Speaker #0Salut à vous !
Et bienvenue à tous les autres.
Je ne sais pas si je vous ai déjà parlé de M. Mois-le-Neu. M. Mois-le-Neu est le concierge de mon immeuble. C'est aussi le concierge de votre immeuble si vous habitez le même immeuble que moi. Si vous n'habitez pas notre immeuble... Vous connaissez peut-être M. Moineux à travers ses activités extra-professionnelles. Car M. Moineux est le secrétaire adjoint de l'association des boulistes du quartier. Si, si, si, si, si, si, si. Ah, si. Ah, c'est quelqu'un d'un de nos consciences. Mais... M. Moëlle ne naît absolument pas le sujet de ma chronique du jour. De quoi donc voulais-je vous parler ? Alors là, aucune idée, aucune idée. Laissez-moi regarder dans mes papiers. Ah ben oui, oui, oui, ben oui, évidemment. Oui, excusez-moi, oui, la mémoire, la mémoire. Paul Claudel disait, j'ai une mémoire excellente. mais je ne me souviens pas des choses comme elles sont. Et finalement, c'est exactement ça. Avec une variable supplémentaire toutefois, que vous comprendrez lorsque vous aurez mon âge. Car avec l'âge, viennent non seulement la sagesse, l'expérience, le recul, mais aussi les trous. Et avec le temps, les trous de mémoire deviennent de plus en plus profonds. Vous connaissez le bon mot de Socrate, celui qu'on apprend lors du premier cours de philosophie en terminale. Mais si, mais si, mais si. Socrate, il disait, la seule chose que je sais, c'est que je ne sais rien. Ok, ok, Socrate. Mais, pour se rapprocher de notre sujet, tu, toi, Socrate, tu aurais dû dire, et je sais aussi que je ne sais plus rien. Je ne sais plus rien. Le peu que j'ai su, je ne le sais plus. Car il arrive un jour où l'on touche cette limite ultime, au-delà de laquelle, je le cite toujours, Tout paraît nouveau à celui qui n'a plus de mémoire. Et que Pierre Desproges me déshérite si je me souviens de qui a écrit cette phrase. Tout paraît nouveau à celui qui n'a plus de mémoire. Alors là, en tout cas, ce n'est pas moi. Enfin, je crois. Bon, voilà, le décor est planté, nous allons parler de la mémoire. Combien de sens différent à ce mot, à votre avis ? Le mot mémoire. J'ouvre le dictionnaire. Si je retrouve mon dictionnaire... Ah si, le voilà. Oui, c'est bon. J'ouvre le dictionnaire. Mémoire, mémoire, mémoire. Oula ! Si c'est au masculin, un mémoire, quatre sens. Et si c'est au féminin, une mémoire, cinq sens. Neuf en tout, donc. On s'y perd. Mon, ma, mémoire, non, on ne sait pas. Alors pour une fois, je ne vais pas citer le dictionnaire. On va y aller à notre façon. Ça va être beaucoup plus clair, vous allez voir. Car comme disait La Rochefoucauld, tout le monde se plaint de sa mémoire et personne ne se plaint de son jugement. Ou, comme disait l'autre, une bonne conscience est souvent le signe d'une mauvaise mémoire. Oui, c'est bien ça. Le temps, il floute la limite entre mémoire et vérité. Et Benjamin Franklin, l'énorme Benjamin Franklin, quasiment une girafe à lui tout seul, Benjamin Franklin. Bref, lui, il nous disait, « Rien n'est plus responsable de bons vieux souvenirs qu'une mauvaise mémoire. » Et ça, c'est sûr. La mémoire nous joue des tours. C'est même une grande magicienne notre mémoire. C'est le bon taux des souvenirs. T'es là, hop hop hop hop, t'es plus là. t'es là, t'es plus là, t'es plus là, t'es plus là, t'es plus là, t'es là Ah ! Certains souvenirs disparaissent, d'autres prennent une place qu'ils n'avaient pas. Certaines couleurs restent vives, très vives même, et puis d'autres s'affadissent, disparaissent d'intignifiance. Ou bien c'est ce que nous croyons, car elles sont bien là, rangées, tout au fond, prêtes à ressurgir, au détour d'une photo, d'une association d'idées, ou d'un lapsus freudien. Et d'autres souvenirs se créent de toutes pièces. Ça existe aussi. Vous, je ne sais pas, mais moi, je ne vous ai pas croisé ce jour-là. Moi, je m'en souviens très bien. Moi, j'ai fait la fête le soir de la prise de la Bastille. Je me revois encore, un peu plus jeune, mais beaucoup plus naïf. Ah, ça ira, ça ira. Direction paradis, changement à Bastille. Mais... suite à un mouvement de grève d'une partie du personnel le prochain départ pour la station paradis sera dans trois cents ans merci de votre patience et c'est ainsi que le caramel devint fou