Speaker #0Quelles sont les différences entre les protestants et les catholiques sur l'Église ? C'est juste après le générique ! Je m'appelle Carolina Costa, je suis auteure théologienne, pasteur de l'Église protestante réformée, et aujourd'hui je m'intéresse à cette question, la différence entre protestants et catholiques sur la particularité de l'Église. Avant de poursuivre, j'aimerais remercier ici l'Église unie du Canada. qui soutient ma mission et mon témoignage sur le web en sponsorisant cette vidéo. Vous me demandez souvent, mais où est-ce que je peux trouver une église comme la tienne, Carolina ? Parce que moi, je n'habite pas là où tu habites, évidemment. Eh bien, une bonne nouvelle, c'est par exemple l'église unique du Canada. Si tu habites de ce côté-là de l'Atlantique, tu trouveras forcément dans cette église une communauté locale pour t'accueillir et partager avec eux. Tout d'abord parce que cette église, elle est issue des protestants huguenots français qui est exactement la même branche que l'église réformée de Suisse dans laquelle moi je suis. Ensuite, parce qu'ils sont engagés depuis très longtemps sur les engagements de justice sociale, pour l'égalité, pour l'inclusivité et pour les personnes LGBTIQ+. Donc, c'est un lieu vraiment très safe et très encourageant aussi pour cette dynamique-là. En résumé, je pense que là, tu le comprends. Si je devais être pasteur un jour au Canada, ce serait forcément dans l'Église Unie du Canada. Donc, vous pouvez y aller en toute sécurité. Vous pouvez même y aller de ma part et ils vous feront un très bon accueil. Vous allez trouver tous les liens. au bas de cette vidéo si cela vous intéresse. Nous en revenons maintenant à cette question de la différence entre les protestants et catholiques. Pour bien comprendre cette différence entre protestants et catholiques sur l'Église, il nous faut remonter à l'origine de ce qu'est l'Église et donc forcément à Jésus lui-même. Soit dit en passant, rien que cette démarche de faire un retour aux sources et à l'origine dans les écrits bibliques, ça c'est typiquement protestant. Alors est-ce que l'Église existait du vivant de Jésus ? Bah non, évidemment. Ou alors en tout cas pas du tout comme on l'entend nous aujourd'hui. Pourquoi ? D'abord pour la simple et bonne raison que Jésus n'était pas chrétien puisqu'il était lui-même juif. Son nom d'ailleurs Jésus en hébreu c'est Yeshua. Et les premiers disciples de Jésus étaient juifs eux aussi bien évidemment. Et donc ils pratiquaient le rite, la ritualité, leurs prières à la manière juive de l'époque. Et où vont les juifs pour pratiquer leur foi ? A l'église non, ou en tout cas pas tout à fait. Je m'explique. Le mot ecclésia en grec désigne le mot église en français que nous connaissons toutes et tous. Il était aussi utilisé dans la Bible hébraïque. Attention, là, il y a un petit moment technique. La Bible hébraïque, c'est la Torah, c'est la Bible en hébreu. C'est là où il y a la Genèse, l'Exode, l'Epsomme, etc. Cette Bible-là, dans le premier siècle de Jésus, était écrite en hébreu. Il y a des écrits, des manuscrits en hébreu de l'époque, mais aussi en grec. Et cette version-là s'appelle la Septante. C'est-à-dire que des Juifs de l'époque étaient aussi hélénisés, c'est-à-dire qu'ils parlaient grec. Ils l'utilisaient aussi dans cette version-là. Et ce mot ? « Ecclesia » en grec est un équivalent du mot hébreu « Kaal » en hébreu et qui désigne en fait la même réalité pour l'époque, c'est-à-dire bien avant que Jésus arrive, désigne simplement une communauté, un rassemblement de personnes pour le culte. Ce qu'en d'autres termes, on appellera par la suite une synagogue. Et si nous lisons un extrait dans l'évangile de Marc au chapitre 1, le verset 21, nous allons peut-être être surpris de lire que Jésus et ses disciples arrivent à la ville de Capharnaüm et le jour du Shabbat, On dit le sabbat en français, mais c'est bien le Shabbat juif. Le jour du Shabbat, Jésus ou Yeshua entre dans, alors par exemple dans ma version ici, c'est écrit dans la maison de prière, et ils se mettent à enseigner. Mais la maison de prière, en hébreu ou en grec, c'est synagogène, c'est-à-dire vraiment la synagogue. C'est-à-dire que Jésus lui-même enseigne dans la synagogue. C'est très intéressant parce qu'il y a des chercheurs, des historiens qui... même l'hypothèse de dire que Jésus aurait été lui-même un pharisien du fait que précisément il a le droit d'entrer dans une synagogue et d'enseigner. Et ce, les pharisiens peuvent le faire. Ce qui est intéressant dans cette théorie, d'ailleurs, c'est de comprendre que Jésus était probablement un pharisien, en tout cas un rabbin, et que c'était probablement un rabbin progressiste qui voulait lui-même réformer la judéité, réformer la religion d'Israël de l'époque. Et c'est évidemment ça qui va lui causer un certain nombre d'ennuis, comme on le sait. Et parce que c'est un progressiste, on pourrait dire Jésus de l'époque, il ne se contente pas d'enseigner dans les synagogues. Il va aussi dans les rues, sur les places publiques, dans les maisons et dans les puits. Et peut-être que quand je vous dis ça, vous avez tout d'un coup en mémoire le célèbre passage de Jean avec le passage de la Samaritaine où Jésus s'arrête justement à un puits et va enseigner une femme. Et cette femme n'est pas n'importe laquelle, c'est une Samaritaine. Alors tiens ! Petit aparté, parce que c'est intéressant de découvrir que justement, dans le judaïsme même du premier siècle de Jésus, il y a justement déjà différents courants. C'est-à-dire qu'il y a les pharisiens et il y a les samaritains, par exemple. Et donc, c'est un peu l'équivalent des protestants et des catholiques de l'époque. Ils partagent la même foi d'Israël, mais ils ont des interprétations et des sensibilités différentes. Donc, ce qui est intéressant, c'est d'aller évidemment regarder Jésus qui lui rencontre. une femme juive, mais d'une autre confession juive, on pourrait dire. Et voici un petit brib de cet échange entre Jésus et la Samaritaine, qui justement lui demande « Nos ancêtres, les Samaritains, ont adoré Dieu sur cette montagne sacrée, et vous, les Juifs, vous dites que le lieu où il faut adorer, c'est Jérusalem. » Et Jésus répond, sous-entendu, où est-ce qu'il faut adorer Dieu ? Et Jésus répond, crois-moi, fais-moi confiance, le moment arrive où vous n'irez plus ni sur cette montagne, ni à Jérusalem pour adorer le Père. Le moment est arrivé et c'est maintenant où Dieu donne son esprit, son esprit saint. Alors celles et ceux qui adorent vraiment le Père le feront en esprit et en vérité. C'est intéressant de voir que Jésus lui-même répond par... Répond de cette manière, car finalement, en esprit, en vérité, ça enlève tout le côté institutionnel, organisationnel, dogmatique. On est assez loin finalement du concept d'église, non ? Il est donc très important de comprendre en amont que les premiers adeptes de Jésus sont des Juifs et qu'ils vont le rester aussi après sa mort. Mais qu'est-ce qui va se passer au fur et à mesure ? Les Juifs, qui sont les adeptes de Jésus, qu'on appelle les adeptes de la voix de Jésus, vont continuer d'aller à la synagogue. Mais il va y avoir des... et des disputes qui vont mener jusqu'à finalement l'expulsion de ceux qu'on appellera ensuite les chrétiens. Mais le mot chrétien va venir des romains. C'est les romains qui vont lancer un sobriquet en disant « oui, c'est des chrestos, c'est des adeptes du Christ » . Mais c'est un sobriquet, c'est comme une petite insulte, on va dire. Mais finalement, les chrétiens vont s'approprier ce nom-là et s'appeler des chrétiens. Mais au départ, les adeptes de Jésus, entre eux, s'appelaient soit les adeptes de la voie, soit les bien-aimés, soit les appelés. Donc on voit bien qu'au démarrage, déjà, il y a une séparation qui va se faire au sein même du judaïsme. Mais on vient de là, les églises, nos églises viennent de cette histoire-là. Et cette séparation va donner précisément différentes interprétations aussi du Christ, de Jésus, de sa vie, de son enseignement. Et c'est la raison pour laquelle vous allez trouver quatre évangiles différents. Et là, je ne vais même pas parler des apocryphes. Je vais vraiment même rester sur les quatre évangiles qui ont des différences parfois. Et ça, c'est dû. au fait que les différentes communautés ont des sensibilités déjà différentes. Donc on pourrait presque dire qu'il y a les chrétiens de Matthieu, les chrétiens de Jean, les chrétiens de Luc et les chrétiens de Marc. Si je fais maintenant un grand saut dans le temps, évidemment ce qui va se jouer dans le temps, c'est l'interprétation autour de ces récits. Alors bien sûr qu'au départ, on a l'Église qui va se constituer petit à petit dans les premiers siècles et qui va former cette grande Église universelle, c'est-à-dire... catholique, puisque catholique en grec signifie universel. Donc on a la première branche qui va effectivement commencer à s'organiser, se cadrer avec les conciles et devenir la grande Église catholique. Mais dans le temps, tout d'un coup, il y a une nouvelle branche qui va partir, je ne vais pas en parler dans cette vidéo, mais c'est la branche orthodoxe qui va vivre une première scission avec l'Église catholique. Donc déjà, l'Église va se scinder en deux. Puis ensuite, en remontant un peu plus loin, quand on arrive au XVIe siècle, il y a une nouvelle scission qui va faire naître les protestants. Mais il faut aussi là se rappeler que Martin Luther, qui est le moine réformateur, qui a créé en fait ce mouvement, l'a fait malgré lui, puisque Martin Luther était un catholique lui-même, évidemment, un moine catholique romain, qui voulait lui-même aussi réformer et dénoncer les excès de l'Église catholique au XVIe siècle, mais malheureusement il s'est fait excommunier. Il a donc été rejeté par l'Église et donc de fait a créé un nouveau mouvement qu'on a appelé le mouvement de la réforme, le mouvement des protestants. qui contrairement à ce qu'on dit ne protestait pas, puisque le mot protestare en latin ne signifie pas protester comme on l'entend en français aujourd'hui, mais qui signifiait affirmer, puisque Martin Luther affirmait la grâce première de Dieu sur les œuvres. Et ça c'est une grande différence entre les catholiques et les protestants, même si avec le temps aujourd'hui ces différences commencent même à s'atténuer finalement. Et donc, dans le mouvement des protestants, de créer une nouvelle Église, forcément que cela allait changer beaucoup de choses aussi sur le plan doctrinal et donc forcément aussi sur la vision et la perception de ce qu'est l'Église. Alors, pour l'Église catholique, l'Église est une, elle est universelle, elle est sainte. Et son objectif, c'est l'unité, c'est-à-dire de rassembler au fond tous les chrétiens et les chrétiennes autour et au centre de cette Église catholique. C'est pourquoi pendant des siècles et des siècles, l'Église catholique n'a pas reconnu le fait que d'autres églises existent autour d'elle, puisqu'elle s'estime être la seule détentrice de la vraie doctrine. C'est tout récemment que le pape François vient de reconnaître pour la première fois la légitimité des autres églises. Mais en son sein, l'Église catholique a quand même ce dogme de l'infaillibilité papale, par exemple, c'est-à-dire que tout ce que dit le pape et tout ce que dit l'Église est vrai. Et l'Église se base sur deux choses, elle se base sur la Bible et sur la tradition, c'est-à-dire tous les pères de l'Église qui vont suivre après les écrits bibliques. Et ça, c'est déjà une grande différence aussi pour l'Église protestante, qui, vous l'avez entendu, dans la démarche des protestants, il y a toujours ce retour aux sources, et le retour aux sources, c'est de s'appuyer uniquement sur la Bible, sur les Écritures. Et la grande différence, c'est justement l'interprétation des Écritures. Donc, que va dire l'Église catholique ? Elle va estimer qu'en fait, sa lignée, elle est depuis les promis disciples, c'est-à-dire qu'elle est une émanation directe de Jésus à travers Pierre, et ils vont s'appuyer sur ce fameux verset que vous connaissez certainement, dans l'Évangile de Matthieu, chapitre 16, le verset 18, qui écrit « Tu es Pierre, et sur cette pierre, je bâtirai mon Église, et la puissance de la mort ne pourra rien contre elle, je te donnerai les clés. » du royaume des cieux. Donc l'Église catholique se fonde vraiment aussi sur ce verset pour dire, voilà, Pierre est le disciple sur lequel s'est construit l'Église et ça a été institué par le Christ. D'où cette sacralité de l'Église pour les catholiques romains. Mais pour un Martin Luther, lui, il va s'appuyer sur d'autres parties des évangiles, notamment par exemple en disant, mais au fond l'Église n'existe que parce que quelques-uns sont rassemblés. au nom du Christ pour partager la parole, pour partager des sacrements comme la Sainte Seine ou le baptême, qui sont les deux seuls sacrements de l'Église protestante, là où l'Église catholique en a sept. Ça, c'est une autre vidéo. Donc, par exemple, pour Martin Luther, pour les protestants, on va dire, il y a une autre parole de Jésus. C'est dans l'Évangile de Matthieu, chapitre 18, verset 20, qui dit « Là où deux ou trois sont rassemblés en mon nom, je suis au milieu d'eux, ou je suis en eux. » Donc, l'Église, c'est déjà là où certains... Juste deux ou trois sont rassemblés pour partager par exemple la parole ou la scène. Ce qui veut dire aussi que pour les protestants, toutes et tous, et ça Martin Luther va le dire aussi, toutes et tous nous sommes prêtres, il n'y a pas de distinction entre les croyantes et les croyants. À partir du moment où nous avons été baptisés, nous pouvons en fait interpréter la parole, nous pouvons la partager, nous pouvons l'interpréter, nous pouvons même la prêcher. Et c'est pourquoi dans le prolongement, il y aura des hommes et des femmes. Donc une vraie horizontalité dans l'Église protestante. Dans l'Église catholique, c'est complètement différent, c'est hiérarchisé, puisque Pierre, ça va être la succession de Pierre, ce sont bien sûr les papes. Et le pape est le garant de l'unité, de la communion de l'Église, et il est aussi le chef, et c'est aussi un chef d'État, ne l'oublions pas, puisque le Vatican, c'est un État au sein du monde. Donc c'est le chef de l'Église, et puis ensuite, il y aura, d'une manière pyramidale, il y aura le pape, il y aura les cardinaux, puis les évêques, puis les prêtres, les diacres, etc., et les laïcs. Ce n'est pas pyramidal et puis c'est une église exclusivement masculine, puisqu'on ne peut être prêtre qu'en étant un homme. Pour la simple et bonne raison valable que disent l'église catholique romaine, c'est de dire que les disciples, les douze, étaient peu des hommes et que Jésus n'était qu'un homme et que donc, pour vivre la messe notamment, il faut nécessairement uniquement un homme pour le faire. Pour conclure, à mon avis, la force des protestants dans leur pluralisme, c'est qu'effectivement on a une pluralité de tendances. protestants, puisqu'on va avoir des églises luthériennes à partir de Martin Luther, Anglicane, presbytérienne, pentecôtiste, évangélique, on va avoir une multitude d'églises, c'est vrai. Au fond, n'importe qui peut créer une église, ça c'est une sorte de force aussi. Elle peut s'adapter aussi à la culture, à l'environnement des personnes qui l'habitent, qui l'animent. Et par conséquent, si tu ne trouves pas une église qui te convient, tu pourras en trouver une autre. Mais la faiblesse, c'est quand tu demandes « que pense l'église protestante de tel ou tel sujet ? » tu auras une multiplicité de voix. Et donc, ce sera difficile de dire « les protestants pensent que » ou « les protestants croient que » parce qu'il y aura pratiquement autant d'interprétations presque que de protestants, j'aurais envie de dire. La force de l'Église catholique romaine, c'est précisément le repère mondial. C'est-à-dire qu'où que tu ailles dans le monde, tu rentres dans n'importe quelle église, tu vas trouver une messe identique à celle que tu connaîtras dans ta propre langue. Donc ça, c'est une force pour moi, d'avoir cette espèce d'unité dans le monde et de repère où les gens peuvent vraiment se retrouver. et très vite se sentir en fraternité, en sororité, parce qu'ils partagent cette même culture liturgique. La faiblesse, ce sont bien sûr tous les abus qui sont heureusement dénoncés toutes ces dernières années et qui sont certainement dus à cette manière pyramidale de fonctionner. Et puis surtout, que la moitié de l'humanité n'y est pas représentée, à savoir les femmes. Mais les choses progressent, le dialogue œcuménique progresse beaucoup. Et par exemple, je donnerai un exemple ici, chaque année depuis 1935, du 18 au 25 janvier, a lieu la semaine de l'unité. et c'est un mouvement mondial. Toutes les églises du monde, protestantes, orthodoxes, catholiques, se réunissent autour d'une seule et même liturgie qui est chaque fois portée par une communauté œcuménique dans le monde. « Écuménique » signifie précisément ce partage entre les chrétiens et cette tentative de dialoguer et d'avancer vers l'unité. Et on salue ici cette initiative qui permet à tous les chrétiens et les chrétiennes de vivre un temps de prière ensemble et d'avancer vers plus de communion. Je peux peut-être conclure en simplement vous disant que moi-même, je suis une chrétienne. J'ai mon père catholique romain, donc je connais très bien cette tradition et je l'apprécie énormément pour beaucoup de choses. Et puis ma mère, elle est luthérienne danoise et moi je suis pasteur dans une église réformée. Donc vous voyez, le cuménisme peut être vécu et incarné par chacun de nous et je peux témoigner que c'est une grande richesse si on sait découvrir ce qui est beau et bon chez les uns et les autres. Tu pourras trouver aussi la lettre hebdomadaire que j'envoie chaque semaine dans ta boîte email. Tu as toutes les indications ici en dessous. Et si tu as envie d'en savoir plus, évidemment, n'hésite pas à aller consulter les autres vidéos et le blog sur mon site internet. À très bientôt ! Chères auditrices, chers auditeurs, chères sœurs et frères, si vous voulez retrouver tous mes épisodes passés et ceux à venir, pensez à vous abonner sur votre plateforme d'écoute, par exemple Spotify, Apple Podcasts ou Deezer. Merci à toute l'équipe bénie des Ataprod qui a fabriqué cet épisode. Si tu as aimé, n'hésite pas à me mettre 5 étoiles. Et pour plus d'informations, on se retrouve sur carolina-costa.com. Soyez bénis les amis !