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VISION #80 — GUILLAUME BLOT | Capturer l’âme des lieux, révéler l’humain cover
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VISION #80 — GUILLAUME BLOT | Capturer l’âme des lieux, révéler l’humain

VISION #80 — GUILLAUME BLOT | Capturer l’âme des lieux, révéler l’humain

35min |18/05/2025
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35min |18/05/2025
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Description

Souvent coiffé d’un bob marin et arborant un style vestimentaire qui lui est propre, Guillaume Blot est une personne que l'on reconnait de loin. Photographe documentaire, Guillaume est passionné par les moments authentiques du quotidien, qu’il immortalise la plupart du temps au flash.


Dans cet épisode, il nous emmène dans un fascinant tour de France : des buvettes de stades aux rades, jusqu’à son dernier projet, où il part à la rencontre des chauffeurs routiers et de leurs fameux relais. Guillaume aime maîtriser ses propos et sa communication, mais ses projets sont avant tout profondément humains, à son image.


🤝 Partenaire


MPB, la plus grande plateforme en ligne au monde pour acheter, vendre et échanger du matériel photo et vidéo d’occasion.


🎙 Crédits


Un podcast réalisé et écrit par Aliocha Boi, produit par Noyau.studio, monté et mixé par Virgile Loiseau et mis en musique par Charlie Janiaut.


✨ Liens  


Instagram - Vision(s)  

Site - Vision(s)



Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Une production à Noyaux Studios.

  • Speaker #1

    Salut c'est Aliocha, vous écoutez Vision, le podcast qui donne nos images. Nous avons la chance cette saison d'être accompagnés à nouveau par MPB, qui est la plus grande plateforme au monde pour acheter, vendre et échanger du matériel photo et vidéo d'occasion, et surtout de manière fiable. Pour vous donner un exemple précis, je viens de vendre un appareil photo numérique que je n'utilisais plus du tout. Je l'ai tout simplement fait estimer sur le site de MPB, ça prend 30 secondes. Ensuite je l'ai envoyé, la livraison est gratuite, et l'équipe spécialiste produit de MPB C'est vraiment occuper du reste, c'est-à-dire d'inspecter avec soin le matériel et de le mettre en ligne. Voilà, c'est aussi simple que ça. Je vous conseille vraiment cette expérience, que ce soit au niveau de la vente, mais aussi de l'achat. Merci encore à MPB de nous accompagner pour cette nouvelle saison. Je vous souhaite, quant à moi, une très bonne écoute.

  • Speaker #0

    J'aimerais vous parler de la photo de Johnny, c'est un chauffeur routier incroyable rencontré l'été dernier au Resto Routier Le Tarin, c'est à La Bati en Savoie. Il est d'ailleurs devenu l'icône de la couverture du livre Resto Routier. J'ai adoré passer ces 45 minutes de pause réglementaire avec lui. Il est arrivé avec son camion rouge et jaune sur le parking, il s'est dirigé vers le comptoir et on a tout de suite papoté avec les deux postières, Aurore et Julie. Et lui, il m'a vraiment raconté son amour de la route, du western. Pourquoi son surnom Johnny ? Parce que c'est pas vraiment son vrai prénom, mais ça je peux pas vraiment, disons, révéler l'officiel. Et puis il m'a proposé d'aller voir son camion et en fait, au moment où je le vois grimper dans la cabine, là je visualise la photo. Et je lui dis Johnny, ne bouge surtout pas, regarde-moi. Et c'est à ce moment-là que je le photographie avec le flash. Et en fait, c'est une photo forte pour moi, car en fait, elle me rappelle avant toute cette rencontre, et tout ce moment passé autour du café, au comptoir et sur le parking, avec un John Wayne en plus, qui était affiché en miniature dans son camion. Et je me souviens, comme s'il nous regardait papoter sur le gravier, ça m'a beaucoup marqué ce moment avec lui. Je m'appelle Guillaume Blot, je suis photographe documentaire. J'ai grandi à Toiré-sur-Loire, un petit village à côté de Nantes, jusqu'à mes 20 ans, puis je suis parti ensuite à Marseille à ce moment-là, et puis Paris pour terminer mes études au CELSA à la Sorbonne, avant ensuite de me former un peu plus à la photographie en continu au Goublin notamment. Et aujourd'hui j'habite à côté de Fontainebleau, en Sud-Sénémarne. Ma mère est prof de techno, mon père est cheminot. Je pense qu'en tout cas, le train, j'ai, grâce à mon père en particulier, pu vraiment commencer mes tours de France dès tout petit, grâce aux facilités de circulation que j'avais. Et d'ailleurs, ma première série Buvette, en 2015, je la réalise vraiment parce que c'est mon dernière année de train quasiment gratuit. Et je veux célébrer cette dernière année. Et c'est un moment où j'aime beaucoup, disons en particulier les avant-matchs de foot. Et donc, je me lance dans un grand Tour de France des stades avec l'idée de chroniquer des buvettes que l'on peut y trouver autour pour voir ce que chacun mange en fonction des villes. donc c'est vrai que ça m'a vraiment Je dirais lancer, en tout cas soutien familial. Dans mes premiers projets, ils ont toujours été présents avec moi, au-delà du train en fait. Ça a été vraiment mes parents de croire en mes projets, mes premiers projets notamment Buvette puis Rad ensuite. C'est vraiment les premiers qui vont au bureau de tabac d'ailleurs, acheter un exemplaire du monde quand j'ai un sujet qui est là. Donc moi ça me touche vraiment, je dirais ce soutien d'avoir des parents vraiment alliés. Je crois que ce qui m'a vraiment donné envie de faire de la photo, et en tout cas les premières images que j'ai, elles sont finalement dans mes yeux où je suis tout petit, mon père m'emmène au stade à la Beaujoire à Nantes, et je vois toutes ces écharpes de couleurs, ces frites déjà, ces sandwiches américains, ces cocas, ces bières, et en fait j'adore cet univers, ces odeurs en plus, ces bruits un peu électrogènes, le speaker qui annonce la composition de... de mon club de cœur. Et donc, je pense que ça m'a vraiment... C'est vraiment imprimé en moi, cet univers des avant-matchs. Donc, ces images que j'avais finalement dans les yeux, je les ai transformées en première série documentaire en 2015 avec Buvette en me rendant dans les différents stades de France et évidemment, de nouveau à Nantes. C'est fou, le foot. J'avoue, je regarde encore un peu les scores. Je pense que ça habite... Comme c'est mes premières émotions fortes, je me souviens des... C'est mes frites de Proust, les avant-matchs avec mon père partagé ce moment, de voir les buts, de se lever avec une foule en entier, ça m'a vraiment beaucoup marqué. C'est de l'ordre de l'épidermique et je pense que c'est pour ça que ça m'habite encore aujourd'hui ce sport. Ce qui m'influence, ça évolue un petit peu tout le temps, moi je dirais qu'en photographie évidemment c'est tout l'imaginaire très coloré, très flashé, de Lars Thunbjörk, de Martin Parr. Dans un autre registre, je dirais que dans l'absurde malin, je l'appelle comme ça, j'aime beaucoup le travail de l'artiste canadienne Gabbois, qui est très dans la transformation avec beaucoup d'humour, d'objets du quotidien. Et visuellement, je trouve que ça claque. Gabbois, par exemple, il y a une photo récente qui m'a marqué, c'est dans une voiture, dans la boîte à gants, elle l'a tirée et en fait, ça devient une forme de plateau d'huître. Donc il y a un peu ce côté... improbable, très coloré, assez drôle et qui moi me parle beaucoup notamment pour ma série la plus récréative qui s'appelle Légende. Et une autre source d'inspiration, documentaire vidéo, j'admire particulièrement les oeuvres du réel d'Alice Diop et d'Alain Cavalier aussi avec tous ses portraits XL notamment. Je dirais que mon travail flash avec un humour tendre entre la culture populaire française et l'humain dans toute sa poésie brute. Mes images visent à montrer la beauté du quotidien et à raconter des histoires que je qualifie de merveilleusement normales. Et l'ensemble est visible à travers les différents projets que j'ai pu mener depuis Buvette, ma première série sur l'univers des friteries autour des stades, de Rad qui s'aventure dans les bistrots les plus authentiques du pays. et plus récemment de restaurants routiers, sur ces relais en couleur qui offrent repas et repos aux chauffeurs et chauffeuses. Je travaille également sur des projets plus intimes, liés au corps intime comme Jeune Naturiste, sur les naturistes et les franges entre 20 et 40 ans, une série qui a pu être exposée au Mucem en 2024, et Partie Intime également qui vise à sensibiliser sur la contraception masculine. dite thermique. Donc mon travail il a en dix ans je crois bien évolué mais toujours en lien avec des univers, des expériences que j'ai pu moi même connaître. Par exemple je fais cette série sur les jeunes naturistes parce que je commence en 2018 moi même à faire du naturisme et donc ça m'intéressait de documenter ces motivations quand on est jeune alors qu'on a peut-être en tête un imaginaire de plutôt de quinquagénaire en tongs au camping si je schématise un peu l'image d'épinal du naturiste alors que évidemment pas du tout, c'est très diversifié. Partie intime, c'est parce que je commence à me contracepter à ce moment-là et que ça me permet de mieux pousser mes recherches et de donner peut-être aussi des informations que moi je n'avais pas forcément trouvées à ce moment-là. Et puis, rad, resto routier, c'est des univers que j'ai pu côtoyer lors de mes reportages, dans ma vie aussi au quotidien quand je me pose avec mes amis à un café ou autre. Et ma photo en fait elle a aussi pas mal évolué d'un point de vue flash. Je l'utilise de manière beaucoup plus brute, plus franche ces dernières années, ce qui était moins le cas avant. J'ai fait ce choix pour vraiment, à mon sens, apporter plus de peps à l'image, plus de piment, et puis mettre davantage même en lumière, avec cette lumière un peu... Très brut, les personnes photographiées, je trouve que ça rehausse vraiment un ensemble, un univers et ça permet de révéler toute la vie des personnes que je photographie. Disons que l'expérimentation s'est faite au fur et à mesure où le flash, j'ai essayé de passer en mode manuel, à la place du TTL qui apporte une lumière beaucoup plus douce, maîtrisée. Moi j'assume totalement ce côté où je mets en puissance maximale mon flash. Je joue après plutôt sur les réglages de mon appareil photo pour diminuer ou pas l'intensité. Je retouche aussi en post-prod avec un peu cet effet vignettage qui permet d'avoir cet halo autour des détails, des portraits, des personnes. Et oui, c'est vraiment en tentant, en n'ayant pas peur parfois de carrément faire des cheveux de tout claquer parce que la lumière était beaucoup trop brute. L'avantage du numérique, c'est qu'on peut quand même voir en temps réel un petit peu ce que ça donne sur l'écran et c'est en tâtonnant comme ça qu'au fur et à mesure, je me sentis à l'aise avec cette lumière peut-être plus crue. C'est devenu une forme d'élément caractéristique de mon travail aujourd'hui en complément d'autres photos que je... Je fais avec une lumière plus douce et je trouve que l'ensemble se combine bien pour raconter les histoires que je veux aujourd'hui. R.A.T. c'est un projet au long cours qui est né en 2019. En fait je passais du temps dans les cafés comme je pense beaucoup d'entre nous, entre deux trains, à travailler, à voir mes copaines. Et en fait j'y voyais des scènes de vie incroyables, j'y entendais des punchlines folles pour ainsi dire. et donc j'ai commencé à réaliser des premières photos des portraits, des détails des scènes de vie dans les baltos, les brasas, les cafés des sports avec l'objectif à ce moment-là vraiment de montrer le verre plus à moitié plein qu'à moitié vide de ces espaces déjà en voie de disparition puisqu'on est passé de 200 000 cafés dans les années 60 à à peine 36 000 aujourd'hui donc ça a été vraiment une érosion et l'idée pour moi c'était en tout cas plutôt de parler, de raconter des histoires de résistantes et résistants qui sont les patrons de patrons et les habitués de ces lieux. Donc après quatre ans de Tour de France, au volant de mon petit camion, la Blotte Mobile, et plus de 220 immersions, je me suis senti à l'aise de proposer de sortir un livre grâce aux éditions Webeck de Gallimard. Donc un livre qui dresse avec, je dirais, tendresse. En tout cas, c'est ce que j'ai essayé de faire, un panorama photo de ces lieux du quotidien résistant et qui sont même désormais inscrits au patrimoine culturel et matériel français. Le livre a plutôt bien été reçu, je crois. On a dépassé les 10 000 exemplaires vendus. Moi, je suis évidemment super content à ma petite échelle. Déjà, d'avoir pu mettre en lumière ces lieux de vie, ces espaces vraiment de vitalité, et si nécessaire, pour une sociabilité de proximité pour beaucoup de personnes, ces cafés. Pour mon travail également, ça m'a apporté de la visibilité davantage. On m'a confié plus de commandes. Mon travail sur l'aspect populaire a été plus reconnu. J'ai aussi pu proposer des sujets. Je me souviens des 24 heures du puzzle que j'avais proposé à Society, qui avaient été acceptés dans la foulée quasiment. Il y a les chemins de France de Fléchette que j'avais pu aussi leur proposer. Donc peut-être les idées que j'avais auparavant qui étaient un peu moins considérées. Grâce à la visibilité du projet, d'un point de vue médiatique, parce que j'ai eu la chance de pouvoir parler du livre et de la série dans différents médias, ça m'a apporté plus de lumière sur un travail de fond que je menais déjà depuis depuis des années. Donc ça m'a facilité des rencontres et des sujets dans le documentaire et même publicitaire puisque petit live goal, cette série m'a même permis de réaliser une campagne pour Picon. Donc c'était un petit clin d'oeil un peu marrant par rapport aussi à au cœur du sujet qui était les bistrots. Je pense que cette série a été appréciée des médias parce qu'on a vraiment chacun, j'ai l'impression, un amour pour les bistrots. On a chacun, chacune, une histoire de rad, de trocquet, et donc il y a une vraie, vraie affection. Le livre est devenu une forme de cadeau, même pour beaucoup, pour un peu témoigner à d'autres personnes cet élan que l'on a chacun pour ces espaces de vie. Des lieux qui revendiquent leur popularité, leur mixité, mais sans en avoir l'authenticité. Pour moi, ça prend vraiment du temps de construire une âme et de conférer une à un lieu. Et donc ça ne passe pas par, malheureusement, des carafricards. C'est vraiment le temps et les personnes qui vont insuffler toute la vie à cet espace. Et c'est des lieux qui n'ont pas les prix des vrais rads. Et donc toute cette tendance, je dirais, à ces néo-PMU, moi je ne peux que le déplorer. L'idée de mon travail, c'est vraiment de raconter des vies qui sont authentiques, qui ont une âme. Et c'est vraiment à quoi je m'évertuerai encore et encore. J'ai développé un protocole immersif que j'applique particulièrement à mes séries rad et restos routiers en ce moment. En fait, j'arrive avec l'appareil photo dans le sac à dos. Il n'est jamais vraiment visible. Je me pose au comptoir. Quand je rentre, je prends un demi, un expresso et puis j'écoute. Je me fonds dans la masse, j'observe. Et puis à un moment donné, je vais réussir à rentrer dans la conversation. C'est un peu la magie du comptoir. Il y a une forme de small talk. C'est dès qu'il y a une petite blague, une petite vanne, c'est un peu plus facile de s'insérer. Et donc c'est à ce moment là où Quand j'ai bien papoté, quand il y a des interactions avec patronnes, patrons et les habitués. Quand j'ai suffisamment aussi posé de questions, parce que c'est un peu une des formations que j'ai. Parce que je suis assez curieux et que je peux facilement interviewer rapidement les personnes sans que ça porte le nom d'interview. Mais quand la curiosité s'inverse et que les personnes se demandent pourquoi je suis là aussi, je leur dis que je ne suis pas uniquement présent pour boire une menthe à l'eau, mais aussi parce que je documente ces espaces. à à leur expliquer mon vrai intérêt pour ces cafés, pour ces lieux de vie et que je suis photographe et que j'adorerais réaliser des images de leur établissement, de faire des portraits s'ils sont d'accord, de prendre des détails en photo. Et je considère que cette méthode vraiment plus douce que d'arriver frontalement et de sortir l'appareil photo, enfin même de l'avoir déjà à la main et de commencer à flasher. ça serait beaucoup trop agressif, trop violent, et on serait vraiment dans un rapport de consommation de l'autre, de l'image que je n'ai pas du tout envie d'avoir. Donc cette méthode vraiment plus douce, ça me permet de gagner leur confiance, qu'ils comprennent, qu'ils acceptent ce moment d'échange plus facilement. Et puis je tiens vraiment aussi à garder un lien au-delà de la prise de vue et de ce moment qu'on a passé ensemble, puisque je garde un contact, un mail. Un téléphone, une adresse postale aussi, pour ceux qui ne sont pas forcément connectés, et je leur envoie systématiquement les photos. Comme on en parlait tout à l'heure de l'évolution d'une pratique, c'est vrai qu'au départ, un peu peut-être naïvement, j'arrivais avec l'appareil photo en bandoulière, et c'est vrai que je me rendais compte un petit peu de la... Peut-être défiance que pouvait représenter cet objet en fait, qui pour certains peut être assez intrusif quand même, de se laisser déshabiller par l'appareil photo, de se mettre un peu à nu entre guillemets par rapport à un inconnu qui est là dans un espace. et donc c'est au fur et à mesure je me suis rendu compte qu'il fallait que je change ma manière de procéder puis c'était beaucoup plus humain aussi de déjà de d'arriver dans le lieu comme une personne classique de pas être dans un rôle de vraiment poser de boire un coup même moi ça me ça me permet de prendre note d'un petit coin d'un carnet de mots clés entendus de phrases pour un peu mieux sentir le... L'endroit, toute son âme, toute sa chaleur, et donc oui, à fur et à mesure des immersions que je réalisais, autant pour les rats que les ristoroutiers, j'ai commencé à en faire vraiment un protocole. Pour la série sur les jeunes naturistes, le protocole est quand même légèrement différent, puisque je n'ai pas de sac à dos. L'appareil photo, là, il est... Plus en bandoulière et disons que j'annonce en amont, je me souviens pour la toute première session de photo, on avait prévenu le camping, c'était à Montalivet, avec la photographe Rebecca Topakian, on avait commencé cette série à deux. Et on avait affiché des pancartes en fait pour prévenir les gens qu'il y avait un reportage qui avait lieu et on avait donné même des rendez-vous aux personnes s'ils voulaient faire partie de la série. Il y a vraiment son père qui est venu. Il y a vraiment zéro personne à ce rendez-vous. Donc on s'est baladé avec l'appareil photo, mais bien quand même le cache dessus. On a eu pas mal de remarques par rapport à ça quand on se baladait. On voyait vraiment avoir ce cache. Les gens sont assez frileux quand ils ne connaissent pas de voir un appareil photo visible, même en bandoulière. On était en tout cas plus facilement identifiés comme photographes à ce moment-là. On allait voir les gens et on leur expliquait, mais vraiment toujours en regardant l'appareil photo en bandoulière. Après une discussion assez longue, il y avait vraiment une mise en confiance plus prononcée. et qu'on commençait à faire des images dans le second temps. Le flash, je l'utilise vraiment pour deux raisons principales. la première. Il y a donc ce côté très brut de ma lumière qui permet vraiment de faire ressortir toutes les couleurs, tout le peps, le sel un peu des situations, des visages, des habits, des attitudes. Il y a donc ce côté flash et aussi le léger décadrage que j'utilise assez souvent, ce qui permet vraiment de renforcer, je dirais, le côté pris sur le vif, le côté en immersion de la photo. Et la deuxième raison, c'est qu'en transparence, le flash pour moi c'est quelque chose de très pratique, dans le sens où j'arrive souvent dans des endroits où la lumière est assez faible, pas hyper flatteuse, et donc d'avoir mon flash Cobra, ça me permet bien souvent de me sortir de situations assez compliquées, et donc ça me rassure vraiment je crois de l'avoir avec moi. Resto routier est né en parallèle de RAD en fait en 2018-2019. Initialement c'est une commande pour un livre intitulé Cantines Générales où Julien Femme qui en avait la rédaction, en tout cas l'éditorial et les choix, m'avait demandé de documenter la cantine des chauffeurs routiers, à savoir donc les relais routiers. Et en fait... J'ai tellement aimé y passer du temps, dans ces restaurants, que pendant mes étés de Tour de France par la suite, avec mon petit camion, j'ai continué de m'y arrêter et d'y faire des photos, pour vraiment documenter ces espaces en voie de disparition eux aussi, puisqu'on est passé vraiment de 4500 restos routiers dans les années 70 à à peine 700 aujourd'hui. Cette baisse, elle est à cause essentiellement du développement des autoroutes, des interdictions de traverser certaines zones, et encore des chauffeurs qui ne s'arrêtent même presque plus que le soir. parce qu'ils préfèrent garder leur enveloppe de frais du midi comme un second salaire en quelque sorte, en prenant simplement un sandwich par exemple. Et donc j'ai voulu à mon échelle encore mettre en lumière le quotidien trépidant de ces lieux, la vie autant couleur qui s'y dévoile, pareil de ces résistants du bord des routes qui triment bien souvent de 4h le matin jusqu'à très très tard le soir. Pour moi c'est vraiment des héros et héroïnes du quotidien, du tous les jours. Et moi j'en suis hyper admiratif et je voulais leur rendre hommage aussi à travers cette série. Pour moi, ces restos routiers sont vraiment des tiers-lieux. Dans la définition des sociologues Ray Oldenburg et plus récemment d'Antoine Buret, les tiers-lieux sont des lieux qui impliquent... une dimension sociale de partage, d'entraide, de solidarité, avec une atmosphère qui s'en dégage, et surtout une considération pour sa population, une forme de lieu de ralliement d'une communauté, et surtout qui dépasse la simple transaction commerciale. Et en ce sens, les restos routiers, ils regroupent toutes ces caractéristiques de lieu de vie, de faire, comme on l'entend, communauté, de partager un moment de retrouvaille, il y a une vraie entraide, ça papote, ça se retrouve, ça se fait vraiment... Un moment où les solitudes s'agrègent, se retrouvent. C'est exactement le cas des restos routiers pour la communauté des chauffeurs et chauffeuses routiers. Et plus largement le midi avec les ouvriers et les gens du coin. J'ai souvent entendu d'ailleurs que c'est ici, un peu c'est la maison, dans la bouche des personnes que j'ai rencontrées là-bas. Donc ce côté vraiment à l'aise, de confort, de retrouvailles avec des personnes proches, d'entraide, pour moi c'est vraiment... une déclinaison de ce qu'on appelle les tiers-lieux. En opposition totale avec le concept de non-lieux de Marc Auger, qui sont vraiment des espaces d'anonymat, c'est toutes ces installations que l'on peut voir, notamment qui sont nécessaires à la circulation des personnes, les voies rapides, les échangeurs, les gares, donc les restaurants, même d'autoroutes, plutôt aseptisés, les franchises. Les restauroutiers, ils viennent vraiment en opposition à ces lieux de passage totalement anonymes. sans vraiment réel aspect de demeure, de résidence, de lieu au sens commun du terme. Donc il y a clairement une opposition entre ces lieux de vie, d'entraide, de retrouvailles, ces tiers-lieux donc, les restaurants routiers, en opposition avec les non-lieux que peuvent représenter les franchisés d'autoroutes. Les restos routiers, vraiment, c'est mes compagnons de route. L'été, c'est des endroits où, quand je voyage seul par moment, de pouvoir pousser la porte d'un resto de bord de route, de me poser un peu au comptoir avant d'aller manger, puis de m'installer ensuite sur ces grandes tablues, puisque les restos routiers, aussi, sont des marqueurs. Au-delà de trouver une douche, un grand parking et donc des menus à prix imbattable, c'est ce côté aussi vraiment vie en... en commun avec un tel qui va se mettre en face. Et en fait, ça fait des grandes tablées de 10-15 personnes. Et ça permet vraiment de discuter avec tout le monde. Et donc, c'est comme ça que moi, je m'immergeais. Je retrouvais une sociabilité plus présente. Et ça me permettait de passer des soirées incroyables, un peu raconter nos vies. Et moi, j'en apprenais beaucoup, en fait, sur leur quotidien, sur leur vie. Ils sont souvent un peu considérés comme les derniers maillons de la mondialisation, les chauffeurs et chauffeuses routiers. Donc, il y a ce côté... où ils ont l'impression d'être assez stigmatisés, il y a une manque de reconnaissance. Et donc moi, tout ça, ça me permettait d'écouter, de comprendre un peu mieux leur quotidien, la rudesse de leur travail. Et ça m'importe aujourd'hui, en tout cas, à travers ce travail, au-delà du lieu des restaurants routiers, mais de raconter aussi ces métiers. Je pense que le déplacement ça fait partie de mon essence. Sans jeu de mot, je mets du diesel en plus dans la blotte mobile. C'est plus ce côté, ça me permet de me sortir d'un quotidien stable et de me remettre en moment de création, d'aller chercher aussi cet état mental de la conduite que j'adore. J'appelle ça un peu la transe de la ligne blanche quand je suis sur des... derrière le volant et que je conduis avec mes yeux posés sur les traits du milieu de la route et que ma tête, elle part dans la réflexion. J'adore cet état en fait que peut procurer la conduite, la voiture. Et c'est vrai qu'après les mouvements, ça me permet d'aller à la rencontre d'univers que je suis peut-être moins familier de base et ça me sort d'une bulle et ça me permet de rencontrer aujourd'hui mes voisins au sens large. Et j'adore ça. Pour moi, c'est une vraie volonté de documenter plutôt la France. d'aller arpenter les nationales départementales parce que je considère que c'est toujours plus important et fort de mieux connaître ses voisins que d'aller au loin et chercher l'exotisme. Pour moi, c'est vraiment crucial, vital, nécessaire de mieux connaître qui vit autour de moi à l'échelle de la France, qui est déjà incroyablement grande avec tellement de diversité. Et donc, c'est pour ça que je m'évertue vraiment à rester dans ce cadre-là pour simplement mieux connaître. avec qui je vis aujourd'hui. Sur cette photo, on aperçoit Thomas, qui est un chauffeur routier breton de 21 ans. qui allume une dernière clope avant d'aller se coucher. On est à côté du resto routier Le Médine, à Coverville-en-Roumois, dans l'heure. En fait, j'ai passé la soirée à manger avec lui, son collègue Antoine, et un autre chauffeur rencontré sur la terrasse, qui s'appelle Eric, qui vient des Vosges, de son côté. Et on a discuté de leur quotidien sur les routes, de leur temps de pause au relais, qui est hyper important pour eux, Thomas en particulier. J'étais curieux de savoir comment il vivait tous les jours avec son camion, sa cabine. Il me raconte que sa cabine est toute petite, un peu étriquée, que lui il aime bien faire du sport pour s'entretenir notamment, et qu'il a ses élastiques toujours avec lui, mais que c'est trop galère d'en faire dans le camion parce qu'il n'arrive pas à s'y tenir debout, il fait 1m80. C'est un peu ces histoires, ces détails de quotidien que j'aime bien raconter pour vraiment se rendre compte d'une réalité du tous les jours. Je suis avec lui dans le champ d'à côté, il fume sa clope et c'est là qu'il y a évidemment ce soleil aussi couchant incroyable et je décide de faire une sorte de nuit américaine en diminuant l'ambiance autour pour faire ressortir les couleurs et lui donner un petit coup de flash sur lui au premier plan. Et puis voilà, il a eu sa clope et juste après celle-ci, il filera sa cabine sur le parking à 100 mètres, rangée en randonnion avec les autres chauffeurs pour passer sa nuit d'été. Je trouve que le doute, il est plutôt sain quand il n'est pas paralysant. C'est un vrai moteur pour moi. C'est ce qui permet de ne pas se reposer sur ses acquis, de vouloir créer, de se renouveler. En photo notamment, ça va être de travailler chaque sujet, comme si c'était le premier, de réfléchir en amont à des manières de traiter le reportage, donc d'écrire. Moi, systématiquement, j'écris sur un papier, à des idées de prise de vue. Ça me permet vraiment d'arriver avec une base, des idées sur le moment, et de ne pas être paralysé par le reportage et le shoot. Je vais aussi avoir ce doute au moment d'envoyer les photos aux médias, me demander est-ce que les images que j'ai transmises à la rédaction du AM, de l'IB, de CIT vont leur plaire. Et je crois que tant que je n'ai pas reçu le mail réponse qui me dit que ça leur convient, je suis toujours un petit peu en stress en fait, je ressens. Et c'est ok, c'est ok d'un côté ça me rassure, ça me témoigne que je mets de ressentir ce doute du cœur sincère, de l'envie, de l'élan dans mes reportages. C'est vrai qu'avec le temps d'avoir pu éditer un livre, de pouvoir montrer mon travail à travers des expositions, m'ont fait gagner en confiance en moi, en mon travail, et je pense aussi en légitimité. Je trouve que l'objet, à travers une publication dans un journal, un magazine, et un livre, et aussi l'expo, ça concrétise davantage un travail, ça le rend plus palpable, plus formel, on peut limite le toucher en fait. Ça le réalise davantage. C'est vrai que moi, ça me permet in fine de me rendre davantage compte du chemin parcouru. Ça me permet de mettre, même et surtout, mieux en valeur les personnes que je photographie, les lieux, les détails, les scènes de vie. Donc, par ces demonstrations, je pense au Mucem pour la sélection de naturistes, cette expo collective. Je pense à la dernière expo en Corée de quelques images que j'ai pu réaliser en Méditerranée ou à l'expo... de Restos Routiers à la Galerie S, ça offre un regard limite à taille réelle en fait, d'avoir des grands tirages, en tout cas c'est ce que je propose, et donc de se rendre compte même plus formellement des sujets que je photographie. Au-delà de l'édition du livre et purement du côté contenu, il y a un gros travail que j'ai pu effectuer avec Gallimard sur l'aspect communication, donc comment rendre à juste valeur et donner une chance à ces images d'être visibles. Et donc ça passe par l'organisation de signatures qu'on va faire pour le livre en France, l'exposition également à la Galerie S, d'imaginer des supports comme des stickers, comme un journal papier que j'offre en ce moment. avec mes rendez-vous pour essayer vraiment de raconter à ces restos routiers qu'ils aient une chance d'être un peu plus visibles. Et je pense que la communication peut être aussi une création et que ça peut simplement permettre à la juste hauteur aux images de vivre. Je dirais qu'en photo, il n'y a pas un temps, mais il y a des temps qui s'imbriquent joliment, à la fois les temps des projets au long cours, typiquement mes projets buvette, rad, restauroutier, qui vont durer pour ainsi dire à vie, en fait que je nourris en fil rouge avec des pauses, des moments plus déter, d'accélération, et ils sont un peu en filigrane dans mon quotidien. Et en parallèle, il y a des temps plus courts, comme les reportages pour la presse, un portrait de quelques minutes à peine pour le réaliser, une manif, un mariage, une illustration pour accompagner un article. Je crois que j'aime bien cette danse, en fait, entre ces différents temps, ça apporte pour moi du rythme, de pouvoir parfois diffuser des images dans la foulée, quand il y a une parution dans un magazine, dans un journal, et à d'autres moments, de garder de côté des photos de projets plus personnels, qui auront plus de force et de sens, d'être publiées ensemble, conjointement, des mois après. Donc il y a vraiment une harmonie pour moi entre... le temps court de réaliser des portraits en à peine 4-5 minutes, 4-5 images, et puis des temps plus longs à vie pour mes sujets autour des rats, des restos routiers. Je dirais que dans une société surbondée d'images numériques, moi je me prends un peu à rêver d'une diffusion davantage par l'objet à l'avenir, de donner une part belle aux posters, aux tirages signés, aux fanzines, aux journaux papiers, aux albums. Je dirais à des supports vraiment palpables, avec toute leur aura, et aussi que l'on peut offrir, et c'est important. et mes envies, là c'est clairement de repartir sur la route, notamment pour continuer mon projet sur les soirées loto en France, pour moi c'est vraiment un combo incroyable de suspense de panier garni, de superstition de gris coloré et d'humain rayonnant surtout j'ai très hâte

  • Speaker #1

    Merci d'avoir écouté ce podcast vous pouvez retrouver tous les épisodes de Vision sur les plateformes de podcast de Spotify en bassant par Deezer, Apple Podcasts et nos actualités sur notre site vision.photo ou sur notre Instagram at podcastvision. Si vous avez quelques secondes pour noter et laisser votre avis, ça nous aide aussi beaucoup. A très vite pour parler de photographie.

Description

Souvent coiffé d’un bob marin et arborant un style vestimentaire qui lui est propre, Guillaume Blot est une personne que l'on reconnait de loin. Photographe documentaire, Guillaume est passionné par les moments authentiques du quotidien, qu’il immortalise la plupart du temps au flash.


Dans cet épisode, il nous emmène dans un fascinant tour de France : des buvettes de stades aux rades, jusqu’à son dernier projet, où il part à la rencontre des chauffeurs routiers et de leurs fameux relais. Guillaume aime maîtriser ses propos et sa communication, mais ses projets sont avant tout profondément humains, à son image.


🤝 Partenaire


MPB, la plus grande plateforme en ligne au monde pour acheter, vendre et échanger du matériel photo et vidéo d’occasion.


🎙 Crédits


Un podcast réalisé et écrit par Aliocha Boi, produit par Noyau.studio, monté et mixé par Virgile Loiseau et mis en musique par Charlie Janiaut.


✨ Liens  


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Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Une production à Noyaux Studios.

  • Speaker #1

    Salut c'est Aliocha, vous écoutez Vision, le podcast qui donne nos images. Nous avons la chance cette saison d'être accompagnés à nouveau par MPB, qui est la plus grande plateforme au monde pour acheter, vendre et échanger du matériel photo et vidéo d'occasion, et surtout de manière fiable. Pour vous donner un exemple précis, je viens de vendre un appareil photo numérique que je n'utilisais plus du tout. Je l'ai tout simplement fait estimer sur le site de MPB, ça prend 30 secondes. Ensuite je l'ai envoyé, la livraison est gratuite, et l'équipe spécialiste produit de MPB C'est vraiment occuper du reste, c'est-à-dire d'inspecter avec soin le matériel et de le mettre en ligne. Voilà, c'est aussi simple que ça. Je vous conseille vraiment cette expérience, que ce soit au niveau de la vente, mais aussi de l'achat. Merci encore à MPB de nous accompagner pour cette nouvelle saison. Je vous souhaite, quant à moi, une très bonne écoute.

  • Speaker #0

    J'aimerais vous parler de la photo de Johnny, c'est un chauffeur routier incroyable rencontré l'été dernier au Resto Routier Le Tarin, c'est à La Bati en Savoie. Il est d'ailleurs devenu l'icône de la couverture du livre Resto Routier. J'ai adoré passer ces 45 minutes de pause réglementaire avec lui. Il est arrivé avec son camion rouge et jaune sur le parking, il s'est dirigé vers le comptoir et on a tout de suite papoté avec les deux postières, Aurore et Julie. Et lui, il m'a vraiment raconté son amour de la route, du western. Pourquoi son surnom Johnny ? Parce que c'est pas vraiment son vrai prénom, mais ça je peux pas vraiment, disons, révéler l'officiel. Et puis il m'a proposé d'aller voir son camion et en fait, au moment où je le vois grimper dans la cabine, là je visualise la photo. Et je lui dis Johnny, ne bouge surtout pas, regarde-moi. Et c'est à ce moment-là que je le photographie avec le flash. Et en fait, c'est une photo forte pour moi, car en fait, elle me rappelle avant toute cette rencontre, et tout ce moment passé autour du café, au comptoir et sur le parking, avec un John Wayne en plus, qui était affiché en miniature dans son camion. Et je me souviens, comme s'il nous regardait papoter sur le gravier, ça m'a beaucoup marqué ce moment avec lui. Je m'appelle Guillaume Blot, je suis photographe documentaire. J'ai grandi à Toiré-sur-Loire, un petit village à côté de Nantes, jusqu'à mes 20 ans, puis je suis parti ensuite à Marseille à ce moment-là, et puis Paris pour terminer mes études au CELSA à la Sorbonne, avant ensuite de me former un peu plus à la photographie en continu au Goublin notamment. Et aujourd'hui j'habite à côté de Fontainebleau, en Sud-Sénémarne. Ma mère est prof de techno, mon père est cheminot. Je pense qu'en tout cas, le train, j'ai, grâce à mon père en particulier, pu vraiment commencer mes tours de France dès tout petit, grâce aux facilités de circulation que j'avais. Et d'ailleurs, ma première série Buvette, en 2015, je la réalise vraiment parce que c'est mon dernière année de train quasiment gratuit. Et je veux célébrer cette dernière année. Et c'est un moment où j'aime beaucoup, disons en particulier les avant-matchs de foot. Et donc, je me lance dans un grand Tour de France des stades avec l'idée de chroniquer des buvettes que l'on peut y trouver autour pour voir ce que chacun mange en fonction des villes. donc c'est vrai que ça m'a vraiment Je dirais lancer, en tout cas soutien familial. Dans mes premiers projets, ils ont toujours été présents avec moi, au-delà du train en fait. Ça a été vraiment mes parents de croire en mes projets, mes premiers projets notamment Buvette puis Rad ensuite. C'est vraiment les premiers qui vont au bureau de tabac d'ailleurs, acheter un exemplaire du monde quand j'ai un sujet qui est là. Donc moi ça me touche vraiment, je dirais ce soutien d'avoir des parents vraiment alliés. Je crois que ce qui m'a vraiment donné envie de faire de la photo, et en tout cas les premières images que j'ai, elles sont finalement dans mes yeux où je suis tout petit, mon père m'emmène au stade à la Beaujoire à Nantes, et je vois toutes ces écharpes de couleurs, ces frites déjà, ces sandwiches américains, ces cocas, ces bières, et en fait j'adore cet univers, ces odeurs en plus, ces bruits un peu électrogènes, le speaker qui annonce la composition de... de mon club de cœur. Et donc, je pense que ça m'a vraiment... C'est vraiment imprimé en moi, cet univers des avant-matchs. Donc, ces images que j'avais finalement dans les yeux, je les ai transformées en première série documentaire en 2015 avec Buvette en me rendant dans les différents stades de France et évidemment, de nouveau à Nantes. C'est fou, le foot. J'avoue, je regarde encore un peu les scores. Je pense que ça habite... Comme c'est mes premières émotions fortes, je me souviens des... C'est mes frites de Proust, les avant-matchs avec mon père partagé ce moment, de voir les buts, de se lever avec une foule en entier, ça m'a vraiment beaucoup marqué. C'est de l'ordre de l'épidermique et je pense que c'est pour ça que ça m'habite encore aujourd'hui ce sport. Ce qui m'influence, ça évolue un petit peu tout le temps, moi je dirais qu'en photographie évidemment c'est tout l'imaginaire très coloré, très flashé, de Lars Thunbjörk, de Martin Parr. Dans un autre registre, je dirais que dans l'absurde malin, je l'appelle comme ça, j'aime beaucoup le travail de l'artiste canadienne Gabbois, qui est très dans la transformation avec beaucoup d'humour, d'objets du quotidien. Et visuellement, je trouve que ça claque. Gabbois, par exemple, il y a une photo récente qui m'a marqué, c'est dans une voiture, dans la boîte à gants, elle l'a tirée et en fait, ça devient une forme de plateau d'huître. Donc il y a un peu ce côté... improbable, très coloré, assez drôle et qui moi me parle beaucoup notamment pour ma série la plus récréative qui s'appelle Légende. Et une autre source d'inspiration, documentaire vidéo, j'admire particulièrement les oeuvres du réel d'Alice Diop et d'Alain Cavalier aussi avec tous ses portraits XL notamment. Je dirais que mon travail flash avec un humour tendre entre la culture populaire française et l'humain dans toute sa poésie brute. Mes images visent à montrer la beauté du quotidien et à raconter des histoires que je qualifie de merveilleusement normales. Et l'ensemble est visible à travers les différents projets que j'ai pu mener depuis Buvette, ma première série sur l'univers des friteries autour des stades, de Rad qui s'aventure dans les bistrots les plus authentiques du pays. et plus récemment de restaurants routiers, sur ces relais en couleur qui offrent repas et repos aux chauffeurs et chauffeuses. Je travaille également sur des projets plus intimes, liés au corps intime comme Jeune Naturiste, sur les naturistes et les franges entre 20 et 40 ans, une série qui a pu être exposée au Mucem en 2024, et Partie Intime également qui vise à sensibiliser sur la contraception masculine. dite thermique. Donc mon travail il a en dix ans je crois bien évolué mais toujours en lien avec des univers, des expériences que j'ai pu moi même connaître. Par exemple je fais cette série sur les jeunes naturistes parce que je commence en 2018 moi même à faire du naturisme et donc ça m'intéressait de documenter ces motivations quand on est jeune alors qu'on a peut-être en tête un imaginaire de plutôt de quinquagénaire en tongs au camping si je schématise un peu l'image d'épinal du naturiste alors que évidemment pas du tout, c'est très diversifié. Partie intime, c'est parce que je commence à me contracepter à ce moment-là et que ça me permet de mieux pousser mes recherches et de donner peut-être aussi des informations que moi je n'avais pas forcément trouvées à ce moment-là. Et puis, rad, resto routier, c'est des univers que j'ai pu côtoyer lors de mes reportages, dans ma vie aussi au quotidien quand je me pose avec mes amis à un café ou autre. Et ma photo en fait elle a aussi pas mal évolué d'un point de vue flash. Je l'utilise de manière beaucoup plus brute, plus franche ces dernières années, ce qui était moins le cas avant. J'ai fait ce choix pour vraiment, à mon sens, apporter plus de peps à l'image, plus de piment, et puis mettre davantage même en lumière, avec cette lumière un peu... Très brut, les personnes photographiées, je trouve que ça rehausse vraiment un ensemble, un univers et ça permet de révéler toute la vie des personnes que je photographie. Disons que l'expérimentation s'est faite au fur et à mesure où le flash, j'ai essayé de passer en mode manuel, à la place du TTL qui apporte une lumière beaucoup plus douce, maîtrisée. Moi j'assume totalement ce côté où je mets en puissance maximale mon flash. Je joue après plutôt sur les réglages de mon appareil photo pour diminuer ou pas l'intensité. Je retouche aussi en post-prod avec un peu cet effet vignettage qui permet d'avoir cet halo autour des détails, des portraits, des personnes. Et oui, c'est vraiment en tentant, en n'ayant pas peur parfois de carrément faire des cheveux de tout claquer parce que la lumière était beaucoup trop brute. L'avantage du numérique, c'est qu'on peut quand même voir en temps réel un petit peu ce que ça donne sur l'écran et c'est en tâtonnant comme ça qu'au fur et à mesure, je me sentis à l'aise avec cette lumière peut-être plus crue. C'est devenu une forme d'élément caractéristique de mon travail aujourd'hui en complément d'autres photos que je... Je fais avec une lumière plus douce et je trouve que l'ensemble se combine bien pour raconter les histoires que je veux aujourd'hui. R.A.T. c'est un projet au long cours qui est né en 2019. En fait je passais du temps dans les cafés comme je pense beaucoup d'entre nous, entre deux trains, à travailler, à voir mes copaines. Et en fait j'y voyais des scènes de vie incroyables, j'y entendais des punchlines folles pour ainsi dire. et donc j'ai commencé à réaliser des premières photos des portraits, des détails des scènes de vie dans les baltos, les brasas, les cafés des sports avec l'objectif à ce moment-là vraiment de montrer le verre plus à moitié plein qu'à moitié vide de ces espaces déjà en voie de disparition puisqu'on est passé de 200 000 cafés dans les années 60 à à peine 36 000 aujourd'hui donc ça a été vraiment une érosion et l'idée pour moi c'était en tout cas plutôt de parler, de raconter des histoires de résistantes et résistants qui sont les patrons de patrons et les habitués de ces lieux. Donc après quatre ans de Tour de France, au volant de mon petit camion, la Blotte Mobile, et plus de 220 immersions, je me suis senti à l'aise de proposer de sortir un livre grâce aux éditions Webeck de Gallimard. Donc un livre qui dresse avec, je dirais, tendresse. En tout cas, c'est ce que j'ai essayé de faire, un panorama photo de ces lieux du quotidien résistant et qui sont même désormais inscrits au patrimoine culturel et matériel français. Le livre a plutôt bien été reçu, je crois. On a dépassé les 10 000 exemplaires vendus. Moi, je suis évidemment super content à ma petite échelle. Déjà, d'avoir pu mettre en lumière ces lieux de vie, ces espaces vraiment de vitalité, et si nécessaire, pour une sociabilité de proximité pour beaucoup de personnes, ces cafés. Pour mon travail également, ça m'a apporté de la visibilité davantage. On m'a confié plus de commandes. Mon travail sur l'aspect populaire a été plus reconnu. J'ai aussi pu proposer des sujets. Je me souviens des 24 heures du puzzle que j'avais proposé à Society, qui avaient été acceptés dans la foulée quasiment. Il y a les chemins de France de Fléchette que j'avais pu aussi leur proposer. Donc peut-être les idées que j'avais auparavant qui étaient un peu moins considérées. Grâce à la visibilité du projet, d'un point de vue médiatique, parce que j'ai eu la chance de pouvoir parler du livre et de la série dans différents médias, ça m'a apporté plus de lumière sur un travail de fond que je menais déjà depuis depuis des années. Donc ça m'a facilité des rencontres et des sujets dans le documentaire et même publicitaire puisque petit live goal, cette série m'a même permis de réaliser une campagne pour Picon. Donc c'était un petit clin d'oeil un peu marrant par rapport aussi à au cœur du sujet qui était les bistrots. Je pense que cette série a été appréciée des médias parce qu'on a vraiment chacun, j'ai l'impression, un amour pour les bistrots. On a chacun, chacune, une histoire de rad, de trocquet, et donc il y a une vraie, vraie affection. Le livre est devenu une forme de cadeau, même pour beaucoup, pour un peu témoigner à d'autres personnes cet élan que l'on a chacun pour ces espaces de vie. Des lieux qui revendiquent leur popularité, leur mixité, mais sans en avoir l'authenticité. Pour moi, ça prend vraiment du temps de construire une âme et de conférer une à un lieu. Et donc ça ne passe pas par, malheureusement, des carafricards. C'est vraiment le temps et les personnes qui vont insuffler toute la vie à cet espace. Et c'est des lieux qui n'ont pas les prix des vrais rads. Et donc toute cette tendance, je dirais, à ces néo-PMU, moi je ne peux que le déplorer. L'idée de mon travail, c'est vraiment de raconter des vies qui sont authentiques, qui ont une âme. Et c'est vraiment à quoi je m'évertuerai encore et encore. J'ai développé un protocole immersif que j'applique particulièrement à mes séries rad et restos routiers en ce moment. En fait, j'arrive avec l'appareil photo dans le sac à dos. Il n'est jamais vraiment visible. Je me pose au comptoir. Quand je rentre, je prends un demi, un expresso et puis j'écoute. Je me fonds dans la masse, j'observe. Et puis à un moment donné, je vais réussir à rentrer dans la conversation. C'est un peu la magie du comptoir. Il y a une forme de small talk. C'est dès qu'il y a une petite blague, une petite vanne, c'est un peu plus facile de s'insérer. Et donc c'est à ce moment là où Quand j'ai bien papoté, quand il y a des interactions avec patronnes, patrons et les habitués. Quand j'ai suffisamment aussi posé de questions, parce que c'est un peu une des formations que j'ai. Parce que je suis assez curieux et que je peux facilement interviewer rapidement les personnes sans que ça porte le nom d'interview. Mais quand la curiosité s'inverse et que les personnes se demandent pourquoi je suis là aussi, je leur dis que je ne suis pas uniquement présent pour boire une menthe à l'eau, mais aussi parce que je documente ces espaces. à à leur expliquer mon vrai intérêt pour ces cafés, pour ces lieux de vie et que je suis photographe et que j'adorerais réaliser des images de leur établissement, de faire des portraits s'ils sont d'accord, de prendre des détails en photo. Et je considère que cette méthode vraiment plus douce que d'arriver frontalement et de sortir l'appareil photo, enfin même de l'avoir déjà à la main et de commencer à flasher. ça serait beaucoup trop agressif, trop violent, et on serait vraiment dans un rapport de consommation de l'autre, de l'image que je n'ai pas du tout envie d'avoir. Donc cette méthode vraiment plus douce, ça me permet de gagner leur confiance, qu'ils comprennent, qu'ils acceptent ce moment d'échange plus facilement. Et puis je tiens vraiment aussi à garder un lien au-delà de la prise de vue et de ce moment qu'on a passé ensemble, puisque je garde un contact, un mail. Un téléphone, une adresse postale aussi, pour ceux qui ne sont pas forcément connectés, et je leur envoie systématiquement les photos. Comme on en parlait tout à l'heure de l'évolution d'une pratique, c'est vrai qu'au départ, un peu peut-être naïvement, j'arrivais avec l'appareil photo en bandoulière, et c'est vrai que je me rendais compte un petit peu de la... Peut-être défiance que pouvait représenter cet objet en fait, qui pour certains peut être assez intrusif quand même, de se laisser déshabiller par l'appareil photo, de se mettre un peu à nu entre guillemets par rapport à un inconnu qui est là dans un espace. et donc c'est au fur et à mesure je me suis rendu compte qu'il fallait que je change ma manière de procéder puis c'était beaucoup plus humain aussi de déjà de d'arriver dans le lieu comme une personne classique de pas être dans un rôle de vraiment poser de boire un coup même moi ça me ça me permet de prendre note d'un petit coin d'un carnet de mots clés entendus de phrases pour un peu mieux sentir le... L'endroit, toute son âme, toute sa chaleur, et donc oui, à fur et à mesure des immersions que je réalisais, autant pour les rats que les ristoroutiers, j'ai commencé à en faire vraiment un protocole. Pour la série sur les jeunes naturistes, le protocole est quand même légèrement différent, puisque je n'ai pas de sac à dos. L'appareil photo, là, il est... Plus en bandoulière et disons que j'annonce en amont, je me souviens pour la toute première session de photo, on avait prévenu le camping, c'était à Montalivet, avec la photographe Rebecca Topakian, on avait commencé cette série à deux. Et on avait affiché des pancartes en fait pour prévenir les gens qu'il y avait un reportage qui avait lieu et on avait donné même des rendez-vous aux personnes s'ils voulaient faire partie de la série. Il y a vraiment son père qui est venu. Il y a vraiment zéro personne à ce rendez-vous. Donc on s'est baladé avec l'appareil photo, mais bien quand même le cache dessus. On a eu pas mal de remarques par rapport à ça quand on se baladait. On voyait vraiment avoir ce cache. Les gens sont assez frileux quand ils ne connaissent pas de voir un appareil photo visible, même en bandoulière. On était en tout cas plus facilement identifiés comme photographes à ce moment-là. On allait voir les gens et on leur expliquait, mais vraiment toujours en regardant l'appareil photo en bandoulière. Après une discussion assez longue, il y avait vraiment une mise en confiance plus prononcée. et qu'on commençait à faire des images dans le second temps. Le flash, je l'utilise vraiment pour deux raisons principales. la première. Il y a donc ce côté très brut de ma lumière qui permet vraiment de faire ressortir toutes les couleurs, tout le peps, le sel un peu des situations, des visages, des habits, des attitudes. Il y a donc ce côté flash et aussi le léger décadrage que j'utilise assez souvent, ce qui permet vraiment de renforcer, je dirais, le côté pris sur le vif, le côté en immersion de la photo. Et la deuxième raison, c'est qu'en transparence, le flash pour moi c'est quelque chose de très pratique, dans le sens où j'arrive souvent dans des endroits où la lumière est assez faible, pas hyper flatteuse, et donc d'avoir mon flash Cobra, ça me permet bien souvent de me sortir de situations assez compliquées, et donc ça me rassure vraiment je crois de l'avoir avec moi. Resto routier est né en parallèle de RAD en fait en 2018-2019. Initialement c'est une commande pour un livre intitulé Cantines Générales où Julien Femme qui en avait la rédaction, en tout cas l'éditorial et les choix, m'avait demandé de documenter la cantine des chauffeurs routiers, à savoir donc les relais routiers. Et en fait... J'ai tellement aimé y passer du temps, dans ces restaurants, que pendant mes étés de Tour de France par la suite, avec mon petit camion, j'ai continué de m'y arrêter et d'y faire des photos, pour vraiment documenter ces espaces en voie de disparition eux aussi, puisqu'on est passé vraiment de 4500 restos routiers dans les années 70 à à peine 700 aujourd'hui. Cette baisse, elle est à cause essentiellement du développement des autoroutes, des interdictions de traverser certaines zones, et encore des chauffeurs qui ne s'arrêtent même presque plus que le soir. parce qu'ils préfèrent garder leur enveloppe de frais du midi comme un second salaire en quelque sorte, en prenant simplement un sandwich par exemple. Et donc j'ai voulu à mon échelle encore mettre en lumière le quotidien trépidant de ces lieux, la vie autant couleur qui s'y dévoile, pareil de ces résistants du bord des routes qui triment bien souvent de 4h le matin jusqu'à très très tard le soir. Pour moi c'est vraiment des héros et héroïnes du quotidien, du tous les jours. Et moi j'en suis hyper admiratif et je voulais leur rendre hommage aussi à travers cette série. Pour moi, ces restos routiers sont vraiment des tiers-lieux. Dans la définition des sociologues Ray Oldenburg et plus récemment d'Antoine Buret, les tiers-lieux sont des lieux qui impliquent... une dimension sociale de partage, d'entraide, de solidarité, avec une atmosphère qui s'en dégage, et surtout une considération pour sa population, une forme de lieu de ralliement d'une communauté, et surtout qui dépasse la simple transaction commerciale. Et en ce sens, les restos routiers, ils regroupent toutes ces caractéristiques de lieu de vie, de faire, comme on l'entend, communauté, de partager un moment de retrouvaille, il y a une vraie entraide, ça papote, ça se retrouve, ça se fait vraiment... Un moment où les solitudes s'agrègent, se retrouvent. C'est exactement le cas des restos routiers pour la communauté des chauffeurs et chauffeuses routiers. Et plus largement le midi avec les ouvriers et les gens du coin. J'ai souvent entendu d'ailleurs que c'est ici, un peu c'est la maison, dans la bouche des personnes que j'ai rencontrées là-bas. Donc ce côté vraiment à l'aise, de confort, de retrouvailles avec des personnes proches, d'entraide, pour moi c'est vraiment... une déclinaison de ce qu'on appelle les tiers-lieux. En opposition totale avec le concept de non-lieux de Marc Auger, qui sont vraiment des espaces d'anonymat, c'est toutes ces installations que l'on peut voir, notamment qui sont nécessaires à la circulation des personnes, les voies rapides, les échangeurs, les gares, donc les restaurants, même d'autoroutes, plutôt aseptisés, les franchises. Les restauroutiers, ils viennent vraiment en opposition à ces lieux de passage totalement anonymes. sans vraiment réel aspect de demeure, de résidence, de lieu au sens commun du terme. Donc il y a clairement une opposition entre ces lieux de vie, d'entraide, de retrouvailles, ces tiers-lieux donc, les restaurants routiers, en opposition avec les non-lieux que peuvent représenter les franchisés d'autoroutes. Les restos routiers, vraiment, c'est mes compagnons de route. L'été, c'est des endroits où, quand je voyage seul par moment, de pouvoir pousser la porte d'un resto de bord de route, de me poser un peu au comptoir avant d'aller manger, puis de m'installer ensuite sur ces grandes tablues, puisque les restos routiers, aussi, sont des marqueurs. Au-delà de trouver une douche, un grand parking et donc des menus à prix imbattable, c'est ce côté aussi vraiment vie en... en commun avec un tel qui va se mettre en face. Et en fait, ça fait des grandes tablées de 10-15 personnes. Et ça permet vraiment de discuter avec tout le monde. Et donc, c'est comme ça que moi, je m'immergeais. Je retrouvais une sociabilité plus présente. Et ça me permettait de passer des soirées incroyables, un peu raconter nos vies. Et moi, j'en apprenais beaucoup, en fait, sur leur quotidien, sur leur vie. Ils sont souvent un peu considérés comme les derniers maillons de la mondialisation, les chauffeurs et chauffeuses routiers. Donc, il y a ce côté... où ils ont l'impression d'être assez stigmatisés, il y a une manque de reconnaissance. Et donc moi, tout ça, ça me permettait d'écouter, de comprendre un peu mieux leur quotidien, la rudesse de leur travail. Et ça m'importe aujourd'hui, en tout cas, à travers ce travail, au-delà du lieu des restaurants routiers, mais de raconter aussi ces métiers. Je pense que le déplacement ça fait partie de mon essence. Sans jeu de mot, je mets du diesel en plus dans la blotte mobile. C'est plus ce côté, ça me permet de me sortir d'un quotidien stable et de me remettre en moment de création, d'aller chercher aussi cet état mental de la conduite que j'adore. J'appelle ça un peu la transe de la ligne blanche quand je suis sur des... derrière le volant et que je conduis avec mes yeux posés sur les traits du milieu de la route et que ma tête, elle part dans la réflexion. J'adore cet état en fait que peut procurer la conduite, la voiture. Et c'est vrai qu'après les mouvements, ça me permet d'aller à la rencontre d'univers que je suis peut-être moins familier de base et ça me sort d'une bulle et ça me permet de rencontrer aujourd'hui mes voisins au sens large. Et j'adore ça. Pour moi, c'est une vraie volonté de documenter plutôt la France. d'aller arpenter les nationales départementales parce que je considère que c'est toujours plus important et fort de mieux connaître ses voisins que d'aller au loin et chercher l'exotisme. Pour moi, c'est vraiment crucial, vital, nécessaire de mieux connaître qui vit autour de moi à l'échelle de la France, qui est déjà incroyablement grande avec tellement de diversité. Et donc, c'est pour ça que je m'évertue vraiment à rester dans ce cadre-là pour simplement mieux connaître. avec qui je vis aujourd'hui. Sur cette photo, on aperçoit Thomas, qui est un chauffeur routier breton de 21 ans. qui allume une dernière clope avant d'aller se coucher. On est à côté du resto routier Le Médine, à Coverville-en-Roumois, dans l'heure. En fait, j'ai passé la soirée à manger avec lui, son collègue Antoine, et un autre chauffeur rencontré sur la terrasse, qui s'appelle Eric, qui vient des Vosges, de son côté. Et on a discuté de leur quotidien sur les routes, de leur temps de pause au relais, qui est hyper important pour eux, Thomas en particulier. J'étais curieux de savoir comment il vivait tous les jours avec son camion, sa cabine. Il me raconte que sa cabine est toute petite, un peu étriquée, que lui il aime bien faire du sport pour s'entretenir notamment, et qu'il a ses élastiques toujours avec lui, mais que c'est trop galère d'en faire dans le camion parce qu'il n'arrive pas à s'y tenir debout, il fait 1m80. C'est un peu ces histoires, ces détails de quotidien que j'aime bien raconter pour vraiment se rendre compte d'une réalité du tous les jours. Je suis avec lui dans le champ d'à côté, il fume sa clope et c'est là qu'il y a évidemment ce soleil aussi couchant incroyable et je décide de faire une sorte de nuit américaine en diminuant l'ambiance autour pour faire ressortir les couleurs et lui donner un petit coup de flash sur lui au premier plan. Et puis voilà, il a eu sa clope et juste après celle-ci, il filera sa cabine sur le parking à 100 mètres, rangée en randonnion avec les autres chauffeurs pour passer sa nuit d'été. Je trouve que le doute, il est plutôt sain quand il n'est pas paralysant. C'est un vrai moteur pour moi. C'est ce qui permet de ne pas se reposer sur ses acquis, de vouloir créer, de se renouveler. En photo notamment, ça va être de travailler chaque sujet, comme si c'était le premier, de réfléchir en amont à des manières de traiter le reportage, donc d'écrire. Moi, systématiquement, j'écris sur un papier, à des idées de prise de vue. Ça me permet vraiment d'arriver avec une base, des idées sur le moment, et de ne pas être paralysé par le reportage et le shoot. Je vais aussi avoir ce doute au moment d'envoyer les photos aux médias, me demander est-ce que les images que j'ai transmises à la rédaction du AM, de l'IB, de CIT vont leur plaire. Et je crois que tant que je n'ai pas reçu le mail réponse qui me dit que ça leur convient, je suis toujours un petit peu en stress en fait, je ressens. Et c'est ok, c'est ok d'un côté ça me rassure, ça me témoigne que je mets de ressentir ce doute du cœur sincère, de l'envie, de l'élan dans mes reportages. C'est vrai qu'avec le temps d'avoir pu éditer un livre, de pouvoir montrer mon travail à travers des expositions, m'ont fait gagner en confiance en moi, en mon travail, et je pense aussi en légitimité. Je trouve que l'objet, à travers une publication dans un journal, un magazine, et un livre, et aussi l'expo, ça concrétise davantage un travail, ça le rend plus palpable, plus formel, on peut limite le toucher en fait. Ça le réalise davantage. C'est vrai que moi, ça me permet in fine de me rendre davantage compte du chemin parcouru. Ça me permet de mettre, même et surtout, mieux en valeur les personnes que je photographie, les lieux, les détails, les scènes de vie. Donc, par ces demonstrations, je pense au Mucem pour la sélection de naturistes, cette expo collective. Je pense à la dernière expo en Corée de quelques images que j'ai pu réaliser en Méditerranée ou à l'expo... de Restos Routiers à la Galerie S, ça offre un regard limite à taille réelle en fait, d'avoir des grands tirages, en tout cas c'est ce que je propose, et donc de se rendre compte même plus formellement des sujets que je photographie. Au-delà de l'édition du livre et purement du côté contenu, il y a un gros travail que j'ai pu effectuer avec Gallimard sur l'aspect communication, donc comment rendre à juste valeur et donner une chance à ces images d'être visibles. Et donc ça passe par l'organisation de signatures qu'on va faire pour le livre en France, l'exposition également à la Galerie S, d'imaginer des supports comme des stickers, comme un journal papier que j'offre en ce moment. avec mes rendez-vous pour essayer vraiment de raconter à ces restos routiers qu'ils aient une chance d'être un peu plus visibles. Et je pense que la communication peut être aussi une création et que ça peut simplement permettre à la juste hauteur aux images de vivre. Je dirais qu'en photo, il n'y a pas un temps, mais il y a des temps qui s'imbriquent joliment, à la fois les temps des projets au long cours, typiquement mes projets buvette, rad, restauroutier, qui vont durer pour ainsi dire à vie, en fait que je nourris en fil rouge avec des pauses, des moments plus déter, d'accélération, et ils sont un peu en filigrane dans mon quotidien. Et en parallèle, il y a des temps plus courts, comme les reportages pour la presse, un portrait de quelques minutes à peine pour le réaliser, une manif, un mariage, une illustration pour accompagner un article. Je crois que j'aime bien cette danse, en fait, entre ces différents temps, ça apporte pour moi du rythme, de pouvoir parfois diffuser des images dans la foulée, quand il y a une parution dans un magazine, dans un journal, et à d'autres moments, de garder de côté des photos de projets plus personnels, qui auront plus de force et de sens, d'être publiées ensemble, conjointement, des mois après. Donc il y a vraiment une harmonie pour moi entre... le temps court de réaliser des portraits en à peine 4-5 minutes, 4-5 images, et puis des temps plus longs à vie pour mes sujets autour des rats, des restos routiers. Je dirais que dans une société surbondée d'images numériques, moi je me prends un peu à rêver d'une diffusion davantage par l'objet à l'avenir, de donner une part belle aux posters, aux tirages signés, aux fanzines, aux journaux papiers, aux albums. Je dirais à des supports vraiment palpables, avec toute leur aura, et aussi que l'on peut offrir, et c'est important. et mes envies, là c'est clairement de repartir sur la route, notamment pour continuer mon projet sur les soirées loto en France, pour moi c'est vraiment un combo incroyable de suspense de panier garni, de superstition de gris coloré et d'humain rayonnant surtout j'ai très hâte

  • Speaker #1

    Merci d'avoir écouté ce podcast vous pouvez retrouver tous les épisodes de Vision sur les plateformes de podcast de Spotify en bassant par Deezer, Apple Podcasts et nos actualités sur notre site vision.photo ou sur notre Instagram at podcastvision. Si vous avez quelques secondes pour noter et laisser votre avis, ça nous aide aussi beaucoup. A très vite pour parler de photographie.

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Description

Souvent coiffé d’un bob marin et arborant un style vestimentaire qui lui est propre, Guillaume Blot est une personne que l'on reconnait de loin. Photographe documentaire, Guillaume est passionné par les moments authentiques du quotidien, qu’il immortalise la plupart du temps au flash.


Dans cet épisode, il nous emmène dans un fascinant tour de France : des buvettes de stades aux rades, jusqu’à son dernier projet, où il part à la rencontre des chauffeurs routiers et de leurs fameux relais. Guillaume aime maîtriser ses propos et sa communication, mais ses projets sont avant tout profondément humains, à son image.


🤝 Partenaire


MPB, la plus grande plateforme en ligne au monde pour acheter, vendre et échanger du matériel photo et vidéo d’occasion.


🎙 Crédits


Un podcast réalisé et écrit par Aliocha Boi, produit par Noyau.studio, monté et mixé par Virgile Loiseau et mis en musique par Charlie Janiaut.


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Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

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  • Speaker #0

    Une production à Noyaux Studios.

  • Speaker #1

    Salut c'est Aliocha, vous écoutez Vision, le podcast qui donne nos images. Nous avons la chance cette saison d'être accompagnés à nouveau par MPB, qui est la plus grande plateforme au monde pour acheter, vendre et échanger du matériel photo et vidéo d'occasion, et surtout de manière fiable. Pour vous donner un exemple précis, je viens de vendre un appareil photo numérique que je n'utilisais plus du tout. Je l'ai tout simplement fait estimer sur le site de MPB, ça prend 30 secondes. Ensuite je l'ai envoyé, la livraison est gratuite, et l'équipe spécialiste produit de MPB C'est vraiment occuper du reste, c'est-à-dire d'inspecter avec soin le matériel et de le mettre en ligne. Voilà, c'est aussi simple que ça. Je vous conseille vraiment cette expérience, que ce soit au niveau de la vente, mais aussi de l'achat. Merci encore à MPB de nous accompagner pour cette nouvelle saison. Je vous souhaite, quant à moi, une très bonne écoute.

  • Speaker #0

    J'aimerais vous parler de la photo de Johnny, c'est un chauffeur routier incroyable rencontré l'été dernier au Resto Routier Le Tarin, c'est à La Bati en Savoie. Il est d'ailleurs devenu l'icône de la couverture du livre Resto Routier. J'ai adoré passer ces 45 minutes de pause réglementaire avec lui. Il est arrivé avec son camion rouge et jaune sur le parking, il s'est dirigé vers le comptoir et on a tout de suite papoté avec les deux postières, Aurore et Julie. Et lui, il m'a vraiment raconté son amour de la route, du western. Pourquoi son surnom Johnny ? Parce que c'est pas vraiment son vrai prénom, mais ça je peux pas vraiment, disons, révéler l'officiel. Et puis il m'a proposé d'aller voir son camion et en fait, au moment où je le vois grimper dans la cabine, là je visualise la photo. Et je lui dis Johnny, ne bouge surtout pas, regarde-moi. Et c'est à ce moment-là que je le photographie avec le flash. Et en fait, c'est une photo forte pour moi, car en fait, elle me rappelle avant toute cette rencontre, et tout ce moment passé autour du café, au comptoir et sur le parking, avec un John Wayne en plus, qui était affiché en miniature dans son camion. Et je me souviens, comme s'il nous regardait papoter sur le gravier, ça m'a beaucoup marqué ce moment avec lui. Je m'appelle Guillaume Blot, je suis photographe documentaire. J'ai grandi à Toiré-sur-Loire, un petit village à côté de Nantes, jusqu'à mes 20 ans, puis je suis parti ensuite à Marseille à ce moment-là, et puis Paris pour terminer mes études au CELSA à la Sorbonne, avant ensuite de me former un peu plus à la photographie en continu au Goublin notamment. Et aujourd'hui j'habite à côté de Fontainebleau, en Sud-Sénémarne. Ma mère est prof de techno, mon père est cheminot. Je pense qu'en tout cas, le train, j'ai, grâce à mon père en particulier, pu vraiment commencer mes tours de France dès tout petit, grâce aux facilités de circulation que j'avais. Et d'ailleurs, ma première série Buvette, en 2015, je la réalise vraiment parce que c'est mon dernière année de train quasiment gratuit. Et je veux célébrer cette dernière année. Et c'est un moment où j'aime beaucoup, disons en particulier les avant-matchs de foot. Et donc, je me lance dans un grand Tour de France des stades avec l'idée de chroniquer des buvettes que l'on peut y trouver autour pour voir ce que chacun mange en fonction des villes. donc c'est vrai que ça m'a vraiment Je dirais lancer, en tout cas soutien familial. Dans mes premiers projets, ils ont toujours été présents avec moi, au-delà du train en fait. Ça a été vraiment mes parents de croire en mes projets, mes premiers projets notamment Buvette puis Rad ensuite. C'est vraiment les premiers qui vont au bureau de tabac d'ailleurs, acheter un exemplaire du monde quand j'ai un sujet qui est là. Donc moi ça me touche vraiment, je dirais ce soutien d'avoir des parents vraiment alliés. Je crois que ce qui m'a vraiment donné envie de faire de la photo, et en tout cas les premières images que j'ai, elles sont finalement dans mes yeux où je suis tout petit, mon père m'emmène au stade à la Beaujoire à Nantes, et je vois toutes ces écharpes de couleurs, ces frites déjà, ces sandwiches américains, ces cocas, ces bières, et en fait j'adore cet univers, ces odeurs en plus, ces bruits un peu électrogènes, le speaker qui annonce la composition de... de mon club de cœur. Et donc, je pense que ça m'a vraiment... C'est vraiment imprimé en moi, cet univers des avant-matchs. Donc, ces images que j'avais finalement dans les yeux, je les ai transformées en première série documentaire en 2015 avec Buvette en me rendant dans les différents stades de France et évidemment, de nouveau à Nantes. C'est fou, le foot. J'avoue, je regarde encore un peu les scores. Je pense que ça habite... Comme c'est mes premières émotions fortes, je me souviens des... C'est mes frites de Proust, les avant-matchs avec mon père partagé ce moment, de voir les buts, de se lever avec une foule en entier, ça m'a vraiment beaucoup marqué. C'est de l'ordre de l'épidermique et je pense que c'est pour ça que ça m'habite encore aujourd'hui ce sport. Ce qui m'influence, ça évolue un petit peu tout le temps, moi je dirais qu'en photographie évidemment c'est tout l'imaginaire très coloré, très flashé, de Lars Thunbjörk, de Martin Parr. Dans un autre registre, je dirais que dans l'absurde malin, je l'appelle comme ça, j'aime beaucoup le travail de l'artiste canadienne Gabbois, qui est très dans la transformation avec beaucoup d'humour, d'objets du quotidien. Et visuellement, je trouve que ça claque. Gabbois, par exemple, il y a une photo récente qui m'a marqué, c'est dans une voiture, dans la boîte à gants, elle l'a tirée et en fait, ça devient une forme de plateau d'huître. Donc il y a un peu ce côté... improbable, très coloré, assez drôle et qui moi me parle beaucoup notamment pour ma série la plus récréative qui s'appelle Légende. Et une autre source d'inspiration, documentaire vidéo, j'admire particulièrement les oeuvres du réel d'Alice Diop et d'Alain Cavalier aussi avec tous ses portraits XL notamment. Je dirais que mon travail flash avec un humour tendre entre la culture populaire française et l'humain dans toute sa poésie brute. Mes images visent à montrer la beauté du quotidien et à raconter des histoires que je qualifie de merveilleusement normales. Et l'ensemble est visible à travers les différents projets que j'ai pu mener depuis Buvette, ma première série sur l'univers des friteries autour des stades, de Rad qui s'aventure dans les bistrots les plus authentiques du pays. et plus récemment de restaurants routiers, sur ces relais en couleur qui offrent repas et repos aux chauffeurs et chauffeuses. Je travaille également sur des projets plus intimes, liés au corps intime comme Jeune Naturiste, sur les naturistes et les franges entre 20 et 40 ans, une série qui a pu être exposée au Mucem en 2024, et Partie Intime également qui vise à sensibiliser sur la contraception masculine. dite thermique. Donc mon travail il a en dix ans je crois bien évolué mais toujours en lien avec des univers, des expériences que j'ai pu moi même connaître. Par exemple je fais cette série sur les jeunes naturistes parce que je commence en 2018 moi même à faire du naturisme et donc ça m'intéressait de documenter ces motivations quand on est jeune alors qu'on a peut-être en tête un imaginaire de plutôt de quinquagénaire en tongs au camping si je schématise un peu l'image d'épinal du naturiste alors que évidemment pas du tout, c'est très diversifié. Partie intime, c'est parce que je commence à me contracepter à ce moment-là et que ça me permet de mieux pousser mes recherches et de donner peut-être aussi des informations que moi je n'avais pas forcément trouvées à ce moment-là. Et puis, rad, resto routier, c'est des univers que j'ai pu côtoyer lors de mes reportages, dans ma vie aussi au quotidien quand je me pose avec mes amis à un café ou autre. Et ma photo en fait elle a aussi pas mal évolué d'un point de vue flash. Je l'utilise de manière beaucoup plus brute, plus franche ces dernières années, ce qui était moins le cas avant. J'ai fait ce choix pour vraiment, à mon sens, apporter plus de peps à l'image, plus de piment, et puis mettre davantage même en lumière, avec cette lumière un peu... Très brut, les personnes photographiées, je trouve que ça rehausse vraiment un ensemble, un univers et ça permet de révéler toute la vie des personnes que je photographie. Disons que l'expérimentation s'est faite au fur et à mesure où le flash, j'ai essayé de passer en mode manuel, à la place du TTL qui apporte une lumière beaucoup plus douce, maîtrisée. Moi j'assume totalement ce côté où je mets en puissance maximale mon flash. Je joue après plutôt sur les réglages de mon appareil photo pour diminuer ou pas l'intensité. Je retouche aussi en post-prod avec un peu cet effet vignettage qui permet d'avoir cet halo autour des détails, des portraits, des personnes. Et oui, c'est vraiment en tentant, en n'ayant pas peur parfois de carrément faire des cheveux de tout claquer parce que la lumière était beaucoup trop brute. L'avantage du numérique, c'est qu'on peut quand même voir en temps réel un petit peu ce que ça donne sur l'écran et c'est en tâtonnant comme ça qu'au fur et à mesure, je me sentis à l'aise avec cette lumière peut-être plus crue. C'est devenu une forme d'élément caractéristique de mon travail aujourd'hui en complément d'autres photos que je... Je fais avec une lumière plus douce et je trouve que l'ensemble se combine bien pour raconter les histoires que je veux aujourd'hui. R.A.T. c'est un projet au long cours qui est né en 2019. En fait je passais du temps dans les cafés comme je pense beaucoup d'entre nous, entre deux trains, à travailler, à voir mes copaines. Et en fait j'y voyais des scènes de vie incroyables, j'y entendais des punchlines folles pour ainsi dire. et donc j'ai commencé à réaliser des premières photos des portraits, des détails des scènes de vie dans les baltos, les brasas, les cafés des sports avec l'objectif à ce moment-là vraiment de montrer le verre plus à moitié plein qu'à moitié vide de ces espaces déjà en voie de disparition puisqu'on est passé de 200 000 cafés dans les années 60 à à peine 36 000 aujourd'hui donc ça a été vraiment une érosion et l'idée pour moi c'était en tout cas plutôt de parler, de raconter des histoires de résistantes et résistants qui sont les patrons de patrons et les habitués de ces lieux. Donc après quatre ans de Tour de France, au volant de mon petit camion, la Blotte Mobile, et plus de 220 immersions, je me suis senti à l'aise de proposer de sortir un livre grâce aux éditions Webeck de Gallimard. Donc un livre qui dresse avec, je dirais, tendresse. En tout cas, c'est ce que j'ai essayé de faire, un panorama photo de ces lieux du quotidien résistant et qui sont même désormais inscrits au patrimoine culturel et matériel français. Le livre a plutôt bien été reçu, je crois. On a dépassé les 10 000 exemplaires vendus. Moi, je suis évidemment super content à ma petite échelle. Déjà, d'avoir pu mettre en lumière ces lieux de vie, ces espaces vraiment de vitalité, et si nécessaire, pour une sociabilité de proximité pour beaucoup de personnes, ces cafés. Pour mon travail également, ça m'a apporté de la visibilité davantage. On m'a confié plus de commandes. Mon travail sur l'aspect populaire a été plus reconnu. J'ai aussi pu proposer des sujets. Je me souviens des 24 heures du puzzle que j'avais proposé à Society, qui avaient été acceptés dans la foulée quasiment. Il y a les chemins de France de Fléchette que j'avais pu aussi leur proposer. Donc peut-être les idées que j'avais auparavant qui étaient un peu moins considérées. Grâce à la visibilité du projet, d'un point de vue médiatique, parce que j'ai eu la chance de pouvoir parler du livre et de la série dans différents médias, ça m'a apporté plus de lumière sur un travail de fond que je menais déjà depuis depuis des années. Donc ça m'a facilité des rencontres et des sujets dans le documentaire et même publicitaire puisque petit live goal, cette série m'a même permis de réaliser une campagne pour Picon. Donc c'était un petit clin d'oeil un peu marrant par rapport aussi à au cœur du sujet qui était les bistrots. Je pense que cette série a été appréciée des médias parce qu'on a vraiment chacun, j'ai l'impression, un amour pour les bistrots. On a chacun, chacune, une histoire de rad, de trocquet, et donc il y a une vraie, vraie affection. Le livre est devenu une forme de cadeau, même pour beaucoup, pour un peu témoigner à d'autres personnes cet élan que l'on a chacun pour ces espaces de vie. Des lieux qui revendiquent leur popularité, leur mixité, mais sans en avoir l'authenticité. Pour moi, ça prend vraiment du temps de construire une âme et de conférer une à un lieu. Et donc ça ne passe pas par, malheureusement, des carafricards. C'est vraiment le temps et les personnes qui vont insuffler toute la vie à cet espace. Et c'est des lieux qui n'ont pas les prix des vrais rads. Et donc toute cette tendance, je dirais, à ces néo-PMU, moi je ne peux que le déplorer. L'idée de mon travail, c'est vraiment de raconter des vies qui sont authentiques, qui ont une âme. Et c'est vraiment à quoi je m'évertuerai encore et encore. J'ai développé un protocole immersif que j'applique particulièrement à mes séries rad et restos routiers en ce moment. En fait, j'arrive avec l'appareil photo dans le sac à dos. Il n'est jamais vraiment visible. Je me pose au comptoir. Quand je rentre, je prends un demi, un expresso et puis j'écoute. Je me fonds dans la masse, j'observe. Et puis à un moment donné, je vais réussir à rentrer dans la conversation. C'est un peu la magie du comptoir. Il y a une forme de small talk. C'est dès qu'il y a une petite blague, une petite vanne, c'est un peu plus facile de s'insérer. Et donc c'est à ce moment là où Quand j'ai bien papoté, quand il y a des interactions avec patronnes, patrons et les habitués. Quand j'ai suffisamment aussi posé de questions, parce que c'est un peu une des formations que j'ai. Parce que je suis assez curieux et que je peux facilement interviewer rapidement les personnes sans que ça porte le nom d'interview. Mais quand la curiosité s'inverse et que les personnes se demandent pourquoi je suis là aussi, je leur dis que je ne suis pas uniquement présent pour boire une menthe à l'eau, mais aussi parce que je documente ces espaces. à à leur expliquer mon vrai intérêt pour ces cafés, pour ces lieux de vie et que je suis photographe et que j'adorerais réaliser des images de leur établissement, de faire des portraits s'ils sont d'accord, de prendre des détails en photo. Et je considère que cette méthode vraiment plus douce que d'arriver frontalement et de sortir l'appareil photo, enfin même de l'avoir déjà à la main et de commencer à flasher. ça serait beaucoup trop agressif, trop violent, et on serait vraiment dans un rapport de consommation de l'autre, de l'image que je n'ai pas du tout envie d'avoir. Donc cette méthode vraiment plus douce, ça me permet de gagner leur confiance, qu'ils comprennent, qu'ils acceptent ce moment d'échange plus facilement. Et puis je tiens vraiment aussi à garder un lien au-delà de la prise de vue et de ce moment qu'on a passé ensemble, puisque je garde un contact, un mail. Un téléphone, une adresse postale aussi, pour ceux qui ne sont pas forcément connectés, et je leur envoie systématiquement les photos. Comme on en parlait tout à l'heure de l'évolution d'une pratique, c'est vrai qu'au départ, un peu peut-être naïvement, j'arrivais avec l'appareil photo en bandoulière, et c'est vrai que je me rendais compte un petit peu de la... Peut-être défiance que pouvait représenter cet objet en fait, qui pour certains peut être assez intrusif quand même, de se laisser déshabiller par l'appareil photo, de se mettre un peu à nu entre guillemets par rapport à un inconnu qui est là dans un espace. et donc c'est au fur et à mesure je me suis rendu compte qu'il fallait que je change ma manière de procéder puis c'était beaucoup plus humain aussi de déjà de d'arriver dans le lieu comme une personne classique de pas être dans un rôle de vraiment poser de boire un coup même moi ça me ça me permet de prendre note d'un petit coin d'un carnet de mots clés entendus de phrases pour un peu mieux sentir le... L'endroit, toute son âme, toute sa chaleur, et donc oui, à fur et à mesure des immersions que je réalisais, autant pour les rats que les ristoroutiers, j'ai commencé à en faire vraiment un protocole. Pour la série sur les jeunes naturistes, le protocole est quand même légèrement différent, puisque je n'ai pas de sac à dos. L'appareil photo, là, il est... Plus en bandoulière et disons que j'annonce en amont, je me souviens pour la toute première session de photo, on avait prévenu le camping, c'était à Montalivet, avec la photographe Rebecca Topakian, on avait commencé cette série à deux. Et on avait affiché des pancartes en fait pour prévenir les gens qu'il y avait un reportage qui avait lieu et on avait donné même des rendez-vous aux personnes s'ils voulaient faire partie de la série. Il y a vraiment son père qui est venu. Il y a vraiment zéro personne à ce rendez-vous. Donc on s'est baladé avec l'appareil photo, mais bien quand même le cache dessus. On a eu pas mal de remarques par rapport à ça quand on se baladait. On voyait vraiment avoir ce cache. Les gens sont assez frileux quand ils ne connaissent pas de voir un appareil photo visible, même en bandoulière. On était en tout cas plus facilement identifiés comme photographes à ce moment-là. On allait voir les gens et on leur expliquait, mais vraiment toujours en regardant l'appareil photo en bandoulière. Après une discussion assez longue, il y avait vraiment une mise en confiance plus prononcée. et qu'on commençait à faire des images dans le second temps. Le flash, je l'utilise vraiment pour deux raisons principales. la première. Il y a donc ce côté très brut de ma lumière qui permet vraiment de faire ressortir toutes les couleurs, tout le peps, le sel un peu des situations, des visages, des habits, des attitudes. Il y a donc ce côté flash et aussi le léger décadrage que j'utilise assez souvent, ce qui permet vraiment de renforcer, je dirais, le côté pris sur le vif, le côté en immersion de la photo. Et la deuxième raison, c'est qu'en transparence, le flash pour moi c'est quelque chose de très pratique, dans le sens où j'arrive souvent dans des endroits où la lumière est assez faible, pas hyper flatteuse, et donc d'avoir mon flash Cobra, ça me permet bien souvent de me sortir de situations assez compliquées, et donc ça me rassure vraiment je crois de l'avoir avec moi. Resto routier est né en parallèle de RAD en fait en 2018-2019. Initialement c'est une commande pour un livre intitulé Cantines Générales où Julien Femme qui en avait la rédaction, en tout cas l'éditorial et les choix, m'avait demandé de documenter la cantine des chauffeurs routiers, à savoir donc les relais routiers. Et en fait... J'ai tellement aimé y passer du temps, dans ces restaurants, que pendant mes étés de Tour de France par la suite, avec mon petit camion, j'ai continué de m'y arrêter et d'y faire des photos, pour vraiment documenter ces espaces en voie de disparition eux aussi, puisqu'on est passé vraiment de 4500 restos routiers dans les années 70 à à peine 700 aujourd'hui. Cette baisse, elle est à cause essentiellement du développement des autoroutes, des interdictions de traverser certaines zones, et encore des chauffeurs qui ne s'arrêtent même presque plus que le soir. parce qu'ils préfèrent garder leur enveloppe de frais du midi comme un second salaire en quelque sorte, en prenant simplement un sandwich par exemple. Et donc j'ai voulu à mon échelle encore mettre en lumière le quotidien trépidant de ces lieux, la vie autant couleur qui s'y dévoile, pareil de ces résistants du bord des routes qui triment bien souvent de 4h le matin jusqu'à très très tard le soir. Pour moi c'est vraiment des héros et héroïnes du quotidien, du tous les jours. Et moi j'en suis hyper admiratif et je voulais leur rendre hommage aussi à travers cette série. Pour moi, ces restos routiers sont vraiment des tiers-lieux. Dans la définition des sociologues Ray Oldenburg et plus récemment d'Antoine Buret, les tiers-lieux sont des lieux qui impliquent... une dimension sociale de partage, d'entraide, de solidarité, avec une atmosphère qui s'en dégage, et surtout une considération pour sa population, une forme de lieu de ralliement d'une communauté, et surtout qui dépasse la simple transaction commerciale. Et en ce sens, les restos routiers, ils regroupent toutes ces caractéristiques de lieu de vie, de faire, comme on l'entend, communauté, de partager un moment de retrouvaille, il y a une vraie entraide, ça papote, ça se retrouve, ça se fait vraiment... Un moment où les solitudes s'agrègent, se retrouvent. C'est exactement le cas des restos routiers pour la communauté des chauffeurs et chauffeuses routiers. Et plus largement le midi avec les ouvriers et les gens du coin. J'ai souvent entendu d'ailleurs que c'est ici, un peu c'est la maison, dans la bouche des personnes que j'ai rencontrées là-bas. Donc ce côté vraiment à l'aise, de confort, de retrouvailles avec des personnes proches, d'entraide, pour moi c'est vraiment... une déclinaison de ce qu'on appelle les tiers-lieux. En opposition totale avec le concept de non-lieux de Marc Auger, qui sont vraiment des espaces d'anonymat, c'est toutes ces installations que l'on peut voir, notamment qui sont nécessaires à la circulation des personnes, les voies rapides, les échangeurs, les gares, donc les restaurants, même d'autoroutes, plutôt aseptisés, les franchises. Les restauroutiers, ils viennent vraiment en opposition à ces lieux de passage totalement anonymes. sans vraiment réel aspect de demeure, de résidence, de lieu au sens commun du terme. Donc il y a clairement une opposition entre ces lieux de vie, d'entraide, de retrouvailles, ces tiers-lieux donc, les restaurants routiers, en opposition avec les non-lieux que peuvent représenter les franchisés d'autoroutes. Les restos routiers, vraiment, c'est mes compagnons de route. L'été, c'est des endroits où, quand je voyage seul par moment, de pouvoir pousser la porte d'un resto de bord de route, de me poser un peu au comptoir avant d'aller manger, puis de m'installer ensuite sur ces grandes tablues, puisque les restos routiers, aussi, sont des marqueurs. Au-delà de trouver une douche, un grand parking et donc des menus à prix imbattable, c'est ce côté aussi vraiment vie en... en commun avec un tel qui va se mettre en face. Et en fait, ça fait des grandes tablées de 10-15 personnes. Et ça permet vraiment de discuter avec tout le monde. Et donc, c'est comme ça que moi, je m'immergeais. Je retrouvais une sociabilité plus présente. Et ça me permettait de passer des soirées incroyables, un peu raconter nos vies. Et moi, j'en apprenais beaucoup, en fait, sur leur quotidien, sur leur vie. Ils sont souvent un peu considérés comme les derniers maillons de la mondialisation, les chauffeurs et chauffeuses routiers. Donc, il y a ce côté... où ils ont l'impression d'être assez stigmatisés, il y a une manque de reconnaissance. Et donc moi, tout ça, ça me permettait d'écouter, de comprendre un peu mieux leur quotidien, la rudesse de leur travail. Et ça m'importe aujourd'hui, en tout cas, à travers ce travail, au-delà du lieu des restaurants routiers, mais de raconter aussi ces métiers. Je pense que le déplacement ça fait partie de mon essence. Sans jeu de mot, je mets du diesel en plus dans la blotte mobile. C'est plus ce côté, ça me permet de me sortir d'un quotidien stable et de me remettre en moment de création, d'aller chercher aussi cet état mental de la conduite que j'adore. J'appelle ça un peu la transe de la ligne blanche quand je suis sur des... derrière le volant et que je conduis avec mes yeux posés sur les traits du milieu de la route et que ma tête, elle part dans la réflexion. J'adore cet état en fait que peut procurer la conduite, la voiture. Et c'est vrai qu'après les mouvements, ça me permet d'aller à la rencontre d'univers que je suis peut-être moins familier de base et ça me sort d'une bulle et ça me permet de rencontrer aujourd'hui mes voisins au sens large. Et j'adore ça. Pour moi, c'est une vraie volonté de documenter plutôt la France. d'aller arpenter les nationales départementales parce que je considère que c'est toujours plus important et fort de mieux connaître ses voisins que d'aller au loin et chercher l'exotisme. Pour moi, c'est vraiment crucial, vital, nécessaire de mieux connaître qui vit autour de moi à l'échelle de la France, qui est déjà incroyablement grande avec tellement de diversité. Et donc, c'est pour ça que je m'évertue vraiment à rester dans ce cadre-là pour simplement mieux connaître. avec qui je vis aujourd'hui. Sur cette photo, on aperçoit Thomas, qui est un chauffeur routier breton de 21 ans. qui allume une dernière clope avant d'aller se coucher. On est à côté du resto routier Le Médine, à Coverville-en-Roumois, dans l'heure. En fait, j'ai passé la soirée à manger avec lui, son collègue Antoine, et un autre chauffeur rencontré sur la terrasse, qui s'appelle Eric, qui vient des Vosges, de son côté. Et on a discuté de leur quotidien sur les routes, de leur temps de pause au relais, qui est hyper important pour eux, Thomas en particulier. J'étais curieux de savoir comment il vivait tous les jours avec son camion, sa cabine. Il me raconte que sa cabine est toute petite, un peu étriquée, que lui il aime bien faire du sport pour s'entretenir notamment, et qu'il a ses élastiques toujours avec lui, mais que c'est trop galère d'en faire dans le camion parce qu'il n'arrive pas à s'y tenir debout, il fait 1m80. C'est un peu ces histoires, ces détails de quotidien que j'aime bien raconter pour vraiment se rendre compte d'une réalité du tous les jours. Je suis avec lui dans le champ d'à côté, il fume sa clope et c'est là qu'il y a évidemment ce soleil aussi couchant incroyable et je décide de faire une sorte de nuit américaine en diminuant l'ambiance autour pour faire ressortir les couleurs et lui donner un petit coup de flash sur lui au premier plan. Et puis voilà, il a eu sa clope et juste après celle-ci, il filera sa cabine sur le parking à 100 mètres, rangée en randonnion avec les autres chauffeurs pour passer sa nuit d'été. Je trouve que le doute, il est plutôt sain quand il n'est pas paralysant. C'est un vrai moteur pour moi. C'est ce qui permet de ne pas se reposer sur ses acquis, de vouloir créer, de se renouveler. En photo notamment, ça va être de travailler chaque sujet, comme si c'était le premier, de réfléchir en amont à des manières de traiter le reportage, donc d'écrire. Moi, systématiquement, j'écris sur un papier, à des idées de prise de vue. Ça me permet vraiment d'arriver avec une base, des idées sur le moment, et de ne pas être paralysé par le reportage et le shoot. Je vais aussi avoir ce doute au moment d'envoyer les photos aux médias, me demander est-ce que les images que j'ai transmises à la rédaction du AM, de l'IB, de CIT vont leur plaire. Et je crois que tant que je n'ai pas reçu le mail réponse qui me dit que ça leur convient, je suis toujours un petit peu en stress en fait, je ressens. Et c'est ok, c'est ok d'un côté ça me rassure, ça me témoigne que je mets de ressentir ce doute du cœur sincère, de l'envie, de l'élan dans mes reportages. C'est vrai qu'avec le temps d'avoir pu éditer un livre, de pouvoir montrer mon travail à travers des expositions, m'ont fait gagner en confiance en moi, en mon travail, et je pense aussi en légitimité. Je trouve que l'objet, à travers une publication dans un journal, un magazine, et un livre, et aussi l'expo, ça concrétise davantage un travail, ça le rend plus palpable, plus formel, on peut limite le toucher en fait. Ça le réalise davantage. C'est vrai que moi, ça me permet in fine de me rendre davantage compte du chemin parcouru. Ça me permet de mettre, même et surtout, mieux en valeur les personnes que je photographie, les lieux, les détails, les scènes de vie. Donc, par ces demonstrations, je pense au Mucem pour la sélection de naturistes, cette expo collective. Je pense à la dernière expo en Corée de quelques images que j'ai pu réaliser en Méditerranée ou à l'expo... de Restos Routiers à la Galerie S, ça offre un regard limite à taille réelle en fait, d'avoir des grands tirages, en tout cas c'est ce que je propose, et donc de se rendre compte même plus formellement des sujets que je photographie. Au-delà de l'édition du livre et purement du côté contenu, il y a un gros travail que j'ai pu effectuer avec Gallimard sur l'aspect communication, donc comment rendre à juste valeur et donner une chance à ces images d'être visibles. Et donc ça passe par l'organisation de signatures qu'on va faire pour le livre en France, l'exposition également à la Galerie S, d'imaginer des supports comme des stickers, comme un journal papier que j'offre en ce moment. avec mes rendez-vous pour essayer vraiment de raconter à ces restos routiers qu'ils aient une chance d'être un peu plus visibles. Et je pense que la communication peut être aussi une création et que ça peut simplement permettre à la juste hauteur aux images de vivre. Je dirais qu'en photo, il n'y a pas un temps, mais il y a des temps qui s'imbriquent joliment, à la fois les temps des projets au long cours, typiquement mes projets buvette, rad, restauroutier, qui vont durer pour ainsi dire à vie, en fait que je nourris en fil rouge avec des pauses, des moments plus déter, d'accélération, et ils sont un peu en filigrane dans mon quotidien. Et en parallèle, il y a des temps plus courts, comme les reportages pour la presse, un portrait de quelques minutes à peine pour le réaliser, une manif, un mariage, une illustration pour accompagner un article. Je crois que j'aime bien cette danse, en fait, entre ces différents temps, ça apporte pour moi du rythme, de pouvoir parfois diffuser des images dans la foulée, quand il y a une parution dans un magazine, dans un journal, et à d'autres moments, de garder de côté des photos de projets plus personnels, qui auront plus de force et de sens, d'être publiées ensemble, conjointement, des mois après. Donc il y a vraiment une harmonie pour moi entre... le temps court de réaliser des portraits en à peine 4-5 minutes, 4-5 images, et puis des temps plus longs à vie pour mes sujets autour des rats, des restos routiers. Je dirais que dans une société surbondée d'images numériques, moi je me prends un peu à rêver d'une diffusion davantage par l'objet à l'avenir, de donner une part belle aux posters, aux tirages signés, aux fanzines, aux journaux papiers, aux albums. Je dirais à des supports vraiment palpables, avec toute leur aura, et aussi que l'on peut offrir, et c'est important. et mes envies, là c'est clairement de repartir sur la route, notamment pour continuer mon projet sur les soirées loto en France, pour moi c'est vraiment un combo incroyable de suspense de panier garni, de superstition de gris coloré et d'humain rayonnant surtout j'ai très hâte

  • Speaker #1

    Merci d'avoir écouté ce podcast vous pouvez retrouver tous les épisodes de Vision sur les plateformes de podcast de Spotify en bassant par Deezer, Apple Podcasts et nos actualités sur notre site vision.photo ou sur notre Instagram at podcastvision. Si vous avez quelques secondes pour noter et laisser votre avis, ça nous aide aussi beaucoup. A très vite pour parler de photographie.

Description

Souvent coiffé d’un bob marin et arborant un style vestimentaire qui lui est propre, Guillaume Blot est une personne que l'on reconnait de loin. Photographe documentaire, Guillaume est passionné par les moments authentiques du quotidien, qu’il immortalise la plupart du temps au flash.


Dans cet épisode, il nous emmène dans un fascinant tour de France : des buvettes de stades aux rades, jusqu’à son dernier projet, où il part à la rencontre des chauffeurs routiers et de leurs fameux relais. Guillaume aime maîtriser ses propos et sa communication, mais ses projets sont avant tout profondément humains, à son image.


🤝 Partenaire


MPB, la plus grande plateforme en ligne au monde pour acheter, vendre et échanger du matériel photo et vidéo d’occasion.


🎙 Crédits


Un podcast réalisé et écrit par Aliocha Boi, produit par Noyau.studio, monté et mixé par Virgile Loiseau et mis en musique par Charlie Janiaut.


✨ Liens  


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Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Une production à Noyaux Studios.

  • Speaker #1

    Salut c'est Aliocha, vous écoutez Vision, le podcast qui donne nos images. Nous avons la chance cette saison d'être accompagnés à nouveau par MPB, qui est la plus grande plateforme au monde pour acheter, vendre et échanger du matériel photo et vidéo d'occasion, et surtout de manière fiable. Pour vous donner un exemple précis, je viens de vendre un appareil photo numérique que je n'utilisais plus du tout. Je l'ai tout simplement fait estimer sur le site de MPB, ça prend 30 secondes. Ensuite je l'ai envoyé, la livraison est gratuite, et l'équipe spécialiste produit de MPB C'est vraiment occuper du reste, c'est-à-dire d'inspecter avec soin le matériel et de le mettre en ligne. Voilà, c'est aussi simple que ça. Je vous conseille vraiment cette expérience, que ce soit au niveau de la vente, mais aussi de l'achat. Merci encore à MPB de nous accompagner pour cette nouvelle saison. Je vous souhaite, quant à moi, une très bonne écoute.

  • Speaker #0

    J'aimerais vous parler de la photo de Johnny, c'est un chauffeur routier incroyable rencontré l'été dernier au Resto Routier Le Tarin, c'est à La Bati en Savoie. Il est d'ailleurs devenu l'icône de la couverture du livre Resto Routier. J'ai adoré passer ces 45 minutes de pause réglementaire avec lui. Il est arrivé avec son camion rouge et jaune sur le parking, il s'est dirigé vers le comptoir et on a tout de suite papoté avec les deux postières, Aurore et Julie. Et lui, il m'a vraiment raconté son amour de la route, du western. Pourquoi son surnom Johnny ? Parce que c'est pas vraiment son vrai prénom, mais ça je peux pas vraiment, disons, révéler l'officiel. Et puis il m'a proposé d'aller voir son camion et en fait, au moment où je le vois grimper dans la cabine, là je visualise la photo. Et je lui dis Johnny, ne bouge surtout pas, regarde-moi. Et c'est à ce moment-là que je le photographie avec le flash. Et en fait, c'est une photo forte pour moi, car en fait, elle me rappelle avant toute cette rencontre, et tout ce moment passé autour du café, au comptoir et sur le parking, avec un John Wayne en plus, qui était affiché en miniature dans son camion. Et je me souviens, comme s'il nous regardait papoter sur le gravier, ça m'a beaucoup marqué ce moment avec lui. Je m'appelle Guillaume Blot, je suis photographe documentaire. J'ai grandi à Toiré-sur-Loire, un petit village à côté de Nantes, jusqu'à mes 20 ans, puis je suis parti ensuite à Marseille à ce moment-là, et puis Paris pour terminer mes études au CELSA à la Sorbonne, avant ensuite de me former un peu plus à la photographie en continu au Goublin notamment. Et aujourd'hui j'habite à côté de Fontainebleau, en Sud-Sénémarne. Ma mère est prof de techno, mon père est cheminot. Je pense qu'en tout cas, le train, j'ai, grâce à mon père en particulier, pu vraiment commencer mes tours de France dès tout petit, grâce aux facilités de circulation que j'avais. Et d'ailleurs, ma première série Buvette, en 2015, je la réalise vraiment parce que c'est mon dernière année de train quasiment gratuit. Et je veux célébrer cette dernière année. Et c'est un moment où j'aime beaucoup, disons en particulier les avant-matchs de foot. Et donc, je me lance dans un grand Tour de France des stades avec l'idée de chroniquer des buvettes que l'on peut y trouver autour pour voir ce que chacun mange en fonction des villes. donc c'est vrai que ça m'a vraiment Je dirais lancer, en tout cas soutien familial. Dans mes premiers projets, ils ont toujours été présents avec moi, au-delà du train en fait. Ça a été vraiment mes parents de croire en mes projets, mes premiers projets notamment Buvette puis Rad ensuite. C'est vraiment les premiers qui vont au bureau de tabac d'ailleurs, acheter un exemplaire du monde quand j'ai un sujet qui est là. Donc moi ça me touche vraiment, je dirais ce soutien d'avoir des parents vraiment alliés. Je crois que ce qui m'a vraiment donné envie de faire de la photo, et en tout cas les premières images que j'ai, elles sont finalement dans mes yeux où je suis tout petit, mon père m'emmène au stade à la Beaujoire à Nantes, et je vois toutes ces écharpes de couleurs, ces frites déjà, ces sandwiches américains, ces cocas, ces bières, et en fait j'adore cet univers, ces odeurs en plus, ces bruits un peu électrogènes, le speaker qui annonce la composition de... de mon club de cœur. Et donc, je pense que ça m'a vraiment... C'est vraiment imprimé en moi, cet univers des avant-matchs. Donc, ces images que j'avais finalement dans les yeux, je les ai transformées en première série documentaire en 2015 avec Buvette en me rendant dans les différents stades de France et évidemment, de nouveau à Nantes. C'est fou, le foot. J'avoue, je regarde encore un peu les scores. Je pense que ça habite... Comme c'est mes premières émotions fortes, je me souviens des... C'est mes frites de Proust, les avant-matchs avec mon père partagé ce moment, de voir les buts, de se lever avec une foule en entier, ça m'a vraiment beaucoup marqué. C'est de l'ordre de l'épidermique et je pense que c'est pour ça que ça m'habite encore aujourd'hui ce sport. Ce qui m'influence, ça évolue un petit peu tout le temps, moi je dirais qu'en photographie évidemment c'est tout l'imaginaire très coloré, très flashé, de Lars Thunbjörk, de Martin Parr. Dans un autre registre, je dirais que dans l'absurde malin, je l'appelle comme ça, j'aime beaucoup le travail de l'artiste canadienne Gabbois, qui est très dans la transformation avec beaucoup d'humour, d'objets du quotidien. Et visuellement, je trouve que ça claque. Gabbois, par exemple, il y a une photo récente qui m'a marqué, c'est dans une voiture, dans la boîte à gants, elle l'a tirée et en fait, ça devient une forme de plateau d'huître. Donc il y a un peu ce côté... improbable, très coloré, assez drôle et qui moi me parle beaucoup notamment pour ma série la plus récréative qui s'appelle Légende. Et une autre source d'inspiration, documentaire vidéo, j'admire particulièrement les oeuvres du réel d'Alice Diop et d'Alain Cavalier aussi avec tous ses portraits XL notamment. Je dirais que mon travail flash avec un humour tendre entre la culture populaire française et l'humain dans toute sa poésie brute. Mes images visent à montrer la beauté du quotidien et à raconter des histoires que je qualifie de merveilleusement normales. Et l'ensemble est visible à travers les différents projets que j'ai pu mener depuis Buvette, ma première série sur l'univers des friteries autour des stades, de Rad qui s'aventure dans les bistrots les plus authentiques du pays. et plus récemment de restaurants routiers, sur ces relais en couleur qui offrent repas et repos aux chauffeurs et chauffeuses. Je travaille également sur des projets plus intimes, liés au corps intime comme Jeune Naturiste, sur les naturistes et les franges entre 20 et 40 ans, une série qui a pu être exposée au Mucem en 2024, et Partie Intime également qui vise à sensibiliser sur la contraception masculine. dite thermique. Donc mon travail il a en dix ans je crois bien évolué mais toujours en lien avec des univers, des expériences que j'ai pu moi même connaître. Par exemple je fais cette série sur les jeunes naturistes parce que je commence en 2018 moi même à faire du naturisme et donc ça m'intéressait de documenter ces motivations quand on est jeune alors qu'on a peut-être en tête un imaginaire de plutôt de quinquagénaire en tongs au camping si je schématise un peu l'image d'épinal du naturiste alors que évidemment pas du tout, c'est très diversifié. Partie intime, c'est parce que je commence à me contracepter à ce moment-là et que ça me permet de mieux pousser mes recherches et de donner peut-être aussi des informations que moi je n'avais pas forcément trouvées à ce moment-là. Et puis, rad, resto routier, c'est des univers que j'ai pu côtoyer lors de mes reportages, dans ma vie aussi au quotidien quand je me pose avec mes amis à un café ou autre. Et ma photo en fait elle a aussi pas mal évolué d'un point de vue flash. Je l'utilise de manière beaucoup plus brute, plus franche ces dernières années, ce qui était moins le cas avant. J'ai fait ce choix pour vraiment, à mon sens, apporter plus de peps à l'image, plus de piment, et puis mettre davantage même en lumière, avec cette lumière un peu... Très brut, les personnes photographiées, je trouve que ça rehausse vraiment un ensemble, un univers et ça permet de révéler toute la vie des personnes que je photographie. Disons que l'expérimentation s'est faite au fur et à mesure où le flash, j'ai essayé de passer en mode manuel, à la place du TTL qui apporte une lumière beaucoup plus douce, maîtrisée. Moi j'assume totalement ce côté où je mets en puissance maximale mon flash. Je joue après plutôt sur les réglages de mon appareil photo pour diminuer ou pas l'intensité. Je retouche aussi en post-prod avec un peu cet effet vignettage qui permet d'avoir cet halo autour des détails, des portraits, des personnes. Et oui, c'est vraiment en tentant, en n'ayant pas peur parfois de carrément faire des cheveux de tout claquer parce que la lumière était beaucoup trop brute. L'avantage du numérique, c'est qu'on peut quand même voir en temps réel un petit peu ce que ça donne sur l'écran et c'est en tâtonnant comme ça qu'au fur et à mesure, je me sentis à l'aise avec cette lumière peut-être plus crue. C'est devenu une forme d'élément caractéristique de mon travail aujourd'hui en complément d'autres photos que je... Je fais avec une lumière plus douce et je trouve que l'ensemble se combine bien pour raconter les histoires que je veux aujourd'hui. R.A.T. c'est un projet au long cours qui est né en 2019. En fait je passais du temps dans les cafés comme je pense beaucoup d'entre nous, entre deux trains, à travailler, à voir mes copaines. Et en fait j'y voyais des scènes de vie incroyables, j'y entendais des punchlines folles pour ainsi dire. et donc j'ai commencé à réaliser des premières photos des portraits, des détails des scènes de vie dans les baltos, les brasas, les cafés des sports avec l'objectif à ce moment-là vraiment de montrer le verre plus à moitié plein qu'à moitié vide de ces espaces déjà en voie de disparition puisqu'on est passé de 200 000 cafés dans les années 60 à à peine 36 000 aujourd'hui donc ça a été vraiment une érosion et l'idée pour moi c'était en tout cas plutôt de parler, de raconter des histoires de résistantes et résistants qui sont les patrons de patrons et les habitués de ces lieux. Donc après quatre ans de Tour de France, au volant de mon petit camion, la Blotte Mobile, et plus de 220 immersions, je me suis senti à l'aise de proposer de sortir un livre grâce aux éditions Webeck de Gallimard. Donc un livre qui dresse avec, je dirais, tendresse. En tout cas, c'est ce que j'ai essayé de faire, un panorama photo de ces lieux du quotidien résistant et qui sont même désormais inscrits au patrimoine culturel et matériel français. Le livre a plutôt bien été reçu, je crois. On a dépassé les 10 000 exemplaires vendus. Moi, je suis évidemment super content à ma petite échelle. Déjà, d'avoir pu mettre en lumière ces lieux de vie, ces espaces vraiment de vitalité, et si nécessaire, pour une sociabilité de proximité pour beaucoup de personnes, ces cafés. Pour mon travail également, ça m'a apporté de la visibilité davantage. On m'a confié plus de commandes. Mon travail sur l'aspect populaire a été plus reconnu. J'ai aussi pu proposer des sujets. Je me souviens des 24 heures du puzzle que j'avais proposé à Society, qui avaient été acceptés dans la foulée quasiment. Il y a les chemins de France de Fléchette que j'avais pu aussi leur proposer. Donc peut-être les idées que j'avais auparavant qui étaient un peu moins considérées. Grâce à la visibilité du projet, d'un point de vue médiatique, parce que j'ai eu la chance de pouvoir parler du livre et de la série dans différents médias, ça m'a apporté plus de lumière sur un travail de fond que je menais déjà depuis depuis des années. Donc ça m'a facilité des rencontres et des sujets dans le documentaire et même publicitaire puisque petit live goal, cette série m'a même permis de réaliser une campagne pour Picon. Donc c'était un petit clin d'oeil un peu marrant par rapport aussi à au cœur du sujet qui était les bistrots. Je pense que cette série a été appréciée des médias parce qu'on a vraiment chacun, j'ai l'impression, un amour pour les bistrots. On a chacun, chacune, une histoire de rad, de trocquet, et donc il y a une vraie, vraie affection. Le livre est devenu une forme de cadeau, même pour beaucoup, pour un peu témoigner à d'autres personnes cet élan que l'on a chacun pour ces espaces de vie. Des lieux qui revendiquent leur popularité, leur mixité, mais sans en avoir l'authenticité. Pour moi, ça prend vraiment du temps de construire une âme et de conférer une à un lieu. Et donc ça ne passe pas par, malheureusement, des carafricards. C'est vraiment le temps et les personnes qui vont insuffler toute la vie à cet espace. Et c'est des lieux qui n'ont pas les prix des vrais rads. Et donc toute cette tendance, je dirais, à ces néo-PMU, moi je ne peux que le déplorer. L'idée de mon travail, c'est vraiment de raconter des vies qui sont authentiques, qui ont une âme. Et c'est vraiment à quoi je m'évertuerai encore et encore. J'ai développé un protocole immersif que j'applique particulièrement à mes séries rad et restos routiers en ce moment. En fait, j'arrive avec l'appareil photo dans le sac à dos. Il n'est jamais vraiment visible. Je me pose au comptoir. Quand je rentre, je prends un demi, un expresso et puis j'écoute. Je me fonds dans la masse, j'observe. Et puis à un moment donné, je vais réussir à rentrer dans la conversation. C'est un peu la magie du comptoir. Il y a une forme de small talk. C'est dès qu'il y a une petite blague, une petite vanne, c'est un peu plus facile de s'insérer. Et donc c'est à ce moment là où Quand j'ai bien papoté, quand il y a des interactions avec patronnes, patrons et les habitués. Quand j'ai suffisamment aussi posé de questions, parce que c'est un peu une des formations que j'ai. Parce que je suis assez curieux et que je peux facilement interviewer rapidement les personnes sans que ça porte le nom d'interview. Mais quand la curiosité s'inverse et que les personnes se demandent pourquoi je suis là aussi, je leur dis que je ne suis pas uniquement présent pour boire une menthe à l'eau, mais aussi parce que je documente ces espaces. à à leur expliquer mon vrai intérêt pour ces cafés, pour ces lieux de vie et que je suis photographe et que j'adorerais réaliser des images de leur établissement, de faire des portraits s'ils sont d'accord, de prendre des détails en photo. Et je considère que cette méthode vraiment plus douce que d'arriver frontalement et de sortir l'appareil photo, enfin même de l'avoir déjà à la main et de commencer à flasher. ça serait beaucoup trop agressif, trop violent, et on serait vraiment dans un rapport de consommation de l'autre, de l'image que je n'ai pas du tout envie d'avoir. Donc cette méthode vraiment plus douce, ça me permet de gagner leur confiance, qu'ils comprennent, qu'ils acceptent ce moment d'échange plus facilement. Et puis je tiens vraiment aussi à garder un lien au-delà de la prise de vue et de ce moment qu'on a passé ensemble, puisque je garde un contact, un mail. Un téléphone, une adresse postale aussi, pour ceux qui ne sont pas forcément connectés, et je leur envoie systématiquement les photos. Comme on en parlait tout à l'heure de l'évolution d'une pratique, c'est vrai qu'au départ, un peu peut-être naïvement, j'arrivais avec l'appareil photo en bandoulière, et c'est vrai que je me rendais compte un petit peu de la... Peut-être défiance que pouvait représenter cet objet en fait, qui pour certains peut être assez intrusif quand même, de se laisser déshabiller par l'appareil photo, de se mettre un peu à nu entre guillemets par rapport à un inconnu qui est là dans un espace. et donc c'est au fur et à mesure je me suis rendu compte qu'il fallait que je change ma manière de procéder puis c'était beaucoup plus humain aussi de déjà de d'arriver dans le lieu comme une personne classique de pas être dans un rôle de vraiment poser de boire un coup même moi ça me ça me permet de prendre note d'un petit coin d'un carnet de mots clés entendus de phrases pour un peu mieux sentir le... L'endroit, toute son âme, toute sa chaleur, et donc oui, à fur et à mesure des immersions que je réalisais, autant pour les rats que les ristoroutiers, j'ai commencé à en faire vraiment un protocole. Pour la série sur les jeunes naturistes, le protocole est quand même légèrement différent, puisque je n'ai pas de sac à dos. L'appareil photo, là, il est... Plus en bandoulière et disons que j'annonce en amont, je me souviens pour la toute première session de photo, on avait prévenu le camping, c'était à Montalivet, avec la photographe Rebecca Topakian, on avait commencé cette série à deux. Et on avait affiché des pancartes en fait pour prévenir les gens qu'il y avait un reportage qui avait lieu et on avait donné même des rendez-vous aux personnes s'ils voulaient faire partie de la série. Il y a vraiment son père qui est venu. Il y a vraiment zéro personne à ce rendez-vous. Donc on s'est baladé avec l'appareil photo, mais bien quand même le cache dessus. On a eu pas mal de remarques par rapport à ça quand on se baladait. On voyait vraiment avoir ce cache. Les gens sont assez frileux quand ils ne connaissent pas de voir un appareil photo visible, même en bandoulière. On était en tout cas plus facilement identifiés comme photographes à ce moment-là. On allait voir les gens et on leur expliquait, mais vraiment toujours en regardant l'appareil photo en bandoulière. Après une discussion assez longue, il y avait vraiment une mise en confiance plus prononcée. et qu'on commençait à faire des images dans le second temps. Le flash, je l'utilise vraiment pour deux raisons principales. la première. Il y a donc ce côté très brut de ma lumière qui permet vraiment de faire ressortir toutes les couleurs, tout le peps, le sel un peu des situations, des visages, des habits, des attitudes. Il y a donc ce côté flash et aussi le léger décadrage que j'utilise assez souvent, ce qui permet vraiment de renforcer, je dirais, le côté pris sur le vif, le côté en immersion de la photo. Et la deuxième raison, c'est qu'en transparence, le flash pour moi c'est quelque chose de très pratique, dans le sens où j'arrive souvent dans des endroits où la lumière est assez faible, pas hyper flatteuse, et donc d'avoir mon flash Cobra, ça me permet bien souvent de me sortir de situations assez compliquées, et donc ça me rassure vraiment je crois de l'avoir avec moi. Resto routier est né en parallèle de RAD en fait en 2018-2019. Initialement c'est une commande pour un livre intitulé Cantines Générales où Julien Femme qui en avait la rédaction, en tout cas l'éditorial et les choix, m'avait demandé de documenter la cantine des chauffeurs routiers, à savoir donc les relais routiers. Et en fait... J'ai tellement aimé y passer du temps, dans ces restaurants, que pendant mes étés de Tour de France par la suite, avec mon petit camion, j'ai continué de m'y arrêter et d'y faire des photos, pour vraiment documenter ces espaces en voie de disparition eux aussi, puisqu'on est passé vraiment de 4500 restos routiers dans les années 70 à à peine 700 aujourd'hui. Cette baisse, elle est à cause essentiellement du développement des autoroutes, des interdictions de traverser certaines zones, et encore des chauffeurs qui ne s'arrêtent même presque plus que le soir. parce qu'ils préfèrent garder leur enveloppe de frais du midi comme un second salaire en quelque sorte, en prenant simplement un sandwich par exemple. Et donc j'ai voulu à mon échelle encore mettre en lumière le quotidien trépidant de ces lieux, la vie autant couleur qui s'y dévoile, pareil de ces résistants du bord des routes qui triment bien souvent de 4h le matin jusqu'à très très tard le soir. Pour moi c'est vraiment des héros et héroïnes du quotidien, du tous les jours. Et moi j'en suis hyper admiratif et je voulais leur rendre hommage aussi à travers cette série. Pour moi, ces restos routiers sont vraiment des tiers-lieux. Dans la définition des sociologues Ray Oldenburg et plus récemment d'Antoine Buret, les tiers-lieux sont des lieux qui impliquent... une dimension sociale de partage, d'entraide, de solidarité, avec une atmosphère qui s'en dégage, et surtout une considération pour sa population, une forme de lieu de ralliement d'une communauté, et surtout qui dépasse la simple transaction commerciale. Et en ce sens, les restos routiers, ils regroupent toutes ces caractéristiques de lieu de vie, de faire, comme on l'entend, communauté, de partager un moment de retrouvaille, il y a une vraie entraide, ça papote, ça se retrouve, ça se fait vraiment... Un moment où les solitudes s'agrègent, se retrouvent. C'est exactement le cas des restos routiers pour la communauté des chauffeurs et chauffeuses routiers. Et plus largement le midi avec les ouvriers et les gens du coin. J'ai souvent entendu d'ailleurs que c'est ici, un peu c'est la maison, dans la bouche des personnes que j'ai rencontrées là-bas. Donc ce côté vraiment à l'aise, de confort, de retrouvailles avec des personnes proches, d'entraide, pour moi c'est vraiment... une déclinaison de ce qu'on appelle les tiers-lieux. En opposition totale avec le concept de non-lieux de Marc Auger, qui sont vraiment des espaces d'anonymat, c'est toutes ces installations que l'on peut voir, notamment qui sont nécessaires à la circulation des personnes, les voies rapides, les échangeurs, les gares, donc les restaurants, même d'autoroutes, plutôt aseptisés, les franchises. Les restauroutiers, ils viennent vraiment en opposition à ces lieux de passage totalement anonymes. sans vraiment réel aspect de demeure, de résidence, de lieu au sens commun du terme. Donc il y a clairement une opposition entre ces lieux de vie, d'entraide, de retrouvailles, ces tiers-lieux donc, les restaurants routiers, en opposition avec les non-lieux que peuvent représenter les franchisés d'autoroutes. Les restos routiers, vraiment, c'est mes compagnons de route. L'été, c'est des endroits où, quand je voyage seul par moment, de pouvoir pousser la porte d'un resto de bord de route, de me poser un peu au comptoir avant d'aller manger, puis de m'installer ensuite sur ces grandes tablues, puisque les restos routiers, aussi, sont des marqueurs. Au-delà de trouver une douche, un grand parking et donc des menus à prix imbattable, c'est ce côté aussi vraiment vie en... en commun avec un tel qui va se mettre en face. Et en fait, ça fait des grandes tablées de 10-15 personnes. Et ça permet vraiment de discuter avec tout le monde. Et donc, c'est comme ça que moi, je m'immergeais. Je retrouvais une sociabilité plus présente. Et ça me permettait de passer des soirées incroyables, un peu raconter nos vies. Et moi, j'en apprenais beaucoup, en fait, sur leur quotidien, sur leur vie. Ils sont souvent un peu considérés comme les derniers maillons de la mondialisation, les chauffeurs et chauffeuses routiers. Donc, il y a ce côté... où ils ont l'impression d'être assez stigmatisés, il y a une manque de reconnaissance. Et donc moi, tout ça, ça me permettait d'écouter, de comprendre un peu mieux leur quotidien, la rudesse de leur travail. Et ça m'importe aujourd'hui, en tout cas, à travers ce travail, au-delà du lieu des restaurants routiers, mais de raconter aussi ces métiers. Je pense que le déplacement ça fait partie de mon essence. Sans jeu de mot, je mets du diesel en plus dans la blotte mobile. C'est plus ce côté, ça me permet de me sortir d'un quotidien stable et de me remettre en moment de création, d'aller chercher aussi cet état mental de la conduite que j'adore. J'appelle ça un peu la transe de la ligne blanche quand je suis sur des... derrière le volant et que je conduis avec mes yeux posés sur les traits du milieu de la route et que ma tête, elle part dans la réflexion. J'adore cet état en fait que peut procurer la conduite, la voiture. Et c'est vrai qu'après les mouvements, ça me permet d'aller à la rencontre d'univers que je suis peut-être moins familier de base et ça me sort d'une bulle et ça me permet de rencontrer aujourd'hui mes voisins au sens large. Et j'adore ça. Pour moi, c'est une vraie volonté de documenter plutôt la France. d'aller arpenter les nationales départementales parce que je considère que c'est toujours plus important et fort de mieux connaître ses voisins que d'aller au loin et chercher l'exotisme. Pour moi, c'est vraiment crucial, vital, nécessaire de mieux connaître qui vit autour de moi à l'échelle de la France, qui est déjà incroyablement grande avec tellement de diversité. Et donc, c'est pour ça que je m'évertue vraiment à rester dans ce cadre-là pour simplement mieux connaître. avec qui je vis aujourd'hui. Sur cette photo, on aperçoit Thomas, qui est un chauffeur routier breton de 21 ans. qui allume une dernière clope avant d'aller se coucher. On est à côté du resto routier Le Médine, à Coverville-en-Roumois, dans l'heure. En fait, j'ai passé la soirée à manger avec lui, son collègue Antoine, et un autre chauffeur rencontré sur la terrasse, qui s'appelle Eric, qui vient des Vosges, de son côté. Et on a discuté de leur quotidien sur les routes, de leur temps de pause au relais, qui est hyper important pour eux, Thomas en particulier. J'étais curieux de savoir comment il vivait tous les jours avec son camion, sa cabine. Il me raconte que sa cabine est toute petite, un peu étriquée, que lui il aime bien faire du sport pour s'entretenir notamment, et qu'il a ses élastiques toujours avec lui, mais que c'est trop galère d'en faire dans le camion parce qu'il n'arrive pas à s'y tenir debout, il fait 1m80. C'est un peu ces histoires, ces détails de quotidien que j'aime bien raconter pour vraiment se rendre compte d'une réalité du tous les jours. Je suis avec lui dans le champ d'à côté, il fume sa clope et c'est là qu'il y a évidemment ce soleil aussi couchant incroyable et je décide de faire une sorte de nuit américaine en diminuant l'ambiance autour pour faire ressortir les couleurs et lui donner un petit coup de flash sur lui au premier plan. Et puis voilà, il a eu sa clope et juste après celle-ci, il filera sa cabine sur le parking à 100 mètres, rangée en randonnion avec les autres chauffeurs pour passer sa nuit d'été. Je trouve que le doute, il est plutôt sain quand il n'est pas paralysant. C'est un vrai moteur pour moi. C'est ce qui permet de ne pas se reposer sur ses acquis, de vouloir créer, de se renouveler. En photo notamment, ça va être de travailler chaque sujet, comme si c'était le premier, de réfléchir en amont à des manières de traiter le reportage, donc d'écrire. Moi, systématiquement, j'écris sur un papier, à des idées de prise de vue. Ça me permet vraiment d'arriver avec une base, des idées sur le moment, et de ne pas être paralysé par le reportage et le shoot. Je vais aussi avoir ce doute au moment d'envoyer les photos aux médias, me demander est-ce que les images que j'ai transmises à la rédaction du AM, de l'IB, de CIT vont leur plaire. Et je crois que tant que je n'ai pas reçu le mail réponse qui me dit que ça leur convient, je suis toujours un petit peu en stress en fait, je ressens. Et c'est ok, c'est ok d'un côté ça me rassure, ça me témoigne que je mets de ressentir ce doute du cœur sincère, de l'envie, de l'élan dans mes reportages. C'est vrai qu'avec le temps d'avoir pu éditer un livre, de pouvoir montrer mon travail à travers des expositions, m'ont fait gagner en confiance en moi, en mon travail, et je pense aussi en légitimité. Je trouve que l'objet, à travers une publication dans un journal, un magazine, et un livre, et aussi l'expo, ça concrétise davantage un travail, ça le rend plus palpable, plus formel, on peut limite le toucher en fait. Ça le réalise davantage. C'est vrai que moi, ça me permet in fine de me rendre davantage compte du chemin parcouru. Ça me permet de mettre, même et surtout, mieux en valeur les personnes que je photographie, les lieux, les détails, les scènes de vie. Donc, par ces demonstrations, je pense au Mucem pour la sélection de naturistes, cette expo collective. Je pense à la dernière expo en Corée de quelques images que j'ai pu réaliser en Méditerranée ou à l'expo... de Restos Routiers à la Galerie S, ça offre un regard limite à taille réelle en fait, d'avoir des grands tirages, en tout cas c'est ce que je propose, et donc de se rendre compte même plus formellement des sujets que je photographie. Au-delà de l'édition du livre et purement du côté contenu, il y a un gros travail que j'ai pu effectuer avec Gallimard sur l'aspect communication, donc comment rendre à juste valeur et donner une chance à ces images d'être visibles. Et donc ça passe par l'organisation de signatures qu'on va faire pour le livre en France, l'exposition également à la Galerie S, d'imaginer des supports comme des stickers, comme un journal papier que j'offre en ce moment. avec mes rendez-vous pour essayer vraiment de raconter à ces restos routiers qu'ils aient une chance d'être un peu plus visibles. Et je pense que la communication peut être aussi une création et que ça peut simplement permettre à la juste hauteur aux images de vivre. Je dirais qu'en photo, il n'y a pas un temps, mais il y a des temps qui s'imbriquent joliment, à la fois les temps des projets au long cours, typiquement mes projets buvette, rad, restauroutier, qui vont durer pour ainsi dire à vie, en fait que je nourris en fil rouge avec des pauses, des moments plus déter, d'accélération, et ils sont un peu en filigrane dans mon quotidien. Et en parallèle, il y a des temps plus courts, comme les reportages pour la presse, un portrait de quelques minutes à peine pour le réaliser, une manif, un mariage, une illustration pour accompagner un article. Je crois que j'aime bien cette danse, en fait, entre ces différents temps, ça apporte pour moi du rythme, de pouvoir parfois diffuser des images dans la foulée, quand il y a une parution dans un magazine, dans un journal, et à d'autres moments, de garder de côté des photos de projets plus personnels, qui auront plus de force et de sens, d'être publiées ensemble, conjointement, des mois après. Donc il y a vraiment une harmonie pour moi entre... le temps court de réaliser des portraits en à peine 4-5 minutes, 4-5 images, et puis des temps plus longs à vie pour mes sujets autour des rats, des restos routiers. Je dirais que dans une société surbondée d'images numériques, moi je me prends un peu à rêver d'une diffusion davantage par l'objet à l'avenir, de donner une part belle aux posters, aux tirages signés, aux fanzines, aux journaux papiers, aux albums. Je dirais à des supports vraiment palpables, avec toute leur aura, et aussi que l'on peut offrir, et c'est important. et mes envies, là c'est clairement de repartir sur la route, notamment pour continuer mon projet sur les soirées loto en France, pour moi c'est vraiment un combo incroyable de suspense de panier garni, de superstition de gris coloré et d'humain rayonnant surtout j'ai très hâte

  • Speaker #1

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