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MORDANT

#36 - Mathieu Courdesses : Comment la photographie animalière éveille notre conscience de la faune sauvage ?

#36 - Mathieu Courdesses : Comment la photographie animalière éveille notre conscience de la faune sauvage ?

1h07 |18/06/2025
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Description

Cet épisode est sponsorisé par l'assurance santé animalière LASSIE :

Avec le code MORDANT40 j’ai le plaisir de vous offrir 40€ à toute nouvelle inscription !



Aujourd'hui dans Mordant j'ai le plaisir de recevoir Mathieu Courdesses, photographe animalier talentueux. Dès l'âge de 8 ans, un voyage inoubliable en Namibie a éveillé en lui un amour profond pour les animaux et les safaris, le virus comme il l’appelle, et ce virus ne l’a jamais quitté depuis.


Mathieu a su transformer sa passion en une carrière inspirante, d’étudiant en école de commerce, en passant par guide jusqu’à devenir photographe animalier et fondateur de sa propre maison de production.


Dans cet épisode on aborde les défis que représente la photographie animalière, notamment l'obtention des autorisations nécessaires, les réalités financières, les connaissances empiriques versus théoriques.


Au fil de la conversation, vous découvrirez comment la photographie peut servir de puissant outil de sensibilisation à la conservation de la nature.


Mathieu ne se contente pas de capturer des images à des fins purement esthétiques ; il s'engage également pour protection de la faune sauvage menacée, il fait partie de la nouvelle génération de photographes plus éclairée, plus éthique et plus respectueuse.


Avec Mathieu, on a aussi parlé d’écotourisme, de diplomatie environnementale et de la mode de la poudre de rhinocéros.


Je vous souhaite une bonne écoute !



-


Pour retrouver Mathieu Courdesses :

TikTok @mathieu.courdesses

Instagram @mathieucourdesses

Pour commander son dernier livre : Orange&Wild




Pour suivre mon quotidien et celui du podcast :


@mathilde_osteo



Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Bonjour Mathieu Courdès, merci beaucoup d'avoir accepté mon invitation. Je suis super contente d'avoir un photographe animalier pour la première fois sur Mordant.

  • Speaker #1

    Bonjour !

  • Speaker #0

    Alors pour commencer, est-ce que tu peux nous dire quel est ton rapport avec les animaux sauvages enfants et même les animaux domestiques ?

  • Speaker #1

    Alors moi j'ai eu la chance du coup d'aller en Namibie à l'âge de 8 ans, mais même avant ce voyage j'étais déjà passionné par les animaux. Je me souviens que mes jouets, quand j'étais tout petit, c'était des petits animaux en plastique et je m'imaginais directeur d'une réserve, propriétaire, directeur d'un zoo. Donc j'étais déjà passionné, passionné. Et puis effectivement, ce voyage en Namibie m'a un peu transformé puisque j'ai su qu'en posant les pieds en Namibie, j'aurais, quoi qu'il arrive, plus tard un rapport avec ce continent. Et les activités, à savoir le safari, la recherche des animaux dans leur milieu naturel, tout ce qu'on peut vivre sur place, je savais que je le revivrais plus tard.

  • Speaker #0

    Extrêmement précoce, c'est dingue.

  • Speaker #1

    Il se passe quelque chose quand on va là-bas, c'est ce qu'on appelle le fameux virus. Il se trouve que pendant quelques années, j'ai organisé des voyages où j'accompagnais des clients avec moi et je leur faisais visiter les parcs nationaux. Et c'est vrai que chez certaines personnes, il y a ce virus qu'on attrape et on n'a qu'une envie, c'est de retourner sur le continent africain pour repartir à la recherche des animaux. Et je crois que oui, ce virus, je l'ai chopé moi très très jeune. Je l'ai encore, je l'ai encore.

  • Speaker #0

    Et donc à 8 ans, tu as fait en sorte de faire les études qu'il fallait pour aller travailler plus tard en Afrique ?

  • Speaker #1

    Alors à 8 ans, non. Mais par contre, j'ai eu la chance ensuite avec mes parents. de retourner en Afrique parce qu'eux aussi ont chopé ce fameux virus. Après, à l'âge de 18 ans, moi, je voulais être photographe animalier, mais mes parents ne voulaient pas. Après, je leur ai dit journaliste. Ils m'ont dit non, ce n'est pas un métier non plus. Je leur ai dit qu'est-ce que vous voulez que je fasse ? Ils m'ont dit fais une école de commerce et puis après, si tu veux faire ton hobby de photographie, tu pourras. J'ai fait cette école de commerce qui ne m'a pas plu. mais cette école avait un cursus qui me permettait de partir à l'étranger et notamment trouver des stages. Et donc, on avait vraiment champ libre pour le choix du stage. Et donc, j'ai envoyé à l'âge de 18-19 ans 150 lettres de motivation, 150 CV à travers toute l'Afrique australe. Et j'ai eu deux réponses, un tour opérateur au Botswana et un tour opérateur en Namibie. Et donc, j'ai vécu sept mois là-bas. où j'ai appris d'abord à être guide, d'abord, pardon, à être traducteur et ensuite à être guide.

  • Speaker #0

    De traduire quelle langue ?

  • Speaker #1

    En fait, je traduisais les guides qui parlaient anglais vers des touristes qui, eux, parlaient français. Et en fait, la petite anecdote, c'est que mon anglais était nul, nul, nul. Je ne parlais quasiment pas anglais. Et donc, en fait, souvent, j'improvisais par rapport à... à ce qu'on voyait. Quand on voyait un lion, le guide donnait plein d'informations sur le lion. Et moi, je comprenais vraiment un mot sur deux. Mais comme j'avais déjà pas mal de connaissances sur le monde animal, je donnais mes propres connaissances aux touristes. Sauf qu'un jour, je suis tombé sur une touriste qui était prof d'anglais et la supercherie n'a pas fonctionné.

  • Speaker #0

    C'est trop drôle. Et donc, tu as fini ton école de commerce pour ensuite... Est-ce que tu as directement bifurqué dessus ? Bifurqué, pardon, sur guide ?

  • Speaker #1

    Alors en fait, j'ai fait deux écoles à la fin de ma première école de commerce. Je suis parti vivre un an en Namibie pour voir si après tout, je voulais faire ma vie là-bas en tant que guide. J'avais quelques hésitations et je me souviens de mon patron sur place qui m'avait dit « Non mais Mathieu, tu ne vas pas être guide, tu vaux mieux que ça. » Et en fait, pour moi, le métier de guide, c'était un métier incroyable. En fait, c'était la première fois de ma vie que… que quelqu'un me disait que j'avais une carrière qui valait peut-être mieux que mes propres aspirations. Et ça, ça m'a permis de me construire, ça m'a permis de viser plus haut. Et du coup, j'ai fait un an en tant que guide et puis je suis parti. Et ensuite, j'ai fait un master dans la production audiovisuelle à l'ESCP. Et ça, ça m'a beaucoup, beaucoup formé. Et ensuite, j'ai travaillé avec un réalisateur, Gilles Demestre. Et ensuite, j'ai fondé ma société de production. Et donc, je produis, je réalise des documentaires pour le digital, pour Internet.

  • Speaker #0

    Ok, mais pas forcément documentaires animaliers.

  • Speaker #1

    C'est toujours des documentaires en lien avec la nature. Par exemple, j'ai fait un documentaire pour une société sur les papillons en Équateur. Donc un éleveur de papillons qui essaye de réintroduire des espèces de papillons qui ont disparu. J'ai fait aussi des documentaires pour mes propres réseaux sociaux. J'ai fait des documentaires pour des gouvernements étrangers. Donc voilà, je mets toujours en lien avec la nature, la protection de la nature. Toujours sur des sujets que je pense, avec le temps, maîtriser un peu et donc sur lesquels je sais construire une histoire.

  • Speaker #0

    Ok. Et est-ce que tu peux nous dire en quoi consistait le rôle de guide exactement ?

  • Speaker #1

    Alors le guide, en fait, c'est l'interface, c'est le lien entre le client et la vie sauvage. Donc entre le touriste, celui qui vient visiter un endroit, et les grands animaux, la grande faune africaine. Et donc il y a un apprentissage d'abord très théorique sur ce qu'on peut avoir dans les livres, qu'on peut aujourd'hui trouver sur Internet. Et puis il y a surtout... Et je crois que c'est ça qui fait un bon guide, l'apprentissage empirique. Donc chaque expérience, chaque observation qu'on va avoir face à des lions, face à des éléphants, va nous permettre d'accumuler des connaissances qui sont pour moi les plus précieuses. Et moi j'ai l'habitude de dire que ce que je sais du monde animal aujourd'hui, ça ne tient que sur une feuille, mais par contre ces connaissances-là, je sais qu'on est très très peu à les savoir dans le monde. et en fait c'est vraiment ça le monde sauvage c'est Tu te rends compte que tu comprends et que tu connais le monde sauvage au moment où tu te rends compte que tu ne connais rien. Il y a une sorte de déclic où tu te dis, mais en fait, c'est un continent, l'éthologie, le monde animal est un continent tellement inexploré que la science est face à tellement d'obstacles, tellement de mystères scientifiques qui sont à la fois passionnants. Et c'est là où tu te rends compte effectivement que c'est un monde incroyable. Ouais, ouais. Et qu'au final, on sait très peu de choses.

  • Speaker #0

    Ouais. Ouais, ouais, c'est dingue. Quand je suis partie, je suis partie une fois en Afrique... Quand tu dis Austral, c'est quoi exactement ?

  • Speaker #1

    L'Afrique australe, c'est Namibie, Afrique du Sud, Botswana, Zambie, Zimbabwe et Mozambique.

  • Speaker #0

    Ok. Bon, alors je suis partie une fois en Afrique australe, en Afrique du Sud. Et quand j'ai découvert du coup moi le métier de ranger, tu nous diras la différence s'il y en a une entre guide et ranger, ben en fait j'étais hallucinée, moi je pensais que ça protégeait une réserve, ça protégeait les animaux, mais en fait ils ont des connaissances incroyables sur, et pas uniquement sur les animaux, les espèces, ce qu'ils vont manger, etc. Mais énormément en éthologie, comportement, et énormément aussi sur la flore, enfin j'étais hallucinée du nombre de plantes, d'herbes, de graminées, de... et tous les chants des oiseaux, enfin bon c'était assez dingue et du coup j'ai j'ai découvert un tout petit bout, je suis pas resté très longtemps mais c'était incroyable. Quel est ton premier voyage en tant que photographe ?

  • Speaker #1

    En tant que photographe, mon premier voyage je pense professionnel, là où j'ai gagné ma vie en tant que photographe, c'est sans doute au Rwanda, où j'avais réussi à négocier des autorisations de tournage, où j'avais réussi à... à déclencher des expositions suite à ce voyage. Après, avant, j'avais vécu en Namibie, au Botswana, donc j'apportais toujours mon appareil photo avec moi. Mais je crois que oui, c'est le Rwanda, mon premier voyage professionnel.

  • Speaker #0

    Et comment ça s'organise un tel voyage ? Niveau autorisation, peut-être pour les réserves ? Est-ce que tu dois être forcément escorté par un guide ou un ranger ou tu peux y aller tout seul ?

  • Speaker #1

    Bien sûr, ça c'est toute la partie un peu immergée de l'iceberg. C'est tout ce qu'on ne voit pas, à savoir... La préparation, l'investigation, la partie production, c'est-à-dire qu'est-ce que ma société va prendre en charge, qu'est-ce que le client va prendre lui à sa charge. Donc voilà, il y a toute une partie à étudier et ça prend des mois et des mois et des mois. Et puis parfois, ça prend quelques semaines. Là, par exemple, je reviens d'un tournage au Botswana. Je crois que fin février. On s'est dit, j'ai eu une personne au téléphone, je lui ai dit voilà, je suis prêt à partir. Mais mi-mars, je partais, enfin fin mars, je partais. Donc là, c'est du rush où tous les jours, on étudie le terrain, tous les jours, on a des interviews avec les guides avant de les rencontrer pour savoir l'histoire qu'on peut construire. Il y a évidemment les autorisations, il y a savoir pourquoi c'est mieux d'aller dans cette concession et pas dans celle-ci. Est-ce qu'on peut faire du hors-piste ? Il y a énormément de... Il y a un savoir-faire que ma société a accumulé au fur et à mesure des années et c'est ça finalement la force de mon travail, c'est que je sais comment construire un voyage pour obtenir les meilleures images, je l'espère possible, et les meilleures vidéos possibles.

  • Speaker #0

    Et qu'est-ce qui te pousse par exemple à aller dans une destination, là tu disais le Botswana, qu'est-ce que tu recherches exactement et tu parlais aussi d'histoire, est-ce que tu recherches à avoir une situation particulière, par exemple je sais pas un accouplement ou une bagarre particulière entre des clans, ou alors tu vas dans une réserve particulière parce que tu veux voir certaines espèces et tu y vas à l'aveugle et tu attends de voir ce qui se passe sur le moment pour ensuite raconter.

  • Speaker #1

    Alors, il y a une partie de ce savoir-faire qui doit rester un peu secret, un peu mystérieux. Mais l'idée, c'est beaucoup, beaucoup d'adaptation. Donc, quand on va dans un endroit, tous les jours avec mon vidéaste et avec mes équipes, on écrit, on réfléchit, on construit le documentaire. S'il nous manque certaines séquences, on retourne dans des endroits. Donc, c'est énormément d'improvisation aussi sur place.

  • Speaker #0

    et Il y a des histoires, est-ce que c'est la vérité absolue ce que tu racontes ou c'est quand même une interprétation de l'homme par rapport au fait qu'ils soient frères et sœurs, enfin j'imagine que ça on le sait, mais par rapport aux bagarres, aux territoires, est-ce que tu le sais toi, ton guide, est-ce que tu es aidé par des éthologues par exemple ou des vétos ?

  • Speaker #1

    Alors, déjà, je me méfie un tout petit peu des éthologues quand il s'agit de... d'interprétation de comportements d'animaux sauvages. Il faut savoir que l'éthologie est une science qui a peu de moyens. Et donc, à part dans la branche de la primatologie, où là, effectivement, il y a plus de recherches parce que la primatologie est accompagnée par les grands laboratoires pharmaceutiques, médicaux. Et donc, on a plus de moyens pour étudier les grands primates. mais Tout ce qui est éthologie, des félidés par exemple, ou des nidés, tout ça, on a quand même très peu de connaissances. Et surtout, moi ce que m'ont appris mes 20 années dans la brousse, c'est que d'une région à l'autre, d'une réserve à l'autre, le comportement d'un animal va varier. Donc pour répondre à ta question, en fait, pour moi les meilleurs éthologues de ces régions sont les guides. qui, eux, sont dans la réserve, ou les rangers, ça dépend comment tu les appelles, sont dans la réserve depuis des années et des années, voire des décennies, et en fait connaissent les différentes générations, les différents clans, les différents territoires des prédateurs. Et donc, c'est avec eux qu'on va construire l'histoire. Alors, à ta question, est-ce qu'il y a de la mise en scène ? Oui, il y a de la mise en scène, mais il n'y a jamais de mensonge. C'est-à-dire qu'on ne va jamais mentir sur une vérité scientifique. Ça, c'est très important. On peut... Par exemple, imaginons que le documentaire, on part à la recherche d'un lion, et il se trouve qu'on voit ce lion le jour 1. En fait, on ne va pas faire un documentaire qui dure deux minutes. Donc, on va essayer de mettre en scène la recherche, ou alors est-ce qu'il n'y a pas autre chose à raconter derrière le lion ? Pourquoi ce lion avait ce caractère-là ? En fait, c'est ça l'adaptation. c'est que Les animaux, on ne sait jamais vraiment sur quoi on va tomber. On ne sait jamais s'il va nous offrir juste un gros billon en bas d'un arbre ou si au contraire, il va être en train de chasser. Donc, c'est de la direction d'acteurs, mais en fait, on n'a aucune direction sur nos acteurs. Donc, c'est à nous d'anticiper et d'improviser par rapport à ce que les animaux nous offrent. Mais en tout cas, on ne mentira jamais sur une vérité scientifique. ou alors... on va choisir de surligner un trait de caractère mais ça ne sera jamais un mensonge et on essaye vraiment d'être toujours à la frontière avec l'anthropomorphisme où on essaye quand même de donner des émotions aux téléspectateurs ou aux viewers mais sans pour autant dire une contre-vérité par exemple on ne va jamais dire Voilà, ça c'est cet éléphant, il s'appelle Michel, il vient de se réveiller, il va prendre son petit déjeuner. Ben non, un éléphant ça ne se réveille pas, ça ne prend pas son petit déjeuner. Donc en revanche, les guides eux donnent des noms aux animaux. D'ailleurs c'est un processus très important pour l'identification, c'est même un processus scientifique. Et les guides nous racontent que chaque éléphant, chaque lion, chaque key species de la réserve a un comportement différent. à son propre mode de vie. Et donc, en fait, c'est sur ces traits de caractère qu'on va insister.

  • Speaker #0

    Est-ce que les animaux, ils ont le temps de s'habituer à toi ? Parce que tu changes pas mal quand même de pays, de réserve, de continent. Et tu vois, ça m'a fait penser à Jane Goodall qui observait les chimpanzés, qui a mis quand même des semaines, des mois, voire certaines années pour tisser des liens avec les familles. Alors que toi, tu changes assez souvent de lieu. Comment ça se passe pour ça ?

  • Speaker #1

    Bon, les animaux qu'on rencontre, dans la grande majorité des cas, ont déjà eu un processus d'habituation. Le processus d'habituation, c'est ce qui permet à un animal de le rassurer par rapport à la présence humaine et à la silhouette humaine. Un gorille, par exemple, qui a eu un processus d'habituation, ça dure, le gorille des montagnes, entre 2 et 4 ans. Et là, le gorille, du coup, a conscience que la silhouette humaine n'est pas un problème, n'est pas liée au braconnage. Pareil pour les lions dans les grandes réserves ou dans les grands parcs nationaux. ils savent que la voiture n'est pas un problème. Mais tout ça, le processus d'habitation, ça met des mois et des mois, et c'est des rangers qui, chaque jour, se rapprochent un peu plus des espèces pour qu'elles puissent être observées et pour qu'elles restent totalement sauvages, mais qu'on puisse au mieux les observer et faire des photos.

  • Speaker #0

    Ouais donc en fait ils mettent tous les hommes dans le même sac, il faut pas qu'ils s'habituent forcément à toi Mathieu mais il faut qu'ils s'habituent à l'homme ou au ranger.

  • Speaker #1

    Ouais bien sûr, bien sûr, ouais c'est ça.

  • Speaker #0

    Y'a pas forcément besoin qu'ils s'habituent à toi.

  • Speaker #1

    Non, non non non non. Non non mais moi surtout quand je pars en tournage, je pars deux semaines, deux trois semaines, donc j'ai pas un processus d'habituation, ça met des mois et des mois et des mois.

  • Speaker #0

    Bah ouais ouais, ok bah ouais c'est pour ça que je me posais la question.

  • Speaker #1

    tout le processus d'habituation par exemple J'avais un ami qui travaillait sur le processus d'habituation d'une famille de gorilles dans le sud du Cameroun. Et ça faisait des années et des années, ça fait presque dix ans maintenant qu'ils essayent d'habituer une famille de gorilles. Et en fait, à chaque fois qu'il y a un cas de braconnage dans la famille, ils sont obligés de tout reprendre de zéro. Ouais,

  • Speaker #0

    ok. Pour redesensibiliser un peu. Ok. Et quelle est ton éthique par rapport à ça ? Jusqu'où tu pourrais aller pour une photo ? Quelles sont tes limites ?

  • Speaker #1

    C'est vraiment...

  • Speaker #0

    Parce que je pense qu'il y a des photographes qui abusent un peu, qui doivent se rapprocher un maximum de certains animaux, non ?

  • Speaker #1

    Ouais, après, je crois pas que ça soit sur la proximité avec l'animal qu'on fixe l'éthique. T'as des animaux qui viennent vers toi. T'as des animaux qui sont curieux, genre l'ours polaire, dans son éthologie, dans son comportement. Il y a une façon d'être curieux parce que l'ours polaire est obligé d'être curieux, est obligé de voir ce qui se passe, de trouver de la nourriture par lui-même. Et donc, par instinct, il va se rapprocher de toi, il va te renifler, il va te sentir. Et donc là, ça ne le dérange pas puisque c'est lui qui vient vers toi. L'éthique du photographe animalier, c'est un sujet très délicat, très difficile. Moi, je sais ma limite. Je sais... En fait, ma limite, elle est souvent liée au plaisir que j'ai à prendre la photo. C'est-à-dire que là, l'année dernière, je suis allé au Brésil pour photographier le jaguar. Et un soir, on me dit, viens, tu vas pouvoir photographier un oslo. Et l'oslo, c'est vraiment un animal très, très difficile à voir, très rare. Et magnifique. En pleine nuit. Comment ?

  • Speaker #0

    Et magnifique, c'est super beau.

  • Speaker #1

    Magnifique, c'est un pédain extraordinaire. Et donc, en pleine nuit, on m'emmène dans une sorte d'affût, un peu. Et j'attends, j'attends, et là, je vois une petite tête qui dépasse, et c'est l'oslo. Et tout de suite, il s'en va. Et donc, moi, je n'ai pas le temps de faire des photos. Et là, tu as un gars qui arrive du lodge dans lequel on était et qui pose des morceaux de poulet, enfin, des petits morceaux de viande, et je crois qu'il en pose trois ou quatre juste en face de l'affût. Effectivement, l'oslo est revenu comme par habitude, et il a mangé les bouts de poulet. Et donc, effectivement, moi, j'ai pris des photos. Mais je me suis dit, en fait, je n'ai aucun plaisir à faire ces photos. En fait, ce n'est pas la nature qui m'offre ce cadeau, c'est l'homme qui l'a provoqué. Et donc, au-delà de tous les problèmes que ça comporte de nourrir un animal, par exemple, sur nos doigts, on peut transmettre éventuellement des maladies à l'animal. Le fait de mettre de la nourriture à un endroit, ça peut entraîner des confrontations entre certaines espèces qui n'ont… donc pas à se rencontrer normalement à l'état sauvage. Après, il faut aussi raison garder. Les grands enjeux de la protection animale, c'est le braconnage, c'est la déforestation, ce n'est pas le nourrissage d'un individu dans un lieu donné. C'est pour ça que... Il y a eu un scandale il n'y a pas très longtemps de deux photographes effectivement qui ont fait des photos en Finlande où les animaux étaient nourris avec des grosses carcasses de cochons. Et donc au même endroit, on avait des ours, des loups, des gloutons. Et donc il y a eu un article sur Reporter, il y a eu un article sur Géo. Ils se sont fait défoncer. Et moi, je pense que la chose juste, c'est d'informer en fait les personnes à qui tu... proposes tes images, à qui tu montres tes images. Si tu leur racontes les coulisses, si tu leur dis voilà comment ça s'est passé, à vous de voir ce que vous en pensez, mais voilà comment j'ai pris ces photos. Et je pense que les gens en fait comprennent ou ne comprennent pas, mais après toi, ton rôle de photographe, ça a été aussi de raconter les coulisses. Et voilà, à côté de ça, tu as aussi des images qui ont été faites, et on le sait aujourd'hui, même les meilleurs photographes animaliers français, notamment le meilleur. Il y a des fortes rumeurs comme quoi il a utilisé des appâts pour prendre certaines de ses photos. Mais est-ce qu'à travers ses photos, il n'a pas sensibilisé des milliers de personnes à une espèce menacée, à la disparition d'un animal en particulier ? C'est un sujet très délicat. Mais moi, en tout cas, je ne veux pas pointer du doigt tel ou tel photographe. D'ailleurs, je n'ai dit aucun nom volontairement, alors que je les ai bien en tête. Chacun a son éthique. Le plus important, ce n'est pas de tromper celles et ceux qui te suivent et qui suivent ton travail.

  • Speaker #0

    Donc, ça rejoint un peu l'une de mes questions. Quel est le rôle de la photographie animale ? J'imagine que ce n'est pas uniquement pour l'art, même si certaines espèces sont magnifiques. Et je pense qu'on est aussi attiré par ça au début. Mais il y a aussi, j'imagine, d'autres rôles.

  • Speaker #1

    Bien sûr. Oui, oui. De toute manière, le photographe animalier qui n'a qu'une vision esthétique, de son travail, pour moi il se trompe un peu. Il doit y avoir une vision de conservation, de sensibilisation, et puis il y a aussi tout un travail d'investigation avant de partir en expédition. Ça fait beaucoup de mots en sion. Il faut savoir où est-ce qu'on va et qu'est-ce qu'on va photographier et pourquoi on va le photographier. En fait à partir du moment où on sait aujourd'hui que pour aller dans un endroit, moi, j'ai une empreinte carbone catastrophique. Évidemment que j'ai une empreinte carbone catastrophique. Donc, qu'est-ce qu'on se dit en tant que photographe animalier ? Comment on rentabilise, même si ce n'est pas le bon terme, mais comment on équilibre cette empreinte carbone ? En faisant des reportages. Moi, je sais que c'est important dans mon travail, je n'en parle pas beaucoup sur les réseaux sociaux, mais de faire ce qu'on appelle de la diplomatie environnementale, donc d'aller voir des ministres, d'aller voir des diplomates. et de leur dire ce que j'ai vu et comment on peut améliorer les choses pour protéger des animaux. Et voilà. Donc, c'est aussi ça, le rôle du photographe animalier, du créateur de contenu nature animalier.

  • Speaker #0

    Et qu'est-ce qu'on peut faire, nous, qui ne sommes pas professionnels ou pas politiques, au quotidien pour aider ces espèces, depuis la France ?

  • Speaker #1

    Bon, pas grand-chose. Je sais que j'ai certains de mes amis, s'ils m'entendaient, ils me tueraient. en m'entendant dire ça, mais en tant que particulier, moi j'ai vu en me rendant sur place la disparition des écosystèmes et des parcs nationaux, c'est quelque chose qui dépasse de loin le foyer, le particulier, c'est des décisions étatiques, gouvernementales, parfois c'est des organisations internationales qui décident ça, parfois c'est des grandes fortunes, des milliardaires qui décident ça. franchement c'est malheureusement en tant que particulier en tout cas je parle bien de la protection des espèces menacées je parle bien du domaine que je connais à savoir le braconnage la déforestation et où je ne parle pas de la protection de l'environnement en tant que tel parce que c'est un sujet tellement large que je peux pas me prenez en tant que spécialiste en revanche sur les sujets de conservation de biodiversité là je m'y connais et à votre échelle enfin à l'échelle du particulier Juste être sensibilisé et dans un repas de famille dire que voilà j'ai vu que malheureusement il y avait plus que 3000 tigres à l'état sauvage, dire que oui il y a plus que 1100 gorilles des montagnes à l'état sauvage, expliquer tout ça, être sensibilisé à ça c'est déjà un pas énorme. Mais les décisions de protection de nos espaces naturels, elles se passent dans des sphères très très hautes.

  • Speaker #0

    Est-ce qu'il y a déjà un animal que tu as photographié et qui n'existe plus aujourd'hui ?

  • Speaker #1

    Je ne crois pas. J'ai vu effectivement certains écosystèmes changer au fur et à mesure de mes allées venues en Afrique. Par exemple, la véritable mode. le terme n'est pas très beau, mais de la corne de rhinocéros, à savoir les rhinocéros qui se font braconner, tuer. C'est une mode qui a vraiment commencé dans les années entre 2005 et 2010. Et puis, elle a eu son apogée en 2014-2015. Et donc, moi qui vais en Afrique depuis que j'ai 8 ans, depuis 2002, j'ai vu effectivement les populations de rhinocéros diminuer et diminuer jusqu'à... devenir pratiquement inexistantes dans certaines régions d'Afrique. Par exemple, au Massaïmara ou au Serengeti, donc au Tanzanie, Kenya, voir un rhinocéros, c'est quelque chose de rarissime. Et puis quand on le voit, généralement, il est très très loin, on voit juste une sorte de petit point noir dans la Grande Plaine. Donc ce sont des animaux qui sont devenus très très difficiles à observer. Au Botswana, il n'y en a quasiment plus. En fait, il reste quelques endroits précieux où on peut en voir, mais ça reste très, très difficile.

  • Speaker #0

    Je repensais en fait à un mois et les rhinocéros que j'ai pu voir. J'en ai vu et j'ai vu des blancs et des noirs justement à la réserve McAllis et dans le nord de l'Afrique du Sud. Et là où j'ai rencontré la ranger qui était française, Claire, avec qui j'ai déjà fait un podcast et qui nous disait d'ailleurs quand on était en safari, c'était du matin au soir. On aidait les rangers, je ne sais plus comment ça s'appelle, les co-touristes. Et il ne fallait pas qu'on poste de photos ni rien, il ne fallait pas donner trop d'infos sur le nombre d'individus et où ils étaient situés finalement.

  • Speaker #1

    Oui, effectivement, ça fait partie des choses qui sont demandées, de ne pas donner d'informations, parce que l'information est déjà un process du braconnage. Il y a même certaines réserves, j'en ai eu écho il y a quelques mois. qui donnent des réserves qui font du tourisme et qui donnent des informations aux braconniers pour compléter les fins de mois et pour gagner de l'argent. Ah ouais,

  • Speaker #0

    donc on peut être de deux côtés.

  • Speaker #1

    Non, mais c'est juste des réserves qui ne s'en sortent pas financièrement. Pendant le Covid, il y a pas mal de réserves qui en ont chié. Et effectivement, j'ai eu il y a quelques mois des informations sur... Une réserve dans laquelle, effectivement, il y aurait eu de l'intelligence avec l'ennemi, comme on dit. Donc, donner des informations sur l'emplacement d'un rhinocéros. Après, c'est toujours la même chose. C'est des on-dit, il n'y a pas eu d'enquête. Il y a énormément de compétition entre les différents lodges et réserves de la région. Donc, chaque bonne excuse est bonne à prendre pour tuer l'autre économiquement. Mais bon, j'avoue que quand on me l'a dit et quand on m'a dit le nom de la réserve, ça ne m'a pas tant étonné que ça.

  • Speaker #0

    Et pourquoi ? Parce que je sais qu'ils coupent les cornes des rhinocéros justement pour éviter le braconnage. Peut-être qu'en les coupant derrière, ils peuvent les revendre aux braconniers. Non, même pas.

  • Speaker #1

    En fait, repose-moi ta question pour être sûr.

  • Speaker #0

    La réserve coupe les cornes pour protéger leurs animaux. Ce n'est pas la réserve qui coupe les cornes.

  • Speaker #1

    Ça dépend. Donc, tu as les parcs nationaux et les réserves. Dans les parcs nationaux, ça dépend des politiques mises en place par les gouvernements, mais généralement, effectivement, ils coupent la corne. Donc ça, c'est avec des fonds publics pour protéger les rhinocéros du braconnage. Mais il faut savoir que même si ça repousse tous les 3-4 ans une corne de rhinocéros, et même s'il y a ça de corne, des rhinocéros peuvent quand même se faire tuer. Parce que le kilo de poudre de corne de rhinocéros se revend entre 70 000 et 80 000 dollars le kilo. Et ça, c'est encore des chiffres d'il y a quelques années. Peut-être que maintenant, ça...

  • Speaker #0

    Et la mode est toujours présente, comme tu disais, s'il y avait une mode...

  • Speaker #1

    Bien sûr. Alors, ça a diminué parce qu'il y a eu des politiques à la fois publiques et des stratégies privées mises en place notamment par les réserves privées pour financer... les cornages de rhinocéros. Souvent, ces réserves utilisent l'argent du tourisme pour protéger leurs rhinocéros. Et aujourd'hui, on le sait, les réserves qui n'ont pas voulu écorner leurs rhinocéros en Afrique du Sud, la grande majorité n'ont plus de rhinocéros. Et les réserves qui ont mené des grandes campagnes d'écornage, eux, ont encore des rhinocéros. Et donc, en fait, moi, à titre personnel, ça me sert le cœur de voir un rhinocéros sans corne. Mais aujourd'hui, face à ce fléau, c'est la seule solution qu'on ait trouvée.

  • Speaker #0

    Pendant un moment, on a injecté un produit au rhinocéros qui rendait la corne un peu rose et qui, a priori, enlevait les effets aphrodisiaques de la corne parce qu'ensuite, la corne est revendue sur le marché chinois pour des vertus aphrodisiaques. Et en fait, on s'est rendu compte que ce produit donnait des problèmes d'estomac et d'intestin au rhinocéros. Et donc, du coup, la seule solution qu'on ait trouvée, c'était de couper. couper les cornes. Il faut savoir que les deux premières causes de mort des rhinocéros, le premier c'est le braconnage, et le deuxième c'est les mâles entre eux qui s'écornent et qui se tuent. Donc finalement, en coupant les cornes, on réduit quand même, face à une population qui allait s'éteindre, face à une espèce qui allait s'éteindre, on réduit quand même de deux facteurs la disparition du rhinocéros. Et en fait, c'est intéressant de voir que Merci. Il y a certaines espèces dans le monde, comme les gorilles, les rhinocéros blancs et noirs, ou les tigres, par exemple, qui doivent leur survie uniquement grâce à l'écotourisme. Uniquement. Alors, ça peut faire mal au cœur à certains d'entendre ça, mais en fait, il y a une loi du marché et de l'économie derrière. C'est que ces parcs nationaux, ces réserves naturelles, elles vont intéresser les industries du bois, elles vont intéresser, pourvu qu'il y ait du pétrole, Merci. d'autres industries qui vont être ultra polluantes. Et donc, finalement, le tourisme n'est pas, à part dans certains pays, mais n'est pas un secteur d'économie qui produit énormément d'argent. Mais par contre, ça recrute beaucoup. C'est-à-dire que le tourisme permet quand même de rendre actif une grande partie de la population dans des régions du monde où il y a quand même beaucoup de chômage. Et surtout, le tourisme, qui fait partie du secteur tertiaire, a tendance à augmenter la classe moyenne dans certaines régions du monde où il y avait quand même jusqu'à il y a 15-20 ans une classe très très pauvre qui représentait 80% voire 85% du pays et une classe extrêmement riche. Et en fait le développement de ces pays du sud va passer par l'émergence du secteur tertiaire et donc une augmentation de la classe moyenne. et moi je me rends bien compte là on sort peut-être un peu un tout petit peu du sujet de l'animalier, mais ça me semble important de dire que le tourisme, l'écotourisme, le tourisme responsable permet de protéger et de sauver certaines espèces de la disparition. Et plus largement, permet de protéger des écosystèmes parce que le rhinocéros, par exemple, par sa présence, par ses excréments, est une sorte d'espèce parapluie et donc va permettre de sauver d'autres animaux rien que parce qu'il est là. Quand il va faire ses excréments, ça va créer des insectes qui vont attirer des oiseaux. Ces oiseaux vont attirer des petits prédateurs comme des cervales, des caracales, même des chacals. Et donc tout ça est très important. Si tu as une espèce qui disparaît de certains biomes, c'est tout le reste des espèces qui sont en péril.

  • Speaker #1

    T'as l'air d'en savoir énormément sur les animaux. Est-ce que tu en sais autant qu'un ranger ? Est-ce que t'as passé des certifications ? Ou est-ce que c'est que de l'empirisme, comme tu disais tout à l'heure ?

  • Speaker #0

    En fait, j'ai eu la chance de commencer à guider à un moment où, notamment en Namibie, il y avait très peu de certifications ou de concours. Donc, j'avais pas besoin de diplôme. Bien sûr, j'ai dû passer des tests, des tests écrits, des tests oraux. J'ai fait plusieurs tours en tant qu'assistant. C'est même presque plus formateur que certaines écoles reconnues par l'État. Mais en tout cas, il m'a fallu du temps avant d'avoir mes propres groupes et de guider. Le Ranger, effectivement, c'est une certification que tu as avec un diplôme, l'un des diplômes qui s'appelle le VGASA, qui est reconnu par l'État sud-africain. Et effectivement, c'est ce qu'on t'apprend. le cri des oiseaux, comme tu disais au début de notre podcast, identifier les différentes espèces, les traces, les crottes, et ça, en fait, une fois que tu es sur le terrain pendant plusieurs mois, tu l'as aussi, c'est quelque chose que tu acquiers, donc moi, je ne me définis pas en tant que ranger, parce que je n'ai pas la certification Vigassa, mais au final, j'ai mes connaissances de guide, et comme je te l'ai dit, c'est vraiment plus mes connaissances Merci. empiriques qui sont importantes que mes connaissances théoriques, sachant que quand tu commences en tant que ranger, tes seules connaissances sont celles que tu as apprises lors de ton stage et dans tes livres.

  • Speaker #1

    Et est-ce que tu connais sur d'autres continents, tu parles beaucoup en Afrique, mais est-ce que tu es partie... En Asie, en Amérique latine et dans ce cas-là, j'imagine que c'est d'autres connaissances.

  • Speaker #0

    Bien sûr, oui, tout à fait. Je suis parti, là, récemment, faire le jaguar au Brésil. Je suis allé photographier le tigre en Inde. Je suis allé photographier les orangs-outans à Sumatra. Je suis allé au Pôle Nord, au Canada, voir les ours blancs. Donc, Équateur aussi. Donc, oui, j'ai eu la chance de voyager pas mal. Effectivement, on est sur... sur des connaissances différentes, mais quand même, je vois certains points communs quand je photographie, par exemple, le jaguar dans le Pantanal. Je trouve quand même, au moment où je prends ma photo, certains points communs avec le léopard qu'on va avoir en Afrique. Quand je photographie le tigre, dans sa manière de se déplacer, dans la manière de nous regarder, je vois dans sa manière d'être finalement... le super prédateur de la région, je vois certains points communs avec le lion. Donc pareil, quand je fais le rang mouton, je vois dans sa manière de se déplacer, dans la manière de me regarder, certaines similitudes avec les gorilles des montagnes. Donc finalement, quand je vois des animaux d'une même famille, j'arrive à comprendre un peu plus l'animal et du coup à choisir un emplacement ou à choisir une heure de la journée pour laquelle le photographier.

  • Speaker #1

    Et quel est ton pays préféré, ta destination préférée ?

  • Speaker #0

    Bonne question. Le Rwanda est quand même un pays qui m'a marqué. J'y suis allé peut-être cinq, six fois. C'est un pays assez extraordinaire pour mille et une raisons. Après, moi, j'ai un attachement aussi particulier pour l'NMB, qui est le pays qui m'a créé en tant que photographe et guide. Quoi d'autre ? Le Botswana, extraordinaire. mon expérience dans le nord du Canada pour voir les ours polaires à Churchill, c'est magique. Donc ouais, non, il y a plein d'endroits dans le monde.

  • Speaker #1

    Après tu fais une grande liste. Et l'animal que tu trouves le plus fascinant ?

  • Speaker #0

    Aïe, aïe, aïe, c'est dur. Le plus fascinant, peut-être celui que je n'ai pas encore photographié.

  • Speaker #1

    Ok. Tu as photographié les pandas ?

  • Speaker #0

    justement non c'est mon rêve parce que t'en parlais dans les gens mais comme ça fait quelques années je me demandais si tu les avais non non pas encore c'est très difficile j'ai eu plein de projets qui m'ont potentiellement amené à les photographier et finalement ça s'est pas fait c'est aussi ça le le métier de photographe et de reporter animalier c'est que sur 10 projets que tu lances il y en a un ou deux qui se font bon là avec mes réseaux sociaux avec le fait entre guillemets que je sois de plus en plus connu les projets sont un peu plus faciles à avoir et les décideurs sont plus faciles à convaincre mais quand même c'est beaucoup de refus en tout cas le début de ma carrière professionnelle c'était dur,

  • Speaker #1

    c'était très dur ok et est-ce que tu as déjà fait des animaux aquatiques ?

  • Speaker #0

    non après j'ai déjà vu les baleines, j'ai déjà vu les grandes colonies d'Otari en Namibie Mais non, je n'ai jamais fait de la photo sous-marine.

  • Speaker #1

    Oui. Et ça ne te donne pas envie ?

  • Speaker #0

    Pas particulièrement. En fait, disons que je trouve qu'il y a vraiment des top, top photographes dans ce milieu-là. Mais même en France, on a certains qui sont pour moi les meilleurs au monde. Je pense à Stéphane Grandsoto qui est exceptionnel. Monsieur Balesta aussi qui est exceptionnel. Moi, je suis… Je trouve qu'il y a tellement à faire déjà sur la terre ferme et notamment des espèces que je n'ai pas encore photographiées que pour l'instant, je vais rester là-dessus.

  • Speaker #1

    Oui, c'est déjà très, très bien. Est-ce que tu as déjà découvert une nouvelle espèce ?

  • Speaker #0

    Ah non, non, non. Non, non, j'ai eu un doute une fois. Je faisais une investigation pour partir au Bénin dans le parc de la Panjari. Et en fait, on n'a pas pu y aller parce qu'on devait y aller. C'était un très beau contrat. C'était au tout début de ma carrière professionnelle. Je n'ai jamais raconté cette anecdote. C'était vraiment… Avec mon équipe, on a été trop contents parce que c'était un projet qui pouvait nous faire vivre pendant au moins un an et demi, deux ans. C'était avec le gouvernement béninois. Et l'idée, c'était d'aller prendre des photos dans ce parc-là, le parc de la Pantjari. et promouvoir le parc avec les réseaux sociaux tout ça. Et en fait, j'ai appelé certains contacts des connaissances que j'ai en Afrique qui travaillent dans la sécurité, dans le renseignement et ils m'ont dit, non Mathieu, là, on ne peut pas trop t'en dire, mais il ne faut pas y aller. Et donc moi, j'ai essayé de creuser parce que je me disais, quand même, c'est un truc qui peut faire déconner ma carrière. Pourquoi il ne faut pas y aller ? Ils m'ont dit, en ce moment, c'est vraiment dangereux. Il y a de plus en plus de djihadistes de l'équivalent de Boko Haram sur place, enfin, l'une des branches de Boko Haram. Et donc, si tu y vas et qu'il y a un problème, malheureusement, là-bas, ils n'arriveront pas à te retrouver et tu risques d'avoir des gros problèmes. Et en fait, j'avais fait toute une investigation, notamment sur leur guépard. Parce que je les soupçonne, entre guillemets, d'avoir une sous-espèce de guépard. Eux, ils disent que c'est des guépards d'Afrique. Enfin, le guépard un peu standard. Mais les photos que j'ai vues de ces guépards me font dire que c'est un guépard qui ne ressemble à aucun autre guépard. Et donc, je voulais aller les photographier et potentiellement aider les scientifiques à les identifier. Et au final, ça ne s'est pas fait. Donc, je n'y suis pas allé parce qu'effectivement, il y avait ce risque de kidnapping. Et il se trouve que la semaine où on devait y aller, il y a une équipe de tournage espagnol qui s'est fait tuer, kidnapper et tuer par les djihadistes.

  • Speaker #1

    Wow, quelle histoire ! En quoi tu pensais qu'ils étaient différents du guépard africain ?

  • Speaker #0

    Ils ont les tâches beaucoup moins denses qu'en Afrique australe ou en Afrique de l'Est.

  • Speaker #1

    Ok, et tu penses toujours ça ou tu as vu de nouvelles photos ?

  • Speaker #0

    Je n'ai pas vu d'autres photos parce que j'ai l'impression que le lodge qui devait nous accueillir a fermé. Je n'ai pas l'impression qu'il y ait beaucoup de touristes qui y vont. Et mine de rien, aujourd'hui avec les portables, les photos des clients, des touristes, aident aussi à une meilleure compréhension du monde sauvage. Et donc, je n'ai pas revu d'autres photos de ces guépards. Mais j'imagine, si je fais mes recherches, je pense que je pourrais trouver.

  • Speaker #1

    Ok. Et ça me fait un lien avec une question que je m'étais préparée aussi, c'est tu parlais d'aider les scientifiques au terme d'éthologie. Est-ce que tes photos peuvent servir justement pour l'avancée scientifique en éthologie ou alors pour recenser ou avoir des infos sur leur santé, l'âge, certaines pathologies, etc. ?

  • Speaker #0

    Oui, bien sûr. Notamment, j'avais fait un reportage dans la Caguerra, au Rwanda, qui est l'un de mes parcs préférés. On avait mis des colliers émetteurs autour du cou d'un éléphant et de lion. Les vétérinaires et les conservateurs m'avaient demandé de bien prendre en photo les lions pour les identifier, puisqu'ils les identifient avec le nombre de... de moustache. A priori, les points des moustaches ne sont pas au même endroit d'un lion à l'autre, c'est un peu comme les empreintes digitales. Et donc, il m'avait demandé de prendre les moustaches des différents lions. Et voilà, ça les aide effectivement à les recenser, ça les aide à voir si certains ont des problèmes de santé. Voilà, c'est aussi comme ça qu'on protège une famille de lions.

  • Speaker #1

    Dans un de tes documentaires, tu dis que tu as une forte connexion spirituelle avec certains animaux est-ce que tu pourrais dire que tu fais de la communication animale ou que c'est quelque chose d'intuitif sur lequel tu n'as pas donné de nom ?

  • Speaker #0

    bon moi je suis quelqu'un de très cartésien donc j'ai je dirais je ne sais pas si la communication entre les êtres humains et le monde animal existe Merci. Je sais qu'il y a certains chamanes que j'ai rencontrés d'ailleurs en Afrique du Sud qui disaient se communiquer avec certains animaux. Moi, ce qui est sûr, c'est que j'ai vu tellement de lions, j'ai passé tellement de temps à observer les éléphants, à observer les léopards, qu'aujourd'hui, les lions, j'ai l'impression qu'ils n'ont plus beaucoup de secrets pour moi. Quand je vois la manière dont marche un lion, je peux savoir... Qu'est-ce qu'il veut faire ? Où il veut aller ? Est-ce qu'il est dans un bon état ? Est-ce qu'il a faim ? Est-ce qu'on peut le suivre ? Est-ce qu'on le dérange ? Tout ça, je le vois, mais je ne l'ai lu nulle part. C'est parce que je les connais, parce que je les ai tellement vus, photographiés, étudiés. Ça fait plus de 20 ans que je vois des lions, donc maintenant, je les connais bien, c'est mes potes.

  • Speaker #1

    Oui, mais tu disais ça dans le documentaire, pour justement, les fois où tu ne les vois pas, eh bien, tu sais... Où ils vont être ?

  • Speaker #0

    Oui, pas tout le temps, mais effectivement, quand pendant plusieurs jours, je n'arrive pas à voir des lions, je me prends un moment et j'essaye de comprendre pourquoi je ne les vois pas. Et en fait, souvent, je le sais. Ça peut être une température, ça peut être du vent, ça peut être de l'humidité. Ça peut être plein de choses. Et du coup, je sais que, par exemple, si je me lève un matin et que je sens la température, l'air, je vois les nuages, je vois tout ça, je sais si je vais les trouver ou pas. Et je sais s'ils seront actifs ou pas. Ça, je le sais, oui.

  • Speaker #1

    Ok. Mais c'est plus par rapport à un calcul, en fait, de toutes tes connaissances et de toute ton expérience cumulée qui vont faire que tu vas avoir... toutes ces infos sur eux.

  • Speaker #0

    Mais peut-être que c'est ça, les gens qui pensent communiquer avec les animaux, enfin vraiment être en lien avec eux, peut-être qu'ils n'ont pas le recul de se dire que c'est un ensemble de connaissances qui leur font croire qu'ils sont en communication avec les animaux. Parce que... Oui, je sais pas, peut-être, mais je te dis, je suis très cartésienne. Ouais,

  • Speaker #1

    c'est ta façon de penser qui est cartésienne, et du coup, pour toi, c'est forcément que les infos qui vont te donner une solution. Mais certaines personnes, ça va être que ce qu'il y a dans leur ressenti, dans leur ventre, tu vois. Mais, ouais, je sais pas, moi, je suis un peu entre les deux. Mais je te disais ça parce qu'en Afrique, il y avait pas mal de stages de photographie, et l'autre chose qu'on voyait pas mal, c'est aussi de stages de communication animale avec la faune sauvage, etc. Donc, je me suis dit... Et en plus, tu parlais de ta connexion. Je me suis dit peut-être que c'est ce que tu fais. Mais finalement, tu ne le fais pas consciemment, mais c'est un petit peu ça, je pense.

  • Speaker #0

    Alors, je me méfie beaucoup des centres de réintroduction et des centres de conservation en Afrique australe parce que c'est devenu un vrai business. En fait, d'un point de vue général, les animaux en détresse, les animaux en difficulté, les animaux blessés ont besoin le moins possible de l'être humain. Ou alors des spécialistes, des vétérinaires, des biologistes, des gens qui ont fait des années et des années d'études, des scientifiques. Et c'est pour ça. En fait, tu as certains centres de réintroduction qui ont créé une sorte de business en disant venez faire du bénévolat, sauf que toi, tu vas payer ta chambre, tu vas payer ta bouffe. Et en fait, eux, ils vont être très contents d'avoir des bénévoles qui viennent. Et c'est ça qui va permettre de faire vivre la réserve. Et moi, j'ai fait... pas mal d'investigations sur ça et tu as certains centres de conservation par exemple qui vont récupérer un bébé lion qui s'est fait renverser par une voiture ils vont réussir à le soigner et en fait ils vont préférer le garder en se disant après tout depuis qu'on a ce petit lion, on a des photos on a plus de followers, on arrive à faire venir plus de monde, plus de bénévoles, donc je vois pas pourquoi on le ramènerait à sa mère, voilà Donc, Il faut être très vigilant avec les centres de conservation. Et pour moi, si tu n'as pas la... Enfin, si on n'a pas la connaissance scientifique, vétérinaire, si on n'a pas une vraie plus-value, c'est difficile de travailler dans la conservation.

  • Speaker #1

    Ouais. Pour choisir mon voyage, j'ai galéré, parce que depuis la France, comme tu dis maintenant, il y en a énormément. Il y en a énormément. Et du coup, je me suis dit, mais où est-ce que c'est le mieux ? Est-ce que je ne vais pas faire... du tourisme qui est néfaste pour les animaux etc et finalement j'ai pas du tout fait de centre de voyage dans un centre de réintroduction de réintroduction je voulais justement pas de ça pas de cash ni rien du coup c'était juste de l'observation partait à 5 heures du mat avec les rangers toute la journée non rentrer le midi on repartait l'aprem pour comment ils appellent ça game drive pour cinq heures et on revenait et parfois on voyait rien parfois on se prenait juste la pluie sur la tête pendant des heures Et c'était trop bien. Dans des camps au milieu du bush, là, et pas d'électricité, on se faisait tous à manger à la lampe torche, les douches et tout, et on repartait le lendemain. Les tentes, la nuit, on entendait parfois les hyènes. Les lions, je suis pas sûre de les avoir entendus à côté de nous, mais bon, c'était juste incroyable. Et parfois un peu frustrant, parce que j'ai pas vu toutes les espèces. J'ai pas vu de léopard, par exemple. Mais sinon, j'ai vu pas mal de choses. Et ouais, il y a tellement de centres... qu'une fois sur place, c'est super dur. Enfin, une fois sur place, on peut se rendre compte, mais à distance, impossible. Enfin, je trouve. C'est super dur. Quelle était ta plus grosse frayeur ? Est-ce qu'il y a un moment où t'as eu chaud, ton cœur s'est accéléré très vite ?

  • Speaker #0

    Il y a certains moments, effectivement, d'adrénaline. Quand tu te fais charger par un hippopotame, quand tu te fais charger par un gorille. Mais comme c'est des charges d'intimidation, je sais que je suis pas en danger quoi. Mais non, mais un truc tout bête tu vois, mais par exemple, là j'ai mis une vidéo sur mon compte Instagram où il se trouve qu'il y a un bébé guépard qui est venu à... quelques mètres de moi pendant que j'étais au sol à pied en train de photographier le reste de la famille. Et il est vraiment venu par curiosité à deux mètres en train de renifler mon appareil photo. Et ça, ça a été un moment exceptionnel, unique, vraiment qui m'a marqué. J'avais le cœur qui battait, mais ce n'était pas de la peur. J'étais heureux. Après, parfois, si les éléphants peuvent être… Un côté un peu terrifiant, mais pas quand ils te chargent, mais quand volontairement ils veulent te faire peur. Ça, ça m'est arrivé une fois. Mais sinon, non, j'ai toujours eu la chance de m'entourer un peu de guides professionnels. Ça, c'est très important pour mes tournages et pour mes reportages. Donc non, je n'ai pas peur.

  • Speaker #1

    Et est-ce qu'à l'inverse, tu as déjà mis des animaux en danger par ta présence, par la présence de ta voiture ou de ton guide ? Le fait de t'approcher fort ? Ou est-ce que tu as roulé déjà sur un animal ?

  • Speaker #0

    Non, jamais. Mon Dieu. Jamais, jamais.

  • Speaker #1

    Mais sans faire exprès, bien sûr. Un porc épique, une tortue, je ne sais pas.

  • Speaker #0

    Non, non, non, jamais. Peut-être qu'en passant en voiture, je ne sais pas, tu as un chacal qui dort à quelques mètres de la route et tu ne le vois pas. Et puis, il passe en voiture. Et du coup, ça le réveille, ça le dérange. Mais je ne sais pas. Je n'ai pas le... Non, je n'ai pas trop de souvenirs de ça. Mais en fait, il y a aussi un truc, c'est que comme je travaille avec ce qu'on appelle des longues focales, donc des grands zooms, je dis toujours à mon guide, ça ne sert à rien de s'approcher trop de l'animal. Déjà parce qu'en plus, si on s'approche trop, on ne va pas avoir le comportement naturel de l'animal. Et en fait, ce qui est intéressant en photo et en vidéo, c'est d'avoir une palette d'attitudes variées et différentes. Et donc, pour toutes ces raisons, je me... À part quand je suis avec des clients et que c'est intéressant pour eux de voir l'animal à 5-6 mètres, on s'approche, mais après je leur dis, écoutez, ça vous dit, on prend nos distances, on se met derrière un buisson, on fait en sorte qu'ils nous voient, mais qu'on ne les dérange pas, et on attend, on attend, on attend, on attend. Et en fait, les moments les plus émouvants, c'est quand on a attendu 3 heures que des lions étaient en train de dormir et qu'ils commencent petit à petit à se lever. Et là encore, lors d'un tournage au Botswana le mois dernier, on a attendu... longtemps que trois malions qui étaient en train de dormir mais profondément se lèvent et quand ils se sont levés on les a suivis pendant pendant deux heures et en pleine nuit et c'était incroyable incroyable quel

  • Speaker #1

    est ton super pouvoir en tant que photographe qu'est ce qui te différencie des autres photographes chacune des réponses serait prétentieuse

  • Speaker #0

    Peut-être... Oh non, je ne sais pas.

  • Speaker #1

    Tes connaissances, mine de rien, tu étais sur le terrain depuis très longtemps.

  • Speaker #0

    Alors, les connaissances, j'ose espérer que chaque photographe animalier a des connaissances du monde animal et qui ne fait pas que de la photo. C'est quand même le B.A.B. Peut-être effectivement le fait d'y être depuis plus de 20 ans. Le fait d'avoir grandi avec la nature, d'avoir grandi avec la savane, le désert. Peut-être que c'est ça ma différence par rapport aux autres. Après, c'est un milieu où... Moi, je l'ai découvert il n'y a pas longtemps. C'est un milieu très dur où chaque photographe a l'impression que l'autre est un concurrent. Et vraiment, ce n'est pas... Oui, non, ce n'est vraiment pas un milieu sympathique. Et en fait, moi, je me sens un peu différent parce qu'aujourd'hui, j'arrive à vivre des réseaux sociaux grâce à la photographie animalière, de mes reportages. et j'ai même le luxe aujourd'hui de choisir mes projets, donc ça c'est extraordinaire, mais 95% des photographes animaliers, ils vont vendre deux photos à un magazine, ils vont vivre avec 800 euros par mois, et du coup ils voient l'autre comme un concurrent, parce qu'il va lui prendre un touriste sur un stage, et donc ça c'est vraiment un monde, je l'ai découvert il y a deux ans, et c'est un monde que je n'aime pas, c'est un monde que je ne comprends pas, où pareil tu as toute une ancienne génération, qui eux alors eux ça leur pose pas de problème de nourrir les animaux et de les prendre en photo ça c'est vraiment le dernier de leurs soucis t'en as même un qui m'a montré des photos d'un martin pêcheur exceptionnel je suis comme comment t'as fait ça ? en fait il m'explique qu'il place des pièges ou en fait des sortes d'aquarium où tu vois pas les bords qui est mis genre vraiment en dessous de la surface il met des poissons comme ça les poissons peuvent pas s'en aller et du coup il sait exactement où le martin pêcheur va pêcher sauf que parfois le Martin Pescher se tape contre le fond de l'aquarium et se casse le bec. et donc lui en fait cette personne ça lui posait aucun problème alors il montrait ses photos de lui en affût et tout mais c'est ridicule enfin voilà on est vraiment déjà sur deux générations qui n'ont pas du tout la même vision de voir le monde sauvage et on est aussi sur deux générations qui ne se comprennent pas sur ce que va devenir la photographie animalière et le reportage animalier et du coup moi vraiment je tends à éviter un peu ce monde les festivals tout ça ... Et par chance, je n'ai pas besoin de visibilité, je n'ai pas besoin des festivals pour vivre de ma passion. Et ça, c'est extraordinaire. Pourvu que ça dure. Ça se trouve, on fait le même call l'année prochaine. Je t'annonce que j'essaye d'aller dans tous les festivals de photographie animalière. Mais je ne crois pas. Je crois vraiment que j'ai la chance d'avoir une communauté très bienveillante, super gentille, qui me suit, qui aime mon travail. Et ça, ça donne énormément de force. Et moi, je préfère me concentrer sur eux que sur le secteur.

  • Speaker #1

    Et comment tu as créé justement cette communauté, ta carrière ? Est-ce que tu avais un mentor ? Tu avais quelqu'un qui t'inspirait ?

  • Speaker #0

    Alors moi, j'ai voulu faire ce métier le jour où j'ai reçu un livre de Steve Bloom, qui est un photographe animalier anglais. Et j'ai trouvé ses photos exceptionnelles. Et encore aujourd'hui, il m'inspire beaucoup dans ma manière de prendre des photos. Pour moi, c'est... Mon maître absolu, c'est vraiment le gars exceptionnel. Après, sur les réseaux sociaux, moi, je vais être très clair, ce n'est pas grâce à mes photos que j'ai eu autant d'abonnés. Ce n'est pas par la qualité de mes photos que j'ai autant d'abonnés. Il y a des photographes animaliers qui sont bien meilleurs que moi et qui n'ont pas cette communauté. Je crois que c'est parce que j'incarne mes contenus, parce que si je… Je montre les coulisses parce que j'ai inventé une façon de raconter aussi le monde sauvage, le monde animal. Et ça, je crois que ça plaît et que j'offrais quelque chose où il y avait une demande a priori. Je pense que c'est aussi simple que ça.

  • Speaker #1

    Est-ce que tu aurais des conseils à donner justement à quelqu'un qui veut se lancer en tant que photographe animalier ?

  • Speaker #0

    Tout simplement de prendre son appareil photo et de sortir, voyager, aller dans les endroits. un peu sauvage, ça peut être à 10 km de chez soi, dans un champ, dans une petite forêt. Aujourd'hui, on peut, par exemple, aller photographier les chevreuils, les renards. Les renards, c'est un animal incroyable à photographier, les écureuils. Il y a des lynx qui sont plus faciles à voir, par exemple, en Espagne. Donc, vraiment, il y a plein de façons de devenir photographe animalier et toujours se poser la question aussi parce qu'il y a une réalité financière. qui a besoin de photographie animalière ? Est-ce que c'est les magazines ? Est-ce que c'est les gouvernements ? Est-ce que c'est des galeries d'exposition ? Donc réfléchir aussi à sa carrière en faisant ce métier, parce que c'est un métier, c'est pas qu'un hobby, contrairement à ce que pensaient mes parents.

  • Speaker #1

    Et est-ce que maintenant ça te plaît toujours autant, justement le fait que ton hobby soit devenu, ta passion soit devenue ton métier, avec la pression financière, etc. Est-ce que ça te plaît toujours autant ?

  • Speaker #0

    Oui, par chance, je touche du bois pourvu que ça dure, mais je n'ai plus cette pression financière. Bien sûr, je ne suis pas multimillionnaire, ça ne marche pas comme ça, la photographie est une manière, mais je peux choisir mes projets. Donc ça, c'est super intéressant. Et oui, j'espère garder cette passion le plus longtemps possible. Mais ça, malheureusement, on ne peut pas savoir. Ça se trouve un jour... Je vais avoir la flemme de me lever pour photographier un léopard. Je vais avoir envie de me coucher plus tôt pour éviter de faire un safari. Ça, j'espère que ça n'arrivera jamais. Ça n'arrive pas pour le moment, mais on ne sait jamais. On ne sait jamais de quoi sera fait nos passions et notre cerveau dans les années à venir. Est-ce que tu peux nous parler de ton prochain projet s'il existe ? Que ce soit en tant que voyage ou documentaire, est-ce que tu as des livres aussi ? Je vois que tu avais déjà sorti un livre il y a quelques temps.

  • Speaker #1

    Oui, j'ai sorti effectivement mon premier livre, Green and Wild, il y a plus de deux ans maintenant. Et là, le deuxième sort... Alors, je ne sais pas quand ce podcast va sortir, mais les précommandes seront possibles le 2 juin. donc ça serait incroyable que ce podcast sorte après le 2 juin ouais on va voir si ça arrive trop bien et donc c'est un livre très important parce que il reprend vraiment c'est un livre donc Orange and Wild sur les déserts et les savannes et il reprend vraiment peut-être mes plus belles photos au cours de ces 12 dernières années et donc au moment où je faisais la composition de ce livre je me suis dit mais il va faire 1000 pages ce livre c'est pas possible et donc j'ai dû choisir vraiment le Le mieux du mieux, le top du top. Et en fait, vous allez découvrir énormément de photos qui ne sont pas sur mes réseaux sociaux. Parce que sur mes réseaux sociaux, je privilégie plutôt le format vertical. Et là, en fait, sur un livre qui fait 30-32 cm, l'idée, c'était vraiment de vous immerger le plus possible avec plein de petites histoires. Et donc, on a vraiment des très belles photos horizontales, pas que, mais on a aussi des histoires que je n'ai jamais racontées. Et j'ai essayé vraiment de passer du temps à l'écrire. pour trouver les mots qui immergent le plus possible. Et sinon, pour annoncer la sortie de ce livre, il y a un documentaire qui va sortir sur ma chaîne YouTube et qui parle de ma dernière séance photo, de mon dernier shooting qui me permet de refermer ce livre.

  • Speaker #0

    Et le documentaire, il sort quand ?

  • Speaker #1

    J'espère qu'il va sortir le 2 juin. Enfin, j'espère qu'il va sortir plus ou moins dans la même semaine que la sortie des précommandes. Ok,

  • Speaker #0

    parfait. Comment tu vois ton futur ? Toujours des voyages, des livres, des documentaires ?

  • Speaker #1

    Mon futur ? Mon futur ? Oui, toujours des documentaires, toujours des livres.

  • Speaker #0

    Dans quelle sorte ça peut évoluer ?

  • Speaker #1

    Peut-être... Avoir des projets de documentaires encore plus ambitieux, avec des plateformes de diffusion comme celles qu'on connaît, Netflix, Amazon, Disney, même si c'est très concurrentiel, mais avoir les moyens de créer vraiment de belles épopées sur les animaux du monde et de raconter vraiment de belles histoires. Je pense qu'aujourd'hui, la télévision a loupé le virage du digital et des créateurs de contenu. Et je pense maintenant que les plateformes peuvent offrir un storytelling adapté à Internet.

  • Speaker #0

    C'est tout ce que je te souhaite alors.

  • Speaker #1

    Merci.

  • Speaker #0

    Merci beaucoup, Mathieu.

  • Speaker #1

    Merci.

Description

Cet épisode est sponsorisé par l'assurance santé animalière LASSIE :

Avec le code MORDANT40 j’ai le plaisir de vous offrir 40€ à toute nouvelle inscription !



Aujourd'hui dans Mordant j'ai le plaisir de recevoir Mathieu Courdesses, photographe animalier talentueux. Dès l'âge de 8 ans, un voyage inoubliable en Namibie a éveillé en lui un amour profond pour les animaux et les safaris, le virus comme il l’appelle, et ce virus ne l’a jamais quitté depuis.


Mathieu a su transformer sa passion en une carrière inspirante, d’étudiant en école de commerce, en passant par guide jusqu’à devenir photographe animalier et fondateur de sa propre maison de production.


Dans cet épisode on aborde les défis que représente la photographie animalière, notamment l'obtention des autorisations nécessaires, les réalités financières, les connaissances empiriques versus théoriques.


Au fil de la conversation, vous découvrirez comment la photographie peut servir de puissant outil de sensibilisation à la conservation de la nature.


Mathieu ne se contente pas de capturer des images à des fins purement esthétiques ; il s'engage également pour protection de la faune sauvage menacée, il fait partie de la nouvelle génération de photographes plus éclairée, plus éthique et plus respectueuse.


Avec Mathieu, on a aussi parlé d’écotourisme, de diplomatie environnementale et de la mode de la poudre de rhinocéros.


Je vous souhaite une bonne écoute !



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Pour retrouver Mathieu Courdesses :

TikTok @mathieu.courdesses

Instagram @mathieucourdesses

Pour commander son dernier livre : Orange&Wild




Pour suivre mon quotidien et celui du podcast :


@mathilde_osteo



Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Bonjour Mathieu Courdès, merci beaucoup d'avoir accepté mon invitation. Je suis super contente d'avoir un photographe animalier pour la première fois sur Mordant.

  • Speaker #1

    Bonjour !

  • Speaker #0

    Alors pour commencer, est-ce que tu peux nous dire quel est ton rapport avec les animaux sauvages enfants et même les animaux domestiques ?

  • Speaker #1

    Alors moi j'ai eu la chance du coup d'aller en Namibie à l'âge de 8 ans, mais même avant ce voyage j'étais déjà passionné par les animaux. Je me souviens que mes jouets, quand j'étais tout petit, c'était des petits animaux en plastique et je m'imaginais directeur d'une réserve, propriétaire, directeur d'un zoo. Donc j'étais déjà passionné, passionné. Et puis effectivement, ce voyage en Namibie m'a un peu transformé puisque j'ai su qu'en posant les pieds en Namibie, j'aurais, quoi qu'il arrive, plus tard un rapport avec ce continent. Et les activités, à savoir le safari, la recherche des animaux dans leur milieu naturel, tout ce qu'on peut vivre sur place, je savais que je le revivrais plus tard.

  • Speaker #0

    Extrêmement précoce, c'est dingue.

  • Speaker #1

    Il se passe quelque chose quand on va là-bas, c'est ce qu'on appelle le fameux virus. Il se trouve que pendant quelques années, j'ai organisé des voyages où j'accompagnais des clients avec moi et je leur faisais visiter les parcs nationaux. Et c'est vrai que chez certaines personnes, il y a ce virus qu'on attrape et on n'a qu'une envie, c'est de retourner sur le continent africain pour repartir à la recherche des animaux. Et je crois que oui, ce virus, je l'ai chopé moi très très jeune. Je l'ai encore, je l'ai encore.

  • Speaker #0

    Et donc à 8 ans, tu as fait en sorte de faire les études qu'il fallait pour aller travailler plus tard en Afrique ?

  • Speaker #1

    Alors à 8 ans, non. Mais par contre, j'ai eu la chance ensuite avec mes parents. de retourner en Afrique parce qu'eux aussi ont chopé ce fameux virus. Après, à l'âge de 18 ans, moi, je voulais être photographe animalier, mais mes parents ne voulaient pas. Après, je leur ai dit journaliste. Ils m'ont dit non, ce n'est pas un métier non plus. Je leur ai dit qu'est-ce que vous voulez que je fasse ? Ils m'ont dit fais une école de commerce et puis après, si tu veux faire ton hobby de photographie, tu pourras. J'ai fait cette école de commerce qui ne m'a pas plu. mais cette école avait un cursus qui me permettait de partir à l'étranger et notamment trouver des stages. Et donc, on avait vraiment champ libre pour le choix du stage. Et donc, j'ai envoyé à l'âge de 18-19 ans 150 lettres de motivation, 150 CV à travers toute l'Afrique australe. Et j'ai eu deux réponses, un tour opérateur au Botswana et un tour opérateur en Namibie. Et donc, j'ai vécu sept mois là-bas. où j'ai appris d'abord à être guide, d'abord, pardon, à être traducteur et ensuite à être guide.

  • Speaker #0

    De traduire quelle langue ?

  • Speaker #1

    En fait, je traduisais les guides qui parlaient anglais vers des touristes qui, eux, parlaient français. Et en fait, la petite anecdote, c'est que mon anglais était nul, nul, nul. Je ne parlais quasiment pas anglais. Et donc, en fait, souvent, j'improvisais par rapport à... à ce qu'on voyait. Quand on voyait un lion, le guide donnait plein d'informations sur le lion. Et moi, je comprenais vraiment un mot sur deux. Mais comme j'avais déjà pas mal de connaissances sur le monde animal, je donnais mes propres connaissances aux touristes. Sauf qu'un jour, je suis tombé sur une touriste qui était prof d'anglais et la supercherie n'a pas fonctionné.

  • Speaker #0

    C'est trop drôle. Et donc, tu as fini ton école de commerce pour ensuite... Est-ce que tu as directement bifurqué dessus ? Bifurqué, pardon, sur guide ?

  • Speaker #1

    Alors en fait, j'ai fait deux écoles à la fin de ma première école de commerce. Je suis parti vivre un an en Namibie pour voir si après tout, je voulais faire ma vie là-bas en tant que guide. J'avais quelques hésitations et je me souviens de mon patron sur place qui m'avait dit « Non mais Mathieu, tu ne vas pas être guide, tu vaux mieux que ça. » Et en fait, pour moi, le métier de guide, c'était un métier incroyable. En fait, c'était la première fois de ma vie que… que quelqu'un me disait que j'avais une carrière qui valait peut-être mieux que mes propres aspirations. Et ça, ça m'a permis de me construire, ça m'a permis de viser plus haut. Et du coup, j'ai fait un an en tant que guide et puis je suis parti. Et ensuite, j'ai fait un master dans la production audiovisuelle à l'ESCP. Et ça, ça m'a beaucoup, beaucoup formé. Et ensuite, j'ai travaillé avec un réalisateur, Gilles Demestre. Et ensuite, j'ai fondé ma société de production. Et donc, je produis, je réalise des documentaires pour le digital, pour Internet.

  • Speaker #0

    Ok, mais pas forcément documentaires animaliers.

  • Speaker #1

    C'est toujours des documentaires en lien avec la nature. Par exemple, j'ai fait un documentaire pour une société sur les papillons en Équateur. Donc un éleveur de papillons qui essaye de réintroduire des espèces de papillons qui ont disparu. J'ai fait aussi des documentaires pour mes propres réseaux sociaux. J'ai fait des documentaires pour des gouvernements étrangers. Donc voilà, je mets toujours en lien avec la nature, la protection de la nature. Toujours sur des sujets que je pense, avec le temps, maîtriser un peu et donc sur lesquels je sais construire une histoire.

  • Speaker #0

    Ok. Et est-ce que tu peux nous dire en quoi consistait le rôle de guide exactement ?

  • Speaker #1

    Alors le guide, en fait, c'est l'interface, c'est le lien entre le client et la vie sauvage. Donc entre le touriste, celui qui vient visiter un endroit, et les grands animaux, la grande faune africaine. Et donc il y a un apprentissage d'abord très théorique sur ce qu'on peut avoir dans les livres, qu'on peut aujourd'hui trouver sur Internet. Et puis il y a surtout... Et je crois que c'est ça qui fait un bon guide, l'apprentissage empirique. Donc chaque expérience, chaque observation qu'on va avoir face à des lions, face à des éléphants, va nous permettre d'accumuler des connaissances qui sont pour moi les plus précieuses. Et moi j'ai l'habitude de dire que ce que je sais du monde animal aujourd'hui, ça ne tient que sur une feuille, mais par contre ces connaissances-là, je sais qu'on est très très peu à les savoir dans le monde. et en fait c'est vraiment ça le monde sauvage c'est Tu te rends compte que tu comprends et que tu connais le monde sauvage au moment où tu te rends compte que tu ne connais rien. Il y a une sorte de déclic où tu te dis, mais en fait, c'est un continent, l'éthologie, le monde animal est un continent tellement inexploré que la science est face à tellement d'obstacles, tellement de mystères scientifiques qui sont à la fois passionnants. Et c'est là où tu te rends compte effectivement que c'est un monde incroyable. Ouais, ouais. Et qu'au final, on sait très peu de choses.

  • Speaker #0

    Ouais. Ouais, ouais, c'est dingue. Quand je suis partie, je suis partie une fois en Afrique... Quand tu dis Austral, c'est quoi exactement ?

  • Speaker #1

    L'Afrique australe, c'est Namibie, Afrique du Sud, Botswana, Zambie, Zimbabwe et Mozambique.

  • Speaker #0

    Ok. Bon, alors je suis partie une fois en Afrique australe, en Afrique du Sud. Et quand j'ai découvert du coup moi le métier de ranger, tu nous diras la différence s'il y en a une entre guide et ranger, ben en fait j'étais hallucinée, moi je pensais que ça protégeait une réserve, ça protégeait les animaux, mais en fait ils ont des connaissances incroyables sur, et pas uniquement sur les animaux, les espèces, ce qu'ils vont manger, etc. Mais énormément en éthologie, comportement, et énormément aussi sur la flore, enfin j'étais hallucinée du nombre de plantes, d'herbes, de graminées, de... et tous les chants des oiseaux, enfin bon c'était assez dingue et du coup j'ai j'ai découvert un tout petit bout, je suis pas resté très longtemps mais c'était incroyable. Quel est ton premier voyage en tant que photographe ?

  • Speaker #1

    En tant que photographe, mon premier voyage je pense professionnel, là où j'ai gagné ma vie en tant que photographe, c'est sans doute au Rwanda, où j'avais réussi à négocier des autorisations de tournage, où j'avais réussi à... à déclencher des expositions suite à ce voyage. Après, avant, j'avais vécu en Namibie, au Botswana, donc j'apportais toujours mon appareil photo avec moi. Mais je crois que oui, c'est le Rwanda, mon premier voyage professionnel.

  • Speaker #0

    Et comment ça s'organise un tel voyage ? Niveau autorisation, peut-être pour les réserves ? Est-ce que tu dois être forcément escorté par un guide ou un ranger ou tu peux y aller tout seul ?

  • Speaker #1

    Bien sûr, ça c'est toute la partie un peu immergée de l'iceberg. C'est tout ce qu'on ne voit pas, à savoir... La préparation, l'investigation, la partie production, c'est-à-dire qu'est-ce que ma société va prendre en charge, qu'est-ce que le client va prendre lui à sa charge. Donc voilà, il y a toute une partie à étudier et ça prend des mois et des mois et des mois. Et puis parfois, ça prend quelques semaines. Là, par exemple, je reviens d'un tournage au Botswana. Je crois que fin février. On s'est dit, j'ai eu une personne au téléphone, je lui ai dit voilà, je suis prêt à partir. Mais mi-mars, je partais, enfin fin mars, je partais. Donc là, c'est du rush où tous les jours, on étudie le terrain, tous les jours, on a des interviews avec les guides avant de les rencontrer pour savoir l'histoire qu'on peut construire. Il y a évidemment les autorisations, il y a savoir pourquoi c'est mieux d'aller dans cette concession et pas dans celle-ci. Est-ce qu'on peut faire du hors-piste ? Il y a énormément de... Il y a un savoir-faire que ma société a accumulé au fur et à mesure des années et c'est ça finalement la force de mon travail, c'est que je sais comment construire un voyage pour obtenir les meilleures images, je l'espère possible, et les meilleures vidéos possibles.

  • Speaker #0

    Et qu'est-ce qui te pousse par exemple à aller dans une destination, là tu disais le Botswana, qu'est-ce que tu recherches exactement et tu parlais aussi d'histoire, est-ce que tu recherches à avoir une situation particulière, par exemple je sais pas un accouplement ou une bagarre particulière entre des clans, ou alors tu vas dans une réserve particulière parce que tu veux voir certaines espèces et tu y vas à l'aveugle et tu attends de voir ce qui se passe sur le moment pour ensuite raconter.

  • Speaker #1

    Alors, il y a une partie de ce savoir-faire qui doit rester un peu secret, un peu mystérieux. Mais l'idée, c'est beaucoup, beaucoup d'adaptation. Donc, quand on va dans un endroit, tous les jours avec mon vidéaste et avec mes équipes, on écrit, on réfléchit, on construit le documentaire. S'il nous manque certaines séquences, on retourne dans des endroits. Donc, c'est énormément d'improvisation aussi sur place.

  • Speaker #0

    et Il y a des histoires, est-ce que c'est la vérité absolue ce que tu racontes ou c'est quand même une interprétation de l'homme par rapport au fait qu'ils soient frères et sœurs, enfin j'imagine que ça on le sait, mais par rapport aux bagarres, aux territoires, est-ce que tu le sais toi, ton guide, est-ce que tu es aidé par des éthologues par exemple ou des vétos ?

  • Speaker #1

    Alors, déjà, je me méfie un tout petit peu des éthologues quand il s'agit de... d'interprétation de comportements d'animaux sauvages. Il faut savoir que l'éthologie est une science qui a peu de moyens. Et donc, à part dans la branche de la primatologie, où là, effectivement, il y a plus de recherches parce que la primatologie est accompagnée par les grands laboratoires pharmaceutiques, médicaux. Et donc, on a plus de moyens pour étudier les grands primates. mais Tout ce qui est éthologie, des félidés par exemple, ou des nidés, tout ça, on a quand même très peu de connaissances. Et surtout, moi ce que m'ont appris mes 20 années dans la brousse, c'est que d'une région à l'autre, d'une réserve à l'autre, le comportement d'un animal va varier. Donc pour répondre à ta question, en fait, pour moi les meilleurs éthologues de ces régions sont les guides. qui, eux, sont dans la réserve, ou les rangers, ça dépend comment tu les appelles, sont dans la réserve depuis des années et des années, voire des décennies, et en fait connaissent les différentes générations, les différents clans, les différents territoires des prédateurs. Et donc, c'est avec eux qu'on va construire l'histoire. Alors, à ta question, est-ce qu'il y a de la mise en scène ? Oui, il y a de la mise en scène, mais il n'y a jamais de mensonge. C'est-à-dire qu'on ne va jamais mentir sur une vérité scientifique. Ça, c'est très important. On peut... Par exemple, imaginons que le documentaire, on part à la recherche d'un lion, et il se trouve qu'on voit ce lion le jour 1. En fait, on ne va pas faire un documentaire qui dure deux minutes. Donc, on va essayer de mettre en scène la recherche, ou alors est-ce qu'il n'y a pas autre chose à raconter derrière le lion ? Pourquoi ce lion avait ce caractère-là ? En fait, c'est ça l'adaptation. c'est que Les animaux, on ne sait jamais vraiment sur quoi on va tomber. On ne sait jamais s'il va nous offrir juste un gros billon en bas d'un arbre ou si au contraire, il va être en train de chasser. Donc, c'est de la direction d'acteurs, mais en fait, on n'a aucune direction sur nos acteurs. Donc, c'est à nous d'anticiper et d'improviser par rapport à ce que les animaux nous offrent. Mais en tout cas, on ne mentira jamais sur une vérité scientifique. ou alors... on va choisir de surligner un trait de caractère mais ça ne sera jamais un mensonge et on essaye vraiment d'être toujours à la frontière avec l'anthropomorphisme où on essaye quand même de donner des émotions aux téléspectateurs ou aux viewers mais sans pour autant dire une contre-vérité par exemple on ne va jamais dire Voilà, ça c'est cet éléphant, il s'appelle Michel, il vient de se réveiller, il va prendre son petit déjeuner. Ben non, un éléphant ça ne se réveille pas, ça ne prend pas son petit déjeuner. Donc en revanche, les guides eux donnent des noms aux animaux. D'ailleurs c'est un processus très important pour l'identification, c'est même un processus scientifique. Et les guides nous racontent que chaque éléphant, chaque lion, chaque key species de la réserve a un comportement différent. à son propre mode de vie. Et donc, en fait, c'est sur ces traits de caractère qu'on va insister.

  • Speaker #0

    Est-ce que les animaux, ils ont le temps de s'habituer à toi ? Parce que tu changes pas mal quand même de pays, de réserve, de continent. Et tu vois, ça m'a fait penser à Jane Goodall qui observait les chimpanzés, qui a mis quand même des semaines, des mois, voire certaines années pour tisser des liens avec les familles. Alors que toi, tu changes assez souvent de lieu. Comment ça se passe pour ça ?

  • Speaker #1

    Bon, les animaux qu'on rencontre, dans la grande majorité des cas, ont déjà eu un processus d'habituation. Le processus d'habituation, c'est ce qui permet à un animal de le rassurer par rapport à la présence humaine et à la silhouette humaine. Un gorille, par exemple, qui a eu un processus d'habituation, ça dure, le gorille des montagnes, entre 2 et 4 ans. Et là, le gorille, du coup, a conscience que la silhouette humaine n'est pas un problème, n'est pas liée au braconnage. Pareil pour les lions dans les grandes réserves ou dans les grands parcs nationaux. ils savent que la voiture n'est pas un problème. Mais tout ça, le processus d'habitation, ça met des mois et des mois, et c'est des rangers qui, chaque jour, se rapprochent un peu plus des espèces pour qu'elles puissent être observées et pour qu'elles restent totalement sauvages, mais qu'on puisse au mieux les observer et faire des photos.

  • Speaker #0

    Ouais donc en fait ils mettent tous les hommes dans le même sac, il faut pas qu'ils s'habituent forcément à toi Mathieu mais il faut qu'ils s'habituent à l'homme ou au ranger.

  • Speaker #1

    Ouais bien sûr, bien sûr, ouais c'est ça.

  • Speaker #0

    Y'a pas forcément besoin qu'ils s'habituent à toi.

  • Speaker #1

    Non, non non non non. Non non mais moi surtout quand je pars en tournage, je pars deux semaines, deux trois semaines, donc j'ai pas un processus d'habituation, ça met des mois et des mois et des mois.

  • Speaker #0

    Bah ouais ouais, ok bah ouais c'est pour ça que je me posais la question.

  • Speaker #1

    tout le processus d'habituation par exemple J'avais un ami qui travaillait sur le processus d'habituation d'une famille de gorilles dans le sud du Cameroun. Et ça faisait des années et des années, ça fait presque dix ans maintenant qu'ils essayent d'habituer une famille de gorilles. Et en fait, à chaque fois qu'il y a un cas de braconnage dans la famille, ils sont obligés de tout reprendre de zéro. Ouais,

  • Speaker #0

    ok. Pour redesensibiliser un peu. Ok. Et quelle est ton éthique par rapport à ça ? Jusqu'où tu pourrais aller pour une photo ? Quelles sont tes limites ?

  • Speaker #1

    C'est vraiment...

  • Speaker #0

    Parce que je pense qu'il y a des photographes qui abusent un peu, qui doivent se rapprocher un maximum de certains animaux, non ?

  • Speaker #1

    Ouais, après, je crois pas que ça soit sur la proximité avec l'animal qu'on fixe l'éthique. T'as des animaux qui viennent vers toi. T'as des animaux qui sont curieux, genre l'ours polaire, dans son éthologie, dans son comportement. Il y a une façon d'être curieux parce que l'ours polaire est obligé d'être curieux, est obligé de voir ce qui se passe, de trouver de la nourriture par lui-même. Et donc, par instinct, il va se rapprocher de toi, il va te renifler, il va te sentir. Et donc là, ça ne le dérange pas puisque c'est lui qui vient vers toi. L'éthique du photographe animalier, c'est un sujet très délicat, très difficile. Moi, je sais ma limite. Je sais... En fait, ma limite, elle est souvent liée au plaisir que j'ai à prendre la photo. C'est-à-dire que là, l'année dernière, je suis allé au Brésil pour photographier le jaguar. Et un soir, on me dit, viens, tu vas pouvoir photographier un oslo. Et l'oslo, c'est vraiment un animal très, très difficile à voir, très rare. Et magnifique. En pleine nuit. Comment ?

  • Speaker #0

    Et magnifique, c'est super beau.

  • Speaker #1

    Magnifique, c'est un pédain extraordinaire. Et donc, en pleine nuit, on m'emmène dans une sorte d'affût, un peu. Et j'attends, j'attends, et là, je vois une petite tête qui dépasse, et c'est l'oslo. Et tout de suite, il s'en va. Et donc, moi, je n'ai pas le temps de faire des photos. Et là, tu as un gars qui arrive du lodge dans lequel on était et qui pose des morceaux de poulet, enfin, des petits morceaux de viande, et je crois qu'il en pose trois ou quatre juste en face de l'affût. Effectivement, l'oslo est revenu comme par habitude, et il a mangé les bouts de poulet. Et donc, effectivement, moi, j'ai pris des photos. Mais je me suis dit, en fait, je n'ai aucun plaisir à faire ces photos. En fait, ce n'est pas la nature qui m'offre ce cadeau, c'est l'homme qui l'a provoqué. Et donc, au-delà de tous les problèmes que ça comporte de nourrir un animal, par exemple, sur nos doigts, on peut transmettre éventuellement des maladies à l'animal. Le fait de mettre de la nourriture à un endroit, ça peut entraîner des confrontations entre certaines espèces qui n'ont… donc pas à se rencontrer normalement à l'état sauvage. Après, il faut aussi raison garder. Les grands enjeux de la protection animale, c'est le braconnage, c'est la déforestation, ce n'est pas le nourrissage d'un individu dans un lieu donné. C'est pour ça que... Il y a eu un scandale il n'y a pas très longtemps de deux photographes effectivement qui ont fait des photos en Finlande où les animaux étaient nourris avec des grosses carcasses de cochons. Et donc au même endroit, on avait des ours, des loups, des gloutons. Et donc il y a eu un article sur Reporter, il y a eu un article sur Géo. Ils se sont fait défoncer. Et moi, je pense que la chose juste, c'est d'informer en fait les personnes à qui tu... proposes tes images, à qui tu montres tes images. Si tu leur racontes les coulisses, si tu leur dis voilà comment ça s'est passé, à vous de voir ce que vous en pensez, mais voilà comment j'ai pris ces photos. Et je pense que les gens en fait comprennent ou ne comprennent pas, mais après toi, ton rôle de photographe, ça a été aussi de raconter les coulisses. Et voilà, à côté de ça, tu as aussi des images qui ont été faites, et on le sait aujourd'hui, même les meilleurs photographes animaliers français, notamment le meilleur. Il y a des fortes rumeurs comme quoi il a utilisé des appâts pour prendre certaines de ses photos. Mais est-ce qu'à travers ses photos, il n'a pas sensibilisé des milliers de personnes à une espèce menacée, à la disparition d'un animal en particulier ? C'est un sujet très délicat. Mais moi, en tout cas, je ne veux pas pointer du doigt tel ou tel photographe. D'ailleurs, je n'ai dit aucun nom volontairement, alors que je les ai bien en tête. Chacun a son éthique. Le plus important, ce n'est pas de tromper celles et ceux qui te suivent et qui suivent ton travail.

  • Speaker #0

    Donc, ça rejoint un peu l'une de mes questions. Quel est le rôle de la photographie animale ? J'imagine que ce n'est pas uniquement pour l'art, même si certaines espèces sont magnifiques. Et je pense qu'on est aussi attiré par ça au début. Mais il y a aussi, j'imagine, d'autres rôles.

  • Speaker #1

    Bien sûr. Oui, oui. De toute manière, le photographe animalier qui n'a qu'une vision esthétique, de son travail, pour moi il se trompe un peu. Il doit y avoir une vision de conservation, de sensibilisation, et puis il y a aussi tout un travail d'investigation avant de partir en expédition. Ça fait beaucoup de mots en sion. Il faut savoir où est-ce qu'on va et qu'est-ce qu'on va photographier et pourquoi on va le photographier. En fait à partir du moment où on sait aujourd'hui que pour aller dans un endroit, moi, j'ai une empreinte carbone catastrophique. Évidemment que j'ai une empreinte carbone catastrophique. Donc, qu'est-ce qu'on se dit en tant que photographe animalier ? Comment on rentabilise, même si ce n'est pas le bon terme, mais comment on équilibre cette empreinte carbone ? En faisant des reportages. Moi, je sais que c'est important dans mon travail, je n'en parle pas beaucoup sur les réseaux sociaux, mais de faire ce qu'on appelle de la diplomatie environnementale, donc d'aller voir des ministres, d'aller voir des diplomates. et de leur dire ce que j'ai vu et comment on peut améliorer les choses pour protéger des animaux. Et voilà. Donc, c'est aussi ça, le rôle du photographe animalier, du créateur de contenu nature animalier.

  • Speaker #0

    Et qu'est-ce qu'on peut faire, nous, qui ne sommes pas professionnels ou pas politiques, au quotidien pour aider ces espèces, depuis la France ?

  • Speaker #1

    Bon, pas grand-chose. Je sais que j'ai certains de mes amis, s'ils m'entendaient, ils me tueraient. en m'entendant dire ça, mais en tant que particulier, moi j'ai vu en me rendant sur place la disparition des écosystèmes et des parcs nationaux, c'est quelque chose qui dépasse de loin le foyer, le particulier, c'est des décisions étatiques, gouvernementales, parfois c'est des organisations internationales qui décident ça, parfois c'est des grandes fortunes, des milliardaires qui décident ça. franchement c'est malheureusement en tant que particulier en tout cas je parle bien de la protection des espèces menacées je parle bien du domaine que je connais à savoir le braconnage la déforestation et où je ne parle pas de la protection de l'environnement en tant que tel parce que c'est un sujet tellement large que je peux pas me prenez en tant que spécialiste en revanche sur les sujets de conservation de biodiversité là je m'y connais et à votre échelle enfin à l'échelle du particulier Juste être sensibilisé et dans un repas de famille dire que voilà j'ai vu que malheureusement il y avait plus que 3000 tigres à l'état sauvage, dire que oui il y a plus que 1100 gorilles des montagnes à l'état sauvage, expliquer tout ça, être sensibilisé à ça c'est déjà un pas énorme. Mais les décisions de protection de nos espaces naturels, elles se passent dans des sphères très très hautes.

  • Speaker #0

    Est-ce qu'il y a déjà un animal que tu as photographié et qui n'existe plus aujourd'hui ?

  • Speaker #1

    Je ne crois pas. J'ai vu effectivement certains écosystèmes changer au fur et à mesure de mes allées venues en Afrique. Par exemple, la véritable mode. le terme n'est pas très beau, mais de la corne de rhinocéros, à savoir les rhinocéros qui se font braconner, tuer. C'est une mode qui a vraiment commencé dans les années entre 2005 et 2010. Et puis, elle a eu son apogée en 2014-2015. Et donc, moi qui vais en Afrique depuis que j'ai 8 ans, depuis 2002, j'ai vu effectivement les populations de rhinocéros diminuer et diminuer jusqu'à... devenir pratiquement inexistantes dans certaines régions d'Afrique. Par exemple, au Massaïmara ou au Serengeti, donc au Tanzanie, Kenya, voir un rhinocéros, c'est quelque chose de rarissime. Et puis quand on le voit, généralement, il est très très loin, on voit juste une sorte de petit point noir dans la Grande Plaine. Donc ce sont des animaux qui sont devenus très très difficiles à observer. Au Botswana, il n'y en a quasiment plus. En fait, il reste quelques endroits précieux où on peut en voir, mais ça reste très, très difficile.

  • Speaker #0

    Je repensais en fait à un mois et les rhinocéros que j'ai pu voir. J'en ai vu et j'ai vu des blancs et des noirs justement à la réserve McAllis et dans le nord de l'Afrique du Sud. Et là où j'ai rencontré la ranger qui était française, Claire, avec qui j'ai déjà fait un podcast et qui nous disait d'ailleurs quand on était en safari, c'était du matin au soir. On aidait les rangers, je ne sais plus comment ça s'appelle, les co-touristes. Et il ne fallait pas qu'on poste de photos ni rien, il ne fallait pas donner trop d'infos sur le nombre d'individus et où ils étaient situés finalement.

  • Speaker #1

    Oui, effectivement, ça fait partie des choses qui sont demandées, de ne pas donner d'informations, parce que l'information est déjà un process du braconnage. Il y a même certaines réserves, j'en ai eu écho il y a quelques mois. qui donnent des réserves qui font du tourisme et qui donnent des informations aux braconniers pour compléter les fins de mois et pour gagner de l'argent. Ah ouais,

  • Speaker #0

    donc on peut être de deux côtés.

  • Speaker #1

    Non, mais c'est juste des réserves qui ne s'en sortent pas financièrement. Pendant le Covid, il y a pas mal de réserves qui en ont chié. Et effectivement, j'ai eu il y a quelques mois des informations sur... Une réserve dans laquelle, effectivement, il y aurait eu de l'intelligence avec l'ennemi, comme on dit. Donc, donner des informations sur l'emplacement d'un rhinocéros. Après, c'est toujours la même chose. C'est des on-dit, il n'y a pas eu d'enquête. Il y a énormément de compétition entre les différents lodges et réserves de la région. Donc, chaque bonne excuse est bonne à prendre pour tuer l'autre économiquement. Mais bon, j'avoue que quand on me l'a dit et quand on m'a dit le nom de la réserve, ça ne m'a pas tant étonné que ça.

  • Speaker #0

    Et pourquoi ? Parce que je sais qu'ils coupent les cornes des rhinocéros justement pour éviter le braconnage. Peut-être qu'en les coupant derrière, ils peuvent les revendre aux braconniers. Non, même pas.

  • Speaker #1

    En fait, repose-moi ta question pour être sûr.

  • Speaker #0

    La réserve coupe les cornes pour protéger leurs animaux. Ce n'est pas la réserve qui coupe les cornes.

  • Speaker #1

    Ça dépend. Donc, tu as les parcs nationaux et les réserves. Dans les parcs nationaux, ça dépend des politiques mises en place par les gouvernements, mais généralement, effectivement, ils coupent la corne. Donc ça, c'est avec des fonds publics pour protéger les rhinocéros du braconnage. Mais il faut savoir que même si ça repousse tous les 3-4 ans une corne de rhinocéros, et même s'il y a ça de corne, des rhinocéros peuvent quand même se faire tuer. Parce que le kilo de poudre de corne de rhinocéros se revend entre 70 000 et 80 000 dollars le kilo. Et ça, c'est encore des chiffres d'il y a quelques années. Peut-être que maintenant, ça...

  • Speaker #0

    Et la mode est toujours présente, comme tu disais, s'il y avait une mode...

  • Speaker #1

    Bien sûr. Alors, ça a diminué parce qu'il y a eu des politiques à la fois publiques et des stratégies privées mises en place notamment par les réserves privées pour financer... les cornages de rhinocéros. Souvent, ces réserves utilisent l'argent du tourisme pour protéger leurs rhinocéros. Et aujourd'hui, on le sait, les réserves qui n'ont pas voulu écorner leurs rhinocéros en Afrique du Sud, la grande majorité n'ont plus de rhinocéros. Et les réserves qui ont mené des grandes campagnes d'écornage, eux, ont encore des rhinocéros. Et donc, en fait, moi, à titre personnel, ça me sert le cœur de voir un rhinocéros sans corne. Mais aujourd'hui, face à ce fléau, c'est la seule solution qu'on ait trouvée.

  • Speaker #0

    Pendant un moment, on a injecté un produit au rhinocéros qui rendait la corne un peu rose et qui, a priori, enlevait les effets aphrodisiaques de la corne parce qu'ensuite, la corne est revendue sur le marché chinois pour des vertus aphrodisiaques. Et en fait, on s'est rendu compte que ce produit donnait des problèmes d'estomac et d'intestin au rhinocéros. Et donc, du coup, la seule solution qu'on ait trouvée, c'était de couper. couper les cornes. Il faut savoir que les deux premières causes de mort des rhinocéros, le premier c'est le braconnage, et le deuxième c'est les mâles entre eux qui s'écornent et qui se tuent. Donc finalement, en coupant les cornes, on réduit quand même, face à une population qui allait s'éteindre, face à une espèce qui allait s'éteindre, on réduit quand même de deux facteurs la disparition du rhinocéros. Et en fait, c'est intéressant de voir que Merci. Il y a certaines espèces dans le monde, comme les gorilles, les rhinocéros blancs et noirs, ou les tigres, par exemple, qui doivent leur survie uniquement grâce à l'écotourisme. Uniquement. Alors, ça peut faire mal au cœur à certains d'entendre ça, mais en fait, il y a une loi du marché et de l'économie derrière. C'est que ces parcs nationaux, ces réserves naturelles, elles vont intéresser les industries du bois, elles vont intéresser, pourvu qu'il y ait du pétrole, Merci. d'autres industries qui vont être ultra polluantes. Et donc, finalement, le tourisme n'est pas, à part dans certains pays, mais n'est pas un secteur d'économie qui produit énormément d'argent. Mais par contre, ça recrute beaucoup. C'est-à-dire que le tourisme permet quand même de rendre actif une grande partie de la population dans des régions du monde où il y a quand même beaucoup de chômage. Et surtout, le tourisme, qui fait partie du secteur tertiaire, a tendance à augmenter la classe moyenne dans certaines régions du monde où il y avait quand même jusqu'à il y a 15-20 ans une classe très très pauvre qui représentait 80% voire 85% du pays et une classe extrêmement riche. Et en fait le développement de ces pays du sud va passer par l'émergence du secteur tertiaire et donc une augmentation de la classe moyenne. et moi je me rends bien compte là on sort peut-être un peu un tout petit peu du sujet de l'animalier, mais ça me semble important de dire que le tourisme, l'écotourisme, le tourisme responsable permet de protéger et de sauver certaines espèces de la disparition. Et plus largement, permet de protéger des écosystèmes parce que le rhinocéros, par exemple, par sa présence, par ses excréments, est une sorte d'espèce parapluie et donc va permettre de sauver d'autres animaux rien que parce qu'il est là. Quand il va faire ses excréments, ça va créer des insectes qui vont attirer des oiseaux. Ces oiseaux vont attirer des petits prédateurs comme des cervales, des caracales, même des chacals. Et donc tout ça est très important. Si tu as une espèce qui disparaît de certains biomes, c'est tout le reste des espèces qui sont en péril.

  • Speaker #1

    T'as l'air d'en savoir énormément sur les animaux. Est-ce que tu en sais autant qu'un ranger ? Est-ce que t'as passé des certifications ? Ou est-ce que c'est que de l'empirisme, comme tu disais tout à l'heure ?

  • Speaker #0

    En fait, j'ai eu la chance de commencer à guider à un moment où, notamment en Namibie, il y avait très peu de certifications ou de concours. Donc, j'avais pas besoin de diplôme. Bien sûr, j'ai dû passer des tests, des tests écrits, des tests oraux. J'ai fait plusieurs tours en tant qu'assistant. C'est même presque plus formateur que certaines écoles reconnues par l'État. Mais en tout cas, il m'a fallu du temps avant d'avoir mes propres groupes et de guider. Le Ranger, effectivement, c'est une certification que tu as avec un diplôme, l'un des diplômes qui s'appelle le VGASA, qui est reconnu par l'État sud-africain. Et effectivement, c'est ce qu'on t'apprend. le cri des oiseaux, comme tu disais au début de notre podcast, identifier les différentes espèces, les traces, les crottes, et ça, en fait, une fois que tu es sur le terrain pendant plusieurs mois, tu l'as aussi, c'est quelque chose que tu acquiers, donc moi, je ne me définis pas en tant que ranger, parce que je n'ai pas la certification Vigassa, mais au final, j'ai mes connaissances de guide, et comme je te l'ai dit, c'est vraiment plus mes connaissances Merci. empiriques qui sont importantes que mes connaissances théoriques, sachant que quand tu commences en tant que ranger, tes seules connaissances sont celles que tu as apprises lors de ton stage et dans tes livres.

  • Speaker #1

    Et est-ce que tu connais sur d'autres continents, tu parles beaucoup en Afrique, mais est-ce que tu es partie... En Asie, en Amérique latine et dans ce cas-là, j'imagine que c'est d'autres connaissances.

  • Speaker #0

    Bien sûr, oui, tout à fait. Je suis parti, là, récemment, faire le jaguar au Brésil. Je suis allé photographier le tigre en Inde. Je suis allé photographier les orangs-outans à Sumatra. Je suis allé au Pôle Nord, au Canada, voir les ours blancs. Donc, Équateur aussi. Donc, oui, j'ai eu la chance de voyager pas mal. Effectivement, on est sur... sur des connaissances différentes, mais quand même, je vois certains points communs quand je photographie, par exemple, le jaguar dans le Pantanal. Je trouve quand même, au moment où je prends ma photo, certains points communs avec le léopard qu'on va avoir en Afrique. Quand je photographie le tigre, dans sa manière de se déplacer, dans la manière de nous regarder, je vois dans sa manière d'être finalement... le super prédateur de la région, je vois certains points communs avec le lion. Donc pareil, quand je fais le rang mouton, je vois dans sa manière de se déplacer, dans la manière de me regarder, certaines similitudes avec les gorilles des montagnes. Donc finalement, quand je vois des animaux d'une même famille, j'arrive à comprendre un peu plus l'animal et du coup à choisir un emplacement ou à choisir une heure de la journée pour laquelle le photographier.

  • Speaker #1

    Et quel est ton pays préféré, ta destination préférée ?

  • Speaker #0

    Bonne question. Le Rwanda est quand même un pays qui m'a marqué. J'y suis allé peut-être cinq, six fois. C'est un pays assez extraordinaire pour mille et une raisons. Après, moi, j'ai un attachement aussi particulier pour l'NMB, qui est le pays qui m'a créé en tant que photographe et guide. Quoi d'autre ? Le Botswana, extraordinaire. mon expérience dans le nord du Canada pour voir les ours polaires à Churchill, c'est magique. Donc ouais, non, il y a plein d'endroits dans le monde.

  • Speaker #1

    Après tu fais une grande liste. Et l'animal que tu trouves le plus fascinant ?

  • Speaker #0

    Aïe, aïe, aïe, c'est dur. Le plus fascinant, peut-être celui que je n'ai pas encore photographié.

  • Speaker #1

    Ok. Tu as photographié les pandas ?

  • Speaker #0

    justement non c'est mon rêve parce que t'en parlais dans les gens mais comme ça fait quelques années je me demandais si tu les avais non non pas encore c'est très difficile j'ai eu plein de projets qui m'ont potentiellement amené à les photographier et finalement ça s'est pas fait c'est aussi ça le le métier de photographe et de reporter animalier c'est que sur 10 projets que tu lances il y en a un ou deux qui se font bon là avec mes réseaux sociaux avec le fait entre guillemets que je sois de plus en plus connu les projets sont un peu plus faciles à avoir et les décideurs sont plus faciles à convaincre mais quand même c'est beaucoup de refus en tout cas le début de ma carrière professionnelle c'était dur,

  • Speaker #1

    c'était très dur ok et est-ce que tu as déjà fait des animaux aquatiques ?

  • Speaker #0

    non après j'ai déjà vu les baleines, j'ai déjà vu les grandes colonies d'Otari en Namibie Mais non, je n'ai jamais fait de la photo sous-marine.

  • Speaker #1

    Oui. Et ça ne te donne pas envie ?

  • Speaker #0

    Pas particulièrement. En fait, disons que je trouve qu'il y a vraiment des top, top photographes dans ce milieu-là. Mais même en France, on a certains qui sont pour moi les meilleurs au monde. Je pense à Stéphane Grandsoto qui est exceptionnel. Monsieur Balesta aussi qui est exceptionnel. Moi, je suis… Je trouve qu'il y a tellement à faire déjà sur la terre ferme et notamment des espèces que je n'ai pas encore photographiées que pour l'instant, je vais rester là-dessus.

  • Speaker #1

    Oui, c'est déjà très, très bien. Est-ce que tu as déjà découvert une nouvelle espèce ?

  • Speaker #0

    Ah non, non, non. Non, non, j'ai eu un doute une fois. Je faisais une investigation pour partir au Bénin dans le parc de la Panjari. Et en fait, on n'a pas pu y aller parce qu'on devait y aller. C'était un très beau contrat. C'était au tout début de ma carrière professionnelle. Je n'ai jamais raconté cette anecdote. C'était vraiment… Avec mon équipe, on a été trop contents parce que c'était un projet qui pouvait nous faire vivre pendant au moins un an et demi, deux ans. C'était avec le gouvernement béninois. Et l'idée, c'était d'aller prendre des photos dans ce parc-là, le parc de la Pantjari. et promouvoir le parc avec les réseaux sociaux tout ça. Et en fait, j'ai appelé certains contacts des connaissances que j'ai en Afrique qui travaillent dans la sécurité, dans le renseignement et ils m'ont dit, non Mathieu, là, on ne peut pas trop t'en dire, mais il ne faut pas y aller. Et donc moi, j'ai essayé de creuser parce que je me disais, quand même, c'est un truc qui peut faire déconner ma carrière. Pourquoi il ne faut pas y aller ? Ils m'ont dit, en ce moment, c'est vraiment dangereux. Il y a de plus en plus de djihadistes de l'équivalent de Boko Haram sur place, enfin, l'une des branches de Boko Haram. Et donc, si tu y vas et qu'il y a un problème, malheureusement, là-bas, ils n'arriveront pas à te retrouver et tu risques d'avoir des gros problèmes. Et en fait, j'avais fait toute une investigation, notamment sur leur guépard. Parce que je les soupçonne, entre guillemets, d'avoir une sous-espèce de guépard. Eux, ils disent que c'est des guépards d'Afrique. Enfin, le guépard un peu standard. Mais les photos que j'ai vues de ces guépards me font dire que c'est un guépard qui ne ressemble à aucun autre guépard. Et donc, je voulais aller les photographier et potentiellement aider les scientifiques à les identifier. Et au final, ça ne s'est pas fait. Donc, je n'y suis pas allé parce qu'effectivement, il y avait ce risque de kidnapping. Et il se trouve que la semaine où on devait y aller, il y a une équipe de tournage espagnol qui s'est fait tuer, kidnapper et tuer par les djihadistes.

  • Speaker #1

    Wow, quelle histoire ! En quoi tu pensais qu'ils étaient différents du guépard africain ?

  • Speaker #0

    Ils ont les tâches beaucoup moins denses qu'en Afrique australe ou en Afrique de l'Est.

  • Speaker #1

    Ok, et tu penses toujours ça ou tu as vu de nouvelles photos ?

  • Speaker #0

    Je n'ai pas vu d'autres photos parce que j'ai l'impression que le lodge qui devait nous accueillir a fermé. Je n'ai pas l'impression qu'il y ait beaucoup de touristes qui y vont. Et mine de rien, aujourd'hui avec les portables, les photos des clients, des touristes, aident aussi à une meilleure compréhension du monde sauvage. Et donc, je n'ai pas revu d'autres photos de ces guépards. Mais j'imagine, si je fais mes recherches, je pense que je pourrais trouver.

  • Speaker #1

    Ok. Et ça me fait un lien avec une question que je m'étais préparée aussi, c'est tu parlais d'aider les scientifiques au terme d'éthologie. Est-ce que tes photos peuvent servir justement pour l'avancée scientifique en éthologie ou alors pour recenser ou avoir des infos sur leur santé, l'âge, certaines pathologies, etc. ?

  • Speaker #0

    Oui, bien sûr. Notamment, j'avais fait un reportage dans la Caguerra, au Rwanda, qui est l'un de mes parcs préférés. On avait mis des colliers émetteurs autour du cou d'un éléphant et de lion. Les vétérinaires et les conservateurs m'avaient demandé de bien prendre en photo les lions pour les identifier, puisqu'ils les identifient avec le nombre de... de moustache. A priori, les points des moustaches ne sont pas au même endroit d'un lion à l'autre, c'est un peu comme les empreintes digitales. Et donc, il m'avait demandé de prendre les moustaches des différents lions. Et voilà, ça les aide effectivement à les recenser, ça les aide à voir si certains ont des problèmes de santé. Voilà, c'est aussi comme ça qu'on protège une famille de lions.

  • Speaker #1

    Dans un de tes documentaires, tu dis que tu as une forte connexion spirituelle avec certains animaux est-ce que tu pourrais dire que tu fais de la communication animale ou que c'est quelque chose d'intuitif sur lequel tu n'as pas donné de nom ?

  • Speaker #0

    bon moi je suis quelqu'un de très cartésien donc j'ai je dirais je ne sais pas si la communication entre les êtres humains et le monde animal existe Merci. Je sais qu'il y a certains chamanes que j'ai rencontrés d'ailleurs en Afrique du Sud qui disaient se communiquer avec certains animaux. Moi, ce qui est sûr, c'est que j'ai vu tellement de lions, j'ai passé tellement de temps à observer les éléphants, à observer les léopards, qu'aujourd'hui, les lions, j'ai l'impression qu'ils n'ont plus beaucoup de secrets pour moi. Quand je vois la manière dont marche un lion, je peux savoir... Qu'est-ce qu'il veut faire ? Où il veut aller ? Est-ce qu'il est dans un bon état ? Est-ce qu'il a faim ? Est-ce qu'on peut le suivre ? Est-ce qu'on le dérange ? Tout ça, je le vois, mais je ne l'ai lu nulle part. C'est parce que je les connais, parce que je les ai tellement vus, photographiés, étudiés. Ça fait plus de 20 ans que je vois des lions, donc maintenant, je les connais bien, c'est mes potes.

  • Speaker #1

    Oui, mais tu disais ça dans le documentaire, pour justement, les fois où tu ne les vois pas, eh bien, tu sais... Où ils vont être ?

  • Speaker #0

    Oui, pas tout le temps, mais effectivement, quand pendant plusieurs jours, je n'arrive pas à voir des lions, je me prends un moment et j'essaye de comprendre pourquoi je ne les vois pas. Et en fait, souvent, je le sais. Ça peut être une température, ça peut être du vent, ça peut être de l'humidité. Ça peut être plein de choses. Et du coup, je sais que, par exemple, si je me lève un matin et que je sens la température, l'air, je vois les nuages, je vois tout ça, je sais si je vais les trouver ou pas. Et je sais s'ils seront actifs ou pas. Ça, je le sais, oui.

  • Speaker #1

    Ok. Mais c'est plus par rapport à un calcul, en fait, de toutes tes connaissances et de toute ton expérience cumulée qui vont faire que tu vas avoir... toutes ces infos sur eux.

  • Speaker #0

    Mais peut-être que c'est ça, les gens qui pensent communiquer avec les animaux, enfin vraiment être en lien avec eux, peut-être qu'ils n'ont pas le recul de se dire que c'est un ensemble de connaissances qui leur font croire qu'ils sont en communication avec les animaux. Parce que... Oui, je sais pas, peut-être, mais je te dis, je suis très cartésienne. Ouais,

  • Speaker #1

    c'est ta façon de penser qui est cartésienne, et du coup, pour toi, c'est forcément que les infos qui vont te donner une solution. Mais certaines personnes, ça va être que ce qu'il y a dans leur ressenti, dans leur ventre, tu vois. Mais, ouais, je sais pas, moi, je suis un peu entre les deux. Mais je te disais ça parce qu'en Afrique, il y avait pas mal de stages de photographie, et l'autre chose qu'on voyait pas mal, c'est aussi de stages de communication animale avec la faune sauvage, etc. Donc, je me suis dit... Et en plus, tu parlais de ta connexion. Je me suis dit peut-être que c'est ce que tu fais. Mais finalement, tu ne le fais pas consciemment, mais c'est un petit peu ça, je pense.

  • Speaker #0

    Alors, je me méfie beaucoup des centres de réintroduction et des centres de conservation en Afrique australe parce que c'est devenu un vrai business. En fait, d'un point de vue général, les animaux en détresse, les animaux en difficulté, les animaux blessés ont besoin le moins possible de l'être humain. Ou alors des spécialistes, des vétérinaires, des biologistes, des gens qui ont fait des années et des années d'études, des scientifiques. Et c'est pour ça. En fait, tu as certains centres de réintroduction qui ont créé une sorte de business en disant venez faire du bénévolat, sauf que toi, tu vas payer ta chambre, tu vas payer ta bouffe. Et en fait, eux, ils vont être très contents d'avoir des bénévoles qui viennent. Et c'est ça qui va permettre de faire vivre la réserve. Et moi, j'ai fait... pas mal d'investigations sur ça et tu as certains centres de conservation par exemple qui vont récupérer un bébé lion qui s'est fait renverser par une voiture ils vont réussir à le soigner et en fait ils vont préférer le garder en se disant après tout depuis qu'on a ce petit lion, on a des photos on a plus de followers, on arrive à faire venir plus de monde, plus de bénévoles, donc je vois pas pourquoi on le ramènerait à sa mère, voilà Donc, Il faut être très vigilant avec les centres de conservation. Et pour moi, si tu n'as pas la... Enfin, si on n'a pas la connaissance scientifique, vétérinaire, si on n'a pas une vraie plus-value, c'est difficile de travailler dans la conservation.

  • Speaker #1

    Ouais. Pour choisir mon voyage, j'ai galéré, parce que depuis la France, comme tu dis maintenant, il y en a énormément. Il y en a énormément. Et du coup, je me suis dit, mais où est-ce que c'est le mieux ? Est-ce que je ne vais pas faire... du tourisme qui est néfaste pour les animaux etc et finalement j'ai pas du tout fait de centre de voyage dans un centre de réintroduction de réintroduction je voulais justement pas de ça pas de cash ni rien du coup c'était juste de l'observation partait à 5 heures du mat avec les rangers toute la journée non rentrer le midi on repartait l'aprem pour comment ils appellent ça game drive pour cinq heures et on revenait et parfois on voyait rien parfois on se prenait juste la pluie sur la tête pendant des heures Et c'était trop bien. Dans des camps au milieu du bush, là, et pas d'électricité, on se faisait tous à manger à la lampe torche, les douches et tout, et on repartait le lendemain. Les tentes, la nuit, on entendait parfois les hyènes. Les lions, je suis pas sûre de les avoir entendus à côté de nous, mais bon, c'était juste incroyable. Et parfois un peu frustrant, parce que j'ai pas vu toutes les espèces. J'ai pas vu de léopard, par exemple. Mais sinon, j'ai vu pas mal de choses. Et ouais, il y a tellement de centres... qu'une fois sur place, c'est super dur. Enfin, une fois sur place, on peut se rendre compte, mais à distance, impossible. Enfin, je trouve. C'est super dur. Quelle était ta plus grosse frayeur ? Est-ce qu'il y a un moment où t'as eu chaud, ton cœur s'est accéléré très vite ?

  • Speaker #0

    Il y a certains moments, effectivement, d'adrénaline. Quand tu te fais charger par un hippopotame, quand tu te fais charger par un gorille. Mais comme c'est des charges d'intimidation, je sais que je suis pas en danger quoi. Mais non, mais un truc tout bête tu vois, mais par exemple, là j'ai mis une vidéo sur mon compte Instagram où il se trouve qu'il y a un bébé guépard qui est venu à... quelques mètres de moi pendant que j'étais au sol à pied en train de photographier le reste de la famille. Et il est vraiment venu par curiosité à deux mètres en train de renifler mon appareil photo. Et ça, ça a été un moment exceptionnel, unique, vraiment qui m'a marqué. J'avais le cœur qui battait, mais ce n'était pas de la peur. J'étais heureux. Après, parfois, si les éléphants peuvent être… Un côté un peu terrifiant, mais pas quand ils te chargent, mais quand volontairement ils veulent te faire peur. Ça, ça m'est arrivé une fois. Mais sinon, non, j'ai toujours eu la chance de m'entourer un peu de guides professionnels. Ça, c'est très important pour mes tournages et pour mes reportages. Donc non, je n'ai pas peur.

  • Speaker #1

    Et est-ce qu'à l'inverse, tu as déjà mis des animaux en danger par ta présence, par la présence de ta voiture ou de ton guide ? Le fait de t'approcher fort ? Ou est-ce que tu as roulé déjà sur un animal ?

  • Speaker #0

    Non, jamais. Mon Dieu. Jamais, jamais.

  • Speaker #1

    Mais sans faire exprès, bien sûr. Un porc épique, une tortue, je ne sais pas.

  • Speaker #0

    Non, non, non, jamais. Peut-être qu'en passant en voiture, je ne sais pas, tu as un chacal qui dort à quelques mètres de la route et tu ne le vois pas. Et puis, il passe en voiture. Et du coup, ça le réveille, ça le dérange. Mais je ne sais pas. Je n'ai pas le... Non, je n'ai pas trop de souvenirs de ça. Mais en fait, il y a aussi un truc, c'est que comme je travaille avec ce qu'on appelle des longues focales, donc des grands zooms, je dis toujours à mon guide, ça ne sert à rien de s'approcher trop de l'animal. Déjà parce qu'en plus, si on s'approche trop, on ne va pas avoir le comportement naturel de l'animal. Et en fait, ce qui est intéressant en photo et en vidéo, c'est d'avoir une palette d'attitudes variées et différentes. Et donc, pour toutes ces raisons, je me... À part quand je suis avec des clients et que c'est intéressant pour eux de voir l'animal à 5-6 mètres, on s'approche, mais après je leur dis, écoutez, ça vous dit, on prend nos distances, on se met derrière un buisson, on fait en sorte qu'ils nous voient, mais qu'on ne les dérange pas, et on attend, on attend, on attend, on attend. Et en fait, les moments les plus émouvants, c'est quand on a attendu 3 heures que des lions étaient en train de dormir et qu'ils commencent petit à petit à se lever. Et là encore, lors d'un tournage au Botswana le mois dernier, on a attendu... longtemps que trois malions qui étaient en train de dormir mais profondément se lèvent et quand ils se sont levés on les a suivis pendant pendant deux heures et en pleine nuit et c'était incroyable incroyable quel

  • Speaker #1

    est ton super pouvoir en tant que photographe qu'est ce qui te différencie des autres photographes chacune des réponses serait prétentieuse

  • Speaker #0

    Peut-être... Oh non, je ne sais pas.

  • Speaker #1

    Tes connaissances, mine de rien, tu étais sur le terrain depuis très longtemps.

  • Speaker #0

    Alors, les connaissances, j'ose espérer que chaque photographe animalier a des connaissances du monde animal et qui ne fait pas que de la photo. C'est quand même le B.A.B. Peut-être effectivement le fait d'y être depuis plus de 20 ans. Le fait d'avoir grandi avec la nature, d'avoir grandi avec la savane, le désert. Peut-être que c'est ça ma différence par rapport aux autres. Après, c'est un milieu où... Moi, je l'ai découvert il n'y a pas longtemps. C'est un milieu très dur où chaque photographe a l'impression que l'autre est un concurrent. Et vraiment, ce n'est pas... Oui, non, ce n'est vraiment pas un milieu sympathique. Et en fait, moi, je me sens un peu différent parce qu'aujourd'hui, j'arrive à vivre des réseaux sociaux grâce à la photographie animalière, de mes reportages. et j'ai même le luxe aujourd'hui de choisir mes projets, donc ça c'est extraordinaire, mais 95% des photographes animaliers, ils vont vendre deux photos à un magazine, ils vont vivre avec 800 euros par mois, et du coup ils voient l'autre comme un concurrent, parce qu'il va lui prendre un touriste sur un stage, et donc ça c'est vraiment un monde, je l'ai découvert il y a deux ans, et c'est un monde que je n'aime pas, c'est un monde que je ne comprends pas, où pareil tu as toute une ancienne génération, qui eux alors eux ça leur pose pas de problème de nourrir les animaux et de les prendre en photo ça c'est vraiment le dernier de leurs soucis t'en as même un qui m'a montré des photos d'un martin pêcheur exceptionnel je suis comme comment t'as fait ça ? en fait il m'explique qu'il place des pièges ou en fait des sortes d'aquarium où tu vois pas les bords qui est mis genre vraiment en dessous de la surface il met des poissons comme ça les poissons peuvent pas s'en aller et du coup il sait exactement où le martin pêcheur va pêcher sauf que parfois le Martin Pescher se tape contre le fond de l'aquarium et se casse le bec. et donc lui en fait cette personne ça lui posait aucun problème alors il montrait ses photos de lui en affût et tout mais c'est ridicule enfin voilà on est vraiment déjà sur deux générations qui n'ont pas du tout la même vision de voir le monde sauvage et on est aussi sur deux générations qui ne se comprennent pas sur ce que va devenir la photographie animalière et le reportage animalier et du coup moi vraiment je tends à éviter un peu ce monde les festivals tout ça ... Et par chance, je n'ai pas besoin de visibilité, je n'ai pas besoin des festivals pour vivre de ma passion. Et ça, c'est extraordinaire. Pourvu que ça dure. Ça se trouve, on fait le même call l'année prochaine. Je t'annonce que j'essaye d'aller dans tous les festivals de photographie animalière. Mais je ne crois pas. Je crois vraiment que j'ai la chance d'avoir une communauté très bienveillante, super gentille, qui me suit, qui aime mon travail. Et ça, ça donne énormément de force. Et moi, je préfère me concentrer sur eux que sur le secteur.

  • Speaker #1

    Et comment tu as créé justement cette communauté, ta carrière ? Est-ce que tu avais un mentor ? Tu avais quelqu'un qui t'inspirait ?

  • Speaker #0

    Alors moi, j'ai voulu faire ce métier le jour où j'ai reçu un livre de Steve Bloom, qui est un photographe animalier anglais. Et j'ai trouvé ses photos exceptionnelles. Et encore aujourd'hui, il m'inspire beaucoup dans ma manière de prendre des photos. Pour moi, c'est... Mon maître absolu, c'est vraiment le gars exceptionnel. Après, sur les réseaux sociaux, moi, je vais être très clair, ce n'est pas grâce à mes photos que j'ai eu autant d'abonnés. Ce n'est pas par la qualité de mes photos que j'ai autant d'abonnés. Il y a des photographes animaliers qui sont bien meilleurs que moi et qui n'ont pas cette communauté. Je crois que c'est parce que j'incarne mes contenus, parce que si je… Je montre les coulisses parce que j'ai inventé une façon de raconter aussi le monde sauvage, le monde animal. Et ça, je crois que ça plaît et que j'offrais quelque chose où il y avait une demande a priori. Je pense que c'est aussi simple que ça.

  • Speaker #1

    Est-ce que tu aurais des conseils à donner justement à quelqu'un qui veut se lancer en tant que photographe animalier ?

  • Speaker #0

    Tout simplement de prendre son appareil photo et de sortir, voyager, aller dans les endroits. un peu sauvage, ça peut être à 10 km de chez soi, dans un champ, dans une petite forêt. Aujourd'hui, on peut, par exemple, aller photographier les chevreuils, les renards. Les renards, c'est un animal incroyable à photographier, les écureuils. Il y a des lynx qui sont plus faciles à voir, par exemple, en Espagne. Donc, vraiment, il y a plein de façons de devenir photographe animalier et toujours se poser la question aussi parce qu'il y a une réalité financière. qui a besoin de photographie animalière ? Est-ce que c'est les magazines ? Est-ce que c'est les gouvernements ? Est-ce que c'est des galeries d'exposition ? Donc réfléchir aussi à sa carrière en faisant ce métier, parce que c'est un métier, c'est pas qu'un hobby, contrairement à ce que pensaient mes parents.

  • Speaker #1

    Et est-ce que maintenant ça te plaît toujours autant, justement le fait que ton hobby soit devenu, ta passion soit devenue ton métier, avec la pression financière, etc. Est-ce que ça te plaît toujours autant ?

  • Speaker #0

    Oui, par chance, je touche du bois pourvu que ça dure, mais je n'ai plus cette pression financière. Bien sûr, je ne suis pas multimillionnaire, ça ne marche pas comme ça, la photographie est une manière, mais je peux choisir mes projets. Donc ça, c'est super intéressant. Et oui, j'espère garder cette passion le plus longtemps possible. Mais ça, malheureusement, on ne peut pas savoir. Ça se trouve un jour... Je vais avoir la flemme de me lever pour photographier un léopard. Je vais avoir envie de me coucher plus tôt pour éviter de faire un safari. Ça, j'espère que ça n'arrivera jamais. Ça n'arrive pas pour le moment, mais on ne sait jamais. On ne sait jamais de quoi sera fait nos passions et notre cerveau dans les années à venir. Est-ce que tu peux nous parler de ton prochain projet s'il existe ? Que ce soit en tant que voyage ou documentaire, est-ce que tu as des livres aussi ? Je vois que tu avais déjà sorti un livre il y a quelques temps.

  • Speaker #1

    Oui, j'ai sorti effectivement mon premier livre, Green and Wild, il y a plus de deux ans maintenant. Et là, le deuxième sort... Alors, je ne sais pas quand ce podcast va sortir, mais les précommandes seront possibles le 2 juin. donc ça serait incroyable que ce podcast sorte après le 2 juin ouais on va voir si ça arrive trop bien et donc c'est un livre très important parce que il reprend vraiment c'est un livre donc Orange and Wild sur les déserts et les savannes et il reprend vraiment peut-être mes plus belles photos au cours de ces 12 dernières années et donc au moment où je faisais la composition de ce livre je me suis dit mais il va faire 1000 pages ce livre c'est pas possible et donc j'ai dû choisir vraiment le Le mieux du mieux, le top du top. Et en fait, vous allez découvrir énormément de photos qui ne sont pas sur mes réseaux sociaux. Parce que sur mes réseaux sociaux, je privilégie plutôt le format vertical. Et là, en fait, sur un livre qui fait 30-32 cm, l'idée, c'était vraiment de vous immerger le plus possible avec plein de petites histoires. Et donc, on a vraiment des très belles photos horizontales, pas que, mais on a aussi des histoires que je n'ai jamais racontées. Et j'ai essayé vraiment de passer du temps à l'écrire. pour trouver les mots qui immergent le plus possible. Et sinon, pour annoncer la sortie de ce livre, il y a un documentaire qui va sortir sur ma chaîne YouTube et qui parle de ma dernière séance photo, de mon dernier shooting qui me permet de refermer ce livre.

  • Speaker #0

    Et le documentaire, il sort quand ?

  • Speaker #1

    J'espère qu'il va sortir le 2 juin. Enfin, j'espère qu'il va sortir plus ou moins dans la même semaine que la sortie des précommandes. Ok,

  • Speaker #0

    parfait. Comment tu vois ton futur ? Toujours des voyages, des livres, des documentaires ?

  • Speaker #1

    Mon futur ? Mon futur ? Oui, toujours des documentaires, toujours des livres.

  • Speaker #0

    Dans quelle sorte ça peut évoluer ?

  • Speaker #1

    Peut-être... Avoir des projets de documentaires encore plus ambitieux, avec des plateformes de diffusion comme celles qu'on connaît, Netflix, Amazon, Disney, même si c'est très concurrentiel, mais avoir les moyens de créer vraiment de belles épopées sur les animaux du monde et de raconter vraiment de belles histoires. Je pense qu'aujourd'hui, la télévision a loupé le virage du digital et des créateurs de contenu. Et je pense maintenant que les plateformes peuvent offrir un storytelling adapté à Internet.

  • Speaker #0

    C'est tout ce que je te souhaite alors.

  • Speaker #1

    Merci.

  • Speaker #0

    Merci beaucoup, Mathieu.

  • Speaker #1

    Merci.

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Description

Cet épisode est sponsorisé par l'assurance santé animalière LASSIE :

Avec le code MORDANT40 j’ai le plaisir de vous offrir 40€ à toute nouvelle inscription !



Aujourd'hui dans Mordant j'ai le plaisir de recevoir Mathieu Courdesses, photographe animalier talentueux. Dès l'âge de 8 ans, un voyage inoubliable en Namibie a éveillé en lui un amour profond pour les animaux et les safaris, le virus comme il l’appelle, et ce virus ne l’a jamais quitté depuis.


Mathieu a su transformer sa passion en une carrière inspirante, d’étudiant en école de commerce, en passant par guide jusqu’à devenir photographe animalier et fondateur de sa propre maison de production.


Dans cet épisode on aborde les défis que représente la photographie animalière, notamment l'obtention des autorisations nécessaires, les réalités financières, les connaissances empiriques versus théoriques.


Au fil de la conversation, vous découvrirez comment la photographie peut servir de puissant outil de sensibilisation à la conservation de la nature.


Mathieu ne se contente pas de capturer des images à des fins purement esthétiques ; il s'engage également pour protection de la faune sauvage menacée, il fait partie de la nouvelle génération de photographes plus éclairée, plus éthique et plus respectueuse.


Avec Mathieu, on a aussi parlé d’écotourisme, de diplomatie environnementale et de la mode de la poudre de rhinocéros.


Je vous souhaite une bonne écoute !



-


Pour retrouver Mathieu Courdesses :

TikTok @mathieu.courdesses

Instagram @mathieucourdesses

Pour commander son dernier livre : Orange&Wild




Pour suivre mon quotidien et celui du podcast :


@mathilde_osteo



Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Bonjour Mathieu Courdès, merci beaucoup d'avoir accepté mon invitation. Je suis super contente d'avoir un photographe animalier pour la première fois sur Mordant.

  • Speaker #1

    Bonjour !

  • Speaker #0

    Alors pour commencer, est-ce que tu peux nous dire quel est ton rapport avec les animaux sauvages enfants et même les animaux domestiques ?

  • Speaker #1

    Alors moi j'ai eu la chance du coup d'aller en Namibie à l'âge de 8 ans, mais même avant ce voyage j'étais déjà passionné par les animaux. Je me souviens que mes jouets, quand j'étais tout petit, c'était des petits animaux en plastique et je m'imaginais directeur d'une réserve, propriétaire, directeur d'un zoo. Donc j'étais déjà passionné, passionné. Et puis effectivement, ce voyage en Namibie m'a un peu transformé puisque j'ai su qu'en posant les pieds en Namibie, j'aurais, quoi qu'il arrive, plus tard un rapport avec ce continent. Et les activités, à savoir le safari, la recherche des animaux dans leur milieu naturel, tout ce qu'on peut vivre sur place, je savais que je le revivrais plus tard.

  • Speaker #0

    Extrêmement précoce, c'est dingue.

  • Speaker #1

    Il se passe quelque chose quand on va là-bas, c'est ce qu'on appelle le fameux virus. Il se trouve que pendant quelques années, j'ai organisé des voyages où j'accompagnais des clients avec moi et je leur faisais visiter les parcs nationaux. Et c'est vrai que chez certaines personnes, il y a ce virus qu'on attrape et on n'a qu'une envie, c'est de retourner sur le continent africain pour repartir à la recherche des animaux. Et je crois que oui, ce virus, je l'ai chopé moi très très jeune. Je l'ai encore, je l'ai encore.

  • Speaker #0

    Et donc à 8 ans, tu as fait en sorte de faire les études qu'il fallait pour aller travailler plus tard en Afrique ?

  • Speaker #1

    Alors à 8 ans, non. Mais par contre, j'ai eu la chance ensuite avec mes parents. de retourner en Afrique parce qu'eux aussi ont chopé ce fameux virus. Après, à l'âge de 18 ans, moi, je voulais être photographe animalier, mais mes parents ne voulaient pas. Après, je leur ai dit journaliste. Ils m'ont dit non, ce n'est pas un métier non plus. Je leur ai dit qu'est-ce que vous voulez que je fasse ? Ils m'ont dit fais une école de commerce et puis après, si tu veux faire ton hobby de photographie, tu pourras. J'ai fait cette école de commerce qui ne m'a pas plu. mais cette école avait un cursus qui me permettait de partir à l'étranger et notamment trouver des stages. Et donc, on avait vraiment champ libre pour le choix du stage. Et donc, j'ai envoyé à l'âge de 18-19 ans 150 lettres de motivation, 150 CV à travers toute l'Afrique australe. Et j'ai eu deux réponses, un tour opérateur au Botswana et un tour opérateur en Namibie. Et donc, j'ai vécu sept mois là-bas. où j'ai appris d'abord à être guide, d'abord, pardon, à être traducteur et ensuite à être guide.

  • Speaker #0

    De traduire quelle langue ?

  • Speaker #1

    En fait, je traduisais les guides qui parlaient anglais vers des touristes qui, eux, parlaient français. Et en fait, la petite anecdote, c'est que mon anglais était nul, nul, nul. Je ne parlais quasiment pas anglais. Et donc, en fait, souvent, j'improvisais par rapport à... à ce qu'on voyait. Quand on voyait un lion, le guide donnait plein d'informations sur le lion. Et moi, je comprenais vraiment un mot sur deux. Mais comme j'avais déjà pas mal de connaissances sur le monde animal, je donnais mes propres connaissances aux touristes. Sauf qu'un jour, je suis tombé sur une touriste qui était prof d'anglais et la supercherie n'a pas fonctionné.

  • Speaker #0

    C'est trop drôle. Et donc, tu as fini ton école de commerce pour ensuite... Est-ce que tu as directement bifurqué dessus ? Bifurqué, pardon, sur guide ?

  • Speaker #1

    Alors en fait, j'ai fait deux écoles à la fin de ma première école de commerce. Je suis parti vivre un an en Namibie pour voir si après tout, je voulais faire ma vie là-bas en tant que guide. J'avais quelques hésitations et je me souviens de mon patron sur place qui m'avait dit « Non mais Mathieu, tu ne vas pas être guide, tu vaux mieux que ça. » Et en fait, pour moi, le métier de guide, c'était un métier incroyable. En fait, c'était la première fois de ma vie que… que quelqu'un me disait que j'avais une carrière qui valait peut-être mieux que mes propres aspirations. Et ça, ça m'a permis de me construire, ça m'a permis de viser plus haut. Et du coup, j'ai fait un an en tant que guide et puis je suis parti. Et ensuite, j'ai fait un master dans la production audiovisuelle à l'ESCP. Et ça, ça m'a beaucoup, beaucoup formé. Et ensuite, j'ai travaillé avec un réalisateur, Gilles Demestre. Et ensuite, j'ai fondé ma société de production. Et donc, je produis, je réalise des documentaires pour le digital, pour Internet.

  • Speaker #0

    Ok, mais pas forcément documentaires animaliers.

  • Speaker #1

    C'est toujours des documentaires en lien avec la nature. Par exemple, j'ai fait un documentaire pour une société sur les papillons en Équateur. Donc un éleveur de papillons qui essaye de réintroduire des espèces de papillons qui ont disparu. J'ai fait aussi des documentaires pour mes propres réseaux sociaux. J'ai fait des documentaires pour des gouvernements étrangers. Donc voilà, je mets toujours en lien avec la nature, la protection de la nature. Toujours sur des sujets que je pense, avec le temps, maîtriser un peu et donc sur lesquels je sais construire une histoire.

  • Speaker #0

    Ok. Et est-ce que tu peux nous dire en quoi consistait le rôle de guide exactement ?

  • Speaker #1

    Alors le guide, en fait, c'est l'interface, c'est le lien entre le client et la vie sauvage. Donc entre le touriste, celui qui vient visiter un endroit, et les grands animaux, la grande faune africaine. Et donc il y a un apprentissage d'abord très théorique sur ce qu'on peut avoir dans les livres, qu'on peut aujourd'hui trouver sur Internet. Et puis il y a surtout... Et je crois que c'est ça qui fait un bon guide, l'apprentissage empirique. Donc chaque expérience, chaque observation qu'on va avoir face à des lions, face à des éléphants, va nous permettre d'accumuler des connaissances qui sont pour moi les plus précieuses. Et moi j'ai l'habitude de dire que ce que je sais du monde animal aujourd'hui, ça ne tient que sur une feuille, mais par contre ces connaissances-là, je sais qu'on est très très peu à les savoir dans le monde. et en fait c'est vraiment ça le monde sauvage c'est Tu te rends compte que tu comprends et que tu connais le monde sauvage au moment où tu te rends compte que tu ne connais rien. Il y a une sorte de déclic où tu te dis, mais en fait, c'est un continent, l'éthologie, le monde animal est un continent tellement inexploré que la science est face à tellement d'obstacles, tellement de mystères scientifiques qui sont à la fois passionnants. Et c'est là où tu te rends compte effectivement que c'est un monde incroyable. Ouais, ouais. Et qu'au final, on sait très peu de choses.

  • Speaker #0

    Ouais. Ouais, ouais, c'est dingue. Quand je suis partie, je suis partie une fois en Afrique... Quand tu dis Austral, c'est quoi exactement ?

  • Speaker #1

    L'Afrique australe, c'est Namibie, Afrique du Sud, Botswana, Zambie, Zimbabwe et Mozambique.

  • Speaker #0

    Ok. Bon, alors je suis partie une fois en Afrique australe, en Afrique du Sud. Et quand j'ai découvert du coup moi le métier de ranger, tu nous diras la différence s'il y en a une entre guide et ranger, ben en fait j'étais hallucinée, moi je pensais que ça protégeait une réserve, ça protégeait les animaux, mais en fait ils ont des connaissances incroyables sur, et pas uniquement sur les animaux, les espèces, ce qu'ils vont manger, etc. Mais énormément en éthologie, comportement, et énormément aussi sur la flore, enfin j'étais hallucinée du nombre de plantes, d'herbes, de graminées, de... et tous les chants des oiseaux, enfin bon c'était assez dingue et du coup j'ai j'ai découvert un tout petit bout, je suis pas resté très longtemps mais c'était incroyable. Quel est ton premier voyage en tant que photographe ?

  • Speaker #1

    En tant que photographe, mon premier voyage je pense professionnel, là où j'ai gagné ma vie en tant que photographe, c'est sans doute au Rwanda, où j'avais réussi à négocier des autorisations de tournage, où j'avais réussi à... à déclencher des expositions suite à ce voyage. Après, avant, j'avais vécu en Namibie, au Botswana, donc j'apportais toujours mon appareil photo avec moi. Mais je crois que oui, c'est le Rwanda, mon premier voyage professionnel.

  • Speaker #0

    Et comment ça s'organise un tel voyage ? Niveau autorisation, peut-être pour les réserves ? Est-ce que tu dois être forcément escorté par un guide ou un ranger ou tu peux y aller tout seul ?

  • Speaker #1

    Bien sûr, ça c'est toute la partie un peu immergée de l'iceberg. C'est tout ce qu'on ne voit pas, à savoir... La préparation, l'investigation, la partie production, c'est-à-dire qu'est-ce que ma société va prendre en charge, qu'est-ce que le client va prendre lui à sa charge. Donc voilà, il y a toute une partie à étudier et ça prend des mois et des mois et des mois. Et puis parfois, ça prend quelques semaines. Là, par exemple, je reviens d'un tournage au Botswana. Je crois que fin février. On s'est dit, j'ai eu une personne au téléphone, je lui ai dit voilà, je suis prêt à partir. Mais mi-mars, je partais, enfin fin mars, je partais. Donc là, c'est du rush où tous les jours, on étudie le terrain, tous les jours, on a des interviews avec les guides avant de les rencontrer pour savoir l'histoire qu'on peut construire. Il y a évidemment les autorisations, il y a savoir pourquoi c'est mieux d'aller dans cette concession et pas dans celle-ci. Est-ce qu'on peut faire du hors-piste ? Il y a énormément de... Il y a un savoir-faire que ma société a accumulé au fur et à mesure des années et c'est ça finalement la force de mon travail, c'est que je sais comment construire un voyage pour obtenir les meilleures images, je l'espère possible, et les meilleures vidéos possibles.

  • Speaker #0

    Et qu'est-ce qui te pousse par exemple à aller dans une destination, là tu disais le Botswana, qu'est-ce que tu recherches exactement et tu parlais aussi d'histoire, est-ce que tu recherches à avoir une situation particulière, par exemple je sais pas un accouplement ou une bagarre particulière entre des clans, ou alors tu vas dans une réserve particulière parce que tu veux voir certaines espèces et tu y vas à l'aveugle et tu attends de voir ce qui se passe sur le moment pour ensuite raconter.

  • Speaker #1

    Alors, il y a une partie de ce savoir-faire qui doit rester un peu secret, un peu mystérieux. Mais l'idée, c'est beaucoup, beaucoup d'adaptation. Donc, quand on va dans un endroit, tous les jours avec mon vidéaste et avec mes équipes, on écrit, on réfléchit, on construit le documentaire. S'il nous manque certaines séquences, on retourne dans des endroits. Donc, c'est énormément d'improvisation aussi sur place.

  • Speaker #0

    et Il y a des histoires, est-ce que c'est la vérité absolue ce que tu racontes ou c'est quand même une interprétation de l'homme par rapport au fait qu'ils soient frères et sœurs, enfin j'imagine que ça on le sait, mais par rapport aux bagarres, aux territoires, est-ce que tu le sais toi, ton guide, est-ce que tu es aidé par des éthologues par exemple ou des vétos ?

  • Speaker #1

    Alors, déjà, je me méfie un tout petit peu des éthologues quand il s'agit de... d'interprétation de comportements d'animaux sauvages. Il faut savoir que l'éthologie est une science qui a peu de moyens. Et donc, à part dans la branche de la primatologie, où là, effectivement, il y a plus de recherches parce que la primatologie est accompagnée par les grands laboratoires pharmaceutiques, médicaux. Et donc, on a plus de moyens pour étudier les grands primates. mais Tout ce qui est éthologie, des félidés par exemple, ou des nidés, tout ça, on a quand même très peu de connaissances. Et surtout, moi ce que m'ont appris mes 20 années dans la brousse, c'est que d'une région à l'autre, d'une réserve à l'autre, le comportement d'un animal va varier. Donc pour répondre à ta question, en fait, pour moi les meilleurs éthologues de ces régions sont les guides. qui, eux, sont dans la réserve, ou les rangers, ça dépend comment tu les appelles, sont dans la réserve depuis des années et des années, voire des décennies, et en fait connaissent les différentes générations, les différents clans, les différents territoires des prédateurs. Et donc, c'est avec eux qu'on va construire l'histoire. Alors, à ta question, est-ce qu'il y a de la mise en scène ? Oui, il y a de la mise en scène, mais il n'y a jamais de mensonge. C'est-à-dire qu'on ne va jamais mentir sur une vérité scientifique. Ça, c'est très important. On peut... Par exemple, imaginons que le documentaire, on part à la recherche d'un lion, et il se trouve qu'on voit ce lion le jour 1. En fait, on ne va pas faire un documentaire qui dure deux minutes. Donc, on va essayer de mettre en scène la recherche, ou alors est-ce qu'il n'y a pas autre chose à raconter derrière le lion ? Pourquoi ce lion avait ce caractère-là ? En fait, c'est ça l'adaptation. c'est que Les animaux, on ne sait jamais vraiment sur quoi on va tomber. On ne sait jamais s'il va nous offrir juste un gros billon en bas d'un arbre ou si au contraire, il va être en train de chasser. Donc, c'est de la direction d'acteurs, mais en fait, on n'a aucune direction sur nos acteurs. Donc, c'est à nous d'anticiper et d'improviser par rapport à ce que les animaux nous offrent. Mais en tout cas, on ne mentira jamais sur une vérité scientifique. ou alors... on va choisir de surligner un trait de caractère mais ça ne sera jamais un mensonge et on essaye vraiment d'être toujours à la frontière avec l'anthropomorphisme où on essaye quand même de donner des émotions aux téléspectateurs ou aux viewers mais sans pour autant dire une contre-vérité par exemple on ne va jamais dire Voilà, ça c'est cet éléphant, il s'appelle Michel, il vient de se réveiller, il va prendre son petit déjeuner. Ben non, un éléphant ça ne se réveille pas, ça ne prend pas son petit déjeuner. Donc en revanche, les guides eux donnent des noms aux animaux. D'ailleurs c'est un processus très important pour l'identification, c'est même un processus scientifique. Et les guides nous racontent que chaque éléphant, chaque lion, chaque key species de la réserve a un comportement différent. à son propre mode de vie. Et donc, en fait, c'est sur ces traits de caractère qu'on va insister.

  • Speaker #0

    Est-ce que les animaux, ils ont le temps de s'habituer à toi ? Parce que tu changes pas mal quand même de pays, de réserve, de continent. Et tu vois, ça m'a fait penser à Jane Goodall qui observait les chimpanzés, qui a mis quand même des semaines, des mois, voire certaines années pour tisser des liens avec les familles. Alors que toi, tu changes assez souvent de lieu. Comment ça se passe pour ça ?

  • Speaker #1

    Bon, les animaux qu'on rencontre, dans la grande majorité des cas, ont déjà eu un processus d'habituation. Le processus d'habituation, c'est ce qui permet à un animal de le rassurer par rapport à la présence humaine et à la silhouette humaine. Un gorille, par exemple, qui a eu un processus d'habituation, ça dure, le gorille des montagnes, entre 2 et 4 ans. Et là, le gorille, du coup, a conscience que la silhouette humaine n'est pas un problème, n'est pas liée au braconnage. Pareil pour les lions dans les grandes réserves ou dans les grands parcs nationaux. ils savent que la voiture n'est pas un problème. Mais tout ça, le processus d'habitation, ça met des mois et des mois, et c'est des rangers qui, chaque jour, se rapprochent un peu plus des espèces pour qu'elles puissent être observées et pour qu'elles restent totalement sauvages, mais qu'on puisse au mieux les observer et faire des photos.

  • Speaker #0

    Ouais donc en fait ils mettent tous les hommes dans le même sac, il faut pas qu'ils s'habituent forcément à toi Mathieu mais il faut qu'ils s'habituent à l'homme ou au ranger.

  • Speaker #1

    Ouais bien sûr, bien sûr, ouais c'est ça.

  • Speaker #0

    Y'a pas forcément besoin qu'ils s'habituent à toi.

  • Speaker #1

    Non, non non non non. Non non mais moi surtout quand je pars en tournage, je pars deux semaines, deux trois semaines, donc j'ai pas un processus d'habituation, ça met des mois et des mois et des mois.

  • Speaker #0

    Bah ouais ouais, ok bah ouais c'est pour ça que je me posais la question.

  • Speaker #1

    tout le processus d'habituation par exemple J'avais un ami qui travaillait sur le processus d'habituation d'une famille de gorilles dans le sud du Cameroun. Et ça faisait des années et des années, ça fait presque dix ans maintenant qu'ils essayent d'habituer une famille de gorilles. Et en fait, à chaque fois qu'il y a un cas de braconnage dans la famille, ils sont obligés de tout reprendre de zéro. Ouais,

  • Speaker #0

    ok. Pour redesensibiliser un peu. Ok. Et quelle est ton éthique par rapport à ça ? Jusqu'où tu pourrais aller pour une photo ? Quelles sont tes limites ?

  • Speaker #1

    C'est vraiment...

  • Speaker #0

    Parce que je pense qu'il y a des photographes qui abusent un peu, qui doivent se rapprocher un maximum de certains animaux, non ?

  • Speaker #1

    Ouais, après, je crois pas que ça soit sur la proximité avec l'animal qu'on fixe l'éthique. T'as des animaux qui viennent vers toi. T'as des animaux qui sont curieux, genre l'ours polaire, dans son éthologie, dans son comportement. Il y a une façon d'être curieux parce que l'ours polaire est obligé d'être curieux, est obligé de voir ce qui se passe, de trouver de la nourriture par lui-même. Et donc, par instinct, il va se rapprocher de toi, il va te renifler, il va te sentir. Et donc là, ça ne le dérange pas puisque c'est lui qui vient vers toi. L'éthique du photographe animalier, c'est un sujet très délicat, très difficile. Moi, je sais ma limite. Je sais... En fait, ma limite, elle est souvent liée au plaisir que j'ai à prendre la photo. C'est-à-dire que là, l'année dernière, je suis allé au Brésil pour photographier le jaguar. Et un soir, on me dit, viens, tu vas pouvoir photographier un oslo. Et l'oslo, c'est vraiment un animal très, très difficile à voir, très rare. Et magnifique. En pleine nuit. Comment ?

  • Speaker #0

    Et magnifique, c'est super beau.

  • Speaker #1

    Magnifique, c'est un pédain extraordinaire. Et donc, en pleine nuit, on m'emmène dans une sorte d'affût, un peu. Et j'attends, j'attends, et là, je vois une petite tête qui dépasse, et c'est l'oslo. Et tout de suite, il s'en va. Et donc, moi, je n'ai pas le temps de faire des photos. Et là, tu as un gars qui arrive du lodge dans lequel on était et qui pose des morceaux de poulet, enfin, des petits morceaux de viande, et je crois qu'il en pose trois ou quatre juste en face de l'affût. Effectivement, l'oslo est revenu comme par habitude, et il a mangé les bouts de poulet. Et donc, effectivement, moi, j'ai pris des photos. Mais je me suis dit, en fait, je n'ai aucun plaisir à faire ces photos. En fait, ce n'est pas la nature qui m'offre ce cadeau, c'est l'homme qui l'a provoqué. Et donc, au-delà de tous les problèmes que ça comporte de nourrir un animal, par exemple, sur nos doigts, on peut transmettre éventuellement des maladies à l'animal. Le fait de mettre de la nourriture à un endroit, ça peut entraîner des confrontations entre certaines espèces qui n'ont… donc pas à se rencontrer normalement à l'état sauvage. Après, il faut aussi raison garder. Les grands enjeux de la protection animale, c'est le braconnage, c'est la déforestation, ce n'est pas le nourrissage d'un individu dans un lieu donné. C'est pour ça que... Il y a eu un scandale il n'y a pas très longtemps de deux photographes effectivement qui ont fait des photos en Finlande où les animaux étaient nourris avec des grosses carcasses de cochons. Et donc au même endroit, on avait des ours, des loups, des gloutons. Et donc il y a eu un article sur Reporter, il y a eu un article sur Géo. Ils se sont fait défoncer. Et moi, je pense que la chose juste, c'est d'informer en fait les personnes à qui tu... proposes tes images, à qui tu montres tes images. Si tu leur racontes les coulisses, si tu leur dis voilà comment ça s'est passé, à vous de voir ce que vous en pensez, mais voilà comment j'ai pris ces photos. Et je pense que les gens en fait comprennent ou ne comprennent pas, mais après toi, ton rôle de photographe, ça a été aussi de raconter les coulisses. Et voilà, à côté de ça, tu as aussi des images qui ont été faites, et on le sait aujourd'hui, même les meilleurs photographes animaliers français, notamment le meilleur. Il y a des fortes rumeurs comme quoi il a utilisé des appâts pour prendre certaines de ses photos. Mais est-ce qu'à travers ses photos, il n'a pas sensibilisé des milliers de personnes à une espèce menacée, à la disparition d'un animal en particulier ? C'est un sujet très délicat. Mais moi, en tout cas, je ne veux pas pointer du doigt tel ou tel photographe. D'ailleurs, je n'ai dit aucun nom volontairement, alors que je les ai bien en tête. Chacun a son éthique. Le plus important, ce n'est pas de tromper celles et ceux qui te suivent et qui suivent ton travail.

  • Speaker #0

    Donc, ça rejoint un peu l'une de mes questions. Quel est le rôle de la photographie animale ? J'imagine que ce n'est pas uniquement pour l'art, même si certaines espèces sont magnifiques. Et je pense qu'on est aussi attiré par ça au début. Mais il y a aussi, j'imagine, d'autres rôles.

  • Speaker #1

    Bien sûr. Oui, oui. De toute manière, le photographe animalier qui n'a qu'une vision esthétique, de son travail, pour moi il se trompe un peu. Il doit y avoir une vision de conservation, de sensibilisation, et puis il y a aussi tout un travail d'investigation avant de partir en expédition. Ça fait beaucoup de mots en sion. Il faut savoir où est-ce qu'on va et qu'est-ce qu'on va photographier et pourquoi on va le photographier. En fait à partir du moment où on sait aujourd'hui que pour aller dans un endroit, moi, j'ai une empreinte carbone catastrophique. Évidemment que j'ai une empreinte carbone catastrophique. Donc, qu'est-ce qu'on se dit en tant que photographe animalier ? Comment on rentabilise, même si ce n'est pas le bon terme, mais comment on équilibre cette empreinte carbone ? En faisant des reportages. Moi, je sais que c'est important dans mon travail, je n'en parle pas beaucoup sur les réseaux sociaux, mais de faire ce qu'on appelle de la diplomatie environnementale, donc d'aller voir des ministres, d'aller voir des diplomates. et de leur dire ce que j'ai vu et comment on peut améliorer les choses pour protéger des animaux. Et voilà. Donc, c'est aussi ça, le rôle du photographe animalier, du créateur de contenu nature animalier.

  • Speaker #0

    Et qu'est-ce qu'on peut faire, nous, qui ne sommes pas professionnels ou pas politiques, au quotidien pour aider ces espèces, depuis la France ?

  • Speaker #1

    Bon, pas grand-chose. Je sais que j'ai certains de mes amis, s'ils m'entendaient, ils me tueraient. en m'entendant dire ça, mais en tant que particulier, moi j'ai vu en me rendant sur place la disparition des écosystèmes et des parcs nationaux, c'est quelque chose qui dépasse de loin le foyer, le particulier, c'est des décisions étatiques, gouvernementales, parfois c'est des organisations internationales qui décident ça, parfois c'est des grandes fortunes, des milliardaires qui décident ça. franchement c'est malheureusement en tant que particulier en tout cas je parle bien de la protection des espèces menacées je parle bien du domaine que je connais à savoir le braconnage la déforestation et où je ne parle pas de la protection de l'environnement en tant que tel parce que c'est un sujet tellement large que je peux pas me prenez en tant que spécialiste en revanche sur les sujets de conservation de biodiversité là je m'y connais et à votre échelle enfin à l'échelle du particulier Juste être sensibilisé et dans un repas de famille dire que voilà j'ai vu que malheureusement il y avait plus que 3000 tigres à l'état sauvage, dire que oui il y a plus que 1100 gorilles des montagnes à l'état sauvage, expliquer tout ça, être sensibilisé à ça c'est déjà un pas énorme. Mais les décisions de protection de nos espaces naturels, elles se passent dans des sphères très très hautes.

  • Speaker #0

    Est-ce qu'il y a déjà un animal que tu as photographié et qui n'existe plus aujourd'hui ?

  • Speaker #1

    Je ne crois pas. J'ai vu effectivement certains écosystèmes changer au fur et à mesure de mes allées venues en Afrique. Par exemple, la véritable mode. le terme n'est pas très beau, mais de la corne de rhinocéros, à savoir les rhinocéros qui se font braconner, tuer. C'est une mode qui a vraiment commencé dans les années entre 2005 et 2010. Et puis, elle a eu son apogée en 2014-2015. Et donc, moi qui vais en Afrique depuis que j'ai 8 ans, depuis 2002, j'ai vu effectivement les populations de rhinocéros diminuer et diminuer jusqu'à... devenir pratiquement inexistantes dans certaines régions d'Afrique. Par exemple, au Massaïmara ou au Serengeti, donc au Tanzanie, Kenya, voir un rhinocéros, c'est quelque chose de rarissime. Et puis quand on le voit, généralement, il est très très loin, on voit juste une sorte de petit point noir dans la Grande Plaine. Donc ce sont des animaux qui sont devenus très très difficiles à observer. Au Botswana, il n'y en a quasiment plus. En fait, il reste quelques endroits précieux où on peut en voir, mais ça reste très, très difficile.

  • Speaker #0

    Je repensais en fait à un mois et les rhinocéros que j'ai pu voir. J'en ai vu et j'ai vu des blancs et des noirs justement à la réserve McAllis et dans le nord de l'Afrique du Sud. Et là où j'ai rencontré la ranger qui était française, Claire, avec qui j'ai déjà fait un podcast et qui nous disait d'ailleurs quand on était en safari, c'était du matin au soir. On aidait les rangers, je ne sais plus comment ça s'appelle, les co-touristes. Et il ne fallait pas qu'on poste de photos ni rien, il ne fallait pas donner trop d'infos sur le nombre d'individus et où ils étaient situés finalement.

  • Speaker #1

    Oui, effectivement, ça fait partie des choses qui sont demandées, de ne pas donner d'informations, parce que l'information est déjà un process du braconnage. Il y a même certaines réserves, j'en ai eu écho il y a quelques mois. qui donnent des réserves qui font du tourisme et qui donnent des informations aux braconniers pour compléter les fins de mois et pour gagner de l'argent. Ah ouais,

  • Speaker #0

    donc on peut être de deux côtés.

  • Speaker #1

    Non, mais c'est juste des réserves qui ne s'en sortent pas financièrement. Pendant le Covid, il y a pas mal de réserves qui en ont chié. Et effectivement, j'ai eu il y a quelques mois des informations sur... Une réserve dans laquelle, effectivement, il y aurait eu de l'intelligence avec l'ennemi, comme on dit. Donc, donner des informations sur l'emplacement d'un rhinocéros. Après, c'est toujours la même chose. C'est des on-dit, il n'y a pas eu d'enquête. Il y a énormément de compétition entre les différents lodges et réserves de la région. Donc, chaque bonne excuse est bonne à prendre pour tuer l'autre économiquement. Mais bon, j'avoue que quand on me l'a dit et quand on m'a dit le nom de la réserve, ça ne m'a pas tant étonné que ça.

  • Speaker #0

    Et pourquoi ? Parce que je sais qu'ils coupent les cornes des rhinocéros justement pour éviter le braconnage. Peut-être qu'en les coupant derrière, ils peuvent les revendre aux braconniers. Non, même pas.

  • Speaker #1

    En fait, repose-moi ta question pour être sûr.

  • Speaker #0

    La réserve coupe les cornes pour protéger leurs animaux. Ce n'est pas la réserve qui coupe les cornes.

  • Speaker #1

    Ça dépend. Donc, tu as les parcs nationaux et les réserves. Dans les parcs nationaux, ça dépend des politiques mises en place par les gouvernements, mais généralement, effectivement, ils coupent la corne. Donc ça, c'est avec des fonds publics pour protéger les rhinocéros du braconnage. Mais il faut savoir que même si ça repousse tous les 3-4 ans une corne de rhinocéros, et même s'il y a ça de corne, des rhinocéros peuvent quand même se faire tuer. Parce que le kilo de poudre de corne de rhinocéros se revend entre 70 000 et 80 000 dollars le kilo. Et ça, c'est encore des chiffres d'il y a quelques années. Peut-être que maintenant, ça...

  • Speaker #0

    Et la mode est toujours présente, comme tu disais, s'il y avait une mode...

  • Speaker #1

    Bien sûr. Alors, ça a diminué parce qu'il y a eu des politiques à la fois publiques et des stratégies privées mises en place notamment par les réserves privées pour financer... les cornages de rhinocéros. Souvent, ces réserves utilisent l'argent du tourisme pour protéger leurs rhinocéros. Et aujourd'hui, on le sait, les réserves qui n'ont pas voulu écorner leurs rhinocéros en Afrique du Sud, la grande majorité n'ont plus de rhinocéros. Et les réserves qui ont mené des grandes campagnes d'écornage, eux, ont encore des rhinocéros. Et donc, en fait, moi, à titre personnel, ça me sert le cœur de voir un rhinocéros sans corne. Mais aujourd'hui, face à ce fléau, c'est la seule solution qu'on ait trouvée.

  • Speaker #0

    Pendant un moment, on a injecté un produit au rhinocéros qui rendait la corne un peu rose et qui, a priori, enlevait les effets aphrodisiaques de la corne parce qu'ensuite, la corne est revendue sur le marché chinois pour des vertus aphrodisiaques. Et en fait, on s'est rendu compte que ce produit donnait des problèmes d'estomac et d'intestin au rhinocéros. Et donc, du coup, la seule solution qu'on ait trouvée, c'était de couper. couper les cornes. Il faut savoir que les deux premières causes de mort des rhinocéros, le premier c'est le braconnage, et le deuxième c'est les mâles entre eux qui s'écornent et qui se tuent. Donc finalement, en coupant les cornes, on réduit quand même, face à une population qui allait s'éteindre, face à une espèce qui allait s'éteindre, on réduit quand même de deux facteurs la disparition du rhinocéros. Et en fait, c'est intéressant de voir que Merci. Il y a certaines espèces dans le monde, comme les gorilles, les rhinocéros blancs et noirs, ou les tigres, par exemple, qui doivent leur survie uniquement grâce à l'écotourisme. Uniquement. Alors, ça peut faire mal au cœur à certains d'entendre ça, mais en fait, il y a une loi du marché et de l'économie derrière. C'est que ces parcs nationaux, ces réserves naturelles, elles vont intéresser les industries du bois, elles vont intéresser, pourvu qu'il y ait du pétrole, Merci. d'autres industries qui vont être ultra polluantes. Et donc, finalement, le tourisme n'est pas, à part dans certains pays, mais n'est pas un secteur d'économie qui produit énormément d'argent. Mais par contre, ça recrute beaucoup. C'est-à-dire que le tourisme permet quand même de rendre actif une grande partie de la population dans des régions du monde où il y a quand même beaucoup de chômage. Et surtout, le tourisme, qui fait partie du secteur tertiaire, a tendance à augmenter la classe moyenne dans certaines régions du monde où il y avait quand même jusqu'à il y a 15-20 ans une classe très très pauvre qui représentait 80% voire 85% du pays et une classe extrêmement riche. Et en fait le développement de ces pays du sud va passer par l'émergence du secteur tertiaire et donc une augmentation de la classe moyenne. et moi je me rends bien compte là on sort peut-être un peu un tout petit peu du sujet de l'animalier, mais ça me semble important de dire que le tourisme, l'écotourisme, le tourisme responsable permet de protéger et de sauver certaines espèces de la disparition. Et plus largement, permet de protéger des écosystèmes parce que le rhinocéros, par exemple, par sa présence, par ses excréments, est une sorte d'espèce parapluie et donc va permettre de sauver d'autres animaux rien que parce qu'il est là. Quand il va faire ses excréments, ça va créer des insectes qui vont attirer des oiseaux. Ces oiseaux vont attirer des petits prédateurs comme des cervales, des caracales, même des chacals. Et donc tout ça est très important. Si tu as une espèce qui disparaît de certains biomes, c'est tout le reste des espèces qui sont en péril.

  • Speaker #1

    T'as l'air d'en savoir énormément sur les animaux. Est-ce que tu en sais autant qu'un ranger ? Est-ce que t'as passé des certifications ? Ou est-ce que c'est que de l'empirisme, comme tu disais tout à l'heure ?

  • Speaker #0

    En fait, j'ai eu la chance de commencer à guider à un moment où, notamment en Namibie, il y avait très peu de certifications ou de concours. Donc, j'avais pas besoin de diplôme. Bien sûr, j'ai dû passer des tests, des tests écrits, des tests oraux. J'ai fait plusieurs tours en tant qu'assistant. C'est même presque plus formateur que certaines écoles reconnues par l'État. Mais en tout cas, il m'a fallu du temps avant d'avoir mes propres groupes et de guider. Le Ranger, effectivement, c'est une certification que tu as avec un diplôme, l'un des diplômes qui s'appelle le VGASA, qui est reconnu par l'État sud-africain. Et effectivement, c'est ce qu'on t'apprend. le cri des oiseaux, comme tu disais au début de notre podcast, identifier les différentes espèces, les traces, les crottes, et ça, en fait, une fois que tu es sur le terrain pendant plusieurs mois, tu l'as aussi, c'est quelque chose que tu acquiers, donc moi, je ne me définis pas en tant que ranger, parce que je n'ai pas la certification Vigassa, mais au final, j'ai mes connaissances de guide, et comme je te l'ai dit, c'est vraiment plus mes connaissances Merci. empiriques qui sont importantes que mes connaissances théoriques, sachant que quand tu commences en tant que ranger, tes seules connaissances sont celles que tu as apprises lors de ton stage et dans tes livres.

  • Speaker #1

    Et est-ce que tu connais sur d'autres continents, tu parles beaucoup en Afrique, mais est-ce que tu es partie... En Asie, en Amérique latine et dans ce cas-là, j'imagine que c'est d'autres connaissances.

  • Speaker #0

    Bien sûr, oui, tout à fait. Je suis parti, là, récemment, faire le jaguar au Brésil. Je suis allé photographier le tigre en Inde. Je suis allé photographier les orangs-outans à Sumatra. Je suis allé au Pôle Nord, au Canada, voir les ours blancs. Donc, Équateur aussi. Donc, oui, j'ai eu la chance de voyager pas mal. Effectivement, on est sur... sur des connaissances différentes, mais quand même, je vois certains points communs quand je photographie, par exemple, le jaguar dans le Pantanal. Je trouve quand même, au moment où je prends ma photo, certains points communs avec le léopard qu'on va avoir en Afrique. Quand je photographie le tigre, dans sa manière de se déplacer, dans la manière de nous regarder, je vois dans sa manière d'être finalement... le super prédateur de la région, je vois certains points communs avec le lion. Donc pareil, quand je fais le rang mouton, je vois dans sa manière de se déplacer, dans la manière de me regarder, certaines similitudes avec les gorilles des montagnes. Donc finalement, quand je vois des animaux d'une même famille, j'arrive à comprendre un peu plus l'animal et du coup à choisir un emplacement ou à choisir une heure de la journée pour laquelle le photographier.

  • Speaker #1

    Et quel est ton pays préféré, ta destination préférée ?

  • Speaker #0

    Bonne question. Le Rwanda est quand même un pays qui m'a marqué. J'y suis allé peut-être cinq, six fois. C'est un pays assez extraordinaire pour mille et une raisons. Après, moi, j'ai un attachement aussi particulier pour l'NMB, qui est le pays qui m'a créé en tant que photographe et guide. Quoi d'autre ? Le Botswana, extraordinaire. mon expérience dans le nord du Canada pour voir les ours polaires à Churchill, c'est magique. Donc ouais, non, il y a plein d'endroits dans le monde.

  • Speaker #1

    Après tu fais une grande liste. Et l'animal que tu trouves le plus fascinant ?

  • Speaker #0

    Aïe, aïe, aïe, c'est dur. Le plus fascinant, peut-être celui que je n'ai pas encore photographié.

  • Speaker #1

    Ok. Tu as photographié les pandas ?

  • Speaker #0

    justement non c'est mon rêve parce que t'en parlais dans les gens mais comme ça fait quelques années je me demandais si tu les avais non non pas encore c'est très difficile j'ai eu plein de projets qui m'ont potentiellement amené à les photographier et finalement ça s'est pas fait c'est aussi ça le le métier de photographe et de reporter animalier c'est que sur 10 projets que tu lances il y en a un ou deux qui se font bon là avec mes réseaux sociaux avec le fait entre guillemets que je sois de plus en plus connu les projets sont un peu plus faciles à avoir et les décideurs sont plus faciles à convaincre mais quand même c'est beaucoup de refus en tout cas le début de ma carrière professionnelle c'était dur,

  • Speaker #1

    c'était très dur ok et est-ce que tu as déjà fait des animaux aquatiques ?

  • Speaker #0

    non après j'ai déjà vu les baleines, j'ai déjà vu les grandes colonies d'Otari en Namibie Mais non, je n'ai jamais fait de la photo sous-marine.

  • Speaker #1

    Oui. Et ça ne te donne pas envie ?

  • Speaker #0

    Pas particulièrement. En fait, disons que je trouve qu'il y a vraiment des top, top photographes dans ce milieu-là. Mais même en France, on a certains qui sont pour moi les meilleurs au monde. Je pense à Stéphane Grandsoto qui est exceptionnel. Monsieur Balesta aussi qui est exceptionnel. Moi, je suis… Je trouve qu'il y a tellement à faire déjà sur la terre ferme et notamment des espèces que je n'ai pas encore photographiées que pour l'instant, je vais rester là-dessus.

  • Speaker #1

    Oui, c'est déjà très, très bien. Est-ce que tu as déjà découvert une nouvelle espèce ?

  • Speaker #0

    Ah non, non, non. Non, non, j'ai eu un doute une fois. Je faisais une investigation pour partir au Bénin dans le parc de la Panjari. Et en fait, on n'a pas pu y aller parce qu'on devait y aller. C'était un très beau contrat. C'était au tout début de ma carrière professionnelle. Je n'ai jamais raconté cette anecdote. C'était vraiment… Avec mon équipe, on a été trop contents parce que c'était un projet qui pouvait nous faire vivre pendant au moins un an et demi, deux ans. C'était avec le gouvernement béninois. Et l'idée, c'était d'aller prendre des photos dans ce parc-là, le parc de la Pantjari. et promouvoir le parc avec les réseaux sociaux tout ça. Et en fait, j'ai appelé certains contacts des connaissances que j'ai en Afrique qui travaillent dans la sécurité, dans le renseignement et ils m'ont dit, non Mathieu, là, on ne peut pas trop t'en dire, mais il ne faut pas y aller. Et donc moi, j'ai essayé de creuser parce que je me disais, quand même, c'est un truc qui peut faire déconner ma carrière. Pourquoi il ne faut pas y aller ? Ils m'ont dit, en ce moment, c'est vraiment dangereux. Il y a de plus en plus de djihadistes de l'équivalent de Boko Haram sur place, enfin, l'une des branches de Boko Haram. Et donc, si tu y vas et qu'il y a un problème, malheureusement, là-bas, ils n'arriveront pas à te retrouver et tu risques d'avoir des gros problèmes. Et en fait, j'avais fait toute une investigation, notamment sur leur guépard. Parce que je les soupçonne, entre guillemets, d'avoir une sous-espèce de guépard. Eux, ils disent que c'est des guépards d'Afrique. Enfin, le guépard un peu standard. Mais les photos que j'ai vues de ces guépards me font dire que c'est un guépard qui ne ressemble à aucun autre guépard. Et donc, je voulais aller les photographier et potentiellement aider les scientifiques à les identifier. Et au final, ça ne s'est pas fait. Donc, je n'y suis pas allé parce qu'effectivement, il y avait ce risque de kidnapping. Et il se trouve que la semaine où on devait y aller, il y a une équipe de tournage espagnol qui s'est fait tuer, kidnapper et tuer par les djihadistes.

  • Speaker #1

    Wow, quelle histoire ! En quoi tu pensais qu'ils étaient différents du guépard africain ?

  • Speaker #0

    Ils ont les tâches beaucoup moins denses qu'en Afrique australe ou en Afrique de l'Est.

  • Speaker #1

    Ok, et tu penses toujours ça ou tu as vu de nouvelles photos ?

  • Speaker #0

    Je n'ai pas vu d'autres photos parce que j'ai l'impression que le lodge qui devait nous accueillir a fermé. Je n'ai pas l'impression qu'il y ait beaucoup de touristes qui y vont. Et mine de rien, aujourd'hui avec les portables, les photos des clients, des touristes, aident aussi à une meilleure compréhension du monde sauvage. Et donc, je n'ai pas revu d'autres photos de ces guépards. Mais j'imagine, si je fais mes recherches, je pense que je pourrais trouver.

  • Speaker #1

    Ok. Et ça me fait un lien avec une question que je m'étais préparée aussi, c'est tu parlais d'aider les scientifiques au terme d'éthologie. Est-ce que tes photos peuvent servir justement pour l'avancée scientifique en éthologie ou alors pour recenser ou avoir des infos sur leur santé, l'âge, certaines pathologies, etc. ?

  • Speaker #0

    Oui, bien sûr. Notamment, j'avais fait un reportage dans la Caguerra, au Rwanda, qui est l'un de mes parcs préférés. On avait mis des colliers émetteurs autour du cou d'un éléphant et de lion. Les vétérinaires et les conservateurs m'avaient demandé de bien prendre en photo les lions pour les identifier, puisqu'ils les identifient avec le nombre de... de moustache. A priori, les points des moustaches ne sont pas au même endroit d'un lion à l'autre, c'est un peu comme les empreintes digitales. Et donc, il m'avait demandé de prendre les moustaches des différents lions. Et voilà, ça les aide effectivement à les recenser, ça les aide à voir si certains ont des problèmes de santé. Voilà, c'est aussi comme ça qu'on protège une famille de lions.

  • Speaker #1

    Dans un de tes documentaires, tu dis que tu as une forte connexion spirituelle avec certains animaux est-ce que tu pourrais dire que tu fais de la communication animale ou que c'est quelque chose d'intuitif sur lequel tu n'as pas donné de nom ?

  • Speaker #0

    bon moi je suis quelqu'un de très cartésien donc j'ai je dirais je ne sais pas si la communication entre les êtres humains et le monde animal existe Merci. Je sais qu'il y a certains chamanes que j'ai rencontrés d'ailleurs en Afrique du Sud qui disaient se communiquer avec certains animaux. Moi, ce qui est sûr, c'est que j'ai vu tellement de lions, j'ai passé tellement de temps à observer les éléphants, à observer les léopards, qu'aujourd'hui, les lions, j'ai l'impression qu'ils n'ont plus beaucoup de secrets pour moi. Quand je vois la manière dont marche un lion, je peux savoir... Qu'est-ce qu'il veut faire ? Où il veut aller ? Est-ce qu'il est dans un bon état ? Est-ce qu'il a faim ? Est-ce qu'on peut le suivre ? Est-ce qu'on le dérange ? Tout ça, je le vois, mais je ne l'ai lu nulle part. C'est parce que je les connais, parce que je les ai tellement vus, photographiés, étudiés. Ça fait plus de 20 ans que je vois des lions, donc maintenant, je les connais bien, c'est mes potes.

  • Speaker #1

    Oui, mais tu disais ça dans le documentaire, pour justement, les fois où tu ne les vois pas, eh bien, tu sais... Où ils vont être ?

  • Speaker #0

    Oui, pas tout le temps, mais effectivement, quand pendant plusieurs jours, je n'arrive pas à voir des lions, je me prends un moment et j'essaye de comprendre pourquoi je ne les vois pas. Et en fait, souvent, je le sais. Ça peut être une température, ça peut être du vent, ça peut être de l'humidité. Ça peut être plein de choses. Et du coup, je sais que, par exemple, si je me lève un matin et que je sens la température, l'air, je vois les nuages, je vois tout ça, je sais si je vais les trouver ou pas. Et je sais s'ils seront actifs ou pas. Ça, je le sais, oui.

  • Speaker #1

    Ok. Mais c'est plus par rapport à un calcul, en fait, de toutes tes connaissances et de toute ton expérience cumulée qui vont faire que tu vas avoir... toutes ces infos sur eux.

  • Speaker #0

    Mais peut-être que c'est ça, les gens qui pensent communiquer avec les animaux, enfin vraiment être en lien avec eux, peut-être qu'ils n'ont pas le recul de se dire que c'est un ensemble de connaissances qui leur font croire qu'ils sont en communication avec les animaux. Parce que... Oui, je sais pas, peut-être, mais je te dis, je suis très cartésienne. Ouais,

  • Speaker #1

    c'est ta façon de penser qui est cartésienne, et du coup, pour toi, c'est forcément que les infos qui vont te donner une solution. Mais certaines personnes, ça va être que ce qu'il y a dans leur ressenti, dans leur ventre, tu vois. Mais, ouais, je sais pas, moi, je suis un peu entre les deux. Mais je te disais ça parce qu'en Afrique, il y avait pas mal de stages de photographie, et l'autre chose qu'on voyait pas mal, c'est aussi de stages de communication animale avec la faune sauvage, etc. Donc, je me suis dit... Et en plus, tu parlais de ta connexion. Je me suis dit peut-être que c'est ce que tu fais. Mais finalement, tu ne le fais pas consciemment, mais c'est un petit peu ça, je pense.

  • Speaker #0

    Alors, je me méfie beaucoup des centres de réintroduction et des centres de conservation en Afrique australe parce que c'est devenu un vrai business. En fait, d'un point de vue général, les animaux en détresse, les animaux en difficulté, les animaux blessés ont besoin le moins possible de l'être humain. Ou alors des spécialistes, des vétérinaires, des biologistes, des gens qui ont fait des années et des années d'études, des scientifiques. Et c'est pour ça. En fait, tu as certains centres de réintroduction qui ont créé une sorte de business en disant venez faire du bénévolat, sauf que toi, tu vas payer ta chambre, tu vas payer ta bouffe. Et en fait, eux, ils vont être très contents d'avoir des bénévoles qui viennent. Et c'est ça qui va permettre de faire vivre la réserve. Et moi, j'ai fait... pas mal d'investigations sur ça et tu as certains centres de conservation par exemple qui vont récupérer un bébé lion qui s'est fait renverser par une voiture ils vont réussir à le soigner et en fait ils vont préférer le garder en se disant après tout depuis qu'on a ce petit lion, on a des photos on a plus de followers, on arrive à faire venir plus de monde, plus de bénévoles, donc je vois pas pourquoi on le ramènerait à sa mère, voilà Donc, Il faut être très vigilant avec les centres de conservation. Et pour moi, si tu n'as pas la... Enfin, si on n'a pas la connaissance scientifique, vétérinaire, si on n'a pas une vraie plus-value, c'est difficile de travailler dans la conservation.

  • Speaker #1

    Ouais. Pour choisir mon voyage, j'ai galéré, parce que depuis la France, comme tu dis maintenant, il y en a énormément. Il y en a énormément. Et du coup, je me suis dit, mais où est-ce que c'est le mieux ? Est-ce que je ne vais pas faire... du tourisme qui est néfaste pour les animaux etc et finalement j'ai pas du tout fait de centre de voyage dans un centre de réintroduction de réintroduction je voulais justement pas de ça pas de cash ni rien du coup c'était juste de l'observation partait à 5 heures du mat avec les rangers toute la journée non rentrer le midi on repartait l'aprem pour comment ils appellent ça game drive pour cinq heures et on revenait et parfois on voyait rien parfois on se prenait juste la pluie sur la tête pendant des heures Et c'était trop bien. Dans des camps au milieu du bush, là, et pas d'électricité, on se faisait tous à manger à la lampe torche, les douches et tout, et on repartait le lendemain. Les tentes, la nuit, on entendait parfois les hyènes. Les lions, je suis pas sûre de les avoir entendus à côté de nous, mais bon, c'était juste incroyable. Et parfois un peu frustrant, parce que j'ai pas vu toutes les espèces. J'ai pas vu de léopard, par exemple. Mais sinon, j'ai vu pas mal de choses. Et ouais, il y a tellement de centres... qu'une fois sur place, c'est super dur. Enfin, une fois sur place, on peut se rendre compte, mais à distance, impossible. Enfin, je trouve. C'est super dur. Quelle était ta plus grosse frayeur ? Est-ce qu'il y a un moment où t'as eu chaud, ton cœur s'est accéléré très vite ?

  • Speaker #0

    Il y a certains moments, effectivement, d'adrénaline. Quand tu te fais charger par un hippopotame, quand tu te fais charger par un gorille. Mais comme c'est des charges d'intimidation, je sais que je suis pas en danger quoi. Mais non, mais un truc tout bête tu vois, mais par exemple, là j'ai mis une vidéo sur mon compte Instagram où il se trouve qu'il y a un bébé guépard qui est venu à... quelques mètres de moi pendant que j'étais au sol à pied en train de photographier le reste de la famille. Et il est vraiment venu par curiosité à deux mètres en train de renifler mon appareil photo. Et ça, ça a été un moment exceptionnel, unique, vraiment qui m'a marqué. J'avais le cœur qui battait, mais ce n'était pas de la peur. J'étais heureux. Après, parfois, si les éléphants peuvent être… Un côté un peu terrifiant, mais pas quand ils te chargent, mais quand volontairement ils veulent te faire peur. Ça, ça m'est arrivé une fois. Mais sinon, non, j'ai toujours eu la chance de m'entourer un peu de guides professionnels. Ça, c'est très important pour mes tournages et pour mes reportages. Donc non, je n'ai pas peur.

  • Speaker #1

    Et est-ce qu'à l'inverse, tu as déjà mis des animaux en danger par ta présence, par la présence de ta voiture ou de ton guide ? Le fait de t'approcher fort ? Ou est-ce que tu as roulé déjà sur un animal ?

  • Speaker #0

    Non, jamais. Mon Dieu. Jamais, jamais.

  • Speaker #1

    Mais sans faire exprès, bien sûr. Un porc épique, une tortue, je ne sais pas.

  • Speaker #0

    Non, non, non, jamais. Peut-être qu'en passant en voiture, je ne sais pas, tu as un chacal qui dort à quelques mètres de la route et tu ne le vois pas. Et puis, il passe en voiture. Et du coup, ça le réveille, ça le dérange. Mais je ne sais pas. Je n'ai pas le... Non, je n'ai pas trop de souvenirs de ça. Mais en fait, il y a aussi un truc, c'est que comme je travaille avec ce qu'on appelle des longues focales, donc des grands zooms, je dis toujours à mon guide, ça ne sert à rien de s'approcher trop de l'animal. Déjà parce qu'en plus, si on s'approche trop, on ne va pas avoir le comportement naturel de l'animal. Et en fait, ce qui est intéressant en photo et en vidéo, c'est d'avoir une palette d'attitudes variées et différentes. Et donc, pour toutes ces raisons, je me... À part quand je suis avec des clients et que c'est intéressant pour eux de voir l'animal à 5-6 mètres, on s'approche, mais après je leur dis, écoutez, ça vous dit, on prend nos distances, on se met derrière un buisson, on fait en sorte qu'ils nous voient, mais qu'on ne les dérange pas, et on attend, on attend, on attend, on attend. Et en fait, les moments les plus émouvants, c'est quand on a attendu 3 heures que des lions étaient en train de dormir et qu'ils commencent petit à petit à se lever. Et là encore, lors d'un tournage au Botswana le mois dernier, on a attendu... longtemps que trois malions qui étaient en train de dormir mais profondément se lèvent et quand ils se sont levés on les a suivis pendant pendant deux heures et en pleine nuit et c'était incroyable incroyable quel

  • Speaker #1

    est ton super pouvoir en tant que photographe qu'est ce qui te différencie des autres photographes chacune des réponses serait prétentieuse

  • Speaker #0

    Peut-être... Oh non, je ne sais pas.

  • Speaker #1

    Tes connaissances, mine de rien, tu étais sur le terrain depuis très longtemps.

  • Speaker #0

    Alors, les connaissances, j'ose espérer que chaque photographe animalier a des connaissances du monde animal et qui ne fait pas que de la photo. C'est quand même le B.A.B. Peut-être effectivement le fait d'y être depuis plus de 20 ans. Le fait d'avoir grandi avec la nature, d'avoir grandi avec la savane, le désert. Peut-être que c'est ça ma différence par rapport aux autres. Après, c'est un milieu où... Moi, je l'ai découvert il n'y a pas longtemps. C'est un milieu très dur où chaque photographe a l'impression que l'autre est un concurrent. Et vraiment, ce n'est pas... Oui, non, ce n'est vraiment pas un milieu sympathique. Et en fait, moi, je me sens un peu différent parce qu'aujourd'hui, j'arrive à vivre des réseaux sociaux grâce à la photographie animalière, de mes reportages. et j'ai même le luxe aujourd'hui de choisir mes projets, donc ça c'est extraordinaire, mais 95% des photographes animaliers, ils vont vendre deux photos à un magazine, ils vont vivre avec 800 euros par mois, et du coup ils voient l'autre comme un concurrent, parce qu'il va lui prendre un touriste sur un stage, et donc ça c'est vraiment un monde, je l'ai découvert il y a deux ans, et c'est un monde que je n'aime pas, c'est un monde que je ne comprends pas, où pareil tu as toute une ancienne génération, qui eux alors eux ça leur pose pas de problème de nourrir les animaux et de les prendre en photo ça c'est vraiment le dernier de leurs soucis t'en as même un qui m'a montré des photos d'un martin pêcheur exceptionnel je suis comme comment t'as fait ça ? en fait il m'explique qu'il place des pièges ou en fait des sortes d'aquarium où tu vois pas les bords qui est mis genre vraiment en dessous de la surface il met des poissons comme ça les poissons peuvent pas s'en aller et du coup il sait exactement où le martin pêcheur va pêcher sauf que parfois le Martin Pescher se tape contre le fond de l'aquarium et se casse le bec. et donc lui en fait cette personne ça lui posait aucun problème alors il montrait ses photos de lui en affût et tout mais c'est ridicule enfin voilà on est vraiment déjà sur deux générations qui n'ont pas du tout la même vision de voir le monde sauvage et on est aussi sur deux générations qui ne se comprennent pas sur ce que va devenir la photographie animalière et le reportage animalier et du coup moi vraiment je tends à éviter un peu ce monde les festivals tout ça ... Et par chance, je n'ai pas besoin de visibilité, je n'ai pas besoin des festivals pour vivre de ma passion. Et ça, c'est extraordinaire. Pourvu que ça dure. Ça se trouve, on fait le même call l'année prochaine. Je t'annonce que j'essaye d'aller dans tous les festivals de photographie animalière. Mais je ne crois pas. Je crois vraiment que j'ai la chance d'avoir une communauté très bienveillante, super gentille, qui me suit, qui aime mon travail. Et ça, ça donne énormément de force. Et moi, je préfère me concentrer sur eux que sur le secteur.

  • Speaker #1

    Et comment tu as créé justement cette communauté, ta carrière ? Est-ce que tu avais un mentor ? Tu avais quelqu'un qui t'inspirait ?

  • Speaker #0

    Alors moi, j'ai voulu faire ce métier le jour où j'ai reçu un livre de Steve Bloom, qui est un photographe animalier anglais. Et j'ai trouvé ses photos exceptionnelles. Et encore aujourd'hui, il m'inspire beaucoup dans ma manière de prendre des photos. Pour moi, c'est... Mon maître absolu, c'est vraiment le gars exceptionnel. Après, sur les réseaux sociaux, moi, je vais être très clair, ce n'est pas grâce à mes photos que j'ai eu autant d'abonnés. Ce n'est pas par la qualité de mes photos que j'ai autant d'abonnés. Il y a des photographes animaliers qui sont bien meilleurs que moi et qui n'ont pas cette communauté. Je crois que c'est parce que j'incarne mes contenus, parce que si je… Je montre les coulisses parce que j'ai inventé une façon de raconter aussi le monde sauvage, le monde animal. Et ça, je crois que ça plaît et que j'offrais quelque chose où il y avait une demande a priori. Je pense que c'est aussi simple que ça.

  • Speaker #1

    Est-ce que tu aurais des conseils à donner justement à quelqu'un qui veut se lancer en tant que photographe animalier ?

  • Speaker #0

    Tout simplement de prendre son appareil photo et de sortir, voyager, aller dans les endroits. un peu sauvage, ça peut être à 10 km de chez soi, dans un champ, dans une petite forêt. Aujourd'hui, on peut, par exemple, aller photographier les chevreuils, les renards. Les renards, c'est un animal incroyable à photographier, les écureuils. Il y a des lynx qui sont plus faciles à voir, par exemple, en Espagne. Donc, vraiment, il y a plein de façons de devenir photographe animalier et toujours se poser la question aussi parce qu'il y a une réalité financière. qui a besoin de photographie animalière ? Est-ce que c'est les magazines ? Est-ce que c'est les gouvernements ? Est-ce que c'est des galeries d'exposition ? Donc réfléchir aussi à sa carrière en faisant ce métier, parce que c'est un métier, c'est pas qu'un hobby, contrairement à ce que pensaient mes parents.

  • Speaker #1

    Et est-ce que maintenant ça te plaît toujours autant, justement le fait que ton hobby soit devenu, ta passion soit devenue ton métier, avec la pression financière, etc. Est-ce que ça te plaît toujours autant ?

  • Speaker #0

    Oui, par chance, je touche du bois pourvu que ça dure, mais je n'ai plus cette pression financière. Bien sûr, je ne suis pas multimillionnaire, ça ne marche pas comme ça, la photographie est une manière, mais je peux choisir mes projets. Donc ça, c'est super intéressant. Et oui, j'espère garder cette passion le plus longtemps possible. Mais ça, malheureusement, on ne peut pas savoir. Ça se trouve un jour... Je vais avoir la flemme de me lever pour photographier un léopard. Je vais avoir envie de me coucher plus tôt pour éviter de faire un safari. Ça, j'espère que ça n'arrivera jamais. Ça n'arrive pas pour le moment, mais on ne sait jamais. On ne sait jamais de quoi sera fait nos passions et notre cerveau dans les années à venir. Est-ce que tu peux nous parler de ton prochain projet s'il existe ? Que ce soit en tant que voyage ou documentaire, est-ce que tu as des livres aussi ? Je vois que tu avais déjà sorti un livre il y a quelques temps.

  • Speaker #1

    Oui, j'ai sorti effectivement mon premier livre, Green and Wild, il y a plus de deux ans maintenant. Et là, le deuxième sort... Alors, je ne sais pas quand ce podcast va sortir, mais les précommandes seront possibles le 2 juin. donc ça serait incroyable que ce podcast sorte après le 2 juin ouais on va voir si ça arrive trop bien et donc c'est un livre très important parce que il reprend vraiment c'est un livre donc Orange and Wild sur les déserts et les savannes et il reprend vraiment peut-être mes plus belles photos au cours de ces 12 dernières années et donc au moment où je faisais la composition de ce livre je me suis dit mais il va faire 1000 pages ce livre c'est pas possible et donc j'ai dû choisir vraiment le Le mieux du mieux, le top du top. Et en fait, vous allez découvrir énormément de photos qui ne sont pas sur mes réseaux sociaux. Parce que sur mes réseaux sociaux, je privilégie plutôt le format vertical. Et là, en fait, sur un livre qui fait 30-32 cm, l'idée, c'était vraiment de vous immerger le plus possible avec plein de petites histoires. Et donc, on a vraiment des très belles photos horizontales, pas que, mais on a aussi des histoires que je n'ai jamais racontées. Et j'ai essayé vraiment de passer du temps à l'écrire. pour trouver les mots qui immergent le plus possible. Et sinon, pour annoncer la sortie de ce livre, il y a un documentaire qui va sortir sur ma chaîne YouTube et qui parle de ma dernière séance photo, de mon dernier shooting qui me permet de refermer ce livre.

  • Speaker #0

    Et le documentaire, il sort quand ?

  • Speaker #1

    J'espère qu'il va sortir le 2 juin. Enfin, j'espère qu'il va sortir plus ou moins dans la même semaine que la sortie des précommandes. Ok,

  • Speaker #0

    parfait. Comment tu vois ton futur ? Toujours des voyages, des livres, des documentaires ?

  • Speaker #1

    Mon futur ? Mon futur ? Oui, toujours des documentaires, toujours des livres.

  • Speaker #0

    Dans quelle sorte ça peut évoluer ?

  • Speaker #1

    Peut-être... Avoir des projets de documentaires encore plus ambitieux, avec des plateformes de diffusion comme celles qu'on connaît, Netflix, Amazon, Disney, même si c'est très concurrentiel, mais avoir les moyens de créer vraiment de belles épopées sur les animaux du monde et de raconter vraiment de belles histoires. Je pense qu'aujourd'hui, la télévision a loupé le virage du digital et des créateurs de contenu. Et je pense maintenant que les plateformes peuvent offrir un storytelling adapté à Internet.

  • Speaker #0

    C'est tout ce que je te souhaite alors.

  • Speaker #1

    Merci.

  • Speaker #0

    Merci beaucoup, Mathieu.

  • Speaker #1

    Merci.

Description

Cet épisode est sponsorisé par l'assurance santé animalière LASSIE :

Avec le code MORDANT40 j’ai le plaisir de vous offrir 40€ à toute nouvelle inscription !



Aujourd'hui dans Mordant j'ai le plaisir de recevoir Mathieu Courdesses, photographe animalier talentueux. Dès l'âge de 8 ans, un voyage inoubliable en Namibie a éveillé en lui un amour profond pour les animaux et les safaris, le virus comme il l’appelle, et ce virus ne l’a jamais quitté depuis.


Mathieu a su transformer sa passion en une carrière inspirante, d’étudiant en école de commerce, en passant par guide jusqu’à devenir photographe animalier et fondateur de sa propre maison de production.


Dans cet épisode on aborde les défis que représente la photographie animalière, notamment l'obtention des autorisations nécessaires, les réalités financières, les connaissances empiriques versus théoriques.


Au fil de la conversation, vous découvrirez comment la photographie peut servir de puissant outil de sensibilisation à la conservation de la nature.


Mathieu ne se contente pas de capturer des images à des fins purement esthétiques ; il s'engage également pour protection de la faune sauvage menacée, il fait partie de la nouvelle génération de photographes plus éclairée, plus éthique et plus respectueuse.


Avec Mathieu, on a aussi parlé d’écotourisme, de diplomatie environnementale et de la mode de la poudre de rhinocéros.


Je vous souhaite une bonne écoute !



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Pour retrouver Mathieu Courdesses :

TikTok @mathieu.courdesses

Instagram @mathieucourdesses

Pour commander son dernier livre : Orange&Wild




Pour suivre mon quotidien et celui du podcast :


@mathilde_osteo



Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Bonjour Mathieu Courdès, merci beaucoup d'avoir accepté mon invitation. Je suis super contente d'avoir un photographe animalier pour la première fois sur Mordant.

  • Speaker #1

    Bonjour !

  • Speaker #0

    Alors pour commencer, est-ce que tu peux nous dire quel est ton rapport avec les animaux sauvages enfants et même les animaux domestiques ?

  • Speaker #1

    Alors moi j'ai eu la chance du coup d'aller en Namibie à l'âge de 8 ans, mais même avant ce voyage j'étais déjà passionné par les animaux. Je me souviens que mes jouets, quand j'étais tout petit, c'était des petits animaux en plastique et je m'imaginais directeur d'une réserve, propriétaire, directeur d'un zoo. Donc j'étais déjà passionné, passionné. Et puis effectivement, ce voyage en Namibie m'a un peu transformé puisque j'ai su qu'en posant les pieds en Namibie, j'aurais, quoi qu'il arrive, plus tard un rapport avec ce continent. Et les activités, à savoir le safari, la recherche des animaux dans leur milieu naturel, tout ce qu'on peut vivre sur place, je savais que je le revivrais plus tard.

  • Speaker #0

    Extrêmement précoce, c'est dingue.

  • Speaker #1

    Il se passe quelque chose quand on va là-bas, c'est ce qu'on appelle le fameux virus. Il se trouve que pendant quelques années, j'ai organisé des voyages où j'accompagnais des clients avec moi et je leur faisais visiter les parcs nationaux. Et c'est vrai que chez certaines personnes, il y a ce virus qu'on attrape et on n'a qu'une envie, c'est de retourner sur le continent africain pour repartir à la recherche des animaux. Et je crois que oui, ce virus, je l'ai chopé moi très très jeune. Je l'ai encore, je l'ai encore.

  • Speaker #0

    Et donc à 8 ans, tu as fait en sorte de faire les études qu'il fallait pour aller travailler plus tard en Afrique ?

  • Speaker #1

    Alors à 8 ans, non. Mais par contre, j'ai eu la chance ensuite avec mes parents. de retourner en Afrique parce qu'eux aussi ont chopé ce fameux virus. Après, à l'âge de 18 ans, moi, je voulais être photographe animalier, mais mes parents ne voulaient pas. Après, je leur ai dit journaliste. Ils m'ont dit non, ce n'est pas un métier non plus. Je leur ai dit qu'est-ce que vous voulez que je fasse ? Ils m'ont dit fais une école de commerce et puis après, si tu veux faire ton hobby de photographie, tu pourras. J'ai fait cette école de commerce qui ne m'a pas plu. mais cette école avait un cursus qui me permettait de partir à l'étranger et notamment trouver des stages. Et donc, on avait vraiment champ libre pour le choix du stage. Et donc, j'ai envoyé à l'âge de 18-19 ans 150 lettres de motivation, 150 CV à travers toute l'Afrique australe. Et j'ai eu deux réponses, un tour opérateur au Botswana et un tour opérateur en Namibie. Et donc, j'ai vécu sept mois là-bas. où j'ai appris d'abord à être guide, d'abord, pardon, à être traducteur et ensuite à être guide.

  • Speaker #0

    De traduire quelle langue ?

  • Speaker #1

    En fait, je traduisais les guides qui parlaient anglais vers des touristes qui, eux, parlaient français. Et en fait, la petite anecdote, c'est que mon anglais était nul, nul, nul. Je ne parlais quasiment pas anglais. Et donc, en fait, souvent, j'improvisais par rapport à... à ce qu'on voyait. Quand on voyait un lion, le guide donnait plein d'informations sur le lion. Et moi, je comprenais vraiment un mot sur deux. Mais comme j'avais déjà pas mal de connaissances sur le monde animal, je donnais mes propres connaissances aux touristes. Sauf qu'un jour, je suis tombé sur une touriste qui était prof d'anglais et la supercherie n'a pas fonctionné.

  • Speaker #0

    C'est trop drôle. Et donc, tu as fini ton école de commerce pour ensuite... Est-ce que tu as directement bifurqué dessus ? Bifurqué, pardon, sur guide ?

  • Speaker #1

    Alors en fait, j'ai fait deux écoles à la fin de ma première école de commerce. Je suis parti vivre un an en Namibie pour voir si après tout, je voulais faire ma vie là-bas en tant que guide. J'avais quelques hésitations et je me souviens de mon patron sur place qui m'avait dit « Non mais Mathieu, tu ne vas pas être guide, tu vaux mieux que ça. » Et en fait, pour moi, le métier de guide, c'était un métier incroyable. En fait, c'était la première fois de ma vie que… que quelqu'un me disait que j'avais une carrière qui valait peut-être mieux que mes propres aspirations. Et ça, ça m'a permis de me construire, ça m'a permis de viser plus haut. Et du coup, j'ai fait un an en tant que guide et puis je suis parti. Et ensuite, j'ai fait un master dans la production audiovisuelle à l'ESCP. Et ça, ça m'a beaucoup, beaucoup formé. Et ensuite, j'ai travaillé avec un réalisateur, Gilles Demestre. Et ensuite, j'ai fondé ma société de production. Et donc, je produis, je réalise des documentaires pour le digital, pour Internet.

  • Speaker #0

    Ok, mais pas forcément documentaires animaliers.

  • Speaker #1

    C'est toujours des documentaires en lien avec la nature. Par exemple, j'ai fait un documentaire pour une société sur les papillons en Équateur. Donc un éleveur de papillons qui essaye de réintroduire des espèces de papillons qui ont disparu. J'ai fait aussi des documentaires pour mes propres réseaux sociaux. J'ai fait des documentaires pour des gouvernements étrangers. Donc voilà, je mets toujours en lien avec la nature, la protection de la nature. Toujours sur des sujets que je pense, avec le temps, maîtriser un peu et donc sur lesquels je sais construire une histoire.

  • Speaker #0

    Ok. Et est-ce que tu peux nous dire en quoi consistait le rôle de guide exactement ?

  • Speaker #1

    Alors le guide, en fait, c'est l'interface, c'est le lien entre le client et la vie sauvage. Donc entre le touriste, celui qui vient visiter un endroit, et les grands animaux, la grande faune africaine. Et donc il y a un apprentissage d'abord très théorique sur ce qu'on peut avoir dans les livres, qu'on peut aujourd'hui trouver sur Internet. Et puis il y a surtout... Et je crois que c'est ça qui fait un bon guide, l'apprentissage empirique. Donc chaque expérience, chaque observation qu'on va avoir face à des lions, face à des éléphants, va nous permettre d'accumuler des connaissances qui sont pour moi les plus précieuses. Et moi j'ai l'habitude de dire que ce que je sais du monde animal aujourd'hui, ça ne tient que sur une feuille, mais par contre ces connaissances-là, je sais qu'on est très très peu à les savoir dans le monde. et en fait c'est vraiment ça le monde sauvage c'est Tu te rends compte que tu comprends et que tu connais le monde sauvage au moment où tu te rends compte que tu ne connais rien. Il y a une sorte de déclic où tu te dis, mais en fait, c'est un continent, l'éthologie, le monde animal est un continent tellement inexploré que la science est face à tellement d'obstacles, tellement de mystères scientifiques qui sont à la fois passionnants. Et c'est là où tu te rends compte effectivement que c'est un monde incroyable. Ouais, ouais. Et qu'au final, on sait très peu de choses.

  • Speaker #0

    Ouais. Ouais, ouais, c'est dingue. Quand je suis partie, je suis partie une fois en Afrique... Quand tu dis Austral, c'est quoi exactement ?

  • Speaker #1

    L'Afrique australe, c'est Namibie, Afrique du Sud, Botswana, Zambie, Zimbabwe et Mozambique.

  • Speaker #0

    Ok. Bon, alors je suis partie une fois en Afrique australe, en Afrique du Sud. Et quand j'ai découvert du coup moi le métier de ranger, tu nous diras la différence s'il y en a une entre guide et ranger, ben en fait j'étais hallucinée, moi je pensais que ça protégeait une réserve, ça protégeait les animaux, mais en fait ils ont des connaissances incroyables sur, et pas uniquement sur les animaux, les espèces, ce qu'ils vont manger, etc. Mais énormément en éthologie, comportement, et énormément aussi sur la flore, enfin j'étais hallucinée du nombre de plantes, d'herbes, de graminées, de... et tous les chants des oiseaux, enfin bon c'était assez dingue et du coup j'ai j'ai découvert un tout petit bout, je suis pas resté très longtemps mais c'était incroyable. Quel est ton premier voyage en tant que photographe ?

  • Speaker #1

    En tant que photographe, mon premier voyage je pense professionnel, là où j'ai gagné ma vie en tant que photographe, c'est sans doute au Rwanda, où j'avais réussi à négocier des autorisations de tournage, où j'avais réussi à... à déclencher des expositions suite à ce voyage. Après, avant, j'avais vécu en Namibie, au Botswana, donc j'apportais toujours mon appareil photo avec moi. Mais je crois que oui, c'est le Rwanda, mon premier voyage professionnel.

  • Speaker #0

    Et comment ça s'organise un tel voyage ? Niveau autorisation, peut-être pour les réserves ? Est-ce que tu dois être forcément escorté par un guide ou un ranger ou tu peux y aller tout seul ?

  • Speaker #1

    Bien sûr, ça c'est toute la partie un peu immergée de l'iceberg. C'est tout ce qu'on ne voit pas, à savoir... La préparation, l'investigation, la partie production, c'est-à-dire qu'est-ce que ma société va prendre en charge, qu'est-ce que le client va prendre lui à sa charge. Donc voilà, il y a toute une partie à étudier et ça prend des mois et des mois et des mois. Et puis parfois, ça prend quelques semaines. Là, par exemple, je reviens d'un tournage au Botswana. Je crois que fin février. On s'est dit, j'ai eu une personne au téléphone, je lui ai dit voilà, je suis prêt à partir. Mais mi-mars, je partais, enfin fin mars, je partais. Donc là, c'est du rush où tous les jours, on étudie le terrain, tous les jours, on a des interviews avec les guides avant de les rencontrer pour savoir l'histoire qu'on peut construire. Il y a évidemment les autorisations, il y a savoir pourquoi c'est mieux d'aller dans cette concession et pas dans celle-ci. Est-ce qu'on peut faire du hors-piste ? Il y a énormément de... Il y a un savoir-faire que ma société a accumulé au fur et à mesure des années et c'est ça finalement la force de mon travail, c'est que je sais comment construire un voyage pour obtenir les meilleures images, je l'espère possible, et les meilleures vidéos possibles.

  • Speaker #0

    Et qu'est-ce qui te pousse par exemple à aller dans une destination, là tu disais le Botswana, qu'est-ce que tu recherches exactement et tu parlais aussi d'histoire, est-ce que tu recherches à avoir une situation particulière, par exemple je sais pas un accouplement ou une bagarre particulière entre des clans, ou alors tu vas dans une réserve particulière parce que tu veux voir certaines espèces et tu y vas à l'aveugle et tu attends de voir ce qui se passe sur le moment pour ensuite raconter.

  • Speaker #1

    Alors, il y a une partie de ce savoir-faire qui doit rester un peu secret, un peu mystérieux. Mais l'idée, c'est beaucoup, beaucoup d'adaptation. Donc, quand on va dans un endroit, tous les jours avec mon vidéaste et avec mes équipes, on écrit, on réfléchit, on construit le documentaire. S'il nous manque certaines séquences, on retourne dans des endroits. Donc, c'est énormément d'improvisation aussi sur place.

  • Speaker #0

    et Il y a des histoires, est-ce que c'est la vérité absolue ce que tu racontes ou c'est quand même une interprétation de l'homme par rapport au fait qu'ils soient frères et sœurs, enfin j'imagine que ça on le sait, mais par rapport aux bagarres, aux territoires, est-ce que tu le sais toi, ton guide, est-ce que tu es aidé par des éthologues par exemple ou des vétos ?

  • Speaker #1

    Alors, déjà, je me méfie un tout petit peu des éthologues quand il s'agit de... d'interprétation de comportements d'animaux sauvages. Il faut savoir que l'éthologie est une science qui a peu de moyens. Et donc, à part dans la branche de la primatologie, où là, effectivement, il y a plus de recherches parce que la primatologie est accompagnée par les grands laboratoires pharmaceutiques, médicaux. Et donc, on a plus de moyens pour étudier les grands primates. mais Tout ce qui est éthologie, des félidés par exemple, ou des nidés, tout ça, on a quand même très peu de connaissances. Et surtout, moi ce que m'ont appris mes 20 années dans la brousse, c'est que d'une région à l'autre, d'une réserve à l'autre, le comportement d'un animal va varier. Donc pour répondre à ta question, en fait, pour moi les meilleurs éthologues de ces régions sont les guides. qui, eux, sont dans la réserve, ou les rangers, ça dépend comment tu les appelles, sont dans la réserve depuis des années et des années, voire des décennies, et en fait connaissent les différentes générations, les différents clans, les différents territoires des prédateurs. Et donc, c'est avec eux qu'on va construire l'histoire. Alors, à ta question, est-ce qu'il y a de la mise en scène ? Oui, il y a de la mise en scène, mais il n'y a jamais de mensonge. C'est-à-dire qu'on ne va jamais mentir sur une vérité scientifique. Ça, c'est très important. On peut... Par exemple, imaginons que le documentaire, on part à la recherche d'un lion, et il se trouve qu'on voit ce lion le jour 1. En fait, on ne va pas faire un documentaire qui dure deux minutes. Donc, on va essayer de mettre en scène la recherche, ou alors est-ce qu'il n'y a pas autre chose à raconter derrière le lion ? Pourquoi ce lion avait ce caractère-là ? En fait, c'est ça l'adaptation. c'est que Les animaux, on ne sait jamais vraiment sur quoi on va tomber. On ne sait jamais s'il va nous offrir juste un gros billon en bas d'un arbre ou si au contraire, il va être en train de chasser. Donc, c'est de la direction d'acteurs, mais en fait, on n'a aucune direction sur nos acteurs. Donc, c'est à nous d'anticiper et d'improviser par rapport à ce que les animaux nous offrent. Mais en tout cas, on ne mentira jamais sur une vérité scientifique. ou alors... on va choisir de surligner un trait de caractère mais ça ne sera jamais un mensonge et on essaye vraiment d'être toujours à la frontière avec l'anthropomorphisme où on essaye quand même de donner des émotions aux téléspectateurs ou aux viewers mais sans pour autant dire une contre-vérité par exemple on ne va jamais dire Voilà, ça c'est cet éléphant, il s'appelle Michel, il vient de se réveiller, il va prendre son petit déjeuner. Ben non, un éléphant ça ne se réveille pas, ça ne prend pas son petit déjeuner. Donc en revanche, les guides eux donnent des noms aux animaux. D'ailleurs c'est un processus très important pour l'identification, c'est même un processus scientifique. Et les guides nous racontent que chaque éléphant, chaque lion, chaque key species de la réserve a un comportement différent. à son propre mode de vie. Et donc, en fait, c'est sur ces traits de caractère qu'on va insister.

  • Speaker #0

    Est-ce que les animaux, ils ont le temps de s'habituer à toi ? Parce que tu changes pas mal quand même de pays, de réserve, de continent. Et tu vois, ça m'a fait penser à Jane Goodall qui observait les chimpanzés, qui a mis quand même des semaines, des mois, voire certaines années pour tisser des liens avec les familles. Alors que toi, tu changes assez souvent de lieu. Comment ça se passe pour ça ?

  • Speaker #1

    Bon, les animaux qu'on rencontre, dans la grande majorité des cas, ont déjà eu un processus d'habituation. Le processus d'habituation, c'est ce qui permet à un animal de le rassurer par rapport à la présence humaine et à la silhouette humaine. Un gorille, par exemple, qui a eu un processus d'habituation, ça dure, le gorille des montagnes, entre 2 et 4 ans. Et là, le gorille, du coup, a conscience que la silhouette humaine n'est pas un problème, n'est pas liée au braconnage. Pareil pour les lions dans les grandes réserves ou dans les grands parcs nationaux. ils savent que la voiture n'est pas un problème. Mais tout ça, le processus d'habitation, ça met des mois et des mois, et c'est des rangers qui, chaque jour, se rapprochent un peu plus des espèces pour qu'elles puissent être observées et pour qu'elles restent totalement sauvages, mais qu'on puisse au mieux les observer et faire des photos.

  • Speaker #0

    Ouais donc en fait ils mettent tous les hommes dans le même sac, il faut pas qu'ils s'habituent forcément à toi Mathieu mais il faut qu'ils s'habituent à l'homme ou au ranger.

  • Speaker #1

    Ouais bien sûr, bien sûr, ouais c'est ça.

  • Speaker #0

    Y'a pas forcément besoin qu'ils s'habituent à toi.

  • Speaker #1

    Non, non non non non. Non non mais moi surtout quand je pars en tournage, je pars deux semaines, deux trois semaines, donc j'ai pas un processus d'habituation, ça met des mois et des mois et des mois.

  • Speaker #0

    Bah ouais ouais, ok bah ouais c'est pour ça que je me posais la question.

  • Speaker #1

    tout le processus d'habituation par exemple J'avais un ami qui travaillait sur le processus d'habituation d'une famille de gorilles dans le sud du Cameroun. Et ça faisait des années et des années, ça fait presque dix ans maintenant qu'ils essayent d'habituer une famille de gorilles. Et en fait, à chaque fois qu'il y a un cas de braconnage dans la famille, ils sont obligés de tout reprendre de zéro. Ouais,

  • Speaker #0

    ok. Pour redesensibiliser un peu. Ok. Et quelle est ton éthique par rapport à ça ? Jusqu'où tu pourrais aller pour une photo ? Quelles sont tes limites ?

  • Speaker #1

    C'est vraiment...

  • Speaker #0

    Parce que je pense qu'il y a des photographes qui abusent un peu, qui doivent se rapprocher un maximum de certains animaux, non ?

  • Speaker #1

    Ouais, après, je crois pas que ça soit sur la proximité avec l'animal qu'on fixe l'éthique. T'as des animaux qui viennent vers toi. T'as des animaux qui sont curieux, genre l'ours polaire, dans son éthologie, dans son comportement. Il y a une façon d'être curieux parce que l'ours polaire est obligé d'être curieux, est obligé de voir ce qui se passe, de trouver de la nourriture par lui-même. Et donc, par instinct, il va se rapprocher de toi, il va te renifler, il va te sentir. Et donc là, ça ne le dérange pas puisque c'est lui qui vient vers toi. L'éthique du photographe animalier, c'est un sujet très délicat, très difficile. Moi, je sais ma limite. Je sais... En fait, ma limite, elle est souvent liée au plaisir que j'ai à prendre la photo. C'est-à-dire que là, l'année dernière, je suis allé au Brésil pour photographier le jaguar. Et un soir, on me dit, viens, tu vas pouvoir photographier un oslo. Et l'oslo, c'est vraiment un animal très, très difficile à voir, très rare. Et magnifique. En pleine nuit. Comment ?

  • Speaker #0

    Et magnifique, c'est super beau.

  • Speaker #1

    Magnifique, c'est un pédain extraordinaire. Et donc, en pleine nuit, on m'emmène dans une sorte d'affût, un peu. Et j'attends, j'attends, et là, je vois une petite tête qui dépasse, et c'est l'oslo. Et tout de suite, il s'en va. Et donc, moi, je n'ai pas le temps de faire des photos. Et là, tu as un gars qui arrive du lodge dans lequel on était et qui pose des morceaux de poulet, enfin, des petits morceaux de viande, et je crois qu'il en pose trois ou quatre juste en face de l'affût. Effectivement, l'oslo est revenu comme par habitude, et il a mangé les bouts de poulet. Et donc, effectivement, moi, j'ai pris des photos. Mais je me suis dit, en fait, je n'ai aucun plaisir à faire ces photos. En fait, ce n'est pas la nature qui m'offre ce cadeau, c'est l'homme qui l'a provoqué. Et donc, au-delà de tous les problèmes que ça comporte de nourrir un animal, par exemple, sur nos doigts, on peut transmettre éventuellement des maladies à l'animal. Le fait de mettre de la nourriture à un endroit, ça peut entraîner des confrontations entre certaines espèces qui n'ont… donc pas à se rencontrer normalement à l'état sauvage. Après, il faut aussi raison garder. Les grands enjeux de la protection animale, c'est le braconnage, c'est la déforestation, ce n'est pas le nourrissage d'un individu dans un lieu donné. C'est pour ça que... Il y a eu un scandale il n'y a pas très longtemps de deux photographes effectivement qui ont fait des photos en Finlande où les animaux étaient nourris avec des grosses carcasses de cochons. Et donc au même endroit, on avait des ours, des loups, des gloutons. Et donc il y a eu un article sur Reporter, il y a eu un article sur Géo. Ils se sont fait défoncer. Et moi, je pense que la chose juste, c'est d'informer en fait les personnes à qui tu... proposes tes images, à qui tu montres tes images. Si tu leur racontes les coulisses, si tu leur dis voilà comment ça s'est passé, à vous de voir ce que vous en pensez, mais voilà comment j'ai pris ces photos. Et je pense que les gens en fait comprennent ou ne comprennent pas, mais après toi, ton rôle de photographe, ça a été aussi de raconter les coulisses. Et voilà, à côté de ça, tu as aussi des images qui ont été faites, et on le sait aujourd'hui, même les meilleurs photographes animaliers français, notamment le meilleur. Il y a des fortes rumeurs comme quoi il a utilisé des appâts pour prendre certaines de ses photos. Mais est-ce qu'à travers ses photos, il n'a pas sensibilisé des milliers de personnes à une espèce menacée, à la disparition d'un animal en particulier ? C'est un sujet très délicat. Mais moi, en tout cas, je ne veux pas pointer du doigt tel ou tel photographe. D'ailleurs, je n'ai dit aucun nom volontairement, alors que je les ai bien en tête. Chacun a son éthique. Le plus important, ce n'est pas de tromper celles et ceux qui te suivent et qui suivent ton travail.

  • Speaker #0

    Donc, ça rejoint un peu l'une de mes questions. Quel est le rôle de la photographie animale ? J'imagine que ce n'est pas uniquement pour l'art, même si certaines espèces sont magnifiques. Et je pense qu'on est aussi attiré par ça au début. Mais il y a aussi, j'imagine, d'autres rôles.

  • Speaker #1

    Bien sûr. Oui, oui. De toute manière, le photographe animalier qui n'a qu'une vision esthétique, de son travail, pour moi il se trompe un peu. Il doit y avoir une vision de conservation, de sensibilisation, et puis il y a aussi tout un travail d'investigation avant de partir en expédition. Ça fait beaucoup de mots en sion. Il faut savoir où est-ce qu'on va et qu'est-ce qu'on va photographier et pourquoi on va le photographier. En fait à partir du moment où on sait aujourd'hui que pour aller dans un endroit, moi, j'ai une empreinte carbone catastrophique. Évidemment que j'ai une empreinte carbone catastrophique. Donc, qu'est-ce qu'on se dit en tant que photographe animalier ? Comment on rentabilise, même si ce n'est pas le bon terme, mais comment on équilibre cette empreinte carbone ? En faisant des reportages. Moi, je sais que c'est important dans mon travail, je n'en parle pas beaucoup sur les réseaux sociaux, mais de faire ce qu'on appelle de la diplomatie environnementale, donc d'aller voir des ministres, d'aller voir des diplomates. et de leur dire ce que j'ai vu et comment on peut améliorer les choses pour protéger des animaux. Et voilà. Donc, c'est aussi ça, le rôle du photographe animalier, du créateur de contenu nature animalier.

  • Speaker #0

    Et qu'est-ce qu'on peut faire, nous, qui ne sommes pas professionnels ou pas politiques, au quotidien pour aider ces espèces, depuis la France ?

  • Speaker #1

    Bon, pas grand-chose. Je sais que j'ai certains de mes amis, s'ils m'entendaient, ils me tueraient. en m'entendant dire ça, mais en tant que particulier, moi j'ai vu en me rendant sur place la disparition des écosystèmes et des parcs nationaux, c'est quelque chose qui dépasse de loin le foyer, le particulier, c'est des décisions étatiques, gouvernementales, parfois c'est des organisations internationales qui décident ça, parfois c'est des grandes fortunes, des milliardaires qui décident ça. franchement c'est malheureusement en tant que particulier en tout cas je parle bien de la protection des espèces menacées je parle bien du domaine que je connais à savoir le braconnage la déforestation et où je ne parle pas de la protection de l'environnement en tant que tel parce que c'est un sujet tellement large que je peux pas me prenez en tant que spécialiste en revanche sur les sujets de conservation de biodiversité là je m'y connais et à votre échelle enfin à l'échelle du particulier Juste être sensibilisé et dans un repas de famille dire que voilà j'ai vu que malheureusement il y avait plus que 3000 tigres à l'état sauvage, dire que oui il y a plus que 1100 gorilles des montagnes à l'état sauvage, expliquer tout ça, être sensibilisé à ça c'est déjà un pas énorme. Mais les décisions de protection de nos espaces naturels, elles se passent dans des sphères très très hautes.

  • Speaker #0

    Est-ce qu'il y a déjà un animal que tu as photographié et qui n'existe plus aujourd'hui ?

  • Speaker #1

    Je ne crois pas. J'ai vu effectivement certains écosystèmes changer au fur et à mesure de mes allées venues en Afrique. Par exemple, la véritable mode. le terme n'est pas très beau, mais de la corne de rhinocéros, à savoir les rhinocéros qui se font braconner, tuer. C'est une mode qui a vraiment commencé dans les années entre 2005 et 2010. Et puis, elle a eu son apogée en 2014-2015. Et donc, moi qui vais en Afrique depuis que j'ai 8 ans, depuis 2002, j'ai vu effectivement les populations de rhinocéros diminuer et diminuer jusqu'à... devenir pratiquement inexistantes dans certaines régions d'Afrique. Par exemple, au Massaïmara ou au Serengeti, donc au Tanzanie, Kenya, voir un rhinocéros, c'est quelque chose de rarissime. Et puis quand on le voit, généralement, il est très très loin, on voit juste une sorte de petit point noir dans la Grande Plaine. Donc ce sont des animaux qui sont devenus très très difficiles à observer. Au Botswana, il n'y en a quasiment plus. En fait, il reste quelques endroits précieux où on peut en voir, mais ça reste très, très difficile.

  • Speaker #0

    Je repensais en fait à un mois et les rhinocéros que j'ai pu voir. J'en ai vu et j'ai vu des blancs et des noirs justement à la réserve McAllis et dans le nord de l'Afrique du Sud. Et là où j'ai rencontré la ranger qui était française, Claire, avec qui j'ai déjà fait un podcast et qui nous disait d'ailleurs quand on était en safari, c'était du matin au soir. On aidait les rangers, je ne sais plus comment ça s'appelle, les co-touristes. Et il ne fallait pas qu'on poste de photos ni rien, il ne fallait pas donner trop d'infos sur le nombre d'individus et où ils étaient situés finalement.

  • Speaker #1

    Oui, effectivement, ça fait partie des choses qui sont demandées, de ne pas donner d'informations, parce que l'information est déjà un process du braconnage. Il y a même certaines réserves, j'en ai eu écho il y a quelques mois. qui donnent des réserves qui font du tourisme et qui donnent des informations aux braconniers pour compléter les fins de mois et pour gagner de l'argent. Ah ouais,

  • Speaker #0

    donc on peut être de deux côtés.

  • Speaker #1

    Non, mais c'est juste des réserves qui ne s'en sortent pas financièrement. Pendant le Covid, il y a pas mal de réserves qui en ont chié. Et effectivement, j'ai eu il y a quelques mois des informations sur... Une réserve dans laquelle, effectivement, il y aurait eu de l'intelligence avec l'ennemi, comme on dit. Donc, donner des informations sur l'emplacement d'un rhinocéros. Après, c'est toujours la même chose. C'est des on-dit, il n'y a pas eu d'enquête. Il y a énormément de compétition entre les différents lodges et réserves de la région. Donc, chaque bonne excuse est bonne à prendre pour tuer l'autre économiquement. Mais bon, j'avoue que quand on me l'a dit et quand on m'a dit le nom de la réserve, ça ne m'a pas tant étonné que ça.

  • Speaker #0

    Et pourquoi ? Parce que je sais qu'ils coupent les cornes des rhinocéros justement pour éviter le braconnage. Peut-être qu'en les coupant derrière, ils peuvent les revendre aux braconniers. Non, même pas.

  • Speaker #1

    En fait, repose-moi ta question pour être sûr.

  • Speaker #0

    La réserve coupe les cornes pour protéger leurs animaux. Ce n'est pas la réserve qui coupe les cornes.

  • Speaker #1

    Ça dépend. Donc, tu as les parcs nationaux et les réserves. Dans les parcs nationaux, ça dépend des politiques mises en place par les gouvernements, mais généralement, effectivement, ils coupent la corne. Donc ça, c'est avec des fonds publics pour protéger les rhinocéros du braconnage. Mais il faut savoir que même si ça repousse tous les 3-4 ans une corne de rhinocéros, et même s'il y a ça de corne, des rhinocéros peuvent quand même se faire tuer. Parce que le kilo de poudre de corne de rhinocéros se revend entre 70 000 et 80 000 dollars le kilo. Et ça, c'est encore des chiffres d'il y a quelques années. Peut-être que maintenant, ça...

  • Speaker #0

    Et la mode est toujours présente, comme tu disais, s'il y avait une mode...

  • Speaker #1

    Bien sûr. Alors, ça a diminué parce qu'il y a eu des politiques à la fois publiques et des stratégies privées mises en place notamment par les réserves privées pour financer... les cornages de rhinocéros. Souvent, ces réserves utilisent l'argent du tourisme pour protéger leurs rhinocéros. Et aujourd'hui, on le sait, les réserves qui n'ont pas voulu écorner leurs rhinocéros en Afrique du Sud, la grande majorité n'ont plus de rhinocéros. Et les réserves qui ont mené des grandes campagnes d'écornage, eux, ont encore des rhinocéros. Et donc, en fait, moi, à titre personnel, ça me sert le cœur de voir un rhinocéros sans corne. Mais aujourd'hui, face à ce fléau, c'est la seule solution qu'on ait trouvée.

  • Speaker #0

    Pendant un moment, on a injecté un produit au rhinocéros qui rendait la corne un peu rose et qui, a priori, enlevait les effets aphrodisiaques de la corne parce qu'ensuite, la corne est revendue sur le marché chinois pour des vertus aphrodisiaques. Et en fait, on s'est rendu compte que ce produit donnait des problèmes d'estomac et d'intestin au rhinocéros. Et donc, du coup, la seule solution qu'on ait trouvée, c'était de couper. couper les cornes. Il faut savoir que les deux premières causes de mort des rhinocéros, le premier c'est le braconnage, et le deuxième c'est les mâles entre eux qui s'écornent et qui se tuent. Donc finalement, en coupant les cornes, on réduit quand même, face à une population qui allait s'éteindre, face à une espèce qui allait s'éteindre, on réduit quand même de deux facteurs la disparition du rhinocéros. Et en fait, c'est intéressant de voir que Merci. Il y a certaines espèces dans le monde, comme les gorilles, les rhinocéros blancs et noirs, ou les tigres, par exemple, qui doivent leur survie uniquement grâce à l'écotourisme. Uniquement. Alors, ça peut faire mal au cœur à certains d'entendre ça, mais en fait, il y a une loi du marché et de l'économie derrière. C'est que ces parcs nationaux, ces réserves naturelles, elles vont intéresser les industries du bois, elles vont intéresser, pourvu qu'il y ait du pétrole, Merci. d'autres industries qui vont être ultra polluantes. Et donc, finalement, le tourisme n'est pas, à part dans certains pays, mais n'est pas un secteur d'économie qui produit énormément d'argent. Mais par contre, ça recrute beaucoup. C'est-à-dire que le tourisme permet quand même de rendre actif une grande partie de la population dans des régions du monde où il y a quand même beaucoup de chômage. Et surtout, le tourisme, qui fait partie du secteur tertiaire, a tendance à augmenter la classe moyenne dans certaines régions du monde où il y avait quand même jusqu'à il y a 15-20 ans une classe très très pauvre qui représentait 80% voire 85% du pays et une classe extrêmement riche. Et en fait le développement de ces pays du sud va passer par l'émergence du secteur tertiaire et donc une augmentation de la classe moyenne. et moi je me rends bien compte là on sort peut-être un peu un tout petit peu du sujet de l'animalier, mais ça me semble important de dire que le tourisme, l'écotourisme, le tourisme responsable permet de protéger et de sauver certaines espèces de la disparition. Et plus largement, permet de protéger des écosystèmes parce que le rhinocéros, par exemple, par sa présence, par ses excréments, est une sorte d'espèce parapluie et donc va permettre de sauver d'autres animaux rien que parce qu'il est là. Quand il va faire ses excréments, ça va créer des insectes qui vont attirer des oiseaux. Ces oiseaux vont attirer des petits prédateurs comme des cervales, des caracales, même des chacals. Et donc tout ça est très important. Si tu as une espèce qui disparaît de certains biomes, c'est tout le reste des espèces qui sont en péril.

  • Speaker #1

    T'as l'air d'en savoir énormément sur les animaux. Est-ce que tu en sais autant qu'un ranger ? Est-ce que t'as passé des certifications ? Ou est-ce que c'est que de l'empirisme, comme tu disais tout à l'heure ?

  • Speaker #0

    En fait, j'ai eu la chance de commencer à guider à un moment où, notamment en Namibie, il y avait très peu de certifications ou de concours. Donc, j'avais pas besoin de diplôme. Bien sûr, j'ai dû passer des tests, des tests écrits, des tests oraux. J'ai fait plusieurs tours en tant qu'assistant. C'est même presque plus formateur que certaines écoles reconnues par l'État. Mais en tout cas, il m'a fallu du temps avant d'avoir mes propres groupes et de guider. Le Ranger, effectivement, c'est une certification que tu as avec un diplôme, l'un des diplômes qui s'appelle le VGASA, qui est reconnu par l'État sud-africain. Et effectivement, c'est ce qu'on t'apprend. le cri des oiseaux, comme tu disais au début de notre podcast, identifier les différentes espèces, les traces, les crottes, et ça, en fait, une fois que tu es sur le terrain pendant plusieurs mois, tu l'as aussi, c'est quelque chose que tu acquiers, donc moi, je ne me définis pas en tant que ranger, parce que je n'ai pas la certification Vigassa, mais au final, j'ai mes connaissances de guide, et comme je te l'ai dit, c'est vraiment plus mes connaissances Merci. empiriques qui sont importantes que mes connaissances théoriques, sachant que quand tu commences en tant que ranger, tes seules connaissances sont celles que tu as apprises lors de ton stage et dans tes livres.

  • Speaker #1

    Et est-ce que tu connais sur d'autres continents, tu parles beaucoup en Afrique, mais est-ce que tu es partie... En Asie, en Amérique latine et dans ce cas-là, j'imagine que c'est d'autres connaissances.

  • Speaker #0

    Bien sûr, oui, tout à fait. Je suis parti, là, récemment, faire le jaguar au Brésil. Je suis allé photographier le tigre en Inde. Je suis allé photographier les orangs-outans à Sumatra. Je suis allé au Pôle Nord, au Canada, voir les ours blancs. Donc, Équateur aussi. Donc, oui, j'ai eu la chance de voyager pas mal. Effectivement, on est sur... sur des connaissances différentes, mais quand même, je vois certains points communs quand je photographie, par exemple, le jaguar dans le Pantanal. Je trouve quand même, au moment où je prends ma photo, certains points communs avec le léopard qu'on va avoir en Afrique. Quand je photographie le tigre, dans sa manière de se déplacer, dans la manière de nous regarder, je vois dans sa manière d'être finalement... le super prédateur de la région, je vois certains points communs avec le lion. Donc pareil, quand je fais le rang mouton, je vois dans sa manière de se déplacer, dans la manière de me regarder, certaines similitudes avec les gorilles des montagnes. Donc finalement, quand je vois des animaux d'une même famille, j'arrive à comprendre un peu plus l'animal et du coup à choisir un emplacement ou à choisir une heure de la journée pour laquelle le photographier.

  • Speaker #1

    Et quel est ton pays préféré, ta destination préférée ?

  • Speaker #0

    Bonne question. Le Rwanda est quand même un pays qui m'a marqué. J'y suis allé peut-être cinq, six fois. C'est un pays assez extraordinaire pour mille et une raisons. Après, moi, j'ai un attachement aussi particulier pour l'NMB, qui est le pays qui m'a créé en tant que photographe et guide. Quoi d'autre ? Le Botswana, extraordinaire. mon expérience dans le nord du Canada pour voir les ours polaires à Churchill, c'est magique. Donc ouais, non, il y a plein d'endroits dans le monde.

  • Speaker #1

    Après tu fais une grande liste. Et l'animal que tu trouves le plus fascinant ?

  • Speaker #0

    Aïe, aïe, aïe, c'est dur. Le plus fascinant, peut-être celui que je n'ai pas encore photographié.

  • Speaker #1

    Ok. Tu as photographié les pandas ?

  • Speaker #0

    justement non c'est mon rêve parce que t'en parlais dans les gens mais comme ça fait quelques années je me demandais si tu les avais non non pas encore c'est très difficile j'ai eu plein de projets qui m'ont potentiellement amené à les photographier et finalement ça s'est pas fait c'est aussi ça le le métier de photographe et de reporter animalier c'est que sur 10 projets que tu lances il y en a un ou deux qui se font bon là avec mes réseaux sociaux avec le fait entre guillemets que je sois de plus en plus connu les projets sont un peu plus faciles à avoir et les décideurs sont plus faciles à convaincre mais quand même c'est beaucoup de refus en tout cas le début de ma carrière professionnelle c'était dur,

  • Speaker #1

    c'était très dur ok et est-ce que tu as déjà fait des animaux aquatiques ?

  • Speaker #0

    non après j'ai déjà vu les baleines, j'ai déjà vu les grandes colonies d'Otari en Namibie Mais non, je n'ai jamais fait de la photo sous-marine.

  • Speaker #1

    Oui. Et ça ne te donne pas envie ?

  • Speaker #0

    Pas particulièrement. En fait, disons que je trouve qu'il y a vraiment des top, top photographes dans ce milieu-là. Mais même en France, on a certains qui sont pour moi les meilleurs au monde. Je pense à Stéphane Grandsoto qui est exceptionnel. Monsieur Balesta aussi qui est exceptionnel. Moi, je suis… Je trouve qu'il y a tellement à faire déjà sur la terre ferme et notamment des espèces que je n'ai pas encore photographiées que pour l'instant, je vais rester là-dessus.

  • Speaker #1

    Oui, c'est déjà très, très bien. Est-ce que tu as déjà découvert une nouvelle espèce ?

  • Speaker #0

    Ah non, non, non. Non, non, j'ai eu un doute une fois. Je faisais une investigation pour partir au Bénin dans le parc de la Panjari. Et en fait, on n'a pas pu y aller parce qu'on devait y aller. C'était un très beau contrat. C'était au tout début de ma carrière professionnelle. Je n'ai jamais raconté cette anecdote. C'était vraiment… Avec mon équipe, on a été trop contents parce que c'était un projet qui pouvait nous faire vivre pendant au moins un an et demi, deux ans. C'était avec le gouvernement béninois. Et l'idée, c'était d'aller prendre des photos dans ce parc-là, le parc de la Pantjari. et promouvoir le parc avec les réseaux sociaux tout ça. Et en fait, j'ai appelé certains contacts des connaissances que j'ai en Afrique qui travaillent dans la sécurité, dans le renseignement et ils m'ont dit, non Mathieu, là, on ne peut pas trop t'en dire, mais il ne faut pas y aller. Et donc moi, j'ai essayé de creuser parce que je me disais, quand même, c'est un truc qui peut faire déconner ma carrière. Pourquoi il ne faut pas y aller ? Ils m'ont dit, en ce moment, c'est vraiment dangereux. Il y a de plus en plus de djihadistes de l'équivalent de Boko Haram sur place, enfin, l'une des branches de Boko Haram. Et donc, si tu y vas et qu'il y a un problème, malheureusement, là-bas, ils n'arriveront pas à te retrouver et tu risques d'avoir des gros problèmes. Et en fait, j'avais fait toute une investigation, notamment sur leur guépard. Parce que je les soupçonne, entre guillemets, d'avoir une sous-espèce de guépard. Eux, ils disent que c'est des guépards d'Afrique. Enfin, le guépard un peu standard. Mais les photos que j'ai vues de ces guépards me font dire que c'est un guépard qui ne ressemble à aucun autre guépard. Et donc, je voulais aller les photographier et potentiellement aider les scientifiques à les identifier. Et au final, ça ne s'est pas fait. Donc, je n'y suis pas allé parce qu'effectivement, il y avait ce risque de kidnapping. Et il se trouve que la semaine où on devait y aller, il y a une équipe de tournage espagnol qui s'est fait tuer, kidnapper et tuer par les djihadistes.

  • Speaker #1

    Wow, quelle histoire ! En quoi tu pensais qu'ils étaient différents du guépard africain ?

  • Speaker #0

    Ils ont les tâches beaucoup moins denses qu'en Afrique australe ou en Afrique de l'Est.

  • Speaker #1

    Ok, et tu penses toujours ça ou tu as vu de nouvelles photos ?

  • Speaker #0

    Je n'ai pas vu d'autres photos parce que j'ai l'impression que le lodge qui devait nous accueillir a fermé. Je n'ai pas l'impression qu'il y ait beaucoup de touristes qui y vont. Et mine de rien, aujourd'hui avec les portables, les photos des clients, des touristes, aident aussi à une meilleure compréhension du monde sauvage. Et donc, je n'ai pas revu d'autres photos de ces guépards. Mais j'imagine, si je fais mes recherches, je pense que je pourrais trouver.

  • Speaker #1

    Ok. Et ça me fait un lien avec une question que je m'étais préparée aussi, c'est tu parlais d'aider les scientifiques au terme d'éthologie. Est-ce que tes photos peuvent servir justement pour l'avancée scientifique en éthologie ou alors pour recenser ou avoir des infos sur leur santé, l'âge, certaines pathologies, etc. ?

  • Speaker #0

    Oui, bien sûr. Notamment, j'avais fait un reportage dans la Caguerra, au Rwanda, qui est l'un de mes parcs préférés. On avait mis des colliers émetteurs autour du cou d'un éléphant et de lion. Les vétérinaires et les conservateurs m'avaient demandé de bien prendre en photo les lions pour les identifier, puisqu'ils les identifient avec le nombre de... de moustache. A priori, les points des moustaches ne sont pas au même endroit d'un lion à l'autre, c'est un peu comme les empreintes digitales. Et donc, il m'avait demandé de prendre les moustaches des différents lions. Et voilà, ça les aide effectivement à les recenser, ça les aide à voir si certains ont des problèmes de santé. Voilà, c'est aussi comme ça qu'on protège une famille de lions.

  • Speaker #1

    Dans un de tes documentaires, tu dis que tu as une forte connexion spirituelle avec certains animaux est-ce que tu pourrais dire que tu fais de la communication animale ou que c'est quelque chose d'intuitif sur lequel tu n'as pas donné de nom ?

  • Speaker #0

    bon moi je suis quelqu'un de très cartésien donc j'ai je dirais je ne sais pas si la communication entre les êtres humains et le monde animal existe Merci. Je sais qu'il y a certains chamanes que j'ai rencontrés d'ailleurs en Afrique du Sud qui disaient se communiquer avec certains animaux. Moi, ce qui est sûr, c'est que j'ai vu tellement de lions, j'ai passé tellement de temps à observer les éléphants, à observer les léopards, qu'aujourd'hui, les lions, j'ai l'impression qu'ils n'ont plus beaucoup de secrets pour moi. Quand je vois la manière dont marche un lion, je peux savoir... Qu'est-ce qu'il veut faire ? Où il veut aller ? Est-ce qu'il est dans un bon état ? Est-ce qu'il a faim ? Est-ce qu'on peut le suivre ? Est-ce qu'on le dérange ? Tout ça, je le vois, mais je ne l'ai lu nulle part. C'est parce que je les connais, parce que je les ai tellement vus, photographiés, étudiés. Ça fait plus de 20 ans que je vois des lions, donc maintenant, je les connais bien, c'est mes potes.

  • Speaker #1

    Oui, mais tu disais ça dans le documentaire, pour justement, les fois où tu ne les vois pas, eh bien, tu sais... Où ils vont être ?

  • Speaker #0

    Oui, pas tout le temps, mais effectivement, quand pendant plusieurs jours, je n'arrive pas à voir des lions, je me prends un moment et j'essaye de comprendre pourquoi je ne les vois pas. Et en fait, souvent, je le sais. Ça peut être une température, ça peut être du vent, ça peut être de l'humidité. Ça peut être plein de choses. Et du coup, je sais que, par exemple, si je me lève un matin et que je sens la température, l'air, je vois les nuages, je vois tout ça, je sais si je vais les trouver ou pas. Et je sais s'ils seront actifs ou pas. Ça, je le sais, oui.

  • Speaker #1

    Ok. Mais c'est plus par rapport à un calcul, en fait, de toutes tes connaissances et de toute ton expérience cumulée qui vont faire que tu vas avoir... toutes ces infos sur eux.

  • Speaker #0

    Mais peut-être que c'est ça, les gens qui pensent communiquer avec les animaux, enfin vraiment être en lien avec eux, peut-être qu'ils n'ont pas le recul de se dire que c'est un ensemble de connaissances qui leur font croire qu'ils sont en communication avec les animaux. Parce que... Oui, je sais pas, peut-être, mais je te dis, je suis très cartésienne. Ouais,

  • Speaker #1

    c'est ta façon de penser qui est cartésienne, et du coup, pour toi, c'est forcément que les infos qui vont te donner une solution. Mais certaines personnes, ça va être que ce qu'il y a dans leur ressenti, dans leur ventre, tu vois. Mais, ouais, je sais pas, moi, je suis un peu entre les deux. Mais je te disais ça parce qu'en Afrique, il y avait pas mal de stages de photographie, et l'autre chose qu'on voyait pas mal, c'est aussi de stages de communication animale avec la faune sauvage, etc. Donc, je me suis dit... Et en plus, tu parlais de ta connexion. Je me suis dit peut-être que c'est ce que tu fais. Mais finalement, tu ne le fais pas consciemment, mais c'est un petit peu ça, je pense.

  • Speaker #0

    Alors, je me méfie beaucoup des centres de réintroduction et des centres de conservation en Afrique australe parce que c'est devenu un vrai business. En fait, d'un point de vue général, les animaux en détresse, les animaux en difficulté, les animaux blessés ont besoin le moins possible de l'être humain. Ou alors des spécialistes, des vétérinaires, des biologistes, des gens qui ont fait des années et des années d'études, des scientifiques. Et c'est pour ça. En fait, tu as certains centres de réintroduction qui ont créé une sorte de business en disant venez faire du bénévolat, sauf que toi, tu vas payer ta chambre, tu vas payer ta bouffe. Et en fait, eux, ils vont être très contents d'avoir des bénévoles qui viennent. Et c'est ça qui va permettre de faire vivre la réserve. Et moi, j'ai fait... pas mal d'investigations sur ça et tu as certains centres de conservation par exemple qui vont récupérer un bébé lion qui s'est fait renverser par une voiture ils vont réussir à le soigner et en fait ils vont préférer le garder en se disant après tout depuis qu'on a ce petit lion, on a des photos on a plus de followers, on arrive à faire venir plus de monde, plus de bénévoles, donc je vois pas pourquoi on le ramènerait à sa mère, voilà Donc, Il faut être très vigilant avec les centres de conservation. Et pour moi, si tu n'as pas la... Enfin, si on n'a pas la connaissance scientifique, vétérinaire, si on n'a pas une vraie plus-value, c'est difficile de travailler dans la conservation.

  • Speaker #1

    Ouais. Pour choisir mon voyage, j'ai galéré, parce que depuis la France, comme tu dis maintenant, il y en a énormément. Il y en a énormément. Et du coup, je me suis dit, mais où est-ce que c'est le mieux ? Est-ce que je ne vais pas faire... du tourisme qui est néfaste pour les animaux etc et finalement j'ai pas du tout fait de centre de voyage dans un centre de réintroduction de réintroduction je voulais justement pas de ça pas de cash ni rien du coup c'était juste de l'observation partait à 5 heures du mat avec les rangers toute la journée non rentrer le midi on repartait l'aprem pour comment ils appellent ça game drive pour cinq heures et on revenait et parfois on voyait rien parfois on se prenait juste la pluie sur la tête pendant des heures Et c'était trop bien. Dans des camps au milieu du bush, là, et pas d'électricité, on se faisait tous à manger à la lampe torche, les douches et tout, et on repartait le lendemain. Les tentes, la nuit, on entendait parfois les hyènes. Les lions, je suis pas sûre de les avoir entendus à côté de nous, mais bon, c'était juste incroyable. Et parfois un peu frustrant, parce que j'ai pas vu toutes les espèces. J'ai pas vu de léopard, par exemple. Mais sinon, j'ai vu pas mal de choses. Et ouais, il y a tellement de centres... qu'une fois sur place, c'est super dur. Enfin, une fois sur place, on peut se rendre compte, mais à distance, impossible. Enfin, je trouve. C'est super dur. Quelle était ta plus grosse frayeur ? Est-ce qu'il y a un moment où t'as eu chaud, ton cœur s'est accéléré très vite ?

  • Speaker #0

    Il y a certains moments, effectivement, d'adrénaline. Quand tu te fais charger par un hippopotame, quand tu te fais charger par un gorille. Mais comme c'est des charges d'intimidation, je sais que je suis pas en danger quoi. Mais non, mais un truc tout bête tu vois, mais par exemple, là j'ai mis une vidéo sur mon compte Instagram où il se trouve qu'il y a un bébé guépard qui est venu à... quelques mètres de moi pendant que j'étais au sol à pied en train de photographier le reste de la famille. Et il est vraiment venu par curiosité à deux mètres en train de renifler mon appareil photo. Et ça, ça a été un moment exceptionnel, unique, vraiment qui m'a marqué. J'avais le cœur qui battait, mais ce n'était pas de la peur. J'étais heureux. Après, parfois, si les éléphants peuvent être… Un côté un peu terrifiant, mais pas quand ils te chargent, mais quand volontairement ils veulent te faire peur. Ça, ça m'est arrivé une fois. Mais sinon, non, j'ai toujours eu la chance de m'entourer un peu de guides professionnels. Ça, c'est très important pour mes tournages et pour mes reportages. Donc non, je n'ai pas peur.

  • Speaker #1

    Et est-ce qu'à l'inverse, tu as déjà mis des animaux en danger par ta présence, par la présence de ta voiture ou de ton guide ? Le fait de t'approcher fort ? Ou est-ce que tu as roulé déjà sur un animal ?

  • Speaker #0

    Non, jamais. Mon Dieu. Jamais, jamais.

  • Speaker #1

    Mais sans faire exprès, bien sûr. Un porc épique, une tortue, je ne sais pas.

  • Speaker #0

    Non, non, non, jamais. Peut-être qu'en passant en voiture, je ne sais pas, tu as un chacal qui dort à quelques mètres de la route et tu ne le vois pas. Et puis, il passe en voiture. Et du coup, ça le réveille, ça le dérange. Mais je ne sais pas. Je n'ai pas le... Non, je n'ai pas trop de souvenirs de ça. Mais en fait, il y a aussi un truc, c'est que comme je travaille avec ce qu'on appelle des longues focales, donc des grands zooms, je dis toujours à mon guide, ça ne sert à rien de s'approcher trop de l'animal. Déjà parce qu'en plus, si on s'approche trop, on ne va pas avoir le comportement naturel de l'animal. Et en fait, ce qui est intéressant en photo et en vidéo, c'est d'avoir une palette d'attitudes variées et différentes. Et donc, pour toutes ces raisons, je me... À part quand je suis avec des clients et que c'est intéressant pour eux de voir l'animal à 5-6 mètres, on s'approche, mais après je leur dis, écoutez, ça vous dit, on prend nos distances, on se met derrière un buisson, on fait en sorte qu'ils nous voient, mais qu'on ne les dérange pas, et on attend, on attend, on attend, on attend. Et en fait, les moments les plus émouvants, c'est quand on a attendu 3 heures que des lions étaient en train de dormir et qu'ils commencent petit à petit à se lever. Et là encore, lors d'un tournage au Botswana le mois dernier, on a attendu... longtemps que trois malions qui étaient en train de dormir mais profondément se lèvent et quand ils se sont levés on les a suivis pendant pendant deux heures et en pleine nuit et c'était incroyable incroyable quel

  • Speaker #1

    est ton super pouvoir en tant que photographe qu'est ce qui te différencie des autres photographes chacune des réponses serait prétentieuse

  • Speaker #0

    Peut-être... Oh non, je ne sais pas.

  • Speaker #1

    Tes connaissances, mine de rien, tu étais sur le terrain depuis très longtemps.

  • Speaker #0

    Alors, les connaissances, j'ose espérer que chaque photographe animalier a des connaissances du monde animal et qui ne fait pas que de la photo. C'est quand même le B.A.B. Peut-être effectivement le fait d'y être depuis plus de 20 ans. Le fait d'avoir grandi avec la nature, d'avoir grandi avec la savane, le désert. Peut-être que c'est ça ma différence par rapport aux autres. Après, c'est un milieu où... Moi, je l'ai découvert il n'y a pas longtemps. C'est un milieu très dur où chaque photographe a l'impression que l'autre est un concurrent. Et vraiment, ce n'est pas... Oui, non, ce n'est vraiment pas un milieu sympathique. Et en fait, moi, je me sens un peu différent parce qu'aujourd'hui, j'arrive à vivre des réseaux sociaux grâce à la photographie animalière, de mes reportages. et j'ai même le luxe aujourd'hui de choisir mes projets, donc ça c'est extraordinaire, mais 95% des photographes animaliers, ils vont vendre deux photos à un magazine, ils vont vivre avec 800 euros par mois, et du coup ils voient l'autre comme un concurrent, parce qu'il va lui prendre un touriste sur un stage, et donc ça c'est vraiment un monde, je l'ai découvert il y a deux ans, et c'est un monde que je n'aime pas, c'est un monde que je ne comprends pas, où pareil tu as toute une ancienne génération, qui eux alors eux ça leur pose pas de problème de nourrir les animaux et de les prendre en photo ça c'est vraiment le dernier de leurs soucis t'en as même un qui m'a montré des photos d'un martin pêcheur exceptionnel je suis comme comment t'as fait ça ? en fait il m'explique qu'il place des pièges ou en fait des sortes d'aquarium où tu vois pas les bords qui est mis genre vraiment en dessous de la surface il met des poissons comme ça les poissons peuvent pas s'en aller et du coup il sait exactement où le martin pêcheur va pêcher sauf que parfois le Martin Pescher se tape contre le fond de l'aquarium et se casse le bec. et donc lui en fait cette personne ça lui posait aucun problème alors il montrait ses photos de lui en affût et tout mais c'est ridicule enfin voilà on est vraiment déjà sur deux générations qui n'ont pas du tout la même vision de voir le monde sauvage et on est aussi sur deux générations qui ne se comprennent pas sur ce que va devenir la photographie animalière et le reportage animalier et du coup moi vraiment je tends à éviter un peu ce monde les festivals tout ça ... Et par chance, je n'ai pas besoin de visibilité, je n'ai pas besoin des festivals pour vivre de ma passion. Et ça, c'est extraordinaire. Pourvu que ça dure. Ça se trouve, on fait le même call l'année prochaine. Je t'annonce que j'essaye d'aller dans tous les festivals de photographie animalière. Mais je ne crois pas. Je crois vraiment que j'ai la chance d'avoir une communauté très bienveillante, super gentille, qui me suit, qui aime mon travail. Et ça, ça donne énormément de force. Et moi, je préfère me concentrer sur eux que sur le secteur.

  • Speaker #1

    Et comment tu as créé justement cette communauté, ta carrière ? Est-ce que tu avais un mentor ? Tu avais quelqu'un qui t'inspirait ?

  • Speaker #0

    Alors moi, j'ai voulu faire ce métier le jour où j'ai reçu un livre de Steve Bloom, qui est un photographe animalier anglais. Et j'ai trouvé ses photos exceptionnelles. Et encore aujourd'hui, il m'inspire beaucoup dans ma manière de prendre des photos. Pour moi, c'est... Mon maître absolu, c'est vraiment le gars exceptionnel. Après, sur les réseaux sociaux, moi, je vais être très clair, ce n'est pas grâce à mes photos que j'ai eu autant d'abonnés. Ce n'est pas par la qualité de mes photos que j'ai autant d'abonnés. Il y a des photographes animaliers qui sont bien meilleurs que moi et qui n'ont pas cette communauté. Je crois que c'est parce que j'incarne mes contenus, parce que si je… Je montre les coulisses parce que j'ai inventé une façon de raconter aussi le monde sauvage, le monde animal. Et ça, je crois que ça plaît et que j'offrais quelque chose où il y avait une demande a priori. Je pense que c'est aussi simple que ça.

  • Speaker #1

    Est-ce que tu aurais des conseils à donner justement à quelqu'un qui veut se lancer en tant que photographe animalier ?

  • Speaker #0

    Tout simplement de prendre son appareil photo et de sortir, voyager, aller dans les endroits. un peu sauvage, ça peut être à 10 km de chez soi, dans un champ, dans une petite forêt. Aujourd'hui, on peut, par exemple, aller photographier les chevreuils, les renards. Les renards, c'est un animal incroyable à photographier, les écureuils. Il y a des lynx qui sont plus faciles à voir, par exemple, en Espagne. Donc, vraiment, il y a plein de façons de devenir photographe animalier et toujours se poser la question aussi parce qu'il y a une réalité financière. qui a besoin de photographie animalière ? Est-ce que c'est les magazines ? Est-ce que c'est les gouvernements ? Est-ce que c'est des galeries d'exposition ? Donc réfléchir aussi à sa carrière en faisant ce métier, parce que c'est un métier, c'est pas qu'un hobby, contrairement à ce que pensaient mes parents.

  • Speaker #1

    Et est-ce que maintenant ça te plaît toujours autant, justement le fait que ton hobby soit devenu, ta passion soit devenue ton métier, avec la pression financière, etc. Est-ce que ça te plaît toujours autant ?

  • Speaker #0

    Oui, par chance, je touche du bois pourvu que ça dure, mais je n'ai plus cette pression financière. Bien sûr, je ne suis pas multimillionnaire, ça ne marche pas comme ça, la photographie est une manière, mais je peux choisir mes projets. Donc ça, c'est super intéressant. Et oui, j'espère garder cette passion le plus longtemps possible. Mais ça, malheureusement, on ne peut pas savoir. Ça se trouve un jour... Je vais avoir la flemme de me lever pour photographier un léopard. Je vais avoir envie de me coucher plus tôt pour éviter de faire un safari. Ça, j'espère que ça n'arrivera jamais. Ça n'arrive pas pour le moment, mais on ne sait jamais. On ne sait jamais de quoi sera fait nos passions et notre cerveau dans les années à venir. Est-ce que tu peux nous parler de ton prochain projet s'il existe ? Que ce soit en tant que voyage ou documentaire, est-ce que tu as des livres aussi ? Je vois que tu avais déjà sorti un livre il y a quelques temps.

  • Speaker #1

    Oui, j'ai sorti effectivement mon premier livre, Green and Wild, il y a plus de deux ans maintenant. Et là, le deuxième sort... Alors, je ne sais pas quand ce podcast va sortir, mais les précommandes seront possibles le 2 juin. donc ça serait incroyable que ce podcast sorte après le 2 juin ouais on va voir si ça arrive trop bien et donc c'est un livre très important parce que il reprend vraiment c'est un livre donc Orange and Wild sur les déserts et les savannes et il reprend vraiment peut-être mes plus belles photos au cours de ces 12 dernières années et donc au moment où je faisais la composition de ce livre je me suis dit mais il va faire 1000 pages ce livre c'est pas possible et donc j'ai dû choisir vraiment le Le mieux du mieux, le top du top. Et en fait, vous allez découvrir énormément de photos qui ne sont pas sur mes réseaux sociaux. Parce que sur mes réseaux sociaux, je privilégie plutôt le format vertical. Et là, en fait, sur un livre qui fait 30-32 cm, l'idée, c'était vraiment de vous immerger le plus possible avec plein de petites histoires. Et donc, on a vraiment des très belles photos horizontales, pas que, mais on a aussi des histoires que je n'ai jamais racontées. Et j'ai essayé vraiment de passer du temps à l'écrire. pour trouver les mots qui immergent le plus possible. Et sinon, pour annoncer la sortie de ce livre, il y a un documentaire qui va sortir sur ma chaîne YouTube et qui parle de ma dernière séance photo, de mon dernier shooting qui me permet de refermer ce livre.

  • Speaker #0

    Et le documentaire, il sort quand ?

  • Speaker #1

    J'espère qu'il va sortir le 2 juin. Enfin, j'espère qu'il va sortir plus ou moins dans la même semaine que la sortie des précommandes. Ok,

  • Speaker #0

    parfait. Comment tu vois ton futur ? Toujours des voyages, des livres, des documentaires ?

  • Speaker #1

    Mon futur ? Mon futur ? Oui, toujours des documentaires, toujours des livres.

  • Speaker #0

    Dans quelle sorte ça peut évoluer ?

  • Speaker #1

    Peut-être... Avoir des projets de documentaires encore plus ambitieux, avec des plateformes de diffusion comme celles qu'on connaît, Netflix, Amazon, Disney, même si c'est très concurrentiel, mais avoir les moyens de créer vraiment de belles épopées sur les animaux du monde et de raconter vraiment de belles histoires. Je pense qu'aujourd'hui, la télévision a loupé le virage du digital et des créateurs de contenu. Et je pense maintenant que les plateformes peuvent offrir un storytelling adapté à Internet.

  • Speaker #0

    C'est tout ce que je te souhaite alors.

  • Speaker #1

    Merci.

  • Speaker #0

    Merci beaucoup, Mathieu.

  • Speaker #1

    Merci.

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