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Les alignées

S'autoriser à être plurielle : médecin, étudiante en philosophie et bien plus encore avec Amélie Cadier-Loriaud.

S'autoriser à être plurielle : médecin, étudiante en philosophie et bien plus encore avec Amélie Cadier-Loriaud.

1h00 |23/09/2025
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Description

Aujourd'hui, je suis ravie d'avoir à mon micro Amélie Cadier-Loriaud , une femme aux multiples facettes : médecin, doctorante en philosophie, professeure de yoga, écrivaine, et maman de trois enfants. Son parcours est une invitation à reconsidérer nos cases.


Dans cet épisode, Amélie nous raconte son cheminement, de la petite fille de la campagne rêvant d'être écrivaine à la médecin qui se sent à l'étroit dans sa "case". Elle nous partage les moments de désalignement qui l'ont menée à une crise existentielle , mais aussi les rencontres inspirantes et les décisions audacieuses qui l'ont aidée à tisser un lien entre ses différentes passions.


On parlera de la difficulté de s'affranchir du regard des autres , de la richesse de la pensée complexe , et de l'importance de la singularité. Amélie nous prouve qu'on peut être à la fois dans le soin des gens et le soin des idées, et qu'on peut s'engager pour le monde tout en trouvant sa propre place.


✨ Si veux en savoir plus sur Les alignées, file découvrir le site internet www.lesalignees.com ou sur mon LinkedIn dans lequel tu découvriras comment nous oeuvrons pour transformer le monde professionnel pour plus d'alignement des salarié·es et la mixité femme/homme.


Pour suivre Amélie :

Son instagram


Pour aller plus loin :

  • Eva Sadoun - Loin des yeux loin du care

  • Green Letter club.

  • Inès Weber - Etre soi une quète essentielle pour le monde.

  • Abdennour Bidar - Les Tisserands.


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Bienvenue sur Les Alignés, je suis Charline Moreau, consultante et coach en entreprise, et depuis plus de 3 ans, je tends le micro à des femmes qui ont osé aligner leur vie avec leurs valeurs. Depuis toujours, ce sont des conversations authentiques avec des femmes sur leur parcours qui m'ont permis de profondément questionner ma vision de l'ambition et de la place que je voulais prendre. Alors je me suis dit... que ces échanges intimistes pourraient inspirer d'autres personnes s'ils étaient diffusés plus largement. C'est comme ça que les alignés sont nés. Tous les 15 jours, je partage avec toi des discussions inspirantes où l'on parle de tout. De pro, de perso, de passion, de reconversion, de réussite, de doute ou encore d'engagement. Parce que trouver sa place en tant que femme dans la société est un cheminement. Et chaque parcours peut nous éclairer. Si ce podcast te plaît déjà, j'ai besoin de toi pour le faire grandir. Partage-le à une personne qui en a besoin. Et surtout, laisse-moi un commentaire et 5 étoiles sur ta plateforme d'écoute préférée. Je sais, ça n'a l'air de rien, mais c'est vraiment très utile pour moi et pour faire connaître ce podcast. Maintenant, je laisse la place à ce nouvel épisode des Alignées. Bonjour Amélie !

  • Speaker #1

    Salut Charline ! Tu vas bien ? Très bien, merci ! Écoute,

  • Speaker #0

    je suis ravie de t'avoir ici à ce micro. Il faut savoir qu'on est l'une en face de l'autre à Bordeaux City, avec une vue à 360 sur Bordeaux qui est assez exceptionnelle.

  • Speaker #1

    Magnifique !

  • Speaker #0

    Voilà, et je suis très très heureuse d'être venue jusqu'à toi pour cette interview, parce que ça fait quelques mois qu'on s'est rencontrés en vrai, et je sais que cette interview va pouvoir... pouvoir éveiller des consciences, peut-être des réflexions autour des sujets qui toi t'animent. Voilà, j'ai hâte de notre conversation. Pour commencer, j'ai une question que je pose à toutes mes invitées, parce que les personnes qui nous écoutent ne te connaissent pas forcément, qui semble simple cette question, mais qui en réalité est assez complexe. La première question pour toi Amélie, c'est Amélie Cadiel-Loriot, qui es-tu ?

  • Speaker #1

    Merci beaucoup Charline, merci de m'avoir proposé cette rencontre. Alors, qui suis-je ? J'ai en effet vaste question à laquelle je ne sais même pas si je serais bien capable de répondre. Mais je dirais que je suis une fille de la campagne à la base. Donc, c'est un point important. J'ai grandi au milieu des vignes, élevée par des parents viticulteurs. Et puis, je suis devenue médecin. J'ai fait des études de médecine que j'ai un peu décidé de faire sur le tard. Parce que moi, quand j'étais enfant, mon rêve, c'était d'être écrivain. Mais voilà, pour mes parents, agriculteurs qui avaient un métier difficile, etc. Écrivain, ça semblait être un métier très instable, très insécure. Et ils souhaitaient pour moi le meilleur. J'étais bonne élève et ils m'ont dit, fais un vrai métier, entre guillemets. Et puis, si un jour, tu as envie d'écrire des livres, tu écriras. Donc, j'ai choisi de faire de la médecine, je pense, pour nourrir une forme de besoin de me rendre utile. Je me disais qu'en étant médecin, ce serait forcément une profession utile aux autres. J'aimais bien les sciences, j'aimais bien comprendre comment fonctionnait le corps humain. C'était quelque chose qui m'attirait pas mal. Donc, j'ai fait médecine, je suis devenue médecin. Et puis, assez vite, je me suis un peu sentie à l'étroit dans ma case de médecin. Et j'avais besoin de plus de créativité, de renouer avec l'écriture. Et aujourd'hui, du coup, je suis aussi doctorante en philosophie. J'ai réduit mon temps de travail pour essayer... de nourrir ma pensée différemment. de prendre soin des idées, en plus de prendre soin de mes patients. Et puis, je consacre pas mal de temps à l'écriture aussi, plus de fiction, de poésie. Et puis, sur le chemin, vu que je ne me trouvais pas assez polyvalente, j'ai aussi passé un diplôme de professeur de yoga. Et donc, j'enseigne un petit peu le yoga depuis un an. Je suis aussi maman de deux petites filles. J'attends un petit troisième pour dans... un peu moins d'un mois. Voilà, je ne sais pas si ça fait... C'est vrai que je me suis pas mal définie par mes professions au final, mais bon voilà, ça donne un petit aperçu.

  • Speaker #0

    Je pense que c'est exactement la manière dont tu t'es livrée à nous la première fois que je t'ai rencontrée, où j'ai vu ton ventre rond, où je ne te connaissais pas du tout et où tu as énoncé la pluralité de tout ce que tu étais et tout ce que tu faisais dans la vie. Et je ne te cache pas que c'est vraiment la première étape qui m'a donné envie d'en apprendre un peu plus sur toi. Et la première chose que je me suis dit, c'est « waouh, elle s'est autorisée à être tout ça en même temps » . C'est la première chose qui m'est venue, moi, à l'esprit quand tu t'es présentée. Donc là, peut-être que c'est déjà la chose que les auditeurs, auditrices sont en train de se dire, c'est « waouh, elle s'est autorisée à être tout ça » . Mais j'imagine qu'on n'en arrive pas à être tout ça si facilement. Et tu le sais, dans ce podcast, l'idée, c'est que les femmes parlent aux femmes en particulier, mais on a aussi des auditeurs hommes. Et c'est de retracer ce parcours d'alignement que tu as eu. Donc là, effectivement, on t'imagine petite fille dans les vignes avec un papa, une maman, peut-être des frères et sœurs. Et en fait, on a envie de savoir quel a été pour toi le tout premier moment que moi, j'ai appelé le moment d'alignement, mais qui en réalité est plutôt un moment de désalignement. où tu as senti que tu avais vraiment besoin d'aligner ta tête, ton cœur et ton corps.

  • Speaker #1

    Oui, en effet, aujourd'hui, je me sens plutôt alignée, même si on pourra revenir dessus. Je pense que l'alignement, c'est un processus hyper dynamique. On évolue sans cesse, on se transforme sans cesse. Clairement, j'ai l'impression que sur le papier, on pourrait se dire « elle s'est autorisée à être tout ça à la fois » , mais ça a été un chemin. Pas forcément facile. Je me suis sentie la plupart du temps désalignée, on ne va pas se mentir. Donc, je vais d'abord parler du désalignement pour ensuite essayer de répondre à ta question d'un grand moment d'alignement, parce que je pense que j'en ai vécu un il n'y a pas si longtemps que ça et qui, je pense, me permet d'aujourd'hui accepter tout ce que je suis. Mais déjà, comme je te disais, j'ai censé s'être étirayée par à la fois, je pense, une âme un peu créative, artiste. Je ne dirais pas ce mot-là parce que je ne me sens pas artiste, mais en tout cas avec envie de créer. d'écrire, d'avoir pas mal d'imaginaire et tout. Et à la fois, j'étais une super bonne élève, très scientifique aussi. Donc, ça a toujours été difficile. À chaque fois qu'il y a eu des choix à faire, en première, quand on choisit S ou L, mes profs de français voulaient que je fasse L, mes parents voulaient que je fasse S, parce que S, ça gardait toutes les portes ouvertes. Bref, j'ai toujours un peu fait des choix par défaut. Finalement, je rentre dans ces études de médecine. Pas par défaut, parce que je me convainc que c'est super de faire ça et que ce sera un métier génial, etc. Mais en fait, dès la première année de médecine, ça s'est bien passé. Puis en fait, on a la tête dans le guidon, on passe le concours. On ne se pose pas tant de questions que ça. Je me souviens de me sentir, pour le coup, d'avoir un espèce de mini flash d'alignement. Je suis sur mon vélo, je viens d'apprendre mes résultats au concours et que je suis reçue en deuxième année. Et là, je me dis, waouh, génial, c'est trop bien et tout ça. Puis en fait, des gringolades assez rapides dès la deuxième année de médecine. En fait, je dirais que de la deuxième... à la sixième année au moment où on passe l'internat. Tous les ans, je me demandais un peu, mais qu'est-ce que je fous là ? Je ne me sentais pas du tout alignée avec mes autres amis, les autres étudiants en médecine autour de moi. À l'époque, je crois aussi que je mettais pas mal la responsabilité sur le système d'enseignement de la médecine qui était un peu old school, par l'hôpital qui ne va pas forcément très bien. Et en fait, dès que tu fais des stages assez rapidement, tu te rends compte qu'il y a des trucs qui clochent un peu. D'avoir une sorte de déception et de ne pas forcément sentir à ma place. Je me revois dire à mes parents, en fait, j'aurais dû faire Sciences Po. En fait, je n'aurais pas dû faire ça. Et en fait, une fois que tu es dans les études de médecine, tu te dis quand même, c'est bête de quitter le navire. J'aimais quand même ça. J'aimais les gens. J'aimais apprendre des choses intéressantes sur le corps humain, la physiopathe, les pathologies, la pharmaco et tout. Mais bon, bref, des années un peu inconfortables quand même. Puis voilà, tu continues d'y aller parce que tu te dis que tu auras un métier à la clé, un chouette métier. Bon, tu serres un peu les dents. Et puis vient l'internat. Et là, en fait, désaligné encore. Tu commences à bosser, tu es à l'hôpital, tu gagnes ta vie, tu te dis indépendant par rapport à tes parents.

  • Speaker #0

    Et en fait, moi, je me pose la question parce que tu dis que tu es bon élève. Effectivement, déjà, la première chose que j'ai envie de dire quand je t'entends, c'est comme tu l'as très bien dit, tu t'es persuadé que c'était la bonne chose pour toi. Donc toi, tu étais à fond, même si derrière, il y avait une espèce de petite voix qui te grattait en te disant « Je ne suis pas tout à fait à ma place » . tu arrives quand même à passer cette première étape et tu passes la deuxième étape. En fait,

  • Speaker #1

    à chaque fois, c'est vrai que je passe les examens haut la main. J'ai toujours des super résultats parce qu'en fait, je suis besogneuse, travailleuse. Je ne veux pas décevoir mes parents. Oui, j'étais contente de bien réussir. En fait, ce qui est compliqué, et comme tu dis, ça gratte, c'est que tu as une partie de toi qui est quand même contente de faire ça, mais une autre qui, petite voix, n'arrête pas de dire en fait, est-ce que je n'aurais pas été mieux ailleurs ? Mais en fait, le truc, c'est que tu... je pense que je suis une personne « raisonnable » , très souvent, tu as une espèce d'autre petite voix qui te dit « oui, mais l'herbe du voisin, elle n'est pas toujours plus verte. » Tu n'arrêtes pas de te dire que tu serais mieux ailleurs, mais tu serais mieux où vraiment ? Parce que les autres parcours ne sont pas forcément imparfaits non plus. Après, tu finis toujours par te dire « est-ce que c'est que je suis une éternelle insatisfaite ? Est-ce que je suis trop exigeante ? » Finalement, c'est plus confortable de rester là où tu es. En fait, ces petites voix qui parlent en te disant « t'es pas à ta place » , t'arrives facilement à les faire taire, en fait, j'ai envie de dire, jusqu'à un certain point.

  • Speaker #0

    Oui, mais justement, je pense que les personnes qui nous écoutent, il y a beaucoup de personnes qui sont soit dans des gros, gros moments, tu vois, où ils se cherchent, ou je sais qu'il y a aussi des jeunes qui nous écoutent et qui se posent des questions, tu vois, un peu comme s'ils avaient un problème de ne pas avoir cette illumination lors des études, où vraiment, ils sentent que c'est pas exactement le bon endroit. Je trouve que c'est intéressant d'avoir ton exemple et on va voir la suite de ton parcours pour te dire que même au début de tes études, ce n'était pas forcément évident pour toi.

  • Speaker #1

    Non, tout à fait. Et après, on va poursuivre, mais je ne regrette rien de tout ce que j'ai fait avant. Je regrette vraiment. Il y a eu après des moments où j'étais peut-être un peu en colère, où je me dis finalement, je me suis trop conformée à une norme sociale. J'ai voulu faire plaisir et du coup, j'ai fait tous ces choix-là. Et en fait, ce n'était pas les bons. Aujourd'hui, je n'en suis plus. plus du tout là, je ne suis pas du tout en colère, je suis hyper apaisée et je me dis que finalement, tout ce qui s'est passé avant m'a appris énormément de choses et je n'en serais pas là aujourd'hui si je n'avais pas persisté dans ces études de médecine. Au final, on y vient. Mais voilà, en tout cas, on peut se sentir très désaligné assez tôt. Finalement persévéré, puis après je deviens interne. Et puis, après, c'est très prenant. Les internes hôpitales travaillent énormément, on fait tourner les services. J'ai appris beaucoup de choses, donc moi je suis devenue radiologue. Mais avant ça, j'ai fait un an de gastro-entérologie. En fait, j'avais choisi une première spécialité. Au bout d'un an, j'ai fait un droit de remords, je suis devenue radiologue. En fait, ça n'allait pas non plus à ce moment-là. Je ne me sentais pas du tout à ma place en gastro-entérologie, alors que c'était une spé que j'adorais. Mais en fait, l'hôpital va vraiment, vraiment mal et broie les humains. Et en fait, je me suis vue devenir un peu l'ombre de moi-même. Et je me suis dit que la formation que j'avais commencé à faire en gastroenterologie ne me permettrait pas de m'épanouir en dehors du travail. C'était tellement prenant, tellement difficile, etc. Bref, j'ai bifurqué à ce moment-là déjà une première fois. J'ai fait de la radiologie. La radiologie, c'est une spécialité passionnante, intellectuellement très nourrissante. C'est très scientifique. Je pense que ça venait combler un peu aussi. Ça venait nourrir plutôt. mon côté un peu geek, scientifique, etc. Mais il y avait d'autres inconvénients. C'est que j'étais un petit peu plus coupée des patients. J'étais moins dans le soin. Donc, assez vite aussi, de nouvelles questions. Mais est-ce que tu es vraiment à ta place ? Et puis, je pense, le coup de grâce. Je me suis sentie quand même désalignée, je pense, pendant toutes mes années de médecine. Même si j'ai toujours réussi à... Pas poker face du tout, mais ce que je veux dire, c'est que... Je n'étais pas marginalisée du tout. Je pense que c'était insoupçonnable pour les gens autour de moi que j'étais désalignée.

  • Speaker #0

    J'ai envie de rebondir là-dessus parce qu'effectivement, le désalignement peut être quelque chose qui est latent, sous-jacent, un espèce de questionnement. Mais comme tu dis, tu continues à avancer à ce moment-là. Et finalement, les autres possibilités sont peut-être alléchantes. Mais il y a cette fameuse petite voix qui te dit... Est-ce que c'est vraiment plus alléchant ailleurs ? Est-ce que l'herbe est plus verte ailleurs ? Tu le dis très bien. Et en plus, clairement, tu as parlé de choses très importantes qui, je pense, ont résonné beaucoup avec les auditeurs et auditrices. Clairement, tu vas devenir médecin en termes de normes sociales, en termes d'attente de ta famille, où tout de suite, tu as posé ça comme base. Tu répondais aussi à ce besoin de sécurité et de statut. finalement. Donc, c'est pas si simple de jeter tout ça à la poubelle. C'est vrai qu'il y a ce côté-là aussi. Et si on se remet à ta place, je trouve ça hyper intéressant que tu mettes tout ça en perspective comme jeune futur médecin et tout ce que ça implique. Et on peut imaginer tout ce qui pouvait se passer en toi.

  • Speaker #1

    Ouais, c'est exactement ce que tu décris. Je rappelle quand même que j'étais quand même satisfaite de plein de choses. Je pense que je suis quelqu'un de très curieux, sérieuse et tout. Et en fait, j'arrivais... Je veux dire aussi, j'avais assez de nourriture quand même pour rester. C'est-à-dire que j'aimais faire des beaux diagnostics en radiologie. J'ai trop aimé apprendre un tas de trucs. J'ai aimé le contact avec les patients. J'ai aimé mes collègues, mes chefs. J'ai aimé l'hôpital. Il ne faut pas non plus croire que ce que je vivais était un calvaire. Sinon, évidemment, je ne serais pas restée.

  • Speaker #0

    Et justement, je trouve que c'est ça qui est intéressant dans ton parcours. Et je pense que là, après, on va pouvoir voir les différentes couleurs, les différents vernis que tu as su ajouter pour justement te nourrir. Tu utilises beaucoup le mot nourrir, qui me semble hyper intéressant, hyper approprié. Et je pense que les personnes qui nous écoutent se disent mais oui, en fait, à aucun moment, on juge du fait que tu n'es pas été OK à ce moment-là, peut-être te poser des questions. mais C'est vrai qu'au micro des alignés, on s'autorise à se dire que oui, tu n'avais ni l'accord d'au-coup, ni des problèmes financiers. On est d'accord qu'on parle entre personnes avec beaucoup de chance dans la vie. On est des privilégiés. Mais ça n'empêche que ce podcast existe aussi parce qu'à l'intérieur de certaines d'entre nous, il se passe des choses et ça fait du bien d'avoir des espaces pour en parler.

  • Speaker #1

    Complètement d'accord. Et je pense que c'est important en effet de partager aussi ça parce que très longtemps, je me suis un peu flagellée. je le disais, je le répète, je me disais c'est peut-être moi le problème, je suis une insatisfaite. J'ai consulté pour ça. Et en fait, j'ai fini par comprendre que non, ce n'était pas une histoire d'insatisfaction, c'était que cette case-là, elle était trop petite pour moi et j'avais besoin de plus d'espace pour exprimer plein d'aspects de ma personne. Et donc, bon bref, ça c'est tout mon parcours d'étudiante en médecine, puis d'interne, puis de médecin. Et puis en fait, j'ai pris, je ne sais pas, j'ai vécu une sorte de crise existentielle, même si je ne sais pas si ce mot veut dire grand-chose, mais il y a une espèce de conjonction de plusieurs éléments. Je suis devenue maman, et ça je pense que plein de femmes à ton micro l'ont dit, mais la maternité, ça bouleverse profondément les femmes. Je pense qu'on se découvre, on se transforme, on se métamorphose, on a une forme de lecture du monde qui change. Ça, ça m'a... Ça m'a profondément transformée. Il y a eu la crise du Covid qui a été quand même... Dans le milieu du soin, on l'a vécu de manière assez étrange. Je pense que ça a mis plein de gens sur des chemins de reconversion aussi. Je pense que c'est des moments où on repense un peu notre façon d'exister. Et puis, en plus de tout ça, je ne sais pas si on aura le temps d'en parler, mais j'ai vécu une énorme crise d'éco-anxiété à l'été 2022. J'ai toujours été intéressée par les sujets environnementaux, par l'écologie en général. Et en fait, je ne pensais pas que ça m'arriverait parce qu'il me semblait avoir bien compris les enjeux climatiques, de biodiversité et tout. En fait, pas du tout. Je suis allée à une conférence en juin 2022 qu'une copine donnait et j'y suis allée juste un peu en me disant, bon, elle n'aura pas beaucoup de monde, donc j'y vais quand même pour qu'elle ait un peu de public. Mais je me suis dit, bon, je ne vais pas apprendre grand-chose. En fait, je suis sortie de là. Ça m'a fait une sorte d'électrochoc. Je pense que je n'avais jamais ressenti autant... Enfin, je ne sais pas, ça m'a fait un vrai bouleversement et j'ai vécu une vraie crise d'éco-anxiété, comme c'est décrit dans les bouquins, avec le U inversé, là où tu fais ton deuil. Tu vis toute une période où c'est vraiment la catastrophe. J'étais quasiment collapsologue. Enfin, voilà, j'ai vraiment... Ça m'a... C'était terrible, quoi. Et puis, à ce moment-là, en fait, je me suis aussi beaucoup abreuvée de lectures de podcasts. pour essayer de comprendre le monde d'une manière un peu plus systémique. Et en fait, je pense que c'est un vrai moment de transformation aussi, enfin tout ça. C'est que du coup, je me suis intéressée à plein de sujets sociaux, politiques, économiques, environnementaux, philosophiques. Ma vision du monde a été bouleversée. Et je pense que de vivre un peu toutes ces crises en même temps, enfin voilà, cette espèce de qui je suis en fait, justement, ça m'a aussi amenée à aussi lire, j'en parlerai à la fin peut-être, mais... D'autres bouquins un peu plus sur la recherche du soi profond, qui on est. Bref, tout ça m'a mis dans une espèce de dynamique de réflexion, de transformation. Et c'est là où, dans ce bouillonnement hyper inconfortable, je pense que pendant un an, j'ai été vraiment super mal à me dire qu'est-ce que je vais faire de ma vie. En plus, j'avais l'impression qu'il fallait que je porte un engagement. J'avais l'impression que j'avais un besoin d'engagement. notamment pour l'écologie. Je ne savais vraiment plus qui j'étais, donc j'ai suivi une psychothérapie. Je me suis vachement intéressée à tout ce que je viens de te dire. J'ai hésité à tout plaquer pour refaire une formation d'ingénieur agricole. Franchement, à un moment donné, je me suis dit qu'il ne faut pas que je revienne à la terre. Mes parents étaient agriculteurs, puis du côté de ma mère, ils sont vraiment agriculteurs de père en fils. Je n'ai que des générations d'agriculteurs au-dessus de moi. est-ce que il faut que j'arrête la médecine et que je devienne agri enfin Bref, et c'est à ce moment-là de ma vie où j'ai aussi rencontré des femmes médecins au parcours hyper différent de ce que j'avais vécu jusque-là, qui m'ont énormément inspirée, où je me suis rendue compte qu'on pouvait être à la fois médecin et à la fois d'autres trucs. Qu'on pouvait écrire des bouquins, qu'on pouvait reprendre ses études et faire des sciences humaines et sociales à côté, qu'on pouvait s'engager dans des assos, et surtout que la santé et l'écologie étaient liées. Et c'est un espèce de parallèle que j'avais. Pas fait jusqu'alors, en fait. Je ne sais même pas comment c'est possible, mais en fait, on nous en parle très peu de la santé environnementale en médecine. Et donc, c'est, je pense, au contact de ces femmes, qu'en fait, après, ce n'est que des rencontres. Je me suis inscrite dans une association, j'ai adhéré à une association qui s'appelle Alliance Santé Planétaire, où on est plutôt des soignants, mais il y a n'importe quelle personne de n'importe quel métier est acceptée et bienvenue plutôt. Et en fait, on pense la santé planétaire, c'est-à-dire en fait, on pense que la santé des humains est forcément reliée à celle de notre planète, à celle des animaux, à celle du vivant. Et puis voilà, j'ai rencontré des gens géniaux dans cet assaut. Je ne sais pas, un jour, j'ai cliqué sur un... J'étais dans mes vastes lorsque j'ai passé, je pense, des heures sur Internet à chercher des formations. Des fois, quand on est complètement désaligné et qu'on cherche... à se renouveler, en fait, on passe son temps à chercher des formations, des parcours, des inspirations, etc. Et je suis tombée sur un master de philosophie de la santé qui était à Bordeaux, à l'université Bordeaux-Montagne, à côté de chez moi. Et en fait, j'ai postulé à ce master. En fait, les inscriptions étaient fermées, mais le directeur du master m'a répondu dans la journée en me disant, oui, les inscriptions sont fermées, mais en fait, il nous reste encore quelques places. Si vous me faites un dossier ce week-end, vous l'aurez en secrétaire et je pense que ça passe. Du coup, j'ai fait le dossier le week-end même sans trop me poser de questions et j'ai été retenue au master. Et là, je crois que j'ai vécu un grand moment d'alignement pendant cette année de master de philosophie de la santé. En effet, je me suis sentie en accord avec mes valeurs, avec mes émotions, avec ce que j'avais fait, avec mon métier de médecin. Mais à la fois, mon côté littéraire et tout ça, enfin voilà, d'être... En fait, ce master est incroyable. C'est un master professionnel où il y a donc beaucoup de professionnels de la santé qui sont étudiants. Ça allait de 25 à 60 ans, des personnalités hyper variées, que des parcours de vie, mais incroyables, que des gens qui ont fait mille trucs. Et c'était dingue.

  • Speaker #0

    Et j'ai envie de rebondir sur ce que tu dis, parce que bon, déjà, on n'a pas envie de te couper.

  • Speaker #1

    Je suis désolée parce qu'en plus, je ne suis pas moula en parole.

  • Speaker #0

    Non, mais pas du tout. Non, en fait, c'est juste que tout à l'heure, tu m'as parlé d'une toute petite case. Tu vois, tu disais la case était trop petite pour moi. Et en fait, on avait l'impression que toi, tu n'avais qu'un seul besoin, c'était de créer des ponts avec d'autres sujets. Et en fait, finalement, l'image qui me vient, c'est un espèce de fil, de lien, qui commence à se tisser entre tous ces différents ponts. Et moi, ce que j'apprécie, et merci beaucoup de partager ça au micro des Alignés, c'est le fait que ce soit très inconfortable quand on est dans cette case qu'on sent trop petite, qu'on voit qu'il y a d'autres choses qui peuvent peut-être être source d'inspiration, peut-être te mener vers un toi, un toi Amélie, qui serait vraiment toi. Et je pense que les personnes qui nous écoutent vont se dire, mais oui, c'est exactement là ce que je suis en train de ressentir. Et ce que je trouve aussi très beau, et c'est aussi pour ça que les alunis existent, c'est comment le fait de rencontrer des personnes qui se sont autorisées à ouvrir d'autres portes, créer des ponts entre des matières, entre des sujets, fait que finalement, toi, tout à l'heure, tu as parlé de se nourrir. Tu arrives finalement à t'autoriser à te nourrir d'autres thématiques. Et c'est ça que je trouve hyper intéressant, de comment tu sortes de cette casse pour finalement commencer à tisser le lien et peut-être à t'autoriser à être... plurielle dans ce que tu es.

  • Speaker #1

    Oui, c'est sûr que c'est un peu le déclic de cette année de master. En effet, c'est vraiment à la fois de voir qu'il y a plein d'autres gens qui ont des vies plurielles et que ça ne les rend pas moins légitimes dans ce qu'ils font. Parce qu'après, je pense qu'en médecine, mais parce que je pense que j'avais projeté moi cette image-là, mais en médecine, on est quand même très... Enfin, c'est... Les médecins qui sortent des cases. Bon, maintenant, évidemment, le sujet m'intéresse. C'est que j'ai l'impression d'être une médecin qui sort des cases. J'ai rencontré d'autres profils un peu comme moi. Donc, je sais que je ne suis pas seule. Mais il y en a quand même peu. en fait la plupart du temps on est un peu sur des rails et moi Vachement longtemps, je me suis dévalorisée. Donc, je me suis dit, mais si tu deviens un médecin à mi-temps, est-ce que tu resteras un bon médecin ? C'était vraiment une vraie question. Et du coup, c'est vrai que quand on veut embrasser, on va dire, une activité un peu plus plurielle, parce qu'aujourd'hui, du coup, après ce master, je suis devenue doctorante. Donc, je dois consacrer du temps à ça. Je donne aussi des cours de philo à des soignants. J'ai écrit un bouquin. On pourrait dire que je me suis aussi complètement dispersée et que du coup, ça fait de moi un moins bon médecin. Ça, c'est vraiment ce que j'avais en tête. C'est hyper bête, mais rien que de se dire qu'on peut être médecin et autre chose, je me disais que les gens vont me prendre pour une folle. Et en fait, je me rends compte que c'est complètement une construction mentale. Parce qu'en fait, quand j'ai annoncé à ma boîte, quand j'ai annoncé à mes collègues et mes associés que j'allais bosser moins de temps en radiologie parce que j'allais partir en thèse de philo, etc. En fait, je n'ai eu que des retours ultra positifs. J'étais hyper étonnée moi-même. En fait, les gens m'ont dit, mais... c'est génial que tu fasses ça. Enfin, bon, voilà, j'ai eu des trucs comme quel courage, ou alors, c'est trop génial pour notre boîte d'avoir quelqu'un comme toi, en fait, parce que du coup, c'est trop bien les profils qui prennent du recul, qui essayent de voir plusieurs horizons et tout. tout le monde a été super valorisant et c'est là, en fait, où j'ai capté, où je me suis dit, ah ouais, en fait, c'est pas forcément mal, entre guillemets, d'être un peu slasheuse. Parce que jusqu'à présent, j'avais vraiment peur de ça, de me dire que les gens vont croire que tu es une moins bonne radiologue que les autres parce que tu consacres un peu moins de temps à ton activité clinique. Comme quoi, on peut aussi se mettre des barrières tout seul et s'inventer un espèce de schéma. Moi, j'avais vraiment l'impression d'être complètement coincée dans ma case de médecin et de jamais pouvoir en sortir. En fait, c'est faux, archi faux. Et je pense que pour... Moi, je suis médecin, mais j'imagine que tous les gens qui nous écoutent ont plein de profils différents.

  • Speaker #0

    C'est exactement ce que j'allais dire. Et finalement, tu vois, là, j'étais en train de lire un livre qui revenait sur la construction de qui on est en tant que personne. Tout à l'heure, tu t'es décrite en tant que littéraire ou scientifique. Ou en fait, très tôt, on devient un « ou » finalement. En fait, on devient absolument juste scientifique ou créative ou littéraire. Et en fait, très, très tôt, on nous met ça dans la tête. Et ça a très peu changé depuis les dernières années. Et c'est en ça que finalement se relier toutes ces différentes facettes de cette personnalité. En fait, en coaching, on parle de croyances limitantes. Ce sont des croyances, ce sont des injonctions qui sont dans nos têtes très, très tôt. Et même en tant qu'enfant. Donc, effectivement, pour s'en défaire, il faut y aller à coups de rencontres très inspirantes, de personnes qui nous montrent que c'est possible. Et effectivement, je trouve que c'est génial. Donc moi, la question qui me vient, c'est ce master qui finalement arrive à relier la santé, l'osophie. Qu'est-ce qui t'apprend, en fait ? Qu'est-ce qui va t'ouvrir comme porte ?

  • Speaker #1

    Franchement, je sais pas. J'ai passé une année absolument merveilleuse. C'est pour moi un grand, grand moment d'alignement. Il m'a apporté déjà beaucoup d'apaisement. Alors, je sais pas. Quand j'ai dit ça, en soutenant mon mémoire, à la fin de l'année, mes profs, ils me disaient, mais c'est très bizarre que tu... que je dis ça parce que d'habitude, au contraire, la philo, ça mène plus de questionnements et de... Enfin, pas forcément de l'apaisement. Et en fait, moi, ça m'a beaucoup apaisée parce que je pense que quand je suis arrivée... Je vous parlais de ma crise d'éco-anxiété, etc. En fait, je me suis tellement abreuvée de plein d'ouvrages, etc. J'avais une vision quand même assez radicale, je dirais, des choses. Presque une forme d'envie de révolution, de changement complet du système. J'étais très en colère, je ne sais pas. Très en colère contre notre modèle. capitaliste, extractiviste qui détruit la planète et qui détruit les hommes et qui détruit le vivant. J'étais un peu peut-être trop... Enfin, pas pleine de certitude, mais j'avais l'impression d'avoir compris des choses, d'être en colère et d'être...

  • Speaker #0

    révolutionnaire. Et en fait, ce que m'a amené ce master, déjà rien que pour ce côté-là, un peu de remise en question totale de la société, c'est que ça m'a amené vraiment de la pensée complexe. En fait, en philosophie, on est évidemment, chacun a son avis sur un sujet, mais en tout cas, en philo, on essaye d'être le plus, j'allais dire, je ne sais pas vraiment d'adjectif parfait, mais on essaye de se faire un peu tout le temps l'avocat du diable. Enfin, du moins, on essaye de prendre à chaque fois des idées complètement au pire. presque opposés, c'est le fameux thèse-antithèse-synthèse, mais on essaye de prendre deux chemins, deux courants de pensée très différents, de vraiment approfondir au max les deux courants de pensée pour arriver à ensuite faire une espèce de contre-argumentaire, etc. Et ensuite, soit on essaye de se positionner plutôt pour un chemin ou l'autre, ou bien de chercher une troisième voie. Moi, j'avoue, j'aime bien ce concept. En tout cas, on essaye d'aborder vraiment une pluralité d'idées, de façons de lire le monde. Et en fait, moi, ça, ça m'a amené beaucoup d'apaisement parce que je me suis rendu compte que, c'est pas que ça m'a déradicalisée parce que j'étais pas radicalisée, mais ce que je veux dire, c'est que ça m'a amené de la nuance, de l'humilité, de la complexité, et de me dire, en fait, tout peut être toujours critiqué. Et le but, c'est d'essayer de naviguer dans un monde hyper complexe. toujours en maintenant le dialogue avec les autres. En fait, je me suis rendu compte que si on se polarisait trop, en fait, on rompait le dialogue. Et je pense que ça me touche beaucoup ce que tu dis avec cette histoire de faire des ponts, faire des liens. Moi, c'est vraiment ce que j'ai envie de faire aujourd'hui. C'est faire des ponts entre la santé et l'écologie, faire des ponts entre la santé et la créativité, le récit et le soin, le politique et le soin, de faire du lien entre les gens, entre des univers différents. Et donc, je me dis que j'ai l'impression d'avoir une espèce de mission de ça, d'être dans le lien, dans le dialogue. Et en fait, dans ce master, déjà, ça m'a apaisée. Puis en plus, le master était construit pour qu'il y ait du lien, parce qu'en fait, c'est un master assez unique en France, où à chaque fois que tu as des cours, tu as un soignant ou soignante, enfin quelqu'un issu du milieu du soin, et un philosophe ou un économiste. On a eu aussi, voilà, on a eu philosophe, économiste de la santé, juriste. Enfin, après, voilà, tu as des... professions à dire universitaires en sciences humaines et sociales, sociologues aussi on a eu. Et à chaque fois qu'ils dialoguent, rien que le master est construit dans un dialogue permanent entre des enseignants-chercheurs et des soignants qui vivent des choses sur le terrain. Donc déjà, ce modèle-là, il est absolument magnifique parce qu'il met en lien toujours ce qu'on vit et une pensée philosophique qui permet de prendre du recul sur ce qu'on vit, justement. Donc ça, c'était merveilleux. Et puis après, j'avoue, j'ai eu la chance de tomber dans une promo incroyable. où il y a eu des liens humains hyper forts. C'était une très belle expérience humaine aussi. Et donc, tout ça m'a profondément transformée. Et là, je crois que ça faisait depuis le lycée que je m'étais... Enfin, je ne sais pas, même depuis toujours, je ne m'étais jamais sentie autour à ma place qu'en suivant ces cours de philo de la santé. On me disait en tout cas qu'on pouvait lier pensée philosophique et métier du soin. Et qu'en fait, tout ça, je te dis... Prendre soin des idées, prendre soin des gens, prendre soin du monde. Enfin voilà, qu'il y avait cette espèce de champ des possibles qui s'ouvrait à justement ma pluralité. Enfin, je sais pas, c'est comme si ce que je ressentais, ce que je pensais s'alignait avec un truc possible dans la réalité, en fait.

  • Speaker #1

    Oui, et tu vois, par rapport à ce que... Bon, déjà, j'ai envie de te dire merci de partager tout ça parce que je pense que ça va beaucoup parler. Et même si toi, tu parles de la santé et de la philosophie, je pense que les personnes qui nous écoutent pourront vraiment faire le lien avec d'autres thématiques qui leur sont chères. Peut-être que ce sera l'écologie, mais ça peut être d'autres engagements qui parfois sont assez lourds à porter. Et puis, comme tu le dis très bien aujourd'hui, quand on est dans un moment où on prend conscience de certaines réalités, il y a très souvent ce moment-là où en fait, on s'abreuve d'informations qui vont dans le même sens. Et donc, on se polarise, on se radicalise. C'est à la fois indispensable de prendre conscience des choses. Et en même temps, il y a une espèce de... de nécessité de prendre soin de soi. Je pense que tu connais le Schumacher College à Londres qui accompagne des militants pour qu'ils prennent soin d'eux-mêmes, pour faire émerger positivement des idées de leur cause, tout en se brûlant pas. Je pense que ça va beaucoup parler aux personnes ici qui nous écoutent et qui écoutent les alignés parce qu'ils ont un engagement et qu'ils ont besoin de se retrouver eux-mêmes. Donc, tout ça fait énormément de sens. Je suis un peu brouillon, mais parce qu'il y avait tellement de choses dans ce que tu as dit. Voilà, le sujet de l'engagement, de prendre soin et de créer aussi des espaces dans lesquels, ce qui me paraît aussi très juste et je le souligne, à la fois pour des environnements universitaires, mais aussi en entreprise ou j'imagine aussi dans le domaine de la santé ou peu importe, le fait d'oser mettre des professionnels qui travaillent dans des milieux très différents et de créer un dialogue et créer un espace dans lequel ils... Il y a ce dialogue et moi, je souris intérieurement quand tu dis cette promo est extraordinaire. Mais en fait, moi, ma conviction profonde, c'est quand tu crées un groupe et un espace, en général,

  • Speaker #0

    un espace quelque chose.

  • Speaker #1

    C'est très souvent très fertile, mais c'est vraiment une conviction que j'ai profonde à chaque fois. Et je souris intérieurement parce que quand tu mets des humains ensemble et qu'il y a cette volonté de créer un espace fertile et authentique entre les personnes. En général, c'est là où la magie arrive. Mais je le prends quand même comme une idée, comme un enseignement d'oser le faire.

  • Speaker #0

    Je ne sais pas combien de temps tiendra ce master, parce que du coup, c'est quand même compliqué pour eux, pour les financements, pour plein de raisons, parce que justement, ils sont un peu un master un peu atypique. Mais oui, je suis d'accord avec toi de faire dialoguer des gens de milieux différents, de professions différentes. En fait, c'est super riche. Et tu n'as pas d'un côté qu'un soignant à la tête dans le guédon qui te parle, ou d'un côté qu'un universitaire ultra perché qui ne sait pas de quoi il parle, il y a il théorise des trucs qu'il n'a pas vécu. Là, il y a vraiment cette rencontre des deux qui était super riche. Et je crois que maintenant, c'est ce que j'essaye moi d'incarner, parce que je ne serai jamais philosophe, dans le sens où je n'ai pas du tout le parcours académique pour devenir philosophe. Je resterai un médecin, mais ce que j'essaye d'amener, en tout cas dans les cours que je donne, dans les DU, dans certaines formations, etc. C'est vraiment ça que j'essaye d'amener, qu'on peut être un peu hybride, mais qu'en fait... ça peut aussi apporter des choses aux gens, c'est-à-dire à la fois avoir un pied dans le monde réel, entre guillemets, du terrain, et quand même s'autoriser une espèce de prise de recul pour essayer de développer sa pensée critique et sa réflexion. Parce que je pense que c'est en amenant de la pensée critique et de la réflexion que justement, soi-même, si on se pose des questions, on arrivera mieux à entendre la parole de l'autre, même si elle est différente de la nôtre. Bref, j'essaye de cultiver ce... Je ne suis pas trop universitaire, je ne suis pas juste du terrain, je suis un peu entre les deux, mais je pense que ça peut être utile pour les autres.

  • Speaker #1

    Et ce côté d'être un « et » et plus un « ou » , tu te sens comment par rapport à ça ?

  • Speaker #0

    C'est pas mal. Justement, je pense qu'on se sent les deux pieds sur la terre. Je ne sais pas, en effet, on se dit qu'on est riche, qu'on est capable d'amener plusieurs choses. On est dans le lien et pas dans la séparation. Enfin, t'as raison, oui, c'est vrai que ce truc d'être ou ça, ou ça, ou ça, c'est terrifiant, en fait, qu'on nous mette dans des cases. Après, voilà, il y a vraiment tout un sujet sur l'hyperspécialisation. C'est un peu ce que tu dis avec tes littéraires ou tes scientifiques. On nous a un peu fait croire que pour avoir une espèce de cohérence linéaire, pour être performant, etc., il fallait s'hyperspécialiser. moi je le vois clairement en médecine parce qu'on fait que s'hyperspécialiser, on est médecin puis ensuite on est médecin, moi j'étais spécialiste en plus d'être spécialiste je me suis spécialisée en imagerie de la femme et imagerie diététique, on est toujours dans ce truc de toujours s'hyperspécialiser pour être l'expert d'un truc et d'être trop fort et d'être reconnu pour ça, donc il y a vraiment cette valorisation de l'hyperspécialisation et on en revient un peu là, il y a pas mal de penseurs qui critiquent ça, il y a un philosophe comme Edgar Morin qui maintenant dit qu'il faut de la pensée complexe justement en fait c'est pas parce qu'on est hyperspécialisé que... Le problème de l'hyperspécialisation, c'est que ça crée aussi des espèces de couloirs où personne ne communique entre eux, où on n'arrive pas à prendre en compte les pensées des systèmes. Enfin bref, je pense qu'on en revient de plus en plus. En tout cas, dans le milieu universitaire, ils essayent de recréer des formations interdisciplinaires, pluridisciplinaires. C'est quand même un truc qui revient. J'ai quand même le sentiment que ça va un peu plus émerger et les gens s'autoriseront peut-être aussi à être plus des « et » que des « ou » Grâce à ce... cette déconstruction un peu de l'hyperspécialisation.

  • Speaker #1

    Et donc maintenant que tu nous dis que tu as vraiment réussi à devenir un OU, j'ai hâte de savoir quel lien tu vas tisser. Quels sont les projets dont tu as envie de nous parler une fois que ce grand moment d'alignement est arrivé ? Qu'est-ce que tu es en train de construire ? Ça,

  • Speaker #0

    c'est pour le coup une question. Je ne sais pas si je peux y répondre parce qu'en fait, je n'ai pas de visibilité sur la suite. Je crois que tous ces grands moments d'inconfort, et puis cette espèce d'alignement qui a surgi du chaos m'ont redonné confiance. Je ne sais pas comment dire, j'ai une forme d'espérance aujourd'hui et en fait j'ai l'impression de me dire que je fais confiance un peu en l'avenir sans savoir vraiment ce qui m'attend parce qu'en fait le projet à court terme c'est quand même de réaliser ma thèse de philo mais je pense que j'en ai encore pour trois ans, trois ans et demi et après en fait je ne sais plus. pas du tout comment tout ça va se mettre en place. En fait, je me dis que je fais les choses au fur et à mesure et que j'ai l'impression en tout cas que c'est plutôt dans les rencontres humaines. Il y a des choses qui vont se décider un peu pour moi. Par exemple, cette année, j'ai eu la chance de donner des cours de philo à des soignantes dans le cadre de l'école de santé intégrative MU Médecine qui a été fondée par Chloé Bramy. Par exemple, Chloé, c'est quelque chose dont elle m'a parlé l'année dernière. Elle m'a proposé ce projet en me disant « qu'est-ce que tu en penses ? » et puis voilà, on y est allé. Et en fait, c'était extraordinaire. J'ai adoré donner ces cours. J'ai l'impression que pour l'instant, il n'y a pas vraiment de trajectoire. Je sais juste que je veux continuer de travailler sur des sujets de santé, de politisation de la santé, d'environnement. Moi, je dis que c'est un peu mon militantisme intellectuel. Ça, c'est ma forme d'engagement, ma façon d'agir sur le monde. Après, je pense que je resterai radiologue à côté parce que pour l'instant, je ne me vois pas du tout. Je ne sais pas du tout dans mon projet d'arrêter. d'être médecin, parce que je pense que c'est important d'avoir un pied dans la réalité toujours. J'ai des projets aussi. J'ai écrit un roman il y a quelques années qui va être publié en septembre. Donc, pareil, je me dis que ce roman va être publié. Je ne sais pas du tout quel écho il aura, quelle résonance. Est-ce que ça va aussi... Parce que ça parle aussi de soins. Enfin, c'est complètement une fiction, mais ça parle du sujet épineux de la fin de vie. Donc je me dis, voilà, après, est-ce que ça va amener des débats ? Enfin, j'en sais rien. Tu vois, en fait, je me dis que chaque pas en amène un autre. Mais c'est sûr que je ne sais pas vraiment où je vais. Mais je me dis que tant que je suis à l'écoute, que j'essaye de garder cet alignement, en tout cas, de ce moment de grâce que j'ai vécu pendant mon master, d'essayer d'être à l'écoute de ce que je ressens, de ce que je pense, de ce que je fais, des gens qui sont autour de moi, des écosystèmes qui se créent et tout. J'ai l'impression que je ne manquerai pas d'idées. j'arriverai à... continuer mon chemin.

  • Speaker #1

    Alors, je pense que les auditeurs, auditeuses se disent non, on ne se fait pas du tout de soucis sur sa capacité à avoir des idées. Et justement, c'est exactement ce que je me disais, c'est pour des personnes qui nous écoutent, moi j'aime bien demander quels sont les conseils enseignements que tu as envie de partager. Et peut-être, là je vais juste aiguiller sur peut-être une chose, c'est quand on a plein d'idées, comment on se lance en fait sur sur... les projets, aussi divers soient-ils, peut-être aussi éloignés de son enseignement de départ, de qui on est au départ, comment on se lance ? Parce qu'en deux secondes, tu viens quand même de nous dire que tu avais écrit un roman, une fiction en parallèle de tout ce qu'on vient de se dire.

  • Speaker #0

    C'est sur plusieurs années.

  • Speaker #1

    Mais voilà, dans ces enseignements, déjà, quels sont-ils ? Et puis peut-être un petit focus sur comment on se lance.

  • Speaker #0

    Alors déjà je commencerais par une chose quand même et tu l'as dit tout à l'heure et j'ai trouvé ça trop bien que tu remets ça dans son contexte je suis quelqu'un de privilégié aujourd'hui dans le sens où j'ai une profession qui me permet de travailler à mi-temps et de suffisamment en tout cas gagner ma vie pour pouvoir satisfaire aux besoins de ma famille et puis j'ai aussi la chance d'avoir un conjoint qui m'aide un peu dans cette qui m'aide matériellement aussi enfin je veux dire sur cette espèce de transition parce qu'en fait ma thèse elle est pas financée j'ai pas de contrat doctoral et tout donc en fait la plupart des choses que je fais aujourd'hui c'est du bénévolat voire du quasi bénévolat quand tu donnes des cours dans des DU t'es très peu payé donc voilà juste pour garder ce côté matériel en tête évidemment parce qu'on pourrait dire il faut du courage il faut de l'audace enfin j'en sais rien mais j'ai quand même la chance d'avoir un métier qui me permet de le faire et un soutien familial qui me permet de le faire Donc ça, c'est quand même un premier truc.

  • Speaker #1

    Et merci de le dire ici.

  • Speaker #0

    Ce n'est pas juste un truc pour remettre tout à zéro. Déjà ça. Ensuite, les conseils que je donnerai avant de se lancer, c'est très court, trois petites phrases, mais en gros, déjà, ce n'est pas parce que vous n'êtes qu'on. On n'a pas besoin d'être dans une case pour être légitime et que parfois, c'est en créant nous-mêmes nos propres formes qu'on arrivera à le mieux. contribuer justement pour la société ou pour les gens qui nous entourent, qu'on contribuera le mieux. Oser à être inclassable, oser être pluriel, à être complexe, parce qu'en fait, à chaque fois que vous osez être ça, ça ouvre un espace pour les autres femmes autour de vous, pour les autres hommes. En tout cas, comme on a vachement parlé de ça, moi, j'ai été énormément inspirée par plein de femmes, que des femmes d'ailleurs. J'ai vraiment trois femmes en tête qui m'ont beaucoup inspirée et qui... elles, en étant complexes, inclassables et plurielles, m'ont permise, m'ont autorisé peut-être à l'être aussi. Et puis, sur ce côté, on se lance. Mais ça, c'est pareil, parce que j'ai la chance d'avoir un soutien quand même matériel. Mais je pense qu'il faut parfois oser aller dans une direction, même si on n'a pas un plan de route. complètement établie. Ce n'est pas parce que tout n'est pas... Moi, j'ai l'impression qu'en tout cas, ce qui m'a rendue forte, ce n'est pas forcément de tout maîtriser, mais c'est plutôt justement de me lancer dans des projets dont j'avais envie sans savoir exactement où ça allait aller. Mais finalement, à partir du moment où on se met dans une espèce de dynamique d'action, en fait, il se passe des trucs. Il se passe des trucs parce qu'on rencontre des gens, parce que... Après, il faut de la patience. C'est un peu facile aussi pour moi de dire, par exemple, mon roman qui va être publié là, c'est un projet, ça fait quatre ans que je le mène. Donc voilà, il faut parfois être patient.

  • Speaker #1

    La ténacité, finalement.

  • Speaker #0

    Voilà, la ténacité. Et alors du coup, je rajouterais un dernier truc. C'est que du coup, j'ai l'impression qu'il faut quand même avoir une forme de confiance, même s'il peut y avoir des moments de désespoir, mais des moments où on se dit, mon Dieu, je me suis lancée dans cette idée folle. Alors qu'en fait... s'en train de merdouiller, puis en plus de ces gestes-là qu'on apprend. Mais pour avoir un peu confiance et justement, je pense, pouvoir raccrocher avec les gens autour de nous qui nous aident à continuer d'avancer, je pense qu'il faut d'abord avoir, enfin, prendre le temps de savoir qui on est. C'est ce qu'on disait au début, mais en tout cas, d'essayer de se reconnecter avec le soi profond, c'est-à-dire avec vraiment qui on est au fond. font, enfin en tout cas, des choses, qu'est-ce qui nous anime ? Il faut prendre soin de son intériorité pour pouvoir ensuite aller vers les autres et s'engager pour le monde. Et ça, c'est pas évident parce que comme tu le disais très justement, on a eu plein d'injonctions, plein de normes sociales depuis qu'on est gamin. En fait, on s'est conformé à toutes ces normes parce qu'on a envie de plaire, on a envie de reconnaissance, on a envie d'être performant. Et je pense qu'il y a plein de gens qui... Moi, la première, on s'égare du coup. À force de vouloir répondre à ses attentes extérieures, on en oublie qui on est. Et ce n'est pas un truc narcissique, je pense, de dire qu'il faut prendre soin de soi. Je pense que c'est en tout cas un pilier essentiel pour pouvoir s'engager pour les autres et pour le monde. Ça, c'est sûr.

  • Speaker #1

    Il y a un côté, c'est un côté que je trouve assez intéressant, qui est développé dans les théories d'organisation d'entreprise, dans lequel, en fait, finalement, la singularité des humains, qui on est de manière très profonde, va... permettre à créer des entreprises, un système, un écosystème qui ira bien. Et c'est plutôt dans le fait de se conformer dans ce qui doit être bien que notre singularité va être complètement étouffée et que finalement, on ne va vraiment pas avoir l'apport au monde qu'on devrait avoir. Alors, je sais qu'il y a des personnes, effectivement, tu le disais très justement, là, on parle toutes les deux parce qu'on a le temps de se poser et de réfléchir. Mais en même temps, je pense qu'il faut aussi se dire, moi je pense que c'est important, qu'il y a des gens qui ont le temps, mais qui se conforment et qui finalement n'ont pas un apport au monde qui est juste pour eux, alors qu'ils pourraient le faire. Donc on sait qu'on parle entre personnes privilégiées, mais comme tu dis, prendre soin du monde, c'est d'abord prendre soin de soi, de sa singularité. Je suis vraiment fondamentalement persuadée que si chacun et chacune trouve sa place, alors le monde ira clairement beaucoup mieux. Donc, c'est un peu le leitmotiv de ce podcast. Et donc, je trouve ça très chouette que tu en parles ici. Donc, merci beaucoup pour ces précieux conseils. Je pense qu'ils vont résonner énormément pour les personnes qui nous écoutent, qui peut-être sont au milieu du guet, tu vois, qui sont déjà, qui sont en cette case un peu trop petite.

  • Speaker #0

    Allez-y, foncez.

  • Speaker #1

    Voilà. Et puis aussi, se dire que ce n'est pas immédiat. Merci beaucoup de l'avoir dit. Ça prend du temps. Ça prend du temps, ça gratte, c'est compliqué. Et parfois, c'est simplement une histoire d'oser prendre un week-end. pour postuler à un DU, à une formation qui, sur le papier, a l'air chouette, mais on ne sait pas vraiment ce que ça va donner. Et voilà, il faut oser, finalement. J'ai envie de te poser la question, parce que je sais que ce sera génial et riche d'enseignements, comme tu as l'air d'être friande de médias. Dans les Alignés, on aime partager des médias, podcasts, ressources qui t'ont nourri, toi, pour aller sur ton chemin.

  • Speaker #0

    Alors, je peux peut-être partager... Alors, il y a podcast et puis ouvrage, ou du moins, personne qui écrive. Oui, dans les podcasts, un que je recommande vraiment, c'est Loin des yeux, loin du care de Eva Sadoun. Eva Sadoun, qui est une femme assez formidable. Voilà, c'est des épisodes sur le care. En tout cas, c'est riche d'enseignements parce que ça montre à quel point le care, donc le soin, manque à plein de structures autour de nous. Et comment il faudrait en ramener pour un peu... rendre notre société plus... Parce que le care, c'est essentiel à la vie et pour un peu réhumaniser, redonner un second souffle à toutes nos structures collectives.

  • Speaker #1

    Alors peut-être le care, pour les personnes qui nous écoutent, ils ne connaissent pas forcément. Est-ce que tu as envie de nous partager une espèce de définition de ce que c'est ?

  • Speaker #0

    L'éthique du care, c'est une pensée des années 80. Ça a émergé en tout cas d'une... à la base d'une psychologue morale qui s'appelle Carol Gilligan. C'est une pensée féministe, qui a ensuite été politisée un peu par Joan Tronto, mais en gros, c'est l'idée que nous sommes toutes et toutes vulnérables et que le soin qu'on s'apporte mutuellement fait tenir nos sociétés. C'est un peu compliqué, mais c'est aussi une manière assez différente de lire le monde, justement, parce qu'en fait, la philosophie morale, elle a été longtemps pensée par des hommes. qui prône que l'individu est autonome, n'a besoin de personne autour de lui, est un écosystème à lui-même, etc. Les penseuses du CAIR, elles remettent un peu, elles disent non, pas du tout, en fait, on a tous besoin les uns des autres, on est tous un espèce de réseau de liens et du coup, le fait qu'on soit tous en lien les uns avec les autres engendre des responsabilités et une manière différente, idéalement, d'organiser nos sociétés. Voilà, en tout cas, c'est... C'est mettre du soin partout dans nos relations, remettre de l'attention. Enfin bon, si vous voulez vous embarquer là-dedans, je pense que d'écouter le podcast Loin des yeux, loin du cœur, c'est top. Voilà, ça c'est le premier. Après, bon, ça c'est purement écolo pour ceux qui s'intéressent un peu à la cause écologique. Il y a le podcast Green Letter Club qui est vraiment génial. Moi qui m'a vraiment appris énormément de choses sur l'écologie au moment où j'en avais besoin. Et après, sur un terrain plus philosophique, je citerai trois auteurs. Alors en un, je citerai Inès Weber, qui est une psychologue pour le coup, mais qui a écrit un bouquin qui s'appelle « Être soi, une quête essentielle pour le monde » . Peut-être que je déforme un peu le titre, mais c'est chez Gallimard. Et justement, moi, j'ai été bouleversée par cette lecture. Justement, Inès Weber, elle dit à quel point on s'est complètement décrochée de notre... de notre soi profond et qu'en fait, on a une espèce de moi social qui gouverne un peu notre vie et que le seul moyen d'être vraiment utile au monde et de se battre et de s'engager et de contribuer à un monde plus juste, plus relié, etc., c'est de déconstruire plein de choses, d'enlever un peu plein d'espèces de couches d'oignons et d'essayer de voir, au fond, ce qu'on aspire, ce qui nous rend heureux. Enfin, voilà. Donc, elle, elle est psychologue et elle dit qu'en fait, elle voit sur son divan plein de gens qui vivent des crises existentielles les allées. elle essaye de donner des réponses, de dire que c'est peut-être la société qui nous a justement enfermées dans ces cases, mis plein d'injonctions sur le dos et que quand même, le véritable moyen de contribuer, c'est quand même d'aller chercher au fond de nous. Ça n'a rien à voir avec le développement personnel, ça n'est pas un égotrip, c'est vraiment quelque chose de nécessaire. Et après, dans la même veine, du coup, il y a Abdenour Bidar qui a écrit un bouquin qui s'appelle « Les tisserands » qui est merveilleux, qui est un peu dans la même idée, mais de dire... que pour lui, il faut qu'on prenne soin des liens qui ont été abîmés. Et donc, il dit qu'il y a trois liens importants. C'est le lien à soi, le lien aux autres, le lien au monde. Et lui, en fait, il développe cette posture du méditant-militant qui dit que pareil, en fait, il faut soigner, prendre soin de son intériorité pour pouvoir ensuite agir sur le monde. Et tu parlais tout à l'heure du Schumacher College. Mais voilà, de cette idée de si on ne veut pas partir en burn-out militant, il faut aussi prendre soin de soi. de vraiment relier que Pour lui, il dit que l'un ne doit pas aller sans l'autre. On ne peut pas faire que méditer et rien faire ou que être dans la méditance. Il faudrait idéalement se nourrir de la méditation pour pouvoir ensuite agir sur le monde autour de soi.

  • Speaker #1

    Et encore une fois, finalement, tu vois, ça devenir un « ou » .

  • Speaker #0

    Oui, et en effet, dire qu'on peut être les deux à la fois, nourrir une forme de spiritualité ou de vie intérieure fertile pour qu'ensuite on puisse... Mieux prendre soin des autres et du monde. Et ça, je pense que tout le monde l'expérimente. Lui, c'est un philosophe, mais il l'explique avec ses mots de philosophe. Et c'est génial. Mais je pense qu'on a tous ressenti que quand nous, on a les batteries à plat, qu'on est perdu, etc. On est incapable d'avoir une écoute active pour quelqu'un qui a besoin de nous. C'est difficile de s'engager pour des projets qui vont nous demander l'énergie parce qu'on n'en a déjà pas. Je pense que c'est un peu du bon sens.

  • Speaker #1

    Oui. Et en même temps, c'est un peu ce qu'on se disait tout à l'heure. Le côté militant, la case militant, parfois, on se sent... Tout à l'heure,

  • Speaker #0

    tu as utilisé un mot pour te décrire. Oui, je vais dire que...

  • Speaker #1

    Tu as dit que tu étais intellectuelle.

  • Speaker #0

    Oui, une forme de... J'essaye en tout cas d'être... Oui,

  • Speaker #1

    de militante intellectuelle.

  • Speaker #0

    Oui,

  • Speaker #1

    c'est ce que tu as utilisé comme mot. Et je me suis dit, ah, c'est drôle, parce que justement, le fait de mettre ces deux mots l'un à côté de l'autre, c'est quelque chose que j'avais rarement entendu en réalité. Et je pense que des personnes qui nous écoutent se disent que le militant, c'est celui de la rue. C'est celui qui va être au premier rang des manifestations. Et donc, encore une fois, s'autoriser à être toi-même et être dans une forme d'engagement qui te correspond.

  • Speaker #0

    En fait, c'est exactement ça. Pendant que je traversais ma crise d'éco-anxiété vénère, je me demandais même, est-ce qu'il ne faut pas s'engager pour Extinction Rebellion ? Est-ce qu'il ne faut pas ? Être dans Dernière Rénovation, et en fait, je me dis, mais ça n'est pas toi. T'enchaîner à une banque ou t'asseoir sur une voie, empêcher des voitures de circuler, ça ne te correspond pas. Donc en fait, je pense qu'en effet, chacun et chacune... peut mettre de l'engagement dans ce qu'il fait. Et moi, en fait, juste grâce à ce master de philo, je me suis rendu compte à quel point j'étais un peu une intello bisu qui aime bien être à la bibliothèque. Bon, OK, finalement, est-ce que ça ne va pas être ça, ma forme d'engagement ? Parce que c'est un terrain que j'aime bien, le terrain des idées, le terrain de l'écriture. Mais en fait, à nous de trouver, on peut être militant en étant agriculteur et faire de l'agroécologie. On peut être militant en étant une infirmière qui continue de prendre soin de ses patients d'une certaine manière. On peut être militant en étant coach professionnel et en remettant de l'inclusivité, de l'inclusion dans les boîtes. Je pense qu'en fait, pareil, militant, c'est devenu un gros mot. Il y a un essai qui est sorti il y a pas longtemps qui s'appelle « Militer, verbe sale » d'une époque. En fait, on a décrédibilisé le militantisme. on l'a dévalorisé parce qu'en fait je pense que le système préfère des gens qui se conforment parce que c'est plus facile de driver une société comme ça, donc les militants maintenant en effet du coup le premier truc qu'on a en tête c'est genre éco-terroriste, des gars qui ont pété des bassines qu'on fait ci, qu'on fait ça, en fait je pense qu'il y a vraiment plein de formes de résister on peut peut-être plutôt utiliser ce mot de résistance que de militantisme parce que peut-être que c'est plus polissé entre guillemets et que tout le monde s'entend dessus mais en tout cas je pense qu'on peut tous résister à ce qui nous semble injuste avec les armes qu'on a et qui on est. Oui,

  • Speaker #1

    ce qui me fait penser au livre de Salomé Sacké, Résister. C'est vrai que c'est un mot qui devient assez actuel et qui est assez juste aussi. Donc, on retient ces ressources-là. Est-ce qu'il y a d'autres ressources que tu as en tête ?

  • Speaker #0

    Après, pareil, il y a... Non, après, des ressources... Moi, il y a un philosophe que j'adore qui s'appelle Jean-Philippe. Ceyron, qui pour moi est un penseur incroyable parce qu'il pense le soin, il pense l'écologie, il pense la poésie, la résistance poétique un peu. C'est un philosophe contemporain qui a écrit plein de bouquins. Je tous les recommande parce que il est super gentil dans la vraie vie. J'ai l'impression. J'ai eu quelques échanges très rapides avec lui. Pour moi, c'est un philosophe qui fait du bien à lire et qui est accessible à lire ou à écouter en podcast. Il n'a pas participé à des podcasts et tout. Et après, en termes d'inspiration, mais après, je ne sais pas, ça peut être une ressource aussi. Il y a une nana que je trouve formidable qui s'appelle Victoire Sato, qui a fondé un média qui s'appelle The Good Good. En fait, elle se bat un peu pour la mode responsable, on va dire. En tout cas, elle est au service de l'écologie dans le milieu de la mode. Et enfin, bon, après, c'est perso, mais vu qu'à la base, c'est une nana qui était radiologue. donc forcément moi ça me parle parce que je suis radiologue et qui elle pour le coup a carrément arrêté d'exercer pour se lancer complètement dans son média et elle pour moi c'est typiquement la femme plurielle parce qu'à côté de ça elle est aussi artiste collagiste, donc elle fait des oeuvres, elle est vraiment une artiste elle s'est lancée dans un projet d'architecture résiliente en Normandie je crois elle est en train de construire, de rénover un truc de ouf, une ferme qu'elle veut transformer en lieu d'échange, en lieu hybride de résidence artistique. Pour moi aussi, pour tous les gens qui se sentent pluriels et qui ont besoin de modèles, Victoire Sato, franchement, elle déchire.

  • Speaker #1

    On sent qu'on va l'inviter au micro des animés.

  • Speaker #0

    Je pense qu'elle aura plein de choses à dire.

  • Speaker #1

    Génial. Une question que j'aime bien poser, c'est qu'est-ce qu'on peut te souhaiter après tout ça ?

  • Speaker #0

    Merci. de bien vivre mon postpartum numéro 3 on peut me souhaiter je pense de garder la confiance même quand ça tangue même si je ne sais pas trop où je serai dans 3-4 ans de rencontrer des gens super sur la route de créer du lien tout le temps c'est ça d'être heureuse en lien en confiance et toujours créer des ponts Salut ! des espaces et de la réflexion.

  • Speaker #1

    Merci. Et pour les personnes qui ont adoré cet épisode, qui ont envie de te suivre sur ton chemin, comment on peut te suivre ?

  • Speaker #0

    Alors, j'ai un compte Instagram, où c'est mon nom, Amélie Cadier-Lauriau, où je poste peut-être pas suffisamment, mais en tout cas, je suis toujours hyper heureuse quand des gens m'écrivent, partagent. des petits morceaux de leur vie, des questions. Je trouve ça hyper précieux. Et pour l'instant, j'ai eu que des échanges super avec les gens qui m'ont écrit. C'est vrai que je ne partage peut-être pas assez régulièrement, mais j'essaye de mettre un peu de contenu de temps en temps. En tout cas, c'est un moyen de me contacter aussi et d'échanger, de créer des trucs. Et après, j'ai une page LinkedIn qui est quasiment morte. Mais pareil, j'ai... J'ai pour projet de la nourrir de quelques articles. Donc voilà, si vous avez que LinkedIn, je fais aussi. Sur ce réseau social, oui.

  • Speaker #1

    Et ton bouquin sort quand exactement ?

  • Speaker #0

    Mon bouquin, c'est un premier roman, c'est une fiction. Et ça sort le 11 septembre prochain. Et ça s'appelle « Avant que tu ne t'en ailles » .

  • Speaker #1

    Écoute, j'ai adoré cet échange. Merci beaucoup d'avoir partagé tout ça au micro des Alignés. J'espère juste... que probablement dans quelques années, on se fasse une autre session pour savoir où tu en es dans quelques temps et où t'as mené cet alignement, ce chemin d'alignement. Mais merci beaucoup,

  • Speaker #0

    Amélie. Merci à toi, Charline. Je suis vraiment ravie.

  • Speaker #1

    Merci beaucoup. À très bientôt.

  • Speaker #0

    À bientôt.

Chapters

  • Introduction et présentation du podcast

    00:06

  • Rencontre avec Amélie Cadiel-Loriot

    02:38

  • Qui est Amélie ? Son parcours de vie

    03:20

  • Moments de désalignement et d'alignement

    06:50

  • Crise d'éco-anxiété et transformation personnelle

    17:42

  • Le master en philosophie de la santé et l'alignement

    22:30

  • Projets futurs et engagement personnel

    39:50

  • Conclusion et ressources à partager

    58:10

Description

Aujourd'hui, je suis ravie d'avoir à mon micro Amélie Cadier-Loriaud , une femme aux multiples facettes : médecin, doctorante en philosophie, professeure de yoga, écrivaine, et maman de trois enfants. Son parcours est une invitation à reconsidérer nos cases.


Dans cet épisode, Amélie nous raconte son cheminement, de la petite fille de la campagne rêvant d'être écrivaine à la médecin qui se sent à l'étroit dans sa "case". Elle nous partage les moments de désalignement qui l'ont menée à une crise existentielle , mais aussi les rencontres inspirantes et les décisions audacieuses qui l'ont aidée à tisser un lien entre ses différentes passions.


On parlera de la difficulté de s'affranchir du regard des autres , de la richesse de la pensée complexe , et de l'importance de la singularité. Amélie nous prouve qu'on peut être à la fois dans le soin des gens et le soin des idées, et qu'on peut s'engager pour le monde tout en trouvant sa propre place.


✨ Si veux en savoir plus sur Les alignées, file découvrir le site internet www.lesalignees.com ou sur mon LinkedIn dans lequel tu découvriras comment nous oeuvrons pour transformer le monde professionnel pour plus d'alignement des salarié·es et la mixité femme/homme.


Pour suivre Amélie :

Son instagram


Pour aller plus loin :

  • Eva Sadoun - Loin des yeux loin du care

  • Green Letter club.

  • Inès Weber - Etre soi une quète essentielle pour le monde.

  • Abdennour Bidar - Les Tisserands.


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Bienvenue sur Les Alignés, je suis Charline Moreau, consultante et coach en entreprise, et depuis plus de 3 ans, je tends le micro à des femmes qui ont osé aligner leur vie avec leurs valeurs. Depuis toujours, ce sont des conversations authentiques avec des femmes sur leur parcours qui m'ont permis de profondément questionner ma vision de l'ambition et de la place que je voulais prendre. Alors je me suis dit... que ces échanges intimistes pourraient inspirer d'autres personnes s'ils étaient diffusés plus largement. C'est comme ça que les alignés sont nés. Tous les 15 jours, je partage avec toi des discussions inspirantes où l'on parle de tout. De pro, de perso, de passion, de reconversion, de réussite, de doute ou encore d'engagement. Parce que trouver sa place en tant que femme dans la société est un cheminement. Et chaque parcours peut nous éclairer. Si ce podcast te plaît déjà, j'ai besoin de toi pour le faire grandir. Partage-le à une personne qui en a besoin. Et surtout, laisse-moi un commentaire et 5 étoiles sur ta plateforme d'écoute préférée. Je sais, ça n'a l'air de rien, mais c'est vraiment très utile pour moi et pour faire connaître ce podcast. Maintenant, je laisse la place à ce nouvel épisode des Alignées. Bonjour Amélie !

  • Speaker #1

    Salut Charline ! Tu vas bien ? Très bien, merci ! Écoute,

  • Speaker #0

    je suis ravie de t'avoir ici à ce micro. Il faut savoir qu'on est l'une en face de l'autre à Bordeaux City, avec une vue à 360 sur Bordeaux qui est assez exceptionnelle.

  • Speaker #1

    Magnifique !

  • Speaker #0

    Voilà, et je suis très très heureuse d'être venue jusqu'à toi pour cette interview, parce que ça fait quelques mois qu'on s'est rencontrés en vrai, et je sais que cette interview va pouvoir... pouvoir éveiller des consciences, peut-être des réflexions autour des sujets qui toi t'animent. Voilà, j'ai hâte de notre conversation. Pour commencer, j'ai une question que je pose à toutes mes invitées, parce que les personnes qui nous écoutent ne te connaissent pas forcément, qui semble simple cette question, mais qui en réalité est assez complexe. La première question pour toi Amélie, c'est Amélie Cadiel-Loriot, qui es-tu ?

  • Speaker #1

    Merci beaucoup Charline, merci de m'avoir proposé cette rencontre. Alors, qui suis-je ? J'ai en effet vaste question à laquelle je ne sais même pas si je serais bien capable de répondre. Mais je dirais que je suis une fille de la campagne à la base. Donc, c'est un point important. J'ai grandi au milieu des vignes, élevée par des parents viticulteurs. Et puis, je suis devenue médecin. J'ai fait des études de médecine que j'ai un peu décidé de faire sur le tard. Parce que moi, quand j'étais enfant, mon rêve, c'était d'être écrivain. Mais voilà, pour mes parents, agriculteurs qui avaient un métier difficile, etc. Écrivain, ça semblait être un métier très instable, très insécure. Et ils souhaitaient pour moi le meilleur. J'étais bonne élève et ils m'ont dit, fais un vrai métier, entre guillemets. Et puis, si un jour, tu as envie d'écrire des livres, tu écriras. Donc, j'ai choisi de faire de la médecine, je pense, pour nourrir une forme de besoin de me rendre utile. Je me disais qu'en étant médecin, ce serait forcément une profession utile aux autres. J'aimais bien les sciences, j'aimais bien comprendre comment fonctionnait le corps humain. C'était quelque chose qui m'attirait pas mal. Donc, j'ai fait médecine, je suis devenue médecin. Et puis, assez vite, je me suis un peu sentie à l'étroit dans ma case de médecin. Et j'avais besoin de plus de créativité, de renouer avec l'écriture. Et aujourd'hui, du coup, je suis aussi doctorante en philosophie. J'ai réduit mon temps de travail pour essayer... de nourrir ma pensée différemment. de prendre soin des idées, en plus de prendre soin de mes patients. Et puis, je consacre pas mal de temps à l'écriture aussi, plus de fiction, de poésie. Et puis, sur le chemin, vu que je ne me trouvais pas assez polyvalente, j'ai aussi passé un diplôme de professeur de yoga. Et donc, j'enseigne un petit peu le yoga depuis un an. Je suis aussi maman de deux petites filles. J'attends un petit troisième pour dans... un peu moins d'un mois. Voilà, je ne sais pas si ça fait... C'est vrai que je me suis pas mal définie par mes professions au final, mais bon voilà, ça donne un petit aperçu.

  • Speaker #0

    Je pense que c'est exactement la manière dont tu t'es livrée à nous la première fois que je t'ai rencontrée, où j'ai vu ton ventre rond, où je ne te connaissais pas du tout et où tu as énoncé la pluralité de tout ce que tu étais et tout ce que tu faisais dans la vie. Et je ne te cache pas que c'est vraiment la première étape qui m'a donné envie d'en apprendre un peu plus sur toi. Et la première chose que je me suis dit, c'est « waouh, elle s'est autorisée à être tout ça en même temps » . C'est la première chose qui m'est venue, moi, à l'esprit quand tu t'es présentée. Donc là, peut-être que c'est déjà la chose que les auditeurs, auditrices sont en train de se dire, c'est « waouh, elle s'est autorisée à être tout ça » . Mais j'imagine qu'on n'en arrive pas à être tout ça si facilement. Et tu le sais, dans ce podcast, l'idée, c'est que les femmes parlent aux femmes en particulier, mais on a aussi des auditeurs hommes. Et c'est de retracer ce parcours d'alignement que tu as eu. Donc là, effectivement, on t'imagine petite fille dans les vignes avec un papa, une maman, peut-être des frères et sœurs. Et en fait, on a envie de savoir quel a été pour toi le tout premier moment que moi, j'ai appelé le moment d'alignement, mais qui en réalité est plutôt un moment de désalignement. où tu as senti que tu avais vraiment besoin d'aligner ta tête, ton cœur et ton corps.

  • Speaker #1

    Oui, en effet, aujourd'hui, je me sens plutôt alignée, même si on pourra revenir dessus. Je pense que l'alignement, c'est un processus hyper dynamique. On évolue sans cesse, on se transforme sans cesse. Clairement, j'ai l'impression que sur le papier, on pourrait se dire « elle s'est autorisée à être tout ça à la fois » , mais ça a été un chemin. Pas forcément facile. Je me suis sentie la plupart du temps désalignée, on ne va pas se mentir. Donc, je vais d'abord parler du désalignement pour ensuite essayer de répondre à ta question d'un grand moment d'alignement, parce que je pense que j'en ai vécu un il n'y a pas si longtemps que ça et qui, je pense, me permet d'aujourd'hui accepter tout ce que je suis. Mais déjà, comme je te disais, j'ai censé s'être étirayée par à la fois, je pense, une âme un peu créative, artiste. Je ne dirais pas ce mot-là parce que je ne me sens pas artiste, mais en tout cas avec envie de créer. d'écrire, d'avoir pas mal d'imaginaire et tout. Et à la fois, j'étais une super bonne élève, très scientifique aussi. Donc, ça a toujours été difficile. À chaque fois qu'il y a eu des choix à faire, en première, quand on choisit S ou L, mes profs de français voulaient que je fasse L, mes parents voulaient que je fasse S, parce que S, ça gardait toutes les portes ouvertes. Bref, j'ai toujours un peu fait des choix par défaut. Finalement, je rentre dans ces études de médecine. Pas par défaut, parce que je me convainc que c'est super de faire ça et que ce sera un métier génial, etc. Mais en fait, dès la première année de médecine, ça s'est bien passé. Puis en fait, on a la tête dans le guidon, on passe le concours. On ne se pose pas tant de questions que ça. Je me souviens de me sentir, pour le coup, d'avoir un espèce de mini flash d'alignement. Je suis sur mon vélo, je viens d'apprendre mes résultats au concours et que je suis reçue en deuxième année. Et là, je me dis, waouh, génial, c'est trop bien et tout ça. Puis en fait, des gringolades assez rapides dès la deuxième année de médecine. En fait, je dirais que de la deuxième... à la sixième année au moment où on passe l'internat. Tous les ans, je me demandais un peu, mais qu'est-ce que je fous là ? Je ne me sentais pas du tout alignée avec mes autres amis, les autres étudiants en médecine autour de moi. À l'époque, je crois aussi que je mettais pas mal la responsabilité sur le système d'enseignement de la médecine qui était un peu old school, par l'hôpital qui ne va pas forcément très bien. Et en fait, dès que tu fais des stages assez rapidement, tu te rends compte qu'il y a des trucs qui clochent un peu. D'avoir une sorte de déception et de ne pas forcément sentir à ma place. Je me revois dire à mes parents, en fait, j'aurais dû faire Sciences Po. En fait, je n'aurais pas dû faire ça. Et en fait, une fois que tu es dans les études de médecine, tu te dis quand même, c'est bête de quitter le navire. J'aimais quand même ça. J'aimais les gens. J'aimais apprendre des choses intéressantes sur le corps humain, la physiopathe, les pathologies, la pharmaco et tout. Mais bon, bref, des années un peu inconfortables quand même. Puis voilà, tu continues d'y aller parce que tu te dis que tu auras un métier à la clé, un chouette métier. Bon, tu serres un peu les dents. Et puis vient l'internat. Et là, en fait, désaligné encore. Tu commences à bosser, tu es à l'hôpital, tu gagnes ta vie, tu te dis indépendant par rapport à tes parents.

  • Speaker #0

    Et en fait, moi, je me pose la question parce que tu dis que tu es bon élève. Effectivement, déjà, la première chose que j'ai envie de dire quand je t'entends, c'est comme tu l'as très bien dit, tu t'es persuadé que c'était la bonne chose pour toi. Donc toi, tu étais à fond, même si derrière, il y avait une espèce de petite voix qui te grattait en te disant « Je ne suis pas tout à fait à ma place » . tu arrives quand même à passer cette première étape et tu passes la deuxième étape. En fait,

  • Speaker #1

    à chaque fois, c'est vrai que je passe les examens haut la main. J'ai toujours des super résultats parce qu'en fait, je suis besogneuse, travailleuse. Je ne veux pas décevoir mes parents. Oui, j'étais contente de bien réussir. En fait, ce qui est compliqué, et comme tu dis, ça gratte, c'est que tu as une partie de toi qui est quand même contente de faire ça, mais une autre qui, petite voix, n'arrête pas de dire en fait, est-ce que je n'aurais pas été mieux ailleurs ? Mais en fait, le truc, c'est que tu... je pense que je suis une personne « raisonnable » , très souvent, tu as une espèce d'autre petite voix qui te dit « oui, mais l'herbe du voisin, elle n'est pas toujours plus verte. » Tu n'arrêtes pas de te dire que tu serais mieux ailleurs, mais tu serais mieux où vraiment ? Parce que les autres parcours ne sont pas forcément imparfaits non plus. Après, tu finis toujours par te dire « est-ce que c'est que je suis une éternelle insatisfaite ? Est-ce que je suis trop exigeante ? » Finalement, c'est plus confortable de rester là où tu es. En fait, ces petites voix qui parlent en te disant « t'es pas à ta place » , t'arrives facilement à les faire taire, en fait, j'ai envie de dire, jusqu'à un certain point.

  • Speaker #0

    Oui, mais justement, je pense que les personnes qui nous écoutent, il y a beaucoup de personnes qui sont soit dans des gros, gros moments, tu vois, où ils se cherchent, ou je sais qu'il y a aussi des jeunes qui nous écoutent et qui se posent des questions, tu vois, un peu comme s'ils avaient un problème de ne pas avoir cette illumination lors des études, où vraiment, ils sentent que c'est pas exactement le bon endroit. Je trouve que c'est intéressant d'avoir ton exemple et on va voir la suite de ton parcours pour te dire que même au début de tes études, ce n'était pas forcément évident pour toi.

  • Speaker #1

    Non, tout à fait. Et après, on va poursuivre, mais je ne regrette rien de tout ce que j'ai fait avant. Je regrette vraiment. Il y a eu après des moments où j'étais peut-être un peu en colère, où je me dis finalement, je me suis trop conformée à une norme sociale. J'ai voulu faire plaisir et du coup, j'ai fait tous ces choix-là. Et en fait, ce n'était pas les bons. Aujourd'hui, je n'en suis plus. plus du tout là, je ne suis pas du tout en colère, je suis hyper apaisée et je me dis que finalement, tout ce qui s'est passé avant m'a appris énormément de choses et je n'en serais pas là aujourd'hui si je n'avais pas persisté dans ces études de médecine. Au final, on y vient. Mais voilà, en tout cas, on peut se sentir très désaligné assez tôt. Finalement persévéré, puis après je deviens interne. Et puis, après, c'est très prenant. Les internes hôpitales travaillent énormément, on fait tourner les services. J'ai appris beaucoup de choses, donc moi je suis devenue radiologue. Mais avant ça, j'ai fait un an de gastro-entérologie. En fait, j'avais choisi une première spécialité. Au bout d'un an, j'ai fait un droit de remords, je suis devenue radiologue. En fait, ça n'allait pas non plus à ce moment-là. Je ne me sentais pas du tout à ma place en gastro-entérologie, alors que c'était une spé que j'adorais. Mais en fait, l'hôpital va vraiment, vraiment mal et broie les humains. Et en fait, je me suis vue devenir un peu l'ombre de moi-même. Et je me suis dit que la formation que j'avais commencé à faire en gastroenterologie ne me permettrait pas de m'épanouir en dehors du travail. C'était tellement prenant, tellement difficile, etc. Bref, j'ai bifurqué à ce moment-là déjà une première fois. J'ai fait de la radiologie. La radiologie, c'est une spécialité passionnante, intellectuellement très nourrissante. C'est très scientifique. Je pense que ça venait combler un peu aussi. Ça venait nourrir plutôt. mon côté un peu geek, scientifique, etc. Mais il y avait d'autres inconvénients. C'est que j'étais un petit peu plus coupée des patients. J'étais moins dans le soin. Donc, assez vite aussi, de nouvelles questions. Mais est-ce que tu es vraiment à ta place ? Et puis, je pense, le coup de grâce. Je me suis sentie quand même désalignée, je pense, pendant toutes mes années de médecine. Même si j'ai toujours réussi à... Pas poker face du tout, mais ce que je veux dire, c'est que... Je n'étais pas marginalisée du tout. Je pense que c'était insoupçonnable pour les gens autour de moi que j'étais désalignée.

  • Speaker #0

    J'ai envie de rebondir là-dessus parce qu'effectivement, le désalignement peut être quelque chose qui est latent, sous-jacent, un espèce de questionnement. Mais comme tu dis, tu continues à avancer à ce moment-là. Et finalement, les autres possibilités sont peut-être alléchantes. Mais il y a cette fameuse petite voix qui te dit... Est-ce que c'est vraiment plus alléchant ailleurs ? Est-ce que l'herbe est plus verte ailleurs ? Tu le dis très bien. Et en plus, clairement, tu as parlé de choses très importantes qui, je pense, ont résonné beaucoup avec les auditeurs et auditrices. Clairement, tu vas devenir médecin en termes de normes sociales, en termes d'attente de ta famille, où tout de suite, tu as posé ça comme base. Tu répondais aussi à ce besoin de sécurité et de statut. finalement. Donc, c'est pas si simple de jeter tout ça à la poubelle. C'est vrai qu'il y a ce côté-là aussi. Et si on se remet à ta place, je trouve ça hyper intéressant que tu mettes tout ça en perspective comme jeune futur médecin et tout ce que ça implique. Et on peut imaginer tout ce qui pouvait se passer en toi.

  • Speaker #1

    Ouais, c'est exactement ce que tu décris. Je rappelle quand même que j'étais quand même satisfaite de plein de choses. Je pense que je suis quelqu'un de très curieux, sérieuse et tout. Et en fait, j'arrivais... Je veux dire aussi, j'avais assez de nourriture quand même pour rester. C'est-à-dire que j'aimais faire des beaux diagnostics en radiologie. J'ai trop aimé apprendre un tas de trucs. J'ai aimé le contact avec les patients. J'ai aimé mes collègues, mes chefs. J'ai aimé l'hôpital. Il ne faut pas non plus croire que ce que je vivais était un calvaire. Sinon, évidemment, je ne serais pas restée.

  • Speaker #0

    Et justement, je trouve que c'est ça qui est intéressant dans ton parcours. Et je pense que là, après, on va pouvoir voir les différentes couleurs, les différents vernis que tu as su ajouter pour justement te nourrir. Tu utilises beaucoup le mot nourrir, qui me semble hyper intéressant, hyper approprié. Et je pense que les personnes qui nous écoutent se disent mais oui, en fait, à aucun moment, on juge du fait que tu n'es pas été OK à ce moment-là, peut-être te poser des questions. mais C'est vrai qu'au micro des alignés, on s'autorise à se dire que oui, tu n'avais ni l'accord d'au-coup, ni des problèmes financiers. On est d'accord qu'on parle entre personnes avec beaucoup de chance dans la vie. On est des privilégiés. Mais ça n'empêche que ce podcast existe aussi parce qu'à l'intérieur de certaines d'entre nous, il se passe des choses et ça fait du bien d'avoir des espaces pour en parler.

  • Speaker #1

    Complètement d'accord. Et je pense que c'est important en effet de partager aussi ça parce que très longtemps, je me suis un peu flagellée. je le disais, je le répète, je me disais c'est peut-être moi le problème, je suis une insatisfaite. J'ai consulté pour ça. Et en fait, j'ai fini par comprendre que non, ce n'était pas une histoire d'insatisfaction, c'était que cette case-là, elle était trop petite pour moi et j'avais besoin de plus d'espace pour exprimer plein d'aspects de ma personne. Et donc, bon bref, ça c'est tout mon parcours d'étudiante en médecine, puis d'interne, puis de médecin. Et puis en fait, j'ai pris, je ne sais pas, j'ai vécu une sorte de crise existentielle, même si je ne sais pas si ce mot veut dire grand-chose, mais il y a une espèce de conjonction de plusieurs éléments. Je suis devenue maman, et ça je pense que plein de femmes à ton micro l'ont dit, mais la maternité, ça bouleverse profondément les femmes. Je pense qu'on se découvre, on se transforme, on se métamorphose, on a une forme de lecture du monde qui change. Ça, ça m'a... Ça m'a profondément transformée. Il y a eu la crise du Covid qui a été quand même... Dans le milieu du soin, on l'a vécu de manière assez étrange. Je pense que ça a mis plein de gens sur des chemins de reconversion aussi. Je pense que c'est des moments où on repense un peu notre façon d'exister. Et puis, en plus de tout ça, je ne sais pas si on aura le temps d'en parler, mais j'ai vécu une énorme crise d'éco-anxiété à l'été 2022. J'ai toujours été intéressée par les sujets environnementaux, par l'écologie en général. Et en fait, je ne pensais pas que ça m'arriverait parce qu'il me semblait avoir bien compris les enjeux climatiques, de biodiversité et tout. En fait, pas du tout. Je suis allée à une conférence en juin 2022 qu'une copine donnait et j'y suis allée juste un peu en me disant, bon, elle n'aura pas beaucoup de monde, donc j'y vais quand même pour qu'elle ait un peu de public. Mais je me suis dit, bon, je ne vais pas apprendre grand-chose. En fait, je suis sortie de là. Ça m'a fait une sorte d'électrochoc. Je pense que je n'avais jamais ressenti autant... Enfin, je ne sais pas, ça m'a fait un vrai bouleversement et j'ai vécu une vraie crise d'éco-anxiété, comme c'est décrit dans les bouquins, avec le U inversé, là où tu fais ton deuil. Tu vis toute une période où c'est vraiment la catastrophe. J'étais quasiment collapsologue. Enfin, voilà, j'ai vraiment... Ça m'a... C'était terrible, quoi. Et puis, à ce moment-là, en fait, je me suis aussi beaucoup abreuvée de lectures de podcasts. pour essayer de comprendre le monde d'une manière un peu plus systémique. Et en fait, je pense que c'est un vrai moment de transformation aussi, enfin tout ça. C'est que du coup, je me suis intéressée à plein de sujets sociaux, politiques, économiques, environnementaux, philosophiques. Ma vision du monde a été bouleversée. Et je pense que de vivre un peu toutes ces crises en même temps, enfin voilà, cette espèce de qui je suis en fait, justement, ça m'a aussi amenée à aussi lire, j'en parlerai à la fin peut-être, mais... D'autres bouquins un peu plus sur la recherche du soi profond, qui on est. Bref, tout ça m'a mis dans une espèce de dynamique de réflexion, de transformation. Et c'est là où, dans ce bouillonnement hyper inconfortable, je pense que pendant un an, j'ai été vraiment super mal à me dire qu'est-ce que je vais faire de ma vie. En plus, j'avais l'impression qu'il fallait que je porte un engagement. J'avais l'impression que j'avais un besoin d'engagement. notamment pour l'écologie. Je ne savais vraiment plus qui j'étais, donc j'ai suivi une psychothérapie. Je me suis vachement intéressée à tout ce que je viens de te dire. J'ai hésité à tout plaquer pour refaire une formation d'ingénieur agricole. Franchement, à un moment donné, je me suis dit qu'il ne faut pas que je revienne à la terre. Mes parents étaient agriculteurs, puis du côté de ma mère, ils sont vraiment agriculteurs de père en fils. Je n'ai que des générations d'agriculteurs au-dessus de moi. est-ce que il faut que j'arrête la médecine et que je devienne agri enfin Bref, et c'est à ce moment-là de ma vie où j'ai aussi rencontré des femmes médecins au parcours hyper différent de ce que j'avais vécu jusque-là, qui m'ont énormément inspirée, où je me suis rendue compte qu'on pouvait être à la fois médecin et à la fois d'autres trucs. Qu'on pouvait écrire des bouquins, qu'on pouvait reprendre ses études et faire des sciences humaines et sociales à côté, qu'on pouvait s'engager dans des assos, et surtout que la santé et l'écologie étaient liées. Et c'est un espèce de parallèle que j'avais. Pas fait jusqu'alors, en fait. Je ne sais même pas comment c'est possible, mais en fait, on nous en parle très peu de la santé environnementale en médecine. Et donc, c'est, je pense, au contact de ces femmes, qu'en fait, après, ce n'est que des rencontres. Je me suis inscrite dans une association, j'ai adhéré à une association qui s'appelle Alliance Santé Planétaire, où on est plutôt des soignants, mais il y a n'importe quelle personne de n'importe quel métier est acceptée et bienvenue plutôt. Et en fait, on pense la santé planétaire, c'est-à-dire en fait, on pense que la santé des humains est forcément reliée à celle de notre planète, à celle des animaux, à celle du vivant. Et puis voilà, j'ai rencontré des gens géniaux dans cet assaut. Je ne sais pas, un jour, j'ai cliqué sur un... J'étais dans mes vastes lorsque j'ai passé, je pense, des heures sur Internet à chercher des formations. Des fois, quand on est complètement désaligné et qu'on cherche... à se renouveler, en fait, on passe son temps à chercher des formations, des parcours, des inspirations, etc. Et je suis tombée sur un master de philosophie de la santé qui était à Bordeaux, à l'université Bordeaux-Montagne, à côté de chez moi. Et en fait, j'ai postulé à ce master. En fait, les inscriptions étaient fermées, mais le directeur du master m'a répondu dans la journée en me disant, oui, les inscriptions sont fermées, mais en fait, il nous reste encore quelques places. Si vous me faites un dossier ce week-end, vous l'aurez en secrétaire et je pense que ça passe. Du coup, j'ai fait le dossier le week-end même sans trop me poser de questions et j'ai été retenue au master. Et là, je crois que j'ai vécu un grand moment d'alignement pendant cette année de master de philosophie de la santé. En effet, je me suis sentie en accord avec mes valeurs, avec mes émotions, avec ce que j'avais fait, avec mon métier de médecin. Mais à la fois, mon côté littéraire et tout ça, enfin voilà, d'être... En fait, ce master est incroyable. C'est un master professionnel où il y a donc beaucoup de professionnels de la santé qui sont étudiants. Ça allait de 25 à 60 ans, des personnalités hyper variées, que des parcours de vie, mais incroyables, que des gens qui ont fait mille trucs. Et c'était dingue.

  • Speaker #0

    Et j'ai envie de rebondir sur ce que tu dis, parce que bon, déjà, on n'a pas envie de te couper.

  • Speaker #1

    Je suis désolée parce qu'en plus, je ne suis pas moula en parole.

  • Speaker #0

    Non, mais pas du tout. Non, en fait, c'est juste que tout à l'heure, tu m'as parlé d'une toute petite case. Tu vois, tu disais la case était trop petite pour moi. Et en fait, on avait l'impression que toi, tu n'avais qu'un seul besoin, c'était de créer des ponts avec d'autres sujets. Et en fait, finalement, l'image qui me vient, c'est un espèce de fil, de lien, qui commence à se tisser entre tous ces différents ponts. Et moi, ce que j'apprécie, et merci beaucoup de partager ça au micro des Alignés, c'est le fait que ce soit très inconfortable quand on est dans cette case qu'on sent trop petite, qu'on voit qu'il y a d'autres choses qui peuvent peut-être être source d'inspiration, peut-être te mener vers un toi, un toi Amélie, qui serait vraiment toi. Et je pense que les personnes qui nous écoutent vont se dire, mais oui, c'est exactement là ce que je suis en train de ressentir. Et ce que je trouve aussi très beau, et c'est aussi pour ça que les alunis existent, c'est comment le fait de rencontrer des personnes qui se sont autorisées à ouvrir d'autres portes, créer des ponts entre des matières, entre des sujets, fait que finalement, toi, tout à l'heure, tu as parlé de se nourrir. Tu arrives finalement à t'autoriser à te nourrir d'autres thématiques. Et c'est ça que je trouve hyper intéressant, de comment tu sortes de cette casse pour finalement commencer à tisser le lien et peut-être à t'autoriser à être... plurielle dans ce que tu es.

  • Speaker #1

    Oui, c'est sûr que c'est un peu le déclic de cette année de master. En effet, c'est vraiment à la fois de voir qu'il y a plein d'autres gens qui ont des vies plurielles et que ça ne les rend pas moins légitimes dans ce qu'ils font. Parce qu'après, je pense qu'en médecine, mais parce que je pense que j'avais projeté moi cette image-là, mais en médecine, on est quand même très... Enfin, c'est... Les médecins qui sortent des cases. Bon, maintenant, évidemment, le sujet m'intéresse. C'est que j'ai l'impression d'être une médecin qui sort des cases. J'ai rencontré d'autres profils un peu comme moi. Donc, je sais que je ne suis pas seule. Mais il y en a quand même peu. en fait la plupart du temps on est un peu sur des rails et moi Vachement longtemps, je me suis dévalorisée. Donc, je me suis dit, mais si tu deviens un médecin à mi-temps, est-ce que tu resteras un bon médecin ? C'était vraiment une vraie question. Et du coup, c'est vrai que quand on veut embrasser, on va dire, une activité un peu plus plurielle, parce qu'aujourd'hui, du coup, après ce master, je suis devenue doctorante. Donc, je dois consacrer du temps à ça. Je donne aussi des cours de philo à des soignants. J'ai écrit un bouquin. On pourrait dire que je me suis aussi complètement dispersée et que du coup, ça fait de moi un moins bon médecin. Ça, c'est vraiment ce que j'avais en tête. C'est hyper bête, mais rien que de se dire qu'on peut être médecin et autre chose, je me disais que les gens vont me prendre pour une folle. Et en fait, je me rends compte que c'est complètement une construction mentale. Parce qu'en fait, quand j'ai annoncé à ma boîte, quand j'ai annoncé à mes collègues et mes associés que j'allais bosser moins de temps en radiologie parce que j'allais partir en thèse de philo, etc. En fait, je n'ai eu que des retours ultra positifs. J'étais hyper étonnée moi-même. En fait, les gens m'ont dit, mais... c'est génial que tu fasses ça. Enfin, bon, voilà, j'ai eu des trucs comme quel courage, ou alors, c'est trop génial pour notre boîte d'avoir quelqu'un comme toi, en fait, parce que du coup, c'est trop bien les profils qui prennent du recul, qui essayent de voir plusieurs horizons et tout. tout le monde a été super valorisant et c'est là, en fait, où j'ai capté, où je me suis dit, ah ouais, en fait, c'est pas forcément mal, entre guillemets, d'être un peu slasheuse. Parce que jusqu'à présent, j'avais vraiment peur de ça, de me dire que les gens vont croire que tu es une moins bonne radiologue que les autres parce que tu consacres un peu moins de temps à ton activité clinique. Comme quoi, on peut aussi se mettre des barrières tout seul et s'inventer un espèce de schéma. Moi, j'avais vraiment l'impression d'être complètement coincée dans ma case de médecin et de jamais pouvoir en sortir. En fait, c'est faux, archi faux. Et je pense que pour... Moi, je suis médecin, mais j'imagine que tous les gens qui nous écoutent ont plein de profils différents.

  • Speaker #0

    C'est exactement ce que j'allais dire. Et finalement, tu vois, là, j'étais en train de lire un livre qui revenait sur la construction de qui on est en tant que personne. Tout à l'heure, tu t'es décrite en tant que littéraire ou scientifique. Ou en fait, très tôt, on devient un « ou » finalement. En fait, on devient absolument juste scientifique ou créative ou littéraire. Et en fait, très, très tôt, on nous met ça dans la tête. Et ça a très peu changé depuis les dernières années. Et c'est en ça que finalement se relier toutes ces différentes facettes de cette personnalité. En fait, en coaching, on parle de croyances limitantes. Ce sont des croyances, ce sont des injonctions qui sont dans nos têtes très, très tôt. Et même en tant qu'enfant. Donc, effectivement, pour s'en défaire, il faut y aller à coups de rencontres très inspirantes, de personnes qui nous montrent que c'est possible. Et effectivement, je trouve que c'est génial. Donc moi, la question qui me vient, c'est ce master qui finalement arrive à relier la santé, l'osophie. Qu'est-ce qui t'apprend, en fait ? Qu'est-ce qui va t'ouvrir comme porte ?

  • Speaker #1

    Franchement, je sais pas. J'ai passé une année absolument merveilleuse. C'est pour moi un grand, grand moment d'alignement. Il m'a apporté déjà beaucoup d'apaisement. Alors, je sais pas. Quand j'ai dit ça, en soutenant mon mémoire, à la fin de l'année, mes profs, ils me disaient, mais c'est très bizarre que tu... que je dis ça parce que d'habitude, au contraire, la philo, ça mène plus de questionnements et de... Enfin, pas forcément de l'apaisement. Et en fait, moi, ça m'a beaucoup apaisée parce que je pense que quand je suis arrivée... Je vous parlais de ma crise d'éco-anxiété, etc. En fait, je me suis tellement abreuvée de plein d'ouvrages, etc. J'avais une vision quand même assez radicale, je dirais, des choses. Presque une forme d'envie de révolution, de changement complet du système. J'étais très en colère, je ne sais pas. Très en colère contre notre modèle. capitaliste, extractiviste qui détruit la planète et qui détruit les hommes et qui détruit le vivant. J'étais un peu peut-être trop... Enfin, pas pleine de certitude, mais j'avais l'impression d'avoir compris des choses, d'être en colère et d'être...

  • Speaker #0

    révolutionnaire. Et en fait, ce que m'a amené ce master, déjà rien que pour ce côté-là, un peu de remise en question totale de la société, c'est que ça m'a amené vraiment de la pensée complexe. En fait, en philosophie, on est évidemment, chacun a son avis sur un sujet, mais en tout cas, en philo, on essaye d'être le plus, j'allais dire, je ne sais pas vraiment d'adjectif parfait, mais on essaye de se faire un peu tout le temps l'avocat du diable. Enfin, du moins, on essaye de prendre à chaque fois des idées complètement au pire. presque opposés, c'est le fameux thèse-antithèse-synthèse, mais on essaye de prendre deux chemins, deux courants de pensée très différents, de vraiment approfondir au max les deux courants de pensée pour arriver à ensuite faire une espèce de contre-argumentaire, etc. Et ensuite, soit on essaye de se positionner plutôt pour un chemin ou l'autre, ou bien de chercher une troisième voie. Moi, j'avoue, j'aime bien ce concept. En tout cas, on essaye d'aborder vraiment une pluralité d'idées, de façons de lire le monde. Et en fait, moi, ça, ça m'a amené beaucoup d'apaisement parce que je me suis rendu compte que, c'est pas que ça m'a déradicalisée parce que j'étais pas radicalisée, mais ce que je veux dire, c'est que ça m'a amené de la nuance, de l'humilité, de la complexité, et de me dire, en fait, tout peut être toujours critiqué. Et le but, c'est d'essayer de naviguer dans un monde hyper complexe. toujours en maintenant le dialogue avec les autres. En fait, je me suis rendu compte que si on se polarisait trop, en fait, on rompait le dialogue. Et je pense que ça me touche beaucoup ce que tu dis avec cette histoire de faire des ponts, faire des liens. Moi, c'est vraiment ce que j'ai envie de faire aujourd'hui. C'est faire des ponts entre la santé et l'écologie, faire des ponts entre la santé et la créativité, le récit et le soin, le politique et le soin, de faire du lien entre les gens, entre des univers différents. Et donc, je me dis que j'ai l'impression d'avoir une espèce de mission de ça, d'être dans le lien, dans le dialogue. Et en fait, dans ce master, déjà, ça m'a apaisée. Puis en plus, le master était construit pour qu'il y ait du lien, parce qu'en fait, c'est un master assez unique en France, où à chaque fois que tu as des cours, tu as un soignant ou soignante, enfin quelqu'un issu du milieu du soin, et un philosophe ou un économiste. On a eu aussi, voilà, on a eu philosophe, économiste de la santé, juriste. Enfin, après, voilà, tu as des... professions à dire universitaires en sciences humaines et sociales, sociologues aussi on a eu. Et à chaque fois qu'ils dialoguent, rien que le master est construit dans un dialogue permanent entre des enseignants-chercheurs et des soignants qui vivent des choses sur le terrain. Donc déjà, ce modèle-là, il est absolument magnifique parce qu'il met en lien toujours ce qu'on vit et une pensée philosophique qui permet de prendre du recul sur ce qu'on vit, justement. Donc ça, c'était merveilleux. Et puis après, j'avoue, j'ai eu la chance de tomber dans une promo incroyable. où il y a eu des liens humains hyper forts. C'était une très belle expérience humaine aussi. Et donc, tout ça m'a profondément transformée. Et là, je crois que ça faisait depuis le lycée que je m'étais... Enfin, je ne sais pas, même depuis toujours, je ne m'étais jamais sentie autour à ma place qu'en suivant ces cours de philo de la santé. On me disait en tout cas qu'on pouvait lier pensée philosophique et métier du soin. Et qu'en fait, tout ça, je te dis... Prendre soin des idées, prendre soin des gens, prendre soin du monde. Enfin voilà, qu'il y avait cette espèce de champ des possibles qui s'ouvrait à justement ma pluralité. Enfin, je sais pas, c'est comme si ce que je ressentais, ce que je pensais s'alignait avec un truc possible dans la réalité, en fait.

  • Speaker #1

    Oui, et tu vois, par rapport à ce que... Bon, déjà, j'ai envie de te dire merci de partager tout ça parce que je pense que ça va beaucoup parler. Et même si toi, tu parles de la santé et de la philosophie, je pense que les personnes qui nous écoutent pourront vraiment faire le lien avec d'autres thématiques qui leur sont chères. Peut-être que ce sera l'écologie, mais ça peut être d'autres engagements qui parfois sont assez lourds à porter. Et puis, comme tu le dis très bien aujourd'hui, quand on est dans un moment où on prend conscience de certaines réalités, il y a très souvent ce moment-là où en fait, on s'abreuve d'informations qui vont dans le même sens. Et donc, on se polarise, on se radicalise. C'est à la fois indispensable de prendre conscience des choses. Et en même temps, il y a une espèce de... de nécessité de prendre soin de soi. Je pense que tu connais le Schumacher College à Londres qui accompagne des militants pour qu'ils prennent soin d'eux-mêmes, pour faire émerger positivement des idées de leur cause, tout en se brûlant pas. Je pense que ça va beaucoup parler aux personnes ici qui nous écoutent et qui écoutent les alignés parce qu'ils ont un engagement et qu'ils ont besoin de se retrouver eux-mêmes. Donc, tout ça fait énormément de sens. Je suis un peu brouillon, mais parce qu'il y avait tellement de choses dans ce que tu as dit. Voilà, le sujet de l'engagement, de prendre soin et de créer aussi des espaces dans lesquels, ce qui me paraît aussi très juste et je le souligne, à la fois pour des environnements universitaires, mais aussi en entreprise ou j'imagine aussi dans le domaine de la santé ou peu importe, le fait d'oser mettre des professionnels qui travaillent dans des milieux très différents et de créer un dialogue et créer un espace dans lequel ils... Il y a ce dialogue et moi, je souris intérieurement quand tu dis cette promo est extraordinaire. Mais en fait, moi, ma conviction profonde, c'est quand tu crées un groupe et un espace, en général,

  • Speaker #0

    un espace quelque chose.

  • Speaker #1

    C'est très souvent très fertile, mais c'est vraiment une conviction que j'ai profonde à chaque fois. Et je souris intérieurement parce que quand tu mets des humains ensemble et qu'il y a cette volonté de créer un espace fertile et authentique entre les personnes. En général, c'est là où la magie arrive. Mais je le prends quand même comme une idée, comme un enseignement d'oser le faire.

  • Speaker #0

    Je ne sais pas combien de temps tiendra ce master, parce que du coup, c'est quand même compliqué pour eux, pour les financements, pour plein de raisons, parce que justement, ils sont un peu un master un peu atypique. Mais oui, je suis d'accord avec toi de faire dialoguer des gens de milieux différents, de professions différentes. En fait, c'est super riche. Et tu n'as pas d'un côté qu'un soignant à la tête dans le guédon qui te parle, ou d'un côté qu'un universitaire ultra perché qui ne sait pas de quoi il parle, il y a il théorise des trucs qu'il n'a pas vécu. Là, il y a vraiment cette rencontre des deux qui était super riche. Et je crois que maintenant, c'est ce que j'essaye moi d'incarner, parce que je ne serai jamais philosophe, dans le sens où je n'ai pas du tout le parcours académique pour devenir philosophe. Je resterai un médecin, mais ce que j'essaye d'amener, en tout cas dans les cours que je donne, dans les DU, dans certaines formations, etc. C'est vraiment ça que j'essaye d'amener, qu'on peut être un peu hybride, mais qu'en fait... ça peut aussi apporter des choses aux gens, c'est-à-dire à la fois avoir un pied dans le monde réel, entre guillemets, du terrain, et quand même s'autoriser une espèce de prise de recul pour essayer de développer sa pensée critique et sa réflexion. Parce que je pense que c'est en amenant de la pensée critique et de la réflexion que justement, soi-même, si on se pose des questions, on arrivera mieux à entendre la parole de l'autre, même si elle est différente de la nôtre. Bref, j'essaye de cultiver ce... Je ne suis pas trop universitaire, je ne suis pas juste du terrain, je suis un peu entre les deux, mais je pense que ça peut être utile pour les autres.

  • Speaker #1

    Et ce côté d'être un « et » et plus un « ou » , tu te sens comment par rapport à ça ?

  • Speaker #0

    C'est pas mal. Justement, je pense qu'on se sent les deux pieds sur la terre. Je ne sais pas, en effet, on se dit qu'on est riche, qu'on est capable d'amener plusieurs choses. On est dans le lien et pas dans la séparation. Enfin, t'as raison, oui, c'est vrai que ce truc d'être ou ça, ou ça, ou ça, c'est terrifiant, en fait, qu'on nous mette dans des cases. Après, voilà, il y a vraiment tout un sujet sur l'hyperspécialisation. C'est un peu ce que tu dis avec tes littéraires ou tes scientifiques. On nous a un peu fait croire que pour avoir une espèce de cohérence linéaire, pour être performant, etc., il fallait s'hyperspécialiser. moi je le vois clairement en médecine parce qu'on fait que s'hyperspécialiser, on est médecin puis ensuite on est médecin, moi j'étais spécialiste en plus d'être spécialiste je me suis spécialisée en imagerie de la femme et imagerie diététique, on est toujours dans ce truc de toujours s'hyperspécialiser pour être l'expert d'un truc et d'être trop fort et d'être reconnu pour ça, donc il y a vraiment cette valorisation de l'hyperspécialisation et on en revient un peu là, il y a pas mal de penseurs qui critiquent ça, il y a un philosophe comme Edgar Morin qui maintenant dit qu'il faut de la pensée complexe justement en fait c'est pas parce qu'on est hyperspécialisé que... Le problème de l'hyperspécialisation, c'est que ça crée aussi des espèces de couloirs où personne ne communique entre eux, où on n'arrive pas à prendre en compte les pensées des systèmes. Enfin bref, je pense qu'on en revient de plus en plus. En tout cas, dans le milieu universitaire, ils essayent de recréer des formations interdisciplinaires, pluridisciplinaires. C'est quand même un truc qui revient. J'ai quand même le sentiment que ça va un peu plus émerger et les gens s'autoriseront peut-être aussi à être plus des « et » que des « ou » Grâce à ce... cette déconstruction un peu de l'hyperspécialisation.

  • Speaker #1

    Et donc maintenant que tu nous dis que tu as vraiment réussi à devenir un OU, j'ai hâte de savoir quel lien tu vas tisser. Quels sont les projets dont tu as envie de nous parler une fois que ce grand moment d'alignement est arrivé ? Qu'est-ce que tu es en train de construire ? Ça,

  • Speaker #0

    c'est pour le coup une question. Je ne sais pas si je peux y répondre parce qu'en fait, je n'ai pas de visibilité sur la suite. Je crois que tous ces grands moments d'inconfort, et puis cette espèce d'alignement qui a surgi du chaos m'ont redonné confiance. Je ne sais pas comment dire, j'ai une forme d'espérance aujourd'hui et en fait j'ai l'impression de me dire que je fais confiance un peu en l'avenir sans savoir vraiment ce qui m'attend parce qu'en fait le projet à court terme c'est quand même de réaliser ma thèse de philo mais je pense que j'en ai encore pour trois ans, trois ans et demi et après en fait je ne sais plus. pas du tout comment tout ça va se mettre en place. En fait, je me dis que je fais les choses au fur et à mesure et que j'ai l'impression en tout cas que c'est plutôt dans les rencontres humaines. Il y a des choses qui vont se décider un peu pour moi. Par exemple, cette année, j'ai eu la chance de donner des cours de philo à des soignantes dans le cadre de l'école de santé intégrative MU Médecine qui a été fondée par Chloé Bramy. Par exemple, Chloé, c'est quelque chose dont elle m'a parlé l'année dernière. Elle m'a proposé ce projet en me disant « qu'est-ce que tu en penses ? » et puis voilà, on y est allé. Et en fait, c'était extraordinaire. J'ai adoré donner ces cours. J'ai l'impression que pour l'instant, il n'y a pas vraiment de trajectoire. Je sais juste que je veux continuer de travailler sur des sujets de santé, de politisation de la santé, d'environnement. Moi, je dis que c'est un peu mon militantisme intellectuel. Ça, c'est ma forme d'engagement, ma façon d'agir sur le monde. Après, je pense que je resterai radiologue à côté parce que pour l'instant, je ne me vois pas du tout. Je ne sais pas du tout dans mon projet d'arrêter. d'être médecin, parce que je pense que c'est important d'avoir un pied dans la réalité toujours. J'ai des projets aussi. J'ai écrit un roman il y a quelques années qui va être publié en septembre. Donc, pareil, je me dis que ce roman va être publié. Je ne sais pas du tout quel écho il aura, quelle résonance. Est-ce que ça va aussi... Parce que ça parle aussi de soins. Enfin, c'est complètement une fiction, mais ça parle du sujet épineux de la fin de vie. Donc je me dis, voilà, après, est-ce que ça va amener des débats ? Enfin, j'en sais rien. Tu vois, en fait, je me dis que chaque pas en amène un autre. Mais c'est sûr que je ne sais pas vraiment où je vais. Mais je me dis que tant que je suis à l'écoute, que j'essaye de garder cet alignement, en tout cas, de ce moment de grâce que j'ai vécu pendant mon master, d'essayer d'être à l'écoute de ce que je ressens, de ce que je pense, de ce que je fais, des gens qui sont autour de moi, des écosystèmes qui se créent et tout. J'ai l'impression que je ne manquerai pas d'idées. j'arriverai à... continuer mon chemin.

  • Speaker #1

    Alors, je pense que les auditeurs, auditeuses se disent non, on ne se fait pas du tout de soucis sur sa capacité à avoir des idées. Et justement, c'est exactement ce que je me disais, c'est pour des personnes qui nous écoutent, moi j'aime bien demander quels sont les conseils enseignements que tu as envie de partager. Et peut-être, là je vais juste aiguiller sur peut-être une chose, c'est quand on a plein d'idées, comment on se lance en fait sur sur... les projets, aussi divers soient-ils, peut-être aussi éloignés de son enseignement de départ, de qui on est au départ, comment on se lance ? Parce qu'en deux secondes, tu viens quand même de nous dire que tu avais écrit un roman, une fiction en parallèle de tout ce qu'on vient de se dire.

  • Speaker #0

    C'est sur plusieurs années.

  • Speaker #1

    Mais voilà, dans ces enseignements, déjà, quels sont-ils ? Et puis peut-être un petit focus sur comment on se lance.

  • Speaker #0

    Alors déjà je commencerais par une chose quand même et tu l'as dit tout à l'heure et j'ai trouvé ça trop bien que tu remets ça dans son contexte je suis quelqu'un de privilégié aujourd'hui dans le sens où j'ai une profession qui me permet de travailler à mi-temps et de suffisamment en tout cas gagner ma vie pour pouvoir satisfaire aux besoins de ma famille et puis j'ai aussi la chance d'avoir un conjoint qui m'aide un peu dans cette qui m'aide matériellement aussi enfin je veux dire sur cette espèce de transition parce qu'en fait ma thèse elle est pas financée j'ai pas de contrat doctoral et tout donc en fait la plupart des choses que je fais aujourd'hui c'est du bénévolat voire du quasi bénévolat quand tu donnes des cours dans des DU t'es très peu payé donc voilà juste pour garder ce côté matériel en tête évidemment parce qu'on pourrait dire il faut du courage il faut de l'audace enfin j'en sais rien mais j'ai quand même la chance d'avoir un métier qui me permet de le faire et un soutien familial qui me permet de le faire Donc ça, c'est quand même un premier truc.

  • Speaker #1

    Et merci de le dire ici.

  • Speaker #0

    Ce n'est pas juste un truc pour remettre tout à zéro. Déjà ça. Ensuite, les conseils que je donnerai avant de se lancer, c'est très court, trois petites phrases, mais en gros, déjà, ce n'est pas parce que vous n'êtes qu'on. On n'a pas besoin d'être dans une case pour être légitime et que parfois, c'est en créant nous-mêmes nos propres formes qu'on arrivera à le mieux. contribuer justement pour la société ou pour les gens qui nous entourent, qu'on contribuera le mieux. Oser à être inclassable, oser être pluriel, à être complexe, parce qu'en fait, à chaque fois que vous osez être ça, ça ouvre un espace pour les autres femmes autour de vous, pour les autres hommes. En tout cas, comme on a vachement parlé de ça, moi, j'ai été énormément inspirée par plein de femmes, que des femmes d'ailleurs. J'ai vraiment trois femmes en tête qui m'ont beaucoup inspirée et qui... elles, en étant complexes, inclassables et plurielles, m'ont permise, m'ont autorisé peut-être à l'être aussi. Et puis, sur ce côté, on se lance. Mais ça, c'est pareil, parce que j'ai la chance d'avoir un soutien quand même matériel. Mais je pense qu'il faut parfois oser aller dans une direction, même si on n'a pas un plan de route. complètement établie. Ce n'est pas parce que tout n'est pas... Moi, j'ai l'impression qu'en tout cas, ce qui m'a rendue forte, ce n'est pas forcément de tout maîtriser, mais c'est plutôt justement de me lancer dans des projets dont j'avais envie sans savoir exactement où ça allait aller. Mais finalement, à partir du moment où on se met dans une espèce de dynamique d'action, en fait, il se passe des trucs. Il se passe des trucs parce qu'on rencontre des gens, parce que... Après, il faut de la patience. C'est un peu facile aussi pour moi de dire, par exemple, mon roman qui va être publié là, c'est un projet, ça fait quatre ans que je le mène. Donc voilà, il faut parfois être patient.

  • Speaker #1

    La ténacité, finalement.

  • Speaker #0

    Voilà, la ténacité. Et alors du coup, je rajouterais un dernier truc. C'est que du coup, j'ai l'impression qu'il faut quand même avoir une forme de confiance, même s'il peut y avoir des moments de désespoir, mais des moments où on se dit, mon Dieu, je me suis lancée dans cette idée folle. Alors qu'en fait... s'en train de merdouiller, puis en plus de ces gestes-là qu'on apprend. Mais pour avoir un peu confiance et justement, je pense, pouvoir raccrocher avec les gens autour de nous qui nous aident à continuer d'avancer, je pense qu'il faut d'abord avoir, enfin, prendre le temps de savoir qui on est. C'est ce qu'on disait au début, mais en tout cas, d'essayer de se reconnecter avec le soi profond, c'est-à-dire avec vraiment qui on est au fond. font, enfin en tout cas, des choses, qu'est-ce qui nous anime ? Il faut prendre soin de son intériorité pour pouvoir ensuite aller vers les autres et s'engager pour le monde. Et ça, c'est pas évident parce que comme tu le disais très justement, on a eu plein d'injonctions, plein de normes sociales depuis qu'on est gamin. En fait, on s'est conformé à toutes ces normes parce qu'on a envie de plaire, on a envie de reconnaissance, on a envie d'être performant. Et je pense qu'il y a plein de gens qui... Moi, la première, on s'égare du coup. À force de vouloir répondre à ses attentes extérieures, on en oublie qui on est. Et ce n'est pas un truc narcissique, je pense, de dire qu'il faut prendre soin de soi. Je pense que c'est en tout cas un pilier essentiel pour pouvoir s'engager pour les autres et pour le monde. Ça, c'est sûr.

  • Speaker #1

    Il y a un côté, c'est un côté que je trouve assez intéressant, qui est développé dans les théories d'organisation d'entreprise, dans lequel, en fait, finalement, la singularité des humains, qui on est de manière très profonde, va... permettre à créer des entreprises, un système, un écosystème qui ira bien. Et c'est plutôt dans le fait de se conformer dans ce qui doit être bien que notre singularité va être complètement étouffée et que finalement, on ne va vraiment pas avoir l'apport au monde qu'on devrait avoir. Alors, je sais qu'il y a des personnes, effectivement, tu le disais très justement, là, on parle toutes les deux parce qu'on a le temps de se poser et de réfléchir. Mais en même temps, je pense qu'il faut aussi se dire, moi je pense que c'est important, qu'il y a des gens qui ont le temps, mais qui se conforment et qui finalement n'ont pas un apport au monde qui est juste pour eux, alors qu'ils pourraient le faire. Donc on sait qu'on parle entre personnes privilégiées, mais comme tu dis, prendre soin du monde, c'est d'abord prendre soin de soi, de sa singularité. Je suis vraiment fondamentalement persuadée que si chacun et chacune trouve sa place, alors le monde ira clairement beaucoup mieux. Donc, c'est un peu le leitmotiv de ce podcast. Et donc, je trouve ça très chouette que tu en parles ici. Donc, merci beaucoup pour ces précieux conseils. Je pense qu'ils vont résonner énormément pour les personnes qui nous écoutent, qui peut-être sont au milieu du guet, tu vois, qui sont déjà, qui sont en cette case un peu trop petite.

  • Speaker #0

    Allez-y, foncez.

  • Speaker #1

    Voilà. Et puis aussi, se dire que ce n'est pas immédiat. Merci beaucoup de l'avoir dit. Ça prend du temps. Ça prend du temps, ça gratte, c'est compliqué. Et parfois, c'est simplement une histoire d'oser prendre un week-end. pour postuler à un DU, à une formation qui, sur le papier, a l'air chouette, mais on ne sait pas vraiment ce que ça va donner. Et voilà, il faut oser, finalement. J'ai envie de te poser la question, parce que je sais que ce sera génial et riche d'enseignements, comme tu as l'air d'être friande de médias. Dans les Alignés, on aime partager des médias, podcasts, ressources qui t'ont nourri, toi, pour aller sur ton chemin.

  • Speaker #0

    Alors, je peux peut-être partager... Alors, il y a podcast et puis ouvrage, ou du moins, personne qui écrive. Oui, dans les podcasts, un que je recommande vraiment, c'est Loin des yeux, loin du care de Eva Sadoun. Eva Sadoun, qui est une femme assez formidable. Voilà, c'est des épisodes sur le care. En tout cas, c'est riche d'enseignements parce que ça montre à quel point le care, donc le soin, manque à plein de structures autour de nous. Et comment il faudrait en ramener pour un peu... rendre notre société plus... Parce que le care, c'est essentiel à la vie et pour un peu réhumaniser, redonner un second souffle à toutes nos structures collectives.

  • Speaker #1

    Alors peut-être le care, pour les personnes qui nous écoutent, ils ne connaissent pas forcément. Est-ce que tu as envie de nous partager une espèce de définition de ce que c'est ?

  • Speaker #0

    L'éthique du care, c'est une pensée des années 80. Ça a émergé en tout cas d'une... à la base d'une psychologue morale qui s'appelle Carol Gilligan. C'est une pensée féministe, qui a ensuite été politisée un peu par Joan Tronto, mais en gros, c'est l'idée que nous sommes toutes et toutes vulnérables et que le soin qu'on s'apporte mutuellement fait tenir nos sociétés. C'est un peu compliqué, mais c'est aussi une manière assez différente de lire le monde, justement, parce qu'en fait, la philosophie morale, elle a été longtemps pensée par des hommes. qui prône que l'individu est autonome, n'a besoin de personne autour de lui, est un écosystème à lui-même, etc. Les penseuses du CAIR, elles remettent un peu, elles disent non, pas du tout, en fait, on a tous besoin les uns des autres, on est tous un espèce de réseau de liens et du coup, le fait qu'on soit tous en lien les uns avec les autres engendre des responsabilités et une manière différente, idéalement, d'organiser nos sociétés. Voilà, en tout cas, c'est... C'est mettre du soin partout dans nos relations, remettre de l'attention. Enfin bon, si vous voulez vous embarquer là-dedans, je pense que d'écouter le podcast Loin des yeux, loin du cœur, c'est top. Voilà, ça c'est le premier. Après, bon, ça c'est purement écolo pour ceux qui s'intéressent un peu à la cause écologique. Il y a le podcast Green Letter Club qui est vraiment génial. Moi qui m'a vraiment appris énormément de choses sur l'écologie au moment où j'en avais besoin. Et après, sur un terrain plus philosophique, je citerai trois auteurs. Alors en un, je citerai Inès Weber, qui est une psychologue pour le coup, mais qui a écrit un bouquin qui s'appelle « Être soi, une quête essentielle pour le monde » . Peut-être que je déforme un peu le titre, mais c'est chez Gallimard. Et justement, moi, j'ai été bouleversée par cette lecture. Justement, Inès Weber, elle dit à quel point on s'est complètement décrochée de notre... de notre soi profond et qu'en fait, on a une espèce de moi social qui gouverne un peu notre vie et que le seul moyen d'être vraiment utile au monde et de se battre et de s'engager et de contribuer à un monde plus juste, plus relié, etc., c'est de déconstruire plein de choses, d'enlever un peu plein d'espèces de couches d'oignons et d'essayer de voir, au fond, ce qu'on aspire, ce qui nous rend heureux. Enfin, voilà. Donc, elle, elle est psychologue et elle dit qu'en fait, elle voit sur son divan plein de gens qui vivent des crises existentielles les allées. elle essaye de donner des réponses, de dire que c'est peut-être la société qui nous a justement enfermées dans ces cases, mis plein d'injonctions sur le dos et que quand même, le véritable moyen de contribuer, c'est quand même d'aller chercher au fond de nous. Ça n'a rien à voir avec le développement personnel, ça n'est pas un égotrip, c'est vraiment quelque chose de nécessaire. Et après, dans la même veine, du coup, il y a Abdenour Bidar qui a écrit un bouquin qui s'appelle « Les tisserands » qui est merveilleux, qui est un peu dans la même idée, mais de dire... que pour lui, il faut qu'on prenne soin des liens qui ont été abîmés. Et donc, il dit qu'il y a trois liens importants. C'est le lien à soi, le lien aux autres, le lien au monde. Et lui, en fait, il développe cette posture du méditant-militant qui dit que pareil, en fait, il faut soigner, prendre soin de son intériorité pour pouvoir ensuite agir sur le monde. Et tu parlais tout à l'heure du Schumacher College. Mais voilà, de cette idée de si on ne veut pas partir en burn-out militant, il faut aussi prendre soin de soi. de vraiment relier que Pour lui, il dit que l'un ne doit pas aller sans l'autre. On ne peut pas faire que méditer et rien faire ou que être dans la méditance. Il faudrait idéalement se nourrir de la méditation pour pouvoir ensuite agir sur le monde autour de soi.

  • Speaker #1

    Et encore une fois, finalement, tu vois, ça devenir un « ou » .

  • Speaker #0

    Oui, et en effet, dire qu'on peut être les deux à la fois, nourrir une forme de spiritualité ou de vie intérieure fertile pour qu'ensuite on puisse... Mieux prendre soin des autres et du monde. Et ça, je pense que tout le monde l'expérimente. Lui, c'est un philosophe, mais il l'explique avec ses mots de philosophe. Et c'est génial. Mais je pense qu'on a tous ressenti que quand nous, on a les batteries à plat, qu'on est perdu, etc. On est incapable d'avoir une écoute active pour quelqu'un qui a besoin de nous. C'est difficile de s'engager pour des projets qui vont nous demander l'énergie parce qu'on n'en a déjà pas. Je pense que c'est un peu du bon sens.

  • Speaker #1

    Oui. Et en même temps, c'est un peu ce qu'on se disait tout à l'heure. Le côté militant, la case militant, parfois, on se sent... Tout à l'heure,

  • Speaker #0

    tu as utilisé un mot pour te décrire. Oui, je vais dire que...

  • Speaker #1

    Tu as dit que tu étais intellectuelle.

  • Speaker #0

    Oui, une forme de... J'essaye en tout cas d'être... Oui,

  • Speaker #1

    de militante intellectuelle.

  • Speaker #0

    Oui,

  • Speaker #1

    c'est ce que tu as utilisé comme mot. Et je me suis dit, ah, c'est drôle, parce que justement, le fait de mettre ces deux mots l'un à côté de l'autre, c'est quelque chose que j'avais rarement entendu en réalité. Et je pense que des personnes qui nous écoutent se disent que le militant, c'est celui de la rue. C'est celui qui va être au premier rang des manifestations. Et donc, encore une fois, s'autoriser à être toi-même et être dans une forme d'engagement qui te correspond.

  • Speaker #0

    En fait, c'est exactement ça. Pendant que je traversais ma crise d'éco-anxiété vénère, je me demandais même, est-ce qu'il ne faut pas s'engager pour Extinction Rebellion ? Est-ce qu'il ne faut pas ? Être dans Dernière Rénovation, et en fait, je me dis, mais ça n'est pas toi. T'enchaîner à une banque ou t'asseoir sur une voie, empêcher des voitures de circuler, ça ne te correspond pas. Donc en fait, je pense qu'en effet, chacun et chacune... peut mettre de l'engagement dans ce qu'il fait. Et moi, en fait, juste grâce à ce master de philo, je me suis rendu compte à quel point j'étais un peu une intello bisu qui aime bien être à la bibliothèque. Bon, OK, finalement, est-ce que ça ne va pas être ça, ma forme d'engagement ? Parce que c'est un terrain que j'aime bien, le terrain des idées, le terrain de l'écriture. Mais en fait, à nous de trouver, on peut être militant en étant agriculteur et faire de l'agroécologie. On peut être militant en étant une infirmière qui continue de prendre soin de ses patients d'une certaine manière. On peut être militant en étant coach professionnel et en remettant de l'inclusivité, de l'inclusion dans les boîtes. Je pense qu'en fait, pareil, militant, c'est devenu un gros mot. Il y a un essai qui est sorti il y a pas longtemps qui s'appelle « Militer, verbe sale » d'une époque. En fait, on a décrédibilisé le militantisme. on l'a dévalorisé parce qu'en fait je pense que le système préfère des gens qui se conforment parce que c'est plus facile de driver une société comme ça, donc les militants maintenant en effet du coup le premier truc qu'on a en tête c'est genre éco-terroriste, des gars qui ont pété des bassines qu'on fait ci, qu'on fait ça, en fait je pense qu'il y a vraiment plein de formes de résister on peut peut-être plutôt utiliser ce mot de résistance que de militantisme parce que peut-être que c'est plus polissé entre guillemets et que tout le monde s'entend dessus mais en tout cas je pense qu'on peut tous résister à ce qui nous semble injuste avec les armes qu'on a et qui on est. Oui,

  • Speaker #1

    ce qui me fait penser au livre de Salomé Sacké, Résister. C'est vrai que c'est un mot qui devient assez actuel et qui est assez juste aussi. Donc, on retient ces ressources-là. Est-ce qu'il y a d'autres ressources que tu as en tête ?

  • Speaker #0

    Après, pareil, il y a... Non, après, des ressources... Moi, il y a un philosophe que j'adore qui s'appelle Jean-Philippe. Ceyron, qui pour moi est un penseur incroyable parce qu'il pense le soin, il pense l'écologie, il pense la poésie, la résistance poétique un peu. C'est un philosophe contemporain qui a écrit plein de bouquins. Je tous les recommande parce que il est super gentil dans la vraie vie. J'ai l'impression. J'ai eu quelques échanges très rapides avec lui. Pour moi, c'est un philosophe qui fait du bien à lire et qui est accessible à lire ou à écouter en podcast. Il n'a pas participé à des podcasts et tout. Et après, en termes d'inspiration, mais après, je ne sais pas, ça peut être une ressource aussi. Il y a une nana que je trouve formidable qui s'appelle Victoire Sato, qui a fondé un média qui s'appelle The Good Good. En fait, elle se bat un peu pour la mode responsable, on va dire. En tout cas, elle est au service de l'écologie dans le milieu de la mode. Et enfin, bon, après, c'est perso, mais vu qu'à la base, c'est une nana qui était radiologue. donc forcément moi ça me parle parce que je suis radiologue et qui elle pour le coup a carrément arrêté d'exercer pour se lancer complètement dans son média et elle pour moi c'est typiquement la femme plurielle parce qu'à côté de ça elle est aussi artiste collagiste, donc elle fait des oeuvres, elle est vraiment une artiste elle s'est lancée dans un projet d'architecture résiliente en Normandie je crois elle est en train de construire, de rénover un truc de ouf, une ferme qu'elle veut transformer en lieu d'échange, en lieu hybride de résidence artistique. Pour moi aussi, pour tous les gens qui se sentent pluriels et qui ont besoin de modèles, Victoire Sato, franchement, elle déchire.

  • Speaker #1

    On sent qu'on va l'inviter au micro des animés.

  • Speaker #0

    Je pense qu'elle aura plein de choses à dire.

  • Speaker #1

    Génial. Une question que j'aime bien poser, c'est qu'est-ce qu'on peut te souhaiter après tout ça ?

  • Speaker #0

    Merci. de bien vivre mon postpartum numéro 3 on peut me souhaiter je pense de garder la confiance même quand ça tangue même si je ne sais pas trop où je serai dans 3-4 ans de rencontrer des gens super sur la route de créer du lien tout le temps c'est ça d'être heureuse en lien en confiance et toujours créer des ponts Salut ! des espaces et de la réflexion.

  • Speaker #1

    Merci. Et pour les personnes qui ont adoré cet épisode, qui ont envie de te suivre sur ton chemin, comment on peut te suivre ?

  • Speaker #0

    Alors, j'ai un compte Instagram, où c'est mon nom, Amélie Cadier-Lauriau, où je poste peut-être pas suffisamment, mais en tout cas, je suis toujours hyper heureuse quand des gens m'écrivent, partagent. des petits morceaux de leur vie, des questions. Je trouve ça hyper précieux. Et pour l'instant, j'ai eu que des échanges super avec les gens qui m'ont écrit. C'est vrai que je ne partage peut-être pas assez régulièrement, mais j'essaye de mettre un peu de contenu de temps en temps. En tout cas, c'est un moyen de me contacter aussi et d'échanger, de créer des trucs. Et après, j'ai une page LinkedIn qui est quasiment morte. Mais pareil, j'ai... J'ai pour projet de la nourrir de quelques articles. Donc voilà, si vous avez que LinkedIn, je fais aussi. Sur ce réseau social, oui.

  • Speaker #1

    Et ton bouquin sort quand exactement ?

  • Speaker #0

    Mon bouquin, c'est un premier roman, c'est une fiction. Et ça sort le 11 septembre prochain. Et ça s'appelle « Avant que tu ne t'en ailles » .

  • Speaker #1

    Écoute, j'ai adoré cet échange. Merci beaucoup d'avoir partagé tout ça au micro des Alignés. J'espère juste... que probablement dans quelques années, on se fasse une autre session pour savoir où tu en es dans quelques temps et où t'as mené cet alignement, ce chemin d'alignement. Mais merci beaucoup,

  • Speaker #0

    Amélie. Merci à toi, Charline. Je suis vraiment ravie.

  • Speaker #1

    Merci beaucoup. À très bientôt.

  • Speaker #0

    À bientôt.

Chapters

  • Introduction et présentation du podcast

    00:06

  • Rencontre avec Amélie Cadiel-Loriot

    02:38

  • Qui est Amélie ? Son parcours de vie

    03:20

  • Moments de désalignement et d'alignement

    06:50

  • Crise d'éco-anxiété et transformation personnelle

    17:42

  • Le master en philosophie de la santé et l'alignement

    22:30

  • Projets futurs et engagement personnel

    39:50

  • Conclusion et ressources à partager

    58:10

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Description

Aujourd'hui, je suis ravie d'avoir à mon micro Amélie Cadier-Loriaud , une femme aux multiples facettes : médecin, doctorante en philosophie, professeure de yoga, écrivaine, et maman de trois enfants. Son parcours est une invitation à reconsidérer nos cases.


Dans cet épisode, Amélie nous raconte son cheminement, de la petite fille de la campagne rêvant d'être écrivaine à la médecin qui se sent à l'étroit dans sa "case". Elle nous partage les moments de désalignement qui l'ont menée à une crise existentielle , mais aussi les rencontres inspirantes et les décisions audacieuses qui l'ont aidée à tisser un lien entre ses différentes passions.


On parlera de la difficulté de s'affranchir du regard des autres , de la richesse de la pensée complexe , et de l'importance de la singularité. Amélie nous prouve qu'on peut être à la fois dans le soin des gens et le soin des idées, et qu'on peut s'engager pour le monde tout en trouvant sa propre place.


✨ Si veux en savoir plus sur Les alignées, file découvrir le site internet www.lesalignees.com ou sur mon LinkedIn dans lequel tu découvriras comment nous oeuvrons pour transformer le monde professionnel pour plus d'alignement des salarié·es et la mixité femme/homme.


Pour suivre Amélie :

Son instagram


Pour aller plus loin :

  • Eva Sadoun - Loin des yeux loin du care

  • Green Letter club.

  • Inès Weber - Etre soi une quète essentielle pour le monde.

  • Abdennour Bidar - Les Tisserands.


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Bienvenue sur Les Alignés, je suis Charline Moreau, consultante et coach en entreprise, et depuis plus de 3 ans, je tends le micro à des femmes qui ont osé aligner leur vie avec leurs valeurs. Depuis toujours, ce sont des conversations authentiques avec des femmes sur leur parcours qui m'ont permis de profondément questionner ma vision de l'ambition et de la place que je voulais prendre. Alors je me suis dit... que ces échanges intimistes pourraient inspirer d'autres personnes s'ils étaient diffusés plus largement. C'est comme ça que les alignés sont nés. Tous les 15 jours, je partage avec toi des discussions inspirantes où l'on parle de tout. De pro, de perso, de passion, de reconversion, de réussite, de doute ou encore d'engagement. Parce que trouver sa place en tant que femme dans la société est un cheminement. Et chaque parcours peut nous éclairer. Si ce podcast te plaît déjà, j'ai besoin de toi pour le faire grandir. Partage-le à une personne qui en a besoin. Et surtout, laisse-moi un commentaire et 5 étoiles sur ta plateforme d'écoute préférée. Je sais, ça n'a l'air de rien, mais c'est vraiment très utile pour moi et pour faire connaître ce podcast. Maintenant, je laisse la place à ce nouvel épisode des Alignées. Bonjour Amélie !

  • Speaker #1

    Salut Charline ! Tu vas bien ? Très bien, merci ! Écoute,

  • Speaker #0

    je suis ravie de t'avoir ici à ce micro. Il faut savoir qu'on est l'une en face de l'autre à Bordeaux City, avec une vue à 360 sur Bordeaux qui est assez exceptionnelle.

  • Speaker #1

    Magnifique !

  • Speaker #0

    Voilà, et je suis très très heureuse d'être venue jusqu'à toi pour cette interview, parce que ça fait quelques mois qu'on s'est rencontrés en vrai, et je sais que cette interview va pouvoir... pouvoir éveiller des consciences, peut-être des réflexions autour des sujets qui toi t'animent. Voilà, j'ai hâte de notre conversation. Pour commencer, j'ai une question que je pose à toutes mes invitées, parce que les personnes qui nous écoutent ne te connaissent pas forcément, qui semble simple cette question, mais qui en réalité est assez complexe. La première question pour toi Amélie, c'est Amélie Cadiel-Loriot, qui es-tu ?

  • Speaker #1

    Merci beaucoup Charline, merci de m'avoir proposé cette rencontre. Alors, qui suis-je ? J'ai en effet vaste question à laquelle je ne sais même pas si je serais bien capable de répondre. Mais je dirais que je suis une fille de la campagne à la base. Donc, c'est un point important. J'ai grandi au milieu des vignes, élevée par des parents viticulteurs. Et puis, je suis devenue médecin. J'ai fait des études de médecine que j'ai un peu décidé de faire sur le tard. Parce que moi, quand j'étais enfant, mon rêve, c'était d'être écrivain. Mais voilà, pour mes parents, agriculteurs qui avaient un métier difficile, etc. Écrivain, ça semblait être un métier très instable, très insécure. Et ils souhaitaient pour moi le meilleur. J'étais bonne élève et ils m'ont dit, fais un vrai métier, entre guillemets. Et puis, si un jour, tu as envie d'écrire des livres, tu écriras. Donc, j'ai choisi de faire de la médecine, je pense, pour nourrir une forme de besoin de me rendre utile. Je me disais qu'en étant médecin, ce serait forcément une profession utile aux autres. J'aimais bien les sciences, j'aimais bien comprendre comment fonctionnait le corps humain. C'était quelque chose qui m'attirait pas mal. Donc, j'ai fait médecine, je suis devenue médecin. Et puis, assez vite, je me suis un peu sentie à l'étroit dans ma case de médecin. Et j'avais besoin de plus de créativité, de renouer avec l'écriture. Et aujourd'hui, du coup, je suis aussi doctorante en philosophie. J'ai réduit mon temps de travail pour essayer... de nourrir ma pensée différemment. de prendre soin des idées, en plus de prendre soin de mes patients. Et puis, je consacre pas mal de temps à l'écriture aussi, plus de fiction, de poésie. Et puis, sur le chemin, vu que je ne me trouvais pas assez polyvalente, j'ai aussi passé un diplôme de professeur de yoga. Et donc, j'enseigne un petit peu le yoga depuis un an. Je suis aussi maman de deux petites filles. J'attends un petit troisième pour dans... un peu moins d'un mois. Voilà, je ne sais pas si ça fait... C'est vrai que je me suis pas mal définie par mes professions au final, mais bon voilà, ça donne un petit aperçu.

  • Speaker #0

    Je pense que c'est exactement la manière dont tu t'es livrée à nous la première fois que je t'ai rencontrée, où j'ai vu ton ventre rond, où je ne te connaissais pas du tout et où tu as énoncé la pluralité de tout ce que tu étais et tout ce que tu faisais dans la vie. Et je ne te cache pas que c'est vraiment la première étape qui m'a donné envie d'en apprendre un peu plus sur toi. Et la première chose que je me suis dit, c'est « waouh, elle s'est autorisée à être tout ça en même temps » . C'est la première chose qui m'est venue, moi, à l'esprit quand tu t'es présentée. Donc là, peut-être que c'est déjà la chose que les auditeurs, auditrices sont en train de se dire, c'est « waouh, elle s'est autorisée à être tout ça » . Mais j'imagine qu'on n'en arrive pas à être tout ça si facilement. Et tu le sais, dans ce podcast, l'idée, c'est que les femmes parlent aux femmes en particulier, mais on a aussi des auditeurs hommes. Et c'est de retracer ce parcours d'alignement que tu as eu. Donc là, effectivement, on t'imagine petite fille dans les vignes avec un papa, une maman, peut-être des frères et sœurs. Et en fait, on a envie de savoir quel a été pour toi le tout premier moment que moi, j'ai appelé le moment d'alignement, mais qui en réalité est plutôt un moment de désalignement. où tu as senti que tu avais vraiment besoin d'aligner ta tête, ton cœur et ton corps.

  • Speaker #1

    Oui, en effet, aujourd'hui, je me sens plutôt alignée, même si on pourra revenir dessus. Je pense que l'alignement, c'est un processus hyper dynamique. On évolue sans cesse, on se transforme sans cesse. Clairement, j'ai l'impression que sur le papier, on pourrait se dire « elle s'est autorisée à être tout ça à la fois » , mais ça a été un chemin. Pas forcément facile. Je me suis sentie la plupart du temps désalignée, on ne va pas se mentir. Donc, je vais d'abord parler du désalignement pour ensuite essayer de répondre à ta question d'un grand moment d'alignement, parce que je pense que j'en ai vécu un il n'y a pas si longtemps que ça et qui, je pense, me permet d'aujourd'hui accepter tout ce que je suis. Mais déjà, comme je te disais, j'ai censé s'être étirayée par à la fois, je pense, une âme un peu créative, artiste. Je ne dirais pas ce mot-là parce que je ne me sens pas artiste, mais en tout cas avec envie de créer. d'écrire, d'avoir pas mal d'imaginaire et tout. Et à la fois, j'étais une super bonne élève, très scientifique aussi. Donc, ça a toujours été difficile. À chaque fois qu'il y a eu des choix à faire, en première, quand on choisit S ou L, mes profs de français voulaient que je fasse L, mes parents voulaient que je fasse S, parce que S, ça gardait toutes les portes ouvertes. Bref, j'ai toujours un peu fait des choix par défaut. Finalement, je rentre dans ces études de médecine. Pas par défaut, parce que je me convainc que c'est super de faire ça et que ce sera un métier génial, etc. Mais en fait, dès la première année de médecine, ça s'est bien passé. Puis en fait, on a la tête dans le guidon, on passe le concours. On ne se pose pas tant de questions que ça. Je me souviens de me sentir, pour le coup, d'avoir un espèce de mini flash d'alignement. Je suis sur mon vélo, je viens d'apprendre mes résultats au concours et que je suis reçue en deuxième année. Et là, je me dis, waouh, génial, c'est trop bien et tout ça. Puis en fait, des gringolades assez rapides dès la deuxième année de médecine. En fait, je dirais que de la deuxième... à la sixième année au moment où on passe l'internat. Tous les ans, je me demandais un peu, mais qu'est-ce que je fous là ? Je ne me sentais pas du tout alignée avec mes autres amis, les autres étudiants en médecine autour de moi. À l'époque, je crois aussi que je mettais pas mal la responsabilité sur le système d'enseignement de la médecine qui était un peu old school, par l'hôpital qui ne va pas forcément très bien. Et en fait, dès que tu fais des stages assez rapidement, tu te rends compte qu'il y a des trucs qui clochent un peu. D'avoir une sorte de déception et de ne pas forcément sentir à ma place. Je me revois dire à mes parents, en fait, j'aurais dû faire Sciences Po. En fait, je n'aurais pas dû faire ça. Et en fait, une fois que tu es dans les études de médecine, tu te dis quand même, c'est bête de quitter le navire. J'aimais quand même ça. J'aimais les gens. J'aimais apprendre des choses intéressantes sur le corps humain, la physiopathe, les pathologies, la pharmaco et tout. Mais bon, bref, des années un peu inconfortables quand même. Puis voilà, tu continues d'y aller parce que tu te dis que tu auras un métier à la clé, un chouette métier. Bon, tu serres un peu les dents. Et puis vient l'internat. Et là, en fait, désaligné encore. Tu commences à bosser, tu es à l'hôpital, tu gagnes ta vie, tu te dis indépendant par rapport à tes parents.

  • Speaker #0

    Et en fait, moi, je me pose la question parce que tu dis que tu es bon élève. Effectivement, déjà, la première chose que j'ai envie de dire quand je t'entends, c'est comme tu l'as très bien dit, tu t'es persuadé que c'était la bonne chose pour toi. Donc toi, tu étais à fond, même si derrière, il y avait une espèce de petite voix qui te grattait en te disant « Je ne suis pas tout à fait à ma place » . tu arrives quand même à passer cette première étape et tu passes la deuxième étape. En fait,

  • Speaker #1

    à chaque fois, c'est vrai que je passe les examens haut la main. J'ai toujours des super résultats parce qu'en fait, je suis besogneuse, travailleuse. Je ne veux pas décevoir mes parents. Oui, j'étais contente de bien réussir. En fait, ce qui est compliqué, et comme tu dis, ça gratte, c'est que tu as une partie de toi qui est quand même contente de faire ça, mais une autre qui, petite voix, n'arrête pas de dire en fait, est-ce que je n'aurais pas été mieux ailleurs ? Mais en fait, le truc, c'est que tu... je pense que je suis une personne « raisonnable » , très souvent, tu as une espèce d'autre petite voix qui te dit « oui, mais l'herbe du voisin, elle n'est pas toujours plus verte. » Tu n'arrêtes pas de te dire que tu serais mieux ailleurs, mais tu serais mieux où vraiment ? Parce que les autres parcours ne sont pas forcément imparfaits non plus. Après, tu finis toujours par te dire « est-ce que c'est que je suis une éternelle insatisfaite ? Est-ce que je suis trop exigeante ? » Finalement, c'est plus confortable de rester là où tu es. En fait, ces petites voix qui parlent en te disant « t'es pas à ta place » , t'arrives facilement à les faire taire, en fait, j'ai envie de dire, jusqu'à un certain point.

  • Speaker #0

    Oui, mais justement, je pense que les personnes qui nous écoutent, il y a beaucoup de personnes qui sont soit dans des gros, gros moments, tu vois, où ils se cherchent, ou je sais qu'il y a aussi des jeunes qui nous écoutent et qui se posent des questions, tu vois, un peu comme s'ils avaient un problème de ne pas avoir cette illumination lors des études, où vraiment, ils sentent que c'est pas exactement le bon endroit. Je trouve que c'est intéressant d'avoir ton exemple et on va voir la suite de ton parcours pour te dire que même au début de tes études, ce n'était pas forcément évident pour toi.

  • Speaker #1

    Non, tout à fait. Et après, on va poursuivre, mais je ne regrette rien de tout ce que j'ai fait avant. Je regrette vraiment. Il y a eu après des moments où j'étais peut-être un peu en colère, où je me dis finalement, je me suis trop conformée à une norme sociale. J'ai voulu faire plaisir et du coup, j'ai fait tous ces choix-là. Et en fait, ce n'était pas les bons. Aujourd'hui, je n'en suis plus. plus du tout là, je ne suis pas du tout en colère, je suis hyper apaisée et je me dis que finalement, tout ce qui s'est passé avant m'a appris énormément de choses et je n'en serais pas là aujourd'hui si je n'avais pas persisté dans ces études de médecine. Au final, on y vient. Mais voilà, en tout cas, on peut se sentir très désaligné assez tôt. Finalement persévéré, puis après je deviens interne. Et puis, après, c'est très prenant. Les internes hôpitales travaillent énormément, on fait tourner les services. J'ai appris beaucoup de choses, donc moi je suis devenue radiologue. Mais avant ça, j'ai fait un an de gastro-entérologie. En fait, j'avais choisi une première spécialité. Au bout d'un an, j'ai fait un droit de remords, je suis devenue radiologue. En fait, ça n'allait pas non plus à ce moment-là. Je ne me sentais pas du tout à ma place en gastro-entérologie, alors que c'était une spé que j'adorais. Mais en fait, l'hôpital va vraiment, vraiment mal et broie les humains. Et en fait, je me suis vue devenir un peu l'ombre de moi-même. Et je me suis dit que la formation que j'avais commencé à faire en gastroenterologie ne me permettrait pas de m'épanouir en dehors du travail. C'était tellement prenant, tellement difficile, etc. Bref, j'ai bifurqué à ce moment-là déjà une première fois. J'ai fait de la radiologie. La radiologie, c'est une spécialité passionnante, intellectuellement très nourrissante. C'est très scientifique. Je pense que ça venait combler un peu aussi. Ça venait nourrir plutôt. mon côté un peu geek, scientifique, etc. Mais il y avait d'autres inconvénients. C'est que j'étais un petit peu plus coupée des patients. J'étais moins dans le soin. Donc, assez vite aussi, de nouvelles questions. Mais est-ce que tu es vraiment à ta place ? Et puis, je pense, le coup de grâce. Je me suis sentie quand même désalignée, je pense, pendant toutes mes années de médecine. Même si j'ai toujours réussi à... Pas poker face du tout, mais ce que je veux dire, c'est que... Je n'étais pas marginalisée du tout. Je pense que c'était insoupçonnable pour les gens autour de moi que j'étais désalignée.

  • Speaker #0

    J'ai envie de rebondir là-dessus parce qu'effectivement, le désalignement peut être quelque chose qui est latent, sous-jacent, un espèce de questionnement. Mais comme tu dis, tu continues à avancer à ce moment-là. Et finalement, les autres possibilités sont peut-être alléchantes. Mais il y a cette fameuse petite voix qui te dit... Est-ce que c'est vraiment plus alléchant ailleurs ? Est-ce que l'herbe est plus verte ailleurs ? Tu le dis très bien. Et en plus, clairement, tu as parlé de choses très importantes qui, je pense, ont résonné beaucoup avec les auditeurs et auditrices. Clairement, tu vas devenir médecin en termes de normes sociales, en termes d'attente de ta famille, où tout de suite, tu as posé ça comme base. Tu répondais aussi à ce besoin de sécurité et de statut. finalement. Donc, c'est pas si simple de jeter tout ça à la poubelle. C'est vrai qu'il y a ce côté-là aussi. Et si on se remet à ta place, je trouve ça hyper intéressant que tu mettes tout ça en perspective comme jeune futur médecin et tout ce que ça implique. Et on peut imaginer tout ce qui pouvait se passer en toi.

  • Speaker #1

    Ouais, c'est exactement ce que tu décris. Je rappelle quand même que j'étais quand même satisfaite de plein de choses. Je pense que je suis quelqu'un de très curieux, sérieuse et tout. Et en fait, j'arrivais... Je veux dire aussi, j'avais assez de nourriture quand même pour rester. C'est-à-dire que j'aimais faire des beaux diagnostics en radiologie. J'ai trop aimé apprendre un tas de trucs. J'ai aimé le contact avec les patients. J'ai aimé mes collègues, mes chefs. J'ai aimé l'hôpital. Il ne faut pas non plus croire que ce que je vivais était un calvaire. Sinon, évidemment, je ne serais pas restée.

  • Speaker #0

    Et justement, je trouve que c'est ça qui est intéressant dans ton parcours. Et je pense que là, après, on va pouvoir voir les différentes couleurs, les différents vernis que tu as su ajouter pour justement te nourrir. Tu utilises beaucoup le mot nourrir, qui me semble hyper intéressant, hyper approprié. Et je pense que les personnes qui nous écoutent se disent mais oui, en fait, à aucun moment, on juge du fait que tu n'es pas été OK à ce moment-là, peut-être te poser des questions. mais C'est vrai qu'au micro des alignés, on s'autorise à se dire que oui, tu n'avais ni l'accord d'au-coup, ni des problèmes financiers. On est d'accord qu'on parle entre personnes avec beaucoup de chance dans la vie. On est des privilégiés. Mais ça n'empêche que ce podcast existe aussi parce qu'à l'intérieur de certaines d'entre nous, il se passe des choses et ça fait du bien d'avoir des espaces pour en parler.

  • Speaker #1

    Complètement d'accord. Et je pense que c'est important en effet de partager aussi ça parce que très longtemps, je me suis un peu flagellée. je le disais, je le répète, je me disais c'est peut-être moi le problème, je suis une insatisfaite. J'ai consulté pour ça. Et en fait, j'ai fini par comprendre que non, ce n'était pas une histoire d'insatisfaction, c'était que cette case-là, elle était trop petite pour moi et j'avais besoin de plus d'espace pour exprimer plein d'aspects de ma personne. Et donc, bon bref, ça c'est tout mon parcours d'étudiante en médecine, puis d'interne, puis de médecin. Et puis en fait, j'ai pris, je ne sais pas, j'ai vécu une sorte de crise existentielle, même si je ne sais pas si ce mot veut dire grand-chose, mais il y a une espèce de conjonction de plusieurs éléments. Je suis devenue maman, et ça je pense que plein de femmes à ton micro l'ont dit, mais la maternité, ça bouleverse profondément les femmes. Je pense qu'on se découvre, on se transforme, on se métamorphose, on a une forme de lecture du monde qui change. Ça, ça m'a... Ça m'a profondément transformée. Il y a eu la crise du Covid qui a été quand même... Dans le milieu du soin, on l'a vécu de manière assez étrange. Je pense que ça a mis plein de gens sur des chemins de reconversion aussi. Je pense que c'est des moments où on repense un peu notre façon d'exister. Et puis, en plus de tout ça, je ne sais pas si on aura le temps d'en parler, mais j'ai vécu une énorme crise d'éco-anxiété à l'été 2022. J'ai toujours été intéressée par les sujets environnementaux, par l'écologie en général. Et en fait, je ne pensais pas que ça m'arriverait parce qu'il me semblait avoir bien compris les enjeux climatiques, de biodiversité et tout. En fait, pas du tout. Je suis allée à une conférence en juin 2022 qu'une copine donnait et j'y suis allée juste un peu en me disant, bon, elle n'aura pas beaucoup de monde, donc j'y vais quand même pour qu'elle ait un peu de public. Mais je me suis dit, bon, je ne vais pas apprendre grand-chose. En fait, je suis sortie de là. Ça m'a fait une sorte d'électrochoc. Je pense que je n'avais jamais ressenti autant... Enfin, je ne sais pas, ça m'a fait un vrai bouleversement et j'ai vécu une vraie crise d'éco-anxiété, comme c'est décrit dans les bouquins, avec le U inversé, là où tu fais ton deuil. Tu vis toute une période où c'est vraiment la catastrophe. J'étais quasiment collapsologue. Enfin, voilà, j'ai vraiment... Ça m'a... C'était terrible, quoi. Et puis, à ce moment-là, en fait, je me suis aussi beaucoup abreuvée de lectures de podcasts. pour essayer de comprendre le monde d'une manière un peu plus systémique. Et en fait, je pense que c'est un vrai moment de transformation aussi, enfin tout ça. C'est que du coup, je me suis intéressée à plein de sujets sociaux, politiques, économiques, environnementaux, philosophiques. Ma vision du monde a été bouleversée. Et je pense que de vivre un peu toutes ces crises en même temps, enfin voilà, cette espèce de qui je suis en fait, justement, ça m'a aussi amenée à aussi lire, j'en parlerai à la fin peut-être, mais... D'autres bouquins un peu plus sur la recherche du soi profond, qui on est. Bref, tout ça m'a mis dans une espèce de dynamique de réflexion, de transformation. Et c'est là où, dans ce bouillonnement hyper inconfortable, je pense que pendant un an, j'ai été vraiment super mal à me dire qu'est-ce que je vais faire de ma vie. En plus, j'avais l'impression qu'il fallait que je porte un engagement. J'avais l'impression que j'avais un besoin d'engagement. notamment pour l'écologie. Je ne savais vraiment plus qui j'étais, donc j'ai suivi une psychothérapie. Je me suis vachement intéressée à tout ce que je viens de te dire. J'ai hésité à tout plaquer pour refaire une formation d'ingénieur agricole. Franchement, à un moment donné, je me suis dit qu'il ne faut pas que je revienne à la terre. Mes parents étaient agriculteurs, puis du côté de ma mère, ils sont vraiment agriculteurs de père en fils. Je n'ai que des générations d'agriculteurs au-dessus de moi. est-ce que il faut que j'arrête la médecine et que je devienne agri enfin Bref, et c'est à ce moment-là de ma vie où j'ai aussi rencontré des femmes médecins au parcours hyper différent de ce que j'avais vécu jusque-là, qui m'ont énormément inspirée, où je me suis rendue compte qu'on pouvait être à la fois médecin et à la fois d'autres trucs. Qu'on pouvait écrire des bouquins, qu'on pouvait reprendre ses études et faire des sciences humaines et sociales à côté, qu'on pouvait s'engager dans des assos, et surtout que la santé et l'écologie étaient liées. Et c'est un espèce de parallèle que j'avais. Pas fait jusqu'alors, en fait. Je ne sais même pas comment c'est possible, mais en fait, on nous en parle très peu de la santé environnementale en médecine. Et donc, c'est, je pense, au contact de ces femmes, qu'en fait, après, ce n'est que des rencontres. Je me suis inscrite dans une association, j'ai adhéré à une association qui s'appelle Alliance Santé Planétaire, où on est plutôt des soignants, mais il y a n'importe quelle personne de n'importe quel métier est acceptée et bienvenue plutôt. Et en fait, on pense la santé planétaire, c'est-à-dire en fait, on pense que la santé des humains est forcément reliée à celle de notre planète, à celle des animaux, à celle du vivant. Et puis voilà, j'ai rencontré des gens géniaux dans cet assaut. Je ne sais pas, un jour, j'ai cliqué sur un... J'étais dans mes vastes lorsque j'ai passé, je pense, des heures sur Internet à chercher des formations. Des fois, quand on est complètement désaligné et qu'on cherche... à se renouveler, en fait, on passe son temps à chercher des formations, des parcours, des inspirations, etc. Et je suis tombée sur un master de philosophie de la santé qui était à Bordeaux, à l'université Bordeaux-Montagne, à côté de chez moi. Et en fait, j'ai postulé à ce master. En fait, les inscriptions étaient fermées, mais le directeur du master m'a répondu dans la journée en me disant, oui, les inscriptions sont fermées, mais en fait, il nous reste encore quelques places. Si vous me faites un dossier ce week-end, vous l'aurez en secrétaire et je pense que ça passe. Du coup, j'ai fait le dossier le week-end même sans trop me poser de questions et j'ai été retenue au master. Et là, je crois que j'ai vécu un grand moment d'alignement pendant cette année de master de philosophie de la santé. En effet, je me suis sentie en accord avec mes valeurs, avec mes émotions, avec ce que j'avais fait, avec mon métier de médecin. Mais à la fois, mon côté littéraire et tout ça, enfin voilà, d'être... En fait, ce master est incroyable. C'est un master professionnel où il y a donc beaucoup de professionnels de la santé qui sont étudiants. Ça allait de 25 à 60 ans, des personnalités hyper variées, que des parcours de vie, mais incroyables, que des gens qui ont fait mille trucs. Et c'était dingue.

  • Speaker #0

    Et j'ai envie de rebondir sur ce que tu dis, parce que bon, déjà, on n'a pas envie de te couper.

  • Speaker #1

    Je suis désolée parce qu'en plus, je ne suis pas moula en parole.

  • Speaker #0

    Non, mais pas du tout. Non, en fait, c'est juste que tout à l'heure, tu m'as parlé d'une toute petite case. Tu vois, tu disais la case était trop petite pour moi. Et en fait, on avait l'impression que toi, tu n'avais qu'un seul besoin, c'était de créer des ponts avec d'autres sujets. Et en fait, finalement, l'image qui me vient, c'est un espèce de fil, de lien, qui commence à se tisser entre tous ces différents ponts. Et moi, ce que j'apprécie, et merci beaucoup de partager ça au micro des Alignés, c'est le fait que ce soit très inconfortable quand on est dans cette case qu'on sent trop petite, qu'on voit qu'il y a d'autres choses qui peuvent peut-être être source d'inspiration, peut-être te mener vers un toi, un toi Amélie, qui serait vraiment toi. Et je pense que les personnes qui nous écoutent vont se dire, mais oui, c'est exactement là ce que je suis en train de ressentir. Et ce que je trouve aussi très beau, et c'est aussi pour ça que les alunis existent, c'est comment le fait de rencontrer des personnes qui se sont autorisées à ouvrir d'autres portes, créer des ponts entre des matières, entre des sujets, fait que finalement, toi, tout à l'heure, tu as parlé de se nourrir. Tu arrives finalement à t'autoriser à te nourrir d'autres thématiques. Et c'est ça que je trouve hyper intéressant, de comment tu sortes de cette casse pour finalement commencer à tisser le lien et peut-être à t'autoriser à être... plurielle dans ce que tu es.

  • Speaker #1

    Oui, c'est sûr que c'est un peu le déclic de cette année de master. En effet, c'est vraiment à la fois de voir qu'il y a plein d'autres gens qui ont des vies plurielles et que ça ne les rend pas moins légitimes dans ce qu'ils font. Parce qu'après, je pense qu'en médecine, mais parce que je pense que j'avais projeté moi cette image-là, mais en médecine, on est quand même très... Enfin, c'est... Les médecins qui sortent des cases. Bon, maintenant, évidemment, le sujet m'intéresse. C'est que j'ai l'impression d'être une médecin qui sort des cases. J'ai rencontré d'autres profils un peu comme moi. Donc, je sais que je ne suis pas seule. Mais il y en a quand même peu. en fait la plupart du temps on est un peu sur des rails et moi Vachement longtemps, je me suis dévalorisée. Donc, je me suis dit, mais si tu deviens un médecin à mi-temps, est-ce que tu resteras un bon médecin ? C'était vraiment une vraie question. Et du coup, c'est vrai que quand on veut embrasser, on va dire, une activité un peu plus plurielle, parce qu'aujourd'hui, du coup, après ce master, je suis devenue doctorante. Donc, je dois consacrer du temps à ça. Je donne aussi des cours de philo à des soignants. J'ai écrit un bouquin. On pourrait dire que je me suis aussi complètement dispersée et que du coup, ça fait de moi un moins bon médecin. Ça, c'est vraiment ce que j'avais en tête. C'est hyper bête, mais rien que de se dire qu'on peut être médecin et autre chose, je me disais que les gens vont me prendre pour une folle. Et en fait, je me rends compte que c'est complètement une construction mentale. Parce qu'en fait, quand j'ai annoncé à ma boîte, quand j'ai annoncé à mes collègues et mes associés que j'allais bosser moins de temps en radiologie parce que j'allais partir en thèse de philo, etc. En fait, je n'ai eu que des retours ultra positifs. J'étais hyper étonnée moi-même. En fait, les gens m'ont dit, mais... c'est génial que tu fasses ça. Enfin, bon, voilà, j'ai eu des trucs comme quel courage, ou alors, c'est trop génial pour notre boîte d'avoir quelqu'un comme toi, en fait, parce que du coup, c'est trop bien les profils qui prennent du recul, qui essayent de voir plusieurs horizons et tout. tout le monde a été super valorisant et c'est là, en fait, où j'ai capté, où je me suis dit, ah ouais, en fait, c'est pas forcément mal, entre guillemets, d'être un peu slasheuse. Parce que jusqu'à présent, j'avais vraiment peur de ça, de me dire que les gens vont croire que tu es une moins bonne radiologue que les autres parce que tu consacres un peu moins de temps à ton activité clinique. Comme quoi, on peut aussi se mettre des barrières tout seul et s'inventer un espèce de schéma. Moi, j'avais vraiment l'impression d'être complètement coincée dans ma case de médecin et de jamais pouvoir en sortir. En fait, c'est faux, archi faux. Et je pense que pour... Moi, je suis médecin, mais j'imagine que tous les gens qui nous écoutent ont plein de profils différents.

  • Speaker #0

    C'est exactement ce que j'allais dire. Et finalement, tu vois, là, j'étais en train de lire un livre qui revenait sur la construction de qui on est en tant que personne. Tout à l'heure, tu t'es décrite en tant que littéraire ou scientifique. Ou en fait, très tôt, on devient un « ou » finalement. En fait, on devient absolument juste scientifique ou créative ou littéraire. Et en fait, très, très tôt, on nous met ça dans la tête. Et ça a très peu changé depuis les dernières années. Et c'est en ça que finalement se relier toutes ces différentes facettes de cette personnalité. En fait, en coaching, on parle de croyances limitantes. Ce sont des croyances, ce sont des injonctions qui sont dans nos têtes très, très tôt. Et même en tant qu'enfant. Donc, effectivement, pour s'en défaire, il faut y aller à coups de rencontres très inspirantes, de personnes qui nous montrent que c'est possible. Et effectivement, je trouve que c'est génial. Donc moi, la question qui me vient, c'est ce master qui finalement arrive à relier la santé, l'osophie. Qu'est-ce qui t'apprend, en fait ? Qu'est-ce qui va t'ouvrir comme porte ?

  • Speaker #1

    Franchement, je sais pas. J'ai passé une année absolument merveilleuse. C'est pour moi un grand, grand moment d'alignement. Il m'a apporté déjà beaucoup d'apaisement. Alors, je sais pas. Quand j'ai dit ça, en soutenant mon mémoire, à la fin de l'année, mes profs, ils me disaient, mais c'est très bizarre que tu... que je dis ça parce que d'habitude, au contraire, la philo, ça mène plus de questionnements et de... Enfin, pas forcément de l'apaisement. Et en fait, moi, ça m'a beaucoup apaisée parce que je pense que quand je suis arrivée... Je vous parlais de ma crise d'éco-anxiété, etc. En fait, je me suis tellement abreuvée de plein d'ouvrages, etc. J'avais une vision quand même assez radicale, je dirais, des choses. Presque une forme d'envie de révolution, de changement complet du système. J'étais très en colère, je ne sais pas. Très en colère contre notre modèle. capitaliste, extractiviste qui détruit la planète et qui détruit les hommes et qui détruit le vivant. J'étais un peu peut-être trop... Enfin, pas pleine de certitude, mais j'avais l'impression d'avoir compris des choses, d'être en colère et d'être...

  • Speaker #0

    révolutionnaire. Et en fait, ce que m'a amené ce master, déjà rien que pour ce côté-là, un peu de remise en question totale de la société, c'est que ça m'a amené vraiment de la pensée complexe. En fait, en philosophie, on est évidemment, chacun a son avis sur un sujet, mais en tout cas, en philo, on essaye d'être le plus, j'allais dire, je ne sais pas vraiment d'adjectif parfait, mais on essaye de se faire un peu tout le temps l'avocat du diable. Enfin, du moins, on essaye de prendre à chaque fois des idées complètement au pire. presque opposés, c'est le fameux thèse-antithèse-synthèse, mais on essaye de prendre deux chemins, deux courants de pensée très différents, de vraiment approfondir au max les deux courants de pensée pour arriver à ensuite faire une espèce de contre-argumentaire, etc. Et ensuite, soit on essaye de se positionner plutôt pour un chemin ou l'autre, ou bien de chercher une troisième voie. Moi, j'avoue, j'aime bien ce concept. En tout cas, on essaye d'aborder vraiment une pluralité d'idées, de façons de lire le monde. Et en fait, moi, ça, ça m'a amené beaucoup d'apaisement parce que je me suis rendu compte que, c'est pas que ça m'a déradicalisée parce que j'étais pas radicalisée, mais ce que je veux dire, c'est que ça m'a amené de la nuance, de l'humilité, de la complexité, et de me dire, en fait, tout peut être toujours critiqué. Et le but, c'est d'essayer de naviguer dans un monde hyper complexe. toujours en maintenant le dialogue avec les autres. En fait, je me suis rendu compte que si on se polarisait trop, en fait, on rompait le dialogue. Et je pense que ça me touche beaucoup ce que tu dis avec cette histoire de faire des ponts, faire des liens. Moi, c'est vraiment ce que j'ai envie de faire aujourd'hui. C'est faire des ponts entre la santé et l'écologie, faire des ponts entre la santé et la créativité, le récit et le soin, le politique et le soin, de faire du lien entre les gens, entre des univers différents. Et donc, je me dis que j'ai l'impression d'avoir une espèce de mission de ça, d'être dans le lien, dans le dialogue. Et en fait, dans ce master, déjà, ça m'a apaisée. Puis en plus, le master était construit pour qu'il y ait du lien, parce qu'en fait, c'est un master assez unique en France, où à chaque fois que tu as des cours, tu as un soignant ou soignante, enfin quelqu'un issu du milieu du soin, et un philosophe ou un économiste. On a eu aussi, voilà, on a eu philosophe, économiste de la santé, juriste. Enfin, après, voilà, tu as des... professions à dire universitaires en sciences humaines et sociales, sociologues aussi on a eu. Et à chaque fois qu'ils dialoguent, rien que le master est construit dans un dialogue permanent entre des enseignants-chercheurs et des soignants qui vivent des choses sur le terrain. Donc déjà, ce modèle-là, il est absolument magnifique parce qu'il met en lien toujours ce qu'on vit et une pensée philosophique qui permet de prendre du recul sur ce qu'on vit, justement. Donc ça, c'était merveilleux. Et puis après, j'avoue, j'ai eu la chance de tomber dans une promo incroyable. où il y a eu des liens humains hyper forts. C'était une très belle expérience humaine aussi. Et donc, tout ça m'a profondément transformée. Et là, je crois que ça faisait depuis le lycée que je m'étais... Enfin, je ne sais pas, même depuis toujours, je ne m'étais jamais sentie autour à ma place qu'en suivant ces cours de philo de la santé. On me disait en tout cas qu'on pouvait lier pensée philosophique et métier du soin. Et qu'en fait, tout ça, je te dis... Prendre soin des idées, prendre soin des gens, prendre soin du monde. Enfin voilà, qu'il y avait cette espèce de champ des possibles qui s'ouvrait à justement ma pluralité. Enfin, je sais pas, c'est comme si ce que je ressentais, ce que je pensais s'alignait avec un truc possible dans la réalité, en fait.

  • Speaker #1

    Oui, et tu vois, par rapport à ce que... Bon, déjà, j'ai envie de te dire merci de partager tout ça parce que je pense que ça va beaucoup parler. Et même si toi, tu parles de la santé et de la philosophie, je pense que les personnes qui nous écoutent pourront vraiment faire le lien avec d'autres thématiques qui leur sont chères. Peut-être que ce sera l'écologie, mais ça peut être d'autres engagements qui parfois sont assez lourds à porter. Et puis, comme tu le dis très bien aujourd'hui, quand on est dans un moment où on prend conscience de certaines réalités, il y a très souvent ce moment-là où en fait, on s'abreuve d'informations qui vont dans le même sens. Et donc, on se polarise, on se radicalise. C'est à la fois indispensable de prendre conscience des choses. Et en même temps, il y a une espèce de... de nécessité de prendre soin de soi. Je pense que tu connais le Schumacher College à Londres qui accompagne des militants pour qu'ils prennent soin d'eux-mêmes, pour faire émerger positivement des idées de leur cause, tout en se brûlant pas. Je pense que ça va beaucoup parler aux personnes ici qui nous écoutent et qui écoutent les alignés parce qu'ils ont un engagement et qu'ils ont besoin de se retrouver eux-mêmes. Donc, tout ça fait énormément de sens. Je suis un peu brouillon, mais parce qu'il y avait tellement de choses dans ce que tu as dit. Voilà, le sujet de l'engagement, de prendre soin et de créer aussi des espaces dans lesquels, ce qui me paraît aussi très juste et je le souligne, à la fois pour des environnements universitaires, mais aussi en entreprise ou j'imagine aussi dans le domaine de la santé ou peu importe, le fait d'oser mettre des professionnels qui travaillent dans des milieux très différents et de créer un dialogue et créer un espace dans lequel ils... Il y a ce dialogue et moi, je souris intérieurement quand tu dis cette promo est extraordinaire. Mais en fait, moi, ma conviction profonde, c'est quand tu crées un groupe et un espace, en général,

  • Speaker #0

    un espace quelque chose.

  • Speaker #1

    C'est très souvent très fertile, mais c'est vraiment une conviction que j'ai profonde à chaque fois. Et je souris intérieurement parce que quand tu mets des humains ensemble et qu'il y a cette volonté de créer un espace fertile et authentique entre les personnes. En général, c'est là où la magie arrive. Mais je le prends quand même comme une idée, comme un enseignement d'oser le faire.

  • Speaker #0

    Je ne sais pas combien de temps tiendra ce master, parce que du coup, c'est quand même compliqué pour eux, pour les financements, pour plein de raisons, parce que justement, ils sont un peu un master un peu atypique. Mais oui, je suis d'accord avec toi de faire dialoguer des gens de milieux différents, de professions différentes. En fait, c'est super riche. Et tu n'as pas d'un côté qu'un soignant à la tête dans le guédon qui te parle, ou d'un côté qu'un universitaire ultra perché qui ne sait pas de quoi il parle, il y a il théorise des trucs qu'il n'a pas vécu. Là, il y a vraiment cette rencontre des deux qui était super riche. Et je crois que maintenant, c'est ce que j'essaye moi d'incarner, parce que je ne serai jamais philosophe, dans le sens où je n'ai pas du tout le parcours académique pour devenir philosophe. Je resterai un médecin, mais ce que j'essaye d'amener, en tout cas dans les cours que je donne, dans les DU, dans certaines formations, etc. C'est vraiment ça que j'essaye d'amener, qu'on peut être un peu hybride, mais qu'en fait... ça peut aussi apporter des choses aux gens, c'est-à-dire à la fois avoir un pied dans le monde réel, entre guillemets, du terrain, et quand même s'autoriser une espèce de prise de recul pour essayer de développer sa pensée critique et sa réflexion. Parce que je pense que c'est en amenant de la pensée critique et de la réflexion que justement, soi-même, si on se pose des questions, on arrivera mieux à entendre la parole de l'autre, même si elle est différente de la nôtre. Bref, j'essaye de cultiver ce... Je ne suis pas trop universitaire, je ne suis pas juste du terrain, je suis un peu entre les deux, mais je pense que ça peut être utile pour les autres.

  • Speaker #1

    Et ce côté d'être un « et » et plus un « ou » , tu te sens comment par rapport à ça ?

  • Speaker #0

    C'est pas mal. Justement, je pense qu'on se sent les deux pieds sur la terre. Je ne sais pas, en effet, on se dit qu'on est riche, qu'on est capable d'amener plusieurs choses. On est dans le lien et pas dans la séparation. Enfin, t'as raison, oui, c'est vrai que ce truc d'être ou ça, ou ça, ou ça, c'est terrifiant, en fait, qu'on nous mette dans des cases. Après, voilà, il y a vraiment tout un sujet sur l'hyperspécialisation. C'est un peu ce que tu dis avec tes littéraires ou tes scientifiques. On nous a un peu fait croire que pour avoir une espèce de cohérence linéaire, pour être performant, etc., il fallait s'hyperspécialiser. moi je le vois clairement en médecine parce qu'on fait que s'hyperspécialiser, on est médecin puis ensuite on est médecin, moi j'étais spécialiste en plus d'être spécialiste je me suis spécialisée en imagerie de la femme et imagerie diététique, on est toujours dans ce truc de toujours s'hyperspécialiser pour être l'expert d'un truc et d'être trop fort et d'être reconnu pour ça, donc il y a vraiment cette valorisation de l'hyperspécialisation et on en revient un peu là, il y a pas mal de penseurs qui critiquent ça, il y a un philosophe comme Edgar Morin qui maintenant dit qu'il faut de la pensée complexe justement en fait c'est pas parce qu'on est hyperspécialisé que... Le problème de l'hyperspécialisation, c'est que ça crée aussi des espèces de couloirs où personne ne communique entre eux, où on n'arrive pas à prendre en compte les pensées des systèmes. Enfin bref, je pense qu'on en revient de plus en plus. En tout cas, dans le milieu universitaire, ils essayent de recréer des formations interdisciplinaires, pluridisciplinaires. C'est quand même un truc qui revient. J'ai quand même le sentiment que ça va un peu plus émerger et les gens s'autoriseront peut-être aussi à être plus des « et » que des « ou » Grâce à ce... cette déconstruction un peu de l'hyperspécialisation.

  • Speaker #1

    Et donc maintenant que tu nous dis que tu as vraiment réussi à devenir un OU, j'ai hâte de savoir quel lien tu vas tisser. Quels sont les projets dont tu as envie de nous parler une fois que ce grand moment d'alignement est arrivé ? Qu'est-ce que tu es en train de construire ? Ça,

  • Speaker #0

    c'est pour le coup une question. Je ne sais pas si je peux y répondre parce qu'en fait, je n'ai pas de visibilité sur la suite. Je crois que tous ces grands moments d'inconfort, et puis cette espèce d'alignement qui a surgi du chaos m'ont redonné confiance. Je ne sais pas comment dire, j'ai une forme d'espérance aujourd'hui et en fait j'ai l'impression de me dire que je fais confiance un peu en l'avenir sans savoir vraiment ce qui m'attend parce qu'en fait le projet à court terme c'est quand même de réaliser ma thèse de philo mais je pense que j'en ai encore pour trois ans, trois ans et demi et après en fait je ne sais plus. pas du tout comment tout ça va se mettre en place. En fait, je me dis que je fais les choses au fur et à mesure et que j'ai l'impression en tout cas que c'est plutôt dans les rencontres humaines. Il y a des choses qui vont se décider un peu pour moi. Par exemple, cette année, j'ai eu la chance de donner des cours de philo à des soignantes dans le cadre de l'école de santé intégrative MU Médecine qui a été fondée par Chloé Bramy. Par exemple, Chloé, c'est quelque chose dont elle m'a parlé l'année dernière. Elle m'a proposé ce projet en me disant « qu'est-ce que tu en penses ? » et puis voilà, on y est allé. Et en fait, c'était extraordinaire. J'ai adoré donner ces cours. J'ai l'impression que pour l'instant, il n'y a pas vraiment de trajectoire. Je sais juste que je veux continuer de travailler sur des sujets de santé, de politisation de la santé, d'environnement. Moi, je dis que c'est un peu mon militantisme intellectuel. Ça, c'est ma forme d'engagement, ma façon d'agir sur le monde. Après, je pense que je resterai radiologue à côté parce que pour l'instant, je ne me vois pas du tout. Je ne sais pas du tout dans mon projet d'arrêter. d'être médecin, parce que je pense que c'est important d'avoir un pied dans la réalité toujours. J'ai des projets aussi. J'ai écrit un roman il y a quelques années qui va être publié en septembre. Donc, pareil, je me dis que ce roman va être publié. Je ne sais pas du tout quel écho il aura, quelle résonance. Est-ce que ça va aussi... Parce que ça parle aussi de soins. Enfin, c'est complètement une fiction, mais ça parle du sujet épineux de la fin de vie. Donc je me dis, voilà, après, est-ce que ça va amener des débats ? Enfin, j'en sais rien. Tu vois, en fait, je me dis que chaque pas en amène un autre. Mais c'est sûr que je ne sais pas vraiment où je vais. Mais je me dis que tant que je suis à l'écoute, que j'essaye de garder cet alignement, en tout cas, de ce moment de grâce que j'ai vécu pendant mon master, d'essayer d'être à l'écoute de ce que je ressens, de ce que je pense, de ce que je fais, des gens qui sont autour de moi, des écosystèmes qui se créent et tout. J'ai l'impression que je ne manquerai pas d'idées. j'arriverai à... continuer mon chemin.

  • Speaker #1

    Alors, je pense que les auditeurs, auditeuses se disent non, on ne se fait pas du tout de soucis sur sa capacité à avoir des idées. Et justement, c'est exactement ce que je me disais, c'est pour des personnes qui nous écoutent, moi j'aime bien demander quels sont les conseils enseignements que tu as envie de partager. Et peut-être, là je vais juste aiguiller sur peut-être une chose, c'est quand on a plein d'idées, comment on se lance en fait sur sur... les projets, aussi divers soient-ils, peut-être aussi éloignés de son enseignement de départ, de qui on est au départ, comment on se lance ? Parce qu'en deux secondes, tu viens quand même de nous dire que tu avais écrit un roman, une fiction en parallèle de tout ce qu'on vient de se dire.

  • Speaker #0

    C'est sur plusieurs années.

  • Speaker #1

    Mais voilà, dans ces enseignements, déjà, quels sont-ils ? Et puis peut-être un petit focus sur comment on se lance.

  • Speaker #0

    Alors déjà je commencerais par une chose quand même et tu l'as dit tout à l'heure et j'ai trouvé ça trop bien que tu remets ça dans son contexte je suis quelqu'un de privilégié aujourd'hui dans le sens où j'ai une profession qui me permet de travailler à mi-temps et de suffisamment en tout cas gagner ma vie pour pouvoir satisfaire aux besoins de ma famille et puis j'ai aussi la chance d'avoir un conjoint qui m'aide un peu dans cette qui m'aide matériellement aussi enfin je veux dire sur cette espèce de transition parce qu'en fait ma thèse elle est pas financée j'ai pas de contrat doctoral et tout donc en fait la plupart des choses que je fais aujourd'hui c'est du bénévolat voire du quasi bénévolat quand tu donnes des cours dans des DU t'es très peu payé donc voilà juste pour garder ce côté matériel en tête évidemment parce qu'on pourrait dire il faut du courage il faut de l'audace enfin j'en sais rien mais j'ai quand même la chance d'avoir un métier qui me permet de le faire et un soutien familial qui me permet de le faire Donc ça, c'est quand même un premier truc.

  • Speaker #1

    Et merci de le dire ici.

  • Speaker #0

    Ce n'est pas juste un truc pour remettre tout à zéro. Déjà ça. Ensuite, les conseils que je donnerai avant de se lancer, c'est très court, trois petites phrases, mais en gros, déjà, ce n'est pas parce que vous n'êtes qu'on. On n'a pas besoin d'être dans une case pour être légitime et que parfois, c'est en créant nous-mêmes nos propres formes qu'on arrivera à le mieux. contribuer justement pour la société ou pour les gens qui nous entourent, qu'on contribuera le mieux. Oser à être inclassable, oser être pluriel, à être complexe, parce qu'en fait, à chaque fois que vous osez être ça, ça ouvre un espace pour les autres femmes autour de vous, pour les autres hommes. En tout cas, comme on a vachement parlé de ça, moi, j'ai été énormément inspirée par plein de femmes, que des femmes d'ailleurs. J'ai vraiment trois femmes en tête qui m'ont beaucoup inspirée et qui... elles, en étant complexes, inclassables et plurielles, m'ont permise, m'ont autorisé peut-être à l'être aussi. Et puis, sur ce côté, on se lance. Mais ça, c'est pareil, parce que j'ai la chance d'avoir un soutien quand même matériel. Mais je pense qu'il faut parfois oser aller dans une direction, même si on n'a pas un plan de route. complètement établie. Ce n'est pas parce que tout n'est pas... Moi, j'ai l'impression qu'en tout cas, ce qui m'a rendue forte, ce n'est pas forcément de tout maîtriser, mais c'est plutôt justement de me lancer dans des projets dont j'avais envie sans savoir exactement où ça allait aller. Mais finalement, à partir du moment où on se met dans une espèce de dynamique d'action, en fait, il se passe des trucs. Il se passe des trucs parce qu'on rencontre des gens, parce que... Après, il faut de la patience. C'est un peu facile aussi pour moi de dire, par exemple, mon roman qui va être publié là, c'est un projet, ça fait quatre ans que je le mène. Donc voilà, il faut parfois être patient.

  • Speaker #1

    La ténacité, finalement.

  • Speaker #0

    Voilà, la ténacité. Et alors du coup, je rajouterais un dernier truc. C'est que du coup, j'ai l'impression qu'il faut quand même avoir une forme de confiance, même s'il peut y avoir des moments de désespoir, mais des moments où on se dit, mon Dieu, je me suis lancée dans cette idée folle. Alors qu'en fait... s'en train de merdouiller, puis en plus de ces gestes-là qu'on apprend. Mais pour avoir un peu confiance et justement, je pense, pouvoir raccrocher avec les gens autour de nous qui nous aident à continuer d'avancer, je pense qu'il faut d'abord avoir, enfin, prendre le temps de savoir qui on est. C'est ce qu'on disait au début, mais en tout cas, d'essayer de se reconnecter avec le soi profond, c'est-à-dire avec vraiment qui on est au fond. font, enfin en tout cas, des choses, qu'est-ce qui nous anime ? Il faut prendre soin de son intériorité pour pouvoir ensuite aller vers les autres et s'engager pour le monde. Et ça, c'est pas évident parce que comme tu le disais très justement, on a eu plein d'injonctions, plein de normes sociales depuis qu'on est gamin. En fait, on s'est conformé à toutes ces normes parce qu'on a envie de plaire, on a envie de reconnaissance, on a envie d'être performant. Et je pense qu'il y a plein de gens qui... Moi, la première, on s'égare du coup. À force de vouloir répondre à ses attentes extérieures, on en oublie qui on est. Et ce n'est pas un truc narcissique, je pense, de dire qu'il faut prendre soin de soi. Je pense que c'est en tout cas un pilier essentiel pour pouvoir s'engager pour les autres et pour le monde. Ça, c'est sûr.

  • Speaker #1

    Il y a un côté, c'est un côté que je trouve assez intéressant, qui est développé dans les théories d'organisation d'entreprise, dans lequel, en fait, finalement, la singularité des humains, qui on est de manière très profonde, va... permettre à créer des entreprises, un système, un écosystème qui ira bien. Et c'est plutôt dans le fait de se conformer dans ce qui doit être bien que notre singularité va être complètement étouffée et que finalement, on ne va vraiment pas avoir l'apport au monde qu'on devrait avoir. Alors, je sais qu'il y a des personnes, effectivement, tu le disais très justement, là, on parle toutes les deux parce qu'on a le temps de se poser et de réfléchir. Mais en même temps, je pense qu'il faut aussi se dire, moi je pense que c'est important, qu'il y a des gens qui ont le temps, mais qui se conforment et qui finalement n'ont pas un apport au monde qui est juste pour eux, alors qu'ils pourraient le faire. Donc on sait qu'on parle entre personnes privilégiées, mais comme tu dis, prendre soin du monde, c'est d'abord prendre soin de soi, de sa singularité. Je suis vraiment fondamentalement persuadée que si chacun et chacune trouve sa place, alors le monde ira clairement beaucoup mieux. Donc, c'est un peu le leitmotiv de ce podcast. Et donc, je trouve ça très chouette que tu en parles ici. Donc, merci beaucoup pour ces précieux conseils. Je pense qu'ils vont résonner énormément pour les personnes qui nous écoutent, qui peut-être sont au milieu du guet, tu vois, qui sont déjà, qui sont en cette case un peu trop petite.

  • Speaker #0

    Allez-y, foncez.

  • Speaker #1

    Voilà. Et puis aussi, se dire que ce n'est pas immédiat. Merci beaucoup de l'avoir dit. Ça prend du temps. Ça prend du temps, ça gratte, c'est compliqué. Et parfois, c'est simplement une histoire d'oser prendre un week-end. pour postuler à un DU, à une formation qui, sur le papier, a l'air chouette, mais on ne sait pas vraiment ce que ça va donner. Et voilà, il faut oser, finalement. J'ai envie de te poser la question, parce que je sais que ce sera génial et riche d'enseignements, comme tu as l'air d'être friande de médias. Dans les Alignés, on aime partager des médias, podcasts, ressources qui t'ont nourri, toi, pour aller sur ton chemin.

  • Speaker #0

    Alors, je peux peut-être partager... Alors, il y a podcast et puis ouvrage, ou du moins, personne qui écrive. Oui, dans les podcasts, un que je recommande vraiment, c'est Loin des yeux, loin du care de Eva Sadoun. Eva Sadoun, qui est une femme assez formidable. Voilà, c'est des épisodes sur le care. En tout cas, c'est riche d'enseignements parce que ça montre à quel point le care, donc le soin, manque à plein de structures autour de nous. Et comment il faudrait en ramener pour un peu... rendre notre société plus... Parce que le care, c'est essentiel à la vie et pour un peu réhumaniser, redonner un second souffle à toutes nos structures collectives.

  • Speaker #1

    Alors peut-être le care, pour les personnes qui nous écoutent, ils ne connaissent pas forcément. Est-ce que tu as envie de nous partager une espèce de définition de ce que c'est ?

  • Speaker #0

    L'éthique du care, c'est une pensée des années 80. Ça a émergé en tout cas d'une... à la base d'une psychologue morale qui s'appelle Carol Gilligan. C'est une pensée féministe, qui a ensuite été politisée un peu par Joan Tronto, mais en gros, c'est l'idée que nous sommes toutes et toutes vulnérables et que le soin qu'on s'apporte mutuellement fait tenir nos sociétés. C'est un peu compliqué, mais c'est aussi une manière assez différente de lire le monde, justement, parce qu'en fait, la philosophie morale, elle a été longtemps pensée par des hommes. qui prône que l'individu est autonome, n'a besoin de personne autour de lui, est un écosystème à lui-même, etc. Les penseuses du CAIR, elles remettent un peu, elles disent non, pas du tout, en fait, on a tous besoin les uns des autres, on est tous un espèce de réseau de liens et du coup, le fait qu'on soit tous en lien les uns avec les autres engendre des responsabilités et une manière différente, idéalement, d'organiser nos sociétés. Voilà, en tout cas, c'est... C'est mettre du soin partout dans nos relations, remettre de l'attention. Enfin bon, si vous voulez vous embarquer là-dedans, je pense que d'écouter le podcast Loin des yeux, loin du cœur, c'est top. Voilà, ça c'est le premier. Après, bon, ça c'est purement écolo pour ceux qui s'intéressent un peu à la cause écologique. Il y a le podcast Green Letter Club qui est vraiment génial. Moi qui m'a vraiment appris énormément de choses sur l'écologie au moment où j'en avais besoin. Et après, sur un terrain plus philosophique, je citerai trois auteurs. Alors en un, je citerai Inès Weber, qui est une psychologue pour le coup, mais qui a écrit un bouquin qui s'appelle « Être soi, une quête essentielle pour le monde » . Peut-être que je déforme un peu le titre, mais c'est chez Gallimard. Et justement, moi, j'ai été bouleversée par cette lecture. Justement, Inès Weber, elle dit à quel point on s'est complètement décrochée de notre... de notre soi profond et qu'en fait, on a une espèce de moi social qui gouverne un peu notre vie et que le seul moyen d'être vraiment utile au monde et de se battre et de s'engager et de contribuer à un monde plus juste, plus relié, etc., c'est de déconstruire plein de choses, d'enlever un peu plein d'espèces de couches d'oignons et d'essayer de voir, au fond, ce qu'on aspire, ce qui nous rend heureux. Enfin, voilà. Donc, elle, elle est psychologue et elle dit qu'en fait, elle voit sur son divan plein de gens qui vivent des crises existentielles les allées. elle essaye de donner des réponses, de dire que c'est peut-être la société qui nous a justement enfermées dans ces cases, mis plein d'injonctions sur le dos et que quand même, le véritable moyen de contribuer, c'est quand même d'aller chercher au fond de nous. Ça n'a rien à voir avec le développement personnel, ça n'est pas un égotrip, c'est vraiment quelque chose de nécessaire. Et après, dans la même veine, du coup, il y a Abdenour Bidar qui a écrit un bouquin qui s'appelle « Les tisserands » qui est merveilleux, qui est un peu dans la même idée, mais de dire... que pour lui, il faut qu'on prenne soin des liens qui ont été abîmés. Et donc, il dit qu'il y a trois liens importants. C'est le lien à soi, le lien aux autres, le lien au monde. Et lui, en fait, il développe cette posture du méditant-militant qui dit que pareil, en fait, il faut soigner, prendre soin de son intériorité pour pouvoir ensuite agir sur le monde. Et tu parlais tout à l'heure du Schumacher College. Mais voilà, de cette idée de si on ne veut pas partir en burn-out militant, il faut aussi prendre soin de soi. de vraiment relier que Pour lui, il dit que l'un ne doit pas aller sans l'autre. On ne peut pas faire que méditer et rien faire ou que être dans la méditance. Il faudrait idéalement se nourrir de la méditation pour pouvoir ensuite agir sur le monde autour de soi.

  • Speaker #1

    Et encore une fois, finalement, tu vois, ça devenir un « ou » .

  • Speaker #0

    Oui, et en effet, dire qu'on peut être les deux à la fois, nourrir une forme de spiritualité ou de vie intérieure fertile pour qu'ensuite on puisse... Mieux prendre soin des autres et du monde. Et ça, je pense que tout le monde l'expérimente. Lui, c'est un philosophe, mais il l'explique avec ses mots de philosophe. Et c'est génial. Mais je pense qu'on a tous ressenti que quand nous, on a les batteries à plat, qu'on est perdu, etc. On est incapable d'avoir une écoute active pour quelqu'un qui a besoin de nous. C'est difficile de s'engager pour des projets qui vont nous demander l'énergie parce qu'on n'en a déjà pas. Je pense que c'est un peu du bon sens.

  • Speaker #1

    Oui. Et en même temps, c'est un peu ce qu'on se disait tout à l'heure. Le côté militant, la case militant, parfois, on se sent... Tout à l'heure,

  • Speaker #0

    tu as utilisé un mot pour te décrire. Oui, je vais dire que...

  • Speaker #1

    Tu as dit que tu étais intellectuelle.

  • Speaker #0

    Oui, une forme de... J'essaye en tout cas d'être... Oui,

  • Speaker #1

    de militante intellectuelle.

  • Speaker #0

    Oui,

  • Speaker #1

    c'est ce que tu as utilisé comme mot. Et je me suis dit, ah, c'est drôle, parce que justement, le fait de mettre ces deux mots l'un à côté de l'autre, c'est quelque chose que j'avais rarement entendu en réalité. Et je pense que des personnes qui nous écoutent se disent que le militant, c'est celui de la rue. C'est celui qui va être au premier rang des manifestations. Et donc, encore une fois, s'autoriser à être toi-même et être dans une forme d'engagement qui te correspond.

  • Speaker #0

    En fait, c'est exactement ça. Pendant que je traversais ma crise d'éco-anxiété vénère, je me demandais même, est-ce qu'il ne faut pas s'engager pour Extinction Rebellion ? Est-ce qu'il ne faut pas ? Être dans Dernière Rénovation, et en fait, je me dis, mais ça n'est pas toi. T'enchaîner à une banque ou t'asseoir sur une voie, empêcher des voitures de circuler, ça ne te correspond pas. Donc en fait, je pense qu'en effet, chacun et chacune... peut mettre de l'engagement dans ce qu'il fait. Et moi, en fait, juste grâce à ce master de philo, je me suis rendu compte à quel point j'étais un peu une intello bisu qui aime bien être à la bibliothèque. Bon, OK, finalement, est-ce que ça ne va pas être ça, ma forme d'engagement ? Parce que c'est un terrain que j'aime bien, le terrain des idées, le terrain de l'écriture. Mais en fait, à nous de trouver, on peut être militant en étant agriculteur et faire de l'agroécologie. On peut être militant en étant une infirmière qui continue de prendre soin de ses patients d'une certaine manière. On peut être militant en étant coach professionnel et en remettant de l'inclusivité, de l'inclusion dans les boîtes. Je pense qu'en fait, pareil, militant, c'est devenu un gros mot. Il y a un essai qui est sorti il y a pas longtemps qui s'appelle « Militer, verbe sale » d'une époque. En fait, on a décrédibilisé le militantisme. on l'a dévalorisé parce qu'en fait je pense que le système préfère des gens qui se conforment parce que c'est plus facile de driver une société comme ça, donc les militants maintenant en effet du coup le premier truc qu'on a en tête c'est genre éco-terroriste, des gars qui ont pété des bassines qu'on fait ci, qu'on fait ça, en fait je pense qu'il y a vraiment plein de formes de résister on peut peut-être plutôt utiliser ce mot de résistance que de militantisme parce que peut-être que c'est plus polissé entre guillemets et que tout le monde s'entend dessus mais en tout cas je pense qu'on peut tous résister à ce qui nous semble injuste avec les armes qu'on a et qui on est. Oui,

  • Speaker #1

    ce qui me fait penser au livre de Salomé Sacké, Résister. C'est vrai que c'est un mot qui devient assez actuel et qui est assez juste aussi. Donc, on retient ces ressources-là. Est-ce qu'il y a d'autres ressources que tu as en tête ?

  • Speaker #0

    Après, pareil, il y a... Non, après, des ressources... Moi, il y a un philosophe que j'adore qui s'appelle Jean-Philippe. Ceyron, qui pour moi est un penseur incroyable parce qu'il pense le soin, il pense l'écologie, il pense la poésie, la résistance poétique un peu. C'est un philosophe contemporain qui a écrit plein de bouquins. Je tous les recommande parce que il est super gentil dans la vraie vie. J'ai l'impression. J'ai eu quelques échanges très rapides avec lui. Pour moi, c'est un philosophe qui fait du bien à lire et qui est accessible à lire ou à écouter en podcast. Il n'a pas participé à des podcasts et tout. Et après, en termes d'inspiration, mais après, je ne sais pas, ça peut être une ressource aussi. Il y a une nana que je trouve formidable qui s'appelle Victoire Sato, qui a fondé un média qui s'appelle The Good Good. En fait, elle se bat un peu pour la mode responsable, on va dire. En tout cas, elle est au service de l'écologie dans le milieu de la mode. Et enfin, bon, après, c'est perso, mais vu qu'à la base, c'est une nana qui était radiologue. donc forcément moi ça me parle parce que je suis radiologue et qui elle pour le coup a carrément arrêté d'exercer pour se lancer complètement dans son média et elle pour moi c'est typiquement la femme plurielle parce qu'à côté de ça elle est aussi artiste collagiste, donc elle fait des oeuvres, elle est vraiment une artiste elle s'est lancée dans un projet d'architecture résiliente en Normandie je crois elle est en train de construire, de rénover un truc de ouf, une ferme qu'elle veut transformer en lieu d'échange, en lieu hybride de résidence artistique. Pour moi aussi, pour tous les gens qui se sentent pluriels et qui ont besoin de modèles, Victoire Sato, franchement, elle déchire.

  • Speaker #1

    On sent qu'on va l'inviter au micro des animés.

  • Speaker #0

    Je pense qu'elle aura plein de choses à dire.

  • Speaker #1

    Génial. Une question que j'aime bien poser, c'est qu'est-ce qu'on peut te souhaiter après tout ça ?

  • Speaker #0

    Merci. de bien vivre mon postpartum numéro 3 on peut me souhaiter je pense de garder la confiance même quand ça tangue même si je ne sais pas trop où je serai dans 3-4 ans de rencontrer des gens super sur la route de créer du lien tout le temps c'est ça d'être heureuse en lien en confiance et toujours créer des ponts Salut ! des espaces et de la réflexion.

  • Speaker #1

    Merci. Et pour les personnes qui ont adoré cet épisode, qui ont envie de te suivre sur ton chemin, comment on peut te suivre ?

  • Speaker #0

    Alors, j'ai un compte Instagram, où c'est mon nom, Amélie Cadier-Lauriau, où je poste peut-être pas suffisamment, mais en tout cas, je suis toujours hyper heureuse quand des gens m'écrivent, partagent. des petits morceaux de leur vie, des questions. Je trouve ça hyper précieux. Et pour l'instant, j'ai eu que des échanges super avec les gens qui m'ont écrit. C'est vrai que je ne partage peut-être pas assez régulièrement, mais j'essaye de mettre un peu de contenu de temps en temps. En tout cas, c'est un moyen de me contacter aussi et d'échanger, de créer des trucs. Et après, j'ai une page LinkedIn qui est quasiment morte. Mais pareil, j'ai... J'ai pour projet de la nourrir de quelques articles. Donc voilà, si vous avez que LinkedIn, je fais aussi. Sur ce réseau social, oui.

  • Speaker #1

    Et ton bouquin sort quand exactement ?

  • Speaker #0

    Mon bouquin, c'est un premier roman, c'est une fiction. Et ça sort le 11 septembre prochain. Et ça s'appelle « Avant que tu ne t'en ailles » .

  • Speaker #1

    Écoute, j'ai adoré cet échange. Merci beaucoup d'avoir partagé tout ça au micro des Alignés. J'espère juste... que probablement dans quelques années, on se fasse une autre session pour savoir où tu en es dans quelques temps et où t'as mené cet alignement, ce chemin d'alignement. Mais merci beaucoup,

  • Speaker #0

    Amélie. Merci à toi, Charline. Je suis vraiment ravie.

  • Speaker #1

    Merci beaucoup. À très bientôt.

  • Speaker #0

    À bientôt.

Chapters

  • Introduction et présentation du podcast

    00:06

  • Rencontre avec Amélie Cadiel-Loriot

    02:38

  • Qui est Amélie ? Son parcours de vie

    03:20

  • Moments de désalignement et d'alignement

    06:50

  • Crise d'éco-anxiété et transformation personnelle

    17:42

  • Le master en philosophie de la santé et l'alignement

    22:30

  • Projets futurs et engagement personnel

    39:50

  • Conclusion et ressources à partager

    58:10

Description

Aujourd'hui, je suis ravie d'avoir à mon micro Amélie Cadier-Loriaud , une femme aux multiples facettes : médecin, doctorante en philosophie, professeure de yoga, écrivaine, et maman de trois enfants. Son parcours est une invitation à reconsidérer nos cases.


Dans cet épisode, Amélie nous raconte son cheminement, de la petite fille de la campagne rêvant d'être écrivaine à la médecin qui se sent à l'étroit dans sa "case". Elle nous partage les moments de désalignement qui l'ont menée à une crise existentielle , mais aussi les rencontres inspirantes et les décisions audacieuses qui l'ont aidée à tisser un lien entre ses différentes passions.


On parlera de la difficulté de s'affranchir du regard des autres , de la richesse de la pensée complexe , et de l'importance de la singularité. Amélie nous prouve qu'on peut être à la fois dans le soin des gens et le soin des idées, et qu'on peut s'engager pour le monde tout en trouvant sa propre place.


✨ Si veux en savoir plus sur Les alignées, file découvrir le site internet www.lesalignees.com ou sur mon LinkedIn dans lequel tu découvriras comment nous oeuvrons pour transformer le monde professionnel pour plus d'alignement des salarié·es et la mixité femme/homme.


Pour suivre Amélie :

Son instagram


Pour aller plus loin :

  • Eva Sadoun - Loin des yeux loin du care

  • Green Letter club.

  • Inès Weber - Etre soi une quète essentielle pour le monde.

  • Abdennour Bidar - Les Tisserands.


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Bienvenue sur Les Alignés, je suis Charline Moreau, consultante et coach en entreprise, et depuis plus de 3 ans, je tends le micro à des femmes qui ont osé aligner leur vie avec leurs valeurs. Depuis toujours, ce sont des conversations authentiques avec des femmes sur leur parcours qui m'ont permis de profondément questionner ma vision de l'ambition et de la place que je voulais prendre. Alors je me suis dit... que ces échanges intimistes pourraient inspirer d'autres personnes s'ils étaient diffusés plus largement. C'est comme ça que les alignés sont nés. Tous les 15 jours, je partage avec toi des discussions inspirantes où l'on parle de tout. De pro, de perso, de passion, de reconversion, de réussite, de doute ou encore d'engagement. Parce que trouver sa place en tant que femme dans la société est un cheminement. Et chaque parcours peut nous éclairer. Si ce podcast te plaît déjà, j'ai besoin de toi pour le faire grandir. Partage-le à une personne qui en a besoin. Et surtout, laisse-moi un commentaire et 5 étoiles sur ta plateforme d'écoute préférée. Je sais, ça n'a l'air de rien, mais c'est vraiment très utile pour moi et pour faire connaître ce podcast. Maintenant, je laisse la place à ce nouvel épisode des Alignées. Bonjour Amélie !

  • Speaker #1

    Salut Charline ! Tu vas bien ? Très bien, merci ! Écoute,

  • Speaker #0

    je suis ravie de t'avoir ici à ce micro. Il faut savoir qu'on est l'une en face de l'autre à Bordeaux City, avec une vue à 360 sur Bordeaux qui est assez exceptionnelle.

  • Speaker #1

    Magnifique !

  • Speaker #0

    Voilà, et je suis très très heureuse d'être venue jusqu'à toi pour cette interview, parce que ça fait quelques mois qu'on s'est rencontrés en vrai, et je sais que cette interview va pouvoir... pouvoir éveiller des consciences, peut-être des réflexions autour des sujets qui toi t'animent. Voilà, j'ai hâte de notre conversation. Pour commencer, j'ai une question que je pose à toutes mes invitées, parce que les personnes qui nous écoutent ne te connaissent pas forcément, qui semble simple cette question, mais qui en réalité est assez complexe. La première question pour toi Amélie, c'est Amélie Cadiel-Loriot, qui es-tu ?

  • Speaker #1

    Merci beaucoup Charline, merci de m'avoir proposé cette rencontre. Alors, qui suis-je ? J'ai en effet vaste question à laquelle je ne sais même pas si je serais bien capable de répondre. Mais je dirais que je suis une fille de la campagne à la base. Donc, c'est un point important. J'ai grandi au milieu des vignes, élevée par des parents viticulteurs. Et puis, je suis devenue médecin. J'ai fait des études de médecine que j'ai un peu décidé de faire sur le tard. Parce que moi, quand j'étais enfant, mon rêve, c'était d'être écrivain. Mais voilà, pour mes parents, agriculteurs qui avaient un métier difficile, etc. Écrivain, ça semblait être un métier très instable, très insécure. Et ils souhaitaient pour moi le meilleur. J'étais bonne élève et ils m'ont dit, fais un vrai métier, entre guillemets. Et puis, si un jour, tu as envie d'écrire des livres, tu écriras. Donc, j'ai choisi de faire de la médecine, je pense, pour nourrir une forme de besoin de me rendre utile. Je me disais qu'en étant médecin, ce serait forcément une profession utile aux autres. J'aimais bien les sciences, j'aimais bien comprendre comment fonctionnait le corps humain. C'était quelque chose qui m'attirait pas mal. Donc, j'ai fait médecine, je suis devenue médecin. Et puis, assez vite, je me suis un peu sentie à l'étroit dans ma case de médecin. Et j'avais besoin de plus de créativité, de renouer avec l'écriture. Et aujourd'hui, du coup, je suis aussi doctorante en philosophie. J'ai réduit mon temps de travail pour essayer... de nourrir ma pensée différemment. de prendre soin des idées, en plus de prendre soin de mes patients. Et puis, je consacre pas mal de temps à l'écriture aussi, plus de fiction, de poésie. Et puis, sur le chemin, vu que je ne me trouvais pas assez polyvalente, j'ai aussi passé un diplôme de professeur de yoga. Et donc, j'enseigne un petit peu le yoga depuis un an. Je suis aussi maman de deux petites filles. J'attends un petit troisième pour dans... un peu moins d'un mois. Voilà, je ne sais pas si ça fait... C'est vrai que je me suis pas mal définie par mes professions au final, mais bon voilà, ça donne un petit aperçu.

  • Speaker #0

    Je pense que c'est exactement la manière dont tu t'es livrée à nous la première fois que je t'ai rencontrée, où j'ai vu ton ventre rond, où je ne te connaissais pas du tout et où tu as énoncé la pluralité de tout ce que tu étais et tout ce que tu faisais dans la vie. Et je ne te cache pas que c'est vraiment la première étape qui m'a donné envie d'en apprendre un peu plus sur toi. Et la première chose que je me suis dit, c'est « waouh, elle s'est autorisée à être tout ça en même temps » . C'est la première chose qui m'est venue, moi, à l'esprit quand tu t'es présentée. Donc là, peut-être que c'est déjà la chose que les auditeurs, auditrices sont en train de se dire, c'est « waouh, elle s'est autorisée à être tout ça » . Mais j'imagine qu'on n'en arrive pas à être tout ça si facilement. Et tu le sais, dans ce podcast, l'idée, c'est que les femmes parlent aux femmes en particulier, mais on a aussi des auditeurs hommes. Et c'est de retracer ce parcours d'alignement que tu as eu. Donc là, effectivement, on t'imagine petite fille dans les vignes avec un papa, une maman, peut-être des frères et sœurs. Et en fait, on a envie de savoir quel a été pour toi le tout premier moment que moi, j'ai appelé le moment d'alignement, mais qui en réalité est plutôt un moment de désalignement. où tu as senti que tu avais vraiment besoin d'aligner ta tête, ton cœur et ton corps.

  • Speaker #1

    Oui, en effet, aujourd'hui, je me sens plutôt alignée, même si on pourra revenir dessus. Je pense que l'alignement, c'est un processus hyper dynamique. On évolue sans cesse, on se transforme sans cesse. Clairement, j'ai l'impression que sur le papier, on pourrait se dire « elle s'est autorisée à être tout ça à la fois » , mais ça a été un chemin. Pas forcément facile. Je me suis sentie la plupart du temps désalignée, on ne va pas se mentir. Donc, je vais d'abord parler du désalignement pour ensuite essayer de répondre à ta question d'un grand moment d'alignement, parce que je pense que j'en ai vécu un il n'y a pas si longtemps que ça et qui, je pense, me permet d'aujourd'hui accepter tout ce que je suis. Mais déjà, comme je te disais, j'ai censé s'être étirayée par à la fois, je pense, une âme un peu créative, artiste. Je ne dirais pas ce mot-là parce que je ne me sens pas artiste, mais en tout cas avec envie de créer. d'écrire, d'avoir pas mal d'imaginaire et tout. Et à la fois, j'étais une super bonne élève, très scientifique aussi. Donc, ça a toujours été difficile. À chaque fois qu'il y a eu des choix à faire, en première, quand on choisit S ou L, mes profs de français voulaient que je fasse L, mes parents voulaient que je fasse S, parce que S, ça gardait toutes les portes ouvertes. Bref, j'ai toujours un peu fait des choix par défaut. Finalement, je rentre dans ces études de médecine. Pas par défaut, parce que je me convainc que c'est super de faire ça et que ce sera un métier génial, etc. Mais en fait, dès la première année de médecine, ça s'est bien passé. Puis en fait, on a la tête dans le guidon, on passe le concours. On ne se pose pas tant de questions que ça. Je me souviens de me sentir, pour le coup, d'avoir un espèce de mini flash d'alignement. Je suis sur mon vélo, je viens d'apprendre mes résultats au concours et que je suis reçue en deuxième année. Et là, je me dis, waouh, génial, c'est trop bien et tout ça. Puis en fait, des gringolades assez rapides dès la deuxième année de médecine. En fait, je dirais que de la deuxième... à la sixième année au moment où on passe l'internat. Tous les ans, je me demandais un peu, mais qu'est-ce que je fous là ? Je ne me sentais pas du tout alignée avec mes autres amis, les autres étudiants en médecine autour de moi. À l'époque, je crois aussi que je mettais pas mal la responsabilité sur le système d'enseignement de la médecine qui était un peu old school, par l'hôpital qui ne va pas forcément très bien. Et en fait, dès que tu fais des stages assez rapidement, tu te rends compte qu'il y a des trucs qui clochent un peu. D'avoir une sorte de déception et de ne pas forcément sentir à ma place. Je me revois dire à mes parents, en fait, j'aurais dû faire Sciences Po. En fait, je n'aurais pas dû faire ça. Et en fait, une fois que tu es dans les études de médecine, tu te dis quand même, c'est bête de quitter le navire. J'aimais quand même ça. J'aimais les gens. J'aimais apprendre des choses intéressantes sur le corps humain, la physiopathe, les pathologies, la pharmaco et tout. Mais bon, bref, des années un peu inconfortables quand même. Puis voilà, tu continues d'y aller parce que tu te dis que tu auras un métier à la clé, un chouette métier. Bon, tu serres un peu les dents. Et puis vient l'internat. Et là, en fait, désaligné encore. Tu commences à bosser, tu es à l'hôpital, tu gagnes ta vie, tu te dis indépendant par rapport à tes parents.

  • Speaker #0

    Et en fait, moi, je me pose la question parce que tu dis que tu es bon élève. Effectivement, déjà, la première chose que j'ai envie de dire quand je t'entends, c'est comme tu l'as très bien dit, tu t'es persuadé que c'était la bonne chose pour toi. Donc toi, tu étais à fond, même si derrière, il y avait une espèce de petite voix qui te grattait en te disant « Je ne suis pas tout à fait à ma place » . tu arrives quand même à passer cette première étape et tu passes la deuxième étape. En fait,

  • Speaker #1

    à chaque fois, c'est vrai que je passe les examens haut la main. J'ai toujours des super résultats parce qu'en fait, je suis besogneuse, travailleuse. Je ne veux pas décevoir mes parents. Oui, j'étais contente de bien réussir. En fait, ce qui est compliqué, et comme tu dis, ça gratte, c'est que tu as une partie de toi qui est quand même contente de faire ça, mais une autre qui, petite voix, n'arrête pas de dire en fait, est-ce que je n'aurais pas été mieux ailleurs ? Mais en fait, le truc, c'est que tu... je pense que je suis une personne « raisonnable » , très souvent, tu as une espèce d'autre petite voix qui te dit « oui, mais l'herbe du voisin, elle n'est pas toujours plus verte. » Tu n'arrêtes pas de te dire que tu serais mieux ailleurs, mais tu serais mieux où vraiment ? Parce que les autres parcours ne sont pas forcément imparfaits non plus. Après, tu finis toujours par te dire « est-ce que c'est que je suis une éternelle insatisfaite ? Est-ce que je suis trop exigeante ? » Finalement, c'est plus confortable de rester là où tu es. En fait, ces petites voix qui parlent en te disant « t'es pas à ta place » , t'arrives facilement à les faire taire, en fait, j'ai envie de dire, jusqu'à un certain point.

  • Speaker #0

    Oui, mais justement, je pense que les personnes qui nous écoutent, il y a beaucoup de personnes qui sont soit dans des gros, gros moments, tu vois, où ils se cherchent, ou je sais qu'il y a aussi des jeunes qui nous écoutent et qui se posent des questions, tu vois, un peu comme s'ils avaient un problème de ne pas avoir cette illumination lors des études, où vraiment, ils sentent que c'est pas exactement le bon endroit. Je trouve que c'est intéressant d'avoir ton exemple et on va voir la suite de ton parcours pour te dire que même au début de tes études, ce n'était pas forcément évident pour toi.

  • Speaker #1

    Non, tout à fait. Et après, on va poursuivre, mais je ne regrette rien de tout ce que j'ai fait avant. Je regrette vraiment. Il y a eu après des moments où j'étais peut-être un peu en colère, où je me dis finalement, je me suis trop conformée à une norme sociale. J'ai voulu faire plaisir et du coup, j'ai fait tous ces choix-là. Et en fait, ce n'était pas les bons. Aujourd'hui, je n'en suis plus. plus du tout là, je ne suis pas du tout en colère, je suis hyper apaisée et je me dis que finalement, tout ce qui s'est passé avant m'a appris énormément de choses et je n'en serais pas là aujourd'hui si je n'avais pas persisté dans ces études de médecine. Au final, on y vient. Mais voilà, en tout cas, on peut se sentir très désaligné assez tôt. Finalement persévéré, puis après je deviens interne. Et puis, après, c'est très prenant. Les internes hôpitales travaillent énormément, on fait tourner les services. J'ai appris beaucoup de choses, donc moi je suis devenue radiologue. Mais avant ça, j'ai fait un an de gastro-entérologie. En fait, j'avais choisi une première spécialité. Au bout d'un an, j'ai fait un droit de remords, je suis devenue radiologue. En fait, ça n'allait pas non plus à ce moment-là. Je ne me sentais pas du tout à ma place en gastro-entérologie, alors que c'était une spé que j'adorais. Mais en fait, l'hôpital va vraiment, vraiment mal et broie les humains. Et en fait, je me suis vue devenir un peu l'ombre de moi-même. Et je me suis dit que la formation que j'avais commencé à faire en gastroenterologie ne me permettrait pas de m'épanouir en dehors du travail. C'était tellement prenant, tellement difficile, etc. Bref, j'ai bifurqué à ce moment-là déjà une première fois. J'ai fait de la radiologie. La radiologie, c'est une spécialité passionnante, intellectuellement très nourrissante. C'est très scientifique. Je pense que ça venait combler un peu aussi. Ça venait nourrir plutôt. mon côté un peu geek, scientifique, etc. Mais il y avait d'autres inconvénients. C'est que j'étais un petit peu plus coupée des patients. J'étais moins dans le soin. Donc, assez vite aussi, de nouvelles questions. Mais est-ce que tu es vraiment à ta place ? Et puis, je pense, le coup de grâce. Je me suis sentie quand même désalignée, je pense, pendant toutes mes années de médecine. Même si j'ai toujours réussi à... Pas poker face du tout, mais ce que je veux dire, c'est que... Je n'étais pas marginalisée du tout. Je pense que c'était insoupçonnable pour les gens autour de moi que j'étais désalignée.

  • Speaker #0

    J'ai envie de rebondir là-dessus parce qu'effectivement, le désalignement peut être quelque chose qui est latent, sous-jacent, un espèce de questionnement. Mais comme tu dis, tu continues à avancer à ce moment-là. Et finalement, les autres possibilités sont peut-être alléchantes. Mais il y a cette fameuse petite voix qui te dit... Est-ce que c'est vraiment plus alléchant ailleurs ? Est-ce que l'herbe est plus verte ailleurs ? Tu le dis très bien. Et en plus, clairement, tu as parlé de choses très importantes qui, je pense, ont résonné beaucoup avec les auditeurs et auditrices. Clairement, tu vas devenir médecin en termes de normes sociales, en termes d'attente de ta famille, où tout de suite, tu as posé ça comme base. Tu répondais aussi à ce besoin de sécurité et de statut. finalement. Donc, c'est pas si simple de jeter tout ça à la poubelle. C'est vrai qu'il y a ce côté-là aussi. Et si on se remet à ta place, je trouve ça hyper intéressant que tu mettes tout ça en perspective comme jeune futur médecin et tout ce que ça implique. Et on peut imaginer tout ce qui pouvait se passer en toi.

  • Speaker #1

    Ouais, c'est exactement ce que tu décris. Je rappelle quand même que j'étais quand même satisfaite de plein de choses. Je pense que je suis quelqu'un de très curieux, sérieuse et tout. Et en fait, j'arrivais... Je veux dire aussi, j'avais assez de nourriture quand même pour rester. C'est-à-dire que j'aimais faire des beaux diagnostics en radiologie. J'ai trop aimé apprendre un tas de trucs. J'ai aimé le contact avec les patients. J'ai aimé mes collègues, mes chefs. J'ai aimé l'hôpital. Il ne faut pas non plus croire que ce que je vivais était un calvaire. Sinon, évidemment, je ne serais pas restée.

  • Speaker #0

    Et justement, je trouve que c'est ça qui est intéressant dans ton parcours. Et je pense que là, après, on va pouvoir voir les différentes couleurs, les différents vernis que tu as su ajouter pour justement te nourrir. Tu utilises beaucoup le mot nourrir, qui me semble hyper intéressant, hyper approprié. Et je pense que les personnes qui nous écoutent se disent mais oui, en fait, à aucun moment, on juge du fait que tu n'es pas été OK à ce moment-là, peut-être te poser des questions. mais C'est vrai qu'au micro des alignés, on s'autorise à se dire que oui, tu n'avais ni l'accord d'au-coup, ni des problèmes financiers. On est d'accord qu'on parle entre personnes avec beaucoup de chance dans la vie. On est des privilégiés. Mais ça n'empêche que ce podcast existe aussi parce qu'à l'intérieur de certaines d'entre nous, il se passe des choses et ça fait du bien d'avoir des espaces pour en parler.

  • Speaker #1

    Complètement d'accord. Et je pense que c'est important en effet de partager aussi ça parce que très longtemps, je me suis un peu flagellée. je le disais, je le répète, je me disais c'est peut-être moi le problème, je suis une insatisfaite. J'ai consulté pour ça. Et en fait, j'ai fini par comprendre que non, ce n'était pas une histoire d'insatisfaction, c'était que cette case-là, elle était trop petite pour moi et j'avais besoin de plus d'espace pour exprimer plein d'aspects de ma personne. Et donc, bon bref, ça c'est tout mon parcours d'étudiante en médecine, puis d'interne, puis de médecin. Et puis en fait, j'ai pris, je ne sais pas, j'ai vécu une sorte de crise existentielle, même si je ne sais pas si ce mot veut dire grand-chose, mais il y a une espèce de conjonction de plusieurs éléments. Je suis devenue maman, et ça je pense que plein de femmes à ton micro l'ont dit, mais la maternité, ça bouleverse profondément les femmes. Je pense qu'on se découvre, on se transforme, on se métamorphose, on a une forme de lecture du monde qui change. Ça, ça m'a... Ça m'a profondément transformée. Il y a eu la crise du Covid qui a été quand même... Dans le milieu du soin, on l'a vécu de manière assez étrange. Je pense que ça a mis plein de gens sur des chemins de reconversion aussi. Je pense que c'est des moments où on repense un peu notre façon d'exister. Et puis, en plus de tout ça, je ne sais pas si on aura le temps d'en parler, mais j'ai vécu une énorme crise d'éco-anxiété à l'été 2022. J'ai toujours été intéressée par les sujets environnementaux, par l'écologie en général. Et en fait, je ne pensais pas que ça m'arriverait parce qu'il me semblait avoir bien compris les enjeux climatiques, de biodiversité et tout. En fait, pas du tout. Je suis allée à une conférence en juin 2022 qu'une copine donnait et j'y suis allée juste un peu en me disant, bon, elle n'aura pas beaucoup de monde, donc j'y vais quand même pour qu'elle ait un peu de public. Mais je me suis dit, bon, je ne vais pas apprendre grand-chose. En fait, je suis sortie de là. Ça m'a fait une sorte d'électrochoc. Je pense que je n'avais jamais ressenti autant... Enfin, je ne sais pas, ça m'a fait un vrai bouleversement et j'ai vécu une vraie crise d'éco-anxiété, comme c'est décrit dans les bouquins, avec le U inversé, là où tu fais ton deuil. Tu vis toute une période où c'est vraiment la catastrophe. J'étais quasiment collapsologue. Enfin, voilà, j'ai vraiment... Ça m'a... C'était terrible, quoi. Et puis, à ce moment-là, en fait, je me suis aussi beaucoup abreuvée de lectures de podcasts. pour essayer de comprendre le monde d'une manière un peu plus systémique. Et en fait, je pense que c'est un vrai moment de transformation aussi, enfin tout ça. C'est que du coup, je me suis intéressée à plein de sujets sociaux, politiques, économiques, environnementaux, philosophiques. Ma vision du monde a été bouleversée. Et je pense que de vivre un peu toutes ces crises en même temps, enfin voilà, cette espèce de qui je suis en fait, justement, ça m'a aussi amenée à aussi lire, j'en parlerai à la fin peut-être, mais... D'autres bouquins un peu plus sur la recherche du soi profond, qui on est. Bref, tout ça m'a mis dans une espèce de dynamique de réflexion, de transformation. Et c'est là où, dans ce bouillonnement hyper inconfortable, je pense que pendant un an, j'ai été vraiment super mal à me dire qu'est-ce que je vais faire de ma vie. En plus, j'avais l'impression qu'il fallait que je porte un engagement. J'avais l'impression que j'avais un besoin d'engagement. notamment pour l'écologie. Je ne savais vraiment plus qui j'étais, donc j'ai suivi une psychothérapie. Je me suis vachement intéressée à tout ce que je viens de te dire. J'ai hésité à tout plaquer pour refaire une formation d'ingénieur agricole. Franchement, à un moment donné, je me suis dit qu'il ne faut pas que je revienne à la terre. Mes parents étaient agriculteurs, puis du côté de ma mère, ils sont vraiment agriculteurs de père en fils. Je n'ai que des générations d'agriculteurs au-dessus de moi. est-ce que il faut que j'arrête la médecine et que je devienne agri enfin Bref, et c'est à ce moment-là de ma vie où j'ai aussi rencontré des femmes médecins au parcours hyper différent de ce que j'avais vécu jusque-là, qui m'ont énormément inspirée, où je me suis rendue compte qu'on pouvait être à la fois médecin et à la fois d'autres trucs. Qu'on pouvait écrire des bouquins, qu'on pouvait reprendre ses études et faire des sciences humaines et sociales à côté, qu'on pouvait s'engager dans des assos, et surtout que la santé et l'écologie étaient liées. Et c'est un espèce de parallèle que j'avais. Pas fait jusqu'alors, en fait. Je ne sais même pas comment c'est possible, mais en fait, on nous en parle très peu de la santé environnementale en médecine. Et donc, c'est, je pense, au contact de ces femmes, qu'en fait, après, ce n'est que des rencontres. Je me suis inscrite dans une association, j'ai adhéré à une association qui s'appelle Alliance Santé Planétaire, où on est plutôt des soignants, mais il y a n'importe quelle personne de n'importe quel métier est acceptée et bienvenue plutôt. Et en fait, on pense la santé planétaire, c'est-à-dire en fait, on pense que la santé des humains est forcément reliée à celle de notre planète, à celle des animaux, à celle du vivant. Et puis voilà, j'ai rencontré des gens géniaux dans cet assaut. Je ne sais pas, un jour, j'ai cliqué sur un... J'étais dans mes vastes lorsque j'ai passé, je pense, des heures sur Internet à chercher des formations. Des fois, quand on est complètement désaligné et qu'on cherche... à se renouveler, en fait, on passe son temps à chercher des formations, des parcours, des inspirations, etc. Et je suis tombée sur un master de philosophie de la santé qui était à Bordeaux, à l'université Bordeaux-Montagne, à côté de chez moi. Et en fait, j'ai postulé à ce master. En fait, les inscriptions étaient fermées, mais le directeur du master m'a répondu dans la journée en me disant, oui, les inscriptions sont fermées, mais en fait, il nous reste encore quelques places. Si vous me faites un dossier ce week-end, vous l'aurez en secrétaire et je pense que ça passe. Du coup, j'ai fait le dossier le week-end même sans trop me poser de questions et j'ai été retenue au master. Et là, je crois que j'ai vécu un grand moment d'alignement pendant cette année de master de philosophie de la santé. En effet, je me suis sentie en accord avec mes valeurs, avec mes émotions, avec ce que j'avais fait, avec mon métier de médecin. Mais à la fois, mon côté littéraire et tout ça, enfin voilà, d'être... En fait, ce master est incroyable. C'est un master professionnel où il y a donc beaucoup de professionnels de la santé qui sont étudiants. Ça allait de 25 à 60 ans, des personnalités hyper variées, que des parcours de vie, mais incroyables, que des gens qui ont fait mille trucs. Et c'était dingue.

  • Speaker #0

    Et j'ai envie de rebondir sur ce que tu dis, parce que bon, déjà, on n'a pas envie de te couper.

  • Speaker #1

    Je suis désolée parce qu'en plus, je ne suis pas moula en parole.

  • Speaker #0

    Non, mais pas du tout. Non, en fait, c'est juste que tout à l'heure, tu m'as parlé d'une toute petite case. Tu vois, tu disais la case était trop petite pour moi. Et en fait, on avait l'impression que toi, tu n'avais qu'un seul besoin, c'était de créer des ponts avec d'autres sujets. Et en fait, finalement, l'image qui me vient, c'est un espèce de fil, de lien, qui commence à se tisser entre tous ces différents ponts. Et moi, ce que j'apprécie, et merci beaucoup de partager ça au micro des Alignés, c'est le fait que ce soit très inconfortable quand on est dans cette case qu'on sent trop petite, qu'on voit qu'il y a d'autres choses qui peuvent peut-être être source d'inspiration, peut-être te mener vers un toi, un toi Amélie, qui serait vraiment toi. Et je pense que les personnes qui nous écoutent vont se dire, mais oui, c'est exactement là ce que je suis en train de ressentir. Et ce que je trouve aussi très beau, et c'est aussi pour ça que les alunis existent, c'est comment le fait de rencontrer des personnes qui se sont autorisées à ouvrir d'autres portes, créer des ponts entre des matières, entre des sujets, fait que finalement, toi, tout à l'heure, tu as parlé de se nourrir. Tu arrives finalement à t'autoriser à te nourrir d'autres thématiques. Et c'est ça que je trouve hyper intéressant, de comment tu sortes de cette casse pour finalement commencer à tisser le lien et peut-être à t'autoriser à être... plurielle dans ce que tu es.

  • Speaker #1

    Oui, c'est sûr que c'est un peu le déclic de cette année de master. En effet, c'est vraiment à la fois de voir qu'il y a plein d'autres gens qui ont des vies plurielles et que ça ne les rend pas moins légitimes dans ce qu'ils font. Parce qu'après, je pense qu'en médecine, mais parce que je pense que j'avais projeté moi cette image-là, mais en médecine, on est quand même très... Enfin, c'est... Les médecins qui sortent des cases. Bon, maintenant, évidemment, le sujet m'intéresse. C'est que j'ai l'impression d'être une médecin qui sort des cases. J'ai rencontré d'autres profils un peu comme moi. Donc, je sais que je ne suis pas seule. Mais il y en a quand même peu. en fait la plupart du temps on est un peu sur des rails et moi Vachement longtemps, je me suis dévalorisée. Donc, je me suis dit, mais si tu deviens un médecin à mi-temps, est-ce que tu resteras un bon médecin ? C'était vraiment une vraie question. Et du coup, c'est vrai que quand on veut embrasser, on va dire, une activité un peu plus plurielle, parce qu'aujourd'hui, du coup, après ce master, je suis devenue doctorante. Donc, je dois consacrer du temps à ça. Je donne aussi des cours de philo à des soignants. J'ai écrit un bouquin. On pourrait dire que je me suis aussi complètement dispersée et que du coup, ça fait de moi un moins bon médecin. Ça, c'est vraiment ce que j'avais en tête. C'est hyper bête, mais rien que de se dire qu'on peut être médecin et autre chose, je me disais que les gens vont me prendre pour une folle. Et en fait, je me rends compte que c'est complètement une construction mentale. Parce qu'en fait, quand j'ai annoncé à ma boîte, quand j'ai annoncé à mes collègues et mes associés que j'allais bosser moins de temps en radiologie parce que j'allais partir en thèse de philo, etc. En fait, je n'ai eu que des retours ultra positifs. J'étais hyper étonnée moi-même. En fait, les gens m'ont dit, mais... c'est génial que tu fasses ça. Enfin, bon, voilà, j'ai eu des trucs comme quel courage, ou alors, c'est trop génial pour notre boîte d'avoir quelqu'un comme toi, en fait, parce que du coup, c'est trop bien les profils qui prennent du recul, qui essayent de voir plusieurs horizons et tout. tout le monde a été super valorisant et c'est là, en fait, où j'ai capté, où je me suis dit, ah ouais, en fait, c'est pas forcément mal, entre guillemets, d'être un peu slasheuse. Parce que jusqu'à présent, j'avais vraiment peur de ça, de me dire que les gens vont croire que tu es une moins bonne radiologue que les autres parce que tu consacres un peu moins de temps à ton activité clinique. Comme quoi, on peut aussi se mettre des barrières tout seul et s'inventer un espèce de schéma. Moi, j'avais vraiment l'impression d'être complètement coincée dans ma case de médecin et de jamais pouvoir en sortir. En fait, c'est faux, archi faux. Et je pense que pour... Moi, je suis médecin, mais j'imagine que tous les gens qui nous écoutent ont plein de profils différents.

  • Speaker #0

    C'est exactement ce que j'allais dire. Et finalement, tu vois, là, j'étais en train de lire un livre qui revenait sur la construction de qui on est en tant que personne. Tout à l'heure, tu t'es décrite en tant que littéraire ou scientifique. Ou en fait, très tôt, on devient un « ou » finalement. En fait, on devient absolument juste scientifique ou créative ou littéraire. Et en fait, très, très tôt, on nous met ça dans la tête. Et ça a très peu changé depuis les dernières années. Et c'est en ça que finalement se relier toutes ces différentes facettes de cette personnalité. En fait, en coaching, on parle de croyances limitantes. Ce sont des croyances, ce sont des injonctions qui sont dans nos têtes très, très tôt. Et même en tant qu'enfant. Donc, effectivement, pour s'en défaire, il faut y aller à coups de rencontres très inspirantes, de personnes qui nous montrent que c'est possible. Et effectivement, je trouve que c'est génial. Donc moi, la question qui me vient, c'est ce master qui finalement arrive à relier la santé, l'osophie. Qu'est-ce qui t'apprend, en fait ? Qu'est-ce qui va t'ouvrir comme porte ?

  • Speaker #1

    Franchement, je sais pas. J'ai passé une année absolument merveilleuse. C'est pour moi un grand, grand moment d'alignement. Il m'a apporté déjà beaucoup d'apaisement. Alors, je sais pas. Quand j'ai dit ça, en soutenant mon mémoire, à la fin de l'année, mes profs, ils me disaient, mais c'est très bizarre que tu... que je dis ça parce que d'habitude, au contraire, la philo, ça mène plus de questionnements et de... Enfin, pas forcément de l'apaisement. Et en fait, moi, ça m'a beaucoup apaisée parce que je pense que quand je suis arrivée... Je vous parlais de ma crise d'éco-anxiété, etc. En fait, je me suis tellement abreuvée de plein d'ouvrages, etc. J'avais une vision quand même assez radicale, je dirais, des choses. Presque une forme d'envie de révolution, de changement complet du système. J'étais très en colère, je ne sais pas. Très en colère contre notre modèle. capitaliste, extractiviste qui détruit la planète et qui détruit les hommes et qui détruit le vivant. J'étais un peu peut-être trop... Enfin, pas pleine de certitude, mais j'avais l'impression d'avoir compris des choses, d'être en colère et d'être...

  • Speaker #0

    révolutionnaire. Et en fait, ce que m'a amené ce master, déjà rien que pour ce côté-là, un peu de remise en question totale de la société, c'est que ça m'a amené vraiment de la pensée complexe. En fait, en philosophie, on est évidemment, chacun a son avis sur un sujet, mais en tout cas, en philo, on essaye d'être le plus, j'allais dire, je ne sais pas vraiment d'adjectif parfait, mais on essaye de se faire un peu tout le temps l'avocat du diable. Enfin, du moins, on essaye de prendre à chaque fois des idées complètement au pire. presque opposés, c'est le fameux thèse-antithèse-synthèse, mais on essaye de prendre deux chemins, deux courants de pensée très différents, de vraiment approfondir au max les deux courants de pensée pour arriver à ensuite faire une espèce de contre-argumentaire, etc. Et ensuite, soit on essaye de se positionner plutôt pour un chemin ou l'autre, ou bien de chercher une troisième voie. Moi, j'avoue, j'aime bien ce concept. En tout cas, on essaye d'aborder vraiment une pluralité d'idées, de façons de lire le monde. Et en fait, moi, ça, ça m'a amené beaucoup d'apaisement parce que je me suis rendu compte que, c'est pas que ça m'a déradicalisée parce que j'étais pas radicalisée, mais ce que je veux dire, c'est que ça m'a amené de la nuance, de l'humilité, de la complexité, et de me dire, en fait, tout peut être toujours critiqué. Et le but, c'est d'essayer de naviguer dans un monde hyper complexe. toujours en maintenant le dialogue avec les autres. En fait, je me suis rendu compte que si on se polarisait trop, en fait, on rompait le dialogue. Et je pense que ça me touche beaucoup ce que tu dis avec cette histoire de faire des ponts, faire des liens. Moi, c'est vraiment ce que j'ai envie de faire aujourd'hui. C'est faire des ponts entre la santé et l'écologie, faire des ponts entre la santé et la créativité, le récit et le soin, le politique et le soin, de faire du lien entre les gens, entre des univers différents. Et donc, je me dis que j'ai l'impression d'avoir une espèce de mission de ça, d'être dans le lien, dans le dialogue. Et en fait, dans ce master, déjà, ça m'a apaisée. Puis en plus, le master était construit pour qu'il y ait du lien, parce qu'en fait, c'est un master assez unique en France, où à chaque fois que tu as des cours, tu as un soignant ou soignante, enfin quelqu'un issu du milieu du soin, et un philosophe ou un économiste. On a eu aussi, voilà, on a eu philosophe, économiste de la santé, juriste. Enfin, après, voilà, tu as des... professions à dire universitaires en sciences humaines et sociales, sociologues aussi on a eu. Et à chaque fois qu'ils dialoguent, rien que le master est construit dans un dialogue permanent entre des enseignants-chercheurs et des soignants qui vivent des choses sur le terrain. Donc déjà, ce modèle-là, il est absolument magnifique parce qu'il met en lien toujours ce qu'on vit et une pensée philosophique qui permet de prendre du recul sur ce qu'on vit, justement. Donc ça, c'était merveilleux. Et puis après, j'avoue, j'ai eu la chance de tomber dans une promo incroyable. où il y a eu des liens humains hyper forts. C'était une très belle expérience humaine aussi. Et donc, tout ça m'a profondément transformée. Et là, je crois que ça faisait depuis le lycée que je m'étais... Enfin, je ne sais pas, même depuis toujours, je ne m'étais jamais sentie autour à ma place qu'en suivant ces cours de philo de la santé. On me disait en tout cas qu'on pouvait lier pensée philosophique et métier du soin. Et qu'en fait, tout ça, je te dis... Prendre soin des idées, prendre soin des gens, prendre soin du monde. Enfin voilà, qu'il y avait cette espèce de champ des possibles qui s'ouvrait à justement ma pluralité. Enfin, je sais pas, c'est comme si ce que je ressentais, ce que je pensais s'alignait avec un truc possible dans la réalité, en fait.

  • Speaker #1

    Oui, et tu vois, par rapport à ce que... Bon, déjà, j'ai envie de te dire merci de partager tout ça parce que je pense que ça va beaucoup parler. Et même si toi, tu parles de la santé et de la philosophie, je pense que les personnes qui nous écoutent pourront vraiment faire le lien avec d'autres thématiques qui leur sont chères. Peut-être que ce sera l'écologie, mais ça peut être d'autres engagements qui parfois sont assez lourds à porter. Et puis, comme tu le dis très bien aujourd'hui, quand on est dans un moment où on prend conscience de certaines réalités, il y a très souvent ce moment-là où en fait, on s'abreuve d'informations qui vont dans le même sens. Et donc, on se polarise, on se radicalise. C'est à la fois indispensable de prendre conscience des choses. Et en même temps, il y a une espèce de... de nécessité de prendre soin de soi. Je pense que tu connais le Schumacher College à Londres qui accompagne des militants pour qu'ils prennent soin d'eux-mêmes, pour faire émerger positivement des idées de leur cause, tout en se brûlant pas. Je pense que ça va beaucoup parler aux personnes ici qui nous écoutent et qui écoutent les alignés parce qu'ils ont un engagement et qu'ils ont besoin de se retrouver eux-mêmes. Donc, tout ça fait énormément de sens. Je suis un peu brouillon, mais parce qu'il y avait tellement de choses dans ce que tu as dit. Voilà, le sujet de l'engagement, de prendre soin et de créer aussi des espaces dans lesquels, ce qui me paraît aussi très juste et je le souligne, à la fois pour des environnements universitaires, mais aussi en entreprise ou j'imagine aussi dans le domaine de la santé ou peu importe, le fait d'oser mettre des professionnels qui travaillent dans des milieux très différents et de créer un dialogue et créer un espace dans lequel ils... Il y a ce dialogue et moi, je souris intérieurement quand tu dis cette promo est extraordinaire. Mais en fait, moi, ma conviction profonde, c'est quand tu crées un groupe et un espace, en général,

  • Speaker #0

    un espace quelque chose.

  • Speaker #1

    C'est très souvent très fertile, mais c'est vraiment une conviction que j'ai profonde à chaque fois. Et je souris intérieurement parce que quand tu mets des humains ensemble et qu'il y a cette volonté de créer un espace fertile et authentique entre les personnes. En général, c'est là où la magie arrive. Mais je le prends quand même comme une idée, comme un enseignement d'oser le faire.

  • Speaker #0

    Je ne sais pas combien de temps tiendra ce master, parce que du coup, c'est quand même compliqué pour eux, pour les financements, pour plein de raisons, parce que justement, ils sont un peu un master un peu atypique. Mais oui, je suis d'accord avec toi de faire dialoguer des gens de milieux différents, de professions différentes. En fait, c'est super riche. Et tu n'as pas d'un côté qu'un soignant à la tête dans le guédon qui te parle, ou d'un côté qu'un universitaire ultra perché qui ne sait pas de quoi il parle, il y a il théorise des trucs qu'il n'a pas vécu. Là, il y a vraiment cette rencontre des deux qui était super riche. Et je crois que maintenant, c'est ce que j'essaye moi d'incarner, parce que je ne serai jamais philosophe, dans le sens où je n'ai pas du tout le parcours académique pour devenir philosophe. Je resterai un médecin, mais ce que j'essaye d'amener, en tout cas dans les cours que je donne, dans les DU, dans certaines formations, etc. C'est vraiment ça que j'essaye d'amener, qu'on peut être un peu hybride, mais qu'en fait... ça peut aussi apporter des choses aux gens, c'est-à-dire à la fois avoir un pied dans le monde réel, entre guillemets, du terrain, et quand même s'autoriser une espèce de prise de recul pour essayer de développer sa pensée critique et sa réflexion. Parce que je pense que c'est en amenant de la pensée critique et de la réflexion que justement, soi-même, si on se pose des questions, on arrivera mieux à entendre la parole de l'autre, même si elle est différente de la nôtre. Bref, j'essaye de cultiver ce... Je ne suis pas trop universitaire, je ne suis pas juste du terrain, je suis un peu entre les deux, mais je pense que ça peut être utile pour les autres.

  • Speaker #1

    Et ce côté d'être un « et » et plus un « ou » , tu te sens comment par rapport à ça ?

  • Speaker #0

    C'est pas mal. Justement, je pense qu'on se sent les deux pieds sur la terre. Je ne sais pas, en effet, on se dit qu'on est riche, qu'on est capable d'amener plusieurs choses. On est dans le lien et pas dans la séparation. Enfin, t'as raison, oui, c'est vrai que ce truc d'être ou ça, ou ça, ou ça, c'est terrifiant, en fait, qu'on nous mette dans des cases. Après, voilà, il y a vraiment tout un sujet sur l'hyperspécialisation. C'est un peu ce que tu dis avec tes littéraires ou tes scientifiques. On nous a un peu fait croire que pour avoir une espèce de cohérence linéaire, pour être performant, etc., il fallait s'hyperspécialiser. moi je le vois clairement en médecine parce qu'on fait que s'hyperspécialiser, on est médecin puis ensuite on est médecin, moi j'étais spécialiste en plus d'être spécialiste je me suis spécialisée en imagerie de la femme et imagerie diététique, on est toujours dans ce truc de toujours s'hyperspécialiser pour être l'expert d'un truc et d'être trop fort et d'être reconnu pour ça, donc il y a vraiment cette valorisation de l'hyperspécialisation et on en revient un peu là, il y a pas mal de penseurs qui critiquent ça, il y a un philosophe comme Edgar Morin qui maintenant dit qu'il faut de la pensée complexe justement en fait c'est pas parce qu'on est hyperspécialisé que... Le problème de l'hyperspécialisation, c'est que ça crée aussi des espèces de couloirs où personne ne communique entre eux, où on n'arrive pas à prendre en compte les pensées des systèmes. Enfin bref, je pense qu'on en revient de plus en plus. En tout cas, dans le milieu universitaire, ils essayent de recréer des formations interdisciplinaires, pluridisciplinaires. C'est quand même un truc qui revient. J'ai quand même le sentiment que ça va un peu plus émerger et les gens s'autoriseront peut-être aussi à être plus des « et » que des « ou » Grâce à ce... cette déconstruction un peu de l'hyperspécialisation.

  • Speaker #1

    Et donc maintenant que tu nous dis que tu as vraiment réussi à devenir un OU, j'ai hâte de savoir quel lien tu vas tisser. Quels sont les projets dont tu as envie de nous parler une fois que ce grand moment d'alignement est arrivé ? Qu'est-ce que tu es en train de construire ? Ça,

  • Speaker #0

    c'est pour le coup une question. Je ne sais pas si je peux y répondre parce qu'en fait, je n'ai pas de visibilité sur la suite. Je crois que tous ces grands moments d'inconfort, et puis cette espèce d'alignement qui a surgi du chaos m'ont redonné confiance. Je ne sais pas comment dire, j'ai une forme d'espérance aujourd'hui et en fait j'ai l'impression de me dire que je fais confiance un peu en l'avenir sans savoir vraiment ce qui m'attend parce qu'en fait le projet à court terme c'est quand même de réaliser ma thèse de philo mais je pense que j'en ai encore pour trois ans, trois ans et demi et après en fait je ne sais plus. pas du tout comment tout ça va se mettre en place. En fait, je me dis que je fais les choses au fur et à mesure et que j'ai l'impression en tout cas que c'est plutôt dans les rencontres humaines. Il y a des choses qui vont se décider un peu pour moi. Par exemple, cette année, j'ai eu la chance de donner des cours de philo à des soignantes dans le cadre de l'école de santé intégrative MU Médecine qui a été fondée par Chloé Bramy. Par exemple, Chloé, c'est quelque chose dont elle m'a parlé l'année dernière. Elle m'a proposé ce projet en me disant « qu'est-ce que tu en penses ? » et puis voilà, on y est allé. Et en fait, c'était extraordinaire. J'ai adoré donner ces cours. J'ai l'impression que pour l'instant, il n'y a pas vraiment de trajectoire. Je sais juste que je veux continuer de travailler sur des sujets de santé, de politisation de la santé, d'environnement. Moi, je dis que c'est un peu mon militantisme intellectuel. Ça, c'est ma forme d'engagement, ma façon d'agir sur le monde. Après, je pense que je resterai radiologue à côté parce que pour l'instant, je ne me vois pas du tout. Je ne sais pas du tout dans mon projet d'arrêter. d'être médecin, parce que je pense que c'est important d'avoir un pied dans la réalité toujours. J'ai des projets aussi. J'ai écrit un roman il y a quelques années qui va être publié en septembre. Donc, pareil, je me dis que ce roman va être publié. Je ne sais pas du tout quel écho il aura, quelle résonance. Est-ce que ça va aussi... Parce que ça parle aussi de soins. Enfin, c'est complètement une fiction, mais ça parle du sujet épineux de la fin de vie. Donc je me dis, voilà, après, est-ce que ça va amener des débats ? Enfin, j'en sais rien. Tu vois, en fait, je me dis que chaque pas en amène un autre. Mais c'est sûr que je ne sais pas vraiment où je vais. Mais je me dis que tant que je suis à l'écoute, que j'essaye de garder cet alignement, en tout cas, de ce moment de grâce que j'ai vécu pendant mon master, d'essayer d'être à l'écoute de ce que je ressens, de ce que je pense, de ce que je fais, des gens qui sont autour de moi, des écosystèmes qui se créent et tout. J'ai l'impression que je ne manquerai pas d'idées. j'arriverai à... continuer mon chemin.

  • Speaker #1

    Alors, je pense que les auditeurs, auditeuses se disent non, on ne se fait pas du tout de soucis sur sa capacité à avoir des idées. Et justement, c'est exactement ce que je me disais, c'est pour des personnes qui nous écoutent, moi j'aime bien demander quels sont les conseils enseignements que tu as envie de partager. Et peut-être, là je vais juste aiguiller sur peut-être une chose, c'est quand on a plein d'idées, comment on se lance en fait sur sur... les projets, aussi divers soient-ils, peut-être aussi éloignés de son enseignement de départ, de qui on est au départ, comment on se lance ? Parce qu'en deux secondes, tu viens quand même de nous dire que tu avais écrit un roman, une fiction en parallèle de tout ce qu'on vient de se dire.

  • Speaker #0

    C'est sur plusieurs années.

  • Speaker #1

    Mais voilà, dans ces enseignements, déjà, quels sont-ils ? Et puis peut-être un petit focus sur comment on se lance.

  • Speaker #0

    Alors déjà je commencerais par une chose quand même et tu l'as dit tout à l'heure et j'ai trouvé ça trop bien que tu remets ça dans son contexte je suis quelqu'un de privilégié aujourd'hui dans le sens où j'ai une profession qui me permet de travailler à mi-temps et de suffisamment en tout cas gagner ma vie pour pouvoir satisfaire aux besoins de ma famille et puis j'ai aussi la chance d'avoir un conjoint qui m'aide un peu dans cette qui m'aide matériellement aussi enfin je veux dire sur cette espèce de transition parce qu'en fait ma thèse elle est pas financée j'ai pas de contrat doctoral et tout donc en fait la plupart des choses que je fais aujourd'hui c'est du bénévolat voire du quasi bénévolat quand tu donnes des cours dans des DU t'es très peu payé donc voilà juste pour garder ce côté matériel en tête évidemment parce qu'on pourrait dire il faut du courage il faut de l'audace enfin j'en sais rien mais j'ai quand même la chance d'avoir un métier qui me permet de le faire et un soutien familial qui me permet de le faire Donc ça, c'est quand même un premier truc.

  • Speaker #1

    Et merci de le dire ici.

  • Speaker #0

    Ce n'est pas juste un truc pour remettre tout à zéro. Déjà ça. Ensuite, les conseils que je donnerai avant de se lancer, c'est très court, trois petites phrases, mais en gros, déjà, ce n'est pas parce que vous n'êtes qu'on. On n'a pas besoin d'être dans une case pour être légitime et que parfois, c'est en créant nous-mêmes nos propres formes qu'on arrivera à le mieux. contribuer justement pour la société ou pour les gens qui nous entourent, qu'on contribuera le mieux. Oser à être inclassable, oser être pluriel, à être complexe, parce qu'en fait, à chaque fois que vous osez être ça, ça ouvre un espace pour les autres femmes autour de vous, pour les autres hommes. En tout cas, comme on a vachement parlé de ça, moi, j'ai été énormément inspirée par plein de femmes, que des femmes d'ailleurs. J'ai vraiment trois femmes en tête qui m'ont beaucoup inspirée et qui... elles, en étant complexes, inclassables et plurielles, m'ont permise, m'ont autorisé peut-être à l'être aussi. Et puis, sur ce côté, on se lance. Mais ça, c'est pareil, parce que j'ai la chance d'avoir un soutien quand même matériel. Mais je pense qu'il faut parfois oser aller dans une direction, même si on n'a pas un plan de route. complètement établie. Ce n'est pas parce que tout n'est pas... Moi, j'ai l'impression qu'en tout cas, ce qui m'a rendue forte, ce n'est pas forcément de tout maîtriser, mais c'est plutôt justement de me lancer dans des projets dont j'avais envie sans savoir exactement où ça allait aller. Mais finalement, à partir du moment où on se met dans une espèce de dynamique d'action, en fait, il se passe des trucs. Il se passe des trucs parce qu'on rencontre des gens, parce que... Après, il faut de la patience. C'est un peu facile aussi pour moi de dire, par exemple, mon roman qui va être publié là, c'est un projet, ça fait quatre ans que je le mène. Donc voilà, il faut parfois être patient.

  • Speaker #1

    La ténacité, finalement.

  • Speaker #0

    Voilà, la ténacité. Et alors du coup, je rajouterais un dernier truc. C'est que du coup, j'ai l'impression qu'il faut quand même avoir une forme de confiance, même s'il peut y avoir des moments de désespoir, mais des moments où on se dit, mon Dieu, je me suis lancée dans cette idée folle. Alors qu'en fait... s'en train de merdouiller, puis en plus de ces gestes-là qu'on apprend. Mais pour avoir un peu confiance et justement, je pense, pouvoir raccrocher avec les gens autour de nous qui nous aident à continuer d'avancer, je pense qu'il faut d'abord avoir, enfin, prendre le temps de savoir qui on est. C'est ce qu'on disait au début, mais en tout cas, d'essayer de se reconnecter avec le soi profond, c'est-à-dire avec vraiment qui on est au fond. font, enfin en tout cas, des choses, qu'est-ce qui nous anime ? Il faut prendre soin de son intériorité pour pouvoir ensuite aller vers les autres et s'engager pour le monde. Et ça, c'est pas évident parce que comme tu le disais très justement, on a eu plein d'injonctions, plein de normes sociales depuis qu'on est gamin. En fait, on s'est conformé à toutes ces normes parce qu'on a envie de plaire, on a envie de reconnaissance, on a envie d'être performant. Et je pense qu'il y a plein de gens qui... Moi, la première, on s'égare du coup. À force de vouloir répondre à ses attentes extérieures, on en oublie qui on est. Et ce n'est pas un truc narcissique, je pense, de dire qu'il faut prendre soin de soi. Je pense que c'est en tout cas un pilier essentiel pour pouvoir s'engager pour les autres et pour le monde. Ça, c'est sûr.

  • Speaker #1

    Il y a un côté, c'est un côté que je trouve assez intéressant, qui est développé dans les théories d'organisation d'entreprise, dans lequel, en fait, finalement, la singularité des humains, qui on est de manière très profonde, va... permettre à créer des entreprises, un système, un écosystème qui ira bien. Et c'est plutôt dans le fait de se conformer dans ce qui doit être bien que notre singularité va être complètement étouffée et que finalement, on ne va vraiment pas avoir l'apport au monde qu'on devrait avoir. Alors, je sais qu'il y a des personnes, effectivement, tu le disais très justement, là, on parle toutes les deux parce qu'on a le temps de se poser et de réfléchir. Mais en même temps, je pense qu'il faut aussi se dire, moi je pense que c'est important, qu'il y a des gens qui ont le temps, mais qui se conforment et qui finalement n'ont pas un apport au monde qui est juste pour eux, alors qu'ils pourraient le faire. Donc on sait qu'on parle entre personnes privilégiées, mais comme tu dis, prendre soin du monde, c'est d'abord prendre soin de soi, de sa singularité. Je suis vraiment fondamentalement persuadée que si chacun et chacune trouve sa place, alors le monde ira clairement beaucoup mieux. Donc, c'est un peu le leitmotiv de ce podcast. Et donc, je trouve ça très chouette que tu en parles ici. Donc, merci beaucoup pour ces précieux conseils. Je pense qu'ils vont résonner énormément pour les personnes qui nous écoutent, qui peut-être sont au milieu du guet, tu vois, qui sont déjà, qui sont en cette case un peu trop petite.

  • Speaker #0

    Allez-y, foncez.

  • Speaker #1

    Voilà. Et puis aussi, se dire que ce n'est pas immédiat. Merci beaucoup de l'avoir dit. Ça prend du temps. Ça prend du temps, ça gratte, c'est compliqué. Et parfois, c'est simplement une histoire d'oser prendre un week-end. pour postuler à un DU, à une formation qui, sur le papier, a l'air chouette, mais on ne sait pas vraiment ce que ça va donner. Et voilà, il faut oser, finalement. J'ai envie de te poser la question, parce que je sais que ce sera génial et riche d'enseignements, comme tu as l'air d'être friande de médias. Dans les Alignés, on aime partager des médias, podcasts, ressources qui t'ont nourri, toi, pour aller sur ton chemin.

  • Speaker #0

    Alors, je peux peut-être partager... Alors, il y a podcast et puis ouvrage, ou du moins, personne qui écrive. Oui, dans les podcasts, un que je recommande vraiment, c'est Loin des yeux, loin du care de Eva Sadoun. Eva Sadoun, qui est une femme assez formidable. Voilà, c'est des épisodes sur le care. En tout cas, c'est riche d'enseignements parce que ça montre à quel point le care, donc le soin, manque à plein de structures autour de nous. Et comment il faudrait en ramener pour un peu... rendre notre société plus... Parce que le care, c'est essentiel à la vie et pour un peu réhumaniser, redonner un second souffle à toutes nos structures collectives.

  • Speaker #1

    Alors peut-être le care, pour les personnes qui nous écoutent, ils ne connaissent pas forcément. Est-ce que tu as envie de nous partager une espèce de définition de ce que c'est ?

  • Speaker #0

    L'éthique du care, c'est une pensée des années 80. Ça a émergé en tout cas d'une... à la base d'une psychologue morale qui s'appelle Carol Gilligan. C'est une pensée féministe, qui a ensuite été politisée un peu par Joan Tronto, mais en gros, c'est l'idée que nous sommes toutes et toutes vulnérables et que le soin qu'on s'apporte mutuellement fait tenir nos sociétés. C'est un peu compliqué, mais c'est aussi une manière assez différente de lire le monde, justement, parce qu'en fait, la philosophie morale, elle a été longtemps pensée par des hommes. qui prône que l'individu est autonome, n'a besoin de personne autour de lui, est un écosystème à lui-même, etc. Les penseuses du CAIR, elles remettent un peu, elles disent non, pas du tout, en fait, on a tous besoin les uns des autres, on est tous un espèce de réseau de liens et du coup, le fait qu'on soit tous en lien les uns avec les autres engendre des responsabilités et une manière différente, idéalement, d'organiser nos sociétés. Voilà, en tout cas, c'est... C'est mettre du soin partout dans nos relations, remettre de l'attention. Enfin bon, si vous voulez vous embarquer là-dedans, je pense que d'écouter le podcast Loin des yeux, loin du cœur, c'est top. Voilà, ça c'est le premier. Après, bon, ça c'est purement écolo pour ceux qui s'intéressent un peu à la cause écologique. Il y a le podcast Green Letter Club qui est vraiment génial. Moi qui m'a vraiment appris énormément de choses sur l'écologie au moment où j'en avais besoin. Et après, sur un terrain plus philosophique, je citerai trois auteurs. Alors en un, je citerai Inès Weber, qui est une psychologue pour le coup, mais qui a écrit un bouquin qui s'appelle « Être soi, une quête essentielle pour le monde » . Peut-être que je déforme un peu le titre, mais c'est chez Gallimard. Et justement, moi, j'ai été bouleversée par cette lecture. Justement, Inès Weber, elle dit à quel point on s'est complètement décrochée de notre... de notre soi profond et qu'en fait, on a une espèce de moi social qui gouverne un peu notre vie et que le seul moyen d'être vraiment utile au monde et de se battre et de s'engager et de contribuer à un monde plus juste, plus relié, etc., c'est de déconstruire plein de choses, d'enlever un peu plein d'espèces de couches d'oignons et d'essayer de voir, au fond, ce qu'on aspire, ce qui nous rend heureux. Enfin, voilà. Donc, elle, elle est psychologue et elle dit qu'en fait, elle voit sur son divan plein de gens qui vivent des crises existentielles les allées. elle essaye de donner des réponses, de dire que c'est peut-être la société qui nous a justement enfermées dans ces cases, mis plein d'injonctions sur le dos et que quand même, le véritable moyen de contribuer, c'est quand même d'aller chercher au fond de nous. Ça n'a rien à voir avec le développement personnel, ça n'est pas un égotrip, c'est vraiment quelque chose de nécessaire. Et après, dans la même veine, du coup, il y a Abdenour Bidar qui a écrit un bouquin qui s'appelle « Les tisserands » qui est merveilleux, qui est un peu dans la même idée, mais de dire... que pour lui, il faut qu'on prenne soin des liens qui ont été abîmés. Et donc, il dit qu'il y a trois liens importants. C'est le lien à soi, le lien aux autres, le lien au monde. Et lui, en fait, il développe cette posture du méditant-militant qui dit que pareil, en fait, il faut soigner, prendre soin de son intériorité pour pouvoir ensuite agir sur le monde. Et tu parlais tout à l'heure du Schumacher College. Mais voilà, de cette idée de si on ne veut pas partir en burn-out militant, il faut aussi prendre soin de soi. de vraiment relier que Pour lui, il dit que l'un ne doit pas aller sans l'autre. On ne peut pas faire que méditer et rien faire ou que être dans la méditance. Il faudrait idéalement se nourrir de la méditation pour pouvoir ensuite agir sur le monde autour de soi.

  • Speaker #1

    Et encore une fois, finalement, tu vois, ça devenir un « ou » .

  • Speaker #0

    Oui, et en effet, dire qu'on peut être les deux à la fois, nourrir une forme de spiritualité ou de vie intérieure fertile pour qu'ensuite on puisse... Mieux prendre soin des autres et du monde. Et ça, je pense que tout le monde l'expérimente. Lui, c'est un philosophe, mais il l'explique avec ses mots de philosophe. Et c'est génial. Mais je pense qu'on a tous ressenti que quand nous, on a les batteries à plat, qu'on est perdu, etc. On est incapable d'avoir une écoute active pour quelqu'un qui a besoin de nous. C'est difficile de s'engager pour des projets qui vont nous demander l'énergie parce qu'on n'en a déjà pas. Je pense que c'est un peu du bon sens.

  • Speaker #1

    Oui. Et en même temps, c'est un peu ce qu'on se disait tout à l'heure. Le côté militant, la case militant, parfois, on se sent... Tout à l'heure,

  • Speaker #0

    tu as utilisé un mot pour te décrire. Oui, je vais dire que...

  • Speaker #1

    Tu as dit que tu étais intellectuelle.

  • Speaker #0

    Oui, une forme de... J'essaye en tout cas d'être... Oui,

  • Speaker #1

    de militante intellectuelle.

  • Speaker #0

    Oui,

  • Speaker #1

    c'est ce que tu as utilisé comme mot. Et je me suis dit, ah, c'est drôle, parce que justement, le fait de mettre ces deux mots l'un à côté de l'autre, c'est quelque chose que j'avais rarement entendu en réalité. Et je pense que des personnes qui nous écoutent se disent que le militant, c'est celui de la rue. C'est celui qui va être au premier rang des manifestations. Et donc, encore une fois, s'autoriser à être toi-même et être dans une forme d'engagement qui te correspond.

  • Speaker #0

    En fait, c'est exactement ça. Pendant que je traversais ma crise d'éco-anxiété vénère, je me demandais même, est-ce qu'il ne faut pas s'engager pour Extinction Rebellion ? Est-ce qu'il ne faut pas ? Être dans Dernière Rénovation, et en fait, je me dis, mais ça n'est pas toi. T'enchaîner à une banque ou t'asseoir sur une voie, empêcher des voitures de circuler, ça ne te correspond pas. Donc en fait, je pense qu'en effet, chacun et chacune... peut mettre de l'engagement dans ce qu'il fait. Et moi, en fait, juste grâce à ce master de philo, je me suis rendu compte à quel point j'étais un peu une intello bisu qui aime bien être à la bibliothèque. Bon, OK, finalement, est-ce que ça ne va pas être ça, ma forme d'engagement ? Parce que c'est un terrain que j'aime bien, le terrain des idées, le terrain de l'écriture. Mais en fait, à nous de trouver, on peut être militant en étant agriculteur et faire de l'agroécologie. On peut être militant en étant une infirmière qui continue de prendre soin de ses patients d'une certaine manière. On peut être militant en étant coach professionnel et en remettant de l'inclusivité, de l'inclusion dans les boîtes. Je pense qu'en fait, pareil, militant, c'est devenu un gros mot. Il y a un essai qui est sorti il y a pas longtemps qui s'appelle « Militer, verbe sale » d'une époque. En fait, on a décrédibilisé le militantisme. on l'a dévalorisé parce qu'en fait je pense que le système préfère des gens qui se conforment parce que c'est plus facile de driver une société comme ça, donc les militants maintenant en effet du coup le premier truc qu'on a en tête c'est genre éco-terroriste, des gars qui ont pété des bassines qu'on fait ci, qu'on fait ça, en fait je pense qu'il y a vraiment plein de formes de résister on peut peut-être plutôt utiliser ce mot de résistance que de militantisme parce que peut-être que c'est plus polissé entre guillemets et que tout le monde s'entend dessus mais en tout cas je pense qu'on peut tous résister à ce qui nous semble injuste avec les armes qu'on a et qui on est. Oui,

  • Speaker #1

    ce qui me fait penser au livre de Salomé Sacké, Résister. C'est vrai que c'est un mot qui devient assez actuel et qui est assez juste aussi. Donc, on retient ces ressources-là. Est-ce qu'il y a d'autres ressources que tu as en tête ?

  • Speaker #0

    Après, pareil, il y a... Non, après, des ressources... Moi, il y a un philosophe que j'adore qui s'appelle Jean-Philippe. Ceyron, qui pour moi est un penseur incroyable parce qu'il pense le soin, il pense l'écologie, il pense la poésie, la résistance poétique un peu. C'est un philosophe contemporain qui a écrit plein de bouquins. Je tous les recommande parce que il est super gentil dans la vraie vie. J'ai l'impression. J'ai eu quelques échanges très rapides avec lui. Pour moi, c'est un philosophe qui fait du bien à lire et qui est accessible à lire ou à écouter en podcast. Il n'a pas participé à des podcasts et tout. Et après, en termes d'inspiration, mais après, je ne sais pas, ça peut être une ressource aussi. Il y a une nana que je trouve formidable qui s'appelle Victoire Sato, qui a fondé un média qui s'appelle The Good Good. En fait, elle se bat un peu pour la mode responsable, on va dire. En tout cas, elle est au service de l'écologie dans le milieu de la mode. Et enfin, bon, après, c'est perso, mais vu qu'à la base, c'est une nana qui était radiologue. donc forcément moi ça me parle parce que je suis radiologue et qui elle pour le coup a carrément arrêté d'exercer pour se lancer complètement dans son média et elle pour moi c'est typiquement la femme plurielle parce qu'à côté de ça elle est aussi artiste collagiste, donc elle fait des oeuvres, elle est vraiment une artiste elle s'est lancée dans un projet d'architecture résiliente en Normandie je crois elle est en train de construire, de rénover un truc de ouf, une ferme qu'elle veut transformer en lieu d'échange, en lieu hybride de résidence artistique. Pour moi aussi, pour tous les gens qui se sentent pluriels et qui ont besoin de modèles, Victoire Sato, franchement, elle déchire.

  • Speaker #1

    On sent qu'on va l'inviter au micro des animés.

  • Speaker #0

    Je pense qu'elle aura plein de choses à dire.

  • Speaker #1

    Génial. Une question que j'aime bien poser, c'est qu'est-ce qu'on peut te souhaiter après tout ça ?

  • Speaker #0

    Merci. de bien vivre mon postpartum numéro 3 on peut me souhaiter je pense de garder la confiance même quand ça tangue même si je ne sais pas trop où je serai dans 3-4 ans de rencontrer des gens super sur la route de créer du lien tout le temps c'est ça d'être heureuse en lien en confiance et toujours créer des ponts Salut ! des espaces et de la réflexion.

  • Speaker #1

    Merci. Et pour les personnes qui ont adoré cet épisode, qui ont envie de te suivre sur ton chemin, comment on peut te suivre ?

  • Speaker #0

    Alors, j'ai un compte Instagram, où c'est mon nom, Amélie Cadier-Lauriau, où je poste peut-être pas suffisamment, mais en tout cas, je suis toujours hyper heureuse quand des gens m'écrivent, partagent. des petits morceaux de leur vie, des questions. Je trouve ça hyper précieux. Et pour l'instant, j'ai eu que des échanges super avec les gens qui m'ont écrit. C'est vrai que je ne partage peut-être pas assez régulièrement, mais j'essaye de mettre un peu de contenu de temps en temps. En tout cas, c'est un moyen de me contacter aussi et d'échanger, de créer des trucs. Et après, j'ai une page LinkedIn qui est quasiment morte. Mais pareil, j'ai... J'ai pour projet de la nourrir de quelques articles. Donc voilà, si vous avez que LinkedIn, je fais aussi. Sur ce réseau social, oui.

  • Speaker #1

    Et ton bouquin sort quand exactement ?

  • Speaker #0

    Mon bouquin, c'est un premier roman, c'est une fiction. Et ça sort le 11 septembre prochain. Et ça s'appelle « Avant que tu ne t'en ailles » .

  • Speaker #1

    Écoute, j'ai adoré cet échange. Merci beaucoup d'avoir partagé tout ça au micro des Alignés. J'espère juste... que probablement dans quelques années, on se fasse une autre session pour savoir où tu en es dans quelques temps et où t'as mené cet alignement, ce chemin d'alignement. Mais merci beaucoup,

  • Speaker #0

    Amélie. Merci à toi, Charline. Je suis vraiment ravie.

  • Speaker #1

    Merci beaucoup. À très bientôt.

  • Speaker #0

    À bientôt.

Chapters

  • Introduction et présentation du podcast

    00:06

  • Rencontre avec Amélie Cadiel-Loriot

    02:38

  • Qui est Amélie ? Son parcours de vie

    03:20

  • Moments de désalignement et d'alignement

    06:50

  • Crise d'éco-anxiété et transformation personnelle

    17:42

  • Le master en philosophie de la santé et l'alignement

    22:30

  • Projets futurs et engagement personnel

    39:50

  • Conclusion et ressources à partager

    58:10

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