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Moi-même en français

Souvenirs d'un Devenir_Guglielmo Fernandez Garcia

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33min |14/02/2025
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33min |14/02/2025
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Description

"Je ne suis pas sûr de tout savoir sur moi..." m'a dit Guglielmo quand je lui ai parlé du podcast Moi-même en français.

Et justement, dans cet épisode il a accepté d'explorer son "lui-même" français avec moi. Il raconte ses premiers mois en France, dans une France post-attentats du Bataclan, dans une université bloquée et mobilisée face à la loi Travail. Comment apprendre quand il n'y a pas de cours ?

Mais son voyage en français ne s'est pas arrêté là : entre ses expériences radio et le lancement de son podcast, il a pu continuer à chercher et devenir lui-même !

Embarque avec lui dans ses souvenirs et ses réflexions pour réfléchir à tes propres défis en français et comment tu veux les affronter : comment gérer son accent "étranger" ? comment se perfectionner quand on n'a pas envie de méthodes scolaires ? comment gérer ce nouveau "moi" dans ton pays d'origine ?

Et le bonus : Guglielmo va t'apprendre une expression super authentique ! Allez, je te lance un défi : trouver la signification de l'expression sans dictionnaire ni IA ! Chiche ? 😋


🤔❓Tes questions à Allo Aliaé : https://www.speakpipe.com/MoiMemeEnFrancais.😌

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🌠Au fait, qui je suis MOI ? 😉 Alice Mansaud, coach de français, Neurolanguage coach®. Actuellement basée à Valencia en Espagne, j'accompagne les non-francophones partout dans le monde, depuis 2016.


📧Abonne-toi à la newsletter La Lettre du Moi(s) : une touche d'inspiration pour être et devenir toi-même en français - https://www.aliae.fr/inscription-lettre-du-moi-s


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • #Alice

    Moi-même en français. Le podcast pour être et devenir toi, même si le français n'est pas ta langue maternelle. Je suis Alice et aujourd'hui je te propose d'écouter les souvenirs d'un devenir. Ami·es non francophones, bienvenue dans la section Souvenirs d'un devenir, où j'échange avec des non francophones comme toi, qui apprennent le français comme toi, et qui sont devenu·es elles-mêmes en français comme toi. Comme d'habitude, je laisse cette question ouverte pour que tu puisses réfléchir à ta propre réponse. Alors aujourd'hui, je vais discuter avec Guglielmo. C'est un peu particulier parce que c'est une interview en direct, ce qui est la première fois que je fais une interview en direct, puisque d'habitude j'enregistre à distance. Et donc là, je vais littéralement tendre mon micro à mon invité. Guglielmo est italien, non francophone, dans le sens où le français n'est pas sa langue maternelle. qui a dû donc apprendre le français adulte. Bonjour et bienvenue, Guglielmo.

  • #Guglielmo

    Bonjour.

  • #Alice

    Alors, est-ce que, comme je le disais, on est en direct là tous les deux. Est-ce que tu peux décrire un petit peu la pièce où on est ? Pourquoi on est là tous les deux aujourd'hui ?

  • #Guglielmo

    Alors, on est à Pod'Paris, qui est un festival de podcast indépendant organisé par l'association BadGeek, qui est une association de podcasteurs et podcasteuses indépendants. Et on est dans une salle, comment il s'appelle le lieu ? La Bellevilloise, à Paris. Dans une salle, pas dans les salles principales, dans une salle à côté, avec plein de fauteuils, il y a plein de canapés. Il y a des objets un peu bizarres accrochés au mur, genre la tête d'une girafe, une tortue géante, un planisphère, et tous des objets comme ça. Mais c'est assez stylé.

  • #Alice

    Oui, effectivement, bonne description, avec un petit peu de verdure et des canapés qui ont l'air bien confortables. Merci beaucoup pour cette description est-ce que maintenant tu peux nous dire un peu pourquoi toi tu es venu à PodParis ?

  • #Guglielmo

    Je suis venu à PodParis parce que moi je suis un passionné de radio associative en général et de podcast et j'ai mon podcast qui s'appelle Azerty qui parle de société numérique mais on était là aussi pour rencontrer d'autres podcasts, faire des séances d'écoute en général rencontrer du monde,des choses comme ça

  • #Alice

    Ok, tu es le premier podcasteurs non francophones que j'interview. Donc, c'est quand même un parcours qui est assez exceptionnel, je dirais, de faire un podcast, de vraiment sortir ta voix en français dans un podcast, alors que ce n'était pas ta langue maternelle. Comment tu en es venu à cette étape de ta vie de lancer ce podcast AZERTY ?

  • #Guglielmo

    Alors, d'ailleurs, je faisais déjà d'autres podcast avant de première chose et deuxième chose pour moi clarifier dans ma démarche de podcast je n'ai fait pas de podcast pour mettre en avant ma voix ça c'est quelque chose qui est très personnel et peut-être n'a pas complètement à voir avec la langue mais pour moi la démarche que j'aime est surtout de tendre les micros à d'autres personnes et qui est du coup pour ça quelque part j'ai essayé toujours d'effacer un peu ma voix et au début quand j'ai commencé effectivement ça me faisait des complexes j'avais demandé à des gens surtout en radio qu'ils ont de métiers sont journalistes "Est-ce que c'est approprié ? Est-ce que mon accent n'est pas trop fort ?" Ou des choses comme ça. Et les réponses que j'ai eues, c'est « Ah non, déjà, c'est attachant l'accent italien » qui d'un côté, ça fait un peu… Ah, c'est bizarre, en même temps, je n'aimerais pas avoir de l'accent, mais je ne sais pas…

  • #Alice

    Tu veux dire que c'est ce que toi, tu as pensé quand on t'a fait ce retour, on t'a renvoyé l'image de « Mais oui, ton accent, il est mignon, il est joli, c'est attachant. » Toi, tu as pensé « Ah non, mince, ça veut dire qu'on entend mon accent. » C'est ça ?

  • #Guglielmo

    Oui un peu et j'ai toujours un rapport un peu ambivalent avec l'accent parce que d'un côté j'aimerais bien parler vraiment bien français et de l'autre côté je me rends de plus en plus compte que c'est important, c'est mes origines, c'est aussi ma façon de parler, c'est un peu spécial. Du coup c'est toujours un rapport un peu compliqué. Or la chose qui m'a poussé aussi c'est que les gens m'ont dit "écoute tu es complètement compréhensible en français et du coup ça c'est déjà suffisant et bien au contraire c'est beaucoup important de casser un peu les codes de la radio". C'est ça qu'on m'a dit à l'époque. En disant, "les accents sont beaux aussi par rapport à la voix lisse qu'on est habitué à entendre et la voix très formatée des fois dans certains médias".

  • #Alice

    Oui, bien sûr. Et puis c'est vrai qu'il peut y avoir aussi des représentations derrière certains accents. Et la représentation de l'accent italien en France, il va être très lié à un environnement artistique et culturel. Donc peut-être que ça passe bien aussi dans l'écosystème de la radio. Ce n'est pas la même chose que d'autres accents dans le monde ou même à l'intérieur de la France et de la francophonie. Il y a des accents qui ont des représentations moins prestigieuses, moins valorisées. Donc, effectivement, tu avais peut-être la chance, au moins que ce soit un accent italien, non ?

  • #Guglielmo

    Oui, et c'est intéressant. C'est un sujet sur lequel j'ai réfléchi depuis quelques mois. Je serais intéressé de savoir depuis quand c'est ça. Parce qu'à une époque, les Italiens en France n'étaient pas, comment dire, trop les bienvenus. Du coup, j'aimerais bien regarder un peu comment ça a changé la perception de l'italianité en France avec le temps. Je n'ai pas de réponse en ce moment. Mais avant, ce n'était pas comme ça, quoi.

  • #Alice

    Non, non, effectivement, en fait, merci. Tu viens de me faire me souvenir de mes propres origines. Mon arrière-grand-père était italien. Et effectivement, donc, mon grand-père qui portait son nom de famille... Quand ma grand-mère a rencontré mon futur grand-père, sa propre mère lui a dit « Attention, il est italien » .

  • #Guglielmo

    Voilà, voilà, un grand classique. Il y a certains stéréotypes qui restent aujourd'hui. Ce n'est pas complètement mort la chose, mais bon, ça va mieux.

  • #Alice

    Non, effectivement, je pense que c'est lié vraiment aussi à l'histoire de France, l'histoire de l'immigration en France. Alors, du coup, toi, quelle est… ton histoire d'immigration, d'émigration vers la France ?

  • #Guglielmo

    Moi, je suis arrivé en France pour faire une partie de ma thèse. C'était une thèse en sciences, en chimie physique. Et du coup, on m'a proposé à la fin de mes masters, je voulais faire une thèse à l'étranger. Et la chef de mon labo, Roberta Cessoli, à Florence, m'a proposé de faire une thèse en co-tutelle entre la France et l'Italie. Et d'ailleurs, une ville en France que moi, je n'avais jamais entendu parler, qui s'appelle Rennes. Et je ne savais même pas si Rennes était en Bretagne ou dans les Champagnes. Parce qu'en Italie, Reims, on dit [reims].

  • #Alice

    En espagnol aussi, effectivement, c'est [reims]. Pour Reims, la capitale du Champagne. Mais Rennes, la capitale bretonne.

  • #Guglielmo

    Voilà. Et après, j'ai rencontré un copain italien qui avait fait sa thèse à Rennes et qui m'avait dit, vas-y, c'est une ville trop bien. Vas-y, etc. Et du coup, j'arrive en France. La première fois, je pense, c'était décembre 2015. Et après, définitivement, janvier 2016, et du coup, j'arrive dans la France après attentat. Et déjà, c'était une ambiance un peu bizarre. Je me souviens, la première arrivée à l'aéroport, il y avait une alarme pour un colis qui pouvait être un attentat et des choses comme ça.

  • #Alice

    Je précise donc les attentats du Bataclan, c'est ça, ces attentats-là, d'accord, en 2015, ok.

  • #Guglielmo

    Voilà, voilà, voilà, du coup, je m'installe et j'avais fait seulement un cours de langue A1 avant en Italie. Du coup, j'étais à peine capable de dire « je m'appelle Guglielmo » . Stop. Et après, du coup, j'arrive à travers l'université pour étudier et bosser en France. Et du coup, j'ai commencé un cours de langue au CIREF, qui est le centre de langue de Rennes, de l'université de Rennes, pour la précision Rennes 2. Or, en 2016, il se passe quelque chose en France aussi.

  • #Alice

    Alors là, ça y est, je suis complètement collée. J'ai un gros blanc. Qu'est-ce qui s'est passé en 2016 ?

  • #Guglielmo

    La loi travail. La loi travail, j'étais à Rennes, l'université de Rennes 2, on l'appelle Rennes 2, "la Rouge", parce qu'à chaque fois qu'il y a quelque chose qui ne va pas, on la bloque. Et du coup, moi, j'arrive avec l'intention de faire un A2, B1, mais c'était impossible parce qu'à chaque fois, la fac était bloquée. Et du coup, je n'ai jamais vraiment appris le français en l'étudiant de façon scolaire. Parce qu'à l'époque, la fac était fermée, la seule chose que je pouvais faire, c'était aller dans les bars, boire des coups avec des gens, essayer de comprendre qu'est ce que les gens disaient. Du coup vraiment mon français s'est construit autour de ça. Après il y a une chose qui a aidé la qualité de mon français et qui à un moment donné j'ai trouvé une compagne en France qui était enseignante de FLE et pour éviter n'importe quel problème de couple on a fait un deal pour lequel elle n'allait pas m'apprendre le français mais on a passé une phase dans laquelle elle voulait apprendre l'italien du coup moi j'ai parlé italien, elle français. Et après, on a inversé. C'est-à-dire que moi, je lui parlais français, elle parlait italien. Alors, des fois, on ne comprenait pas la chose que l'autre disait, mais au moins, ça nous a permis, d'une façon un peu plus fluide et moins scolaire, d'apprendre le français.

  • #Alice

    D'accord. Donc, en gros, vous étiez dans une conversation, à la maison, au quotidien." Qu'est-ce qu'on fait à manger ce soir ?" Et il y en avait un qui posait la question en français ou en italien, et l'autre répondait dans l'autre langue, c'est ça ?

  • #Guglielmo

    Oui, voilà. Voilà, et après on demandait en anglais s'il y avait des mots que vraiment on ne comprenait pas. Et des fois, bon, alors les embrouilles à l'époque, on les faisait en anglais, parce que là, comme ça, on est sûr de se comprendre. Mais sinon, oui, il y avait souvent ce côté un peu bizarre de ce double dialogue italo-français. Après, l'italien et le français, c'est des langues relativement similaires. Du coup, on comprenait. Moi, les gens, ils étaient étonnés au début, parce que j'avais un vocabulaire très précis. Mais tout simplement parce que j'avais appris un... Comment on dit ? Pas les pièges, mais... les hacks du français, de prendre un mot italien et qui souvent se rend un peu français, ça ressemble beaucoup au mot français. Et du coup, il y avait des mots que les gens disaient, "comment tu fais pour connaître ces mots-là ?" Moi, je sais pas, j'ai appris le mot italien et je l'ai rendu un peu français, quoi.

  • #Alice

    Oui, effectivement, c'est un grand atout qu'il y a entre le français et l'italien qui sont des langues romanes. C'est qu'on peut transformer un peu. Et c'est vrai que pour les auditeurices qui nous écoutent, si vous avez une langue maternelle comme l'espagnol, le portugais, le roumain, le catalan, et que vous apprenez le français, il faut pas hésiter, à oser le mot avec le mot qui vient de votre langue et qui sonne français. On le francise un peu, voilà, en espagnol et en italien comme, je ne sais pas, nazione, nacion. En français, on va faire la nasale, le nez nation et ça passe, quoi. Ce n'est pas du vocabulaire très, très précis comme ce que tu devais utiliser. Mais en tout cas, je trouve que c'est super important de se dire qu'on peut oser, on peut essayer. Et puis en plus ça a l'avantage d'entraîner un peu le cerveau à faire une prononciation française et donc à observer comment les francophones parlent et essayer d'imiter et ça en plus ça va beaucoup aider pour la prononciation, l'accent qu'on peut avoir en français.

  • #Guglielmo

    Oui et pour moi il y avait aussi une autre chose à l'époque, je me refusais un peu de m'enfermer dans des cercles d'étrangers, c'est-à-dire que, soyons honnêtes, en vrai... tous les trois, en France on dit les Italiens et l'Espagnol, mais aussi c'est vrai pour les Français à l'étranger, on a la tendance à faire groupe un peu, parce que ça nous sort moins de la zone de confort. Et moi je m'étais dit, non, je vais vraiment essayer de vivre en France, et du coup, à mon boulot aussi on parlait que français, il y avait très peu d'étrangers dans mon labo de recherche, du coup, pour comprendre, c'était un peu nécessaire, et après oui, j'avais un peu une démarche d'esquiver toutes les situations dans lesquelles je voyais, ah, c'est entre expats. Je ne parle pas d'immigrés parce que les Italiens, je ne pense pas qu'on puisse le définir aujourd'hui "immigrés" en France. C'est plus des expats pour moi, parce qu'il faut rendre aussi d'autres peuples qui arrivent en France vraiment immigrés, avec un statut un peu différent. Et du coup, j'ai essayé d'esquiver un peu, oui c'est ça, le monde des expats. Et ça, je pense, ça a aidé un peu parce que j'ai socialisé en français plus rapidement.

  • #Alice

    La distinction que tu fais entre expats et immigrés, effectivement, c'est un grand sujet, je trouve, sur la mobilité internationale, parce qu'on va effectivement avoir plutôt les pays du Nord, des personnes qui viennent des pays du Nord, entre guillemets, occidentalisés, qui bougent sur la planète. On va les appeler des expats, mais par contre, quand quelqu'un qui vient d'Afrique vient en France, on va l'appeler un immigré. Et c'est comme tu le dis... C'est à la fois un peu injuste de faire cette différence, mais en même temps, c'est important de montrer qu'effectivement, y'a pas les mêmes enjeux pour une personne qui vient d'Afrique que pour quelqu'un qui vient d'Italie. Et une personne qui vient d'Afrique va avoir beaucoup plus de problématiques pour s'intégrer, va être racisée en France. Et ce qui n'a peut-être pas été ton cas, toi, quand tu as commencé à vivre en France. Mais justement, j'ai envie de te demander, quelle a été ton expérience dans ta sociabilisation en français en tant qu'Italien ?

  • #Guglielmo

    Oui, alors d'ailleurs, juste une chose sur la différence expat et immigré. Alors peut-être des militants, des coloniaux ou des sociologues pourraient me sauter dessus. Mais pour moi, la différence, c'est est-ce que la population qui arrive subit du racisme ou de la colonisation ou de la colonie en général ? Si c'est ça, pour moi, j'utilise immigré. Sinon, c'est des expats. Du coup, pour moi, la différence est vraiment liée à ça. Par rapport à ma socialisation en français, là, la question est un peu compliquée dans le sens où là, ça fait beaucoup de temps que je suis arrivé en France. Et il faut savoir que je suis reparti de la France aussi. Et du coup, j'ai eu une sorte de deux départs, deux fois. C'est-à-dire qu'après ma thèse, j'ai voyagé en Amérique latine. Non, je suis d'abord rentré en Italie. Après, j'ai voyagé en Amérique latine. Et après, je suis revenu en France. Du coup, c'est comme s'il y avait un premier temps en France et un deuxième temps. Et dans le premier temps, la socialisation, moi j'ai eu de la chance de rencontrer des gens très chouettes qui, du coup, ils venaient vers moi à travers le fait que je comprenais pas tout et qui, du coup, m'aidaient beaucoup. Et ça amenait aussi, je pense notamment à une personne, ça amenait beaucoup aussi à de l'humour autour de ça. Des fois, je comprenais pas si c'était un humour sur moi ou avec moi. Mais la majorité des fois, je pense vraiment à une personne, c'était de l'humour avec moi. Parce que je disais des choses qui n'avaient pas de sens et du coup, étaient rigolotes.

  • #Alice

    D'accord. Et donc, cette personne, justement, elle pouvait t'expliquer pourquoi c'était drôle, qu'est-ce qui faisait que c'était drôle en français de dire ce que t'avais dit ?

  • #Guglielmo

    Oui, oui, complètement, complètement. Après, il y avait toujours l'explication qui arrivait quand je voyais des choses bizarres, des choses comme ça. Oui, oui, bien sûr.

  • #Alice

    Tu as un exemple, une anecdote ?

  • #Guglielmo

    C'est ça le problème, ça a passé tellement de temps. Alors, il y a une anecdote, je pense que ça va revenir plus tard, c'est les proverbes.

  • #Alice

    D'accord. Qu'est-ce que tu veux dire ?

  • #Guglielmo

    Je veux dire que... il y a beaucoup de proverbes qui sont similaires entre l'italien et le français mais pas toutes. Et du coup, pas tous les proverbes. Du coup, des fois j'utilisais des expressions qui venaient de l'italien et qui n'avaient aucun sens en français. Et du coup ça les faisait rire. Et des fois j'essayais d'imiter des mots, des façons de dire françaises mais je les utilisais hyper mal et du coup ça menait à de l'humour quand on te comprend pas et tu essaies de réutiliser quelque chose que tu comprends pas, ça peut être drôle.

  • #Alice

    Oui, effectivement. Et comment tu as vécu ton processus d'apprentissage, c'est-à-dire vraiment cette évolution pour petit à petit passer d'un niveau A1 quand même, qui est extrêmement débutant, à aujourd'hui, cette capacité que tu as de t'exprimer avec une très grande fluidité, de travailler, être complètement, de vivre en français ?

  • #Guglielmo

    C'était toujours un rapport conflictuel, c'est-à-dire... qu'à chaque fois, je voulais m'y remettre à étudier le français. Mais au final, je vivais déjà en France et j'avais un niveau de vie qui était suffisant pour me faire comprendre et qui, du coup, ouais, il y avait ce conflit intérieur de « Ah, je devrais améliorer mon français. » Mais au final, je vis déjà bien. J'ai plein de choses. Je suis à Rennes. J'aime bien aller dans les bars. J'ai pas de besoin. Et du coup, je sais pas. Et ouais, du coup, pour des années, c'était un peu, il y avait ces deux choses d'un côté de dire, je l'apprends à travers la vie. Et de l'autre côté, ouais, mais ça serait bien quand même d'apprendre les règles de l'accord. Et de l'autre côté, ah mais l'accord, c'est chiant à étudier, c'est compliqué. Tu vois un peu ce que je veux dire ? Vraiment, il y avait ces doubles choses qui me tiraient de deux côtés.

  • #Alice

    Mais du coup, est-ce que tu as vraiment appris des règles ? Du coup, est-ce que tu as suivi des cours ou tu t'es plongé dans des bouquins ? Qu'est-ce que tu as fait alors pour améliorer ?

  • #Guglielmo

    Je n'ai jamais fait de cours parce que, comme je le disais, il n'y avait pas ces côtés-là. Je pense que la majorité, c'était commencer à lire, à lire en français, à regarder aussi, ah ouais, là, il y a eu un passage effectivement plus tard que ma langue s'est améliorée, ah YouTube aussi. Oui. Il faut savoir que par rapport à d'autres pays, le YouTube français est assez développé. Au niveau de vulgarisation scientifique, un peu comme celui anglais américain au niveau de essais politiques, de médias alternatifs. Il y a plein de choses sur le YouTube français. Et j'avoue que je pense que ça m'a beaucoup aidé en réfléchissant. Et après, les cinémas. Moi, j'aime bien le cinéma. Et du coup, à l'époque, j'allais souvent dans deux cinémas d'essais à Rennes. Et effectivement, je me rends compte qu'à l'époque, peut-être que je ne donnais pas beaucoup de poids à ça comme moyen d'améliorer ma langue. C'était pas ça l'objectif. Mais là, rétrospectivement, je me dis, ah oui, effectivement, tous les films français que je me suis tapé, ou tout simplement, tous les fois où mes copains voulaient voir, ou ma compagne de l'époque voulait voir un film en français ou un film avec des sous-titres français. Au final, je pense que ça a aidé. Merci Léa pour avoir insisté.

  • #Alice

    Mais effectivement, ce que tu dis, on voit bien la différence entre deux types d'apprentissage qui peuvent être tout à fait complémentaires. Et aussi, il peut y avoir des choix de la personne d'apprendre de telle ou telle manière. Et en fait, moi, quand je te pose la question, est-ce que tu as fait des cours ? Est-ce que tu as appris des règles ? Je me réfère à un apprentissage vraiment explicite où on va aller regarder comment est structurée la langue. On réfléchit à la syntaxe. On va faire exprès d'utiliser la langue juste pour l'apprendre. Et puis, il y a l'apprentissage implicite qui est ce que tu as fait en fait. Qui est l'apprentissage qu'on fait quand on est en immersion dans le pays, ou qu'on recrée de l'immersion, parce que des personnes qui vivent hors de France peuvent très bien se recréer de l'immersion en regardant des séries, des films, en écoutant des podcasts. Donc, effectivement, il y a cet apprentissage implicite qui est extrêmement puissant et qui n'est parfois pas toujours valorisé. Il y a des personnes qui vont se centrer sur un apprentissage explicite, faire des exercices. Alors que, comme tu le dis, ça peut être chiant, on n'a pas envie de le faire et donc il y a une démotivation qui vient avec ce type d'apprentissage. Alors qu'en fait, on peut aussi essayer d'apprendre de manière plus immersive, implicite.

  • #Guglielmo

    Là, je me suis souvenu aussi d'une autre chose. Tu m'as débloqué un souvenir qu'effectivement, le fait que j'avais des bouquins de langue française à la maison, même si je n'étais pas constant, mais que quand même j'avais les ressources qui étaient là présentes, même si je ne faisais pas de cours, même si je me souviens, je me suis souvenu là maintenant, que j'avais deux cahiers différents, que j'ai commencé en me disant, allez, là je me mets, je prends un bouquin, j'ai fait un cours, je suis le bouquin, j'ai fait tous les exercices, je vais m'améliorer. Jamais continuer plus de, je ne sais pas, quelques semaines, mais le fait de les avoir, de tenter plusieurs fois cette chose-là, je pense peut-être que s'est couplée à l'apprentissage implicite en donnant quelques bases de plus. Et récemment, j'augmente beaucoup le niveau, par contre, à travers toujours YouTube, toujours des films. Et je dois dire aussi, l'IA m'aide là récemment c'est-à-dire que...

  • #Alice

    L'intelligence artificielle, IA en français ?

  • #Guglielmo

    Oui, complètement. Parce que je l'utilise beaucoup pour le boulot. Et du coup, au final, des fois, quand je vois des choses complexes, je me fais aider. Par, genre,une IA s'appelle DeepL, de traduction. Et après, du coup, ça m'aide aussi à penser des formes en français qui, peut-être, je n'avais pas pensé. Voilà. #Alice Excellent. Effectivement, là, tu parles en plus d'un autre aspect qui est cette conscience qu'on a d'apprendre et qui est aussi très puissante quand on apprend pour s'améliorer. C'est, voilà, se dire, bah... En fait, là, je suis en train d'apprendre. Là, maintenant, je suis en train d'apprendre. Je peux m'améliorer. "Qu'est-ce que je vois dans cette phrase que je viens de traduire sur Deepl ? Qu'est-ce que je vois que je pourrais réutiliser dans d'autres cas ? Ah tiens, mais en fait, en italien, le verbe, on va le mettre à cet endroit-là, alors qu'en français, il va être à un autre endroit". Voilà, donc il y a des choses effectivement comme ça, simplement par la conscience qu'on a, qu'on est en train d'apprendre, et qui font énormément travailler le cerveau, donc ça peut être un peu fatigant, mais c'est très puissant. Oui. Après, au niveau biographique personnel, il y a vraiment la première phase que j'étais en Italie, comme je le disais, avant de repartir la première fois, j'étais plus observateur de la culture française aussi. C'est-à-dire, là, on parlait de la Loi Travail, et je me souviens que moi, j'ai aussi un petit côté militant, heu dans différents collectifs, dans des choses comme ça. J'arrivais en France, je ne connaissais pas le monde. Du coup, j'observais beaucoup ce qui s'est passé. Et je me sentais du coup un peu passif. Ce n'est pas que ça m'intéressait pas. C'est juste que je me sentais passif. Et la deuxième fois que je suis revenu en France, c'était un peu, bon, OK, on s'installe un peu, pour un petit moment. Et du coup, je suis devenu aussi plus actif dans des réseaux militants, dans des associations, dans des organisations. Et du coup, là, tu es un peu obligé, quoi. À un moment, tu veux, je sais pas... rentrer dans un collectif écologique, lancer un projet, je ne sais pas quoi, être tout simplement dans une asso de quartier, t'es un peu obligé de te faire comprendre par les gens. Et du coup, ça te pousse aussi à améliorer ta langue. Et effectivement, aussi dans l'apprentissage, quand j'étais passif, j'étais plus attentif à apprendre la langue. Et quand je me suis dit, je vais avoir une vie active, là, j'ai moins fait d'exercices, des choses comme ça. Je sais pas si tu vois un peu ce dualisme entre ces deux phases.

  • #Alice

    Tout à fait, effectivement. Et je pense que c'est très lié, comme tu l'as souligné, au fait que tu avais cette envie de t'installer, que tu sais que tu vas rester pour un petit moment et puis vraiment de participer à la vie de la société. Et quand tu parles de tes engagements, de tes intérêts, ça me fait penser aux thématiques de ton podcast où clairement, donc tu as parlé tout à l'heure du fait que c'était sur la société numérique. Mais moi, quand j'ai entendu, j'ai vu qu'il y avait beaucoup de hauteur, il y avait une mise en perspective par rapport effectivement aux impacts de la technologie dans notre société. Ça, c'est moi qui le dis, mais maintenant, j'aimerais que toi, tu dises pourquoi tu as fait ce podcast, pourquoi tu l'as monté.

  • #Guglielmo

    Wow, alors pourquoi j'ai monté AZERTY ? Je pense que AZERTY est né pour moi parce que je voyais autour de moi de nouvelles technologies comme par exemple l'intelligence artificielle et je voyais la difficulté qu'on a et que j'avais autour de moi... moi je travaille beaucoup avec les maths je travaille avec l'ordinateur et de les différents points de vue que je voyais autour de moi c'est à dire qu'il y avait des gens qui étaient plutôt facilement anti-tech des gens qui étaient un peu pro- tech "teubé" et du coup ça m'a toujours passionné à moi en plus moi je suis la génération qui a grandi avec l'arrivée d'internet et l'arrivée de numérique. Et du coup, je voyais un sujet intéressant, aussi d'un point de vue, entre guillements "militant", dans le sens de dire, il faut entamer ces sujets-là, il faut discuter de qu'est-ce que la technologie dit de nous, comment ça nous impacte, parce qu'il y a autour de moi, je voyais, beaucoup de gens qui disaient, ah mais ces sujets, c'est pour les geeks. Ces sujets, c'est pour les gens techniques. Et moi, j'étais là à dire, mais non, attends, ta vie est complètement impactée de comment tu utilises ton portable, de comment tu utilises Internet, qu'est-ce que Internet fait de toi, de tes données. Et les gens disaient, ouais, mais bon, ça, ça ne m'intéresse pas, ça me fait juste bader. Attends, peut-être qu'il y a un moyen de discuter de ces sujets-là. Et du coup, je me suis intéressé. En plus, moi, j'ai fait physique et chimie. J'ai fait chimie physique pour la précision dans mes études, mais j'hésitais beaucoup avec sociologie. Du coup, j'avais eu un intérêt, aussi sur ce qu'on appelle STS, Science Technology Studies, qui est la critique, la sociologie de la technologie. Du coup, je me suis dit, allez, voilà. Et en plus, j'étais toujours passionné de SF.

  • #Alice

    SF, science-fiction.

  • #Guglielmo

    Du coup, j'ai rencontré après Alex à travers la radio, qui est l'autre co-host. Et lui, il avait toujours plus ou moins la même passion. Moi, au début, je voulais faire un projet seulement sur l'intelligence artificielle. Et après, rapidement, il m'a convaincu à dire, il y a plein de sujets intéressants, allons-y. Et l'angle qu'on a choisi est vraiment... d'essayer de se poser des questions pour tout le monde. C'est pas vraiment un podcast de la tech pour des gens de la tech. Mon objectif, c'est de dire telle personne qui, normalement, n'est pas un geek ou une geek ou un nerd de ces choses-là, n'est pas passionné d'ordinateurs ou de jeux vidéo, ah ben voilà, cette personne-là a trouvé quelque chose d'intéressant et qui lui parle de son rapport à la technologie.

  • #Alice

    Est-ce que t'aurais lancé ce podcast en italien ?

  • #Guglielmo

    Alors, bonne question. Parce que c'est beau d'être en France. Je m'explique mieux. Le milieu radio italien et de podcasts de radio associative, par exemple, qui est une salle de sport incroyable pour apprendre à faire de l'audio, les radios associatives, n'existe pas autant qu'en France. Du coup, je pense qu'à l'époque 2008-2009, avec des copains, c'était un moment de mouvement social en Italie, une réforme de l'université plus la crise économique qui arrivait. On avait lancé un web radio, mais au final, on avait laissé tomber. Et je me rends compte que cette passion, je l'ai repris beaucoup d'années après parce que j'ai trouvé un terreau fertile. Du coup, je ne sais pas si je l'aurais lancé en italien, parce que peut-être j'aurais pas eu l'entourage autour de moi, l'envie, le fait de percevoir que c'est possible de le faire. Je sais pas si c'est clair ce que j'ai dit. C'est vraiment le fait qu'en Italie, je suis baigné beaucoup moins par ce genre d'initiatives. En France, je les ai trouvées assez facilement. Du coup, tu te dis "Allons-y, peut-être je peux le faire.".

  • #Alice

    Super, merci. Maintenant, c'est le moment de la question rituelle pour clore notre entretien. On a commencé un peu à en parler dans le cours de notre dialogue. Mais qu'est-ce que tu fais ou tu dis en français que tu ne peux pas faire ou dire en italien ?

  • #Guglielmo

    Et l'inverse ou seulement dans ce sens ?

  • #Alice

    Plutôt dans ce sens-là.

  • #Guglielmo

    Que je peux dire en français mais je ne peux pas dire en italien. #Alice Ou faire. #Guglielmo Ou faire. Alors ça c'est compliqué pour moi parce que comme je disais il y a plein de proverbes que ne se traduisent pas. Et certains oui. Du coup il y a des expressions que j'adore en français. Et que du coup à chaque fois je dois les expliquer. Du coup c'est pas quelque chose que je ne peux pas faire. Mais ça demande une action de plus, de l'expliquer. Comme notamment, "ah bah celui-là n'est pas le couteau le plus aiguisé du tiroir". C'est une expression que j'adore, je la trouve magnifique et je ne peux pas trop l'utiliser en italien. Du coup, voilà, c'est plus ça. Après, je répète, avec le fait que c'est deux langues similaires, j'ai un peu du mal à cibler une chose plus précise. C'est plus le problème des traductions.

  • #Alice

    D'accord, c'est vraiment centré sur la langue. Et puis, comme on l'a vu finalement, le fait de faire des... C'est ce que tu as dit tout à l'heure autour du podcast. Oui, tu l'as lancé en français, mais peut-être que tu l'aurais fait en italien. Mais ce n'est pas la langue qui pose problème ou qui incite à le faire. C'était vraiment plus l'environnement dans lequel tu te trouvais.

  • #Guglielmo

    Il y a une autre chose que je ne peux pas plus faire en italien : parler correctement italien. C'est-à-dire que, vu que ma compagne actuelle, Roberta, est italienne aussi, je suis toujours en contact avec beaucoup de copains italiens, mais je vis en France. Mon français n'est pas parfait, mais mon italien est contaminé, et mon français aussi, par l'autre langue, et étant de langues similaires. Et du coup, des fois, quand je rentre les premières semaines en Italie, mes copains, mais ils se foutent de ma gueule, mais un point pas possible, parce que je ne parle pas vraiment italien. Je parle la langue que j'ai inventée entre l'italien et le français. Et du coup, je ne peux plus parler correctement l'italien. Ça, c'est pas mal. Oui, effectivement. Super, c'est hyper intéressant de voir un peu cette douleur qu'on peut avoir, mais qui n'est pas une fatalité, parce que, comme tu dis, c'est aussi une question d'acclimatation. Et au bout d'un certain temps, j'imagine que ton italien revient, même s'il y a toujours un peu des petites nuances, des petites touches, comme des petits coups de pinceau de français, j'imagine.

  • #Alice

    Voilà, oui, complètement. Après, je ne sais pas parce que je ne rentre généralement que quelques semaines et du coup, je ne dépasse jamais le temps d'adaptation. Mais oui, je pense, oui. Si je redéménageais en Italie, probablement, oui, l'italien revient. J'espère !

  • #Guglielmo

    Alors, Guglielmo, avant qu'on se quitte, j'ai quand même un dernier, j'ai un petit cadeau pour toi et je suis très heureuse de pouvoir le faire parce que comme d'habitude, on est à distance, je ne peux pas faire de cadeau à mes invité·es. Mais voilà, je t'offre ce marque-page, du podcast Moi-même en français. Sur ce marque-page, il y a une citation. Est-ce que tu peux nous la lire ?

  • #Alice

    Merci déjà pour le marque-page. "J'accepte la grande aventure d'être moi."

  • #Guglielmo

    Qu'est-ce que ça t'inspire ?

  • #Alice

    La chose que ça m'inspire, ce n'est pas lié à la langue. C'est lié plutôt à soi-même. Moi, je dis tout le temps comme blague, que j'ai décidé de prendre toute ma vie pour essayer de comprendre qui je suis. Et du coup, "j'accepte cette grande aventure..." pour moi,'est pas juste lié à la langue. Après, c'est vrai que pour moi, il y a deux Guglielmo. Il y a le Guglielmo français et super-imposé, il y a légèrement différent le Guglielmo italien. Je n'arrive pas à avoir le même humour, le même humorisme. Je fais encore plus de blagues en italien. Et je n'arrive pas des fois en français. Ou si j'essaye, ça ne passe pas. Ce n'est pas drôle. Du coup, c'est comme s'il y avait deux "moi" un peu différents, avec de petits détails différents. Du coup, voilà, c'est ça que m'inspire cette phrase, d'accepter le fait d'être double. Et que je vais passer toute ma vie à essayer de comprendre qui je suis déjà. C'est pas mal. Quand on préparait cet entretien, tu m'as dit quelque chose comme « je suis pas sûr de tout savoir sur moi » .

  • #Guglielmo

    Voilà, c'est exactement ça. Et qui est sûr, eh bah bravo hein !

  • #Alice

    Oui, effectivement. Et je pense que Simone de Beauvoir, puisque c'est elle qui a écrit ça, je pense que c'est un peu ce qu'elle voulait transmettre, qu'effectivement, c'est toute une aventure de se trouver, de savoir qui on est. Et en plus... sachant qu'on va beaucoup évoluer donc on saura peut-être jamais vraiment qui on est. En tout cas je me suis beaucoup retrouvée dans ta propre définition et comment tu as lu cette citation merci beaucoup . #Guglielmo Merci à toi. C'est la fin de cet épisode parce qu'on doit maintenant laisser la place à un atelier qui se tient pour ce festival de Pod'Paris. J'étais vraiment mais enchantée de là je pense que c'est un peu mon influence espagnole parce que "estoy encatada!", je suis enchantée de t'avoir rencontré Guglielmo, et d'avoir fait cet épisode dans ce cadre assez exceptionnel. Donc, c'était une super première expérience pour moi. Merci beaucoup d'avoir accepté mon invitation. #Guglielmo : Et merci à toi pour l'invitation. Ami·es non francophones, merci et bravo d'avoir suivi cet épisode jusqu'au bout. Moi, je pense que tu peux vraiment être fier/fière, surtout que Guglielmo a vraiment des expressions très françaises. Il parle un peu de verlan, il sort des proverbes en français. Je pense que je ferai une petite note dans l'article de blog qui accompagne l'épisode, peut-être pour traduire certaines petites choses. Enfin, pas traduire, mais réexpliquer. Par exemple, la super expression « c'est pas le couteau le plus aiguisé du tiroir » . J'espère que son parcours t'a inspiré·e et te donnera envie de poursuivre ton propre chemin pour être et devenir toi-même en français. Pour recevoir plus de conseils, d'idées, de ressources, tu peux t'abonner à ma newsletter, La Lettre du mois. À la prochaine !

  • #Guglielmo

    Salut à tout le monde, à la prochaine !

  • #Alice

    Et voilà, c'était Moi-même en français, un podcast d'Aliahe, conçu et présenté par Alice Mansaud. Retrouve tous les épisodes sur le site aliae.fr et partage tes commentaires sur le blog. À toi de jouer !

Description

"Je ne suis pas sûr de tout savoir sur moi..." m'a dit Guglielmo quand je lui ai parlé du podcast Moi-même en français.

Et justement, dans cet épisode il a accepté d'explorer son "lui-même" français avec moi. Il raconte ses premiers mois en France, dans une France post-attentats du Bataclan, dans une université bloquée et mobilisée face à la loi Travail. Comment apprendre quand il n'y a pas de cours ?

Mais son voyage en français ne s'est pas arrêté là : entre ses expériences radio et le lancement de son podcast, il a pu continuer à chercher et devenir lui-même !

Embarque avec lui dans ses souvenirs et ses réflexions pour réfléchir à tes propres défis en français et comment tu veux les affronter : comment gérer son accent "étranger" ? comment se perfectionner quand on n'a pas envie de méthodes scolaires ? comment gérer ce nouveau "moi" dans ton pays d'origine ?

Et le bonus : Guglielmo va t'apprendre une expression super authentique ! Allez, je te lance un défi : trouver la signification de l'expression sans dictionnaire ni IA ! Chiche ? 😋


🤔❓Tes questions à Allo Aliaé : https://www.speakpipe.com/MoiMemeEnFrancais.😌

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🌠Au fait, qui je suis MOI ? 😉 Alice Mansaud, coach de français, Neurolanguage coach®. Actuellement basée à Valencia en Espagne, j'accompagne les non-francophones partout dans le monde, depuis 2016.


📧Abonne-toi à la newsletter La Lettre du Moi(s) : une touche d'inspiration pour être et devenir toi-même en français - https://www.aliae.fr/inscription-lettre-du-moi-s


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • #Alice

    Moi-même en français. Le podcast pour être et devenir toi, même si le français n'est pas ta langue maternelle. Je suis Alice et aujourd'hui je te propose d'écouter les souvenirs d'un devenir. Ami·es non francophones, bienvenue dans la section Souvenirs d'un devenir, où j'échange avec des non francophones comme toi, qui apprennent le français comme toi, et qui sont devenu·es elles-mêmes en français comme toi. Comme d'habitude, je laisse cette question ouverte pour que tu puisses réfléchir à ta propre réponse. Alors aujourd'hui, je vais discuter avec Guglielmo. C'est un peu particulier parce que c'est une interview en direct, ce qui est la première fois que je fais une interview en direct, puisque d'habitude j'enregistre à distance. Et donc là, je vais littéralement tendre mon micro à mon invité. Guglielmo est italien, non francophone, dans le sens où le français n'est pas sa langue maternelle. qui a dû donc apprendre le français adulte. Bonjour et bienvenue, Guglielmo.

  • #Guglielmo

    Bonjour.

  • #Alice

    Alors, est-ce que, comme je le disais, on est en direct là tous les deux. Est-ce que tu peux décrire un petit peu la pièce où on est ? Pourquoi on est là tous les deux aujourd'hui ?

  • #Guglielmo

    Alors, on est à Pod'Paris, qui est un festival de podcast indépendant organisé par l'association BadGeek, qui est une association de podcasteurs et podcasteuses indépendants. Et on est dans une salle, comment il s'appelle le lieu ? La Bellevilloise, à Paris. Dans une salle, pas dans les salles principales, dans une salle à côté, avec plein de fauteuils, il y a plein de canapés. Il y a des objets un peu bizarres accrochés au mur, genre la tête d'une girafe, une tortue géante, un planisphère, et tous des objets comme ça. Mais c'est assez stylé.

  • #Alice

    Oui, effectivement, bonne description, avec un petit peu de verdure et des canapés qui ont l'air bien confortables. Merci beaucoup pour cette description est-ce que maintenant tu peux nous dire un peu pourquoi toi tu es venu à PodParis ?

  • #Guglielmo

    Je suis venu à PodParis parce que moi je suis un passionné de radio associative en général et de podcast et j'ai mon podcast qui s'appelle Azerty qui parle de société numérique mais on était là aussi pour rencontrer d'autres podcasts, faire des séances d'écoute en général rencontrer du monde,des choses comme ça

  • #Alice

    Ok, tu es le premier podcasteurs non francophones que j'interview. Donc, c'est quand même un parcours qui est assez exceptionnel, je dirais, de faire un podcast, de vraiment sortir ta voix en français dans un podcast, alors que ce n'était pas ta langue maternelle. Comment tu en es venu à cette étape de ta vie de lancer ce podcast AZERTY ?

  • #Guglielmo

    Alors, d'ailleurs, je faisais déjà d'autres podcast avant de première chose et deuxième chose pour moi clarifier dans ma démarche de podcast je n'ai fait pas de podcast pour mettre en avant ma voix ça c'est quelque chose qui est très personnel et peut-être n'a pas complètement à voir avec la langue mais pour moi la démarche que j'aime est surtout de tendre les micros à d'autres personnes et qui est du coup pour ça quelque part j'ai essayé toujours d'effacer un peu ma voix et au début quand j'ai commencé effectivement ça me faisait des complexes j'avais demandé à des gens surtout en radio qu'ils ont de métiers sont journalistes "Est-ce que c'est approprié ? Est-ce que mon accent n'est pas trop fort ?" Ou des choses comme ça. Et les réponses que j'ai eues, c'est « Ah non, déjà, c'est attachant l'accent italien » qui d'un côté, ça fait un peu… Ah, c'est bizarre, en même temps, je n'aimerais pas avoir de l'accent, mais je ne sais pas…

  • #Alice

    Tu veux dire que c'est ce que toi, tu as pensé quand on t'a fait ce retour, on t'a renvoyé l'image de « Mais oui, ton accent, il est mignon, il est joli, c'est attachant. » Toi, tu as pensé « Ah non, mince, ça veut dire qu'on entend mon accent. » C'est ça ?

  • #Guglielmo

    Oui un peu et j'ai toujours un rapport un peu ambivalent avec l'accent parce que d'un côté j'aimerais bien parler vraiment bien français et de l'autre côté je me rends de plus en plus compte que c'est important, c'est mes origines, c'est aussi ma façon de parler, c'est un peu spécial. Du coup c'est toujours un rapport un peu compliqué. Or la chose qui m'a poussé aussi c'est que les gens m'ont dit "écoute tu es complètement compréhensible en français et du coup ça c'est déjà suffisant et bien au contraire c'est beaucoup important de casser un peu les codes de la radio". C'est ça qu'on m'a dit à l'époque. En disant, "les accents sont beaux aussi par rapport à la voix lisse qu'on est habitué à entendre et la voix très formatée des fois dans certains médias".

  • #Alice

    Oui, bien sûr. Et puis c'est vrai qu'il peut y avoir aussi des représentations derrière certains accents. Et la représentation de l'accent italien en France, il va être très lié à un environnement artistique et culturel. Donc peut-être que ça passe bien aussi dans l'écosystème de la radio. Ce n'est pas la même chose que d'autres accents dans le monde ou même à l'intérieur de la France et de la francophonie. Il y a des accents qui ont des représentations moins prestigieuses, moins valorisées. Donc, effectivement, tu avais peut-être la chance, au moins que ce soit un accent italien, non ?

  • #Guglielmo

    Oui, et c'est intéressant. C'est un sujet sur lequel j'ai réfléchi depuis quelques mois. Je serais intéressé de savoir depuis quand c'est ça. Parce qu'à une époque, les Italiens en France n'étaient pas, comment dire, trop les bienvenus. Du coup, j'aimerais bien regarder un peu comment ça a changé la perception de l'italianité en France avec le temps. Je n'ai pas de réponse en ce moment. Mais avant, ce n'était pas comme ça, quoi.

  • #Alice

    Non, non, effectivement, en fait, merci. Tu viens de me faire me souvenir de mes propres origines. Mon arrière-grand-père était italien. Et effectivement, donc, mon grand-père qui portait son nom de famille... Quand ma grand-mère a rencontré mon futur grand-père, sa propre mère lui a dit « Attention, il est italien » .

  • #Guglielmo

    Voilà, voilà, un grand classique. Il y a certains stéréotypes qui restent aujourd'hui. Ce n'est pas complètement mort la chose, mais bon, ça va mieux.

  • #Alice

    Non, effectivement, je pense que c'est lié vraiment aussi à l'histoire de France, l'histoire de l'immigration en France. Alors, du coup, toi, quelle est… ton histoire d'immigration, d'émigration vers la France ?

  • #Guglielmo

    Moi, je suis arrivé en France pour faire une partie de ma thèse. C'était une thèse en sciences, en chimie physique. Et du coup, on m'a proposé à la fin de mes masters, je voulais faire une thèse à l'étranger. Et la chef de mon labo, Roberta Cessoli, à Florence, m'a proposé de faire une thèse en co-tutelle entre la France et l'Italie. Et d'ailleurs, une ville en France que moi, je n'avais jamais entendu parler, qui s'appelle Rennes. Et je ne savais même pas si Rennes était en Bretagne ou dans les Champagnes. Parce qu'en Italie, Reims, on dit [reims].

  • #Alice

    En espagnol aussi, effectivement, c'est [reims]. Pour Reims, la capitale du Champagne. Mais Rennes, la capitale bretonne.

  • #Guglielmo

    Voilà. Et après, j'ai rencontré un copain italien qui avait fait sa thèse à Rennes et qui m'avait dit, vas-y, c'est une ville trop bien. Vas-y, etc. Et du coup, j'arrive en France. La première fois, je pense, c'était décembre 2015. Et après, définitivement, janvier 2016, et du coup, j'arrive dans la France après attentat. Et déjà, c'était une ambiance un peu bizarre. Je me souviens, la première arrivée à l'aéroport, il y avait une alarme pour un colis qui pouvait être un attentat et des choses comme ça.

  • #Alice

    Je précise donc les attentats du Bataclan, c'est ça, ces attentats-là, d'accord, en 2015, ok.

  • #Guglielmo

    Voilà, voilà, voilà, du coup, je m'installe et j'avais fait seulement un cours de langue A1 avant en Italie. Du coup, j'étais à peine capable de dire « je m'appelle Guglielmo » . Stop. Et après, du coup, j'arrive à travers l'université pour étudier et bosser en France. Et du coup, j'ai commencé un cours de langue au CIREF, qui est le centre de langue de Rennes, de l'université de Rennes, pour la précision Rennes 2. Or, en 2016, il se passe quelque chose en France aussi.

  • #Alice

    Alors là, ça y est, je suis complètement collée. J'ai un gros blanc. Qu'est-ce qui s'est passé en 2016 ?

  • #Guglielmo

    La loi travail. La loi travail, j'étais à Rennes, l'université de Rennes 2, on l'appelle Rennes 2, "la Rouge", parce qu'à chaque fois qu'il y a quelque chose qui ne va pas, on la bloque. Et du coup, moi, j'arrive avec l'intention de faire un A2, B1, mais c'était impossible parce qu'à chaque fois, la fac était bloquée. Et du coup, je n'ai jamais vraiment appris le français en l'étudiant de façon scolaire. Parce qu'à l'époque, la fac était fermée, la seule chose que je pouvais faire, c'était aller dans les bars, boire des coups avec des gens, essayer de comprendre qu'est ce que les gens disaient. Du coup vraiment mon français s'est construit autour de ça. Après il y a une chose qui a aidé la qualité de mon français et qui à un moment donné j'ai trouvé une compagne en France qui était enseignante de FLE et pour éviter n'importe quel problème de couple on a fait un deal pour lequel elle n'allait pas m'apprendre le français mais on a passé une phase dans laquelle elle voulait apprendre l'italien du coup moi j'ai parlé italien, elle français. Et après, on a inversé. C'est-à-dire que moi, je lui parlais français, elle parlait italien. Alors, des fois, on ne comprenait pas la chose que l'autre disait, mais au moins, ça nous a permis, d'une façon un peu plus fluide et moins scolaire, d'apprendre le français.

  • #Alice

    D'accord. Donc, en gros, vous étiez dans une conversation, à la maison, au quotidien." Qu'est-ce qu'on fait à manger ce soir ?" Et il y en avait un qui posait la question en français ou en italien, et l'autre répondait dans l'autre langue, c'est ça ?

  • #Guglielmo

    Oui, voilà. Voilà, et après on demandait en anglais s'il y avait des mots que vraiment on ne comprenait pas. Et des fois, bon, alors les embrouilles à l'époque, on les faisait en anglais, parce que là, comme ça, on est sûr de se comprendre. Mais sinon, oui, il y avait souvent ce côté un peu bizarre de ce double dialogue italo-français. Après, l'italien et le français, c'est des langues relativement similaires. Du coup, on comprenait. Moi, les gens, ils étaient étonnés au début, parce que j'avais un vocabulaire très précis. Mais tout simplement parce que j'avais appris un... Comment on dit ? Pas les pièges, mais... les hacks du français, de prendre un mot italien et qui souvent se rend un peu français, ça ressemble beaucoup au mot français. Et du coup, il y avait des mots que les gens disaient, "comment tu fais pour connaître ces mots-là ?" Moi, je sais pas, j'ai appris le mot italien et je l'ai rendu un peu français, quoi.

  • #Alice

    Oui, effectivement, c'est un grand atout qu'il y a entre le français et l'italien qui sont des langues romanes. C'est qu'on peut transformer un peu. Et c'est vrai que pour les auditeurices qui nous écoutent, si vous avez une langue maternelle comme l'espagnol, le portugais, le roumain, le catalan, et que vous apprenez le français, il faut pas hésiter, à oser le mot avec le mot qui vient de votre langue et qui sonne français. On le francise un peu, voilà, en espagnol et en italien comme, je ne sais pas, nazione, nacion. En français, on va faire la nasale, le nez nation et ça passe, quoi. Ce n'est pas du vocabulaire très, très précis comme ce que tu devais utiliser. Mais en tout cas, je trouve que c'est super important de se dire qu'on peut oser, on peut essayer. Et puis en plus ça a l'avantage d'entraîner un peu le cerveau à faire une prononciation française et donc à observer comment les francophones parlent et essayer d'imiter et ça en plus ça va beaucoup aider pour la prononciation, l'accent qu'on peut avoir en français.

  • #Guglielmo

    Oui et pour moi il y avait aussi une autre chose à l'époque, je me refusais un peu de m'enfermer dans des cercles d'étrangers, c'est-à-dire que, soyons honnêtes, en vrai... tous les trois, en France on dit les Italiens et l'Espagnol, mais aussi c'est vrai pour les Français à l'étranger, on a la tendance à faire groupe un peu, parce que ça nous sort moins de la zone de confort. Et moi je m'étais dit, non, je vais vraiment essayer de vivre en France, et du coup, à mon boulot aussi on parlait que français, il y avait très peu d'étrangers dans mon labo de recherche, du coup, pour comprendre, c'était un peu nécessaire, et après oui, j'avais un peu une démarche d'esquiver toutes les situations dans lesquelles je voyais, ah, c'est entre expats. Je ne parle pas d'immigrés parce que les Italiens, je ne pense pas qu'on puisse le définir aujourd'hui "immigrés" en France. C'est plus des expats pour moi, parce qu'il faut rendre aussi d'autres peuples qui arrivent en France vraiment immigrés, avec un statut un peu différent. Et du coup, j'ai essayé d'esquiver un peu, oui c'est ça, le monde des expats. Et ça, je pense, ça a aidé un peu parce que j'ai socialisé en français plus rapidement.

  • #Alice

    La distinction que tu fais entre expats et immigrés, effectivement, c'est un grand sujet, je trouve, sur la mobilité internationale, parce qu'on va effectivement avoir plutôt les pays du Nord, des personnes qui viennent des pays du Nord, entre guillemets, occidentalisés, qui bougent sur la planète. On va les appeler des expats, mais par contre, quand quelqu'un qui vient d'Afrique vient en France, on va l'appeler un immigré. Et c'est comme tu le dis... C'est à la fois un peu injuste de faire cette différence, mais en même temps, c'est important de montrer qu'effectivement, y'a pas les mêmes enjeux pour une personne qui vient d'Afrique que pour quelqu'un qui vient d'Italie. Et une personne qui vient d'Afrique va avoir beaucoup plus de problématiques pour s'intégrer, va être racisée en France. Et ce qui n'a peut-être pas été ton cas, toi, quand tu as commencé à vivre en France. Mais justement, j'ai envie de te demander, quelle a été ton expérience dans ta sociabilisation en français en tant qu'Italien ?

  • #Guglielmo

    Oui, alors d'ailleurs, juste une chose sur la différence expat et immigré. Alors peut-être des militants, des coloniaux ou des sociologues pourraient me sauter dessus. Mais pour moi, la différence, c'est est-ce que la population qui arrive subit du racisme ou de la colonisation ou de la colonie en général ? Si c'est ça, pour moi, j'utilise immigré. Sinon, c'est des expats. Du coup, pour moi, la différence est vraiment liée à ça. Par rapport à ma socialisation en français, là, la question est un peu compliquée dans le sens où là, ça fait beaucoup de temps que je suis arrivé en France. Et il faut savoir que je suis reparti de la France aussi. Et du coup, j'ai eu une sorte de deux départs, deux fois. C'est-à-dire qu'après ma thèse, j'ai voyagé en Amérique latine. Non, je suis d'abord rentré en Italie. Après, j'ai voyagé en Amérique latine. Et après, je suis revenu en France. Du coup, c'est comme s'il y avait un premier temps en France et un deuxième temps. Et dans le premier temps, la socialisation, moi j'ai eu de la chance de rencontrer des gens très chouettes qui, du coup, ils venaient vers moi à travers le fait que je comprenais pas tout et qui, du coup, m'aidaient beaucoup. Et ça amenait aussi, je pense notamment à une personne, ça amenait beaucoup aussi à de l'humour autour de ça. Des fois, je comprenais pas si c'était un humour sur moi ou avec moi. Mais la majorité des fois, je pense vraiment à une personne, c'était de l'humour avec moi. Parce que je disais des choses qui n'avaient pas de sens et du coup, étaient rigolotes.

  • #Alice

    D'accord. Et donc, cette personne, justement, elle pouvait t'expliquer pourquoi c'était drôle, qu'est-ce qui faisait que c'était drôle en français de dire ce que t'avais dit ?

  • #Guglielmo

    Oui, oui, complètement, complètement. Après, il y avait toujours l'explication qui arrivait quand je voyais des choses bizarres, des choses comme ça. Oui, oui, bien sûr.

  • #Alice

    Tu as un exemple, une anecdote ?

  • #Guglielmo

    C'est ça le problème, ça a passé tellement de temps. Alors, il y a une anecdote, je pense que ça va revenir plus tard, c'est les proverbes.

  • #Alice

    D'accord. Qu'est-ce que tu veux dire ?

  • #Guglielmo

    Je veux dire que... il y a beaucoup de proverbes qui sont similaires entre l'italien et le français mais pas toutes. Et du coup, pas tous les proverbes. Du coup, des fois j'utilisais des expressions qui venaient de l'italien et qui n'avaient aucun sens en français. Et du coup ça les faisait rire. Et des fois j'essayais d'imiter des mots, des façons de dire françaises mais je les utilisais hyper mal et du coup ça menait à de l'humour quand on te comprend pas et tu essaies de réutiliser quelque chose que tu comprends pas, ça peut être drôle.

  • #Alice

    Oui, effectivement. Et comment tu as vécu ton processus d'apprentissage, c'est-à-dire vraiment cette évolution pour petit à petit passer d'un niveau A1 quand même, qui est extrêmement débutant, à aujourd'hui, cette capacité que tu as de t'exprimer avec une très grande fluidité, de travailler, être complètement, de vivre en français ?

  • #Guglielmo

    C'était toujours un rapport conflictuel, c'est-à-dire... qu'à chaque fois, je voulais m'y remettre à étudier le français. Mais au final, je vivais déjà en France et j'avais un niveau de vie qui était suffisant pour me faire comprendre et qui, du coup, ouais, il y avait ce conflit intérieur de « Ah, je devrais améliorer mon français. » Mais au final, je vis déjà bien. J'ai plein de choses. Je suis à Rennes. J'aime bien aller dans les bars. J'ai pas de besoin. Et du coup, je sais pas. Et ouais, du coup, pour des années, c'était un peu, il y avait ces deux choses d'un côté de dire, je l'apprends à travers la vie. Et de l'autre côté, ouais, mais ça serait bien quand même d'apprendre les règles de l'accord. Et de l'autre côté, ah mais l'accord, c'est chiant à étudier, c'est compliqué. Tu vois un peu ce que je veux dire ? Vraiment, il y avait ces doubles choses qui me tiraient de deux côtés.

  • #Alice

    Mais du coup, est-ce que tu as vraiment appris des règles ? Du coup, est-ce que tu as suivi des cours ou tu t'es plongé dans des bouquins ? Qu'est-ce que tu as fait alors pour améliorer ?

  • #Guglielmo

    Je n'ai jamais fait de cours parce que, comme je le disais, il n'y avait pas ces côtés-là. Je pense que la majorité, c'était commencer à lire, à lire en français, à regarder aussi, ah ouais, là, il y a eu un passage effectivement plus tard que ma langue s'est améliorée, ah YouTube aussi. Oui. Il faut savoir que par rapport à d'autres pays, le YouTube français est assez développé. Au niveau de vulgarisation scientifique, un peu comme celui anglais américain au niveau de essais politiques, de médias alternatifs. Il y a plein de choses sur le YouTube français. Et j'avoue que je pense que ça m'a beaucoup aidé en réfléchissant. Et après, les cinémas. Moi, j'aime bien le cinéma. Et du coup, à l'époque, j'allais souvent dans deux cinémas d'essais à Rennes. Et effectivement, je me rends compte qu'à l'époque, peut-être que je ne donnais pas beaucoup de poids à ça comme moyen d'améliorer ma langue. C'était pas ça l'objectif. Mais là, rétrospectivement, je me dis, ah oui, effectivement, tous les films français que je me suis tapé, ou tout simplement, tous les fois où mes copains voulaient voir, ou ma compagne de l'époque voulait voir un film en français ou un film avec des sous-titres français. Au final, je pense que ça a aidé. Merci Léa pour avoir insisté.

  • #Alice

    Mais effectivement, ce que tu dis, on voit bien la différence entre deux types d'apprentissage qui peuvent être tout à fait complémentaires. Et aussi, il peut y avoir des choix de la personne d'apprendre de telle ou telle manière. Et en fait, moi, quand je te pose la question, est-ce que tu as fait des cours ? Est-ce que tu as appris des règles ? Je me réfère à un apprentissage vraiment explicite où on va aller regarder comment est structurée la langue. On réfléchit à la syntaxe. On va faire exprès d'utiliser la langue juste pour l'apprendre. Et puis, il y a l'apprentissage implicite qui est ce que tu as fait en fait. Qui est l'apprentissage qu'on fait quand on est en immersion dans le pays, ou qu'on recrée de l'immersion, parce que des personnes qui vivent hors de France peuvent très bien se recréer de l'immersion en regardant des séries, des films, en écoutant des podcasts. Donc, effectivement, il y a cet apprentissage implicite qui est extrêmement puissant et qui n'est parfois pas toujours valorisé. Il y a des personnes qui vont se centrer sur un apprentissage explicite, faire des exercices. Alors que, comme tu le dis, ça peut être chiant, on n'a pas envie de le faire et donc il y a une démotivation qui vient avec ce type d'apprentissage. Alors qu'en fait, on peut aussi essayer d'apprendre de manière plus immersive, implicite.

  • #Guglielmo

    Là, je me suis souvenu aussi d'une autre chose. Tu m'as débloqué un souvenir qu'effectivement, le fait que j'avais des bouquins de langue française à la maison, même si je n'étais pas constant, mais que quand même j'avais les ressources qui étaient là présentes, même si je ne faisais pas de cours, même si je me souviens, je me suis souvenu là maintenant, que j'avais deux cahiers différents, que j'ai commencé en me disant, allez, là je me mets, je prends un bouquin, j'ai fait un cours, je suis le bouquin, j'ai fait tous les exercices, je vais m'améliorer. Jamais continuer plus de, je ne sais pas, quelques semaines, mais le fait de les avoir, de tenter plusieurs fois cette chose-là, je pense peut-être que s'est couplée à l'apprentissage implicite en donnant quelques bases de plus. Et récemment, j'augmente beaucoup le niveau, par contre, à travers toujours YouTube, toujours des films. Et je dois dire aussi, l'IA m'aide là récemment c'est-à-dire que...

  • #Alice

    L'intelligence artificielle, IA en français ?

  • #Guglielmo

    Oui, complètement. Parce que je l'utilise beaucoup pour le boulot. Et du coup, au final, des fois, quand je vois des choses complexes, je me fais aider. Par, genre,une IA s'appelle DeepL, de traduction. Et après, du coup, ça m'aide aussi à penser des formes en français qui, peut-être, je n'avais pas pensé. Voilà. #Alice Excellent. Effectivement, là, tu parles en plus d'un autre aspect qui est cette conscience qu'on a d'apprendre et qui est aussi très puissante quand on apprend pour s'améliorer. C'est, voilà, se dire, bah... En fait, là, je suis en train d'apprendre. Là, maintenant, je suis en train d'apprendre. Je peux m'améliorer. "Qu'est-ce que je vois dans cette phrase que je viens de traduire sur Deepl ? Qu'est-ce que je vois que je pourrais réutiliser dans d'autres cas ? Ah tiens, mais en fait, en italien, le verbe, on va le mettre à cet endroit-là, alors qu'en français, il va être à un autre endroit". Voilà, donc il y a des choses effectivement comme ça, simplement par la conscience qu'on a, qu'on est en train d'apprendre, et qui font énormément travailler le cerveau, donc ça peut être un peu fatigant, mais c'est très puissant. Oui. Après, au niveau biographique personnel, il y a vraiment la première phase que j'étais en Italie, comme je le disais, avant de repartir la première fois, j'étais plus observateur de la culture française aussi. C'est-à-dire, là, on parlait de la Loi Travail, et je me souviens que moi, j'ai aussi un petit côté militant, heu dans différents collectifs, dans des choses comme ça. J'arrivais en France, je ne connaissais pas le monde. Du coup, j'observais beaucoup ce qui s'est passé. Et je me sentais du coup un peu passif. Ce n'est pas que ça m'intéressait pas. C'est juste que je me sentais passif. Et la deuxième fois que je suis revenu en France, c'était un peu, bon, OK, on s'installe un peu, pour un petit moment. Et du coup, je suis devenu aussi plus actif dans des réseaux militants, dans des associations, dans des organisations. Et du coup, là, tu es un peu obligé, quoi. À un moment, tu veux, je sais pas... rentrer dans un collectif écologique, lancer un projet, je ne sais pas quoi, être tout simplement dans une asso de quartier, t'es un peu obligé de te faire comprendre par les gens. Et du coup, ça te pousse aussi à améliorer ta langue. Et effectivement, aussi dans l'apprentissage, quand j'étais passif, j'étais plus attentif à apprendre la langue. Et quand je me suis dit, je vais avoir une vie active, là, j'ai moins fait d'exercices, des choses comme ça. Je sais pas si tu vois un peu ce dualisme entre ces deux phases.

  • #Alice

    Tout à fait, effectivement. Et je pense que c'est très lié, comme tu l'as souligné, au fait que tu avais cette envie de t'installer, que tu sais que tu vas rester pour un petit moment et puis vraiment de participer à la vie de la société. Et quand tu parles de tes engagements, de tes intérêts, ça me fait penser aux thématiques de ton podcast où clairement, donc tu as parlé tout à l'heure du fait que c'était sur la société numérique. Mais moi, quand j'ai entendu, j'ai vu qu'il y avait beaucoup de hauteur, il y avait une mise en perspective par rapport effectivement aux impacts de la technologie dans notre société. Ça, c'est moi qui le dis, mais maintenant, j'aimerais que toi, tu dises pourquoi tu as fait ce podcast, pourquoi tu l'as monté.

  • #Guglielmo

    Wow, alors pourquoi j'ai monté AZERTY ? Je pense que AZERTY est né pour moi parce que je voyais autour de moi de nouvelles technologies comme par exemple l'intelligence artificielle et je voyais la difficulté qu'on a et que j'avais autour de moi... moi je travaille beaucoup avec les maths je travaille avec l'ordinateur et de les différents points de vue que je voyais autour de moi c'est à dire qu'il y avait des gens qui étaient plutôt facilement anti-tech des gens qui étaient un peu pro- tech "teubé" et du coup ça m'a toujours passionné à moi en plus moi je suis la génération qui a grandi avec l'arrivée d'internet et l'arrivée de numérique. Et du coup, je voyais un sujet intéressant, aussi d'un point de vue, entre guillements "militant", dans le sens de dire, il faut entamer ces sujets-là, il faut discuter de qu'est-ce que la technologie dit de nous, comment ça nous impacte, parce qu'il y a autour de moi, je voyais, beaucoup de gens qui disaient, ah mais ces sujets, c'est pour les geeks. Ces sujets, c'est pour les gens techniques. Et moi, j'étais là à dire, mais non, attends, ta vie est complètement impactée de comment tu utilises ton portable, de comment tu utilises Internet, qu'est-ce que Internet fait de toi, de tes données. Et les gens disaient, ouais, mais bon, ça, ça ne m'intéresse pas, ça me fait juste bader. Attends, peut-être qu'il y a un moyen de discuter de ces sujets-là. Et du coup, je me suis intéressé. En plus, moi, j'ai fait physique et chimie. J'ai fait chimie physique pour la précision dans mes études, mais j'hésitais beaucoup avec sociologie. Du coup, j'avais eu un intérêt, aussi sur ce qu'on appelle STS, Science Technology Studies, qui est la critique, la sociologie de la technologie. Du coup, je me suis dit, allez, voilà. Et en plus, j'étais toujours passionné de SF.

  • #Alice

    SF, science-fiction.

  • #Guglielmo

    Du coup, j'ai rencontré après Alex à travers la radio, qui est l'autre co-host. Et lui, il avait toujours plus ou moins la même passion. Moi, au début, je voulais faire un projet seulement sur l'intelligence artificielle. Et après, rapidement, il m'a convaincu à dire, il y a plein de sujets intéressants, allons-y. Et l'angle qu'on a choisi est vraiment... d'essayer de se poser des questions pour tout le monde. C'est pas vraiment un podcast de la tech pour des gens de la tech. Mon objectif, c'est de dire telle personne qui, normalement, n'est pas un geek ou une geek ou un nerd de ces choses-là, n'est pas passionné d'ordinateurs ou de jeux vidéo, ah ben voilà, cette personne-là a trouvé quelque chose d'intéressant et qui lui parle de son rapport à la technologie.

  • #Alice

    Est-ce que t'aurais lancé ce podcast en italien ?

  • #Guglielmo

    Alors, bonne question. Parce que c'est beau d'être en France. Je m'explique mieux. Le milieu radio italien et de podcasts de radio associative, par exemple, qui est une salle de sport incroyable pour apprendre à faire de l'audio, les radios associatives, n'existe pas autant qu'en France. Du coup, je pense qu'à l'époque 2008-2009, avec des copains, c'était un moment de mouvement social en Italie, une réforme de l'université plus la crise économique qui arrivait. On avait lancé un web radio, mais au final, on avait laissé tomber. Et je me rends compte que cette passion, je l'ai repris beaucoup d'années après parce que j'ai trouvé un terreau fertile. Du coup, je ne sais pas si je l'aurais lancé en italien, parce que peut-être j'aurais pas eu l'entourage autour de moi, l'envie, le fait de percevoir que c'est possible de le faire. Je sais pas si c'est clair ce que j'ai dit. C'est vraiment le fait qu'en Italie, je suis baigné beaucoup moins par ce genre d'initiatives. En France, je les ai trouvées assez facilement. Du coup, tu te dis "Allons-y, peut-être je peux le faire.".

  • #Alice

    Super, merci. Maintenant, c'est le moment de la question rituelle pour clore notre entretien. On a commencé un peu à en parler dans le cours de notre dialogue. Mais qu'est-ce que tu fais ou tu dis en français que tu ne peux pas faire ou dire en italien ?

  • #Guglielmo

    Et l'inverse ou seulement dans ce sens ?

  • #Alice

    Plutôt dans ce sens-là.

  • #Guglielmo

    Que je peux dire en français mais je ne peux pas dire en italien. #Alice Ou faire. #Guglielmo Ou faire. Alors ça c'est compliqué pour moi parce que comme je disais il y a plein de proverbes que ne se traduisent pas. Et certains oui. Du coup il y a des expressions que j'adore en français. Et que du coup à chaque fois je dois les expliquer. Du coup c'est pas quelque chose que je ne peux pas faire. Mais ça demande une action de plus, de l'expliquer. Comme notamment, "ah bah celui-là n'est pas le couteau le plus aiguisé du tiroir". C'est une expression que j'adore, je la trouve magnifique et je ne peux pas trop l'utiliser en italien. Du coup, voilà, c'est plus ça. Après, je répète, avec le fait que c'est deux langues similaires, j'ai un peu du mal à cibler une chose plus précise. C'est plus le problème des traductions.

  • #Alice

    D'accord, c'est vraiment centré sur la langue. Et puis, comme on l'a vu finalement, le fait de faire des... C'est ce que tu as dit tout à l'heure autour du podcast. Oui, tu l'as lancé en français, mais peut-être que tu l'aurais fait en italien. Mais ce n'est pas la langue qui pose problème ou qui incite à le faire. C'était vraiment plus l'environnement dans lequel tu te trouvais.

  • #Guglielmo

    Il y a une autre chose que je ne peux pas plus faire en italien : parler correctement italien. C'est-à-dire que, vu que ma compagne actuelle, Roberta, est italienne aussi, je suis toujours en contact avec beaucoup de copains italiens, mais je vis en France. Mon français n'est pas parfait, mais mon italien est contaminé, et mon français aussi, par l'autre langue, et étant de langues similaires. Et du coup, des fois, quand je rentre les premières semaines en Italie, mes copains, mais ils se foutent de ma gueule, mais un point pas possible, parce que je ne parle pas vraiment italien. Je parle la langue que j'ai inventée entre l'italien et le français. Et du coup, je ne peux plus parler correctement l'italien. Ça, c'est pas mal. Oui, effectivement. Super, c'est hyper intéressant de voir un peu cette douleur qu'on peut avoir, mais qui n'est pas une fatalité, parce que, comme tu dis, c'est aussi une question d'acclimatation. Et au bout d'un certain temps, j'imagine que ton italien revient, même s'il y a toujours un peu des petites nuances, des petites touches, comme des petits coups de pinceau de français, j'imagine.

  • #Alice

    Voilà, oui, complètement. Après, je ne sais pas parce que je ne rentre généralement que quelques semaines et du coup, je ne dépasse jamais le temps d'adaptation. Mais oui, je pense, oui. Si je redéménageais en Italie, probablement, oui, l'italien revient. J'espère !

  • #Guglielmo

    Alors, Guglielmo, avant qu'on se quitte, j'ai quand même un dernier, j'ai un petit cadeau pour toi et je suis très heureuse de pouvoir le faire parce que comme d'habitude, on est à distance, je ne peux pas faire de cadeau à mes invité·es. Mais voilà, je t'offre ce marque-page, du podcast Moi-même en français. Sur ce marque-page, il y a une citation. Est-ce que tu peux nous la lire ?

  • #Alice

    Merci déjà pour le marque-page. "J'accepte la grande aventure d'être moi."

  • #Guglielmo

    Qu'est-ce que ça t'inspire ?

  • #Alice

    La chose que ça m'inspire, ce n'est pas lié à la langue. C'est lié plutôt à soi-même. Moi, je dis tout le temps comme blague, que j'ai décidé de prendre toute ma vie pour essayer de comprendre qui je suis. Et du coup, "j'accepte cette grande aventure..." pour moi,'est pas juste lié à la langue. Après, c'est vrai que pour moi, il y a deux Guglielmo. Il y a le Guglielmo français et super-imposé, il y a légèrement différent le Guglielmo italien. Je n'arrive pas à avoir le même humour, le même humorisme. Je fais encore plus de blagues en italien. Et je n'arrive pas des fois en français. Ou si j'essaye, ça ne passe pas. Ce n'est pas drôle. Du coup, c'est comme s'il y avait deux "moi" un peu différents, avec de petits détails différents. Du coup, voilà, c'est ça que m'inspire cette phrase, d'accepter le fait d'être double. Et que je vais passer toute ma vie à essayer de comprendre qui je suis déjà. C'est pas mal. Quand on préparait cet entretien, tu m'as dit quelque chose comme « je suis pas sûr de tout savoir sur moi » .

  • #Guglielmo

    Voilà, c'est exactement ça. Et qui est sûr, eh bah bravo hein !

  • #Alice

    Oui, effectivement. Et je pense que Simone de Beauvoir, puisque c'est elle qui a écrit ça, je pense que c'est un peu ce qu'elle voulait transmettre, qu'effectivement, c'est toute une aventure de se trouver, de savoir qui on est. Et en plus... sachant qu'on va beaucoup évoluer donc on saura peut-être jamais vraiment qui on est. En tout cas je me suis beaucoup retrouvée dans ta propre définition et comment tu as lu cette citation merci beaucoup . #Guglielmo Merci à toi. C'est la fin de cet épisode parce qu'on doit maintenant laisser la place à un atelier qui se tient pour ce festival de Pod'Paris. J'étais vraiment mais enchantée de là je pense que c'est un peu mon influence espagnole parce que "estoy encatada!", je suis enchantée de t'avoir rencontré Guglielmo, et d'avoir fait cet épisode dans ce cadre assez exceptionnel. Donc, c'était une super première expérience pour moi. Merci beaucoup d'avoir accepté mon invitation. #Guglielmo : Et merci à toi pour l'invitation. Ami·es non francophones, merci et bravo d'avoir suivi cet épisode jusqu'au bout. Moi, je pense que tu peux vraiment être fier/fière, surtout que Guglielmo a vraiment des expressions très françaises. Il parle un peu de verlan, il sort des proverbes en français. Je pense que je ferai une petite note dans l'article de blog qui accompagne l'épisode, peut-être pour traduire certaines petites choses. Enfin, pas traduire, mais réexpliquer. Par exemple, la super expression « c'est pas le couteau le plus aiguisé du tiroir » . J'espère que son parcours t'a inspiré·e et te donnera envie de poursuivre ton propre chemin pour être et devenir toi-même en français. Pour recevoir plus de conseils, d'idées, de ressources, tu peux t'abonner à ma newsletter, La Lettre du mois. À la prochaine !

  • #Guglielmo

    Salut à tout le monde, à la prochaine !

  • #Alice

    Et voilà, c'était Moi-même en français, un podcast d'Aliahe, conçu et présenté par Alice Mansaud. Retrouve tous les épisodes sur le site aliae.fr et partage tes commentaires sur le blog. À toi de jouer !

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Description

"Je ne suis pas sûr de tout savoir sur moi..." m'a dit Guglielmo quand je lui ai parlé du podcast Moi-même en français.

Et justement, dans cet épisode il a accepté d'explorer son "lui-même" français avec moi. Il raconte ses premiers mois en France, dans une France post-attentats du Bataclan, dans une université bloquée et mobilisée face à la loi Travail. Comment apprendre quand il n'y a pas de cours ?

Mais son voyage en français ne s'est pas arrêté là : entre ses expériences radio et le lancement de son podcast, il a pu continuer à chercher et devenir lui-même !

Embarque avec lui dans ses souvenirs et ses réflexions pour réfléchir à tes propres défis en français et comment tu veux les affronter : comment gérer son accent "étranger" ? comment se perfectionner quand on n'a pas envie de méthodes scolaires ? comment gérer ce nouveau "moi" dans ton pays d'origine ?

Et le bonus : Guglielmo va t'apprendre une expression super authentique ! Allez, je te lance un défi : trouver la signification de l'expression sans dictionnaire ni IA ! Chiche ? 😋


🤔❓Tes questions à Allo Aliaé : https://www.speakpipe.com/MoiMemeEnFrancais.😌

---
🌠Au fait, qui je suis MOI ? 😉 Alice Mansaud, coach de français, Neurolanguage coach®. Actuellement basée à Valencia en Espagne, j'accompagne les non-francophones partout dans le monde, depuis 2016.


📧Abonne-toi à la newsletter La Lettre du Moi(s) : une touche d'inspiration pour être et devenir toi-même en français - https://www.aliae.fr/inscription-lettre-du-moi-s


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • #Alice

    Moi-même en français. Le podcast pour être et devenir toi, même si le français n'est pas ta langue maternelle. Je suis Alice et aujourd'hui je te propose d'écouter les souvenirs d'un devenir. Ami·es non francophones, bienvenue dans la section Souvenirs d'un devenir, où j'échange avec des non francophones comme toi, qui apprennent le français comme toi, et qui sont devenu·es elles-mêmes en français comme toi. Comme d'habitude, je laisse cette question ouverte pour que tu puisses réfléchir à ta propre réponse. Alors aujourd'hui, je vais discuter avec Guglielmo. C'est un peu particulier parce que c'est une interview en direct, ce qui est la première fois que je fais une interview en direct, puisque d'habitude j'enregistre à distance. Et donc là, je vais littéralement tendre mon micro à mon invité. Guglielmo est italien, non francophone, dans le sens où le français n'est pas sa langue maternelle. qui a dû donc apprendre le français adulte. Bonjour et bienvenue, Guglielmo.

  • #Guglielmo

    Bonjour.

  • #Alice

    Alors, est-ce que, comme je le disais, on est en direct là tous les deux. Est-ce que tu peux décrire un petit peu la pièce où on est ? Pourquoi on est là tous les deux aujourd'hui ?

  • #Guglielmo

    Alors, on est à Pod'Paris, qui est un festival de podcast indépendant organisé par l'association BadGeek, qui est une association de podcasteurs et podcasteuses indépendants. Et on est dans une salle, comment il s'appelle le lieu ? La Bellevilloise, à Paris. Dans une salle, pas dans les salles principales, dans une salle à côté, avec plein de fauteuils, il y a plein de canapés. Il y a des objets un peu bizarres accrochés au mur, genre la tête d'une girafe, une tortue géante, un planisphère, et tous des objets comme ça. Mais c'est assez stylé.

  • #Alice

    Oui, effectivement, bonne description, avec un petit peu de verdure et des canapés qui ont l'air bien confortables. Merci beaucoup pour cette description est-ce que maintenant tu peux nous dire un peu pourquoi toi tu es venu à PodParis ?

  • #Guglielmo

    Je suis venu à PodParis parce que moi je suis un passionné de radio associative en général et de podcast et j'ai mon podcast qui s'appelle Azerty qui parle de société numérique mais on était là aussi pour rencontrer d'autres podcasts, faire des séances d'écoute en général rencontrer du monde,des choses comme ça

  • #Alice

    Ok, tu es le premier podcasteurs non francophones que j'interview. Donc, c'est quand même un parcours qui est assez exceptionnel, je dirais, de faire un podcast, de vraiment sortir ta voix en français dans un podcast, alors que ce n'était pas ta langue maternelle. Comment tu en es venu à cette étape de ta vie de lancer ce podcast AZERTY ?

  • #Guglielmo

    Alors, d'ailleurs, je faisais déjà d'autres podcast avant de première chose et deuxième chose pour moi clarifier dans ma démarche de podcast je n'ai fait pas de podcast pour mettre en avant ma voix ça c'est quelque chose qui est très personnel et peut-être n'a pas complètement à voir avec la langue mais pour moi la démarche que j'aime est surtout de tendre les micros à d'autres personnes et qui est du coup pour ça quelque part j'ai essayé toujours d'effacer un peu ma voix et au début quand j'ai commencé effectivement ça me faisait des complexes j'avais demandé à des gens surtout en radio qu'ils ont de métiers sont journalistes "Est-ce que c'est approprié ? Est-ce que mon accent n'est pas trop fort ?" Ou des choses comme ça. Et les réponses que j'ai eues, c'est « Ah non, déjà, c'est attachant l'accent italien » qui d'un côté, ça fait un peu… Ah, c'est bizarre, en même temps, je n'aimerais pas avoir de l'accent, mais je ne sais pas…

  • #Alice

    Tu veux dire que c'est ce que toi, tu as pensé quand on t'a fait ce retour, on t'a renvoyé l'image de « Mais oui, ton accent, il est mignon, il est joli, c'est attachant. » Toi, tu as pensé « Ah non, mince, ça veut dire qu'on entend mon accent. » C'est ça ?

  • #Guglielmo

    Oui un peu et j'ai toujours un rapport un peu ambivalent avec l'accent parce que d'un côté j'aimerais bien parler vraiment bien français et de l'autre côté je me rends de plus en plus compte que c'est important, c'est mes origines, c'est aussi ma façon de parler, c'est un peu spécial. Du coup c'est toujours un rapport un peu compliqué. Or la chose qui m'a poussé aussi c'est que les gens m'ont dit "écoute tu es complètement compréhensible en français et du coup ça c'est déjà suffisant et bien au contraire c'est beaucoup important de casser un peu les codes de la radio". C'est ça qu'on m'a dit à l'époque. En disant, "les accents sont beaux aussi par rapport à la voix lisse qu'on est habitué à entendre et la voix très formatée des fois dans certains médias".

  • #Alice

    Oui, bien sûr. Et puis c'est vrai qu'il peut y avoir aussi des représentations derrière certains accents. Et la représentation de l'accent italien en France, il va être très lié à un environnement artistique et culturel. Donc peut-être que ça passe bien aussi dans l'écosystème de la radio. Ce n'est pas la même chose que d'autres accents dans le monde ou même à l'intérieur de la France et de la francophonie. Il y a des accents qui ont des représentations moins prestigieuses, moins valorisées. Donc, effectivement, tu avais peut-être la chance, au moins que ce soit un accent italien, non ?

  • #Guglielmo

    Oui, et c'est intéressant. C'est un sujet sur lequel j'ai réfléchi depuis quelques mois. Je serais intéressé de savoir depuis quand c'est ça. Parce qu'à une époque, les Italiens en France n'étaient pas, comment dire, trop les bienvenus. Du coup, j'aimerais bien regarder un peu comment ça a changé la perception de l'italianité en France avec le temps. Je n'ai pas de réponse en ce moment. Mais avant, ce n'était pas comme ça, quoi.

  • #Alice

    Non, non, effectivement, en fait, merci. Tu viens de me faire me souvenir de mes propres origines. Mon arrière-grand-père était italien. Et effectivement, donc, mon grand-père qui portait son nom de famille... Quand ma grand-mère a rencontré mon futur grand-père, sa propre mère lui a dit « Attention, il est italien » .

  • #Guglielmo

    Voilà, voilà, un grand classique. Il y a certains stéréotypes qui restent aujourd'hui. Ce n'est pas complètement mort la chose, mais bon, ça va mieux.

  • #Alice

    Non, effectivement, je pense que c'est lié vraiment aussi à l'histoire de France, l'histoire de l'immigration en France. Alors, du coup, toi, quelle est… ton histoire d'immigration, d'émigration vers la France ?

  • #Guglielmo

    Moi, je suis arrivé en France pour faire une partie de ma thèse. C'était une thèse en sciences, en chimie physique. Et du coup, on m'a proposé à la fin de mes masters, je voulais faire une thèse à l'étranger. Et la chef de mon labo, Roberta Cessoli, à Florence, m'a proposé de faire une thèse en co-tutelle entre la France et l'Italie. Et d'ailleurs, une ville en France que moi, je n'avais jamais entendu parler, qui s'appelle Rennes. Et je ne savais même pas si Rennes était en Bretagne ou dans les Champagnes. Parce qu'en Italie, Reims, on dit [reims].

  • #Alice

    En espagnol aussi, effectivement, c'est [reims]. Pour Reims, la capitale du Champagne. Mais Rennes, la capitale bretonne.

  • #Guglielmo

    Voilà. Et après, j'ai rencontré un copain italien qui avait fait sa thèse à Rennes et qui m'avait dit, vas-y, c'est une ville trop bien. Vas-y, etc. Et du coup, j'arrive en France. La première fois, je pense, c'était décembre 2015. Et après, définitivement, janvier 2016, et du coup, j'arrive dans la France après attentat. Et déjà, c'était une ambiance un peu bizarre. Je me souviens, la première arrivée à l'aéroport, il y avait une alarme pour un colis qui pouvait être un attentat et des choses comme ça.

  • #Alice

    Je précise donc les attentats du Bataclan, c'est ça, ces attentats-là, d'accord, en 2015, ok.

  • #Guglielmo

    Voilà, voilà, voilà, du coup, je m'installe et j'avais fait seulement un cours de langue A1 avant en Italie. Du coup, j'étais à peine capable de dire « je m'appelle Guglielmo » . Stop. Et après, du coup, j'arrive à travers l'université pour étudier et bosser en France. Et du coup, j'ai commencé un cours de langue au CIREF, qui est le centre de langue de Rennes, de l'université de Rennes, pour la précision Rennes 2. Or, en 2016, il se passe quelque chose en France aussi.

  • #Alice

    Alors là, ça y est, je suis complètement collée. J'ai un gros blanc. Qu'est-ce qui s'est passé en 2016 ?

  • #Guglielmo

    La loi travail. La loi travail, j'étais à Rennes, l'université de Rennes 2, on l'appelle Rennes 2, "la Rouge", parce qu'à chaque fois qu'il y a quelque chose qui ne va pas, on la bloque. Et du coup, moi, j'arrive avec l'intention de faire un A2, B1, mais c'était impossible parce qu'à chaque fois, la fac était bloquée. Et du coup, je n'ai jamais vraiment appris le français en l'étudiant de façon scolaire. Parce qu'à l'époque, la fac était fermée, la seule chose que je pouvais faire, c'était aller dans les bars, boire des coups avec des gens, essayer de comprendre qu'est ce que les gens disaient. Du coup vraiment mon français s'est construit autour de ça. Après il y a une chose qui a aidé la qualité de mon français et qui à un moment donné j'ai trouvé une compagne en France qui était enseignante de FLE et pour éviter n'importe quel problème de couple on a fait un deal pour lequel elle n'allait pas m'apprendre le français mais on a passé une phase dans laquelle elle voulait apprendre l'italien du coup moi j'ai parlé italien, elle français. Et après, on a inversé. C'est-à-dire que moi, je lui parlais français, elle parlait italien. Alors, des fois, on ne comprenait pas la chose que l'autre disait, mais au moins, ça nous a permis, d'une façon un peu plus fluide et moins scolaire, d'apprendre le français.

  • #Alice

    D'accord. Donc, en gros, vous étiez dans une conversation, à la maison, au quotidien." Qu'est-ce qu'on fait à manger ce soir ?" Et il y en avait un qui posait la question en français ou en italien, et l'autre répondait dans l'autre langue, c'est ça ?

  • #Guglielmo

    Oui, voilà. Voilà, et après on demandait en anglais s'il y avait des mots que vraiment on ne comprenait pas. Et des fois, bon, alors les embrouilles à l'époque, on les faisait en anglais, parce que là, comme ça, on est sûr de se comprendre. Mais sinon, oui, il y avait souvent ce côté un peu bizarre de ce double dialogue italo-français. Après, l'italien et le français, c'est des langues relativement similaires. Du coup, on comprenait. Moi, les gens, ils étaient étonnés au début, parce que j'avais un vocabulaire très précis. Mais tout simplement parce que j'avais appris un... Comment on dit ? Pas les pièges, mais... les hacks du français, de prendre un mot italien et qui souvent se rend un peu français, ça ressemble beaucoup au mot français. Et du coup, il y avait des mots que les gens disaient, "comment tu fais pour connaître ces mots-là ?" Moi, je sais pas, j'ai appris le mot italien et je l'ai rendu un peu français, quoi.

  • #Alice

    Oui, effectivement, c'est un grand atout qu'il y a entre le français et l'italien qui sont des langues romanes. C'est qu'on peut transformer un peu. Et c'est vrai que pour les auditeurices qui nous écoutent, si vous avez une langue maternelle comme l'espagnol, le portugais, le roumain, le catalan, et que vous apprenez le français, il faut pas hésiter, à oser le mot avec le mot qui vient de votre langue et qui sonne français. On le francise un peu, voilà, en espagnol et en italien comme, je ne sais pas, nazione, nacion. En français, on va faire la nasale, le nez nation et ça passe, quoi. Ce n'est pas du vocabulaire très, très précis comme ce que tu devais utiliser. Mais en tout cas, je trouve que c'est super important de se dire qu'on peut oser, on peut essayer. Et puis en plus ça a l'avantage d'entraîner un peu le cerveau à faire une prononciation française et donc à observer comment les francophones parlent et essayer d'imiter et ça en plus ça va beaucoup aider pour la prononciation, l'accent qu'on peut avoir en français.

  • #Guglielmo

    Oui et pour moi il y avait aussi une autre chose à l'époque, je me refusais un peu de m'enfermer dans des cercles d'étrangers, c'est-à-dire que, soyons honnêtes, en vrai... tous les trois, en France on dit les Italiens et l'Espagnol, mais aussi c'est vrai pour les Français à l'étranger, on a la tendance à faire groupe un peu, parce que ça nous sort moins de la zone de confort. Et moi je m'étais dit, non, je vais vraiment essayer de vivre en France, et du coup, à mon boulot aussi on parlait que français, il y avait très peu d'étrangers dans mon labo de recherche, du coup, pour comprendre, c'était un peu nécessaire, et après oui, j'avais un peu une démarche d'esquiver toutes les situations dans lesquelles je voyais, ah, c'est entre expats. Je ne parle pas d'immigrés parce que les Italiens, je ne pense pas qu'on puisse le définir aujourd'hui "immigrés" en France. C'est plus des expats pour moi, parce qu'il faut rendre aussi d'autres peuples qui arrivent en France vraiment immigrés, avec un statut un peu différent. Et du coup, j'ai essayé d'esquiver un peu, oui c'est ça, le monde des expats. Et ça, je pense, ça a aidé un peu parce que j'ai socialisé en français plus rapidement.

  • #Alice

    La distinction que tu fais entre expats et immigrés, effectivement, c'est un grand sujet, je trouve, sur la mobilité internationale, parce qu'on va effectivement avoir plutôt les pays du Nord, des personnes qui viennent des pays du Nord, entre guillemets, occidentalisés, qui bougent sur la planète. On va les appeler des expats, mais par contre, quand quelqu'un qui vient d'Afrique vient en France, on va l'appeler un immigré. Et c'est comme tu le dis... C'est à la fois un peu injuste de faire cette différence, mais en même temps, c'est important de montrer qu'effectivement, y'a pas les mêmes enjeux pour une personne qui vient d'Afrique que pour quelqu'un qui vient d'Italie. Et une personne qui vient d'Afrique va avoir beaucoup plus de problématiques pour s'intégrer, va être racisée en France. Et ce qui n'a peut-être pas été ton cas, toi, quand tu as commencé à vivre en France. Mais justement, j'ai envie de te demander, quelle a été ton expérience dans ta sociabilisation en français en tant qu'Italien ?

  • #Guglielmo

    Oui, alors d'ailleurs, juste une chose sur la différence expat et immigré. Alors peut-être des militants, des coloniaux ou des sociologues pourraient me sauter dessus. Mais pour moi, la différence, c'est est-ce que la population qui arrive subit du racisme ou de la colonisation ou de la colonie en général ? Si c'est ça, pour moi, j'utilise immigré. Sinon, c'est des expats. Du coup, pour moi, la différence est vraiment liée à ça. Par rapport à ma socialisation en français, là, la question est un peu compliquée dans le sens où là, ça fait beaucoup de temps que je suis arrivé en France. Et il faut savoir que je suis reparti de la France aussi. Et du coup, j'ai eu une sorte de deux départs, deux fois. C'est-à-dire qu'après ma thèse, j'ai voyagé en Amérique latine. Non, je suis d'abord rentré en Italie. Après, j'ai voyagé en Amérique latine. Et après, je suis revenu en France. Du coup, c'est comme s'il y avait un premier temps en France et un deuxième temps. Et dans le premier temps, la socialisation, moi j'ai eu de la chance de rencontrer des gens très chouettes qui, du coup, ils venaient vers moi à travers le fait que je comprenais pas tout et qui, du coup, m'aidaient beaucoup. Et ça amenait aussi, je pense notamment à une personne, ça amenait beaucoup aussi à de l'humour autour de ça. Des fois, je comprenais pas si c'était un humour sur moi ou avec moi. Mais la majorité des fois, je pense vraiment à une personne, c'était de l'humour avec moi. Parce que je disais des choses qui n'avaient pas de sens et du coup, étaient rigolotes.

  • #Alice

    D'accord. Et donc, cette personne, justement, elle pouvait t'expliquer pourquoi c'était drôle, qu'est-ce qui faisait que c'était drôle en français de dire ce que t'avais dit ?

  • #Guglielmo

    Oui, oui, complètement, complètement. Après, il y avait toujours l'explication qui arrivait quand je voyais des choses bizarres, des choses comme ça. Oui, oui, bien sûr.

  • #Alice

    Tu as un exemple, une anecdote ?

  • #Guglielmo

    C'est ça le problème, ça a passé tellement de temps. Alors, il y a une anecdote, je pense que ça va revenir plus tard, c'est les proverbes.

  • #Alice

    D'accord. Qu'est-ce que tu veux dire ?

  • #Guglielmo

    Je veux dire que... il y a beaucoup de proverbes qui sont similaires entre l'italien et le français mais pas toutes. Et du coup, pas tous les proverbes. Du coup, des fois j'utilisais des expressions qui venaient de l'italien et qui n'avaient aucun sens en français. Et du coup ça les faisait rire. Et des fois j'essayais d'imiter des mots, des façons de dire françaises mais je les utilisais hyper mal et du coup ça menait à de l'humour quand on te comprend pas et tu essaies de réutiliser quelque chose que tu comprends pas, ça peut être drôle.

  • #Alice

    Oui, effectivement. Et comment tu as vécu ton processus d'apprentissage, c'est-à-dire vraiment cette évolution pour petit à petit passer d'un niveau A1 quand même, qui est extrêmement débutant, à aujourd'hui, cette capacité que tu as de t'exprimer avec une très grande fluidité, de travailler, être complètement, de vivre en français ?

  • #Guglielmo

    C'était toujours un rapport conflictuel, c'est-à-dire... qu'à chaque fois, je voulais m'y remettre à étudier le français. Mais au final, je vivais déjà en France et j'avais un niveau de vie qui était suffisant pour me faire comprendre et qui, du coup, ouais, il y avait ce conflit intérieur de « Ah, je devrais améliorer mon français. » Mais au final, je vis déjà bien. J'ai plein de choses. Je suis à Rennes. J'aime bien aller dans les bars. J'ai pas de besoin. Et du coup, je sais pas. Et ouais, du coup, pour des années, c'était un peu, il y avait ces deux choses d'un côté de dire, je l'apprends à travers la vie. Et de l'autre côté, ouais, mais ça serait bien quand même d'apprendre les règles de l'accord. Et de l'autre côté, ah mais l'accord, c'est chiant à étudier, c'est compliqué. Tu vois un peu ce que je veux dire ? Vraiment, il y avait ces doubles choses qui me tiraient de deux côtés.

  • #Alice

    Mais du coup, est-ce que tu as vraiment appris des règles ? Du coup, est-ce que tu as suivi des cours ou tu t'es plongé dans des bouquins ? Qu'est-ce que tu as fait alors pour améliorer ?

  • #Guglielmo

    Je n'ai jamais fait de cours parce que, comme je le disais, il n'y avait pas ces côtés-là. Je pense que la majorité, c'était commencer à lire, à lire en français, à regarder aussi, ah ouais, là, il y a eu un passage effectivement plus tard que ma langue s'est améliorée, ah YouTube aussi. Oui. Il faut savoir que par rapport à d'autres pays, le YouTube français est assez développé. Au niveau de vulgarisation scientifique, un peu comme celui anglais américain au niveau de essais politiques, de médias alternatifs. Il y a plein de choses sur le YouTube français. Et j'avoue que je pense que ça m'a beaucoup aidé en réfléchissant. Et après, les cinémas. Moi, j'aime bien le cinéma. Et du coup, à l'époque, j'allais souvent dans deux cinémas d'essais à Rennes. Et effectivement, je me rends compte qu'à l'époque, peut-être que je ne donnais pas beaucoup de poids à ça comme moyen d'améliorer ma langue. C'était pas ça l'objectif. Mais là, rétrospectivement, je me dis, ah oui, effectivement, tous les films français que je me suis tapé, ou tout simplement, tous les fois où mes copains voulaient voir, ou ma compagne de l'époque voulait voir un film en français ou un film avec des sous-titres français. Au final, je pense que ça a aidé. Merci Léa pour avoir insisté.

  • #Alice

    Mais effectivement, ce que tu dis, on voit bien la différence entre deux types d'apprentissage qui peuvent être tout à fait complémentaires. Et aussi, il peut y avoir des choix de la personne d'apprendre de telle ou telle manière. Et en fait, moi, quand je te pose la question, est-ce que tu as fait des cours ? Est-ce que tu as appris des règles ? Je me réfère à un apprentissage vraiment explicite où on va aller regarder comment est structurée la langue. On réfléchit à la syntaxe. On va faire exprès d'utiliser la langue juste pour l'apprendre. Et puis, il y a l'apprentissage implicite qui est ce que tu as fait en fait. Qui est l'apprentissage qu'on fait quand on est en immersion dans le pays, ou qu'on recrée de l'immersion, parce que des personnes qui vivent hors de France peuvent très bien se recréer de l'immersion en regardant des séries, des films, en écoutant des podcasts. Donc, effectivement, il y a cet apprentissage implicite qui est extrêmement puissant et qui n'est parfois pas toujours valorisé. Il y a des personnes qui vont se centrer sur un apprentissage explicite, faire des exercices. Alors que, comme tu le dis, ça peut être chiant, on n'a pas envie de le faire et donc il y a une démotivation qui vient avec ce type d'apprentissage. Alors qu'en fait, on peut aussi essayer d'apprendre de manière plus immersive, implicite.

  • #Guglielmo

    Là, je me suis souvenu aussi d'une autre chose. Tu m'as débloqué un souvenir qu'effectivement, le fait que j'avais des bouquins de langue française à la maison, même si je n'étais pas constant, mais que quand même j'avais les ressources qui étaient là présentes, même si je ne faisais pas de cours, même si je me souviens, je me suis souvenu là maintenant, que j'avais deux cahiers différents, que j'ai commencé en me disant, allez, là je me mets, je prends un bouquin, j'ai fait un cours, je suis le bouquin, j'ai fait tous les exercices, je vais m'améliorer. Jamais continuer plus de, je ne sais pas, quelques semaines, mais le fait de les avoir, de tenter plusieurs fois cette chose-là, je pense peut-être que s'est couplée à l'apprentissage implicite en donnant quelques bases de plus. Et récemment, j'augmente beaucoup le niveau, par contre, à travers toujours YouTube, toujours des films. Et je dois dire aussi, l'IA m'aide là récemment c'est-à-dire que...

  • #Alice

    L'intelligence artificielle, IA en français ?

  • #Guglielmo

    Oui, complètement. Parce que je l'utilise beaucoup pour le boulot. Et du coup, au final, des fois, quand je vois des choses complexes, je me fais aider. Par, genre,une IA s'appelle DeepL, de traduction. Et après, du coup, ça m'aide aussi à penser des formes en français qui, peut-être, je n'avais pas pensé. Voilà. #Alice Excellent. Effectivement, là, tu parles en plus d'un autre aspect qui est cette conscience qu'on a d'apprendre et qui est aussi très puissante quand on apprend pour s'améliorer. C'est, voilà, se dire, bah... En fait, là, je suis en train d'apprendre. Là, maintenant, je suis en train d'apprendre. Je peux m'améliorer. "Qu'est-ce que je vois dans cette phrase que je viens de traduire sur Deepl ? Qu'est-ce que je vois que je pourrais réutiliser dans d'autres cas ? Ah tiens, mais en fait, en italien, le verbe, on va le mettre à cet endroit-là, alors qu'en français, il va être à un autre endroit". Voilà, donc il y a des choses effectivement comme ça, simplement par la conscience qu'on a, qu'on est en train d'apprendre, et qui font énormément travailler le cerveau, donc ça peut être un peu fatigant, mais c'est très puissant. Oui. Après, au niveau biographique personnel, il y a vraiment la première phase que j'étais en Italie, comme je le disais, avant de repartir la première fois, j'étais plus observateur de la culture française aussi. C'est-à-dire, là, on parlait de la Loi Travail, et je me souviens que moi, j'ai aussi un petit côté militant, heu dans différents collectifs, dans des choses comme ça. J'arrivais en France, je ne connaissais pas le monde. Du coup, j'observais beaucoup ce qui s'est passé. Et je me sentais du coup un peu passif. Ce n'est pas que ça m'intéressait pas. C'est juste que je me sentais passif. Et la deuxième fois que je suis revenu en France, c'était un peu, bon, OK, on s'installe un peu, pour un petit moment. Et du coup, je suis devenu aussi plus actif dans des réseaux militants, dans des associations, dans des organisations. Et du coup, là, tu es un peu obligé, quoi. À un moment, tu veux, je sais pas... rentrer dans un collectif écologique, lancer un projet, je ne sais pas quoi, être tout simplement dans une asso de quartier, t'es un peu obligé de te faire comprendre par les gens. Et du coup, ça te pousse aussi à améliorer ta langue. Et effectivement, aussi dans l'apprentissage, quand j'étais passif, j'étais plus attentif à apprendre la langue. Et quand je me suis dit, je vais avoir une vie active, là, j'ai moins fait d'exercices, des choses comme ça. Je sais pas si tu vois un peu ce dualisme entre ces deux phases.

  • #Alice

    Tout à fait, effectivement. Et je pense que c'est très lié, comme tu l'as souligné, au fait que tu avais cette envie de t'installer, que tu sais que tu vas rester pour un petit moment et puis vraiment de participer à la vie de la société. Et quand tu parles de tes engagements, de tes intérêts, ça me fait penser aux thématiques de ton podcast où clairement, donc tu as parlé tout à l'heure du fait que c'était sur la société numérique. Mais moi, quand j'ai entendu, j'ai vu qu'il y avait beaucoup de hauteur, il y avait une mise en perspective par rapport effectivement aux impacts de la technologie dans notre société. Ça, c'est moi qui le dis, mais maintenant, j'aimerais que toi, tu dises pourquoi tu as fait ce podcast, pourquoi tu l'as monté.

  • #Guglielmo

    Wow, alors pourquoi j'ai monté AZERTY ? Je pense que AZERTY est né pour moi parce que je voyais autour de moi de nouvelles technologies comme par exemple l'intelligence artificielle et je voyais la difficulté qu'on a et que j'avais autour de moi... moi je travaille beaucoup avec les maths je travaille avec l'ordinateur et de les différents points de vue que je voyais autour de moi c'est à dire qu'il y avait des gens qui étaient plutôt facilement anti-tech des gens qui étaient un peu pro- tech "teubé" et du coup ça m'a toujours passionné à moi en plus moi je suis la génération qui a grandi avec l'arrivée d'internet et l'arrivée de numérique. Et du coup, je voyais un sujet intéressant, aussi d'un point de vue, entre guillements "militant", dans le sens de dire, il faut entamer ces sujets-là, il faut discuter de qu'est-ce que la technologie dit de nous, comment ça nous impacte, parce qu'il y a autour de moi, je voyais, beaucoup de gens qui disaient, ah mais ces sujets, c'est pour les geeks. Ces sujets, c'est pour les gens techniques. Et moi, j'étais là à dire, mais non, attends, ta vie est complètement impactée de comment tu utilises ton portable, de comment tu utilises Internet, qu'est-ce que Internet fait de toi, de tes données. Et les gens disaient, ouais, mais bon, ça, ça ne m'intéresse pas, ça me fait juste bader. Attends, peut-être qu'il y a un moyen de discuter de ces sujets-là. Et du coup, je me suis intéressé. En plus, moi, j'ai fait physique et chimie. J'ai fait chimie physique pour la précision dans mes études, mais j'hésitais beaucoup avec sociologie. Du coup, j'avais eu un intérêt, aussi sur ce qu'on appelle STS, Science Technology Studies, qui est la critique, la sociologie de la technologie. Du coup, je me suis dit, allez, voilà. Et en plus, j'étais toujours passionné de SF.

  • #Alice

    SF, science-fiction.

  • #Guglielmo

    Du coup, j'ai rencontré après Alex à travers la radio, qui est l'autre co-host. Et lui, il avait toujours plus ou moins la même passion. Moi, au début, je voulais faire un projet seulement sur l'intelligence artificielle. Et après, rapidement, il m'a convaincu à dire, il y a plein de sujets intéressants, allons-y. Et l'angle qu'on a choisi est vraiment... d'essayer de se poser des questions pour tout le monde. C'est pas vraiment un podcast de la tech pour des gens de la tech. Mon objectif, c'est de dire telle personne qui, normalement, n'est pas un geek ou une geek ou un nerd de ces choses-là, n'est pas passionné d'ordinateurs ou de jeux vidéo, ah ben voilà, cette personne-là a trouvé quelque chose d'intéressant et qui lui parle de son rapport à la technologie.

  • #Alice

    Est-ce que t'aurais lancé ce podcast en italien ?

  • #Guglielmo

    Alors, bonne question. Parce que c'est beau d'être en France. Je m'explique mieux. Le milieu radio italien et de podcasts de radio associative, par exemple, qui est une salle de sport incroyable pour apprendre à faire de l'audio, les radios associatives, n'existe pas autant qu'en France. Du coup, je pense qu'à l'époque 2008-2009, avec des copains, c'était un moment de mouvement social en Italie, une réforme de l'université plus la crise économique qui arrivait. On avait lancé un web radio, mais au final, on avait laissé tomber. Et je me rends compte que cette passion, je l'ai repris beaucoup d'années après parce que j'ai trouvé un terreau fertile. Du coup, je ne sais pas si je l'aurais lancé en italien, parce que peut-être j'aurais pas eu l'entourage autour de moi, l'envie, le fait de percevoir que c'est possible de le faire. Je sais pas si c'est clair ce que j'ai dit. C'est vraiment le fait qu'en Italie, je suis baigné beaucoup moins par ce genre d'initiatives. En France, je les ai trouvées assez facilement. Du coup, tu te dis "Allons-y, peut-être je peux le faire.".

  • #Alice

    Super, merci. Maintenant, c'est le moment de la question rituelle pour clore notre entretien. On a commencé un peu à en parler dans le cours de notre dialogue. Mais qu'est-ce que tu fais ou tu dis en français que tu ne peux pas faire ou dire en italien ?

  • #Guglielmo

    Et l'inverse ou seulement dans ce sens ?

  • #Alice

    Plutôt dans ce sens-là.

  • #Guglielmo

    Que je peux dire en français mais je ne peux pas dire en italien. #Alice Ou faire. #Guglielmo Ou faire. Alors ça c'est compliqué pour moi parce que comme je disais il y a plein de proverbes que ne se traduisent pas. Et certains oui. Du coup il y a des expressions que j'adore en français. Et que du coup à chaque fois je dois les expliquer. Du coup c'est pas quelque chose que je ne peux pas faire. Mais ça demande une action de plus, de l'expliquer. Comme notamment, "ah bah celui-là n'est pas le couteau le plus aiguisé du tiroir". C'est une expression que j'adore, je la trouve magnifique et je ne peux pas trop l'utiliser en italien. Du coup, voilà, c'est plus ça. Après, je répète, avec le fait que c'est deux langues similaires, j'ai un peu du mal à cibler une chose plus précise. C'est plus le problème des traductions.

  • #Alice

    D'accord, c'est vraiment centré sur la langue. Et puis, comme on l'a vu finalement, le fait de faire des... C'est ce que tu as dit tout à l'heure autour du podcast. Oui, tu l'as lancé en français, mais peut-être que tu l'aurais fait en italien. Mais ce n'est pas la langue qui pose problème ou qui incite à le faire. C'était vraiment plus l'environnement dans lequel tu te trouvais.

  • #Guglielmo

    Il y a une autre chose que je ne peux pas plus faire en italien : parler correctement italien. C'est-à-dire que, vu que ma compagne actuelle, Roberta, est italienne aussi, je suis toujours en contact avec beaucoup de copains italiens, mais je vis en France. Mon français n'est pas parfait, mais mon italien est contaminé, et mon français aussi, par l'autre langue, et étant de langues similaires. Et du coup, des fois, quand je rentre les premières semaines en Italie, mes copains, mais ils se foutent de ma gueule, mais un point pas possible, parce que je ne parle pas vraiment italien. Je parle la langue que j'ai inventée entre l'italien et le français. Et du coup, je ne peux plus parler correctement l'italien. Ça, c'est pas mal. Oui, effectivement. Super, c'est hyper intéressant de voir un peu cette douleur qu'on peut avoir, mais qui n'est pas une fatalité, parce que, comme tu dis, c'est aussi une question d'acclimatation. Et au bout d'un certain temps, j'imagine que ton italien revient, même s'il y a toujours un peu des petites nuances, des petites touches, comme des petits coups de pinceau de français, j'imagine.

  • #Alice

    Voilà, oui, complètement. Après, je ne sais pas parce que je ne rentre généralement que quelques semaines et du coup, je ne dépasse jamais le temps d'adaptation. Mais oui, je pense, oui. Si je redéménageais en Italie, probablement, oui, l'italien revient. J'espère !

  • #Guglielmo

    Alors, Guglielmo, avant qu'on se quitte, j'ai quand même un dernier, j'ai un petit cadeau pour toi et je suis très heureuse de pouvoir le faire parce que comme d'habitude, on est à distance, je ne peux pas faire de cadeau à mes invité·es. Mais voilà, je t'offre ce marque-page, du podcast Moi-même en français. Sur ce marque-page, il y a une citation. Est-ce que tu peux nous la lire ?

  • #Alice

    Merci déjà pour le marque-page. "J'accepte la grande aventure d'être moi."

  • #Guglielmo

    Qu'est-ce que ça t'inspire ?

  • #Alice

    La chose que ça m'inspire, ce n'est pas lié à la langue. C'est lié plutôt à soi-même. Moi, je dis tout le temps comme blague, que j'ai décidé de prendre toute ma vie pour essayer de comprendre qui je suis. Et du coup, "j'accepte cette grande aventure..." pour moi,'est pas juste lié à la langue. Après, c'est vrai que pour moi, il y a deux Guglielmo. Il y a le Guglielmo français et super-imposé, il y a légèrement différent le Guglielmo italien. Je n'arrive pas à avoir le même humour, le même humorisme. Je fais encore plus de blagues en italien. Et je n'arrive pas des fois en français. Ou si j'essaye, ça ne passe pas. Ce n'est pas drôle. Du coup, c'est comme s'il y avait deux "moi" un peu différents, avec de petits détails différents. Du coup, voilà, c'est ça que m'inspire cette phrase, d'accepter le fait d'être double. Et que je vais passer toute ma vie à essayer de comprendre qui je suis déjà. C'est pas mal. Quand on préparait cet entretien, tu m'as dit quelque chose comme « je suis pas sûr de tout savoir sur moi » .

  • #Guglielmo

    Voilà, c'est exactement ça. Et qui est sûr, eh bah bravo hein !

  • #Alice

    Oui, effectivement. Et je pense que Simone de Beauvoir, puisque c'est elle qui a écrit ça, je pense que c'est un peu ce qu'elle voulait transmettre, qu'effectivement, c'est toute une aventure de se trouver, de savoir qui on est. Et en plus... sachant qu'on va beaucoup évoluer donc on saura peut-être jamais vraiment qui on est. En tout cas je me suis beaucoup retrouvée dans ta propre définition et comment tu as lu cette citation merci beaucoup . #Guglielmo Merci à toi. C'est la fin de cet épisode parce qu'on doit maintenant laisser la place à un atelier qui se tient pour ce festival de Pod'Paris. J'étais vraiment mais enchantée de là je pense que c'est un peu mon influence espagnole parce que "estoy encatada!", je suis enchantée de t'avoir rencontré Guglielmo, et d'avoir fait cet épisode dans ce cadre assez exceptionnel. Donc, c'était une super première expérience pour moi. Merci beaucoup d'avoir accepté mon invitation. #Guglielmo : Et merci à toi pour l'invitation. Ami·es non francophones, merci et bravo d'avoir suivi cet épisode jusqu'au bout. Moi, je pense que tu peux vraiment être fier/fière, surtout que Guglielmo a vraiment des expressions très françaises. Il parle un peu de verlan, il sort des proverbes en français. Je pense que je ferai une petite note dans l'article de blog qui accompagne l'épisode, peut-être pour traduire certaines petites choses. Enfin, pas traduire, mais réexpliquer. Par exemple, la super expression « c'est pas le couteau le plus aiguisé du tiroir » . J'espère que son parcours t'a inspiré·e et te donnera envie de poursuivre ton propre chemin pour être et devenir toi-même en français. Pour recevoir plus de conseils, d'idées, de ressources, tu peux t'abonner à ma newsletter, La Lettre du mois. À la prochaine !

  • #Guglielmo

    Salut à tout le monde, à la prochaine !

  • #Alice

    Et voilà, c'était Moi-même en français, un podcast d'Aliahe, conçu et présenté par Alice Mansaud. Retrouve tous les épisodes sur le site aliae.fr et partage tes commentaires sur le blog. À toi de jouer !

Description

"Je ne suis pas sûr de tout savoir sur moi..." m'a dit Guglielmo quand je lui ai parlé du podcast Moi-même en français.

Et justement, dans cet épisode il a accepté d'explorer son "lui-même" français avec moi. Il raconte ses premiers mois en France, dans une France post-attentats du Bataclan, dans une université bloquée et mobilisée face à la loi Travail. Comment apprendre quand il n'y a pas de cours ?

Mais son voyage en français ne s'est pas arrêté là : entre ses expériences radio et le lancement de son podcast, il a pu continuer à chercher et devenir lui-même !

Embarque avec lui dans ses souvenirs et ses réflexions pour réfléchir à tes propres défis en français et comment tu veux les affronter : comment gérer son accent "étranger" ? comment se perfectionner quand on n'a pas envie de méthodes scolaires ? comment gérer ce nouveau "moi" dans ton pays d'origine ?

Et le bonus : Guglielmo va t'apprendre une expression super authentique ! Allez, je te lance un défi : trouver la signification de l'expression sans dictionnaire ni IA ! Chiche ? 😋


🤔❓Tes questions à Allo Aliaé : https://www.speakpipe.com/MoiMemeEnFrancais.😌

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🌠Au fait, qui je suis MOI ? 😉 Alice Mansaud, coach de français, Neurolanguage coach®. Actuellement basée à Valencia en Espagne, j'accompagne les non-francophones partout dans le monde, depuis 2016.


📧Abonne-toi à la newsletter La Lettre du Moi(s) : une touche d'inspiration pour être et devenir toi-même en français - https://www.aliae.fr/inscription-lettre-du-moi-s


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • #Alice

    Moi-même en français. Le podcast pour être et devenir toi, même si le français n'est pas ta langue maternelle. Je suis Alice et aujourd'hui je te propose d'écouter les souvenirs d'un devenir. Ami·es non francophones, bienvenue dans la section Souvenirs d'un devenir, où j'échange avec des non francophones comme toi, qui apprennent le français comme toi, et qui sont devenu·es elles-mêmes en français comme toi. Comme d'habitude, je laisse cette question ouverte pour que tu puisses réfléchir à ta propre réponse. Alors aujourd'hui, je vais discuter avec Guglielmo. C'est un peu particulier parce que c'est une interview en direct, ce qui est la première fois que je fais une interview en direct, puisque d'habitude j'enregistre à distance. Et donc là, je vais littéralement tendre mon micro à mon invité. Guglielmo est italien, non francophone, dans le sens où le français n'est pas sa langue maternelle. qui a dû donc apprendre le français adulte. Bonjour et bienvenue, Guglielmo.

  • #Guglielmo

    Bonjour.

  • #Alice

    Alors, est-ce que, comme je le disais, on est en direct là tous les deux. Est-ce que tu peux décrire un petit peu la pièce où on est ? Pourquoi on est là tous les deux aujourd'hui ?

  • #Guglielmo

    Alors, on est à Pod'Paris, qui est un festival de podcast indépendant organisé par l'association BadGeek, qui est une association de podcasteurs et podcasteuses indépendants. Et on est dans une salle, comment il s'appelle le lieu ? La Bellevilloise, à Paris. Dans une salle, pas dans les salles principales, dans une salle à côté, avec plein de fauteuils, il y a plein de canapés. Il y a des objets un peu bizarres accrochés au mur, genre la tête d'une girafe, une tortue géante, un planisphère, et tous des objets comme ça. Mais c'est assez stylé.

  • #Alice

    Oui, effectivement, bonne description, avec un petit peu de verdure et des canapés qui ont l'air bien confortables. Merci beaucoup pour cette description est-ce que maintenant tu peux nous dire un peu pourquoi toi tu es venu à PodParis ?

  • #Guglielmo

    Je suis venu à PodParis parce que moi je suis un passionné de radio associative en général et de podcast et j'ai mon podcast qui s'appelle Azerty qui parle de société numérique mais on était là aussi pour rencontrer d'autres podcasts, faire des séances d'écoute en général rencontrer du monde,des choses comme ça

  • #Alice

    Ok, tu es le premier podcasteurs non francophones que j'interview. Donc, c'est quand même un parcours qui est assez exceptionnel, je dirais, de faire un podcast, de vraiment sortir ta voix en français dans un podcast, alors que ce n'était pas ta langue maternelle. Comment tu en es venu à cette étape de ta vie de lancer ce podcast AZERTY ?

  • #Guglielmo

    Alors, d'ailleurs, je faisais déjà d'autres podcast avant de première chose et deuxième chose pour moi clarifier dans ma démarche de podcast je n'ai fait pas de podcast pour mettre en avant ma voix ça c'est quelque chose qui est très personnel et peut-être n'a pas complètement à voir avec la langue mais pour moi la démarche que j'aime est surtout de tendre les micros à d'autres personnes et qui est du coup pour ça quelque part j'ai essayé toujours d'effacer un peu ma voix et au début quand j'ai commencé effectivement ça me faisait des complexes j'avais demandé à des gens surtout en radio qu'ils ont de métiers sont journalistes "Est-ce que c'est approprié ? Est-ce que mon accent n'est pas trop fort ?" Ou des choses comme ça. Et les réponses que j'ai eues, c'est « Ah non, déjà, c'est attachant l'accent italien » qui d'un côté, ça fait un peu… Ah, c'est bizarre, en même temps, je n'aimerais pas avoir de l'accent, mais je ne sais pas…

  • #Alice

    Tu veux dire que c'est ce que toi, tu as pensé quand on t'a fait ce retour, on t'a renvoyé l'image de « Mais oui, ton accent, il est mignon, il est joli, c'est attachant. » Toi, tu as pensé « Ah non, mince, ça veut dire qu'on entend mon accent. » C'est ça ?

  • #Guglielmo

    Oui un peu et j'ai toujours un rapport un peu ambivalent avec l'accent parce que d'un côté j'aimerais bien parler vraiment bien français et de l'autre côté je me rends de plus en plus compte que c'est important, c'est mes origines, c'est aussi ma façon de parler, c'est un peu spécial. Du coup c'est toujours un rapport un peu compliqué. Or la chose qui m'a poussé aussi c'est que les gens m'ont dit "écoute tu es complètement compréhensible en français et du coup ça c'est déjà suffisant et bien au contraire c'est beaucoup important de casser un peu les codes de la radio". C'est ça qu'on m'a dit à l'époque. En disant, "les accents sont beaux aussi par rapport à la voix lisse qu'on est habitué à entendre et la voix très formatée des fois dans certains médias".

  • #Alice

    Oui, bien sûr. Et puis c'est vrai qu'il peut y avoir aussi des représentations derrière certains accents. Et la représentation de l'accent italien en France, il va être très lié à un environnement artistique et culturel. Donc peut-être que ça passe bien aussi dans l'écosystème de la radio. Ce n'est pas la même chose que d'autres accents dans le monde ou même à l'intérieur de la France et de la francophonie. Il y a des accents qui ont des représentations moins prestigieuses, moins valorisées. Donc, effectivement, tu avais peut-être la chance, au moins que ce soit un accent italien, non ?

  • #Guglielmo

    Oui, et c'est intéressant. C'est un sujet sur lequel j'ai réfléchi depuis quelques mois. Je serais intéressé de savoir depuis quand c'est ça. Parce qu'à une époque, les Italiens en France n'étaient pas, comment dire, trop les bienvenus. Du coup, j'aimerais bien regarder un peu comment ça a changé la perception de l'italianité en France avec le temps. Je n'ai pas de réponse en ce moment. Mais avant, ce n'était pas comme ça, quoi.

  • #Alice

    Non, non, effectivement, en fait, merci. Tu viens de me faire me souvenir de mes propres origines. Mon arrière-grand-père était italien. Et effectivement, donc, mon grand-père qui portait son nom de famille... Quand ma grand-mère a rencontré mon futur grand-père, sa propre mère lui a dit « Attention, il est italien » .

  • #Guglielmo

    Voilà, voilà, un grand classique. Il y a certains stéréotypes qui restent aujourd'hui. Ce n'est pas complètement mort la chose, mais bon, ça va mieux.

  • #Alice

    Non, effectivement, je pense que c'est lié vraiment aussi à l'histoire de France, l'histoire de l'immigration en France. Alors, du coup, toi, quelle est… ton histoire d'immigration, d'émigration vers la France ?

  • #Guglielmo

    Moi, je suis arrivé en France pour faire une partie de ma thèse. C'était une thèse en sciences, en chimie physique. Et du coup, on m'a proposé à la fin de mes masters, je voulais faire une thèse à l'étranger. Et la chef de mon labo, Roberta Cessoli, à Florence, m'a proposé de faire une thèse en co-tutelle entre la France et l'Italie. Et d'ailleurs, une ville en France que moi, je n'avais jamais entendu parler, qui s'appelle Rennes. Et je ne savais même pas si Rennes était en Bretagne ou dans les Champagnes. Parce qu'en Italie, Reims, on dit [reims].

  • #Alice

    En espagnol aussi, effectivement, c'est [reims]. Pour Reims, la capitale du Champagne. Mais Rennes, la capitale bretonne.

  • #Guglielmo

    Voilà. Et après, j'ai rencontré un copain italien qui avait fait sa thèse à Rennes et qui m'avait dit, vas-y, c'est une ville trop bien. Vas-y, etc. Et du coup, j'arrive en France. La première fois, je pense, c'était décembre 2015. Et après, définitivement, janvier 2016, et du coup, j'arrive dans la France après attentat. Et déjà, c'était une ambiance un peu bizarre. Je me souviens, la première arrivée à l'aéroport, il y avait une alarme pour un colis qui pouvait être un attentat et des choses comme ça.

  • #Alice

    Je précise donc les attentats du Bataclan, c'est ça, ces attentats-là, d'accord, en 2015, ok.

  • #Guglielmo

    Voilà, voilà, voilà, du coup, je m'installe et j'avais fait seulement un cours de langue A1 avant en Italie. Du coup, j'étais à peine capable de dire « je m'appelle Guglielmo » . Stop. Et après, du coup, j'arrive à travers l'université pour étudier et bosser en France. Et du coup, j'ai commencé un cours de langue au CIREF, qui est le centre de langue de Rennes, de l'université de Rennes, pour la précision Rennes 2. Or, en 2016, il se passe quelque chose en France aussi.

  • #Alice

    Alors là, ça y est, je suis complètement collée. J'ai un gros blanc. Qu'est-ce qui s'est passé en 2016 ?

  • #Guglielmo

    La loi travail. La loi travail, j'étais à Rennes, l'université de Rennes 2, on l'appelle Rennes 2, "la Rouge", parce qu'à chaque fois qu'il y a quelque chose qui ne va pas, on la bloque. Et du coup, moi, j'arrive avec l'intention de faire un A2, B1, mais c'était impossible parce qu'à chaque fois, la fac était bloquée. Et du coup, je n'ai jamais vraiment appris le français en l'étudiant de façon scolaire. Parce qu'à l'époque, la fac était fermée, la seule chose que je pouvais faire, c'était aller dans les bars, boire des coups avec des gens, essayer de comprendre qu'est ce que les gens disaient. Du coup vraiment mon français s'est construit autour de ça. Après il y a une chose qui a aidé la qualité de mon français et qui à un moment donné j'ai trouvé une compagne en France qui était enseignante de FLE et pour éviter n'importe quel problème de couple on a fait un deal pour lequel elle n'allait pas m'apprendre le français mais on a passé une phase dans laquelle elle voulait apprendre l'italien du coup moi j'ai parlé italien, elle français. Et après, on a inversé. C'est-à-dire que moi, je lui parlais français, elle parlait italien. Alors, des fois, on ne comprenait pas la chose que l'autre disait, mais au moins, ça nous a permis, d'une façon un peu plus fluide et moins scolaire, d'apprendre le français.

  • #Alice

    D'accord. Donc, en gros, vous étiez dans une conversation, à la maison, au quotidien." Qu'est-ce qu'on fait à manger ce soir ?" Et il y en avait un qui posait la question en français ou en italien, et l'autre répondait dans l'autre langue, c'est ça ?

  • #Guglielmo

    Oui, voilà. Voilà, et après on demandait en anglais s'il y avait des mots que vraiment on ne comprenait pas. Et des fois, bon, alors les embrouilles à l'époque, on les faisait en anglais, parce que là, comme ça, on est sûr de se comprendre. Mais sinon, oui, il y avait souvent ce côté un peu bizarre de ce double dialogue italo-français. Après, l'italien et le français, c'est des langues relativement similaires. Du coup, on comprenait. Moi, les gens, ils étaient étonnés au début, parce que j'avais un vocabulaire très précis. Mais tout simplement parce que j'avais appris un... Comment on dit ? Pas les pièges, mais... les hacks du français, de prendre un mot italien et qui souvent se rend un peu français, ça ressemble beaucoup au mot français. Et du coup, il y avait des mots que les gens disaient, "comment tu fais pour connaître ces mots-là ?" Moi, je sais pas, j'ai appris le mot italien et je l'ai rendu un peu français, quoi.

  • #Alice

    Oui, effectivement, c'est un grand atout qu'il y a entre le français et l'italien qui sont des langues romanes. C'est qu'on peut transformer un peu. Et c'est vrai que pour les auditeurices qui nous écoutent, si vous avez une langue maternelle comme l'espagnol, le portugais, le roumain, le catalan, et que vous apprenez le français, il faut pas hésiter, à oser le mot avec le mot qui vient de votre langue et qui sonne français. On le francise un peu, voilà, en espagnol et en italien comme, je ne sais pas, nazione, nacion. En français, on va faire la nasale, le nez nation et ça passe, quoi. Ce n'est pas du vocabulaire très, très précis comme ce que tu devais utiliser. Mais en tout cas, je trouve que c'est super important de se dire qu'on peut oser, on peut essayer. Et puis en plus ça a l'avantage d'entraîner un peu le cerveau à faire une prononciation française et donc à observer comment les francophones parlent et essayer d'imiter et ça en plus ça va beaucoup aider pour la prononciation, l'accent qu'on peut avoir en français.

  • #Guglielmo

    Oui et pour moi il y avait aussi une autre chose à l'époque, je me refusais un peu de m'enfermer dans des cercles d'étrangers, c'est-à-dire que, soyons honnêtes, en vrai... tous les trois, en France on dit les Italiens et l'Espagnol, mais aussi c'est vrai pour les Français à l'étranger, on a la tendance à faire groupe un peu, parce que ça nous sort moins de la zone de confort. Et moi je m'étais dit, non, je vais vraiment essayer de vivre en France, et du coup, à mon boulot aussi on parlait que français, il y avait très peu d'étrangers dans mon labo de recherche, du coup, pour comprendre, c'était un peu nécessaire, et après oui, j'avais un peu une démarche d'esquiver toutes les situations dans lesquelles je voyais, ah, c'est entre expats. Je ne parle pas d'immigrés parce que les Italiens, je ne pense pas qu'on puisse le définir aujourd'hui "immigrés" en France. C'est plus des expats pour moi, parce qu'il faut rendre aussi d'autres peuples qui arrivent en France vraiment immigrés, avec un statut un peu différent. Et du coup, j'ai essayé d'esquiver un peu, oui c'est ça, le monde des expats. Et ça, je pense, ça a aidé un peu parce que j'ai socialisé en français plus rapidement.

  • #Alice

    La distinction que tu fais entre expats et immigrés, effectivement, c'est un grand sujet, je trouve, sur la mobilité internationale, parce qu'on va effectivement avoir plutôt les pays du Nord, des personnes qui viennent des pays du Nord, entre guillemets, occidentalisés, qui bougent sur la planète. On va les appeler des expats, mais par contre, quand quelqu'un qui vient d'Afrique vient en France, on va l'appeler un immigré. Et c'est comme tu le dis... C'est à la fois un peu injuste de faire cette différence, mais en même temps, c'est important de montrer qu'effectivement, y'a pas les mêmes enjeux pour une personne qui vient d'Afrique que pour quelqu'un qui vient d'Italie. Et une personne qui vient d'Afrique va avoir beaucoup plus de problématiques pour s'intégrer, va être racisée en France. Et ce qui n'a peut-être pas été ton cas, toi, quand tu as commencé à vivre en France. Mais justement, j'ai envie de te demander, quelle a été ton expérience dans ta sociabilisation en français en tant qu'Italien ?

  • #Guglielmo

    Oui, alors d'ailleurs, juste une chose sur la différence expat et immigré. Alors peut-être des militants, des coloniaux ou des sociologues pourraient me sauter dessus. Mais pour moi, la différence, c'est est-ce que la population qui arrive subit du racisme ou de la colonisation ou de la colonie en général ? Si c'est ça, pour moi, j'utilise immigré. Sinon, c'est des expats. Du coup, pour moi, la différence est vraiment liée à ça. Par rapport à ma socialisation en français, là, la question est un peu compliquée dans le sens où là, ça fait beaucoup de temps que je suis arrivé en France. Et il faut savoir que je suis reparti de la France aussi. Et du coup, j'ai eu une sorte de deux départs, deux fois. C'est-à-dire qu'après ma thèse, j'ai voyagé en Amérique latine. Non, je suis d'abord rentré en Italie. Après, j'ai voyagé en Amérique latine. Et après, je suis revenu en France. Du coup, c'est comme s'il y avait un premier temps en France et un deuxième temps. Et dans le premier temps, la socialisation, moi j'ai eu de la chance de rencontrer des gens très chouettes qui, du coup, ils venaient vers moi à travers le fait que je comprenais pas tout et qui, du coup, m'aidaient beaucoup. Et ça amenait aussi, je pense notamment à une personne, ça amenait beaucoup aussi à de l'humour autour de ça. Des fois, je comprenais pas si c'était un humour sur moi ou avec moi. Mais la majorité des fois, je pense vraiment à une personne, c'était de l'humour avec moi. Parce que je disais des choses qui n'avaient pas de sens et du coup, étaient rigolotes.

  • #Alice

    D'accord. Et donc, cette personne, justement, elle pouvait t'expliquer pourquoi c'était drôle, qu'est-ce qui faisait que c'était drôle en français de dire ce que t'avais dit ?

  • #Guglielmo

    Oui, oui, complètement, complètement. Après, il y avait toujours l'explication qui arrivait quand je voyais des choses bizarres, des choses comme ça. Oui, oui, bien sûr.

  • #Alice

    Tu as un exemple, une anecdote ?

  • #Guglielmo

    C'est ça le problème, ça a passé tellement de temps. Alors, il y a une anecdote, je pense que ça va revenir plus tard, c'est les proverbes.

  • #Alice

    D'accord. Qu'est-ce que tu veux dire ?

  • #Guglielmo

    Je veux dire que... il y a beaucoup de proverbes qui sont similaires entre l'italien et le français mais pas toutes. Et du coup, pas tous les proverbes. Du coup, des fois j'utilisais des expressions qui venaient de l'italien et qui n'avaient aucun sens en français. Et du coup ça les faisait rire. Et des fois j'essayais d'imiter des mots, des façons de dire françaises mais je les utilisais hyper mal et du coup ça menait à de l'humour quand on te comprend pas et tu essaies de réutiliser quelque chose que tu comprends pas, ça peut être drôle.

  • #Alice

    Oui, effectivement. Et comment tu as vécu ton processus d'apprentissage, c'est-à-dire vraiment cette évolution pour petit à petit passer d'un niveau A1 quand même, qui est extrêmement débutant, à aujourd'hui, cette capacité que tu as de t'exprimer avec une très grande fluidité, de travailler, être complètement, de vivre en français ?

  • #Guglielmo

    C'était toujours un rapport conflictuel, c'est-à-dire... qu'à chaque fois, je voulais m'y remettre à étudier le français. Mais au final, je vivais déjà en France et j'avais un niveau de vie qui était suffisant pour me faire comprendre et qui, du coup, ouais, il y avait ce conflit intérieur de « Ah, je devrais améliorer mon français. » Mais au final, je vis déjà bien. J'ai plein de choses. Je suis à Rennes. J'aime bien aller dans les bars. J'ai pas de besoin. Et du coup, je sais pas. Et ouais, du coup, pour des années, c'était un peu, il y avait ces deux choses d'un côté de dire, je l'apprends à travers la vie. Et de l'autre côté, ouais, mais ça serait bien quand même d'apprendre les règles de l'accord. Et de l'autre côté, ah mais l'accord, c'est chiant à étudier, c'est compliqué. Tu vois un peu ce que je veux dire ? Vraiment, il y avait ces doubles choses qui me tiraient de deux côtés.

  • #Alice

    Mais du coup, est-ce que tu as vraiment appris des règles ? Du coup, est-ce que tu as suivi des cours ou tu t'es plongé dans des bouquins ? Qu'est-ce que tu as fait alors pour améliorer ?

  • #Guglielmo

    Je n'ai jamais fait de cours parce que, comme je le disais, il n'y avait pas ces côtés-là. Je pense que la majorité, c'était commencer à lire, à lire en français, à regarder aussi, ah ouais, là, il y a eu un passage effectivement plus tard que ma langue s'est améliorée, ah YouTube aussi. Oui. Il faut savoir que par rapport à d'autres pays, le YouTube français est assez développé. Au niveau de vulgarisation scientifique, un peu comme celui anglais américain au niveau de essais politiques, de médias alternatifs. Il y a plein de choses sur le YouTube français. Et j'avoue que je pense que ça m'a beaucoup aidé en réfléchissant. Et après, les cinémas. Moi, j'aime bien le cinéma. Et du coup, à l'époque, j'allais souvent dans deux cinémas d'essais à Rennes. Et effectivement, je me rends compte qu'à l'époque, peut-être que je ne donnais pas beaucoup de poids à ça comme moyen d'améliorer ma langue. C'était pas ça l'objectif. Mais là, rétrospectivement, je me dis, ah oui, effectivement, tous les films français que je me suis tapé, ou tout simplement, tous les fois où mes copains voulaient voir, ou ma compagne de l'époque voulait voir un film en français ou un film avec des sous-titres français. Au final, je pense que ça a aidé. Merci Léa pour avoir insisté.

  • #Alice

    Mais effectivement, ce que tu dis, on voit bien la différence entre deux types d'apprentissage qui peuvent être tout à fait complémentaires. Et aussi, il peut y avoir des choix de la personne d'apprendre de telle ou telle manière. Et en fait, moi, quand je te pose la question, est-ce que tu as fait des cours ? Est-ce que tu as appris des règles ? Je me réfère à un apprentissage vraiment explicite où on va aller regarder comment est structurée la langue. On réfléchit à la syntaxe. On va faire exprès d'utiliser la langue juste pour l'apprendre. Et puis, il y a l'apprentissage implicite qui est ce que tu as fait en fait. Qui est l'apprentissage qu'on fait quand on est en immersion dans le pays, ou qu'on recrée de l'immersion, parce que des personnes qui vivent hors de France peuvent très bien se recréer de l'immersion en regardant des séries, des films, en écoutant des podcasts. Donc, effectivement, il y a cet apprentissage implicite qui est extrêmement puissant et qui n'est parfois pas toujours valorisé. Il y a des personnes qui vont se centrer sur un apprentissage explicite, faire des exercices. Alors que, comme tu le dis, ça peut être chiant, on n'a pas envie de le faire et donc il y a une démotivation qui vient avec ce type d'apprentissage. Alors qu'en fait, on peut aussi essayer d'apprendre de manière plus immersive, implicite.

  • #Guglielmo

    Là, je me suis souvenu aussi d'une autre chose. Tu m'as débloqué un souvenir qu'effectivement, le fait que j'avais des bouquins de langue française à la maison, même si je n'étais pas constant, mais que quand même j'avais les ressources qui étaient là présentes, même si je ne faisais pas de cours, même si je me souviens, je me suis souvenu là maintenant, que j'avais deux cahiers différents, que j'ai commencé en me disant, allez, là je me mets, je prends un bouquin, j'ai fait un cours, je suis le bouquin, j'ai fait tous les exercices, je vais m'améliorer. Jamais continuer plus de, je ne sais pas, quelques semaines, mais le fait de les avoir, de tenter plusieurs fois cette chose-là, je pense peut-être que s'est couplée à l'apprentissage implicite en donnant quelques bases de plus. Et récemment, j'augmente beaucoup le niveau, par contre, à travers toujours YouTube, toujours des films. Et je dois dire aussi, l'IA m'aide là récemment c'est-à-dire que...

  • #Alice

    L'intelligence artificielle, IA en français ?

  • #Guglielmo

    Oui, complètement. Parce que je l'utilise beaucoup pour le boulot. Et du coup, au final, des fois, quand je vois des choses complexes, je me fais aider. Par, genre,une IA s'appelle DeepL, de traduction. Et après, du coup, ça m'aide aussi à penser des formes en français qui, peut-être, je n'avais pas pensé. Voilà. #Alice Excellent. Effectivement, là, tu parles en plus d'un autre aspect qui est cette conscience qu'on a d'apprendre et qui est aussi très puissante quand on apprend pour s'améliorer. C'est, voilà, se dire, bah... En fait, là, je suis en train d'apprendre. Là, maintenant, je suis en train d'apprendre. Je peux m'améliorer. "Qu'est-ce que je vois dans cette phrase que je viens de traduire sur Deepl ? Qu'est-ce que je vois que je pourrais réutiliser dans d'autres cas ? Ah tiens, mais en fait, en italien, le verbe, on va le mettre à cet endroit-là, alors qu'en français, il va être à un autre endroit". Voilà, donc il y a des choses effectivement comme ça, simplement par la conscience qu'on a, qu'on est en train d'apprendre, et qui font énormément travailler le cerveau, donc ça peut être un peu fatigant, mais c'est très puissant. Oui. Après, au niveau biographique personnel, il y a vraiment la première phase que j'étais en Italie, comme je le disais, avant de repartir la première fois, j'étais plus observateur de la culture française aussi. C'est-à-dire, là, on parlait de la Loi Travail, et je me souviens que moi, j'ai aussi un petit côté militant, heu dans différents collectifs, dans des choses comme ça. J'arrivais en France, je ne connaissais pas le monde. Du coup, j'observais beaucoup ce qui s'est passé. Et je me sentais du coup un peu passif. Ce n'est pas que ça m'intéressait pas. C'est juste que je me sentais passif. Et la deuxième fois que je suis revenu en France, c'était un peu, bon, OK, on s'installe un peu, pour un petit moment. Et du coup, je suis devenu aussi plus actif dans des réseaux militants, dans des associations, dans des organisations. Et du coup, là, tu es un peu obligé, quoi. À un moment, tu veux, je sais pas... rentrer dans un collectif écologique, lancer un projet, je ne sais pas quoi, être tout simplement dans une asso de quartier, t'es un peu obligé de te faire comprendre par les gens. Et du coup, ça te pousse aussi à améliorer ta langue. Et effectivement, aussi dans l'apprentissage, quand j'étais passif, j'étais plus attentif à apprendre la langue. Et quand je me suis dit, je vais avoir une vie active, là, j'ai moins fait d'exercices, des choses comme ça. Je sais pas si tu vois un peu ce dualisme entre ces deux phases.

  • #Alice

    Tout à fait, effectivement. Et je pense que c'est très lié, comme tu l'as souligné, au fait que tu avais cette envie de t'installer, que tu sais que tu vas rester pour un petit moment et puis vraiment de participer à la vie de la société. Et quand tu parles de tes engagements, de tes intérêts, ça me fait penser aux thématiques de ton podcast où clairement, donc tu as parlé tout à l'heure du fait que c'était sur la société numérique. Mais moi, quand j'ai entendu, j'ai vu qu'il y avait beaucoup de hauteur, il y avait une mise en perspective par rapport effectivement aux impacts de la technologie dans notre société. Ça, c'est moi qui le dis, mais maintenant, j'aimerais que toi, tu dises pourquoi tu as fait ce podcast, pourquoi tu l'as monté.

  • #Guglielmo

    Wow, alors pourquoi j'ai monté AZERTY ? Je pense que AZERTY est né pour moi parce que je voyais autour de moi de nouvelles technologies comme par exemple l'intelligence artificielle et je voyais la difficulté qu'on a et que j'avais autour de moi... moi je travaille beaucoup avec les maths je travaille avec l'ordinateur et de les différents points de vue que je voyais autour de moi c'est à dire qu'il y avait des gens qui étaient plutôt facilement anti-tech des gens qui étaient un peu pro- tech "teubé" et du coup ça m'a toujours passionné à moi en plus moi je suis la génération qui a grandi avec l'arrivée d'internet et l'arrivée de numérique. Et du coup, je voyais un sujet intéressant, aussi d'un point de vue, entre guillements "militant", dans le sens de dire, il faut entamer ces sujets-là, il faut discuter de qu'est-ce que la technologie dit de nous, comment ça nous impacte, parce qu'il y a autour de moi, je voyais, beaucoup de gens qui disaient, ah mais ces sujets, c'est pour les geeks. Ces sujets, c'est pour les gens techniques. Et moi, j'étais là à dire, mais non, attends, ta vie est complètement impactée de comment tu utilises ton portable, de comment tu utilises Internet, qu'est-ce que Internet fait de toi, de tes données. Et les gens disaient, ouais, mais bon, ça, ça ne m'intéresse pas, ça me fait juste bader. Attends, peut-être qu'il y a un moyen de discuter de ces sujets-là. Et du coup, je me suis intéressé. En plus, moi, j'ai fait physique et chimie. J'ai fait chimie physique pour la précision dans mes études, mais j'hésitais beaucoup avec sociologie. Du coup, j'avais eu un intérêt, aussi sur ce qu'on appelle STS, Science Technology Studies, qui est la critique, la sociologie de la technologie. Du coup, je me suis dit, allez, voilà. Et en plus, j'étais toujours passionné de SF.

  • #Alice

    SF, science-fiction.

  • #Guglielmo

    Du coup, j'ai rencontré après Alex à travers la radio, qui est l'autre co-host. Et lui, il avait toujours plus ou moins la même passion. Moi, au début, je voulais faire un projet seulement sur l'intelligence artificielle. Et après, rapidement, il m'a convaincu à dire, il y a plein de sujets intéressants, allons-y. Et l'angle qu'on a choisi est vraiment... d'essayer de se poser des questions pour tout le monde. C'est pas vraiment un podcast de la tech pour des gens de la tech. Mon objectif, c'est de dire telle personne qui, normalement, n'est pas un geek ou une geek ou un nerd de ces choses-là, n'est pas passionné d'ordinateurs ou de jeux vidéo, ah ben voilà, cette personne-là a trouvé quelque chose d'intéressant et qui lui parle de son rapport à la technologie.

  • #Alice

    Est-ce que t'aurais lancé ce podcast en italien ?

  • #Guglielmo

    Alors, bonne question. Parce que c'est beau d'être en France. Je m'explique mieux. Le milieu radio italien et de podcasts de radio associative, par exemple, qui est une salle de sport incroyable pour apprendre à faire de l'audio, les radios associatives, n'existe pas autant qu'en France. Du coup, je pense qu'à l'époque 2008-2009, avec des copains, c'était un moment de mouvement social en Italie, une réforme de l'université plus la crise économique qui arrivait. On avait lancé un web radio, mais au final, on avait laissé tomber. Et je me rends compte que cette passion, je l'ai repris beaucoup d'années après parce que j'ai trouvé un terreau fertile. Du coup, je ne sais pas si je l'aurais lancé en italien, parce que peut-être j'aurais pas eu l'entourage autour de moi, l'envie, le fait de percevoir que c'est possible de le faire. Je sais pas si c'est clair ce que j'ai dit. C'est vraiment le fait qu'en Italie, je suis baigné beaucoup moins par ce genre d'initiatives. En France, je les ai trouvées assez facilement. Du coup, tu te dis "Allons-y, peut-être je peux le faire.".

  • #Alice

    Super, merci. Maintenant, c'est le moment de la question rituelle pour clore notre entretien. On a commencé un peu à en parler dans le cours de notre dialogue. Mais qu'est-ce que tu fais ou tu dis en français que tu ne peux pas faire ou dire en italien ?

  • #Guglielmo

    Et l'inverse ou seulement dans ce sens ?

  • #Alice

    Plutôt dans ce sens-là.

  • #Guglielmo

    Que je peux dire en français mais je ne peux pas dire en italien. #Alice Ou faire. #Guglielmo Ou faire. Alors ça c'est compliqué pour moi parce que comme je disais il y a plein de proverbes que ne se traduisent pas. Et certains oui. Du coup il y a des expressions que j'adore en français. Et que du coup à chaque fois je dois les expliquer. Du coup c'est pas quelque chose que je ne peux pas faire. Mais ça demande une action de plus, de l'expliquer. Comme notamment, "ah bah celui-là n'est pas le couteau le plus aiguisé du tiroir". C'est une expression que j'adore, je la trouve magnifique et je ne peux pas trop l'utiliser en italien. Du coup, voilà, c'est plus ça. Après, je répète, avec le fait que c'est deux langues similaires, j'ai un peu du mal à cibler une chose plus précise. C'est plus le problème des traductions.

  • #Alice

    D'accord, c'est vraiment centré sur la langue. Et puis, comme on l'a vu finalement, le fait de faire des... C'est ce que tu as dit tout à l'heure autour du podcast. Oui, tu l'as lancé en français, mais peut-être que tu l'aurais fait en italien. Mais ce n'est pas la langue qui pose problème ou qui incite à le faire. C'était vraiment plus l'environnement dans lequel tu te trouvais.

  • #Guglielmo

    Il y a une autre chose que je ne peux pas plus faire en italien : parler correctement italien. C'est-à-dire que, vu que ma compagne actuelle, Roberta, est italienne aussi, je suis toujours en contact avec beaucoup de copains italiens, mais je vis en France. Mon français n'est pas parfait, mais mon italien est contaminé, et mon français aussi, par l'autre langue, et étant de langues similaires. Et du coup, des fois, quand je rentre les premières semaines en Italie, mes copains, mais ils se foutent de ma gueule, mais un point pas possible, parce que je ne parle pas vraiment italien. Je parle la langue que j'ai inventée entre l'italien et le français. Et du coup, je ne peux plus parler correctement l'italien. Ça, c'est pas mal. Oui, effectivement. Super, c'est hyper intéressant de voir un peu cette douleur qu'on peut avoir, mais qui n'est pas une fatalité, parce que, comme tu dis, c'est aussi une question d'acclimatation. Et au bout d'un certain temps, j'imagine que ton italien revient, même s'il y a toujours un peu des petites nuances, des petites touches, comme des petits coups de pinceau de français, j'imagine.

  • #Alice

    Voilà, oui, complètement. Après, je ne sais pas parce que je ne rentre généralement que quelques semaines et du coup, je ne dépasse jamais le temps d'adaptation. Mais oui, je pense, oui. Si je redéménageais en Italie, probablement, oui, l'italien revient. J'espère !

  • #Guglielmo

    Alors, Guglielmo, avant qu'on se quitte, j'ai quand même un dernier, j'ai un petit cadeau pour toi et je suis très heureuse de pouvoir le faire parce que comme d'habitude, on est à distance, je ne peux pas faire de cadeau à mes invité·es. Mais voilà, je t'offre ce marque-page, du podcast Moi-même en français. Sur ce marque-page, il y a une citation. Est-ce que tu peux nous la lire ?

  • #Alice

    Merci déjà pour le marque-page. "J'accepte la grande aventure d'être moi."

  • #Guglielmo

    Qu'est-ce que ça t'inspire ?

  • #Alice

    La chose que ça m'inspire, ce n'est pas lié à la langue. C'est lié plutôt à soi-même. Moi, je dis tout le temps comme blague, que j'ai décidé de prendre toute ma vie pour essayer de comprendre qui je suis. Et du coup, "j'accepte cette grande aventure..." pour moi,'est pas juste lié à la langue. Après, c'est vrai que pour moi, il y a deux Guglielmo. Il y a le Guglielmo français et super-imposé, il y a légèrement différent le Guglielmo italien. Je n'arrive pas à avoir le même humour, le même humorisme. Je fais encore plus de blagues en italien. Et je n'arrive pas des fois en français. Ou si j'essaye, ça ne passe pas. Ce n'est pas drôle. Du coup, c'est comme s'il y avait deux "moi" un peu différents, avec de petits détails différents. Du coup, voilà, c'est ça que m'inspire cette phrase, d'accepter le fait d'être double. Et que je vais passer toute ma vie à essayer de comprendre qui je suis déjà. C'est pas mal. Quand on préparait cet entretien, tu m'as dit quelque chose comme « je suis pas sûr de tout savoir sur moi » .

  • #Guglielmo

    Voilà, c'est exactement ça. Et qui est sûr, eh bah bravo hein !

  • #Alice

    Oui, effectivement. Et je pense que Simone de Beauvoir, puisque c'est elle qui a écrit ça, je pense que c'est un peu ce qu'elle voulait transmettre, qu'effectivement, c'est toute une aventure de se trouver, de savoir qui on est. Et en plus... sachant qu'on va beaucoup évoluer donc on saura peut-être jamais vraiment qui on est. En tout cas je me suis beaucoup retrouvée dans ta propre définition et comment tu as lu cette citation merci beaucoup . #Guglielmo Merci à toi. C'est la fin de cet épisode parce qu'on doit maintenant laisser la place à un atelier qui se tient pour ce festival de Pod'Paris. J'étais vraiment mais enchantée de là je pense que c'est un peu mon influence espagnole parce que "estoy encatada!", je suis enchantée de t'avoir rencontré Guglielmo, et d'avoir fait cet épisode dans ce cadre assez exceptionnel. Donc, c'était une super première expérience pour moi. Merci beaucoup d'avoir accepté mon invitation. #Guglielmo : Et merci à toi pour l'invitation. Ami·es non francophones, merci et bravo d'avoir suivi cet épisode jusqu'au bout. Moi, je pense que tu peux vraiment être fier/fière, surtout que Guglielmo a vraiment des expressions très françaises. Il parle un peu de verlan, il sort des proverbes en français. Je pense que je ferai une petite note dans l'article de blog qui accompagne l'épisode, peut-être pour traduire certaines petites choses. Enfin, pas traduire, mais réexpliquer. Par exemple, la super expression « c'est pas le couteau le plus aiguisé du tiroir » . J'espère que son parcours t'a inspiré·e et te donnera envie de poursuivre ton propre chemin pour être et devenir toi-même en français. Pour recevoir plus de conseils, d'idées, de ressources, tu peux t'abonner à ma newsletter, La Lettre du mois. À la prochaine !

  • #Guglielmo

    Salut à tout le monde, à la prochaine !

  • #Alice

    Et voilà, c'était Moi-même en français, un podcast d'Aliahe, conçu et présenté par Alice Mansaud. Retrouve tous les épisodes sur le site aliae.fr et partage tes commentaires sur le blog. À toi de jouer !

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