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Une voix en altitude | David Bordes cover
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On n'a qu'une voix

Une voix en altitude | David Bordes

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39min |10/09/2024
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39min |10/09/2024
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Description

Bienvenue sur On n’a qu’une voix, un podcast pour découvrir ce que cache notre voix !


Dans cet épisode, vous allez entendre la voix de David Bordes. En tant qu’accompagnateur en montagne et conteur, David utilise sa voix au quotidien.
Ensemble, nous allons parler de contes, de Pyrénées, de kiwis, de la langue occitane et de l’importance d’ouvrir grand ses oreilles avant d’ouvrir sa bouche !


Il nous dit (presque !) tout sur : 

  • la voix dans sa vie d’accompagnateur en montagne, de conteur et… d’être humain ;

  • la manière dont le conte est arrivé dans sa vie ;

  • la place des langues dans son quotidien et en particulier, celle de l’occitan ;

  • l’importance d’articuler écoute et parole.


Bonne écoute !


💡 Les liens pour découvrir et contacter David : 

Caminam : https://www.caminam.fr/

L'aventure nordique : https://laventurenordique.fr


Vous avez aimé cet épisode ? Je vous invite à : 

➡️ vous abonner au podcast sur votre application d’écoute préférée ;

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Vous avez envie de partager l’histoire de votre voix ?

📩 Contactez-moi à l’adresse suivante : christine.irabola.redac@gmail.com.


Crédits :


  • Réalisation, montage, mixage : Christine Irabola

  • Musiques et chants : Émilie Décla

  • Hébergement : Ausha


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Christine

    On n'a qu'une voix, un podcast pour découvrir ce que cache notre voix. Chaque mois, venez à la rencontre de mes invités qui lèvent le voile sur l'histoire singulière de leur voix. Au programme, des voix parlées, des voix chantées, des voix jouées et des voix parfois malmenées. L'intention ? vous procurer des émotions, vous faire voyager, vous apporter des conseils et vous proposer un pas de côté pour vous inviter à aimer votre voix. Dans cet épisode, vous allez entendre la voix de David Borde. En tant qu'accompagnateur en montagne et conteur, David utilise sa voix au quotidien. Ensemble, nous allons parler de contes, de Pyrénées, de Kiwi, de la langue occitane et de l'importance d'ouvrir grand ses oreilles avant d'ouvrir sa bouche. Bonne écoute ! Bonjour David !

  • David

    Adiu, bonjour !

  • Christine

    Pour commencer, j'aimerais savoir quelle place a la voix dans ta vie ?

  • David

    La voix, j'ai la voix de tous les jours, celle qui me permet de communiquer avec les miens, avec les amis, avec ceux que j'aime bien et ceux que je n'aime pas. Et ma voix professionnelle, c'est-à-dire que c'est un de mes outils. Et à la montagne, on compte. Et aussi les moments où je ne m'en sers pas. J'ai des kiwis avec mon cousin. Quand je suis à tailler les kiwis, je ne parle pas et c'est très agréable. Donc c'est quelque chose dont je me sers. Et parfois, c'est bien de...

  • Christine

    Et la voix des autres, est-ce qu'elle a une place dans ta vie ?

  • David

    Prépondérante. Qu'on le veuille ou non, la voix des autres, elle est là. On est obligé de faire avec plein de choses qu'on n'a pas envie d'entendre. mais qu'on entend quand même et qui sont là. Des choses affectueuses, des choses d'amour quand on est dans la famille, le couple, des choses de gestion quotidienne. La voix des autres, c'est communiquer avec les autres. C'est sûr que s'il y a un sourd, il n'entendra pas ce qu'on dit. Mais il y a des gens qui sont obligés de faire sans la voix, les mains ou ce qu'on veut. Ou quand il y a quelqu'un qui a une autre langue, on est obligé de communiquer différemment. Mais on est des animaux sociaux. Le tout seul en haut de la montagne, je n'y crois pas. Des animaux de troupeau au départ.

  • Christine

    Donc aujourd'hui, tu es accompagnateur en montagne, tu es conteur aussi. Si on reprend dans la chronologie, qu'est-ce qui arrive en premier dans ta vie ?

  • David

    Ce qui arrive en premier, c'est que j'étais un peu agité du casque jeune, un peu agité, je me suis pas mal servi de ma voix, donc on en reparlera après sur les choses qui énervent, si tu veux. Et donc, j'ai fait plein de choses, plein de choses. Et quand est arrivée la question de, et si on se calmait un peu ? J'ai commencé par l'accompagnateur en montagne et assez vite je me suis fait coincer par un monsieur qui s'appelle Serge Mauroite qui m'a coincé dans le compte et là ça s'est enchaîné très vite. Après qui a influencé sur l'autre je ne sais pas trop au départ parce que les deux ont suivi très rapidement.

  • Christine

    D'accord et tu penses que dans ton enfance est-ce qu'il y avait déjà des racines de cette voix là ?

  • David

    Ah oui beaucoup. Déjà dans mon enfance, un pied urbain du côté de Pau, un pied très rural dans la ferme de mes grands-parents paternels. Et ma grand-mère qui parlait, qui parlait, qui parlait, mon grand-père des coins, la table, le café, et puis blablablam, ça parle de tout, de rien, mais beaucoup parler, parler, parler, et nous, gosses, écouter, beaucoup écouter ça. Et ça faisait partie d'un environnement global, des récits, beaucoup d'échanges verbaux. Parler. Et ça, je pense que c'est quelque chose qui a marqué, qui a pas mal marqué. Oui, oui.

  • Christine

    D'accord. Et donc après, tu te lances dans l'accompagnateur en montagne, c'est ça ? Oui. Et là, quelle place a eu la voix à ce moment-là ? Est-ce que tu peux nous en dire quelques mots ?

  • David

    Et moi, petit, pour aller chercher du café, la note, l'addition, ça te faisait beaucoup rire. Mon père va demander l'addition. J'étais mort de peur. Je ne valais rien. J'étais une chaussette. Et petit à petit, clac, clac, donc... Le parcours que j'ai eu avant, pas mal de manifs, de machins, j'ai appris l'habitude de parler, je m'étais vacciné fort. Mais là, je me suis retrouvé à me servir de ma voix avec des gens que je ne connais pas, qui me payent, à transmettre des choses, du savoir ou des émotions, des consignes de sécurité. Donc, gagner de l'autorité par rapport à la voix, déjà, gagner une place dans le groupe. C'est l'histoire sociale de plein de gens, comment tu prends ta place avec les autres. Donc la voix, ça a questionné plein de choses. Et puis ça, toutes ces questions-là, plus le fait que je parle à 300 à l'heure tout le temps. Donc comment tu... qu'est-ce qu'on fait avec la vitesse ? Et les... Toutes les contraintes extérieures, quand tu es dehors, le chien qui passe, le vent, la cascade, donc apprendre à faire avec ces paramètres physiques de la montagne.

  • Christine

    D'accord, donc tu as commencé par être accompagnateur en montagne, le conte, c'est venu après ?

  • David

    Un an après.

  • Christine

    Ok, et là, tu es autodidacte, tu t'appuies sur d'autres conteurs, comment tu procèdes ?

  • David

    Je me suis fait arracher mon pare-chocs par une dame qui s'appelle Sophie, adorable, avec qui on était au lycée. Elle m'a dit Je suis désolé, je t'ai arraché ton pare-chocs, mais je n'ai pas une thune. Comment on fait ? Je ne sais pas. Donc, on a trouvé un pare-chocs à la casse, de fil en aiguille, on se le répare. On s'arrange, elle me donne un petit fromage et tout va bien. Cette fille est dans le milieu du cheval avec un très bon copain Balou, un gars qui gère l'association Petit Pas au port de Castets, avec les bourricots, avec les ânes. Et à ce moment-là, Balou démarrait Petit pas, il a dit je cherche un accompagnateur, un jeune, elle m'en parle de fil en aiguille, on va là-bas, deux bières plus tard je me retrouve avec une annesse qui est morte depuis la pauvre et on va faire trois tours par là et je rentre mais c'est trop bien ça. Et là on a réfléchi, qu'est-ce qu'on fait ? Moi je cherchais à travailler, eux à faire tourner les ânes, des gens qui font des marmottes et compagnie, il y en a plein. Et j'avais vu un spectacle de contes, quelque temps avant, à la forêt suspendue de Bosse d'Arros, c'était une partie des chanteurs des Pagayous. Un groupe de polyphonie, il y en avait trois. Salles, Abadie et Mauhourat, qui s'étaient répartis un peu des ambiances. Je trouvais ça terrible, très très bon. Donc j'ai dit, pareil, ce qu'on peut faire, on part en randonnée. Moi j'encadre, je prends ma part. Vous, vous louez les ânes, très bien. Et on va se caler à un endroit, un feu du comte. Il ne nous manquait que le compteur. Donc j'ai appelé Maurat avec qui on s'entendait déjà pas mal. Et je lui ai demandé de venir. Il m'a dit, parfait, je viens. Il est venu. La question financière. Les gens payent combien tu veux par soirée. Je ne veux pas d'argent, je suis un stit, c'est bon, j'ai mes sous. Mais si, non, si, non. Et au bout d'un moment, il me dit, écoute, moi, je viens à une condition, c'est que tu essaies de compter. Ce qui n'était pas prévu, trop, mais je lui dis, non, non, si, bon. Et après, j'ai essayé, le virus est rentré. Et voilà, tu ne t'en débarrasses pas après. Puis tu prends plaisir et puis tu joues avec.

  • Christine

    Quand tu dis conter, est-ce que ce sont des contes traditionnels ou c'est toi qui les écris ? Comment ça se passe ?

  • David

    En fait, je récupère des contes traditionnels, soit que j'ai entendu. Moi, je fais partie du... Là, j'arrive à 50 ans. On est une génération au moins dans le milieu accompagnateur en montagne. Pas tous, mais on est quand même pas mal à avoir été marqué par Louis Espinassous. Un peu conteur et tout ça. Donc, il y avait déjà le répertoire de Louis qu'on avait entendu ici ou là, en formation ou ailleurs. ça ce que j'avais entendu avec maura tu es tous ces gens là et après on a un panel de bouquins qui est quand même assez énorme on a la chance d'avoir pu tout un travail de collectage donc je suis allé piocher dans ce répertoire tradi gascon et pyrénéens et à partir de là ça tu le prends et zlaf j'ai joué avec quoi donc

  • Christine

    j'ai pas fait vraiment d'écriture mais je les ai repris et du coup est ce que tu te souviens de la première fois que tu as compté ouais

  • David

    C'est pas facile, c'est pas facile, mais en même temps, c'est des gens que tu connais pas. T'es au coin du feu, il fait à peu près sombre, tu vois personne. Puis j'avais déjà un peu de métier quand même, enfin un peu, j'avais quand même déjà pratiqué un peu le fait de m'adresser à des gens. Donc tu regardes un peu au-dessus de la tête et t'envoies, et feu. Et après, ça se fait peu à peu. Tu vois ce qui prend, ce qui prend pas, tu te fais un peu secouer par les physionomies des gens. Et en fait, tu te rends conte qu'en fait, il faut déconnecter ça. La physionomie n'est pas synonyme de ce qui se passe à l'intérieur. Tu as des gens qui respirent l'ennui et qui en fait non, ils sont à fond. Pas un exercice facile, mais pas non plus quelque chose de dramatique.

  • Christine

    Et après, est-ce qu'il y a des techniques qui t'ont accompagné au fil des années ou pas vraiment ?

  • David

    J'avais fait un stage avec Louis, justement, pour essayer. Un peu, oui, il y a quelques techniques. Mais après, je pense que c'est surtout le meilleur conseil, c'est Serge Mambrat qui me l'avait donné. C'était de la douche, la voiture, les moments où tu es tout seul, tu te fais l'histoire. Dans un tu rodes, on se met l'histoire en bouche. Ce qui fait qu'après, quand on est avec des gens, on ne va plus chercher le fil. Et après, c'est parler suffisamment fort, faire des images. Pour moi, m'imposer à me mettre des blancs, ce n'est pas rien. Mais ces blancs-là sont nécessaires pour que les gens qui écoutent aient le temps de se faire des images. Et après, oui, la technique de tenir les gens en face. de se désimaginer comme dans un filet. Mais pour avoir pas le mouvement permanent à faire, comme si je fais avec le micro, si je passe à droite, à gauche, ton son ne fait que varier, ceux qui sont à droite, à gauche n'entendent pas. Donc voilà, essayez d'avoir ça. Et poussez un peu. Et voilà.

  • Christine

    Et du coup, est-ce que tu peux nous dire quelle place a la voix dans tes comptes ?

  • David

    Et moi, je m'en sers bien. Je m'en sers, bon déjà, j'ai un peu de wawa au naturel, donc je pousse un peu la voix et la voix me sert pour faire des modulations. Au lycée, j'ai eu beaucoup d'histoires parce que je n'arrêtais pas de faire du bruit, des machins, que ça m'amusait beaucoup. Et en fait, je m'amuse à faire ça, des onomatopées, des petits bruits, des machins. Je ne peux pas m'empêcher de faire dans la vie naturelle, normale, entre guillemets. Donc je m'en sers, je joue avec. Après, je mélange aussi avec l'occident. On en reparlera après. Dans le conte, ma voix me sert un peu d'outil en plus des mots. Le mot image, il y a aussi l'outil voix.

  • Christine

    D'accord. Donc, en fait, on ne va pas dire qu'il y a quelque chose qui prime. Est-ce que c'est le récit qui prime ? Est-ce que c'est la voix qui prime ? Pour toi, tout est important, finalement.

  • David

    Les deux vont ensemble. Parce qu'après, je pense que chaque conteur a aussi une personnalité. C'est pas du théâtre où tu prends la personnalité de quelqu'un. Là, tu as ta personnalité et il y a des gens qui parlent doucement et ils sont comme ça. Et il y a des fois des conteurs, c'est super agréable à écouter. T'es à deux doigts de la léthargie, t'as l'impression de loin. Mais non, c'est doux. C'est juste doux, c'est tout calme et ils sont comme ça. Et ça n'a rien de désagréable. Et d'autres plus explosifs où la voix, elle est là. Je pense que c'est un tout. Il n'y en a pas un qui va primer plus que l'autre.

  • Christine

    Alors toi, tu contes, on en avait parlé, aussi bien dedans que dehors, c'est bien ça ?

  • David

    Oui.

  • Christine

    Est-ce que, j'imagine que les enjeux sont différents, est-ce que tu peux nous en dire quelques mots ?

  • David

    Les enjeux, quand tu es dedans, tu fermes une petite ambiance et tu joues avec le calme, dans un endroit où les gens sont rentrés, de gré ou de force, de force si c'est des gamins, mais ils sont rentrés, ils s'avouent le son, ils sont posés, ils tapent. T'as pas de perturbations extérieures qui vont pas... C'est facile dedans, c'est agréable, c'est facile. Dehors, tu as beaucoup plus de contraintes sonores. Le vent, la cascade, l'autre kek qui passe en scooter quand t'es en semi-urbain, les vaches, les cloches... Salut, t'es là ? Oui, je travaille ! Tu peux avoir tout ça qui joue, mais en même temps, dehors, t'as un support énorme. Tu as des plantes, des arbres, le chien qui passe, tu rentres le chien dans l'histoire. Tu as aussi une capacité de rebond qui est terrible. Et un environnement.

  • Christine

    Tu joues avec l'environnement aussi finalement.

  • David

    Il faut intégrer les gens, tout ce qui peut être une perturbation. Enfin pas de trop non plus, mais il faut quand même intégrer tout ça dedans. Moi dans ma pratique et dans ce que je fais, et ce que je conseillerais, c'est que tu t'appuies parce que c'est des choses qui vont te perturber. C'est des choses qui ne sont pas dans l'histoire. et qui de toute façon les gens vont soit les regarder, soit les écouter. Donc soit tu te bats contre le chien, soit tu rentres le chien dans l'histoire. Soit tu acceptes quand tu es au Bénou par exemple, et que tu as je ne sais pas qui, aux commandes de son super hélicoptère à 24 millions d'euros qui passe, et bien tu attends que l'hélicoptère passe. On ne joue pas contre un hélicoptère. Une fois qu'il est passé, ou pareil pour le tracteur, ou le quad, il y a des moments où tu attends, et après tu repars.

  • Christine

    Est-ce que toi, tu as des endroits vraiment dans lesquels tu adores compter ?

  • David

    Oui, quand on monte, oui, oui, oui. Il y a une keb, les keb, c'est des abris sous roches. Il y a une grosse keb dans la vallée d'Ossau, vers le Caillou de Soques, où on s'arrête régulièrement avec mon collègue, Pierre Vidal. On a une soirée où on monte jusqu'à une cabane, et feu, comte, ventrêche et vin rouge. C'est très bien, culinaire et culturel. Et un peu de sport. Et là, il y a une très, très belle keb, j'adore. C'est un très, très bel endroit. En plus, il y a un peu de résonance et puis ça fait une ambiance où il y a très peu de gens qui passent. Il y a du monde, mais voilà, tu as une belle éthrée. Ça, c'est un bel endroit que j'aime bien. Et après, vers tout ce qui est un peu haut, où tu surplombes des lacs, vers au-dessus des refuges d'Ayous, au-dessus du refuge d'Arlette. Là, c'est un peu chaud à gérer parce que là, tu as le vent. Et là, le vent, par contre, tu ne peux pas faire grand-chose contre. Mais là quand tu as des moments où tu arrives à poser tout le monde, que tu n'as pas trop de vent contre toi, tu as un paysage de dengots, là ça bombarde, c'est pas mal.

  • Christine

    Et les gens ils te font quel retour dans des endroits comme ça ?

  • David

    Ah oui, tu as de tout. Tu as les gens qui ne disent rien, la tête qui bouge, ceux qui ont les yeux qui brillent, ceux qui verbalisent, c'était génial, machin ceux qui ne disent rien. Peut-être qu'il y en a aussi qui n'aiment pas et qui ne le disent pas. Je n'ai jamais eu personne qui m'a dit c'est pourri, par-ci, là-dos Tronche d'ail là, qui dit, c'est pas, c'était nul. Truc d'ado, je prêche le faux pour le vrai. Et en attendant, il est resté jusqu'au bout, et puis il n'a pas sorti le téléphone, donc l'un dans l'autre. Et là, t'as des retours surprenants. Après, en montagne, des fois, on a une dame, une fois, qui nous s'est mise à pleurer. On rentrait de la nocturne, là, et levée de lune au-dessus de la dente de soc. Une espèce de relief un peu pointu. Et là, paf, la lune qui est sortie, une espèce d'ambiance terrible. Et là, elle nous a posé une petite larme. Elle était juste à côté de nous. Mais qu'est-ce qui vous arrive ? C'est trop beau ! Mais voilà ! C'est mignon. C'est cool. Ça donne du sens.

  • Christine

    J'ai vu que tu participais aussi à des festivals.

  • David

    Un peu.

  • Christine

    des festivals de contes, est-ce que c'est quelque chose que tu aimes bien faire ?

  • David

    Oui, mais on s'est vite rendu compte, quand je dis on, je faisais partie du collectif SAI, qui était un regroupement pluridisciplinaire, comme on dit, où il y avait des gens du groupe La Famille Artus, qui étaient plutôt tradiocs, mais alors ils ont tout tourné en électro, avec beaucoup d'improvisations, des ambiances très différentes. Donc il y avait eux sur la partie musique, danse, chant. Il y avait Colinato qui était une plasticienne qui travaillait sur des projections, qui est partie dans le Lot aujourd'hui. Serge et moi en conte. Enfin, il y avait tout un carrefour. Et un monsieur là, Patrick Pouzet, qui était un peu aux manettes de tout ça. Aujourd'hui, la structure est rentrée dans la Ciutat, Oueda, Sapou. Et on s'est rendu compte que pour aller dans les festivals de contes, c'est quand même un milieu d'entre-soi assez important. C'est beaucoup de cooptation. de cooptation de l'un ou de l'autre et qu'il faut quand même un bon vendeur qui soit connu et reconnu et que rentrer dans ce petit monde tout cool et tout sympathique soit-il c'est pas si facile donc il faut quand même donner de l'énergie pour se bagarrer là-dedans et ça n'enlève rien à la qualité artistique de ce qu'on y entend et tout ça mais c'est pas un environnement simple d'un côté et de l'autre c'est la distance Et rarefois, je suis parti sur des festivals un petit peu loin, des petites choses. Tu te dis, c'est la vie d'intermittent du spectacle. Tu roules 6 heures, tu attends 2 heures, tu fais 8 minutes de balance, tu fais ton compte, petit spectacle, 50 minutes, 1h15. Tu attends et tu te remets 6 heures de bagnole. Le rang du temps m'a un peu interrogé.

  • Christine

    Peut-être que pour toi, ça a moins de sens parce que toi, tu es quand même ancré aussi ici, que tu as parlé des endroits que tu aimais bien. C'était aussi des endroits que tu connais, dans lesquels tu amènes les gens, que tu accompagnes finalement. Est-ce que ça a peut-être moins de sens de te retrouver ?

  • David

    Je ne sais pas. En même temps, dans un festival, c'est agréable parce que souvent, tu as affaire à un public de gens qui sait où ils vont. Après, moi, j'aime bien aussi quand tu coïnces des gens, ils sont pris dans une ambiance, ils ne savent pas où ils sont. C'est surprenant. C'est assez bon. Mais il y a aussi tout un côté confort. Tu fais le festival, tu as des conditions techniques, un public, des gens qui t'accueillent. Tu es dans une ambiance, tu rencontres d'autres gens qui sont meilleurs que toi, tous. Parce que ceux-là, ils sont à 100% que sur ça. Des ladis diallo, des jolins, il y a quand même quelques pointures. Il y a du très très bon. Donc ça, peut-être qu'en vieillissant, c'est un truc où j'essaierai de pousser plus. Mais pour l'instant, entre ce que je te disais avant... Aujourd'hui que j'ai assez de combats par droite à gauche, je n'ai pas envie de mettre trop d'énergie dessus. Mais ce n'est pas dit qu'au bout d'un moment, si j'ai les genoux qui me lâchent ou que j'en ai marre de batailler sur l'accompagnement, ce n'est pas dit que tenter. Après, il faut avoir l'envie de faire des comptes de temps en temps et en faire un métier à 100%. C'est autre chose aussi. Il faut des spectacles clés en main, il faut des spectacles bien faits que tu puisses présenter, vendre. Donc le côté un peu impro, où des fois je sors de la voiture, j'ai aucune idée de ce que je vais raconter, et je prends un compte, et puis après, on va faire l'autre, et ça roule. Et c'est pas un spectacle construit.

  • Christine

    Oui, finalement, c'est deux métiers différents.

  • David

    C'est autre chose. On l'a eu fait avec le collectif, on avait deux spectacles carrés, avec compte, musique, chant, projection, mais c'est vraiment un autre travail. Tu fais tes filages à l'italienne, pour tout bien caler, c'est génial, ça professionnalise dans le sens où on apprend à... On apprend à se tenir sur une scène, on apprend à faire avec d'autres éléments, mais c'est cadré, c'est autre chose.

  • Christine

    Est-ce qu'il y a, soit dans ces endroits-là, soit à d'autres moments, des voix qui t'inspirent ? Ça peut être des conteurs, mais ça peut être aussi des chanteurs ou autres.

  • David

    Il y a des voix qui me marquent. Au quotidien aussi, tu parles avec des gens qui ont des voix qui résonnent. Et à l'inverse, tu as des voix qui sont fatigantes. Je ne dirais pas jusqu'à agressantes, mais fatigantes. Il y a des gens qui parlent. C'est pas lié à eux, mais t'as des voix qui te... qui te scie l'oreille. Arrête-toi, s'il te plaît ! Mais après, il y a des voix qui te portent, qui t'interloquent. Puis oui, sur les chanteurs, on a tous des voix d'un chanteur qui te marquent. Oui, louride. Moi, par exemple, c'est une petite voix qui... Un truc très con, Brassens. Ou après, en polyphonie, en chant, des fois, tu te retrouves à chanter par là et tu as une basse assez énorme qui sort ou un gars qui a une haute incroyable. Enfin, tu as des voix comme ça, un peu de tout type.

  • Christine

    Alors David, on en a un petit peu parlé de la place de la voix dans l'accompagnement en montagne. Est-ce que tu peux nous en dire un petit peu plus ?

  • David

    Ça pose un cadre, souvent déjà, le bonjour, le hadichat, le premier contact avec les gens. Ils payent, il y a les gens qui te connaissent, et il y a les autres. Et là, la voix, le fait de la poser, le fait de prendre ce premier contact, déjà tu prends ta place sur le groupe. C'est pas que tu dois être supérieur au groupe, mais c'est qu'ils payent pour être avec toi, et que tu es responsable d'eux, quelque part. Et qu'à un moment donné, si ça part un peu en cacahuète, il faut que tu puisses maîtriser ce qui se passe globalement dans la mesure du possible. Donc je pense qu'il y a aussi la voix, elle sert beaucoup à ça, avec des tas de personnalités différentes. C'est pas parce que tu parles fort que tu vas être forcément écouté. Je pense que c'est la personnalité, il y a des gens qui vont parler tout doucement, des gens qui vont utiliser la blague, mais elle donne un cadre de... Elle prend le groupe, quoi. Je pense que dans l'accompagnement, il y a ça beaucoup. Et après, nous, on est un métier où on parle. Pendant très longtemps, on disait un bon guide ne parle pas. Pour un guide de haute montagne, il te prenait à un point A, il te prenait au refuge ou au village, il te montait en haut de je ne sais quel pic, et il te ramenait vivant. Et qu'il ne parle pas, c'est pas... sans foutre. C'était un bon guide ne parle pas. Il fallait que... c'était de la technique et rentrer vivant. Nous, c'est au contraire. Nous, on est des gens qui partageons un milieu, on partage un milieu avec les autres. On partage les observations, on partage ce qu'on voit au niveau des bestioles, des plantes, du pastoralisme, des pics, des contes, de la géologie. Donc on est tout le temps en train de parler. Donc la voix, elle est là pour... c'est une passerelle constante entre nous, le milieu et les clients. On peut dire comme on veut, mais ça reste des clients, les gens y payent. On ne vit pas que d'amour et d'eau fraîche. C'est important. Mais clac, clac, c'est aussi ça. Dans l'accompagnement, c'est cet outil-là, ce fil.

  • Christine

    Et toi, parce que ça fait combien d'années que tu es accompagnateur mental ?

  • David

    Moi, j'ai démarré en 2002.

  • Christine

    Ok, donc ça fait 22 ans. Est-ce que tu as senti une évolution là-dessus au fil du temps ?

  • David

    Sur la voix ?

  • Christine

    Sur la voix, la place, tu vois, c'est-à-dire, tu dis, voilà, qu'en fait, ça va au-delà de juste amener d'un point A à un point B, il se passe plein de choses entre les deux.

  • David

    J'ai senti une évolution avec les scolaires. J'ai senti une évolution avec les scolaires dans le sens où je passe beaucoup plus... Mais ça, c'est pas que moi. Quand on discute avec des gens qui les ont en milieu fermé, les enfants, des enseignants ça s'appelle. C'est un combat partout, assez fréquent. C'est le temps passé à gagner l'écoute. Et ça la voix elle est primordiale. Et nous on a une collègue par exemple qui a une toute petite voix qui se questionne fortement sur elle, sa relation avec les scolaires, parce qu'elle aime bien les transmissions pédagogiques. Mais cette espèce de recherche là, enfin de comment arriver à... prendre le dessus sur la classe, dans le sens où ils vont être attentifs. Comment arriver à les écouter ? Le dessus c'est pas qu'un rapport de force où on leur met les coups de bâtons, mais c'est ça, c'est comment on va arriver à les faire écouter. Et ça c'est un temps qui devient de plus en plus long et où la voix a son importance. Et à un moment donné, c'est un niveau sonore, c'est de choisir ses mots, trouver le moment où il y a un creux de bruit, au milieu du bruit, pour aller chercher. Et ça, c'est quelque chose qui a évolué. Ça, c'est une vraie évolution. Après, le grand public, entre guillemets, les adultes, les ados, c'est différent. Je ne vois pas de grand... Je n'ai pas ressenti, en tout cas, de grand mouvement sur ça.

  • Christine

    Il y a un sujet qui est important à aborder aujourd'hui, je pense que c'est la question de la langue, enfin des langues, puisque là, aujourd'hui, on se parle en français. Mais il y a une autre langue qui a une place importante dans ta vie. Est-ce que tu peux nous en dire un petit peu plus ?

  • David

    Ah, c'est là où on habite. Ça va être en Occitan, enfin en Gascogne, en Béarnais, on est très fort pour se disputer ici sur le nom de la langue. On a vraiment des gens qui ont du temps, en Vallée d'Osso on en a 2-3 là, des très très bons, qui ont du temps pour ça. Et donc la définition pour ceux de l'Occitan, dans sa variante béarnaise, c'est la langue d'ici qui est là, et moi que j'entendais aussi, autour de moi, que j'ai beaucoup entendu. Et mon père a essayé de me l'apprendre, il a dit tu rigoles ou quoi ? Et non, non, hors de question. J'ai pas voulu. Enfin si, petit, j'avais un livre qui s'appelle l'esquirette, c'est la petite cloche. Donc j'apprenais un peu, quatre mots, Bonne nuit pour Bonne nuit Enfin, il y avait quelques mots, mais pas plus. Mais j'entendais quand même beaucoup la langue autour de moi. Et après, est arrivée la période ado et un peu plus où là, c'était pas la peine. J'ai pas voulu en entendre parler. Et après, mon parcours de lycéen ayant été un peu chaotique, il a été... T'es convenu pour tout le monde que c'était bien à un moment donné que je passais un an un peu loin de la maison et j'ai échoué à Bayonne. Très bonne année. Magnifique année, scolairement parlant, il faut voir, mais très très belle année où je me suis retrouvé à Cassin. René Cassin, 92-93, voilà, c'est la belle époque. Il y avait pas mal d'agitation sociale, pas mal d'agitation musicale, pas mal de monde qui s'agitait, des gens pas mal sympathiques. Puis des thématiques un peu costauds, il y avait une grosse campagne sur l'insoumission qui existait, il y avait tout un bazar. Dans tous les sens, puis des groupes, ça bougeait fort. Et nous, on s'y retrouvait très, très bien dans cette petite ambiance. Mais il y avait le fait qu'il y avait énormément qui parlaient en basque entre eux. Et puis, ça, ça te le fait sentir qu'ils sont quand même le peuple élu. Et je plaisante.

  • Christine

    C'est bien qu'il y ait un sous-texte.

  • David

    C'est bien qu'il y ait un sous-texte. Non, non, on bataillait beaucoup avec ça, on rigolait. Et alors, quand même, ça m'a questionné. Puis on a eu plein de discussions sur la place de la langue, la place sociale, la place politique, l'histoire linguistique de la France, de ce pays. Donc, tout ne s'est pas fait seul, que les gens n'ont pas abandonné du jour au lendemain le Basque, le Breton, le Catalan, le Galicien. Enfin, le Galicien, c'est l'autre côté, mais... Tout ça, que ça ne s'est pas abandonné du jour au lendemain, qu'il y a tout un processus historique qui s'est fait. Et voilà, tout ça, ça questionne. Les relations avec les langues de l'immigration aussi, parler mal français plutôt que turc à vos enfants, ça a suivi encore. Sous Sarkozy, on en sortait encore. Et là, actuellement, on creuserait un petit peu. On n'est pas loin. On est loin d'avoir vraiment avancé sur ce sujet. Mais voilà, tout ça, ça a bougé, bougé. Ça s'est agité. Après, je suis rentré en Béarn. Et puis de là, les fils ont fait que j'ai rencontré les gens de Radio Païs par exemple, les gens des Calandrets, les écoles immersives en Occitan, les gens de Carnaval, enfin le milieu un peu occitaniste, les gens de la Tour du Bourreau, qui était à Pau, un local plutôt militant. Et puis tout ça, ça s'est fait, clac, clac, clac, et puis je me suis dit, mais quand même, mais quand même, mais quand même. Et puis j'ai commencé à parler un peu, et puis on a eu la chance d'être toute une vague de jeunes, un peu branchés pareil. Elle était un peu rock'n'roll aussi, et donc on s'est auto-motivés, plus quelques-uns qui nous ont accompagnés là-dedans. Et puis petit à petit, j'ai basculé. Alors ça a beaucoup fait rire mon père, beaucoup. Il me dit Ah oui, c'est ça, ton Occitan, on parle bien, Arnaïs, ici. Et puis même, quand tu essaies de transmettre la langue à ton gamin, et puis qu'il revient par la fenêtre en te disant Oui, j'apprends l'Occitan, mais oui. Et bon, finalement, les choses se sont faites, donc ça a pris une place. Et puis au-delà des questionnements militants qu'on peut avoir, ou historiques, après il y a un vrai plaisir. un vrai plaisir à parler, il y a le chuc de la langue, le jus de la langue, ça veut rien dire en français, le sens, l'architecture, les mots que tu peux utiliser, les échanges que tu vas créer avec les gens quand tu parles. Il y a des gens avec qui j'ai jamais parlé français, d'autres, quand on bascule en oc, ça n'a rien à voir, tu vas chercher d'autres choses, donc il y a ce plaisir-là. Et en parallèle, ma compagne Myriam, qui elle est née au... au Kenya, fille de pieds noirs et de bourguignons, qui est après rentrée à 11 ans ici, et qui a passé dans le sud-est, plutôt un profil de gens qui ont voyagé, et qui a eu décidé, ça va, un moment, de courir partout, donc de se poser ici, qui s'est ancré, qui a appris la langue aussi, et aujourd'hui qui l'enseigne, et qui parle mieux que moi, et donc on s'est accompagné aussi là-dedans, ce qui fait qu'aujourd'hui on parle avec les garçons, avec nos enfants, et qui eux sont assez fiers de ça, enfin ça dépend d'où ils sont. Ils sont un peu discrets parfois. Parle moins fort papa, s'il te plaît. Mais voilà, ça a pris une place prépondérante. Enfin prépondérante, une place importante en tout cas.

  • Christine

    Et si on repart de la voix, quand tu parles en français, quand tu parles en occitan, est-ce que tu perçois une différence ?

  • David

    Dans l'intonation, la tonalité, je sais plus.

  • Christine

    Pas forcément. Par contre, quand je vais parler en occitan, surtout avec des gens qui la tiennent depuis plus longtemps que moi, des gens qui sont nés dedans, ou des gens qui ont une jolie langue dans le sens vocabulaire, syntaxe, tout ça, je vais être plus attentif à la façon de parler, aux tournures, aux mots, à des airs qui roulent. Moi, je suis un enfant de TF1, entre guillemets, mais le joli air qui roule des vieux, tout ça, le air d'Edith Piaf, on est lycée. On est passé tous au concasseur. Donc des fois, je vais être plus attentif à ça. Après, en français, pareil, je vais être attentif des fois quand il y a des accents complètement surréalistes qui débarquent, de harrasse ou de je ne sais pas où, un bon vieux vieux géant qui sort de là-bas, tu ne sais pas d'où. Ça, c'est très bon, j'adore. Les Québécois aussi me font beaucoup rire. Bon, ils font rire tout le monde, mais l'intonation, c'est rigolo. Je pense que c'est plus ça qui m'interpelle.

  • David

    Mais justement, les gens que tu accompagnes en montagne, par exemple, qui viennent de partout, finalement, est-ce qu'ils te font des remarques sur la musicalité de ta voix ? Est-ce que ça arrive, ça ?

  • Christine

    Ah oui, oui, parce que je ne me rends pas compte, mais je mets plein de mots d'occident un peu partout. Méfiez-vous de ne pas vous mettre une tec dans la branche. Pardon ? Tu as plein de trucs comme ça. Il te l'a engoulé, le monsieur, le sandwich ? Il y a plein de trucs comme ça qui me partent, qui se sont tout mesclés, tout mélangés. Et donc des fois, ça les fait rire. Et à l'inverse, tu vas avoir un gars du fond du Rouergue, ou un Aveyroné qui est là, ou je ne sais pas où, un Bigourdant, et clac, ça fait une passerelle. Ou des Portugais, très souvent les Portugais. Castagné, on a énormément de mots proches, et les Portugais, c'est quand même des gens qui sont très attachés à la langue. Au tour du monde, les Portugais restent très locuteurs. Ils ne sont pas forcément à faire beaucoup de bruit, mais ils ont tous l'espèce de croix portugaise sur eux. ou partout, et la langue. Donc, c'est des gens qui sont sensibles à la langue, à l'écoute. Donc, voilà, il y a ça. Et puis,

  • Speaker #2

    il y a ceux qui s'en fichent complètement et qui grandent bien leur façon. Papa qui a étudié le débat de l'Ugère, papa qui a l'ordre, papa, au grand cours, cours, cours, papa, papa, que j'ai cassé, que j'ai cassé des blancs, des rues, des rues qui cantent du ciel, qui disent comme ça, on ne peut pas,

  • David

    Est-ce qu'il y a des sujets qui t'amènent à élever la voix ?

  • Christine

    Heureusement que je vais en montagne. Heureusement que je vais en montagne et que je travaille avec des enfants, des ados, ou avec un public adulte, mais sur des moments de transmission, de douceur, de montagne. Sinon, moi je disjoncterais. On est dans un monde qui t'agace profondément. L'histoire de Gaza en ce moment, c'est infâme. On était partis faire une mission civile en Palestine en 2003. Et tu te dis, pourquoi on n'écoute pas les gens ? Pourquoi on ne les écoute pas ? Il y avait les antisionistes israéliens qu'on avait rencontrés sur place. Il y avait Varjavski, c'était un fils de rabbin, un gars que ses parents avaient un peu goûté au camp de concentration, donc on ne peut pas trop dire qu'il est antisémite. Et qui n'arrêtait pas de dire que l'extension des colonies, on allait droit dans le mur. Et de l'autre côté, on avait rencontré le docteur Sabri, un gars du FATA, du parti Arafat. Ils disaient attention, on a les barbus qui arrivent, et eux ils avaient un conflit interne entre les palestiniens, entre les laïcs, qui pouvaient être croyants par là, et les musulmans, les islamistes politiques. Et aujourd'hui tu te retrouves avec un gouvernement d'extrême droite en Israël, ceux qui ont tué Issa Krabi, c'est eux, c'est pas qu'ils ont appuyé sur la gâchette, mais c'est des gens qui ont tué une parole de paix du côté israélien. Et de l'autre côté, les enfants du Hamas, c'est plus compliqué à ce niveau-là, parce que quand tu es enfermé, tu moisis doucement dans ta tête, même s'il y a des tas de choses positives qui se font en Gaza. Mais on se retrouve là avec quelque chose de... Oui, ça, ça me fait bondir. L'Europe qui continue à vendre des armes. Les Américains me font bondir, les USA économiquement, je parlais. Nous-mêmes, l'occidental français de base m'agace de plus en plus à aller chez Starbucks, à mettre le joli pull de Noël des Nord-Américains. On fait le perçant, t'as l'impression, dans un feuilleton américain, ils sont tous habillés comme des mille-or, comme dans les feuilletons américains. Ça sort d'où, ça ? Les écoles de business school, ça s'appelle, avec les petits chapeaux américains qu'on jette à la fin, des gamins qui ne savent pas qu'une palace existe, mais qui connaissent la NBA. On regarde Netflix, on commande chez Amazon, on va au Drive parce que c'est plus pratique s'il te plaît. L'humour, j'aime beaucoup l'humour, mais c'est du stand-up américain. On se standardise là et à côté de ça, on secoue le petit drapeau français. Vive le retour à nos traditions ! Il y a un tas de choses, ça peut durer longtemps. Il y a un tas de choses qui me donnent envie d'élever la voix. La retraite, la retraite. cette espèce d'hypocrisie donc oui il y a plein de choses de temps en temps j'élève un peu la voix dans des manifs ou quoi mais j'y vais de moins en moins aussi j'ai passé beaucoup de temps sur des réunions, des collages, des organisations de manifs aller faire le peintre la nuit et au bout d'un moment je lève un peu le pied et de temps en temps j'élève la voix je discute beaucoup parce qu'après dans mon entourage j'ai de tout donc je discute beaucoup et avec des écolophènes fatigants et des chasseurs épuisants et tout Donc on discute un peu de tout. Donc j'ai ma part de joute verbale régulière, mais tranquillement. Après, je m'amuse à me refaire toutes les affiches de Zemmour en Valais d'Osso. Ça, ça m'amuse beaucoup. Beaucoup. Avec des copains bergers qui passent et qui me disent Hé, on en a encore dans la peinture si tu veux ! Et voilà. Donc ça, ça me plaît. Un peu. Mais je suis rentré dans une phase aussi où je me protège. Je me protège parce que peut-être qu'il ne faudrait pas... Peut-être qu'il faudrait qu'on sorte un bon coup tous, mais j'y crois pas au sortir tous une bonne fois pour toutes. Je vois pas autour de moi ça. J'espère me tromper, mais je le vois pas. Et donc j'essaie de me protéger un peu pour éviter de disjoncter et d'être désagréable pour les gens autour de moi. Mais y'a de quoi, ouais. Par contre tous les gens qui font comme si tout allait tout le temps, là, cet espèce de sourire bienheureux. Ah ça va bien, oui, non ça va pas. Débranche ton ombri, l'ouvre les yeux, s'il te plaît.

  • David

    Est-ce qu'il y a un dernier point sur lequel tu aimerais revenir par rapport à la voix ? Tu penses qu'on a fait le tour. On n'a jamais fait le tour, mais déjà pour aujourd'hui.

  • Christine

    On a fait le tour. Après, je pense que ça vaut le coup ici de prêter, de se méfier aux gens qui utilisent trop leur voix et de prendre le temps un peu d'écouter. La voix, moi, avant, j'ai parlé beaucoup. Je parle encore beaucoup, mais je pense que c'est lié au fait d'écouter. D'abord, j'ai passé beaucoup de temps à écouter. Je me force des fois, je me mords la langue. Ah écoutez, parce que la voix, ce n'est pas que soi, et c'est énormément de voix qu'on a autour de nous. Et dans un monde où on est là, où c'est chacun un peu qui reste un peu dans ses rails, le téléphone, tous les algorithmes qui te ramènent tout le temps un peu sur les mêmes choses, alors ce ne sont pas des choses positives, n'importe, mais ça vaut le coup de se servir de la voix des autres un peu.

  • David

    Merci, je crois qu'on va terminer là-dessus. Très bien, merci beaucoup David.

  • Christine

    Merci à toi.

  • Christine Irabola

    Un grand merci à David pour la générosité et la spontanéité avec lesquelles il a répondu à toutes mes questions. Vous trouverez les informations le concernant dans la description de cet épisode. Merci à vous d'avoir écouté cet épisode d'On n'a qu'une voix jusqu'au bout. S'il vous a plu, abonnez-vous dès maintenant pour ne pas manquer la voix de mes prochains invités. Et pour soutenir mon podcast, je vous propose de le noter et de le commenter sur votre application d'écoute préférée. Enfin, un merci tout particulier à Émilie Décla, qui a créé et interprété toutes les musiques d'On n'a qu'une voix. Retrouvez l'actualité du podcast sur le compte Instagram ou LinkedIn, entre voix et mots. À bientôt ! S

Chapters

  • Introduction au podcast et à l'invité David Borde

    00:09

  • La voix dans la vie quotidienne de David

    01:12

  • Parcours de David : de l'enfance à l'accompagnement en montagne

    02:27

  • Les racines de la voix dans l'enfance de David

    03:06

  • L'importance de la voix dans le conte

    05:06

  • La voix comme outil d'accompagnement en montagne

    09:56

  • Les enjeux de raconter des histoires en intérieur et extérieur

    09:56

  • Préférences de David pour les lieux de conte

    13:19

  • Inspirations vocales et influence des voix sur David

    19:19

  • La voix dans l'accompagnement en montagne

    20:22

  • Importance de la langue occitane dans la vie de David

    24:16

  • Réflexions finales sur la voix et l'écoute

    29:17

  • Conclusion et réflexions sur l'écoute et la voix

    37:09

Description

Bienvenue sur On n’a qu’une voix, un podcast pour découvrir ce que cache notre voix !


Dans cet épisode, vous allez entendre la voix de David Bordes. En tant qu’accompagnateur en montagne et conteur, David utilise sa voix au quotidien.
Ensemble, nous allons parler de contes, de Pyrénées, de kiwis, de la langue occitane et de l’importance d’ouvrir grand ses oreilles avant d’ouvrir sa bouche !


Il nous dit (presque !) tout sur : 

  • la voix dans sa vie d’accompagnateur en montagne, de conteur et… d’être humain ;

  • la manière dont le conte est arrivé dans sa vie ;

  • la place des langues dans son quotidien et en particulier, celle de l’occitan ;

  • l’importance d’articuler écoute et parole.


Bonne écoute !


💡 Les liens pour découvrir et contacter David : 

Caminam : https://www.caminam.fr/

L'aventure nordique : https://laventurenordique.fr


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➡️ vous abonner au podcast sur votre application d’écoute préférée ;

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📩 Contactez-moi à l’adresse suivante : christine.irabola.redac@gmail.com.


Crédits :


  • Réalisation, montage, mixage : Christine Irabola

  • Musiques et chants : Émilie Décla

  • Hébergement : Ausha


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Christine

    On n'a qu'une voix, un podcast pour découvrir ce que cache notre voix. Chaque mois, venez à la rencontre de mes invités qui lèvent le voile sur l'histoire singulière de leur voix. Au programme, des voix parlées, des voix chantées, des voix jouées et des voix parfois malmenées. L'intention ? vous procurer des émotions, vous faire voyager, vous apporter des conseils et vous proposer un pas de côté pour vous inviter à aimer votre voix. Dans cet épisode, vous allez entendre la voix de David Borde. En tant qu'accompagnateur en montagne et conteur, David utilise sa voix au quotidien. Ensemble, nous allons parler de contes, de Pyrénées, de Kiwi, de la langue occitane et de l'importance d'ouvrir grand ses oreilles avant d'ouvrir sa bouche. Bonne écoute ! Bonjour David !

  • David

    Adiu, bonjour !

  • Christine

    Pour commencer, j'aimerais savoir quelle place a la voix dans ta vie ?

  • David

    La voix, j'ai la voix de tous les jours, celle qui me permet de communiquer avec les miens, avec les amis, avec ceux que j'aime bien et ceux que je n'aime pas. Et ma voix professionnelle, c'est-à-dire que c'est un de mes outils. Et à la montagne, on compte. Et aussi les moments où je ne m'en sers pas. J'ai des kiwis avec mon cousin. Quand je suis à tailler les kiwis, je ne parle pas et c'est très agréable. Donc c'est quelque chose dont je me sers. Et parfois, c'est bien de...

  • Christine

    Et la voix des autres, est-ce qu'elle a une place dans ta vie ?

  • David

    Prépondérante. Qu'on le veuille ou non, la voix des autres, elle est là. On est obligé de faire avec plein de choses qu'on n'a pas envie d'entendre. mais qu'on entend quand même et qui sont là. Des choses affectueuses, des choses d'amour quand on est dans la famille, le couple, des choses de gestion quotidienne. La voix des autres, c'est communiquer avec les autres. C'est sûr que s'il y a un sourd, il n'entendra pas ce qu'on dit. Mais il y a des gens qui sont obligés de faire sans la voix, les mains ou ce qu'on veut. Ou quand il y a quelqu'un qui a une autre langue, on est obligé de communiquer différemment. Mais on est des animaux sociaux. Le tout seul en haut de la montagne, je n'y crois pas. Des animaux de troupeau au départ.

  • Christine

    Donc aujourd'hui, tu es accompagnateur en montagne, tu es conteur aussi. Si on reprend dans la chronologie, qu'est-ce qui arrive en premier dans ta vie ?

  • David

    Ce qui arrive en premier, c'est que j'étais un peu agité du casque jeune, un peu agité, je me suis pas mal servi de ma voix, donc on en reparlera après sur les choses qui énervent, si tu veux. Et donc, j'ai fait plein de choses, plein de choses. Et quand est arrivée la question de, et si on se calmait un peu ? J'ai commencé par l'accompagnateur en montagne et assez vite je me suis fait coincer par un monsieur qui s'appelle Serge Mauroite qui m'a coincé dans le compte et là ça s'est enchaîné très vite. Après qui a influencé sur l'autre je ne sais pas trop au départ parce que les deux ont suivi très rapidement.

  • Christine

    D'accord et tu penses que dans ton enfance est-ce qu'il y avait déjà des racines de cette voix là ?

  • David

    Ah oui beaucoup. Déjà dans mon enfance, un pied urbain du côté de Pau, un pied très rural dans la ferme de mes grands-parents paternels. Et ma grand-mère qui parlait, qui parlait, qui parlait, mon grand-père des coins, la table, le café, et puis blablablam, ça parle de tout, de rien, mais beaucoup parler, parler, parler, et nous, gosses, écouter, beaucoup écouter ça. Et ça faisait partie d'un environnement global, des récits, beaucoup d'échanges verbaux. Parler. Et ça, je pense que c'est quelque chose qui a marqué, qui a pas mal marqué. Oui, oui.

  • Christine

    D'accord. Et donc après, tu te lances dans l'accompagnateur en montagne, c'est ça ? Oui. Et là, quelle place a eu la voix à ce moment-là ? Est-ce que tu peux nous en dire quelques mots ?

  • David

    Et moi, petit, pour aller chercher du café, la note, l'addition, ça te faisait beaucoup rire. Mon père va demander l'addition. J'étais mort de peur. Je ne valais rien. J'étais une chaussette. Et petit à petit, clac, clac, donc... Le parcours que j'ai eu avant, pas mal de manifs, de machins, j'ai appris l'habitude de parler, je m'étais vacciné fort. Mais là, je me suis retrouvé à me servir de ma voix avec des gens que je ne connais pas, qui me payent, à transmettre des choses, du savoir ou des émotions, des consignes de sécurité. Donc, gagner de l'autorité par rapport à la voix, déjà, gagner une place dans le groupe. C'est l'histoire sociale de plein de gens, comment tu prends ta place avec les autres. Donc la voix, ça a questionné plein de choses. Et puis ça, toutes ces questions-là, plus le fait que je parle à 300 à l'heure tout le temps. Donc comment tu... qu'est-ce qu'on fait avec la vitesse ? Et les... Toutes les contraintes extérieures, quand tu es dehors, le chien qui passe, le vent, la cascade, donc apprendre à faire avec ces paramètres physiques de la montagne.

  • Christine

    D'accord, donc tu as commencé par être accompagnateur en montagne, le conte, c'est venu après ?

  • David

    Un an après.

  • Christine

    Ok, et là, tu es autodidacte, tu t'appuies sur d'autres conteurs, comment tu procèdes ?

  • David

    Je me suis fait arracher mon pare-chocs par une dame qui s'appelle Sophie, adorable, avec qui on était au lycée. Elle m'a dit Je suis désolé, je t'ai arraché ton pare-chocs, mais je n'ai pas une thune. Comment on fait ? Je ne sais pas. Donc, on a trouvé un pare-chocs à la casse, de fil en aiguille, on se le répare. On s'arrange, elle me donne un petit fromage et tout va bien. Cette fille est dans le milieu du cheval avec un très bon copain Balou, un gars qui gère l'association Petit Pas au port de Castets, avec les bourricots, avec les ânes. Et à ce moment-là, Balou démarrait Petit pas, il a dit je cherche un accompagnateur, un jeune, elle m'en parle de fil en aiguille, on va là-bas, deux bières plus tard je me retrouve avec une annesse qui est morte depuis la pauvre et on va faire trois tours par là et je rentre mais c'est trop bien ça. Et là on a réfléchi, qu'est-ce qu'on fait ? Moi je cherchais à travailler, eux à faire tourner les ânes, des gens qui font des marmottes et compagnie, il y en a plein. Et j'avais vu un spectacle de contes, quelque temps avant, à la forêt suspendue de Bosse d'Arros, c'était une partie des chanteurs des Pagayous. Un groupe de polyphonie, il y en avait trois. Salles, Abadie et Mauhourat, qui s'étaient répartis un peu des ambiances. Je trouvais ça terrible, très très bon. Donc j'ai dit, pareil, ce qu'on peut faire, on part en randonnée. Moi j'encadre, je prends ma part. Vous, vous louez les ânes, très bien. Et on va se caler à un endroit, un feu du comte. Il ne nous manquait que le compteur. Donc j'ai appelé Maurat avec qui on s'entendait déjà pas mal. Et je lui ai demandé de venir. Il m'a dit, parfait, je viens. Il est venu. La question financière. Les gens payent combien tu veux par soirée. Je ne veux pas d'argent, je suis un stit, c'est bon, j'ai mes sous. Mais si, non, si, non. Et au bout d'un moment, il me dit, écoute, moi, je viens à une condition, c'est que tu essaies de compter. Ce qui n'était pas prévu, trop, mais je lui dis, non, non, si, bon. Et après, j'ai essayé, le virus est rentré. Et voilà, tu ne t'en débarrasses pas après. Puis tu prends plaisir et puis tu joues avec.

  • Christine

    Quand tu dis conter, est-ce que ce sont des contes traditionnels ou c'est toi qui les écris ? Comment ça se passe ?

  • David

    En fait, je récupère des contes traditionnels, soit que j'ai entendu. Moi, je fais partie du... Là, j'arrive à 50 ans. On est une génération au moins dans le milieu accompagnateur en montagne. Pas tous, mais on est quand même pas mal à avoir été marqué par Louis Espinassous. Un peu conteur et tout ça. Donc, il y avait déjà le répertoire de Louis qu'on avait entendu ici ou là, en formation ou ailleurs. ça ce que j'avais entendu avec maura tu es tous ces gens là et après on a un panel de bouquins qui est quand même assez énorme on a la chance d'avoir pu tout un travail de collectage donc je suis allé piocher dans ce répertoire tradi gascon et pyrénéens et à partir de là ça tu le prends et zlaf j'ai joué avec quoi donc

  • Christine

    j'ai pas fait vraiment d'écriture mais je les ai repris et du coup est ce que tu te souviens de la première fois que tu as compté ouais

  • David

    C'est pas facile, c'est pas facile, mais en même temps, c'est des gens que tu connais pas. T'es au coin du feu, il fait à peu près sombre, tu vois personne. Puis j'avais déjà un peu de métier quand même, enfin un peu, j'avais quand même déjà pratiqué un peu le fait de m'adresser à des gens. Donc tu regardes un peu au-dessus de la tête et t'envoies, et feu. Et après, ça se fait peu à peu. Tu vois ce qui prend, ce qui prend pas, tu te fais un peu secouer par les physionomies des gens. Et en fait, tu te rends conte qu'en fait, il faut déconnecter ça. La physionomie n'est pas synonyme de ce qui se passe à l'intérieur. Tu as des gens qui respirent l'ennui et qui en fait non, ils sont à fond. Pas un exercice facile, mais pas non plus quelque chose de dramatique.

  • Christine

    Et après, est-ce qu'il y a des techniques qui t'ont accompagné au fil des années ou pas vraiment ?

  • David

    J'avais fait un stage avec Louis, justement, pour essayer. Un peu, oui, il y a quelques techniques. Mais après, je pense que c'est surtout le meilleur conseil, c'est Serge Mambrat qui me l'avait donné. C'était de la douche, la voiture, les moments où tu es tout seul, tu te fais l'histoire. Dans un tu rodes, on se met l'histoire en bouche. Ce qui fait qu'après, quand on est avec des gens, on ne va plus chercher le fil. Et après, c'est parler suffisamment fort, faire des images. Pour moi, m'imposer à me mettre des blancs, ce n'est pas rien. Mais ces blancs-là sont nécessaires pour que les gens qui écoutent aient le temps de se faire des images. Et après, oui, la technique de tenir les gens en face. de se désimaginer comme dans un filet. Mais pour avoir pas le mouvement permanent à faire, comme si je fais avec le micro, si je passe à droite, à gauche, ton son ne fait que varier, ceux qui sont à droite, à gauche n'entendent pas. Donc voilà, essayez d'avoir ça. Et poussez un peu. Et voilà.

  • Christine

    Et du coup, est-ce que tu peux nous dire quelle place a la voix dans tes comptes ?

  • David

    Et moi, je m'en sers bien. Je m'en sers, bon déjà, j'ai un peu de wawa au naturel, donc je pousse un peu la voix et la voix me sert pour faire des modulations. Au lycée, j'ai eu beaucoup d'histoires parce que je n'arrêtais pas de faire du bruit, des machins, que ça m'amusait beaucoup. Et en fait, je m'amuse à faire ça, des onomatopées, des petits bruits, des machins. Je ne peux pas m'empêcher de faire dans la vie naturelle, normale, entre guillemets. Donc je m'en sers, je joue avec. Après, je mélange aussi avec l'occident. On en reparlera après. Dans le conte, ma voix me sert un peu d'outil en plus des mots. Le mot image, il y a aussi l'outil voix.

  • Christine

    D'accord. Donc, en fait, on ne va pas dire qu'il y a quelque chose qui prime. Est-ce que c'est le récit qui prime ? Est-ce que c'est la voix qui prime ? Pour toi, tout est important, finalement.

  • David

    Les deux vont ensemble. Parce qu'après, je pense que chaque conteur a aussi une personnalité. C'est pas du théâtre où tu prends la personnalité de quelqu'un. Là, tu as ta personnalité et il y a des gens qui parlent doucement et ils sont comme ça. Et il y a des fois des conteurs, c'est super agréable à écouter. T'es à deux doigts de la léthargie, t'as l'impression de loin. Mais non, c'est doux. C'est juste doux, c'est tout calme et ils sont comme ça. Et ça n'a rien de désagréable. Et d'autres plus explosifs où la voix, elle est là. Je pense que c'est un tout. Il n'y en a pas un qui va primer plus que l'autre.

  • Christine

    Alors toi, tu contes, on en avait parlé, aussi bien dedans que dehors, c'est bien ça ?

  • David

    Oui.

  • Christine

    Est-ce que, j'imagine que les enjeux sont différents, est-ce que tu peux nous en dire quelques mots ?

  • David

    Les enjeux, quand tu es dedans, tu fermes une petite ambiance et tu joues avec le calme, dans un endroit où les gens sont rentrés, de gré ou de force, de force si c'est des gamins, mais ils sont rentrés, ils s'avouent le son, ils sont posés, ils tapent. T'as pas de perturbations extérieures qui vont pas... C'est facile dedans, c'est agréable, c'est facile. Dehors, tu as beaucoup plus de contraintes sonores. Le vent, la cascade, l'autre kek qui passe en scooter quand t'es en semi-urbain, les vaches, les cloches... Salut, t'es là ? Oui, je travaille ! Tu peux avoir tout ça qui joue, mais en même temps, dehors, t'as un support énorme. Tu as des plantes, des arbres, le chien qui passe, tu rentres le chien dans l'histoire. Tu as aussi une capacité de rebond qui est terrible. Et un environnement.

  • Christine

    Tu joues avec l'environnement aussi finalement.

  • David

    Il faut intégrer les gens, tout ce qui peut être une perturbation. Enfin pas de trop non plus, mais il faut quand même intégrer tout ça dedans. Moi dans ma pratique et dans ce que je fais, et ce que je conseillerais, c'est que tu t'appuies parce que c'est des choses qui vont te perturber. C'est des choses qui ne sont pas dans l'histoire. et qui de toute façon les gens vont soit les regarder, soit les écouter. Donc soit tu te bats contre le chien, soit tu rentres le chien dans l'histoire. Soit tu acceptes quand tu es au Bénou par exemple, et que tu as je ne sais pas qui, aux commandes de son super hélicoptère à 24 millions d'euros qui passe, et bien tu attends que l'hélicoptère passe. On ne joue pas contre un hélicoptère. Une fois qu'il est passé, ou pareil pour le tracteur, ou le quad, il y a des moments où tu attends, et après tu repars.

  • Christine

    Est-ce que toi, tu as des endroits vraiment dans lesquels tu adores compter ?

  • David

    Oui, quand on monte, oui, oui, oui. Il y a une keb, les keb, c'est des abris sous roches. Il y a une grosse keb dans la vallée d'Ossau, vers le Caillou de Soques, où on s'arrête régulièrement avec mon collègue, Pierre Vidal. On a une soirée où on monte jusqu'à une cabane, et feu, comte, ventrêche et vin rouge. C'est très bien, culinaire et culturel. Et un peu de sport. Et là, il y a une très, très belle keb, j'adore. C'est un très, très bel endroit. En plus, il y a un peu de résonance et puis ça fait une ambiance où il y a très peu de gens qui passent. Il y a du monde, mais voilà, tu as une belle éthrée. Ça, c'est un bel endroit que j'aime bien. Et après, vers tout ce qui est un peu haut, où tu surplombes des lacs, vers au-dessus des refuges d'Ayous, au-dessus du refuge d'Arlette. Là, c'est un peu chaud à gérer parce que là, tu as le vent. Et là, le vent, par contre, tu ne peux pas faire grand-chose contre. Mais là quand tu as des moments où tu arrives à poser tout le monde, que tu n'as pas trop de vent contre toi, tu as un paysage de dengots, là ça bombarde, c'est pas mal.

  • Christine

    Et les gens ils te font quel retour dans des endroits comme ça ?

  • David

    Ah oui, tu as de tout. Tu as les gens qui ne disent rien, la tête qui bouge, ceux qui ont les yeux qui brillent, ceux qui verbalisent, c'était génial, machin ceux qui ne disent rien. Peut-être qu'il y en a aussi qui n'aiment pas et qui ne le disent pas. Je n'ai jamais eu personne qui m'a dit c'est pourri, par-ci, là-dos Tronche d'ail là, qui dit, c'est pas, c'était nul. Truc d'ado, je prêche le faux pour le vrai. Et en attendant, il est resté jusqu'au bout, et puis il n'a pas sorti le téléphone, donc l'un dans l'autre. Et là, t'as des retours surprenants. Après, en montagne, des fois, on a une dame, une fois, qui nous s'est mise à pleurer. On rentrait de la nocturne, là, et levée de lune au-dessus de la dente de soc. Une espèce de relief un peu pointu. Et là, paf, la lune qui est sortie, une espèce d'ambiance terrible. Et là, elle nous a posé une petite larme. Elle était juste à côté de nous. Mais qu'est-ce qui vous arrive ? C'est trop beau ! Mais voilà ! C'est mignon. C'est cool. Ça donne du sens.

  • Christine

    J'ai vu que tu participais aussi à des festivals.

  • David

    Un peu.

  • Christine

    des festivals de contes, est-ce que c'est quelque chose que tu aimes bien faire ?

  • David

    Oui, mais on s'est vite rendu compte, quand je dis on, je faisais partie du collectif SAI, qui était un regroupement pluridisciplinaire, comme on dit, où il y avait des gens du groupe La Famille Artus, qui étaient plutôt tradiocs, mais alors ils ont tout tourné en électro, avec beaucoup d'improvisations, des ambiances très différentes. Donc il y avait eux sur la partie musique, danse, chant. Il y avait Colinato qui était une plasticienne qui travaillait sur des projections, qui est partie dans le Lot aujourd'hui. Serge et moi en conte. Enfin, il y avait tout un carrefour. Et un monsieur là, Patrick Pouzet, qui était un peu aux manettes de tout ça. Aujourd'hui, la structure est rentrée dans la Ciutat, Oueda, Sapou. Et on s'est rendu compte que pour aller dans les festivals de contes, c'est quand même un milieu d'entre-soi assez important. C'est beaucoup de cooptation. de cooptation de l'un ou de l'autre et qu'il faut quand même un bon vendeur qui soit connu et reconnu et que rentrer dans ce petit monde tout cool et tout sympathique soit-il c'est pas si facile donc il faut quand même donner de l'énergie pour se bagarrer là-dedans et ça n'enlève rien à la qualité artistique de ce qu'on y entend et tout ça mais c'est pas un environnement simple d'un côté et de l'autre c'est la distance Et rarefois, je suis parti sur des festivals un petit peu loin, des petites choses. Tu te dis, c'est la vie d'intermittent du spectacle. Tu roules 6 heures, tu attends 2 heures, tu fais 8 minutes de balance, tu fais ton compte, petit spectacle, 50 minutes, 1h15. Tu attends et tu te remets 6 heures de bagnole. Le rang du temps m'a un peu interrogé.

  • Christine

    Peut-être que pour toi, ça a moins de sens parce que toi, tu es quand même ancré aussi ici, que tu as parlé des endroits que tu aimais bien. C'était aussi des endroits que tu connais, dans lesquels tu amènes les gens, que tu accompagnes finalement. Est-ce que ça a peut-être moins de sens de te retrouver ?

  • David

    Je ne sais pas. En même temps, dans un festival, c'est agréable parce que souvent, tu as affaire à un public de gens qui sait où ils vont. Après, moi, j'aime bien aussi quand tu coïnces des gens, ils sont pris dans une ambiance, ils ne savent pas où ils sont. C'est surprenant. C'est assez bon. Mais il y a aussi tout un côté confort. Tu fais le festival, tu as des conditions techniques, un public, des gens qui t'accueillent. Tu es dans une ambiance, tu rencontres d'autres gens qui sont meilleurs que toi, tous. Parce que ceux-là, ils sont à 100% que sur ça. Des ladis diallo, des jolins, il y a quand même quelques pointures. Il y a du très très bon. Donc ça, peut-être qu'en vieillissant, c'est un truc où j'essaierai de pousser plus. Mais pour l'instant, entre ce que je te disais avant... Aujourd'hui que j'ai assez de combats par droite à gauche, je n'ai pas envie de mettre trop d'énergie dessus. Mais ce n'est pas dit qu'au bout d'un moment, si j'ai les genoux qui me lâchent ou que j'en ai marre de batailler sur l'accompagnement, ce n'est pas dit que tenter. Après, il faut avoir l'envie de faire des comptes de temps en temps et en faire un métier à 100%. C'est autre chose aussi. Il faut des spectacles clés en main, il faut des spectacles bien faits que tu puisses présenter, vendre. Donc le côté un peu impro, où des fois je sors de la voiture, j'ai aucune idée de ce que je vais raconter, et je prends un compte, et puis après, on va faire l'autre, et ça roule. Et c'est pas un spectacle construit.

  • Christine

    Oui, finalement, c'est deux métiers différents.

  • David

    C'est autre chose. On l'a eu fait avec le collectif, on avait deux spectacles carrés, avec compte, musique, chant, projection, mais c'est vraiment un autre travail. Tu fais tes filages à l'italienne, pour tout bien caler, c'est génial, ça professionnalise dans le sens où on apprend à... On apprend à se tenir sur une scène, on apprend à faire avec d'autres éléments, mais c'est cadré, c'est autre chose.

  • Christine

    Est-ce qu'il y a, soit dans ces endroits-là, soit à d'autres moments, des voix qui t'inspirent ? Ça peut être des conteurs, mais ça peut être aussi des chanteurs ou autres.

  • David

    Il y a des voix qui me marquent. Au quotidien aussi, tu parles avec des gens qui ont des voix qui résonnent. Et à l'inverse, tu as des voix qui sont fatigantes. Je ne dirais pas jusqu'à agressantes, mais fatigantes. Il y a des gens qui parlent. C'est pas lié à eux, mais t'as des voix qui te... qui te scie l'oreille. Arrête-toi, s'il te plaît ! Mais après, il y a des voix qui te portent, qui t'interloquent. Puis oui, sur les chanteurs, on a tous des voix d'un chanteur qui te marquent. Oui, louride. Moi, par exemple, c'est une petite voix qui... Un truc très con, Brassens. Ou après, en polyphonie, en chant, des fois, tu te retrouves à chanter par là et tu as une basse assez énorme qui sort ou un gars qui a une haute incroyable. Enfin, tu as des voix comme ça, un peu de tout type.

  • Christine

    Alors David, on en a un petit peu parlé de la place de la voix dans l'accompagnement en montagne. Est-ce que tu peux nous en dire un petit peu plus ?

  • David

    Ça pose un cadre, souvent déjà, le bonjour, le hadichat, le premier contact avec les gens. Ils payent, il y a les gens qui te connaissent, et il y a les autres. Et là, la voix, le fait de la poser, le fait de prendre ce premier contact, déjà tu prends ta place sur le groupe. C'est pas que tu dois être supérieur au groupe, mais c'est qu'ils payent pour être avec toi, et que tu es responsable d'eux, quelque part. Et qu'à un moment donné, si ça part un peu en cacahuète, il faut que tu puisses maîtriser ce qui se passe globalement dans la mesure du possible. Donc je pense qu'il y a aussi la voix, elle sert beaucoup à ça, avec des tas de personnalités différentes. C'est pas parce que tu parles fort que tu vas être forcément écouté. Je pense que c'est la personnalité, il y a des gens qui vont parler tout doucement, des gens qui vont utiliser la blague, mais elle donne un cadre de... Elle prend le groupe, quoi. Je pense que dans l'accompagnement, il y a ça beaucoup. Et après, nous, on est un métier où on parle. Pendant très longtemps, on disait un bon guide ne parle pas. Pour un guide de haute montagne, il te prenait à un point A, il te prenait au refuge ou au village, il te montait en haut de je ne sais quel pic, et il te ramenait vivant. Et qu'il ne parle pas, c'est pas... sans foutre. C'était un bon guide ne parle pas. Il fallait que... c'était de la technique et rentrer vivant. Nous, c'est au contraire. Nous, on est des gens qui partageons un milieu, on partage un milieu avec les autres. On partage les observations, on partage ce qu'on voit au niveau des bestioles, des plantes, du pastoralisme, des pics, des contes, de la géologie. Donc on est tout le temps en train de parler. Donc la voix, elle est là pour... c'est une passerelle constante entre nous, le milieu et les clients. On peut dire comme on veut, mais ça reste des clients, les gens y payent. On ne vit pas que d'amour et d'eau fraîche. C'est important. Mais clac, clac, c'est aussi ça. Dans l'accompagnement, c'est cet outil-là, ce fil.

  • Christine

    Et toi, parce que ça fait combien d'années que tu es accompagnateur mental ?

  • David

    Moi, j'ai démarré en 2002.

  • Christine

    Ok, donc ça fait 22 ans. Est-ce que tu as senti une évolution là-dessus au fil du temps ?

  • David

    Sur la voix ?

  • Christine

    Sur la voix, la place, tu vois, c'est-à-dire, tu dis, voilà, qu'en fait, ça va au-delà de juste amener d'un point A à un point B, il se passe plein de choses entre les deux.

  • David

    J'ai senti une évolution avec les scolaires. J'ai senti une évolution avec les scolaires dans le sens où je passe beaucoup plus... Mais ça, c'est pas que moi. Quand on discute avec des gens qui les ont en milieu fermé, les enfants, des enseignants ça s'appelle. C'est un combat partout, assez fréquent. C'est le temps passé à gagner l'écoute. Et ça la voix elle est primordiale. Et nous on a une collègue par exemple qui a une toute petite voix qui se questionne fortement sur elle, sa relation avec les scolaires, parce qu'elle aime bien les transmissions pédagogiques. Mais cette espèce de recherche là, enfin de comment arriver à... prendre le dessus sur la classe, dans le sens où ils vont être attentifs. Comment arriver à les écouter ? Le dessus c'est pas qu'un rapport de force où on leur met les coups de bâtons, mais c'est ça, c'est comment on va arriver à les faire écouter. Et ça c'est un temps qui devient de plus en plus long et où la voix a son importance. Et à un moment donné, c'est un niveau sonore, c'est de choisir ses mots, trouver le moment où il y a un creux de bruit, au milieu du bruit, pour aller chercher. Et ça, c'est quelque chose qui a évolué. Ça, c'est une vraie évolution. Après, le grand public, entre guillemets, les adultes, les ados, c'est différent. Je ne vois pas de grand... Je n'ai pas ressenti, en tout cas, de grand mouvement sur ça.

  • Christine

    Il y a un sujet qui est important à aborder aujourd'hui, je pense que c'est la question de la langue, enfin des langues, puisque là, aujourd'hui, on se parle en français. Mais il y a une autre langue qui a une place importante dans ta vie. Est-ce que tu peux nous en dire un petit peu plus ?

  • David

    Ah, c'est là où on habite. Ça va être en Occitan, enfin en Gascogne, en Béarnais, on est très fort pour se disputer ici sur le nom de la langue. On a vraiment des gens qui ont du temps, en Vallée d'Osso on en a 2-3 là, des très très bons, qui ont du temps pour ça. Et donc la définition pour ceux de l'Occitan, dans sa variante béarnaise, c'est la langue d'ici qui est là, et moi que j'entendais aussi, autour de moi, que j'ai beaucoup entendu. Et mon père a essayé de me l'apprendre, il a dit tu rigoles ou quoi ? Et non, non, hors de question. J'ai pas voulu. Enfin si, petit, j'avais un livre qui s'appelle l'esquirette, c'est la petite cloche. Donc j'apprenais un peu, quatre mots, Bonne nuit pour Bonne nuit Enfin, il y avait quelques mots, mais pas plus. Mais j'entendais quand même beaucoup la langue autour de moi. Et après, est arrivée la période ado et un peu plus où là, c'était pas la peine. J'ai pas voulu en entendre parler. Et après, mon parcours de lycéen ayant été un peu chaotique, il a été... T'es convenu pour tout le monde que c'était bien à un moment donné que je passais un an un peu loin de la maison et j'ai échoué à Bayonne. Très bonne année. Magnifique année, scolairement parlant, il faut voir, mais très très belle année où je me suis retrouvé à Cassin. René Cassin, 92-93, voilà, c'est la belle époque. Il y avait pas mal d'agitation sociale, pas mal d'agitation musicale, pas mal de monde qui s'agitait, des gens pas mal sympathiques. Puis des thématiques un peu costauds, il y avait une grosse campagne sur l'insoumission qui existait, il y avait tout un bazar. Dans tous les sens, puis des groupes, ça bougeait fort. Et nous, on s'y retrouvait très, très bien dans cette petite ambiance. Mais il y avait le fait qu'il y avait énormément qui parlaient en basque entre eux. Et puis, ça, ça te le fait sentir qu'ils sont quand même le peuple élu. Et je plaisante.

  • Christine

    C'est bien qu'il y ait un sous-texte.

  • David

    C'est bien qu'il y ait un sous-texte. Non, non, on bataillait beaucoup avec ça, on rigolait. Et alors, quand même, ça m'a questionné. Puis on a eu plein de discussions sur la place de la langue, la place sociale, la place politique, l'histoire linguistique de la France, de ce pays. Donc, tout ne s'est pas fait seul, que les gens n'ont pas abandonné du jour au lendemain le Basque, le Breton, le Catalan, le Galicien. Enfin, le Galicien, c'est l'autre côté, mais... Tout ça, que ça ne s'est pas abandonné du jour au lendemain, qu'il y a tout un processus historique qui s'est fait. Et voilà, tout ça, ça questionne. Les relations avec les langues de l'immigration aussi, parler mal français plutôt que turc à vos enfants, ça a suivi encore. Sous Sarkozy, on en sortait encore. Et là, actuellement, on creuserait un petit peu. On n'est pas loin. On est loin d'avoir vraiment avancé sur ce sujet. Mais voilà, tout ça, ça a bougé, bougé. Ça s'est agité. Après, je suis rentré en Béarn. Et puis de là, les fils ont fait que j'ai rencontré les gens de Radio Païs par exemple, les gens des Calandrets, les écoles immersives en Occitan, les gens de Carnaval, enfin le milieu un peu occitaniste, les gens de la Tour du Bourreau, qui était à Pau, un local plutôt militant. Et puis tout ça, ça s'est fait, clac, clac, clac, et puis je me suis dit, mais quand même, mais quand même, mais quand même. Et puis j'ai commencé à parler un peu, et puis on a eu la chance d'être toute une vague de jeunes, un peu branchés pareil. Elle était un peu rock'n'roll aussi, et donc on s'est auto-motivés, plus quelques-uns qui nous ont accompagnés là-dedans. Et puis petit à petit, j'ai basculé. Alors ça a beaucoup fait rire mon père, beaucoup. Il me dit Ah oui, c'est ça, ton Occitan, on parle bien, Arnaïs, ici. Et puis même, quand tu essaies de transmettre la langue à ton gamin, et puis qu'il revient par la fenêtre en te disant Oui, j'apprends l'Occitan, mais oui. Et bon, finalement, les choses se sont faites, donc ça a pris une place. Et puis au-delà des questionnements militants qu'on peut avoir, ou historiques, après il y a un vrai plaisir. un vrai plaisir à parler, il y a le chuc de la langue, le jus de la langue, ça veut rien dire en français, le sens, l'architecture, les mots que tu peux utiliser, les échanges que tu vas créer avec les gens quand tu parles. Il y a des gens avec qui j'ai jamais parlé français, d'autres, quand on bascule en oc, ça n'a rien à voir, tu vas chercher d'autres choses, donc il y a ce plaisir-là. Et en parallèle, ma compagne Myriam, qui elle est née au... au Kenya, fille de pieds noirs et de bourguignons, qui est après rentrée à 11 ans ici, et qui a passé dans le sud-est, plutôt un profil de gens qui ont voyagé, et qui a eu décidé, ça va, un moment, de courir partout, donc de se poser ici, qui s'est ancré, qui a appris la langue aussi, et aujourd'hui qui l'enseigne, et qui parle mieux que moi, et donc on s'est accompagné aussi là-dedans, ce qui fait qu'aujourd'hui on parle avec les garçons, avec nos enfants, et qui eux sont assez fiers de ça, enfin ça dépend d'où ils sont. Ils sont un peu discrets parfois. Parle moins fort papa, s'il te plaît. Mais voilà, ça a pris une place prépondérante. Enfin prépondérante, une place importante en tout cas.

  • Christine

    Et si on repart de la voix, quand tu parles en français, quand tu parles en occitan, est-ce que tu perçois une différence ?

  • David

    Dans l'intonation, la tonalité, je sais plus.

  • Christine

    Pas forcément. Par contre, quand je vais parler en occitan, surtout avec des gens qui la tiennent depuis plus longtemps que moi, des gens qui sont nés dedans, ou des gens qui ont une jolie langue dans le sens vocabulaire, syntaxe, tout ça, je vais être plus attentif à la façon de parler, aux tournures, aux mots, à des airs qui roulent. Moi, je suis un enfant de TF1, entre guillemets, mais le joli air qui roule des vieux, tout ça, le air d'Edith Piaf, on est lycée. On est passé tous au concasseur. Donc des fois, je vais être plus attentif à ça. Après, en français, pareil, je vais être attentif des fois quand il y a des accents complètement surréalistes qui débarquent, de harrasse ou de je ne sais pas où, un bon vieux vieux géant qui sort de là-bas, tu ne sais pas d'où. Ça, c'est très bon, j'adore. Les Québécois aussi me font beaucoup rire. Bon, ils font rire tout le monde, mais l'intonation, c'est rigolo. Je pense que c'est plus ça qui m'interpelle.

  • David

    Mais justement, les gens que tu accompagnes en montagne, par exemple, qui viennent de partout, finalement, est-ce qu'ils te font des remarques sur la musicalité de ta voix ? Est-ce que ça arrive, ça ?

  • Christine

    Ah oui, oui, parce que je ne me rends pas compte, mais je mets plein de mots d'occident un peu partout. Méfiez-vous de ne pas vous mettre une tec dans la branche. Pardon ? Tu as plein de trucs comme ça. Il te l'a engoulé, le monsieur, le sandwich ? Il y a plein de trucs comme ça qui me partent, qui se sont tout mesclés, tout mélangés. Et donc des fois, ça les fait rire. Et à l'inverse, tu vas avoir un gars du fond du Rouergue, ou un Aveyroné qui est là, ou je ne sais pas où, un Bigourdant, et clac, ça fait une passerelle. Ou des Portugais, très souvent les Portugais. Castagné, on a énormément de mots proches, et les Portugais, c'est quand même des gens qui sont très attachés à la langue. Au tour du monde, les Portugais restent très locuteurs. Ils ne sont pas forcément à faire beaucoup de bruit, mais ils ont tous l'espèce de croix portugaise sur eux. ou partout, et la langue. Donc, c'est des gens qui sont sensibles à la langue, à l'écoute. Donc, voilà, il y a ça. Et puis,

  • Speaker #2

    il y a ceux qui s'en fichent complètement et qui grandent bien leur façon. Papa qui a étudié le débat de l'Ugère, papa qui a l'ordre, papa, au grand cours, cours, cours, papa, papa, que j'ai cassé, que j'ai cassé des blancs, des rues, des rues qui cantent du ciel, qui disent comme ça, on ne peut pas,

  • David

    Est-ce qu'il y a des sujets qui t'amènent à élever la voix ?

  • Christine

    Heureusement que je vais en montagne. Heureusement que je vais en montagne et que je travaille avec des enfants, des ados, ou avec un public adulte, mais sur des moments de transmission, de douceur, de montagne. Sinon, moi je disjoncterais. On est dans un monde qui t'agace profondément. L'histoire de Gaza en ce moment, c'est infâme. On était partis faire une mission civile en Palestine en 2003. Et tu te dis, pourquoi on n'écoute pas les gens ? Pourquoi on ne les écoute pas ? Il y avait les antisionistes israéliens qu'on avait rencontrés sur place. Il y avait Varjavski, c'était un fils de rabbin, un gars que ses parents avaient un peu goûté au camp de concentration, donc on ne peut pas trop dire qu'il est antisémite. Et qui n'arrêtait pas de dire que l'extension des colonies, on allait droit dans le mur. Et de l'autre côté, on avait rencontré le docteur Sabri, un gars du FATA, du parti Arafat. Ils disaient attention, on a les barbus qui arrivent, et eux ils avaient un conflit interne entre les palestiniens, entre les laïcs, qui pouvaient être croyants par là, et les musulmans, les islamistes politiques. Et aujourd'hui tu te retrouves avec un gouvernement d'extrême droite en Israël, ceux qui ont tué Issa Krabi, c'est eux, c'est pas qu'ils ont appuyé sur la gâchette, mais c'est des gens qui ont tué une parole de paix du côté israélien. Et de l'autre côté, les enfants du Hamas, c'est plus compliqué à ce niveau-là, parce que quand tu es enfermé, tu moisis doucement dans ta tête, même s'il y a des tas de choses positives qui se font en Gaza. Mais on se retrouve là avec quelque chose de... Oui, ça, ça me fait bondir. L'Europe qui continue à vendre des armes. Les Américains me font bondir, les USA économiquement, je parlais. Nous-mêmes, l'occidental français de base m'agace de plus en plus à aller chez Starbucks, à mettre le joli pull de Noël des Nord-Américains. On fait le perçant, t'as l'impression, dans un feuilleton américain, ils sont tous habillés comme des mille-or, comme dans les feuilletons américains. Ça sort d'où, ça ? Les écoles de business school, ça s'appelle, avec les petits chapeaux américains qu'on jette à la fin, des gamins qui ne savent pas qu'une palace existe, mais qui connaissent la NBA. On regarde Netflix, on commande chez Amazon, on va au Drive parce que c'est plus pratique s'il te plaît. L'humour, j'aime beaucoup l'humour, mais c'est du stand-up américain. On se standardise là et à côté de ça, on secoue le petit drapeau français. Vive le retour à nos traditions ! Il y a un tas de choses, ça peut durer longtemps. Il y a un tas de choses qui me donnent envie d'élever la voix. La retraite, la retraite. cette espèce d'hypocrisie donc oui il y a plein de choses de temps en temps j'élève un peu la voix dans des manifs ou quoi mais j'y vais de moins en moins aussi j'ai passé beaucoup de temps sur des réunions, des collages, des organisations de manifs aller faire le peintre la nuit et au bout d'un moment je lève un peu le pied et de temps en temps j'élève la voix je discute beaucoup parce qu'après dans mon entourage j'ai de tout donc je discute beaucoup et avec des écolophènes fatigants et des chasseurs épuisants et tout Donc on discute un peu de tout. Donc j'ai ma part de joute verbale régulière, mais tranquillement. Après, je m'amuse à me refaire toutes les affiches de Zemmour en Valais d'Osso. Ça, ça m'amuse beaucoup. Beaucoup. Avec des copains bergers qui passent et qui me disent Hé, on en a encore dans la peinture si tu veux ! Et voilà. Donc ça, ça me plaît. Un peu. Mais je suis rentré dans une phase aussi où je me protège. Je me protège parce que peut-être qu'il ne faudrait pas... Peut-être qu'il faudrait qu'on sorte un bon coup tous, mais j'y crois pas au sortir tous une bonne fois pour toutes. Je vois pas autour de moi ça. J'espère me tromper, mais je le vois pas. Et donc j'essaie de me protéger un peu pour éviter de disjoncter et d'être désagréable pour les gens autour de moi. Mais y'a de quoi, ouais. Par contre tous les gens qui font comme si tout allait tout le temps, là, cet espèce de sourire bienheureux. Ah ça va bien, oui, non ça va pas. Débranche ton ombri, l'ouvre les yeux, s'il te plaît.

  • David

    Est-ce qu'il y a un dernier point sur lequel tu aimerais revenir par rapport à la voix ? Tu penses qu'on a fait le tour. On n'a jamais fait le tour, mais déjà pour aujourd'hui.

  • Christine

    On a fait le tour. Après, je pense que ça vaut le coup ici de prêter, de se méfier aux gens qui utilisent trop leur voix et de prendre le temps un peu d'écouter. La voix, moi, avant, j'ai parlé beaucoup. Je parle encore beaucoup, mais je pense que c'est lié au fait d'écouter. D'abord, j'ai passé beaucoup de temps à écouter. Je me force des fois, je me mords la langue. Ah écoutez, parce que la voix, ce n'est pas que soi, et c'est énormément de voix qu'on a autour de nous. Et dans un monde où on est là, où c'est chacun un peu qui reste un peu dans ses rails, le téléphone, tous les algorithmes qui te ramènent tout le temps un peu sur les mêmes choses, alors ce ne sont pas des choses positives, n'importe, mais ça vaut le coup de se servir de la voix des autres un peu.

  • David

    Merci, je crois qu'on va terminer là-dessus. Très bien, merci beaucoup David.

  • Christine

    Merci à toi.

  • Christine Irabola

    Un grand merci à David pour la générosité et la spontanéité avec lesquelles il a répondu à toutes mes questions. Vous trouverez les informations le concernant dans la description de cet épisode. Merci à vous d'avoir écouté cet épisode d'On n'a qu'une voix jusqu'au bout. S'il vous a plu, abonnez-vous dès maintenant pour ne pas manquer la voix de mes prochains invités. Et pour soutenir mon podcast, je vous propose de le noter et de le commenter sur votre application d'écoute préférée. Enfin, un merci tout particulier à Émilie Décla, qui a créé et interprété toutes les musiques d'On n'a qu'une voix. Retrouvez l'actualité du podcast sur le compte Instagram ou LinkedIn, entre voix et mots. À bientôt ! S

Chapters

  • Introduction au podcast et à l'invité David Borde

    00:09

  • La voix dans la vie quotidienne de David

    01:12

  • Parcours de David : de l'enfance à l'accompagnement en montagne

    02:27

  • Les racines de la voix dans l'enfance de David

    03:06

  • L'importance de la voix dans le conte

    05:06

  • La voix comme outil d'accompagnement en montagne

    09:56

  • Les enjeux de raconter des histoires en intérieur et extérieur

    09:56

  • Préférences de David pour les lieux de conte

    13:19

  • Inspirations vocales et influence des voix sur David

    19:19

  • La voix dans l'accompagnement en montagne

    20:22

  • Importance de la langue occitane dans la vie de David

    24:16

  • Réflexions finales sur la voix et l'écoute

    29:17

  • Conclusion et réflexions sur l'écoute et la voix

    37:09

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Description

Bienvenue sur On n’a qu’une voix, un podcast pour découvrir ce que cache notre voix !


Dans cet épisode, vous allez entendre la voix de David Bordes. En tant qu’accompagnateur en montagne et conteur, David utilise sa voix au quotidien.
Ensemble, nous allons parler de contes, de Pyrénées, de kiwis, de la langue occitane et de l’importance d’ouvrir grand ses oreilles avant d’ouvrir sa bouche !


Il nous dit (presque !) tout sur : 

  • la voix dans sa vie d’accompagnateur en montagne, de conteur et… d’être humain ;

  • la manière dont le conte est arrivé dans sa vie ;

  • la place des langues dans son quotidien et en particulier, celle de l’occitan ;

  • l’importance d’articuler écoute et parole.


Bonne écoute !


💡 Les liens pour découvrir et contacter David : 

Caminam : https://www.caminam.fr/

L'aventure nordique : https://laventurenordique.fr


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Crédits :


  • Réalisation, montage, mixage : Christine Irabola

  • Musiques et chants : Émilie Décla

  • Hébergement : Ausha


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Christine

    On n'a qu'une voix, un podcast pour découvrir ce que cache notre voix. Chaque mois, venez à la rencontre de mes invités qui lèvent le voile sur l'histoire singulière de leur voix. Au programme, des voix parlées, des voix chantées, des voix jouées et des voix parfois malmenées. L'intention ? vous procurer des émotions, vous faire voyager, vous apporter des conseils et vous proposer un pas de côté pour vous inviter à aimer votre voix. Dans cet épisode, vous allez entendre la voix de David Borde. En tant qu'accompagnateur en montagne et conteur, David utilise sa voix au quotidien. Ensemble, nous allons parler de contes, de Pyrénées, de Kiwi, de la langue occitane et de l'importance d'ouvrir grand ses oreilles avant d'ouvrir sa bouche. Bonne écoute ! Bonjour David !

  • David

    Adiu, bonjour !

  • Christine

    Pour commencer, j'aimerais savoir quelle place a la voix dans ta vie ?

  • David

    La voix, j'ai la voix de tous les jours, celle qui me permet de communiquer avec les miens, avec les amis, avec ceux que j'aime bien et ceux que je n'aime pas. Et ma voix professionnelle, c'est-à-dire que c'est un de mes outils. Et à la montagne, on compte. Et aussi les moments où je ne m'en sers pas. J'ai des kiwis avec mon cousin. Quand je suis à tailler les kiwis, je ne parle pas et c'est très agréable. Donc c'est quelque chose dont je me sers. Et parfois, c'est bien de...

  • Christine

    Et la voix des autres, est-ce qu'elle a une place dans ta vie ?

  • David

    Prépondérante. Qu'on le veuille ou non, la voix des autres, elle est là. On est obligé de faire avec plein de choses qu'on n'a pas envie d'entendre. mais qu'on entend quand même et qui sont là. Des choses affectueuses, des choses d'amour quand on est dans la famille, le couple, des choses de gestion quotidienne. La voix des autres, c'est communiquer avec les autres. C'est sûr que s'il y a un sourd, il n'entendra pas ce qu'on dit. Mais il y a des gens qui sont obligés de faire sans la voix, les mains ou ce qu'on veut. Ou quand il y a quelqu'un qui a une autre langue, on est obligé de communiquer différemment. Mais on est des animaux sociaux. Le tout seul en haut de la montagne, je n'y crois pas. Des animaux de troupeau au départ.

  • Christine

    Donc aujourd'hui, tu es accompagnateur en montagne, tu es conteur aussi. Si on reprend dans la chronologie, qu'est-ce qui arrive en premier dans ta vie ?

  • David

    Ce qui arrive en premier, c'est que j'étais un peu agité du casque jeune, un peu agité, je me suis pas mal servi de ma voix, donc on en reparlera après sur les choses qui énervent, si tu veux. Et donc, j'ai fait plein de choses, plein de choses. Et quand est arrivée la question de, et si on se calmait un peu ? J'ai commencé par l'accompagnateur en montagne et assez vite je me suis fait coincer par un monsieur qui s'appelle Serge Mauroite qui m'a coincé dans le compte et là ça s'est enchaîné très vite. Après qui a influencé sur l'autre je ne sais pas trop au départ parce que les deux ont suivi très rapidement.

  • Christine

    D'accord et tu penses que dans ton enfance est-ce qu'il y avait déjà des racines de cette voix là ?

  • David

    Ah oui beaucoup. Déjà dans mon enfance, un pied urbain du côté de Pau, un pied très rural dans la ferme de mes grands-parents paternels. Et ma grand-mère qui parlait, qui parlait, qui parlait, mon grand-père des coins, la table, le café, et puis blablablam, ça parle de tout, de rien, mais beaucoup parler, parler, parler, et nous, gosses, écouter, beaucoup écouter ça. Et ça faisait partie d'un environnement global, des récits, beaucoup d'échanges verbaux. Parler. Et ça, je pense que c'est quelque chose qui a marqué, qui a pas mal marqué. Oui, oui.

  • Christine

    D'accord. Et donc après, tu te lances dans l'accompagnateur en montagne, c'est ça ? Oui. Et là, quelle place a eu la voix à ce moment-là ? Est-ce que tu peux nous en dire quelques mots ?

  • David

    Et moi, petit, pour aller chercher du café, la note, l'addition, ça te faisait beaucoup rire. Mon père va demander l'addition. J'étais mort de peur. Je ne valais rien. J'étais une chaussette. Et petit à petit, clac, clac, donc... Le parcours que j'ai eu avant, pas mal de manifs, de machins, j'ai appris l'habitude de parler, je m'étais vacciné fort. Mais là, je me suis retrouvé à me servir de ma voix avec des gens que je ne connais pas, qui me payent, à transmettre des choses, du savoir ou des émotions, des consignes de sécurité. Donc, gagner de l'autorité par rapport à la voix, déjà, gagner une place dans le groupe. C'est l'histoire sociale de plein de gens, comment tu prends ta place avec les autres. Donc la voix, ça a questionné plein de choses. Et puis ça, toutes ces questions-là, plus le fait que je parle à 300 à l'heure tout le temps. Donc comment tu... qu'est-ce qu'on fait avec la vitesse ? Et les... Toutes les contraintes extérieures, quand tu es dehors, le chien qui passe, le vent, la cascade, donc apprendre à faire avec ces paramètres physiques de la montagne.

  • Christine

    D'accord, donc tu as commencé par être accompagnateur en montagne, le conte, c'est venu après ?

  • David

    Un an après.

  • Christine

    Ok, et là, tu es autodidacte, tu t'appuies sur d'autres conteurs, comment tu procèdes ?

  • David

    Je me suis fait arracher mon pare-chocs par une dame qui s'appelle Sophie, adorable, avec qui on était au lycée. Elle m'a dit Je suis désolé, je t'ai arraché ton pare-chocs, mais je n'ai pas une thune. Comment on fait ? Je ne sais pas. Donc, on a trouvé un pare-chocs à la casse, de fil en aiguille, on se le répare. On s'arrange, elle me donne un petit fromage et tout va bien. Cette fille est dans le milieu du cheval avec un très bon copain Balou, un gars qui gère l'association Petit Pas au port de Castets, avec les bourricots, avec les ânes. Et à ce moment-là, Balou démarrait Petit pas, il a dit je cherche un accompagnateur, un jeune, elle m'en parle de fil en aiguille, on va là-bas, deux bières plus tard je me retrouve avec une annesse qui est morte depuis la pauvre et on va faire trois tours par là et je rentre mais c'est trop bien ça. Et là on a réfléchi, qu'est-ce qu'on fait ? Moi je cherchais à travailler, eux à faire tourner les ânes, des gens qui font des marmottes et compagnie, il y en a plein. Et j'avais vu un spectacle de contes, quelque temps avant, à la forêt suspendue de Bosse d'Arros, c'était une partie des chanteurs des Pagayous. Un groupe de polyphonie, il y en avait trois. Salles, Abadie et Mauhourat, qui s'étaient répartis un peu des ambiances. Je trouvais ça terrible, très très bon. Donc j'ai dit, pareil, ce qu'on peut faire, on part en randonnée. Moi j'encadre, je prends ma part. Vous, vous louez les ânes, très bien. Et on va se caler à un endroit, un feu du comte. Il ne nous manquait que le compteur. Donc j'ai appelé Maurat avec qui on s'entendait déjà pas mal. Et je lui ai demandé de venir. Il m'a dit, parfait, je viens. Il est venu. La question financière. Les gens payent combien tu veux par soirée. Je ne veux pas d'argent, je suis un stit, c'est bon, j'ai mes sous. Mais si, non, si, non. Et au bout d'un moment, il me dit, écoute, moi, je viens à une condition, c'est que tu essaies de compter. Ce qui n'était pas prévu, trop, mais je lui dis, non, non, si, bon. Et après, j'ai essayé, le virus est rentré. Et voilà, tu ne t'en débarrasses pas après. Puis tu prends plaisir et puis tu joues avec.

  • Christine

    Quand tu dis conter, est-ce que ce sont des contes traditionnels ou c'est toi qui les écris ? Comment ça se passe ?

  • David

    En fait, je récupère des contes traditionnels, soit que j'ai entendu. Moi, je fais partie du... Là, j'arrive à 50 ans. On est une génération au moins dans le milieu accompagnateur en montagne. Pas tous, mais on est quand même pas mal à avoir été marqué par Louis Espinassous. Un peu conteur et tout ça. Donc, il y avait déjà le répertoire de Louis qu'on avait entendu ici ou là, en formation ou ailleurs. ça ce que j'avais entendu avec maura tu es tous ces gens là et après on a un panel de bouquins qui est quand même assez énorme on a la chance d'avoir pu tout un travail de collectage donc je suis allé piocher dans ce répertoire tradi gascon et pyrénéens et à partir de là ça tu le prends et zlaf j'ai joué avec quoi donc

  • Christine

    j'ai pas fait vraiment d'écriture mais je les ai repris et du coup est ce que tu te souviens de la première fois que tu as compté ouais

  • David

    C'est pas facile, c'est pas facile, mais en même temps, c'est des gens que tu connais pas. T'es au coin du feu, il fait à peu près sombre, tu vois personne. Puis j'avais déjà un peu de métier quand même, enfin un peu, j'avais quand même déjà pratiqué un peu le fait de m'adresser à des gens. Donc tu regardes un peu au-dessus de la tête et t'envoies, et feu. Et après, ça se fait peu à peu. Tu vois ce qui prend, ce qui prend pas, tu te fais un peu secouer par les physionomies des gens. Et en fait, tu te rends conte qu'en fait, il faut déconnecter ça. La physionomie n'est pas synonyme de ce qui se passe à l'intérieur. Tu as des gens qui respirent l'ennui et qui en fait non, ils sont à fond. Pas un exercice facile, mais pas non plus quelque chose de dramatique.

  • Christine

    Et après, est-ce qu'il y a des techniques qui t'ont accompagné au fil des années ou pas vraiment ?

  • David

    J'avais fait un stage avec Louis, justement, pour essayer. Un peu, oui, il y a quelques techniques. Mais après, je pense que c'est surtout le meilleur conseil, c'est Serge Mambrat qui me l'avait donné. C'était de la douche, la voiture, les moments où tu es tout seul, tu te fais l'histoire. Dans un tu rodes, on se met l'histoire en bouche. Ce qui fait qu'après, quand on est avec des gens, on ne va plus chercher le fil. Et après, c'est parler suffisamment fort, faire des images. Pour moi, m'imposer à me mettre des blancs, ce n'est pas rien. Mais ces blancs-là sont nécessaires pour que les gens qui écoutent aient le temps de se faire des images. Et après, oui, la technique de tenir les gens en face. de se désimaginer comme dans un filet. Mais pour avoir pas le mouvement permanent à faire, comme si je fais avec le micro, si je passe à droite, à gauche, ton son ne fait que varier, ceux qui sont à droite, à gauche n'entendent pas. Donc voilà, essayez d'avoir ça. Et poussez un peu. Et voilà.

  • Christine

    Et du coup, est-ce que tu peux nous dire quelle place a la voix dans tes comptes ?

  • David

    Et moi, je m'en sers bien. Je m'en sers, bon déjà, j'ai un peu de wawa au naturel, donc je pousse un peu la voix et la voix me sert pour faire des modulations. Au lycée, j'ai eu beaucoup d'histoires parce que je n'arrêtais pas de faire du bruit, des machins, que ça m'amusait beaucoup. Et en fait, je m'amuse à faire ça, des onomatopées, des petits bruits, des machins. Je ne peux pas m'empêcher de faire dans la vie naturelle, normale, entre guillemets. Donc je m'en sers, je joue avec. Après, je mélange aussi avec l'occident. On en reparlera après. Dans le conte, ma voix me sert un peu d'outil en plus des mots. Le mot image, il y a aussi l'outil voix.

  • Christine

    D'accord. Donc, en fait, on ne va pas dire qu'il y a quelque chose qui prime. Est-ce que c'est le récit qui prime ? Est-ce que c'est la voix qui prime ? Pour toi, tout est important, finalement.

  • David

    Les deux vont ensemble. Parce qu'après, je pense que chaque conteur a aussi une personnalité. C'est pas du théâtre où tu prends la personnalité de quelqu'un. Là, tu as ta personnalité et il y a des gens qui parlent doucement et ils sont comme ça. Et il y a des fois des conteurs, c'est super agréable à écouter. T'es à deux doigts de la léthargie, t'as l'impression de loin. Mais non, c'est doux. C'est juste doux, c'est tout calme et ils sont comme ça. Et ça n'a rien de désagréable. Et d'autres plus explosifs où la voix, elle est là. Je pense que c'est un tout. Il n'y en a pas un qui va primer plus que l'autre.

  • Christine

    Alors toi, tu contes, on en avait parlé, aussi bien dedans que dehors, c'est bien ça ?

  • David

    Oui.

  • Christine

    Est-ce que, j'imagine que les enjeux sont différents, est-ce que tu peux nous en dire quelques mots ?

  • David

    Les enjeux, quand tu es dedans, tu fermes une petite ambiance et tu joues avec le calme, dans un endroit où les gens sont rentrés, de gré ou de force, de force si c'est des gamins, mais ils sont rentrés, ils s'avouent le son, ils sont posés, ils tapent. T'as pas de perturbations extérieures qui vont pas... C'est facile dedans, c'est agréable, c'est facile. Dehors, tu as beaucoup plus de contraintes sonores. Le vent, la cascade, l'autre kek qui passe en scooter quand t'es en semi-urbain, les vaches, les cloches... Salut, t'es là ? Oui, je travaille ! Tu peux avoir tout ça qui joue, mais en même temps, dehors, t'as un support énorme. Tu as des plantes, des arbres, le chien qui passe, tu rentres le chien dans l'histoire. Tu as aussi une capacité de rebond qui est terrible. Et un environnement.

  • Christine

    Tu joues avec l'environnement aussi finalement.

  • David

    Il faut intégrer les gens, tout ce qui peut être une perturbation. Enfin pas de trop non plus, mais il faut quand même intégrer tout ça dedans. Moi dans ma pratique et dans ce que je fais, et ce que je conseillerais, c'est que tu t'appuies parce que c'est des choses qui vont te perturber. C'est des choses qui ne sont pas dans l'histoire. et qui de toute façon les gens vont soit les regarder, soit les écouter. Donc soit tu te bats contre le chien, soit tu rentres le chien dans l'histoire. Soit tu acceptes quand tu es au Bénou par exemple, et que tu as je ne sais pas qui, aux commandes de son super hélicoptère à 24 millions d'euros qui passe, et bien tu attends que l'hélicoptère passe. On ne joue pas contre un hélicoptère. Une fois qu'il est passé, ou pareil pour le tracteur, ou le quad, il y a des moments où tu attends, et après tu repars.

  • Christine

    Est-ce que toi, tu as des endroits vraiment dans lesquels tu adores compter ?

  • David

    Oui, quand on monte, oui, oui, oui. Il y a une keb, les keb, c'est des abris sous roches. Il y a une grosse keb dans la vallée d'Ossau, vers le Caillou de Soques, où on s'arrête régulièrement avec mon collègue, Pierre Vidal. On a une soirée où on monte jusqu'à une cabane, et feu, comte, ventrêche et vin rouge. C'est très bien, culinaire et culturel. Et un peu de sport. Et là, il y a une très, très belle keb, j'adore. C'est un très, très bel endroit. En plus, il y a un peu de résonance et puis ça fait une ambiance où il y a très peu de gens qui passent. Il y a du monde, mais voilà, tu as une belle éthrée. Ça, c'est un bel endroit que j'aime bien. Et après, vers tout ce qui est un peu haut, où tu surplombes des lacs, vers au-dessus des refuges d'Ayous, au-dessus du refuge d'Arlette. Là, c'est un peu chaud à gérer parce que là, tu as le vent. Et là, le vent, par contre, tu ne peux pas faire grand-chose contre. Mais là quand tu as des moments où tu arrives à poser tout le monde, que tu n'as pas trop de vent contre toi, tu as un paysage de dengots, là ça bombarde, c'est pas mal.

  • Christine

    Et les gens ils te font quel retour dans des endroits comme ça ?

  • David

    Ah oui, tu as de tout. Tu as les gens qui ne disent rien, la tête qui bouge, ceux qui ont les yeux qui brillent, ceux qui verbalisent, c'était génial, machin ceux qui ne disent rien. Peut-être qu'il y en a aussi qui n'aiment pas et qui ne le disent pas. Je n'ai jamais eu personne qui m'a dit c'est pourri, par-ci, là-dos Tronche d'ail là, qui dit, c'est pas, c'était nul. Truc d'ado, je prêche le faux pour le vrai. Et en attendant, il est resté jusqu'au bout, et puis il n'a pas sorti le téléphone, donc l'un dans l'autre. Et là, t'as des retours surprenants. Après, en montagne, des fois, on a une dame, une fois, qui nous s'est mise à pleurer. On rentrait de la nocturne, là, et levée de lune au-dessus de la dente de soc. Une espèce de relief un peu pointu. Et là, paf, la lune qui est sortie, une espèce d'ambiance terrible. Et là, elle nous a posé une petite larme. Elle était juste à côté de nous. Mais qu'est-ce qui vous arrive ? C'est trop beau ! Mais voilà ! C'est mignon. C'est cool. Ça donne du sens.

  • Christine

    J'ai vu que tu participais aussi à des festivals.

  • David

    Un peu.

  • Christine

    des festivals de contes, est-ce que c'est quelque chose que tu aimes bien faire ?

  • David

    Oui, mais on s'est vite rendu compte, quand je dis on, je faisais partie du collectif SAI, qui était un regroupement pluridisciplinaire, comme on dit, où il y avait des gens du groupe La Famille Artus, qui étaient plutôt tradiocs, mais alors ils ont tout tourné en électro, avec beaucoup d'improvisations, des ambiances très différentes. Donc il y avait eux sur la partie musique, danse, chant. Il y avait Colinato qui était une plasticienne qui travaillait sur des projections, qui est partie dans le Lot aujourd'hui. Serge et moi en conte. Enfin, il y avait tout un carrefour. Et un monsieur là, Patrick Pouzet, qui était un peu aux manettes de tout ça. Aujourd'hui, la structure est rentrée dans la Ciutat, Oueda, Sapou. Et on s'est rendu compte que pour aller dans les festivals de contes, c'est quand même un milieu d'entre-soi assez important. C'est beaucoup de cooptation. de cooptation de l'un ou de l'autre et qu'il faut quand même un bon vendeur qui soit connu et reconnu et que rentrer dans ce petit monde tout cool et tout sympathique soit-il c'est pas si facile donc il faut quand même donner de l'énergie pour se bagarrer là-dedans et ça n'enlève rien à la qualité artistique de ce qu'on y entend et tout ça mais c'est pas un environnement simple d'un côté et de l'autre c'est la distance Et rarefois, je suis parti sur des festivals un petit peu loin, des petites choses. Tu te dis, c'est la vie d'intermittent du spectacle. Tu roules 6 heures, tu attends 2 heures, tu fais 8 minutes de balance, tu fais ton compte, petit spectacle, 50 minutes, 1h15. Tu attends et tu te remets 6 heures de bagnole. Le rang du temps m'a un peu interrogé.

  • Christine

    Peut-être que pour toi, ça a moins de sens parce que toi, tu es quand même ancré aussi ici, que tu as parlé des endroits que tu aimais bien. C'était aussi des endroits que tu connais, dans lesquels tu amènes les gens, que tu accompagnes finalement. Est-ce que ça a peut-être moins de sens de te retrouver ?

  • David

    Je ne sais pas. En même temps, dans un festival, c'est agréable parce que souvent, tu as affaire à un public de gens qui sait où ils vont. Après, moi, j'aime bien aussi quand tu coïnces des gens, ils sont pris dans une ambiance, ils ne savent pas où ils sont. C'est surprenant. C'est assez bon. Mais il y a aussi tout un côté confort. Tu fais le festival, tu as des conditions techniques, un public, des gens qui t'accueillent. Tu es dans une ambiance, tu rencontres d'autres gens qui sont meilleurs que toi, tous. Parce que ceux-là, ils sont à 100% que sur ça. Des ladis diallo, des jolins, il y a quand même quelques pointures. Il y a du très très bon. Donc ça, peut-être qu'en vieillissant, c'est un truc où j'essaierai de pousser plus. Mais pour l'instant, entre ce que je te disais avant... Aujourd'hui que j'ai assez de combats par droite à gauche, je n'ai pas envie de mettre trop d'énergie dessus. Mais ce n'est pas dit qu'au bout d'un moment, si j'ai les genoux qui me lâchent ou que j'en ai marre de batailler sur l'accompagnement, ce n'est pas dit que tenter. Après, il faut avoir l'envie de faire des comptes de temps en temps et en faire un métier à 100%. C'est autre chose aussi. Il faut des spectacles clés en main, il faut des spectacles bien faits que tu puisses présenter, vendre. Donc le côté un peu impro, où des fois je sors de la voiture, j'ai aucune idée de ce que je vais raconter, et je prends un compte, et puis après, on va faire l'autre, et ça roule. Et c'est pas un spectacle construit.

  • Christine

    Oui, finalement, c'est deux métiers différents.

  • David

    C'est autre chose. On l'a eu fait avec le collectif, on avait deux spectacles carrés, avec compte, musique, chant, projection, mais c'est vraiment un autre travail. Tu fais tes filages à l'italienne, pour tout bien caler, c'est génial, ça professionnalise dans le sens où on apprend à... On apprend à se tenir sur une scène, on apprend à faire avec d'autres éléments, mais c'est cadré, c'est autre chose.

  • Christine

    Est-ce qu'il y a, soit dans ces endroits-là, soit à d'autres moments, des voix qui t'inspirent ? Ça peut être des conteurs, mais ça peut être aussi des chanteurs ou autres.

  • David

    Il y a des voix qui me marquent. Au quotidien aussi, tu parles avec des gens qui ont des voix qui résonnent. Et à l'inverse, tu as des voix qui sont fatigantes. Je ne dirais pas jusqu'à agressantes, mais fatigantes. Il y a des gens qui parlent. C'est pas lié à eux, mais t'as des voix qui te... qui te scie l'oreille. Arrête-toi, s'il te plaît ! Mais après, il y a des voix qui te portent, qui t'interloquent. Puis oui, sur les chanteurs, on a tous des voix d'un chanteur qui te marquent. Oui, louride. Moi, par exemple, c'est une petite voix qui... Un truc très con, Brassens. Ou après, en polyphonie, en chant, des fois, tu te retrouves à chanter par là et tu as une basse assez énorme qui sort ou un gars qui a une haute incroyable. Enfin, tu as des voix comme ça, un peu de tout type.

  • Christine

    Alors David, on en a un petit peu parlé de la place de la voix dans l'accompagnement en montagne. Est-ce que tu peux nous en dire un petit peu plus ?

  • David

    Ça pose un cadre, souvent déjà, le bonjour, le hadichat, le premier contact avec les gens. Ils payent, il y a les gens qui te connaissent, et il y a les autres. Et là, la voix, le fait de la poser, le fait de prendre ce premier contact, déjà tu prends ta place sur le groupe. C'est pas que tu dois être supérieur au groupe, mais c'est qu'ils payent pour être avec toi, et que tu es responsable d'eux, quelque part. Et qu'à un moment donné, si ça part un peu en cacahuète, il faut que tu puisses maîtriser ce qui se passe globalement dans la mesure du possible. Donc je pense qu'il y a aussi la voix, elle sert beaucoup à ça, avec des tas de personnalités différentes. C'est pas parce que tu parles fort que tu vas être forcément écouté. Je pense que c'est la personnalité, il y a des gens qui vont parler tout doucement, des gens qui vont utiliser la blague, mais elle donne un cadre de... Elle prend le groupe, quoi. Je pense que dans l'accompagnement, il y a ça beaucoup. Et après, nous, on est un métier où on parle. Pendant très longtemps, on disait un bon guide ne parle pas. Pour un guide de haute montagne, il te prenait à un point A, il te prenait au refuge ou au village, il te montait en haut de je ne sais quel pic, et il te ramenait vivant. Et qu'il ne parle pas, c'est pas... sans foutre. C'était un bon guide ne parle pas. Il fallait que... c'était de la technique et rentrer vivant. Nous, c'est au contraire. Nous, on est des gens qui partageons un milieu, on partage un milieu avec les autres. On partage les observations, on partage ce qu'on voit au niveau des bestioles, des plantes, du pastoralisme, des pics, des contes, de la géologie. Donc on est tout le temps en train de parler. Donc la voix, elle est là pour... c'est une passerelle constante entre nous, le milieu et les clients. On peut dire comme on veut, mais ça reste des clients, les gens y payent. On ne vit pas que d'amour et d'eau fraîche. C'est important. Mais clac, clac, c'est aussi ça. Dans l'accompagnement, c'est cet outil-là, ce fil.

  • Christine

    Et toi, parce que ça fait combien d'années que tu es accompagnateur mental ?

  • David

    Moi, j'ai démarré en 2002.

  • Christine

    Ok, donc ça fait 22 ans. Est-ce que tu as senti une évolution là-dessus au fil du temps ?

  • David

    Sur la voix ?

  • Christine

    Sur la voix, la place, tu vois, c'est-à-dire, tu dis, voilà, qu'en fait, ça va au-delà de juste amener d'un point A à un point B, il se passe plein de choses entre les deux.

  • David

    J'ai senti une évolution avec les scolaires. J'ai senti une évolution avec les scolaires dans le sens où je passe beaucoup plus... Mais ça, c'est pas que moi. Quand on discute avec des gens qui les ont en milieu fermé, les enfants, des enseignants ça s'appelle. C'est un combat partout, assez fréquent. C'est le temps passé à gagner l'écoute. Et ça la voix elle est primordiale. Et nous on a une collègue par exemple qui a une toute petite voix qui se questionne fortement sur elle, sa relation avec les scolaires, parce qu'elle aime bien les transmissions pédagogiques. Mais cette espèce de recherche là, enfin de comment arriver à... prendre le dessus sur la classe, dans le sens où ils vont être attentifs. Comment arriver à les écouter ? Le dessus c'est pas qu'un rapport de force où on leur met les coups de bâtons, mais c'est ça, c'est comment on va arriver à les faire écouter. Et ça c'est un temps qui devient de plus en plus long et où la voix a son importance. Et à un moment donné, c'est un niveau sonore, c'est de choisir ses mots, trouver le moment où il y a un creux de bruit, au milieu du bruit, pour aller chercher. Et ça, c'est quelque chose qui a évolué. Ça, c'est une vraie évolution. Après, le grand public, entre guillemets, les adultes, les ados, c'est différent. Je ne vois pas de grand... Je n'ai pas ressenti, en tout cas, de grand mouvement sur ça.

  • Christine

    Il y a un sujet qui est important à aborder aujourd'hui, je pense que c'est la question de la langue, enfin des langues, puisque là, aujourd'hui, on se parle en français. Mais il y a une autre langue qui a une place importante dans ta vie. Est-ce que tu peux nous en dire un petit peu plus ?

  • David

    Ah, c'est là où on habite. Ça va être en Occitan, enfin en Gascogne, en Béarnais, on est très fort pour se disputer ici sur le nom de la langue. On a vraiment des gens qui ont du temps, en Vallée d'Osso on en a 2-3 là, des très très bons, qui ont du temps pour ça. Et donc la définition pour ceux de l'Occitan, dans sa variante béarnaise, c'est la langue d'ici qui est là, et moi que j'entendais aussi, autour de moi, que j'ai beaucoup entendu. Et mon père a essayé de me l'apprendre, il a dit tu rigoles ou quoi ? Et non, non, hors de question. J'ai pas voulu. Enfin si, petit, j'avais un livre qui s'appelle l'esquirette, c'est la petite cloche. Donc j'apprenais un peu, quatre mots, Bonne nuit pour Bonne nuit Enfin, il y avait quelques mots, mais pas plus. Mais j'entendais quand même beaucoup la langue autour de moi. Et après, est arrivée la période ado et un peu plus où là, c'était pas la peine. J'ai pas voulu en entendre parler. Et après, mon parcours de lycéen ayant été un peu chaotique, il a été... T'es convenu pour tout le monde que c'était bien à un moment donné que je passais un an un peu loin de la maison et j'ai échoué à Bayonne. Très bonne année. Magnifique année, scolairement parlant, il faut voir, mais très très belle année où je me suis retrouvé à Cassin. René Cassin, 92-93, voilà, c'est la belle époque. Il y avait pas mal d'agitation sociale, pas mal d'agitation musicale, pas mal de monde qui s'agitait, des gens pas mal sympathiques. Puis des thématiques un peu costauds, il y avait une grosse campagne sur l'insoumission qui existait, il y avait tout un bazar. Dans tous les sens, puis des groupes, ça bougeait fort. Et nous, on s'y retrouvait très, très bien dans cette petite ambiance. Mais il y avait le fait qu'il y avait énormément qui parlaient en basque entre eux. Et puis, ça, ça te le fait sentir qu'ils sont quand même le peuple élu. Et je plaisante.

  • Christine

    C'est bien qu'il y ait un sous-texte.

  • David

    C'est bien qu'il y ait un sous-texte. Non, non, on bataillait beaucoup avec ça, on rigolait. Et alors, quand même, ça m'a questionné. Puis on a eu plein de discussions sur la place de la langue, la place sociale, la place politique, l'histoire linguistique de la France, de ce pays. Donc, tout ne s'est pas fait seul, que les gens n'ont pas abandonné du jour au lendemain le Basque, le Breton, le Catalan, le Galicien. Enfin, le Galicien, c'est l'autre côté, mais... Tout ça, que ça ne s'est pas abandonné du jour au lendemain, qu'il y a tout un processus historique qui s'est fait. Et voilà, tout ça, ça questionne. Les relations avec les langues de l'immigration aussi, parler mal français plutôt que turc à vos enfants, ça a suivi encore. Sous Sarkozy, on en sortait encore. Et là, actuellement, on creuserait un petit peu. On n'est pas loin. On est loin d'avoir vraiment avancé sur ce sujet. Mais voilà, tout ça, ça a bougé, bougé. Ça s'est agité. Après, je suis rentré en Béarn. Et puis de là, les fils ont fait que j'ai rencontré les gens de Radio Païs par exemple, les gens des Calandrets, les écoles immersives en Occitan, les gens de Carnaval, enfin le milieu un peu occitaniste, les gens de la Tour du Bourreau, qui était à Pau, un local plutôt militant. Et puis tout ça, ça s'est fait, clac, clac, clac, et puis je me suis dit, mais quand même, mais quand même, mais quand même. Et puis j'ai commencé à parler un peu, et puis on a eu la chance d'être toute une vague de jeunes, un peu branchés pareil. Elle était un peu rock'n'roll aussi, et donc on s'est auto-motivés, plus quelques-uns qui nous ont accompagnés là-dedans. Et puis petit à petit, j'ai basculé. Alors ça a beaucoup fait rire mon père, beaucoup. Il me dit Ah oui, c'est ça, ton Occitan, on parle bien, Arnaïs, ici. Et puis même, quand tu essaies de transmettre la langue à ton gamin, et puis qu'il revient par la fenêtre en te disant Oui, j'apprends l'Occitan, mais oui. Et bon, finalement, les choses se sont faites, donc ça a pris une place. Et puis au-delà des questionnements militants qu'on peut avoir, ou historiques, après il y a un vrai plaisir. un vrai plaisir à parler, il y a le chuc de la langue, le jus de la langue, ça veut rien dire en français, le sens, l'architecture, les mots que tu peux utiliser, les échanges que tu vas créer avec les gens quand tu parles. Il y a des gens avec qui j'ai jamais parlé français, d'autres, quand on bascule en oc, ça n'a rien à voir, tu vas chercher d'autres choses, donc il y a ce plaisir-là. Et en parallèle, ma compagne Myriam, qui elle est née au... au Kenya, fille de pieds noirs et de bourguignons, qui est après rentrée à 11 ans ici, et qui a passé dans le sud-est, plutôt un profil de gens qui ont voyagé, et qui a eu décidé, ça va, un moment, de courir partout, donc de se poser ici, qui s'est ancré, qui a appris la langue aussi, et aujourd'hui qui l'enseigne, et qui parle mieux que moi, et donc on s'est accompagné aussi là-dedans, ce qui fait qu'aujourd'hui on parle avec les garçons, avec nos enfants, et qui eux sont assez fiers de ça, enfin ça dépend d'où ils sont. Ils sont un peu discrets parfois. Parle moins fort papa, s'il te plaît. Mais voilà, ça a pris une place prépondérante. Enfin prépondérante, une place importante en tout cas.

  • Christine

    Et si on repart de la voix, quand tu parles en français, quand tu parles en occitan, est-ce que tu perçois une différence ?

  • David

    Dans l'intonation, la tonalité, je sais plus.

  • Christine

    Pas forcément. Par contre, quand je vais parler en occitan, surtout avec des gens qui la tiennent depuis plus longtemps que moi, des gens qui sont nés dedans, ou des gens qui ont une jolie langue dans le sens vocabulaire, syntaxe, tout ça, je vais être plus attentif à la façon de parler, aux tournures, aux mots, à des airs qui roulent. Moi, je suis un enfant de TF1, entre guillemets, mais le joli air qui roule des vieux, tout ça, le air d'Edith Piaf, on est lycée. On est passé tous au concasseur. Donc des fois, je vais être plus attentif à ça. Après, en français, pareil, je vais être attentif des fois quand il y a des accents complètement surréalistes qui débarquent, de harrasse ou de je ne sais pas où, un bon vieux vieux géant qui sort de là-bas, tu ne sais pas d'où. Ça, c'est très bon, j'adore. Les Québécois aussi me font beaucoup rire. Bon, ils font rire tout le monde, mais l'intonation, c'est rigolo. Je pense que c'est plus ça qui m'interpelle.

  • David

    Mais justement, les gens que tu accompagnes en montagne, par exemple, qui viennent de partout, finalement, est-ce qu'ils te font des remarques sur la musicalité de ta voix ? Est-ce que ça arrive, ça ?

  • Christine

    Ah oui, oui, parce que je ne me rends pas compte, mais je mets plein de mots d'occident un peu partout. Méfiez-vous de ne pas vous mettre une tec dans la branche. Pardon ? Tu as plein de trucs comme ça. Il te l'a engoulé, le monsieur, le sandwich ? Il y a plein de trucs comme ça qui me partent, qui se sont tout mesclés, tout mélangés. Et donc des fois, ça les fait rire. Et à l'inverse, tu vas avoir un gars du fond du Rouergue, ou un Aveyroné qui est là, ou je ne sais pas où, un Bigourdant, et clac, ça fait une passerelle. Ou des Portugais, très souvent les Portugais. Castagné, on a énormément de mots proches, et les Portugais, c'est quand même des gens qui sont très attachés à la langue. Au tour du monde, les Portugais restent très locuteurs. Ils ne sont pas forcément à faire beaucoup de bruit, mais ils ont tous l'espèce de croix portugaise sur eux. ou partout, et la langue. Donc, c'est des gens qui sont sensibles à la langue, à l'écoute. Donc, voilà, il y a ça. Et puis,

  • Speaker #2

    il y a ceux qui s'en fichent complètement et qui grandent bien leur façon. Papa qui a étudié le débat de l'Ugère, papa qui a l'ordre, papa, au grand cours, cours, cours, papa, papa, que j'ai cassé, que j'ai cassé des blancs, des rues, des rues qui cantent du ciel, qui disent comme ça, on ne peut pas,

  • David

    Est-ce qu'il y a des sujets qui t'amènent à élever la voix ?

  • Christine

    Heureusement que je vais en montagne. Heureusement que je vais en montagne et que je travaille avec des enfants, des ados, ou avec un public adulte, mais sur des moments de transmission, de douceur, de montagne. Sinon, moi je disjoncterais. On est dans un monde qui t'agace profondément. L'histoire de Gaza en ce moment, c'est infâme. On était partis faire une mission civile en Palestine en 2003. Et tu te dis, pourquoi on n'écoute pas les gens ? Pourquoi on ne les écoute pas ? Il y avait les antisionistes israéliens qu'on avait rencontrés sur place. Il y avait Varjavski, c'était un fils de rabbin, un gars que ses parents avaient un peu goûté au camp de concentration, donc on ne peut pas trop dire qu'il est antisémite. Et qui n'arrêtait pas de dire que l'extension des colonies, on allait droit dans le mur. Et de l'autre côté, on avait rencontré le docteur Sabri, un gars du FATA, du parti Arafat. Ils disaient attention, on a les barbus qui arrivent, et eux ils avaient un conflit interne entre les palestiniens, entre les laïcs, qui pouvaient être croyants par là, et les musulmans, les islamistes politiques. Et aujourd'hui tu te retrouves avec un gouvernement d'extrême droite en Israël, ceux qui ont tué Issa Krabi, c'est eux, c'est pas qu'ils ont appuyé sur la gâchette, mais c'est des gens qui ont tué une parole de paix du côté israélien. Et de l'autre côté, les enfants du Hamas, c'est plus compliqué à ce niveau-là, parce que quand tu es enfermé, tu moisis doucement dans ta tête, même s'il y a des tas de choses positives qui se font en Gaza. Mais on se retrouve là avec quelque chose de... Oui, ça, ça me fait bondir. L'Europe qui continue à vendre des armes. Les Américains me font bondir, les USA économiquement, je parlais. Nous-mêmes, l'occidental français de base m'agace de plus en plus à aller chez Starbucks, à mettre le joli pull de Noël des Nord-Américains. On fait le perçant, t'as l'impression, dans un feuilleton américain, ils sont tous habillés comme des mille-or, comme dans les feuilletons américains. Ça sort d'où, ça ? Les écoles de business school, ça s'appelle, avec les petits chapeaux américains qu'on jette à la fin, des gamins qui ne savent pas qu'une palace existe, mais qui connaissent la NBA. On regarde Netflix, on commande chez Amazon, on va au Drive parce que c'est plus pratique s'il te plaît. L'humour, j'aime beaucoup l'humour, mais c'est du stand-up américain. On se standardise là et à côté de ça, on secoue le petit drapeau français. Vive le retour à nos traditions ! Il y a un tas de choses, ça peut durer longtemps. Il y a un tas de choses qui me donnent envie d'élever la voix. La retraite, la retraite. cette espèce d'hypocrisie donc oui il y a plein de choses de temps en temps j'élève un peu la voix dans des manifs ou quoi mais j'y vais de moins en moins aussi j'ai passé beaucoup de temps sur des réunions, des collages, des organisations de manifs aller faire le peintre la nuit et au bout d'un moment je lève un peu le pied et de temps en temps j'élève la voix je discute beaucoup parce qu'après dans mon entourage j'ai de tout donc je discute beaucoup et avec des écolophènes fatigants et des chasseurs épuisants et tout Donc on discute un peu de tout. Donc j'ai ma part de joute verbale régulière, mais tranquillement. Après, je m'amuse à me refaire toutes les affiches de Zemmour en Valais d'Osso. Ça, ça m'amuse beaucoup. Beaucoup. Avec des copains bergers qui passent et qui me disent Hé, on en a encore dans la peinture si tu veux ! Et voilà. Donc ça, ça me plaît. Un peu. Mais je suis rentré dans une phase aussi où je me protège. Je me protège parce que peut-être qu'il ne faudrait pas... Peut-être qu'il faudrait qu'on sorte un bon coup tous, mais j'y crois pas au sortir tous une bonne fois pour toutes. Je vois pas autour de moi ça. J'espère me tromper, mais je le vois pas. Et donc j'essaie de me protéger un peu pour éviter de disjoncter et d'être désagréable pour les gens autour de moi. Mais y'a de quoi, ouais. Par contre tous les gens qui font comme si tout allait tout le temps, là, cet espèce de sourire bienheureux. Ah ça va bien, oui, non ça va pas. Débranche ton ombri, l'ouvre les yeux, s'il te plaît.

  • David

    Est-ce qu'il y a un dernier point sur lequel tu aimerais revenir par rapport à la voix ? Tu penses qu'on a fait le tour. On n'a jamais fait le tour, mais déjà pour aujourd'hui.

  • Christine

    On a fait le tour. Après, je pense que ça vaut le coup ici de prêter, de se méfier aux gens qui utilisent trop leur voix et de prendre le temps un peu d'écouter. La voix, moi, avant, j'ai parlé beaucoup. Je parle encore beaucoup, mais je pense que c'est lié au fait d'écouter. D'abord, j'ai passé beaucoup de temps à écouter. Je me force des fois, je me mords la langue. Ah écoutez, parce que la voix, ce n'est pas que soi, et c'est énormément de voix qu'on a autour de nous. Et dans un monde où on est là, où c'est chacun un peu qui reste un peu dans ses rails, le téléphone, tous les algorithmes qui te ramènent tout le temps un peu sur les mêmes choses, alors ce ne sont pas des choses positives, n'importe, mais ça vaut le coup de se servir de la voix des autres un peu.

  • David

    Merci, je crois qu'on va terminer là-dessus. Très bien, merci beaucoup David.

  • Christine

    Merci à toi.

  • Christine Irabola

    Un grand merci à David pour la générosité et la spontanéité avec lesquelles il a répondu à toutes mes questions. Vous trouverez les informations le concernant dans la description de cet épisode. Merci à vous d'avoir écouté cet épisode d'On n'a qu'une voix jusqu'au bout. S'il vous a plu, abonnez-vous dès maintenant pour ne pas manquer la voix de mes prochains invités. Et pour soutenir mon podcast, je vous propose de le noter et de le commenter sur votre application d'écoute préférée. Enfin, un merci tout particulier à Émilie Décla, qui a créé et interprété toutes les musiques d'On n'a qu'une voix. Retrouvez l'actualité du podcast sur le compte Instagram ou LinkedIn, entre voix et mots. À bientôt ! S

Chapters

  • Introduction au podcast et à l'invité David Borde

    00:09

  • La voix dans la vie quotidienne de David

    01:12

  • Parcours de David : de l'enfance à l'accompagnement en montagne

    02:27

  • Les racines de la voix dans l'enfance de David

    03:06

  • L'importance de la voix dans le conte

    05:06

  • La voix comme outil d'accompagnement en montagne

    09:56

  • Les enjeux de raconter des histoires en intérieur et extérieur

    09:56

  • Préférences de David pour les lieux de conte

    13:19

  • Inspirations vocales et influence des voix sur David

    19:19

  • La voix dans l'accompagnement en montagne

    20:22

  • Importance de la langue occitane dans la vie de David

    24:16

  • Réflexions finales sur la voix et l'écoute

    29:17

  • Conclusion et réflexions sur l'écoute et la voix

    37:09

Description

Bienvenue sur On n’a qu’une voix, un podcast pour découvrir ce que cache notre voix !


Dans cet épisode, vous allez entendre la voix de David Bordes. En tant qu’accompagnateur en montagne et conteur, David utilise sa voix au quotidien.
Ensemble, nous allons parler de contes, de Pyrénées, de kiwis, de la langue occitane et de l’importance d’ouvrir grand ses oreilles avant d’ouvrir sa bouche !


Il nous dit (presque !) tout sur : 

  • la voix dans sa vie d’accompagnateur en montagne, de conteur et… d’être humain ;

  • la manière dont le conte est arrivé dans sa vie ;

  • la place des langues dans son quotidien et en particulier, celle de l’occitan ;

  • l’importance d’articuler écoute et parole.


Bonne écoute !


💡 Les liens pour découvrir et contacter David : 

Caminam : https://www.caminam.fr/

L'aventure nordique : https://laventurenordique.fr


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➡️ vous abonner au podcast sur votre application d’écoute préférée ;

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📩 Contactez-moi à l’adresse suivante : christine.irabola.redac@gmail.com.


Crédits :


  • Réalisation, montage, mixage : Christine Irabola

  • Musiques et chants : Émilie Décla

  • Hébergement : Ausha


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Christine

    On n'a qu'une voix, un podcast pour découvrir ce que cache notre voix. Chaque mois, venez à la rencontre de mes invités qui lèvent le voile sur l'histoire singulière de leur voix. Au programme, des voix parlées, des voix chantées, des voix jouées et des voix parfois malmenées. L'intention ? vous procurer des émotions, vous faire voyager, vous apporter des conseils et vous proposer un pas de côté pour vous inviter à aimer votre voix. Dans cet épisode, vous allez entendre la voix de David Borde. En tant qu'accompagnateur en montagne et conteur, David utilise sa voix au quotidien. Ensemble, nous allons parler de contes, de Pyrénées, de Kiwi, de la langue occitane et de l'importance d'ouvrir grand ses oreilles avant d'ouvrir sa bouche. Bonne écoute ! Bonjour David !

  • David

    Adiu, bonjour !

  • Christine

    Pour commencer, j'aimerais savoir quelle place a la voix dans ta vie ?

  • David

    La voix, j'ai la voix de tous les jours, celle qui me permet de communiquer avec les miens, avec les amis, avec ceux que j'aime bien et ceux que je n'aime pas. Et ma voix professionnelle, c'est-à-dire que c'est un de mes outils. Et à la montagne, on compte. Et aussi les moments où je ne m'en sers pas. J'ai des kiwis avec mon cousin. Quand je suis à tailler les kiwis, je ne parle pas et c'est très agréable. Donc c'est quelque chose dont je me sers. Et parfois, c'est bien de...

  • Christine

    Et la voix des autres, est-ce qu'elle a une place dans ta vie ?

  • David

    Prépondérante. Qu'on le veuille ou non, la voix des autres, elle est là. On est obligé de faire avec plein de choses qu'on n'a pas envie d'entendre. mais qu'on entend quand même et qui sont là. Des choses affectueuses, des choses d'amour quand on est dans la famille, le couple, des choses de gestion quotidienne. La voix des autres, c'est communiquer avec les autres. C'est sûr que s'il y a un sourd, il n'entendra pas ce qu'on dit. Mais il y a des gens qui sont obligés de faire sans la voix, les mains ou ce qu'on veut. Ou quand il y a quelqu'un qui a une autre langue, on est obligé de communiquer différemment. Mais on est des animaux sociaux. Le tout seul en haut de la montagne, je n'y crois pas. Des animaux de troupeau au départ.

  • Christine

    Donc aujourd'hui, tu es accompagnateur en montagne, tu es conteur aussi. Si on reprend dans la chronologie, qu'est-ce qui arrive en premier dans ta vie ?

  • David

    Ce qui arrive en premier, c'est que j'étais un peu agité du casque jeune, un peu agité, je me suis pas mal servi de ma voix, donc on en reparlera après sur les choses qui énervent, si tu veux. Et donc, j'ai fait plein de choses, plein de choses. Et quand est arrivée la question de, et si on se calmait un peu ? J'ai commencé par l'accompagnateur en montagne et assez vite je me suis fait coincer par un monsieur qui s'appelle Serge Mauroite qui m'a coincé dans le compte et là ça s'est enchaîné très vite. Après qui a influencé sur l'autre je ne sais pas trop au départ parce que les deux ont suivi très rapidement.

  • Christine

    D'accord et tu penses que dans ton enfance est-ce qu'il y avait déjà des racines de cette voix là ?

  • David

    Ah oui beaucoup. Déjà dans mon enfance, un pied urbain du côté de Pau, un pied très rural dans la ferme de mes grands-parents paternels. Et ma grand-mère qui parlait, qui parlait, qui parlait, mon grand-père des coins, la table, le café, et puis blablablam, ça parle de tout, de rien, mais beaucoup parler, parler, parler, et nous, gosses, écouter, beaucoup écouter ça. Et ça faisait partie d'un environnement global, des récits, beaucoup d'échanges verbaux. Parler. Et ça, je pense que c'est quelque chose qui a marqué, qui a pas mal marqué. Oui, oui.

  • Christine

    D'accord. Et donc après, tu te lances dans l'accompagnateur en montagne, c'est ça ? Oui. Et là, quelle place a eu la voix à ce moment-là ? Est-ce que tu peux nous en dire quelques mots ?

  • David

    Et moi, petit, pour aller chercher du café, la note, l'addition, ça te faisait beaucoup rire. Mon père va demander l'addition. J'étais mort de peur. Je ne valais rien. J'étais une chaussette. Et petit à petit, clac, clac, donc... Le parcours que j'ai eu avant, pas mal de manifs, de machins, j'ai appris l'habitude de parler, je m'étais vacciné fort. Mais là, je me suis retrouvé à me servir de ma voix avec des gens que je ne connais pas, qui me payent, à transmettre des choses, du savoir ou des émotions, des consignes de sécurité. Donc, gagner de l'autorité par rapport à la voix, déjà, gagner une place dans le groupe. C'est l'histoire sociale de plein de gens, comment tu prends ta place avec les autres. Donc la voix, ça a questionné plein de choses. Et puis ça, toutes ces questions-là, plus le fait que je parle à 300 à l'heure tout le temps. Donc comment tu... qu'est-ce qu'on fait avec la vitesse ? Et les... Toutes les contraintes extérieures, quand tu es dehors, le chien qui passe, le vent, la cascade, donc apprendre à faire avec ces paramètres physiques de la montagne.

  • Christine

    D'accord, donc tu as commencé par être accompagnateur en montagne, le conte, c'est venu après ?

  • David

    Un an après.

  • Christine

    Ok, et là, tu es autodidacte, tu t'appuies sur d'autres conteurs, comment tu procèdes ?

  • David

    Je me suis fait arracher mon pare-chocs par une dame qui s'appelle Sophie, adorable, avec qui on était au lycée. Elle m'a dit Je suis désolé, je t'ai arraché ton pare-chocs, mais je n'ai pas une thune. Comment on fait ? Je ne sais pas. Donc, on a trouvé un pare-chocs à la casse, de fil en aiguille, on se le répare. On s'arrange, elle me donne un petit fromage et tout va bien. Cette fille est dans le milieu du cheval avec un très bon copain Balou, un gars qui gère l'association Petit Pas au port de Castets, avec les bourricots, avec les ânes. Et à ce moment-là, Balou démarrait Petit pas, il a dit je cherche un accompagnateur, un jeune, elle m'en parle de fil en aiguille, on va là-bas, deux bières plus tard je me retrouve avec une annesse qui est morte depuis la pauvre et on va faire trois tours par là et je rentre mais c'est trop bien ça. Et là on a réfléchi, qu'est-ce qu'on fait ? Moi je cherchais à travailler, eux à faire tourner les ânes, des gens qui font des marmottes et compagnie, il y en a plein. Et j'avais vu un spectacle de contes, quelque temps avant, à la forêt suspendue de Bosse d'Arros, c'était une partie des chanteurs des Pagayous. Un groupe de polyphonie, il y en avait trois. Salles, Abadie et Mauhourat, qui s'étaient répartis un peu des ambiances. Je trouvais ça terrible, très très bon. Donc j'ai dit, pareil, ce qu'on peut faire, on part en randonnée. Moi j'encadre, je prends ma part. Vous, vous louez les ânes, très bien. Et on va se caler à un endroit, un feu du comte. Il ne nous manquait que le compteur. Donc j'ai appelé Maurat avec qui on s'entendait déjà pas mal. Et je lui ai demandé de venir. Il m'a dit, parfait, je viens. Il est venu. La question financière. Les gens payent combien tu veux par soirée. Je ne veux pas d'argent, je suis un stit, c'est bon, j'ai mes sous. Mais si, non, si, non. Et au bout d'un moment, il me dit, écoute, moi, je viens à une condition, c'est que tu essaies de compter. Ce qui n'était pas prévu, trop, mais je lui dis, non, non, si, bon. Et après, j'ai essayé, le virus est rentré. Et voilà, tu ne t'en débarrasses pas après. Puis tu prends plaisir et puis tu joues avec.

  • Christine

    Quand tu dis conter, est-ce que ce sont des contes traditionnels ou c'est toi qui les écris ? Comment ça se passe ?

  • David

    En fait, je récupère des contes traditionnels, soit que j'ai entendu. Moi, je fais partie du... Là, j'arrive à 50 ans. On est une génération au moins dans le milieu accompagnateur en montagne. Pas tous, mais on est quand même pas mal à avoir été marqué par Louis Espinassous. Un peu conteur et tout ça. Donc, il y avait déjà le répertoire de Louis qu'on avait entendu ici ou là, en formation ou ailleurs. ça ce que j'avais entendu avec maura tu es tous ces gens là et après on a un panel de bouquins qui est quand même assez énorme on a la chance d'avoir pu tout un travail de collectage donc je suis allé piocher dans ce répertoire tradi gascon et pyrénéens et à partir de là ça tu le prends et zlaf j'ai joué avec quoi donc

  • Christine

    j'ai pas fait vraiment d'écriture mais je les ai repris et du coup est ce que tu te souviens de la première fois que tu as compté ouais

  • David

    C'est pas facile, c'est pas facile, mais en même temps, c'est des gens que tu connais pas. T'es au coin du feu, il fait à peu près sombre, tu vois personne. Puis j'avais déjà un peu de métier quand même, enfin un peu, j'avais quand même déjà pratiqué un peu le fait de m'adresser à des gens. Donc tu regardes un peu au-dessus de la tête et t'envoies, et feu. Et après, ça se fait peu à peu. Tu vois ce qui prend, ce qui prend pas, tu te fais un peu secouer par les physionomies des gens. Et en fait, tu te rends conte qu'en fait, il faut déconnecter ça. La physionomie n'est pas synonyme de ce qui se passe à l'intérieur. Tu as des gens qui respirent l'ennui et qui en fait non, ils sont à fond. Pas un exercice facile, mais pas non plus quelque chose de dramatique.

  • Christine

    Et après, est-ce qu'il y a des techniques qui t'ont accompagné au fil des années ou pas vraiment ?

  • David

    J'avais fait un stage avec Louis, justement, pour essayer. Un peu, oui, il y a quelques techniques. Mais après, je pense que c'est surtout le meilleur conseil, c'est Serge Mambrat qui me l'avait donné. C'était de la douche, la voiture, les moments où tu es tout seul, tu te fais l'histoire. Dans un tu rodes, on se met l'histoire en bouche. Ce qui fait qu'après, quand on est avec des gens, on ne va plus chercher le fil. Et après, c'est parler suffisamment fort, faire des images. Pour moi, m'imposer à me mettre des blancs, ce n'est pas rien. Mais ces blancs-là sont nécessaires pour que les gens qui écoutent aient le temps de se faire des images. Et après, oui, la technique de tenir les gens en face. de se désimaginer comme dans un filet. Mais pour avoir pas le mouvement permanent à faire, comme si je fais avec le micro, si je passe à droite, à gauche, ton son ne fait que varier, ceux qui sont à droite, à gauche n'entendent pas. Donc voilà, essayez d'avoir ça. Et poussez un peu. Et voilà.

  • Christine

    Et du coup, est-ce que tu peux nous dire quelle place a la voix dans tes comptes ?

  • David

    Et moi, je m'en sers bien. Je m'en sers, bon déjà, j'ai un peu de wawa au naturel, donc je pousse un peu la voix et la voix me sert pour faire des modulations. Au lycée, j'ai eu beaucoup d'histoires parce que je n'arrêtais pas de faire du bruit, des machins, que ça m'amusait beaucoup. Et en fait, je m'amuse à faire ça, des onomatopées, des petits bruits, des machins. Je ne peux pas m'empêcher de faire dans la vie naturelle, normale, entre guillemets. Donc je m'en sers, je joue avec. Après, je mélange aussi avec l'occident. On en reparlera après. Dans le conte, ma voix me sert un peu d'outil en plus des mots. Le mot image, il y a aussi l'outil voix.

  • Christine

    D'accord. Donc, en fait, on ne va pas dire qu'il y a quelque chose qui prime. Est-ce que c'est le récit qui prime ? Est-ce que c'est la voix qui prime ? Pour toi, tout est important, finalement.

  • David

    Les deux vont ensemble. Parce qu'après, je pense que chaque conteur a aussi une personnalité. C'est pas du théâtre où tu prends la personnalité de quelqu'un. Là, tu as ta personnalité et il y a des gens qui parlent doucement et ils sont comme ça. Et il y a des fois des conteurs, c'est super agréable à écouter. T'es à deux doigts de la léthargie, t'as l'impression de loin. Mais non, c'est doux. C'est juste doux, c'est tout calme et ils sont comme ça. Et ça n'a rien de désagréable. Et d'autres plus explosifs où la voix, elle est là. Je pense que c'est un tout. Il n'y en a pas un qui va primer plus que l'autre.

  • Christine

    Alors toi, tu contes, on en avait parlé, aussi bien dedans que dehors, c'est bien ça ?

  • David

    Oui.

  • Christine

    Est-ce que, j'imagine que les enjeux sont différents, est-ce que tu peux nous en dire quelques mots ?

  • David

    Les enjeux, quand tu es dedans, tu fermes une petite ambiance et tu joues avec le calme, dans un endroit où les gens sont rentrés, de gré ou de force, de force si c'est des gamins, mais ils sont rentrés, ils s'avouent le son, ils sont posés, ils tapent. T'as pas de perturbations extérieures qui vont pas... C'est facile dedans, c'est agréable, c'est facile. Dehors, tu as beaucoup plus de contraintes sonores. Le vent, la cascade, l'autre kek qui passe en scooter quand t'es en semi-urbain, les vaches, les cloches... Salut, t'es là ? Oui, je travaille ! Tu peux avoir tout ça qui joue, mais en même temps, dehors, t'as un support énorme. Tu as des plantes, des arbres, le chien qui passe, tu rentres le chien dans l'histoire. Tu as aussi une capacité de rebond qui est terrible. Et un environnement.

  • Christine

    Tu joues avec l'environnement aussi finalement.

  • David

    Il faut intégrer les gens, tout ce qui peut être une perturbation. Enfin pas de trop non plus, mais il faut quand même intégrer tout ça dedans. Moi dans ma pratique et dans ce que je fais, et ce que je conseillerais, c'est que tu t'appuies parce que c'est des choses qui vont te perturber. C'est des choses qui ne sont pas dans l'histoire. et qui de toute façon les gens vont soit les regarder, soit les écouter. Donc soit tu te bats contre le chien, soit tu rentres le chien dans l'histoire. Soit tu acceptes quand tu es au Bénou par exemple, et que tu as je ne sais pas qui, aux commandes de son super hélicoptère à 24 millions d'euros qui passe, et bien tu attends que l'hélicoptère passe. On ne joue pas contre un hélicoptère. Une fois qu'il est passé, ou pareil pour le tracteur, ou le quad, il y a des moments où tu attends, et après tu repars.

  • Christine

    Est-ce que toi, tu as des endroits vraiment dans lesquels tu adores compter ?

  • David

    Oui, quand on monte, oui, oui, oui. Il y a une keb, les keb, c'est des abris sous roches. Il y a une grosse keb dans la vallée d'Ossau, vers le Caillou de Soques, où on s'arrête régulièrement avec mon collègue, Pierre Vidal. On a une soirée où on monte jusqu'à une cabane, et feu, comte, ventrêche et vin rouge. C'est très bien, culinaire et culturel. Et un peu de sport. Et là, il y a une très, très belle keb, j'adore. C'est un très, très bel endroit. En plus, il y a un peu de résonance et puis ça fait une ambiance où il y a très peu de gens qui passent. Il y a du monde, mais voilà, tu as une belle éthrée. Ça, c'est un bel endroit que j'aime bien. Et après, vers tout ce qui est un peu haut, où tu surplombes des lacs, vers au-dessus des refuges d'Ayous, au-dessus du refuge d'Arlette. Là, c'est un peu chaud à gérer parce que là, tu as le vent. Et là, le vent, par contre, tu ne peux pas faire grand-chose contre. Mais là quand tu as des moments où tu arrives à poser tout le monde, que tu n'as pas trop de vent contre toi, tu as un paysage de dengots, là ça bombarde, c'est pas mal.

  • Christine

    Et les gens ils te font quel retour dans des endroits comme ça ?

  • David

    Ah oui, tu as de tout. Tu as les gens qui ne disent rien, la tête qui bouge, ceux qui ont les yeux qui brillent, ceux qui verbalisent, c'était génial, machin ceux qui ne disent rien. Peut-être qu'il y en a aussi qui n'aiment pas et qui ne le disent pas. Je n'ai jamais eu personne qui m'a dit c'est pourri, par-ci, là-dos Tronche d'ail là, qui dit, c'est pas, c'était nul. Truc d'ado, je prêche le faux pour le vrai. Et en attendant, il est resté jusqu'au bout, et puis il n'a pas sorti le téléphone, donc l'un dans l'autre. Et là, t'as des retours surprenants. Après, en montagne, des fois, on a une dame, une fois, qui nous s'est mise à pleurer. On rentrait de la nocturne, là, et levée de lune au-dessus de la dente de soc. Une espèce de relief un peu pointu. Et là, paf, la lune qui est sortie, une espèce d'ambiance terrible. Et là, elle nous a posé une petite larme. Elle était juste à côté de nous. Mais qu'est-ce qui vous arrive ? C'est trop beau ! Mais voilà ! C'est mignon. C'est cool. Ça donne du sens.

  • Christine

    J'ai vu que tu participais aussi à des festivals.

  • David

    Un peu.

  • Christine

    des festivals de contes, est-ce que c'est quelque chose que tu aimes bien faire ?

  • David

    Oui, mais on s'est vite rendu compte, quand je dis on, je faisais partie du collectif SAI, qui était un regroupement pluridisciplinaire, comme on dit, où il y avait des gens du groupe La Famille Artus, qui étaient plutôt tradiocs, mais alors ils ont tout tourné en électro, avec beaucoup d'improvisations, des ambiances très différentes. Donc il y avait eux sur la partie musique, danse, chant. Il y avait Colinato qui était une plasticienne qui travaillait sur des projections, qui est partie dans le Lot aujourd'hui. Serge et moi en conte. Enfin, il y avait tout un carrefour. Et un monsieur là, Patrick Pouzet, qui était un peu aux manettes de tout ça. Aujourd'hui, la structure est rentrée dans la Ciutat, Oueda, Sapou. Et on s'est rendu compte que pour aller dans les festivals de contes, c'est quand même un milieu d'entre-soi assez important. C'est beaucoup de cooptation. de cooptation de l'un ou de l'autre et qu'il faut quand même un bon vendeur qui soit connu et reconnu et que rentrer dans ce petit monde tout cool et tout sympathique soit-il c'est pas si facile donc il faut quand même donner de l'énergie pour se bagarrer là-dedans et ça n'enlève rien à la qualité artistique de ce qu'on y entend et tout ça mais c'est pas un environnement simple d'un côté et de l'autre c'est la distance Et rarefois, je suis parti sur des festivals un petit peu loin, des petites choses. Tu te dis, c'est la vie d'intermittent du spectacle. Tu roules 6 heures, tu attends 2 heures, tu fais 8 minutes de balance, tu fais ton compte, petit spectacle, 50 minutes, 1h15. Tu attends et tu te remets 6 heures de bagnole. Le rang du temps m'a un peu interrogé.

  • Christine

    Peut-être que pour toi, ça a moins de sens parce que toi, tu es quand même ancré aussi ici, que tu as parlé des endroits que tu aimais bien. C'était aussi des endroits que tu connais, dans lesquels tu amènes les gens, que tu accompagnes finalement. Est-ce que ça a peut-être moins de sens de te retrouver ?

  • David

    Je ne sais pas. En même temps, dans un festival, c'est agréable parce que souvent, tu as affaire à un public de gens qui sait où ils vont. Après, moi, j'aime bien aussi quand tu coïnces des gens, ils sont pris dans une ambiance, ils ne savent pas où ils sont. C'est surprenant. C'est assez bon. Mais il y a aussi tout un côté confort. Tu fais le festival, tu as des conditions techniques, un public, des gens qui t'accueillent. Tu es dans une ambiance, tu rencontres d'autres gens qui sont meilleurs que toi, tous. Parce que ceux-là, ils sont à 100% que sur ça. Des ladis diallo, des jolins, il y a quand même quelques pointures. Il y a du très très bon. Donc ça, peut-être qu'en vieillissant, c'est un truc où j'essaierai de pousser plus. Mais pour l'instant, entre ce que je te disais avant... Aujourd'hui que j'ai assez de combats par droite à gauche, je n'ai pas envie de mettre trop d'énergie dessus. Mais ce n'est pas dit qu'au bout d'un moment, si j'ai les genoux qui me lâchent ou que j'en ai marre de batailler sur l'accompagnement, ce n'est pas dit que tenter. Après, il faut avoir l'envie de faire des comptes de temps en temps et en faire un métier à 100%. C'est autre chose aussi. Il faut des spectacles clés en main, il faut des spectacles bien faits que tu puisses présenter, vendre. Donc le côté un peu impro, où des fois je sors de la voiture, j'ai aucune idée de ce que je vais raconter, et je prends un compte, et puis après, on va faire l'autre, et ça roule. Et c'est pas un spectacle construit.

  • Christine

    Oui, finalement, c'est deux métiers différents.

  • David

    C'est autre chose. On l'a eu fait avec le collectif, on avait deux spectacles carrés, avec compte, musique, chant, projection, mais c'est vraiment un autre travail. Tu fais tes filages à l'italienne, pour tout bien caler, c'est génial, ça professionnalise dans le sens où on apprend à... On apprend à se tenir sur une scène, on apprend à faire avec d'autres éléments, mais c'est cadré, c'est autre chose.

  • Christine

    Est-ce qu'il y a, soit dans ces endroits-là, soit à d'autres moments, des voix qui t'inspirent ? Ça peut être des conteurs, mais ça peut être aussi des chanteurs ou autres.

  • David

    Il y a des voix qui me marquent. Au quotidien aussi, tu parles avec des gens qui ont des voix qui résonnent. Et à l'inverse, tu as des voix qui sont fatigantes. Je ne dirais pas jusqu'à agressantes, mais fatigantes. Il y a des gens qui parlent. C'est pas lié à eux, mais t'as des voix qui te... qui te scie l'oreille. Arrête-toi, s'il te plaît ! Mais après, il y a des voix qui te portent, qui t'interloquent. Puis oui, sur les chanteurs, on a tous des voix d'un chanteur qui te marquent. Oui, louride. Moi, par exemple, c'est une petite voix qui... Un truc très con, Brassens. Ou après, en polyphonie, en chant, des fois, tu te retrouves à chanter par là et tu as une basse assez énorme qui sort ou un gars qui a une haute incroyable. Enfin, tu as des voix comme ça, un peu de tout type.

  • Christine

    Alors David, on en a un petit peu parlé de la place de la voix dans l'accompagnement en montagne. Est-ce que tu peux nous en dire un petit peu plus ?

  • David

    Ça pose un cadre, souvent déjà, le bonjour, le hadichat, le premier contact avec les gens. Ils payent, il y a les gens qui te connaissent, et il y a les autres. Et là, la voix, le fait de la poser, le fait de prendre ce premier contact, déjà tu prends ta place sur le groupe. C'est pas que tu dois être supérieur au groupe, mais c'est qu'ils payent pour être avec toi, et que tu es responsable d'eux, quelque part. Et qu'à un moment donné, si ça part un peu en cacahuète, il faut que tu puisses maîtriser ce qui se passe globalement dans la mesure du possible. Donc je pense qu'il y a aussi la voix, elle sert beaucoup à ça, avec des tas de personnalités différentes. C'est pas parce que tu parles fort que tu vas être forcément écouté. Je pense que c'est la personnalité, il y a des gens qui vont parler tout doucement, des gens qui vont utiliser la blague, mais elle donne un cadre de... Elle prend le groupe, quoi. Je pense que dans l'accompagnement, il y a ça beaucoup. Et après, nous, on est un métier où on parle. Pendant très longtemps, on disait un bon guide ne parle pas. Pour un guide de haute montagne, il te prenait à un point A, il te prenait au refuge ou au village, il te montait en haut de je ne sais quel pic, et il te ramenait vivant. Et qu'il ne parle pas, c'est pas... sans foutre. C'était un bon guide ne parle pas. Il fallait que... c'était de la technique et rentrer vivant. Nous, c'est au contraire. Nous, on est des gens qui partageons un milieu, on partage un milieu avec les autres. On partage les observations, on partage ce qu'on voit au niveau des bestioles, des plantes, du pastoralisme, des pics, des contes, de la géologie. Donc on est tout le temps en train de parler. Donc la voix, elle est là pour... c'est une passerelle constante entre nous, le milieu et les clients. On peut dire comme on veut, mais ça reste des clients, les gens y payent. On ne vit pas que d'amour et d'eau fraîche. C'est important. Mais clac, clac, c'est aussi ça. Dans l'accompagnement, c'est cet outil-là, ce fil.

  • Christine

    Et toi, parce que ça fait combien d'années que tu es accompagnateur mental ?

  • David

    Moi, j'ai démarré en 2002.

  • Christine

    Ok, donc ça fait 22 ans. Est-ce que tu as senti une évolution là-dessus au fil du temps ?

  • David

    Sur la voix ?

  • Christine

    Sur la voix, la place, tu vois, c'est-à-dire, tu dis, voilà, qu'en fait, ça va au-delà de juste amener d'un point A à un point B, il se passe plein de choses entre les deux.

  • David

    J'ai senti une évolution avec les scolaires. J'ai senti une évolution avec les scolaires dans le sens où je passe beaucoup plus... Mais ça, c'est pas que moi. Quand on discute avec des gens qui les ont en milieu fermé, les enfants, des enseignants ça s'appelle. C'est un combat partout, assez fréquent. C'est le temps passé à gagner l'écoute. Et ça la voix elle est primordiale. Et nous on a une collègue par exemple qui a une toute petite voix qui se questionne fortement sur elle, sa relation avec les scolaires, parce qu'elle aime bien les transmissions pédagogiques. Mais cette espèce de recherche là, enfin de comment arriver à... prendre le dessus sur la classe, dans le sens où ils vont être attentifs. Comment arriver à les écouter ? Le dessus c'est pas qu'un rapport de force où on leur met les coups de bâtons, mais c'est ça, c'est comment on va arriver à les faire écouter. Et ça c'est un temps qui devient de plus en plus long et où la voix a son importance. Et à un moment donné, c'est un niveau sonore, c'est de choisir ses mots, trouver le moment où il y a un creux de bruit, au milieu du bruit, pour aller chercher. Et ça, c'est quelque chose qui a évolué. Ça, c'est une vraie évolution. Après, le grand public, entre guillemets, les adultes, les ados, c'est différent. Je ne vois pas de grand... Je n'ai pas ressenti, en tout cas, de grand mouvement sur ça.

  • Christine

    Il y a un sujet qui est important à aborder aujourd'hui, je pense que c'est la question de la langue, enfin des langues, puisque là, aujourd'hui, on se parle en français. Mais il y a une autre langue qui a une place importante dans ta vie. Est-ce que tu peux nous en dire un petit peu plus ?

  • David

    Ah, c'est là où on habite. Ça va être en Occitan, enfin en Gascogne, en Béarnais, on est très fort pour se disputer ici sur le nom de la langue. On a vraiment des gens qui ont du temps, en Vallée d'Osso on en a 2-3 là, des très très bons, qui ont du temps pour ça. Et donc la définition pour ceux de l'Occitan, dans sa variante béarnaise, c'est la langue d'ici qui est là, et moi que j'entendais aussi, autour de moi, que j'ai beaucoup entendu. Et mon père a essayé de me l'apprendre, il a dit tu rigoles ou quoi ? Et non, non, hors de question. J'ai pas voulu. Enfin si, petit, j'avais un livre qui s'appelle l'esquirette, c'est la petite cloche. Donc j'apprenais un peu, quatre mots, Bonne nuit pour Bonne nuit Enfin, il y avait quelques mots, mais pas plus. Mais j'entendais quand même beaucoup la langue autour de moi. Et après, est arrivée la période ado et un peu plus où là, c'était pas la peine. J'ai pas voulu en entendre parler. Et après, mon parcours de lycéen ayant été un peu chaotique, il a été... T'es convenu pour tout le monde que c'était bien à un moment donné que je passais un an un peu loin de la maison et j'ai échoué à Bayonne. Très bonne année. Magnifique année, scolairement parlant, il faut voir, mais très très belle année où je me suis retrouvé à Cassin. René Cassin, 92-93, voilà, c'est la belle époque. Il y avait pas mal d'agitation sociale, pas mal d'agitation musicale, pas mal de monde qui s'agitait, des gens pas mal sympathiques. Puis des thématiques un peu costauds, il y avait une grosse campagne sur l'insoumission qui existait, il y avait tout un bazar. Dans tous les sens, puis des groupes, ça bougeait fort. Et nous, on s'y retrouvait très, très bien dans cette petite ambiance. Mais il y avait le fait qu'il y avait énormément qui parlaient en basque entre eux. Et puis, ça, ça te le fait sentir qu'ils sont quand même le peuple élu. Et je plaisante.

  • Christine

    C'est bien qu'il y ait un sous-texte.

  • David

    C'est bien qu'il y ait un sous-texte. Non, non, on bataillait beaucoup avec ça, on rigolait. Et alors, quand même, ça m'a questionné. Puis on a eu plein de discussions sur la place de la langue, la place sociale, la place politique, l'histoire linguistique de la France, de ce pays. Donc, tout ne s'est pas fait seul, que les gens n'ont pas abandonné du jour au lendemain le Basque, le Breton, le Catalan, le Galicien. Enfin, le Galicien, c'est l'autre côté, mais... Tout ça, que ça ne s'est pas abandonné du jour au lendemain, qu'il y a tout un processus historique qui s'est fait. Et voilà, tout ça, ça questionne. Les relations avec les langues de l'immigration aussi, parler mal français plutôt que turc à vos enfants, ça a suivi encore. Sous Sarkozy, on en sortait encore. Et là, actuellement, on creuserait un petit peu. On n'est pas loin. On est loin d'avoir vraiment avancé sur ce sujet. Mais voilà, tout ça, ça a bougé, bougé. Ça s'est agité. Après, je suis rentré en Béarn. Et puis de là, les fils ont fait que j'ai rencontré les gens de Radio Païs par exemple, les gens des Calandrets, les écoles immersives en Occitan, les gens de Carnaval, enfin le milieu un peu occitaniste, les gens de la Tour du Bourreau, qui était à Pau, un local plutôt militant. Et puis tout ça, ça s'est fait, clac, clac, clac, et puis je me suis dit, mais quand même, mais quand même, mais quand même. Et puis j'ai commencé à parler un peu, et puis on a eu la chance d'être toute une vague de jeunes, un peu branchés pareil. Elle était un peu rock'n'roll aussi, et donc on s'est auto-motivés, plus quelques-uns qui nous ont accompagnés là-dedans. Et puis petit à petit, j'ai basculé. Alors ça a beaucoup fait rire mon père, beaucoup. Il me dit Ah oui, c'est ça, ton Occitan, on parle bien, Arnaïs, ici. Et puis même, quand tu essaies de transmettre la langue à ton gamin, et puis qu'il revient par la fenêtre en te disant Oui, j'apprends l'Occitan, mais oui. Et bon, finalement, les choses se sont faites, donc ça a pris une place. Et puis au-delà des questionnements militants qu'on peut avoir, ou historiques, après il y a un vrai plaisir. un vrai plaisir à parler, il y a le chuc de la langue, le jus de la langue, ça veut rien dire en français, le sens, l'architecture, les mots que tu peux utiliser, les échanges que tu vas créer avec les gens quand tu parles. Il y a des gens avec qui j'ai jamais parlé français, d'autres, quand on bascule en oc, ça n'a rien à voir, tu vas chercher d'autres choses, donc il y a ce plaisir-là. Et en parallèle, ma compagne Myriam, qui elle est née au... au Kenya, fille de pieds noirs et de bourguignons, qui est après rentrée à 11 ans ici, et qui a passé dans le sud-est, plutôt un profil de gens qui ont voyagé, et qui a eu décidé, ça va, un moment, de courir partout, donc de se poser ici, qui s'est ancré, qui a appris la langue aussi, et aujourd'hui qui l'enseigne, et qui parle mieux que moi, et donc on s'est accompagné aussi là-dedans, ce qui fait qu'aujourd'hui on parle avec les garçons, avec nos enfants, et qui eux sont assez fiers de ça, enfin ça dépend d'où ils sont. Ils sont un peu discrets parfois. Parle moins fort papa, s'il te plaît. Mais voilà, ça a pris une place prépondérante. Enfin prépondérante, une place importante en tout cas.

  • Christine

    Et si on repart de la voix, quand tu parles en français, quand tu parles en occitan, est-ce que tu perçois une différence ?

  • David

    Dans l'intonation, la tonalité, je sais plus.

  • Christine

    Pas forcément. Par contre, quand je vais parler en occitan, surtout avec des gens qui la tiennent depuis plus longtemps que moi, des gens qui sont nés dedans, ou des gens qui ont une jolie langue dans le sens vocabulaire, syntaxe, tout ça, je vais être plus attentif à la façon de parler, aux tournures, aux mots, à des airs qui roulent. Moi, je suis un enfant de TF1, entre guillemets, mais le joli air qui roule des vieux, tout ça, le air d'Edith Piaf, on est lycée. On est passé tous au concasseur. Donc des fois, je vais être plus attentif à ça. Après, en français, pareil, je vais être attentif des fois quand il y a des accents complètement surréalistes qui débarquent, de harrasse ou de je ne sais pas où, un bon vieux vieux géant qui sort de là-bas, tu ne sais pas d'où. Ça, c'est très bon, j'adore. Les Québécois aussi me font beaucoup rire. Bon, ils font rire tout le monde, mais l'intonation, c'est rigolo. Je pense que c'est plus ça qui m'interpelle.

  • David

    Mais justement, les gens que tu accompagnes en montagne, par exemple, qui viennent de partout, finalement, est-ce qu'ils te font des remarques sur la musicalité de ta voix ? Est-ce que ça arrive, ça ?

  • Christine

    Ah oui, oui, parce que je ne me rends pas compte, mais je mets plein de mots d'occident un peu partout. Méfiez-vous de ne pas vous mettre une tec dans la branche. Pardon ? Tu as plein de trucs comme ça. Il te l'a engoulé, le monsieur, le sandwich ? Il y a plein de trucs comme ça qui me partent, qui se sont tout mesclés, tout mélangés. Et donc des fois, ça les fait rire. Et à l'inverse, tu vas avoir un gars du fond du Rouergue, ou un Aveyroné qui est là, ou je ne sais pas où, un Bigourdant, et clac, ça fait une passerelle. Ou des Portugais, très souvent les Portugais. Castagné, on a énormément de mots proches, et les Portugais, c'est quand même des gens qui sont très attachés à la langue. Au tour du monde, les Portugais restent très locuteurs. Ils ne sont pas forcément à faire beaucoup de bruit, mais ils ont tous l'espèce de croix portugaise sur eux. ou partout, et la langue. Donc, c'est des gens qui sont sensibles à la langue, à l'écoute. Donc, voilà, il y a ça. Et puis,

  • Speaker #2

    il y a ceux qui s'en fichent complètement et qui grandent bien leur façon. Papa qui a étudié le débat de l'Ugère, papa qui a l'ordre, papa, au grand cours, cours, cours, papa, papa, que j'ai cassé, que j'ai cassé des blancs, des rues, des rues qui cantent du ciel, qui disent comme ça, on ne peut pas,

  • David

    Est-ce qu'il y a des sujets qui t'amènent à élever la voix ?

  • Christine

    Heureusement que je vais en montagne. Heureusement que je vais en montagne et que je travaille avec des enfants, des ados, ou avec un public adulte, mais sur des moments de transmission, de douceur, de montagne. Sinon, moi je disjoncterais. On est dans un monde qui t'agace profondément. L'histoire de Gaza en ce moment, c'est infâme. On était partis faire une mission civile en Palestine en 2003. Et tu te dis, pourquoi on n'écoute pas les gens ? Pourquoi on ne les écoute pas ? Il y avait les antisionistes israéliens qu'on avait rencontrés sur place. Il y avait Varjavski, c'était un fils de rabbin, un gars que ses parents avaient un peu goûté au camp de concentration, donc on ne peut pas trop dire qu'il est antisémite. Et qui n'arrêtait pas de dire que l'extension des colonies, on allait droit dans le mur. Et de l'autre côté, on avait rencontré le docteur Sabri, un gars du FATA, du parti Arafat. Ils disaient attention, on a les barbus qui arrivent, et eux ils avaient un conflit interne entre les palestiniens, entre les laïcs, qui pouvaient être croyants par là, et les musulmans, les islamistes politiques. Et aujourd'hui tu te retrouves avec un gouvernement d'extrême droite en Israël, ceux qui ont tué Issa Krabi, c'est eux, c'est pas qu'ils ont appuyé sur la gâchette, mais c'est des gens qui ont tué une parole de paix du côté israélien. Et de l'autre côté, les enfants du Hamas, c'est plus compliqué à ce niveau-là, parce que quand tu es enfermé, tu moisis doucement dans ta tête, même s'il y a des tas de choses positives qui se font en Gaza. Mais on se retrouve là avec quelque chose de... Oui, ça, ça me fait bondir. L'Europe qui continue à vendre des armes. Les Américains me font bondir, les USA économiquement, je parlais. Nous-mêmes, l'occidental français de base m'agace de plus en plus à aller chez Starbucks, à mettre le joli pull de Noël des Nord-Américains. On fait le perçant, t'as l'impression, dans un feuilleton américain, ils sont tous habillés comme des mille-or, comme dans les feuilletons américains. Ça sort d'où, ça ? Les écoles de business school, ça s'appelle, avec les petits chapeaux américains qu'on jette à la fin, des gamins qui ne savent pas qu'une palace existe, mais qui connaissent la NBA. On regarde Netflix, on commande chez Amazon, on va au Drive parce que c'est plus pratique s'il te plaît. L'humour, j'aime beaucoup l'humour, mais c'est du stand-up américain. On se standardise là et à côté de ça, on secoue le petit drapeau français. Vive le retour à nos traditions ! Il y a un tas de choses, ça peut durer longtemps. Il y a un tas de choses qui me donnent envie d'élever la voix. La retraite, la retraite. cette espèce d'hypocrisie donc oui il y a plein de choses de temps en temps j'élève un peu la voix dans des manifs ou quoi mais j'y vais de moins en moins aussi j'ai passé beaucoup de temps sur des réunions, des collages, des organisations de manifs aller faire le peintre la nuit et au bout d'un moment je lève un peu le pied et de temps en temps j'élève la voix je discute beaucoup parce qu'après dans mon entourage j'ai de tout donc je discute beaucoup et avec des écolophènes fatigants et des chasseurs épuisants et tout Donc on discute un peu de tout. Donc j'ai ma part de joute verbale régulière, mais tranquillement. Après, je m'amuse à me refaire toutes les affiches de Zemmour en Valais d'Osso. Ça, ça m'amuse beaucoup. Beaucoup. Avec des copains bergers qui passent et qui me disent Hé, on en a encore dans la peinture si tu veux ! Et voilà. Donc ça, ça me plaît. Un peu. Mais je suis rentré dans une phase aussi où je me protège. Je me protège parce que peut-être qu'il ne faudrait pas... Peut-être qu'il faudrait qu'on sorte un bon coup tous, mais j'y crois pas au sortir tous une bonne fois pour toutes. Je vois pas autour de moi ça. J'espère me tromper, mais je le vois pas. Et donc j'essaie de me protéger un peu pour éviter de disjoncter et d'être désagréable pour les gens autour de moi. Mais y'a de quoi, ouais. Par contre tous les gens qui font comme si tout allait tout le temps, là, cet espèce de sourire bienheureux. Ah ça va bien, oui, non ça va pas. Débranche ton ombri, l'ouvre les yeux, s'il te plaît.

  • David

    Est-ce qu'il y a un dernier point sur lequel tu aimerais revenir par rapport à la voix ? Tu penses qu'on a fait le tour. On n'a jamais fait le tour, mais déjà pour aujourd'hui.

  • Christine

    On a fait le tour. Après, je pense que ça vaut le coup ici de prêter, de se méfier aux gens qui utilisent trop leur voix et de prendre le temps un peu d'écouter. La voix, moi, avant, j'ai parlé beaucoup. Je parle encore beaucoup, mais je pense que c'est lié au fait d'écouter. D'abord, j'ai passé beaucoup de temps à écouter. Je me force des fois, je me mords la langue. Ah écoutez, parce que la voix, ce n'est pas que soi, et c'est énormément de voix qu'on a autour de nous. Et dans un monde où on est là, où c'est chacun un peu qui reste un peu dans ses rails, le téléphone, tous les algorithmes qui te ramènent tout le temps un peu sur les mêmes choses, alors ce ne sont pas des choses positives, n'importe, mais ça vaut le coup de se servir de la voix des autres un peu.

  • David

    Merci, je crois qu'on va terminer là-dessus. Très bien, merci beaucoup David.

  • Christine

    Merci à toi.

  • Christine Irabola

    Un grand merci à David pour la générosité et la spontanéité avec lesquelles il a répondu à toutes mes questions. Vous trouverez les informations le concernant dans la description de cet épisode. Merci à vous d'avoir écouté cet épisode d'On n'a qu'une voix jusqu'au bout. S'il vous a plu, abonnez-vous dès maintenant pour ne pas manquer la voix de mes prochains invités. Et pour soutenir mon podcast, je vous propose de le noter et de le commenter sur votre application d'écoute préférée. Enfin, un merci tout particulier à Émilie Décla, qui a créé et interprété toutes les musiques d'On n'a qu'une voix. Retrouvez l'actualité du podcast sur le compte Instagram ou LinkedIn, entre voix et mots. À bientôt ! S

Chapters

  • Introduction au podcast et à l'invité David Borde

    00:09

  • La voix dans la vie quotidienne de David

    01:12

  • Parcours de David : de l'enfance à l'accompagnement en montagne

    02:27

  • Les racines de la voix dans l'enfance de David

    03:06

  • L'importance de la voix dans le conte

    05:06

  • La voix comme outil d'accompagnement en montagne

    09:56

  • Les enjeux de raconter des histoires en intérieur et extérieur

    09:56

  • Préférences de David pour les lieux de conte

    13:19

  • Inspirations vocales et influence des voix sur David

    19:19

  • La voix dans l'accompagnement en montagne

    20:22

  • Importance de la langue occitane dans la vie de David

    24:16

  • Réflexions finales sur la voix et l'écoute

    29:17

  • Conclusion et réflexions sur l'écoute et la voix

    37:09

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