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Rencontres sauvages

Rencontres sauvages avec Tamara Kostianovsky, artiste (S2-E8)

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15min |15/05/2024
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Rencontres sauvages avec Tamara Kostianovsky, artiste (S2-E8)

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15min |15/05/2024
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Description

« Avec cette palette de couleurs, je cherche à donner un aspect anthropomorphique aux arbres pour montrer qu’ils font partie de nous et que nous pouvons entrer en connexion directe avec eux, comme des pairs. »


Pour ce nouvel épisode, "Rencontres sauvages" nous fait découvrir le travail de Tamara Kostianovsky, exposée au musée de la Chasse et de la Nature jusqu'au 3 novembre 2023. Tout commence par la réception d'un étrange colis contenant un faisan, qui se révèlera fondateur dans son processus créatif et dans son lien avec le monde sauvage...



Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Rencontre sauvage avec l'artiste Tamara Kostianowski, un podcast du musée de la chasse et de la nature. Tamara Kostianowski, que signifient pour vous les termes de rencontre sauvage ?

  • Speaker #1

    Quand je pense à ces mots de rencontre sauvage,

  • Speaker #2

    la première chose qui me vient en tête, c'est une anecdote. J'ai créé énormément d'œuvres qui mettent en scène des carcasses, des carcasses de vaches. parce que j'ai grandi en Argentine et que c'est une image qui a toujours été très présente pour moi. Ça fait partie de notre identité nationale. C'est même dans l'icône une représentation de la fierté nationale argentine. Et j'ai créé plusieurs de ces carcasses. Et au fil du temps, c'est finalement une amie proche qui m'a suggéré de les agrémenter de plumes. Donc j'ai commandé sur eBay des plumes en tissu pour ces carcasses-là. Je m'attendais à recevoir une petite enveloppe qui contiendrait quelques plumes. Et c'est un gros carton qui est arrivé par le courrier, qui m'a semblé un peu louche. Ce n'était pas ce à quoi je m'attendais. Et du coup, j'ai attendu quelques jours pour retrouver le courage d'ouvrir ce carton. Effectivement, à l'intérieur, ce ne sont pas des plumes que j'ai trouvées, mais un faisan qui venait tout juste d'être chassé, d'être tué. J'ai surmonté l'horreur de trouver ce cadavre d'oiseau qui arrivait comme ça dans mon atelier. Je l'ai attrapé par les pattes, je l'ai posé sur ma table de travail. Et là, j'ai vécu une expérience assez magique, presque transcendantale. Il y avait quelque chose d'infiniment beau dans ces plumes iridescentes qui m'ont immédiatement fascinée. J'avais presque l'impression de voir la queue d'un arc-en-ciel comme une sorte d'image fantasmée. qu'on n'a jamais eu l'occasion de voir réellement. Et en même temps, il y avait quelque chose d'incroyablement dramatique dans le fait d'avoir cet animal mort sur ma table de travail. J'ai produit énormément d'œuvres qui traitent de la chair, qui abordent la question de la chair humaine, qui la mettent en scène. Ce sont des images qui me viennent aussi de mon propre vécu, d'avoir dans le cabinet de mon père notamment, qui était chirurgien, et auprès de qui j'ai été stagiaire quand j'étais jeune fille. vu cette chair humaine, mais je n'avais jamais été confrontée à une chair morte. C'était la première fois que j'étais face à un animal mort. J'ai contemplé cet oiseau pendant quelques minutes et puis je l'ai pris par les pattes et je l'ai suspendu à un de ces crochets que j'utilisais justement pour créer ces œuvres carcasses. Et là, il y a eu un nouveau moment de magie au moment où les ailes de l'oiseau se sont ouvertes, se sont déployées, presque comme l'image d'une crucifixion. Et encore une fois, en Argentine, qui est un pays extrêmement catholique, enfant, mon quotidien était complètement peuplé, rempli d'images de la crucifixion. Et donc ça a été vraiment un moment tout à fait unique. C'était à la fois un oiseau, un oiseau mort dans mon atelier, mais pas seulement. C'était aussi quelque chose de complètement sublime. Et c'est ça, ma première rencontre avec la nature sauvage, même si c'était un animal qui était mort cette fois.

  • Speaker #0

    Ça me fait penser au titre de votre exposition, La chair du monde. Est-ce que finalement, la chair, ce n'est pas un moyen pour vous d'entrer en contact de manière sensible, par le toucher, avec la nature et l'art que vous réunissez dans vos œuvres ?

  • Speaker #1

    Oui, je pense à la chair comme un véhicule.

  • Speaker #2

    Oui, pour moi, la chair, c'est vraiment le vaisseau et le sujet même de toutes mes œuvres. Pour moi, notre existence, mon existence et notre existence à tous, elle s'accomplit par le corps. Et donc cette obsession que j'ai des oiseaux, des vaches, des arbres, etc., ce que je recherche en fait, c'est justement cet élément de chair qui est pour moi le très commun à tous les êtres vivants. Par exemple, quand je fais une carcasse de vache, ou une souche d'arbre, ou une carcasse d'oiseau, Tout ça, ce sont des animaux morts, mais il y a un fil conducteur qui est l'utilisation du tissu, qui est l'utilisation même plus précisément du textile, dont une grande partie est recyclée. Donc en fait, c'est un matériau humain dont je me sers pour recréer ces carcasses, qui est encore une fois une manière de mettre en lumière le point commun qui relie tous ces êtres vivants.

  • Speaker #0

    Est-ce que vous pourriez nous décrire votre travail ? Parce que lorsque l'on voit par exemple une souche d'arbre, une carcasse, un oiseau, ils sont donc fabriqués à partir de tissus. Et je pense peut-être plus précisément aux souches d'arbre, on a presque l'impression au niveau des couleurs de voir à l'intérieur d'un corps. Il y a quelque chose qui est presque viscéral.

  • Speaker #2

    Quand j'avais à peu près 19 ans, j'ai commencé à étudier les beaux-arts et donc on me donnait des devoirs assez classiques pour les étudier en art. Je devais peindre des natures mortes ou des modèles vivants. Mais à peu près au même moment, on est dans les années 80 en Argentine, mon père était un chirurgien esthétique. Et je me suis dit que ce serait bien pour moi d'avoir quand même une petite idée de ce que c'était que le monde du travail. Et donc je suis allée... Travailler dans son cabinet, non pas tant pour assister moi-même ou participer aux chirurgies, bien sûr, mais pour faire le café, répondre au téléphone, ouvrir la porte. et à cet endroit-là, j'ai découvert le monde qui se trouve au-delà de la peau, qui se trouve sous la peau des humains. Quand la peau se déchire, ce qu'elle révèle en dessous, la couche de graisse, les ligaments, les os parfois, et tout ça révélait une palette de couleurs qui m'a énormément marquée. Et c'était vraiment exactement au même moment que je vivais mes années d'éducation à l'art à l'école de Beaux-Arts où j'étais. C'est presque comme si j'avais découvert et appris l'univers artistique au travers de cette palette de l'anatomie humaine. Et c'est cette palette-là, vous avez tout à fait raison, que j'utilise dans absolument toutes mes œuvres. Et c'est pour ça qu'à l'intérieur de mes arbres, on voit les couleurs des entrailles d'un corps humain. C'est encore une fois une manière de souligner ce qui unit tous les êtres vivants. et de montrer qu'on ne fait qu'un avec la nature. S'il faut protéger l'environnement, ce n'est pas juste parce que c'est bon pour nous, c'est parce que l'environnement, c'est nous.

  • Speaker #0

    Dans votre exposition, vous proposez dans une première pièce une sorte de balade dans la forêt. On peut voir des troncs d'arbres,

  • Speaker #2

    des souches,

  • Speaker #0

    il y a la coupe d'un séquoia. Qu'est-ce que vous voulez nous donner comme sensation, que ce soit au niveau des yeux ou peut-être même au niveau du toucher ?

  • Speaker #1

    Oui.

  • Speaker #2

    Les œuvres qui sont présentées dans le principal espace d'exposition sont directement inspirées par une rencontre avec la nature que j'ai eue en me promenant dans les jardins botaniques de Brooklyn. Il y avait un arbre qui avait été abattu par les jardiniers parce qu'il était malade et il s'était dit... que c'était une bonne idée de l'ouvrir, justement, de montrer l'intérieur de cet arbre pour le public, pour les scientifiques. Et c'est vraiment ça qui inspire directement ma sculpture, qui est tout à fait similaire à ce que j'ai vu ce jour-là. Et à la question, effectivement, de la texture, des couleurs dont on a parlé, avec les arbres en particulier, ce que j'essaie de faire, c'est d'avoir, justement, par l'utilisation de cette palette de couleurs, un aspect anthropomorphique, de montrer que ces arbres ne sont pas extérieurs à nous, ils font partie de nous. de nous et donc on peut entrer en relation directe et en connexion directe avec ces arbres comme si on était des pères. J'ai commencé à créer ces arbres après la mort de mon père qui est parti en 2017. Très souvent quand on perd un membre de sa famille, une des questions qui se posent c'est que faire de ses vêtements, de sa garde-robe qui reste. J'ai réfléchi assez longtemps et le premier arbre que j'ai créé, je l'ai créé justement avec les vêtements de mon père, qui sur la fin de sa vie avait pris sa retraite et consacré tout son temps à son jardin. Donc c'était une manière de lui ériger une sorte de monument, de lui rendre hommage et de le garder en vie aussi, parce qu'à travers ces tissus-là, c'est presque le tissu véritablement de mon père, ces cellules en quelque sorte qui demeurent en vie et qui restent présentes dans mon existence. et aussi peut-être dans celle des visiteurs de l'exposition. Bien sûr, on peut entendre cette histoire-là comme celle d'une fille loyale qui honore son père, une bonne fille. Et bien évidemment, c'était un parent qui a été formidable et envers qui j'ai énormément de gratitude. Mais il y a aussi un contre-courant sous-jacent que l'on peut ressentir. qu'il y ait aussi celui du symbole phallique de l'arbre, qui est aussi le symbole du pénis. Donc quelque part, une forme de castration aussi dans cet hommage, ça a du sens aussi pour moi. Peut-être que d'une certaine façon, il faut tuer le père pour trouver sa propre voix. Et je pense que ça peut exister en même temps que l'hommage, que l'honneur rendu à mon père.

  • Speaker #0

    Est-ce que vous pourriez nous décrire une de vos souches d'arbres et comment vous la sculptez ?

  • Speaker #1

    Les souches font partie des œuvres les plus complexes parmi toutes les œuvres que j'ai pu créer.

  • Speaker #2

    Je commence toujours par prendre des photos d'arbres morts. J'ai une certaine obsession pour les photos d'arbres morts. Je les collectionne, j'en ai des centaines, des dossiers entiers dans mon atelier. Et une fois que j'ai une idée de l'aspect que je veux donner à ma sculpture d'arbres, Je crée d'abord une maquette, un modèle en 3D, et ensuite je construis la structure en bois, de façon assez paradoxale. Et puis une fois que la structure, la charpente est faite, j'ajoute dessus du grillage, celui des poulaillers, pour créer une forme plus organique. C'est ce qui va me permettre vraiment de donner une forme plus souple. Et ensuite, par-dessus, je pose une première peau. qui est en tissu, mais avec des tissus assez légers, des draps de mauvaise qualité. C'est vraiment une première enveloppe qui a vocation à donner une uniformité à la sculpture. Ensuite, seulement, j'ajoute par-dessus les velours, les tissus récupérés sur mes vêtements. Et ce que vous verrez, la dernière couche, c'est ça qui sera visible dans l'exposition. Il y a toute une structure complexe en dessous de la surface. Mes arbres... On voit toujours qu'ils ont été tués, abattus de façon mécanique, c'est-à-dire qu'ils ont été sciés, houpés à la hache. Ce ne sont pas des arbres qui sont morts de mort naturelle. Il y a un lien avec la violence qui est là aussi le fil conducteur entre toutes mes créations, que ce soit les carcasses de vaches ou d'oiseaux. Il y a toujours la main de l'homme qui intervient pour tuer l'être vivant dont il est question.

  • Speaker #0

    Il y a aussi un autre fil rouge qui semble parcourir toute votre œuvre, c'est l'idée du cycle de la Renaissance, je dirais même de la métamorphose. Je pense notamment aux carcasses que vous pouvez exposer au musée de la chasse et de la nature, où dans les carcasses, on voit qu'il y a, qui est donc par nature, est morte, on voit la vie qui apparaît à travers des oiseaux, des végétaux. Et vous utilisez, votre mode aussi d'expression, ce sont ces vêtements recyclés. Donc l'idée du cycle est importante aussi dans votre travail ?

  • Speaker #1

    Oui,

  • Speaker #2

    c'est important pour moi que dans chaque œuvre, il y ait la place pour une forme de renaissance. Ça fait dix ans que je travaille, que je produis des œuvres et j'ai participé à plusieurs expositions autour des pratiques environnementales dans l'art. Aux Etats-Unis, quand on parle d'environnement aujourd'hui, il y a un courant très fort qui est assez moraliste finalement, un moralisateur, qui dit tout ce qu'il ne faut pas faire. Il ne faut pas allumer la lumière, il ne faut pas se racheter des vêtements neufs, etc. Mais c'est aussi assez négatif et en fait, dans mon travail, ce que j'essaie de faire est une approche plus utopique. de trouver quelque chose de positif dans une mort qui pourrait se transformer en espace de renaissance, en espace qui permette justement de redonner la vie à quelque chose.

  • Speaker #0

    Finalement, vos œuvres permettent d'avoir quel type de relation à la nature ?

  • Speaker #2

    C'est vraiment l'idée de ne pas voir la nature, de ne pas considérer la nature comme quelque chose qui est extérieur à nous. de considérer en fait que nous faisons partie de la nature et que la nature fait partie de nous. Quand le spectateur, quand le visiteur découvre dans cette exposition des silhouettes qui rappellent le corps humain, qui sont fabriquées à partir de vêtements portés par des humains, ce que j'espère, c'est que ça permet justement d'atteindre cette unification du paradigme, cette unité de comprendre que nous faisons partie de la nature et que la nature fait partie de nous.

  • Speaker #0

    C'était Rencontre Sauvage avec l'artiste Tamara Kostianowski pour son exposition La chair du monde. Traduction Marguerite Capelle, un podcast du Musée de la Chasse et de la Nature réalisé par Céline Duchesnet et Laurent Polret.

Description

« Avec cette palette de couleurs, je cherche à donner un aspect anthropomorphique aux arbres pour montrer qu’ils font partie de nous et que nous pouvons entrer en connexion directe avec eux, comme des pairs. »


Pour ce nouvel épisode, "Rencontres sauvages" nous fait découvrir le travail de Tamara Kostianovsky, exposée au musée de la Chasse et de la Nature jusqu'au 3 novembre 2023. Tout commence par la réception d'un étrange colis contenant un faisan, qui se révèlera fondateur dans son processus créatif et dans son lien avec le monde sauvage...



Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Rencontre sauvage avec l'artiste Tamara Kostianowski, un podcast du musée de la chasse et de la nature. Tamara Kostianowski, que signifient pour vous les termes de rencontre sauvage ?

  • Speaker #1

    Quand je pense à ces mots de rencontre sauvage,

  • Speaker #2

    la première chose qui me vient en tête, c'est une anecdote. J'ai créé énormément d'œuvres qui mettent en scène des carcasses, des carcasses de vaches. parce que j'ai grandi en Argentine et que c'est une image qui a toujours été très présente pour moi. Ça fait partie de notre identité nationale. C'est même dans l'icône une représentation de la fierté nationale argentine. Et j'ai créé plusieurs de ces carcasses. Et au fil du temps, c'est finalement une amie proche qui m'a suggéré de les agrémenter de plumes. Donc j'ai commandé sur eBay des plumes en tissu pour ces carcasses-là. Je m'attendais à recevoir une petite enveloppe qui contiendrait quelques plumes. Et c'est un gros carton qui est arrivé par le courrier, qui m'a semblé un peu louche. Ce n'était pas ce à quoi je m'attendais. Et du coup, j'ai attendu quelques jours pour retrouver le courage d'ouvrir ce carton. Effectivement, à l'intérieur, ce ne sont pas des plumes que j'ai trouvées, mais un faisan qui venait tout juste d'être chassé, d'être tué. J'ai surmonté l'horreur de trouver ce cadavre d'oiseau qui arrivait comme ça dans mon atelier. Je l'ai attrapé par les pattes, je l'ai posé sur ma table de travail. Et là, j'ai vécu une expérience assez magique, presque transcendantale. Il y avait quelque chose d'infiniment beau dans ces plumes iridescentes qui m'ont immédiatement fascinée. J'avais presque l'impression de voir la queue d'un arc-en-ciel comme une sorte d'image fantasmée. qu'on n'a jamais eu l'occasion de voir réellement. Et en même temps, il y avait quelque chose d'incroyablement dramatique dans le fait d'avoir cet animal mort sur ma table de travail. J'ai produit énormément d'œuvres qui traitent de la chair, qui abordent la question de la chair humaine, qui la mettent en scène. Ce sont des images qui me viennent aussi de mon propre vécu, d'avoir dans le cabinet de mon père notamment, qui était chirurgien, et auprès de qui j'ai été stagiaire quand j'étais jeune fille. vu cette chair humaine, mais je n'avais jamais été confrontée à une chair morte. C'était la première fois que j'étais face à un animal mort. J'ai contemplé cet oiseau pendant quelques minutes et puis je l'ai pris par les pattes et je l'ai suspendu à un de ces crochets que j'utilisais justement pour créer ces œuvres carcasses. Et là, il y a eu un nouveau moment de magie au moment où les ailes de l'oiseau se sont ouvertes, se sont déployées, presque comme l'image d'une crucifixion. Et encore une fois, en Argentine, qui est un pays extrêmement catholique, enfant, mon quotidien était complètement peuplé, rempli d'images de la crucifixion. Et donc ça a été vraiment un moment tout à fait unique. C'était à la fois un oiseau, un oiseau mort dans mon atelier, mais pas seulement. C'était aussi quelque chose de complètement sublime. Et c'est ça, ma première rencontre avec la nature sauvage, même si c'était un animal qui était mort cette fois.

  • Speaker #0

    Ça me fait penser au titre de votre exposition, La chair du monde. Est-ce que finalement, la chair, ce n'est pas un moyen pour vous d'entrer en contact de manière sensible, par le toucher, avec la nature et l'art que vous réunissez dans vos œuvres ?

  • Speaker #1

    Oui, je pense à la chair comme un véhicule.

  • Speaker #2

    Oui, pour moi, la chair, c'est vraiment le vaisseau et le sujet même de toutes mes œuvres. Pour moi, notre existence, mon existence et notre existence à tous, elle s'accomplit par le corps. Et donc cette obsession que j'ai des oiseaux, des vaches, des arbres, etc., ce que je recherche en fait, c'est justement cet élément de chair qui est pour moi le très commun à tous les êtres vivants. Par exemple, quand je fais une carcasse de vache, ou une souche d'arbre, ou une carcasse d'oiseau, Tout ça, ce sont des animaux morts, mais il y a un fil conducteur qui est l'utilisation du tissu, qui est l'utilisation même plus précisément du textile, dont une grande partie est recyclée. Donc en fait, c'est un matériau humain dont je me sers pour recréer ces carcasses, qui est encore une fois une manière de mettre en lumière le point commun qui relie tous ces êtres vivants.

  • Speaker #0

    Est-ce que vous pourriez nous décrire votre travail ? Parce que lorsque l'on voit par exemple une souche d'arbre, une carcasse, un oiseau, ils sont donc fabriqués à partir de tissus. Et je pense peut-être plus précisément aux souches d'arbre, on a presque l'impression au niveau des couleurs de voir à l'intérieur d'un corps. Il y a quelque chose qui est presque viscéral.

  • Speaker #2

    Quand j'avais à peu près 19 ans, j'ai commencé à étudier les beaux-arts et donc on me donnait des devoirs assez classiques pour les étudier en art. Je devais peindre des natures mortes ou des modèles vivants. Mais à peu près au même moment, on est dans les années 80 en Argentine, mon père était un chirurgien esthétique. Et je me suis dit que ce serait bien pour moi d'avoir quand même une petite idée de ce que c'était que le monde du travail. Et donc je suis allée... Travailler dans son cabinet, non pas tant pour assister moi-même ou participer aux chirurgies, bien sûr, mais pour faire le café, répondre au téléphone, ouvrir la porte. et à cet endroit-là, j'ai découvert le monde qui se trouve au-delà de la peau, qui se trouve sous la peau des humains. Quand la peau se déchire, ce qu'elle révèle en dessous, la couche de graisse, les ligaments, les os parfois, et tout ça révélait une palette de couleurs qui m'a énormément marquée. Et c'était vraiment exactement au même moment que je vivais mes années d'éducation à l'art à l'école de Beaux-Arts où j'étais. C'est presque comme si j'avais découvert et appris l'univers artistique au travers de cette palette de l'anatomie humaine. Et c'est cette palette-là, vous avez tout à fait raison, que j'utilise dans absolument toutes mes œuvres. Et c'est pour ça qu'à l'intérieur de mes arbres, on voit les couleurs des entrailles d'un corps humain. C'est encore une fois une manière de souligner ce qui unit tous les êtres vivants. et de montrer qu'on ne fait qu'un avec la nature. S'il faut protéger l'environnement, ce n'est pas juste parce que c'est bon pour nous, c'est parce que l'environnement, c'est nous.

  • Speaker #0

    Dans votre exposition, vous proposez dans une première pièce une sorte de balade dans la forêt. On peut voir des troncs d'arbres,

  • Speaker #2

    des souches,

  • Speaker #0

    il y a la coupe d'un séquoia. Qu'est-ce que vous voulez nous donner comme sensation, que ce soit au niveau des yeux ou peut-être même au niveau du toucher ?

  • Speaker #1

    Oui.

  • Speaker #2

    Les œuvres qui sont présentées dans le principal espace d'exposition sont directement inspirées par une rencontre avec la nature que j'ai eue en me promenant dans les jardins botaniques de Brooklyn. Il y avait un arbre qui avait été abattu par les jardiniers parce qu'il était malade et il s'était dit... que c'était une bonne idée de l'ouvrir, justement, de montrer l'intérieur de cet arbre pour le public, pour les scientifiques. Et c'est vraiment ça qui inspire directement ma sculpture, qui est tout à fait similaire à ce que j'ai vu ce jour-là. Et à la question, effectivement, de la texture, des couleurs dont on a parlé, avec les arbres en particulier, ce que j'essaie de faire, c'est d'avoir, justement, par l'utilisation de cette palette de couleurs, un aspect anthropomorphique, de montrer que ces arbres ne sont pas extérieurs à nous, ils font partie de nous. de nous et donc on peut entrer en relation directe et en connexion directe avec ces arbres comme si on était des pères. J'ai commencé à créer ces arbres après la mort de mon père qui est parti en 2017. Très souvent quand on perd un membre de sa famille, une des questions qui se posent c'est que faire de ses vêtements, de sa garde-robe qui reste. J'ai réfléchi assez longtemps et le premier arbre que j'ai créé, je l'ai créé justement avec les vêtements de mon père, qui sur la fin de sa vie avait pris sa retraite et consacré tout son temps à son jardin. Donc c'était une manière de lui ériger une sorte de monument, de lui rendre hommage et de le garder en vie aussi, parce qu'à travers ces tissus-là, c'est presque le tissu véritablement de mon père, ces cellules en quelque sorte qui demeurent en vie et qui restent présentes dans mon existence. et aussi peut-être dans celle des visiteurs de l'exposition. Bien sûr, on peut entendre cette histoire-là comme celle d'une fille loyale qui honore son père, une bonne fille. Et bien évidemment, c'était un parent qui a été formidable et envers qui j'ai énormément de gratitude. Mais il y a aussi un contre-courant sous-jacent que l'on peut ressentir. qu'il y ait aussi celui du symbole phallique de l'arbre, qui est aussi le symbole du pénis. Donc quelque part, une forme de castration aussi dans cet hommage, ça a du sens aussi pour moi. Peut-être que d'une certaine façon, il faut tuer le père pour trouver sa propre voix. Et je pense que ça peut exister en même temps que l'hommage, que l'honneur rendu à mon père.

  • Speaker #0

    Est-ce que vous pourriez nous décrire une de vos souches d'arbres et comment vous la sculptez ?

  • Speaker #1

    Les souches font partie des œuvres les plus complexes parmi toutes les œuvres que j'ai pu créer.

  • Speaker #2

    Je commence toujours par prendre des photos d'arbres morts. J'ai une certaine obsession pour les photos d'arbres morts. Je les collectionne, j'en ai des centaines, des dossiers entiers dans mon atelier. Et une fois que j'ai une idée de l'aspect que je veux donner à ma sculpture d'arbres, Je crée d'abord une maquette, un modèle en 3D, et ensuite je construis la structure en bois, de façon assez paradoxale. Et puis une fois que la structure, la charpente est faite, j'ajoute dessus du grillage, celui des poulaillers, pour créer une forme plus organique. C'est ce qui va me permettre vraiment de donner une forme plus souple. Et ensuite, par-dessus, je pose une première peau. qui est en tissu, mais avec des tissus assez légers, des draps de mauvaise qualité. C'est vraiment une première enveloppe qui a vocation à donner une uniformité à la sculpture. Ensuite, seulement, j'ajoute par-dessus les velours, les tissus récupérés sur mes vêtements. Et ce que vous verrez, la dernière couche, c'est ça qui sera visible dans l'exposition. Il y a toute une structure complexe en dessous de la surface. Mes arbres... On voit toujours qu'ils ont été tués, abattus de façon mécanique, c'est-à-dire qu'ils ont été sciés, houpés à la hache. Ce ne sont pas des arbres qui sont morts de mort naturelle. Il y a un lien avec la violence qui est là aussi le fil conducteur entre toutes mes créations, que ce soit les carcasses de vaches ou d'oiseaux. Il y a toujours la main de l'homme qui intervient pour tuer l'être vivant dont il est question.

  • Speaker #0

    Il y a aussi un autre fil rouge qui semble parcourir toute votre œuvre, c'est l'idée du cycle de la Renaissance, je dirais même de la métamorphose. Je pense notamment aux carcasses que vous pouvez exposer au musée de la chasse et de la nature, où dans les carcasses, on voit qu'il y a, qui est donc par nature, est morte, on voit la vie qui apparaît à travers des oiseaux, des végétaux. Et vous utilisez, votre mode aussi d'expression, ce sont ces vêtements recyclés. Donc l'idée du cycle est importante aussi dans votre travail ?

  • Speaker #1

    Oui,

  • Speaker #2

    c'est important pour moi que dans chaque œuvre, il y ait la place pour une forme de renaissance. Ça fait dix ans que je travaille, que je produis des œuvres et j'ai participé à plusieurs expositions autour des pratiques environnementales dans l'art. Aux Etats-Unis, quand on parle d'environnement aujourd'hui, il y a un courant très fort qui est assez moraliste finalement, un moralisateur, qui dit tout ce qu'il ne faut pas faire. Il ne faut pas allumer la lumière, il ne faut pas se racheter des vêtements neufs, etc. Mais c'est aussi assez négatif et en fait, dans mon travail, ce que j'essaie de faire est une approche plus utopique. de trouver quelque chose de positif dans une mort qui pourrait se transformer en espace de renaissance, en espace qui permette justement de redonner la vie à quelque chose.

  • Speaker #0

    Finalement, vos œuvres permettent d'avoir quel type de relation à la nature ?

  • Speaker #2

    C'est vraiment l'idée de ne pas voir la nature, de ne pas considérer la nature comme quelque chose qui est extérieur à nous. de considérer en fait que nous faisons partie de la nature et que la nature fait partie de nous. Quand le spectateur, quand le visiteur découvre dans cette exposition des silhouettes qui rappellent le corps humain, qui sont fabriquées à partir de vêtements portés par des humains, ce que j'espère, c'est que ça permet justement d'atteindre cette unification du paradigme, cette unité de comprendre que nous faisons partie de la nature et que la nature fait partie de nous.

  • Speaker #0

    C'était Rencontre Sauvage avec l'artiste Tamara Kostianowski pour son exposition La chair du monde. Traduction Marguerite Capelle, un podcast du Musée de la Chasse et de la Nature réalisé par Céline Duchesnet et Laurent Polret.

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« Avec cette palette de couleurs, je cherche à donner un aspect anthropomorphique aux arbres pour montrer qu’ils font partie de nous et que nous pouvons entrer en connexion directe avec eux, comme des pairs. »


Pour ce nouvel épisode, "Rencontres sauvages" nous fait découvrir le travail de Tamara Kostianovsky, exposée au musée de la Chasse et de la Nature jusqu'au 3 novembre 2023. Tout commence par la réception d'un étrange colis contenant un faisan, qui se révèlera fondateur dans son processus créatif et dans son lien avec le monde sauvage...



Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

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  • Speaker #0

    Rencontre sauvage avec l'artiste Tamara Kostianowski, un podcast du musée de la chasse et de la nature. Tamara Kostianowski, que signifient pour vous les termes de rencontre sauvage ?

  • Speaker #1

    Quand je pense à ces mots de rencontre sauvage,

  • Speaker #2

    la première chose qui me vient en tête, c'est une anecdote. J'ai créé énormément d'œuvres qui mettent en scène des carcasses, des carcasses de vaches. parce que j'ai grandi en Argentine et que c'est une image qui a toujours été très présente pour moi. Ça fait partie de notre identité nationale. C'est même dans l'icône une représentation de la fierté nationale argentine. Et j'ai créé plusieurs de ces carcasses. Et au fil du temps, c'est finalement une amie proche qui m'a suggéré de les agrémenter de plumes. Donc j'ai commandé sur eBay des plumes en tissu pour ces carcasses-là. Je m'attendais à recevoir une petite enveloppe qui contiendrait quelques plumes. Et c'est un gros carton qui est arrivé par le courrier, qui m'a semblé un peu louche. Ce n'était pas ce à quoi je m'attendais. Et du coup, j'ai attendu quelques jours pour retrouver le courage d'ouvrir ce carton. Effectivement, à l'intérieur, ce ne sont pas des plumes que j'ai trouvées, mais un faisan qui venait tout juste d'être chassé, d'être tué. J'ai surmonté l'horreur de trouver ce cadavre d'oiseau qui arrivait comme ça dans mon atelier. Je l'ai attrapé par les pattes, je l'ai posé sur ma table de travail. Et là, j'ai vécu une expérience assez magique, presque transcendantale. Il y avait quelque chose d'infiniment beau dans ces plumes iridescentes qui m'ont immédiatement fascinée. J'avais presque l'impression de voir la queue d'un arc-en-ciel comme une sorte d'image fantasmée. qu'on n'a jamais eu l'occasion de voir réellement. Et en même temps, il y avait quelque chose d'incroyablement dramatique dans le fait d'avoir cet animal mort sur ma table de travail. J'ai produit énormément d'œuvres qui traitent de la chair, qui abordent la question de la chair humaine, qui la mettent en scène. Ce sont des images qui me viennent aussi de mon propre vécu, d'avoir dans le cabinet de mon père notamment, qui était chirurgien, et auprès de qui j'ai été stagiaire quand j'étais jeune fille. vu cette chair humaine, mais je n'avais jamais été confrontée à une chair morte. C'était la première fois que j'étais face à un animal mort. J'ai contemplé cet oiseau pendant quelques minutes et puis je l'ai pris par les pattes et je l'ai suspendu à un de ces crochets que j'utilisais justement pour créer ces œuvres carcasses. Et là, il y a eu un nouveau moment de magie au moment où les ailes de l'oiseau se sont ouvertes, se sont déployées, presque comme l'image d'une crucifixion. Et encore une fois, en Argentine, qui est un pays extrêmement catholique, enfant, mon quotidien était complètement peuplé, rempli d'images de la crucifixion. Et donc ça a été vraiment un moment tout à fait unique. C'était à la fois un oiseau, un oiseau mort dans mon atelier, mais pas seulement. C'était aussi quelque chose de complètement sublime. Et c'est ça, ma première rencontre avec la nature sauvage, même si c'était un animal qui était mort cette fois.

  • Speaker #0

    Ça me fait penser au titre de votre exposition, La chair du monde. Est-ce que finalement, la chair, ce n'est pas un moyen pour vous d'entrer en contact de manière sensible, par le toucher, avec la nature et l'art que vous réunissez dans vos œuvres ?

  • Speaker #1

    Oui, je pense à la chair comme un véhicule.

  • Speaker #2

    Oui, pour moi, la chair, c'est vraiment le vaisseau et le sujet même de toutes mes œuvres. Pour moi, notre existence, mon existence et notre existence à tous, elle s'accomplit par le corps. Et donc cette obsession que j'ai des oiseaux, des vaches, des arbres, etc., ce que je recherche en fait, c'est justement cet élément de chair qui est pour moi le très commun à tous les êtres vivants. Par exemple, quand je fais une carcasse de vache, ou une souche d'arbre, ou une carcasse d'oiseau, Tout ça, ce sont des animaux morts, mais il y a un fil conducteur qui est l'utilisation du tissu, qui est l'utilisation même plus précisément du textile, dont une grande partie est recyclée. Donc en fait, c'est un matériau humain dont je me sers pour recréer ces carcasses, qui est encore une fois une manière de mettre en lumière le point commun qui relie tous ces êtres vivants.

  • Speaker #0

    Est-ce que vous pourriez nous décrire votre travail ? Parce que lorsque l'on voit par exemple une souche d'arbre, une carcasse, un oiseau, ils sont donc fabriqués à partir de tissus. Et je pense peut-être plus précisément aux souches d'arbre, on a presque l'impression au niveau des couleurs de voir à l'intérieur d'un corps. Il y a quelque chose qui est presque viscéral.

  • Speaker #2

    Quand j'avais à peu près 19 ans, j'ai commencé à étudier les beaux-arts et donc on me donnait des devoirs assez classiques pour les étudier en art. Je devais peindre des natures mortes ou des modèles vivants. Mais à peu près au même moment, on est dans les années 80 en Argentine, mon père était un chirurgien esthétique. Et je me suis dit que ce serait bien pour moi d'avoir quand même une petite idée de ce que c'était que le monde du travail. Et donc je suis allée... Travailler dans son cabinet, non pas tant pour assister moi-même ou participer aux chirurgies, bien sûr, mais pour faire le café, répondre au téléphone, ouvrir la porte. et à cet endroit-là, j'ai découvert le monde qui se trouve au-delà de la peau, qui se trouve sous la peau des humains. Quand la peau se déchire, ce qu'elle révèle en dessous, la couche de graisse, les ligaments, les os parfois, et tout ça révélait une palette de couleurs qui m'a énormément marquée. Et c'était vraiment exactement au même moment que je vivais mes années d'éducation à l'art à l'école de Beaux-Arts où j'étais. C'est presque comme si j'avais découvert et appris l'univers artistique au travers de cette palette de l'anatomie humaine. Et c'est cette palette-là, vous avez tout à fait raison, que j'utilise dans absolument toutes mes œuvres. Et c'est pour ça qu'à l'intérieur de mes arbres, on voit les couleurs des entrailles d'un corps humain. C'est encore une fois une manière de souligner ce qui unit tous les êtres vivants. et de montrer qu'on ne fait qu'un avec la nature. S'il faut protéger l'environnement, ce n'est pas juste parce que c'est bon pour nous, c'est parce que l'environnement, c'est nous.

  • Speaker #0

    Dans votre exposition, vous proposez dans une première pièce une sorte de balade dans la forêt. On peut voir des troncs d'arbres,

  • Speaker #2

    des souches,

  • Speaker #0

    il y a la coupe d'un séquoia. Qu'est-ce que vous voulez nous donner comme sensation, que ce soit au niveau des yeux ou peut-être même au niveau du toucher ?

  • Speaker #1

    Oui.

  • Speaker #2

    Les œuvres qui sont présentées dans le principal espace d'exposition sont directement inspirées par une rencontre avec la nature que j'ai eue en me promenant dans les jardins botaniques de Brooklyn. Il y avait un arbre qui avait été abattu par les jardiniers parce qu'il était malade et il s'était dit... que c'était une bonne idée de l'ouvrir, justement, de montrer l'intérieur de cet arbre pour le public, pour les scientifiques. Et c'est vraiment ça qui inspire directement ma sculpture, qui est tout à fait similaire à ce que j'ai vu ce jour-là. Et à la question, effectivement, de la texture, des couleurs dont on a parlé, avec les arbres en particulier, ce que j'essaie de faire, c'est d'avoir, justement, par l'utilisation de cette palette de couleurs, un aspect anthropomorphique, de montrer que ces arbres ne sont pas extérieurs à nous, ils font partie de nous. de nous et donc on peut entrer en relation directe et en connexion directe avec ces arbres comme si on était des pères. J'ai commencé à créer ces arbres après la mort de mon père qui est parti en 2017. Très souvent quand on perd un membre de sa famille, une des questions qui se posent c'est que faire de ses vêtements, de sa garde-robe qui reste. J'ai réfléchi assez longtemps et le premier arbre que j'ai créé, je l'ai créé justement avec les vêtements de mon père, qui sur la fin de sa vie avait pris sa retraite et consacré tout son temps à son jardin. Donc c'était une manière de lui ériger une sorte de monument, de lui rendre hommage et de le garder en vie aussi, parce qu'à travers ces tissus-là, c'est presque le tissu véritablement de mon père, ces cellules en quelque sorte qui demeurent en vie et qui restent présentes dans mon existence. et aussi peut-être dans celle des visiteurs de l'exposition. Bien sûr, on peut entendre cette histoire-là comme celle d'une fille loyale qui honore son père, une bonne fille. Et bien évidemment, c'était un parent qui a été formidable et envers qui j'ai énormément de gratitude. Mais il y a aussi un contre-courant sous-jacent que l'on peut ressentir. qu'il y ait aussi celui du symbole phallique de l'arbre, qui est aussi le symbole du pénis. Donc quelque part, une forme de castration aussi dans cet hommage, ça a du sens aussi pour moi. Peut-être que d'une certaine façon, il faut tuer le père pour trouver sa propre voix. Et je pense que ça peut exister en même temps que l'hommage, que l'honneur rendu à mon père.

  • Speaker #0

    Est-ce que vous pourriez nous décrire une de vos souches d'arbres et comment vous la sculptez ?

  • Speaker #1

    Les souches font partie des œuvres les plus complexes parmi toutes les œuvres que j'ai pu créer.

  • Speaker #2

    Je commence toujours par prendre des photos d'arbres morts. J'ai une certaine obsession pour les photos d'arbres morts. Je les collectionne, j'en ai des centaines, des dossiers entiers dans mon atelier. Et une fois que j'ai une idée de l'aspect que je veux donner à ma sculpture d'arbres, Je crée d'abord une maquette, un modèle en 3D, et ensuite je construis la structure en bois, de façon assez paradoxale. Et puis une fois que la structure, la charpente est faite, j'ajoute dessus du grillage, celui des poulaillers, pour créer une forme plus organique. C'est ce qui va me permettre vraiment de donner une forme plus souple. Et ensuite, par-dessus, je pose une première peau. qui est en tissu, mais avec des tissus assez légers, des draps de mauvaise qualité. C'est vraiment une première enveloppe qui a vocation à donner une uniformité à la sculpture. Ensuite, seulement, j'ajoute par-dessus les velours, les tissus récupérés sur mes vêtements. Et ce que vous verrez, la dernière couche, c'est ça qui sera visible dans l'exposition. Il y a toute une structure complexe en dessous de la surface. Mes arbres... On voit toujours qu'ils ont été tués, abattus de façon mécanique, c'est-à-dire qu'ils ont été sciés, houpés à la hache. Ce ne sont pas des arbres qui sont morts de mort naturelle. Il y a un lien avec la violence qui est là aussi le fil conducteur entre toutes mes créations, que ce soit les carcasses de vaches ou d'oiseaux. Il y a toujours la main de l'homme qui intervient pour tuer l'être vivant dont il est question.

  • Speaker #0

    Il y a aussi un autre fil rouge qui semble parcourir toute votre œuvre, c'est l'idée du cycle de la Renaissance, je dirais même de la métamorphose. Je pense notamment aux carcasses que vous pouvez exposer au musée de la chasse et de la nature, où dans les carcasses, on voit qu'il y a, qui est donc par nature, est morte, on voit la vie qui apparaît à travers des oiseaux, des végétaux. Et vous utilisez, votre mode aussi d'expression, ce sont ces vêtements recyclés. Donc l'idée du cycle est importante aussi dans votre travail ?

  • Speaker #1

    Oui,

  • Speaker #2

    c'est important pour moi que dans chaque œuvre, il y ait la place pour une forme de renaissance. Ça fait dix ans que je travaille, que je produis des œuvres et j'ai participé à plusieurs expositions autour des pratiques environnementales dans l'art. Aux Etats-Unis, quand on parle d'environnement aujourd'hui, il y a un courant très fort qui est assez moraliste finalement, un moralisateur, qui dit tout ce qu'il ne faut pas faire. Il ne faut pas allumer la lumière, il ne faut pas se racheter des vêtements neufs, etc. Mais c'est aussi assez négatif et en fait, dans mon travail, ce que j'essaie de faire est une approche plus utopique. de trouver quelque chose de positif dans une mort qui pourrait se transformer en espace de renaissance, en espace qui permette justement de redonner la vie à quelque chose.

  • Speaker #0

    Finalement, vos œuvres permettent d'avoir quel type de relation à la nature ?

  • Speaker #2

    C'est vraiment l'idée de ne pas voir la nature, de ne pas considérer la nature comme quelque chose qui est extérieur à nous. de considérer en fait que nous faisons partie de la nature et que la nature fait partie de nous. Quand le spectateur, quand le visiteur découvre dans cette exposition des silhouettes qui rappellent le corps humain, qui sont fabriquées à partir de vêtements portés par des humains, ce que j'espère, c'est que ça permet justement d'atteindre cette unification du paradigme, cette unité de comprendre que nous faisons partie de la nature et que la nature fait partie de nous.

  • Speaker #0

    C'était Rencontre Sauvage avec l'artiste Tamara Kostianowski pour son exposition La chair du monde. Traduction Marguerite Capelle, un podcast du Musée de la Chasse et de la Nature réalisé par Céline Duchesnet et Laurent Polret.

Description

« Avec cette palette de couleurs, je cherche à donner un aspect anthropomorphique aux arbres pour montrer qu’ils font partie de nous et que nous pouvons entrer en connexion directe avec eux, comme des pairs. »


Pour ce nouvel épisode, "Rencontres sauvages" nous fait découvrir le travail de Tamara Kostianovsky, exposée au musée de la Chasse et de la Nature jusqu'au 3 novembre 2023. Tout commence par la réception d'un étrange colis contenant un faisan, qui se révèlera fondateur dans son processus créatif et dans son lien avec le monde sauvage...



Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Rencontre sauvage avec l'artiste Tamara Kostianowski, un podcast du musée de la chasse et de la nature. Tamara Kostianowski, que signifient pour vous les termes de rencontre sauvage ?

  • Speaker #1

    Quand je pense à ces mots de rencontre sauvage,

  • Speaker #2

    la première chose qui me vient en tête, c'est une anecdote. J'ai créé énormément d'œuvres qui mettent en scène des carcasses, des carcasses de vaches. parce que j'ai grandi en Argentine et que c'est une image qui a toujours été très présente pour moi. Ça fait partie de notre identité nationale. C'est même dans l'icône une représentation de la fierté nationale argentine. Et j'ai créé plusieurs de ces carcasses. Et au fil du temps, c'est finalement une amie proche qui m'a suggéré de les agrémenter de plumes. Donc j'ai commandé sur eBay des plumes en tissu pour ces carcasses-là. Je m'attendais à recevoir une petite enveloppe qui contiendrait quelques plumes. Et c'est un gros carton qui est arrivé par le courrier, qui m'a semblé un peu louche. Ce n'était pas ce à quoi je m'attendais. Et du coup, j'ai attendu quelques jours pour retrouver le courage d'ouvrir ce carton. Effectivement, à l'intérieur, ce ne sont pas des plumes que j'ai trouvées, mais un faisan qui venait tout juste d'être chassé, d'être tué. J'ai surmonté l'horreur de trouver ce cadavre d'oiseau qui arrivait comme ça dans mon atelier. Je l'ai attrapé par les pattes, je l'ai posé sur ma table de travail. Et là, j'ai vécu une expérience assez magique, presque transcendantale. Il y avait quelque chose d'infiniment beau dans ces plumes iridescentes qui m'ont immédiatement fascinée. J'avais presque l'impression de voir la queue d'un arc-en-ciel comme une sorte d'image fantasmée. qu'on n'a jamais eu l'occasion de voir réellement. Et en même temps, il y avait quelque chose d'incroyablement dramatique dans le fait d'avoir cet animal mort sur ma table de travail. J'ai produit énormément d'œuvres qui traitent de la chair, qui abordent la question de la chair humaine, qui la mettent en scène. Ce sont des images qui me viennent aussi de mon propre vécu, d'avoir dans le cabinet de mon père notamment, qui était chirurgien, et auprès de qui j'ai été stagiaire quand j'étais jeune fille. vu cette chair humaine, mais je n'avais jamais été confrontée à une chair morte. C'était la première fois que j'étais face à un animal mort. J'ai contemplé cet oiseau pendant quelques minutes et puis je l'ai pris par les pattes et je l'ai suspendu à un de ces crochets que j'utilisais justement pour créer ces œuvres carcasses. Et là, il y a eu un nouveau moment de magie au moment où les ailes de l'oiseau se sont ouvertes, se sont déployées, presque comme l'image d'une crucifixion. Et encore une fois, en Argentine, qui est un pays extrêmement catholique, enfant, mon quotidien était complètement peuplé, rempli d'images de la crucifixion. Et donc ça a été vraiment un moment tout à fait unique. C'était à la fois un oiseau, un oiseau mort dans mon atelier, mais pas seulement. C'était aussi quelque chose de complètement sublime. Et c'est ça, ma première rencontre avec la nature sauvage, même si c'était un animal qui était mort cette fois.

  • Speaker #0

    Ça me fait penser au titre de votre exposition, La chair du monde. Est-ce que finalement, la chair, ce n'est pas un moyen pour vous d'entrer en contact de manière sensible, par le toucher, avec la nature et l'art que vous réunissez dans vos œuvres ?

  • Speaker #1

    Oui, je pense à la chair comme un véhicule.

  • Speaker #2

    Oui, pour moi, la chair, c'est vraiment le vaisseau et le sujet même de toutes mes œuvres. Pour moi, notre existence, mon existence et notre existence à tous, elle s'accomplit par le corps. Et donc cette obsession que j'ai des oiseaux, des vaches, des arbres, etc., ce que je recherche en fait, c'est justement cet élément de chair qui est pour moi le très commun à tous les êtres vivants. Par exemple, quand je fais une carcasse de vache, ou une souche d'arbre, ou une carcasse d'oiseau, Tout ça, ce sont des animaux morts, mais il y a un fil conducteur qui est l'utilisation du tissu, qui est l'utilisation même plus précisément du textile, dont une grande partie est recyclée. Donc en fait, c'est un matériau humain dont je me sers pour recréer ces carcasses, qui est encore une fois une manière de mettre en lumière le point commun qui relie tous ces êtres vivants.

  • Speaker #0

    Est-ce que vous pourriez nous décrire votre travail ? Parce que lorsque l'on voit par exemple une souche d'arbre, une carcasse, un oiseau, ils sont donc fabriqués à partir de tissus. Et je pense peut-être plus précisément aux souches d'arbre, on a presque l'impression au niveau des couleurs de voir à l'intérieur d'un corps. Il y a quelque chose qui est presque viscéral.

  • Speaker #2

    Quand j'avais à peu près 19 ans, j'ai commencé à étudier les beaux-arts et donc on me donnait des devoirs assez classiques pour les étudier en art. Je devais peindre des natures mortes ou des modèles vivants. Mais à peu près au même moment, on est dans les années 80 en Argentine, mon père était un chirurgien esthétique. Et je me suis dit que ce serait bien pour moi d'avoir quand même une petite idée de ce que c'était que le monde du travail. Et donc je suis allée... Travailler dans son cabinet, non pas tant pour assister moi-même ou participer aux chirurgies, bien sûr, mais pour faire le café, répondre au téléphone, ouvrir la porte. et à cet endroit-là, j'ai découvert le monde qui se trouve au-delà de la peau, qui se trouve sous la peau des humains. Quand la peau se déchire, ce qu'elle révèle en dessous, la couche de graisse, les ligaments, les os parfois, et tout ça révélait une palette de couleurs qui m'a énormément marquée. Et c'était vraiment exactement au même moment que je vivais mes années d'éducation à l'art à l'école de Beaux-Arts où j'étais. C'est presque comme si j'avais découvert et appris l'univers artistique au travers de cette palette de l'anatomie humaine. Et c'est cette palette-là, vous avez tout à fait raison, que j'utilise dans absolument toutes mes œuvres. Et c'est pour ça qu'à l'intérieur de mes arbres, on voit les couleurs des entrailles d'un corps humain. C'est encore une fois une manière de souligner ce qui unit tous les êtres vivants. et de montrer qu'on ne fait qu'un avec la nature. S'il faut protéger l'environnement, ce n'est pas juste parce que c'est bon pour nous, c'est parce que l'environnement, c'est nous.

  • Speaker #0

    Dans votre exposition, vous proposez dans une première pièce une sorte de balade dans la forêt. On peut voir des troncs d'arbres,

  • Speaker #2

    des souches,

  • Speaker #0

    il y a la coupe d'un séquoia. Qu'est-ce que vous voulez nous donner comme sensation, que ce soit au niveau des yeux ou peut-être même au niveau du toucher ?

  • Speaker #1

    Oui.

  • Speaker #2

    Les œuvres qui sont présentées dans le principal espace d'exposition sont directement inspirées par une rencontre avec la nature que j'ai eue en me promenant dans les jardins botaniques de Brooklyn. Il y avait un arbre qui avait été abattu par les jardiniers parce qu'il était malade et il s'était dit... que c'était une bonne idée de l'ouvrir, justement, de montrer l'intérieur de cet arbre pour le public, pour les scientifiques. Et c'est vraiment ça qui inspire directement ma sculpture, qui est tout à fait similaire à ce que j'ai vu ce jour-là. Et à la question, effectivement, de la texture, des couleurs dont on a parlé, avec les arbres en particulier, ce que j'essaie de faire, c'est d'avoir, justement, par l'utilisation de cette palette de couleurs, un aspect anthropomorphique, de montrer que ces arbres ne sont pas extérieurs à nous, ils font partie de nous. de nous et donc on peut entrer en relation directe et en connexion directe avec ces arbres comme si on était des pères. J'ai commencé à créer ces arbres après la mort de mon père qui est parti en 2017. Très souvent quand on perd un membre de sa famille, une des questions qui se posent c'est que faire de ses vêtements, de sa garde-robe qui reste. J'ai réfléchi assez longtemps et le premier arbre que j'ai créé, je l'ai créé justement avec les vêtements de mon père, qui sur la fin de sa vie avait pris sa retraite et consacré tout son temps à son jardin. Donc c'était une manière de lui ériger une sorte de monument, de lui rendre hommage et de le garder en vie aussi, parce qu'à travers ces tissus-là, c'est presque le tissu véritablement de mon père, ces cellules en quelque sorte qui demeurent en vie et qui restent présentes dans mon existence. et aussi peut-être dans celle des visiteurs de l'exposition. Bien sûr, on peut entendre cette histoire-là comme celle d'une fille loyale qui honore son père, une bonne fille. Et bien évidemment, c'était un parent qui a été formidable et envers qui j'ai énormément de gratitude. Mais il y a aussi un contre-courant sous-jacent que l'on peut ressentir. qu'il y ait aussi celui du symbole phallique de l'arbre, qui est aussi le symbole du pénis. Donc quelque part, une forme de castration aussi dans cet hommage, ça a du sens aussi pour moi. Peut-être que d'une certaine façon, il faut tuer le père pour trouver sa propre voix. Et je pense que ça peut exister en même temps que l'hommage, que l'honneur rendu à mon père.

  • Speaker #0

    Est-ce que vous pourriez nous décrire une de vos souches d'arbres et comment vous la sculptez ?

  • Speaker #1

    Les souches font partie des œuvres les plus complexes parmi toutes les œuvres que j'ai pu créer.

  • Speaker #2

    Je commence toujours par prendre des photos d'arbres morts. J'ai une certaine obsession pour les photos d'arbres morts. Je les collectionne, j'en ai des centaines, des dossiers entiers dans mon atelier. Et une fois que j'ai une idée de l'aspect que je veux donner à ma sculpture d'arbres, Je crée d'abord une maquette, un modèle en 3D, et ensuite je construis la structure en bois, de façon assez paradoxale. Et puis une fois que la structure, la charpente est faite, j'ajoute dessus du grillage, celui des poulaillers, pour créer une forme plus organique. C'est ce qui va me permettre vraiment de donner une forme plus souple. Et ensuite, par-dessus, je pose une première peau. qui est en tissu, mais avec des tissus assez légers, des draps de mauvaise qualité. C'est vraiment une première enveloppe qui a vocation à donner une uniformité à la sculpture. Ensuite, seulement, j'ajoute par-dessus les velours, les tissus récupérés sur mes vêtements. Et ce que vous verrez, la dernière couche, c'est ça qui sera visible dans l'exposition. Il y a toute une structure complexe en dessous de la surface. Mes arbres... On voit toujours qu'ils ont été tués, abattus de façon mécanique, c'est-à-dire qu'ils ont été sciés, houpés à la hache. Ce ne sont pas des arbres qui sont morts de mort naturelle. Il y a un lien avec la violence qui est là aussi le fil conducteur entre toutes mes créations, que ce soit les carcasses de vaches ou d'oiseaux. Il y a toujours la main de l'homme qui intervient pour tuer l'être vivant dont il est question.

  • Speaker #0

    Il y a aussi un autre fil rouge qui semble parcourir toute votre œuvre, c'est l'idée du cycle de la Renaissance, je dirais même de la métamorphose. Je pense notamment aux carcasses que vous pouvez exposer au musée de la chasse et de la nature, où dans les carcasses, on voit qu'il y a, qui est donc par nature, est morte, on voit la vie qui apparaît à travers des oiseaux, des végétaux. Et vous utilisez, votre mode aussi d'expression, ce sont ces vêtements recyclés. Donc l'idée du cycle est importante aussi dans votre travail ?

  • Speaker #1

    Oui,

  • Speaker #2

    c'est important pour moi que dans chaque œuvre, il y ait la place pour une forme de renaissance. Ça fait dix ans que je travaille, que je produis des œuvres et j'ai participé à plusieurs expositions autour des pratiques environnementales dans l'art. Aux Etats-Unis, quand on parle d'environnement aujourd'hui, il y a un courant très fort qui est assez moraliste finalement, un moralisateur, qui dit tout ce qu'il ne faut pas faire. Il ne faut pas allumer la lumière, il ne faut pas se racheter des vêtements neufs, etc. Mais c'est aussi assez négatif et en fait, dans mon travail, ce que j'essaie de faire est une approche plus utopique. de trouver quelque chose de positif dans une mort qui pourrait se transformer en espace de renaissance, en espace qui permette justement de redonner la vie à quelque chose.

  • Speaker #0

    Finalement, vos œuvres permettent d'avoir quel type de relation à la nature ?

  • Speaker #2

    C'est vraiment l'idée de ne pas voir la nature, de ne pas considérer la nature comme quelque chose qui est extérieur à nous. de considérer en fait que nous faisons partie de la nature et que la nature fait partie de nous. Quand le spectateur, quand le visiteur découvre dans cette exposition des silhouettes qui rappellent le corps humain, qui sont fabriquées à partir de vêtements portés par des humains, ce que j'espère, c'est que ça permet justement d'atteindre cette unification du paradigme, cette unité de comprendre que nous faisons partie de la nature et que la nature fait partie de nous.

  • Speaker #0

    C'était Rencontre Sauvage avec l'artiste Tamara Kostianowski pour son exposition La chair du monde. Traduction Marguerite Capelle, un podcast du Musée de la Chasse et de la Nature réalisé par Céline Duchesnet et Laurent Polret.

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