- Speaker #0
Chaque jour, lorsque j'ouvre mes messages sur les réseaux sociaux, je suis submergée par autant de questions qui demandent des réponses concrètes que d'interrogations profondes qui traversent la communauté Les Invisibles. Face à l'impossibilité de répondre individuellement à chacune d'elles et pour composer avec ma propre fatigue et les symptômes, j'ai choisi de partager mes réponses et celles d'autres Invisibles en live sur Instagram. pour rendre nos témoignages et nos réflexions accessibles au plus grand nombre. Dorénavant, ces moments de partage ne se limitent plus aux réseaux sociaux. Tu peux désormais les écouter, quand tu le souhaites, où que tu sois, grâce à leur rediffusion sur ce podcast. Bienvenue sur le nouveau format, les Invisibles répondent. Bonne écoute ! Bonsoir !
- Speaker #1
Bonsoir à tous ! et à toutes.
- Speaker #0
Alors si jamais moi je crois que je ne vois personne qui entre et qui sort, donc n'hésite pas aussi à me dire un peu les commentaires et tout ça.
- Speaker #1
Ok, je vais essayer de suivre ça au mieux.
- Speaker #0
Trop bien. Ce soir, on va parler d'isolement. C'est une thématique où je me suis un peu posée avec. Tu sais, je me suis un petit peu demandé qu'est-ce que ça me faisait vivre de simplement... penser à l'isolement et il y a beaucoup de choses qui sont sorties en fait de part de vulnérabilité chez moi je vais peut-être mettre mes écouteurs parce que je crois qu'il y a une sorte de petit larsen assez possible ah voilà ça a l'air plus confortable ouais il y a vraiment beaucoup de vulnérabilité qui est sorti et je voulais déjà vite exposer ça comme ça à chaud
- Speaker #1
Avec grand plaisir.
- Speaker #0
Parce que je me suis souvenu de comment la maladie est arrivée avec cette brutalité dans ma vie. Il n'y a pas eu de glissement tranquille. Il y a vraiment eu un truc où c'était d'une seconde à l'autre et en fait, je suis passée de cette hyper sociabilité qui était de... vivre avec toujours du monde. Tu vois, j'ai vécu pendant 4 ans avec 10 colocataires. Je travaillais dans des foyers où il y avait 10 résidents, où on était 10 collègues. Donc, tu vois, en fait, finalement, j'étais toujours avec à peu près 10 personnes dans ma vie, dans tous les domaines. Je partais en voyage, j'allais en festival, en concert. Je faisais des sorties, des apéros. Tu vois, vraiment, cette vie hyper sociable. Et tout d'un coup, le basculement d'une seconde à l'autre, la maladie qui arrive et l'isolement, mais qui arrive, tu sais, jour. d'un coup. C'était vraiment le mur. Et j'avais juste envie de démarrer avec cette toute petite introduction et après, évidemment, qu'on va pouvoir détailler tout ça. Mais peut-être qu'avant, présentons nous et surtout toi, Fernand, parce qu'il y a peut-être des personnes qui se demandent, qu'est-ce que tu fais là ce soir ?
- Speaker #1
Qui es-tu ? Et ce jeune homme.
- Speaker #0
Ce beau jeune homme dans sa chemise violette,
- Speaker #1
ou bordeaux.
- Speaker #0
Et évidemment, l'idéal, c'est que toi, tu te présentes. Mais voilà, moi, j'avais déjà envie de dire avec mon son de cloche que pour moi, tu es vraiment le bras droit, mon bras droit dans l'association avec qui on navigue chaque jour pour penser cette association, ses missions, ses valeurs, développer plein de ressources ensemble. On communique tous les jours. Et ce qu'il y a de plus drôle là-dedans, c'est qu'on ne s'est jamais rencontrés en vrai. Il faut peut-être le dire.
- Speaker #1
Jamais, jamais.
- Speaker #0
Sauf que dans cette question de l'isolement, tu sais.
- Speaker #1
Oui, j'allais dire, c'est là où le numérique est formidable. C'est que ça permet de rencontrer des gens et de se rapprocher au-delà du physique, qui parfois n'est pas toujours ça.
- Speaker #0
Oui, carrément. Et donc, voilà, tu es ce bras droit, mais en réalité, tu as une étiquette bien plus importante aussi, qui est vraiment d'être le président de l'association Les Invinibles.
- Speaker #1
Exactement. Donc, effectivement, on s'est rencontrés en… en mai 2024 et j'ai répondu à une annonce bénévole et puis de fil en aiguille. Aujourd'hui, on en est là avec ce duo qui est hyper important, je pense, pour l'association, pour tout ce qu'on peut développer ensemble, à la fois de créatif, parce que c'est notre point fort à tous les deux, et tout ce qu'on peut créer de stratégique autour de ces missions, ces valeurs. qui structurent l'association et qui font qu'elle grandit et qu'elle se développe. Donc, c'est vraiment génial. En te rencontrant, je ne pensais pas en arriver là et c'est absolument génial. Comme je te le dis souvent, ça a déclenché chez moi un militantisme que je n'avais pas forcément. Et là, vraiment, ça donne du sens. Même, j'ai envie de dire, ça donne du sens à la maladie et à comment elle s'est développée dans ma vie et comment je peux aujourd'hui en faire quelque chose. Donc, c'est formidable de se rendre compte.
- Speaker #0
Trop bien. Donc voilà, Fernand, président de l'association. Et puis pour juste un tout petit peu expliquer, du coup, moi, je faisais l'étiquette plutôt le statut de directrice de l'association. Et voilà, on avance, on chemine ensemble tous les deux. Et ce que je propose peut-être, c'est vraiment aux personnes qui sont présentes de ne pas hésiter à démarrer, de poser des questions. Nous, on y répond avec grand, grand plaisir, avec notre expérience finalement qui est individuelle à chacun.
- Speaker #1
Complètement. Et là, tu as donné ton ressenti sur l'isolement. Et c'est drôle parce que moi, je l'ai perçu différemment. Et c'est intéressant d'ailleurs si vous, vous avez… Comment vous percevez l'isolement et peut-être comment… Quelle est votre définition de l'isolement ? Bonsoir à tous. Il y a plein de personnes qui disent bonsoir. C'est vraiment cool de vous retrouver là. Donc moi, sur l'isolement, alors contrairement à toi, moi, je l'ai vécu beaucoup plus progressivement. Moi, je suis atteint de colopathie fonctionnelle et c'est installé progressivement à partir de 2019. assez progressivement où c'était une fois par mois, j'avais des crises une fois par mois sans trop poser le mot dessus, au départ je pensais que c'était juste passager j'y croyais fortement et je l'espérais et puis finalement c'est devenu une fois par semaine et puis à partir de février 2020 c'était tous les jours et c'est vraiment à partir de ce moment-là, en fait progressivement j'ai annulé des choses alors il n'y a que le travail qui est resté mais tout l'autour a disparu progressivement parce que je ne pouvais plus me déplacer. Et en février, c'était même faire les courses. Même faire les courses, c'était très compliqué. Le magasin était à deux minutes à pied de chez moi, mais c'était vraiment très compliqué d'y aller. Donc, progressivement, toutes les sorties se sont annulées de mon fait. Et finalement, l'isolement, il se fait comme ça. Et tu parlais de réflexion autour de l'isolement. Ce serait intéressant de savoir ce que tu mets derrière et ce que les personnes qui nous regardent mettent derrière aussi. Parce qu'en y réfléchissant, je me suis dit, mais ce n'est pas seulement une isolation sociale, il y a plein d'autres isolements qui se mettent en place.
- Speaker #0
Et qui touchent finalement aussi des sphères qui sont très différentes. Tu vois, toi, tu parles vraiment de ce côté progressif. Tout d'un coup, il y a un truc qui m'est venu un peu en tête, comme si tu étais un peu spectateur de ce qui était en train d'arriver. Tu pouvais voir un peu la chose se passer petit à petit.
- Speaker #1
Exactement. Oui, je pense que maintenant, je peux dire qu'il y a une forme de dissociation où j'étais spectateur de quelque chose qui était en train de s'installer en moi, que je refusais complètement parce que... Parce que c'était tellement insidieux et que je ne savais pas l'expliquer. Je ne voulais pas y croire. Je ne savais pas quelle forme ça allait prendre. Est-ce que ça allait rester pendant plusieurs mois ? Je pense que la première année, je me souviens de coups de téléphone avec mes amis où je leur disais « Ah, mais là, en ce moment, ça va mieux. Donc, je sens que la semaine prochaine, je vais pouvoir venir. » Et en fait, non, j'annulais parce que la semaine prochaine, ça n'allait pas mieux. Donc, effectivement, ça a été très insidieux et très long avant que je… comprennent qu'effectivement, ça allait rester et s'installer. Ça me fait penser à la chronique de malade que tu as faite, la première, où l'inconnu vient, il toque, et en fait, il reste, il s'installe avec ses valises, et c'est exactement ça. C'est exactement ça qu'il a installé. Et moi, je me disais, mais il va repartir un jour. Il va prendre la porte dans l'autre sens. En fait, non.
- Speaker #0
Donc toi, aujourd'hui, tu te sens isolé ? Je me pose la question en t'écoutant.
- Speaker #1
Oui, par la force des choses. par la force des choses, mais de bien des manières. Je pense que je me suis d'abord senti isolé d'un point de vue social parce qu'effectivement, on rompt avec, comme tu le disais au début, on rompt avec des choses du quotidien. Sortir entre amis, aller faire ses courses devient compliqué. Et puis d'autres choses qui s'installent autour. Aller au travail, j'avais la chance de pouvoir y aller à pied. Donc ça, je ne le gérais pas trop trop mal, bien heureusement, parce qu'il aurait fallu prendre les transports. Ça aurait été très compliqué pour moi. Et puis maintenant, je pense qu'il y a plutôt un isolement qui est, je dirais, plus identitaire, en fait. être malade dans la société qui est la nôtre, où il faut être productif, où il faut être présent, où il faut être très installé, finalement il y a ce rapport qui est compliqué, où on se sent en dehors de la société, et de ce point de vue-là il y a une forme d'isolement qui se fait aussi, et puis quelque chose qu'on côtoie tous les deux, je pense dans notre travail avec l'association, c'est un isolement aussi un peu sociétal. Je ne vois pas et les invisibles, tu as trouvé ce mot formidable qui est simple, mais qui décrit bien ce qui se passe.
- Speaker #0
C'est intéressant ce que tu dis finalement, c'est qu'on a aussi un isolement qui est ressenti. Je pense à d'autres malades qui peut-être sont encore tout à fait ancrés dans l'espace public et la société, mais qui peuvent quand même, du fait de vivre des symptômes et les conséquences de ces symptômes et des maladies invisibles, se sentir isolés, alors que pourtant de l'extérieur, ça pourrait ne pas se voir. mais sentir ce décalage et le décalage vis-à-vis du monde et des autres, c'est une sorte d'isolement aussi.
- Speaker #1
Complètement, complètement. Et toi, l'isolement, tu parlais de tout ce que tu as vécu au début de l'annonce de ton diagnostic. Comment après tu l'as vécu au jour le jour ?
- Speaker #0
Écoute, c'est encore un travail de tous les jours, j'ai envie de te dire. Moi, comme je t'ai dit, c'est vraiment arrivé avec fracas. Et donc, j'ai senti l'isolement dans tous les domaines de ma vie. Je l'ai dû vraiment faire un deuil dans tous les domaines de ma vie. J'étais dans un travail que j'adorais. Je l'ai dû du jour au lendemain. En fait, du jour au lendemain, j'ai été à l'arrêt. Et je n'ai plus jamais retrouvé ce travail alors que j'avais un lien avec les personnes que j'accompagnais, les résidents, mes collègues. Absolument incroyable. Donc, il y a vraiment eu... Ok, du jour au lendemain, je ne vous vois pas. plus en fait. Donc il y a eu cette sphère du travail qui en plus de ça était pour moi une sphère extrêmement importante où j'étais hyper engagée là-dedans. Il y avait tout justement cette sphère plutôt sociale, comme je te disais, très sociale. Donc là aussi tout d'un coup, je ne peux plus venir au dîner, je ne peux plus venir aux soirées, je ne peux plus venir aux apéros. On nous propose de partir en week-end entre copines ou en voyage ou en vacances. Tout ça, c'était un an pour tout finalement. Avant, j'étais yes girl. Vas-y, on y va tout le temps. Go, on s'en fiche, on n'a pas de thune, on y va. C'était vraiment... Il y a eu un bouleversement total. Même finalement dans ma relation de couple, tout à coup, les invitations qui étaient pour nous deux, j'étais là, en fait, Mickaël, vas-y, mais moi, je ne peux pas venir. Tout d'un coup, on a même l'impression de s'isoler par rapport à son partenaire parce qu'on ne partage plus. des activités, on n'honore plus des invitations avec son partenaire. Donc il y a vraiment un isolement sur tous les plans et qui m'a profondément amenée dans la déprime aussi de ça. Mais en fait, l'envie, elle est là. Je ne suis pas une personne de base qui est solitaire. Alors ça, on en parlera après, mais ça a beaucoup changé et de manière très positive. Mais à la base, non, je ne connaissais pas. Je ne savais même pas ce que c'était d'être seule. Et tout d'un coup, je l'étais. Là, je suis 24. Oui. Et en plus de ça, en le subissant, et en plus de ça, en ne l'ayant jamais expérimenté, enfin, tu vois, c'est un tout. Ce n'est pas tout d'un coup, je me retrouve seule. Ah, j'ai des gosses. Ah, je me retrouve seule. C'est génial. Je vais pouvoir enfin me mater une série. Non, non, non. Je me retrouve seule. J'ai des symptômes qui sont invalidants. Je me sens à l'écart de la société. Les gens qui m'entourent ne me comprennent pas. Même certaines personnes doutent de ce que je vis. Donc, c'est vraiment un truc, mais qui prend l'espace.
- Speaker #1
Oui, complètement. Ce que je trouve intéressant dans ce que tu dis, c'est la différence entre solitude et isolement. Je me suis posé la question avant, parce que moi, je suis quelqu'un qui aime être seul. Et je me suis dit, mais pourquoi l'isolement, a contrario, me touche tant ? Et effectivement, je pense que la solitude, peut-être que vous pourrez nous dire ce que vous en pensez en commentaire. La solitude, pour moi, c'est quelque chose qu'on choisit. C'est presque de l'ordre du refuge, du moment un peu pour soi, alors que l'isolement, pour moi, c'est vraiment une fracture. C'est quelque chose qui est complètement subi, de l'ordre de... Vraiment, on n'a pas le choix, juste on est isolé, exclu. Il y a une exclusion, en fait, de quelque chose, alors qu'isolé par soi-même, on se met dans un petit coin, on se retrouve. L'isolement, il y a quelque chose qu'on ne gère pas, qui en plus avec la maladie s'impose à nous. Donc effectivement, le fait que ça soit imposé de choix, ce qui est dit là. Donc effectivement, l'isolement, il y a quelque chose de brutal qui touche à plein de niveaux. Tu parlais d'invitation, ça m'a fait repenser à une chose toute bête, mais par rapport spécifiquement à la maladie qui est la mienne sur vraiment l'intestin irritable, c'est qu'il y a des choses que je ne peux pas manger parce que ça me crée des symptômes. Et même quand je peux me déplacer dans un endroit, finalement, il y a une forme d'isolement parce que je ne peux pas manger comme tout le monde, parce que je ne peux pas... boire ce verre d'alcool même un tout petit peu parce qu'en fait ça déclenche des symptômes. Donc même dans un espace qui est celui de la rencontre, finalement il y a une dissociation qui se fait du reste du groupe parce que la maladie impose ça.
- Speaker #0
C'est tellement juste ce que tu dis, c'est vraiment ça, c'est que finalement même quand tout d'un coup tu as des moments de sociabilité possibles, il y a quand même quelque chose qui très fréquemment te met en outsider. C'est que moi, j'ai toute une époque où j'arrivais avec mes topos R chez les gens, donc je ne pouvais pas partager la bonne nourriture comme toi, ou je ne sais pas, tout d'un coup, je rentre beaucoup plus tôt que les autres, je passe une demi-heure, une heure. Donc, il y a aussi quelque chose qui te stigmatise là-dedans, dans cet isolement. Donc déjà, tu te sens isolée et en plus, tu es stigmatisée là-dedans. On va mettre le doigt là-dessus. Tu n'appartiens plus vraiment au groupe, en fait.
- Speaker #1
Complètement. Les gens en plus, aussi bienveillants soient les gens, c'est que c'est une petite fracture. Même si tu es bien entouré, il y a une petite fracture qui se fait. Et c'est hyper intéressant de se dire que finalement, l'isolement, ce n'est pas seulement un gros mot pour dire une grosse chose. L'isolement, il est dans des toutes petites fractures du quotidien et ça touche par plein de biais. C'est des petites aiguilles qui touchent comme ça.
- Speaker #0
Et c'est vrai que tu parlais de subi et choisi. on parle souvent de cette nuance dans la solitude. Est-ce que cette solitude, elle est subie ? Est-ce que finalement, je n'en voudrais pas, mais je n'ai pas le choix ? Ou est-ce que je la choisis et justement, c'est une place que j'honore, c'est un refuge, c'est un cocon, et ça n'a rien à voir ? Et peut-être que c'est intéressant de pouvoir parler aussi de cette transition-là, c'est-à-dire comment cette solitude qui est subie, dans lesquelles... on fait forcément l'expérience, je pense, quand on tombe malade, comment elle peut à nouveau être, ou à nouveau, ou simplement pour la première fois, être appropriée, en fait, et tout d'un coup, devenir aussi un sanctuaire. Et je ne dis pas que ça peut l'être à tout moment, je ne suis pas dans une vision hyper idéaliste, mais pour le coup, en tout cas, de mon expérience personnelle, je suis passée de, je ne connaissais pas la solitude, et même je la... m'était hyper loin, donc ça c'était aussi mes mécanismes de défense personnelle à tout d'un coup ok, en fait cette solitude elle est là et j'ai juste pas le choix donc comment faire en sorte que je la subisse moins et à certains moments pouvoir m'approprier ce moment de solitude et en faire quelque chose qui est confortable pour moi et qui soit qui s'aligne avec justesse avec mes capacités du moment Mh-hm. Parce que, par exemple, des fois, on est vraiment complètement alité et on est seul. Et donc, c'est terrible. Enfin, juste, ça peut être horrible. Mais est-ce que tout d'un coup, à ce moment-là, on a la toute petite capacité de vivre ce moment-là en faisant quelque chose qui est OK pour soi quand même ? Est-ce que regarder une série depuis son lit, c'est OK ? Est-ce que c'est trop ? Est-ce que je peux me mettre des écouteurs et écouter une musique que j'adore ? Est-ce que, enfin tu vois, il y a peut-être des... petites choses qui peuvent être introduites à ce moment-là et qui tout d'un coup fait cette solitude, qui subit quelque chose où il y a peu plus de choix.
- Speaker #1
Il y a quelqu'un dans les commentaires qui dit que l'isolement subit, c'était dans l'isolement subit et que maintenant elle en a fait un cocon par nécessité. Ne plus subir les incompréhensions, les déceptions de certaines personnes. Effectivement. Et de vivre sa vie et de se dire... de peut-être moins le subir en fait. Tu parlais d'espace où on peut faire autre chose, ce n'est pas quelque chose que j'ai mis en place actuellement, mais je me dis moi qui suis très créatif et qui aimerais retrouver une créativité manuelle, je me dis que peut-être des moments où cet isolement est imposé, peut-être que je peux en faire des espaces de créativité, si je suis alité, peut-être écrire en étant allongé ou faire des choses qui... m'inspirent et qui font que ce moment d'isolement finalement devient un cocon de créativité ou de quelque chose qui m'aide à produire parce que finalement ces moments d'isolement je crois sont aussi très précieux dans la société qui est la nôtre aujourd'hui très productive très vite parfois. Moi, pour ça, la maladie, je la remercie parce que ça m'a ramené à quelque chose d'essentiel qui est le temps présent, même s'il est parfois inconfortable, de revenir au temps présent, de ne pas se poser la question de ce que je vais devenir dans 5 ans, ou dans 10 ans, ou dans 15 ans, juste être là. Et je trouve que pour ça, c'est très précieux. Et si c'est revenir dans des moments inconfortables et d'isolement, à se dire, qu'est-ce que je peux faire dans ce moment ? Et peut-être que si je ne suis pas productif, c'est OK. Si je ne suis pas... Voilà, et je pense que ça peut être très précieux. Comment toi, tu gères ces moments d'isolement aujourd'hui ?
- Speaker #0
Tu vois, moi, ce que tu as dit m'a beaucoup résonné quand tu as parlé de l'écriture. Parce que je peux être au plus mal de mal, je peux être à 10 sur 10 des symptômes, ne plus pouvoir mettre un pied par terre. Rien ne m'enlèvera jamais mon stylo et mon papier. Rien. Et pourtant, je peux faire des trajets pour aller aux toilettes et vomir toutes les dix minutes tellement ça tangue autour de moi. Je peux écrire vraiment n'importe comment. Les lettres sont ignobles sur mon carnet, mais il y a quelque chose qui peut-être est encore un acte de résistance, et de militantisme, et de créativité, une espèce de mélange de tout ça, de finalement, je peux être au plus mal du mal, j'arriverai toujours à écrire, en tout cas dans ma situation. d'une autre personne, ce ne sera pas forcément le cas, mais ce sera peut-être autre chose. Elle arrivera peut-être à mettre au monde encore quelque chose, ou faire venir le monde à elle d'une certaine manière, en écoutant une méditation, tu vois, en étant connectée à une part de ce monde-là. Et des fois, c'est peut-être trouver ça. Et quand on parlait aussi de cette question de subi et choisi, des fois, il peut y avoir quelque chose de l'ordre de la posture, mais qui prend du temps. Ça peut prendre des années, on est bien d'accord. On n'est pas dans un optimisme forcé ici. Mais tu vois, je te parlais au début des invitations qu'on avait avec Mickaël et auxquelles je devais toujours dire non. Eh bien, aujourd'hui, ça m'arrive de vraiment le voir partir pour aller à cette invitation. Et puis moi, de me dire, c'est ce que j'ai bien pouvoir faire pour moi, tu vois. Ça n'enlève pas le fait qu'il y ait des symptômes et que ce soit difficile, mais est-ce que peut-être justement ce soir-là, je me fais le plaisir de me faire livrer le repas, tu vois ? Un plateau télé, est-ce que je me mets au lit encore plus tôt que d'habitude et je mets mes huiles essentielles ? En fait, c'est ça aussi dans cette question pour moi de la réappropriation de cet espace. Ce n'est pas pour l'édulcorer. C'est des fois très difficile et en fait, des fois, tu es juste là, mais en fait, tu en as marre. Il y en a juste marre. Mais comment de temps en temps, sur des petites choses, on peut quand même y arriver ? Et moi, c'est vrai que ça m'a permis un petit peu de modifier mon attitude vis-à-vis de cet isolement. Mais il a fallu que je me rencontre aussi pour ça.
- Speaker #1
Tu vois ?
- Speaker #0
Oui, oui. Parce que dans l'isolement aussi, j'avais tendance à me fuir, tu vois, à la base. Parce que j'avais aussi tendance à fuir mon corps qui est symptomatique. d'être dans un truc hyper dissocié. En fait, c'est tellement désagréable. Je ne peux pas sortir, mais être avec moi, c'est immonde. Parce que c'est que dans le symptôme. Et tout d'un coup, c'était, comment je peux recréer déjà du lien avec moi, même dans la maladie, même dans les douleurs. Et à partir de ces premiers pas d'apprivoisement avec moi-même, j'ai commencé à pouvoir mettre en place des espaces aussi de créativité et des choses comme ça, et des moments cocon.
- Speaker #1
Oui, un retour à soi. Il y a quelqu'un qui dit une phrase qui souligne ce que tu dis, c'est l'isolement comme la maladie pour revenir à soi. C'est tout simple, mais vraiment, je suis totalement d'accord avec ça. Je crois que la maladie m'a permis de revenir à moi, c'est-à-dire de m'intéresser et de beaucoup plus m'autoriser à ne pas être bien, à avoir besoin, comme tu le disais, de se coucher plus tôt. Vraiment, maintenant, il y a des fois où si j'ai envie de manger à 18h et de me coucher à 19h, peut-être que du point de vue de la société, je me couche avec les poules, mais moi, j'ai besoin de me coucher avec les poules et ça me convient parfaitement aujourd'hui. Et peut-être qu'avant, j'aurais eu ce mécanisme de me dire « Ah non, mais tu te couches vraiment trop tôt. Allez, force-toi un petit peu. Tu ne vas pas te coucher avec les poules. » En fait, non. Vraiment, aujourd'hui, je m'autorise à ça et je suis très content de ça parce que je pense qu'on ne s'écoute pas toujours assez. Et moi, c'est un côté de la maladie et de l'isolement que j'apprécie aujourd'hui, en tout cas que j'accorde parce que ça me fait beaucoup de bien même si parfois c'est parce qu'il ya un inconfort d'abord le sourire un peu parce que la moitié suis salement dès quand tu me dis manger à 18 heures pour moi c'est la base Moi, c'est une base un peu avancée, mais je suis dans ces horaires-là parce que c'est plus confortable pour moi.
- Speaker #0
Mais je voulais aussi rebondir sur quelque chose. C'est que là, c'est vrai qu'on raconte l'aspect aussi qui est plus positif, quand on se reconnecte à soi et tout ça. Mais en tout cas, pour moi, il est essentiel de garder et rester dans le lien. Il est essentiel. Et ce lien, aujourd'hui, il se construit vraiment différemment. aussi avec les gens c'est que je sais pas par exemple une copine que je voyais peut-être dix fois par année à l'époque et ben maintenant je vais la voir une fois par année et c'est comment aussi j'ai pu lui dire à cette personne là et bien en fait cela n'a rien à voir avec l'amour que je te porte ça a vraiment à voir avec ma condition physique et si je te vois aujourd'hui une fois par année alors qu'avant c'était dix fois Ça ne regarde que le fait que je suis malade et ça ne remet en doute rien par rapport à notre relation. Mais j'ai quand même besoin personnellement de pouvoir rester en lien et quand je peux, je vais quand même essayer d'être dedans.
- Speaker #1
Oui, ne serait-ce qu'un tout petit peu parce que ça crée ce lien social. Et d'ailleurs, je me permets de rebondir sur une question parce que je pense que tu y as répondu un petit peu, mais peut-être que tu pourras enrichir. Merci. Comment faire quand on a fait le tour de remplir cet isolement chez soi ? La personne disait subir l'isolement double, l'errance diagnostique, bien évidemment, qui crée de l'isolement, parce que quand on est incompris par le monde médical, l'errance médicale fait partie de cet isolement-là aussi, et devoir être alité en plus. Comment on fait quand on a un peu fait le tour de remplir ? Comment on peut aller chercher autre chose ? Je pense que tu y as répondu en partie, c'est-à-dire qu'effectivement, d'aller créer du lien, le plus possible, même digital. C'est quelque chose, tu parlais d'échanger des messages. Moi, je le fais, même pour simplement dire une petite pensée pour toi et finalement, c'est une pensée qui revient vers soi et qui fait du bien de demander comment ça va avec des personnes qui vraiment écoutent une réponse et qui peuvent être là. Un petit coup de téléphone, quelque chose, une sortie, une connexion qui se fait d'une manière ou d'une autre. Ça,
- Speaker #0
c'est que Merci. On a quand même cette chance aujourd'hui d'avoir cette possibilité-là d'être connecté avec des gens tout en étant dans son lit ou alité, que ce soit par téléphone, des écouteurs, si on ne peut pas être en visio ou en visio si c'est OK. Il y a cette possibilité-là et il y a autant cette possibilité-là, je pense, avec son entourage proche, si c'est des personnes qui sont encore présentes dans la famille et les amis, mais ça peut être aussi avec des communautés. de personnes malades. Complètement. Et ça, nous, c'est aussi ce qu'on crée. Finalement, tu vois, je pense aussi au cercle de parole qui est en partie de l'association. Là, on est en train de créer des ateliers aussi pour les personnes malades sur des thématiques, des ateliers de thématiques, des ateliers avec des professionnels qui vont pouvoir apporter, proposer des pratiques aux personnes malades. Donc, voilà, le côté digital, on est aussi en train de l'amener très, très fort chez les invisibles. rester au courant de ce qui se passe mais c'est vraiment ça de se dire ok il y a peut-être les proches avec qui des fois c'est encore un petit peu possible de rester en lien ou pas et puis après il y a vraiment ces communautés de personnes qui finalement savent ce qu'on vit et personnellement j'ai pu avoir, j'ai créé des relations et la nôtre en est la preuve totale en fait comme on le disait en début de ce live c'est que on s'est jamais vu en vrai Merci. Alors pour moi aujourd'hui, ça reste quelque chose qui des fois me rend triste où je me dis mais là j'aimerais juste prendre le train à aller retrouver Fernand, le prendre dans mes bras et dire mais c'est un truc de ouf tout ce qu'on fait. Et ça, il peut y avoir un manque des fois, mais ce manque il est petit par rapport finalement à tout ce que ça remplit, cette relation d'être tous les jours en lien et de savoir qu'on se comprend. et à l'obstétrice. un peu exagéré ce que je vais dire peut-être, mais presque sans condition. Tu vois, il y a quelque chose où on sait tellement ce que c'est de vivre dans ces corps inadaptés, dans ces corps invalides, qu'on n'a pas besoin de s'écrire des tartines pour s'expliquer que ça ne va pas, qu'on ne va pas pouvoir honorer notre rendez-vous, que ce qu'on s'était mis comme projet pour cette semaine, ce n'est pas possible. On sait que l'autre sait. Oui, complètement. Moi, je pense que la rencontre avec des pères, des personnes qui sont aussi malades, et même pas forcément les mêmes maladies, parce que finalement, on se rend compte qu'on rencontre les mêmes défis, les mêmes effets psychologiques, sociaux, comme l'isolement. On se rend compte que peu importe la maladie et le handicap invisible, finalement, il y a des chapitres de vie et de la vie de malade particulièrement qui sont les mêmes. de pouvoir discuter sans retenue, sans condition comme tu le dis, j'ai envie de dire comme condition sociétale en fait, ça fait du bien et effectivement pour parler de nos rendez-vous dans l'ombre, on peut être pas coiffé, ça peut être pas du tout parfois confortable et on se le dit c'est pas confortable et c'est ok et parfois c'est dans une relation au corps qui est peut-être de l'ordre de l'intime mais qui où en fait les barrières qui sont plutôt gérées par la société qui nous dit qu'il ne faut pas parler de sel, de toilette, de corps qui a mal, de vessie, de tous ces mots et encore même là je l'ai fait moi-même de mettre des mots plus poétiques dirons-nous. Mais en fait entre malades on peut complètement enlever ces barrières-là et ça fait un bien fou parce qu'on a besoin de ça et ça c'est absolument formidable.
- Speaker #1
Je me dis aussi que ça pourrait être intéressant Alors... Tu vois, des fois que les personnes mettent en commentaire ce qu'elles vivent sous nos publications pour que d'autres personnes les voient, puissent rebondir et ça crée des liens aussi.
- Speaker #0
Complètement, complètement. Allez-y, posez-vous des questions entre vous, allez contacter les gens. Il y a certainement des gens qui ont les mêmes pathologies que vous, si c'est quelque chose qui vous rassure, ou même parce que la personne a dit quelque chose qui fait vibrer quelque chose à l'intérieur de vous, qui appelle chez vous. quelque chose à l'intérieur de vous, allez-y, allez parler à cette personne, vous lui ferez du bien et vous vous ferez du bien. Il y a forcément des liens à faire aussi de ce point de vue-là. Profitez de ces espaces de commentaires, ils peuvent être très précieux. Là, il y a une question très intéressante. Comment trouver l'équilibre entre respect du recul qu'une personne souffrant de maladies invisibles souhaite garder et éviter le sentiment d'isolement abordé ? c'est une personne qui a une amie qui est dans une situation de maladie handicap invisible. Comment garder ce respect quand on est proche entre ce besoin d'être isolé parce que la maladie l'impose et en même temps éviter que la personne se sente isolée ? Comment toi tu vois ?
- Speaker #1
Je trouve cette question en effet hyper intéressante. Je pense qu'il y a vraiment une posture à avoir dans cet aspect de dire, mais je suis là pour toi, comment est-ce que je peux être là pour toi, pour que ce soit le plus agréable possible ? Est-ce que tu as besoin que, je ne sais pas, je vienne te poser la question une fois par semaine, par message, de comment tu vas ? Est-ce qu'au contraire, tu veux attendre de venir toi vers moi quand tu sens qu'il y a du mieux ? Finalement, c'est de poser la question à l'autre. qu'est-ce qui est le plus confortable pour toi ? Avec quoi c'est OK pour toi de naviguer dans la relation ?
- Speaker #0
Oui, oui. Et si la personne ne sait pas, je pense que simplement dire, voilà, je parlais d'une pensée pour toi, ou un petit message, ou un petit gif rigolo, ou j'ai une pensée pour toi parce que j'ai vu ça, quelque chose qui n'implique pas toujours une réponse de la part de la personne qui est malade ou handicapée invisible, juste cette pensée-là, enfin en tout cas de mon côté, peut être hyper précieuse. j'essaie d'y répondre, parfois je n'y réponds pas mais déjà ça c'est énorme de sentir qu'il y a quelqu'un qui est là et qui pense à toi je trouve que c'est déjà hyper précieux et montrer de l'intérêt tu sais,
- Speaker #1
moi il y a un truc qui m'a beaucoup touchée quand je suis tombée malade d'une amie c'est que ça peut paraître assez banal mais ça résonne encore 5 ans plus tard elle m'a dit je suis allée sur des forums de gens qui vivent Merci. avec ta pathologie et je suis allée lire ce qu'ils vivaient eux aussi et comme ça, ça m'a encore plus donné d'informations sur ce que c'est de vivre avec ça et à quel point c'est horrible et tout ça, il y avait une question de donner de l'intérêt et de valider aussi j'ai trouvé ça hyper puissant parce que j'étais là mais finalement, rien de demander à cet ami en pleine santé d'aller lire des forums sur ça, tu vois il y a des gens qui ont des pathologies, ils vont même pas lire des forums sur leur propre pathologie Merci. Et j'étais là, ah ouais, je suis hyper touchée. En fait, tu as décidé de prendre un temps dans ta vie pour accorder... L'intérêt à ce que je vis. Wow !
- Speaker #0
Complètement. Très belle preuve d'empathie, de bienveillance, complètement. Il y a quelqu'un qui dit, et c'est vrai aussi peut-être que notre discours, quelqu'un qui dit difficile, ça de maintenir les liens. Effectivement. Effectivement. Moi, pour être tout à fait honnête, de l'époque où j'ai commencé à être malade, aujourd'hui, il y peu de personnes qui sont encore là aujourd'hui. Les gens ont disparu et effectivement, c'est quelque chose qui n'est pas évident de maintenir le lien, surtout quand on ne peut pas maintenir ce lien social en allant voir les gens ou en participant à tous ces événements sociaux que peuvent être les soirées, les anniversaires, les baptêmes, les mariages ou tout autre. Effectivement, c'est quelque chose qui est compliqué. Je pense qu'il faut régulièrement le verbaliser, que c'est compliqué. Et puis, quelque part, peut-être que se séparer aussi des gens qui s'en vont, tout simplement, parce que faire ce travail-là de maintenir le lien peut être épuisant. Donc, je pense qu'il faut maintenir le lien avec des gens qui sont déjà autour et qui sont toujours présents et qui sont toujours là. Et je pense que dans ce cas-là, ce n'est plus maintenir le lien, c'est plutôt l'enrichir et le nourrir. Mais effectivement, c'est... Peut-être que ces liens-là, ils sont sur le doigt d'une main. Et puis des liens, on se dit peut-être, je ne sais pas ce que tu mets derrière le mot lien, toi Tamara. Moi, j'y mets, ça peut être très bien cette boulangère ou ce boulanger à qui tu vas tous les samedis ou la personne sur le marché à qui tu dis bonjour régulièrement ou le voisin qui te reconnaît. Moi, je sais que je suis dans une copropriété avec des voisins. formidable et ça c'est déjà du lien social qui est hyper précieux et je pense que dans une journée ou même dans une semaine d'avoir ces sourires là ça ramène à du lien social qui est beaucoup plus humain et qui est intéressant aussi alors qu'il peut-être pas suffisant mais
- Speaker #1
qui est déjà déjà se nourrir de ça peut être hyper important et pertinent pour soi mais c'est vrai que c'est très juste que tu dis et ce que la personne a mis en commentaire c'est à dire que dans tous les cas, je pense, en tout cas, c'est mon expérience aussi personnelle, il y a vraiment des liens qui se sont délités et aujourd'hui qui n'existent plus. Alors, il y a des liens qui peut-être déjà de base étaient un petit peu plus superficiels. Donc, voilà, aujourd'hui, ils ne font plus partie de ma vie et je dis ça sans animosité. Tu vois ce que je veux dire ? Vraiment. C'est des gens que je peux avoir encore dans le cœur, mais avec qui je dis que voilà. ça s'est délié parce que ça s'est délié. Et la vie est comme ça. Et aussi, c'est très confrontant des fois pour les gens qu'on puisse tomber malade. Et ils finissent par juste partir. Et je crois que nous, on n'a pas l'énergie de leur courir après. On est dans autre chose.
- Speaker #0
C'est parce que ça sert au final.
- Speaker #1
C'est ça. Et donc, on voit aussi qui sont les personnes qui comptent, qui sont les personnes qui restent, qui ont créé de l'intérêt, qui justement envoient de temps en temps une pensée, qui sont présents avec... conditions qui sont différentes pour nous aujourd'hui et c'est comment aussi pouvoir accueillir ce fait-là qu'il y a des personnes qui quittent notre vie et comment ça peut devenir finalement ok de se dire bah voilà pour moi c'est important de continuer à nourrir des vrais liens même s'ils sont peu et puis la multitude de liens tant pis c'est pas grave et j'aime beaucoup ce que tu dis par rapport aux liens dans le quotidien Merci. C'est des fois des choses qu'on oublie, finalement, de comment on regarde le voisin et la manière de lui dire bonjour, et limite de lui demander comment ça va dans l'ascenseur, tu as passé une bonne journée, ou c'est galère. Tu sais, même un peu le small talk. Mais le small talk, il peut apporter quelque chose dans la journée. Il peut apporter un sourire, un échange, parler à la caissière, comment ça va la famille. Tu vois, vraiment. Moi, j'adore ça. L'art de la petite conversation. Mon mari, il ne supporte pas ça. Et il me dit à chaque fois, mais comment c'est possible que tu aies toujours un sujet avec des gens qu'on ne connaît ni d'Ève ni d'Adam ? Je la mets, oui, mais on va chercher nos enfants à la crèche en même temps. On a forcément un sujet en commun, tu vois. Et c'est vrai que des fois, c'est des... Tu vois, je pense par exemple, moi, en allant à la crèche, mais c'est à quelques mètres de chez moi, tu vois, donc c'est vraiment à côté. Eh bien, j'ai l'occasion de croiser d'autres parents et de discuter des petites choses de la vie. Des fois, ça nous prend 10-15 minutes en bas de l'immeuble à tchatcher comme ça et c'est déjà un lien dans la journée.
- Speaker #0
Mais complètement. qui est hyper précieux. Il y a une personne que j'aime beaucoup qui a dit qu'il y a un prix naturel et aussi, il y a des personnes qu'on n'attendait pas et qui se révèlent à toi à ce moment-là. Alors, je ne l'ai pas vécu personnellement ou sinon, c'est plutôt des gens à qui je m'attendais à ce qu'ils soient là, mais ils l'ont été encore plus, encore plus présent, encore plus et de façon vraiment euh... avec un soin que je n'aurais pas imaginé ou que je n'aurais pas osé espérer.
- Speaker #1
Tu pourrais nous dire qui ? C'est hyper intéressant.
- Speaker #0
Moi, ça a été vraiment ma petite sœur. J'ai une petite sœur que je sais formidable, mais qui l'a été puissance 3000, vraiment, et qui a été un peu formidable de compréhension. de justesse, d'une maturité exceptionnelle, alors qu'il y a 5 ans, elle avait à peine 20 ans, donc d'une grande maturité, et aujourd'hui, dans son travail, elle est une personne qui a exactement la même maladie que moi, et elle a su être à l'écoute, et être, donc je pense qu'il y a des... gens qui ont aussi ça en eux et que ça révèle. Je trouve que c'est hyper intéressant d'avoir posé ces mots-là, parce que c'est très vrai.
- Speaker #1
Ça me touche tellement ce que tu dis, vraiment, j'ai les larmes qui sont montées. Parce que c'est vrai qu'on parle beaucoup de ces personnes qui partent finalement de notre vie, mais on oublie parfois aussi de pouvoir honorer ceux qui ont donné. tellement de choses à ce moment-là. Et moi, j'ai une relation avec deux, trois amis, mais qui se sont renforcés. Mais en fait, il y a une authenticité qui s'amène avec la vulnérabilité aussi, des fois. Et le fait qu'on tombe les masques aussi, des fois, vis-à-vis des autres et ce qu'on montre, ça peut être... ça peut résonner chez l'autre, même si l'autre n'est pas malade, mais sur d'autres parts de lui, le toucher. réveillé fin il ya des choses comme ça très fort et je pense aussi notamment à mon père tu vois où le lien c est encore plus fort aujourd'hui et je vois parce que lui il consomme mais tout notre contenu Papa je me réveille le matin là au portugal je l'arrive au salon mon père il est allongé avec sa tablette sur YouTube à écouter le dernier épisode tous les matins. Et puis, il écoute sur YouTube même les épisodes qui ne sont pas en vidéo. Il est vraiment avec l'écran comme ça et il regarde alors qu'il n'y a pas de livre. Il y a juste le logo. Et là, à fond. Et il a toujours un avis à donner sur ça. Et puis, même quand on parle des choses du quotidien, souvent, il va avoir une pensée où il va dire « Ah oui, mais toi... » Par exemple, il s'avance sur un truc. Puis après, il dit, ah ouais, mais non, mais toi, en fait, avec la maladie, peut-être que ça va être compliqué de faire ça. Ah oui, non, mais toi, tu vois, tout d'un coup, il y a quelque chose de spontané, naturel qui sort et tout d'un coup, il y a une espèce de petite vigilance qui s'ouvre chez lui. Ah non, mais ça ne va peut-être pas convenir à Tamara. Ah, mais pour elle, c'est différent parce qu'elle est malade. Et puis, il fut là, waouh ! Tout d'un coup, juste de venir m'offrir de l'espace, tu vois ? Un espace qui est peut-être différent qu'une autre personne qui est... extrêmement fonctionnelle ou valide de dire ok on a une pensée un petit peu plus précise de est ce qu'on peut faire quelque chose pour que ce soit plus confortable pour toi et tout ça et il ya des gens qui le font avec amour et avec brio quoi vraiment complètement complètement il
- Speaker #0
ya une question que j'ai envie de te poser et que je pose à tout le monde c'est qu'elle est aujourd'hui là où les formes de Solutions qui pourrait venir
- Speaker #1
à menir ce besoin d'isolement tu vois ce que je veux dire est ce qu'il ya des choses où tu te dis pour me sentir encore moins isolé j'aurais besoin de ça oui et les donner un exemple qui est hyper concret parce qu'il s'est passé dans ma vie il ya quelques semaines il ya quelques semaines je devais manger avec deux personnes que je chéris énormément une de mes meilleures amies et sa maman on devait aller manger au restaurant et c'était impossible vraiment pour moi. J'étais au maximum des symptômes, je ne n'y arrivais pas. Et en fait, j'ai dû annuler. Et ça m'a vraiment mis dans cette solitude subie. J'avais très envie de les voir. Je partais ensuite au Portugal, donc je savais que je n'allais pas les voir pendant des mois. Enfin, voilà. J'étais vraiment en mode, je suis déçue, très déçue et je me sens seule. Et en plus, il faisait beau ce jour-là, j'avais envie de vivre ce moment et pas juste être seule chez moi. Et ces deux personnes m'ont écrit sur le groupe, on a un groupe WhatsApp commun, elles m'ont dit, « En fait, on se fait livrer chez toi et on vient chez toi. »
- Speaker #0
Tellement génial.
- Speaker #1
Et ça m'a… Je te jure, rien que d'en reparler, ça me fait monter l'émotion. Il y a quelque chose de… Ok, tu es isolée à cause de ça, mais on ne va pas te laisser isoler en fait.
- Speaker #0
Oui, c'est une excuse qu'on anéantit.
- Speaker #1
C'est ça. Et alors, elles m'ont demandé… Mais quand même, elles m'ont demandé si c'était OK. Et ça, c'est important de le dire parce que des fois, c'est juste pas possible que les gens viennent à toi. Et j'ai dit ouais, c'est OK quoi. Et ça m'a tellement touchée. Et tout d'un coup, ben voilà, elles sont arrivées. On était là avec les repas à emporter et puis dans les assiettes, machin, et sur la terrasse. Et j'ai pu profiter de ce rayon de soleil avec ces deux personnes qui m'ont d'ailleurs posé des questions assez profondes sur cet état en me demandant mais qu'est-ce qui fait qu'on peut venir à toi, mais que toi, tu peux pas te déplacer ? Parce que tu vois, le restaurant, il n'était pas loin de chez moi, il était à deux, trois arrêts de tram. D'expliquer tout ce que c'était la surcompensation, d'aller dans un endroit que tu ne connais pas, avec d'autres gens, avec des stimuli, alors que là, tu es dans un espace de sécurité et safe chez toi, et qu'on y vienne, c'est différent. Et puis de pouvoir aussi leur dire, finalement, là, c'est trop pour moi, si vous pouvez partir. De pouvoir aussi le nommer, de dire, voilà. j'ai cette fatigabilité peut-être que je vous demanderais de partir à un certain moment mais c'est avec tout l'amour du monde et ça donc c'est arrivé cette fois-là dans ma vie mais c'est pas ce qui arrive majoritairement donc je pense que c'est quelque part c'est ça dont j'aurais plus besoin pour me sentir moins isolée c'est que les moments où il y a cet isolement qui se fait cette rupture avec le monde c'est qu'il y a des personnes qui me disent mais est-ce que tu veux qu'on vienne à toi est-ce que qu'est-ce qu'on peut faire garder ce lien tout en respectant ta capacité de l'instant. Oui,
- Speaker #0
complètement.
- Speaker #1
Du coup, je te renvoie à la question.
- Speaker #0
Alors, je n'avais pas pensé à ce que tu as dit, mais je pense que c'est effectivement très vrai. C'est un besoin qui est chez moi aussi, c'est-à-dire que quand il y a rupture, parce que l'isolement pour moi est impossible autrement, que la personne puisse me dire, dans ce cas-là, c'est moi qui viens à toi et on arrange quelque chose qui fait que... que cet isolement, et c'est plus qu'un concept qui s'évapore, et on le bannit, en fait. Donc, je trouve que c'est très vrai. Alors là, c'est propre à ma maladie, mais moi, j'aimerais que la société, aussi, me permette que cet isolement ne se fasse pas. Dans le cadre de ma maladie, moi, c'est tout bête, mais beaucoup plus de toilettes publiques ou des toilettes dans les magasins, et en fait, juste ça, juste des toilettes. ça serait tellement pour moi quelque chose de... Enfin, ça changerait complètement ma vie, tu vois. Les transports à Paris où il n'y a plus du tout de toilettes dans les transports, c'est désastreux pour moi, en fait, parce que ça veut dire que je ne peux pas prendre ces transports-là. Donc, là, cet après-midi, je suis allé dans un espace commercial où il y avait différents magasins. Aucun d'eux n'avait des toilettes. Et pour moi, c'était hyper inconfortable parce que moi, je peux en avoir besoin à tout moment. et juste cet aspect-là fait que si je ne suis pas sans symptômes, je ne peux pas sortir parce qu'il n'y a pas ces points de sécurité qui me permettent ça. Et le besoin après, et je ne sais pas si ça va rejoindre la situation d'autres personnes, moi aujourd'hui je suis célibataire et le rapport à mon corps depuis la maladie est complètement différent. et ce besoin, ce lien aussi du toucher de quelqu'un d'autre, du toucher charnel de la sensibilité, de même de la sexualité, c'est quelque chose qui a été complètement rompu avec la maladie et ça dans l'isolement en tant qu'être humain c'est quelque chose qui n'est pas évident et que je ressens peut-être le plus et qui aujourd'hui m'impacte le plus.
- Speaker #1
C'est un besoin fondamental, c'est physiologique. On a besoin d'être lié aux autres, on a besoin d'être dans le toucher. Et ça, c'est quelque chose en plus qui se perd même de manière plus globale, le toucher. Mais j'entends ce que tu dis et je trouve ça en effet difficile de ne pas avoir ce contact physique. Je ne sais pas du tout si c'est une piste. Alors, de nouveau, c'est cette question de... Pas être dans quelque chose d'édulcoré quand t'as besoin d'un contact d'une autre personne, t'as besoin d'un contact d'une autre personne. mais J'ai découvert personnellement le fait vraiment de me faire des auto-calins. Alors, je te dis ça en ayant la chance d'avoir des calins de mon mari, de ma fille. D'accord ? Donc, merci madame, mais vous avez des calins, donc vos auto-calins, voilà. Mais quand même, te dire ça parce qu'il y a des moments où finalement, tu vois, ces personnes-là ne remplissent pas toute cette solitude que tu ressens au fond.
- Speaker #0
Complètement.
- Speaker #1
Et vraiment, j'ai appris. à juste me dire ok là t'as besoin de te déposer dans des bras de bienveillance de chaleur et de me prendre dans ces bras et de me laisser aller et maintenant j'arrive à me dire mais en fait je suis jamais seule parce que je suis avec moi-même je peux être un support aussi à moi-même c'est tout bête mais je pense que justement comme ce que je disais tout à l'heure c'est que Quand on tombe malade, la connexion à soi, elle est difficile. Elle est vraiment difficile. On a presque l'impression d'être son propre ennemi, tu vois. Son corps, il dysfonctionne. On se déteste, on se critique, on se juge. On est affreux avec soi-même. Et de pouvoir tout d'un coup aussi, ok, revenir un peu là, genre, ou en fait, je... Qu'est-ce que je donnerais à un enfant qui vit ça ? En fait, je le prendrais dans les bras et je serais là, mais en fait, c'est dur ce que tu vis. Viens là, viens contre moi, que je te console. Je n'ai peut-être pas grand-chose d'autre à dire, mais viens te déposer. Et de pouvoir s'apporter aussi des petites choses comme ça, d'amour et de bienveillance, ça ne résout bien sûr pas tout. Ça n'enlève pas le fait que... tu souffres de ne pas vivre de sensibilité, de sensualité, de sexualité, on est bien d'accord. Mais voilà, c'est des petites choses auxquelles j'ai pensé aussi, des fois, de pouvoir s'apporter à soi-même, quand malheureusement, ce n'est pas possible de l'extérieur.
- Speaker #0
Oui, mais c'est complètement vrai et je le partage complètement. C'est-à-dire que c'est effectivement une réponse qui, je crois, est de toute façon nécessaire par rapport aux maladies que l'on vit, qui sont souvent physiques et qui font que le rapport au corps est complètement et très souvent détérioré, je pense que la reconnexion à soi est quelque chose d'important. Et dans le cadre que j'évoquais de manque de toucher, de sensorialité de la part de quelqu'un d'autre ou même de sexualité, moi, ma forme de réponse aussi à ce manque, il est très personnel, c'est-à-dire qu'effectivement, ça va être... Moi je suis quelqu'un depuis très jeune, mais encore plus maintenant, qui prend soin de ma peau. Et c'est des moments de sensualité qui n'ont pas la même saveur que si c'était quelqu'un d'autre, bien évidemment, mais qui participent aussi d'une forme de tendresse et de câlins, d'auto-câlins dont tu parlais, qui sont ultra importants pour moi. De revenir à une forme de sensualité avec soi-même. J'y pense en même temps que je le dis, alors je ne sais pas si je trouverais les mots parfaits pour le décrire, mais en tout cas, d'avoir un retour à une forme de sensualité avec soi-même, qui peut-être est un peu tabou dans nos sociétés, mais de toucher sensuel, qui peuvent évoquer des choses rien que par le toucher, je pense que déjà avec soi-même, ça peut être hyper précieux. Totalement. De retourner à son corps.
- Speaker #1
justement c'est d'autant plus dans le fait qu'on a tendance à se rejeter comment recréer un lien avec ce corps qui est dysfonctionnel ou en tout cas qui rentre pas dans les normes moi je voulais te demander donc aujourd'hui le fait que tu es encore invalide t'empêche d'avoir des relations de coup ou plus de sexualité avec des partenaires alors je pense
- Speaker #0
Je ne pense pas que ce soit mon corps qui m'empêche, parce que ça voudrait dire que là encore, je le dissocie de moi et que j'en fais un ennemi. Je pense qu'il a décuplé déjà un rapport à mon corps qui n'était pas serein et qui n'était pas optimal. Donc il a décuplé ce rapport-là qui n'était déjà pas très bon. Et aujourd'hui, comme c'est très lié à la sphère intime, euh... la colopathie fonctionnelle, c'est compliqué. C'est plus que c'est que mon corps, aujourd'hui, est devenu insécuritaire pour moi. C'est-à-dire qu'à tout moment, il peut être dysfonctionnel dans un espace où, pourtant, on doit avoir une certaine maîtrise de soi par rapport au corps de l'autre, par rapport au moment qui est très charnel et où on est complètement dénudé ou pas, mais en tout cas dénudé dans l'intimité. Et c'est vrai que... Aujourd'hui, le rapport à mon corps et à la sexualité avec quelqu'un d'autre, C'est compliqué, c'est compliqué parce que ça demanderait que j'ai une confiance énorme envers l'autre personne, qu'il y ait un regard qui soit posé et peut-être même des mots en fait, de qu'est-ce qui est confortable pour toi, qu'est-ce qui ne l'est pas, comment on peut avancer progressivement ensemble en fait.
- Speaker #1
Et dans un contexte comme ça, tu peux projeter le fait que ce soit possible à nouveau un jour ?
- Speaker #0
Projeter, je ne sais pas. Espérer. Projeter, peut-être pas. Espérer. Espérer parce que ça demande la nécessité de l'autre, de la présence de l'autre et de l'empathie de l'autre, la bienveillance de l'autre. Donc, espérer rencontrer la bonne personne, je crois.
- Speaker #1
Ça demande beaucoup de conditions. Mais finalement, est-ce que ce n'est pas les conditions pour une relation saine ?
- Speaker #0
Très probablement, très probablement au final. Alors, il y a quelqu'un qui dit rencontrer quelqu'un quand on sait qu'on est régulièrement hors service, très belle façon de le dire, c'est vraiment pas évident à assumer. Effectivement, effectivement, ce hors service est très bien trouvé. Je pense que c'est la problématique que je rencontre aujourd'hui, c'est effectivement comment envisager de rentrer. dans une phase de séduction où le corps est d'une certaine manière importante aussi dans cette phase de séduction alors même que ce corps est régulièrement en service je trouve cette formulation génial je vais la garder c'est effectivement ça c'est pas évident toi comment ça s'est passé la relation avec michael ta présence au corps et à propre sexualité
- Speaker #1
Bonne question. Moi, là où ça a vraiment impacté la sexualité, si tu veux, plus que les symptômes de tangage ou de brouillard cérébral ou de troubles cognitifs, c'est vraiment la fatigue, l'épuisement. Et en fait, quand on est épuisé, non, on n'est pas disposé à avoir des rapports sexuels. Et en tout été... Moi, je suis quelqu'un qui a une libido franche, pour ne pas dire autrement. Et donc, ce qui a vraiment changé, si tu veux, c'est la fréquence de nos rapports. C'est-à-dire qu'on est passé de plusieurs rapports par jour, excusez-moi si je choque certaines personnes pressantes, à des rapports d'être plutôt une fois par semaine. Donc, il y a vraiment quelque chose qui a changé en termes de fréquence, simplement parce que je suis tellement… épuisé. Le soir, c'est inenvisageable pour moi parce que j'ai surcompensé une journée entière. Donc, ce n'est juste pas possible. Les après-midi et les matins, quand on a un enfant et que le mari travaille, il y a des questions logistiques finalement aussi qui vont avec tout ça. Et donc, c'est la fréquence. Mais là aussi, où ça a dû peut-être un boost se réapprivoiser, moi, ça a été vraiment ce rapport à mon propre corps et comme on l'a déjà un petit peu nommé. C'est-à-dire que pour être, je pense, bien dans sa sexualité, il faut être bien dans son corps. Mais pas que bien dans son corps physiquement, comme on l'entend souvent. Moi, je suis hyper OK avec ma cellulite, mes bourrelets. Ce n'est pas ça le problème. C'est qu'il y a vraiment un moment donné où mon corps me l'est rejeté puissance 1000. Je me suis détestée dans le symptôme. Et quand on se déteste, comment on peut être... Dans une relation de sexualité, comment on peut créer de la connexion avec l'autre si on n'est pas connecté avec soi ? C'est vraiment là l'enjeu pour moi qui a été important. C'est récupérer des parties de moi, comme ça, et les mettre en sécurité, et leur donner de l'amour et de la bienveillance pour à nouveau être dans une sexualité pleinement épanouie, même si la fréquence a changé.
- Speaker #0
Est-ce que tu... Pour revenir à notre thème, est-ce que pour toi, c'est une forme d'isolement, ça, par rapport à ton mari, Mickaël ?
- Speaker #1
C'est difficile de te répondre à chaud à cette question parce que, en tout cas, si tu parles sur le thème de la sexualité, c'est toujours moi qui ai eu une libido plus importante que lui. Finalement, c'est presque moi qui en ai plus souffert.
- Speaker #0
Et pour revenir vraiment sur cette thématique de l'isolement et par rapport au couple, c'est vrai que moi, je me suis souvent excusée envers Mickaël de ne pas pouvoir vivre les choses avec lui, qui était plutôt de l'ordre d'activité ou comme on disait, d'invitation. Et lui a toujours été dans une bienveillance, mais juste immense, de dire, mais finalement, moi, je n'attends pas. pas des choses de toi comme ça. Cette pression, c'est toi qui te la mets. Moi, je suis confortable, en fait, avec le fait que t'es malade, avec le fait que des fois, tu viennes, des fois, tu viennes pas. Il arrive qu'on invite des personnes à la maison et en toute honnêteté, moi, je quitte en plein repas pour aller me coucher. Tu vois, l'image que tu as à dire aux personnes, ben voilà, ça fait trop plaisir de vous avoir chez nous ce soir, mais vous savez que ce que je vis, ben ça va faire que peut-être je vais devoir. partir à un moment donné. Il ne faut vraiment pas le prendre compte de vous. Ce n'est pas que ce que vous racontez est ennuyant ou quoi que ce soit, mais c'est moi dans mon besoin de repos. Et finalement, les gens l'ont très bien intégré maintenant. Et puis, des fois, je me relève pour aller faire pipi à 3h du matin et il y a encore 5 personnes dans l'appartement en train de refaire le monde. Et moi, je suis là genre « Eh, coucou ! » Je dors depuis 22h. Et qui êtes-vous ? C'est clair. et puis t'es sur un autre mode les gens sont complètement ignores c'est hyper drôle mais voilà c'est ça aussi d'avoir finalement un partenaire ou une partenaire qui sont dans cette bienveillance de comprendre que c'est pas eux le problème quand on fait pas des choses avec ou qu'on partage pas des moments avec et ça la problématique et on va pas rentrer dans cette thématique là maintenant mais c'est que en fonction du type d'attachement de la personne en face Merci. Si il y a un attachement évitant, anxieux ou désorganisé, peut-être que la personne va extrêmement mal le vivre en pensant que c'est de sa faute, elle va se remettre en question, alors que pas du tout. Là aussi, on est dans des choses que, si on est face à une personne qui a un attachement sécure, elle peut entendre tout ça, mais en fonction de qui on a en face de nous, ce n'est pas toujours entendable.
- Speaker #1
Oui, complètement. Ce que tu dis me fait penser à une notion d'isolement et culpabilité. comment aussi L'isolement qui est déjà quelque chose qu'on subit. Je ne sais pas si ça fait sens pour toi ce couple de mots-là, mais dans ce que tu disais notamment par rapport à Mickaël, à quel point on peut aussi se reprocher cet isolement-là qui n'est déjà pas voulu, mais qui de facto est là, et comment cet isolement est perçu par les autres, puisqu'il n'est pas perçu comme ça, ou en tout cas il est perçu comme voulu alors qu'il ne l'est pas. Et finalement, comment on se défend de ça ? Est-ce que ça a apporté chez toi de la culpabilité ? Ou au contraire, pas du tout ?
- Speaker #0
Ah oui, mais méga ! Tu sais, en plus, c'est tout bête ce que je vais dire, mais dans une société sexiste, tu vois, il y a ce côté genre, je suis la femme, je dois aller aux bras de mon homme, honorer les choses, tu vois. Il y a un côté un peu, bah ouais, je... je laisse tomber mon mari il y a quelque chose d'hyper culpabilisant mais c'est là où lui a très vite arrêté ses pensées anxiogènes cette culpabilité en disant tu crois quoi, t'es pas un trophée à honorer, à montrer juste tu t'écoutes, mais ce qui est incroyable c'est que lui, sans être malade alors je mets des guillemets parce qu'il a quand même il est encore dans une dépression postpartum et tout ça, mais lui a toujours été comme ça avec lui-même Merci. C'est-à-dire qu'il a une invitation à laquelle il doit aller, pour finir, il ne la sent pas, il est crevé, il va se l'écouter. Et il ne pose pas plus de questions que ça, il envoie juste un vieux message. Coucou, désolé, j'annule. Mais moi, je tourne en bourrique pendant huit ans en me disant « Est-ce que je ne pourrais quand même pas essayer de faire un effort ? Est-ce que du coup, parce qu'après, il va falloir retrouver une date, ça va être compliqué ? » Je me prends la tête pendant des heures parce que j'annule alors que je suis dans un état de l'enfer. Alors que lui, juste d'être crevé, il est là genre non, j'annule. Et puis, il envoie son message et puis après, il est tranquille. Il fait sa soirée, il est tout à l'heure genre, ne culpabilise pas.
- Speaker #1
Oui, complètement. Moi, ça m'a apporté beaucoup de culpabilité, encore parfois maintenant. Parce que du coup, la maladie a apporté avec elle une anxiété anticipatoire où en fait, je me demande comment ça va se passer. Est-ce que je suis sûr que... Est-ce qu'il y a des toilettes ? Tout un ensemble de questions qui font que j'anticipe beaucoup trop et du coup, je crée du stress sur ça. Et quand je me dois d'annuler, soit parce que l'anxiété est tellement forte que je suis paralysé et que je n'envisage même pas de pouvoir sortir, ou parce que tout simplement les symptômes sont trop présents. Alors quand les symptômes sont trop présents, c'est assez facile pour moi d'annuler, de dire « je ne peux pas venir parce que physiquement c'est impossible, parce que les symptômes sont beaucoup trop présents et m'empêchent d'y aller » . Et puis il y a des fois où c'est l'anxiété. qui me fait dire non, je ne vais pas parce que ça va déclencher chez moi tout un lot de choses et aussi des symptômes parce que les deux se parlent et là j'ai cette culpabilité qui se met en place parce que je me dis peut-être que tu pourrais faire un effort et si tu faisais un effort et peut-être que ça va bien se passer donc vas-y, force-toi à y aller et là ça crée souvent de la culpabilité et pour l'instant je n'ai pas trouvé le remède à ça si ce n'est que de dire bon bah en fait Merci. Je le fais comme ça. Il y a quelqu'un qui dit que l'anticipatoire contribue aussi beaucoup à l'isolement. Mais complètement. En fait, l'un est la conséquence de l'autre, bien malheureusement. Et en plus, par-dessus, comme je le disais, ça crée de la culpabilité parce qu'on se dit que c'est juste de l'anxiété. Donc, si j'arrivais à l'éteindre et à m'apaiser, comme le dirait certains médecins faits du yoga et faits du sport, peut-être que tu pourrais sortir. Mais ce n'est pas toujours évident. Toujours des calculs, anticiper les situations.
- Speaker #0
Mais ce qui est intéressant, c'est que tu fais une différence entre tes symptômes de la colopathie fonctionnelle et l'anxiété. Alors que l'anxiété est un symptôme.
- Speaker #1
L'anxiété est un symptôme. Certes. Et la colopathie fonctionnelle peut être activée par l'anxiété. Donc tout ça, tu parles et c'est un lot de choses. Si tu veux, chez moi, c'est un peu qui de la poule ou de l'œuf ? C'est-à-dire, si c'est le symptôme qui vient en premier, je suis assez OK avec ça pour dire « De toute façon, les symptômes sont là, donc je ne peux pas faire autrement. » Par contre, si c'est l'anxiété, alors certes, c'est un symptôme, mais il y a peut-être une façon de faire, d'agir, de le taire, de l'amenuir de telle façon que je vais pouvoir quand même sortir. Parce que des fois, j'y arrive.
- Speaker #0
Mais pour moi, ça me fait de nouveau penser au fait que… Ça, c'est parce qu'on baigne dans une société psychophobe et que les symptômes physiques sont entendables et les symptômes mentaux ne le sont pas. Et que les symptômes mentaux, c'est, mais finalement, mets-toi un coup de pied au cul, tu vas pouvoir y aller. Alors que tu as de l'anxiété. L'anxiété est un symptôme physique, tu vois. Oui,
- Speaker #1
complètement. Tu as raison, tu as raison.
- Speaker #0
C'est la physiologie.
- Speaker #1
C'est comme si je me disais à moi-même, c'est dans ta tête, tu vas pouvoir agir dessus. Donc, juste, tais ce qu'il y a dans ta tête, tais tes pensées et vas-y. il ya quelques fois ça marche et puis d'autres fois ça marche alors je lis j'ai une amie qui a une batterie sociale qui s'épuise avec les groupes ça lui arrive fréquemment d'annuler et on l'a tous bien assimilé je dirais même qu'on s'écoute plus nous aussi et bien ça peut servir et si ça peut rayonner c'est encore mieux et c'est là l'apport de j'ai envie de dire l'apport de la maladie qu'est ce que tu as à dire là dessus
- Speaker #0
Non, non, mais j'ai simplement à rebondir très rapidement. Mais le groupe, c'est ce qui prend. Moi, c'est pareil. Alors aujourd'hui, la relation en one-one, elle peut être possible à certains moments et même vraiment très enrichissante. Mais le groupe est devenu quelque chose de… Parce qu'en fait, on est en surcompensation avec des profils différents et des conversations. des sensations qui s'entrecroisent, des besoins différents chez chacun, des envies, et puis tu surcompenses. C'est d'une difficulté, le groupe, pour les personnes malades et leur sensibilité, l'hyper-visibilité.
- Speaker #1
Complètement. Parce qu'en plus, il y a un groupe à l'extérieur, mais j'ai envie de dire qu'il y a presque un groupe à l'intérieur qu'il faut gérer, c'est-à-dire le groupe des symptômes. Moi, je sais que si je sens un symptôme, ça me défocus complètement et je suis focus à l'intérieur tout en faisant attention à ce qui se passe à l'extérieur parce que tu es en groupe et qu'il faut faire du social. et c'est très très compliqué ça devient un marasme à l'intérieur qui est compliqué à gérer il y a un autre message en tant que proche aussi il ne faut pas priver la personne de la possibilité de choisir d'assister à un événement ça peut être un réflexe inconscient de ne pas proposer de sortir j'ai envie de rebondir là-dessus parce qu'il y a un exemple personnel que je trouve chouette aussi
- Speaker #0
J'ai une amie qui est artiste et qui propose plein d'événements, très souvent, auxquels on peut participer, des expositions, différentes choses, des spectacles. Une fois, je me suis excusée auprès d'elle en lui disant « En fait, je suis désolée parce que maintenant, je n'arrive quasi plus à venir à tes événements. Avant, j'allais quasi à tous. Et maintenant, j'arrive à venir peut-être une fois sur dix à un événement alors qu'avant, c'était neuf fois sur dix. » Et elle me dit « Mais finalement, tu es comme toutes les personnes. » Elle me dit « Mais toutes les personnes valides à qui j'envoie les événements, ils viennent à un événement sur dix. » Donc déjà... juste remettre dans ce contexte-là finalement, il y a plein d'autres gens qui fonctionnent très très bien et qui ne viennent seulement qu'à un événement sur 10 et puis elle m'a aussi dit, moi ça ne va pas m'empêcher de continuer à être invitée parce que je serai heureuse le jour où tu viens, même si c'est une fois par année, et j'étais là mais merci parce que j'avais peur qu'elle cesse de m'inviter en fait ouais,
- Speaker #1
j'ai eu ce même sentiment avec ma soeur où effectivement elle est toujours de bonnes invitations et très souvent je refuse alors que l'envie est grande mais je refuse parce que c'est pas possible pour moi et on a de temps en temps ces conversations là parce que moi j'ai ce sentiment là de dire je suis vraiment désolé j'annule tout le temps, je dis tout le temps non mais sache que c'est pas contre toi c'est juste je peux pas et elle a toujours ses paroles ultra rassurantes et je pense qu'il faut avoir ces paroles là aussi en tant que personne valide c'est de pouvoir dire c'est...
- Speaker #0
ok en fait et effectivement le jour où tu pourras venir et bien ce sera génial et on se concentrera là dessus c'est vrai que finalement les gens de l'entourage elles devraient pas anticiper si ça nous convient ou pas et des fois de oser dire spontanément est-ce que tu moi je t'invite à cet endroit mais laisse-toi me dire si c'est ok pour toi ou pas parce que c'est vrai qu'il y a beaucoup de gens qui disent que ils nous envoient des invitations une fois, deux fois, trois fois, quatre fois, puis au bout d'un moment, quand on refuse tout le temps, ils arrêtent de le faire. Parce que eux, dans leur compréhension, c'est qu'on n'a pas envie d'y participer et qu'on fait le mort, entre guillemets, mais ce n'est pas du tout le cas. Et donc, c'est vrai que ça aussi, ça participe à l'isolement quand tout à coup, les gens arrêtent de t'envoyer leur composition parce que tu n'as pas pu venir souvent. Et nous aussi, peut-être qu'on a cette responsabilité de leur dire de leur dire mais en fait je vais probablement ne... Ne pas pouvoir venir à plein de moments, mais est-ce que tu peux continuer à m'inviter dans les moments où tu aurais eu envie que je sois là pour que ce soit moi qui me prononce sur si c'est possible ou pas ?
- Speaker #1
Complètement, complètement. Alors, je le lis en même temps. Mon neurologue m'a expliqué très clairement la présence de l'anxiété dans un contexte de douleur chronique. Ça m'a beaucoup aidé à moins culpabiliser de ne pas arriver à la gérer. Oui, l'anxiété. si tu veux venir nous partager ce qu'a dit ton neurologue, n'hésite pas, en message privé, ça nous intéresse beaucoup. Désolée, j'ai pris en cours, mais avec grand plaisir, même si c'est en cours, bienvenue.
- Speaker #0
Je dis juste fermement que je vais bientôt devoir arrêter ce super live parce que je commence à prendre un peu trop sur moi, mais on peut encore échanger quelques minutes, mais je ne vais pas pouvoir aller beaucoup plus loin que ça.
- Speaker #1
Pas de souci. Est-ce que les personnes qui sont là, vous avez des envies, des questions, des choses sur lesquelles vous voulez rebondir ? Avez-vous, vous aussi, la sensation de perdre votre identité à cause de la maladie, des privations, des possibilités, d'œil invisible de vos projets, de devoir faire une croix sur vos valeurs ?
- Speaker #0
C'était l'autre thème que je vous proposais pour ce soir. La perte d'identité.
- Speaker #1
Mais dans l'islam, Mais, désolément, il y a un peu de ça aussi, je trouve. Mais vas-y, je te laisse rebondir.
- Speaker #0
Je pense que, sincèrement, ça voudrait un deuxième live, de pouvoir parler de cette thématique. Mais je suis tout à fait d'accord avec ce qui est dit. C'est-à-dire que, tu vois, comme je disais au tout départ, c'est que moi, j'étais une personne hyper sociable. Et tout d'un coup, le fait de ne plus l'être, je perds une part de mon identité. Le fait de ne plus tout le temps être avec des gens, d'être dans cette sociabilité plus, plus, plus, il y a une part de moi à qui j'ai dû dire au revoir. Mais il y a des parts de moi à qui j'ai dit bonjour, comme le fait de pouvoir apprivoiser cette solitude, me rencontrer, créer des connexions avec moi-même. Donc, c'est vrai qu'il y a des pertes, mais il y a aussi des choses qui se gagnent. Mais ça, vraiment, ça vaudrait la peine qu'on en discute parce que cette question de l'identité, elle est énorme dans la maladie, énorme.
- Speaker #1
Je crois qu'elle est même fondamentale par rapport à beaucoup de choses que je me suis dites même. Moi-même, c'est le mois d'avant, un mois avant, je vais revenir à avant. Il y a un moment, enfin, toutes ces questions-là d'identité sont très importantes. Par rapport à l'idolement, plus spécifiquement, je pense qu'il y a l'identité sociale du rapport à l'autre, de l'identité même dans le rapport au travail, à quel point le fait de devoir s'isoler parce que la maladie isole. Moi, je sais que par exemple, aujourd'hui, c'est inconcevable pour moi d'avoir un travail où je vais tous les jours. C'est inconcevable. Donc ça, ça crée de l'isolement aussi. Je suis très content d'être freelance. Et il y a aussi, comme tu dis, plein de parts de moi là-dedans qui se sont ouvertes et dont je suis très content. Mais il y a aussi des parties de moi qui ne sont pas comblées avec ça. Donc je pense que l'isolement aussi... créer une autre identité qui n'est pas la même et avec laquelle on doit composer et qui n'est pas toujours évidente, ça c'est certain.
- Speaker #0
Oui, et puis parce que tu parles du travail, je rebondis aussi personnellement par rapport à ça. Moi, le travail, ça faisait partie de l'identité, de la Tamara que j'étais. J'étais la travailleuse sociale, éducatrice spécialisée qui s'engage dans des foyers pour jeunes et machin. Enfin, tu vois, en plus, c'est déjà une posture qui est militante. Il y a une identité là-dessus. et donc... et d'être très investie dans mon travail. Enfin, tu vois, toutes ces choses. Je pense que vraiment, d'arrêter de travailler dans le contexte dans lequel je travaillais, eh bien, pour moi, ça a été un de mes plus grands deuils. J'ai mis deux ans et demi, trois ans, accepté que je ne retournerais plus dans le travail social. Et je perdais un pan de moi. Vraiment, tu vois, je te le montre physiquement. Il y a vraiment, c'est comme si on me démembrait. Il y avait quelque chose de... Mais si je ne suis plus ça ? Donc, je ne suis plus la travailleuse sociale, je ne suis plus l'hyperactive, hypersociale, mais en fait, qui suis-je ? Je suis pas ce que je fais. Parce que quand on tombe malade, on ne fait plus plein de choses. Donc, qui on est si on ne fait pas ce que... Si on n'est plus ce qu'on fait ?
- Speaker #1
Ça pose des questions un peu philosophiques qui vont peut-être te parler entre... Être et faire. Est-ce qu'aujourd'hui, dans la société où on est, on a besoin de faire pour être ? Je trouve que, moi en tout cas, la maladie m'a permis de revenir à un état d'être. Je suis ce que je suis et c'est déjà pas mal. Et si je ne peux pas faire pour correspondre à tout ce que veut la société de moi, tant pis. Moi, j'aime beaucoup... Je ne sais plus qui l'a dit, mais vous faites quoi dans la vie ? Je fais de mon mieux. Je rêve de ces moments où je peux répondre ça, parce que je crois que c'est vraiment ça, il faut faire de son mieux. Et la maladie m'a apporté beaucoup par rapport à ça, de dire je suis ce que je suis et je fais de mon mieux, et c'est déjà pas mal.
- Speaker #0
En tout cas, ça soulève vraiment le fait qu'il va y avoir un besoin de temps d'échange sur cette thématique de l'identité.
- Speaker #1
Oui, complètement. si ça vous tente, avec grand plaisir. Pour conclure, moi je voulais partager une petite lecture que j'avais faite il y a quelques années, je me suis rappelé de ça. C'est Julie Dachez, D-A-C-H-E-Z, qui a écrit une BD avec une illustratrice qui s'appelle La différence invisible. Et elle parle justement de toutes ces questions-là. Alors elle, elle est autiste Asperger, et elle parle justement de comment elle a tenté de s'intégrer dans cette société-là, et comment elle a essayé de correspondre avec les défis qui étaient les siens. Et voilà, je me dis si ça peut intéresser certains. Moi, j'avais trouvé ça très bien, et j'aime beaucoup le format BD dans ces questions-là. Donc voilà, je voulais le partager, ça me semblait... intéressant. Je regarde un petit peu si...
- Speaker #0
Moi, je veux juste répondre à une phrase que je vois là, où quelqu'un dit « ça me tue de devoir répondre « je ne travaille pas » sans en expliquer la cause. Moi, j'ai pris le parti de ne pas dire que je ne travaillais pas, parce que je travaille à des choses. Et en fait, c'est comment on peut essayer de valoriser ce qu'on fait. Tu vois, par exemple, si tu continues à faire du jardinage, tu peux dire « je jardine » . Si tu écris, tu peux dire « je suis auteur, je suis écrivaine, j'écris » . En fait, qu'est-ce qui finalement donne un statut à chaque fois ? Et donc, on peut des fois se dire… On peut parler de soi dans le travail de manière différente que ce qu'on imagine qui est un travail salarié de l'État ou des choses comme ça, et se dire, voilà, j'élève mes enfants, je suis auteur, j'ai créé une association. Enfin, on peut parler de soi dans une manière de travailler qui est différente que celle qu'on imagine. Et comme ça, il n'y a pas toujours à se justifier si on n'en a pas envie.
- Speaker #1
Complètement, complètement. Il y a encore une... petite phrase là. Et ce qu'on est, ça permet finalement de contribuer à une autre culture, à une autre société, une autre vision de la vie. Je pense que c'est très vrai. Je pense qu'on ne le perçoit pas toujours parce que ce n'est pas forcément évident dans les états qui nous parcourent, mais je pense que le fait d'être malade et la vision que ça nous impose, mais finalement qu'on choisit en évoluant, ça va... certainement permettre de changer la société. En tout cas, c'est ce qu'on espère aussi avec la société, avec l'association, pardon.
- Speaker #0
C'est clair.
- Speaker #1
Plus empathique et plus juste.
- Speaker #0
Merci pour tous les beaux messages aussi de clôture de ce moment, ça fait plaisir de les lire.
- Speaker #1
Oui, c'est vraiment génial. Et on espère que ce petit moment vous aura moins isolé, justement.
- Speaker #0
C'est clair. peut-être qu'on peut aussi réfléchir à proposer plus souvent ce genre de format pour échanger entre nous entre nous tous et toutes voilà ça vous plaît,
- Speaker #1
on sera ravis d'échanger avec vous super, bonne soirée à tout le monde bonne soirée n'oubliez pas que vous êtes avec vous-même et ça c'est déjà énorme complètement on vous embrasse bien fort et à très bientôt salut Tamara ciao
- Speaker #0
Fernand Ensemble, continuons à visibiliser l'invisible.