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Jean-Claude Vannier : les 5 BO qui lui ont donné envie de composer de la musique à l'image cover
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Musique de film : une histoire d'inspiration

Jean-Claude Vannier : les 5 BO qui lui ont donné envie de composer de la musique à l'image

Jean-Claude Vannier : les 5 BO qui lui ont donné envie de composer de la musique à l'image

25min |15/04/2019
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Description

Pour ce cinquième épisode, nous accueillons un compositeur autodidacte, qui déteste l’idée du professionnalisme, un poète du bricolage, passionné par ce qui est déglingué, par les fausses notes, par les instruments désaccordés. 

Au cinéma, ses partitions emblématiques s’intitulent Slogan, La Horse, Projection privée, Les Lolos de Lola, Les Guichets du Louvre, L’Amour propre ne le reste jamais très longtemps, Comédie d’été, Bienvenu à bord, La Tour Montparnasse infernale, Les Amants réguliers, La Frontière de l’aube, Microbe et gasoil.

Crédits musicaux :

Les 400 coups / Musique de Jean Constantin - Editions Les Films du Carrosse

Truffaut cha cha cha, par Jean Constantin / Paroles et musique de Jean Constantin / Arrangement et direction d'orchestre : Jean-Claude Vannier. Inédit

Le Troisième homme (The Third man) / Musique d'Anton Karas - Editions Chappell

La Strada / Musique de Nino Rota - Editions Redi Ponti de Laurentiis

Touchez par au grisbi / Musique de Jean Wiener

Interprétée par Jean Wiener (piano) et Jean Wetzel (harmonica)

Editions Warner Chappell Music France 

Mon oncle / Musique de Franck Barcellini - Editions Emi Music Publishing France / Specta Films 


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Evocation d'une vocation, un compositeur d'aujourd'hui nous raconte les cinq bandes originales fondatrices qui ont façonné son ADN, et lui ont transmis l'envie, l'impulsion d'écrire pour l'image. Pour ce cinquième épisode, nous accueillons un compositeur autodidacte qui déteste l'idée du professionnalisme, un poète du bricolage, passionné par tout ce qui est déglingué, par les fausses notes, par les instruments désaccordés. Au cinéma, ses partitions emblématiques s'intitulent « Slogan » , « La Horse » , Projections privées, les lolos de Lola, les guichets du Louvre, l'amour propre ne le reste jamais très longtemps, comédie d'été, bienvenue à bord, la tourbamparnasse infernale, les amants réguliers, la frontière de l'aube, microbes gasoiles. Bonjour Jean-Claude Vannier.

  • Speaker #1

    Bonjour. Vous êtes né à Bécon-les-Bruyères où vous avez grandi. Oui. Quelle était la place du cinéma dans votre enfance et votre jeunesse ? Pas grande parce que mes parents ne sortaient pas, ils étaient contre cette idée de plaisir je pense. Il y avait deux cinémas à Bécamp, il y avait le Bécamp Palace et le Casino de Bécamp. Les noms même de ces cinémas étaient dérisoires, c'était des cinémas des années 50. Alors c'était l'époque où il y avait des actualités peintes sur un écran. Et en attraction il y avait des humoristes ou des musiciens qui venaient, comme ça j'ai pu voir Gilbert Bécamp ou des gens comme ça. Et donc, je n'ai pas vu beaucoup de films quand j'étais jeune.

  • Speaker #0

    Mais vous aimiez ça ou pas ? Moi, je trouvais ça sympa. J'aime bien. Donc, j'ai vu ce film, Les 400 coups, où Jean-Pierre Lehoux, qui a à peu près mon âge Alors, évidemment, il y avait une génération de se regarder soi-même miroir, un petit peu empathique. Et donc, j'étais très emballé par ce film. Et j'ai beaucoup aimé la musique. Pourquoi ? Parce qu'elle est simple. C'est pas une musique prétentieuse, c'est une musique simple, mélodique. Je me souviens plus qui l'a écrite. C'est Jean Constantin. Jean Constantin, voilà. Il a toujours eu des idées mélodiques assez astucieuses, bien parisiennes, bien françaises. Je trouve ça très sidérant. Ça me le rapproche de Marguerite Monod, comme genre. Même différence pour l'un comme pour l'autre. Et en tout cas, j'ai adoré cette musique. Et vous avez vous-même réorchestré Merci. cette musique, 13 ans plus tard, en travaillant avec Jean Constantin, qui s'appelle Le Poulpe, et Jean Constantin a transformé sa valse des 400 coups en cha-cha dédiée à François Truffaut. Je ne me souviens pas de ça, mais c'est possible. Je me souviens vaguement que j'ai fait un disque avec lui, mais je ne me souviens plus quoi. En tout cas, j'ai adoré cette musique de film. Alors voici donc la version originale des 400 coups, musique de Jean Constantin, orchestrée par Michel Legrand, et juste ensuite, la version réarrangée par Jean-Claude Vanier, 13 ans plus tard, avec un texte, en hommage au cinéma Truffaut, Truffaut, cha-cha-cha, interprété par Jean Constantin au moment. Alors un autre choix déterminant dans votre enfance, c'est un film de Carol Reed, et qui est un film qui a donné un coup de pied dans la fourmilière, puisque au lieu d'avoir une partition qui s'aligne sur tous les détails de l'action, c'est un polar qui se passe à Vienne, il y avait un seul et même thème joué à la cita. Anton Karras, le troisième homme. Oui. D'abord parce que là j'ai découvert cet instrument extraordinaire, la sitar, j'en ai même mis plus tard dans des musiques de films. J'ai eu du mal à trouver les gens qui en jouaient. Mais surtout j'ai trouvé la construction et la place où est mise la musique et sa signification dans l'action, dans l'image, etc. C'est formidable d'avoir mis toujours ce thème là, comme ça. Ça pourrait paraître obsédant, ça pourrait paraître paresseux, ça pourrait paraître ennuyeux, mais c'est formidable. Formidable l'emploi même, l'intelligence de l'emploi. En fait, ce qui s'est passé, c'est que ce film a été tourné à Vienne. Et en face de l'opéra, il y a le Café Mozart et le café où il y a la tarte célèbre. Je t'en fous. Et donc, il y avait Anton Carras qui jouait de la sitar. Il jouait ce thème qui n'avait pas du tout été fait pour le film. Tampana, voilà, etc. Et je ne sais pas si c'est par Orsanwell qui a dit mais c'est formidable votre musique etc. Oui, Carol Reid qui l'a attrapée. C'est ça. Et donc ils ont enregistré à la va-vite ce truc et puis ils n'ont pas appelé aucun compositeur, ils ont mis que cette musique-là dans le film. Et je trouve ça génial, vraiment le mot n'est pas trop fort. Mais est-ce que vous aimez le thème en lui-même ou est-ce que vous aimez le principe même de la répétition ?

  • Speaker #1

    C'est ce que je vous disais, c'est le principe même de la répétition et la place, comment elle est employée, la musique et ce qu'elle signifie dans le film. C'est magnifique ça. Elle a une vraie signification obsédante avec l'action. Ça marche très très bien avec le film d'ailleurs, le film a fonctionné. Et vous, dans vos enregistrements, qui avez-vous employé à la CITAR ? J'ai pris un type qui était le patron du syndicat des boulangers, et qui donnait des cours de CITAR. Ah oui ? Oui. J'ai eu un mal fou avec lui, parce qu'évidemment, ces gens-là ne disent pas la musique, mais ça n'empêche qu'ils sont très bons musiciens. C'était pas mal, ce qu'il a fait, j'aimais bien. Et puis surtout, il y a des choses que je n'avais pas prévues dans la citadelle. Des machins comme ça. Il a reproduit ça magnifiquement. C'est tout un style, c'est ça la musique. C'est comme le tango, comme tout ça. Il faut que ça soit joué par des gens qui connaissent bien le truc. Donc, Antoine Carras, c'est moi, j'ai beaucoup peur.

  • Speaker #0

    Un autre choix, d'un instrument soliste à un autre, de la cita à la trompette, c'est le film qui a vraiment fait éclater mondialement l'écriture de Nino Rota chez Fellini, l'Astrada. Pourtant, Nino Rota avait fait beaucoup de films avant. Pas seulement avec Fellini, il est là depuis le début. Mais de la carrière de Fellini, il avait fait plein d'autres. Il avait fait une œuvre monumentale, comment dire, Nino Rantana. Elle a commencé dans les années 30, donc il avait déjà presque 20 ans de cinéma au compteur avant l'Astrada.

  • Speaker #1

    Oui, mais il n'a pas fait que du cinéma, il a fait des symphonies, des concertos, c'est absolument dingue. Et donc l'Astrada. L'Astrada, c'était jouer à la trompette, ça correspondait parfaitement à l'image que, je crois, Fellini voulait donner de sa femme à l'époque, Giulietta Massina. Ça correspondait... à l'ambiance du cirque, ça correspondait à la solitude, c'était extraordinaire. J'ai adoré ce truc. Le thème est beau, comme toujours, Nino Rotin, un génie musical, formidable, très particulier, on le connaît tout de suite. C'est en même temps traditionnel et malin. Et puis ça me touche au cœur, toujours, toutes les musiques de Nino Rota, je trouve ça exemplaire. Et celle-là, celle-là qui est pratiquement sans accompagnement, qui est un solo de trompette qui tire des larmes, véritablement.

  • Speaker #0

    C'est presque, oui, comme une longue plainte, qui est la plainte du personnage de Gelsomina. Et ça, c'est le travail de Fellini et de Nino Rota, parce que Nino Rota a peut-être eu l'idée du thème, mais je pense que Fellini a insisté pour que ça soit utilisé de cette façon-là. Il y a aussi les deux, c'est un duo, c'est ça qui est formidable. que j'ai jamais eu la chance d'avoir, c'est le Dio Nino Rota Fellini, qui a fonctionné à merveille. Même si je pense sur le plan amical. Moi, je n'ai pas eu cette chance d'avoir un frère cinéaste. Et vous le regrettez ? Oui, je le regrette. C'est toujours bien. Ça aurait été pas mal. On aurait fait les choses ensemble. C'était marrant. Ils se sont déconnés. et l'harmonica avec un soloiste. Il ne touchait pas au Grisby. Jean Wetzel à l'harmonica et Jean Vienner à la composition. Alors Jean Vienner, il se fait que Je l'ai entendu parler de lui, c'est un mec que je voulais absolument rencontrer, je n'osais pas l'appeler. Mon grand-père avait fait son service militaire avec lui. Et pour mille raisons, je n'osais pas l'appeler. Et puis un jour, je vois Vienner sur une liste d'altos, de musiciens qui jouaient dans l'orchestre que j'avais à diriger. Je lui dis « Vous êtes de la famille de Jean Vianney ? » Il me dit « Oui, je suis son fils. » Je lui dis « Écoutez, ça ne vous ennuierait pas de lui dire que j'ai rien rencontré. » Et je me suis lancé, j'avais vraiment le trac. Et donc, on s'est appelé, j'étais le voir, il habitait dans une rue dans le 18ème, qui montait, je me souviens. Il avait un bureau d'écolier, sur lequel il écrivait la musique. et un mur d'écoliers anciens, avec des petits engrais, et tout ça. Et puis, à angle droit, il y avait le piano. Ils sortaient de l'un à l'autre, comme ça, je trouvais ça marrant. On est devenus hyper amis. Donc, on sortait ensemble, etc. Il avait sa copine qui s'appelait Alice, je crois. Il disait, ma compagne. Il était charmant, on discutait de plein de trucs. Il m'a appris plein de trucs formidables. Il m'a appris, il avait connu Stravinsky, Ravel, tous ces gens-là. Satie. Et donc il m'a dit, mais le Poulenc, il me dit, mais le plus marrant de la bande, le plus déconnant, le plus hirsute, c'était vraiment Stravinsky. Qu'est-ce qui me faisait marrer ? Et tout d'un coup, quand il m'a dit ça, ça m'a, moi qui adorais Stravinsky un peu comme une idole, un peu d'une manière chrétienne, je dirais, il me l'a ramené à la vie. Il m'a présenté un mauvais élève déconnant, marrant, qui était prêt à toutes les blagues et tout ça, mais également j'entends. Et c'est vrai qu'à chaque fois que je regarde une partition de Stravitri, je vois où il s'amuse. Je vois qu'il s'amuse. En fait, il se marre comme un fou. C'est un élève, un bon élève iconoclaste. C'est incroyable. Mais vous qui aimiez l'écriture de Wiener, est-ce que vous avez retrouvé dans l'homme, dans l'être humain, ce que vous admiriez dans son langage ?

  • Speaker #1

    Oui, parce que c'est toute une époque, Wiener. C'est pas moderne. C'est un type de l'époque 30-40, juste avant la guerre. Parce qu'il s'est planqué pendant la guerre. Mais dans l'époque 30-40, il avait un duo qui s'appelle Wiener et Doucet, deux pianistes, au bœuf sur le toit, je pense. Cette musique de Touché pas au gris-bis, je la trouve formidable pour plusieurs raisons. D'abord parce qu'elle est très simple, c'est accompagné au piano avec un harmonica qui vibre, j'adore ça. Et en plus, ça a l'air, comment dire, populaire comme ça, et malin, pour faire un tube, mais en fait c'est beaucoup plus que ça. Si vous l'écoutez d'un bout à l'autre, vous verrez que vous êtes incapable de la reproduire de mémoire. Pourquoi ? Parce que c'est comme beaucoup de choses bien foutues, comme certaines chansons des Beatles, comme d'autres thèmes de Gershwin ou je sais pas trop qui. Des gens qui ont le génie de la mélodie, comme ça. Et cette mélodie est extrêmement complexe et extrêmement intelligente, et elle est, comment dire Super, elle correspond vachement bien en plus à l'esprit du film. L'esprit du grisby. Le grisby, c'est un mot qui a été inventé par le breton le grisby. Il y a plusieurs de ses romans qui s'appellent comme ça. Et donc voilà, ça me faisait marrer d'abord le mot grisby, de toute façon étymologiquement, et puis la personnalité de Vionner qui était un gentil garçon, super sympa, modeste, marrant, qui travaillait à l'assassin à un moment donné. Il était justement, il supervisait les partitions des musiques de films, je crois. Je vous ai vu passer vos partitions quelques fois, ça m'amuse beaucoup.

  • Speaker #0

    Il était à la commission d'audiovisuel. Mais vous savez qu'en fait, Viennaire a écrit pour le film une partition de 40 ou 50 minutes à l'image. Une partition que Jacques Becker, le metteur en scène, a intégralement mise à la poubelle pour garder que le thème qu'il a répété un peu sur le principe du troisième ordre. Il a bien fait, parce que c'est vraiment bien. Sous- Et dernier choix, qui est lié à un cinéaste qui a marqué la comédie à la française, qui en partant d'ailleurs d'un univers burlesque, est allé vers une esthétique de plus en plus abstraite, c'est Jacques Tati. Vous avez pris le film presque du milieu de sa carrière, et qui a été d'ailleurs son dernier succès commercial, avec un film très personnel qui parle de la transition entre deux mondes, et ce film c'est Mon Oncle.

  • Speaker #2

    Oui, c'est pareil, c'est une musique, c'est Francis Lemarque qui a fait ça non ? C'est Franck Barcellini.

  • Speaker #1

    Bon, en tout cas. Je trouve cette musique magnifique parce qu'elle donne bien la naïveté du personnage. Et puis la familiarité aussi. C'est assez amusant. Ça marche très bien avec le film. Je crois que le film aurait été détruit par une musique symphonique par exemple. Mais là, c'était exactement ce qu'il fallait. Je trouve que ça colle parfaitement à l'esprit de Tati. J'ai beaucoup aimé Tati. Je pense qu'il est... Il a été pillé, copié, tout ça, etc. Mais je trouve que Tati était formidable. Est-ce que vous comprenez aussi son choix de prendre plutôt des compositeurs de chansons, de variétés, en tout cas de prendre des profanes de la musique de film ? Oui, je comprends très bien. Un professionnel de la musique de film, ça peut être envahissant, chiant, qui nous a bassourdés avec son professionnalisme, ses fucs, ses contrepoints, ses problèmes harmoniques et tout ça. Je trouve qu'il a très bien fait. Et puis, quand vous avez vu le film, vous avez perçu aussi que Merci. par rapport à ce qui se faisait beaucoup à l'époque en comédie avec ce compositeur d'ailleurs très doué, Gérard Calvi, qui écrivait sur des films comiques, des musiques comiques. Mais il écrivait pour les branquignoles.

  • Speaker #0

    Les branquignoles, des musiques à effet façon Spike Jonze en quelque sorte. Oui, bien sûr. Alors que Tati, lui, c'était tout le contraire. Il voulait des musiques, des rengaines populaires, populistes, des valses, des faubourgs.

  • Speaker #1

    Oui, je préfère ça, moi. J'aime beaucoup, j'ai entendu des trucs de Calvi qui sont des trucs formidables. Je suis pas bien fou de la musique genre Spike Jonze et compagnie. Je déteste ça, la musique Blague, quoi. La musique qui veut faire rire. Oui. Quand, par exemple, Eric et Ramzy m'ont appelé pour faire la tournée de la Parnasse infernale, ils m'ont demandé de faire de la musique comique. Et je leur ai dit, je ne peux pas, tout simplement. Ça ne m'amuse pas, d'abord, je ne sais pas le faire, etc. Je leur ai dit, je vais faire une musique traditionnelle, de ce qu'on met sur les films américains, et je vous ferai que votre comique ressortira encore mieux. Et j'ai vu qu'Eric, il n'y a pas longtemps, m'a dit que c'était une super idée. C'est la meilleure idée qu'on puisse avoir.

  • Speaker #0

    C'est-à-dire d'avoir un contrepoint. par rapport à ce qu'on voit à l'image. Et là, en l'occurrence, c'est un contrepoint de sentiment qui met d'autant plus, par effet de contraste, en valeur la drôlerie des situations. Oui, c'est ça, c'est même qui le met en valeur. Je sais que Mozart a fait des musiques, des plaisanteries, des plaisanteries musicales. Ces plaisanteries musicales, j'en ai des partitions ici, c'est marrant comme tout, mais c'est un mec qui joue fou à un moment donné parce qu'il a perdu la partition. des musiques qu'on jouait au dé, il a fait ça aussi. Il avait à chaque mesure porté un nombre, je tirais les dires, mais la cinquième, il y a le duo de la table, ce qu'on appelle le duo de la table, c'est une partition, il y a un violoniste en face de vous à la table, et chacun joue la partition, l'un à l'envers et l'autre à l'endroit. Il y a un moment où ça coince un petit peu, vers le milieu, et ça marche. C'est rigolo. Beaucoup de musiciens ont fait, Rameau aussi a fait des canons. Tomura va trop vite, je crois que c'est de lui. Unietudo. Des trucs comme ça. Il a fait des canons, mais des canons complexes. Bach a fait, dans l'art de la fugue, des trucs insensés. Un thème qui part du début jusqu'à la fin, et le deuxième astromo qui joue le même thème à l'envers qui part de la fin pour aller au début. Des trucs amusants comme ça, des jeux. Là, ça fait penser à Pérec. Ce sont des contraintes qui sont des marches au pied pour l'imagination. Et vous vous souvenez précisément de la découverte de mon oncle à l'époque ? Je pense qu'on ne le voyait pas comme on le verrait aujourd'hui, parce que j'ai revu mon oncle dernièrement, et ça ne fait pas autant d'effet qu'à l'époque, parce que le décalage était énorme entre le mobilier, qui était fait par un designer vraiment de l'époque, et qui était vendu après par Macha Makeyev. Donc, il y a eu toute une esthétique. La Villa Arpèle, oui. Oui,

  • Speaker #1

    ça, des trucs marrants. Alors qu'aujourd'hui, c'est presque passé dans les mœurs. Le mec qui fait marcher sa fontaine en arrivant chez lui, mais il y a plein de connards qui ont des maisons de campagne où ils se sont fait une fausse fontaine en plastique et ils mettent le truc en route quand ils arrivent. C'est devenu comme ça. À l'époque, c'était complètement plouc. Maintenant, c'est devenu bourgeois. On va donc se quitter avec cet hommage à Jacques Théaty et à ce compositeur, Franck Barcellini, qui a écrit ce thème, qui a traversé le temps, le thème de mon oncle. Merci Jean-Claude Vanier. C'est moi qui vous remercie.

Chapters

  • La vocation d'un compositeur et ses influences

    00:00

  • Jean-Claude Vannier et son parcours cinématographique

    02:24

  • L'impact de "Le Troisième Homme" sur Vannier

    05:45

  • Nino Rota et l'émotion dans "L'Astrada"

    12:16

  • Jacques Tati et l'importance de la musique dans ses films

    17:50

Description

Pour ce cinquième épisode, nous accueillons un compositeur autodidacte, qui déteste l’idée du professionnalisme, un poète du bricolage, passionné par ce qui est déglingué, par les fausses notes, par les instruments désaccordés. 

Au cinéma, ses partitions emblématiques s’intitulent Slogan, La Horse, Projection privée, Les Lolos de Lola, Les Guichets du Louvre, L’Amour propre ne le reste jamais très longtemps, Comédie d’été, Bienvenu à bord, La Tour Montparnasse infernale, Les Amants réguliers, La Frontière de l’aube, Microbe et gasoil.

Crédits musicaux :

Les 400 coups / Musique de Jean Constantin - Editions Les Films du Carrosse

Truffaut cha cha cha, par Jean Constantin / Paroles et musique de Jean Constantin / Arrangement et direction d'orchestre : Jean-Claude Vannier. Inédit

Le Troisième homme (The Third man) / Musique d'Anton Karas - Editions Chappell

La Strada / Musique de Nino Rota - Editions Redi Ponti de Laurentiis

Touchez par au grisbi / Musique de Jean Wiener

Interprétée par Jean Wiener (piano) et Jean Wetzel (harmonica)

Editions Warner Chappell Music France 

Mon oncle / Musique de Franck Barcellini - Editions Emi Music Publishing France / Specta Films 


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Evocation d'une vocation, un compositeur d'aujourd'hui nous raconte les cinq bandes originales fondatrices qui ont façonné son ADN, et lui ont transmis l'envie, l'impulsion d'écrire pour l'image. Pour ce cinquième épisode, nous accueillons un compositeur autodidacte qui déteste l'idée du professionnalisme, un poète du bricolage, passionné par tout ce qui est déglingué, par les fausses notes, par les instruments désaccordés. Au cinéma, ses partitions emblématiques s'intitulent « Slogan » , « La Horse » , Projections privées, les lolos de Lola, les guichets du Louvre, l'amour propre ne le reste jamais très longtemps, comédie d'été, bienvenue à bord, la tourbamparnasse infernale, les amants réguliers, la frontière de l'aube, microbes gasoiles. Bonjour Jean-Claude Vannier.

  • Speaker #1

    Bonjour. Vous êtes né à Bécon-les-Bruyères où vous avez grandi. Oui. Quelle était la place du cinéma dans votre enfance et votre jeunesse ? Pas grande parce que mes parents ne sortaient pas, ils étaient contre cette idée de plaisir je pense. Il y avait deux cinémas à Bécamp, il y avait le Bécamp Palace et le Casino de Bécamp. Les noms même de ces cinémas étaient dérisoires, c'était des cinémas des années 50. Alors c'était l'époque où il y avait des actualités peintes sur un écran. Et en attraction il y avait des humoristes ou des musiciens qui venaient, comme ça j'ai pu voir Gilbert Bécamp ou des gens comme ça. Et donc, je n'ai pas vu beaucoup de films quand j'étais jeune.

  • Speaker #0

    Mais vous aimiez ça ou pas ? Moi, je trouvais ça sympa. J'aime bien. Donc, j'ai vu ce film, Les 400 coups, où Jean-Pierre Lehoux, qui a à peu près mon âge Alors, évidemment, il y avait une génération de se regarder soi-même miroir, un petit peu empathique. Et donc, j'étais très emballé par ce film. Et j'ai beaucoup aimé la musique. Pourquoi ? Parce qu'elle est simple. C'est pas une musique prétentieuse, c'est une musique simple, mélodique. Je me souviens plus qui l'a écrite. C'est Jean Constantin. Jean Constantin, voilà. Il a toujours eu des idées mélodiques assez astucieuses, bien parisiennes, bien françaises. Je trouve ça très sidérant. Ça me le rapproche de Marguerite Monod, comme genre. Même différence pour l'un comme pour l'autre. Et en tout cas, j'ai adoré cette musique. Et vous avez vous-même réorchestré Merci. cette musique, 13 ans plus tard, en travaillant avec Jean Constantin, qui s'appelle Le Poulpe, et Jean Constantin a transformé sa valse des 400 coups en cha-cha dédiée à François Truffaut. Je ne me souviens pas de ça, mais c'est possible. Je me souviens vaguement que j'ai fait un disque avec lui, mais je ne me souviens plus quoi. En tout cas, j'ai adoré cette musique de film. Alors voici donc la version originale des 400 coups, musique de Jean Constantin, orchestrée par Michel Legrand, et juste ensuite, la version réarrangée par Jean-Claude Vanier, 13 ans plus tard, avec un texte, en hommage au cinéma Truffaut, Truffaut, cha-cha-cha, interprété par Jean Constantin au moment. Alors un autre choix déterminant dans votre enfance, c'est un film de Carol Reed, et qui est un film qui a donné un coup de pied dans la fourmilière, puisque au lieu d'avoir une partition qui s'aligne sur tous les détails de l'action, c'est un polar qui se passe à Vienne, il y avait un seul et même thème joué à la cita. Anton Karras, le troisième homme. Oui. D'abord parce que là j'ai découvert cet instrument extraordinaire, la sitar, j'en ai même mis plus tard dans des musiques de films. J'ai eu du mal à trouver les gens qui en jouaient. Mais surtout j'ai trouvé la construction et la place où est mise la musique et sa signification dans l'action, dans l'image, etc. C'est formidable d'avoir mis toujours ce thème là, comme ça. Ça pourrait paraître obsédant, ça pourrait paraître paresseux, ça pourrait paraître ennuyeux, mais c'est formidable. Formidable l'emploi même, l'intelligence de l'emploi. En fait, ce qui s'est passé, c'est que ce film a été tourné à Vienne. Et en face de l'opéra, il y a le Café Mozart et le café où il y a la tarte célèbre. Je t'en fous. Et donc, il y avait Anton Carras qui jouait de la sitar. Il jouait ce thème qui n'avait pas du tout été fait pour le film. Tampana, voilà, etc. Et je ne sais pas si c'est par Orsanwell qui a dit mais c'est formidable votre musique etc. Oui, Carol Reid qui l'a attrapée. C'est ça. Et donc ils ont enregistré à la va-vite ce truc et puis ils n'ont pas appelé aucun compositeur, ils ont mis que cette musique-là dans le film. Et je trouve ça génial, vraiment le mot n'est pas trop fort. Mais est-ce que vous aimez le thème en lui-même ou est-ce que vous aimez le principe même de la répétition ?

  • Speaker #1

    C'est ce que je vous disais, c'est le principe même de la répétition et la place, comment elle est employée, la musique et ce qu'elle signifie dans le film. C'est magnifique ça. Elle a une vraie signification obsédante avec l'action. Ça marche très très bien avec le film d'ailleurs, le film a fonctionné. Et vous, dans vos enregistrements, qui avez-vous employé à la CITAR ? J'ai pris un type qui était le patron du syndicat des boulangers, et qui donnait des cours de CITAR. Ah oui ? Oui. J'ai eu un mal fou avec lui, parce qu'évidemment, ces gens-là ne disent pas la musique, mais ça n'empêche qu'ils sont très bons musiciens. C'était pas mal, ce qu'il a fait, j'aimais bien. Et puis surtout, il y a des choses que je n'avais pas prévues dans la citadelle. Des machins comme ça. Il a reproduit ça magnifiquement. C'est tout un style, c'est ça la musique. C'est comme le tango, comme tout ça. Il faut que ça soit joué par des gens qui connaissent bien le truc. Donc, Antoine Carras, c'est moi, j'ai beaucoup peur.

  • Speaker #0

    Un autre choix, d'un instrument soliste à un autre, de la cita à la trompette, c'est le film qui a vraiment fait éclater mondialement l'écriture de Nino Rota chez Fellini, l'Astrada. Pourtant, Nino Rota avait fait beaucoup de films avant. Pas seulement avec Fellini, il est là depuis le début. Mais de la carrière de Fellini, il avait fait plein d'autres. Il avait fait une œuvre monumentale, comment dire, Nino Rantana. Elle a commencé dans les années 30, donc il avait déjà presque 20 ans de cinéma au compteur avant l'Astrada.

  • Speaker #1

    Oui, mais il n'a pas fait que du cinéma, il a fait des symphonies, des concertos, c'est absolument dingue. Et donc l'Astrada. L'Astrada, c'était jouer à la trompette, ça correspondait parfaitement à l'image que, je crois, Fellini voulait donner de sa femme à l'époque, Giulietta Massina. Ça correspondait... à l'ambiance du cirque, ça correspondait à la solitude, c'était extraordinaire. J'ai adoré ce truc. Le thème est beau, comme toujours, Nino Rotin, un génie musical, formidable, très particulier, on le connaît tout de suite. C'est en même temps traditionnel et malin. Et puis ça me touche au cœur, toujours, toutes les musiques de Nino Rota, je trouve ça exemplaire. Et celle-là, celle-là qui est pratiquement sans accompagnement, qui est un solo de trompette qui tire des larmes, véritablement.

  • Speaker #0

    C'est presque, oui, comme une longue plainte, qui est la plainte du personnage de Gelsomina. Et ça, c'est le travail de Fellini et de Nino Rota, parce que Nino Rota a peut-être eu l'idée du thème, mais je pense que Fellini a insisté pour que ça soit utilisé de cette façon-là. Il y a aussi les deux, c'est un duo, c'est ça qui est formidable. que j'ai jamais eu la chance d'avoir, c'est le Dio Nino Rota Fellini, qui a fonctionné à merveille. Même si je pense sur le plan amical. Moi, je n'ai pas eu cette chance d'avoir un frère cinéaste. Et vous le regrettez ? Oui, je le regrette. C'est toujours bien. Ça aurait été pas mal. On aurait fait les choses ensemble. C'était marrant. Ils se sont déconnés. et l'harmonica avec un soloiste. Il ne touchait pas au Grisby. Jean Wetzel à l'harmonica et Jean Vienner à la composition. Alors Jean Vienner, il se fait que Je l'ai entendu parler de lui, c'est un mec que je voulais absolument rencontrer, je n'osais pas l'appeler. Mon grand-père avait fait son service militaire avec lui. Et pour mille raisons, je n'osais pas l'appeler. Et puis un jour, je vois Vienner sur une liste d'altos, de musiciens qui jouaient dans l'orchestre que j'avais à diriger. Je lui dis « Vous êtes de la famille de Jean Vianney ? » Il me dit « Oui, je suis son fils. » Je lui dis « Écoutez, ça ne vous ennuierait pas de lui dire que j'ai rien rencontré. » Et je me suis lancé, j'avais vraiment le trac. Et donc, on s'est appelé, j'étais le voir, il habitait dans une rue dans le 18ème, qui montait, je me souviens. Il avait un bureau d'écolier, sur lequel il écrivait la musique. et un mur d'écoliers anciens, avec des petits engrais, et tout ça. Et puis, à angle droit, il y avait le piano. Ils sortaient de l'un à l'autre, comme ça, je trouvais ça marrant. On est devenus hyper amis. Donc, on sortait ensemble, etc. Il avait sa copine qui s'appelait Alice, je crois. Il disait, ma compagne. Il était charmant, on discutait de plein de trucs. Il m'a appris plein de trucs formidables. Il m'a appris, il avait connu Stravinsky, Ravel, tous ces gens-là. Satie. Et donc il m'a dit, mais le Poulenc, il me dit, mais le plus marrant de la bande, le plus déconnant, le plus hirsute, c'était vraiment Stravinsky. Qu'est-ce qui me faisait marrer ? Et tout d'un coup, quand il m'a dit ça, ça m'a, moi qui adorais Stravinsky un peu comme une idole, un peu d'une manière chrétienne, je dirais, il me l'a ramené à la vie. Il m'a présenté un mauvais élève déconnant, marrant, qui était prêt à toutes les blagues et tout ça, mais également j'entends. Et c'est vrai qu'à chaque fois que je regarde une partition de Stravitri, je vois où il s'amuse. Je vois qu'il s'amuse. En fait, il se marre comme un fou. C'est un élève, un bon élève iconoclaste. C'est incroyable. Mais vous qui aimiez l'écriture de Wiener, est-ce que vous avez retrouvé dans l'homme, dans l'être humain, ce que vous admiriez dans son langage ?

  • Speaker #1

    Oui, parce que c'est toute une époque, Wiener. C'est pas moderne. C'est un type de l'époque 30-40, juste avant la guerre. Parce qu'il s'est planqué pendant la guerre. Mais dans l'époque 30-40, il avait un duo qui s'appelle Wiener et Doucet, deux pianistes, au bœuf sur le toit, je pense. Cette musique de Touché pas au gris-bis, je la trouve formidable pour plusieurs raisons. D'abord parce qu'elle est très simple, c'est accompagné au piano avec un harmonica qui vibre, j'adore ça. Et en plus, ça a l'air, comment dire, populaire comme ça, et malin, pour faire un tube, mais en fait c'est beaucoup plus que ça. Si vous l'écoutez d'un bout à l'autre, vous verrez que vous êtes incapable de la reproduire de mémoire. Pourquoi ? Parce que c'est comme beaucoup de choses bien foutues, comme certaines chansons des Beatles, comme d'autres thèmes de Gershwin ou je sais pas trop qui. Des gens qui ont le génie de la mélodie, comme ça. Et cette mélodie est extrêmement complexe et extrêmement intelligente, et elle est, comment dire Super, elle correspond vachement bien en plus à l'esprit du film. L'esprit du grisby. Le grisby, c'est un mot qui a été inventé par le breton le grisby. Il y a plusieurs de ses romans qui s'appellent comme ça. Et donc voilà, ça me faisait marrer d'abord le mot grisby, de toute façon étymologiquement, et puis la personnalité de Vionner qui était un gentil garçon, super sympa, modeste, marrant, qui travaillait à l'assassin à un moment donné. Il était justement, il supervisait les partitions des musiques de films, je crois. Je vous ai vu passer vos partitions quelques fois, ça m'amuse beaucoup.

  • Speaker #0

    Il était à la commission d'audiovisuel. Mais vous savez qu'en fait, Viennaire a écrit pour le film une partition de 40 ou 50 minutes à l'image. Une partition que Jacques Becker, le metteur en scène, a intégralement mise à la poubelle pour garder que le thème qu'il a répété un peu sur le principe du troisième ordre. Il a bien fait, parce que c'est vraiment bien. Sous- Et dernier choix, qui est lié à un cinéaste qui a marqué la comédie à la française, qui en partant d'ailleurs d'un univers burlesque, est allé vers une esthétique de plus en plus abstraite, c'est Jacques Tati. Vous avez pris le film presque du milieu de sa carrière, et qui a été d'ailleurs son dernier succès commercial, avec un film très personnel qui parle de la transition entre deux mondes, et ce film c'est Mon Oncle.

  • Speaker #2

    Oui, c'est pareil, c'est une musique, c'est Francis Lemarque qui a fait ça non ? C'est Franck Barcellini.

  • Speaker #1

    Bon, en tout cas. Je trouve cette musique magnifique parce qu'elle donne bien la naïveté du personnage. Et puis la familiarité aussi. C'est assez amusant. Ça marche très bien avec le film. Je crois que le film aurait été détruit par une musique symphonique par exemple. Mais là, c'était exactement ce qu'il fallait. Je trouve que ça colle parfaitement à l'esprit de Tati. J'ai beaucoup aimé Tati. Je pense qu'il est... Il a été pillé, copié, tout ça, etc. Mais je trouve que Tati était formidable. Est-ce que vous comprenez aussi son choix de prendre plutôt des compositeurs de chansons, de variétés, en tout cas de prendre des profanes de la musique de film ? Oui, je comprends très bien. Un professionnel de la musique de film, ça peut être envahissant, chiant, qui nous a bassourdés avec son professionnalisme, ses fucs, ses contrepoints, ses problèmes harmoniques et tout ça. Je trouve qu'il a très bien fait. Et puis, quand vous avez vu le film, vous avez perçu aussi que Merci. par rapport à ce qui se faisait beaucoup à l'époque en comédie avec ce compositeur d'ailleurs très doué, Gérard Calvi, qui écrivait sur des films comiques, des musiques comiques. Mais il écrivait pour les branquignoles.

  • Speaker #0

    Les branquignoles, des musiques à effet façon Spike Jonze en quelque sorte. Oui, bien sûr. Alors que Tati, lui, c'était tout le contraire. Il voulait des musiques, des rengaines populaires, populistes, des valses, des faubourgs.

  • Speaker #1

    Oui, je préfère ça, moi. J'aime beaucoup, j'ai entendu des trucs de Calvi qui sont des trucs formidables. Je suis pas bien fou de la musique genre Spike Jonze et compagnie. Je déteste ça, la musique Blague, quoi. La musique qui veut faire rire. Oui. Quand, par exemple, Eric et Ramzy m'ont appelé pour faire la tournée de la Parnasse infernale, ils m'ont demandé de faire de la musique comique. Et je leur ai dit, je ne peux pas, tout simplement. Ça ne m'amuse pas, d'abord, je ne sais pas le faire, etc. Je leur ai dit, je vais faire une musique traditionnelle, de ce qu'on met sur les films américains, et je vous ferai que votre comique ressortira encore mieux. Et j'ai vu qu'Eric, il n'y a pas longtemps, m'a dit que c'était une super idée. C'est la meilleure idée qu'on puisse avoir.

  • Speaker #0

    C'est-à-dire d'avoir un contrepoint. par rapport à ce qu'on voit à l'image. Et là, en l'occurrence, c'est un contrepoint de sentiment qui met d'autant plus, par effet de contraste, en valeur la drôlerie des situations. Oui, c'est ça, c'est même qui le met en valeur. Je sais que Mozart a fait des musiques, des plaisanteries, des plaisanteries musicales. Ces plaisanteries musicales, j'en ai des partitions ici, c'est marrant comme tout, mais c'est un mec qui joue fou à un moment donné parce qu'il a perdu la partition. des musiques qu'on jouait au dé, il a fait ça aussi. Il avait à chaque mesure porté un nombre, je tirais les dires, mais la cinquième, il y a le duo de la table, ce qu'on appelle le duo de la table, c'est une partition, il y a un violoniste en face de vous à la table, et chacun joue la partition, l'un à l'envers et l'autre à l'endroit. Il y a un moment où ça coince un petit peu, vers le milieu, et ça marche. C'est rigolo. Beaucoup de musiciens ont fait, Rameau aussi a fait des canons. Tomura va trop vite, je crois que c'est de lui. Unietudo. Des trucs comme ça. Il a fait des canons, mais des canons complexes. Bach a fait, dans l'art de la fugue, des trucs insensés. Un thème qui part du début jusqu'à la fin, et le deuxième astromo qui joue le même thème à l'envers qui part de la fin pour aller au début. Des trucs amusants comme ça, des jeux. Là, ça fait penser à Pérec. Ce sont des contraintes qui sont des marches au pied pour l'imagination. Et vous vous souvenez précisément de la découverte de mon oncle à l'époque ? Je pense qu'on ne le voyait pas comme on le verrait aujourd'hui, parce que j'ai revu mon oncle dernièrement, et ça ne fait pas autant d'effet qu'à l'époque, parce que le décalage était énorme entre le mobilier, qui était fait par un designer vraiment de l'époque, et qui était vendu après par Macha Makeyev. Donc, il y a eu toute une esthétique. La Villa Arpèle, oui. Oui,

  • Speaker #1

    ça, des trucs marrants. Alors qu'aujourd'hui, c'est presque passé dans les mœurs. Le mec qui fait marcher sa fontaine en arrivant chez lui, mais il y a plein de connards qui ont des maisons de campagne où ils se sont fait une fausse fontaine en plastique et ils mettent le truc en route quand ils arrivent. C'est devenu comme ça. À l'époque, c'était complètement plouc. Maintenant, c'est devenu bourgeois. On va donc se quitter avec cet hommage à Jacques Théaty et à ce compositeur, Franck Barcellini, qui a écrit ce thème, qui a traversé le temps, le thème de mon oncle. Merci Jean-Claude Vanier. C'est moi qui vous remercie.

Chapters

  • La vocation d'un compositeur et ses influences

    00:00

  • Jean-Claude Vannier et son parcours cinématographique

    02:24

  • L'impact de "Le Troisième Homme" sur Vannier

    05:45

  • Nino Rota et l'émotion dans "L'Astrada"

    12:16

  • Jacques Tati et l'importance de la musique dans ses films

    17:50

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Description

Pour ce cinquième épisode, nous accueillons un compositeur autodidacte, qui déteste l’idée du professionnalisme, un poète du bricolage, passionné par ce qui est déglingué, par les fausses notes, par les instruments désaccordés. 

Au cinéma, ses partitions emblématiques s’intitulent Slogan, La Horse, Projection privée, Les Lolos de Lola, Les Guichets du Louvre, L’Amour propre ne le reste jamais très longtemps, Comédie d’été, Bienvenu à bord, La Tour Montparnasse infernale, Les Amants réguliers, La Frontière de l’aube, Microbe et gasoil.

Crédits musicaux :

Les 400 coups / Musique de Jean Constantin - Editions Les Films du Carrosse

Truffaut cha cha cha, par Jean Constantin / Paroles et musique de Jean Constantin / Arrangement et direction d'orchestre : Jean-Claude Vannier. Inédit

Le Troisième homme (The Third man) / Musique d'Anton Karas - Editions Chappell

La Strada / Musique de Nino Rota - Editions Redi Ponti de Laurentiis

Touchez par au grisbi / Musique de Jean Wiener

Interprétée par Jean Wiener (piano) et Jean Wetzel (harmonica)

Editions Warner Chappell Music France 

Mon oncle / Musique de Franck Barcellini - Editions Emi Music Publishing France / Specta Films 


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Evocation d'une vocation, un compositeur d'aujourd'hui nous raconte les cinq bandes originales fondatrices qui ont façonné son ADN, et lui ont transmis l'envie, l'impulsion d'écrire pour l'image. Pour ce cinquième épisode, nous accueillons un compositeur autodidacte qui déteste l'idée du professionnalisme, un poète du bricolage, passionné par tout ce qui est déglingué, par les fausses notes, par les instruments désaccordés. Au cinéma, ses partitions emblématiques s'intitulent « Slogan » , « La Horse » , Projections privées, les lolos de Lola, les guichets du Louvre, l'amour propre ne le reste jamais très longtemps, comédie d'été, bienvenue à bord, la tourbamparnasse infernale, les amants réguliers, la frontière de l'aube, microbes gasoiles. Bonjour Jean-Claude Vannier.

  • Speaker #1

    Bonjour. Vous êtes né à Bécon-les-Bruyères où vous avez grandi. Oui. Quelle était la place du cinéma dans votre enfance et votre jeunesse ? Pas grande parce que mes parents ne sortaient pas, ils étaient contre cette idée de plaisir je pense. Il y avait deux cinémas à Bécamp, il y avait le Bécamp Palace et le Casino de Bécamp. Les noms même de ces cinémas étaient dérisoires, c'était des cinémas des années 50. Alors c'était l'époque où il y avait des actualités peintes sur un écran. Et en attraction il y avait des humoristes ou des musiciens qui venaient, comme ça j'ai pu voir Gilbert Bécamp ou des gens comme ça. Et donc, je n'ai pas vu beaucoup de films quand j'étais jeune.

  • Speaker #0

    Mais vous aimiez ça ou pas ? Moi, je trouvais ça sympa. J'aime bien. Donc, j'ai vu ce film, Les 400 coups, où Jean-Pierre Lehoux, qui a à peu près mon âge Alors, évidemment, il y avait une génération de se regarder soi-même miroir, un petit peu empathique. Et donc, j'étais très emballé par ce film. Et j'ai beaucoup aimé la musique. Pourquoi ? Parce qu'elle est simple. C'est pas une musique prétentieuse, c'est une musique simple, mélodique. Je me souviens plus qui l'a écrite. C'est Jean Constantin. Jean Constantin, voilà. Il a toujours eu des idées mélodiques assez astucieuses, bien parisiennes, bien françaises. Je trouve ça très sidérant. Ça me le rapproche de Marguerite Monod, comme genre. Même différence pour l'un comme pour l'autre. Et en tout cas, j'ai adoré cette musique. Et vous avez vous-même réorchestré Merci. cette musique, 13 ans plus tard, en travaillant avec Jean Constantin, qui s'appelle Le Poulpe, et Jean Constantin a transformé sa valse des 400 coups en cha-cha dédiée à François Truffaut. Je ne me souviens pas de ça, mais c'est possible. Je me souviens vaguement que j'ai fait un disque avec lui, mais je ne me souviens plus quoi. En tout cas, j'ai adoré cette musique de film. Alors voici donc la version originale des 400 coups, musique de Jean Constantin, orchestrée par Michel Legrand, et juste ensuite, la version réarrangée par Jean-Claude Vanier, 13 ans plus tard, avec un texte, en hommage au cinéma Truffaut, Truffaut, cha-cha-cha, interprété par Jean Constantin au moment. Alors un autre choix déterminant dans votre enfance, c'est un film de Carol Reed, et qui est un film qui a donné un coup de pied dans la fourmilière, puisque au lieu d'avoir une partition qui s'aligne sur tous les détails de l'action, c'est un polar qui se passe à Vienne, il y avait un seul et même thème joué à la cita. Anton Karras, le troisième homme. Oui. D'abord parce que là j'ai découvert cet instrument extraordinaire, la sitar, j'en ai même mis plus tard dans des musiques de films. J'ai eu du mal à trouver les gens qui en jouaient. Mais surtout j'ai trouvé la construction et la place où est mise la musique et sa signification dans l'action, dans l'image, etc. C'est formidable d'avoir mis toujours ce thème là, comme ça. Ça pourrait paraître obsédant, ça pourrait paraître paresseux, ça pourrait paraître ennuyeux, mais c'est formidable. Formidable l'emploi même, l'intelligence de l'emploi. En fait, ce qui s'est passé, c'est que ce film a été tourné à Vienne. Et en face de l'opéra, il y a le Café Mozart et le café où il y a la tarte célèbre. Je t'en fous. Et donc, il y avait Anton Carras qui jouait de la sitar. Il jouait ce thème qui n'avait pas du tout été fait pour le film. Tampana, voilà, etc. Et je ne sais pas si c'est par Orsanwell qui a dit mais c'est formidable votre musique etc. Oui, Carol Reid qui l'a attrapée. C'est ça. Et donc ils ont enregistré à la va-vite ce truc et puis ils n'ont pas appelé aucun compositeur, ils ont mis que cette musique-là dans le film. Et je trouve ça génial, vraiment le mot n'est pas trop fort. Mais est-ce que vous aimez le thème en lui-même ou est-ce que vous aimez le principe même de la répétition ?

  • Speaker #1

    C'est ce que je vous disais, c'est le principe même de la répétition et la place, comment elle est employée, la musique et ce qu'elle signifie dans le film. C'est magnifique ça. Elle a une vraie signification obsédante avec l'action. Ça marche très très bien avec le film d'ailleurs, le film a fonctionné. Et vous, dans vos enregistrements, qui avez-vous employé à la CITAR ? J'ai pris un type qui était le patron du syndicat des boulangers, et qui donnait des cours de CITAR. Ah oui ? Oui. J'ai eu un mal fou avec lui, parce qu'évidemment, ces gens-là ne disent pas la musique, mais ça n'empêche qu'ils sont très bons musiciens. C'était pas mal, ce qu'il a fait, j'aimais bien. Et puis surtout, il y a des choses que je n'avais pas prévues dans la citadelle. Des machins comme ça. Il a reproduit ça magnifiquement. C'est tout un style, c'est ça la musique. C'est comme le tango, comme tout ça. Il faut que ça soit joué par des gens qui connaissent bien le truc. Donc, Antoine Carras, c'est moi, j'ai beaucoup peur.

  • Speaker #0

    Un autre choix, d'un instrument soliste à un autre, de la cita à la trompette, c'est le film qui a vraiment fait éclater mondialement l'écriture de Nino Rota chez Fellini, l'Astrada. Pourtant, Nino Rota avait fait beaucoup de films avant. Pas seulement avec Fellini, il est là depuis le début. Mais de la carrière de Fellini, il avait fait plein d'autres. Il avait fait une œuvre monumentale, comment dire, Nino Rantana. Elle a commencé dans les années 30, donc il avait déjà presque 20 ans de cinéma au compteur avant l'Astrada.

  • Speaker #1

    Oui, mais il n'a pas fait que du cinéma, il a fait des symphonies, des concertos, c'est absolument dingue. Et donc l'Astrada. L'Astrada, c'était jouer à la trompette, ça correspondait parfaitement à l'image que, je crois, Fellini voulait donner de sa femme à l'époque, Giulietta Massina. Ça correspondait... à l'ambiance du cirque, ça correspondait à la solitude, c'était extraordinaire. J'ai adoré ce truc. Le thème est beau, comme toujours, Nino Rotin, un génie musical, formidable, très particulier, on le connaît tout de suite. C'est en même temps traditionnel et malin. Et puis ça me touche au cœur, toujours, toutes les musiques de Nino Rota, je trouve ça exemplaire. Et celle-là, celle-là qui est pratiquement sans accompagnement, qui est un solo de trompette qui tire des larmes, véritablement.

  • Speaker #0

    C'est presque, oui, comme une longue plainte, qui est la plainte du personnage de Gelsomina. Et ça, c'est le travail de Fellini et de Nino Rota, parce que Nino Rota a peut-être eu l'idée du thème, mais je pense que Fellini a insisté pour que ça soit utilisé de cette façon-là. Il y a aussi les deux, c'est un duo, c'est ça qui est formidable. que j'ai jamais eu la chance d'avoir, c'est le Dio Nino Rota Fellini, qui a fonctionné à merveille. Même si je pense sur le plan amical. Moi, je n'ai pas eu cette chance d'avoir un frère cinéaste. Et vous le regrettez ? Oui, je le regrette. C'est toujours bien. Ça aurait été pas mal. On aurait fait les choses ensemble. C'était marrant. Ils se sont déconnés. et l'harmonica avec un soloiste. Il ne touchait pas au Grisby. Jean Wetzel à l'harmonica et Jean Vienner à la composition. Alors Jean Vienner, il se fait que Je l'ai entendu parler de lui, c'est un mec que je voulais absolument rencontrer, je n'osais pas l'appeler. Mon grand-père avait fait son service militaire avec lui. Et pour mille raisons, je n'osais pas l'appeler. Et puis un jour, je vois Vienner sur une liste d'altos, de musiciens qui jouaient dans l'orchestre que j'avais à diriger. Je lui dis « Vous êtes de la famille de Jean Vianney ? » Il me dit « Oui, je suis son fils. » Je lui dis « Écoutez, ça ne vous ennuierait pas de lui dire que j'ai rien rencontré. » Et je me suis lancé, j'avais vraiment le trac. Et donc, on s'est appelé, j'étais le voir, il habitait dans une rue dans le 18ème, qui montait, je me souviens. Il avait un bureau d'écolier, sur lequel il écrivait la musique. et un mur d'écoliers anciens, avec des petits engrais, et tout ça. Et puis, à angle droit, il y avait le piano. Ils sortaient de l'un à l'autre, comme ça, je trouvais ça marrant. On est devenus hyper amis. Donc, on sortait ensemble, etc. Il avait sa copine qui s'appelait Alice, je crois. Il disait, ma compagne. Il était charmant, on discutait de plein de trucs. Il m'a appris plein de trucs formidables. Il m'a appris, il avait connu Stravinsky, Ravel, tous ces gens-là. Satie. Et donc il m'a dit, mais le Poulenc, il me dit, mais le plus marrant de la bande, le plus déconnant, le plus hirsute, c'était vraiment Stravinsky. Qu'est-ce qui me faisait marrer ? Et tout d'un coup, quand il m'a dit ça, ça m'a, moi qui adorais Stravinsky un peu comme une idole, un peu d'une manière chrétienne, je dirais, il me l'a ramené à la vie. Il m'a présenté un mauvais élève déconnant, marrant, qui était prêt à toutes les blagues et tout ça, mais également j'entends. Et c'est vrai qu'à chaque fois que je regarde une partition de Stravitri, je vois où il s'amuse. Je vois qu'il s'amuse. En fait, il se marre comme un fou. C'est un élève, un bon élève iconoclaste. C'est incroyable. Mais vous qui aimiez l'écriture de Wiener, est-ce que vous avez retrouvé dans l'homme, dans l'être humain, ce que vous admiriez dans son langage ?

  • Speaker #1

    Oui, parce que c'est toute une époque, Wiener. C'est pas moderne. C'est un type de l'époque 30-40, juste avant la guerre. Parce qu'il s'est planqué pendant la guerre. Mais dans l'époque 30-40, il avait un duo qui s'appelle Wiener et Doucet, deux pianistes, au bœuf sur le toit, je pense. Cette musique de Touché pas au gris-bis, je la trouve formidable pour plusieurs raisons. D'abord parce qu'elle est très simple, c'est accompagné au piano avec un harmonica qui vibre, j'adore ça. Et en plus, ça a l'air, comment dire, populaire comme ça, et malin, pour faire un tube, mais en fait c'est beaucoup plus que ça. Si vous l'écoutez d'un bout à l'autre, vous verrez que vous êtes incapable de la reproduire de mémoire. Pourquoi ? Parce que c'est comme beaucoup de choses bien foutues, comme certaines chansons des Beatles, comme d'autres thèmes de Gershwin ou je sais pas trop qui. Des gens qui ont le génie de la mélodie, comme ça. Et cette mélodie est extrêmement complexe et extrêmement intelligente, et elle est, comment dire Super, elle correspond vachement bien en plus à l'esprit du film. L'esprit du grisby. Le grisby, c'est un mot qui a été inventé par le breton le grisby. Il y a plusieurs de ses romans qui s'appellent comme ça. Et donc voilà, ça me faisait marrer d'abord le mot grisby, de toute façon étymologiquement, et puis la personnalité de Vionner qui était un gentil garçon, super sympa, modeste, marrant, qui travaillait à l'assassin à un moment donné. Il était justement, il supervisait les partitions des musiques de films, je crois. Je vous ai vu passer vos partitions quelques fois, ça m'amuse beaucoup.

  • Speaker #0

    Il était à la commission d'audiovisuel. Mais vous savez qu'en fait, Viennaire a écrit pour le film une partition de 40 ou 50 minutes à l'image. Une partition que Jacques Becker, le metteur en scène, a intégralement mise à la poubelle pour garder que le thème qu'il a répété un peu sur le principe du troisième ordre. Il a bien fait, parce que c'est vraiment bien. Sous- Et dernier choix, qui est lié à un cinéaste qui a marqué la comédie à la française, qui en partant d'ailleurs d'un univers burlesque, est allé vers une esthétique de plus en plus abstraite, c'est Jacques Tati. Vous avez pris le film presque du milieu de sa carrière, et qui a été d'ailleurs son dernier succès commercial, avec un film très personnel qui parle de la transition entre deux mondes, et ce film c'est Mon Oncle.

  • Speaker #2

    Oui, c'est pareil, c'est une musique, c'est Francis Lemarque qui a fait ça non ? C'est Franck Barcellini.

  • Speaker #1

    Bon, en tout cas. Je trouve cette musique magnifique parce qu'elle donne bien la naïveté du personnage. Et puis la familiarité aussi. C'est assez amusant. Ça marche très bien avec le film. Je crois que le film aurait été détruit par une musique symphonique par exemple. Mais là, c'était exactement ce qu'il fallait. Je trouve que ça colle parfaitement à l'esprit de Tati. J'ai beaucoup aimé Tati. Je pense qu'il est... Il a été pillé, copié, tout ça, etc. Mais je trouve que Tati était formidable. Est-ce que vous comprenez aussi son choix de prendre plutôt des compositeurs de chansons, de variétés, en tout cas de prendre des profanes de la musique de film ? Oui, je comprends très bien. Un professionnel de la musique de film, ça peut être envahissant, chiant, qui nous a bassourdés avec son professionnalisme, ses fucs, ses contrepoints, ses problèmes harmoniques et tout ça. Je trouve qu'il a très bien fait. Et puis, quand vous avez vu le film, vous avez perçu aussi que Merci. par rapport à ce qui se faisait beaucoup à l'époque en comédie avec ce compositeur d'ailleurs très doué, Gérard Calvi, qui écrivait sur des films comiques, des musiques comiques. Mais il écrivait pour les branquignoles.

  • Speaker #0

    Les branquignoles, des musiques à effet façon Spike Jonze en quelque sorte. Oui, bien sûr. Alors que Tati, lui, c'était tout le contraire. Il voulait des musiques, des rengaines populaires, populistes, des valses, des faubourgs.

  • Speaker #1

    Oui, je préfère ça, moi. J'aime beaucoup, j'ai entendu des trucs de Calvi qui sont des trucs formidables. Je suis pas bien fou de la musique genre Spike Jonze et compagnie. Je déteste ça, la musique Blague, quoi. La musique qui veut faire rire. Oui. Quand, par exemple, Eric et Ramzy m'ont appelé pour faire la tournée de la Parnasse infernale, ils m'ont demandé de faire de la musique comique. Et je leur ai dit, je ne peux pas, tout simplement. Ça ne m'amuse pas, d'abord, je ne sais pas le faire, etc. Je leur ai dit, je vais faire une musique traditionnelle, de ce qu'on met sur les films américains, et je vous ferai que votre comique ressortira encore mieux. Et j'ai vu qu'Eric, il n'y a pas longtemps, m'a dit que c'était une super idée. C'est la meilleure idée qu'on puisse avoir.

  • Speaker #0

    C'est-à-dire d'avoir un contrepoint. par rapport à ce qu'on voit à l'image. Et là, en l'occurrence, c'est un contrepoint de sentiment qui met d'autant plus, par effet de contraste, en valeur la drôlerie des situations. Oui, c'est ça, c'est même qui le met en valeur. Je sais que Mozart a fait des musiques, des plaisanteries, des plaisanteries musicales. Ces plaisanteries musicales, j'en ai des partitions ici, c'est marrant comme tout, mais c'est un mec qui joue fou à un moment donné parce qu'il a perdu la partition. des musiques qu'on jouait au dé, il a fait ça aussi. Il avait à chaque mesure porté un nombre, je tirais les dires, mais la cinquième, il y a le duo de la table, ce qu'on appelle le duo de la table, c'est une partition, il y a un violoniste en face de vous à la table, et chacun joue la partition, l'un à l'envers et l'autre à l'endroit. Il y a un moment où ça coince un petit peu, vers le milieu, et ça marche. C'est rigolo. Beaucoup de musiciens ont fait, Rameau aussi a fait des canons. Tomura va trop vite, je crois que c'est de lui. Unietudo. Des trucs comme ça. Il a fait des canons, mais des canons complexes. Bach a fait, dans l'art de la fugue, des trucs insensés. Un thème qui part du début jusqu'à la fin, et le deuxième astromo qui joue le même thème à l'envers qui part de la fin pour aller au début. Des trucs amusants comme ça, des jeux. Là, ça fait penser à Pérec. Ce sont des contraintes qui sont des marches au pied pour l'imagination. Et vous vous souvenez précisément de la découverte de mon oncle à l'époque ? Je pense qu'on ne le voyait pas comme on le verrait aujourd'hui, parce que j'ai revu mon oncle dernièrement, et ça ne fait pas autant d'effet qu'à l'époque, parce que le décalage était énorme entre le mobilier, qui était fait par un designer vraiment de l'époque, et qui était vendu après par Macha Makeyev. Donc, il y a eu toute une esthétique. La Villa Arpèle, oui. Oui,

  • Speaker #1

    ça, des trucs marrants. Alors qu'aujourd'hui, c'est presque passé dans les mœurs. Le mec qui fait marcher sa fontaine en arrivant chez lui, mais il y a plein de connards qui ont des maisons de campagne où ils se sont fait une fausse fontaine en plastique et ils mettent le truc en route quand ils arrivent. C'est devenu comme ça. À l'époque, c'était complètement plouc. Maintenant, c'est devenu bourgeois. On va donc se quitter avec cet hommage à Jacques Théaty et à ce compositeur, Franck Barcellini, qui a écrit ce thème, qui a traversé le temps, le thème de mon oncle. Merci Jean-Claude Vanier. C'est moi qui vous remercie.

Chapters

  • La vocation d'un compositeur et ses influences

    00:00

  • Jean-Claude Vannier et son parcours cinématographique

    02:24

  • L'impact de "Le Troisième Homme" sur Vannier

    05:45

  • Nino Rota et l'émotion dans "L'Astrada"

    12:16

  • Jacques Tati et l'importance de la musique dans ses films

    17:50

Description

Pour ce cinquième épisode, nous accueillons un compositeur autodidacte, qui déteste l’idée du professionnalisme, un poète du bricolage, passionné par ce qui est déglingué, par les fausses notes, par les instruments désaccordés. 

Au cinéma, ses partitions emblématiques s’intitulent Slogan, La Horse, Projection privée, Les Lolos de Lola, Les Guichets du Louvre, L’Amour propre ne le reste jamais très longtemps, Comédie d’été, Bienvenu à bord, La Tour Montparnasse infernale, Les Amants réguliers, La Frontière de l’aube, Microbe et gasoil.

Crédits musicaux :

Les 400 coups / Musique de Jean Constantin - Editions Les Films du Carrosse

Truffaut cha cha cha, par Jean Constantin / Paroles et musique de Jean Constantin / Arrangement et direction d'orchestre : Jean-Claude Vannier. Inédit

Le Troisième homme (The Third man) / Musique d'Anton Karas - Editions Chappell

La Strada / Musique de Nino Rota - Editions Redi Ponti de Laurentiis

Touchez par au grisbi / Musique de Jean Wiener

Interprétée par Jean Wiener (piano) et Jean Wetzel (harmonica)

Editions Warner Chappell Music France 

Mon oncle / Musique de Franck Barcellini - Editions Emi Music Publishing France / Specta Films 


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Evocation d'une vocation, un compositeur d'aujourd'hui nous raconte les cinq bandes originales fondatrices qui ont façonné son ADN, et lui ont transmis l'envie, l'impulsion d'écrire pour l'image. Pour ce cinquième épisode, nous accueillons un compositeur autodidacte qui déteste l'idée du professionnalisme, un poète du bricolage, passionné par tout ce qui est déglingué, par les fausses notes, par les instruments désaccordés. Au cinéma, ses partitions emblématiques s'intitulent « Slogan » , « La Horse » , Projections privées, les lolos de Lola, les guichets du Louvre, l'amour propre ne le reste jamais très longtemps, comédie d'été, bienvenue à bord, la tourbamparnasse infernale, les amants réguliers, la frontière de l'aube, microbes gasoiles. Bonjour Jean-Claude Vannier.

  • Speaker #1

    Bonjour. Vous êtes né à Bécon-les-Bruyères où vous avez grandi. Oui. Quelle était la place du cinéma dans votre enfance et votre jeunesse ? Pas grande parce que mes parents ne sortaient pas, ils étaient contre cette idée de plaisir je pense. Il y avait deux cinémas à Bécamp, il y avait le Bécamp Palace et le Casino de Bécamp. Les noms même de ces cinémas étaient dérisoires, c'était des cinémas des années 50. Alors c'était l'époque où il y avait des actualités peintes sur un écran. Et en attraction il y avait des humoristes ou des musiciens qui venaient, comme ça j'ai pu voir Gilbert Bécamp ou des gens comme ça. Et donc, je n'ai pas vu beaucoup de films quand j'étais jeune.

  • Speaker #0

    Mais vous aimiez ça ou pas ? Moi, je trouvais ça sympa. J'aime bien. Donc, j'ai vu ce film, Les 400 coups, où Jean-Pierre Lehoux, qui a à peu près mon âge Alors, évidemment, il y avait une génération de se regarder soi-même miroir, un petit peu empathique. Et donc, j'étais très emballé par ce film. Et j'ai beaucoup aimé la musique. Pourquoi ? Parce qu'elle est simple. C'est pas une musique prétentieuse, c'est une musique simple, mélodique. Je me souviens plus qui l'a écrite. C'est Jean Constantin. Jean Constantin, voilà. Il a toujours eu des idées mélodiques assez astucieuses, bien parisiennes, bien françaises. Je trouve ça très sidérant. Ça me le rapproche de Marguerite Monod, comme genre. Même différence pour l'un comme pour l'autre. Et en tout cas, j'ai adoré cette musique. Et vous avez vous-même réorchestré Merci. cette musique, 13 ans plus tard, en travaillant avec Jean Constantin, qui s'appelle Le Poulpe, et Jean Constantin a transformé sa valse des 400 coups en cha-cha dédiée à François Truffaut. Je ne me souviens pas de ça, mais c'est possible. Je me souviens vaguement que j'ai fait un disque avec lui, mais je ne me souviens plus quoi. En tout cas, j'ai adoré cette musique de film. Alors voici donc la version originale des 400 coups, musique de Jean Constantin, orchestrée par Michel Legrand, et juste ensuite, la version réarrangée par Jean-Claude Vanier, 13 ans plus tard, avec un texte, en hommage au cinéma Truffaut, Truffaut, cha-cha-cha, interprété par Jean Constantin au moment. Alors un autre choix déterminant dans votre enfance, c'est un film de Carol Reed, et qui est un film qui a donné un coup de pied dans la fourmilière, puisque au lieu d'avoir une partition qui s'aligne sur tous les détails de l'action, c'est un polar qui se passe à Vienne, il y avait un seul et même thème joué à la cita. Anton Karras, le troisième homme. Oui. D'abord parce que là j'ai découvert cet instrument extraordinaire, la sitar, j'en ai même mis plus tard dans des musiques de films. J'ai eu du mal à trouver les gens qui en jouaient. Mais surtout j'ai trouvé la construction et la place où est mise la musique et sa signification dans l'action, dans l'image, etc. C'est formidable d'avoir mis toujours ce thème là, comme ça. Ça pourrait paraître obsédant, ça pourrait paraître paresseux, ça pourrait paraître ennuyeux, mais c'est formidable. Formidable l'emploi même, l'intelligence de l'emploi. En fait, ce qui s'est passé, c'est que ce film a été tourné à Vienne. Et en face de l'opéra, il y a le Café Mozart et le café où il y a la tarte célèbre. Je t'en fous. Et donc, il y avait Anton Carras qui jouait de la sitar. Il jouait ce thème qui n'avait pas du tout été fait pour le film. Tampana, voilà, etc. Et je ne sais pas si c'est par Orsanwell qui a dit mais c'est formidable votre musique etc. Oui, Carol Reid qui l'a attrapée. C'est ça. Et donc ils ont enregistré à la va-vite ce truc et puis ils n'ont pas appelé aucun compositeur, ils ont mis que cette musique-là dans le film. Et je trouve ça génial, vraiment le mot n'est pas trop fort. Mais est-ce que vous aimez le thème en lui-même ou est-ce que vous aimez le principe même de la répétition ?

  • Speaker #1

    C'est ce que je vous disais, c'est le principe même de la répétition et la place, comment elle est employée, la musique et ce qu'elle signifie dans le film. C'est magnifique ça. Elle a une vraie signification obsédante avec l'action. Ça marche très très bien avec le film d'ailleurs, le film a fonctionné. Et vous, dans vos enregistrements, qui avez-vous employé à la CITAR ? J'ai pris un type qui était le patron du syndicat des boulangers, et qui donnait des cours de CITAR. Ah oui ? Oui. J'ai eu un mal fou avec lui, parce qu'évidemment, ces gens-là ne disent pas la musique, mais ça n'empêche qu'ils sont très bons musiciens. C'était pas mal, ce qu'il a fait, j'aimais bien. Et puis surtout, il y a des choses que je n'avais pas prévues dans la citadelle. Des machins comme ça. Il a reproduit ça magnifiquement. C'est tout un style, c'est ça la musique. C'est comme le tango, comme tout ça. Il faut que ça soit joué par des gens qui connaissent bien le truc. Donc, Antoine Carras, c'est moi, j'ai beaucoup peur.

  • Speaker #0

    Un autre choix, d'un instrument soliste à un autre, de la cita à la trompette, c'est le film qui a vraiment fait éclater mondialement l'écriture de Nino Rota chez Fellini, l'Astrada. Pourtant, Nino Rota avait fait beaucoup de films avant. Pas seulement avec Fellini, il est là depuis le début. Mais de la carrière de Fellini, il avait fait plein d'autres. Il avait fait une œuvre monumentale, comment dire, Nino Rantana. Elle a commencé dans les années 30, donc il avait déjà presque 20 ans de cinéma au compteur avant l'Astrada.

  • Speaker #1

    Oui, mais il n'a pas fait que du cinéma, il a fait des symphonies, des concertos, c'est absolument dingue. Et donc l'Astrada. L'Astrada, c'était jouer à la trompette, ça correspondait parfaitement à l'image que, je crois, Fellini voulait donner de sa femme à l'époque, Giulietta Massina. Ça correspondait... à l'ambiance du cirque, ça correspondait à la solitude, c'était extraordinaire. J'ai adoré ce truc. Le thème est beau, comme toujours, Nino Rotin, un génie musical, formidable, très particulier, on le connaît tout de suite. C'est en même temps traditionnel et malin. Et puis ça me touche au cœur, toujours, toutes les musiques de Nino Rota, je trouve ça exemplaire. Et celle-là, celle-là qui est pratiquement sans accompagnement, qui est un solo de trompette qui tire des larmes, véritablement.

  • Speaker #0

    C'est presque, oui, comme une longue plainte, qui est la plainte du personnage de Gelsomina. Et ça, c'est le travail de Fellini et de Nino Rota, parce que Nino Rota a peut-être eu l'idée du thème, mais je pense que Fellini a insisté pour que ça soit utilisé de cette façon-là. Il y a aussi les deux, c'est un duo, c'est ça qui est formidable. que j'ai jamais eu la chance d'avoir, c'est le Dio Nino Rota Fellini, qui a fonctionné à merveille. Même si je pense sur le plan amical. Moi, je n'ai pas eu cette chance d'avoir un frère cinéaste. Et vous le regrettez ? Oui, je le regrette. C'est toujours bien. Ça aurait été pas mal. On aurait fait les choses ensemble. C'était marrant. Ils se sont déconnés. et l'harmonica avec un soloiste. Il ne touchait pas au Grisby. Jean Wetzel à l'harmonica et Jean Vienner à la composition. Alors Jean Vienner, il se fait que Je l'ai entendu parler de lui, c'est un mec que je voulais absolument rencontrer, je n'osais pas l'appeler. Mon grand-père avait fait son service militaire avec lui. Et pour mille raisons, je n'osais pas l'appeler. Et puis un jour, je vois Vienner sur une liste d'altos, de musiciens qui jouaient dans l'orchestre que j'avais à diriger. Je lui dis « Vous êtes de la famille de Jean Vianney ? » Il me dit « Oui, je suis son fils. » Je lui dis « Écoutez, ça ne vous ennuierait pas de lui dire que j'ai rien rencontré. » Et je me suis lancé, j'avais vraiment le trac. Et donc, on s'est appelé, j'étais le voir, il habitait dans une rue dans le 18ème, qui montait, je me souviens. Il avait un bureau d'écolier, sur lequel il écrivait la musique. et un mur d'écoliers anciens, avec des petits engrais, et tout ça. Et puis, à angle droit, il y avait le piano. Ils sortaient de l'un à l'autre, comme ça, je trouvais ça marrant. On est devenus hyper amis. Donc, on sortait ensemble, etc. Il avait sa copine qui s'appelait Alice, je crois. Il disait, ma compagne. Il était charmant, on discutait de plein de trucs. Il m'a appris plein de trucs formidables. Il m'a appris, il avait connu Stravinsky, Ravel, tous ces gens-là. Satie. Et donc il m'a dit, mais le Poulenc, il me dit, mais le plus marrant de la bande, le plus déconnant, le plus hirsute, c'était vraiment Stravinsky. Qu'est-ce qui me faisait marrer ? Et tout d'un coup, quand il m'a dit ça, ça m'a, moi qui adorais Stravinsky un peu comme une idole, un peu d'une manière chrétienne, je dirais, il me l'a ramené à la vie. Il m'a présenté un mauvais élève déconnant, marrant, qui était prêt à toutes les blagues et tout ça, mais également j'entends. Et c'est vrai qu'à chaque fois que je regarde une partition de Stravitri, je vois où il s'amuse. Je vois qu'il s'amuse. En fait, il se marre comme un fou. C'est un élève, un bon élève iconoclaste. C'est incroyable. Mais vous qui aimiez l'écriture de Wiener, est-ce que vous avez retrouvé dans l'homme, dans l'être humain, ce que vous admiriez dans son langage ?

  • Speaker #1

    Oui, parce que c'est toute une époque, Wiener. C'est pas moderne. C'est un type de l'époque 30-40, juste avant la guerre. Parce qu'il s'est planqué pendant la guerre. Mais dans l'époque 30-40, il avait un duo qui s'appelle Wiener et Doucet, deux pianistes, au bœuf sur le toit, je pense. Cette musique de Touché pas au gris-bis, je la trouve formidable pour plusieurs raisons. D'abord parce qu'elle est très simple, c'est accompagné au piano avec un harmonica qui vibre, j'adore ça. Et en plus, ça a l'air, comment dire, populaire comme ça, et malin, pour faire un tube, mais en fait c'est beaucoup plus que ça. Si vous l'écoutez d'un bout à l'autre, vous verrez que vous êtes incapable de la reproduire de mémoire. Pourquoi ? Parce que c'est comme beaucoup de choses bien foutues, comme certaines chansons des Beatles, comme d'autres thèmes de Gershwin ou je sais pas trop qui. Des gens qui ont le génie de la mélodie, comme ça. Et cette mélodie est extrêmement complexe et extrêmement intelligente, et elle est, comment dire Super, elle correspond vachement bien en plus à l'esprit du film. L'esprit du grisby. Le grisby, c'est un mot qui a été inventé par le breton le grisby. Il y a plusieurs de ses romans qui s'appellent comme ça. Et donc voilà, ça me faisait marrer d'abord le mot grisby, de toute façon étymologiquement, et puis la personnalité de Vionner qui était un gentil garçon, super sympa, modeste, marrant, qui travaillait à l'assassin à un moment donné. Il était justement, il supervisait les partitions des musiques de films, je crois. Je vous ai vu passer vos partitions quelques fois, ça m'amuse beaucoup.

  • Speaker #0

    Il était à la commission d'audiovisuel. Mais vous savez qu'en fait, Viennaire a écrit pour le film une partition de 40 ou 50 minutes à l'image. Une partition que Jacques Becker, le metteur en scène, a intégralement mise à la poubelle pour garder que le thème qu'il a répété un peu sur le principe du troisième ordre. Il a bien fait, parce que c'est vraiment bien. Sous- Et dernier choix, qui est lié à un cinéaste qui a marqué la comédie à la française, qui en partant d'ailleurs d'un univers burlesque, est allé vers une esthétique de plus en plus abstraite, c'est Jacques Tati. Vous avez pris le film presque du milieu de sa carrière, et qui a été d'ailleurs son dernier succès commercial, avec un film très personnel qui parle de la transition entre deux mondes, et ce film c'est Mon Oncle.

  • Speaker #2

    Oui, c'est pareil, c'est une musique, c'est Francis Lemarque qui a fait ça non ? C'est Franck Barcellini.

  • Speaker #1

    Bon, en tout cas. Je trouve cette musique magnifique parce qu'elle donne bien la naïveté du personnage. Et puis la familiarité aussi. C'est assez amusant. Ça marche très bien avec le film. Je crois que le film aurait été détruit par une musique symphonique par exemple. Mais là, c'était exactement ce qu'il fallait. Je trouve que ça colle parfaitement à l'esprit de Tati. J'ai beaucoup aimé Tati. Je pense qu'il est... Il a été pillé, copié, tout ça, etc. Mais je trouve que Tati était formidable. Est-ce que vous comprenez aussi son choix de prendre plutôt des compositeurs de chansons, de variétés, en tout cas de prendre des profanes de la musique de film ? Oui, je comprends très bien. Un professionnel de la musique de film, ça peut être envahissant, chiant, qui nous a bassourdés avec son professionnalisme, ses fucs, ses contrepoints, ses problèmes harmoniques et tout ça. Je trouve qu'il a très bien fait. Et puis, quand vous avez vu le film, vous avez perçu aussi que Merci. par rapport à ce qui se faisait beaucoup à l'époque en comédie avec ce compositeur d'ailleurs très doué, Gérard Calvi, qui écrivait sur des films comiques, des musiques comiques. Mais il écrivait pour les branquignoles.

  • Speaker #0

    Les branquignoles, des musiques à effet façon Spike Jonze en quelque sorte. Oui, bien sûr. Alors que Tati, lui, c'était tout le contraire. Il voulait des musiques, des rengaines populaires, populistes, des valses, des faubourgs.

  • Speaker #1

    Oui, je préfère ça, moi. J'aime beaucoup, j'ai entendu des trucs de Calvi qui sont des trucs formidables. Je suis pas bien fou de la musique genre Spike Jonze et compagnie. Je déteste ça, la musique Blague, quoi. La musique qui veut faire rire. Oui. Quand, par exemple, Eric et Ramzy m'ont appelé pour faire la tournée de la Parnasse infernale, ils m'ont demandé de faire de la musique comique. Et je leur ai dit, je ne peux pas, tout simplement. Ça ne m'amuse pas, d'abord, je ne sais pas le faire, etc. Je leur ai dit, je vais faire une musique traditionnelle, de ce qu'on met sur les films américains, et je vous ferai que votre comique ressortira encore mieux. Et j'ai vu qu'Eric, il n'y a pas longtemps, m'a dit que c'était une super idée. C'est la meilleure idée qu'on puisse avoir.

  • Speaker #0

    C'est-à-dire d'avoir un contrepoint. par rapport à ce qu'on voit à l'image. Et là, en l'occurrence, c'est un contrepoint de sentiment qui met d'autant plus, par effet de contraste, en valeur la drôlerie des situations. Oui, c'est ça, c'est même qui le met en valeur. Je sais que Mozart a fait des musiques, des plaisanteries, des plaisanteries musicales. Ces plaisanteries musicales, j'en ai des partitions ici, c'est marrant comme tout, mais c'est un mec qui joue fou à un moment donné parce qu'il a perdu la partition. des musiques qu'on jouait au dé, il a fait ça aussi. Il avait à chaque mesure porté un nombre, je tirais les dires, mais la cinquième, il y a le duo de la table, ce qu'on appelle le duo de la table, c'est une partition, il y a un violoniste en face de vous à la table, et chacun joue la partition, l'un à l'envers et l'autre à l'endroit. Il y a un moment où ça coince un petit peu, vers le milieu, et ça marche. C'est rigolo. Beaucoup de musiciens ont fait, Rameau aussi a fait des canons. Tomura va trop vite, je crois que c'est de lui. Unietudo. Des trucs comme ça. Il a fait des canons, mais des canons complexes. Bach a fait, dans l'art de la fugue, des trucs insensés. Un thème qui part du début jusqu'à la fin, et le deuxième astromo qui joue le même thème à l'envers qui part de la fin pour aller au début. Des trucs amusants comme ça, des jeux. Là, ça fait penser à Pérec. Ce sont des contraintes qui sont des marches au pied pour l'imagination. Et vous vous souvenez précisément de la découverte de mon oncle à l'époque ? Je pense qu'on ne le voyait pas comme on le verrait aujourd'hui, parce que j'ai revu mon oncle dernièrement, et ça ne fait pas autant d'effet qu'à l'époque, parce que le décalage était énorme entre le mobilier, qui était fait par un designer vraiment de l'époque, et qui était vendu après par Macha Makeyev. Donc, il y a eu toute une esthétique. La Villa Arpèle, oui. Oui,

  • Speaker #1

    ça, des trucs marrants. Alors qu'aujourd'hui, c'est presque passé dans les mœurs. Le mec qui fait marcher sa fontaine en arrivant chez lui, mais il y a plein de connards qui ont des maisons de campagne où ils se sont fait une fausse fontaine en plastique et ils mettent le truc en route quand ils arrivent. C'est devenu comme ça. À l'époque, c'était complètement plouc. Maintenant, c'est devenu bourgeois. On va donc se quitter avec cet hommage à Jacques Théaty et à ce compositeur, Franck Barcellini, qui a écrit ce thème, qui a traversé le temps, le thème de mon oncle. Merci Jean-Claude Vanier. C'est moi qui vous remercie.

Chapters

  • La vocation d'un compositeur et ses influences

    00:00

  • Jean-Claude Vannier et son parcours cinématographique

    02:24

  • L'impact de "Le Troisième Homme" sur Vannier

    05:45

  • Nino Rota et l'émotion dans "L'Astrada"

    12:16

  • Jacques Tati et l'importance de la musique dans ses films

    17:50

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