Speaker #0Je suis une femme de 49 ans. Je suis mariée, j'ai une grande fille de 18 ans et je suis issue d'une famille de 7 enfants, de 6 filles et un garçon. Bien sûr, il n'était pas le plus malheureux, bien au contraire. Alors, je suis assez rigolote. On a eu des parents très, très sévères puisqu'on n'élève pas des enfants, 7 enfants comme on élève 1 ou 2 enfants. Donc, on a été élevés à la dure. Nous, on était élevés dans le respect, dans la bienveillance. dans le travail. Et ça, c'est quelque chose que nos parents nous ont inculqué. Ils nous ont appris plein de choses. Le courage, parce que pour eux, c'est important. Et c'est ce que j'inculque encore à ma fille. Parce que moi, j'en ai qu'une, mais je lui inculque ça. Et la notion de travail. Ça, ça a été quelque chose qui a toujours été présent depuis mon enfance. Et aujourd'hui, moi, je me définis comme une battante. J'aime la franchise, l'honnêteté. Ça, ça a été quelque chose qui va faire partie de l'histoire qu'on va comprendre après. Pourquoi j'ai sombré ? Parce que c'est l'honnêteté qui a été quelque chose qui m'a perturbée violemment, on va dire. Moi, j'aime les choses organisées, structurées. Je suis très carrée, d'où je suis secrétaire comptable. Donc, j'aime bien les choses bien faites, bien carrées. C'est un défaut ou une qualité, je ne sais pas. Mais moi, c'est comme ça, j'aime bien les choses bien faites. et je suis très, très strict, mais envers moi également. Pas qu'envers les personnes, mais envers moi aussi. Et je suis très sensible. En fait, derrière ce caractère assez fort, il y a une carapace qui se forme, et on croit qu'on est durs, mais finalement, on ne l'est pas toujours. Donc, moi, j'ai rencontré mon mari sur mon lieu de travail. Comment on va dire ? Ça n'a pas été le coup de foudre tout de suite, ça a été beaucoup dans les échanges. On s'entendait très, très bien, on avait les mêmes principes, les mêmes valeurs, je pense. C'est pour ça qu'on s'entendait très, très bien. Lui, très très calme. Moi, je suis une petite pile, on va dire. Donc, il me canalise quand il faut. Donc, moi, j'étais secrétaire comptable, agent administratif. J'étais le tout dans une entreprise d'une vingtaine de personnes où j'étais l'unique femme dans un monde d'hommes avec des chauffeurs routiers. Donc, ça, ça a été terrible parce que... une petite femme d'un mètre soixante, 23 ans à l'époque, quand j'ai commencé, de se faire respecter par des chauffeurs rochers, qui n'ont pas des jeunes non plus, c'est des gens d'un certain âge quand même. Je travaille sur la région de Dakar Coase. Et je m'occupais de tout ce qui était chargement, déchargement, donc déchargement en matière première, chargement des produits finis. Donc j'étais en contact avec les chauffeurs tous les jours. S'il y avait un souci sur le terrain, je prenais mon casque et j'allais. Je me faisais respecter, bien respecter on va dire. J'ai bien réussi. Pourquoi ? Parce que je pense que mon père était un contre-maître. et il a toujours été respecté et je pense que c'est quelque chose que nous on a à l'intérieur de nous je pense que on l'a en héritage on va dire et puis un jour parce qu'au début nous n'avions pas dit que nous étions ensemble avec mon mari et un jour on a dû le dire pour avoir des congés sinon on les avait pas ensemble donc j'ai été voir mon supérieur il a mal vécu ça s'est pas bien passé puis on on a commencé à avoir des mésententes Donc moi, je ne supportais plus la situation. Je lui ai dit, écoute, je demande ma mutation groupe. J'avais déjà eu connaissance qu'il y avait un poste qui s'est libéré en 2019. Donc 22 ans après, je suis partie et j'ai quitté l'entreprise. Donc j'ai quitté mes repères, parce que pendant 22 ans, vous imaginez bien que vous avez des bons repères. Vous avez vos collègues qui, comme on peut dire, c'est comme une famille. C'est des gens avec qui vous travaillez tous les jours. J'adorais aussi ce contact avec ces chauffeurs routiers tous les matins. C'était un métier très, très prenant. Mais j'adorais. J'adorais. C'était ce que j'aimais. Mais je suis partie parce que je ne supportais plus la situation. Et puis, je pense que j'avais envie aussi d'autre chose. Et donc, je suis partie dans une entreprise du groupe. Et là, ça ne s'est pas bien passé. Pourquoi ? Parce que j'étais sous la couteau. Paul, de trois personnes qui m'ont pas bien acceptée. Je ne sais pas. Franchement, je ne sais pas. Donc moi, je suis arrivée, je ne connaissais pas du tout le métier. Donc on m'a dit qu'on allait me former. Le problème, c'est qu'on ne m'a pas donné toutes les informations au début parce que soi-disant qu'on n'avait pas le temps, etc. Et après, il y a eu une période très, très difficile où on avait tous les matins. Au café, on commençait par boire le café, donc on buvait le café, qui doit être un instant convivial. Pour moi, c'était un calvaire. Et on avait le droit à... « Ah, lui, tu te rends compte ? Il a dit ça ? » L'autre qui disait... « Oh, et puis elle pue, elle ! » Enfin, tous des trucs comme ça qui étaient pour moi insupportables. Je ne supportais plus. Et ça, tous les jours. à longueur de journée. Vous pouviez être dans votre bureau, tranquillement, en train de téléphoner à quelqu'un pour des renseignements ou des choses comme ça. Ça criait dans les couloirs, ça hurlait à longueur de journée. C'était pire que de travailler dans une industrie où vous aviez le bruit toute la journée, en fait. Le fait de parler sur le dos des gens, il n'y a pas l'honnêteté, il n'y a pas la franchise, voilà. C'était une horreur, enfin. Et la direction ne bougeait pas. À aucun moment, on s'est dit... Là, il y a un problème, ça va trop loin. Moi, quand j'ai entendu ça, j'ai dit, il n'y a plus de respect, c'est plus possible. Donc, je suis rentrée chez moi, j'en ai parlé à mon mari, parce que j'avais besoin, en fait, de lui en parler, parce que je gardais ça pour moi et, en fait, ça bouillonnait à l'intérieur. C'est ça, notre quotidien, c'est ça, c'est toujours rabaisser l'autre, en fait. Vous voyez, c'était un côté, je n'aimais pas ce côté-là, au lieu de dire, allez, viens, je te prends par la main, on y va et on va réussir ensemble. Non, non, alors que c'est l'image qui donnait. C'était l'image qui donnait et pas du tout celle qui est la réalité. L'image réelle, ce n'était pas celle-là. Mais là, ce n'était pas du tout l'image que moi j'avais vue de l'extérieur. Et quand vous êtes dedans, ce n'est plus du tout la même ambiance. Donc, les gens m'ont vue. Je ne vais pas mentir, quelques mois après, ils en ont parlé à mon mari puisque mon mari travaillait encore dans l'ancienne entreprise et qu'on avait contact. Ils demandaient mes nouvelles. Ils ont dit « on a vu qu'Aurélie n'était plus bien » . J'ai dit « mais par contre, il n'y a personne qui a bougé » . Et ça, ça a été quelque chose que je n'ai pas apprécié. Je suis arrivée en mai 2019, et en décembre 2019, j'avais déjà été demandée un rendez-vous avec une convocation pour faire un point. Donc déjà en décembre 2019, j'avais déjà cette appréhension d'aller au travail. En 2020, il y a une chose que des gens n'ont pas aimée, mais moi que j'ai appréciée énormément, c'est le confinement. Mars 2020, ça a été la plus belle période pour moi, parce qu'on a été plus de deux mois et demi, voire trois mois à la maison. Et là, j'ai retrouvé en fait l'apaisement, le calme, le respect. Je faisais mon travail comme je voulais à la maison, on était en télétravail. Donc, plus de contact, plus de bruit. Et là, c'était très, très bien. Et on a repris, je crois que c'était en juin ou juillet, fin juin, début juillet 2020, on a repris. Et là, ça a recommencé. malheureux. multiplié par 10, donc tout le temps, tout le temps, rebelote, jusqu'au jour où, en mars 2021, j'ai attrapé le Covid. J'ai quand même continué à travailler en télétravail. Je n'ai pas arrêté parce que j'avais le Covid, malgré que j'étais très très malade.
Speaker #0J'ai moi mon travail, je ne peux pas le perdre aujourd'hui, parce que c'est ça. Aujourd'hui, on ne travaille pas pour le plaisir, on travaille parce qu'on a une maison à payer, parce qu'on a des études. Moi, j'ai une fille de 18 ans, elle est aujourd'hui à Lille. Il faut payer le logement, il faut payer les études, il faut payer les assurances, tout ce qu'il faut. Donc, je ne pouvais pas me permettre de perdre mon boulot. et puis Quelques temps après, j'ai eu les vacances de juillet-août. C'était août, moi, puisque mon mari m'est eu juillet. Bien sûr, encore là, pour avoir des congés, c'était la galère. Au bout de deux ans. Du coup, j'ai dû prendre mes congés séparément. On l'a fait. Et puis, en septembre 2021, un matin, un lundi matin, je peux vous dire que ça faisait un moment que ça grouillait. Ça n'allait pas. J'ai devenu méchante. Je criais beaucoup. Ça, c'est les mots de ma fille. Ça, ça a été très, très dur de l'entendre, de me dire « Maman, je ne te parlais même plus parce que tu ne faisais que pleurer, que crier. » Et c'est un matin, un lundi matin, mon mari qui me dit « Ah, chou, tu sais où je peux trouver ce papier-là ? » Et là, j'ai explosé. J'ai été méchante. Je lui ai dit « Tu te démerdes, je m'en fous, tu ne me fais pas chier. » Et là, il m'a... Je le vois encore dans le tiroir de mon buffet de salle à manger, à me regarder et me dire « Mais qu'est-ce que tu as, toi ? » Je pose une question, une simple question, pour un papier qu'il avait besoin pour le travail. Je crois que c'était ça, je ne me souviens plus. Et là, quand il m'a dit ça, je l'ai regardé, je me suis effondrée parce que je me suis dit « Oh ! Mon Dieu ! » Mon mari me dit « Stop ! » Parce que c'est quelqu'un de gentil, en fait. Pourquoi tout d'un coup, il me dit, mais qu'est-ce que t'as ? Et là, je m'effondre. Je pleure, je pleure, je pleure, je pleure. Il me dit, mais qu'est-ce que tu as ? Je ne sais pas. Tu sais quoi ? Je ne veux plus aller travailler. Il me dit, ce n'est pas possible, ça, Oueli. Je lui dis, écoute, je ne suis pas bien. Je dis, ce boulot, je ne l'aime plus. Je ne me plais plus. qu'est-ce qu'il faut faire si « Peut-être appeler le médecin, non ? » Je dis « Ben, si tu veux. » Il me dit « Ben, écoute, tu sais ce que je vais faire ? » Je dis « Non. » Il me dit « Ben, je vais prendre le téléphone, puis je vais appeler ton médecin, puis on prend une urgence, un rendez-vous là. » Parce qu'il dit « Il y a quelque chose qui ne va pas bien. » Et puis, il m'accompagne, bien sûr. Le médecin traitant, c'est mon médecin de quand j'étais jeune, donc elle me connaît très, très bien. Donc, elle prend l'appel de Nicolas. qui est mon mari, il dit, j'appelle pour Aurélie. Puis là, elle a dit, oh là là, il y a un problème. Si son mari l'appelle, c'est qu'il y a un gros problème. Donc, il dit, Aurélie ne va pas bien. Elle pleure beaucoup. Donc, elle dit, vous venez tout de suite. Et quand je suis arrivée là-bas, le verdict tombe. Dépression émotionnelle. Qu'est-ce que c'est que ce truc ? Une maladie pour moi inconnue. Je ne connaissais pas du tout. Si, le mot dépression, je le connaissais. Mais dépression émotionnelle, je ne connaissais pas. Et là, à un moment, plusieurs médecins que j'ai rencontrés se sont demandé si c'était un burn-out ou une répression. Ils ne savaient pas dire lequel des deux, parce que ces deux maladies sont des maladies invisibles. En fait, vous entendez des choses qui ne vous concernent pas obligatoirement. Ce n'est pas obligatoirement... Vous n'êtes pas obligatoirement visé. C'est, comme je vous dis, des mots envers des autres, des anciens collègues. Tout ça... émotionnellement, je ne l'ai pas supporté. Moi, c'est comme ça que je la vois, parce que je ne me suis jamais vraiment posé la question, puisqu'on m'a dit qu'on me mettait des pressions émotionnelles, mais c'était vraiment mon émotion qui était mise à rude épreuve. Moi, j'ai rencontré le médecin du travail qui m'a dit que si ça n'allait pas, il fallait démissionner. Je lui dis « Mais non, pourquoi c'est à moi de partir alors que je ne me trouvais pas le problème ? Le problème ne venait pas de moi, il venait des autres personnes. » Moi, ce que j'aurais voulu, c'était qu'on me dise « On va régler ce problème-là et ça va calmer tout le monde. » Mais on n'a pas fait. Et là, ça a dégradé. Il y a d'autres personnes qui sont parties. C'est normal, c'est humain. En fait, vous êtes bien, vous avez l'impression d'être bien. Et à l'intérieur de vous, ça vous ronge, ça vous bouffe. Ça vous monte en colère. Après, il y a des gens, ils vont plus être se morfond. Moi, c'est plus la colère qui sortait, en fait. Cette façon, comme disait mon médecin traitant, une cocotte. Elle me montrait cette image de cocotte. Et puis, elle dit, la soupape, elle est quoi ? Et la soupape, elle a pété. Et donc, elle dit, on va arrêter cinq semaines, Aurélie. Je dis, ah bon ? Mais tu ne peux pas m'arrêter cinq semaines. Mais qu'est-ce que moi, je vais faire mon boulot ? Ah non, non, non, mais là, tu as dit, tu n'es pas capable d'aller travailler. Il faut absolument... Elle dit déjà se reposer. Et moi, je me suis dit, ah bon ? Elle m'a dit, mais ce n'est pas fini. Aurélie, il y en a pour minimum six mois. Il faut se recentrer sur soi. Et ce que j'ai fait, en fait ? Au début, ça a été quinze jours où elle m'a dit, on ne pense à plus rien et on se repose. Donc, je n'ai fait que dormir. Dormir, dormir, dormir. C'est la reconstruction, ils appellent ça. C'est de se poser, de se reposer. Ils disent toujours qu'il faut sortir, mais moi, je n'étais pas capable de sortir de chez moi. Tellement que j'avais honte de ce que j'avais. Parce que moi, j'avais honte d'être en dépression. Alors déjà, ça a été très long. Mon médecin traitant m'a fait... Parce que je ne l'acceptais pas, en fait. Elle m'a fait faire appel au CMP. C'est un organisme, je pense, avec des infirmières psychologues, etc. Et c'est une infirmière qui s'occupait de moi. Une belle personne. Et en fait, elle m'a dit, il n'y a que le fait d'en parler qui m'aidait en fait. D'en parler, d'en pleurer. Après, je ne sais pas, peut-être que tous les gens sont différents, mais moi, j'avais besoin de sortir. Et le fait que je n'arrivais pas à comprendre que ça pouvait m'arriver, c'était ça le pire. C'est qu'on m'a toujours dit, « Ah, tu es une femme forte, une battante, tu vas y arriver ! » Puis là, de se voir comme ça, à terre, parce que moi, je me suis trouvée à terre. C'est les mots que j'avais utilisés. À l'époque, à cette dame qui me dit « mais non, vous n'êtes pas à terre, vous êtes devant moi » . Et puis je la regarde, puis je me dis « ah ouais, vous avez raison » . « Mais oui, il y a des gens qui ne savent même plus se lever » . Et là, j'ai dit « ah ben c'est que j'ai quand même un peu plus de force » . Et donc en fait, c'est un travail de mois, d'années, parce que franchement, j'ai mis deux ans à m'en remettre. Et les gens disent « ah non, moi je pensais qu'en six mois, ça allait être… » . Non. Et quand elle m'a dit qu'il y avait des gens, ça faisait un an et demi qu'elle les suivait, j'ai dit un an et demi ? Et elle me dit, ça vous paraît énorme ? J'ai dit oui. Moi, je me suis dit, mais je ne me vois pas encore dans un an et demi, encore là, à cet âge-là en fait. Et puis, vous devez d'abord essayer de trouver le calme à l'intérieur de vous. Moi, c'était ça, puisque j'étais toujours dans l'énervement. J'avais besoin de trouver le calme. je passais mon temps temps à nettoyer ma maison. Ça, c'était quelque chose... Parce que je disais toujours ma maison propre, mon cerveau propre. Et elle me disait il faut sortir de chez vous, mais je n'arrivais pas à sortir de chez moi. C'est cette culpabilité d'être à l'arrêt alors que pour moi, je n'avais rien. En fait, pour moi, je n'avais rien. J'étais juste envie de pleurer et de rester chez moi. Et ce mot fainéant qui a été dur. dur d'entendre de la part de certaines personnes de votre entourage. Aujourd'hui, comment je la vois ma dépression ? Je l'ai acceptée. Je l'ai acceptée parce qu'on a le droit à des moments de faiblesse. On a le droit à être fatigué, on a le droit de ne pas être toujours au top. On est un être humain, on a des sentiments, on a un cerveau, on a le droit de dire stop, j'ai plus envie de ça en fait. Puis je n'ai pas eu de chance. Deux mois après qu'on me diagnostique ça, papa qui arrive d'urgence à l'hôpital. Et puis papa qui décède trois semaines après. Donc je ne vous dis pas, c'était le dernier survivant puisqu'on avait déjà perdu maman en 2010. Donc la galère, quand on est sept, vous imaginez bien que ça ne se passe pas toujours bien. Prendre des décisions à sept, ça a été terrible, terrible. Et pourtant, j'ai mené le combat. et en fait Ce qui m'a le plus aidée, je vais dire, c'est... Ma sœur de Lille, avec qui j'étais en binôme, parce qu'on a fait tous les paquets. Au début, on était ensemble quand papa était hospitalisé, mais bon, ma sœur, elle a eu des soucis de santé. Donc, je voulais la préserver. Je lui dis « je vais m'en occuper » . Elle me dit « tu dois penser à toi, parce que c'était la seule qui était au courant » . J'étais en arrêt maladie. Je ne l'ai pas dit à tous, je ne l'ai dit qu'à ma sœur, avec qui j'étais en binôme. Et puis, mon frère, qui m'ont fait confiance. dans toutes les décisions que j'ai prises pour papa, parce qu'à un moment, il fallait le faire hospitaliser, opérer. C'est tout moi qui ai pris les décisions, en urgence, puisque de toute manière, je ne pouvais pas commencer à appeler les sept. Ils m'ont aidée, sincèrement, parce qu'ils m'ont redonné confiance. Je n'avais plus confiance en moi. Je n'avais même plus prendre une décision chez moi. Qu'est-ce qu'on mange ce soir ? Je ne sais pas. Ça, ça a été difficile. Mais après, j'ai toujours été présente pour mon mari et ma fille. Ça, je me suis... même si c'était difficile de me lever le matin. je me levais à 6h avec ma fille. C'était eux, ma bouffée d'oxygène et ma force de me lever. Et puis mon papa, j'avais besoin de lui, il avait besoin de moi. Lui, il a été là aussi au début de ma dépression, moi j'en avais parlé. Je l'appelais tous les jours. Du coup, comme j'avais été en arrêt maladie, il y avait une assurance prévoyance du travail qui a fait appel à Prévia. Prévia, quand ils m'ont contactée, ça faisait un petit moment que j'étais à l'arrêt et papa venait de décéder. je crois deux ou trois mois après. Ça a commencé, je pense, en 2022, très bien. Et du coup, là, ils ont eu l'urgence, donc j'ai été très bien accompagnée. J'ai trouvé des gens formidables, même si je n'ai jamais rencontré physiquement. C'était toujours par téléphone, bien sûr, mais ils m'ont aidée, ils m'ont fait grandir aussi, parce que comme j'étais dans la colère, je voulais vengeance, en fait. On m'a donné de la sophrologie, je ne connaissais pas du tout. J'ai adoré. Même mon médecin traitant m'a dit « Aurélie, tu ne cesseras pas de méthode. » J'ai dit « Ben ouais. » J'ai dit « Écoute, j'aime bien la sophrologie finalement. » Et en fait, c'était ma bouffée d'oxygène, de tranquillité, c'était mon heure. J'étais vidée. À chaque fois qu'elle me disait « Qu'est-ce que vous en pensez ? » Je dis « Ben moi, je suis vidée. » En fait, j'arrivais à me enlever ce... Parce que dans votre cerveau, c'est plein, plein, plein, plein. et à vider au fur et à mesure. ce cerveau et avoir de l'espace de tranquillité, ce que je n'avais plus en fait. Pareil, j'ai eu 12 séances de sophrologie avec Prévia et 8 séances de psychologue, qui elle aussi a été formidable, je leur ai écrit encore. Et la psychologue, elle m'a demandé d'écrire tout ce que je ressentais. Ça a été un travail très difficile, ça a fait remonter des choses. Mais moi, je sais que quand je l'avais fait, je lui avais envoyé par mail, il y avait 9 pages ou 10 pages. Et elle m'a dit, c'était chronologie. J'étais partie du premier jour, en fait, et elle a vu la dégradation, en fait, sur les dix pages. Je ne sais plus, dix, neuf, neuf ou dix pages, elle a pris le temps de les lire. Ça aussi, c'est un cadeau qu'elle m'a fait. De toute façon, je lui ai dit, à un moment, on m'a demandé si vous deviez encore y retourner. Quel est le sentiment que vous auriez ? J'en avais deux. Il y en a un, je les aurais tous tués. Et le deuxième, c'est « je me serais effondrée, j'aurais pleuré, je me serais barrée » . J'étais incapable d'y aller. Le premier rendez-vous qu'on a eu grâce à Prévia, parce qu'on a demandé une rupture conventionnelle, je me dis « je ne veux pas les avoir en téléphone » . C'est Prévia qui a fait le nécessaire pour moi. Et heureusement, parce que j'aurais été même incapable de prendre mon téléphone et de les appeler. Et là, le premier rendez-vous, j'ai demandé hors de l'entreprise. Et la personne, quand elle m'a vue, parce que c'était le nouveau patron, puisque l'autre était parti en retraite entre deux, il avait bien compris ce qui se passait. Et il m'a dit, mais moi, j'étais là, Aurélie, j'ai bien vu ce qui se passait. Et je comprends bien pourquoi tu me demandes aujourd'hui une rupture conventionnelle que je vais accepter. De toute façon, moi, mon cerveau, je ne l'écoutais pas. Il a fait des dégâts sur mon corps. Et là, c'est pour ça qu'il faut l'écouter. Le corps, c'est ce qu'il disait. Maintenant, je l'écoute. Je ne vais pas mentir. dès que Le premier symptôme, parce qu'il sait où il doit taper pour que je commence à réagir. Et il tape au bon endroit quand il faut. Moi, on m'a dit un jour, tu as un sac de pierre sur le dos, il va falloir que tu l'enlèves. Et j'ai dit, c'est vrai. Finalement, c'est bien vrai. Il faudrait des fois, je vais te le donner. Comme ça, tu pourras le porter, tu verras. Après, il y a tout ça qui est difficile. Quand vous avez l'habitude de prendre les choses, vous les prenez. Vous avez l'habitude. Allez, vous êtes fortes. Voilà. Et ça, c'est l'image qu'on donne des gens qui sont forts. Elle va toujours se relever, ne vous inquiétez pas. Puis quand elle tombe, on dit « qu'est-ce qu'elle a ? » Mais on est un humain. Et un humain, à un moment, il en a marre. Et c'est pour ça d'ailleurs que j'ai changé de travail. parce que j'ai fait une reconversion professionnelle, J'ai été rechercher l'humain. Parce que quand je me suis occupée de papa, je me suis dit « purée, j'aime bien faire ça » . Et il m'a dit que je faisais ça bien. Et il m'a même dit « quoi, tu vas faire ça ? » . J'ai dit « ouais » . Oh, il dit « tu sais, les personnes âgées, il y en a, elles sont pénibles » . Eh bien, je lui ai dit « tu sais, le pire, il est là » . Alors, on dit « tu sais, papa » . Puis il a rigolé parce que c'était comme ça que j'aimais bien dédramatiser les choses. Encore aujourd'hui, dans mon métier d'ADVF, assistante de vie aux familles. Quand les gens ne vont pas bien, parce qu'on rencontre énormément de gens qui ne vont pas bien, ou seuls, parce que la dépression, il y en a, j'en ai. Je prends mon mal à patience et je les écoute, parce que c'est ça, l'écoute. Je n'ai pas de jugement à leur porter, parce que justement, je l'ai vécu, je ne jugerai pas. Pareil, j'ai eu des suicides autour de moi, parce que justement, moi, j'ai eu ces idées noires à un moment. Quand ça n'allait pas, je me disais, pour que ça s'arrête, qu'est-ce que je vais faire ? Un jour, j'ai pris ma voiture et j'ai dit, je vais me foutre en l'air, parce qu'on a envie que tout s'arrête. À un moment, on dit... Quand est-ce que ça va se stopper ? Quand est-ce que ça va arrêter ? En fait, c'est ça, on veut que ça s'arrête. Et les gens ne comprennent pas, en fait, votre cerveau, il est là. Et puis, c'est comme dans les dessins animés, ils le font bien, cette petite lumière rouge. Eh bien, elle est là. Et quand maintenant, elle commence à peine à s'allumer, je dis, oh lô lô lô lô lô, c'est pas bon. Et je leur dis aux gens, prenez le temps de parler et de vous reposer parce qu'il y a comme ça qu'on y arrive. Parler, voir des gens. compétents, parce qu'il faut voir aussi des gens compétents. Il ne faut pas croire qu'on n'est pas prêt à rechuter. Je pense qu'on peut rechuter un jour. Je pense qu'on peut rechuter un jour. C'est à nous d'écouter, d'écouter son corps et de dire, bon, là, il me dit qu'il faut que je fais trop, il faut que je m'arrête. Et aujourd'hui, je prends un peu plus de temps pour moi, ce que je ne faisais peut-être pas avant, justement, pour ne pas replonger dans ça et refaire, je ne vais pas dire l'enfer, parce que Ce n'est pas le mot qu'ils ont utilisé, mais je pense que ma famille proche, vous voir comme ça, ça ne doit pas être plaisant. Moi, je n'aimerais pas. Mais c'est pour ça que je voulais toujours être présente. Je faisais à manger, je m'occupais de ma maison. À partir du moment où je faisais quelque chose, je disais, je ne suis pas là sans rien faire. Je travaille un petit peu quand même. Puis je disais à mon mari, aujourd'hui, je n'ai rien foutu. Il dit, c'est bien. Et moi, je dis, ce n'est pas bien. si si c'est bien qu'il disait Et moi, je trouvais que ce n'était pas bien. Mais aujourd'hui, je n'ai rien foutu. J'aimais bien cette phrase. Je n'ai rien foutu, mais rien, rien, rien. Si, j'avais regardé la télé. Parce que justement, c'est ça aussi. Il faut prendre ces moments-là. Comme vous dites, aller boire un café avec une copine. Qu'est-ce que ça, c'est un bonheur que je ne prenais plus non plus. J'ai posé la question à mon mari et à ma fille. Je dis, voilà, j'ai une question. Quelle est la citation qui correspond le mieux à ma vie ? Et tout de suite, ma fille m'a dit « La vie, ce n'est pas d'attendre que l'orage passe, c'est d'apprendre à danser sous la pluie. » J'ai trouvé ça formidable. Parce qu'on se prend des coups, mais on se relève. C'est eux que j'ai choisis. J'ai choisi mon mari, et on a choisi de faire une belle galine. Et aujourd'hui, j'en suis tellement fière. Quel bonheur !