Description

Savez-vous comment se fabrique un opéra ? À l'occasion de l'opéra La Flûte enchantée de Mozart donné à l'Opéra de Rennes en mai 2025, plongeons dans l'envers du décor à la rencontre de celles et ceux qui fabriquent et conçoivent les décors, costumes et accessoires. Pour ce deuxième épisode, rendez-vous avec les serrurières. Non, elles ne fabriquent pas de serrures ! Leur matière : le métal. Leur mission : créer des structures sur lesquelles tout repose.

Un podcast réalisé par Arnaud Wassmer.

Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

• Speaker #0

  L'Envers du décor, une série de podcasts de l'Opéra de Rennes. A l'occasion de la création de la Flûte enchantée de Mozart à l'Opéra de Rennes et à Angénante Opéra au printemps 2025, nous vous proposons de rencontrer celles et ceux qui fabriquent cette production. Dans cet épisode, je vous propose de découvrir le métier de serrurière. Dans l'atelier de construction des décors, des femmes travaillent à assembler et à fixer des éléments métalliques entre eux perçage et soudure sont leur quotidien.

• Speaker #1

  Métallerie, serrurier, c'est l'intitulé complet du métier, je ne sais pas pourquoi on dit serrurier.

• Speaker #2

  Parce qu'à la base, c'était surtout la fabrication de tout ce qui était ouvrant en ferraille. Et du coup, c'est resté. Mais c'est un peu en train de changer, j'ai l'impression. Ça s'utilise beaucoup dans le spectacle et moins dans le bâtiment maintenant, le terme de serrurier.

• Speaker #3

  Et là, qu'est-ce que vous faites aujourd'hui ?

• Speaker #2

  Des gueules de loups ! On cherche un système pour faire des gueules de loups un peu plus rapidement que si on devait les faire une par une.

• Speaker #3

  Et les gueules de loups c'est ?

• Speaker #2

  Alors c'est des entailles, un grugeage, à faire sur un tube rond, sur l'extrémité d'un tube rond, pour qu'il puisse être assemblé avec un autre tube rond et qu'on puisse venir souder ces deux tubes ensemble.

• Speaker #1

  C'est ça, c'est les garde-corps d'un élément de décor où il y a une montée d'escalier avec une main courante. On attaque ce deuxième élément de décor, il y a d'autres choses à faire mais là on est un peu là-dessus.

• Speaker #2

  Moi j'avais commencé à bosser dans les décors de spectacle plutôt théâtre. En travaillant avec des scénographes qui faisaient aussi la construction, du coup plus des personnes qui étaient soit à leur compte qui bossaient pour des compagnies, soit qui venaient travailler, faire une création dans un théâtre par exemple. Et après moi je suis passée par des bateaux et de la réparation de bateaux et de vieux gréements et après je suis retournée dans le spectacle. Et après j'ai fait une formation de métallerie pour avoir une spécialité parce que c'était pas facile en fait de trouver du boulot en n'ayant pas forcément une spécialité dans une matière. Je pense que c'était en voyant surtout un spectacle où il y avait la possibilité de visiter un peu les coulisses et c'était un projet de fin d'année et en fait je crois que c'est vraiment un moment où ça a un peu tilté de ok j'ai envie de faire ça. Et après aussi c'était une période où j'étais quand même entourée de pas mal de personnes qui faisaient différents types d'artisanat et de bricoles. Et du coup il y avait la possibilité de faire ça en fait.

• Speaker #1

  Ça fait pas longtemps que je fais la construction de décors et c'était un peu sur un malentendu à la base j'ai remplacé une amie mais je savais que ça existait j'avais déjà un peu envie mais je pense que je regardais ça de loin et avant ça moi j'ai fait quatre ans d'intérim en chaudronnerie, métallerie, soudure après une reconversion et voilà c'était bien pendant trois ans quatre ans mais mais là j'en ai un peu marre, surtout que j'étais la seule femme. Et on va se mentir, je vais dire les grands mots. Il y avait tout le temps du sexisme ambiant. En serrurier, on n'est que des meufs et ça fait la différence. Donc c'est très agréable. Et puis même le travail, le contexte, l'aboutissement de ce qu'on fabrique, moi ça me convient mieux en tout cas pour l'instant. C'est le début mais j'espère... Après c'est arrivé à une période où je me disais qu'il fallait que je change d'application de ce métier-là. C'était ça où j'arrêtais. Et voilà, c'est arrivé à un moment charnière, au bon moment on va dire.

• Speaker #3

  Et comment vous définiriez toutes les deux ce travail dans l'atelier ?

• Speaker #2

  J'ai l'impression qu'ici c'est quand même assez souvent le même procédé, et que justement c'est pas tellement un prototype à inventer, mais que comme c'est de l'opéra, c'est quand même des grosses pièces structurelles, des fois qui sont amenées à être mécanisées par des moteurs qui vont porter des gens. Il y a quand même beaucoup de contraintes. Ce n'est pas du décor en soi. Ce n'est pas un des éléments qui sont décoratifs, mais ce sont des éléments qui sont structurels. Du coup, j'ai l'impression qu'assez souvent, on a des plans qui sont faits en amont par des dessinateurs approuvés par des bureaux d'études. Du coup, c'est plus un travail de précision. En tout cas, de réussir à respecter ces plans-là et ces contraintes. Et réussir à être assez minutieuse là-dedans. Et que les soudures tiennent.

• Speaker #1

  C'est vrai que c'est un peu ça qu'on disait tout à l'heure hors micro, mais il y a beaucoup d'adaptabilité. En fait, il faut prendre en compte les différents... La scénographe, le dessinateur... Les contraintes budgétaires, les contraintes de temps, et il faut réussir à s'adapter à tout ça. Et voilà, de toute façon, on n'a pas trop le choix. Du coup, il faut faire au mieux avec ça. Et souvent, ça marche. Oui,

• Speaker #3

  parce que vous ne divisez pas le choix, mais vous avez quand même des allers-retours avec ces nodographes. Vous mettez en scène un moment pour dire que ça, finalement, ça ne va pas passer. On pourrait faire comme ça, comme ça, comme ça.

• Speaker #2

  Oui, on demande quand même des possibilités de modification. On fait des modifications à des endroits pour que... Soit ce soit plus faisable, ça marche mieux au montage.

• Speaker #1

  Puis c'est qu'on a un vrai rôle à jouer dedans.

• Speaker #3

  En plus ça c'est un atelier où il y a plein de corps de métier qui se mélangent, c'est aussi quelque chose qui vous a attiré là ou qui vous plait en arrivant ici ?

• Speaker #1

  Moi je trouve ça super agréable de pouvoir discuter avec d'autres corps de métier et de se dire que... Souvent en fait c'est en plus des pièces d'un même élément de décor qui vont devoir être assemblées et du coup il faut... s'organiser pour que ça s'emboîte bien, pour que ça soit les mêmes cotes ou les mêmes modifications de cotes. Donc je trouve que c'est cool.

• Speaker #2

  Moi je trouve ça surtout très agréable, en tout cas quand c'est possible de passer d'une matière à l'autre. C'est ça que je trouve chouette dans les décors et je pense aussi que ce qui m'a attirée au départ, c'était le fait de ne pas me cantonner à une matière. Et je pense que ça a mis très longtemps aussi jusqu'à ce que j'arrive à choisir par exemple entre le bois et le métal, parce que j'avais l'impression qu'il fallait absolument choisir. En fait, c'est un peu vrai. Mais je trouve que c'est dur aussi, une fois qu'on nous a mis un peu dans le travail d'une matière, je trouve que ce n'est pas évident d'en sortir dans beaucoup d'ateliers.

• Speaker #3

  Jusqu'à quand vous l'accompagnez,

• Speaker #2

  ce décor ? Jusqu'au bout ! Jusqu'au début de l'étape de création.

• Speaker #1

  Nous on fait le montage tous les deux. Du coup, ça c'est cool aussi de pouvoir voir le décor qu'on a construit en situation, et genre dans l'opéra.

• Speaker #3

  A aucun moment ici en fait il est construit en entier. C'est que des morceaux et ils s'assemblent à l'opéra.

• Speaker #2

  Là par exemple, la semaine passée on a assemblé toute la première structure. Je sais pas si t'étais déjà là ou pas.

• Speaker #1

  Oui mais élément par élément.

• Speaker #2

  On a monté tout le promontoire une fois, puis après il est démonté pour partir en peinture, une fois qu'on est sûr qu'il n'y a plus de cidre à faire dessus et que c'est bon, ça fonctionne. On est quand même obligé de le monter à blanc ici dans l'atelier pour être sûr que ça fonctionne. Après on démonte, on fait partir en déco et après c'est remonté au plateau. Et là ça va être la même chose avec le deuxième élément, on va quand même le monter une première fois ici, avant qu'il soit monté au plateau. En fait on n'en voit jamais les choses. Au plateau sont d'abord les montées abondantes. Il faut vérifier que ça fonctionne. On construit toujours en plein de pièces qui après viennent s'assembler par boulonnage. Donc il faut quand même qu'on vérifie que ça fonctionne bien. Là par exemple, le deuxième élément qu'on est en train de construire, c'est comme une sorte de demi-cercle. Et en fait c'est un demi-cercle, donc c'est ces deux escaliers là avec la plateforme etc. Et bien ça va être sur des roues et ça va suivre la tournette en venant un peu toujours vers la tournette pour être sûr que ça ne parte pas complètement au lointain. Et en gros, ça forcément on va d'abord le tester ici pour voir si ça fonctionne bien.

• Speaker #3

  Vous avez la chance d'aller jusqu'à l'Opéra pour assembler,

• Speaker #1

  monter ce que vous avez fait du coup. Ouais, ça on s'est dit entre nous, parce que du coup on est plusieurs en serrurerie comme je disais tout à l'heure, et on se dit un peu, on s'organise un peu pour qui veut faire quoi. Là on a choisi, Lynn et moi, d'y aller et on s'est organisé avec les autres et c'était bien comme ça. Mais effectivement c'est une chance de pouvoir le faire et de voir comment ce que ça donne en vrai et après on est invité à la générale du coup on voit de toute façon même en jeu ce que ça donne mais c'est bien d'avoir les étapes de construction de A à Z.

• Speaker #2

  Moi j'ai toujours un trac avant le premier montage à blanc mais bah ouais c'est pour voir si ça fonctionne quoi si il faut

• Speaker #1

  percer des trous si machin si tous les techniciens vont nous regarder en mode c'est une fois de faute ouais voilà si t'es super en lâché ou pas c'est un arrivé avec ce que vous faites vous moi je pense c'est pas tant ça le risque c'est plutôt les Je sais pas, il manque un élément, là c'est mal meulé du coup c'est un peu blessant mais la force des soudures, moi ça m'inquiète pas trop.

• Speaker #2

  Ou alors que par exemple ça a déformé la pièce à la soudure.

• Speaker #1

  Oui, et du coup ça s'en mange mal avec l'autre élément.

• Speaker #2

  Du coup il faut il faut réchauffer la pièce pour la remettre bien droite dans l'autre sens etc. Ça peut arriver par exemple.

• Speaker #1

  On vient au montage surtout parce qu'en fait c'est les premiers moments, le décor après il va être démonté et remonté un un certain nombre de fois. suivant le nombre de représentations qu'il y a. Mais nous on vient au premier montage aussi parce que justement pour voir si tout se passe bien, pour transmettre ce qu'on sait parce qu'on l'a construit.

• Speaker #2

  Pour faire le vote d'emploi quoi en fait.

• Speaker #1

  Ouais c'est ça, pour faire la transmission et si jamais il y a des modifs à faire aussi, revenir en atelier ou faire sur place.

• Speaker #2

  Mais ça après j'ai l'impression que c'est un peu le rôle du régisseur ou de la régisseuse de...

• Speaker #1

  Ouais, bah dans une certaine mesure quoi.

• Speaker #2

  D'avoir, enfin de regrouper ces informations puis de partir en tournée avec et de les...

• Speaker #0

  Vous avez découvert le travail des serrurières et notamment celui de Magali et Lynn que je remercie pour leur accueil. Vous pouvez retrouver cet épisode. et l'ensemble de ceux de la série L'Envers du Décor sur le site de l'Opéra de Rennes, une série de podcasts réalisés par Arnaud Vassemer.