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Les Vrais Souverains

Magique bambou

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32min |15/05/2023
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Les Vrais Souverains

Magique bambou

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32min |15/05/2023
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Description

Le pépiniériste Stéphane Alzaix invite à Luzillat, dans le Puy-de-Dôme, Mathieu Poizat et Christophe Downey, fondateurs d’Horizom, une entreprise agricole qui plante du bambou en France, à présenter ses centaines de variétés de bambous à un couple d’agriculteurs du Morvan. Ils discutent de l’extraordinaire opportunité écologique et économique que représente le bambou pour l’industrie et l’agriculture française.


Co-réalisé par Renaud Duguet et Maxime Verner. 

Voix off : Elia.

Générique : Guillaume Bérat.


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Bonjour les vrais souverains, je suis Arnaud Montebourg et j'approuve ce podcast. J'ai créé il y a quelques années les équipes du Made in France qui contribuent à construire, reconstruire la nouvelle agriculture et la nouvelle industrie de notre pays. On le fait modestement, mais on le fait concrètement. Et je vous emmène à la rencontre des vrais souverains, celles et ceux qui se battent au quotidien pour que la France redevienne ce grand pays inspirant que nous aimons tant et où nous voulons vivre longtemps.

  • Speaker #1

    Dans les stratégies nationales de diminution de carbone, la France doit multiplier par 2 sa biomasse d'ici 2050. La biomasse, c'est la fabrication de la nouvelle forêt, et on ne peut pas le faire avec les seules forêts existantes. Nous avons besoin d'une plante extraordinaire qui nous permette de stocker dix fois plus de carbone que les autres et de produire de la biomasse deux fois plus rapidement. Cette plante magique existe partout dans le monde. Elle s'appelle le bambou. C'est une plante qui n'est pas invasive, contrairement aux préjugés, et qui pousse à une vitesse accélérée, éblouissant tous les agronomes.

  • Speaker #0

    Le bambou est un outil indispensable pour construire la souveraineté d'une biomasse française.

  • Speaker #1

    Alors aujourd'hui, on va à l'usine dans le Puy-de-Dôme, chez Stéphane Alzay, qui est pépiniériste du bambou. Il y a 15 ans, il était pompier professionnel et s'est reconverti dans une plante qui est sa passion. Il en a 450 variétés. C'est le meilleur pépiniériste aujourd'hui en France de bambou. dont ils maîtrisent les origines, la culture, l'élevage, la croissance. Bref, une encyclopédie. Et nous y allons avec les dirigeants d'Horizome, qui ont créé une société dans laquelle je suis moi-même impliqué et associé, qui installe la filière bambou en France pour tous les usages. que cette plante extraordinaire est capable d'apporter. C'est une plante qui stocke du carbone de façon imbattable, comme aucune autre plante. Parce qu'elle repousse quand on la coupe, donc inutile de la replanter. Quand vous plantez un arbre, il stocke du carbone, puis 80 ans après, vous l'abattez, vous le remplacez. Mais là, tous les ans, vous coupez un rang, deux rangs de bambou, et il repousse naturellement. Donc c'est une plante à croissance exponentielle. et c'est une plante qui est l'avenir de l'industrie et de l'agriculture. Et c'est la raison pour laquelle nous avons décidé de nous y investir. Alors là, il y a deux de mes amis agriculteurs dans le Morvan, ma région natale, entre la Nièvre, la Côte d'Or et la Saône-et-Loire, qui sont là et qui vont se poser toutes les questions pour savoir si oui ou non ils vont planter du bambou chez eux. Je vais te présenter tous nos amis. Alors ça, c'est les pires dirigeants d'Horizon. Et Stéphane Alzé et le Pépiniéris qui nous invitent dans cet endroit incroyable.

  • Speaker #2

    D'accord.

  • Speaker #1

    Voilà. Ça va, bonne route ?

  • Speaker #2

    Oui.

  • Speaker #1

    Bonne heure. Nous on a fait trois heures de train et donc on se pose la question de savoir si on plante du bambou dans le Morvan donc toutes les questions agronomiques économiques, techniques tout ! On va passer en revue tout ça et puis sous le feu sceptique de l'esprit naturel, de l'agriculteur que nous sommes tous ici Parce qu'on se pose la question, c'est une plante à laquelle nous sommes aventureux. Et pourtant, c'est une plante extraordinaire. Donc on va commencer le voyage avec toi, Stéphane. Tu nous guides, on te suit.

  • Speaker #3

    C'est une plante qui n'est pas partout dans le monde. C'est un peu dommage de ne pas l'utiliser, on ne l'utilise pas partout ailleurs. On la connaît juste comme une plante d'ornement. Alors que partout ailleurs on en fait beaucoup d'autres choses. Ici c'est à peu près des conditions défavorables, qu'on puisse avoir, enfin on peut pousser du bambou. Le terrain est très très lourd, c'est vraiment de l'argile, on peut faire de la poterie en fait, il y a des briquetteries traditionnellement, donc c'est de la terre, vraiment de la terre glaise. On a des sécheresses terribles, ça n'a jamais été arrosé, donc le jardin c'est vraiment une condition très défavorable. Et ça pousse quand même.

  • Speaker #1

    Suivons le guide.

  • Speaker #3

    Donc là c'est la partie pépinière, il y a des bambous de collection, des choses rares qui sont venus de Chine, donc très très peu d'exemplaires. Il y a une grande partie, c'est un gros stock de bambous non envahissants, c'est ce qu'on fait le plus. Et ici quelques plants de bambous qu'on plante en agriculture en fait.

  • Speaker #1

    Alors ça c'est le moyen Fabien ? C'est celui-là que tu envisages de planter en France ? C'est celui que tu plantes dans les Landes ?

  • Speaker #3

    Oui, celui-ci en fait partie à peu près. On en a pour l'instant une douzaine de bambous moyens qu'on est en train de développer, mais on va augmenter la liste. Ceux-là en font partie, c'est la famille Philostachys, c'est un Philostachys primotina, là-bas on a mélangé avec un Philostachys incarnata, mais il faut faire un mix de toute façon, il ne faut pas planter une seule espèce de bambou, parce que si elle fleurit, il n'y a plus rien.

  • Speaker #1

    Tu as un mix de combien d'espèces dans le cheptel, dans ton panel de variétés idéal ?

  • Speaker #3

    Sur chaque plantation, il faut qu'il y ait 7 ou 8 espèces. Mais du coup, nous, ça nous oblige à avoir un panel de peut-être une trentaine de bambous moyens, parce que les bambous moyens sont beaucoup plus adaptables, et à peu près 60 bambous géants. Ça c'est du moyen ? Ça c'est du moyen.

  • Speaker #1

    Mais tu as des géants ici ? Je ne vois pas la comparaison. C'est ceux-là les géants là ? C'est pas vite voir non. C'est beau !

  • Speaker #3

    C'est du géant qui a mal poussé ici, parce que ça n'a jamais été arrosé et mon sol n'est pas terrible. C'est pas un géant ?

  • Speaker #1

    Oui. Ah ouais, ça va plus haut là !

  • Speaker #3

    Ça va plus haut et il y en a quelques-uns qui commencent à être plus gros là.

  • Speaker #1

    et là ils ont 10 ans ?

  • Speaker #3

    oui c'était la deuxième année ça pousse en combien de temps ? en deux mois

  • Speaker #1

    Quand vous récoltez ça,

  • Speaker #3

    ça fait quoi ?

  • Speaker #1

    La récolte, c'est on coupe, on broie ?

  • Speaker #4

    On coupe, on broie, ça fait des plaquettes forestières, des chips. Des chips, c'est ça. C'est une broyeuse ?

  • Speaker #3

    Oui, c'est comme une grosse moissonneuse. Ça dépend des applications. On peut ramasser soit en balles, soit le broyeur qui est récupéré.

  • Speaker #1

    Des rangs denses comme ça, là ?

  • Speaker #3

    Faits comme ça,

  • Speaker #1

    large de je ne sais quoi, d'un mètre de même ?

  • Speaker #3

    La largeur de l'outil, de l'engin, en fait.

  • Speaker #1

    Et c'est un rang sur deux par an.

  • Speaker #3

    Voilà, c'est ça. Il faut couper ça en février, et du coup, au printemps, ça repousse.

  • Speaker #2

    C'est un peu comme le miscanthus.

  • Speaker #3

    Exactement. C'est exactement ça, sauf que les mensurations ne sont pas les mêmes, et les débouchés sont beaucoup plus nombreux.

  • Speaker #5

    Le bambou est beaucoup plus ligneux. Il y a plein d'applications intéressantes avec le Miscanthus. Et on voit d'ailleurs que c'est une culture qui se développe, une culture de biomasse qui se développe. Mais le bambou a vraiment cet avantage de ressembler dans sa composition chimique beaucoup plus au bois, parce que c'est vraiment une ressource de biomasse ligneux cellulosique.

  • Speaker #4

    Et il n'y a pas de séquestration carbone importante pour le Miscanthus.

  • Speaker #3

    D'accord. Ça c'est un plant qui a 3 ans et un pot de 5 litres, donc c'est ça qu'on plante 400 à l'hectare. On coupe à 1,50 mètre pour le transport, pour la reprise, et voilà. C'est ce qu'on met, pour faire un hectare, on met 400 pots comme ça. La difficulté qui fait que c'est long à produire, ce qui compte c'est ce qui est dessous en fait, c'est que le rhizome soit... suffisamment développé pour bien s'installer, s'installer rapidement. Et c'est à cet âge-là qu'il commence vraiment à s'étendre dès qu'il est planté.

  • Speaker #1

    Et alors tu ne peux pas les garder au-delà de 3 ans ?

  • Speaker #3

    Moi, j'avais l'habitude de les garder au-delà et je les vendais en pots plus gros. Je vendais des pots de 15 litres, puis des pots de 30 litres. Mais c'est trop lourd. Quand on en plante un ou deux chez un collectionneur ça va, ou chez un particulier, mais pour planter 400 à l'hectare, il vaut mieux transporter 400 pots de 5 litres que 400 pots de 30 litres parce que c'est une logistique différente après.

  • Speaker #4

    Là on voit qu'il y a un nid là.

  • Speaker #3

    Ah ouais, ça c'est formidable parce que les chats ne peuvent pas attraper les nids d'oiseaux dans les bambous.

  • Speaker #1

    Ah non, trop dur !

  • Speaker #3

    Il y a plusieurs sociétés en Europe qui font du bambou. Il y en a une qui est assez sérieuse et qui fait les choses plutôt bien, qui diversifie les espèces. Et il y en a une contre laquelle j'essaie d'attirer l'attention, qui ne plante qu'une seule espèce, parce qu'ils ont la facilité d'obtenir des graines de cette espèce chaque année. Et il se trouve que ce bambou c'est le plus difficile à faire pousser. Vous ne l'avez pas vu dans mon jardin, parce que déjà il ne supporte pas l'argile, il ne supporte pas le calcaire, il ne supporte pas l'excès d'eau en hiver. Donc c'est le bambou le plus capricieux à faire pousser. Quand il pousse, il devient énorme, mais souvent il ne pousse pas. Et c'est un bambou qui est vraiment compliqué. Donc c'est un peu dommage de mettre déjà qu'une seule espèce de bambou, et surtout celui-ci qui est vraiment compliqué à faire pousser. À savoir, quand on ne plante qu'une seule espèce de bambou, si ça fleurit, on n'a plus rien. Pour l'Inde, une floraison c'était synonyme de famine terrible. C'est énorme, le développement du bambou en Inde. Il y a un ministre du bambou en Inde. C'est un... Et c'est Lin Bar qui nous a appris justement à mettre en place des pépinières dès les premiers signes de floraison. Et ce ministre du bambou indien, il m'avait dit en juin 2018 qu'il avait découvert aujourd'hui, c'était à Pékin, que le bambou pouvait remplacer tous les plastiques jetables. Il m'a dit, c'est fini, dans tous les états d'Inde du Nord-Est, il n'y aura plus de plastique jetable. Six mois plus tard, il n'y a plus de plastique jetable. Tout remplacé par du bambou.

  • Speaker #0

    Christophe Donnet, Dimitri Guyot et Mathieu Poisa ont créé en 2021 Horizon.

  • Speaker #5

    L'objectif d'Horizon, c'est vraiment de développer et structurer une filière. Et pour que cette filière, elle prenne de l'ampleur et elle arrive à se développer, il faut vraiment que tous les acteurs arrivent à trouver un modèle économique viable et viable sur le long terme. Et donc, dans ces acteurs, dans cette filière, il y a l'amont. Donc, il y a vraiment le côté pépinière, le côté on aide, on accompagne les porteurs de projets pour démarrer. une plantation pour démarrer une bambouzette. Et ensuite, on voit le rôle d'horizone comme un rôle d'accompagnateur, non seulement au début, mais ensuite sur le long terme, sur la valorisation. Et effectivement, on a un mécanisme de commission où on souhaite aligner nos intérêts avec celui des porteurs de projets. Donc, on se rémunère sur la base d'une commission sur les crédits carbone et sur la base d'une commission sur la valorisation. de la biomasse produite, ce qui permet d'aligner les intérêts et ça permet pour nous d'aller chercher la meilleure valeur pour le porteur de projet. Et comme ça, on s'assure que l'équilibre économique soit bien respecté. Et derrière, l'idée, c'est aussi de trouver un équilibre économique pour les industriels et les transformateurs qui vont ensuite transformer la biomasse et aller décarboner différents secteurs, différentes industries.

  • Speaker #0

    Stéphane Alzay nous raconte comment il est tombé amoureux du magique bambou.

  • Speaker #3

    J'étais pompier professionnel. Et je vous ferai voir, il y a une rue du bambou à Lusia, j'y suis pour rien. Et donc ma grand-mère m'appelait, elle vendait, elle m'appelait quand j'étais ado, je venais avec ma mobilette, je faisais 7 km. Viens vite, ils ont poussé dans la nuit, ils vont me cacher le soleil. Et je cassais du bambou. Ma grand-mère est décédée en 1998, la maison est restée un peu à l'abandon. Du coup les bambous, ils en ont profité, ils avaient 30 ans. Et sur 400 m² en 2007, il y a 400 m² de bambouserie qui est sortie d'un seul coup, en deux mois. et à plus de 14 mètres de haut. Donc c'était assez spectaculaire. Quand j'ai vu ça, j'ai dit, c'est quoi cette plante en fait ? Et j'ai commencé d'acheter un livre, j'ai étudié petit à petit. Maintenant j'ai des encyclopédies chinoises, parce qu'il n'y a plus assez de documentation, ni en français ni en anglais. Donc voilà, c'est devenu une vraie passion comme ça.

  • Speaker #1

    Vrai, faux, quoi, comment ? Le bambou existe en France depuis 1860. Est-ce qu'on a entendu parler des envahisseurs ? Non. Alors explique-nous où on en est, quelle est la réalité de ça, quelles espèces, quoi, comment ? Parce qu'il y a quand même une mythologie qui tourne, des préjugés, des idées reçues, et puis un peu d'ignorance surtout sur le sujet. Qu'est-ce que vous avez à répondre là, tous les trois ?

  • Speaker #3

    C'est très facile. C'est une plante très expansive. Le bambou, il est fait pour faire une forêt. Mais au départ, ça va devenir une culture en fait, donc ce n'est pas un espace naturel qui pourrait coloniser. Donc si on définit de le planter sur une parcelle, il faut qu'il reste sur cette parcelle. Et la technique est très simple, il suffit de faire un chemin tout autour de la parcelle qui délimite la parcelle. Et une fois par an dans un sol normal et deux fois par an sur un sol sablonneux, il faut passer une sous-souleuse en fait, de 40 cm qui sectionne le rhizome parce que les rhizomes sont à 30 cm. Et donc le fait de contrôler ce chemin, si on ne pète pas souvent, on passe un coup de broyeur et un coup de sous-soleuse, et le bambou il restera sur sa parcelle en fait.

  • Speaker #1

    C'est une plante qui ne se disperse pas parce qu'elle n'a pas de gramination ?

  • Speaker #3

    Non, ça ne fleurit pas. La fleuraison a lieu à peu près tous les 100 ans, donc il n'y a pas de dispersion de graines. Ça ne peut pas envahir... comme région. C'est largement moins invasif que du colza.

  • Speaker #4

    On a cette vision d'une plante exotique qui aurait besoin de beaucoup d'eau, plante même aquatique. Et en fait, les variétés que tu as ramenées de Chine, elles viennent de la Chine continentale avec des climats qui ressemblent beaucoup aux nôtres. Et donc, les besoins en eau, c'est globalement 100 mm par mois au printemps.

  • Speaker #1

    S'il n'y a pas de précipitation, comme on le connaît, par exemple, au Louis.

  • Speaker #4

    C'est bien le problème, oui. On serait content d'être en botte dans ton jardin aujourd'hui, Stéphane.

  • Speaker #3

    Je serais content que vous soyez en botte,

  • Speaker #4

    ce serait dommage. C'est vrai que c'est un des problèmes et on se dit que face à tous ces aléas climatiques, c'est peut-être mieux de prévoir de l'irrigation en appoint.

  • Speaker #2

    Aujourd'hui quand même, on en parle tous les jours à la télévision, le manque d'eau potable va devenir, on va dire, un vrai sujet dans les... Et même chez nous qui sommes le réservoir en eau potable de la France.

  • Speaker #3

    J'ai regardé en Morvan, j'ai regardé la pluviométrie, j'ai trouvé très intéressant. Moi ici, jusqu'à il y a 4-5 ans, je disais vous plantez vos bambous pour des bambous d'ornement, mais il faut bien qu'ils poussent aussi. Vous n'arrosez pas forcément, vous verrez les pluies du mois de septembre rattraperont. Et puis ça va, moins ça rattrape en fait. On se rend compte que depuis 2017, il y a vraiment des années très difficiles et puis elles s'accumulent. C'est souvent ça, les poulies, les sapinières. Le bambou n'a pas forcément besoin d'être arrosé. Peut-être que le système d'irrigation, il y a de grandes chances qu'il ne fonctionne qu'une année sur 6 ou 7. Mais c'est vraiment pour sécuriser la sortie des pousses au printemps.

  • Speaker #4

    S'il n'y a rien, on préconise un goutte-à-goutte. parce que c'est le plus efficient. Après, s'il y a des parcelles de maïs qui étaient irriguées et qu'il y a déjà un système d'irrigation, on peut réfléchir justement à réutiliser ce système. En fait, c'est surtout de l'appoint.

  • Speaker #1

    Dans le Morvan, il n'y a pas un préfet qui sait ce que c'est qu'un arrêté pour l'irrigation. Ils n'ont jamais vu ça, donc il n'y a pas d'historique. Donc nous, on va se pointer. On va dire, ah, monsieur le préfet, on vous demande un petit peu de dérégulation. Et là, ça va être la révolution. Ils vont nous dire, mais dans le moment, maintenant, on fait une dérégulation. Donc, on a un petit sujet sur la manière dont on traite ce problème en réglementaire, sachant qu'il n'y a pas de forage. Il y a des prélèvements dans les rivières, certainement.

  • Speaker #2

    Il n'y a pas de forage, il n'y a pas de système d'irrigation pour le maïs, il n'y a strictement rien. Parce que nous, le Moran, c'est...

  • Speaker #1

    C'est très humide.

  • Speaker #2

    C'est déjà assez humide, et il n'y a pas des parcellaires, comme dans la Beauce, comme dans toutes ces régions où l'agriculture, on va dire, céréalière est en place, où vous avez des arroseurs qui font 2 km de long et qui tournent en rond. Nous, on n'a pas ça, les parcellaires, c'est... Les plus gros c'est 20 hectares, 10 hectares, 5 hectares, mais il y a beaucoup plus de parcelles qui font 1,5 hectare, 1 hectare. Et il y a tout le temps des petits boctaux, des haies qui séparent toutes ces parcelles-là. Donc c'est quand même hyper compliqué d'irriguer.

  • Speaker #3

    Mais après, je viens sur l'effet du bambou sur le climat. Quand on a des parcelles de bambou adultes, c'est plus humide. On a l'arrosé quand il y a une grosse canicule énorme. On a l'arrosé trois, quatre jours de plus qu'en dehors de la bambouserie. Et le bambou influe largement, au point de vue local, sur l'humidité, sur la chaleur. Il fait 7 degrés d'écart en plein cagnard quand il y a une canicule, entre chez mes parents à Maringues et ici.

  • Speaker #2

    La culture de bambou est, on va dire, consommatrice de produits phytosanitaires.

  • Speaker #4

    Non, justement, c'est ça qui est...

  • Speaker #2

    C'est un sujet assez chaud et bouillant dans notre région du Morvan.

  • Speaker #3

    Il n'y a aucune maladie, aucun parasite. Le seul vrai ennemi du bambou, c'est le panda. Il n'y a aucun parasite qui nuit à la culture du bambou.

  • Speaker #4

    C'est vrai qu'au début, nous, on avait vraiment une vue très ingénieure de comment on peut séquestrer du carbone en s'inspirant de la nature. Et ensuite, on s'est dit, bon, ce bambou, il faut bien que des gens le cultivent. Et c'est là qu'on a compris qu'il y avait un vrai enjeu d'inégalité, de revenus, de se rendre compte que le producteur, il est à l'amont de la chaîne de valeur. d'une manière très paradoxale, celui qui est le moins rémunéré. Et c'est comme ça qu'on est tombé sur le chemin d'Arnaud et de François et de la Compagnie des Amandes, qui a un peu révolutionné ce système de partage de la valeur.

  • Speaker #1

    Nous, on n'achète pas la terre à la Compagnie des Amandes. Donc la terre appartient aux paysans. C'est une loi de la Révolution française, puisque le paysan a obtenu la terre contre le clergé et la noblesse. Donc nous, on n'est ni des Américains ni des Chinois. Et on est pour que la propriété appartienne aux paysans. En revanche, on s'associe avec l'agriculteur, le paysan, le sylviculteur dans notre cas. C'est un peu cette idée-là. On s'associe pour exploiter ensemble. Où on apporte la technique, le paysan apporte sa terre, l'écosystème. On apporte la R&D, c'est-à-dire qu'est-ce qu'on fait pour améliorer la plante. Et on apporte le débouché pour dérisquer. Et le financement. Parce que quand on s'associe, ça veut dire qu'on est aligné avec le paysan et qu'on va gagner de l'argent ensemble en valorisant le plus possible sur l'aval. Donc c'est ça la garantie. Alors la contrepartie, c'est que le paysan accepte de ne pas travailler seul, ce qui est plutôt un avantage parce que le cerveau collectif est toujours meilleur que le cerveau individuel. Et il ouvre le capital en minoritaire à des partenaires. Et on partage ensuite 51-49. On a choisi cette clé de répartition. Franchement, on a eu... 3 500 hectares de déclarations de candidatures, on n'a pas pu les retenir tous parce qu'il y avait des problèmes pédologiques, climatiques, il y avait les EGEL, le ceci, le cela, mais franchement, ça montre qu'il y a un appétit sur ce type de partenariat, d'association, on est des associés. Et dans le modèle économique d'Horizome et de notre petite entreprise formidable sur la plantation de bambous en France, une partie des investissements sont financés par les crédits carbone. Ce qui permet d'abord d'attendre la récolte. en ayant un financement de l'investissement par l'agriculteur, qui n'est pas obligé de supporter toute la dette, un travail qui est quand même un peu rémunéré, même s'il ne l'est pas à 100%, et comme le crédit carbone aujourd'hui commence à monter, monter, monter, alors là, les cours, on vient de tutoyer les 100 euros, alors qu'aujourd'hui, le marché était plutôt à 50, on sait que les revenus attachés à la séquestration du carbone ne peuvent qu'augmenter, puisque tout le monde en veut, et qu'il n'y en a pas assez. Voilà.

  • Speaker #4

    On fait plus que séquestrer du carbone, il y a vraiment un enjeu sur le territoire, l'agriculteur, le fait de financer des exploitations qui aujourd'hui tendent à disparaître. Ce qui rassure, c'est que ce bambou, on le récolte chaque année, donc on ne va pas pouvoir déforester ou exploiter plus vite que la vitesse de repousse, comme c'est le cas pour les forêts aujourd'hui. Et donc ça vient finalement compléter, soulager l'exploitation de la forêt, pour justement alimenter les industries en biomasse. En gros, on veut récupérer des terres qui sont tassées, mortes, où il y a eu beaucoup de conventionnels. Et puis, redonner de la vie microbienne, bactérienne, les verres de terre, remettre en place des symbioses mycorhiziennes. Combler les carences en oligo-éléments, réhausser le taux de matière organique, ce qui fait qu'on aura du coup une bambouzette dont la chute des feuilles permet d'apporter la ration du sol chaque année et on va pouvoir prélever de la biomasse du système. sans casser le cycle d'auto-fertilité, parce que justement on a ces feuilles qui apportent la ration du sol. Et donc là on sort complètement du prisme de l'agriculture conventionnelle, en ayant le moins d'influence sur les écosystèmes possibles. Alors on reste quand même un peu dans le productivisme, et le but c'est d'alimenter le moins mal possible les industries. Donc on n'est pas en train de dire qu'on va recréer des forêts primaires et que ce sera aussi bien, mais en tout cas on veut minimiser l'impact qu'on a sur les écosystèmes. La forêt va se densifier progressivement, comme on l'a vu, d'un à deux mètres par an. Au bout de cinq ans, la canopée se referme. Il y a un couvert végétal naturel qui se forme de par des feuilles. Donc en fait, on a une rétention de l'eau, de l'humidité qui est intéressante, ce qui explique pourquoi il n'y a pas tant besoin d'irrigation et d'eau que ça. Et au bout de la quatrième, cinquième année, on va faire la première récolte en bande. Donc en fait, on va s'y aller mécaniquement, une bande sur deux à l'automne, et elle va repousser au printemps d'après, en un mois. Donc en un mois, le bambou aura retrouvé sa taille finale, donc c'est entre 5 et 10 mètres pour les variétés qui nous intéressent. Nous, ce qu'on propose, c'est d'aller vraiment développer... de la recherche et développement pour adresser des niches industrielles qui ne parlent pas au grand public, mais qui en fait seront les meilleures valorisations pour cette biomasse. donner un exemple de ce que ça veut dire remplacer un matériau fossile par de la biomasse pour des carbonelles industrie. On peut prendre l'exemple de Michelin qui s'est engagé à avoir une production 100% biosourcée ou recyclée d'ici 2050. Et on peut se demander du coup à quoi ressemble un pneu biosourcé, ça défie pas mal l'intuition. Et donc l'exemple qu'on peut donner c'est dans les gommes de pneus il y a du noir de carbone qui sert à... durcir la gomme pour justement qu'elle résiste mieux à l'abrasion. Et donc, ce noir de carbone, aujourd'hui, il est d'origine fossile, c'est assez évident. Mais on peut en fait le biosourcer avec du bambou ou des déchets issus de l'industrie du bois. On va pyroliser ces déchets, donc en fait les chauffer sous atmosphères contrôlées sans oxygène à 500-600 degrés et obtenir du coup du biochar, donc du charbon végétal. Et ensuite, on peut, de ce charbon végétal... obtenir du noir de carbone. Et donc, on avait fait le calcul, je crois qu'il faudrait 200 000 hectares de bambou en France pour fournir Michelin et qu'il puisse atteindre son objectif de biosourcer sa production d'ici 2050. L'Oréal s'inscrit pas mal dans cette démarche-là aussi, ils veulent avoir biosourcé à 95% d'ici 2030, donc là c'est vraiment demain. Et donc, il y a des enjeux de les fournir en fibres, en silice organique, organique...

  • Speaker #2

    Est-ce que dans le bambou, pareil, on peut faire plusieurs produits ? Ou est-ce que ça porte tout au même endroit ?

  • Speaker #4

    C'est tout le défi, c'est de, à partir de ce bambou, d'aller chercher vraiment la cellulose, l'hémicellulose et la lignine pour ensuite vraiment en extraire la quintessence et valoriser au plus cher. Et justement, remplacer tous ces produits d'origine fossile par cette biomasse qu'on aurait raffinée. Aujourd'hui, il y a des gens qui savent faire ça en France. Il faut le passer à l'échelle. Entre-temps... On va lancer des pilotes. Cette biomasse, elle n'a pas beaucoup de valeur à la tonne au mètre cube, donc elle est peu transportable. Et donc c'est aussi pour ça qu'on est à peu près sûr que l'avenir serait industrialisé pour les besoins locaux, plutôt que faire venir tous les ans un milliard de produits transformés en bambou.

  • Speaker #1

    Et comment se disent-ils que ce soit les Hollandais qui ont pris le marché du bambou en Europe ? Qu'est-ce qui se passe ?

  • Speaker #3

    Ils ont été à la présidence de l'Inbar. C'est quoi l'Inbar ? L'Inbar, c'est International Network for Bamboo and Rattan. C'est une organisation intergouvernementale qui doit avoir aujourd'hui 47 pays. C'est basé à Pékin, c'est financé en grande partie par la Chine. Ils siègent régulièrement à l'ONU. C'est des lobbyistes du bambou, en fait. Mais en même temps, ils ont des plans de financement pour les pays en voie de développement, notamment en Afrique, en Amérique du Sud et en Asie du Sud-Est, pour développer le bambou. C'est ce qui aide à supporter les nouvelles routes de la soie de Xi Jinping en fait. Mais c'est un avantage justement où ça améliore grandement la vie des gens autour du bambou. Cette organisation intergouvernementale a longtemps été présidée par des Hollandais. Et donc chaque fois qu'il y avait une nouvelle ressource qui naissait en Chine, et bien ils se la seront appropriées pour les Pays-Bas. Donc c'est comme ça qu'on a une boîte qui est depuis 25 ans en Europe, qui distribue tous les produits en bambou, le parquet en bambou, les planches en bambou, qui ont habillé l'aéroport de Madrid, parce qu'ils sont arrivés comme ça en fait. Dès qu'il y avait une piste à exploiter, elle est arrivée directement au pays.

  • Speaker #1

    Ça portait un milliard de produits de bambou ?

  • Speaker #3

    Ah oui, c'était jusqu'à très peu de temps, c'était tout via les Pays-Bas. Donc les produits arrivés aux Pays-Bas étaient revendus en France, et la France est un des plus gros acheteurs de bambou. Les filières bambou, il y a eu déjà des industriels qui ont pensé dans le sud-ouest, on a rencontré des gens, ingénieurs forestiers, qui avaient déjà fait du papier avec du bambou il y a 40 ans. Et ce qui manquait à l'époque, c'était le financement de départ, ce que le Crédit Carbone risque de permettre cette fois. Mais il y a déjà des gens qui ont pensé, il y a des gens qui avaient pensé la fameuse légende des bambous landais, les graines de bambou introduites par François Mitterrand. qui ont été jetés comme ça directement plein champ et qui n'ont pas fonctionné, mais il y a déjà des gens qui avaient pensé. Après une nouvelle tempête dans les Landes et des hectares et des hectares de pins accouchés, les sylviculteurs se sont dit, il y en a marre, il faut qu'on trouve autre chose. Et ils se sont dit, ils avaient l'image du bambou qui pousse les pieds dans l'eau, parce que l'idée du pin, c'est de pomper l'eau en fait, pour que ça ne redevienne pas un marécage. Et puis il est souple, si le vent souffle très fort, il ne cassera pas, comme le roseau de la fable de la fontaine. Et donc ils ont cherché à planter du bambou. Et ils ont obtenu, comme François Mitterrand avait une maison à Souston, Les gens disent que c'est dans la valise diplomatique qu'ils ont obtenu des graines de bambou. Et ils les ont mis directement dans les semoirs à maïs. Ils ne savaient pas comment ça fonctionnait. En fait, les graines de bambou, c'est très difficile à faire germer. Et ça doit être transplanté, en fait. Et là, non, ils ont mis en plein champ. Ils ont arrosé, ils ont tout noyé. Il y a eu 2% de succès, à peu près. On a des très belles bambouseries qui sont encore à Génie-les-Bains, à Morsence. Et puis des graines qui se sont envolées, qui sont allées se poser vraiment dans les endroits où ça leur convient. Il y a des bambous comme ça.

  • Speaker #1

    Voilà. Il y a un sujet très important, c'est ce qu'on appelle ce que les technocrates, tous les ministères créés par Dieu sur le carbone répètent en chœur, c'est l'additionnalité. C'est-à-dire que tu remplaces du maïs par du bambou, il y a une super additionnalité que tu peux te faire rémunérer. Si c'est du blé... par un amendier, il y a une additionnalité qu'on peut mesurer. Alors il y a des méthodes de mesure et de calcul, donc il faut quand même entrer dans le tuyau de ce truc-là pour obtenir les certifications. Donc ça veut dire que, d'abord, tu ne peux pas remplacer de la forêt par du bambou, parce que ce n'est pas de la sylviculture au regard de la liste des plantes autorisées par le ministère de l'Agriculture. Déjà, tu ne peux pas planter sur ce qui est classé forêt, sylviculture, bois, c'est comme une plante. Donc là, s'il y a eu du maïs, de la prairie, des cultures, ça, ça marche. Donc là, tu as de la bonne additionnalité. Alors, si tu remplaces du bois par du bambou... on va discutailler pendant longtemps au ministère. Donc, cette question, elle est très importante dans la stratégie de plantation pour vous. Quelle parcelle ou qu'est-ce qu'on convertit en bambou ou qu'est-ce qu'on ne convertit pas, qu'on garde pour autre chose, dans votre dispositif de culture et de sylviculture chez vous.

  • Speaker #2

    Nous on est producteurs de sapins de Noël et en parallèle on façonne du bois de chauffage en bûchette. Et là j'ai un collègue qui fait la même chose que moi sur le Morvan, un peu plus dans le sud. Aujourd'hui, vu le prix de l'électricité, on a une grosse série qui cherche à développer, on va dire, une usine biomasse pour fabriquer de l'électricité. Et là, il cherche, donc nous, lui, il a déjà négocié un marché de 5000 tonnes pour l'année, mais bon, il ne s'est pas trop engagé. Et nous, tous nos déchets qui sortent de notre combiné, on va les stocker. Et on va passer ça en biomasse.

  • Speaker #4

    Justement, c'est tout le défi de lancer une filière, c'est qu'il faut des gens à l'amont qui plantent, mais il faut que ces gens qui prennent le risque de planter puissent valoriser derrière. Et donc c'est toute la valeur ajoutée d'Horizome, c'est que sur les trois fondateurs, on est deux ingénieurs en matériaux. matériaux, bâtiments. Et donc on noue des partenariats avec les industriels pour justement valoriser au mieux la production. Et d'ailleurs dans notre business model, on s'aligne avec le producteur puisqu'on prend une commission sur tout ce qui va sortir de la bambouzette et donc on est aligné pour vendre au plus cher.

  • Speaker #0

    Horizon a déjà planté 15 hectares de bambous dans les Landes et le Gers déploie son expertise agronomique chez des agriculteurs pionniers partout en France. L'Europe commence à prendre le tournant du marché carbone pour le rendre accessible aux planteurs de bambousées. De plus en plus d'industries vont être tenues d'acheter des droits à polluer, entraînant une hausse du prix du carbone, faisant baisser d'autant l'investissement initial à la charge des agriculteurs. Ces conditions se mettent maintenant en œuvre pour faire émerger cette nouvelle agriculture qui permettra aux matières organiques de devenir cette matière première pour les industries qui remplacera peu à peu les produits du pétrole. Alors, il faut se retrousser les manches et les solutions sont bien là. Personne ne pourra tenir l'engagement de la neutralité carbone en 2050 sans planter massivement du bambou, une plante magique.

Description

Le pépiniériste Stéphane Alzaix invite à Luzillat, dans le Puy-de-Dôme, Mathieu Poizat et Christophe Downey, fondateurs d’Horizom, une entreprise agricole qui plante du bambou en France, à présenter ses centaines de variétés de bambous à un couple d’agriculteurs du Morvan. Ils discutent de l’extraordinaire opportunité écologique et économique que représente le bambou pour l’industrie et l’agriculture française.


Co-réalisé par Renaud Duguet et Maxime Verner. 

Voix off : Elia.

Générique : Guillaume Bérat.


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Bonjour les vrais souverains, je suis Arnaud Montebourg et j'approuve ce podcast. J'ai créé il y a quelques années les équipes du Made in France qui contribuent à construire, reconstruire la nouvelle agriculture et la nouvelle industrie de notre pays. On le fait modestement, mais on le fait concrètement. Et je vous emmène à la rencontre des vrais souverains, celles et ceux qui se battent au quotidien pour que la France redevienne ce grand pays inspirant que nous aimons tant et où nous voulons vivre longtemps.

  • Speaker #1

    Dans les stratégies nationales de diminution de carbone, la France doit multiplier par 2 sa biomasse d'ici 2050. La biomasse, c'est la fabrication de la nouvelle forêt, et on ne peut pas le faire avec les seules forêts existantes. Nous avons besoin d'une plante extraordinaire qui nous permette de stocker dix fois plus de carbone que les autres et de produire de la biomasse deux fois plus rapidement. Cette plante magique existe partout dans le monde. Elle s'appelle le bambou. C'est une plante qui n'est pas invasive, contrairement aux préjugés, et qui pousse à une vitesse accélérée, éblouissant tous les agronomes.

  • Speaker #0

    Le bambou est un outil indispensable pour construire la souveraineté d'une biomasse française.

  • Speaker #1

    Alors aujourd'hui, on va à l'usine dans le Puy-de-Dôme, chez Stéphane Alzay, qui est pépiniériste du bambou. Il y a 15 ans, il était pompier professionnel et s'est reconverti dans une plante qui est sa passion. Il en a 450 variétés. C'est le meilleur pépiniériste aujourd'hui en France de bambou. dont ils maîtrisent les origines, la culture, l'élevage, la croissance. Bref, une encyclopédie. Et nous y allons avec les dirigeants d'Horizome, qui ont créé une société dans laquelle je suis moi-même impliqué et associé, qui installe la filière bambou en France pour tous les usages. que cette plante extraordinaire est capable d'apporter. C'est une plante qui stocke du carbone de façon imbattable, comme aucune autre plante. Parce qu'elle repousse quand on la coupe, donc inutile de la replanter. Quand vous plantez un arbre, il stocke du carbone, puis 80 ans après, vous l'abattez, vous le remplacez. Mais là, tous les ans, vous coupez un rang, deux rangs de bambou, et il repousse naturellement. Donc c'est une plante à croissance exponentielle. et c'est une plante qui est l'avenir de l'industrie et de l'agriculture. Et c'est la raison pour laquelle nous avons décidé de nous y investir. Alors là, il y a deux de mes amis agriculteurs dans le Morvan, ma région natale, entre la Nièvre, la Côte d'Or et la Saône-et-Loire, qui sont là et qui vont se poser toutes les questions pour savoir si oui ou non ils vont planter du bambou chez eux. Je vais te présenter tous nos amis. Alors ça, c'est les pires dirigeants d'Horizon. Et Stéphane Alzé et le Pépiniéris qui nous invitent dans cet endroit incroyable.

  • Speaker #2

    D'accord.

  • Speaker #1

    Voilà. Ça va, bonne route ?

  • Speaker #2

    Oui.

  • Speaker #1

    Bonne heure. Nous on a fait trois heures de train et donc on se pose la question de savoir si on plante du bambou dans le Morvan donc toutes les questions agronomiques économiques, techniques tout ! On va passer en revue tout ça et puis sous le feu sceptique de l'esprit naturel, de l'agriculteur que nous sommes tous ici Parce qu'on se pose la question, c'est une plante à laquelle nous sommes aventureux. Et pourtant, c'est une plante extraordinaire. Donc on va commencer le voyage avec toi, Stéphane. Tu nous guides, on te suit.

  • Speaker #3

    C'est une plante qui n'est pas partout dans le monde. C'est un peu dommage de ne pas l'utiliser, on ne l'utilise pas partout ailleurs. On la connaît juste comme une plante d'ornement. Alors que partout ailleurs on en fait beaucoup d'autres choses. Ici c'est à peu près des conditions défavorables, qu'on puisse avoir, enfin on peut pousser du bambou. Le terrain est très très lourd, c'est vraiment de l'argile, on peut faire de la poterie en fait, il y a des briquetteries traditionnellement, donc c'est de la terre, vraiment de la terre glaise. On a des sécheresses terribles, ça n'a jamais été arrosé, donc le jardin c'est vraiment une condition très défavorable. Et ça pousse quand même.

  • Speaker #1

    Suivons le guide.

  • Speaker #3

    Donc là c'est la partie pépinière, il y a des bambous de collection, des choses rares qui sont venus de Chine, donc très très peu d'exemplaires. Il y a une grande partie, c'est un gros stock de bambous non envahissants, c'est ce qu'on fait le plus. Et ici quelques plants de bambous qu'on plante en agriculture en fait.

  • Speaker #1

    Alors ça c'est le moyen Fabien ? C'est celui-là que tu envisages de planter en France ? C'est celui que tu plantes dans les Landes ?

  • Speaker #3

    Oui, celui-ci en fait partie à peu près. On en a pour l'instant une douzaine de bambous moyens qu'on est en train de développer, mais on va augmenter la liste. Ceux-là en font partie, c'est la famille Philostachys, c'est un Philostachys primotina, là-bas on a mélangé avec un Philostachys incarnata, mais il faut faire un mix de toute façon, il ne faut pas planter une seule espèce de bambou, parce que si elle fleurit, il n'y a plus rien.

  • Speaker #1

    Tu as un mix de combien d'espèces dans le cheptel, dans ton panel de variétés idéal ?

  • Speaker #3

    Sur chaque plantation, il faut qu'il y ait 7 ou 8 espèces. Mais du coup, nous, ça nous oblige à avoir un panel de peut-être une trentaine de bambous moyens, parce que les bambous moyens sont beaucoup plus adaptables, et à peu près 60 bambous géants. Ça c'est du moyen ? Ça c'est du moyen.

  • Speaker #1

    Mais tu as des géants ici ? Je ne vois pas la comparaison. C'est ceux-là les géants là ? C'est pas vite voir non. C'est beau !

  • Speaker #3

    C'est du géant qui a mal poussé ici, parce que ça n'a jamais été arrosé et mon sol n'est pas terrible. C'est pas un géant ?

  • Speaker #1

    Oui. Ah ouais, ça va plus haut là !

  • Speaker #3

    Ça va plus haut et il y en a quelques-uns qui commencent à être plus gros là.

  • Speaker #1

    et là ils ont 10 ans ?

  • Speaker #3

    oui c'était la deuxième année ça pousse en combien de temps ? en deux mois

  • Speaker #1

    Quand vous récoltez ça,

  • Speaker #3

    ça fait quoi ?

  • Speaker #1

    La récolte, c'est on coupe, on broie ?

  • Speaker #4

    On coupe, on broie, ça fait des plaquettes forestières, des chips. Des chips, c'est ça. C'est une broyeuse ?

  • Speaker #3

    Oui, c'est comme une grosse moissonneuse. Ça dépend des applications. On peut ramasser soit en balles, soit le broyeur qui est récupéré.

  • Speaker #1

    Des rangs denses comme ça, là ?

  • Speaker #3

    Faits comme ça,

  • Speaker #1

    large de je ne sais quoi, d'un mètre de même ?

  • Speaker #3

    La largeur de l'outil, de l'engin, en fait.

  • Speaker #1

    Et c'est un rang sur deux par an.

  • Speaker #3

    Voilà, c'est ça. Il faut couper ça en février, et du coup, au printemps, ça repousse.

  • Speaker #2

    C'est un peu comme le miscanthus.

  • Speaker #3

    Exactement. C'est exactement ça, sauf que les mensurations ne sont pas les mêmes, et les débouchés sont beaucoup plus nombreux.

  • Speaker #5

    Le bambou est beaucoup plus ligneux. Il y a plein d'applications intéressantes avec le Miscanthus. Et on voit d'ailleurs que c'est une culture qui se développe, une culture de biomasse qui se développe. Mais le bambou a vraiment cet avantage de ressembler dans sa composition chimique beaucoup plus au bois, parce que c'est vraiment une ressource de biomasse ligneux cellulosique.

  • Speaker #4

    Et il n'y a pas de séquestration carbone importante pour le Miscanthus.

  • Speaker #3

    D'accord. Ça c'est un plant qui a 3 ans et un pot de 5 litres, donc c'est ça qu'on plante 400 à l'hectare. On coupe à 1,50 mètre pour le transport, pour la reprise, et voilà. C'est ce qu'on met, pour faire un hectare, on met 400 pots comme ça. La difficulté qui fait que c'est long à produire, ce qui compte c'est ce qui est dessous en fait, c'est que le rhizome soit... suffisamment développé pour bien s'installer, s'installer rapidement. Et c'est à cet âge-là qu'il commence vraiment à s'étendre dès qu'il est planté.

  • Speaker #1

    Et alors tu ne peux pas les garder au-delà de 3 ans ?

  • Speaker #3

    Moi, j'avais l'habitude de les garder au-delà et je les vendais en pots plus gros. Je vendais des pots de 15 litres, puis des pots de 30 litres. Mais c'est trop lourd. Quand on en plante un ou deux chez un collectionneur ça va, ou chez un particulier, mais pour planter 400 à l'hectare, il vaut mieux transporter 400 pots de 5 litres que 400 pots de 30 litres parce que c'est une logistique différente après.

  • Speaker #4

    Là on voit qu'il y a un nid là.

  • Speaker #3

    Ah ouais, ça c'est formidable parce que les chats ne peuvent pas attraper les nids d'oiseaux dans les bambous.

  • Speaker #1

    Ah non, trop dur !

  • Speaker #3

    Il y a plusieurs sociétés en Europe qui font du bambou. Il y en a une qui est assez sérieuse et qui fait les choses plutôt bien, qui diversifie les espèces. Et il y en a une contre laquelle j'essaie d'attirer l'attention, qui ne plante qu'une seule espèce, parce qu'ils ont la facilité d'obtenir des graines de cette espèce chaque année. Et il se trouve que ce bambou c'est le plus difficile à faire pousser. Vous ne l'avez pas vu dans mon jardin, parce que déjà il ne supporte pas l'argile, il ne supporte pas le calcaire, il ne supporte pas l'excès d'eau en hiver. Donc c'est le bambou le plus capricieux à faire pousser. Quand il pousse, il devient énorme, mais souvent il ne pousse pas. Et c'est un bambou qui est vraiment compliqué. Donc c'est un peu dommage de mettre déjà qu'une seule espèce de bambou, et surtout celui-ci qui est vraiment compliqué à faire pousser. À savoir, quand on ne plante qu'une seule espèce de bambou, si ça fleurit, on n'a plus rien. Pour l'Inde, une floraison c'était synonyme de famine terrible. C'est énorme, le développement du bambou en Inde. Il y a un ministre du bambou en Inde. C'est un... Et c'est Lin Bar qui nous a appris justement à mettre en place des pépinières dès les premiers signes de floraison. Et ce ministre du bambou indien, il m'avait dit en juin 2018 qu'il avait découvert aujourd'hui, c'était à Pékin, que le bambou pouvait remplacer tous les plastiques jetables. Il m'a dit, c'est fini, dans tous les états d'Inde du Nord-Est, il n'y aura plus de plastique jetable. Six mois plus tard, il n'y a plus de plastique jetable. Tout remplacé par du bambou.

  • Speaker #0

    Christophe Donnet, Dimitri Guyot et Mathieu Poisa ont créé en 2021 Horizon.

  • Speaker #5

    L'objectif d'Horizon, c'est vraiment de développer et structurer une filière. Et pour que cette filière, elle prenne de l'ampleur et elle arrive à se développer, il faut vraiment que tous les acteurs arrivent à trouver un modèle économique viable et viable sur le long terme. Et donc, dans ces acteurs, dans cette filière, il y a l'amont. Donc, il y a vraiment le côté pépinière, le côté on aide, on accompagne les porteurs de projets pour démarrer. une plantation pour démarrer une bambouzette. Et ensuite, on voit le rôle d'horizone comme un rôle d'accompagnateur, non seulement au début, mais ensuite sur le long terme, sur la valorisation. Et effectivement, on a un mécanisme de commission où on souhaite aligner nos intérêts avec celui des porteurs de projets. Donc, on se rémunère sur la base d'une commission sur les crédits carbone et sur la base d'une commission sur la valorisation. de la biomasse produite, ce qui permet d'aligner les intérêts et ça permet pour nous d'aller chercher la meilleure valeur pour le porteur de projet. Et comme ça, on s'assure que l'équilibre économique soit bien respecté. Et derrière, l'idée, c'est aussi de trouver un équilibre économique pour les industriels et les transformateurs qui vont ensuite transformer la biomasse et aller décarboner différents secteurs, différentes industries.

  • Speaker #0

    Stéphane Alzay nous raconte comment il est tombé amoureux du magique bambou.

  • Speaker #3

    J'étais pompier professionnel. Et je vous ferai voir, il y a une rue du bambou à Lusia, j'y suis pour rien. Et donc ma grand-mère m'appelait, elle vendait, elle m'appelait quand j'étais ado, je venais avec ma mobilette, je faisais 7 km. Viens vite, ils ont poussé dans la nuit, ils vont me cacher le soleil. Et je cassais du bambou. Ma grand-mère est décédée en 1998, la maison est restée un peu à l'abandon. Du coup les bambous, ils en ont profité, ils avaient 30 ans. Et sur 400 m² en 2007, il y a 400 m² de bambouserie qui est sortie d'un seul coup, en deux mois. et à plus de 14 mètres de haut. Donc c'était assez spectaculaire. Quand j'ai vu ça, j'ai dit, c'est quoi cette plante en fait ? Et j'ai commencé d'acheter un livre, j'ai étudié petit à petit. Maintenant j'ai des encyclopédies chinoises, parce qu'il n'y a plus assez de documentation, ni en français ni en anglais. Donc voilà, c'est devenu une vraie passion comme ça.

  • Speaker #1

    Vrai, faux, quoi, comment ? Le bambou existe en France depuis 1860. Est-ce qu'on a entendu parler des envahisseurs ? Non. Alors explique-nous où on en est, quelle est la réalité de ça, quelles espèces, quoi, comment ? Parce qu'il y a quand même une mythologie qui tourne, des préjugés, des idées reçues, et puis un peu d'ignorance surtout sur le sujet. Qu'est-ce que vous avez à répondre là, tous les trois ?

  • Speaker #3

    C'est très facile. C'est une plante très expansive. Le bambou, il est fait pour faire une forêt. Mais au départ, ça va devenir une culture en fait, donc ce n'est pas un espace naturel qui pourrait coloniser. Donc si on définit de le planter sur une parcelle, il faut qu'il reste sur cette parcelle. Et la technique est très simple, il suffit de faire un chemin tout autour de la parcelle qui délimite la parcelle. Et une fois par an dans un sol normal et deux fois par an sur un sol sablonneux, il faut passer une sous-souleuse en fait, de 40 cm qui sectionne le rhizome parce que les rhizomes sont à 30 cm. Et donc le fait de contrôler ce chemin, si on ne pète pas souvent, on passe un coup de broyeur et un coup de sous-soleuse, et le bambou il restera sur sa parcelle en fait.

  • Speaker #1

    C'est une plante qui ne se disperse pas parce qu'elle n'a pas de gramination ?

  • Speaker #3

    Non, ça ne fleurit pas. La fleuraison a lieu à peu près tous les 100 ans, donc il n'y a pas de dispersion de graines. Ça ne peut pas envahir... comme région. C'est largement moins invasif que du colza.

  • Speaker #4

    On a cette vision d'une plante exotique qui aurait besoin de beaucoup d'eau, plante même aquatique. Et en fait, les variétés que tu as ramenées de Chine, elles viennent de la Chine continentale avec des climats qui ressemblent beaucoup aux nôtres. Et donc, les besoins en eau, c'est globalement 100 mm par mois au printemps.

  • Speaker #1

    S'il n'y a pas de précipitation, comme on le connaît, par exemple, au Louis.

  • Speaker #4

    C'est bien le problème, oui. On serait content d'être en botte dans ton jardin aujourd'hui, Stéphane.

  • Speaker #3

    Je serais content que vous soyez en botte,

  • Speaker #4

    ce serait dommage. C'est vrai que c'est un des problèmes et on se dit que face à tous ces aléas climatiques, c'est peut-être mieux de prévoir de l'irrigation en appoint.

  • Speaker #2

    Aujourd'hui quand même, on en parle tous les jours à la télévision, le manque d'eau potable va devenir, on va dire, un vrai sujet dans les... Et même chez nous qui sommes le réservoir en eau potable de la France.

  • Speaker #3

    J'ai regardé en Morvan, j'ai regardé la pluviométrie, j'ai trouvé très intéressant. Moi ici, jusqu'à il y a 4-5 ans, je disais vous plantez vos bambous pour des bambous d'ornement, mais il faut bien qu'ils poussent aussi. Vous n'arrosez pas forcément, vous verrez les pluies du mois de septembre rattraperont. Et puis ça va, moins ça rattrape en fait. On se rend compte que depuis 2017, il y a vraiment des années très difficiles et puis elles s'accumulent. C'est souvent ça, les poulies, les sapinières. Le bambou n'a pas forcément besoin d'être arrosé. Peut-être que le système d'irrigation, il y a de grandes chances qu'il ne fonctionne qu'une année sur 6 ou 7. Mais c'est vraiment pour sécuriser la sortie des pousses au printemps.

  • Speaker #4

    S'il n'y a rien, on préconise un goutte-à-goutte. parce que c'est le plus efficient. Après, s'il y a des parcelles de maïs qui étaient irriguées et qu'il y a déjà un système d'irrigation, on peut réfléchir justement à réutiliser ce système. En fait, c'est surtout de l'appoint.

  • Speaker #1

    Dans le Morvan, il n'y a pas un préfet qui sait ce que c'est qu'un arrêté pour l'irrigation. Ils n'ont jamais vu ça, donc il n'y a pas d'historique. Donc nous, on va se pointer. On va dire, ah, monsieur le préfet, on vous demande un petit peu de dérégulation. Et là, ça va être la révolution. Ils vont nous dire, mais dans le moment, maintenant, on fait une dérégulation. Donc, on a un petit sujet sur la manière dont on traite ce problème en réglementaire, sachant qu'il n'y a pas de forage. Il y a des prélèvements dans les rivières, certainement.

  • Speaker #2

    Il n'y a pas de forage, il n'y a pas de système d'irrigation pour le maïs, il n'y a strictement rien. Parce que nous, le Moran, c'est...

  • Speaker #1

    C'est très humide.

  • Speaker #2

    C'est déjà assez humide, et il n'y a pas des parcellaires, comme dans la Beauce, comme dans toutes ces régions où l'agriculture, on va dire, céréalière est en place, où vous avez des arroseurs qui font 2 km de long et qui tournent en rond. Nous, on n'a pas ça, les parcellaires, c'est... Les plus gros c'est 20 hectares, 10 hectares, 5 hectares, mais il y a beaucoup plus de parcelles qui font 1,5 hectare, 1 hectare. Et il y a tout le temps des petits boctaux, des haies qui séparent toutes ces parcelles-là. Donc c'est quand même hyper compliqué d'irriguer.

  • Speaker #3

    Mais après, je viens sur l'effet du bambou sur le climat. Quand on a des parcelles de bambou adultes, c'est plus humide. On a l'arrosé quand il y a une grosse canicule énorme. On a l'arrosé trois, quatre jours de plus qu'en dehors de la bambouserie. Et le bambou influe largement, au point de vue local, sur l'humidité, sur la chaleur. Il fait 7 degrés d'écart en plein cagnard quand il y a une canicule, entre chez mes parents à Maringues et ici.

  • Speaker #2

    La culture de bambou est, on va dire, consommatrice de produits phytosanitaires.

  • Speaker #4

    Non, justement, c'est ça qui est...

  • Speaker #2

    C'est un sujet assez chaud et bouillant dans notre région du Morvan.

  • Speaker #3

    Il n'y a aucune maladie, aucun parasite. Le seul vrai ennemi du bambou, c'est le panda. Il n'y a aucun parasite qui nuit à la culture du bambou.

  • Speaker #4

    C'est vrai qu'au début, nous, on avait vraiment une vue très ingénieure de comment on peut séquestrer du carbone en s'inspirant de la nature. Et ensuite, on s'est dit, bon, ce bambou, il faut bien que des gens le cultivent. Et c'est là qu'on a compris qu'il y avait un vrai enjeu d'inégalité, de revenus, de se rendre compte que le producteur, il est à l'amont de la chaîne de valeur. d'une manière très paradoxale, celui qui est le moins rémunéré. Et c'est comme ça qu'on est tombé sur le chemin d'Arnaud et de François et de la Compagnie des Amandes, qui a un peu révolutionné ce système de partage de la valeur.

  • Speaker #1

    Nous, on n'achète pas la terre à la Compagnie des Amandes. Donc la terre appartient aux paysans. C'est une loi de la Révolution française, puisque le paysan a obtenu la terre contre le clergé et la noblesse. Donc nous, on n'est ni des Américains ni des Chinois. Et on est pour que la propriété appartienne aux paysans. En revanche, on s'associe avec l'agriculteur, le paysan, le sylviculteur dans notre cas. C'est un peu cette idée-là. On s'associe pour exploiter ensemble. Où on apporte la technique, le paysan apporte sa terre, l'écosystème. On apporte la R&D, c'est-à-dire qu'est-ce qu'on fait pour améliorer la plante. Et on apporte le débouché pour dérisquer. Et le financement. Parce que quand on s'associe, ça veut dire qu'on est aligné avec le paysan et qu'on va gagner de l'argent ensemble en valorisant le plus possible sur l'aval. Donc c'est ça la garantie. Alors la contrepartie, c'est que le paysan accepte de ne pas travailler seul, ce qui est plutôt un avantage parce que le cerveau collectif est toujours meilleur que le cerveau individuel. Et il ouvre le capital en minoritaire à des partenaires. Et on partage ensuite 51-49. On a choisi cette clé de répartition. Franchement, on a eu... 3 500 hectares de déclarations de candidatures, on n'a pas pu les retenir tous parce qu'il y avait des problèmes pédologiques, climatiques, il y avait les EGEL, le ceci, le cela, mais franchement, ça montre qu'il y a un appétit sur ce type de partenariat, d'association, on est des associés. Et dans le modèle économique d'Horizome et de notre petite entreprise formidable sur la plantation de bambous en France, une partie des investissements sont financés par les crédits carbone. Ce qui permet d'abord d'attendre la récolte. en ayant un financement de l'investissement par l'agriculteur, qui n'est pas obligé de supporter toute la dette, un travail qui est quand même un peu rémunéré, même s'il ne l'est pas à 100%, et comme le crédit carbone aujourd'hui commence à monter, monter, monter, alors là, les cours, on vient de tutoyer les 100 euros, alors qu'aujourd'hui, le marché était plutôt à 50, on sait que les revenus attachés à la séquestration du carbone ne peuvent qu'augmenter, puisque tout le monde en veut, et qu'il n'y en a pas assez. Voilà.

  • Speaker #4

    On fait plus que séquestrer du carbone, il y a vraiment un enjeu sur le territoire, l'agriculteur, le fait de financer des exploitations qui aujourd'hui tendent à disparaître. Ce qui rassure, c'est que ce bambou, on le récolte chaque année, donc on ne va pas pouvoir déforester ou exploiter plus vite que la vitesse de repousse, comme c'est le cas pour les forêts aujourd'hui. Et donc ça vient finalement compléter, soulager l'exploitation de la forêt, pour justement alimenter les industries en biomasse. En gros, on veut récupérer des terres qui sont tassées, mortes, où il y a eu beaucoup de conventionnels. Et puis, redonner de la vie microbienne, bactérienne, les verres de terre, remettre en place des symbioses mycorhiziennes. Combler les carences en oligo-éléments, réhausser le taux de matière organique, ce qui fait qu'on aura du coup une bambouzette dont la chute des feuilles permet d'apporter la ration du sol chaque année et on va pouvoir prélever de la biomasse du système. sans casser le cycle d'auto-fertilité, parce que justement on a ces feuilles qui apportent la ration du sol. Et donc là on sort complètement du prisme de l'agriculture conventionnelle, en ayant le moins d'influence sur les écosystèmes possibles. Alors on reste quand même un peu dans le productivisme, et le but c'est d'alimenter le moins mal possible les industries. Donc on n'est pas en train de dire qu'on va recréer des forêts primaires et que ce sera aussi bien, mais en tout cas on veut minimiser l'impact qu'on a sur les écosystèmes. La forêt va se densifier progressivement, comme on l'a vu, d'un à deux mètres par an. Au bout de cinq ans, la canopée se referme. Il y a un couvert végétal naturel qui se forme de par des feuilles. Donc en fait, on a une rétention de l'eau, de l'humidité qui est intéressante, ce qui explique pourquoi il n'y a pas tant besoin d'irrigation et d'eau que ça. Et au bout de la quatrième, cinquième année, on va faire la première récolte en bande. Donc en fait, on va s'y aller mécaniquement, une bande sur deux à l'automne, et elle va repousser au printemps d'après, en un mois. Donc en un mois, le bambou aura retrouvé sa taille finale, donc c'est entre 5 et 10 mètres pour les variétés qui nous intéressent. Nous, ce qu'on propose, c'est d'aller vraiment développer... de la recherche et développement pour adresser des niches industrielles qui ne parlent pas au grand public, mais qui en fait seront les meilleures valorisations pour cette biomasse. donner un exemple de ce que ça veut dire remplacer un matériau fossile par de la biomasse pour des carbonelles industrie. On peut prendre l'exemple de Michelin qui s'est engagé à avoir une production 100% biosourcée ou recyclée d'ici 2050. Et on peut se demander du coup à quoi ressemble un pneu biosourcé, ça défie pas mal l'intuition. Et donc l'exemple qu'on peut donner c'est dans les gommes de pneus il y a du noir de carbone qui sert à... durcir la gomme pour justement qu'elle résiste mieux à l'abrasion. Et donc, ce noir de carbone, aujourd'hui, il est d'origine fossile, c'est assez évident. Mais on peut en fait le biosourcer avec du bambou ou des déchets issus de l'industrie du bois. On va pyroliser ces déchets, donc en fait les chauffer sous atmosphères contrôlées sans oxygène à 500-600 degrés et obtenir du coup du biochar, donc du charbon végétal. Et ensuite, on peut, de ce charbon végétal... obtenir du noir de carbone. Et donc, on avait fait le calcul, je crois qu'il faudrait 200 000 hectares de bambou en France pour fournir Michelin et qu'il puisse atteindre son objectif de biosourcer sa production d'ici 2050. L'Oréal s'inscrit pas mal dans cette démarche-là aussi, ils veulent avoir biosourcé à 95% d'ici 2030, donc là c'est vraiment demain. Et donc, il y a des enjeux de les fournir en fibres, en silice organique, organique...

  • Speaker #2

    Est-ce que dans le bambou, pareil, on peut faire plusieurs produits ? Ou est-ce que ça porte tout au même endroit ?

  • Speaker #4

    C'est tout le défi, c'est de, à partir de ce bambou, d'aller chercher vraiment la cellulose, l'hémicellulose et la lignine pour ensuite vraiment en extraire la quintessence et valoriser au plus cher. Et justement, remplacer tous ces produits d'origine fossile par cette biomasse qu'on aurait raffinée. Aujourd'hui, il y a des gens qui savent faire ça en France. Il faut le passer à l'échelle. Entre-temps... On va lancer des pilotes. Cette biomasse, elle n'a pas beaucoup de valeur à la tonne au mètre cube, donc elle est peu transportable. Et donc c'est aussi pour ça qu'on est à peu près sûr que l'avenir serait industrialisé pour les besoins locaux, plutôt que faire venir tous les ans un milliard de produits transformés en bambou.

  • Speaker #1

    Et comment se disent-ils que ce soit les Hollandais qui ont pris le marché du bambou en Europe ? Qu'est-ce qui se passe ?

  • Speaker #3

    Ils ont été à la présidence de l'Inbar. C'est quoi l'Inbar ? L'Inbar, c'est International Network for Bamboo and Rattan. C'est une organisation intergouvernementale qui doit avoir aujourd'hui 47 pays. C'est basé à Pékin, c'est financé en grande partie par la Chine. Ils siègent régulièrement à l'ONU. C'est des lobbyistes du bambou, en fait. Mais en même temps, ils ont des plans de financement pour les pays en voie de développement, notamment en Afrique, en Amérique du Sud et en Asie du Sud-Est, pour développer le bambou. C'est ce qui aide à supporter les nouvelles routes de la soie de Xi Jinping en fait. Mais c'est un avantage justement où ça améliore grandement la vie des gens autour du bambou. Cette organisation intergouvernementale a longtemps été présidée par des Hollandais. Et donc chaque fois qu'il y avait une nouvelle ressource qui naissait en Chine, et bien ils se la seront appropriées pour les Pays-Bas. Donc c'est comme ça qu'on a une boîte qui est depuis 25 ans en Europe, qui distribue tous les produits en bambou, le parquet en bambou, les planches en bambou, qui ont habillé l'aéroport de Madrid, parce qu'ils sont arrivés comme ça en fait. Dès qu'il y avait une piste à exploiter, elle est arrivée directement au pays.

  • Speaker #1

    Ça portait un milliard de produits de bambou ?

  • Speaker #3

    Ah oui, c'était jusqu'à très peu de temps, c'était tout via les Pays-Bas. Donc les produits arrivés aux Pays-Bas étaient revendus en France, et la France est un des plus gros acheteurs de bambou. Les filières bambou, il y a eu déjà des industriels qui ont pensé dans le sud-ouest, on a rencontré des gens, ingénieurs forestiers, qui avaient déjà fait du papier avec du bambou il y a 40 ans. Et ce qui manquait à l'époque, c'était le financement de départ, ce que le Crédit Carbone risque de permettre cette fois. Mais il y a déjà des gens qui ont pensé, il y a des gens qui avaient pensé la fameuse légende des bambous landais, les graines de bambou introduites par François Mitterrand. qui ont été jetés comme ça directement plein champ et qui n'ont pas fonctionné, mais il y a déjà des gens qui avaient pensé. Après une nouvelle tempête dans les Landes et des hectares et des hectares de pins accouchés, les sylviculteurs se sont dit, il y en a marre, il faut qu'on trouve autre chose. Et ils se sont dit, ils avaient l'image du bambou qui pousse les pieds dans l'eau, parce que l'idée du pin, c'est de pomper l'eau en fait, pour que ça ne redevienne pas un marécage. Et puis il est souple, si le vent souffle très fort, il ne cassera pas, comme le roseau de la fable de la fontaine. Et donc ils ont cherché à planter du bambou. Et ils ont obtenu, comme François Mitterrand avait une maison à Souston, Les gens disent que c'est dans la valise diplomatique qu'ils ont obtenu des graines de bambou. Et ils les ont mis directement dans les semoirs à maïs. Ils ne savaient pas comment ça fonctionnait. En fait, les graines de bambou, c'est très difficile à faire germer. Et ça doit être transplanté, en fait. Et là, non, ils ont mis en plein champ. Ils ont arrosé, ils ont tout noyé. Il y a eu 2% de succès, à peu près. On a des très belles bambouseries qui sont encore à Génie-les-Bains, à Morsence. Et puis des graines qui se sont envolées, qui sont allées se poser vraiment dans les endroits où ça leur convient. Il y a des bambous comme ça.

  • Speaker #1

    Voilà. Il y a un sujet très important, c'est ce qu'on appelle ce que les technocrates, tous les ministères créés par Dieu sur le carbone répètent en chœur, c'est l'additionnalité. C'est-à-dire que tu remplaces du maïs par du bambou, il y a une super additionnalité que tu peux te faire rémunérer. Si c'est du blé... par un amendier, il y a une additionnalité qu'on peut mesurer. Alors il y a des méthodes de mesure et de calcul, donc il faut quand même entrer dans le tuyau de ce truc-là pour obtenir les certifications. Donc ça veut dire que, d'abord, tu ne peux pas remplacer de la forêt par du bambou, parce que ce n'est pas de la sylviculture au regard de la liste des plantes autorisées par le ministère de l'Agriculture. Déjà, tu ne peux pas planter sur ce qui est classé forêt, sylviculture, bois, c'est comme une plante. Donc là, s'il y a eu du maïs, de la prairie, des cultures, ça, ça marche. Donc là, tu as de la bonne additionnalité. Alors, si tu remplaces du bois par du bambou... on va discutailler pendant longtemps au ministère. Donc, cette question, elle est très importante dans la stratégie de plantation pour vous. Quelle parcelle ou qu'est-ce qu'on convertit en bambou ou qu'est-ce qu'on ne convertit pas, qu'on garde pour autre chose, dans votre dispositif de culture et de sylviculture chez vous.

  • Speaker #2

    Nous on est producteurs de sapins de Noël et en parallèle on façonne du bois de chauffage en bûchette. Et là j'ai un collègue qui fait la même chose que moi sur le Morvan, un peu plus dans le sud. Aujourd'hui, vu le prix de l'électricité, on a une grosse série qui cherche à développer, on va dire, une usine biomasse pour fabriquer de l'électricité. Et là, il cherche, donc nous, lui, il a déjà négocié un marché de 5000 tonnes pour l'année, mais bon, il ne s'est pas trop engagé. Et nous, tous nos déchets qui sortent de notre combiné, on va les stocker. Et on va passer ça en biomasse.

  • Speaker #4

    Justement, c'est tout le défi de lancer une filière, c'est qu'il faut des gens à l'amont qui plantent, mais il faut que ces gens qui prennent le risque de planter puissent valoriser derrière. Et donc c'est toute la valeur ajoutée d'Horizome, c'est que sur les trois fondateurs, on est deux ingénieurs en matériaux. matériaux, bâtiments. Et donc on noue des partenariats avec les industriels pour justement valoriser au mieux la production. Et d'ailleurs dans notre business model, on s'aligne avec le producteur puisqu'on prend une commission sur tout ce qui va sortir de la bambouzette et donc on est aligné pour vendre au plus cher.

  • Speaker #0

    Horizon a déjà planté 15 hectares de bambous dans les Landes et le Gers déploie son expertise agronomique chez des agriculteurs pionniers partout en France. L'Europe commence à prendre le tournant du marché carbone pour le rendre accessible aux planteurs de bambousées. De plus en plus d'industries vont être tenues d'acheter des droits à polluer, entraînant une hausse du prix du carbone, faisant baisser d'autant l'investissement initial à la charge des agriculteurs. Ces conditions se mettent maintenant en œuvre pour faire émerger cette nouvelle agriculture qui permettra aux matières organiques de devenir cette matière première pour les industries qui remplacera peu à peu les produits du pétrole. Alors, il faut se retrousser les manches et les solutions sont bien là. Personne ne pourra tenir l'engagement de la neutralité carbone en 2050 sans planter massivement du bambou, une plante magique.

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Description

Le pépiniériste Stéphane Alzaix invite à Luzillat, dans le Puy-de-Dôme, Mathieu Poizat et Christophe Downey, fondateurs d’Horizom, une entreprise agricole qui plante du bambou en France, à présenter ses centaines de variétés de bambous à un couple d’agriculteurs du Morvan. Ils discutent de l’extraordinaire opportunité écologique et économique que représente le bambou pour l’industrie et l’agriculture française.


Co-réalisé par Renaud Duguet et Maxime Verner. 

Voix off : Elia.

Générique : Guillaume Bérat.


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Bonjour les vrais souverains, je suis Arnaud Montebourg et j'approuve ce podcast. J'ai créé il y a quelques années les équipes du Made in France qui contribuent à construire, reconstruire la nouvelle agriculture et la nouvelle industrie de notre pays. On le fait modestement, mais on le fait concrètement. Et je vous emmène à la rencontre des vrais souverains, celles et ceux qui se battent au quotidien pour que la France redevienne ce grand pays inspirant que nous aimons tant et où nous voulons vivre longtemps.

  • Speaker #1

    Dans les stratégies nationales de diminution de carbone, la France doit multiplier par 2 sa biomasse d'ici 2050. La biomasse, c'est la fabrication de la nouvelle forêt, et on ne peut pas le faire avec les seules forêts existantes. Nous avons besoin d'une plante extraordinaire qui nous permette de stocker dix fois plus de carbone que les autres et de produire de la biomasse deux fois plus rapidement. Cette plante magique existe partout dans le monde. Elle s'appelle le bambou. C'est une plante qui n'est pas invasive, contrairement aux préjugés, et qui pousse à une vitesse accélérée, éblouissant tous les agronomes.

  • Speaker #0

    Le bambou est un outil indispensable pour construire la souveraineté d'une biomasse française.

  • Speaker #1

    Alors aujourd'hui, on va à l'usine dans le Puy-de-Dôme, chez Stéphane Alzay, qui est pépiniériste du bambou. Il y a 15 ans, il était pompier professionnel et s'est reconverti dans une plante qui est sa passion. Il en a 450 variétés. C'est le meilleur pépiniériste aujourd'hui en France de bambou. dont ils maîtrisent les origines, la culture, l'élevage, la croissance. Bref, une encyclopédie. Et nous y allons avec les dirigeants d'Horizome, qui ont créé une société dans laquelle je suis moi-même impliqué et associé, qui installe la filière bambou en France pour tous les usages. que cette plante extraordinaire est capable d'apporter. C'est une plante qui stocke du carbone de façon imbattable, comme aucune autre plante. Parce qu'elle repousse quand on la coupe, donc inutile de la replanter. Quand vous plantez un arbre, il stocke du carbone, puis 80 ans après, vous l'abattez, vous le remplacez. Mais là, tous les ans, vous coupez un rang, deux rangs de bambou, et il repousse naturellement. Donc c'est une plante à croissance exponentielle. et c'est une plante qui est l'avenir de l'industrie et de l'agriculture. Et c'est la raison pour laquelle nous avons décidé de nous y investir. Alors là, il y a deux de mes amis agriculteurs dans le Morvan, ma région natale, entre la Nièvre, la Côte d'Or et la Saône-et-Loire, qui sont là et qui vont se poser toutes les questions pour savoir si oui ou non ils vont planter du bambou chez eux. Je vais te présenter tous nos amis. Alors ça, c'est les pires dirigeants d'Horizon. Et Stéphane Alzé et le Pépiniéris qui nous invitent dans cet endroit incroyable.

  • Speaker #2

    D'accord.

  • Speaker #1

    Voilà. Ça va, bonne route ?

  • Speaker #2

    Oui.

  • Speaker #1

    Bonne heure. Nous on a fait trois heures de train et donc on se pose la question de savoir si on plante du bambou dans le Morvan donc toutes les questions agronomiques économiques, techniques tout ! On va passer en revue tout ça et puis sous le feu sceptique de l'esprit naturel, de l'agriculteur que nous sommes tous ici Parce qu'on se pose la question, c'est une plante à laquelle nous sommes aventureux. Et pourtant, c'est une plante extraordinaire. Donc on va commencer le voyage avec toi, Stéphane. Tu nous guides, on te suit.

  • Speaker #3

    C'est une plante qui n'est pas partout dans le monde. C'est un peu dommage de ne pas l'utiliser, on ne l'utilise pas partout ailleurs. On la connaît juste comme une plante d'ornement. Alors que partout ailleurs on en fait beaucoup d'autres choses. Ici c'est à peu près des conditions défavorables, qu'on puisse avoir, enfin on peut pousser du bambou. Le terrain est très très lourd, c'est vraiment de l'argile, on peut faire de la poterie en fait, il y a des briquetteries traditionnellement, donc c'est de la terre, vraiment de la terre glaise. On a des sécheresses terribles, ça n'a jamais été arrosé, donc le jardin c'est vraiment une condition très défavorable. Et ça pousse quand même.

  • Speaker #1

    Suivons le guide.

  • Speaker #3

    Donc là c'est la partie pépinière, il y a des bambous de collection, des choses rares qui sont venus de Chine, donc très très peu d'exemplaires. Il y a une grande partie, c'est un gros stock de bambous non envahissants, c'est ce qu'on fait le plus. Et ici quelques plants de bambous qu'on plante en agriculture en fait.

  • Speaker #1

    Alors ça c'est le moyen Fabien ? C'est celui-là que tu envisages de planter en France ? C'est celui que tu plantes dans les Landes ?

  • Speaker #3

    Oui, celui-ci en fait partie à peu près. On en a pour l'instant une douzaine de bambous moyens qu'on est en train de développer, mais on va augmenter la liste. Ceux-là en font partie, c'est la famille Philostachys, c'est un Philostachys primotina, là-bas on a mélangé avec un Philostachys incarnata, mais il faut faire un mix de toute façon, il ne faut pas planter une seule espèce de bambou, parce que si elle fleurit, il n'y a plus rien.

  • Speaker #1

    Tu as un mix de combien d'espèces dans le cheptel, dans ton panel de variétés idéal ?

  • Speaker #3

    Sur chaque plantation, il faut qu'il y ait 7 ou 8 espèces. Mais du coup, nous, ça nous oblige à avoir un panel de peut-être une trentaine de bambous moyens, parce que les bambous moyens sont beaucoup plus adaptables, et à peu près 60 bambous géants. Ça c'est du moyen ? Ça c'est du moyen.

  • Speaker #1

    Mais tu as des géants ici ? Je ne vois pas la comparaison. C'est ceux-là les géants là ? C'est pas vite voir non. C'est beau !

  • Speaker #3

    C'est du géant qui a mal poussé ici, parce que ça n'a jamais été arrosé et mon sol n'est pas terrible. C'est pas un géant ?

  • Speaker #1

    Oui. Ah ouais, ça va plus haut là !

  • Speaker #3

    Ça va plus haut et il y en a quelques-uns qui commencent à être plus gros là.

  • Speaker #1

    et là ils ont 10 ans ?

  • Speaker #3

    oui c'était la deuxième année ça pousse en combien de temps ? en deux mois

  • Speaker #1

    Quand vous récoltez ça,

  • Speaker #3

    ça fait quoi ?

  • Speaker #1

    La récolte, c'est on coupe, on broie ?

  • Speaker #4

    On coupe, on broie, ça fait des plaquettes forestières, des chips. Des chips, c'est ça. C'est une broyeuse ?

  • Speaker #3

    Oui, c'est comme une grosse moissonneuse. Ça dépend des applications. On peut ramasser soit en balles, soit le broyeur qui est récupéré.

  • Speaker #1

    Des rangs denses comme ça, là ?

  • Speaker #3

    Faits comme ça,

  • Speaker #1

    large de je ne sais quoi, d'un mètre de même ?

  • Speaker #3

    La largeur de l'outil, de l'engin, en fait.

  • Speaker #1

    Et c'est un rang sur deux par an.

  • Speaker #3

    Voilà, c'est ça. Il faut couper ça en février, et du coup, au printemps, ça repousse.

  • Speaker #2

    C'est un peu comme le miscanthus.

  • Speaker #3

    Exactement. C'est exactement ça, sauf que les mensurations ne sont pas les mêmes, et les débouchés sont beaucoup plus nombreux.

  • Speaker #5

    Le bambou est beaucoup plus ligneux. Il y a plein d'applications intéressantes avec le Miscanthus. Et on voit d'ailleurs que c'est une culture qui se développe, une culture de biomasse qui se développe. Mais le bambou a vraiment cet avantage de ressembler dans sa composition chimique beaucoup plus au bois, parce que c'est vraiment une ressource de biomasse ligneux cellulosique.

  • Speaker #4

    Et il n'y a pas de séquestration carbone importante pour le Miscanthus.

  • Speaker #3

    D'accord. Ça c'est un plant qui a 3 ans et un pot de 5 litres, donc c'est ça qu'on plante 400 à l'hectare. On coupe à 1,50 mètre pour le transport, pour la reprise, et voilà. C'est ce qu'on met, pour faire un hectare, on met 400 pots comme ça. La difficulté qui fait que c'est long à produire, ce qui compte c'est ce qui est dessous en fait, c'est que le rhizome soit... suffisamment développé pour bien s'installer, s'installer rapidement. Et c'est à cet âge-là qu'il commence vraiment à s'étendre dès qu'il est planté.

  • Speaker #1

    Et alors tu ne peux pas les garder au-delà de 3 ans ?

  • Speaker #3

    Moi, j'avais l'habitude de les garder au-delà et je les vendais en pots plus gros. Je vendais des pots de 15 litres, puis des pots de 30 litres. Mais c'est trop lourd. Quand on en plante un ou deux chez un collectionneur ça va, ou chez un particulier, mais pour planter 400 à l'hectare, il vaut mieux transporter 400 pots de 5 litres que 400 pots de 30 litres parce que c'est une logistique différente après.

  • Speaker #4

    Là on voit qu'il y a un nid là.

  • Speaker #3

    Ah ouais, ça c'est formidable parce que les chats ne peuvent pas attraper les nids d'oiseaux dans les bambous.

  • Speaker #1

    Ah non, trop dur !

  • Speaker #3

    Il y a plusieurs sociétés en Europe qui font du bambou. Il y en a une qui est assez sérieuse et qui fait les choses plutôt bien, qui diversifie les espèces. Et il y en a une contre laquelle j'essaie d'attirer l'attention, qui ne plante qu'une seule espèce, parce qu'ils ont la facilité d'obtenir des graines de cette espèce chaque année. Et il se trouve que ce bambou c'est le plus difficile à faire pousser. Vous ne l'avez pas vu dans mon jardin, parce que déjà il ne supporte pas l'argile, il ne supporte pas le calcaire, il ne supporte pas l'excès d'eau en hiver. Donc c'est le bambou le plus capricieux à faire pousser. Quand il pousse, il devient énorme, mais souvent il ne pousse pas. Et c'est un bambou qui est vraiment compliqué. Donc c'est un peu dommage de mettre déjà qu'une seule espèce de bambou, et surtout celui-ci qui est vraiment compliqué à faire pousser. À savoir, quand on ne plante qu'une seule espèce de bambou, si ça fleurit, on n'a plus rien. Pour l'Inde, une floraison c'était synonyme de famine terrible. C'est énorme, le développement du bambou en Inde. Il y a un ministre du bambou en Inde. C'est un... Et c'est Lin Bar qui nous a appris justement à mettre en place des pépinières dès les premiers signes de floraison. Et ce ministre du bambou indien, il m'avait dit en juin 2018 qu'il avait découvert aujourd'hui, c'était à Pékin, que le bambou pouvait remplacer tous les plastiques jetables. Il m'a dit, c'est fini, dans tous les états d'Inde du Nord-Est, il n'y aura plus de plastique jetable. Six mois plus tard, il n'y a plus de plastique jetable. Tout remplacé par du bambou.

  • Speaker #0

    Christophe Donnet, Dimitri Guyot et Mathieu Poisa ont créé en 2021 Horizon.

  • Speaker #5

    L'objectif d'Horizon, c'est vraiment de développer et structurer une filière. Et pour que cette filière, elle prenne de l'ampleur et elle arrive à se développer, il faut vraiment que tous les acteurs arrivent à trouver un modèle économique viable et viable sur le long terme. Et donc, dans ces acteurs, dans cette filière, il y a l'amont. Donc, il y a vraiment le côté pépinière, le côté on aide, on accompagne les porteurs de projets pour démarrer. une plantation pour démarrer une bambouzette. Et ensuite, on voit le rôle d'horizone comme un rôle d'accompagnateur, non seulement au début, mais ensuite sur le long terme, sur la valorisation. Et effectivement, on a un mécanisme de commission où on souhaite aligner nos intérêts avec celui des porteurs de projets. Donc, on se rémunère sur la base d'une commission sur les crédits carbone et sur la base d'une commission sur la valorisation. de la biomasse produite, ce qui permet d'aligner les intérêts et ça permet pour nous d'aller chercher la meilleure valeur pour le porteur de projet. Et comme ça, on s'assure que l'équilibre économique soit bien respecté. Et derrière, l'idée, c'est aussi de trouver un équilibre économique pour les industriels et les transformateurs qui vont ensuite transformer la biomasse et aller décarboner différents secteurs, différentes industries.

  • Speaker #0

    Stéphane Alzay nous raconte comment il est tombé amoureux du magique bambou.

  • Speaker #3

    J'étais pompier professionnel. Et je vous ferai voir, il y a une rue du bambou à Lusia, j'y suis pour rien. Et donc ma grand-mère m'appelait, elle vendait, elle m'appelait quand j'étais ado, je venais avec ma mobilette, je faisais 7 km. Viens vite, ils ont poussé dans la nuit, ils vont me cacher le soleil. Et je cassais du bambou. Ma grand-mère est décédée en 1998, la maison est restée un peu à l'abandon. Du coup les bambous, ils en ont profité, ils avaient 30 ans. Et sur 400 m² en 2007, il y a 400 m² de bambouserie qui est sortie d'un seul coup, en deux mois. et à plus de 14 mètres de haut. Donc c'était assez spectaculaire. Quand j'ai vu ça, j'ai dit, c'est quoi cette plante en fait ? Et j'ai commencé d'acheter un livre, j'ai étudié petit à petit. Maintenant j'ai des encyclopédies chinoises, parce qu'il n'y a plus assez de documentation, ni en français ni en anglais. Donc voilà, c'est devenu une vraie passion comme ça.

  • Speaker #1

    Vrai, faux, quoi, comment ? Le bambou existe en France depuis 1860. Est-ce qu'on a entendu parler des envahisseurs ? Non. Alors explique-nous où on en est, quelle est la réalité de ça, quelles espèces, quoi, comment ? Parce qu'il y a quand même une mythologie qui tourne, des préjugés, des idées reçues, et puis un peu d'ignorance surtout sur le sujet. Qu'est-ce que vous avez à répondre là, tous les trois ?

  • Speaker #3

    C'est très facile. C'est une plante très expansive. Le bambou, il est fait pour faire une forêt. Mais au départ, ça va devenir une culture en fait, donc ce n'est pas un espace naturel qui pourrait coloniser. Donc si on définit de le planter sur une parcelle, il faut qu'il reste sur cette parcelle. Et la technique est très simple, il suffit de faire un chemin tout autour de la parcelle qui délimite la parcelle. Et une fois par an dans un sol normal et deux fois par an sur un sol sablonneux, il faut passer une sous-souleuse en fait, de 40 cm qui sectionne le rhizome parce que les rhizomes sont à 30 cm. Et donc le fait de contrôler ce chemin, si on ne pète pas souvent, on passe un coup de broyeur et un coup de sous-soleuse, et le bambou il restera sur sa parcelle en fait.

  • Speaker #1

    C'est une plante qui ne se disperse pas parce qu'elle n'a pas de gramination ?

  • Speaker #3

    Non, ça ne fleurit pas. La fleuraison a lieu à peu près tous les 100 ans, donc il n'y a pas de dispersion de graines. Ça ne peut pas envahir... comme région. C'est largement moins invasif que du colza.

  • Speaker #4

    On a cette vision d'une plante exotique qui aurait besoin de beaucoup d'eau, plante même aquatique. Et en fait, les variétés que tu as ramenées de Chine, elles viennent de la Chine continentale avec des climats qui ressemblent beaucoup aux nôtres. Et donc, les besoins en eau, c'est globalement 100 mm par mois au printemps.

  • Speaker #1

    S'il n'y a pas de précipitation, comme on le connaît, par exemple, au Louis.

  • Speaker #4

    C'est bien le problème, oui. On serait content d'être en botte dans ton jardin aujourd'hui, Stéphane.

  • Speaker #3

    Je serais content que vous soyez en botte,

  • Speaker #4

    ce serait dommage. C'est vrai que c'est un des problèmes et on se dit que face à tous ces aléas climatiques, c'est peut-être mieux de prévoir de l'irrigation en appoint.

  • Speaker #2

    Aujourd'hui quand même, on en parle tous les jours à la télévision, le manque d'eau potable va devenir, on va dire, un vrai sujet dans les... Et même chez nous qui sommes le réservoir en eau potable de la France.

  • Speaker #3

    J'ai regardé en Morvan, j'ai regardé la pluviométrie, j'ai trouvé très intéressant. Moi ici, jusqu'à il y a 4-5 ans, je disais vous plantez vos bambous pour des bambous d'ornement, mais il faut bien qu'ils poussent aussi. Vous n'arrosez pas forcément, vous verrez les pluies du mois de septembre rattraperont. Et puis ça va, moins ça rattrape en fait. On se rend compte que depuis 2017, il y a vraiment des années très difficiles et puis elles s'accumulent. C'est souvent ça, les poulies, les sapinières. Le bambou n'a pas forcément besoin d'être arrosé. Peut-être que le système d'irrigation, il y a de grandes chances qu'il ne fonctionne qu'une année sur 6 ou 7. Mais c'est vraiment pour sécuriser la sortie des pousses au printemps.

  • Speaker #4

    S'il n'y a rien, on préconise un goutte-à-goutte. parce que c'est le plus efficient. Après, s'il y a des parcelles de maïs qui étaient irriguées et qu'il y a déjà un système d'irrigation, on peut réfléchir justement à réutiliser ce système. En fait, c'est surtout de l'appoint.

  • Speaker #1

    Dans le Morvan, il n'y a pas un préfet qui sait ce que c'est qu'un arrêté pour l'irrigation. Ils n'ont jamais vu ça, donc il n'y a pas d'historique. Donc nous, on va se pointer. On va dire, ah, monsieur le préfet, on vous demande un petit peu de dérégulation. Et là, ça va être la révolution. Ils vont nous dire, mais dans le moment, maintenant, on fait une dérégulation. Donc, on a un petit sujet sur la manière dont on traite ce problème en réglementaire, sachant qu'il n'y a pas de forage. Il y a des prélèvements dans les rivières, certainement.

  • Speaker #2

    Il n'y a pas de forage, il n'y a pas de système d'irrigation pour le maïs, il n'y a strictement rien. Parce que nous, le Moran, c'est...

  • Speaker #1

    C'est très humide.

  • Speaker #2

    C'est déjà assez humide, et il n'y a pas des parcellaires, comme dans la Beauce, comme dans toutes ces régions où l'agriculture, on va dire, céréalière est en place, où vous avez des arroseurs qui font 2 km de long et qui tournent en rond. Nous, on n'a pas ça, les parcellaires, c'est... Les plus gros c'est 20 hectares, 10 hectares, 5 hectares, mais il y a beaucoup plus de parcelles qui font 1,5 hectare, 1 hectare. Et il y a tout le temps des petits boctaux, des haies qui séparent toutes ces parcelles-là. Donc c'est quand même hyper compliqué d'irriguer.

  • Speaker #3

    Mais après, je viens sur l'effet du bambou sur le climat. Quand on a des parcelles de bambou adultes, c'est plus humide. On a l'arrosé quand il y a une grosse canicule énorme. On a l'arrosé trois, quatre jours de plus qu'en dehors de la bambouserie. Et le bambou influe largement, au point de vue local, sur l'humidité, sur la chaleur. Il fait 7 degrés d'écart en plein cagnard quand il y a une canicule, entre chez mes parents à Maringues et ici.

  • Speaker #2

    La culture de bambou est, on va dire, consommatrice de produits phytosanitaires.

  • Speaker #4

    Non, justement, c'est ça qui est...

  • Speaker #2

    C'est un sujet assez chaud et bouillant dans notre région du Morvan.

  • Speaker #3

    Il n'y a aucune maladie, aucun parasite. Le seul vrai ennemi du bambou, c'est le panda. Il n'y a aucun parasite qui nuit à la culture du bambou.

  • Speaker #4

    C'est vrai qu'au début, nous, on avait vraiment une vue très ingénieure de comment on peut séquestrer du carbone en s'inspirant de la nature. Et ensuite, on s'est dit, bon, ce bambou, il faut bien que des gens le cultivent. Et c'est là qu'on a compris qu'il y avait un vrai enjeu d'inégalité, de revenus, de se rendre compte que le producteur, il est à l'amont de la chaîne de valeur. d'une manière très paradoxale, celui qui est le moins rémunéré. Et c'est comme ça qu'on est tombé sur le chemin d'Arnaud et de François et de la Compagnie des Amandes, qui a un peu révolutionné ce système de partage de la valeur.

  • Speaker #1

    Nous, on n'achète pas la terre à la Compagnie des Amandes. Donc la terre appartient aux paysans. C'est une loi de la Révolution française, puisque le paysan a obtenu la terre contre le clergé et la noblesse. Donc nous, on n'est ni des Américains ni des Chinois. Et on est pour que la propriété appartienne aux paysans. En revanche, on s'associe avec l'agriculteur, le paysan, le sylviculteur dans notre cas. C'est un peu cette idée-là. On s'associe pour exploiter ensemble. Où on apporte la technique, le paysan apporte sa terre, l'écosystème. On apporte la R&D, c'est-à-dire qu'est-ce qu'on fait pour améliorer la plante. Et on apporte le débouché pour dérisquer. Et le financement. Parce que quand on s'associe, ça veut dire qu'on est aligné avec le paysan et qu'on va gagner de l'argent ensemble en valorisant le plus possible sur l'aval. Donc c'est ça la garantie. Alors la contrepartie, c'est que le paysan accepte de ne pas travailler seul, ce qui est plutôt un avantage parce que le cerveau collectif est toujours meilleur que le cerveau individuel. Et il ouvre le capital en minoritaire à des partenaires. Et on partage ensuite 51-49. On a choisi cette clé de répartition. Franchement, on a eu... 3 500 hectares de déclarations de candidatures, on n'a pas pu les retenir tous parce qu'il y avait des problèmes pédologiques, climatiques, il y avait les EGEL, le ceci, le cela, mais franchement, ça montre qu'il y a un appétit sur ce type de partenariat, d'association, on est des associés. Et dans le modèle économique d'Horizome et de notre petite entreprise formidable sur la plantation de bambous en France, une partie des investissements sont financés par les crédits carbone. Ce qui permet d'abord d'attendre la récolte. en ayant un financement de l'investissement par l'agriculteur, qui n'est pas obligé de supporter toute la dette, un travail qui est quand même un peu rémunéré, même s'il ne l'est pas à 100%, et comme le crédit carbone aujourd'hui commence à monter, monter, monter, alors là, les cours, on vient de tutoyer les 100 euros, alors qu'aujourd'hui, le marché était plutôt à 50, on sait que les revenus attachés à la séquestration du carbone ne peuvent qu'augmenter, puisque tout le monde en veut, et qu'il n'y en a pas assez. Voilà.

  • Speaker #4

    On fait plus que séquestrer du carbone, il y a vraiment un enjeu sur le territoire, l'agriculteur, le fait de financer des exploitations qui aujourd'hui tendent à disparaître. Ce qui rassure, c'est que ce bambou, on le récolte chaque année, donc on ne va pas pouvoir déforester ou exploiter plus vite que la vitesse de repousse, comme c'est le cas pour les forêts aujourd'hui. Et donc ça vient finalement compléter, soulager l'exploitation de la forêt, pour justement alimenter les industries en biomasse. En gros, on veut récupérer des terres qui sont tassées, mortes, où il y a eu beaucoup de conventionnels. Et puis, redonner de la vie microbienne, bactérienne, les verres de terre, remettre en place des symbioses mycorhiziennes. Combler les carences en oligo-éléments, réhausser le taux de matière organique, ce qui fait qu'on aura du coup une bambouzette dont la chute des feuilles permet d'apporter la ration du sol chaque année et on va pouvoir prélever de la biomasse du système. sans casser le cycle d'auto-fertilité, parce que justement on a ces feuilles qui apportent la ration du sol. Et donc là on sort complètement du prisme de l'agriculture conventionnelle, en ayant le moins d'influence sur les écosystèmes possibles. Alors on reste quand même un peu dans le productivisme, et le but c'est d'alimenter le moins mal possible les industries. Donc on n'est pas en train de dire qu'on va recréer des forêts primaires et que ce sera aussi bien, mais en tout cas on veut minimiser l'impact qu'on a sur les écosystèmes. La forêt va se densifier progressivement, comme on l'a vu, d'un à deux mètres par an. Au bout de cinq ans, la canopée se referme. Il y a un couvert végétal naturel qui se forme de par des feuilles. Donc en fait, on a une rétention de l'eau, de l'humidité qui est intéressante, ce qui explique pourquoi il n'y a pas tant besoin d'irrigation et d'eau que ça. Et au bout de la quatrième, cinquième année, on va faire la première récolte en bande. Donc en fait, on va s'y aller mécaniquement, une bande sur deux à l'automne, et elle va repousser au printemps d'après, en un mois. Donc en un mois, le bambou aura retrouvé sa taille finale, donc c'est entre 5 et 10 mètres pour les variétés qui nous intéressent. Nous, ce qu'on propose, c'est d'aller vraiment développer... de la recherche et développement pour adresser des niches industrielles qui ne parlent pas au grand public, mais qui en fait seront les meilleures valorisations pour cette biomasse. donner un exemple de ce que ça veut dire remplacer un matériau fossile par de la biomasse pour des carbonelles industrie. On peut prendre l'exemple de Michelin qui s'est engagé à avoir une production 100% biosourcée ou recyclée d'ici 2050. Et on peut se demander du coup à quoi ressemble un pneu biosourcé, ça défie pas mal l'intuition. Et donc l'exemple qu'on peut donner c'est dans les gommes de pneus il y a du noir de carbone qui sert à... durcir la gomme pour justement qu'elle résiste mieux à l'abrasion. Et donc, ce noir de carbone, aujourd'hui, il est d'origine fossile, c'est assez évident. Mais on peut en fait le biosourcer avec du bambou ou des déchets issus de l'industrie du bois. On va pyroliser ces déchets, donc en fait les chauffer sous atmosphères contrôlées sans oxygène à 500-600 degrés et obtenir du coup du biochar, donc du charbon végétal. Et ensuite, on peut, de ce charbon végétal... obtenir du noir de carbone. Et donc, on avait fait le calcul, je crois qu'il faudrait 200 000 hectares de bambou en France pour fournir Michelin et qu'il puisse atteindre son objectif de biosourcer sa production d'ici 2050. L'Oréal s'inscrit pas mal dans cette démarche-là aussi, ils veulent avoir biosourcé à 95% d'ici 2030, donc là c'est vraiment demain. Et donc, il y a des enjeux de les fournir en fibres, en silice organique, organique...

  • Speaker #2

    Est-ce que dans le bambou, pareil, on peut faire plusieurs produits ? Ou est-ce que ça porte tout au même endroit ?

  • Speaker #4

    C'est tout le défi, c'est de, à partir de ce bambou, d'aller chercher vraiment la cellulose, l'hémicellulose et la lignine pour ensuite vraiment en extraire la quintessence et valoriser au plus cher. Et justement, remplacer tous ces produits d'origine fossile par cette biomasse qu'on aurait raffinée. Aujourd'hui, il y a des gens qui savent faire ça en France. Il faut le passer à l'échelle. Entre-temps... On va lancer des pilotes. Cette biomasse, elle n'a pas beaucoup de valeur à la tonne au mètre cube, donc elle est peu transportable. Et donc c'est aussi pour ça qu'on est à peu près sûr que l'avenir serait industrialisé pour les besoins locaux, plutôt que faire venir tous les ans un milliard de produits transformés en bambou.

  • Speaker #1

    Et comment se disent-ils que ce soit les Hollandais qui ont pris le marché du bambou en Europe ? Qu'est-ce qui se passe ?

  • Speaker #3

    Ils ont été à la présidence de l'Inbar. C'est quoi l'Inbar ? L'Inbar, c'est International Network for Bamboo and Rattan. C'est une organisation intergouvernementale qui doit avoir aujourd'hui 47 pays. C'est basé à Pékin, c'est financé en grande partie par la Chine. Ils siègent régulièrement à l'ONU. C'est des lobbyistes du bambou, en fait. Mais en même temps, ils ont des plans de financement pour les pays en voie de développement, notamment en Afrique, en Amérique du Sud et en Asie du Sud-Est, pour développer le bambou. C'est ce qui aide à supporter les nouvelles routes de la soie de Xi Jinping en fait. Mais c'est un avantage justement où ça améliore grandement la vie des gens autour du bambou. Cette organisation intergouvernementale a longtemps été présidée par des Hollandais. Et donc chaque fois qu'il y avait une nouvelle ressource qui naissait en Chine, et bien ils se la seront appropriées pour les Pays-Bas. Donc c'est comme ça qu'on a une boîte qui est depuis 25 ans en Europe, qui distribue tous les produits en bambou, le parquet en bambou, les planches en bambou, qui ont habillé l'aéroport de Madrid, parce qu'ils sont arrivés comme ça en fait. Dès qu'il y avait une piste à exploiter, elle est arrivée directement au pays.

  • Speaker #1

    Ça portait un milliard de produits de bambou ?

  • Speaker #3

    Ah oui, c'était jusqu'à très peu de temps, c'était tout via les Pays-Bas. Donc les produits arrivés aux Pays-Bas étaient revendus en France, et la France est un des plus gros acheteurs de bambou. Les filières bambou, il y a eu déjà des industriels qui ont pensé dans le sud-ouest, on a rencontré des gens, ingénieurs forestiers, qui avaient déjà fait du papier avec du bambou il y a 40 ans. Et ce qui manquait à l'époque, c'était le financement de départ, ce que le Crédit Carbone risque de permettre cette fois. Mais il y a déjà des gens qui ont pensé, il y a des gens qui avaient pensé la fameuse légende des bambous landais, les graines de bambou introduites par François Mitterrand. qui ont été jetés comme ça directement plein champ et qui n'ont pas fonctionné, mais il y a déjà des gens qui avaient pensé. Après une nouvelle tempête dans les Landes et des hectares et des hectares de pins accouchés, les sylviculteurs se sont dit, il y en a marre, il faut qu'on trouve autre chose. Et ils se sont dit, ils avaient l'image du bambou qui pousse les pieds dans l'eau, parce que l'idée du pin, c'est de pomper l'eau en fait, pour que ça ne redevienne pas un marécage. Et puis il est souple, si le vent souffle très fort, il ne cassera pas, comme le roseau de la fable de la fontaine. Et donc ils ont cherché à planter du bambou. Et ils ont obtenu, comme François Mitterrand avait une maison à Souston, Les gens disent que c'est dans la valise diplomatique qu'ils ont obtenu des graines de bambou. Et ils les ont mis directement dans les semoirs à maïs. Ils ne savaient pas comment ça fonctionnait. En fait, les graines de bambou, c'est très difficile à faire germer. Et ça doit être transplanté, en fait. Et là, non, ils ont mis en plein champ. Ils ont arrosé, ils ont tout noyé. Il y a eu 2% de succès, à peu près. On a des très belles bambouseries qui sont encore à Génie-les-Bains, à Morsence. Et puis des graines qui se sont envolées, qui sont allées se poser vraiment dans les endroits où ça leur convient. Il y a des bambous comme ça.

  • Speaker #1

    Voilà. Il y a un sujet très important, c'est ce qu'on appelle ce que les technocrates, tous les ministères créés par Dieu sur le carbone répètent en chœur, c'est l'additionnalité. C'est-à-dire que tu remplaces du maïs par du bambou, il y a une super additionnalité que tu peux te faire rémunérer. Si c'est du blé... par un amendier, il y a une additionnalité qu'on peut mesurer. Alors il y a des méthodes de mesure et de calcul, donc il faut quand même entrer dans le tuyau de ce truc-là pour obtenir les certifications. Donc ça veut dire que, d'abord, tu ne peux pas remplacer de la forêt par du bambou, parce que ce n'est pas de la sylviculture au regard de la liste des plantes autorisées par le ministère de l'Agriculture. Déjà, tu ne peux pas planter sur ce qui est classé forêt, sylviculture, bois, c'est comme une plante. Donc là, s'il y a eu du maïs, de la prairie, des cultures, ça, ça marche. Donc là, tu as de la bonne additionnalité. Alors, si tu remplaces du bois par du bambou... on va discutailler pendant longtemps au ministère. Donc, cette question, elle est très importante dans la stratégie de plantation pour vous. Quelle parcelle ou qu'est-ce qu'on convertit en bambou ou qu'est-ce qu'on ne convertit pas, qu'on garde pour autre chose, dans votre dispositif de culture et de sylviculture chez vous.

  • Speaker #2

    Nous on est producteurs de sapins de Noël et en parallèle on façonne du bois de chauffage en bûchette. Et là j'ai un collègue qui fait la même chose que moi sur le Morvan, un peu plus dans le sud. Aujourd'hui, vu le prix de l'électricité, on a une grosse série qui cherche à développer, on va dire, une usine biomasse pour fabriquer de l'électricité. Et là, il cherche, donc nous, lui, il a déjà négocié un marché de 5000 tonnes pour l'année, mais bon, il ne s'est pas trop engagé. Et nous, tous nos déchets qui sortent de notre combiné, on va les stocker. Et on va passer ça en biomasse.

  • Speaker #4

    Justement, c'est tout le défi de lancer une filière, c'est qu'il faut des gens à l'amont qui plantent, mais il faut que ces gens qui prennent le risque de planter puissent valoriser derrière. Et donc c'est toute la valeur ajoutée d'Horizome, c'est que sur les trois fondateurs, on est deux ingénieurs en matériaux. matériaux, bâtiments. Et donc on noue des partenariats avec les industriels pour justement valoriser au mieux la production. Et d'ailleurs dans notre business model, on s'aligne avec le producteur puisqu'on prend une commission sur tout ce qui va sortir de la bambouzette et donc on est aligné pour vendre au plus cher.

  • Speaker #0

    Horizon a déjà planté 15 hectares de bambous dans les Landes et le Gers déploie son expertise agronomique chez des agriculteurs pionniers partout en France. L'Europe commence à prendre le tournant du marché carbone pour le rendre accessible aux planteurs de bambousées. De plus en plus d'industries vont être tenues d'acheter des droits à polluer, entraînant une hausse du prix du carbone, faisant baisser d'autant l'investissement initial à la charge des agriculteurs. Ces conditions se mettent maintenant en œuvre pour faire émerger cette nouvelle agriculture qui permettra aux matières organiques de devenir cette matière première pour les industries qui remplacera peu à peu les produits du pétrole. Alors, il faut se retrousser les manches et les solutions sont bien là. Personne ne pourra tenir l'engagement de la neutralité carbone en 2050 sans planter massivement du bambou, une plante magique.

Description

Le pépiniériste Stéphane Alzaix invite à Luzillat, dans le Puy-de-Dôme, Mathieu Poizat et Christophe Downey, fondateurs d’Horizom, une entreprise agricole qui plante du bambou en France, à présenter ses centaines de variétés de bambous à un couple d’agriculteurs du Morvan. Ils discutent de l’extraordinaire opportunité écologique et économique que représente le bambou pour l’industrie et l’agriculture française.


Co-réalisé par Renaud Duguet et Maxime Verner. 

Voix off : Elia.

Générique : Guillaume Bérat.


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Bonjour les vrais souverains, je suis Arnaud Montebourg et j'approuve ce podcast. J'ai créé il y a quelques années les équipes du Made in France qui contribuent à construire, reconstruire la nouvelle agriculture et la nouvelle industrie de notre pays. On le fait modestement, mais on le fait concrètement. Et je vous emmène à la rencontre des vrais souverains, celles et ceux qui se battent au quotidien pour que la France redevienne ce grand pays inspirant que nous aimons tant et où nous voulons vivre longtemps.

  • Speaker #1

    Dans les stratégies nationales de diminution de carbone, la France doit multiplier par 2 sa biomasse d'ici 2050. La biomasse, c'est la fabrication de la nouvelle forêt, et on ne peut pas le faire avec les seules forêts existantes. Nous avons besoin d'une plante extraordinaire qui nous permette de stocker dix fois plus de carbone que les autres et de produire de la biomasse deux fois plus rapidement. Cette plante magique existe partout dans le monde. Elle s'appelle le bambou. C'est une plante qui n'est pas invasive, contrairement aux préjugés, et qui pousse à une vitesse accélérée, éblouissant tous les agronomes.

  • Speaker #0

    Le bambou est un outil indispensable pour construire la souveraineté d'une biomasse française.

  • Speaker #1

    Alors aujourd'hui, on va à l'usine dans le Puy-de-Dôme, chez Stéphane Alzay, qui est pépiniériste du bambou. Il y a 15 ans, il était pompier professionnel et s'est reconverti dans une plante qui est sa passion. Il en a 450 variétés. C'est le meilleur pépiniériste aujourd'hui en France de bambou. dont ils maîtrisent les origines, la culture, l'élevage, la croissance. Bref, une encyclopédie. Et nous y allons avec les dirigeants d'Horizome, qui ont créé une société dans laquelle je suis moi-même impliqué et associé, qui installe la filière bambou en France pour tous les usages. que cette plante extraordinaire est capable d'apporter. C'est une plante qui stocke du carbone de façon imbattable, comme aucune autre plante. Parce qu'elle repousse quand on la coupe, donc inutile de la replanter. Quand vous plantez un arbre, il stocke du carbone, puis 80 ans après, vous l'abattez, vous le remplacez. Mais là, tous les ans, vous coupez un rang, deux rangs de bambou, et il repousse naturellement. Donc c'est une plante à croissance exponentielle. et c'est une plante qui est l'avenir de l'industrie et de l'agriculture. Et c'est la raison pour laquelle nous avons décidé de nous y investir. Alors là, il y a deux de mes amis agriculteurs dans le Morvan, ma région natale, entre la Nièvre, la Côte d'Or et la Saône-et-Loire, qui sont là et qui vont se poser toutes les questions pour savoir si oui ou non ils vont planter du bambou chez eux. Je vais te présenter tous nos amis. Alors ça, c'est les pires dirigeants d'Horizon. Et Stéphane Alzé et le Pépiniéris qui nous invitent dans cet endroit incroyable.

  • Speaker #2

    D'accord.

  • Speaker #1

    Voilà. Ça va, bonne route ?

  • Speaker #2

    Oui.

  • Speaker #1

    Bonne heure. Nous on a fait trois heures de train et donc on se pose la question de savoir si on plante du bambou dans le Morvan donc toutes les questions agronomiques économiques, techniques tout ! On va passer en revue tout ça et puis sous le feu sceptique de l'esprit naturel, de l'agriculteur que nous sommes tous ici Parce qu'on se pose la question, c'est une plante à laquelle nous sommes aventureux. Et pourtant, c'est une plante extraordinaire. Donc on va commencer le voyage avec toi, Stéphane. Tu nous guides, on te suit.

  • Speaker #3

    C'est une plante qui n'est pas partout dans le monde. C'est un peu dommage de ne pas l'utiliser, on ne l'utilise pas partout ailleurs. On la connaît juste comme une plante d'ornement. Alors que partout ailleurs on en fait beaucoup d'autres choses. Ici c'est à peu près des conditions défavorables, qu'on puisse avoir, enfin on peut pousser du bambou. Le terrain est très très lourd, c'est vraiment de l'argile, on peut faire de la poterie en fait, il y a des briquetteries traditionnellement, donc c'est de la terre, vraiment de la terre glaise. On a des sécheresses terribles, ça n'a jamais été arrosé, donc le jardin c'est vraiment une condition très défavorable. Et ça pousse quand même.

  • Speaker #1

    Suivons le guide.

  • Speaker #3

    Donc là c'est la partie pépinière, il y a des bambous de collection, des choses rares qui sont venus de Chine, donc très très peu d'exemplaires. Il y a une grande partie, c'est un gros stock de bambous non envahissants, c'est ce qu'on fait le plus. Et ici quelques plants de bambous qu'on plante en agriculture en fait.

  • Speaker #1

    Alors ça c'est le moyen Fabien ? C'est celui-là que tu envisages de planter en France ? C'est celui que tu plantes dans les Landes ?

  • Speaker #3

    Oui, celui-ci en fait partie à peu près. On en a pour l'instant une douzaine de bambous moyens qu'on est en train de développer, mais on va augmenter la liste. Ceux-là en font partie, c'est la famille Philostachys, c'est un Philostachys primotina, là-bas on a mélangé avec un Philostachys incarnata, mais il faut faire un mix de toute façon, il ne faut pas planter une seule espèce de bambou, parce que si elle fleurit, il n'y a plus rien.

  • Speaker #1

    Tu as un mix de combien d'espèces dans le cheptel, dans ton panel de variétés idéal ?

  • Speaker #3

    Sur chaque plantation, il faut qu'il y ait 7 ou 8 espèces. Mais du coup, nous, ça nous oblige à avoir un panel de peut-être une trentaine de bambous moyens, parce que les bambous moyens sont beaucoup plus adaptables, et à peu près 60 bambous géants. Ça c'est du moyen ? Ça c'est du moyen.

  • Speaker #1

    Mais tu as des géants ici ? Je ne vois pas la comparaison. C'est ceux-là les géants là ? C'est pas vite voir non. C'est beau !

  • Speaker #3

    C'est du géant qui a mal poussé ici, parce que ça n'a jamais été arrosé et mon sol n'est pas terrible. C'est pas un géant ?

  • Speaker #1

    Oui. Ah ouais, ça va plus haut là !

  • Speaker #3

    Ça va plus haut et il y en a quelques-uns qui commencent à être plus gros là.

  • Speaker #1

    et là ils ont 10 ans ?

  • Speaker #3

    oui c'était la deuxième année ça pousse en combien de temps ? en deux mois

  • Speaker #1

    Quand vous récoltez ça,

  • Speaker #3

    ça fait quoi ?

  • Speaker #1

    La récolte, c'est on coupe, on broie ?

  • Speaker #4

    On coupe, on broie, ça fait des plaquettes forestières, des chips. Des chips, c'est ça. C'est une broyeuse ?

  • Speaker #3

    Oui, c'est comme une grosse moissonneuse. Ça dépend des applications. On peut ramasser soit en balles, soit le broyeur qui est récupéré.

  • Speaker #1

    Des rangs denses comme ça, là ?

  • Speaker #3

    Faits comme ça,

  • Speaker #1

    large de je ne sais quoi, d'un mètre de même ?

  • Speaker #3

    La largeur de l'outil, de l'engin, en fait.

  • Speaker #1

    Et c'est un rang sur deux par an.

  • Speaker #3

    Voilà, c'est ça. Il faut couper ça en février, et du coup, au printemps, ça repousse.

  • Speaker #2

    C'est un peu comme le miscanthus.

  • Speaker #3

    Exactement. C'est exactement ça, sauf que les mensurations ne sont pas les mêmes, et les débouchés sont beaucoup plus nombreux.

  • Speaker #5

    Le bambou est beaucoup plus ligneux. Il y a plein d'applications intéressantes avec le Miscanthus. Et on voit d'ailleurs que c'est une culture qui se développe, une culture de biomasse qui se développe. Mais le bambou a vraiment cet avantage de ressembler dans sa composition chimique beaucoup plus au bois, parce que c'est vraiment une ressource de biomasse ligneux cellulosique.

  • Speaker #4

    Et il n'y a pas de séquestration carbone importante pour le Miscanthus.

  • Speaker #3

    D'accord. Ça c'est un plant qui a 3 ans et un pot de 5 litres, donc c'est ça qu'on plante 400 à l'hectare. On coupe à 1,50 mètre pour le transport, pour la reprise, et voilà. C'est ce qu'on met, pour faire un hectare, on met 400 pots comme ça. La difficulté qui fait que c'est long à produire, ce qui compte c'est ce qui est dessous en fait, c'est que le rhizome soit... suffisamment développé pour bien s'installer, s'installer rapidement. Et c'est à cet âge-là qu'il commence vraiment à s'étendre dès qu'il est planté.

  • Speaker #1

    Et alors tu ne peux pas les garder au-delà de 3 ans ?

  • Speaker #3

    Moi, j'avais l'habitude de les garder au-delà et je les vendais en pots plus gros. Je vendais des pots de 15 litres, puis des pots de 30 litres. Mais c'est trop lourd. Quand on en plante un ou deux chez un collectionneur ça va, ou chez un particulier, mais pour planter 400 à l'hectare, il vaut mieux transporter 400 pots de 5 litres que 400 pots de 30 litres parce que c'est une logistique différente après.

  • Speaker #4

    Là on voit qu'il y a un nid là.

  • Speaker #3

    Ah ouais, ça c'est formidable parce que les chats ne peuvent pas attraper les nids d'oiseaux dans les bambous.

  • Speaker #1

    Ah non, trop dur !

  • Speaker #3

    Il y a plusieurs sociétés en Europe qui font du bambou. Il y en a une qui est assez sérieuse et qui fait les choses plutôt bien, qui diversifie les espèces. Et il y en a une contre laquelle j'essaie d'attirer l'attention, qui ne plante qu'une seule espèce, parce qu'ils ont la facilité d'obtenir des graines de cette espèce chaque année. Et il se trouve que ce bambou c'est le plus difficile à faire pousser. Vous ne l'avez pas vu dans mon jardin, parce que déjà il ne supporte pas l'argile, il ne supporte pas le calcaire, il ne supporte pas l'excès d'eau en hiver. Donc c'est le bambou le plus capricieux à faire pousser. Quand il pousse, il devient énorme, mais souvent il ne pousse pas. Et c'est un bambou qui est vraiment compliqué. Donc c'est un peu dommage de mettre déjà qu'une seule espèce de bambou, et surtout celui-ci qui est vraiment compliqué à faire pousser. À savoir, quand on ne plante qu'une seule espèce de bambou, si ça fleurit, on n'a plus rien. Pour l'Inde, une floraison c'était synonyme de famine terrible. C'est énorme, le développement du bambou en Inde. Il y a un ministre du bambou en Inde. C'est un... Et c'est Lin Bar qui nous a appris justement à mettre en place des pépinières dès les premiers signes de floraison. Et ce ministre du bambou indien, il m'avait dit en juin 2018 qu'il avait découvert aujourd'hui, c'était à Pékin, que le bambou pouvait remplacer tous les plastiques jetables. Il m'a dit, c'est fini, dans tous les états d'Inde du Nord-Est, il n'y aura plus de plastique jetable. Six mois plus tard, il n'y a plus de plastique jetable. Tout remplacé par du bambou.

  • Speaker #0

    Christophe Donnet, Dimitri Guyot et Mathieu Poisa ont créé en 2021 Horizon.

  • Speaker #5

    L'objectif d'Horizon, c'est vraiment de développer et structurer une filière. Et pour que cette filière, elle prenne de l'ampleur et elle arrive à se développer, il faut vraiment que tous les acteurs arrivent à trouver un modèle économique viable et viable sur le long terme. Et donc, dans ces acteurs, dans cette filière, il y a l'amont. Donc, il y a vraiment le côté pépinière, le côté on aide, on accompagne les porteurs de projets pour démarrer. une plantation pour démarrer une bambouzette. Et ensuite, on voit le rôle d'horizone comme un rôle d'accompagnateur, non seulement au début, mais ensuite sur le long terme, sur la valorisation. Et effectivement, on a un mécanisme de commission où on souhaite aligner nos intérêts avec celui des porteurs de projets. Donc, on se rémunère sur la base d'une commission sur les crédits carbone et sur la base d'une commission sur la valorisation. de la biomasse produite, ce qui permet d'aligner les intérêts et ça permet pour nous d'aller chercher la meilleure valeur pour le porteur de projet. Et comme ça, on s'assure que l'équilibre économique soit bien respecté. Et derrière, l'idée, c'est aussi de trouver un équilibre économique pour les industriels et les transformateurs qui vont ensuite transformer la biomasse et aller décarboner différents secteurs, différentes industries.

  • Speaker #0

    Stéphane Alzay nous raconte comment il est tombé amoureux du magique bambou.

  • Speaker #3

    J'étais pompier professionnel. Et je vous ferai voir, il y a une rue du bambou à Lusia, j'y suis pour rien. Et donc ma grand-mère m'appelait, elle vendait, elle m'appelait quand j'étais ado, je venais avec ma mobilette, je faisais 7 km. Viens vite, ils ont poussé dans la nuit, ils vont me cacher le soleil. Et je cassais du bambou. Ma grand-mère est décédée en 1998, la maison est restée un peu à l'abandon. Du coup les bambous, ils en ont profité, ils avaient 30 ans. Et sur 400 m² en 2007, il y a 400 m² de bambouserie qui est sortie d'un seul coup, en deux mois. et à plus de 14 mètres de haut. Donc c'était assez spectaculaire. Quand j'ai vu ça, j'ai dit, c'est quoi cette plante en fait ? Et j'ai commencé d'acheter un livre, j'ai étudié petit à petit. Maintenant j'ai des encyclopédies chinoises, parce qu'il n'y a plus assez de documentation, ni en français ni en anglais. Donc voilà, c'est devenu une vraie passion comme ça.

  • Speaker #1

    Vrai, faux, quoi, comment ? Le bambou existe en France depuis 1860. Est-ce qu'on a entendu parler des envahisseurs ? Non. Alors explique-nous où on en est, quelle est la réalité de ça, quelles espèces, quoi, comment ? Parce qu'il y a quand même une mythologie qui tourne, des préjugés, des idées reçues, et puis un peu d'ignorance surtout sur le sujet. Qu'est-ce que vous avez à répondre là, tous les trois ?

  • Speaker #3

    C'est très facile. C'est une plante très expansive. Le bambou, il est fait pour faire une forêt. Mais au départ, ça va devenir une culture en fait, donc ce n'est pas un espace naturel qui pourrait coloniser. Donc si on définit de le planter sur une parcelle, il faut qu'il reste sur cette parcelle. Et la technique est très simple, il suffit de faire un chemin tout autour de la parcelle qui délimite la parcelle. Et une fois par an dans un sol normal et deux fois par an sur un sol sablonneux, il faut passer une sous-souleuse en fait, de 40 cm qui sectionne le rhizome parce que les rhizomes sont à 30 cm. Et donc le fait de contrôler ce chemin, si on ne pète pas souvent, on passe un coup de broyeur et un coup de sous-soleuse, et le bambou il restera sur sa parcelle en fait.

  • Speaker #1

    C'est une plante qui ne se disperse pas parce qu'elle n'a pas de gramination ?

  • Speaker #3

    Non, ça ne fleurit pas. La fleuraison a lieu à peu près tous les 100 ans, donc il n'y a pas de dispersion de graines. Ça ne peut pas envahir... comme région. C'est largement moins invasif que du colza.

  • Speaker #4

    On a cette vision d'une plante exotique qui aurait besoin de beaucoup d'eau, plante même aquatique. Et en fait, les variétés que tu as ramenées de Chine, elles viennent de la Chine continentale avec des climats qui ressemblent beaucoup aux nôtres. Et donc, les besoins en eau, c'est globalement 100 mm par mois au printemps.

  • Speaker #1

    S'il n'y a pas de précipitation, comme on le connaît, par exemple, au Louis.

  • Speaker #4

    C'est bien le problème, oui. On serait content d'être en botte dans ton jardin aujourd'hui, Stéphane.

  • Speaker #3

    Je serais content que vous soyez en botte,

  • Speaker #4

    ce serait dommage. C'est vrai que c'est un des problèmes et on se dit que face à tous ces aléas climatiques, c'est peut-être mieux de prévoir de l'irrigation en appoint.

  • Speaker #2

    Aujourd'hui quand même, on en parle tous les jours à la télévision, le manque d'eau potable va devenir, on va dire, un vrai sujet dans les... Et même chez nous qui sommes le réservoir en eau potable de la France.

  • Speaker #3

    J'ai regardé en Morvan, j'ai regardé la pluviométrie, j'ai trouvé très intéressant. Moi ici, jusqu'à il y a 4-5 ans, je disais vous plantez vos bambous pour des bambous d'ornement, mais il faut bien qu'ils poussent aussi. Vous n'arrosez pas forcément, vous verrez les pluies du mois de septembre rattraperont. Et puis ça va, moins ça rattrape en fait. On se rend compte que depuis 2017, il y a vraiment des années très difficiles et puis elles s'accumulent. C'est souvent ça, les poulies, les sapinières. Le bambou n'a pas forcément besoin d'être arrosé. Peut-être que le système d'irrigation, il y a de grandes chances qu'il ne fonctionne qu'une année sur 6 ou 7. Mais c'est vraiment pour sécuriser la sortie des pousses au printemps.

  • Speaker #4

    S'il n'y a rien, on préconise un goutte-à-goutte. parce que c'est le plus efficient. Après, s'il y a des parcelles de maïs qui étaient irriguées et qu'il y a déjà un système d'irrigation, on peut réfléchir justement à réutiliser ce système. En fait, c'est surtout de l'appoint.

  • Speaker #1

    Dans le Morvan, il n'y a pas un préfet qui sait ce que c'est qu'un arrêté pour l'irrigation. Ils n'ont jamais vu ça, donc il n'y a pas d'historique. Donc nous, on va se pointer. On va dire, ah, monsieur le préfet, on vous demande un petit peu de dérégulation. Et là, ça va être la révolution. Ils vont nous dire, mais dans le moment, maintenant, on fait une dérégulation. Donc, on a un petit sujet sur la manière dont on traite ce problème en réglementaire, sachant qu'il n'y a pas de forage. Il y a des prélèvements dans les rivières, certainement.

  • Speaker #2

    Il n'y a pas de forage, il n'y a pas de système d'irrigation pour le maïs, il n'y a strictement rien. Parce que nous, le Moran, c'est...

  • Speaker #1

    C'est très humide.

  • Speaker #2

    C'est déjà assez humide, et il n'y a pas des parcellaires, comme dans la Beauce, comme dans toutes ces régions où l'agriculture, on va dire, céréalière est en place, où vous avez des arroseurs qui font 2 km de long et qui tournent en rond. Nous, on n'a pas ça, les parcellaires, c'est... Les plus gros c'est 20 hectares, 10 hectares, 5 hectares, mais il y a beaucoup plus de parcelles qui font 1,5 hectare, 1 hectare. Et il y a tout le temps des petits boctaux, des haies qui séparent toutes ces parcelles-là. Donc c'est quand même hyper compliqué d'irriguer.

  • Speaker #3

    Mais après, je viens sur l'effet du bambou sur le climat. Quand on a des parcelles de bambou adultes, c'est plus humide. On a l'arrosé quand il y a une grosse canicule énorme. On a l'arrosé trois, quatre jours de plus qu'en dehors de la bambouserie. Et le bambou influe largement, au point de vue local, sur l'humidité, sur la chaleur. Il fait 7 degrés d'écart en plein cagnard quand il y a une canicule, entre chez mes parents à Maringues et ici.

  • Speaker #2

    La culture de bambou est, on va dire, consommatrice de produits phytosanitaires.

  • Speaker #4

    Non, justement, c'est ça qui est...

  • Speaker #2

    C'est un sujet assez chaud et bouillant dans notre région du Morvan.

  • Speaker #3

    Il n'y a aucune maladie, aucun parasite. Le seul vrai ennemi du bambou, c'est le panda. Il n'y a aucun parasite qui nuit à la culture du bambou.

  • Speaker #4

    C'est vrai qu'au début, nous, on avait vraiment une vue très ingénieure de comment on peut séquestrer du carbone en s'inspirant de la nature. Et ensuite, on s'est dit, bon, ce bambou, il faut bien que des gens le cultivent. Et c'est là qu'on a compris qu'il y avait un vrai enjeu d'inégalité, de revenus, de se rendre compte que le producteur, il est à l'amont de la chaîne de valeur. d'une manière très paradoxale, celui qui est le moins rémunéré. Et c'est comme ça qu'on est tombé sur le chemin d'Arnaud et de François et de la Compagnie des Amandes, qui a un peu révolutionné ce système de partage de la valeur.

  • Speaker #1

    Nous, on n'achète pas la terre à la Compagnie des Amandes. Donc la terre appartient aux paysans. C'est une loi de la Révolution française, puisque le paysan a obtenu la terre contre le clergé et la noblesse. Donc nous, on n'est ni des Américains ni des Chinois. Et on est pour que la propriété appartienne aux paysans. En revanche, on s'associe avec l'agriculteur, le paysan, le sylviculteur dans notre cas. C'est un peu cette idée-là. On s'associe pour exploiter ensemble. Où on apporte la technique, le paysan apporte sa terre, l'écosystème. On apporte la R&D, c'est-à-dire qu'est-ce qu'on fait pour améliorer la plante. Et on apporte le débouché pour dérisquer. Et le financement. Parce que quand on s'associe, ça veut dire qu'on est aligné avec le paysan et qu'on va gagner de l'argent ensemble en valorisant le plus possible sur l'aval. Donc c'est ça la garantie. Alors la contrepartie, c'est que le paysan accepte de ne pas travailler seul, ce qui est plutôt un avantage parce que le cerveau collectif est toujours meilleur que le cerveau individuel. Et il ouvre le capital en minoritaire à des partenaires. Et on partage ensuite 51-49. On a choisi cette clé de répartition. Franchement, on a eu... 3 500 hectares de déclarations de candidatures, on n'a pas pu les retenir tous parce qu'il y avait des problèmes pédologiques, climatiques, il y avait les EGEL, le ceci, le cela, mais franchement, ça montre qu'il y a un appétit sur ce type de partenariat, d'association, on est des associés. Et dans le modèle économique d'Horizome et de notre petite entreprise formidable sur la plantation de bambous en France, une partie des investissements sont financés par les crédits carbone. Ce qui permet d'abord d'attendre la récolte. en ayant un financement de l'investissement par l'agriculteur, qui n'est pas obligé de supporter toute la dette, un travail qui est quand même un peu rémunéré, même s'il ne l'est pas à 100%, et comme le crédit carbone aujourd'hui commence à monter, monter, monter, alors là, les cours, on vient de tutoyer les 100 euros, alors qu'aujourd'hui, le marché était plutôt à 50, on sait que les revenus attachés à la séquestration du carbone ne peuvent qu'augmenter, puisque tout le monde en veut, et qu'il n'y en a pas assez. Voilà.

  • Speaker #4

    On fait plus que séquestrer du carbone, il y a vraiment un enjeu sur le territoire, l'agriculteur, le fait de financer des exploitations qui aujourd'hui tendent à disparaître. Ce qui rassure, c'est que ce bambou, on le récolte chaque année, donc on ne va pas pouvoir déforester ou exploiter plus vite que la vitesse de repousse, comme c'est le cas pour les forêts aujourd'hui. Et donc ça vient finalement compléter, soulager l'exploitation de la forêt, pour justement alimenter les industries en biomasse. En gros, on veut récupérer des terres qui sont tassées, mortes, où il y a eu beaucoup de conventionnels. Et puis, redonner de la vie microbienne, bactérienne, les verres de terre, remettre en place des symbioses mycorhiziennes. Combler les carences en oligo-éléments, réhausser le taux de matière organique, ce qui fait qu'on aura du coup une bambouzette dont la chute des feuilles permet d'apporter la ration du sol chaque année et on va pouvoir prélever de la biomasse du système. sans casser le cycle d'auto-fertilité, parce que justement on a ces feuilles qui apportent la ration du sol. Et donc là on sort complètement du prisme de l'agriculture conventionnelle, en ayant le moins d'influence sur les écosystèmes possibles. Alors on reste quand même un peu dans le productivisme, et le but c'est d'alimenter le moins mal possible les industries. Donc on n'est pas en train de dire qu'on va recréer des forêts primaires et que ce sera aussi bien, mais en tout cas on veut minimiser l'impact qu'on a sur les écosystèmes. La forêt va se densifier progressivement, comme on l'a vu, d'un à deux mètres par an. Au bout de cinq ans, la canopée se referme. Il y a un couvert végétal naturel qui se forme de par des feuilles. Donc en fait, on a une rétention de l'eau, de l'humidité qui est intéressante, ce qui explique pourquoi il n'y a pas tant besoin d'irrigation et d'eau que ça. Et au bout de la quatrième, cinquième année, on va faire la première récolte en bande. Donc en fait, on va s'y aller mécaniquement, une bande sur deux à l'automne, et elle va repousser au printemps d'après, en un mois. Donc en un mois, le bambou aura retrouvé sa taille finale, donc c'est entre 5 et 10 mètres pour les variétés qui nous intéressent. Nous, ce qu'on propose, c'est d'aller vraiment développer... de la recherche et développement pour adresser des niches industrielles qui ne parlent pas au grand public, mais qui en fait seront les meilleures valorisations pour cette biomasse. donner un exemple de ce que ça veut dire remplacer un matériau fossile par de la biomasse pour des carbonelles industrie. On peut prendre l'exemple de Michelin qui s'est engagé à avoir une production 100% biosourcée ou recyclée d'ici 2050. Et on peut se demander du coup à quoi ressemble un pneu biosourcé, ça défie pas mal l'intuition. Et donc l'exemple qu'on peut donner c'est dans les gommes de pneus il y a du noir de carbone qui sert à... durcir la gomme pour justement qu'elle résiste mieux à l'abrasion. Et donc, ce noir de carbone, aujourd'hui, il est d'origine fossile, c'est assez évident. Mais on peut en fait le biosourcer avec du bambou ou des déchets issus de l'industrie du bois. On va pyroliser ces déchets, donc en fait les chauffer sous atmosphères contrôlées sans oxygène à 500-600 degrés et obtenir du coup du biochar, donc du charbon végétal. Et ensuite, on peut, de ce charbon végétal... obtenir du noir de carbone. Et donc, on avait fait le calcul, je crois qu'il faudrait 200 000 hectares de bambou en France pour fournir Michelin et qu'il puisse atteindre son objectif de biosourcer sa production d'ici 2050. L'Oréal s'inscrit pas mal dans cette démarche-là aussi, ils veulent avoir biosourcé à 95% d'ici 2030, donc là c'est vraiment demain. Et donc, il y a des enjeux de les fournir en fibres, en silice organique, organique...

  • Speaker #2

    Est-ce que dans le bambou, pareil, on peut faire plusieurs produits ? Ou est-ce que ça porte tout au même endroit ?

  • Speaker #4

    C'est tout le défi, c'est de, à partir de ce bambou, d'aller chercher vraiment la cellulose, l'hémicellulose et la lignine pour ensuite vraiment en extraire la quintessence et valoriser au plus cher. Et justement, remplacer tous ces produits d'origine fossile par cette biomasse qu'on aurait raffinée. Aujourd'hui, il y a des gens qui savent faire ça en France. Il faut le passer à l'échelle. Entre-temps... On va lancer des pilotes. Cette biomasse, elle n'a pas beaucoup de valeur à la tonne au mètre cube, donc elle est peu transportable. Et donc c'est aussi pour ça qu'on est à peu près sûr que l'avenir serait industrialisé pour les besoins locaux, plutôt que faire venir tous les ans un milliard de produits transformés en bambou.

  • Speaker #1

    Et comment se disent-ils que ce soit les Hollandais qui ont pris le marché du bambou en Europe ? Qu'est-ce qui se passe ?

  • Speaker #3

    Ils ont été à la présidence de l'Inbar. C'est quoi l'Inbar ? L'Inbar, c'est International Network for Bamboo and Rattan. C'est une organisation intergouvernementale qui doit avoir aujourd'hui 47 pays. C'est basé à Pékin, c'est financé en grande partie par la Chine. Ils siègent régulièrement à l'ONU. C'est des lobbyistes du bambou, en fait. Mais en même temps, ils ont des plans de financement pour les pays en voie de développement, notamment en Afrique, en Amérique du Sud et en Asie du Sud-Est, pour développer le bambou. C'est ce qui aide à supporter les nouvelles routes de la soie de Xi Jinping en fait. Mais c'est un avantage justement où ça améliore grandement la vie des gens autour du bambou. Cette organisation intergouvernementale a longtemps été présidée par des Hollandais. Et donc chaque fois qu'il y avait une nouvelle ressource qui naissait en Chine, et bien ils se la seront appropriées pour les Pays-Bas. Donc c'est comme ça qu'on a une boîte qui est depuis 25 ans en Europe, qui distribue tous les produits en bambou, le parquet en bambou, les planches en bambou, qui ont habillé l'aéroport de Madrid, parce qu'ils sont arrivés comme ça en fait. Dès qu'il y avait une piste à exploiter, elle est arrivée directement au pays.

  • Speaker #1

    Ça portait un milliard de produits de bambou ?

  • Speaker #3

    Ah oui, c'était jusqu'à très peu de temps, c'était tout via les Pays-Bas. Donc les produits arrivés aux Pays-Bas étaient revendus en France, et la France est un des plus gros acheteurs de bambou. Les filières bambou, il y a eu déjà des industriels qui ont pensé dans le sud-ouest, on a rencontré des gens, ingénieurs forestiers, qui avaient déjà fait du papier avec du bambou il y a 40 ans. Et ce qui manquait à l'époque, c'était le financement de départ, ce que le Crédit Carbone risque de permettre cette fois. Mais il y a déjà des gens qui ont pensé, il y a des gens qui avaient pensé la fameuse légende des bambous landais, les graines de bambou introduites par François Mitterrand. qui ont été jetés comme ça directement plein champ et qui n'ont pas fonctionné, mais il y a déjà des gens qui avaient pensé. Après une nouvelle tempête dans les Landes et des hectares et des hectares de pins accouchés, les sylviculteurs se sont dit, il y en a marre, il faut qu'on trouve autre chose. Et ils se sont dit, ils avaient l'image du bambou qui pousse les pieds dans l'eau, parce que l'idée du pin, c'est de pomper l'eau en fait, pour que ça ne redevienne pas un marécage. Et puis il est souple, si le vent souffle très fort, il ne cassera pas, comme le roseau de la fable de la fontaine. Et donc ils ont cherché à planter du bambou. Et ils ont obtenu, comme François Mitterrand avait une maison à Souston, Les gens disent que c'est dans la valise diplomatique qu'ils ont obtenu des graines de bambou. Et ils les ont mis directement dans les semoirs à maïs. Ils ne savaient pas comment ça fonctionnait. En fait, les graines de bambou, c'est très difficile à faire germer. Et ça doit être transplanté, en fait. Et là, non, ils ont mis en plein champ. Ils ont arrosé, ils ont tout noyé. Il y a eu 2% de succès, à peu près. On a des très belles bambouseries qui sont encore à Génie-les-Bains, à Morsence. Et puis des graines qui se sont envolées, qui sont allées se poser vraiment dans les endroits où ça leur convient. Il y a des bambous comme ça.

  • Speaker #1

    Voilà. Il y a un sujet très important, c'est ce qu'on appelle ce que les technocrates, tous les ministères créés par Dieu sur le carbone répètent en chœur, c'est l'additionnalité. C'est-à-dire que tu remplaces du maïs par du bambou, il y a une super additionnalité que tu peux te faire rémunérer. Si c'est du blé... par un amendier, il y a une additionnalité qu'on peut mesurer. Alors il y a des méthodes de mesure et de calcul, donc il faut quand même entrer dans le tuyau de ce truc-là pour obtenir les certifications. Donc ça veut dire que, d'abord, tu ne peux pas remplacer de la forêt par du bambou, parce que ce n'est pas de la sylviculture au regard de la liste des plantes autorisées par le ministère de l'Agriculture. Déjà, tu ne peux pas planter sur ce qui est classé forêt, sylviculture, bois, c'est comme une plante. Donc là, s'il y a eu du maïs, de la prairie, des cultures, ça, ça marche. Donc là, tu as de la bonne additionnalité. Alors, si tu remplaces du bois par du bambou... on va discutailler pendant longtemps au ministère. Donc, cette question, elle est très importante dans la stratégie de plantation pour vous. Quelle parcelle ou qu'est-ce qu'on convertit en bambou ou qu'est-ce qu'on ne convertit pas, qu'on garde pour autre chose, dans votre dispositif de culture et de sylviculture chez vous.

  • Speaker #2

    Nous on est producteurs de sapins de Noël et en parallèle on façonne du bois de chauffage en bûchette. Et là j'ai un collègue qui fait la même chose que moi sur le Morvan, un peu plus dans le sud. Aujourd'hui, vu le prix de l'électricité, on a une grosse série qui cherche à développer, on va dire, une usine biomasse pour fabriquer de l'électricité. Et là, il cherche, donc nous, lui, il a déjà négocié un marché de 5000 tonnes pour l'année, mais bon, il ne s'est pas trop engagé. Et nous, tous nos déchets qui sortent de notre combiné, on va les stocker. Et on va passer ça en biomasse.

  • Speaker #4

    Justement, c'est tout le défi de lancer une filière, c'est qu'il faut des gens à l'amont qui plantent, mais il faut que ces gens qui prennent le risque de planter puissent valoriser derrière. Et donc c'est toute la valeur ajoutée d'Horizome, c'est que sur les trois fondateurs, on est deux ingénieurs en matériaux. matériaux, bâtiments. Et donc on noue des partenariats avec les industriels pour justement valoriser au mieux la production. Et d'ailleurs dans notre business model, on s'aligne avec le producteur puisqu'on prend une commission sur tout ce qui va sortir de la bambouzette et donc on est aligné pour vendre au plus cher.

  • Speaker #0

    Horizon a déjà planté 15 hectares de bambous dans les Landes et le Gers déploie son expertise agronomique chez des agriculteurs pionniers partout en France. L'Europe commence à prendre le tournant du marché carbone pour le rendre accessible aux planteurs de bambousées. De plus en plus d'industries vont être tenues d'acheter des droits à polluer, entraînant une hausse du prix du carbone, faisant baisser d'autant l'investissement initial à la charge des agriculteurs. Ces conditions se mettent maintenant en œuvre pour faire émerger cette nouvelle agriculture qui permettra aux matières organiques de devenir cette matière première pour les industries qui remplacera peu à peu les produits du pétrole. Alors, il faut se retrousser les manches et les solutions sont bien là. Personne ne pourra tenir l'engagement de la neutralité carbone en 2050 sans planter massivement du bambou, une plante magique.

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