à aller voir ce spécialiste-là. Et tu vois, c'est-à-dire que je pense qu'aujourd'hui, tu vas dans la rue et tu demandes à des gens, au hasard, un micro-trottoir, est-ce que vous savez c'est quoi un orthophoniste ? peut-être qu'on va se retrouver à neuf personnes sur dix qui ne savent pas ce que c'est.
- Speaker #1
Absolument. Mais d'où l'importance et le bien-fondé de la prévention à nouveau. La prévention, pourquoi ? Parce que d'abord, on apporte la connaissance, on apprend aux gens que ce métier existe. Ça peut se faire, j'ai parlé des écoles, ça peut se faire aussi par les autres spécialistes, par les généralistes, les pédiatres, qui vont être au courant, qui sont en contact, qui vont réorienter. Ça peut être ça. Ça peut être aussi, quand je parle de prévention, le deuxième point de la prévention, par l'adoption des bons comportements qui vont éviter justement de nous retrouver. trouver avec nos enfants dans des situations où on flirte avec le trouble ou le retard et où du coup, on est dans une situation de besoin, parce qu'on a adopté les bons comportements plus tôt, ça peut se faire par là aussi. Et puis, il y a aussi un autre truc, c'est le... parce que ça, on n'en a pas parlé, c'est l'aspect de la notion des parents ou de la famille qui consiste à dire... Je m'accuse, ça sort un peu de la question, mais ça me vient juste là. Il consiste à dire, voilà, toi tu vas te plaindre, tu vas dire mon enfant, il a deux ans, il ne parle pas. On va dire, ah mais non, c'est bon, laisse, patiente. Et il a trois ans, il n'y a toujours rien. Oui, mais non, attends, patiente. Et il a quatre ans, il ne parle toujours pas. Oui, mais tu te rappelles, toi, tu as commencé à parler à cinq ans en fait. Non, à la minute où vous avez l'inquiétude, allez voir un thérapeute, allez voir un spécialiste. Et ce n'est pas seulement pour l'orthophonie d'ailleurs. Allez voir quelqu'un qui vous dira, patiente.
- Speaker #0
Va voir un professionnel qui va te poser un vrai diagnostic.
- Speaker #1
Ou qui te dira juste de patienter, mais ça vient d'un professionnel. Oui !
- Speaker #0
Mais même quand je dis diagnostic, même ce côté de dire patiente, c'est un diagnostic sans que c'est un professionnel de la santé qui en parle.
- Speaker #1
Il vaut mieux entendre patiente trop tôt que c'est trop tard plus tard. Il vaut mieux ça.
- Speaker #0
J'aime bien comment t'as dit ta phrase.
- Speaker #1
Je n'ai pas fait exprès.
- Speaker #0
Il vaut mieux attendre.
- Speaker #1
Comment tu l'as dit ? Il vaut mieux entendre patiente trop tôt que c'est trop tard plus tard. On va faire un t-shirt avec ça.
- Speaker #0
Ouais, non, ça, c'est une vraie phrase. Voilà.
- Speaker #1
C'est un statut MSN, même. Ouais. C'est un statut MSN.
- Speaker #0
Twitter X, ça va valer. Allez,
- Speaker #1
partez. Ouais. Comment on revient de ça ?
- Speaker #0
Non, mais non, c'est vrai. Mais c'est tout à fait vrai. Il faut prévenir. Il faut, comme tu dis, il faut libérer, en tout cas, il faut ouvrir la discussion. Parce qu'on ne va pas... vers une situation qui va s'améliorer. Non, on va vers une situation où ça va devenir encore pire. Parce que si on ne fait rien, les écrans vont continuer à rentrer de plus en plus. Et moi, cette notion de l'IA, je pense qu'on ne se rend pas compte à quel point nos enfants sont en train de foncer dans quelque chose. Parce que nos parents ne se rendaient pas compte de nous, vers quoi on fonçait quand on a eu des téléphones portables et tout. Mais je pense que nous, on ne se rend pas compte, parce que là, quand tu parlais, tu disais tout à l'heure que l'écran, il n'y a pas d'interaction, il n'y a pas d'échange.
- Speaker #1
Oui.
- Speaker #0
Mais là, tu vas te retrouver peut-être avec un écran.
- Speaker #1
Oui, qui te parle.
- Speaker #0
Qui te parle, qui te répond, et avec qui tu vas créer un échange. Donc, tu vas créer une interaction. Et donc là, le danger... pour moi, il est encore plus grand. Parce que ton interaction, elle est avec une machine.
- Speaker #1
Je pense que dans... D'abord, je suis absolument d'accord.
- Speaker #0
On voit déjà des gens qui créent des addictions, des adultes qui créent des addictions, qui tombent amoureux. J'ai lu un article cette semaine de gens qui tombent.
- Speaker #1
Oui, absolument.
- Speaker #0
Donc imagine nos enfants qui ont le cerveau pas prêt et qui vont se retrouver avec ça.
- Speaker #1
Il faut, à nouveau, dans des situations comme ça, moi, je me... Quand je dis dans des situations comme ça, on parle de...
- Speaker #0
De l'IA, de nouveautés qui arrivent.
- Speaker #1
Voilà, mais moi, dans des situations de ce type, je me demande toujours qu'est-ce qui nous fait courir ou qu'est-ce qui nous manque ? D'accord ? La plupart du temps, ce qui te manque te fait courir, d'ailleurs. Quelqu'un qui se met à parler avec l'IA. Là, on réfléchit, j'ai pas nécessairement... Oui, oui,
- Speaker #0
c'est vraiment une discussion entre nous.
- Speaker #1
À ton avis, quelqu'un qui se met à parler à l'IA, qu'est-ce qu'il recherche ?
- Speaker #0
De l'attention. Pour moi, il recherche de l'attention, pour moi, il recherche une écoute, entre guillemets.
- Speaker #1
Il recherche un lien, une écoute, de la communication, une occasion de partager. Tant qu'on n'aura pas humanisé un peu plus, ces notions-là, tant qu'on les... Alors, quand je dis tant qu'on n'aura pas humanisé un peu plus ces notions-là, tant qu'on n'en aura pas fait des marqueurs de faiblesse, tant qu'on arrêtera... Enfin, quand on arrêtera enfin de croire que parce qu'on a besoin d'attention, parce qu'on a besoin d'écoute, on est faible, quand on aura compris ça, on validera le besoin d'attention et d'écoute. Une fois qu'on aura validé complètement le besoin d'attention et d'écoute, en l'humanisant... on pourra aller chercher ou offrir de l'attention et de l'écoute. Et quand on offrira de l'attention et de l'écoute, en humanisant et en étant nous-mêmes humains, on restera le médicament au mal de notre société humaine. Et on arrêtera d'aller le chercher dans la machine. Le proverbe Wolof dit « Nip Ausha bunit » .
- Speaker #0
Tu peux traduire pour les noms, Olof ?
- Speaker #1
J'allais le faire. Le proverbe, Olof dit, c'est l'être humain et le remède de l'être humain. Tant qu'on ne reviendra pas à ça, on sera à chercher notre chemin dans les écrans, dans l'IA et dans plein de choses qui sont en réalité là pour nous servir, mais qu'on sert aujourd'hui. Parce que c'est la situation et la société dans laquelle on vit. Moi, quand je vois, et je pense que tu es pareil, quand je vois les dérives de l'IA, je repense à... Ça va faire un peu vieux, mais je repense à des scènes de Robocop ou à des scènes de film où, en fait, la machine prend le dessus. Bien sûr. C'est vers là où on va. Bien sûr. Mais tu ne peux en réalité avoir peur et craindre qu'une chose à laquelle tu as donné de l'importance. recentrons-nous et à nouveau je reparle d'humain parce que pour moi c'est le début c'est le centre et c'est là où on doit rester recentrons-nous dans nos rapports même en couple les téléphones en couple attends les histoires où vous êtes à table tous les deux où vous êtes face à face vous vous envoyez des blagues mais mon frère vous rigolez pas vous vous envoyez lol mais on s'envoie des réels mon gars et voilà non mais vous envoyez des réels parce que c'est drôle d'accord Mais moi, attends, je vais te montrer un réel, c'est drôle. Viens te mettre à côté de moi. Viens regarder le réel à côté de moi. Pourquoi tu m'envoies un réel ? Et puis je t'envoie un réel.
- Speaker #0
J'entends quelqu'un qui tousse dans la pièce. Voilà,
- Speaker #1
j'y retourne pas. Je vais prendre une gifle et passer lui comme ça.
- Speaker #0
Des fois, vous êtes dans le même lit dos à dos.
- Speaker #1
Tant pire. Moi-même, je peux parler. Pour moi, on n'est pas là. Tu envoies le réel.
- Speaker #0
Je sens que cette discussion va changer.
- Speaker #1
Non, tu envoies le réel. Tu vois, ta femme te laisse sur vue.
- Speaker #0
Vu.
- Speaker #1
Elle est là. Oui. Elle te laisse sur vue. Et tu te surprends, toi qui es orthophoniste, en train de dire, oh, les écrans, c'est pas bien, avoir un sentiment de pourquoi elle n'a pas liké.
- Speaker #0
Pourquoi elle n'a pas ri, déjà ? Pourquoi elle n'a pas... Je n'ai pas entendu un petit...
- Speaker #1
Non, mais ce n'est même pas le rire. Même moi qui te parle de ça, je me retrouve à dire, elle n'a pas liké. Elle ne m'a pas écrit lol.
- Speaker #0
Elle n'a pas mis le cœur.
- Speaker #1
Exactement. Double-cliqué. Et elle fait semblant de dormir, en plus. Et ça, ça veut dire que moi, le matin, je vais me réveiller. Je vais me réveiller énervé en me disant, je t'ai envoyé un réel que tu n'as pas liké. Alors que si je le mets en story, tout le monde va cliquer. Mais déjà,
- Speaker #0
même, tu vois le vu. Tu lui as envoyé peut-être 4, 5 réels. Tu vois le vu, il n'y a aucune réaction sur aucun des réels. Et tu dis, mais je t'ai envoyé des trucs, tu n'as pas vu ? Si, si, j'ai vu. Mais tu n'as même pas rigolé.
- Speaker #1
Tu ne demandes pas. Moi, je ne demande pas. parce que juste après ça quand t'as envoyé les 4-5 vidéos là toi on t'envoie une recette flinguée du pain perdu Que toi, tu n'en manges même pas. Et elle, par contre, elle va se fâcher si tu ne l'aïs pas. Tu vois ?
- Speaker #0
Comme quoi, on a tous les mêmes problèmes.
- Speaker #1
Ce n'est pas facile. Un exercice. Un exercice. J'ai un exercice pour vous. C'est quelque chose que je pratique. En tout cas, que j'essaye de pratiquer depuis longtemps concernant le téléphone. On parlait du réveil. C'est... On a tous, en tout cas, beaucoup d'entre nous, on se réflexe au réveil de prendre le téléphone. Tout à l'heure, petite parenthèse, j'ai dit qu'on avait beaucoup d'excuses. d'avoir des écrans en main, pardon, achetez-vous des radios réveil. L'excuse du téléphone pour nous réveiller le matin ne tient pas la route. On veut juste prendre notre téléphone et le regarder, scroller un peu. C'est une mauvaise habitude. Et pour moi... Si c'est ça l'habitude qu'on a au réveil, ça en dit long sur notre manière de consommer le téléphone. Et je pense qu'à ce moment-là, c'est plus le téléphone qui nous consomme d'ailleurs. C'est pas grave.
- Speaker #0
Oui, le cerveau n'est pas encore assez allumé.
- Speaker #1
Et si ton cerveau non allumé te réclame ton téléphone juste pour scroller au réveil, c'est un problème. Je dis ça, c'est pour nous tous. Le truc que j'essaie de faire souvent, moi, le matin, c'est de dire, voilà, je me réveille, je coupe la sonnerie du réveil. Tu prends la douche, tu prends ta douche, tu fais ta prière, tu te brosses tes dents, tu prends ton petit déjeuner et tu te dis, mon téléphone, je ne le regarde que dans 20 minutes. On va t'apprendre quoi dans les 20 minutes ? Il n'y a rien qui va se passer dans le monde qui nécessite que tu sois là.
- Speaker #0
Ou même souvent, tu prends le téléphone le matin en disant, qu'est-ce que j'ai loupé cette nuit ? C'est ça. Est-ce que j'ai loupé des messages, des appels ?
- Speaker #1
C'est ça. À nouveau, on croit qu'il y a un truc qui est important, ou louper des messages, on n'est pas si important que ça à 6h du matin. À moins que tu travailles aux urgences et que ce soit ton téléphone pour travailler. Mais beaucoup d'entre nous, en fait, c'est pas... Pour moi, c'est un truc à essayer de mettre en place. Le matin, on n'est pas obligé de regarder nos téléphones. Le soir, on n'est pas obligé de nous endormir avec nos téléphones. on ne se parle plus. Tout à l'heure, on rigolait de l'histoire de couple, mais tu as des couples, j'ai vu des scènes où vous êtes au resto, tu es au resto et je trouve ça triste au passage. Et tu as deux personnes qui mangent et...
- Speaker #0
Chacun est dans son monde sur son écran. Ouais. Enfin,
- Speaker #1
c'est... Je pense qu'on a du travail à faire.
- Speaker #0
Et surtout, comme tu disais, Pascal, la finalité aujourd'hui de notre discussion, c'est surtout comment on protège nos enfants mieux face aux écrans si nous, adultes, on a ces comportements. Ils ne vont faire que photocopier, imprimer, ils vont faire la même chose.
- Speaker #1
Exactement. Et en fait, l'une des solutions, ce n'est pas la plus facile à entendre parce qu'on a déjà nos habitudes et qu'on est très bien dans notre confort et que pourtant, il faut qu'on en sorte. Mais l'une des réelles solutions, c'est nous de changer notre manière de faire. On n'éduque pas un enfant en lui disant ce qu'il faut faire, on l'éduque en lui montrant ce qu'il faut faire.
- Speaker #0
Et tu vois, moi, un truc que j'aimerais juste corriger. Tu dis, on a ses habitudes, mais on est peut-être encore la dernière génération où nous, on a connu la vie sans téléphone. Donc, c'est-à-dire que nous,
- Speaker #1
tu vois,
- Speaker #0
nous, on a vécu quand même une partie de notre vie où ça n'existait pas. pas le téléphone donc on sait encore c'est quoi d'aller jouer dehors avec les copains comme tu le sens mais je comprends ce que tu es oui tout à fait et malgré ça nous on est déjà dans cette habitude donc tu imagines ces enfants qui sont nés avec les premiers moments de vie dans cette habitude là l'impact que ça va ça peut avoir sur eux donc c'est pour ça que c'est c'est important et je sais pas ce qu'a légitimus j'avais vu une interview de lui qui m'avait beaucoup marqué avant avant que... que Kélina naisse ou Kélina venait de naître, où il disait s'il y a un truc qu'il regrette, c'est de ne pas avoir assez pris le temps. On en revient à cette notion de temps que tu disais. Quand sa fille lui disait, et il disait aux gens de lâcher les écrans, quand ton enfant te dit « Papa, je veux faire ci, je veux faire ça » , de profiter. de ces moments parce que il y aura un moment où ton enfant va être grand, il va plus t'appeler pour te dire papa je veux jouer, papa je veux faire ça et tout et tout et je me redis souvent ça dans ma tête et des fois, tu sais j'ai pas envie de jouer, j'ai envie d'être posé je me dis en fait profite parce que le moment où elle te demandera plus ça ça, ça va te manquer. Et tu vas le vouloir. Tu vas le vouloir, son attention, et elle sera plus là pour avoir ton attention.
- Speaker #1
C'est maintenant qu'il faut créer ces moments-là.
- Speaker #0
C'est maintenant qu'il faut créer ces liens-là. Je sais que c'est pas facile en tant que parent. Des fois, t'es fatigué, t'as des longues journées, t'as des problèmes, des factures, des trucs que tu dois anticiper, que l'enfant sait pas. Il sait pas tous tes problèmes que toi, tu gères. Mais c'est ton enfant. Il a pas à savoir tous les problèmes que tu gères. Tu dois pouvoir lui donner de l'attention et tu dois profiter surtout de ces moments parce que ces moments vont disparaître à un moment.
- Speaker #1
À ce moment-là, il faut encore rappeler que tout ça, ça se dit dans la bienveillance. Ce n'est pas du jugement ou de la critique. Mais si à un moment donné, vous vous retrouvez dans une situation tant que parent où c'est difficile pour vous de mettre en place ces choses-là, c'est que le mal, il est peut-être un peu plus profond. Alors, ce n'est pas les écrans à ce moment-là qu'il faut aller voir. On a des solutions qui existent. C'est s'asseoir, échanger avec quelqu'un qui est qualifié pour ça. aussi. revoir un peu la manière dont on vit, voir s'il y a des choses à bouger. Un autre élément qui me vient en tête, c'est que tout à l'heure, quand je disais, attention à ne pas créer des excuses pour utiliser les écrans, quand tu parles de l'interview de Pascal Legitimus, il y a un autre truc, il y a une fonction dont on nous parle aujourd'hui comme étant celle qui peut légitimer encore la... La nécessité ou l'existence de nos téléphones, c'est l'appareil photo. Oui, mais je prends des souvenirs. Moi, il y a un truc qui me choque, c'est que dans beaucoup d'événements, et ça, par contre, pour le coup, c'est quelque chose que j'ai du mal à faire. On filme, en fait. On filme tout. On est tous des reporters aujourd'hui. Moi, j'aimerais vraiment qu'on se pose la question. Tu vas à un mariage, par exemple. Dans les mariages, c'est souvent ça. Je n'ai pas dit qu'il ne faut pas filmer. Vous payez un caméraman, mais vous êtes là tous et vous vous tapez des mots d'épaule ensuite. Je ne comprends pas. Mais ça, c'est moi, à nouveau. Je ne comprends pas pourquoi. Peut-être que d'autres personnes le vivent autrement. Je suis curieux de savoir, de toutes les personnes qui filment l'arrivée de la mariée à l'église ou à la mairie, de toutes les personnes qui filment un événement heureux, de toutes ces personnes-là, Qui regarde à nouveau ces moments ? Qui regarde ces vidéos encore ? Si vous les regardez, est-ce que vous les regardez tous ensemble ? Est-ce que vous en faites quelque chose ? Parce que sinon, ça veut dire que ce moment-là, en fait, vous vous l'êtes gâché. Parce que vous auriez pu juste le regarder avec vos yeux et vous créer un souvenir. Et c'est beaucoup plus beau. Alors derrière, tu vas me dire, oui, mais moi, c'est mon anniversaire, je veux une photo. Oui, d'accord. Mais je parle d'un moment spécifique où il y a tout le monde qui a la main en l'air. Alors, là, par contre, c'est juste une réflexion que je me fais. Je ne sais pas. Non,
- Speaker #0
je comprends très bien ce que tu veux dire.
- Speaker #1
J'ai beaucoup de mal avec ce truc où tu te dis, mais attends, c'est un moment qui est tellement intime. C'est parfois, parfois, on vit des moments qui sont... Il y a des moments qui ne sont pas faits pour être filmés. Il y a des moments qui sont faits pour être racontés. Il y a des moments qui sont faits pour être racontés par dix personnes différentes, avec dix versions différentes.
- Speaker #0
Ouais, mais tu vois, en fait, depuis tout à l'heure, je m'étais dit... Je... on est à 2h24 de discussion je te jure mais la discussion elle est tellement intéressante que c'est difficile pour moi de la couper mais tu vois je me dis aussi il y a des choses heureusement qu'il y a ces trucs pour filmer parce que tu vois il y a des moments moi je car elle si tu vois son téléphone elle a des vidéos peut-être dans son téléphone ok qui date de... Elle n'efface rien.
- Speaker #1
C'est Karel.
- Speaker #0
Il y a 10 ans. Quand je dis, oui, mais tu vois, il y a des moments, je vais lui reparler d'un truc. Elle va dire, ah ben ça, je l'ai. Tac, elle va se taper. Et on va revoir le moment. Et encore plus, tu vois, quand t'as un enfant, tu prends tout en photo. Oui,
- Speaker #1
mais absolument. D'accord.
- Speaker #0
T'as des trucs de... Et le dernier point, c'est que...
- Speaker #1
C'est vrai qu'elle dit des choses sur les événements publics.
- Speaker #0
Oui, les événements publics.
- Speaker #1
Je ne parle pas des souvenirs.
- Speaker #0
Ok, juste en...
- Speaker #1
Non, tu as un enfant qui lit. Non, je comprends ce que tu veux dire. Je parle de la présence... Là, par contre, c'est vraiment la présence du téléphone dans la sphère publique, dans les grands événements. Il y a un truc qu'on regarde et...
- Speaker #0
Finalement, tu ne vis pas l'événement à son... C'est ça.
- Speaker #1
C'est ça.
- Speaker #0
En tout cas, moi, j'aimerais juste...
- Speaker #1
Oui.
- Speaker #0
parce que comme je t'ai dit c'est une discussion qu'on pourrait on pourrait étendre, étendre, étendre, parce que c'est un débat qui est hyper intéressant.
- Speaker #1
Après, tu ne peux pas faire venir un orthophoniste et penser qu'il ne sera pas bavard non plus.
- Speaker #0
Ah oui, mais non, je ne te demande pas de ne pas être bavard. Au contraire, moi, j'adore parler et je pense que les gens qui écoutent le podcast et qui vont le regarder vont grave apprécier la discussion parce qu'il y a beaucoup d'informations pertinentes. Moi, j'aimerais juste, comme je te disais, finir la discussion sur une belle image, un beau souvenir, quelque chose qui... Une expérience peut-être avec un patient, et ce n'est pas forcément un enfant, mais est-ce qu'aujourd'hui, en tant qu'orthophoniste qui rêvait de faire ça, qui rêvait d'impacter, qui se voyait faire ça, est-ce que tu as une histoire ? Est-ce que tu as un patient ou une patiente, un enfant, une histoire qui t'a marqué ?
- Speaker #1
Il y en a pas mal.
- Speaker #0
J'imagine.
- Speaker #1
Il y en a pas mal, mais il y en a une à laquelle je pense. Alors, bien entendu, on va respecter le sujet médical, par le médical.
- Speaker #0
Pas de nom, bien sûr.
- Speaker #1
Mais j'ai reçu, il y a quelques années, un petit garçon qui ne parlait pas. En tout cas, qui était très en retard, qui ne parlait pas.
- Speaker #0
Qui avait quel âge ?
- Speaker #1
Je pense qu'il avait à l'époque... Il devait bien avoir 4 ans, je pense. Trois, quatre ans ? Oui, quatre ans, je pense.
- Speaker #0
Quatre ans, il ne parlait pas ? Trois, quatre ans,
- Speaker #1
oui. Le souvenir de l'année est un peu flou encore, mais il avait à peu près cet âge. Il était en âge de parler. Il ne parlait pas du tout. Et cet enfant a été vu par des thérapeutes, un peu partout. Beaucoup de gens, parce que tu as souvent un patient, et le monde entier est thérapeute autour de lui, et beaucoup de gens autour de la famille ont émis l'idée, ont encouragé l'idée, On pensait utile d'insister auprès des parents en leur disant qu'il y avait des risques que leur enfant soit autiste.
- Speaker #0
D'accord.
- Speaker #1
C'est quelque chose que nous-mêmes, nous ne disons pas dans notre métier aussi facilement. C'est quelque chose qui est tellement lourd de responsabilité qu'on prend le temps et qu'il n'y a pas un seul thérapeute qui pose ce type de diagnostic. Donc, j'appelle aussi à la responsabilité des gens autour des parents qui ont leurs enfants en difficulté. ne posez pas de diagnostic. D'abord, ce n'est pas votre travail et vous ne savez pas ce que vous faites à des personnes qui entendent et réentendent des choses aussi dures. Donc moi, je reçois cet enfant, dont je reçois avec sa famille pour le pilon orthophonique. Et il se passe un truc, c'est que, donc pas de parole, il n'y a rien. Je le vois sur une séance. Et oui, il fait penser, en fait, il a des traits, il peut faire penser, même un professionnel, il peut faire penser à un enfant qui présenterait des traits autistiques. Et il y a un truc qui me dit, et en fait, je te raconte ça parce que je revois encore le regard de l'enfant qui me regarde, et il y a un truc qui me dit, patiente, patiente, patiente, patiente, patiente. Je le vois une fois. Je fais l'évaluation, je fais les tests que je dois faire, et puis je le reçois, je pense que je le reçois la semaine suivante. Et la semaine suivante, je le reçois. Au moment où je suis en train de me dire, moi aussi, je commence à me dire, bon, est-ce que on ne va pas commencer à réfléchir à du TSA ou à de l'autisme ? Je commence à... Je vois des signes, en fait. Je vois des choses. Donc, pour mieux comprendre, dans l'autisme, il y a des marqueurs. Et s'il y a absence de telles choses, par exemple, on peut commencer à penser à de l'autisme. D'accord. Sur la première séance, c'était pas là. Et sur la deuxième séance, il y a un bout. Ça n'apparaît pas, mais il y a un bout de ça qui apparaît. Ça n'apparaît pas complètement.
- Speaker #0
Un bout des marqueurs.
- Speaker #1
Un bout des... Alors, comment on va le dire ? L'absence du marqueur n'est plus totale. Première séance, l'absence est totale. D'accord. D'accord ? Enfin, l'absence du marqueur. Je vais essayer de m'exprimer correctement. L'absence d'un trait, l'autisme, c'est l'absence de certains traits. Par exemple, un enfant qui ne regarde pas, tu vas commencer à dire, bon, ça fait partie des traits. D'accord. Imaginons, ce n'est pas le cas, mais pour rendre la compréhension plus facile.
- Speaker #0
Imaginons qu'il ne t'a pas regardé toute la première séance.
- Speaker #1
La deuxième séance, il te regarde. Il commence à te regarder.
- Speaker #0
D'accord.
- Speaker #1
Là, il y a un truc qui me dit doucement. à nouveau. Et je revois le visage de l'enfant, doucement, doucement. Et c'est la première fois de ma vie que je me dis tout le monde s'est trompé. Et que j'ai littéralement l'impression que le gamin me parle, en fait. Donc, je décide de prendre le temps, ce que je ne fais pas souvent quand je dis de prendre le temps. Je prends le temps pour mes diagnostics, mais je décide de le faire revenir. Je pose un diagnostic de suspicion de retard de langage. Je crois que c'est ce que j'avais fait à l'époque. Je pose un diagnostic qui me permet en tout cas de ne pas « enfermer »
- Speaker #0
l'enfant dans une case.
- Speaker #1
Exactement. Et de me dire, on va gagner du temps. Je vais en parler avec les parents, je vais leur expliquer. Mais le bilan étant important, le document étant important, ce qui est marqué peut suivre l'enfant. Donc, c'est une vraie responsabilité. On ne fait pas n'importe quoi à ce moment-là. Et donc, je pose des précautions. Et en fait, au fur et à mesure, je vois l'enfant changer tout doucement. On n'est pas en train de parler de l'évolution du progrès, on est juste en train de parler de ce que je pensais qu'il avait ou ce que nous pensions tous qu'il avait. Et il y a un moment où j'en parle avec des collègues et on est deux, trois, et on se dit à un moment, on avait tous le même sentiment, il n'est pas autiste. L'histoire me marque, pourquoi ? Parce que, tout simplement, ce gamin qui aujourd'hui parle, au passage, parle et vit, et fait son petit bout de chemin, est hyper courageux et très bien entouré. Ce que j'ai tiré, ce que je tire de ce garçon, en fait, c'est moi qui suis professionnel, moi qui pensais savoir, il m'a appris quelque chose. Et tout à l'heure, on disait, on parlait des leçons de la vie, c'est important d'accepter, d'entendre et d'écouter. Et c'est l'une des premières fois dans ma pratique que ce type de cas est arrivé et qu'en fait, il m'a amené à l'écouter différemment. Enfin, il m'a amené à l'écouter et à pratiquer différemment de ce que je connaissais de l'école, en m'adaptant à un enfant qui était complètement différent et en... Voilà, en essayant de fonctionner un peu différemment de ce que je connaissais, donc en sortant de ma zone de confort. Et au moment où ces choses apparaissent, bien entendu, on se réajuste dans le diagnostic.
- Speaker #0
On a un peu plus de courage et puis voilà, on attaque la rééducation sous un angle un peu différent et on a commencé à avoir des progrès. C'était génial. Il y a eu des moments difficiles parce que tout simplement, il y a des moments où tu vas, tu travailles, tu travailles, tu travailles. Le progrès, il n'est pas linéaire, le progrès. Ce que j'explique souvent aux parents. Donc, on a des progrès et à un moment donné, ça s'arrête.
- Speaker #1
Ça s'arrête, ça stagne. Ça stagne.
- Speaker #0
Et puis, tu dois comprendre que tu dois continuer de travailler en fait avec cet enfant. Il ne faut pas s'arrêter. Et à un moment, tu vas avoir encore un effet où il va grimper, il va décoller. Et moi, ce que ça m'a appris à ce moment-là, d'abord, c'est la notion d'accepter d'attendre, la notion d'accepter de patienter, c'est la notion de prendre ce que cet enfant te donne à ce moment-là. Mais c'est surtout la notion de ne jamais accepter l'idée qu'on peut enfermer un être humain dans une case et dans une définition. On peut essayer de faire beaucoup de choses, on peut essayer d'adapter. On avait à ce moment-là, ça remontait il y a quelques années, et c'était l'un, au passage d'ailleurs, c'est assez intéressant que ce soit cette histoire, parce que c'était l'une des premières fois qu'on soulevait à un moment donné dans l'étude du cas, la notion. d'écran.
- Speaker #1
Ok, d'accord.
- Speaker #0
Donc en fait, on s'est rendu compte qu'il y avait peut-être un retard un peu global, que les écrans avaient eu un peu d'impact, mais qu'en tout cas, cet enfant n'était pas dans ce qu'on pensait au début. Et le danger un peu dans ces situations-là, c'est de se tromper dans le diagnostic et d'envoyer cet enfant-là dans un circuit qui n'est absolument pas adapté.
- Speaker #1
C'est ça, parce qu'une fois que l'erreur est posée, c'est des traitements, c'est des trucs qui vont être faits et qui vont l'enfoncer plus qu'autre chose. donc c'est très dangereux,
- Speaker #0
c'est pour ça que comme tu dis beaucoup de précautions le poids de poser un diagnostic c'est pas évident non c'est pas évident et c'est pour ça que c'est important c'est important que les parents comprennent que souvent, parce que souvent les parents arrivent avec leurs enfants, et on les comprend arrivent et ont envie de dire, il a quoi ? Si là, tout de suite, j'ai mal à la tête et que je prends un thermomètre et que je prends ma température et que j'ai de la fièvre, oui, j'ai de la fièvre. Si j'ai mal au ventre, j'ai mal au ventre. Mais là, c'est complètement différent. Vous allez voir un médecin, il peut vous prescrire une radio. On va voir, c'est plus concret. Là, en orthophonie, c'est différent. On est sur des choses qui sont quand même plus complexes à observer et donc plus difficiles à expliquer. Et quand elles peuvent être expliquées, parfois, elles peuvent être expliquées, mais par des mots qui peuvent être difficiles ou lourds. Ça ne veut pas dire qu'on a peur de poser ces mots, on a juste besoin de nous assurer que ces mots sont adaptés à ce qu'on voit là, tout de suite, maintenant, mais qu'ils seront valables dans... les prochains mois, dans les prochains jours ou dans les prochaines années, sachant que, bien entendu, on essaie de faire évoluer la chose positivement. Donc, on est toujours dans la... On essaie de rester au maximum dans la patience, dans la bienveillance. On essaie de faire valoir une véritable expertise. C'est important. Et puis surtout, on ne s'emballe pas quand on pose un diagnostic. J'ai énormément appris de ce gamin, et il fait partie de ce qui, aujourd'hui, je le vois encore aujourd'hui, de temps en temps... Et il grandit très bien. Il fait partie de ceux qui, moi, m'ont éclairé complètement. Tu les vois et tu te dis, le chemin a été long quand même.
- Speaker #1
C'est pour ces moments que j'ai fait ça. Voilà,
- Speaker #0
c'est ça. Ça ou une maman que je vois, je ne vais pas raconter l'histoire parce que j'étais déjà raconté l'histoire, mais ça ou une maman qui pleure en salle d'attente parce qu'elle vient me montrer... ou me dire que son enfant parle et que tu te rends compte qu'en fait elle pleure mais t'as d'autres parents qui sont là parce que les gens ils viennent ils ont les mêmes horaires, ils commencent à se connaître un peu et elle, elle arrive avec son histoire, elle est en larmes complètement, toi tu sors pour prendre un patient t'as toute la salle d'attente qui pleure c'est fou, et qui pleure parce que l'enfant parle, l'enfant il est là, il est en train de parler et elle appelle le papa qui est en réunion moi je fais ce métier pour ces moments là ça pour moi ça explique Ça vaut tous les sacrifices du monde. Et ces enfants-là, même s'ils ne sont pas mes enfants, ce sont mes enfants quand même.
- Speaker #1
En tout cas, Christian, je te remercie énormément.
- Speaker #0
Merci pour l'invitation.
- Speaker #1
Parce que c'est hyper inspirant de voir que tu peux tomber sur ta passion par hasard. Tu peux impacter des vies. Tu peux changer de route autour d'un caldou. tu vois bêtement mais moi ce que je vais surtout retenir de notre discussion c'est ça c'est le côté t'as cru en ton chemin sans tu sais on raconte souvent les histoires de oui depuis petit moi je savais que je devais faire ça tout et tout tu t'es tombé dedans sans faire exprès ouais t'as foncé. Aujourd'hui, on voit que t'es épanoui dans ce que tu fais. On voit que t'es heureux dans ce que tu fais. On voit que tu prends du plaisir à aider les gens et à impacter. J'espère que dans notre discussion, on aura permis à des gens de connaître déjà un peu mieux le métier. On aura permis à des gens peut-être de se rendre compte qu'il faut parler, il faut communiquer, il faut prendre du temps avec ses enfants. Et surtout, inviter les gens qui ont des questions, qui ont des doutes peut-être sur ce qu'ils vivent eux-mêmes, ce qu'ils vivent avec leurs enfants, de ne pas hésiter à aller voir un orthophoniste et à aller exposer en tout cas les questions qu'ils ont et qu'on pourra peut-être leur donner des réponses et on pourra peut-être les aider dans ce qu'ils traversent aujourd'hui. En tout cas, j'espère que tu as passé un aussi bon moment que moi.
- Speaker #0
J'ai passé un très bon moment.
- Speaker #1
La team incroyable. Nous, on a passé un super moment. J'espère que vous aussi, vous avez passé un super moment. Si vous avez des questions pour Christian, n'hésitez pas en commentaire. De toute façon, je vous mettrai aussi tous ces réseaux dans la description. Et n'oubliez pas, abonnez-vous. Un petit message, un petit like. Ça aide l'algorithme. Ça aide à faire voir ce que Christian fait. Et je vous dis à très vite pour un nouvel épisode du Offshore.
- Speaker #0
Peace,
- Speaker #1
la famille.
- Speaker #0
Merci. Orsos