Speaker #1Merci Anaïs, merci Flo. Alors ça a été tout un chemin totalement inattendu. Nous étions avec Flo dans les derniers jours avant le bon attiré pour notre livre, puisque le 22 août 2024, en l'occurrence, était notre date objectif de sortie en librairie de notre petit dernier de notre tribu. Donc c'était mardi 25 juin, j'avais été opérée le mois d'avant de façon totalement improbable au niveau de l'intestin. Une opération qui déjà était intervenue quelques jours avant que je parte à Paris voir ma maison d'édition Erol. Donc quelque chose de très inattendu avec une grande urgence médicale. J'avais vu la gastro-entérologue le lundi, je devais partir à Paris le mercredi. Et là, elle me dit non, en fait, vous annulez tout et vous devez vous faire opérer dans les jours qui viennent. Donc là, j'ai eu une première urgence médicale à vivre, totalement inattendue. L'opération se fait. J'ai beaucoup de mal à remonter, à me remettre de cette opération, avec notamment un réveil très difficile. Donc ça, c'était fin mai. Et puis, mi-juin... Ça faisait déjà une dizaine de jours où j'avais une narine bouchée, sans rhinite, sans rhume, absolument aucun symptôme, je n'ai absolument pas été malade. Je fais beaucoup de mouchages de nez et puis ça ne passe pas, les nuits deviennent de plus en plus difficiles parce que dès que je m'allonge, j'ai vraiment cette obstruction de la respiration. Donc je dors très peu et à la fois avec Flo, nous sommes très concentrés sur... Ce bon intérêt qui arrive, et là deux semaines se passent, et je deviens de plus en plus fatiguée, je remarque que je perds du poids, sans comprendre pourquoi, parce que je n'ai aucun changement dans mon alimentation. Donc je me questionne, et à la fois on est dans cette joie extrême des dernières relectures, dans ce timing aussi à respecter. Donc je suis très très centrée sur le travail qui est l'un des grands piliers de mon équilibre. Et un matin, mon mari me dit, c'est plus possible en fait, tu n'as presque pas dormi cette nuit, tu n'arrives plus du tout à respirer, il se passe quelque chose. Donc je vais à la pharmacie pour essayer de leur demander s'ils n'auraient pas un petit produit pour déboucher ce nez, alors que j'essaie, je fais ce mouchage tous les jours avec la petite corne là, qui est le mouchage idéal, où ça passe vraiment d'une narine à l'autre. Et la pharmacienne me dit simplement, Aline, allez chez l'ORL. Bon, on est lundi matin, le bon a tiré le vendredi, j'ai bien autre chose dans la tête, il fait beau, il fait chaud, on est en petite robe légère, ce sont les premières chaleurs à Annecy. Et puis j'ai cette espèce d'intuition, je ne sais pas comment dire, je ne pourrais pas le décrire, vous savez ces choses, vous savez, vous savez qu'il se passe quelque chose. Donc ce n'est pas du tout à mon habitude, je pars à la clinique. Un jour, on devait déjeuner ensemble, Anaïs d'ailleurs, où tu étais venue à Annecy. Mais j'étais loin de m'imaginer ce qui m'attendait. Je pars à la clinique, je suis face à cette secrétaire au service ORL qui ne comprend absolument pas ma demande et qui me dit « Mais pour un ébouché, madame, je n'ai pas de rendez-vous dans la minute à vous donner. » Et moi, je sentais à l'intérieur de moi qu'il y avait cette espèce d'urgence à voir un médecin. Elle me donne un rendez-vous pour le lendemain, mon ORL est en déplacement. En congrès, elle me donne rendez-vous chez son confrère. Et là, le mardi 25 juin, j'arrive dans le bureau de consultation. Il met une caméra dans la narine gauche qui respire très bien. Tout est impeccable. Et là, il met la caméra dans la narine gauche. Non, droite. Je confonds, c'est là où c'est marrant. Mon cerveau oublie. Il met d'abord dans la narine gauche, qui respire très bien. Et là, il ressort la caméra. Et puis, il l'insère dans la narine droite. Et là, il se tait. Ce silence, c'est l'une des choses que je n'oublierai jamais. Ce silence qui doit durer quelques secondes, mais qui me paraît une éternité. Et il dit « Bon, et là j'ai compris. » À ce moment-là, et ça me remplit encore d'émotions plusieurs mois après, je comprends qu'il se passe quelque chose de grave. Mon esprit commence à partir, mon corps est dans la salle de consultation. Il m'invite à s'asseoir à nouveau sur le siège à côté de son bureau. Et là, un flot de paroles se met à sortir de sa bouche. Il me dit « Madame, il y a une tumeur, c'est soit bénin, soit cancéreux. » Et là, tout s'écroule. Je n'arrive pas à y croire. Ayant moi-même vécu avec une maman qui a eu un cancer du système lymphatique, un lymphome, un lymphome hotchkinien, quand j'avais 6 ans et qui s'est battu pendant 17 ans, avant de décéder quand j'étais jeune adulte, je me suis dit que ce n'est pas possible que je sois en train de vivre ce moment-là, ce moment tant redouté. Je me sens très seule dans cette salle de consultation. J'essaye de me concentrer sur ces mots. Tout va trop vite. Il m'explique toute la procédure. Je n'ai pas de cahier, moi qui ai toujours un petit carnet et des stylos de couleurs dans mon sac à main. Là, j'y suis allée en petite robe légère, en imaginant que j'avais une petite infection ou quelque chose, un virus. Mais loin de m'imaginer que ce serait une tumeur. Il me parle d'IRM, il me parle de biopsie, il me parle d'opération. Tout de suite, je lui dis non, non, non, ce n'est pas possible. Je ne peux pas me faire opérer, je me suis fait opérer il y a trois semaines, ça s'est très mal passé, c'est hors de question. Je ne me ferai pas opérer. Il me dit, madame, je crois que vous n'avez pas compris, je ne vous donne pas le choix. À nouveau, j'essaye de me concentrer sur chaque mot, sur sa bouche. Il me donne un papier, il me dit, dans trois jours, vous faites un IRM, vous savez ces rendez-vous pour lesquels d'habitude il y a six mois d'attente. Et là, dans trois jours, je vais avoir un rendez-vous. Il m'explique comment y aller au sein de la clinique. Tout ça dure quatre minutes chrono pour m'expliquer toute cette procédure, tant rodée de son côté, mais que moi j'entends pour la première fois. J'aurais aimé qu'il ait plus de temps. J'aurais aimé qu'il me le dise avec des mots doux. J'aurais aimé qu'il m'enveloppe de douceur. et d'empathie, plutôt que de me le dire avec un ton très robotisé. Je ressors, je suis complètement perdue. On est à la Clinique Générale d'Annecy, c'est tout petit. Et pourtant, j'ai deux étages à descendre et pourtant je me perds. Je suis complètement égarée, abasourdie. Je vais prendre le rendez-vous pour l'IRM. Et là, je vois au regard des femmes qu'il se passe quelque chose de grave. Vous savez, ce regard très profond dans les yeux. Elle ne parle pas, elle me donne juste ce rendez-vous, mais tout est dit dans le regard. Et là, je ressors, je suis complètement abasourdie. Je ne sais pas comment encore tenir debout. Je monte dans ma voiture, alors déjà, il faut que je retrouve ma voiture, parce que ça a commencé des jours où je n'ai jamais autant perdu ma voiture sur les parkings. Ça a bien duré 15 jours. J'appelle ma sœur. Il faut que je rentre vite parce qu'on a une session de travail avec Flo à 14h. Et pour Flo, il est trop tôt pour lui dire. Il est trop tôt parce qu'on a toute cette belle après-midi de travail. Et ça m'émeut encore d'en parler beaucoup. Cet après-midi que je vais encore dans la joie et l'insouciance, j'appelle ma sœur. Et je lui dis qu'ils ont détecté une tumeur qui peut-être soit bénigne, soit cancéreuse. Elle est choquée. Elle ne comprend pas pour le moment ce que je lui dis. Et à la fois, on a cette connexion tellement forte toutes les deux. que ces seuls mots suffisent pour partager notre détresse toutes les deux, pour que je dépose ma détresse, qu'elle la réceptionne avec tout son amour de grande sœur. Elle me demande de m'arrêter, parce qu'elle sent que je suis en train de conduire. Elle me demande de m'arrêter, et je trouve ça extraordinaire d'avoir cette première personne ressource que je peux appeler et auprès de qui je peux déposer, à peine... À peine, j'ai raccroché avec ma sœur tout de suite. J'appelle mon mari. Alors certes, c'est le moment du déjeuner, donc je prie pour qu'il ne soit pas en train de courir sur sa pause-déj et qu'il réponde un premier appel, un deuxième, un troisième, comme ça jusqu'à 20 appels et pas de réponse. C'est très dur parce que j'aurais vraiment, vraiment eu besoin d'entendre sa voix à ce moment-là. Cette voix qui me sécurise, cette voix qui me fait tant de bien quand je suis très agitée. Et c'est avec beaucoup d'impuissance que je raccroche au niveau de ces appels qui se trouvent sans réponse. Je rentre à la maison, évidemment, c'est le moment de déjeuner, mais je n'ai absolument pas faim. Et là, avant de retrouver Flo, où j'ai besoin de retrouver mon assise, mon ancrage, j'appelle, je fais vraiment appel à à ce village ressource, je trouve ça extraordinaire parce que finalement, cette annonce arrive à quelques jours de ce bon attiré de ce livre que l'on a écrit avec tout notre cœur, avec Flo, depuis septembre. Ce livre où l'on a transmis aux mères, c'est un livre à destination des mères, pour les inviter à inventer leur équilibre jour après jour, à inventer la mère qu'elles ont envie de devenir. et pendant tous ces mois d'écriture à plein temps bien sûr nous avons livré nos partages de mère, notre expertise en tant que consultante en parentalité et on a concocté toute une palette de délices enchanteurs pour que la mère puisse s'outiller au quotidien en fonction des expériences qu'elle traverse et aujourd'hui ce livre, lorsque je vis cette annonce, prend tout son sens et... automatiquement, je pense à cet outil du village ressources que l'on partage dès le début. Et après, ma sœur, je me dis, OK, de qui j'ai besoin dans ce village pour retrouver mon ancrage, pour retrouver Flo, pour me recentrer avant cette session de travail qui est si importante. Donc, j'appelle une autre amie, Sonia, qui est très pragmatique. Et je sais qu'elle va me faire redescendre sur terre, me réancrer et me faire redescendre dans le pratico-pratique sur les prochaines étapes. Elle me donne notamment un conseil merveilleux, qui est d'aller voir mon médecin généraliste. Parce que finalement, j'ai entendu toutes ces informations, ces mille informations en quatre minutes chrono, mais elles se sont déjà évaporées et je suis complètement perdue avec ça. C'est vrai que les médecins, c'est leur quotidien, c'est leur routine. Tout leur paraît évident. Alors même si chaque mot, tous ces mots techniques, IRM, etc., analyse de sang, biopsie, je les connais bien, puisque moi j'ai grandi avec tous ces mots. J'avais six ans quand... Tous ces mots sont arrivés dans ma vie et à la fois on les oublie très vite. Donc elle me permet de me ramener à la réalité et de prendre rendez-vous avec ce médecin généraliste qui je sais aura du temps à me consacrer pour m'expliquer et m'accompagner. Et puis j'ai également mon amie Charlotte qui est coach et qui sait, je sais qu'elle... J'allais y trouver dans cet espace-là. Elle a su reformuler mon vécu, me poser des questions pertinentes et me refaire prendre de la hauteur. Je prends le temps aussi d'appeler ma voisine Corinne, de qui je suis très proche. Je sens que mon circuit du stress avec l'annonce de ce matin est suractivé. Et j'ai vraiment besoin qu'on me prenne dans les bras. J'ai besoin de ce contact, de ce toucher physique, pour que mon corps s'apaise, que cette hormone de l'ocytocine soit libérée. Et c'est un moment particulièrement fort pour moi, pour me permettre d'être en lien avec Flo après. Quelques petits textos à Flo pour lui dire que je serai un petit peu en retard. Et à 14h30, notre session de travail reprend. On est à trois jours du bon à tirer. C'est la joie, l'insouciance. Jusqu'au vendredi matin où il y a l'IRM. Quelques minutes après qu'on commence à travailler avec Flo, il y a mon téléphone qui sonne. Alors d'habitude, il est éteint évidemment pendant nos sessions de travail, mais là je vois que c'est Tristan qui rappelle. Je lui demande quelques minutes, je la mets en mute évidemment, elle est au courant de rien. Et là Tristan, je lui expose ce qui s'est passé la matinée avec la découverte de la tumeur qui est soit bénigne, soit cancéreuse, et qu'on allait en parler ce soir. Que là, ce n'était pas le moment parce que j'étais en pleine session de travail. Alors évidemment pour lui c'est un choc et à la fois on est tous les deux au travail donc on sait qu'on aura cet espace ce soir pour se retrouver et en parler.