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Les alignées

D'une prise de conscience en Inde à son implication pour la Croix-Rouge : le parcours d'engagement aux milles facettes de Fatima

D'une prise de conscience en Inde à son implication pour la Croix-Rouge : le parcours d'engagement aux milles facettes de Fatima

48min |20/05/2025
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D'une prise de conscience en Inde à son implication pour la Croix-Rouge : le parcours d'engagement aux milles facettes de Fatima

D'une prise de conscience en Inde à son implication pour la Croix-Rouge : le parcours d'engagement aux milles facettes de Fatima

48min |20/05/2025
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Description

On rencontre rarement une personne qui a passé des mois sur le terrain en zone de conflit pendant quatre ans pour aider les populations (Ukraine au début de la guerre, Yémen, Congo, Nigeria et Ethiopie).

On rencontre exceptionnellement une personne qui se révolte depuis l’enfance de la condition des femmes et qui est parvenu à faire reconnaitre des oubliées de l’histoire.

On rencontre peu une personne qui se donne comme intention de s’émerveiller des choses simples.

Alors est-ce que tu imagines la probabilité de rencontrer une personne qui soit tout cela à la fois ?

 

Cette personne, c’est Fatima Sator. Son parcours d’alignement est, n’ayons pas peur des mots : I-N-C-R-O-Y-A-B-L-E. Et cet interview l’est encore plus tant il est authentique.

 

Je remercie Fatima d’avoir accepté mon invitation et lasse place à ce nouvel épisode des alignées qui raisonnera avec nombre d’entre vous.


Pour aller plus loin :

Podcasts en français :

Un podcast à soi Charlotte Bienaimé pour Arte

Le cœur sur la table et les couilles sur la table de Victoire Tuaillon

Emotions de Louie Media

La terre au carré par Mathieu Vidard.

Philosophie sexy de Marie Robert

 

Podcast en anglais

On Being de Krista Tippett


Livres

Titiou Lecoq - Les Grandes Oubliées

Mona Chollet

Chimamanda Ngozi Adichie – Nous sommes tous des féministes

 

Pour suivre Fatima :


 ✨ Si veux en savoir plus sur Les alignées, file découvrir le site internet www.lesalignees.com ou sur mon LinkedIn dans lequel tu découvriras comment nous oeuvrons pour transformer le monde professionnel pour plus d'alignement des salarié·es et la mixité femme/homme.


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Bienvenue sur Les Alignés, je suis Charline Moreau, consultante et coach en entreprise et depuis plus de trois ans, je tends le micro à des femmes qui ont osé aligner leur vie avec leur valeur. Depuis toujours, ce sont des conversations authentiques avec des femmes sur leur parcours qui m'ont permis de profondément questionner ma vision de l'ambition et de la place que je voulais prendre. Alors je me suis dit que ces échanges intimistes pourraient inspirer d'autres personnes s'ils étaient diffusés plus largement. C'est comme ça que les alignés sont nés. Tous les 15 jours, je partage avec toi des discussions inspirantes où l'on parle de tout. De pro, de perso, de passion, de reconversion, de réussite, de doute ou encore d'engagement. Parce que trouver sa place en tant que femme dans la société est un cheminement. Et chaque parcours peut nous éclairer. Si ce podcast te plaît déjà, j'ai besoin de toi pour le faire grandir. Partage-le à une personne qui en a besoin. Et surtout, laisse-moi un commentaire et 5 étoiles sur ta plateforme d'écoute préférée. Je sais, ça n'a l'air de rien. Mais c'est vraiment très utile pour moi et pour faire connaître ce podcast. Maintenant, je laisse la place à ce nouvel épisode des Alignées. On rencontre rarement une personne qui a passé des mois sur le terrain en zone de conflit pour aider les populations. On rencontre exceptionnellement une personne qui se révolte depuis l'enfance de la condition des femmes et qui est parvenue à faire reconnaître des oubliés de l'histoire. On rencontre peu... une personne qui se donne comme intention de s'émerveiller des choses simples. Alors, est-ce que tu imagines la probabilité de rencontrer une personne qui soit tout cela à la fois ? Cette personne, c'est Fatima Sator. Son parcours d'alignement est, n'ayons pas peur des mots, incroyable. Et cette interview l'est encore plus tant il est authentique. Je remercie Fatima d'avoir accepté mon invitation et laisse place à ce nouvel épisode des Alignés qui résonnera avec nombre d'entre vous. Bonjour Fatima !

  • Speaker #1

    Bonjour Charline !

  • Speaker #0

    Comment vas-tu ?

  • Speaker #1

    Ça va bien et toi ?

  • Speaker #0

    Écoute, je vais super bien, je suis ravie. On est dans un endroit extraordinaire, puisqu'on est au CICR, donc le Comité International de la Croix-Rouge. Je pense que là, en termes de grades, le podcast a pris énormément de grades vu la pièce dans laquelle on enregistre. Et je te remercie de m'inviter dans cet endroit assez fabuleux.

  • Speaker #1

    Merci à toi, merci de venir jusqu'ici. C'est trop bien de t'avoir.

  • Speaker #0

    Écoute... Voilà, même si on est au CICR, on a à cœur ici dans les alignés d'avoir une discussion authentique sur toi, ton parcours. En fait, c'est vraiment pour ta personnalité, pour qui tu es que je suis venue jusqu'à Genève. En tout cas, les personnes qui ne te connaissent pas ici, elles ont envie de connaître ton parcours. Et que je te pose cette première question que je pose à toutes mes invitées, qui semble simple, mais qui en réalité est assez complexe. Fatima Sator, qui es-tu ?

  • Speaker #1

    Oh, sacrée question ! déjà là c'est très philosophique je me demande si on arrive à y répondre ou alors peut-être ça prend presque toute une vie en fait pour avoir la réponse si je reste un peu dans le métaphysique je te dirais que je suis un peu une exploratrice de la vie exploratrice de cette planète on vient là, on n'a pas beaucoup de temps on a un peu de passage on fait des rencontres merveilleuses on expérimente des choses, on expérimente la vie On expérimente un voyage intérieur aussi. Enfin, voilà, on a un peu ce moment sur Terre qui est magique. Et du coup, je pense que la question qui est dessus, ça revient un peu à qu'est-ce qui me définit. Donc, si je devais un peu redescendre de la métaphysique pratico-pratique, comme tu vois, je suis une femme. J'ai, disons, les valeurs qui me définissent, ça serait... Pour moi, c'est très, très important la question d'humanité. Donc, je me définis déjà comme humaine. qui vit avec tout plein d'autres petits humains autour de moi. Et j'adore ça. J'adore l'humanité, j'adore les gens, j'adore la beauté de l'humanité. Et donc, je suis, évidemment, je travaille ici au Comité international de la Croix-Rouge. Je suis aussi une amie, une partenaire, une fille. Voilà, j'ai plusieurs casquettes en fonction de... à qui tu demandes. Mais non, aujourd'hui, je ne saurais pas vraiment te répondre clairement de qui je suis sans, comme on se le disait, s'identifier à un travail, parce que c'est très souvent, en fait, je pense que tu le vois très souvent, on va se présenter en présentant notre travail. Et j'essaye de faire vraiment ce travail, de me dire qui suis-je autre que ce que je fais ? Qu'est-ce qui me définit ? C'est toute une recherche, c'est très beau, c'est une chouette aventure.

  • Speaker #0

    C'est très beau. En fait, dans le podcast, il n'y a pas d'image. Moi, ce que je peux dire, c'est que j'ai observé que quand tu as utilisé le mot humanité, tu as vraiment le visage qui s'est éclairé. J'ai ressenti que c'était très important pour toi. J'ai envie que les personnes qui nous écoutent sentent que ce mot-là, il n'a pas seulement juste une connotation toute simple, mais que vraiment, il y a une sorte d'énergie qui vient t'animer quand on parle. J'espère que vous aussi, maintenant que je vous en parle, vous pouvez visualiser Fatima qui s'anime quand on parle d'humanité. effectivement tu travailles au comité international de la Croix-Rouge et là c'est ce que tu fais maintenant mais dans ce podcast en fait pour aller creuser un petit peu plus loin au-delà de la métaphysique en fait j'ai développé une méthode assez simple dans laquelle je demande à mes invités de revenir sur leur parcours d'alignement et en fait en réalité j'aurais peut-être dû parler de désalignement de moments où finalement tu as ressenti le besoin d'aligner ta tête, ton cœur et ton corps quand je te parle de ça il y a probablement un tout premier moment qui devient en tête Je serais bien curieuse de savoir quel a été ce tout premier moment pour toi.

  • Speaker #1

    Oui, volontiers. Alors, je crois que je te rejoins complètement dans cette idée de, j'ai l'impression, en tous les cas, un de mes objectifs et ce qui m'anime beaucoup, c'est toute cette question de déconstruction. Donc, un peu comme si on était un oignon avec plein de couches et qu'en fait, chaque expérience, chaque journée, chaque apprentissage nous amène à enlever chaque couche pour finalement se retrouver. Donc c'est vrai que cette question de presque de se désaligner pour finalement s'aligner, elle est très importante pour moi. Et écoute, moi, je pense que j'ai eu plutôt, c'est un peu comme le bonheur, j'ai des moments d'alignement. Il y a des moments où je me désaligne un peu, et il y a des moments où je me sens clairement alignée. Et un des moments qui m'a particulièrement marquée, je dirais, donc j'ai beaucoup voyagé dans mon enfance et dans mon adolescence, et après plus tard encore, et c'était un moment, on était en Inde avec ma famille. Et je vois cette scène d'une jeune fille qui avait été probablement, je m'imagine, mariée de force. Et en fait, je la voyais, elle pleurait, elle ne voulait pas suivre sa famille ou son mari, qui clairement avait une grande différence d'âge. Et là, tout s'est allumé en moi. Il y avait la révolte, il y avait l'indignation, il y avait la colère. Et c'est là que j'ai vu, donc j'avais 14 ans, et je me suis dit, mais en fait, non, je... je veux faire quelque chose, ça a été vraiment un peu l'élément déclencheur, je veux faire quelque chose pour mon temps sur cette planète qui va contribuer à changer d'une certaine manière la vie des femmes, ou en tout cas encore que ce qu'elles soient, que ce soit les femmes à côté de moi ou les femmes plus loin, mais en tout cas je me suis vraiment rendue compte de la dynamique de pouvoir, du patriarcat, de toutes les injustices, de qu'est-ce que ça veut dire être née femme. Et en fait, je me suis rendue compte, je me suis dit, mais en fait, la seule chose qui me sépare de cette femme, de cette jeune fille qui a à peu près le même âge que moi, c'est juste que j'ai eu le privilège de grandir et de vivre dans un autre pays. Mais c'était juste une pure chance. Donc, c'est vrai que c'était à ce moment-là où j'ai vraiment senti que tout était aligné et que c'était dans ce domaine-là que je devais aller, d'une manière ou d'une autre.

  • Speaker #0

    Et à ce moment-là, tu as 14 ans. On a envie de savoir un peu à quoi ressemble ton quotidien, tu vois, t'habites où ? Parce qu'effectivement, déjà, t'es en Inde à 14 ans, ce qui est assez exceptionnel. Et quand même, c'est une prise de conscience qui est, j'allais dire, alors peut-être que je vais utiliser des mots que t'as pas du tout ressenti, donc tu me dis si c'était pas ça. Mais moi, effectivement, à 14 ans, comprendre qu'il y a ce monde-là dans lequel tu nais femme et finalement qu'il y a une énorme différence entre les femmes et la manière dont elles sont traitées dans le monde. Voilà, j'ai envie de savoir, tu pars d'où ? en arrivant en Inde ?

  • Speaker #1

    Oui, alors je pars quand même, je viens quand même d'une famille, donc je suis née en Algérie, je viens d'une famille très « ouverte » , avec un papa très féministe, une maman aussi, donc ils m'ont vraiment poussée dans ces réflexions-là. Mais reste que, c'est vrai que en tant qu'Algérienne, il y avait tellement de choses qui me révoltaient, depuis toute jeune, je voyais la différence de traitement de la société par rapport à mon frère. Des histoires toutes basiques, d'héritage, comme quoi la loi lui donne le double d'héritage que moi, potentiellement. J'ai été mise dans ce bain de, déjà, tu es née femme, donc tu es inférieure d'une certaine manière, donc tu as d'autres droits, etc. Donc depuis toute petite, ça m'a toujours... Je me rappelle, je disais à mes parents, je devais avoir 8-9 ans, je disais que mon rêve ultime, c'était de renaître homme. Je me déguisais dans la rue en homme. pour voir ce que c'était d'être homme dans une société patriarcale. Donc ça m'a toujours énormément animée. Et très vite, j'ai commencé à poser beaucoup de questions, à tout décortiquer. Donc je ne prenais pas grand-chose pour acquis. Si on me dit, ça c'est comme ça, non ça ne me va pas. Je vais essayer de comprendre pourquoi, pourquoi on en est arrivé là. Évidemment, l'épisode, cette période en Inde où j'étais scolarisée, où j'ai fait quelques années d'études là-bas, c'est encore plus renforcer cette... Cette problématique qui, je pensais, à l'époque, était seulement dans mon pays. Je me suis rendue compte que non. Jusqu'à aujourd'hui, on ne peut absolument pas dire qu'il y a un seul pays qui atteint l'égalité hommes-femmes. C'est révoltant, c'est inacceptable. Je me dis qu'on est en 2025. On arrive à faire plein de choses. On a envoyé des hommes sur la Lune, et des femmes d'ailleurs. Des vaccins, des soins, tout ce qu'on veut. Mais... sur ce point-là, on parle quand même de 50% de la population. Et c'est énorme.

  • Speaker #0

    Et c'est drôle quand tu parles de ça, parce qu'il y a vraiment le sujet du rapport à la domination du patriarcat. En fait, souvent, moi, quand j'utilise ce mot qui, pour beaucoup de personnes, est un gros mot, et qu'on résume ça à, finalement, un esprit de domination, je te dis, ok, il y a finalement une différence entre deux populations qui sont équivalentes à la 50% de la population mondiale. Mais alors, bon, après, moi, je vais te dire, je vais te taquiner, parce que je vais te dire... Ouais, OK, t'as 14 ans. Là, tu te rends compte quand même qu'il y a un problème majeur dans la société. Et finalement, on a été nombreuses à se rendre compte de ça. Mais toi, t'as décidé de prendre le sujet à bras le corps. C'est-à-dire que tu t'es dit je vais faire ça de ma vie. Ce qui est quand même quelque chose d'assez exceptionnel. Et pour les personnes qui écoutent ce podcast, qui cherchent à s'aligner, qui cherchent à s'inspirer de Parcours, moi, j'ai envie de savoir en fait, comment tu t'es mis en mouvement face à cet objectif d'agir sur le patriarcat, sur la mixité femmes-hommes ? Comment t'as fait ? Alors bon,

  • Speaker #1

    c'était pas simple. Et je pense que c'est jamais simple. Et aujourd'hui, c'est encore la galère. Comme pour moi, pour toutes les femmes, en fait. Je pense qu'on n'y arrivera jamais complètement. Mais en tous les cas, je pense que même quand on se dit « Ah, mais ça y est, j'y suis arrivée dans cette égalité-là. » Non, en fait, non. Il faut encore se battre. Et c'est jamais à prendre pour acquis. L'histoire nous le montre. Non, écoute, en fait, à l'époque, je m'étais dit que je voulais être journaliste. Donc, en fait, je me suis dit que c'était la meilleure manière de raconter tout ça. Et c'était un peu cette phrase qui dit « oui, donnez la voix à ceux qui n'en ont pas » . On me dit « moi j'ai accès à certaines plateformes, je vais avoir accès à des études, donc j'ai envie de raconter tout ça » . Donc j'ai fait des études, alors ce n'était pas tout de suite le journalisme, d'abord je me suis un peu trompée, enfin pas beaucoup de compassion pour moi, parce que dans le sens où je trouve que ce n'est pas facile aujourd'hui de s'orienter, et on n'a pas forcément toujours les bonnes béquilles pour. Donc j'ai fait d'abord de l'économie, donc rien à voir. économie et finance, donc juste après le bac du coup, et j'étais bonne à ça et je détestais ça. Donc ça c'est toujours un peu le moment frustrant où tu te rends compte qu'en fait t'es bonne à un truc, mais t'aimes pas du tout ça. Et donc du coup j'ai attendu patiemment que ces trois ans passent et je me suis inscrite en master de journalisme. Au début c'était assez intéressant parce que j'ai essayé en France. Alors en fait j'ai fait des études à Lyon et puis après j'ai fait une année d'échange à Los Angeles, ça c'était vraiment cool. J'avais bien choisi l'échange. Et puis après, je voulais absolument retourner au journalisme. J'avais essayé des universités en France. Et en fait, je revenais toujours avec... C'est toujours le même retour. On me disait, ben non, t'as un profil plutôt d'économiste. Vous avez une licence en économie. Non, vous avez un bac S. Non, non, il n'y a pas de place, en fait, pour le journalisme là-dedans. Puis après, on m'a dit, à part si vous faites, je ne sais pas, journaliste, finance, finance ou économie, moi, j'en pouvais plus. Et donc, du coup, j'ai essayé d'autres pays en Europe. Et puis, la Suisse. La Suisse qui est étonnamment moins, entre guillemets, moins carrée. Puis du coup, en fait, on m'a acceptée directement au journalisme. Et là, c'est vrai que j'avais des camarades en théologie. C'était super intéressant. C'était des gens qui n'avaient absolument rien à voir avec ce cursus-là. Et là, ça a été l'éclate. Et là, j'ai vraiment adoré. J'ai adoré le journalisme. J'ai adoré raconter des histoires. j'ai adoré, je pense que c'était encore une fois cette valeur d'humanité qui était clairement honorée. parce que du coup, c'était aller à la rencontre de gens, des gens qui ne me ressemblent pas forcément, des gens qui ne pensent pas forcément pareil que moi, qui n'ont pas le même background socioculturel. Et c'était extrêmement enrichissant. Donc ça, c'était des années que j'ai adorées. Puis après, j'ai travaillé en tant que journaliste jusqu'à ce que je me rende compte que j'aimais beaucoup. J'ai fait beaucoup de local, disons. Par contre, il y avait clairement la dimension internationale qui me manquait. Et en fait, je me suis dit, moi, je vais être reporter de guerre. Et là, pour faire ça, on m'a expliqué. qu'il fallait idéalement faire un master en Angleterre. Et c'est ce que j'ai fait. J'ai enchaîné, j'ai fait un master à Londres. Et après, très vite, je me suis retrouvée dans le système international. Donc, j'ai d'abord travaillé aux Nations Unies, quelques années, ici à Genève. Et puis finalement... Aux Nations Unies, j'ai d'abord travaillé un moment pour l'ONU Femmes. Ensuite, je suis arrivée dans l'humanitaire. Je me suis dit, OK, en fait, c'est très sympa. C'est sympa à partir de Genève, mais je parle de la souffrance des gens et tout. Mais clairement, ça donne quoi ? C'est quoi le terrain et de quoi je parle ? Et c'est à ce moment-là que j'ai décidé de rejoindre le comité international de la Croix-Rouge. Et je suis partie quelques années essentiellement en Afrique.

  • Speaker #0

    C'est vrai qu'à un moment donné, il y a un saut. dans le vide où tu vois que tu parles de d'un coup j'ai voulu devenir reporter de guerre et je pense que les personnes qui nous écoutent se disent non mais qui est cette personne derrière ce micro parce qu'effectivement tout à l'heure on parlait ensemble en off, on se disait que finalement on n'était pas vraiment notre travail mais je m'imagine le fait de devenir reporter de guerre fait que ton travail est toute ta vie puisque j'imagine que ça prend toute la place Et donc, j'ai envie de savoir, toi qui étais engagée déjà au niveau des valeurs sur les femmes, qu'est-ce que tu retiens de ces années de reporter de guerre ? Qu'est-ce que ça t'a apporté ? Et aussi, au micro des Alignés, on a envie de voir un peu les deux côtés de la médaille. Parce que les personnes qui nous écoutent, c'est un peu un métier qui fait rêver. C'est un peu une vie qui peut sembler complètement pleine de sens et d'alignement. Et moi, j'ai envie de savoir qu'est-ce qui se passe derrière cette image. toute policée, toute jolie, toute vernie du reporter de guerre qui va raconter des histoires fondamentales pour l'humanité finalement.

  • Speaker #1

    Alors oui, finalement, je ne suis pas tout à fait devenue reporter de guerre. Je travaille du coup, je fais de la communication au CICR qui est une organisation humanitaire. Et ça ressemble beaucoup quand on est sur le terrain. Donc après, c'est clairement pas évident sur plein de plans. Mais je pense qu'en fait, la première fois que j'ai mis ma première mission était au Congo. J'avais 26 ans. Et là, en fait, on perd vraiment tous ses repères et on perd aussi surtout. Et d'où je reviens encore sur cette idée d'humanité, c'est-à-dire qu'en fait, je me disais, mais évidemment que moi, si j'étais née dans un pays en guerre que je n'avais pas depuis plus de 25 ans, que je n'avais pas eu accès à l'éducation, etc. Comment je réfléchirais ? Et en fait, c'est aussi des expériences qui m'ont appris que rien n'est noir ou blanc et qu'en fait, finalement, à mettre beaucoup de compassion. dans nos échanges, parce que finalement, on galère tous d'une certaine manière, avec des insécurités, avec des peurs, on l'a tous à un certain niveau, et donc en fait, par exemple, on faisait des visites en prison quelquefois, et moi, en fait, moi ce qui m'intéresse dans cette visite en prison, c'est juste l'humain qui est en face de moi, donc je vais pas du tout voir de quoi il est là, qu'est-ce qu'il a fait, pourquoi il s'est retrouvé là. Ce qui m'intéresse, c'est juste le fait que ce soit un fils, un frère, potentiellement un ami. est en fait un humain et qu'il a des droits de base, une dignité de base. Et donc, c'est vraiment de retourner dans cette humanité pure. J'ai aussi rencontré sincèrement des gardiens de prison qui faisaient leur maximum pour que ça se passe bien. J'ai rencontré en même temps des humanitaires qui étaient exécrables. Donc, voilà que, évidemment, notre travail ne nous définit pas, mais qu'il n'y a pas... Tout est très complexe, en fait. Tout est très gris. Et du coup, ça m'a appris à poser des questions, à comprendre. Et à essayer, oui, de mettre un peu cette bienveillance un peu partout.

  • Speaker #0

    À mettre un petit peu de nuance dans tout, finalement.

  • Speaker #1

    C'est exactement ça le mot, c'est nuance. Et aujourd'hui, dans un monde aussi polarisé que le nôtre, c'est quasiment la chose la plus dure. Parce que c'est presque facile de prendre un côté ou un autre et de dire, en fait, celui qui est en face de moi, il a tort, c'est moi qui ai raison. C'est presque trop facile intellectuellement. Mais en fait, de mettre un peu cette nuance, d'être un peu plus au milieu, d'ouvrir son cœur en se disant « Ok, mais en fait, moi, je ne pense pas pareil parce qu'il y a des raisons. Cette personne pense comme ça parce qu'il y a d'autres raisons. » C'est très, très difficile parce que du coup, ça touche, ça chamboule, ça chamboule tout ce qu'il y a en nous, ça chamboule notre éducation, ça chamboule notre identité, ça chamboule notre égo. donc voilà de faire encore cet effort de se dire mais attends en fait de déconstruction, de dire je vais quand même laisser une chance, je vais essayer de comprendre, et de permettre encore cette zone de la rencontre, juste de pouvoir se rencontrer au milieu, parce qu'autrement sinon on a des blocs parallèles et puis il n'y a jamais de rencontre. C'est un peu triste.

  • Speaker #0

    Et surtout dans le monde dans lequel on vit en ce moment, où ça fait complètement écho, je trouve, le fait de garder des espaces de rencontre, des espaces dans lesquels on essaie de se comprendre. Je trouve que c'est hyper intéressant, très fort de parler de ça maintenant, aujourd'hui. Tu le sais, dans les alignés, et notamment moi, je travaille beaucoup sur la place des femmes en entreprise. Et je ne peux que peut-être, à la lumière de tout ce que tu... C'est un peu une question piège. À la lumière de tout ce que tu as vu, de toutes les rencontres que tu as faites, du monde dans lequel on est aujourd'hui. J'aimerais bien savoir quelle est ta vision, justement, de quelle va être la rencontre de tout ce qui est en train de se passer sur la diversité, l'inclusion, la place des femmes. Est-ce que tu as envie de nous donner un peu ta vision de ce qui va se passer ou c'est un peu une question trop complexe ? Non,

  • Speaker #1

    pas du tout, elle est très importante. J'ai toujours eu de l'espoir et j'en ai encore. Je refuse de courber à ces moments-là parce que... Et au contraire, je me dis des fois qu'il y a même... Il y a des moments d'histoire, je ne dis pas qu'on en a besoin du tout, mais qui peut-être amènent ce coup, déjà qui nous rappelle qu'on n'est jamais trop confortable, qu'il n'y a jamais d'acquis, surtout, que ça nous rappelle que c'est aujourd'hui qu'il faut prendre position. Donc je l'utilise presque comme le moment pour encore plus affirmer, affirmer ses valeurs, affirmer nos droits. Et je dirais qu'au contraire, ça peut être vraiment utilisé comme un catalyseur pour rendre les choses, pour arriver peut-être plus rapidement. Et surtout, c'est un super rappel qu'encore une fois, on est loin de se reposer sur ses lauriers et de se dire, en fait, moi, j'ai beaucoup travaillé avec des chercheuses universitaires. Donc avant, l'humanitaire, c'était plutôt une carrière académique. On en parlera plus tard. Et en fait, j'ai rencontré beaucoup de chercheuses. dans des universités nordiques, donc la Norvège, la Suède et tout. Puis elle me disait à quel point que leur débat, c'était non mais attends, on ne va plus vraiment fêter la journée internationale des droits des femmes. On n'en a plus besoin parce qu'on y est arrivé. Et en fait, je te dis mais non, en fait, on n'y est pas arrivé. On n'y est pas arrivé et il faut toujours continuer à se battre et juste ne pas oublier.

  • Speaker #0

    Ne pas oublier et ne jamais rien prendre pour acquis. Et puis comme tu le disais très bien, en fait, le patriarcat est partout. Il n'y a aucun endroit, il n'y a aucun modèle, même dans les pays du Nord où tout est complètement équilibré. Donc, en fait, finalement, on n'y est pas. Et tu vois, je trouve ça très intéressant que tu parles de chercheuse dans ces sujets-là, parce que même sur le sujet de la place des femmes en entreprise, quand on commence à creuser le sujet, au début, les personnes nous disent un peu, non, mais en fait, c'est un truc, tu vois, un truc de bonne femme, un truc de l'émotionnel. En réalité, on y est. finalement, vous pouvez prendre votre congé maths et tout va bien. Je caricature. Moi, j'ai une amie qui a réussi à avoir un super poste après son congé maths. Oui, OK, fine. Mais heureusement, il y a des chercheurs, des chercheuses qui vont mettre de la nuance, qui vont aller mettre des chiffres, des études derrière ces sujets-là. Et on en a besoin pour savoir un peu où on en est. Tu parles de chercheuse. Et en fait, c'est quand même un sujet qui m'a paru très intéressant quand je t'ai rencontrée. C'est toutes les recherches que tu as faites sur une certaine personne. Est-ce que tu as envie de nous en parler un peu ? Oui,

  • Speaker #1

    avec plaisir, j'adore en parler. Oui, alors en fait, quand j'ai terminé mes études à Londres, je devais chercher un sujet de thèse. Et puis, je vais à l'université LSE, London School of Economics, la bibliothèque. Et en fait, je tombe sur ces archives d'une femme que je ne connaissais pas, qui s'appelait Berta Lutz, donc une brésilienne. que je n'en avais jamais entendu parler. Moi, en plus, j'avais fait des études en sciences po, j'avais fait du journalisme, extrêmement intéressée par le féminisme, les relations internationales. Jamais entendu parler de cette femme. Et du coup, je commence à lire les archives. En fait, c'était elle racontait son rôle à ce qu'on appelle la conférence de San Francisco, qui était en fait la conférence fondatrice des Nations Unies à l'époque. Donc, on est en 1945, juste au lendemain de la guerre. Et en fait, elle raconte comment elle a dû se battre. contre tous les pays qui étaient présents. Donc déjà, en fait, il faut revenir un peu dans... Si on revient en 45, on est en 45, il y a seulement 3% de femmes qui sont présentes à la conférence de San Francisco. Et parmi ces 3%, seulement 4 ont signé la Charte des Nations Unies, qui est en fait le premier document de droit international qui mentionne l'égalité des genres. Et en fait, quand on regarde l'histoire derrière, c'est fascinant. Donc en fait, il y a cette femme qui a été envoyée spécialement par le gouvernement du Brésil à l'époque. pour s'assurer qu'il y ait une mention d'égalité des genres dans la Charte des Nations Unies. Moi, je me dis, mais attends, mais c'est pas possible que je ne connaisse pas cette femme. Enfin, je veux dire, on n'en a jamais parlé. Je commence à en parler autour de moi. On me dit, bon, non, aucune idée. Et du coup, je fais toute une recherche très longue sur elle. Donc, je vais un peu la découvrir de qui elle était, quel a été son rôle dans les relations internationales. Et en fait, je me rends compte que c'est grâce à elle, c'est grâce à elle et d'autres femmes d'Amérique latine en tout cas au niveau du droit international, des relations internationales, c'est grâce à ces femmes-là qu'on en est où on en est en termes d'égalité. Et c'était vraiment elles qui avaient poussé pour avoir un article spécifique sur l'égalité des genres en Nations Unies. Et c'est vrai qu'en fait, si ce n'était pas ça, peut-être la Déclaration universelle des droits de l'homme, on n'en serait pas, on n'aurait pas eu ce qu'on a réussi à avoir. Plus tard, il y a eu beaucoup de conférences autour d'égalité des genres. Et en fait, c'était grâce à ces femmes. Et ces femmes, de manière très intéressante, c'était des femmes, elle, elle se qualifiait entre guillemets de pays du Sud, donc c'était le Brésil. la République dominicaine, il y avait la Namibie aussi qui était présente. Il y avait beaucoup de pays qui, entre guillemets, se disaient du Sud, sachant qu'en fait, la majorité des pays étaient encore colonisés à l'époque. Donc, sur toute la représentation, il y avait certains de ces pays-là. Et en fait, de manière très intéressante, elles racontaient comment elles ont dû faire face à une opposition de ce qu'on peut appeler, entre guillemets, les pays du Nord. Donc, il y avait vraiment ce schéma de la diplomate américaine qui disait que... qui a expliqué à cette brésilienne, j'espère que tu ne vas jamais parler de l'égalité des genres à cette conférence, parce que ce serait très vulgaire. Donc, on repart dans toute cette déconstruction de la narrative dominante autour de ces questions-là, comme quoi, en fait, l'égalité des genres est plus une invention des pays du Nord. Et moi, c'est vrai qu'en fait, en tant qu'Algérienne, ça parle énormément, parce que moi, depuis toute petite, à chaque fois que je faisais mes discours féministes et que quand j'ai fait mon coming-out féministe, on me disait, on me disait, non, mais arrête. Ça, c'est un truc de là-bas, ce n'est pas un truc de chez nous. On a des problèmes économiques, etc. Et en fait, c'était vraiment cette question d'appropriation. Et je me suis dit, mais en fait, le féminisme, ce n'est pas du tout quelque chose des pays du Nord. En fait, c'est quelque chose de global, cette question d'appropriation. Et donc, du coup, c'est à ce moment-là que j'ai utilisé cette recherche un peu comme base pour rappeler la question d'appropriation autour du féminisme. Ma définition personnelle du féminisme, parce que je sais que c'est aussi un mot qui fait débat. Oui, tout à fait. Malheureusement. Alors, c'est plutôt, disons, ma définition, c'est vraiment tout simplement l'égalité. C'est juste, ou même de l'équité. C'est une équité homme-femme et au-delà, voilà. C'est juste les mêmes droits, les mêmes devoirs pour tout le monde. C'est pas forcément une lutte contre les hommes, au contraire, je considère que vraiment, ce serait des alliés pour y arriver. Et donc, c'est vrai qu'en fait, je m'étais aussi rendue compte, voilà, à chaque fois que je disais le mot féminisme, des fois, il y avait des gens qui étaient choqués.

  • Speaker #0

    Le côté assez militant, en fait.

  • Speaker #1

    Le côté militant, en fait, c'est vraiment, c'est une grosse caricature à ce niveau-là. Et donc voilà, du coup, j'ai fait beaucoup de recherches autour de cette femme-là et autour, oui, de cette question d'appropriation, de rappeler qu'en fait, les questions d'égalité sont la responsabilité de tout le monde et qu'on n'arrivera jamais vraiment à vivre bien, à avoir des sociétés fonctionnelles tant qu'on aura la moitié de la population qui n'a pas les mêmes droits que l'autre moitié.

  • Speaker #0

    Et tu parles de ça, en fait, quand tu nous as décrit ton parcours, on comprend que ça, ça arrive finalement très tôt dans ta vie. T'as quel âge à ce moment-là, quand tu découvres Bertha Lutz et que tu commences à travailler sur elle ?

  • Speaker #1

    Ouais,

  • Speaker #0

    22 ans.

  • Speaker #1

    22 ans, donc quand même, tu vois, fin d'études quasiment. Donc, c'était mon deuxième master que je faisais à l'époque.

  • Speaker #0

    Et là, tu vois, je t'imagine, à 22 ans, découvrant ce profil où finalement, tu te rends compte qu'elle a œuvré pour la cause qui t'avait mise en mouvement 8 ans avant. Quand je t'ai entendue la première fois, ce qui m'a marquée, c'est ta ténacité sur ce sujet-là. Est-ce que tu peux nous décrire un petit peu ce que tu as fait de tes recherches ? Parce que les personnes qui nous écoutent, ce qui m'a marquée dans ce que tu as raconté, c'est ta capacité à être tenace, à tenir le cap. Et moi, ma croyance, c'est qu'individuellement, si chacun va au bout de ses idées et promeut ce qui est important pour lui, alors les choses vont changer. Et donc, j'ai envie que tu nous décrives un petit peu cette ténacité dont tu as fait preuve après avoir découvert cette personne. Parce que finalement, ça aurait pu rester dans un mémoire au fond du placard. Et puis, c'est tout.

  • Speaker #1

    Clairement, non, complètement d'accord avec toi. Je pense que je me suis rendue compte de l'importance que c'était déjà dans la façon, l'impact que ça a eu sur moi et donc ma façon de m'approprier ces questions-là. Et je me suis dit, mais en fait, dans la situation dans laquelle aujourd'hui, on ne peut absolument pas se permettre d'oublier ces histoires. Il y a tellement d'histoires oubliées, notamment de femmes dans les relations internationales, dans la science, partout. Et en fait, je me suis dit, non, mais ça, c'est de l'or et on ne peut pas passer à côté. Alors, ce n'était vraiment pas facile. C'est vraiment pas facile parce que, comme tu dis, j'avais 22 ans. Je l'ai fait avec une collègue, une copine de fac à l'époque. On s'est mis à deux. Et ouais, on avait 22 ans. On n'avait pas vraiment d'expérience. On n'avait pas de thèse de doctorat. On n'était pas connus. Enfin voilà, pas du tout. Et oui, il y a vraiment cette question de tenacité. On n'avait vraiment pas lâché. Vraiment, vraiment pas lâché. Il y avait des moments où en fait, on se disait mais laisse tomber, ça sert à rien. On ne répond pas à nos mails. On demande des rendez-vous parce que nous, en fait, ce qu'on demandait, c'était il faut qu'on la connaisse, cette femme. On n'en a jamais entendu parler. Il faut qu'il y ait des films sur elle. Il faut qu'il y ait des affiches. Elle est où et tout. Et donc, en fait, on poussait, on poussait des portes et tout. Et soit on ne nous recevait pas. C'était vraiment galère. Puis on se disait mais attends, mais est-ce qu'il y a eu mille fois où on s'est dit mais laisse tomber en fait. C'est bon, on a fini nos études, c'est bon, on laisse tomber. Voilà, ils ne veulent pas qu'elle soit connue. Voilà, ce n'est pas notre problème et puis tant pis. Et en fait, on s'est dit, ben non, en fait, on ne peut pas au nom de plein d'autres femmes que ça pourrait toucher, au nom de l'histoire, au nom de l'égalité. On ne peut pas juste abandonner. Et non, on a vraiment insisté. Alors, c'est intéressant par rapport Ausha des mots, parce que je pense que...

  • Speaker #0

    On pouvait être un peu décrite quelquefois comme entre guillemets en kikineuse pour ne pas dire autre chose. Chose que peut-être un homme, on aurait dit, voilà, tenace.

  • Speaker #1

    Il est tenace.

  • Speaker #0

    Donc c'est très bien que tu utilises ce mot. Et ça, c'est vraiment un des conseils que je donne. Je parle quelquefois dans des écoles et tout à des personnes en fin d'études ou d'ados. Je dis mais juste ne lâchez pas. Lâchez pas parce que ça vaut vraiment le coup. Et si vous, vous y croyez, c'est tout ce qui compte. C'est tout ce qui... Et c'est ce qu'on se disait un peu tout à l'heure, avant le début de l'enregistrement, peut-être juste de se dire d'essayer. D'essayer, c'est déjà énorme. Est-ce qu'on va réussir ou pas ? Ça, c'est une autre question. Mais juste d'essayer, c'est déjà tellement important.

  • Speaker #1

    Et parfois, ça marche.

  • Speaker #0

    Souvent, ça marche.

  • Speaker #1

    Et finalement, tu vois, quand tu nous parles de Bertha Lutz, qui, je pense, va énormément... Enfin, son parcours, le fait qu'elle ait été une femme parmi les quatre... présente sur un événement majeur en 1945, l'initiation des Nations Unies, qui n'est pas rien, et qu'elle était complètement oubliée, finalement, on se rend compte de combien les gouttes d'eau individuelles sont importantes pour faire avancer ces sujets-là, et d'autant plus parce que là, aujourd'hui, on est en train d'enregistrer en avril 2025, et on se rend compte que toutes les gouttes d'eau, il faut que ça devienne un torrent pour contrer toutes ces idées contraires et qui ont le vent en poupe. donc écoute je suis ravie que tu t'es pu parler de ta ténacité et non pas de ton côté enquiquineuse je me serais jamais permise de parler de ça mais en tout cas voilà donc soyez tenace effectivement et donc j'ai pas de part mais je peux dire que en tout cas les personnes peuvent écouter un documentaire qui a été produit par HBO grâce à tes recherches et celles de ton ami donc voilà allez chercher et découvrir ce profil qui est absolument incroyable et plein d'inspiration aussi tu peux pas l'interviewer Donc, ce documentaire sera parfait.

  • Speaker #0

    Non, c'est vrai que... Non, non, aujourd'hui, on peut dire qu'après des années de galères et de ténacité, on y est arrivé. Donc, il y a eu, comme tu dis, il y a eu ce documentaire de HBO qui retrace sa vie, sur lequel on a travaillé. On a fait un TED Talk à l'époque. Maintenant, il y a des livres pour enfants. On enseigne aussi dans des universités de diplomates cette histoire. Donc, à un moment, c'était assez... On a fait quelques écoles de diplomatie dans le monde pour raconter cette histoire. C'est une histoire aussi qui est inclue dans l'histoire, dans les cours d'introduction des Nations Unies. Donc, dès que quelqu'un entre aux Nations Unies, ça s'est inclus. On a écrit un livre qui s'appelle « Les femmes et les Nations Unies » où on a inclus cette histoire. Donc, il y a eu plein, plein, plein de choses depuis. Et l'idée, c'était un peu de, en anglais, c'est « get history right » . Je ne sais pas comment tu traduis ça.

  • Speaker #1

    Un peu de redonner à l'histoire, enfin à cette femme, cette histoire. Voilà,

  • Speaker #0

    exactement. donc non on y est arrivé après il y a aussi je le dis aussi quand je parle à des filles dans les écoles ou dans les niveaux de master dans les universités de leur dire mais allez-y chercher ces femmes là, chercher ces petites pépites qui existent dans les archives ou voilà ailleurs ou comme tu le fais toi aussi à travers les alignés tu vois, de mettre en lumière toutes ces histoires qui autrement ne seraient passerait un peu dans les oubliés c'est un peu dommage

  • Speaker #1

    tu vois j'avais envie de rebondir exactement là-dessus en disant finalement observer ces femmes qui font peut-être le en anglais on dit l'extra mile, qui vont un tout petit peu plus loin que là vous auriez osé aller et finalement qui vont vous guider qui vont vous permettre de vous dire mais moi en fait pour Pour moi, c'est possible. Et voilà, Bertha Lutz, c'est vrai que c'était une femme incroyable en 1945. Mais il y en a tellement des femmes aujourd'hui qui font ce pas de côté dans plein de domaines différents. Et il faut les valoriser. Il faut écouter leur voix. Il faut les diffuser. Tout à l'heure, on parlait de l'instagrammable. Ce n'est peut-être pas tout à fait instagrammable, voire pas du tout. Par contre, il faut leur donner une voix. Il faut les valoriser. Je suis super contente qu'on ait parlé de Berthaloud, clairement. Mais là, on t'avait laissé trouver ta place, finalement, dans ce monde de la communication au CICR. Et je suis curieuse de savoir, parce que Fatima, tu n'es pas que ton travail, est-ce qu'il y a d'autres moments d'alignement que tu as envie de partager avec nous ou des réflexions que tu as aujourd'hui ?

  • Speaker #0

    Oui, clairement. Non, merci. Et puis, comme tu dis, je pense que peut-être c'est un peu, juste pour rendre les choses un peu plus claires pour les personnes qui nous écoutent. Donc, il y a un peu eu deux moments. Il y a ce moment de recherche autour d'égalité des genres et donc autour de Berthaloutes. Et puis, comme tu dis, et ça revient à ce que tu fais toi aussi avec Les Alignés, c'est la création de modèles, en fait, de modèles inspirants de femmes. On se dit, ah, mais elle a fait, donc pourquoi je ne pourrais pas le faire ? Et ça, on en manque. Il faut en créer autant que possible. Donc, toi, tu le fais aussi à travers ce podcast. Et puis ensuite, du coup, il y a l'autre partie, disons, de ma vie professionnelle qui est vraiment l'humanitaire. Voilà, les deux se complémentent au final, mais c'est vraiment un peu deux casquettes. Donc, je suis contente qu'on ait eu l'occasion de couvrir tout ça, parce que c'est jamais très facile de parler de tout ça en même temps, dans un seul épisode. Donc, c'est top. Et oui, par rapport à autre chose, tout ce qui n'est pas forcément les accomplissements du travail. Alors, je suis très, très alignée sur mon tapis de yoga. Ça, c'est très aligné. Je suis très alignée quand j'ai des conversations comme les nôtres, surtout entre femmes, en fait. Je suis très, très alignée dans les échanges, dans l'apprentissage, d'apprendre. Et aussi, je pense, et surtout, comme tu le sais, aujourd'hui, je travaille plutôt dans les guerres. C'est beaucoup de souffrance que je vois, c'est beaucoup d'horreur. J'ai fait cinq années dans des pays en guerre et j'ai vu le meilleur, mais aussi le pire de l'humanité. Et pour moi, je retrouve... Aujourd'hui, c'est vraiment... Aujourd'hui que je suis revenue, ici à Genève, c'est dans l'émerveillement, dans la nature. Voilà, je trouve ça juste incroyable. On est en train de faire ce podcast en plein printemps, donc voilà, c'est vrai, c'est l'apogée de cette beauté. Et c'est vrai que des fois, quand je trouve ces souffrances sur lesquelles on travaille, qu'on essaye de... Évidemment, on essaye d'apporter un peu de soulagement et encore une fois, un peu d'humanité dans toute cette horreur. Souvent, je vais un peu me réfugier dans... dans nos montagnes, entre les arbres, et puis juste de voir la beauté qu'il y a autour de nous. Parce qu'il suffit juste de poser son regard là où elle est, mais elle est vraiment partout.

  • Speaker #1

    Une question qui me vient, parce que les alignés, je pense qu'il y a eu beaucoup de personnes qui étaient plutôt dans le monde du corporate, qui sont passées à ce micro, ou des entrepreneuses, ou en tout cas des personnes qui ne sauvent pas des vies, des personnes qui ne voient pas des guerres. Et je me posais cette question, c'était, tu vois, on parle beaucoup d'alignement par avoir des projets de sens. Et toi, tu es clairement dans un endroit où il y a du sens. Mais après, je me disais, quelle pression ? Comment tu vis avec tout ça ? Comment tu vis en se disant que chaque jour, ce que tu vas faire a énormément d'impact et que parfois, j'imagine, ce n'est pas facile ? Est-ce que c'est une question qui fait sens pour toi, ça ?

  • Speaker #0

    Oui, complètement, ça me parle beaucoup. Alors déjà, j'ai eu de grands débats internes aussi en me demandant, mais attends, est-ce que tu es obligée d'aller ? de l'autre côté du monde, dans une zone de guerre sous les bombes pour finalement trouver un sens à ta vie et te dire tu sers à quelque chose sur cette planète. Ma conclusion, ça a été que non, on peut très bien le faire en travaillant dans un monde corporate. Des fois, c'est un sourire, c'est une aide. Les besoins ne sont pas non plus que de l'autre côté de cette planète et il y en a aussi vraiment plein autour de nous. Donc on peut vraiment faire une différence aussi localement et ça je crois. énormément au local, à la puissance du local. Et oui, c'est vrai que la question du sens revient toujours dans le sens où tu te dis il faut, disons, arriver à faire la paix avec... Cette phrase, c'est encore en anglicisme, mais tu sais ce truc qui dit « I am enough » . De se dire « mais en fait, j'ai pas besoin de prouver déjà à moi-même que je peux y arriver » . Et à un moment, on se dit « mais en fait, ça va, quoi. J'ai pas besoin de faire des choses de... » de super héros et tout, pour avoir une validation. Et donc ça, par contre, ce qui est sûr, c'est que oui, je n'arriverai jamais à faire quelque chose où je ne trouve pas du sens. Et c'est un énorme privilège, c'est une chance énorme de pouvoir travailler dans un secteur qui change la vie des gens, clairement. Je l'ai vraiment vu sur le terrain et c'est une différence de vie ou de mort, ça c'est clair. Et donc d'avoir ce privilège-là, c'est énorme. Et en même temps... je fais aussi un travail d'une certaine manière sur moi où je me dis, ok, est-ce qu'il y a moyen que ça t'impacte sans forcément risquer ta vie ?

  • Speaker #1

    Je crois que cette phrase est l'une des plus mythiques de ce podcast. Mais bon, effectivement, merci d'avoir répondu à cette question. Et pour les personnes qui écoutent les Alignés aussi, pour trouver leur chemin, notamment les personnes qui cherchent leur voie au début, tu disais que ce n'était pas évident. Peut-être que ça leur donnera des billes pour savoir dans quelle direction aller.

  • Speaker #0

    Mais carrément, je pense aussi, moi j'ai eu une réflexion à un moment en me disant, on met tellement de pression sur le sens de notre travail, on met tellement de pression sur est-ce que c'est vraiment au travail qu'on va trouver tout notre sens ? Je sais pas. Et donc en fait, c'est un peu cette idée de me dire, est-ce qu'il n'y a pas... Tu vois, pour toutes les personnes qui sont peut-être frustrées dans leur travail, en se disant, ouais, mais bon, en fait, moi, ça sert à rien ce que je fais. Déjà, ça sert toujours à quelque chose. Mais c'est plutôt de se dire, mais en fait, qu'est-ce qui... Est-ce que si je trouve pas cette satisfaction à travers... Voilà, j'ai besoin de plus de sens dans mon travail, et est-ce qu'il n'y a pas moyen de le trouver ailleurs ? que ce soit dans sa vie personnelle ou en rejoignant des associations il y a plein d'autres manières de faire la différence sans pour autant en faire le métier de sa vie donc voilà un peu de créativité et je pense qu'on est tous très très créatifs là-dedans,

  • Speaker #1

    pas trop de pression sur ça et effectivement c'est très juste il y a ce côté égo qui est nourri je trouve très tôt notamment quand même les enfants, tu vois, qu'est-ce que tu vas devenir plus tard ? En fait, comme si on devenait quelque chose. Non, en fait, tu es déjà quelque chose. Et je trouve que ça met tellement de pression sur les épaules, tu vois, tu veux devenir pompier, devenir peu importe quoi. Donc la pression, elle commence très, très tôt. Et finalement, c'est vrai que dans les parcours des alignés, j'ai remarqué qu'il y avait des personnes qui avaient une vie avec un éventail de parcours qui parfois arrivaient en parallèle. Tu vois, tu me dis, là, c'est intéressant parce que... On a réussi à traiter deux sujets qui n'ont presque rien à voir, mais en fait, c'est toi qui as l'initiative des deux sujets. Et c'est assez souvent qu'à ce podcast, on se rend compte qu'on se nourrit de différentes, on appelle ça des domaines de vie, de ces différents domaines de vie. Et parfois, ça passe par le yoga, par la danse, par la créativité, par le chant. Et c'est vrai qu'il y a un côté avec le coaching, avec le développement personnel, où tout semble passer par la vie professionnelle. réussite professionnelle et je trouve ça intéressant qu'on en parle et qu'on questionne ça ici et même avec quelqu'un comme toi qui a un job pour le coup plein de sens donc voilà, merci beaucoup de partager ça dans ce podcast on aime bien avoir des conseils, des enseignements que tu aurais envie de partager avec nous, pour les personnes qui nous écoutent et qui ont envie de s'aligner alors oui,

  • Speaker #0

    je pense que le premier peut-être va faire déjà le pont entre la dernière réflexion que tu as partagée, qui résonne beaucoup, qui consiste en fait à se dire, au lieu de se dire qu'est-ce que je veux faire, c'est plutôt qui est-ce que je veux être. Quels sont en fait, déjà de se poser la question des valeurs, quelles sont mes valeurs, déjà ça c'est énorme de les connaître, et de dire en fait qui je veux être. Et dans ce qui je veux être, quel type d'activité soutiendrait se devenir, entre guillemets. Donc voilà, c'est vrai que si je veux être une personne bienveillante, qui aide mes proches, etc., je ne vais peut-être pas faire un travail super stressant qui m'enlève tout le temps que j'ai avec ma famille. Donc voilà, juste un peu de inverser un peu les questions qu'on se pose. Et puis, alors ça, c'est clair, la tenacité, vraiment la détermination de... À chaque fois, je me dis ce truc, tu sais, qui dit en anglais que actions lead to action. Donc, de... Quand on fait, et ça n'a pas besoin d'être parfait, parce que c'est vrai qu'il y a ce truc de « ah non, mais c'est jamais assez bien » , « non, non, mais là, je ne sais pas, tu vois le podcast, non, non, mais en fait, là, je pourrais encore l'améliorer » . Non, c'est tout. On l'envoie, l'idée, c'est juste que ça parte. Et puis, de voir ce que ça donne, c'est juste aider. Et donc, en fait, ça se travaille aussi à travers des rencontres. En fait, c'est quand on est dans le mouvement, forcément, la vie bouge. C'est toujours... C'est la stagnation qui est peut-être un peu cette inertie, mais juste un peu d'aller à la rencontre, d'écrire ce mail. Ce n'est pas grave, on n'aura pas de réponse. Eh bien, on le renvoie et on le renvoie encore.

  • Speaker #1

    Et au pire, oui, on a renvoyé un nombre interne.

  • Speaker #0

    Et donc, voilà, de ne pas avoir peur de tout ça. Puis ensuite, on en parlait tout à l'heure, mais c'est vrai qu'en fait, en tant que... justement en tant que femme, on a un peu tendance à se un peu à se rabaisser, puis je ne suis pas si bon pour ça, puis qu'est-ce que les gens vont croire quand je vais dire ça, et puis de le faire quand même, ça c'est des voix qu'on a autour de nous, ça ne nous définit pas de prendre la parole, de postuler à ce job, et puis on voit ce que ça donne, et puis peut-être qu'on ne le voudra pas, mais au moins qu'on postule et puis d'aller à la rencontre de cette personne, d'envoyer ce mail de, voilà, juste de s'exposer, de prendre un peu un risque, parce qu'en fait ça... ça peut vraiment faire des chocs à pique. Complètement. C'est tout ce que ça peut donner après. Et donc voilà, c'est sûr que c'est plus facile à dire qu'à faire. Mais je trouve que de se donner un peu ces petits défis quotidiens ou hebdomadaires et de se féliciter après. Vraiment, vraiment. Moi, j'ai tendance, tu vois, je me dis, bon, OK, je me fais un peu des petits... Ce ne sont même pas des objectifs, parce que c'est plutôt un peu des intentions. On va les appeler ça un peu des intentions par semaine. En me disant, cette semaine, j'aimerais bien ça. Et si je n'y arrive pas, je me dis que ce n'est pas grave. Il y a une raison. Tu y arriveras encore la semaine prochaine. Il n'y a pas de problème. Donc, de s'enlever un peu cette... On se met quand même une sacrée pression. Et puis, être femme aujourd'hui, quelques-unes d'entre nous sont aussi mères, sont collègues, sont amies, sont partenaires. Ça fait vraiment beaucoup. C'est une question de charge mentale. À un moment, juste de se dire, c'est déjà super. On y arrive.

  • Speaker #1

    Je reviens sur You're Enough. T'es assez.

  • Speaker #0

    T'es assez. Il n'y a pas besoin de faire plus. Il y a aussi, on en parlait tout à l'heure en dehors du studio, c'était tout change tout le temps. Il y a vraiment cette question d'impermanence. Il n'y a rien qui dure. Donc, je me rends compte que même à travers, tu vois, j'ai fait mes années dans des zones de conflit. Ce n'est plus le cas aujourd'hui. Mes états d'âme, mes émotions que je ressens maintenant, je ne les ressentirai pas peut-être dans un quart d'heure, 30 minutes. Tout, tout change tout le temps. Donc, ce qui laisse aussi énormément d'espoir et le chant à beaucoup de créativité.

  • Speaker #1

    Quand je serai en train de me poser plein de questions, je repenserai à ça, sur est-ce que je dois le faire, est-ce que je ne dois pas le faire, est-ce que je dois célébrer ça ? Le côté célébration, je trouve qu'il est très intéressant parce que je trouve qu'on a tous et toutes tendance à passer à autre chose très rapidement. Tu vas se dire que les choses sont faites et que c'est acquis. Alors, merci pour tous ces conseils que je vais vraiment garder précieusement. Je te vois, là, on parle de plein de sujets. On a parlé yoga, on a parlé de Bertha, on a parlé de ton travail, on a parlé de toi. On aimerait bien, je pense, savoir ce qu'on peut te souhaiter, Fatima.

  • Speaker #0

    Wow, grosse question ! On pourrait me souhaiter un cœur ouvert, de continuer à s'émerveiller, de continuer à rencontrer, d'apprendre, à continuer à faire mes asanas et toutes mes postures de yoga. Mais aussi la contemplation de l'extérieur et de l'intérieur. Et c'est aussi, d'une certaine manière, à me le souhaiter à moi, mais aussi au monde, en fait. Je pense que... de retrouver de la douceur. Je pense de revenir à la douceur, de mettre un peu de magie dans son quotidien. C'est comme quand tu regardes autour de nous, c'est incroyable juste le fait d'être là, d'être vivant, de respirer. C'est clairement un miracle. Et les petits bonheurs sont vraiment... sont vraiment là. Cette personne qui passe à côté de toi qui te sourit, le rire d'un enfant, la bise le matin, la rosée, juste des choses très très simples qui font qu'on peut être complètement dans la contemplation à longueur de journée.

  • Speaker #1

    Revenir à une certaine simplicité, finalement.

  • Speaker #0

    Il y a beaucoup, beaucoup de beauté dans la simplicité et finalement, il y a un peu tout dans rien.

  • Speaker #1

    Je vais garder cette phrase. Qui est très juste.

  • Speaker #0

    qui est très bien. Mais c'est vrai qu'il ne faut pas grand-chose.

  • Speaker #1

    Pour celles qui ont envie d'aller sur ton chemin, est-ce qu'il y a des médias, des podcasts, des livres que tu recommandes ?

  • Speaker #0

    J'écoute pas mal de podcasts. J'aime beaucoup un podcast à soi de Arte, aussi sur toutes ces questions de genre. Évidemment, le cœur sur la table et les couilles sur la table. Il y a un podcast hyper chouette qui s'appelle Émotions que j'aime aussi beaucoup. Évidemment, le côté écolo, ça va être la terre au carré. Et il y a aussi Philosophie sexy que j'aime aussi beaucoup. Et en anglais, j'écoute pas mal un podcast qui s'appelle On Being, qui est aussi un peu sur toutes les questions de spiritualité, tout qui est vraiment, vraiment chouette. Et puis, en livre, alors évidemment, on titoue le coq avec Les Grandes Oubliées, parce que ça, voilà, ça résonne beaucoup avec ce qu'on a parlé. J'aime beaucoup les Mona Chollet. Et évidemment, je suis une grande fan d'une autrice qui s'appelle Chimamanda Adichie, qui est une autrice nigériane qui a écrit On devrait tous être féministes. Donc, il m'a toujours beaucoup parlé. Et puis autrement, après, sur mon parcours, c'est plutôt... Je suis plus sur LinkedIn. En ce moment, c'est un peu plus LinkedIn, pas très Instagram. Peut-être à un moment, j'y étais. Puis après, j'ai déconnecté.

  • Speaker #1

    Écoute, on va te suivre sur LinkedIn. Et on a envie de voir toutes tes activités. Et on s'imagine qu'il y a peut-être... des choses qui vont émerger dans les prochaines années, puisque Action Lead to Action, donc on sait qu'il se passera des choses pour toi. J'ai juste envie de te remercier, Fatima, pour cette conversation qui, pour moi en tout cas, a été vraiment un vrai plaisir, un vrai échange. Et je sais qu'elle va en inspirer beaucoup. J'ai juste envie de te dire que le fait que tu parles d'humanité et que ça éclaire ton visage, en tout cas, moi, ça m'a donné beaucoup d'espoir. Donc rien que pour ça, j'ai envie de te dire merci beaucoup.

  • Speaker #0

    Merci mille fois à toi, Charline.

  • Speaker #1

    Et j'ai envie de te dire à bientôt.

  • Speaker #0

    À très vite.

Chapters

  • Introduction et présentation de Fatima Sator

    00:06

  • Le parcours de Fatima : Prise de conscience et engagement

    01:40

  • Les expériences de Fatima dans l'humanitaire

    05:17

  • Les leçons tirées du journalisme et du terrain

    15:05

  • La recherche sur Bertha Lutz et son impact

    21:02

  • La ténacité et l'importance de raconter les histoires oubliées

    31:00

  • Conseils pour s'aligner et trouver son chemin

    40:18

  • Conclusion et réflexions finales

    45:48

Description

On rencontre rarement une personne qui a passé des mois sur le terrain en zone de conflit pendant quatre ans pour aider les populations (Ukraine au début de la guerre, Yémen, Congo, Nigeria et Ethiopie).

On rencontre exceptionnellement une personne qui se révolte depuis l’enfance de la condition des femmes et qui est parvenu à faire reconnaitre des oubliées de l’histoire.

On rencontre peu une personne qui se donne comme intention de s’émerveiller des choses simples.

Alors est-ce que tu imagines la probabilité de rencontrer une personne qui soit tout cela à la fois ?

 

Cette personne, c’est Fatima Sator. Son parcours d’alignement est, n’ayons pas peur des mots : I-N-C-R-O-Y-A-B-L-E. Et cet interview l’est encore plus tant il est authentique.

 

Je remercie Fatima d’avoir accepté mon invitation et lasse place à ce nouvel épisode des alignées qui raisonnera avec nombre d’entre vous.


Pour aller plus loin :

Podcasts en français :

Un podcast à soi Charlotte Bienaimé pour Arte

Le cœur sur la table et les couilles sur la table de Victoire Tuaillon

Emotions de Louie Media

La terre au carré par Mathieu Vidard.

Philosophie sexy de Marie Robert

 

Podcast en anglais

On Being de Krista Tippett


Livres

Titiou Lecoq - Les Grandes Oubliées

Mona Chollet

Chimamanda Ngozi Adichie – Nous sommes tous des féministes

 

Pour suivre Fatima :


 ✨ Si veux en savoir plus sur Les alignées, file découvrir le site internet www.lesalignees.com ou sur mon LinkedIn dans lequel tu découvriras comment nous oeuvrons pour transformer le monde professionnel pour plus d'alignement des salarié·es et la mixité femme/homme.


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Bienvenue sur Les Alignés, je suis Charline Moreau, consultante et coach en entreprise et depuis plus de trois ans, je tends le micro à des femmes qui ont osé aligner leur vie avec leur valeur. Depuis toujours, ce sont des conversations authentiques avec des femmes sur leur parcours qui m'ont permis de profondément questionner ma vision de l'ambition et de la place que je voulais prendre. Alors je me suis dit que ces échanges intimistes pourraient inspirer d'autres personnes s'ils étaient diffusés plus largement. C'est comme ça que les alignés sont nés. Tous les 15 jours, je partage avec toi des discussions inspirantes où l'on parle de tout. De pro, de perso, de passion, de reconversion, de réussite, de doute ou encore d'engagement. Parce que trouver sa place en tant que femme dans la société est un cheminement. Et chaque parcours peut nous éclairer. Si ce podcast te plaît déjà, j'ai besoin de toi pour le faire grandir. Partage-le à une personne qui en a besoin. Et surtout, laisse-moi un commentaire et 5 étoiles sur ta plateforme d'écoute préférée. Je sais, ça n'a l'air de rien. Mais c'est vraiment très utile pour moi et pour faire connaître ce podcast. Maintenant, je laisse la place à ce nouvel épisode des Alignées. On rencontre rarement une personne qui a passé des mois sur le terrain en zone de conflit pour aider les populations. On rencontre exceptionnellement une personne qui se révolte depuis l'enfance de la condition des femmes et qui est parvenue à faire reconnaître des oubliés de l'histoire. On rencontre peu... une personne qui se donne comme intention de s'émerveiller des choses simples. Alors, est-ce que tu imagines la probabilité de rencontrer une personne qui soit tout cela à la fois ? Cette personne, c'est Fatima Sator. Son parcours d'alignement est, n'ayons pas peur des mots, incroyable. Et cette interview l'est encore plus tant il est authentique. Je remercie Fatima d'avoir accepté mon invitation et laisse place à ce nouvel épisode des Alignés qui résonnera avec nombre d'entre vous. Bonjour Fatima !

  • Speaker #1

    Bonjour Charline !

  • Speaker #0

    Comment vas-tu ?

  • Speaker #1

    Ça va bien et toi ?

  • Speaker #0

    Écoute, je vais super bien, je suis ravie. On est dans un endroit extraordinaire, puisqu'on est au CICR, donc le Comité International de la Croix-Rouge. Je pense que là, en termes de grades, le podcast a pris énormément de grades vu la pièce dans laquelle on enregistre. Et je te remercie de m'inviter dans cet endroit assez fabuleux.

  • Speaker #1

    Merci à toi, merci de venir jusqu'ici. C'est trop bien de t'avoir.

  • Speaker #0

    Écoute... Voilà, même si on est au CICR, on a à cœur ici dans les alignés d'avoir une discussion authentique sur toi, ton parcours. En fait, c'est vraiment pour ta personnalité, pour qui tu es que je suis venue jusqu'à Genève. En tout cas, les personnes qui ne te connaissent pas ici, elles ont envie de connaître ton parcours. Et que je te pose cette première question que je pose à toutes mes invitées, qui semble simple, mais qui en réalité est assez complexe. Fatima Sator, qui es-tu ?

  • Speaker #1

    Oh, sacrée question ! déjà là c'est très philosophique je me demande si on arrive à y répondre ou alors peut-être ça prend presque toute une vie en fait pour avoir la réponse si je reste un peu dans le métaphysique je te dirais que je suis un peu une exploratrice de la vie exploratrice de cette planète on vient là, on n'a pas beaucoup de temps on a un peu de passage on fait des rencontres merveilleuses on expérimente des choses, on expérimente la vie On expérimente un voyage intérieur aussi. Enfin, voilà, on a un peu ce moment sur Terre qui est magique. Et du coup, je pense que la question qui est dessus, ça revient un peu à qu'est-ce qui me définit. Donc, si je devais un peu redescendre de la métaphysique pratico-pratique, comme tu vois, je suis une femme. J'ai, disons, les valeurs qui me définissent, ça serait... Pour moi, c'est très, très important la question d'humanité. Donc, je me définis déjà comme humaine. qui vit avec tout plein d'autres petits humains autour de moi. Et j'adore ça. J'adore l'humanité, j'adore les gens, j'adore la beauté de l'humanité. Et donc, je suis, évidemment, je travaille ici au Comité international de la Croix-Rouge. Je suis aussi une amie, une partenaire, une fille. Voilà, j'ai plusieurs casquettes en fonction de... à qui tu demandes. Mais non, aujourd'hui, je ne saurais pas vraiment te répondre clairement de qui je suis sans, comme on se le disait, s'identifier à un travail, parce que c'est très souvent, en fait, je pense que tu le vois très souvent, on va se présenter en présentant notre travail. Et j'essaye de faire vraiment ce travail, de me dire qui suis-je autre que ce que je fais ? Qu'est-ce qui me définit ? C'est toute une recherche, c'est très beau, c'est une chouette aventure.

  • Speaker #0

    C'est très beau. En fait, dans le podcast, il n'y a pas d'image. Moi, ce que je peux dire, c'est que j'ai observé que quand tu as utilisé le mot humanité, tu as vraiment le visage qui s'est éclairé. J'ai ressenti que c'était très important pour toi. J'ai envie que les personnes qui nous écoutent sentent que ce mot-là, il n'a pas seulement juste une connotation toute simple, mais que vraiment, il y a une sorte d'énergie qui vient t'animer quand on parle. J'espère que vous aussi, maintenant que je vous en parle, vous pouvez visualiser Fatima qui s'anime quand on parle d'humanité. effectivement tu travailles au comité international de la Croix-Rouge et là c'est ce que tu fais maintenant mais dans ce podcast en fait pour aller creuser un petit peu plus loin au-delà de la métaphysique en fait j'ai développé une méthode assez simple dans laquelle je demande à mes invités de revenir sur leur parcours d'alignement et en fait en réalité j'aurais peut-être dû parler de désalignement de moments où finalement tu as ressenti le besoin d'aligner ta tête, ton cœur et ton corps quand je te parle de ça il y a probablement un tout premier moment qui devient en tête Je serais bien curieuse de savoir quel a été ce tout premier moment pour toi.

  • Speaker #1

    Oui, volontiers. Alors, je crois que je te rejoins complètement dans cette idée de, j'ai l'impression, en tous les cas, un de mes objectifs et ce qui m'anime beaucoup, c'est toute cette question de déconstruction. Donc, un peu comme si on était un oignon avec plein de couches et qu'en fait, chaque expérience, chaque journée, chaque apprentissage nous amène à enlever chaque couche pour finalement se retrouver. Donc c'est vrai que cette question de presque de se désaligner pour finalement s'aligner, elle est très importante pour moi. Et écoute, moi, je pense que j'ai eu plutôt, c'est un peu comme le bonheur, j'ai des moments d'alignement. Il y a des moments où je me désaligne un peu, et il y a des moments où je me sens clairement alignée. Et un des moments qui m'a particulièrement marquée, je dirais, donc j'ai beaucoup voyagé dans mon enfance et dans mon adolescence, et après plus tard encore, et c'était un moment, on était en Inde avec ma famille. Et je vois cette scène d'une jeune fille qui avait été probablement, je m'imagine, mariée de force. Et en fait, je la voyais, elle pleurait, elle ne voulait pas suivre sa famille ou son mari, qui clairement avait une grande différence d'âge. Et là, tout s'est allumé en moi. Il y avait la révolte, il y avait l'indignation, il y avait la colère. Et c'est là que j'ai vu, donc j'avais 14 ans, et je me suis dit, mais en fait, non, je... je veux faire quelque chose, ça a été vraiment un peu l'élément déclencheur, je veux faire quelque chose pour mon temps sur cette planète qui va contribuer à changer d'une certaine manière la vie des femmes, ou en tout cas encore que ce qu'elles soient, que ce soit les femmes à côté de moi ou les femmes plus loin, mais en tout cas je me suis vraiment rendue compte de la dynamique de pouvoir, du patriarcat, de toutes les injustices, de qu'est-ce que ça veut dire être née femme. Et en fait, je me suis rendue compte, je me suis dit, mais en fait, la seule chose qui me sépare de cette femme, de cette jeune fille qui a à peu près le même âge que moi, c'est juste que j'ai eu le privilège de grandir et de vivre dans un autre pays. Mais c'était juste une pure chance. Donc, c'est vrai que c'était à ce moment-là où j'ai vraiment senti que tout était aligné et que c'était dans ce domaine-là que je devais aller, d'une manière ou d'une autre.

  • Speaker #0

    Et à ce moment-là, tu as 14 ans. On a envie de savoir un peu à quoi ressemble ton quotidien, tu vois, t'habites où ? Parce qu'effectivement, déjà, t'es en Inde à 14 ans, ce qui est assez exceptionnel. Et quand même, c'est une prise de conscience qui est, j'allais dire, alors peut-être que je vais utiliser des mots que t'as pas du tout ressenti, donc tu me dis si c'était pas ça. Mais moi, effectivement, à 14 ans, comprendre qu'il y a ce monde-là dans lequel tu nais femme et finalement qu'il y a une énorme différence entre les femmes et la manière dont elles sont traitées dans le monde. Voilà, j'ai envie de savoir, tu pars d'où ? en arrivant en Inde ?

  • Speaker #1

    Oui, alors je pars quand même, je viens quand même d'une famille, donc je suis née en Algérie, je viens d'une famille très « ouverte » , avec un papa très féministe, une maman aussi, donc ils m'ont vraiment poussée dans ces réflexions-là. Mais reste que, c'est vrai que en tant qu'Algérienne, il y avait tellement de choses qui me révoltaient, depuis toute jeune, je voyais la différence de traitement de la société par rapport à mon frère. Des histoires toutes basiques, d'héritage, comme quoi la loi lui donne le double d'héritage que moi, potentiellement. J'ai été mise dans ce bain de, déjà, tu es née femme, donc tu es inférieure d'une certaine manière, donc tu as d'autres droits, etc. Donc depuis toute petite, ça m'a toujours... Je me rappelle, je disais à mes parents, je devais avoir 8-9 ans, je disais que mon rêve ultime, c'était de renaître homme. Je me déguisais dans la rue en homme. pour voir ce que c'était d'être homme dans une société patriarcale. Donc ça m'a toujours énormément animée. Et très vite, j'ai commencé à poser beaucoup de questions, à tout décortiquer. Donc je ne prenais pas grand-chose pour acquis. Si on me dit, ça c'est comme ça, non ça ne me va pas. Je vais essayer de comprendre pourquoi, pourquoi on en est arrivé là. Évidemment, l'épisode, cette période en Inde où j'étais scolarisée, où j'ai fait quelques années d'études là-bas, c'est encore plus renforcer cette... Cette problématique qui, je pensais, à l'époque, était seulement dans mon pays. Je me suis rendue compte que non. Jusqu'à aujourd'hui, on ne peut absolument pas dire qu'il y a un seul pays qui atteint l'égalité hommes-femmes. C'est révoltant, c'est inacceptable. Je me dis qu'on est en 2025. On arrive à faire plein de choses. On a envoyé des hommes sur la Lune, et des femmes d'ailleurs. Des vaccins, des soins, tout ce qu'on veut. Mais... sur ce point-là, on parle quand même de 50% de la population. Et c'est énorme.

  • Speaker #0

    Et c'est drôle quand tu parles de ça, parce qu'il y a vraiment le sujet du rapport à la domination du patriarcat. En fait, souvent, moi, quand j'utilise ce mot qui, pour beaucoup de personnes, est un gros mot, et qu'on résume ça à, finalement, un esprit de domination, je te dis, ok, il y a finalement une différence entre deux populations qui sont équivalentes à la 50% de la population mondiale. Mais alors, bon, après, moi, je vais te dire, je vais te taquiner, parce que je vais te dire... Ouais, OK, t'as 14 ans. Là, tu te rends compte quand même qu'il y a un problème majeur dans la société. Et finalement, on a été nombreuses à se rendre compte de ça. Mais toi, t'as décidé de prendre le sujet à bras le corps. C'est-à-dire que tu t'es dit je vais faire ça de ma vie. Ce qui est quand même quelque chose d'assez exceptionnel. Et pour les personnes qui écoutent ce podcast, qui cherchent à s'aligner, qui cherchent à s'inspirer de Parcours, moi, j'ai envie de savoir en fait, comment tu t'es mis en mouvement face à cet objectif d'agir sur le patriarcat, sur la mixité femmes-hommes ? Comment t'as fait ? Alors bon,

  • Speaker #1

    c'était pas simple. Et je pense que c'est jamais simple. Et aujourd'hui, c'est encore la galère. Comme pour moi, pour toutes les femmes, en fait. Je pense qu'on n'y arrivera jamais complètement. Mais en tous les cas, je pense que même quand on se dit « Ah, mais ça y est, j'y suis arrivée dans cette égalité-là. » Non, en fait, non. Il faut encore se battre. Et c'est jamais à prendre pour acquis. L'histoire nous le montre. Non, écoute, en fait, à l'époque, je m'étais dit que je voulais être journaliste. Donc, en fait, je me suis dit que c'était la meilleure manière de raconter tout ça. Et c'était un peu cette phrase qui dit « oui, donnez la voix à ceux qui n'en ont pas » . On me dit « moi j'ai accès à certaines plateformes, je vais avoir accès à des études, donc j'ai envie de raconter tout ça » . Donc j'ai fait des études, alors ce n'était pas tout de suite le journalisme, d'abord je me suis un peu trompée, enfin pas beaucoup de compassion pour moi, parce que dans le sens où je trouve que ce n'est pas facile aujourd'hui de s'orienter, et on n'a pas forcément toujours les bonnes béquilles pour. Donc j'ai fait d'abord de l'économie, donc rien à voir. économie et finance, donc juste après le bac du coup, et j'étais bonne à ça et je détestais ça. Donc ça c'est toujours un peu le moment frustrant où tu te rends compte qu'en fait t'es bonne à un truc, mais t'aimes pas du tout ça. Et donc du coup j'ai attendu patiemment que ces trois ans passent et je me suis inscrite en master de journalisme. Au début c'était assez intéressant parce que j'ai essayé en France. Alors en fait j'ai fait des études à Lyon et puis après j'ai fait une année d'échange à Los Angeles, ça c'était vraiment cool. J'avais bien choisi l'échange. Et puis après, je voulais absolument retourner au journalisme. J'avais essayé des universités en France. Et en fait, je revenais toujours avec... C'est toujours le même retour. On me disait, ben non, t'as un profil plutôt d'économiste. Vous avez une licence en économie. Non, vous avez un bac S. Non, non, il n'y a pas de place, en fait, pour le journalisme là-dedans. Puis après, on m'a dit, à part si vous faites, je ne sais pas, journaliste, finance, finance ou économie, moi, j'en pouvais plus. Et donc, du coup, j'ai essayé d'autres pays en Europe. Et puis, la Suisse. La Suisse qui est étonnamment moins, entre guillemets, moins carrée. Puis du coup, en fait, on m'a acceptée directement au journalisme. Et là, c'est vrai que j'avais des camarades en théologie. C'était super intéressant. C'était des gens qui n'avaient absolument rien à voir avec ce cursus-là. Et là, ça a été l'éclate. Et là, j'ai vraiment adoré. J'ai adoré le journalisme. J'ai adoré raconter des histoires. j'ai adoré, je pense que c'était encore une fois cette valeur d'humanité qui était clairement honorée. parce que du coup, c'était aller à la rencontre de gens, des gens qui ne me ressemblent pas forcément, des gens qui ne pensent pas forcément pareil que moi, qui n'ont pas le même background socioculturel. Et c'était extrêmement enrichissant. Donc ça, c'était des années que j'ai adorées. Puis après, j'ai travaillé en tant que journaliste jusqu'à ce que je me rende compte que j'aimais beaucoup. J'ai fait beaucoup de local, disons. Par contre, il y avait clairement la dimension internationale qui me manquait. Et en fait, je me suis dit, moi, je vais être reporter de guerre. Et là, pour faire ça, on m'a expliqué. qu'il fallait idéalement faire un master en Angleterre. Et c'est ce que j'ai fait. J'ai enchaîné, j'ai fait un master à Londres. Et après, très vite, je me suis retrouvée dans le système international. Donc, j'ai d'abord travaillé aux Nations Unies, quelques années, ici à Genève. Et puis finalement... Aux Nations Unies, j'ai d'abord travaillé un moment pour l'ONU Femmes. Ensuite, je suis arrivée dans l'humanitaire. Je me suis dit, OK, en fait, c'est très sympa. C'est sympa à partir de Genève, mais je parle de la souffrance des gens et tout. Mais clairement, ça donne quoi ? C'est quoi le terrain et de quoi je parle ? Et c'est à ce moment-là que j'ai décidé de rejoindre le comité international de la Croix-Rouge. Et je suis partie quelques années essentiellement en Afrique.

  • Speaker #0

    C'est vrai qu'à un moment donné, il y a un saut. dans le vide où tu vois que tu parles de d'un coup j'ai voulu devenir reporter de guerre et je pense que les personnes qui nous écoutent se disent non mais qui est cette personne derrière ce micro parce qu'effectivement tout à l'heure on parlait ensemble en off, on se disait que finalement on n'était pas vraiment notre travail mais je m'imagine le fait de devenir reporter de guerre fait que ton travail est toute ta vie puisque j'imagine que ça prend toute la place Et donc, j'ai envie de savoir, toi qui étais engagée déjà au niveau des valeurs sur les femmes, qu'est-ce que tu retiens de ces années de reporter de guerre ? Qu'est-ce que ça t'a apporté ? Et aussi, au micro des Alignés, on a envie de voir un peu les deux côtés de la médaille. Parce que les personnes qui nous écoutent, c'est un peu un métier qui fait rêver. C'est un peu une vie qui peut sembler complètement pleine de sens et d'alignement. Et moi, j'ai envie de savoir qu'est-ce qui se passe derrière cette image. toute policée, toute jolie, toute vernie du reporter de guerre qui va raconter des histoires fondamentales pour l'humanité finalement.

  • Speaker #1

    Alors oui, finalement, je ne suis pas tout à fait devenue reporter de guerre. Je travaille du coup, je fais de la communication au CICR qui est une organisation humanitaire. Et ça ressemble beaucoup quand on est sur le terrain. Donc après, c'est clairement pas évident sur plein de plans. Mais je pense qu'en fait, la première fois que j'ai mis ma première mission était au Congo. J'avais 26 ans. Et là, en fait, on perd vraiment tous ses repères et on perd aussi surtout. Et d'où je reviens encore sur cette idée d'humanité, c'est-à-dire qu'en fait, je me disais, mais évidemment que moi, si j'étais née dans un pays en guerre que je n'avais pas depuis plus de 25 ans, que je n'avais pas eu accès à l'éducation, etc. Comment je réfléchirais ? Et en fait, c'est aussi des expériences qui m'ont appris que rien n'est noir ou blanc et qu'en fait, finalement, à mettre beaucoup de compassion. dans nos échanges, parce que finalement, on galère tous d'une certaine manière, avec des insécurités, avec des peurs, on l'a tous à un certain niveau, et donc en fait, par exemple, on faisait des visites en prison quelquefois, et moi, en fait, moi ce qui m'intéresse dans cette visite en prison, c'est juste l'humain qui est en face de moi, donc je vais pas du tout voir de quoi il est là, qu'est-ce qu'il a fait, pourquoi il s'est retrouvé là. Ce qui m'intéresse, c'est juste le fait que ce soit un fils, un frère, potentiellement un ami. est en fait un humain et qu'il a des droits de base, une dignité de base. Et donc, c'est vraiment de retourner dans cette humanité pure. J'ai aussi rencontré sincèrement des gardiens de prison qui faisaient leur maximum pour que ça se passe bien. J'ai rencontré en même temps des humanitaires qui étaient exécrables. Donc, voilà que, évidemment, notre travail ne nous définit pas, mais qu'il n'y a pas... Tout est très complexe, en fait. Tout est très gris. Et du coup, ça m'a appris à poser des questions, à comprendre. Et à essayer, oui, de mettre un peu cette bienveillance un peu partout.

  • Speaker #0

    À mettre un petit peu de nuance dans tout, finalement.

  • Speaker #1

    C'est exactement ça le mot, c'est nuance. Et aujourd'hui, dans un monde aussi polarisé que le nôtre, c'est quasiment la chose la plus dure. Parce que c'est presque facile de prendre un côté ou un autre et de dire, en fait, celui qui est en face de moi, il a tort, c'est moi qui ai raison. C'est presque trop facile intellectuellement. Mais en fait, de mettre un peu cette nuance, d'être un peu plus au milieu, d'ouvrir son cœur en se disant « Ok, mais en fait, moi, je ne pense pas pareil parce qu'il y a des raisons. Cette personne pense comme ça parce qu'il y a d'autres raisons. » C'est très, très difficile parce que du coup, ça touche, ça chamboule, ça chamboule tout ce qu'il y a en nous, ça chamboule notre éducation, ça chamboule notre identité, ça chamboule notre égo. donc voilà de faire encore cet effort de se dire mais attends en fait de déconstruction, de dire je vais quand même laisser une chance, je vais essayer de comprendre, et de permettre encore cette zone de la rencontre, juste de pouvoir se rencontrer au milieu, parce qu'autrement sinon on a des blocs parallèles et puis il n'y a jamais de rencontre. C'est un peu triste.

  • Speaker #0

    Et surtout dans le monde dans lequel on vit en ce moment, où ça fait complètement écho, je trouve, le fait de garder des espaces de rencontre, des espaces dans lesquels on essaie de se comprendre. Je trouve que c'est hyper intéressant, très fort de parler de ça maintenant, aujourd'hui. Tu le sais, dans les alignés, et notamment moi, je travaille beaucoup sur la place des femmes en entreprise. Et je ne peux que peut-être, à la lumière de tout ce que tu... C'est un peu une question piège. À la lumière de tout ce que tu as vu, de toutes les rencontres que tu as faites, du monde dans lequel on est aujourd'hui. J'aimerais bien savoir quelle est ta vision, justement, de quelle va être la rencontre de tout ce qui est en train de se passer sur la diversité, l'inclusion, la place des femmes. Est-ce que tu as envie de nous donner un peu ta vision de ce qui va se passer ou c'est un peu une question trop complexe ? Non,

  • Speaker #1

    pas du tout, elle est très importante. J'ai toujours eu de l'espoir et j'en ai encore. Je refuse de courber à ces moments-là parce que... Et au contraire, je me dis des fois qu'il y a même... Il y a des moments d'histoire, je ne dis pas qu'on en a besoin du tout, mais qui peut-être amènent ce coup, déjà qui nous rappelle qu'on n'est jamais trop confortable, qu'il n'y a jamais d'acquis, surtout, que ça nous rappelle que c'est aujourd'hui qu'il faut prendre position. Donc je l'utilise presque comme le moment pour encore plus affirmer, affirmer ses valeurs, affirmer nos droits. Et je dirais qu'au contraire, ça peut être vraiment utilisé comme un catalyseur pour rendre les choses, pour arriver peut-être plus rapidement. Et surtout, c'est un super rappel qu'encore une fois, on est loin de se reposer sur ses lauriers et de se dire, en fait, moi, j'ai beaucoup travaillé avec des chercheuses universitaires. Donc avant, l'humanitaire, c'était plutôt une carrière académique. On en parlera plus tard. Et en fait, j'ai rencontré beaucoup de chercheuses. dans des universités nordiques, donc la Norvège, la Suède et tout. Puis elle me disait à quel point que leur débat, c'était non mais attends, on ne va plus vraiment fêter la journée internationale des droits des femmes. On n'en a plus besoin parce qu'on y est arrivé. Et en fait, je te dis mais non, en fait, on n'y est pas arrivé. On n'y est pas arrivé et il faut toujours continuer à se battre et juste ne pas oublier.

  • Speaker #0

    Ne pas oublier et ne jamais rien prendre pour acquis. Et puis comme tu le disais très bien, en fait, le patriarcat est partout. Il n'y a aucun endroit, il n'y a aucun modèle, même dans les pays du Nord où tout est complètement équilibré. Donc, en fait, finalement, on n'y est pas. Et tu vois, je trouve ça très intéressant que tu parles de chercheuse dans ces sujets-là, parce que même sur le sujet de la place des femmes en entreprise, quand on commence à creuser le sujet, au début, les personnes nous disent un peu, non, mais en fait, c'est un truc, tu vois, un truc de bonne femme, un truc de l'émotionnel. En réalité, on y est. finalement, vous pouvez prendre votre congé maths et tout va bien. Je caricature. Moi, j'ai une amie qui a réussi à avoir un super poste après son congé maths. Oui, OK, fine. Mais heureusement, il y a des chercheurs, des chercheuses qui vont mettre de la nuance, qui vont aller mettre des chiffres, des études derrière ces sujets-là. Et on en a besoin pour savoir un peu où on en est. Tu parles de chercheuse. Et en fait, c'est quand même un sujet qui m'a paru très intéressant quand je t'ai rencontrée. C'est toutes les recherches que tu as faites sur une certaine personne. Est-ce que tu as envie de nous en parler un peu ? Oui,

  • Speaker #1

    avec plaisir, j'adore en parler. Oui, alors en fait, quand j'ai terminé mes études à Londres, je devais chercher un sujet de thèse. Et puis, je vais à l'université LSE, London School of Economics, la bibliothèque. Et en fait, je tombe sur ces archives d'une femme que je ne connaissais pas, qui s'appelait Berta Lutz, donc une brésilienne. que je n'en avais jamais entendu parler. Moi, en plus, j'avais fait des études en sciences po, j'avais fait du journalisme, extrêmement intéressée par le féminisme, les relations internationales. Jamais entendu parler de cette femme. Et du coup, je commence à lire les archives. En fait, c'était elle racontait son rôle à ce qu'on appelle la conférence de San Francisco, qui était en fait la conférence fondatrice des Nations Unies à l'époque. Donc, on est en 1945, juste au lendemain de la guerre. Et en fait, elle raconte comment elle a dû se battre. contre tous les pays qui étaient présents. Donc déjà, en fait, il faut revenir un peu dans... Si on revient en 45, on est en 45, il y a seulement 3% de femmes qui sont présentes à la conférence de San Francisco. Et parmi ces 3%, seulement 4 ont signé la Charte des Nations Unies, qui est en fait le premier document de droit international qui mentionne l'égalité des genres. Et en fait, quand on regarde l'histoire derrière, c'est fascinant. Donc en fait, il y a cette femme qui a été envoyée spécialement par le gouvernement du Brésil à l'époque. pour s'assurer qu'il y ait une mention d'égalité des genres dans la Charte des Nations Unies. Moi, je me dis, mais attends, mais c'est pas possible que je ne connaisse pas cette femme. Enfin, je veux dire, on n'en a jamais parlé. Je commence à en parler autour de moi. On me dit, bon, non, aucune idée. Et du coup, je fais toute une recherche très longue sur elle. Donc, je vais un peu la découvrir de qui elle était, quel a été son rôle dans les relations internationales. Et en fait, je me rends compte que c'est grâce à elle, c'est grâce à elle et d'autres femmes d'Amérique latine en tout cas au niveau du droit international, des relations internationales, c'est grâce à ces femmes-là qu'on en est où on en est en termes d'égalité. Et c'était vraiment elles qui avaient poussé pour avoir un article spécifique sur l'égalité des genres en Nations Unies. Et c'est vrai qu'en fait, si ce n'était pas ça, peut-être la Déclaration universelle des droits de l'homme, on n'en serait pas, on n'aurait pas eu ce qu'on a réussi à avoir. Plus tard, il y a eu beaucoup de conférences autour d'égalité des genres. Et en fait, c'était grâce à ces femmes. Et ces femmes, de manière très intéressante, c'était des femmes, elle, elle se qualifiait entre guillemets de pays du Sud, donc c'était le Brésil. la République dominicaine, il y avait la Namibie aussi qui était présente. Il y avait beaucoup de pays qui, entre guillemets, se disaient du Sud, sachant qu'en fait, la majorité des pays étaient encore colonisés à l'époque. Donc, sur toute la représentation, il y avait certains de ces pays-là. Et en fait, de manière très intéressante, elles racontaient comment elles ont dû faire face à une opposition de ce qu'on peut appeler, entre guillemets, les pays du Nord. Donc, il y avait vraiment ce schéma de la diplomate américaine qui disait que... qui a expliqué à cette brésilienne, j'espère que tu ne vas jamais parler de l'égalité des genres à cette conférence, parce que ce serait très vulgaire. Donc, on repart dans toute cette déconstruction de la narrative dominante autour de ces questions-là, comme quoi, en fait, l'égalité des genres est plus une invention des pays du Nord. Et moi, c'est vrai qu'en fait, en tant qu'Algérienne, ça parle énormément, parce que moi, depuis toute petite, à chaque fois que je faisais mes discours féministes et que quand j'ai fait mon coming-out féministe, on me disait, on me disait, non, mais arrête. Ça, c'est un truc de là-bas, ce n'est pas un truc de chez nous. On a des problèmes économiques, etc. Et en fait, c'était vraiment cette question d'appropriation. Et je me suis dit, mais en fait, le féminisme, ce n'est pas du tout quelque chose des pays du Nord. En fait, c'est quelque chose de global, cette question d'appropriation. Et donc, du coup, c'est à ce moment-là que j'ai utilisé cette recherche un peu comme base pour rappeler la question d'appropriation autour du féminisme. Ma définition personnelle du féminisme, parce que je sais que c'est aussi un mot qui fait débat. Oui, tout à fait. Malheureusement. Alors, c'est plutôt, disons, ma définition, c'est vraiment tout simplement l'égalité. C'est juste, ou même de l'équité. C'est une équité homme-femme et au-delà, voilà. C'est juste les mêmes droits, les mêmes devoirs pour tout le monde. C'est pas forcément une lutte contre les hommes, au contraire, je considère que vraiment, ce serait des alliés pour y arriver. Et donc, c'est vrai qu'en fait, je m'étais aussi rendue compte, voilà, à chaque fois que je disais le mot féminisme, des fois, il y avait des gens qui étaient choqués.

  • Speaker #0

    Le côté assez militant, en fait.

  • Speaker #1

    Le côté militant, en fait, c'est vraiment, c'est une grosse caricature à ce niveau-là. Et donc voilà, du coup, j'ai fait beaucoup de recherches autour de cette femme-là et autour, oui, de cette question d'appropriation, de rappeler qu'en fait, les questions d'égalité sont la responsabilité de tout le monde et qu'on n'arrivera jamais vraiment à vivre bien, à avoir des sociétés fonctionnelles tant qu'on aura la moitié de la population qui n'a pas les mêmes droits que l'autre moitié.

  • Speaker #0

    Et tu parles de ça, en fait, quand tu nous as décrit ton parcours, on comprend que ça, ça arrive finalement très tôt dans ta vie. T'as quel âge à ce moment-là, quand tu découvres Bertha Lutz et que tu commences à travailler sur elle ?

  • Speaker #1

    Ouais,

  • Speaker #0

    22 ans.

  • Speaker #1

    22 ans, donc quand même, tu vois, fin d'études quasiment. Donc, c'était mon deuxième master que je faisais à l'époque.

  • Speaker #0

    Et là, tu vois, je t'imagine, à 22 ans, découvrant ce profil où finalement, tu te rends compte qu'elle a œuvré pour la cause qui t'avait mise en mouvement 8 ans avant. Quand je t'ai entendue la première fois, ce qui m'a marquée, c'est ta ténacité sur ce sujet-là. Est-ce que tu peux nous décrire un petit peu ce que tu as fait de tes recherches ? Parce que les personnes qui nous écoutent, ce qui m'a marquée dans ce que tu as raconté, c'est ta capacité à être tenace, à tenir le cap. Et moi, ma croyance, c'est qu'individuellement, si chacun va au bout de ses idées et promeut ce qui est important pour lui, alors les choses vont changer. Et donc, j'ai envie que tu nous décrives un petit peu cette ténacité dont tu as fait preuve après avoir découvert cette personne. Parce que finalement, ça aurait pu rester dans un mémoire au fond du placard. Et puis, c'est tout.

  • Speaker #1

    Clairement, non, complètement d'accord avec toi. Je pense que je me suis rendue compte de l'importance que c'était déjà dans la façon, l'impact que ça a eu sur moi et donc ma façon de m'approprier ces questions-là. Et je me suis dit, mais en fait, dans la situation dans laquelle aujourd'hui, on ne peut absolument pas se permettre d'oublier ces histoires. Il y a tellement d'histoires oubliées, notamment de femmes dans les relations internationales, dans la science, partout. Et en fait, je me suis dit, non, mais ça, c'est de l'or et on ne peut pas passer à côté. Alors, ce n'était vraiment pas facile. C'est vraiment pas facile parce que, comme tu dis, j'avais 22 ans. Je l'ai fait avec une collègue, une copine de fac à l'époque. On s'est mis à deux. Et ouais, on avait 22 ans. On n'avait pas vraiment d'expérience. On n'avait pas de thèse de doctorat. On n'était pas connus. Enfin voilà, pas du tout. Et oui, il y a vraiment cette question de tenacité. On n'avait vraiment pas lâché. Vraiment, vraiment pas lâché. Il y avait des moments où en fait, on se disait mais laisse tomber, ça sert à rien. On ne répond pas à nos mails. On demande des rendez-vous parce que nous, en fait, ce qu'on demandait, c'était il faut qu'on la connaisse, cette femme. On n'en a jamais entendu parler. Il faut qu'il y ait des films sur elle. Il faut qu'il y ait des affiches. Elle est où et tout. Et donc, en fait, on poussait, on poussait des portes et tout. Et soit on ne nous recevait pas. C'était vraiment galère. Puis on se disait mais attends, mais est-ce qu'il y a eu mille fois où on s'est dit mais laisse tomber en fait. C'est bon, on a fini nos études, c'est bon, on laisse tomber. Voilà, ils ne veulent pas qu'elle soit connue. Voilà, ce n'est pas notre problème et puis tant pis. Et en fait, on s'est dit, ben non, en fait, on ne peut pas au nom de plein d'autres femmes que ça pourrait toucher, au nom de l'histoire, au nom de l'égalité. On ne peut pas juste abandonner. Et non, on a vraiment insisté. Alors, c'est intéressant par rapport Ausha des mots, parce que je pense que...

  • Speaker #0

    On pouvait être un peu décrite quelquefois comme entre guillemets en kikineuse pour ne pas dire autre chose. Chose que peut-être un homme, on aurait dit, voilà, tenace.

  • Speaker #1

    Il est tenace.

  • Speaker #0

    Donc c'est très bien que tu utilises ce mot. Et ça, c'est vraiment un des conseils que je donne. Je parle quelquefois dans des écoles et tout à des personnes en fin d'études ou d'ados. Je dis mais juste ne lâchez pas. Lâchez pas parce que ça vaut vraiment le coup. Et si vous, vous y croyez, c'est tout ce qui compte. C'est tout ce qui... Et c'est ce qu'on se disait un peu tout à l'heure, avant le début de l'enregistrement, peut-être juste de se dire d'essayer. D'essayer, c'est déjà énorme. Est-ce qu'on va réussir ou pas ? Ça, c'est une autre question. Mais juste d'essayer, c'est déjà tellement important.

  • Speaker #1

    Et parfois, ça marche.

  • Speaker #0

    Souvent, ça marche.

  • Speaker #1

    Et finalement, tu vois, quand tu nous parles de Bertha Lutz, qui, je pense, va énormément... Enfin, son parcours, le fait qu'elle ait été une femme parmi les quatre... présente sur un événement majeur en 1945, l'initiation des Nations Unies, qui n'est pas rien, et qu'elle était complètement oubliée, finalement, on se rend compte de combien les gouttes d'eau individuelles sont importantes pour faire avancer ces sujets-là, et d'autant plus parce que là, aujourd'hui, on est en train d'enregistrer en avril 2025, et on se rend compte que toutes les gouttes d'eau, il faut que ça devienne un torrent pour contrer toutes ces idées contraires et qui ont le vent en poupe. donc écoute je suis ravie que tu t'es pu parler de ta ténacité et non pas de ton côté enquiquineuse je me serais jamais permise de parler de ça mais en tout cas voilà donc soyez tenace effectivement et donc j'ai pas de part mais je peux dire que en tout cas les personnes peuvent écouter un documentaire qui a été produit par HBO grâce à tes recherches et celles de ton ami donc voilà allez chercher et découvrir ce profil qui est absolument incroyable et plein d'inspiration aussi tu peux pas l'interviewer Donc, ce documentaire sera parfait.

  • Speaker #0

    Non, c'est vrai que... Non, non, aujourd'hui, on peut dire qu'après des années de galères et de ténacité, on y est arrivé. Donc, il y a eu, comme tu dis, il y a eu ce documentaire de HBO qui retrace sa vie, sur lequel on a travaillé. On a fait un TED Talk à l'époque. Maintenant, il y a des livres pour enfants. On enseigne aussi dans des universités de diplomates cette histoire. Donc, à un moment, c'était assez... On a fait quelques écoles de diplomatie dans le monde pour raconter cette histoire. C'est une histoire aussi qui est inclue dans l'histoire, dans les cours d'introduction des Nations Unies. Donc, dès que quelqu'un entre aux Nations Unies, ça s'est inclus. On a écrit un livre qui s'appelle « Les femmes et les Nations Unies » où on a inclus cette histoire. Donc, il y a eu plein, plein, plein de choses depuis. Et l'idée, c'était un peu de, en anglais, c'est « get history right » . Je ne sais pas comment tu traduis ça.

  • Speaker #1

    Un peu de redonner à l'histoire, enfin à cette femme, cette histoire. Voilà,

  • Speaker #0

    exactement. donc non on y est arrivé après il y a aussi je le dis aussi quand je parle à des filles dans les écoles ou dans les niveaux de master dans les universités de leur dire mais allez-y chercher ces femmes là, chercher ces petites pépites qui existent dans les archives ou voilà ailleurs ou comme tu le fais toi aussi à travers les alignés tu vois, de mettre en lumière toutes ces histoires qui autrement ne seraient passerait un peu dans les oubliés c'est un peu dommage

  • Speaker #1

    tu vois j'avais envie de rebondir exactement là-dessus en disant finalement observer ces femmes qui font peut-être le en anglais on dit l'extra mile, qui vont un tout petit peu plus loin que là vous auriez osé aller et finalement qui vont vous guider qui vont vous permettre de vous dire mais moi en fait pour Pour moi, c'est possible. Et voilà, Bertha Lutz, c'est vrai que c'était une femme incroyable en 1945. Mais il y en a tellement des femmes aujourd'hui qui font ce pas de côté dans plein de domaines différents. Et il faut les valoriser. Il faut écouter leur voix. Il faut les diffuser. Tout à l'heure, on parlait de l'instagrammable. Ce n'est peut-être pas tout à fait instagrammable, voire pas du tout. Par contre, il faut leur donner une voix. Il faut les valoriser. Je suis super contente qu'on ait parlé de Berthaloud, clairement. Mais là, on t'avait laissé trouver ta place, finalement, dans ce monde de la communication au CICR. Et je suis curieuse de savoir, parce que Fatima, tu n'es pas que ton travail, est-ce qu'il y a d'autres moments d'alignement que tu as envie de partager avec nous ou des réflexions que tu as aujourd'hui ?

  • Speaker #0

    Oui, clairement. Non, merci. Et puis, comme tu dis, je pense que peut-être c'est un peu, juste pour rendre les choses un peu plus claires pour les personnes qui nous écoutent. Donc, il y a un peu eu deux moments. Il y a ce moment de recherche autour d'égalité des genres et donc autour de Berthaloutes. Et puis, comme tu dis, et ça revient à ce que tu fais toi aussi avec Les Alignés, c'est la création de modèles, en fait, de modèles inspirants de femmes. On se dit, ah, mais elle a fait, donc pourquoi je ne pourrais pas le faire ? Et ça, on en manque. Il faut en créer autant que possible. Donc, toi, tu le fais aussi à travers ce podcast. Et puis ensuite, du coup, il y a l'autre partie, disons, de ma vie professionnelle qui est vraiment l'humanitaire. Voilà, les deux se complémentent au final, mais c'est vraiment un peu deux casquettes. Donc, je suis contente qu'on ait eu l'occasion de couvrir tout ça, parce que c'est jamais très facile de parler de tout ça en même temps, dans un seul épisode. Donc, c'est top. Et oui, par rapport à autre chose, tout ce qui n'est pas forcément les accomplissements du travail. Alors, je suis très, très alignée sur mon tapis de yoga. Ça, c'est très aligné. Je suis très alignée quand j'ai des conversations comme les nôtres, surtout entre femmes, en fait. Je suis très, très alignée dans les échanges, dans l'apprentissage, d'apprendre. Et aussi, je pense, et surtout, comme tu le sais, aujourd'hui, je travaille plutôt dans les guerres. C'est beaucoup de souffrance que je vois, c'est beaucoup d'horreur. J'ai fait cinq années dans des pays en guerre et j'ai vu le meilleur, mais aussi le pire de l'humanité. Et pour moi, je retrouve... Aujourd'hui, c'est vraiment... Aujourd'hui que je suis revenue, ici à Genève, c'est dans l'émerveillement, dans la nature. Voilà, je trouve ça juste incroyable. On est en train de faire ce podcast en plein printemps, donc voilà, c'est vrai, c'est l'apogée de cette beauté. Et c'est vrai que des fois, quand je trouve ces souffrances sur lesquelles on travaille, qu'on essaye de... Évidemment, on essaye d'apporter un peu de soulagement et encore une fois, un peu d'humanité dans toute cette horreur. Souvent, je vais un peu me réfugier dans... dans nos montagnes, entre les arbres, et puis juste de voir la beauté qu'il y a autour de nous. Parce qu'il suffit juste de poser son regard là où elle est, mais elle est vraiment partout.

  • Speaker #1

    Une question qui me vient, parce que les alignés, je pense qu'il y a eu beaucoup de personnes qui étaient plutôt dans le monde du corporate, qui sont passées à ce micro, ou des entrepreneuses, ou en tout cas des personnes qui ne sauvent pas des vies, des personnes qui ne voient pas des guerres. Et je me posais cette question, c'était, tu vois, on parle beaucoup d'alignement par avoir des projets de sens. Et toi, tu es clairement dans un endroit où il y a du sens. Mais après, je me disais, quelle pression ? Comment tu vis avec tout ça ? Comment tu vis en se disant que chaque jour, ce que tu vas faire a énormément d'impact et que parfois, j'imagine, ce n'est pas facile ? Est-ce que c'est une question qui fait sens pour toi, ça ?

  • Speaker #0

    Oui, complètement, ça me parle beaucoup. Alors déjà, j'ai eu de grands débats internes aussi en me demandant, mais attends, est-ce que tu es obligée d'aller ? de l'autre côté du monde, dans une zone de guerre sous les bombes pour finalement trouver un sens à ta vie et te dire tu sers à quelque chose sur cette planète. Ma conclusion, ça a été que non, on peut très bien le faire en travaillant dans un monde corporate. Des fois, c'est un sourire, c'est une aide. Les besoins ne sont pas non plus que de l'autre côté de cette planète et il y en a aussi vraiment plein autour de nous. Donc on peut vraiment faire une différence aussi localement et ça je crois. énormément au local, à la puissance du local. Et oui, c'est vrai que la question du sens revient toujours dans le sens où tu te dis il faut, disons, arriver à faire la paix avec... Cette phrase, c'est encore en anglicisme, mais tu sais ce truc qui dit « I am enough » . De se dire « mais en fait, j'ai pas besoin de prouver déjà à moi-même que je peux y arriver » . Et à un moment, on se dit « mais en fait, ça va, quoi. J'ai pas besoin de faire des choses de... » de super héros et tout, pour avoir une validation. Et donc ça, par contre, ce qui est sûr, c'est que oui, je n'arriverai jamais à faire quelque chose où je ne trouve pas du sens. Et c'est un énorme privilège, c'est une chance énorme de pouvoir travailler dans un secteur qui change la vie des gens, clairement. Je l'ai vraiment vu sur le terrain et c'est une différence de vie ou de mort, ça c'est clair. Et donc d'avoir ce privilège-là, c'est énorme. Et en même temps... je fais aussi un travail d'une certaine manière sur moi où je me dis, ok, est-ce qu'il y a moyen que ça t'impacte sans forcément risquer ta vie ?

  • Speaker #1

    Je crois que cette phrase est l'une des plus mythiques de ce podcast. Mais bon, effectivement, merci d'avoir répondu à cette question. Et pour les personnes qui écoutent les Alignés aussi, pour trouver leur chemin, notamment les personnes qui cherchent leur voie au début, tu disais que ce n'était pas évident. Peut-être que ça leur donnera des billes pour savoir dans quelle direction aller.

  • Speaker #0

    Mais carrément, je pense aussi, moi j'ai eu une réflexion à un moment en me disant, on met tellement de pression sur le sens de notre travail, on met tellement de pression sur est-ce que c'est vraiment au travail qu'on va trouver tout notre sens ? Je sais pas. Et donc en fait, c'est un peu cette idée de me dire, est-ce qu'il n'y a pas... Tu vois, pour toutes les personnes qui sont peut-être frustrées dans leur travail, en se disant, ouais, mais bon, en fait, moi, ça sert à rien ce que je fais. Déjà, ça sert toujours à quelque chose. Mais c'est plutôt de se dire, mais en fait, qu'est-ce qui... Est-ce que si je trouve pas cette satisfaction à travers... Voilà, j'ai besoin de plus de sens dans mon travail, et est-ce qu'il n'y a pas moyen de le trouver ailleurs ? que ce soit dans sa vie personnelle ou en rejoignant des associations il y a plein d'autres manières de faire la différence sans pour autant en faire le métier de sa vie donc voilà un peu de créativité et je pense qu'on est tous très très créatifs là-dedans,

  • Speaker #1

    pas trop de pression sur ça et effectivement c'est très juste il y a ce côté égo qui est nourri je trouve très tôt notamment quand même les enfants, tu vois, qu'est-ce que tu vas devenir plus tard ? En fait, comme si on devenait quelque chose. Non, en fait, tu es déjà quelque chose. Et je trouve que ça met tellement de pression sur les épaules, tu vois, tu veux devenir pompier, devenir peu importe quoi. Donc la pression, elle commence très, très tôt. Et finalement, c'est vrai que dans les parcours des alignés, j'ai remarqué qu'il y avait des personnes qui avaient une vie avec un éventail de parcours qui parfois arrivaient en parallèle. Tu vois, tu me dis, là, c'est intéressant parce que... On a réussi à traiter deux sujets qui n'ont presque rien à voir, mais en fait, c'est toi qui as l'initiative des deux sujets. Et c'est assez souvent qu'à ce podcast, on se rend compte qu'on se nourrit de différentes, on appelle ça des domaines de vie, de ces différents domaines de vie. Et parfois, ça passe par le yoga, par la danse, par la créativité, par le chant. Et c'est vrai qu'il y a un côté avec le coaching, avec le développement personnel, où tout semble passer par la vie professionnelle. réussite professionnelle et je trouve ça intéressant qu'on en parle et qu'on questionne ça ici et même avec quelqu'un comme toi qui a un job pour le coup plein de sens donc voilà, merci beaucoup de partager ça dans ce podcast on aime bien avoir des conseils, des enseignements que tu aurais envie de partager avec nous, pour les personnes qui nous écoutent et qui ont envie de s'aligner alors oui,

  • Speaker #0

    je pense que le premier peut-être va faire déjà le pont entre la dernière réflexion que tu as partagée, qui résonne beaucoup, qui consiste en fait à se dire, au lieu de se dire qu'est-ce que je veux faire, c'est plutôt qui est-ce que je veux être. Quels sont en fait, déjà de se poser la question des valeurs, quelles sont mes valeurs, déjà ça c'est énorme de les connaître, et de dire en fait qui je veux être. Et dans ce qui je veux être, quel type d'activité soutiendrait se devenir, entre guillemets. Donc voilà, c'est vrai que si je veux être une personne bienveillante, qui aide mes proches, etc., je ne vais peut-être pas faire un travail super stressant qui m'enlève tout le temps que j'ai avec ma famille. Donc voilà, juste un peu de inverser un peu les questions qu'on se pose. Et puis, alors ça, c'est clair, la tenacité, vraiment la détermination de... À chaque fois, je me dis ce truc, tu sais, qui dit en anglais que actions lead to action. Donc, de... Quand on fait, et ça n'a pas besoin d'être parfait, parce que c'est vrai qu'il y a ce truc de « ah non, mais c'est jamais assez bien » , « non, non, mais là, je ne sais pas, tu vois le podcast, non, non, mais en fait, là, je pourrais encore l'améliorer » . Non, c'est tout. On l'envoie, l'idée, c'est juste que ça parte. Et puis, de voir ce que ça donne, c'est juste aider. Et donc, en fait, ça se travaille aussi à travers des rencontres. En fait, c'est quand on est dans le mouvement, forcément, la vie bouge. C'est toujours... C'est la stagnation qui est peut-être un peu cette inertie, mais juste un peu d'aller à la rencontre, d'écrire ce mail. Ce n'est pas grave, on n'aura pas de réponse. Eh bien, on le renvoie et on le renvoie encore.

  • Speaker #1

    Et au pire, oui, on a renvoyé un nombre interne.

  • Speaker #0

    Et donc, voilà, de ne pas avoir peur de tout ça. Puis ensuite, on en parlait tout à l'heure, mais c'est vrai qu'en fait, en tant que... justement en tant que femme, on a un peu tendance à se un peu à se rabaisser, puis je ne suis pas si bon pour ça, puis qu'est-ce que les gens vont croire quand je vais dire ça, et puis de le faire quand même, ça c'est des voix qu'on a autour de nous, ça ne nous définit pas de prendre la parole, de postuler à ce job, et puis on voit ce que ça donne, et puis peut-être qu'on ne le voudra pas, mais au moins qu'on postule et puis d'aller à la rencontre de cette personne, d'envoyer ce mail de, voilà, juste de s'exposer, de prendre un peu un risque, parce qu'en fait ça... ça peut vraiment faire des chocs à pique. Complètement. C'est tout ce que ça peut donner après. Et donc voilà, c'est sûr que c'est plus facile à dire qu'à faire. Mais je trouve que de se donner un peu ces petits défis quotidiens ou hebdomadaires et de se féliciter après. Vraiment, vraiment. Moi, j'ai tendance, tu vois, je me dis, bon, OK, je me fais un peu des petits... Ce ne sont même pas des objectifs, parce que c'est plutôt un peu des intentions. On va les appeler ça un peu des intentions par semaine. En me disant, cette semaine, j'aimerais bien ça. Et si je n'y arrive pas, je me dis que ce n'est pas grave. Il y a une raison. Tu y arriveras encore la semaine prochaine. Il n'y a pas de problème. Donc, de s'enlever un peu cette... On se met quand même une sacrée pression. Et puis, être femme aujourd'hui, quelques-unes d'entre nous sont aussi mères, sont collègues, sont amies, sont partenaires. Ça fait vraiment beaucoup. C'est une question de charge mentale. À un moment, juste de se dire, c'est déjà super. On y arrive.

  • Speaker #1

    Je reviens sur You're Enough. T'es assez.

  • Speaker #0

    T'es assez. Il n'y a pas besoin de faire plus. Il y a aussi, on en parlait tout à l'heure en dehors du studio, c'était tout change tout le temps. Il y a vraiment cette question d'impermanence. Il n'y a rien qui dure. Donc, je me rends compte que même à travers, tu vois, j'ai fait mes années dans des zones de conflit. Ce n'est plus le cas aujourd'hui. Mes états d'âme, mes émotions que je ressens maintenant, je ne les ressentirai pas peut-être dans un quart d'heure, 30 minutes. Tout, tout change tout le temps. Donc, ce qui laisse aussi énormément d'espoir et le chant à beaucoup de créativité.

  • Speaker #1

    Quand je serai en train de me poser plein de questions, je repenserai à ça, sur est-ce que je dois le faire, est-ce que je ne dois pas le faire, est-ce que je dois célébrer ça ? Le côté célébration, je trouve qu'il est très intéressant parce que je trouve qu'on a tous et toutes tendance à passer à autre chose très rapidement. Tu vas se dire que les choses sont faites et que c'est acquis. Alors, merci pour tous ces conseils que je vais vraiment garder précieusement. Je te vois, là, on parle de plein de sujets. On a parlé yoga, on a parlé de Bertha, on a parlé de ton travail, on a parlé de toi. On aimerait bien, je pense, savoir ce qu'on peut te souhaiter, Fatima.

  • Speaker #0

    Wow, grosse question ! On pourrait me souhaiter un cœur ouvert, de continuer à s'émerveiller, de continuer à rencontrer, d'apprendre, à continuer à faire mes asanas et toutes mes postures de yoga. Mais aussi la contemplation de l'extérieur et de l'intérieur. Et c'est aussi, d'une certaine manière, à me le souhaiter à moi, mais aussi au monde, en fait. Je pense que... de retrouver de la douceur. Je pense de revenir à la douceur, de mettre un peu de magie dans son quotidien. C'est comme quand tu regardes autour de nous, c'est incroyable juste le fait d'être là, d'être vivant, de respirer. C'est clairement un miracle. Et les petits bonheurs sont vraiment... sont vraiment là. Cette personne qui passe à côté de toi qui te sourit, le rire d'un enfant, la bise le matin, la rosée, juste des choses très très simples qui font qu'on peut être complètement dans la contemplation à longueur de journée.

  • Speaker #1

    Revenir à une certaine simplicité, finalement.

  • Speaker #0

    Il y a beaucoup, beaucoup de beauté dans la simplicité et finalement, il y a un peu tout dans rien.

  • Speaker #1

    Je vais garder cette phrase. Qui est très juste.

  • Speaker #0

    qui est très bien. Mais c'est vrai qu'il ne faut pas grand-chose.

  • Speaker #1

    Pour celles qui ont envie d'aller sur ton chemin, est-ce qu'il y a des médias, des podcasts, des livres que tu recommandes ?

  • Speaker #0

    J'écoute pas mal de podcasts. J'aime beaucoup un podcast à soi de Arte, aussi sur toutes ces questions de genre. Évidemment, le cœur sur la table et les couilles sur la table. Il y a un podcast hyper chouette qui s'appelle Émotions que j'aime aussi beaucoup. Évidemment, le côté écolo, ça va être la terre au carré. Et il y a aussi Philosophie sexy que j'aime aussi beaucoup. Et en anglais, j'écoute pas mal un podcast qui s'appelle On Being, qui est aussi un peu sur toutes les questions de spiritualité, tout qui est vraiment, vraiment chouette. Et puis, en livre, alors évidemment, on titoue le coq avec Les Grandes Oubliées, parce que ça, voilà, ça résonne beaucoup avec ce qu'on a parlé. J'aime beaucoup les Mona Chollet. Et évidemment, je suis une grande fan d'une autrice qui s'appelle Chimamanda Adichie, qui est une autrice nigériane qui a écrit On devrait tous être féministes. Donc, il m'a toujours beaucoup parlé. Et puis autrement, après, sur mon parcours, c'est plutôt... Je suis plus sur LinkedIn. En ce moment, c'est un peu plus LinkedIn, pas très Instagram. Peut-être à un moment, j'y étais. Puis après, j'ai déconnecté.

  • Speaker #1

    Écoute, on va te suivre sur LinkedIn. Et on a envie de voir toutes tes activités. Et on s'imagine qu'il y a peut-être... des choses qui vont émerger dans les prochaines années, puisque Action Lead to Action, donc on sait qu'il se passera des choses pour toi. J'ai juste envie de te remercier, Fatima, pour cette conversation qui, pour moi en tout cas, a été vraiment un vrai plaisir, un vrai échange. Et je sais qu'elle va en inspirer beaucoup. J'ai juste envie de te dire que le fait que tu parles d'humanité et que ça éclaire ton visage, en tout cas, moi, ça m'a donné beaucoup d'espoir. Donc rien que pour ça, j'ai envie de te dire merci beaucoup.

  • Speaker #0

    Merci mille fois à toi, Charline.

  • Speaker #1

    Et j'ai envie de te dire à bientôt.

  • Speaker #0

    À très vite.

Chapters

  • Introduction et présentation de Fatima Sator

    00:06

  • Le parcours de Fatima : Prise de conscience et engagement

    01:40

  • Les expériences de Fatima dans l'humanitaire

    05:17

  • Les leçons tirées du journalisme et du terrain

    15:05

  • La recherche sur Bertha Lutz et son impact

    21:02

  • La ténacité et l'importance de raconter les histoires oubliées

    31:00

  • Conseils pour s'aligner et trouver son chemin

    40:18

  • Conclusion et réflexions finales

    45:48

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Description

On rencontre rarement une personne qui a passé des mois sur le terrain en zone de conflit pendant quatre ans pour aider les populations (Ukraine au début de la guerre, Yémen, Congo, Nigeria et Ethiopie).

On rencontre exceptionnellement une personne qui se révolte depuis l’enfance de la condition des femmes et qui est parvenu à faire reconnaitre des oubliées de l’histoire.

On rencontre peu une personne qui se donne comme intention de s’émerveiller des choses simples.

Alors est-ce que tu imagines la probabilité de rencontrer une personne qui soit tout cela à la fois ?

 

Cette personne, c’est Fatima Sator. Son parcours d’alignement est, n’ayons pas peur des mots : I-N-C-R-O-Y-A-B-L-E. Et cet interview l’est encore plus tant il est authentique.

 

Je remercie Fatima d’avoir accepté mon invitation et lasse place à ce nouvel épisode des alignées qui raisonnera avec nombre d’entre vous.


Pour aller plus loin :

Podcasts en français :

Un podcast à soi Charlotte Bienaimé pour Arte

Le cœur sur la table et les couilles sur la table de Victoire Tuaillon

Emotions de Louie Media

La terre au carré par Mathieu Vidard.

Philosophie sexy de Marie Robert

 

Podcast en anglais

On Being de Krista Tippett


Livres

Titiou Lecoq - Les Grandes Oubliées

Mona Chollet

Chimamanda Ngozi Adichie – Nous sommes tous des féministes

 

Pour suivre Fatima :


 ✨ Si veux en savoir plus sur Les alignées, file découvrir le site internet www.lesalignees.com ou sur mon LinkedIn dans lequel tu découvriras comment nous oeuvrons pour transformer le monde professionnel pour plus d'alignement des salarié·es et la mixité femme/homme.


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Bienvenue sur Les Alignés, je suis Charline Moreau, consultante et coach en entreprise et depuis plus de trois ans, je tends le micro à des femmes qui ont osé aligner leur vie avec leur valeur. Depuis toujours, ce sont des conversations authentiques avec des femmes sur leur parcours qui m'ont permis de profondément questionner ma vision de l'ambition et de la place que je voulais prendre. Alors je me suis dit que ces échanges intimistes pourraient inspirer d'autres personnes s'ils étaient diffusés plus largement. C'est comme ça que les alignés sont nés. Tous les 15 jours, je partage avec toi des discussions inspirantes où l'on parle de tout. De pro, de perso, de passion, de reconversion, de réussite, de doute ou encore d'engagement. Parce que trouver sa place en tant que femme dans la société est un cheminement. Et chaque parcours peut nous éclairer. Si ce podcast te plaît déjà, j'ai besoin de toi pour le faire grandir. Partage-le à une personne qui en a besoin. Et surtout, laisse-moi un commentaire et 5 étoiles sur ta plateforme d'écoute préférée. Je sais, ça n'a l'air de rien. Mais c'est vraiment très utile pour moi et pour faire connaître ce podcast. Maintenant, je laisse la place à ce nouvel épisode des Alignées. On rencontre rarement une personne qui a passé des mois sur le terrain en zone de conflit pour aider les populations. On rencontre exceptionnellement une personne qui se révolte depuis l'enfance de la condition des femmes et qui est parvenue à faire reconnaître des oubliés de l'histoire. On rencontre peu... une personne qui se donne comme intention de s'émerveiller des choses simples. Alors, est-ce que tu imagines la probabilité de rencontrer une personne qui soit tout cela à la fois ? Cette personne, c'est Fatima Sator. Son parcours d'alignement est, n'ayons pas peur des mots, incroyable. Et cette interview l'est encore plus tant il est authentique. Je remercie Fatima d'avoir accepté mon invitation et laisse place à ce nouvel épisode des Alignés qui résonnera avec nombre d'entre vous. Bonjour Fatima !

  • Speaker #1

    Bonjour Charline !

  • Speaker #0

    Comment vas-tu ?

  • Speaker #1

    Ça va bien et toi ?

  • Speaker #0

    Écoute, je vais super bien, je suis ravie. On est dans un endroit extraordinaire, puisqu'on est au CICR, donc le Comité International de la Croix-Rouge. Je pense que là, en termes de grades, le podcast a pris énormément de grades vu la pièce dans laquelle on enregistre. Et je te remercie de m'inviter dans cet endroit assez fabuleux.

  • Speaker #1

    Merci à toi, merci de venir jusqu'ici. C'est trop bien de t'avoir.

  • Speaker #0

    Écoute... Voilà, même si on est au CICR, on a à cœur ici dans les alignés d'avoir une discussion authentique sur toi, ton parcours. En fait, c'est vraiment pour ta personnalité, pour qui tu es que je suis venue jusqu'à Genève. En tout cas, les personnes qui ne te connaissent pas ici, elles ont envie de connaître ton parcours. Et que je te pose cette première question que je pose à toutes mes invitées, qui semble simple, mais qui en réalité est assez complexe. Fatima Sator, qui es-tu ?

  • Speaker #1

    Oh, sacrée question ! déjà là c'est très philosophique je me demande si on arrive à y répondre ou alors peut-être ça prend presque toute une vie en fait pour avoir la réponse si je reste un peu dans le métaphysique je te dirais que je suis un peu une exploratrice de la vie exploratrice de cette planète on vient là, on n'a pas beaucoup de temps on a un peu de passage on fait des rencontres merveilleuses on expérimente des choses, on expérimente la vie On expérimente un voyage intérieur aussi. Enfin, voilà, on a un peu ce moment sur Terre qui est magique. Et du coup, je pense que la question qui est dessus, ça revient un peu à qu'est-ce qui me définit. Donc, si je devais un peu redescendre de la métaphysique pratico-pratique, comme tu vois, je suis une femme. J'ai, disons, les valeurs qui me définissent, ça serait... Pour moi, c'est très, très important la question d'humanité. Donc, je me définis déjà comme humaine. qui vit avec tout plein d'autres petits humains autour de moi. Et j'adore ça. J'adore l'humanité, j'adore les gens, j'adore la beauté de l'humanité. Et donc, je suis, évidemment, je travaille ici au Comité international de la Croix-Rouge. Je suis aussi une amie, une partenaire, une fille. Voilà, j'ai plusieurs casquettes en fonction de... à qui tu demandes. Mais non, aujourd'hui, je ne saurais pas vraiment te répondre clairement de qui je suis sans, comme on se le disait, s'identifier à un travail, parce que c'est très souvent, en fait, je pense que tu le vois très souvent, on va se présenter en présentant notre travail. Et j'essaye de faire vraiment ce travail, de me dire qui suis-je autre que ce que je fais ? Qu'est-ce qui me définit ? C'est toute une recherche, c'est très beau, c'est une chouette aventure.

  • Speaker #0

    C'est très beau. En fait, dans le podcast, il n'y a pas d'image. Moi, ce que je peux dire, c'est que j'ai observé que quand tu as utilisé le mot humanité, tu as vraiment le visage qui s'est éclairé. J'ai ressenti que c'était très important pour toi. J'ai envie que les personnes qui nous écoutent sentent que ce mot-là, il n'a pas seulement juste une connotation toute simple, mais que vraiment, il y a une sorte d'énergie qui vient t'animer quand on parle. J'espère que vous aussi, maintenant que je vous en parle, vous pouvez visualiser Fatima qui s'anime quand on parle d'humanité. effectivement tu travailles au comité international de la Croix-Rouge et là c'est ce que tu fais maintenant mais dans ce podcast en fait pour aller creuser un petit peu plus loin au-delà de la métaphysique en fait j'ai développé une méthode assez simple dans laquelle je demande à mes invités de revenir sur leur parcours d'alignement et en fait en réalité j'aurais peut-être dû parler de désalignement de moments où finalement tu as ressenti le besoin d'aligner ta tête, ton cœur et ton corps quand je te parle de ça il y a probablement un tout premier moment qui devient en tête Je serais bien curieuse de savoir quel a été ce tout premier moment pour toi.

  • Speaker #1

    Oui, volontiers. Alors, je crois que je te rejoins complètement dans cette idée de, j'ai l'impression, en tous les cas, un de mes objectifs et ce qui m'anime beaucoup, c'est toute cette question de déconstruction. Donc, un peu comme si on était un oignon avec plein de couches et qu'en fait, chaque expérience, chaque journée, chaque apprentissage nous amène à enlever chaque couche pour finalement se retrouver. Donc c'est vrai que cette question de presque de se désaligner pour finalement s'aligner, elle est très importante pour moi. Et écoute, moi, je pense que j'ai eu plutôt, c'est un peu comme le bonheur, j'ai des moments d'alignement. Il y a des moments où je me désaligne un peu, et il y a des moments où je me sens clairement alignée. Et un des moments qui m'a particulièrement marquée, je dirais, donc j'ai beaucoup voyagé dans mon enfance et dans mon adolescence, et après plus tard encore, et c'était un moment, on était en Inde avec ma famille. Et je vois cette scène d'une jeune fille qui avait été probablement, je m'imagine, mariée de force. Et en fait, je la voyais, elle pleurait, elle ne voulait pas suivre sa famille ou son mari, qui clairement avait une grande différence d'âge. Et là, tout s'est allumé en moi. Il y avait la révolte, il y avait l'indignation, il y avait la colère. Et c'est là que j'ai vu, donc j'avais 14 ans, et je me suis dit, mais en fait, non, je... je veux faire quelque chose, ça a été vraiment un peu l'élément déclencheur, je veux faire quelque chose pour mon temps sur cette planète qui va contribuer à changer d'une certaine manière la vie des femmes, ou en tout cas encore que ce qu'elles soient, que ce soit les femmes à côté de moi ou les femmes plus loin, mais en tout cas je me suis vraiment rendue compte de la dynamique de pouvoir, du patriarcat, de toutes les injustices, de qu'est-ce que ça veut dire être née femme. Et en fait, je me suis rendue compte, je me suis dit, mais en fait, la seule chose qui me sépare de cette femme, de cette jeune fille qui a à peu près le même âge que moi, c'est juste que j'ai eu le privilège de grandir et de vivre dans un autre pays. Mais c'était juste une pure chance. Donc, c'est vrai que c'était à ce moment-là où j'ai vraiment senti que tout était aligné et que c'était dans ce domaine-là que je devais aller, d'une manière ou d'une autre.

  • Speaker #0

    Et à ce moment-là, tu as 14 ans. On a envie de savoir un peu à quoi ressemble ton quotidien, tu vois, t'habites où ? Parce qu'effectivement, déjà, t'es en Inde à 14 ans, ce qui est assez exceptionnel. Et quand même, c'est une prise de conscience qui est, j'allais dire, alors peut-être que je vais utiliser des mots que t'as pas du tout ressenti, donc tu me dis si c'était pas ça. Mais moi, effectivement, à 14 ans, comprendre qu'il y a ce monde-là dans lequel tu nais femme et finalement qu'il y a une énorme différence entre les femmes et la manière dont elles sont traitées dans le monde. Voilà, j'ai envie de savoir, tu pars d'où ? en arrivant en Inde ?

  • Speaker #1

    Oui, alors je pars quand même, je viens quand même d'une famille, donc je suis née en Algérie, je viens d'une famille très « ouverte » , avec un papa très féministe, une maman aussi, donc ils m'ont vraiment poussée dans ces réflexions-là. Mais reste que, c'est vrai que en tant qu'Algérienne, il y avait tellement de choses qui me révoltaient, depuis toute jeune, je voyais la différence de traitement de la société par rapport à mon frère. Des histoires toutes basiques, d'héritage, comme quoi la loi lui donne le double d'héritage que moi, potentiellement. J'ai été mise dans ce bain de, déjà, tu es née femme, donc tu es inférieure d'une certaine manière, donc tu as d'autres droits, etc. Donc depuis toute petite, ça m'a toujours... Je me rappelle, je disais à mes parents, je devais avoir 8-9 ans, je disais que mon rêve ultime, c'était de renaître homme. Je me déguisais dans la rue en homme. pour voir ce que c'était d'être homme dans une société patriarcale. Donc ça m'a toujours énormément animée. Et très vite, j'ai commencé à poser beaucoup de questions, à tout décortiquer. Donc je ne prenais pas grand-chose pour acquis. Si on me dit, ça c'est comme ça, non ça ne me va pas. Je vais essayer de comprendre pourquoi, pourquoi on en est arrivé là. Évidemment, l'épisode, cette période en Inde où j'étais scolarisée, où j'ai fait quelques années d'études là-bas, c'est encore plus renforcer cette... Cette problématique qui, je pensais, à l'époque, était seulement dans mon pays. Je me suis rendue compte que non. Jusqu'à aujourd'hui, on ne peut absolument pas dire qu'il y a un seul pays qui atteint l'égalité hommes-femmes. C'est révoltant, c'est inacceptable. Je me dis qu'on est en 2025. On arrive à faire plein de choses. On a envoyé des hommes sur la Lune, et des femmes d'ailleurs. Des vaccins, des soins, tout ce qu'on veut. Mais... sur ce point-là, on parle quand même de 50% de la population. Et c'est énorme.

  • Speaker #0

    Et c'est drôle quand tu parles de ça, parce qu'il y a vraiment le sujet du rapport à la domination du patriarcat. En fait, souvent, moi, quand j'utilise ce mot qui, pour beaucoup de personnes, est un gros mot, et qu'on résume ça à, finalement, un esprit de domination, je te dis, ok, il y a finalement une différence entre deux populations qui sont équivalentes à la 50% de la population mondiale. Mais alors, bon, après, moi, je vais te dire, je vais te taquiner, parce que je vais te dire... Ouais, OK, t'as 14 ans. Là, tu te rends compte quand même qu'il y a un problème majeur dans la société. Et finalement, on a été nombreuses à se rendre compte de ça. Mais toi, t'as décidé de prendre le sujet à bras le corps. C'est-à-dire que tu t'es dit je vais faire ça de ma vie. Ce qui est quand même quelque chose d'assez exceptionnel. Et pour les personnes qui écoutent ce podcast, qui cherchent à s'aligner, qui cherchent à s'inspirer de Parcours, moi, j'ai envie de savoir en fait, comment tu t'es mis en mouvement face à cet objectif d'agir sur le patriarcat, sur la mixité femmes-hommes ? Comment t'as fait ? Alors bon,

  • Speaker #1

    c'était pas simple. Et je pense que c'est jamais simple. Et aujourd'hui, c'est encore la galère. Comme pour moi, pour toutes les femmes, en fait. Je pense qu'on n'y arrivera jamais complètement. Mais en tous les cas, je pense que même quand on se dit « Ah, mais ça y est, j'y suis arrivée dans cette égalité-là. » Non, en fait, non. Il faut encore se battre. Et c'est jamais à prendre pour acquis. L'histoire nous le montre. Non, écoute, en fait, à l'époque, je m'étais dit que je voulais être journaliste. Donc, en fait, je me suis dit que c'était la meilleure manière de raconter tout ça. Et c'était un peu cette phrase qui dit « oui, donnez la voix à ceux qui n'en ont pas » . On me dit « moi j'ai accès à certaines plateformes, je vais avoir accès à des études, donc j'ai envie de raconter tout ça » . Donc j'ai fait des études, alors ce n'était pas tout de suite le journalisme, d'abord je me suis un peu trompée, enfin pas beaucoup de compassion pour moi, parce que dans le sens où je trouve que ce n'est pas facile aujourd'hui de s'orienter, et on n'a pas forcément toujours les bonnes béquilles pour. Donc j'ai fait d'abord de l'économie, donc rien à voir. économie et finance, donc juste après le bac du coup, et j'étais bonne à ça et je détestais ça. Donc ça c'est toujours un peu le moment frustrant où tu te rends compte qu'en fait t'es bonne à un truc, mais t'aimes pas du tout ça. Et donc du coup j'ai attendu patiemment que ces trois ans passent et je me suis inscrite en master de journalisme. Au début c'était assez intéressant parce que j'ai essayé en France. Alors en fait j'ai fait des études à Lyon et puis après j'ai fait une année d'échange à Los Angeles, ça c'était vraiment cool. J'avais bien choisi l'échange. Et puis après, je voulais absolument retourner au journalisme. J'avais essayé des universités en France. Et en fait, je revenais toujours avec... C'est toujours le même retour. On me disait, ben non, t'as un profil plutôt d'économiste. Vous avez une licence en économie. Non, vous avez un bac S. Non, non, il n'y a pas de place, en fait, pour le journalisme là-dedans. Puis après, on m'a dit, à part si vous faites, je ne sais pas, journaliste, finance, finance ou économie, moi, j'en pouvais plus. Et donc, du coup, j'ai essayé d'autres pays en Europe. Et puis, la Suisse. La Suisse qui est étonnamment moins, entre guillemets, moins carrée. Puis du coup, en fait, on m'a acceptée directement au journalisme. Et là, c'est vrai que j'avais des camarades en théologie. C'était super intéressant. C'était des gens qui n'avaient absolument rien à voir avec ce cursus-là. Et là, ça a été l'éclate. Et là, j'ai vraiment adoré. J'ai adoré le journalisme. J'ai adoré raconter des histoires. j'ai adoré, je pense que c'était encore une fois cette valeur d'humanité qui était clairement honorée. parce que du coup, c'était aller à la rencontre de gens, des gens qui ne me ressemblent pas forcément, des gens qui ne pensent pas forcément pareil que moi, qui n'ont pas le même background socioculturel. Et c'était extrêmement enrichissant. Donc ça, c'était des années que j'ai adorées. Puis après, j'ai travaillé en tant que journaliste jusqu'à ce que je me rende compte que j'aimais beaucoup. J'ai fait beaucoup de local, disons. Par contre, il y avait clairement la dimension internationale qui me manquait. Et en fait, je me suis dit, moi, je vais être reporter de guerre. Et là, pour faire ça, on m'a expliqué. qu'il fallait idéalement faire un master en Angleterre. Et c'est ce que j'ai fait. J'ai enchaîné, j'ai fait un master à Londres. Et après, très vite, je me suis retrouvée dans le système international. Donc, j'ai d'abord travaillé aux Nations Unies, quelques années, ici à Genève. Et puis finalement... Aux Nations Unies, j'ai d'abord travaillé un moment pour l'ONU Femmes. Ensuite, je suis arrivée dans l'humanitaire. Je me suis dit, OK, en fait, c'est très sympa. C'est sympa à partir de Genève, mais je parle de la souffrance des gens et tout. Mais clairement, ça donne quoi ? C'est quoi le terrain et de quoi je parle ? Et c'est à ce moment-là que j'ai décidé de rejoindre le comité international de la Croix-Rouge. Et je suis partie quelques années essentiellement en Afrique.

  • Speaker #0

    C'est vrai qu'à un moment donné, il y a un saut. dans le vide où tu vois que tu parles de d'un coup j'ai voulu devenir reporter de guerre et je pense que les personnes qui nous écoutent se disent non mais qui est cette personne derrière ce micro parce qu'effectivement tout à l'heure on parlait ensemble en off, on se disait que finalement on n'était pas vraiment notre travail mais je m'imagine le fait de devenir reporter de guerre fait que ton travail est toute ta vie puisque j'imagine que ça prend toute la place Et donc, j'ai envie de savoir, toi qui étais engagée déjà au niveau des valeurs sur les femmes, qu'est-ce que tu retiens de ces années de reporter de guerre ? Qu'est-ce que ça t'a apporté ? Et aussi, au micro des Alignés, on a envie de voir un peu les deux côtés de la médaille. Parce que les personnes qui nous écoutent, c'est un peu un métier qui fait rêver. C'est un peu une vie qui peut sembler complètement pleine de sens et d'alignement. Et moi, j'ai envie de savoir qu'est-ce qui se passe derrière cette image. toute policée, toute jolie, toute vernie du reporter de guerre qui va raconter des histoires fondamentales pour l'humanité finalement.

  • Speaker #1

    Alors oui, finalement, je ne suis pas tout à fait devenue reporter de guerre. Je travaille du coup, je fais de la communication au CICR qui est une organisation humanitaire. Et ça ressemble beaucoup quand on est sur le terrain. Donc après, c'est clairement pas évident sur plein de plans. Mais je pense qu'en fait, la première fois que j'ai mis ma première mission était au Congo. J'avais 26 ans. Et là, en fait, on perd vraiment tous ses repères et on perd aussi surtout. Et d'où je reviens encore sur cette idée d'humanité, c'est-à-dire qu'en fait, je me disais, mais évidemment que moi, si j'étais née dans un pays en guerre que je n'avais pas depuis plus de 25 ans, que je n'avais pas eu accès à l'éducation, etc. Comment je réfléchirais ? Et en fait, c'est aussi des expériences qui m'ont appris que rien n'est noir ou blanc et qu'en fait, finalement, à mettre beaucoup de compassion. dans nos échanges, parce que finalement, on galère tous d'une certaine manière, avec des insécurités, avec des peurs, on l'a tous à un certain niveau, et donc en fait, par exemple, on faisait des visites en prison quelquefois, et moi, en fait, moi ce qui m'intéresse dans cette visite en prison, c'est juste l'humain qui est en face de moi, donc je vais pas du tout voir de quoi il est là, qu'est-ce qu'il a fait, pourquoi il s'est retrouvé là. Ce qui m'intéresse, c'est juste le fait que ce soit un fils, un frère, potentiellement un ami. est en fait un humain et qu'il a des droits de base, une dignité de base. Et donc, c'est vraiment de retourner dans cette humanité pure. J'ai aussi rencontré sincèrement des gardiens de prison qui faisaient leur maximum pour que ça se passe bien. J'ai rencontré en même temps des humanitaires qui étaient exécrables. Donc, voilà que, évidemment, notre travail ne nous définit pas, mais qu'il n'y a pas... Tout est très complexe, en fait. Tout est très gris. Et du coup, ça m'a appris à poser des questions, à comprendre. Et à essayer, oui, de mettre un peu cette bienveillance un peu partout.

  • Speaker #0

    À mettre un petit peu de nuance dans tout, finalement.

  • Speaker #1

    C'est exactement ça le mot, c'est nuance. Et aujourd'hui, dans un monde aussi polarisé que le nôtre, c'est quasiment la chose la plus dure. Parce que c'est presque facile de prendre un côté ou un autre et de dire, en fait, celui qui est en face de moi, il a tort, c'est moi qui ai raison. C'est presque trop facile intellectuellement. Mais en fait, de mettre un peu cette nuance, d'être un peu plus au milieu, d'ouvrir son cœur en se disant « Ok, mais en fait, moi, je ne pense pas pareil parce qu'il y a des raisons. Cette personne pense comme ça parce qu'il y a d'autres raisons. » C'est très, très difficile parce que du coup, ça touche, ça chamboule, ça chamboule tout ce qu'il y a en nous, ça chamboule notre éducation, ça chamboule notre identité, ça chamboule notre égo. donc voilà de faire encore cet effort de se dire mais attends en fait de déconstruction, de dire je vais quand même laisser une chance, je vais essayer de comprendre, et de permettre encore cette zone de la rencontre, juste de pouvoir se rencontrer au milieu, parce qu'autrement sinon on a des blocs parallèles et puis il n'y a jamais de rencontre. C'est un peu triste.

  • Speaker #0

    Et surtout dans le monde dans lequel on vit en ce moment, où ça fait complètement écho, je trouve, le fait de garder des espaces de rencontre, des espaces dans lesquels on essaie de se comprendre. Je trouve que c'est hyper intéressant, très fort de parler de ça maintenant, aujourd'hui. Tu le sais, dans les alignés, et notamment moi, je travaille beaucoup sur la place des femmes en entreprise. Et je ne peux que peut-être, à la lumière de tout ce que tu... C'est un peu une question piège. À la lumière de tout ce que tu as vu, de toutes les rencontres que tu as faites, du monde dans lequel on est aujourd'hui. J'aimerais bien savoir quelle est ta vision, justement, de quelle va être la rencontre de tout ce qui est en train de se passer sur la diversité, l'inclusion, la place des femmes. Est-ce que tu as envie de nous donner un peu ta vision de ce qui va se passer ou c'est un peu une question trop complexe ? Non,

  • Speaker #1

    pas du tout, elle est très importante. J'ai toujours eu de l'espoir et j'en ai encore. Je refuse de courber à ces moments-là parce que... Et au contraire, je me dis des fois qu'il y a même... Il y a des moments d'histoire, je ne dis pas qu'on en a besoin du tout, mais qui peut-être amènent ce coup, déjà qui nous rappelle qu'on n'est jamais trop confortable, qu'il n'y a jamais d'acquis, surtout, que ça nous rappelle que c'est aujourd'hui qu'il faut prendre position. Donc je l'utilise presque comme le moment pour encore plus affirmer, affirmer ses valeurs, affirmer nos droits. Et je dirais qu'au contraire, ça peut être vraiment utilisé comme un catalyseur pour rendre les choses, pour arriver peut-être plus rapidement. Et surtout, c'est un super rappel qu'encore une fois, on est loin de se reposer sur ses lauriers et de se dire, en fait, moi, j'ai beaucoup travaillé avec des chercheuses universitaires. Donc avant, l'humanitaire, c'était plutôt une carrière académique. On en parlera plus tard. Et en fait, j'ai rencontré beaucoup de chercheuses. dans des universités nordiques, donc la Norvège, la Suède et tout. Puis elle me disait à quel point que leur débat, c'était non mais attends, on ne va plus vraiment fêter la journée internationale des droits des femmes. On n'en a plus besoin parce qu'on y est arrivé. Et en fait, je te dis mais non, en fait, on n'y est pas arrivé. On n'y est pas arrivé et il faut toujours continuer à se battre et juste ne pas oublier.

  • Speaker #0

    Ne pas oublier et ne jamais rien prendre pour acquis. Et puis comme tu le disais très bien, en fait, le patriarcat est partout. Il n'y a aucun endroit, il n'y a aucun modèle, même dans les pays du Nord où tout est complètement équilibré. Donc, en fait, finalement, on n'y est pas. Et tu vois, je trouve ça très intéressant que tu parles de chercheuse dans ces sujets-là, parce que même sur le sujet de la place des femmes en entreprise, quand on commence à creuser le sujet, au début, les personnes nous disent un peu, non, mais en fait, c'est un truc, tu vois, un truc de bonne femme, un truc de l'émotionnel. En réalité, on y est. finalement, vous pouvez prendre votre congé maths et tout va bien. Je caricature. Moi, j'ai une amie qui a réussi à avoir un super poste après son congé maths. Oui, OK, fine. Mais heureusement, il y a des chercheurs, des chercheuses qui vont mettre de la nuance, qui vont aller mettre des chiffres, des études derrière ces sujets-là. Et on en a besoin pour savoir un peu où on en est. Tu parles de chercheuse. Et en fait, c'est quand même un sujet qui m'a paru très intéressant quand je t'ai rencontrée. C'est toutes les recherches que tu as faites sur une certaine personne. Est-ce que tu as envie de nous en parler un peu ? Oui,

  • Speaker #1

    avec plaisir, j'adore en parler. Oui, alors en fait, quand j'ai terminé mes études à Londres, je devais chercher un sujet de thèse. Et puis, je vais à l'université LSE, London School of Economics, la bibliothèque. Et en fait, je tombe sur ces archives d'une femme que je ne connaissais pas, qui s'appelait Berta Lutz, donc une brésilienne. que je n'en avais jamais entendu parler. Moi, en plus, j'avais fait des études en sciences po, j'avais fait du journalisme, extrêmement intéressée par le féminisme, les relations internationales. Jamais entendu parler de cette femme. Et du coup, je commence à lire les archives. En fait, c'était elle racontait son rôle à ce qu'on appelle la conférence de San Francisco, qui était en fait la conférence fondatrice des Nations Unies à l'époque. Donc, on est en 1945, juste au lendemain de la guerre. Et en fait, elle raconte comment elle a dû se battre. contre tous les pays qui étaient présents. Donc déjà, en fait, il faut revenir un peu dans... Si on revient en 45, on est en 45, il y a seulement 3% de femmes qui sont présentes à la conférence de San Francisco. Et parmi ces 3%, seulement 4 ont signé la Charte des Nations Unies, qui est en fait le premier document de droit international qui mentionne l'égalité des genres. Et en fait, quand on regarde l'histoire derrière, c'est fascinant. Donc en fait, il y a cette femme qui a été envoyée spécialement par le gouvernement du Brésil à l'époque. pour s'assurer qu'il y ait une mention d'égalité des genres dans la Charte des Nations Unies. Moi, je me dis, mais attends, mais c'est pas possible que je ne connaisse pas cette femme. Enfin, je veux dire, on n'en a jamais parlé. Je commence à en parler autour de moi. On me dit, bon, non, aucune idée. Et du coup, je fais toute une recherche très longue sur elle. Donc, je vais un peu la découvrir de qui elle était, quel a été son rôle dans les relations internationales. Et en fait, je me rends compte que c'est grâce à elle, c'est grâce à elle et d'autres femmes d'Amérique latine en tout cas au niveau du droit international, des relations internationales, c'est grâce à ces femmes-là qu'on en est où on en est en termes d'égalité. Et c'était vraiment elles qui avaient poussé pour avoir un article spécifique sur l'égalité des genres en Nations Unies. Et c'est vrai qu'en fait, si ce n'était pas ça, peut-être la Déclaration universelle des droits de l'homme, on n'en serait pas, on n'aurait pas eu ce qu'on a réussi à avoir. Plus tard, il y a eu beaucoup de conférences autour d'égalité des genres. Et en fait, c'était grâce à ces femmes. Et ces femmes, de manière très intéressante, c'était des femmes, elle, elle se qualifiait entre guillemets de pays du Sud, donc c'était le Brésil. la République dominicaine, il y avait la Namibie aussi qui était présente. Il y avait beaucoup de pays qui, entre guillemets, se disaient du Sud, sachant qu'en fait, la majorité des pays étaient encore colonisés à l'époque. Donc, sur toute la représentation, il y avait certains de ces pays-là. Et en fait, de manière très intéressante, elles racontaient comment elles ont dû faire face à une opposition de ce qu'on peut appeler, entre guillemets, les pays du Nord. Donc, il y avait vraiment ce schéma de la diplomate américaine qui disait que... qui a expliqué à cette brésilienne, j'espère que tu ne vas jamais parler de l'égalité des genres à cette conférence, parce que ce serait très vulgaire. Donc, on repart dans toute cette déconstruction de la narrative dominante autour de ces questions-là, comme quoi, en fait, l'égalité des genres est plus une invention des pays du Nord. Et moi, c'est vrai qu'en fait, en tant qu'Algérienne, ça parle énormément, parce que moi, depuis toute petite, à chaque fois que je faisais mes discours féministes et que quand j'ai fait mon coming-out féministe, on me disait, on me disait, non, mais arrête. Ça, c'est un truc de là-bas, ce n'est pas un truc de chez nous. On a des problèmes économiques, etc. Et en fait, c'était vraiment cette question d'appropriation. Et je me suis dit, mais en fait, le féminisme, ce n'est pas du tout quelque chose des pays du Nord. En fait, c'est quelque chose de global, cette question d'appropriation. Et donc, du coup, c'est à ce moment-là que j'ai utilisé cette recherche un peu comme base pour rappeler la question d'appropriation autour du féminisme. Ma définition personnelle du féminisme, parce que je sais que c'est aussi un mot qui fait débat. Oui, tout à fait. Malheureusement. Alors, c'est plutôt, disons, ma définition, c'est vraiment tout simplement l'égalité. C'est juste, ou même de l'équité. C'est une équité homme-femme et au-delà, voilà. C'est juste les mêmes droits, les mêmes devoirs pour tout le monde. C'est pas forcément une lutte contre les hommes, au contraire, je considère que vraiment, ce serait des alliés pour y arriver. Et donc, c'est vrai qu'en fait, je m'étais aussi rendue compte, voilà, à chaque fois que je disais le mot féminisme, des fois, il y avait des gens qui étaient choqués.

  • Speaker #0

    Le côté assez militant, en fait.

  • Speaker #1

    Le côté militant, en fait, c'est vraiment, c'est une grosse caricature à ce niveau-là. Et donc voilà, du coup, j'ai fait beaucoup de recherches autour de cette femme-là et autour, oui, de cette question d'appropriation, de rappeler qu'en fait, les questions d'égalité sont la responsabilité de tout le monde et qu'on n'arrivera jamais vraiment à vivre bien, à avoir des sociétés fonctionnelles tant qu'on aura la moitié de la population qui n'a pas les mêmes droits que l'autre moitié.

  • Speaker #0

    Et tu parles de ça, en fait, quand tu nous as décrit ton parcours, on comprend que ça, ça arrive finalement très tôt dans ta vie. T'as quel âge à ce moment-là, quand tu découvres Bertha Lutz et que tu commences à travailler sur elle ?

  • Speaker #1

    Ouais,

  • Speaker #0

    22 ans.

  • Speaker #1

    22 ans, donc quand même, tu vois, fin d'études quasiment. Donc, c'était mon deuxième master que je faisais à l'époque.

  • Speaker #0

    Et là, tu vois, je t'imagine, à 22 ans, découvrant ce profil où finalement, tu te rends compte qu'elle a œuvré pour la cause qui t'avait mise en mouvement 8 ans avant. Quand je t'ai entendue la première fois, ce qui m'a marquée, c'est ta ténacité sur ce sujet-là. Est-ce que tu peux nous décrire un petit peu ce que tu as fait de tes recherches ? Parce que les personnes qui nous écoutent, ce qui m'a marquée dans ce que tu as raconté, c'est ta capacité à être tenace, à tenir le cap. Et moi, ma croyance, c'est qu'individuellement, si chacun va au bout de ses idées et promeut ce qui est important pour lui, alors les choses vont changer. Et donc, j'ai envie que tu nous décrives un petit peu cette ténacité dont tu as fait preuve après avoir découvert cette personne. Parce que finalement, ça aurait pu rester dans un mémoire au fond du placard. Et puis, c'est tout.

  • Speaker #1

    Clairement, non, complètement d'accord avec toi. Je pense que je me suis rendue compte de l'importance que c'était déjà dans la façon, l'impact que ça a eu sur moi et donc ma façon de m'approprier ces questions-là. Et je me suis dit, mais en fait, dans la situation dans laquelle aujourd'hui, on ne peut absolument pas se permettre d'oublier ces histoires. Il y a tellement d'histoires oubliées, notamment de femmes dans les relations internationales, dans la science, partout. Et en fait, je me suis dit, non, mais ça, c'est de l'or et on ne peut pas passer à côté. Alors, ce n'était vraiment pas facile. C'est vraiment pas facile parce que, comme tu dis, j'avais 22 ans. Je l'ai fait avec une collègue, une copine de fac à l'époque. On s'est mis à deux. Et ouais, on avait 22 ans. On n'avait pas vraiment d'expérience. On n'avait pas de thèse de doctorat. On n'était pas connus. Enfin voilà, pas du tout. Et oui, il y a vraiment cette question de tenacité. On n'avait vraiment pas lâché. Vraiment, vraiment pas lâché. Il y avait des moments où en fait, on se disait mais laisse tomber, ça sert à rien. On ne répond pas à nos mails. On demande des rendez-vous parce que nous, en fait, ce qu'on demandait, c'était il faut qu'on la connaisse, cette femme. On n'en a jamais entendu parler. Il faut qu'il y ait des films sur elle. Il faut qu'il y ait des affiches. Elle est où et tout. Et donc, en fait, on poussait, on poussait des portes et tout. Et soit on ne nous recevait pas. C'était vraiment galère. Puis on se disait mais attends, mais est-ce qu'il y a eu mille fois où on s'est dit mais laisse tomber en fait. C'est bon, on a fini nos études, c'est bon, on laisse tomber. Voilà, ils ne veulent pas qu'elle soit connue. Voilà, ce n'est pas notre problème et puis tant pis. Et en fait, on s'est dit, ben non, en fait, on ne peut pas au nom de plein d'autres femmes que ça pourrait toucher, au nom de l'histoire, au nom de l'égalité. On ne peut pas juste abandonner. Et non, on a vraiment insisté. Alors, c'est intéressant par rapport Ausha des mots, parce que je pense que...

  • Speaker #0

    On pouvait être un peu décrite quelquefois comme entre guillemets en kikineuse pour ne pas dire autre chose. Chose que peut-être un homme, on aurait dit, voilà, tenace.

  • Speaker #1

    Il est tenace.

  • Speaker #0

    Donc c'est très bien que tu utilises ce mot. Et ça, c'est vraiment un des conseils que je donne. Je parle quelquefois dans des écoles et tout à des personnes en fin d'études ou d'ados. Je dis mais juste ne lâchez pas. Lâchez pas parce que ça vaut vraiment le coup. Et si vous, vous y croyez, c'est tout ce qui compte. C'est tout ce qui... Et c'est ce qu'on se disait un peu tout à l'heure, avant le début de l'enregistrement, peut-être juste de se dire d'essayer. D'essayer, c'est déjà énorme. Est-ce qu'on va réussir ou pas ? Ça, c'est une autre question. Mais juste d'essayer, c'est déjà tellement important.

  • Speaker #1

    Et parfois, ça marche.

  • Speaker #0

    Souvent, ça marche.

  • Speaker #1

    Et finalement, tu vois, quand tu nous parles de Bertha Lutz, qui, je pense, va énormément... Enfin, son parcours, le fait qu'elle ait été une femme parmi les quatre... présente sur un événement majeur en 1945, l'initiation des Nations Unies, qui n'est pas rien, et qu'elle était complètement oubliée, finalement, on se rend compte de combien les gouttes d'eau individuelles sont importantes pour faire avancer ces sujets-là, et d'autant plus parce que là, aujourd'hui, on est en train d'enregistrer en avril 2025, et on se rend compte que toutes les gouttes d'eau, il faut que ça devienne un torrent pour contrer toutes ces idées contraires et qui ont le vent en poupe. donc écoute je suis ravie que tu t'es pu parler de ta ténacité et non pas de ton côté enquiquineuse je me serais jamais permise de parler de ça mais en tout cas voilà donc soyez tenace effectivement et donc j'ai pas de part mais je peux dire que en tout cas les personnes peuvent écouter un documentaire qui a été produit par HBO grâce à tes recherches et celles de ton ami donc voilà allez chercher et découvrir ce profil qui est absolument incroyable et plein d'inspiration aussi tu peux pas l'interviewer Donc, ce documentaire sera parfait.

  • Speaker #0

    Non, c'est vrai que... Non, non, aujourd'hui, on peut dire qu'après des années de galères et de ténacité, on y est arrivé. Donc, il y a eu, comme tu dis, il y a eu ce documentaire de HBO qui retrace sa vie, sur lequel on a travaillé. On a fait un TED Talk à l'époque. Maintenant, il y a des livres pour enfants. On enseigne aussi dans des universités de diplomates cette histoire. Donc, à un moment, c'était assez... On a fait quelques écoles de diplomatie dans le monde pour raconter cette histoire. C'est une histoire aussi qui est inclue dans l'histoire, dans les cours d'introduction des Nations Unies. Donc, dès que quelqu'un entre aux Nations Unies, ça s'est inclus. On a écrit un livre qui s'appelle « Les femmes et les Nations Unies » où on a inclus cette histoire. Donc, il y a eu plein, plein, plein de choses depuis. Et l'idée, c'était un peu de, en anglais, c'est « get history right » . Je ne sais pas comment tu traduis ça.

  • Speaker #1

    Un peu de redonner à l'histoire, enfin à cette femme, cette histoire. Voilà,

  • Speaker #0

    exactement. donc non on y est arrivé après il y a aussi je le dis aussi quand je parle à des filles dans les écoles ou dans les niveaux de master dans les universités de leur dire mais allez-y chercher ces femmes là, chercher ces petites pépites qui existent dans les archives ou voilà ailleurs ou comme tu le fais toi aussi à travers les alignés tu vois, de mettre en lumière toutes ces histoires qui autrement ne seraient passerait un peu dans les oubliés c'est un peu dommage

  • Speaker #1

    tu vois j'avais envie de rebondir exactement là-dessus en disant finalement observer ces femmes qui font peut-être le en anglais on dit l'extra mile, qui vont un tout petit peu plus loin que là vous auriez osé aller et finalement qui vont vous guider qui vont vous permettre de vous dire mais moi en fait pour Pour moi, c'est possible. Et voilà, Bertha Lutz, c'est vrai que c'était une femme incroyable en 1945. Mais il y en a tellement des femmes aujourd'hui qui font ce pas de côté dans plein de domaines différents. Et il faut les valoriser. Il faut écouter leur voix. Il faut les diffuser. Tout à l'heure, on parlait de l'instagrammable. Ce n'est peut-être pas tout à fait instagrammable, voire pas du tout. Par contre, il faut leur donner une voix. Il faut les valoriser. Je suis super contente qu'on ait parlé de Berthaloud, clairement. Mais là, on t'avait laissé trouver ta place, finalement, dans ce monde de la communication au CICR. Et je suis curieuse de savoir, parce que Fatima, tu n'es pas que ton travail, est-ce qu'il y a d'autres moments d'alignement que tu as envie de partager avec nous ou des réflexions que tu as aujourd'hui ?

  • Speaker #0

    Oui, clairement. Non, merci. Et puis, comme tu dis, je pense que peut-être c'est un peu, juste pour rendre les choses un peu plus claires pour les personnes qui nous écoutent. Donc, il y a un peu eu deux moments. Il y a ce moment de recherche autour d'égalité des genres et donc autour de Berthaloutes. Et puis, comme tu dis, et ça revient à ce que tu fais toi aussi avec Les Alignés, c'est la création de modèles, en fait, de modèles inspirants de femmes. On se dit, ah, mais elle a fait, donc pourquoi je ne pourrais pas le faire ? Et ça, on en manque. Il faut en créer autant que possible. Donc, toi, tu le fais aussi à travers ce podcast. Et puis ensuite, du coup, il y a l'autre partie, disons, de ma vie professionnelle qui est vraiment l'humanitaire. Voilà, les deux se complémentent au final, mais c'est vraiment un peu deux casquettes. Donc, je suis contente qu'on ait eu l'occasion de couvrir tout ça, parce que c'est jamais très facile de parler de tout ça en même temps, dans un seul épisode. Donc, c'est top. Et oui, par rapport à autre chose, tout ce qui n'est pas forcément les accomplissements du travail. Alors, je suis très, très alignée sur mon tapis de yoga. Ça, c'est très aligné. Je suis très alignée quand j'ai des conversations comme les nôtres, surtout entre femmes, en fait. Je suis très, très alignée dans les échanges, dans l'apprentissage, d'apprendre. Et aussi, je pense, et surtout, comme tu le sais, aujourd'hui, je travaille plutôt dans les guerres. C'est beaucoup de souffrance que je vois, c'est beaucoup d'horreur. J'ai fait cinq années dans des pays en guerre et j'ai vu le meilleur, mais aussi le pire de l'humanité. Et pour moi, je retrouve... Aujourd'hui, c'est vraiment... Aujourd'hui que je suis revenue, ici à Genève, c'est dans l'émerveillement, dans la nature. Voilà, je trouve ça juste incroyable. On est en train de faire ce podcast en plein printemps, donc voilà, c'est vrai, c'est l'apogée de cette beauté. Et c'est vrai que des fois, quand je trouve ces souffrances sur lesquelles on travaille, qu'on essaye de... Évidemment, on essaye d'apporter un peu de soulagement et encore une fois, un peu d'humanité dans toute cette horreur. Souvent, je vais un peu me réfugier dans... dans nos montagnes, entre les arbres, et puis juste de voir la beauté qu'il y a autour de nous. Parce qu'il suffit juste de poser son regard là où elle est, mais elle est vraiment partout.

  • Speaker #1

    Une question qui me vient, parce que les alignés, je pense qu'il y a eu beaucoup de personnes qui étaient plutôt dans le monde du corporate, qui sont passées à ce micro, ou des entrepreneuses, ou en tout cas des personnes qui ne sauvent pas des vies, des personnes qui ne voient pas des guerres. Et je me posais cette question, c'était, tu vois, on parle beaucoup d'alignement par avoir des projets de sens. Et toi, tu es clairement dans un endroit où il y a du sens. Mais après, je me disais, quelle pression ? Comment tu vis avec tout ça ? Comment tu vis en se disant que chaque jour, ce que tu vas faire a énormément d'impact et que parfois, j'imagine, ce n'est pas facile ? Est-ce que c'est une question qui fait sens pour toi, ça ?

  • Speaker #0

    Oui, complètement, ça me parle beaucoup. Alors déjà, j'ai eu de grands débats internes aussi en me demandant, mais attends, est-ce que tu es obligée d'aller ? de l'autre côté du monde, dans une zone de guerre sous les bombes pour finalement trouver un sens à ta vie et te dire tu sers à quelque chose sur cette planète. Ma conclusion, ça a été que non, on peut très bien le faire en travaillant dans un monde corporate. Des fois, c'est un sourire, c'est une aide. Les besoins ne sont pas non plus que de l'autre côté de cette planète et il y en a aussi vraiment plein autour de nous. Donc on peut vraiment faire une différence aussi localement et ça je crois. énormément au local, à la puissance du local. Et oui, c'est vrai que la question du sens revient toujours dans le sens où tu te dis il faut, disons, arriver à faire la paix avec... Cette phrase, c'est encore en anglicisme, mais tu sais ce truc qui dit « I am enough » . De se dire « mais en fait, j'ai pas besoin de prouver déjà à moi-même que je peux y arriver » . Et à un moment, on se dit « mais en fait, ça va, quoi. J'ai pas besoin de faire des choses de... » de super héros et tout, pour avoir une validation. Et donc ça, par contre, ce qui est sûr, c'est que oui, je n'arriverai jamais à faire quelque chose où je ne trouve pas du sens. Et c'est un énorme privilège, c'est une chance énorme de pouvoir travailler dans un secteur qui change la vie des gens, clairement. Je l'ai vraiment vu sur le terrain et c'est une différence de vie ou de mort, ça c'est clair. Et donc d'avoir ce privilège-là, c'est énorme. Et en même temps... je fais aussi un travail d'une certaine manière sur moi où je me dis, ok, est-ce qu'il y a moyen que ça t'impacte sans forcément risquer ta vie ?

  • Speaker #1

    Je crois que cette phrase est l'une des plus mythiques de ce podcast. Mais bon, effectivement, merci d'avoir répondu à cette question. Et pour les personnes qui écoutent les Alignés aussi, pour trouver leur chemin, notamment les personnes qui cherchent leur voie au début, tu disais que ce n'était pas évident. Peut-être que ça leur donnera des billes pour savoir dans quelle direction aller.

  • Speaker #0

    Mais carrément, je pense aussi, moi j'ai eu une réflexion à un moment en me disant, on met tellement de pression sur le sens de notre travail, on met tellement de pression sur est-ce que c'est vraiment au travail qu'on va trouver tout notre sens ? Je sais pas. Et donc en fait, c'est un peu cette idée de me dire, est-ce qu'il n'y a pas... Tu vois, pour toutes les personnes qui sont peut-être frustrées dans leur travail, en se disant, ouais, mais bon, en fait, moi, ça sert à rien ce que je fais. Déjà, ça sert toujours à quelque chose. Mais c'est plutôt de se dire, mais en fait, qu'est-ce qui... Est-ce que si je trouve pas cette satisfaction à travers... Voilà, j'ai besoin de plus de sens dans mon travail, et est-ce qu'il n'y a pas moyen de le trouver ailleurs ? que ce soit dans sa vie personnelle ou en rejoignant des associations il y a plein d'autres manières de faire la différence sans pour autant en faire le métier de sa vie donc voilà un peu de créativité et je pense qu'on est tous très très créatifs là-dedans,

  • Speaker #1

    pas trop de pression sur ça et effectivement c'est très juste il y a ce côté égo qui est nourri je trouve très tôt notamment quand même les enfants, tu vois, qu'est-ce que tu vas devenir plus tard ? En fait, comme si on devenait quelque chose. Non, en fait, tu es déjà quelque chose. Et je trouve que ça met tellement de pression sur les épaules, tu vois, tu veux devenir pompier, devenir peu importe quoi. Donc la pression, elle commence très, très tôt. Et finalement, c'est vrai que dans les parcours des alignés, j'ai remarqué qu'il y avait des personnes qui avaient une vie avec un éventail de parcours qui parfois arrivaient en parallèle. Tu vois, tu me dis, là, c'est intéressant parce que... On a réussi à traiter deux sujets qui n'ont presque rien à voir, mais en fait, c'est toi qui as l'initiative des deux sujets. Et c'est assez souvent qu'à ce podcast, on se rend compte qu'on se nourrit de différentes, on appelle ça des domaines de vie, de ces différents domaines de vie. Et parfois, ça passe par le yoga, par la danse, par la créativité, par le chant. Et c'est vrai qu'il y a un côté avec le coaching, avec le développement personnel, où tout semble passer par la vie professionnelle. réussite professionnelle et je trouve ça intéressant qu'on en parle et qu'on questionne ça ici et même avec quelqu'un comme toi qui a un job pour le coup plein de sens donc voilà, merci beaucoup de partager ça dans ce podcast on aime bien avoir des conseils, des enseignements que tu aurais envie de partager avec nous, pour les personnes qui nous écoutent et qui ont envie de s'aligner alors oui,

  • Speaker #0

    je pense que le premier peut-être va faire déjà le pont entre la dernière réflexion que tu as partagée, qui résonne beaucoup, qui consiste en fait à se dire, au lieu de se dire qu'est-ce que je veux faire, c'est plutôt qui est-ce que je veux être. Quels sont en fait, déjà de se poser la question des valeurs, quelles sont mes valeurs, déjà ça c'est énorme de les connaître, et de dire en fait qui je veux être. Et dans ce qui je veux être, quel type d'activité soutiendrait se devenir, entre guillemets. Donc voilà, c'est vrai que si je veux être une personne bienveillante, qui aide mes proches, etc., je ne vais peut-être pas faire un travail super stressant qui m'enlève tout le temps que j'ai avec ma famille. Donc voilà, juste un peu de inverser un peu les questions qu'on se pose. Et puis, alors ça, c'est clair, la tenacité, vraiment la détermination de... À chaque fois, je me dis ce truc, tu sais, qui dit en anglais que actions lead to action. Donc, de... Quand on fait, et ça n'a pas besoin d'être parfait, parce que c'est vrai qu'il y a ce truc de « ah non, mais c'est jamais assez bien » , « non, non, mais là, je ne sais pas, tu vois le podcast, non, non, mais en fait, là, je pourrais encore l'améliorer » . Non, c'est tout. On l'envoie, l'idée, c'est juste que ça parte. Et puis, de voir ce que ça donne, c'est juste aider. Et donc, en fait, ça se travaille aussi à travers des rencontres. En fait, c'est quand on est dans le mouvement, forcément, la vie bouge. C'est toujours... C'est la stagnation qui est peut-être un peu cette inertie, mais juste un peu d'aller à la rencontre, d'écrire ce mail. Ce n'est pas grave, on n'aura pas de réponse. Eh bien, on le renvoie et on le renvoie encore.

  • Speaker #1

    Et au pire, oui, on a renvoyé un nombre interne.

  • Speaker #0

    Et donc, voilà, de ne pas avoir peur de tout ça. Puis ensuite, on en parlait tout à l'heure, mais c'est vrai qu'en fait, en tant que... justement en tant que femme, on a un peu tendance à se un peu à se rabaisser, puis je ne suis pas si bon pour ça, puis qu'est-ce que les gens vont croire quand je vais dire ça, et puis de le faire quand même, ça c'est des voix qu'on a autour de nous, ça ne nous définit pas de prendre la parole, de postuler à ce job, et puis on voit ce que ça donne, et puis peut-être qu'on ne le voudra pas, mais au moins qu'on postule et puis d'aller à la rencontre de cette personne, d'envoyer ce mail de, voilà, juste de s'exposer, de prendre un peu un risque, parce qu'en fait ça... ça peut vraiment faire des chocs à pique. Complètement. C'est tout ce que ça peut donner après. Et donc voilà, c'est sûr que c'est plus facile à dire qu'à faire. Mais je trouve que de se donner un peu ces petits défis quotidiens ou hebdomadaires et de se féliciter après. Vraiment, vraiment. Moi, j'ai tendance, tu vois, je me dis, bon, OK, je me fais un peu des petits... Ce ne sont même pas des objectifs, parce que c'est plutôt un peu des intentions. On va les appeler ça un peu des intentions par semaine. En me disant, cette semaine, j'aimerais bien ça. Et si je n'y arrive pas, je me dis que ce n'est pas grave. Il y a une raison. Tu y arriveras encore la semaine prochaine. Il n'y a pas de problème. Donc, de s'enlever un peu cette... On se met quand même une sacrée pression. Et puis, être femme aujourd'hui, quelques-unes d'entre nous sont aussi mères, sont collègues, sont amies, sont partenaires. Ça fait vraiment beaucoup. C'est une question de charge mentale. À un moment, juste de se dire, c'est déjà super. On y arrive.

  • Speaker #1

    Je reviens sur You're Enough. T'es assez.

  • Speaker #0

    T'es assez. Il n'y a pas besoin de faire plus. Il y a aussi, on en parlait tout à l'heure en dehors du studio, c'était tout change tout le temps. Il y a vraiment cette question d'impermanence. Il n'y a rien qui dure. Donc, je me rends compte que même à travers, tu vois, j'ai fait mes années dans des zones de conflit. Ce n'est plus le cas aujourd'hui. Mes états d'âme, mes émotions que je ressens maintenant, je ne les ressentirai pas peut-être dans un quart d'heure, 30 minutes. Tout, tout change tout le temps. Donc, ce qui laisse aussi énormément d'espoir et le chant à beaucoup de créativité.

  • Speaker #1

    Quand je serai en train de me poser plein de questions, je repenserai à ça, sur est-ce que je dois le faire, est-ce que je ne dois pas le faire, est-ce que je dois célébrer ça ? Le côté célébration, je trouve qu'il est très intéressant parce que je trouve qu'on a tous et toutes tendance à passer à autre chose très rapidement. Tu vas se dire que les choses sont faites et que c'est acquis. Alors, merci pour tous ces conseils que je vais vraiment garder précieusement. Je te vois, là, on parle de plein de sujets. On a parlé yoga, on a parlé de Bertha, on a parlé de ton travail, on a parlé de toi. On aimerait bien, je pense, savoir ce qu'on peut te souhaiter, Fatima.

  • Speaker #0

    Wow, grosse question ! On pourrait me souhaiter un cœur ouvert, de continuer à s'émerveiller, de continuer à rencontrer, d'apprendre, à continuer à faire mes asanas et toutes mes postures de yoga. Mais aussi la contemplation de l'extérieur et de l'intérieur. Et c'est aussi, d'une certaine manière, à me le souhaiter à moi, mais aussi au monde, en fait. Je pense que... de retrouver de la douceur. Je pense de revenir à la douceur, de mettre un peu de magie dans son quotidien. C'est comme quand tu regardes autour de nous, c'est incroyable juste le fait d'être là, d'être vivant, de respirer. C'est clairement un miracle. Et les petits bonheurs sont vraiment... sont vraiment là. Cette personne qui passe à côté de toi qui te sourit, le rire d'un enfant, la bise le matin, la rosée, juste des choses très très simples qui font qu'on peut être complètement dans la contemplation à longueur de journée.

  • Speaker #1

    Revenir à une certaine simplicité, finalement.

  • Speaker #0

    Il y a beaucoup, beaucoup de beauté dans la simplicité et finalement, il y a un peu tout dans rien.

  • Speaker #1

    Je vais garder cette phrase. Qui est très juste.

  • Speaker #0

    qui est très bien. Mais c'est vrai qu'il ne faut pas grand-chose.

  • Speaker #1

    Pour celles qui ont envie d'aller sur ton chemin, est-ce qu'il y a des médias, des podcasts, des livres que tu recommandes ?

  • Speaker #0

    J'écoute pas mal de podcasts. J'aime beaucoup un podcast à soi de Arte, aussi sur toutes ces questions de genre. Évidemment, le cœur sur la table et les couilles sur la table. Il y a un podcast hyper chouette qui s'appelle Émotions que j'aime aussi beaucoup. Évidemment, le côté écolo, ça va être la terre au carré. Et il y a aussi Philosophie sexy que j'aime aussi beaucoup. Et en anglais, j'écoute pas mal un podcast qui s'appelle On Being, qui est aussi un peu sur toutes les questions de spiritualité, tout qui est vraiment, vraiment chouette. Et puis, en livre, alors évidemment, on titoue le coq avec Les Grandes Oubliées, parce que ça, voilà, ça résonne beaucoup avec ce qu'on a parlé. J'aime beaucoup les Mona Chollet. Et évidemment, je suis une grande fan d'une autrice qui s'appelle Chimamanda Adichie, qui est une autrice nigériane qui a écrit On devrait tous être féministes. Donc, il m'a toujours beaucoup parlé. Et puis autrement, après, sur mon parcours, c'est plutôt... Je suis plus sur LinkedIn. En ce moment, c'est un peu plus LinkedIn, pas très Instagram. Peut-être à un moment, j'y étais. Puis après, j'ai déconnecté.

  • Speaker #1

    Écoute, on va te suivre sur LinkedIn. Et on a envie de voir toutes tes activités. Et on s'imagine qu'il y a peut-être... des choses qui vont émerger dans les prochaines années, puisque Action Lead to Action, donc on sait qu'il se passera des choses pour toi. J'ai juste envie de te remercier, Fatima, pour cette conversation qui, pour moi en tout cas, a été vraiment un vrai plaisir, un vrai échange. Et je sais qu'elle va en inspirer beaucoup. J'ai juste envie de te dire que le fait que tu parles d'humanité et que ça éclaire ton visage, en tout cas, moi, ça m'a donné beaucoup d'espoir. Donc rien que pour ça, j'ai envie de te dire merci beaucoup.

  • Speaker #0

    Merci mille fois à toi, Charline.

  • Speaker #1

    Et j'ai envie de te dire à bientôt.

  • Speaker #0

    À très vite.

Chapters

  • Introduction et présentation de Fatima Sator

    00:06

  • Le parcours de Fatima : Prise de conscience et engagement

    01:40

  • Les expériences de Fatima dans l'humanitaire

    05:17

  • Les leçons tirées du journalisme et du terrain

    15:05

  • La recherche sur Bertha Lutz et son impact

    21:02

  • La ténacité et l'importance de raconter les histoires oubliées

    31:00

  • Conseils pour s'aligner et trouver son chemin

    40:18

  • Conclusion et réflexions finales

    45:48

Description

On rencontre rarement une personne qui a passé des mois sur le terrain en zone de conflit pendant quatre ans pour aider les populations (Ukraine au début de la guerre, Yémen, Congo, Nigeria et Ethiopie).

On rencontre exceptionnellement une personne qui se révolte depuis l’enfance de la condition des femmes et qui est parvenu à faire reconnaitre des oubliées de l’histoire.

On rencontre peu une personne qui se donne comme intention de s’émerveiller des choses simples.

Alors est-ce que tu imagines la probabilité de rencontrer une personne qui soit tout cela à la fois ?

 

Cette personne, c’est Fatima Sator. Son parcours d’alignement est, n’ayons pas peur des mots : I-N-C-R-O-Y-A-B-L-E. Et cet interview l’est encore plus tant il est authentique.

 

Je remercie Fatima d’avoir accepté mon invitation et lasse place à ce nouvel épisode des alignées qui raisonnera avec nombre d’entre vous.


Pour aller plus loin :

Podcasts en français :

Un podcast à soi Charlotte Bienaimé pour Arte

Le cœur sur la table et les couilles sur la table de Victoire Tuaillon

Emotions de Louie Media

La terre au carré par Mathieu Vidard.

Philosophie sexy de Marie Robert

 

Podcast en anglais

On Being de Krista Tippett


Livres

Titiou Lecoq - Les Grandes Oubliées

Mona Chollet

Chimamanda Ngozi Adichie – Nous sommes tous des féministes

 

Pour suivre Fatima :


 ✨ Si veux en savoir plus sur Les alignées, file découvrir le site internet www.lesalignees.com ou sur mon LinkedIn dans lequel tu découvriras comment nous oeuvrons pour transformer le monde professionnel pour plus d'alignement des salarié·es et la mixité femme/homme.


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Bienvenue sur Les Alignés, je suis Charline Moreau, consultante et coach en entreprise et depuis plus de trois ans, je tends le micro à des femmes qui ont osé aligner leur vie avec leur valeur. Depuis toujours, ce sont des conversations authentiques avec des femmes sur leur parcours qui m'ont permis de profondément questionner ma vision de l'ambition et de la place que je voulais prendre. Alors je me suis dit que ces échanges intimistes pourraient inspirer d'autres personnes s'ils étaient diffusés plus largement. C'est comme ça que les alignés sont nés. Tous les 15 jours, je partage avec toi des discussions inspirantes où l'on parle de tout. De pro, de perso, de passion, de reconversion, de réussite, de doute ou encore d'engagement. Parce que trouver sa place en tant que femme dans la société est un cheminement. Et chaque parcours peut nous éclairer. Si ce podcast te plaît déjà, j'ai besoin de toi pour le faire grandir. Partage-le à une personne qui en a besoin. Et surtout, laisse-moi un commentaire et 5 étoiles sur ta plateforme d'écoute préférée. Je sais, ça n'a l'air de rien. Mais c'est vraiment très utile pour moi et pour faire connaître ce podcast. Maintenant, je laisse la place à ce nouvel épisode des Alignées. On rencontre rarement une personne qui a passé des mois sur le terrain en zone de conflit pour aider les populations. On rencontre exceptionnellement une personne qui se révolte depuis l'enfance de la condition des femmes et qui est parvenue à faire reconnaître des oubliés de l'histoire. On rencontre peu... une personne qui se donne comme intention de s'émerveiller des choses simples. Alors, est-ce que tu imagines la probabilité de rencontrer une personne qui soit tout cela à la fois ? Cette personne, c'est Fatima Sator. Son parcours d'alignement est, n'ayons pas peur des mots, incroyable. Et cette interview l'est encore plus tant il est authentique. Je remercie Fatima d'avoir accepté mon invitation et laisse place à ce nouvel épisode des Alignés qui résonnera avec nombre d'entre vous. Bonjour Fatima !

  • Speaker #1

    Bonjour Charline !

  • Speaker #0

    Comment vas-tu ?

  • Speaker #1

    Ça va bien et toi ?

  • Speaker #0

    Écoute, je vais super bien, je suis ravie. On est dans un endroit extraordinaire, puisqu'on est au CICR, donc le Comité International de la Croix-Rouge. Je pense que là, en termes de grades, le podcast a pris énormément de grades vu la pièce dans laquelle on enregistre. Et je te remercie de m'inviter dans cet endroit assez fabuleux.

  • Speaker #1

    Merci à toi, merci de venir jusqu'ici. C'est trop bien de t'avoir.

  • Speaker #0

    Écoute... Voilà, même si on est au CICR, on a à cœur ici dans les alignés d'avoir une discussion authentique sur toi, ton parcours. En fait, c'est vraiment pour ta personnalité, pour qui tu es que je suis venue jusqu'à Genève. En tout cas, les personnes qui ne te connaissent pas ici, elles ont envie de connaître ton parcours. Et que je te pose cette première question que je pose à toutes mes invitées, qui semble simple, mais qui en réalité est assez complexe. Fatima Sator, qui es-tu ?

  • Speaker #1

    Oh, sacrée question ! déjà là c'est très philosophique je me demande si on arrive à y répondre ou alors peut-être ça prend presque toute une vie en fait pour avoir la réponse si je reste un peu dans le métaphysique je te dirais que je suis un peu une exploratrice de la vie exploratrice de cette planète on vient là, on n'a pas beaucoup de temps on a un peu de passage on fait des rencontres merveilleuses on expérimente des choses, on expérimente la vie On expérimente un voyage intérieur aussi. Enfin, voilà, on a un peu ce moment sur Terre qui est magique. Et du coup, je pense que la question qui est dessus, ça revient un peu à qu'est-ce qui me définit. Donc, si je devais un peu redescendre de la métaphysique pratico-pratique, comme tu vois, je suis une femme. J'ai, disons, les valeurs qui me définissent, ça serait... Pour moi, c'est très, très important la question d'humanité. Donc, je me définis déjà comme humaine. qui vit avec tout plein d'autres petits humains autour de moi. Et j'adore ça. J'adore l'humanité, j'adore les gens, j'adore la beauté de l'humanité. Et donc, je suis, évidemment, je travaille ici au Comité international de la Croix-Rouge. Je suis aussi une amie, une partenaire, une fille. Voilà, j'ai plusieurs casquettes en fonction de... à qui tu demandes. Mais non, aujourd'hui, je ne saurais pas vraiment te répondre clairement de qui je suis sans, comme on se le disait, s'identifier à un travail, parce que c'est très souvent, en fait, je pense que tu le vois très souvent, on va se présenter en présentant notre travail. Et j'essaye de faire vraiment ce travail, de me dire qui suis-je autre que ce que je fais ? Qu'est-ce qui me définit ? C'est toute une recherche, c'est très beau, c'est une chouette aventure.

  • Speaker #0

    C'est très beau. En fait, dans le podcast, il n'y a pas d'image. Moi, ce que je peux dire, c'est que j'ai observé que quand tu as utilisé le mot humanité, tu as vraiment le visage qui s'est éclairé. J'ai ressenti que c'était très important pour toi. J'ai envie que les personnes qui nous écoutent sentent que ce mot-là, il n'a pas seulement juste une connotation toute simple, mais que vraiment, il y a une sorte d'énergie qui vient t'animer quand on parle. J'espère que vous aussi, maintenant que je vous en parle, vous pouvez visualiser Fatima qui s'anime quand on parle d'humanité. effectivement tu travailles au comité international de la Croix-Rouge et là c'est ce que tu fais maintenant mais dans ce podcast en fait pour aller creuser un petit peu plus loin au-delà de la métaphysique en fait j'ai développé une méthode assez simple dans laquelle je demande à mes invités de revenir sur leur parcours d'alignement et en fait en réalité j'aurais peut-être dû parler de désalignement de moments où finalement tu as ressenti le besoin d'aligner ta tête, ton cœur et ton corps quand je te parle de ça il y a probablement un tout premier moment qui devient en tête Je serais bien curieuse de savoir quel a été ce tout premier moment pour toi.

  • Speaker #1

    Oui, volontiers. Alors, je crois que je te rejoins complètement dans cette idée de, j'ai l'impression, en tous les cas, un de mes objectifs et ce qui m'anime beaucoup, c'est toute cette question de déconstruction. Donc, un peu comme si on était un oignon avec plein de couches et qu'en fait, chaque expérience, chaque journée, chaque apprentissage nous amène à enlever chaque couche pour finalement se retrouver. Donc c'est vrai que cette question de presque de se désaligner pour finalement s'aligner, elle est très importante pour moi. Et écoute, moi, je pense que j'ai eu plutôt, c'est un peu comme le bonheur, j'ai des moments d'alignement. Il y a des moments où je me désaligne un peu, et il y a des moments où je me sens clairement alignée. Et un des moments qui m'a particulièrement marquée, je dirais, donc j'ai beaucoup voyagé dans mon enfance et dans mon adolescence, et après plus tard encore, et c'était un moment, on était en Inde avec ma famille. Et je vois cette scène d'une jeune fille qui avait été probablement, je m'imagine, mariée de force. Et en fait, je la voyais, elle pleurait, elle ne voulait pas suivre sa famille ou son mari, qui clairement avait une grande différence d'âge. Et là, tout s'est allumé en moi. Il y avait la révolte, il y avait l'indignation, il y avait la colère. Et c'est là que j'ai vu, donc j'avais 14 ans, et je me suis dit, mais en fait, non, je... je veux faire quelque chose, ça a été vraiment un peu l'élément déclencheur, je veux faire quelque chose pour mon temps sur cette planète qui va contribuer à changer d'une certaine manière la vie des femmes, ou en tout cas encore que ce qu'elles soient, que ce soit les femmes à côté de moi ou les femmes plus loin, mais en tout cas je me suis vraiment rendue compte de la dynamique de pouvoir, du patriarcat, de toutes les injustices, de qu'est-ce que ça veut dire être née femme. Et en fait, je me suis rendue compte, je me suis dit, mais en fait, la seule chose qui me sépare de cette femme, de cette jeune fille qui a à peu près le même âge que moi, c'est juste que j'ai eu le privilège de grandir et de vivre dans un autre pays. Mais c'était juste une pure chance. Donc, c'est vrai que c'était à ce moment-là où j'ai vraiment senti que tout était aligné et que c'était dans ce domaine-là que je devais aller, d'une manière ou d'une autre.

  • Speaker #0

    Et à ce moment-là, tu as 14 ans. On a envie de savoir un peu à quoi ressemble ton quotidien, tu vois, t'habites où ? Parce qu'effectivement, déjà, t'es en Inde à 14 ans, ce qui est assez exceptionnel. Et quand même, c'est une prise de conscience qui est, j'allais dire, alors peut-être que je vais utiliser des mots que t'as pas du tout ressenti, donc tu me dis si c'était pas ça. Mais moi, effectivement, à 14 ans, comprendre qu'il y a ce monde-là dans lequel tu nais femme et finalement qu'il y a une énorme différence entre les femmes et la manière dont elles sont traitées dans le monde. Voilà, j'ai envie de savoir, tu pars d'où ? en arrivant en Inde ?

  • Speaker #1

    Oui, alors je pars quand même, je viens quand même d'une famille, donc je suis née en Algérie, je viens d'une famille très « ouverte » , avec un papa très féministe, une maman aussi, donc ils m'ont vraiment poussée dans ces réflexions-là. Mais reste que, c'est vrai que en tant qu'Algérienne, il y avait tellement de choses qui me révoltaient, depuis toute jeune, je voyais la différence de traitement de la société par rapport à mon frère. Des histoires toutes basiques, d'héritage, comme quoi la loi lui donne le double d'héritage que moi, potentiellement. J'ai été mise dans ce bain de, déjà, tu es née femme, donc tu es inférieure d'une certaine manière, donc tu as d'autres droits, etc. Donc depuis toute petite, ça m'a toujours... Je me rappelle, je disais à mes parents, je devais avoir 8-9 ans, je disais que mon rêve ultime, c'était de renaître homme. Je me déguisais dans la rue en homme. pour voir ce que c'était d'être homme dans une société patriarcale. Donc ça m'a toujours énormément animée. Et très vite, j'ai commencé à poser beaucoup de questions, à tout décortiquer. Donc je ne prenais pas grand-chose pour acquis. Si on me dit, ça c'est comme ça, non ça ne me va pas. Je vais essayer de comprendre pourquoi, pourquoi on en est arrivé là. Évidemment, l'épisode, cette période en Inde où j'étais scolarisée, où j'ai fait quelques années d'études là-bas, c'est encore plus renforcer cette... Cette problématique qui, je pensais, à l'époque, était seulement dans mon pays. Je me suis rendue compte que non. Jusqu'à aujourd'hui, on ne peut absolument pas dire qu'il y a un seul pays qui atteint l'égalité hommes-femmes. C'est révoltant, c'est inacceptable. Je me dis qu'on est en 2025. On arrive à faire plein de choses. On a envoyé des hommes sur la Lune, et des femmes d'ailleurs. Des vaccins, des soins, tout ce qu'on veut. Mais... sur ce point-là, on parle quand même de 50% de la population. Et c'est énorme.

  • Speaker #0

    Et c'est drôle quand tu parles de ça, parce qu'il y a vraiment le sujet du rapport à la domination du patriarcat. En fait, souvent, moi, quand j'utilise ce mot qui, pour beaucoup de personnes, est un gros mot, et qu'on résume ça à, finalement, un esprit de domination, je te dis, ok, il y a finalement une différence entre deux populations qui sont équivalentes à la 50% de la population mondiale. Mais alors, bon, après, moi, je vais te dire, je vais te taquiner, parce que je vais te dire... Ouais, OK, t'as 14 ans. Là, tu te rends compte quand même qu'il y a un problème majeur dans la société. Et finalement, on a été nombreuses à se rendre compte de ça. Mais toi, t'as décidé de prendre le sujet à bras le corps. C'est-à-dire que tu t'es dit je vais faire ça de ma vie. Ce qui est quand même quelque chose d'assez exceptionnel. Et pour les personnes qui écoutent ce podcast, qui cherchent à s'aligner, qui cherchent à s'inspirer de Parcours, moi, j'ai envie de savoir en fait, comment tu t'es mis en mouvement face à cet objectif d'agir sur le patriarcat, sur la mixité femmes-hommes ? Comment t'as fait ? Alors bon,

  • Speaker #1

    c'était pas simple. Et je pense que c'est jamais simple. Et aujourd'hui, c'est encore la galère. Comme pour moi, pour toutes les femmes, en fait. Je pense qu'on n'y arrivera jamais complètement. Mais en tous les cas, je pense que même quand on se dit « Ah, mais ça y est, j'y suis arrivée dans cette égalité-là. » Non, en fait, non. Il faut encore se battre. Et c'est jamais à prendre pour acquis. L'histoire nous le montre. Non, écoute, en fait, à l'époque, je m'étais dit que je voulais être journaliste. Donc, en fait, je me suis dit que c'était la meilleure manière de raconter tout ça. Et c'était un peu cette phrase qui dit « oui, donnez la voix à ceux qui n'en ont pas » . On me dit « moi j'ai accès à certaines plateformes, je vais avoir accès à des études, donc j'ai envie de raconter tout ça » . Donc j'ai fait des études, alors ce n'était pas tout de suite le journalisme, d'abord je me suis un peu trompée, enfin pas beaucoup de compassion pour moi, parce que dans le sens où je trouve que ce n'est pas facile aujourd'hui de s'orienter, et on n'a pas forcément toujours les bonnes béquilles pour. Donc j'ai fait d'abord de l'économie, donc rien à voir. économie et finance, donc juste après le bac du coup, et j'étais bonne à ça et je détestais ça. Donc ça c'est toujours un peu le moment frustrant où tu te rends compte qu'en fait t'es bonne à un truc, mais t'aimes pas du tout ça. Et donc du coup j'ai attendu patiemment que ces trois ans passent et je me suis inscrite en master de journalisme. Au début c'était assez intéressant parce que j'ai essayé en France. Alors en fait j'ai fait des études à Lyon et puis après j'ai fait une année d'échange à Los Angeles, ça c'était vraiment cool. J'avais bien choisi l'échange. Et puis après, je voulais absolument retourner au journalisme. J'avais essayé des universités en France. Et en fait, je revenais toujours avec... C'est toujours le même retour. On me disait, ben non, t'as un profil plutôt d'économiste. Vous avez une licence en économie. Non, vous avez un bac S. Non, non, il n'y a pas de place, en fait, pour le journalisme là-dedans. Puis après, on m'a dit, à part si vous faites, je ne sais pas, journaliste, finance, finance ou économie, moi, j'en pouvais plus. Et donc, du coup, j'ai essayé d'autres pays en Europe. Et puis, la Suisse. La Suisse qui est étonnamment moins, entre guillemets, moins carrée. Puis du coup, en fait, on m'a acceptée directement au journalisme. Et là, c'est vrai que j'avais des camarades en théologie. C'était super intéressant. C'était des gens qui n'avaient absolument rien à voir avec ce cursus-là. Et là, ça a été l'éclate. Et là, j'ai vraiment adoré. J'ai adoré le journalisme. J'ai adoré raconter des histoires. j'ai adoré, je pense que c'était encore une fois cette valeur d'humanité qui était clairement honorée. parce que du coup, c'était aller à la rencontre de gens, des gens qui ne me ressemblent pas forcément, des gens qui ne pensent pas forcément pareil que moi, qui n'ont pas le même background socioculturel. Et c'était extrêmement enrichissant. Donc ça, c'était des années que j'ai adorées. Puis après, j'ai travaillé en tant que journaliste jusqu'à ce que je me rende compte que j'aimais beaucoup. J'ai fait beaucoup de local, disons. Par contre, il y avait clairement la dimension internationale qui me manquait. Et en fait, je me suis dit, moi, je vais être reporter de guerre. Et là, pour faire ça, on m'a expliqué. qu'il fallait idéalement faire un master en Angleterre. Et c'est ce que j'ai fait. J'ai enchaîné, j'ai fait un master à Londres. Et après, très vite, je me suis retrouvée dans le système international. Donc, j'ai d'abord travaillé aux Nations Unies, quelques années, ici à Genève. Et puis finalement... Aux Nations Unies, j'ai d'abord travaillé un moment pour l'ONU Femmes. Ensuite, je suis arrivée dans l'humanitaire. Je me suis dit, OK, en fait, c'est très sympa. C'est sympa à partir de Genève, mais je parle de la souffrance des gens et tout. Mais clairement, ça donne quoi ? C'est quoi le terrain et de quoi je parle ? Et c'est à ce moment-là que j'ai décidé de rejoindre le comité international de la Croix-Rouge. Et je suis partie quelques années essentiellement en Afrique.

  • Speaker #0

    C'est vrai qu'à un moment donné, il y a un saut. dans le vide où tu vois que tu parles de d'un coup j'ai voulu devenir reporter de guerre et je pense que les personnes qui nous écoutent se disent non mais qui est cette personne derrière ce micro parce qu'effectivement tout à l'heure on parlait ensemble en off, on se disait que finalement on n'était pas vraiment notre travail mais je m'imagine le fait de devenir reporter de guerre fait que ton travail est toute ta vie puisque j'imagine que ça prend toute la place Et donc, j'ai envie de savoir, toi qui étais engagée déjà au niveau des valeurs sur les femmes, qu'est-ce que tu retiens de ces années de reporter de guerre ? Qu'est-ce que ça t'a apporté ? Et aussi, au micro des Alignés, on a envie de voir un peu les deux côtés de la médaille. Parce que les personnes qui nous écoutent, c'est un peu un métier qui fait rêver. C'est un peu une vie qui peut sembler complètement pleine de sens et d'alignement. Et moi, j'ai envie de savoir qu'est-ce qui se passe derrière cette image. toute policée, toute jolie, toute vernie du reporter de guerre qui va raconter des histoires fondamentales pour l'humanité finalement.

  • Speaker #1

    Alors oui, finalement, je ne suis pas tout à fait devenue reporter de guerre. Je travaille du coup, je fais de la communication au CICR qui est une organisation humanitaire. Et ça ressemble beaucoup quand on est sur le terrain. Donc après, c'est clairement pas évident sur plein de plans. Mais je pense qu'en fait, la première fois que j'ai mis ma première mission était au Congo. J'avais 26 ans. Et là, en fait, on perd vraiment tous ses repères et on perd aussi surtout. Et d'où je reviens encore sur cette idée d'humanité, c'est-à-dire qu'en fait, je me disais, mais évidemment que moi, si j'étais née dans un pays en guerre que je n'avais pas depuis plus de 25 ans, que je n'avais pas eu accès à l'éducation, etc. Comment je réfléchirais ? Et en fait, c'est aussi des expériences qui m'ont appris que rien n'est noir ou blanc et qu'en fait, finalement, à mettre beaucoup de compassion. dans nos échanges, parce que finalement, on galère tous d'une certaine manière, avec des insécurités, avec des peurs, on l'a tous à un certain niveau, et donc en fait, par exemple, on faisait des visites en prison quelquefois, et moi, en fait, moi ce qui m'intéresse dans cette visite en prison, c'est juste l'humain qui est en face de moi, donc je vais pas du tout voir de quoi il est là, qu'est-ce qu'il a fait, pourquoi il s'est retrouvé là. Ce qui m'intéresse, c'est juste le fait que ce soit un fils, un frère, potentiellement un ami. est en fait un humain et qu'il a des droits de base, une dignité de base. Et donc, c'est vraiment de retourner dans cette humanité pure. J'ai aussi rencontré sincèrement des gardiens de prison qui faisaient leur maximum pour que ça se passe bien. J'ai rencontré en même temps des humanitaires qui étaient exécrables. Donc, voilà que, évidemment, notre travail ne nous définit pas, mais qu'il n'y a pas... Tout est très complexe, en fait. Tout est très gris. Et du coup, ça m'a appris à poser des questions, à comprendre. Et à essayer, oui, de mettre un peu cette bienveillance un peu partout.

  • Speaker #0

    À mettre un petit peu de nuance dans tout, finalement.

  • Speaker #1

    C'est exactement ça le mot, c'est nuance. Et aujourd'hui, dans un monde aussi polarisé que le nôtre, c'est quasiment la chose la plus dure. Parce que c'est presque facile de prendre un côté ou un autre et de dire, en fait, celui qui est en face de moi, il a tort, c'est moi qui ai raison. C'est presque trop facile intellectuellement. Mais en fait, de mettre un peu cette nuance, d'être un peu plus au milieu, d'ouvrir son cœur en se disant « Ok, mais en fait, moi, je ne pense pas pareil parce qu'il y a des raisons. Cette personne pense comme ça parce qu'il y a d'autres raisons. » C'est très, très difficile parce que du coup, ça touche, ça chamboule, ça chamboule tout ce qu'il y a en nous, ça chamboule notre éducation, ça chamboule notre identité, ça chamboule notre égo. donc voilà de faire encore cet effort de se dire mais attends en fait de déconstruction, de dire je vais quand même laisser une chance, je vais essayer de comprendre, et de permettre encore cette zone de la rencontre, juste de pouvoir se rencontrer au milieu, parce qu'autrement sinon on a des blocs parallèles et puis il n'y a jamais de rencontre. C'est un peu triste.

  • Speaker #0

    Et surtout dans le monde dans lequel on vit en ce moment, où ça fait complètement écho, je trouve, le fait de garder des espaces de rencontre, des espaces dans lesquels on essaie de se comprendre. Je trouve que c'est hyper intéressant, très fort de parler de ça maintenant, aujourd'hui. Tu le sais, dans les alignés, et notamment moi, je travaille beaucoup sur la place des femmes en entreprise. Et je ne peux que peut-être, à la lumière de tout ce que tu... C'est un peu une question piège. À la lumière de tout ce que tu as vu, de toutes les rencontres que tu as faites, du monde dans lequel on est aujourd'hui. J'aimerais bien savoir quelle est ta vision, justement, de quelle va être la rencontre de tout ce qui est en train de se passer sur la diversité, l'inclusion, la place des femmes. Est-ce que tu as envie de nous donner un peu ta vision de ce qui va se passer ou c'est un peu une question trop complexe ? Non,

  • Speaker #1

    pas du tout, elle est très importante. J'ai toujours eu de l'espoir et j'en ai encore. Je refuse de courber à ces moments-là parce que... Et au contraire, je me dis des fois qu'il y a même... Il y a des moments d'histoire, je ne dis pas qu'on en a besoin du tout, mais qui peut-être amènent ce coup, déjà qui nous rappelle qu'on n'est jamais trop confortable, qu'il n'y a jamais d'acquis, surtout, que ça nous rappelle que c'est aujourd'hui qu'il faut prendre position. Donc je l'utilise presque comme le moment pour encore plus affirmer, affirmer ses valeurs, affirmer nos droits. Et je dirais qu'au contraire, ça peut être vraiment utilisé comme un catalyseur pour rendre les choses, pour arriver peut-être plus rapidement. Et surtout, c'est un super rappel qu'encore une fois, on est loin de se reposer sur ses lauriers et de se dire, en fait, moi, j'ai beaucoup travaillé avec des chercheuses universitaires. Donc avant, l'humanitaire, c'était plutôt une carrière académique. On en parlera plus tard. Et en fait, j'ai rencontré beaucoup de chercheuses. dans des universités nordiques, donc la Norvège, la Suède et tout. Puis elle me disait à quel point que leur débat, c'était non mais attends, on ne va plus vraiment fêter la journée internationale des droits des femmes. On n'en a plus besoin parce qu'on y est arrivé. Et en fait, je te dis mais non, en fait, on n'y est pas arrivé. On n'y est pas arrivé et il faut toujours continuer à se battre et juste ne pas oublier.

  • Speaker #0

    Ne pas oublier et ne jamais rien prendre pour acquis. Et puis comme tu le disais très bien, en fait, le patriarcat est partout. Il n'y a aucun endroit, il n'y a aucun modèle, même dans les pays du Nord où tout est complètement équilibré. Donc, en fait, finalement, on n'y est pas. Et tu vois, je trouve ça très intéressant que tu parles de chercheuse dans ces sujets-là, parce que même sur le sujet de la place des femmes en entreprise, quand on commence à creuser le sujet, au début, les personnes nous disent un peu, non, mais en fait, c'est un truc, tu vois, un truc de bonne femme, un truc de l'émotionnel. En réalité, on y est. finalement, vous pouvez prendre votre congé maths et tout va bien. Je caricature. Moi, j'ai une amie qui a réussi à avoir un super poste après son congé maths. Oui, OK, fine. Mais heureusement, il y a des chercheurs, des chercheuses qui vont mettre de la nuance, qui vont aller mettre des chiffres, des études derrière ces sujets-là. Et on en a besoin pour savoir un peu où on en est. Tu parles de chercheuse. Et en fait, c'est quand même un sujet qui m'a paru très intéressant quand je t'ai rencontrée. C'est toutes les recherches que tu as faites sur une certaine personne. Est-ce que tu as envie de nous en parler un peu ? Oui,

  • Speaker #1

    avec plaisir, j'adore en parler. Oui, alors en fait, quand j'ai terminé mes études à Londres, je devais chercher un sujet de thèse. Et puis, je vais à l'université LSE, London School of Economics, la bibliothèque. Et en fait, je tombe sur ces archives d'une femme que je ne connaissais pas, qui s'appelait Berta Lutz, donc une brésilienne. que je n'en avais jamais entendu parler. Moi, en plus, j'avais fait des études en sciences po, j'avais fait du journalisme, extrêmement intéressée par le féminisme, les relations internationales. Jamais entendu parler de cette femme. Et du coup, je commence à lire les archives. En fait, c'était elle racontait son rôle à ce qu'on appelle la conférence de San Francisco, qui était en fait la conférence fondatrice des Nations Unies à l'époque. Donc, on est en 1945, juste au lendemain de la guerre. Et en fait, elle raconte comment elle a dû se battre. contre tous les pays qui étaient présents. Donc déjà, en fait, il faut revenir un peu dans... Si on revient en 45, on est en 45, il y a seulement 3% de femmes qui sont présentes à la conférence de San Francisco. Et parmi ces 3%, seulement 4 ont signé la Charte des Nations Unies, qui est en fait le premier document de droit international qui mentionne l'égalité des genres. Et en fait, quand on regarde l'histoire derrière, c'est fascinant. Donc en fait, il y a cette femme qui a été envoyée spécialement par le gouvernement du Brésil à l'époque. pour s'assurer qu'il y ait une mention d'égalité des genres dans la Charte des Nations Unies. Moi, je me dis, mais attends, mais c'est pas possible que je ne connaisse pas cette femme. Enfin, je veux dire, on n'en a jamais parlé. Je commence à en parler autour de moi. On me dit, bon, non, aucune idée. Et du coup, je fais toute une recherche très longue sur elle. Donc, je vais un peu la découvrir de qui elle était, quel a été son rôle dans les relations internationales. Et en fait, je me rends compte que c'est grâce à elle, c'est grâce à elle et d'autres femmes d'Amérique latine en tout cas au niveau du droit international, des relations internationales, c'est grâce à ces femmes-là qu'on en est où on en est en termes d'égalité. Et c'était vraiment elles qui avaient poussé pour avoir un article spécifique sur l'égalité des genres en Nations Unies. Et c'est vrai qu'en fait, si ce n'était pas ça, peut-être la Déclaration universelle des droits de l'homme, on n'en serait pas, on n'aurait pas eu ce qu'on a réussi à avoir. Plus tard, il y a eu beaucoup de conférences autour d'égalité des genres. Et en fait, c'était grâce à ces femmes. Et ces femmes, de manière très intéressante, c'était des femmes, elle, elle se qualifiait entre guillemets de pays du Sud, donc c'était le Brésil. la République dominicaine, il y avait la Namibie aussi qui était présente. Il y avait beaucoup de pays qui, entre guillemets, se disaient du Sud, sachant qu'en fait, la majorité des pays étaient encore colonisés à l'époque. Donc, sur toute la représentation, il y avait certains de ces pays-là. Et en fait, de manière très intéressante, elles racontaient comment elles ont dû faire face à une opposition de ce qu'on peut appeler, entre guillemets, les pays du Nord. Donc, il y avait vraiment ce schéma de la diplomate américaine qui disait que... qui a expliqué à cette brésilienne, j'espère que tu ne vas jamais parler de l'égalité des genres à cette conférence, parce que ce serait très vulgaire. Donc, on repart dans toute cette déconstruction de la narrative dominante autour de ces questions-là, comme quoi, en fait, l'égalité des genres est plus une invention des pays du Nord. Et moi, c'est vrai qu'en fait, en tant qu'Algérienne, ça parle énormément, parce que moi, depuis toute petite, à chaque fois que je faisais mes discours féministes et que quand j'ai fait mon coming-out féministe, on me disait, on me disait, non, mais arrête. Ça, c'est un truc de là-bas, ce n'est pas un truc de chez nous. On a des problèmes économiques, etc. Et en fait, c'était vraiment cette question d'appropriation. Et je me suis dit, mais en fait, le féminisme, ce n'est pas du tout quelque chose des pays du Nord. En fait, c'est quelque chose de global, cette question d'appropriation. Et donc, du coup, c'est à ce moment-là que j'ai utilisé cette recherche un peu comme base pour rappeler la question d'appropriation autour du féminisme. Ma définition personnelle du féminisme, parce que je sais que c'est aussi un mot qui fait débat. Oui, tout à fait. Malheureusement. Alors, c'est plutôt, disons, ma définition, c'est vraiment tout simplement l'égalité. C'est juste, ou même de l'équité. C'est une équité homme-femme et au-delà, voilà. C'est juste les mêmes droits, les mêmes devoirs pour tout le monde. C'est pas forcément une lutte contre les hommes, au contraire, je considère que vraiment, ce serait des alliés pour y arriver. Et donc, c'est vrai qu'en fait, je m'étais aussi rendue compte, voilà, à chaque fois que je disais le mot féminisme, des fois, il y avait des gens qui étaient choqués.

  • Speaker #0

    Le côté assez militant, en fait.

  • Speaker #1

    Le côté militant, en fait, c'est vraiment, c'est une grosse caricature à ce niveau-là. Et donc voilà, du coup, j'ai fait beaucoup de recherches autour de cette femme-là et autour, oui, de cette question d'appropriation, de rappeler qu'en fait, les questions d'égalité sont la responsabilité de tout le monde et qu'on n'arrivera jamais vraiment à vivre bien, à avoir des sociétés fonctionnelles tant qu'on aura la moitié de la population qui n'a pas les mêmes droits que l'autre moitié.

  • Speaker #0

    Et tu parles de ça, en fait, quand tu nous as décrit ton parcours, on comprend que ça, ça arrive finalement très tôt dans ta vie. T'as quel âge à ce moment-là, quand tu découvres Bertha Lutz et que tu commences à travailler sur elle ?

  • Speaker #1

    Ouais,

  • Speaker #0

    22 ans.

  • Speaker #1

    22 ans, donc quand même, tu vois, fin d'études quasiment. Donc, c'était mon deuxième master que je faisais à l'époque.

  • Speaker #0

    Et là, tu vois, je t'imagine, à 22 ans, découvrant ce profil où finalement, tu te rends compte qu'elle a œuvré pour la cause qui t'avait mise en mouvement 8 ans avant. Quand je t'ai entendue la première fois, ce qui m'a marquée, c'est ta ténacité sur ce sujet-là. Est-ce que tu peux nous décrire un petit peu ce que tu as fait de tes recherches ? Parce que les personnes qui nous écoutent, ce qui m'a marquée dans ce que tu as raconté, c'est ta capacité à être tenace, à tenir le cap. Et moi, ma croyance, c'est qu'individuellement, si chacun va au bout de ses idées et promeut ce qui est important pour lui, alors les choses vont changer. Et donc, j'ai envie que tu nous décrives un petit peu cette ténacité dont tu as fait preuve après avoir découvert cette personne. Parce que finalement, ça aurait pu rester dans un mémoire au fond du placard. Et puis, c'est tout.

  • Speaker #1

    Clairement, non, complètement d'accord avec toi. Je pense que je me suis rendue compte de l'importance que c'était déjà dans la façon, l'impact que ça a eu sur moi et donc ma façon de m'approprier ces questions-là. Et je me suis dit, mais en fait, dans la situation dans laquelle aujourd'hui, on ne peut absolument pas se permettre d'oublier ces histoires. Il y a tellement d'histoires oubliées, notamment de femmes dans les relations internationales, dans la science, partout. Et en fait, je me suis dit, non, mais ça, c'est de l'or et on ne peut pas passer à côté. Alors, ce n'était vraiment pas facile. C'est vraiment pas facile parce que, comme tu dis, j'avais 22 ans. Je l'ai fait avec une collègue, une copine de fac à l'époque. On s'est mis à deux. Et ouais, on avait 22 ans. On n'avait pas vraiment d'expérience. On n'avait pas de thèse de doctorat. On n'était pas connus. Enfin voilà, pas du tout. Et oui, il y a vraiment cette question de tenacité. On n'avait vraiment pas lâché. Vraiment, vraiment pas lâché. Il y avait des moments où en fait, on se disait mais laisse tomber, ça sert à rien. On ne répond pas à nos mails. On demande des rendez-vous parce que nous, en fait, ce qu'on demandait, c'était il faut qu'on la connaisse, cette femme. On n'en a jamais entendu parler. Il faut qu'il y ait des films sur elle. Il faut qu'il y ait des affiches. Elle est où et tout. Et donc, en fait, on poussait, on poussait des portes et tout. Et soit on ne nous recevait pas. C'était vraiment galère. Puis on se disait mais attends, mais est-ce qu'il y a eu mille fois où on s'est dit mais laisse tomber en fait. C'est bon, on a fini nos études, c'est bon, on laisse tomber. Voilà, ils ne veulent pas qu'elle soit connue. Voilà, ce n'est pas notre problème et puis tant pis. Et en fait, on s'est dit, ben non, en fait, on ne peut pas au nom de plein d'autres femmes que ça pourrait toucher, au nom de l'histoire, au nom de l'égalité. On ne peut pas juste abandonner. Et non, on a vraiment insisté. Alors, c'est intéressant par rapport Ausha des mots, parce que je pense que...

  • Speaker #0

    On pouvait être un peu décrite quelquefois comme entre guillemets en kikineuse pour ne pas dire autre chose. Chose que peut-être un homme, on aurait dit, voilà, tenace.

  • Speaker #1

    Il est tenace.

  • Speaker #0

    Donc c'est très bien que tu utilises ce mot. Et ça, c'est vraiment un des conseils que je donne. Je parle quelquefois dans des écoles et tout à des personnes en fin d'études ou d'ados. Je dis mais juste ne lâchez pas. Lâchez pas parce que ça vaut vraiment le coup. Et si vous, vous y croyez, c'est tout ce qui compte. C'est tout ce qui... Et c'est ce qu'on se disait un peu tout à l'heure, avant le début de l'enregistrement, peut-être juste de se dire d'essayer. D'essayer, c'est déjà énorme. Est-ce qu'on va réussir ou pas ? Ça, c'est une autre question. Mais juste d'essayer, c'est déjà tellement important.

  • Speaker #1

    Et parfois, ça marche.

  • Speaker #0

    Souvent, ça marche.

  • Speaker #1

    Et finalement, tu vois, quand tu nous parles de Bertha Lutz, qui, je pense, va énormément... Enfin, son parcours, le fait qu'elle ait été une femme parmi les quatre... présente sur un événement majeur en 1945, l'initiation des Nations Unies, qui n'est pas rien, et qu'elle était complètement oubliée, finalement, on se rend compte de combien les gouttes d'eau individuelles sont importantes pour faire avancer ces sujets-là, et d'autant plus parce que là, aujourd'hui, on est en train d'enregistrer en avril 2025, et on se rend compte que toutes les gouttes d'eau, il faut que ça devienne un torrent pour contrer toutes ces idées contraires et qui ont le vent en poupe. donc écoute je suis ravie que tu t'es pu parler de ta ténacité et non pas de ton côté enquiquineuse je me serais jamais permise de parler de ça mais en tout cas voilà donc soyez tenace effectivement et donc j'ai pas de part mais je peux dire que en tout cas les personnes peuvent écouter un documentaire qui a été produit par HBO grâce à tes recherches et celles de ton ami donc voilà allez chercher et découvrir ce profil qui est absolument incroyable et plein d'inspiration aussi tu peux pas l'interviewer Donc, ce documentaire sera parfait.

  • Speaker #0

    Non, c'est vrai que... Non, non, aujourd'hui, on peut dire qu'après des années de galères et de ténacité, on y est arrivé. Donc, il y a eu, comme tu dis, il y a eu ce documentaire de HBO qui retrace sa vie, sur lequel on a travaillé. On a fait un TED Talk à l'époque. Maintenant, il y a des livres pour enfants. On enseigne aussi dans des universités de diplomates cette histoire. Donc, à un moment, c'était assez... On a fait quelques écoles de diplomatie dans le monde pour raconter cette histoire. C'est une histoire aussi qui est inclue dans l'histoire, dans les cours d'introduction des Nations Unies. Donc, dès que quelqu'un entre aux Nations Unies, ça s'est inclus. On a écrit un livre qui s'appelle « Les femmes et les Nations Unies » où on a inclus cette histoire. Donc, il y a eu plein, plein, plein de choses depuis. Et l'idée, c'était un peu de, en anglais, c'est « get history right » . Je ne sais pas comment tu traduis ça.

  • Speaker #1

    Un peu de redonner à l'histoire, enfin à cette femme, cette histoire. Voilà,

  • Speaker #0

    exactement. donc non on y est arrivé après il y a aussi je le dis aussi quand je parle à des filles dans les écoles ou dans les niveaux de master dans les universités de leur dire mais allez-y chercher ces femmes là, chercher ces petites pépites qui existent dans les archives ou voilà ailleurs ou comme tu le fais toi aussi à travers les alignés tu vois, de mettre en lumière toutes ces histoires qui autrement ne seraient passerait un peu dans les oubliés c'est un peu dommage

  • Speaker #1

    tu vois j'avais envie de rebondir exactement là-dessus en disant finalement observer ces femmes qui font peut-être le en anglais on dit l'extra mile, qui vont un tout petit peu plus loin que là vous auriez osé aller et finalement qui vont vous guider qui vont vous permettre de vous dire mais moi en fait pour Pour moi, c'est possible. Et voilà, Bertha Lutz, c'est vrai que c'était une femme incroyable en 1945. Mais il y en a tellement des femmes aujourd'hui qui font ce pas de côté dans plein de domaines différents. Et il faut les valoriser. Il faut écouter leur voix. Il faut les diffuser. Tout à l'heure, on parlait de l'instagrammable. Ce n'est peut-être pas tout à fait instagrammable, voire pas du tout. Par contre, il faut leur donner une voix. Il faut les valoriser. Je suis super contente qu'on ait parlé de Berthaloud, clairement. Mais là, on t'avait laissé trouver ta place, finalement, dans ce monde de la communication au CICR. Et je suis curieuse de savoir, parce que Fatima, tu n'es pas que ton travail, est-ce qu'il y a d'autres moments d'alignement que tu as envie de partager avec nous ou des réflexions que tu as aujourd'hui ?

  • Speaker #0

    Oui, clairement. Non, merci. Et puis, comme tu dis, je pense que peut-être c'est un peu, juste pour rendre les choses un peu plus claires pour les personnes qui nous écoutent. Donc, il y a un peu eu deux moments. Il y a ce moment de recherche autour d'égalité des genres et donc autour de Berthaloutes. Et puis, comme tu dis, et ça revient à ce que tu fais toi aussi avec Les Alignés, c'est la création de modèles, en fait, de modèles inspirants de femmes. On se dit, ah, mais elle a fait, donc pourquoi je ne pourrais pas le faire ? Et ça, on en manque. Il faut en créer autant que possible. Donc, toi, tu le fais aussi à travers ce podcast. Et puis ensuite, du coup, il y a l'autre partie, disons, de ma vie professionnelle qui est vraiment l'humanitaire. Voilà, les deux se complémentent au final, mais c'est vraiment un peu deux casquettes. Donc, je suis contente qu'on ait eu l'occasion de couvrir tout ça, parce que c'est jamais très facile de parler de tout ça en même temps, dans un seul épisode. Donc, c'est top. Et oui, par rapport à autre chose, tout ce qui n'est pas forcément les accomplissements du travail. Alors, je suis très, très alignée sur mon tapis de yoga. Ça, c'est très aligné. Je suis très alignée quand j'ai des conversations comme les nôtres, surtout entre femmes, en fait. Je suis très, très alignée dans les échanges, dans l'apprentissage, d'apprendre. Et aussi, je pense, et surtout, comme tu le sais, aujourd'hui, je travaille plutôt dans les guerres. C'est beaucoup de souffrance que je vois, c'est beaucoup d'horreur. J'ai fait cinq années dans des pays en guerre et j'ai vu le meilleur, mais aussi le pire de l'humanité. Et pour moi, je retrouve... Aujourd'hui, c'est vraiment... Aujourd'hui que je suis revenue, ici à Genève, c'est dans l'émerveillement, dans la nature. Voilà, je trouve ça juste incroyable. On est en train de faire ce podcast en plein printemps, donc voilà, c'est vrai, c'est l'apogée de cette beauté. Et c'est vrai que des fois, quand je trouve ces souffrances sur lesquelles on travaille, qu'on essaye de... Évidemment, on essaye d'apporter un peu de soulagement et encore une fois, un peu d'humanité dans toute cette horreur. Souvent, je vais un peu me réfugier dans... dans nos montagnes, entre les arbres, et puis juste de voir la beauté qu'il y a autour de nous. Parce qu'il suffit juste de poser son regard là où elle est, mais elle est vraiment partout.

  • Speaker #1

    Une question qui me vient, parce que les alignés, je pense qu'il y a eu beaucoup de personnes qui étaient plutôt dans le monde du corporate, qui sont passées à ce micro, ou des entrepreneuses, ou en tout cas des personnes qui ne sauvent pas des vies, des personnes qui ne voient pas des guerres. Et je me posais cette question, c'était, tu vois, on parle beaucoup d'alignement par avoir des projets de sens. Et toi, tu es clairement dans un endroit où il y a du sens. Mais après, je me disais, quelle pression ? Comment tu vis avec tout ça ? Comment tu vis en se disant que chaque jour, ce que tu vas faire a énormément d'impact et que parfois, j'imagine, ce n'est pas facile ? Est-ce que c'est une question qui fait sens pour toi, ça ?

  • Speaker #0

    Oui, complètement, ça me parle beaucoup. Alors déjà, j'ai eu de grands débats internes aussi en me demandant, mais attends, est-ce que tu es obligée d'aller ? de l'autre côté du monde, dans une zone de guerre sous les bombes pour finalement trouver un sens à ta vie et te dire tu sers à quelque chose sur cette planète. Ma conclusion, ça a été que non, on peut très bien le faire en travaillant dans un monde corporate. Des fois, c'est un sourire, c'est une aide. Les besoins ne sont pas non plus que de l'autre côté de cette planète et il y en a aussi vraiment plein autour de nous. Donc on peut vraiment faire une différence aussi localement et ça je crois. énormément au local, à la puissance du local. Et oui, c'est vrai que la question du sens revient toujours dans le sens où tu te dis il faut, disons, arriver à faire la paix avec... Cette phrase, c'est encore en anglicisme, mais tu sais ce truc qui dit « I am enough » . De se dire « mais en fait, j'ai pas besoin de prouver déjà à moi-même que je peux y arriver » . Et à un moment, on se dit « mais en fait, ça va, quoi. J'ai pas besoin de faire des choses de... » de super héros et tout, pour avoir une validation. Et donc ça, par contre, ce qui est sûr, c'est que oui, je n'arriverai jamais à faire quelque chose où je ne trouve pas du sens. Et c'est un énorme privilège, c'est une chance énorme de pouvoir travailler dans un secteur qui change la vie des gens, clairement. Je l'ai vraiment vu sur le terrain et c'est une différence de vie ou de mort, ça c'est clair. Et donc d'avoir ce privilège-là, c'est énorme. Et en même temps... je fais aussi un travail d'une certaine manière sur moi où je me dis, ok, est-ce qu'il y a moyen que ça t'impacte sans forcément risquer ta vie ?

  • Speaker #1

    Je crois que cette phrase est l'une des plus mythiques de ce podcast. Mais bon, effectivement, merci d'avoir répondu à cette question. Et pour les personnes qui écoutent les Alignés aussi, pour trouver leur chemin, notamment les personnes qui cherchent leur voie au début, tu disais que ce n'était pas évident. Peut-être que ça leur donnera des billes pour savoir dans quelle direction aller.

  • Speaker #0

    Mais carrément, je pense aussi, moi j'ai eu une réflexion à un moment en me disant, on met tellement de pression sur le sens de notre travail, on met tellement de pression sur est-ce que c'est vraiment au travail qu'on va trouver tout notre sens ? Je sais pas. Et donc en fait, c'est un peu cette idée de me dire, est-ce qu'il n'y a pas... Tu vois, pour toutes les personnes qui sont peut-être frustrées dans leur travail, en se disant, ouais, mais bon, en fait, moi, ça sert à rien ce que je fais. Déjà, ça sert toujours à quelque chose. Mais c'est plutôt de se dire, mais en fait, qu'est-ce qui... Est-ce que si je trouve pas cette satisfaction à travers... Voilà, j'ai besoin de plus de sens dans mon travail, et est-ce qu'il n'y a pas moyen de le trouver ailleurs ? que ce soit dans sa vie personnelle ou en rejoignant des associations il y a plein d'autres manières de faire la différence sans pour autant en faire le métier de sa vie donc voilà un peu de créativité et je pense qu'on est tous très très créatifs là-dedans,

  • Speaker #1

    pas trop de pression sur ça et effectivement c'est très juste il y a ce côté égo qui est nourri je trouve très tôt notamment quand même les enfants, tu vois, qu'est-ce que tu vas devenir plus tard ? En fait, comme si on devenait quelque chose. Non, en fait, tu es déjà quelque chose. Et je trouve que ça met tellement de pression sur les épaules, tu vois, tu veux devenir pompier, devenir peu importe quoi. Donc la pression, elle commence très, très tôt. Et finalement, c'est vrai que dans les parcours des alignés, j'ai remarqué qu'il y avait des personnes qui avaient une vie avec un éventail de parcours qui parfois arrivaient en parallèle. Tu vois, tu me dis, là, c'est intéressant parce que... On a réussi à traiter deux sujets qui n'ont presque rien à voir, mais en fait, c'est toi qui as l'initiative des deux sujets. Et c'est assez souvent qu'à ce podcast, on se rend compte qu'on se nourrit de différentes, on appelle ça des domaines de vie, de ces différents domaines de vie. Et parfois, ça passe par le yoga, par la danse, par la créativité, par le chant. Et c'est vrai qu'il y a un côté avec le coaching, avec le développement personnel, où tout semble passer par la vie professionnelle. réussite professionnelle et je trouve ça intéressant qu'on en parle et qu'on questionne ça ici et même avec quelqu'un comme toi qui a un job pour le coup plein de sens donc voilà, merci beaucoup de partager ça dans ce podcast on aime bien avoir des conseils, des enseignements que tu aurais envie de partager avec nous, pour les personnes qui nous écoutent et qui ont envie de s'aligner alors oui,

  • Speaker #0

    je pense que le premier peut-être va faire déjà le pont entre la dernière réflexion que tu as partagée, qui résonne beaucoup, qui consiste en fait à se dire, au lieu de se dire qu'est-ce que je veux faire, c'est plutôt qui est-ce que je veux être. Quels sont en fait, déjà de se poser la question des valeurs, quelles sont mes valeurs, déjà ça c'est énorme de les connaître, et de dire en fait qui je veux être. Et dans ce qui je veux être, quel type d'activité soutiendrait se devenir, entre guillemets. Donc voilà, c'est vrai que si je veux être une personne bienveillante, qui aide mes proches, etc., je ne vais peut-être pas faire un travail super stressant qui m'enlève tout le temps que j'ai avec ma famille. Donc voilà, juste un peu de inverser un peu les questions qu'on se pose. Et puis, alors ça, c'est clair, la tenacité, vraiment la détermination de... À chaque fois, je me dis ce truc, tu sais, qui dit en anglais que actions lead to action. Donc, de... Quand on fait, et ça n'a pas besoin d'être parfait, parce que c'est vrai qu'il y a ce truc de « ah non, mais c'est jamais assez bien » , « non, non, mais là, je ne sais pas, tu vois le podcast, non, non, mais en fait, là, je pourrais encore l'améliorer » . Non, c'est tout. On l'envoie, l'idée, c'est juste que ça parte. Et puis, de voir ce que ça donne, c'est juste aider. Et donc, en fait, ça se travaille aussi à travers des rencontres. En fait, c'est quand on est dans le mouvement, forcément, la vie bouge. C'est toujours... C'est la stagnation qui est peut-être un peu cette inertie, mais juste un peu d'aller à la rencontre, d'écrire ce mail. Ce n'est pas grave, on n'aura pas de réponse. Eh bien, on le renvoie et on le renvoie encore.

  • Speaker #1

    Et au pire, oui, on a renvoyé un nombre interne.

  • Speaker #0

    Et donc, voilà, de ne pas avoir peur de tout ça. Puis ensuite, on en parlait tout à l'heure, mais c'est vrai qu'en fait, en tant que... justement en tant que femme, on a un peu tendance à se un peu à se rabaisser, puis je ne suis pas si bon pour ça, puis qu'est-ce que les gens vont croire quand je vais dire ça, et puis de le faire quand même, ça c'est des voix qu'on a autour de nous, ça ne nous définit pas de prendre la parole, de postuler à ce job, et puis on voit ce que ça donne, et puis peut-être qu'on ne le voudra pas, mais au moins qu'on postule et puis d'aller à la rencontre de cette personne, d'envoyer ce mail de, voilà, juste de s'exposer, de prendre un peu un risque, parce qu'en fait ça... ça peut vraiment faire des chocs à pique. Complètement. C'est tout ce que ça peut donner après. Et donc voilà, c'est sûr que c'est plus facile à dire qu'à faire. Mais je trouve que de se donner un peu ces petits défis quotidiens ou hebdomadaires et de se féliciter après. Vraiment, vraiment. Moi, j'ai tendance, tu vois, je me dis, bon, OK, je me fais un peu des petits... Ce ne sont même pas des objectifs, parce que c'est plutôt un peu des intentions. On va les appeler ça un peu des intentions par semaine. En me disant, cette semaine, j'aimerais bien ça. Et si je n'y arrive pas, je me dis que ce n'est pas grave. Il y a une raison. Tu y arriveras encore la semaine prochaine. Il n'y a pas de problème. Donc, de s'enlever un peu cette... On se met quand même une sacrée pression. Et puis, être femme aujourd'hui, quelques-unes d'entre nous sont aussi mères, sont collègues, sont amies, sont partenaires. Ça fait vraiment beaucoup. C'est une question de charge mentale. À un moment, juste de se dire, c'est déjà super. On y arrive.

  • Speaker #1

    Je reviens sur You're Enough. T'es assez.

  • Speaker #0

    T'es assez. Il n'y a pas besoin de faire plus. Il y a aussi, on en parlait tout à l'heure en dehors du studio, c'était tout change tout le temps. Il y a vraiment cette question d'impermanence. Il n'y a rien qui dure. Donc, je me rends compte que même à travers, tu vois, j'ai fait mes années dans des zones de conflit. Ce n'est plus le cas aujourd'hui. Mes états d'âme, mes émotions que je ressens maintenant, je ne les ressentirai pas peut-être dans un quart d'heure, 30 minutes. Tout, tout change tout le temps. Donc, ce qui laisse aussi énormément d'espoir et le chant à beaucoup de créativité.

  • Speaker #1

    Quand je serai en train de me poser plein de questions, je repenserai à ça, sur est-ce que je dois le faire, est-ce que je ne dois pas le faire, est-ce que je dois célébrer ça ? Le côté célébration, je trouve qu'il est très intéressant parce que je trouve qu'on a tous et toutes tendance à passer à autre chose très rapidement. Tu vas se dire que les choses sont faites et que c'est acquis. Alors, merci pour tous ces conseils que je vais vraiment garder précieusement. Je te vois, là, on parle de plein de sujets. On a parlé yoga, on a parlé de Bertha, on a parlé de ton travail, on a parlé de toi. On aimerait bien, je pense, savoir ce qu'on peut te souhaiter, Fatima.

  • Speaker #0

    Wow, grosse question ! On pourrait me souhaiter un cœur ouvert, de continuer à s'émerveiller, de continuer à rencontrer, d'apprendre, à continuer à faire mes asanas et toutes mes postures de yoga. Mais aussi la contemplation de l'extérieur et de l'intérieur. Et c'est aussi, d'une certaine manière, à me le souhaiter à moi, mais aussi au monde, en fait. Je pense que... de retrouver de la douceur. Je pense de revenir à la douceur, de mettre un peu de magie dans son quotidien. C'est comme quand tu regardes autour de nous, c'est incroyable juste le fait d'être là, d'être vivant, de respirer. C'est clairement un miracle. Et les petits bonheurs sont vraiment... sont vraiment là. Cette personne qui passe à côté de toi qui te sourit, le rire d'un enfant, la bise le matin, la rosée, juste des choses très très simples qui font qu'on peut être complètement dans la contemplation à longueur de journée.

  • Speaker #1

    Revenir à une certaine simplicité, finalement.

  • Speaker #0

    Il y a beaucoup, beaucoup de beauté dans la simplicité et finalement, il y a un peu tout dans rien.

  • Speaker #1

    Je vais garder cette phrase. Qui est très juste.

  • Speaker #0

    qui est très bien. Mais c'est vrai qu'il ne faut pas grand-chose.

  • Speaker #1

    Pour celles qui ont envie d'aller sur ton chemin, est-ce qu'il y a des médias, des podcasts, des livres que tu recommandes ?

  • Speaker #0

    J'écoute pas mal de podcasts. J'aime beaucoup un podcast à soi de Arte, aussi sur toutes ces questions de genre. Évidemment, le cœur sur la table et les couilles sur la table. Il y a un podcast hyper chouette qui s'appelle Émotions que j'aime aussi beaucoup. Évidemment, le côté écolo, ça va être la terre au carré. Et il y a aussi Philosophie sexy que j'aime aussi beaucoup. Et en anglais, j'écoute pas mal un podcast qui s'appelle On Being, qui est aussi un peu sur toutes les questions de spiritualité, tout qui est vraiment, vraiment chouette. Et puis, en livre, alors évidemment, on titoue le coq avec Les Grandes Oubliées, parce que ça, voilà, ça résonne beaucoup avec ce qu'on a parlé. J'aime beaucoup les Mona Chollet. Et évidemment, je suis une grande fan d'une autrice qui s'appelle Chimamanda Adichie, qui est une autrice nigériane qui a écrit On devrait tous être féministes. Donc, il m'a toujours beaucoup parlé. Et puis autrement, après, sur mon parcours, c'est plutôt... Je suis plus sur LinkedIn. En ce moment, c'est un peu plus LinkedIn, pas très Instagram. Peut-être à un moment, j'y étais. Puis après, j'ai déconnecté.

  • Speaker #1

    Écoute, on va te suivre sur LinkedIn. Et on a envie de voir toutes tes activités. Et on s'imagine qu'il y a peut-être... des choses qui vont émerger dans les prochaines années, puisque Action Lead to Action, donc on sait qu'il se passera des choses pour toi. J'ai juste envie de te remercier, Fatima, pour cette conversation qui, pour moi en tout cas, a été vraiment un vrai plaisir, un vrai échange. Et je sais qu'elle va en inspirer beaucoup. J'ai juste envie de te dire que le fait que tu parles d'humanité et que ça éclaire ton visage, en tout cas, moi, ça m'a donné beaucoup d'espoir. Donc rien que pour ça, j'ai envie de te dire merci beaucoup.

  • Speaker #0

    Merci mille fois à toi, Charline.

  • Speaker #1

    Et j'ai envie de te dire à bientôt.

  • Speaker #0

    À très vite.

Chapters

  • Introduction et présentation de Fatima Sator

    00:06

  • Le parcours de Fatima : Prise de conscience et engagement

    01:40

  • Les expériences de Fatima dans l'humanitaire

    05:17

  • Les leçons tirées du journalisme et du terrain

    15:05

  • La recherche sur Bertha Lutz et son impact

    21:02

  • La ténacité et l'importance de raconter les histoires oubliées

    31:00

  • Conseils pour s'aligner et trouver son chemin

    40:18

  • Conclusion et réflexions finales

    45:48

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