Speaker #1J'ai pris cette photo il y a quelques années. Je ne sais plus exactement quand, mais c'était quand j'étais étudiante aux Arts Déco à Paris et j'avais un job en même temps pour gagner ma vie. qui était de faire des photos pour des agences immobilières dans les banlieues chic. Et donc, c'était vraiment des photos basiques, au trépied, au grand angle, qui me demandaient peu d'efforts mentaux, on va dire, mais à la fois de vraiment pas faire de la photo instinctive comme je l'apprenais et comme je l'étudiais en école d'art, mais moyen facile de gagner ma vie. Et donc, c'était le printemps, je suis au Vésiné, je vois... le Vésiné qui fleurit, tout ça. Et donc, j'ai cueilli plein de fleurs entre chaque shoot de maison chic. Et je suis repartie prendre mon RER, rentrer chez moi à Paris, à Crimée. Et du coup, j'ai fait cette photo de ces fleurs dans leur sac plastique en attendant mon train, tout simplement, parce que ça me rendait très heureuse de rentrer avec ces fleurs à Paris. Donc on y voit des fleurs qui dépassent et qui se répandent, qui sortent vraiment d'un sac plastique blanc un peu mou et affaissé sur un siège caractéristique bleu-scient un peu du RER, que je connais très bien aussi parce que je suis banlieusarde et de cette ligne-là. Donc pour moi, c'est hyper familier et un peu en fin de journée, il fait super beau le soleil. Et là, moi, cette image, elle me rend assez heureuse. Je suis Louise Desnos, je suis née à Paris, puis j'ai grandi à Sartreville, en banlieue. Quand j'étais au collège, j'hésitais entre photographe et architecte d'intérieur. J'avais vu la concert d'orientation, j'avais écrit architecte d'intérieur avec plein de H et plein de R à intérieur, etc. Puis j'avais fait mon stage de troisième avec un architecte d'intérieur. À la suite de ce stage, je me suis dit que je ne serais pas architecte d'intérieur. Du coup, photographe, nous voilà. J'ai fait un bac S pour faire plaisir à mes parents, pour les rassurer. Et en gros, c'était un peu le deal qu'on s'était fixé. Tu fais ton bac S et après, tu fais ce que tu veux si t'es sûr de toi. Après, ils m'ont quand même mis pas mal de warnings sur mes envies d'être photographe, de ce que ça impliquait d'être indépendante. Ce ne serait pas facile, ce serait un peu un truc de chaque jour à maintenir. Ce n'était pas la facilité que je choisissais. Donc après le bac, j'ai fait un BTS photo à Roubaix. Je n'ai pas été prise à celui de Paris, j'ai été deg, parce que délocalisée comme j'étais en banlieue. Ce n'était pas agréable comme étude objectivement, mais très utile parce que j'ai... Pas du tout, moi, ce truc de geek un peu technique qui va chercher les trucs. Je l'aide plus en plus quand même d'aller regarder des tutos, des trucs quand je suis bloquée sur des choses, par exemple en montage, vidéo ou ce genre de choses. Mais à la base, ça ne m'attirait pas. Donc, je me suis dit, tu vas te faire un peu mal, tu vas faire un BTS. Ça sera terminé après et voilà. Et effectivement, j'ai fait ça. Mais c'est vrai qu'en BTS, on ne te demande pas d'être artiste. Donc, j'étais aussi super frustrée. J'ai fait beaucoup de stages pendant le BTS, dont un dans un labo, photo qui s'appelait Self Color Vic Art, et aussi un avec un photographe qui s'appelle Mark Lyon. J'y reviendrai plus tard, mais j'ai continué à bosser avec les deux, le labo et Mark Lyon. C'était un apprentissage de la retouche, des scans aussi. Aussi du labo argentique, mais plus succinctement, puisque j'étais surtout à la partie numérique. Selfcolor, c'était un labo dans lequel les photographes pouvaient venir faire du tirage de leurs photos. Et Selfcolor numérique, qui est devenu Vicart, etc. C'était un labo où on faisait nous des tirages, mais où aussi les clients venaient notamment utiliser des Imacon pour scanner et retoucher leurs photos sur des écrans calibrés et tout ça. Donc c'était un super lieu en tout cas pour rencontrer plein de boulots de photographes de différents horizons, parce que du coup être technicienne là-bas ça me permettait de suivre aussi le travail de chacun, ce qui m'inspirait vachement. Et en même temps j'étais... à la fac à Paris 8, parce qu'après ces études, j'ai eu ce job au labo, mais je m'étais dit, garde quand même un pied dans les études, même si après le BTS, vraiment, j'avais envie de ne plus jamais faire d'études, parce que ça m'avait dégoûtée sur le coup. Mais voilà, je m'étais inscrite à la fac, et en fait, j'ai adoré la fac à Paris 8, parce que c'était une approche beaucoup plus intellectuelle, historique, philosophique, de la photographie, qu'on m'a... poussé à désapprendre un peu ma technique pour plus questionner les sujets que je photographiais, plus me sonder en tant que wannabe artiste. Alors c'était d'abord L2 art plastique, et ensuite il y a un cursus à Paris 8 qui est L3 photographie et art contemporain. Et ouais, c'était trop bien. Le labo et le boulot de technicien, c'est un truc assez masculin. Et donc, pour me faire ma place avec mon boss et d'avoir aussi les clients intéressants qui viennent travailler avec moi en tant que jeune, femme, ce n'était pas facile. Donc, j'ai vachement changé mon langage, par exemple, à ce moment, pour avoir l'air plus adulte, changer même ma façon de m'habiller et tout, pour être plus prise au sérieux. Ce qui n'était pas toujours le cas au début. Après, je me formais aussi et j'ai appris le métier. C'était en partie normal, mais pas que. Et après, j'allais à la fac avec des gens de mon âge qui avaient 19 ans, 20 ans et qui étaient vachement plus à la coule, vachement plus bébés. Donc, j'étais hyper schizo à cette époque. Et aussi, je n'avais vraiment pas le temps de vivre. Donc, je bossais du lundi au samedi de 9h à 21h genre. Et le dimanche, je faisais mes dissertations pour la fac. Et en gros, sur mes trajets de... De la fac à chez moi, au labo, je faisais des photos, ou chez moi dans mon appartement. Du coup j'avais fait un espèce de petit sujet qu'il fallait rendre, qui s'appelait le projet tutoré en fin de troisième année, que j'avais appelé enfermement contemplatif, où je faisais que des photos chez moi, parce qu'effectivement j'avais pas le temps d'avoir une vie et de sortir. Et donc au bout de ces deux ans, j'ai commencé à être frustrée aussi. notamment aux deux endroits. A la fac, je trouvais ça hyper intéressant, mais je trouvais que ça prenait une tournure trop intellectuelle et pas assez pratique. Et donc j'avais envie d'en sortir. Et d'autre part, au labo, je commençais à être une technicienne frustrée. et à être jalouse des photographes que je voyais faire plein de projets, partir voyager, et moi être enfermée entre les quatre murs du labo. Donc je me suis dit, je me laisse une chance, j'essaye les arts décoratifs, là il faut que je décide, soit je suis artiste, soit je suis technicienne. Du coup j'ai testé les concours des arts déco en deuxième année, donc je n'ai pas pris non plus un risque de malade, puisque c'était ma troisième deuxième année. Et si ça ne marchait pas, je restais au labo et je devenais technicienne jusqu'à la fin de mes jours. Et Dieu merci, les arts déco, ça a marché. Et donc là, j'ai fait notamment une pause avec les jobs étudiants, à demander à mes parents de venir plus en aide financière, à être boursière aussi. faire ce cursus de façon plus apaisée. Et après, rapidement, j'ai aussi repris avec les agences immobilières pour compléter, parce que vivre à Paris, ça coûte cher. Mes premiers souvenirs avec la photo, c'est d'abord avec mes albums de famille. Mon père était monteur. réalisateur aussi, mais surtout monteur au cours de sa vie, plutôt pour la télé. Et donc, il avait un vrai sens de l'image. C'est lui qui m'a fait beaucoup aimer le cinéma et la photo. Et donc, j'adorais regarder les albums de famille parce que déjà, je trouvais les photos trop belles. Et puis, je voyais aussi tout l'amour qui nous portait par ces images à ma mère, mon frère et moi. Et je continue à être un peu obsédée par ces objets, comme si j'allais... Je ne sais pas, c'est aussi une forme de preuve et d'enquête sur mon existence, mon identité, que je cherche à travers ces photos. Et je pense que c'est un truc aussi, ce lien intime que j'essaye de retrouver quand je photographie des gens. Enfin, ce que je vois qu'ils portaient d'hyper bienveillant quand ils nous regardaient, je crois que c'est un truc qui m'a vachement inspirée. en tant que photographe sur la façon dont je regardais pour le coup mes proches mais aussi en général les êtres. Ouais, j'observais... Ouais, je pense que j'observais beaucoup. Mais c'est surtout le regard bienveillant que portait mon père sur nous qui m'a aussi beaucoup inspirée. Voilà, et après, mon autre rapport au... Aux images, c'est que j'étais fascinée par les magazines, même d'ado ou de mode un peu débile. Mais en gros, je ne lisais pas grand-chose et j'étais surtout fascinée par les images. J'étais aussi fan de Buffy contre les vampires. Par exemple, je passais mon temps chez la Buraliste, qui vendait aussi des bonbons à l'école primaire. à feuilleter tous les magazines pour chercher juste les images de Buffy contre les vampires dans ce magazine. Donc je la rendais ouf parce que vraiment j'ouvrais tous les magazines pour chercher la photo de Buffy. Et j'achetais effectivement un magazine seulement s'il y avait une page avec une photo de Buffy. Et le magazine servait juste à ce que je découpe la photo de Buffy pour la mettre dans mon classeur avec toutes les photos de Buffy contre les vampires. Mais je faisais pas mal aussi de collage avec les photos. J'en affichais plein sur le mur. Ça m'obsédait pas mal. Ce que je fais beaucoup moins maintenant aussi. Avant, je m'abondais d'images au mur autour de moi. Maintenant, j'en mettrais peu parce qu'on est tellement assaillis par les réseaux et d'images que quand je rentre chez moi, je suis contente que ce soit un peu calme. Mes inspirations, c'est assez varié. Ça va de Hegelston, qui m'a vachement inspirée parce qu'effectivement, il erre et on ne sait pas ce qu'il fout. Et en fait, il fait des chefs-d'oeuvre en traînant autour de chez lui. Donc, c'est vrai qu'en tant que photographe, c'est hyper inspirant parce que tu dis que tout est sujet autour de toi et que tout est dans la façon dont tu regardes les choses et ce qui t'entoure. Persona de Bergman, enfin ce film Persona de Bergman, ça m'a pété la tête à peu près quand je l'ai vu. Parce que c'est un film qui parlait autant de cinéma, d'existence. Je trouvais ça hyper complet, les images sont trop belles. Ça venait répondre et poser des questions existentielles que j'avais à ce moment-là. Donc ouais, grosse claque. 8,5 de Fellini aussi, ça sur les doutes existentiels de faut-il créer, faut-il sortir les choses, faut-il accepter l'échec parfois et ne pas faire. Ça aussi, méga réflexion. Après, il y a des choses plus douces et plus lyriques. comme les vagues de Virginia Woolf c'est plus comment tu laisses ton esprit se perdre dans des formes de rêverie et accéder à une forme de lyrisme qui permet aussi dans mon cas puisque c'est la photographie de mettre ça plus en image que par des mots il y a Mauvais sang de Léo Scarax aussi ou pareil... Le film en lui-même, les images, ça m'a super marquée et influencée. J'ai découvert récemment le travail de Miranda Joulaï. J'ai vu le film Moi, toi et tous les autres et j'ai trouvé ça franchement super. C'est comme un condensé d'humanité dans ce qu'elle a de plus vulnérable, à la fois bienveillant, à la fois... bizarre, je sais pas, ça m'a super touchée. Et en ce moment, je lis Histoire de vent d'Adélaïde Duvanel. Et ça faisait longtemps que j'avais pas lu un livre dont l'écriture était pareil, aussi lyrique, aussi belle. C'est assez dark dans les sujets, mais la façon dont elle parle des choses est super imagée, hyper inspirante. Et voilà, je le rapproche typiquement d'une photographie où... Pour parler du réel, on peut utiliser des langages qui prennent des détours et finalement disent plus que simplement le réel. Et pour finir, plus en photographie, j'ai vu il y a quelques années au bal l'exposition de Judith Ausha qui m'a presque émue aux larmes. Donc c'est que des portraits qu'elle fait et vraiment on a l'impression qu'elle capture les sens. des gens qu'elle photographie. Je ne sais pas comment dire, mais c'est juste des portraits assez simples, mais en fait, super touchants. Je me suis retenue de pleurer, parce que j'étais au bal, donc je n'avais pas envie de pleurer devant les gens, mais c'était très remuant. Mon approche, c'est la... Pas mal évolué. Alors d'abord, pendant mon cursus scolaire, on va dire, le BTS, c'était vraiment maîtriser d'abord le médium qu'est la photographie, donc l'outil en général. Le travail au labo est venu aussi consolider ça sur la post-production et les tirages. Donc ça, ça me sert vachement parce que quand j'ai des expos aujourd'hui, par exemple, À produire, j'aime suivre les tirages où je sais vraiment bien préparer les fichiers, les images pour en faire des tirages. La fac s'est venue apporter un truc beaucoup plus intellectuel et ça m'a aussi un peu libérée de ma technique. J'ai pensé plus la photographie dans son contexte historique, culturel, sociologique aussi, ce qu'elle apportait. J'ai plus commencé à chercher mon langage. Il y avait notamment ce livre pour une philosophie de la photographie de Willem Flusser qui m'avait vachement marquée. Et notamment un aspect qui était que le photographe, il essaye d'un peu épuiser le système via son appareil photo. En gros, il faut qu'il essaye un peu toute forme de technique pour déchiffrer le monde, trouver son langage, etc. Et donc là, c'était une période où j'expérimentais un peu plein de langages différents. En gros, il y avait aussi ce truc que l'appareil photo, il interprète déjà le réel. Chaque appareil photo interprète le réel différemment. Et donc, c'est vrai que pendant mes études, surtout au début de mes études à la fac, je déformais aussi beaucoup mes images parce que je me disais, l'appareil photo, il interprète. Moi, je peux interpréter aussi autant que possible. Donc, let's go. Et donc, je me lâchais sur des déformations un peu d'images. Maintenant, j'ai une approche plus naturaliste. Mais ça dépend encore des projets. C'est plus parce qu'en ce moment, je suis sur un projet plus documentaire et que donc, j'essaye là d'être assez fidèle au réel parce que c'est mon sujet qui... me l'impose. Mais il y a aussi, j'aime encore jouer avec l'appareil, la technique, etc. pour créer d'autres formes de langues. Et notamment, c'est quelque chose que j'expérimente plutôt d'abord via les commandes, puisque je le vois un peu comme des exercices de style, notamment, et où c'est un peu ma vision de quelque chose à un moment. Donc, par exemple, des photos pour des musiciens, où ça va être mon interprétation de leur musique. qui va me permettre de tester des choses, plus avec des flashs, de la lumière. Quand j'étais jeune, je travaillais en numérique d'abord, et c'est vrai que je produisais beaucoup, tout le temps. J'avais toujours mon appareil photo sur moi, et je ne m'empêchais aucune photo, ce qui était super. Par contre, c'est vrai que rapidement, on accumule, on accumule, on accumule, et que ça devient aussi un peu envahissant. Et j'ai opéré vers 2017 un changement pour l'argentique, qui est super parce qu'on réfléchit plus à la photo qu'on fait, chaque photo coûte, on la compose, on sait pourquoi on la fait, elle n'est pas que le fruit d'un hasard. Donc globalement, proportionnellement, je fais de meilleures photos, mais j'en fais moins. Donc il y a un truc où c'est à la fois bien et pas bien, parce qu'il y a aussi plein de photos que je m'empêche de faire. Ou je vais commencer à douter, je me dis, celle-là, je ne la fais pas, parce que sinon, je vais encore faire des milliards de photos, etc. Je pense que parfois, je me sens sûre, mais d'autre part, je fais moins de photos inutiles aussi. Je pense que le passage argentique, c'est esthétique, et parce que j'avais bossé dans ce labo qui était mi-argentique, mi-numérique, et que, par exemple, retoucher des négatifs, c'était un processus naturel pour moi. J'étais à l'aise là-dedans, que je ne le faisais pas dans mon travail et que je me suis dit, en fait, ce truc, tu le maîtrises, donc tu peux le faire. Et donc, je l'ai fait parce qu'effectivement, en termes d'image, oui, je préférais ça. Après, c'était un truc bizarre où, par exemple, je faisais du numérique, mais les gens pensaient déjà que je faisais de l'argentique. Mais du coup, c'était aussi un truc pour être plus honnête avec moi-même et le monde que je me suis dit, bon, fais-toi argentique. J'ai voyagé en Chine, au Liban, au Canada, à Cuba, au Brésil, en Algérie, à Hong Kong, au Japon, au Maroc. Tout ça via mon travail de photographe. Et notamment dans ces endroits, j'ai décidé de rester plus longtemps. Parfois je voyage, je fais le job et puis je rentre. Dans ces endroits-là, hyper variés, j'ai décidé de rester plus longtemps pour faire des photos. Et dans ce cas-là, c'est vrai que je me mets à errer partout, un peu pendant quelques jours. Limite, je ne mange pas le midi, je ne fais que de marcher, marcher, marcher. Je sais plus ou moins où je vais et puis je me laisse aussi me perdre dans des endroits. Et je suis seule et je photographie. C'est vrai qu'il y a un truc dans le voyage seule où je me trouve vachement plus attentive à ce qui m'entoure par rapport à... Quand je suis accompagnée, par exemple, parce que là, c'est un refuge où tu parles avec quelqu'un, tu la regardes et en fait, tu zappes plein de choses. Quand tu voyages et que tu es seule, c'est vrai que tu es happée par tout, ton regard se pose sur chaque chose. Et quand j'y vais pour faire des photos, c'est vrai que du coup, je suis en mode chercheuse, je cherche des trucs. Et en plus, l'appareil photo, je fais aussi beaucoup de portraits quand je voyage comme ça. Et donc, l'appareil photo, c'est un... super moyen de rentrer en contact aussi avec des gens. Parce que je fais toujours un mélange de demander, pas demander, ça dépend mais en gros, je ne demande pas quand les gens sont de dos, je demande quand ils sont de face ou je les photographie d'abord, puis je leur fais signe et je leur montre mon appareil photo, avec un sourire évidemment, pour qu'on se mette un peu dans un accord tacite qu'on est d'accord sur ce qui vient de se passer. que je leur ai pas volé un truc. Si les gens sont pas contents, bon bah j'ai fait ma photo, elle est en argentique mais en gros je l'utiliserai pas quoi, parce que je sais qu'ils ont pas kiffé quoi. Il y a plein de photos que je fais en voyage et j'ai pas le temps de les retoucher parce que c'est après des commandes, avant d'autres, avant de rentrer en France et du coup c'est vrai que je les fais, je les emmagasine, je sais pas si j'en ferai un jour. Quelque chose peut-être de global, peut-être pas, je ne sais pas trop, mais elles existent. Un voyage que j'ai... beaucoup aimé en tout cas, c'est ces deux séries, notamment au Liban, où je suis venue en plus avant la commande. Donc ça, c'est ce que je préfère faire parce que t'arrives, t'as d'abord ton temps à toi. Tu n'enregistres pas déjà les choses dans le cadre d'une commande, etc. C'est vraiment, tu découvres avec tes yeux, quoi, sous aucun autre prisme. Et ouais, ça m'a... passionnée comme pays parce que... Et dans ce cas-là, la photo, c'est un moyen de comprendre. Donc à la fois, je pose plein de questions aux gens que je rencontre qui me permettent de comprendre. Ces questions, elles m'amènent aussi à faire d'autres photos, à regarder les choses autrement. Par exemple, tous les visages politiques qui étaient affichés, du coup, du clientélisme, du pluralisme religieux, de pourquoi les gens affichent ces photos. C'est parce qu'en fait... C'est peut-être ces gens qui vont leur avoir trouvé du travail ou qui leur trouveront du travail. Donc c'est un truc culturel pour nous hyper bizarre en France parce qu'on ne mettrait pas toutes les photos de nos politiques dans la rue. Et à la fois, c'est des affiches qui prennent un peu cher avec le temps, qui sont déformées. Du coup, ça fait des visages un peu grimés. Et voilà. Puis il y a toutes ces communautés qui vivent. ensemble sans complètement vivre ensemble aussi. J'avais rencontré Nadine, qui est une fille que j'ai photographiée, qui se baignait avec sa famille dans la mer. Elle portait le voile en se baignant. Et je ne sais pas, je les ai vues au loin, je les ai trouvées trop beaux. En fait, elle était avec son mari, son père et un autre couple, dont son frère. Je les ai approchés en me disant, je pense que, je vais leur demander si je peux les photographier, mais de prime abord, j'ai l'impression qu'on est dans des mondes assez différents. Je pense que je vais me prendre un recal, quoi. Ce qui arrive aussi quand tu fais des photos comme ça, tu pars en voyage. Parfois, tu tentes ta chance et les gens ne te font pas confiance, ce qui est légitime parce qu'ils ne savent pas qui t'es, donc ils ne savent pas si tu es voué de bonnes intentions ou de très mauvaises. Mais voilà. Et là, ils ont été, par exemple, directement super accueillants, super chaleureux. On a pris un goûter ensemble, j'ai des photographiés. Puis, on a vachement sympathisé. Ils m'ont invité à dîner chez eux. Donc, c'était plus dans les montagnes, dans le Liban, un peu loin, à une heure de voiture, un truc comme ça. Et puis, ils m'ont ramené après, plus tard à Beyrouth, dans la soirée, après dîner. Et ouais, il y a un truc avec cette fille où... On a lié un lien hyper... On était hyper contentes de se rencontrer en fait toutes les deux parce qu'on se rendait compte qu'on appartenait à des lieux, des mondes, des cultures variées mais que je sais pas, il y avait un truc aussi où on se reconnaissait l'une l'autre quoi, enfin où on s'est tout de suite compris et ouais reconnu un peu, je sais pas comment dire. Ma série Femmes sous influence, c'est venu plutôt d'images que j'ai regroupées ensemble en 2021 pour une expo à la Villette. Ça faisait un moment que j'avais envie de faire un projet plus sur des amis, des connaissances et un projet vraiment de portrait. C'était aussi en réponse au fait que je fais beaucoup de portraits de presse. Et que du coup, je me questionnais beaucoup sur la représentation en général. C'est-à-dire qu'un portrait de presse, en fait, parfois on a dix minutes avec quelqu'un qui est une personnalité publique, qui contrôle ou pas son image, qui te donne ou pas sa confiance. En dix minutes, de toute façon, on a peu de temps pour créer un lien avec quelqu'un et du coup, qui se livre plus, mais voilà. Et surtout, c'est quelqu'un qui vient défendre un projet. Donc, en tout cas, j'essaye toujours d'accéder à une forme d'intériorité quand je fais des portraits, même pour la presse. Mais je n'essaie pas non plus de tromper les gens que je photographie parce qu'ils ne viennent pas, à un moment, servir mon travail personnel. Je suis là en qualité de... Ils présentent un projet, je les prends en photo. Donc, c'est un truc que je distingue vachement de mon travail personnel et notamment de photos que je fais. plus avec des amis, des femmes, aussi avec des hommes, et c'est vrai que j'ai un rapport...
Speaker #0plus naturelle, plus libérée, avec mes amis femmes, parce qu'il y a un truc où... Il se crée avec ses amis un lien de confiance qui est légitime parce qu'on se connaît, et du coup, j'arrive à obtenir une forme de lâcher-prise. Et moi, je trouve que c'est des images qui m'en disent... plus sur l'être en général. Et en tant que femme, je trouve qu'être dans son corps, c'est parfois super exaltant et c'est parfois une forme de contrainte. Et je crois que c'est ce que j'ai essayé de mettre en image dans cette série de femmes sous influence. Enfin que c'est des questions en tout cas qui m'habitaient et que j'ai regardé plein d'images que j'avais prises et je me suis dit, ah là je trouve quelque chose de ça. Donc c'est aussi en fait une forme d'autoportrait, c'est aussi moi qui essaye de les déchiffrer, de les démasquer, et à la fois c'est impossible parce que c'est qu'une vision de quelqu'un à un moment donné, ce quelqu'un qui donne une image de lui telle à un moment donné, qui peut être diverse, enfin voilà, mais ça me passionne. C'est des portraits de femmes, parfois nues, parfois habillées, parfois hyper... détendu, parfois justement dans des postures ou des visages plus contraints. C'est des photos en couleur et en noir et blanc. Ma série à Sédis, je pense que j'ai... tourner autour longtemps avant de la nommer et de m'y consacrer vraiment. En gros, c'était... Je pense que je l'ai commencé vraiment d'abord inconsciemment du coup, après mes études à la fac, en fait en entrant aux arts déco, quand j'ai récupéré du temps libre et que j'ai entrevu la... paraissent comme un espace de liberté parce que j'avais vraiment pas eu le temps, parce que je faisais que de bosser au labo et à la fac et je faisais aussi des retouches. pour ce photographe Marc Lyon avec qui j'avais fait un stage aussi en BTS. Donc à un moment, j'avais deux jobs et la fac. Donc vraiment, ça faisait trop. Et j'étais épuisée aussi, clairement, de cette vie très studieuse et un peu remplie d'obligations et de devoirs. Donc je photographiais pas mal d'abord mes amis, mon entourage. En fait, dès qu'ils étaient dans une position un peu avachie, un peu mélancolique, un peu là, il y avait mon cerveau qui scintillait et il fallait absolument que je fasse une photo. Ça a commencé comme ça. Et puis, j'ai lu Oblomov, que j'ai trouvé dans la bibliothèque de ma mère, qui est un livre d'Ivan Gondjarov. Et là, ça parle d'un homme qui, en gros, est très paresseux. passe sa life dans son divan. Il a plein de choses à faire, mais il les reporte, il ne les fait pas. Et il a un meilleur ami qui s'appelle Stoltz, qui lui est hyper entreprenant, qui fait plein de choses. Et en fait, on se demande lequel est un peu dans la raison. Si Oblomov, il a complètement renoncé à la vie en étant paresseux et qu'il est passé à côté de son existence, ou si en fait, toute action, toute... mise en œuvre et assez vaine dans l'existence et qu'en fait il avait depuis le début l'ultime sagesse. Donc c'est comme ça que j'ai trouvé la Cédie, qui est un peu cet endroit où on n'accepte pas ses doutes mais où on a plein de doutes et où on est un peu perdu dans des pensées confuses à pas savoir quoi en faire. Donc je pense aussi que le moment où j'ai eu plus de temps, j'ai eu des moments où j'étais un peu livrée à moi-même et c'était aussi des moments où Quand j'étais livrée à moi-même, j'avais beaucoup de mélancolie, mais que je traitais notamment en faisant des photos. Donc l'acédie, je l'ai autant cherché comme motif que je pense que j'avais un peu des lunettes aussi d'acédie pour faire ces photos. Donc parfois, c'est pareil, j'étais chez moi un peu désemparée de mon existence, à me dire quel est le sens de la vie, un peu existentialiste. et à pas trouver de réponse. Et donc là, dans ces moments, soit je faisais des photos chez moi, soit je sortais errer dans la rue, à Paris aussi. prendre ce qui me tombait sous la main en photo. Et après, j'ai fait mon mémoire aux arts déco, sur la paresse au cinéma, parce que vraiment, j'étais mono-sujet, mono-tâche, enfin pas que, mais quand même, ça tournait beaucoup autour de ça. Et donc là, j'ai aussi eu des lectures plus iconographiques, philosophiques, etc. sur la paresse pour la comprendre et la décrypter. Donc là, j'ai cherché aussi plus des... Notamment le bestiaire de la paresse, les escargots, les chiens, les ânes, ce qui représente le lit. J'ai toujours aussi pensé à la paresse parce qu'elle n'a pas d'existence en dehors, sans le travail. Il y avait aussi ces idées de décroissance, de calmer le rythme, d'arrêter, etc. Plein de choses que j'ai cherchées. Et après, là où j'ai pensé la paresse et la cédille, c'est que du coup, oui, pour moi, c'est à la fois un truc mélancolique, assez dark, mais qui peut donner une forme de lyrisme dans les arts en général. Mais c'est aussi un espace de liberté, à savoir que je ne suis jamais plus heureuse qu'en vacances quand même, ou qu'en week-end, à faire... Ce que j'ai envie de faire, quoi. Donc que ce soit... Le moment vidé de responsabilité, c'est aussi celui qu'on réinvestit comme on en a envie. Pas forcément en faisant rien, en fait. C'est aussi ça, pour moi, la paresse, quoi. C'est aussi se dire, OK, là, j'ai peut-être plein de choses à faire, mais tant pis, je les décale et là, je fais ça parce que j'ai envie de le faire plaisir et que ça va me faire du bien, quoi. Ces moments vides où je sens que je me ressource aussi, et que je me retrouve, je me re-rencontre un peu. Un truc comme ça. Je ne me perds pas, en fait. Ça me permet de ne pas me perdre, de rester liée au monde et à moi-même, je crois. C'est aussi un sujet qui est venu, la paresse, parce que j'observais mon entourage qui dilait plus ou moins. bien avec la paresse, qui se l'interdisait complètement ou qui tombait dedans parce que exténuée. Mais effectivement, je pense que c'est hyper important d'avoir des moments comme ça. Et c'est difficile de ne pas culpabiliser, puisque la paresse, elle est faite de telle sorte que on est dans un monde où, et depuis toujours de toute façon, d'abord, le temps appartenait à... Dieu, et c'est comme ça qu'Enelassé dit, c'était le moine dans son monastère qui ne consacre pas son temps à Dieu et qui du coup est fautif. Après, au temps des Lumières, c'était le temps comme valeur qui appartient à l'humanité entière, et donc l'humain qui ne consacre pas son temps à l'humanité est fautif aussi. La paresse, c'est ce postulat peut-être plus individualiste, où le temps c'est ta liberté, tu en fais ce que tu veux. Après, je suis aussi, pas pour dire ne faites rien de votre vie, l'humain a besoin de divertissement, c'est un peu l'idée de Pascal aussi, de son divertissement, l'humain ne sait plus quoi faire de lui et devient un zinzin. Donc il faut quand même remplir son temps, mais pas que d'obligation. La Cédia, c'est du coup un ensemble d'images que j'ai conçues. C'était à la base mon projet de diplôme, donc ça remonte, c'était en 2017. J'avais fait une première version de livre à ce moment-là. Je l'ai envoyée à quelques éditeurs et ça n'a pas marché. Ça m'a pas mal découragée sur le moment, donc j'ai laissé le truc de côté. J'ai eu beaucoup de commandes après, donc je suis passée à autre chose. Et c'est en 2021 que je me suis dit quand même, t'es un peu teubé parce que t'avais ce projet, t'es pas allé au bout, je m'en suis voulu. Surtout que je continuais en fait à faire des images qui rentraient dans ce sujet de la Cédie. Pas que, mais en partie. L'ensemble d'images évoluait et continuait. Et donc là, j'ai contacté Thomas Opario, donc Witty Books, via un ami, Esteban González. Et il a été super enthousiaste du projet, mais dispo en 2022 pour qu'on travaille dessus. Donc on a commencé à travailler en 2022. En gros, je lui avais envoyé ma version qui datait au max. Et les images avec d'autres images mises à jour, ça c'est un processus que j'ai continué à faire. En gros, je continuais à faire des images, je lui envoyais, on les intégrait ou pas. Mais voilà, c'est resté un peu constant. Et donc, on se faisait en fait des ping-pong où lui, il a revu tout le séquençage. On a vite quand même parlé du format, etc. Et à peu près du nombre de pages, mais ça c'est pareil, ça a évolué au fil du temps. Mais en gros, oui, c'est ça, sur le séquençage, on se faisait des ping-pong. parfois assez rapprochés, parfois assez espacés parce que pareil l'un et l'autre pris dans lui d'autres projets de livres moi d'autres projets de commandes où parfois t'es photographe, t'es artiste et puis tu gagnes aussi ta vie donc parfois tu te fais rouler dessus en commande, parfois t'as des petits temps plus libres et tu peux te remettre sur ces travaux mais c'est vrai que c'est pas facile de laisser des trucs en plan les reprendre, se réinvestir vachement dedans refaire une pause, retourner... Ça rend un peu schizo parfois. Et puis, c'est vrai que comme j'avais ces images avec moi et que j'avais fait une première version livre, au début, j'étais un peu contre le fric et j'avais du mal à lui laisser la main mise sur le séquençage. Donc, je faisais pas mal de résistance. En gros, je réintervenais à chaque fois pas mal. Et donc, on se faisait des ping-pong comme ça au début. Après, il y a un moment où j'ai été rattrapée par des trucs persos. Le décès de mon père. Là, j'avoue que ma vie, mon œuvre... J'essayais de l'accompagner du plus que je pouvais en fin de vie, dans sa maladie, pour être près de lui. Et puis après, j'étais déjà dans ce moment-là. Et puis après, j'étais un peu triste. Et c'est vrai que là, sur le coup, ma vie, mon œuvre, j'en avais rien à foutre. C'était vraiment le cadet de mes soucis. Donc j'ai un peu fait une grande pause et la morte auprès de Thomas Zoh. Et puis je l'ai recontacté début mi-2023, après 6-8 mois de silence radio. En l'occurrence, il a compris et je lui ai dit, si j'ai fait la grosse morte et que tu es passé à autre chose, que tu ne veux plus travailler sur le sujet, je comprends. Si t'es encore chaud, on y retourne. Et donc, on a fait ça. Mais là, 2023 a été à nouveau super busy. Donc, on est reparti dessus en 2024. De toute façon, moi, c'est vrai que comme c'est un projet que j'étais enceinte de ce projet depuis déjà des années, en fait, j'étais pas pressée. J'étais plus dans l'urgence de quoi que ce soit. Donc, je lui ai dit OK, on repart dessus en 2024. Et enfin, mon grand ado est né. En octobre 2024, il est sorti. Dieu merci, il fallait que ça se termine, ce processus quand même, parce que ça m'a semblé être une éternité. Mais c'était aussi des trucs de dealé avec un truc de confiance en moi. Je pense que ça me terrorisait aussi de le sortir, parce qu'il y avait un truc très intime, où j'avais l'impression de dire de moi un truc peu reluisant aussi dans ce travail. C'était un peu ma psychothérapie. C'est bon, maintenant je suis en paix. C'était aussi un fight avec moi-même. Et on a fini par trouver des... Enfin, à se faire confiance avec Thomaso, et moi aussi à plus lâcher prise, ce qui était difficile. Mais je suis très contente de l'avoir fait, parce qu'au final, je suis très contente du résultat. Et je l'avais contacté parce que je lui faisais confiance et que j'adorais son travail. Et je suis très contente qu'on soit allés à la fin de ce processus ensemble. de cette façon. Le doute est très présent dans ma vie. Je crois que j'ai ma lune en balance, un truc comme ça, donc j'ai un peu lâché l'astrologie mais grosso modo le doute, c'est bien là, c'est bien présent. Je me soigne quand même, mais notamment sur Les sélections d'images, les trucs, j'ai fait chier mes amis pendant des années, notamment pour les édits à envoyer à la presse. Qu'est-ce que j'envoie, qu'est-ce que j'envoie pas, machin. Maintenant, c'est bon, j'ai arrêté d'embêter les gens et je me fais plus confiance. Mais après, douter, je pense que c'est sain et que c'est très bien. Tant qu'on finit par régler... Il ne faut pas que les doutes fassent aller vers une inertie qui bloque complètement, mais douter, ça me semble très sain. Dans Oblomov, justement... Il y a ce personnage, Stolz, qui parle des doutes de l'existence notamment et qui dit que c'est très sain de les rencontrer à la bonne heure, au bon moment et qu'il faut les aimer ces doutes pour les surpasser. Et pour moi, c'est un peu ça. Par exemple, la Cédie, c'est ne pas réussir à aimer ses doutes et donc être empêtrée. Je fais à la fois de la commande, des projets artistiques. Donc c'est vrai que mes images, elles se déploient dans différents supports. À savoir, elles peuvent autant être sur une pochette de disque que sur un poster pour un concert, que dans un magazine, que, je ne sais pas, encadrées pour une exposition. Donc ça prend des formes vraiment plus ou moins précieuses ou pas du tout. Et j'avais fait un travail... En 2018 ou 2019, qu'on avait continué en 2020 avec mon amie Sophia Taillet, qui est designer. Elle, elle collectionne vachement des matériaux, elle les déforme pour se les réapproprier. En fait, on était parti du postulat, c'est ça, qu'on était deux collectionneuses, elle de structure qu'elle trouve aussi ou qu'elle recycle dans son travail, et moi d'image que je fais. Et on a essayé de confronter ces deux travaux. Et c'était vraiment en rapport... Le projet s'appelle Scroll parce que c'était en opposition, en gros, à l'affluence des images sur les réseaux, sur Internet. Enfin, effectivement, moi, c'est sûr que ça fait des années que je me dis que je scrolle, je regarde des photos, et je ne sais pas du tout ce qu'il me reste à la fin, quoi, de ces heures de scrolling, quoi. Et donc, on voulait un peu rematérialiser les images et notamment les faire sortir aussi de leur dimension 2D. Donc, là, pour Scroll, c'était des photos, on a utilisé le textile, ça aurait pu être autre chose, pour les mettre en volume. Donc, il y a par exemple un homme qui... J'avais fait une photo d'un homme qui dort en Chine. En gros, je partais de photos existantes et on les remettait en scène. Et donc là, par exemple, il y avait cette idée du sommeil et donc de rendre l'homme qui dort... un peu en flaque, de rejouer un peu les sensations des photos dans la façon dont elles étaient mises en scène. Après, selon les expos en général, pour chaque projet, je pense que je cherche un moyen d'accrocher différent. C'est plus le projet qui va me guider sur les formats, les tirages, si c'est différents formats, quel support, si c'est... que des photos à égalité. Pour Femmes sous Influence, par exemple, je voulais que ce soit que des images à la même taille parce que je voulais les mettre à égalité. Ce n'était pas des fragments de quelque chose qui viennent raconter une constellation de... que sais-je. Du coup, oui, chaque projet vient s'exposer différemment. Après, je préfère quand même vachement l'objet-livre parce que ça crée un... L'expo, il y a un truc un peu plus... Je trouve ça hyper intéressant, mais il y a un truc un peu plus monumental, regardez-moi. Le livre, ça crée un rapport vachement plus intime, one-to-one, et aussi c'est un objet indépendant qui voyage, et puis on le garde en plus. Donc après, le livre, quand on l'a, il nous appartient. Et le travail qu'on aime de quelqu'un, on se l'est un peu approprié, et puis c'est accessible, un livre photo, ce n'est pas un tirage d'art hyper cher. Je ne sais pas, je préfère les livres que les expos. J'aime les expos, exposez-moi partout s'il vous plaît, mais je préfère les livres. La photographie de commande, forcément j'aime ça quand on me laisse extrêmement libre de faire... ce que je veux. Ça a été le cas dans des projets mode et documentaire. Et donc, notamment là... Il y avait ce sujet pour Obis, avec un camp scout musulman, qui est sorti dans le dernier, qui s'appelle L'île aux enfants Et en fait, quand j'ai passé une semaine avec ce groupe d'enfants, j'ai adoré. Et j'ai aussi eu tout de suite envie de faire un film documentaire, parce que c'est mille histoires dans... un camp de différentes personnes qui cherchent leur place. Certains qui sont plus timides, d'autres qui ont beaucoup d'assurance. Certains qui vont être un peu perdus. Et aussi comment ils sont coupés de... Comment c'est un lieu de construction de soi hors de la famille, de l'école. On revient à une forme de paresse parce que ça se passe pendant les grandes vacances, en été. C'est des... Jeunes qui viennent des quartiers populaires de Lyon et qui se retrouvent tous les étés dans les gorges de la Loire. Et donc, ils appellent ça une île et on a appelé ça aussi l'île aux enfants parce que c'est un lieu qui est en gros reculé, mais seulement accessible par bateau ou par une demi-heure de marche. Donc, ils sont vraiment coupés du monde. Il y a un peu un truc à Sa Majesté la Mouche, ça devient vraiment une société d'enfants gouvernés. par les enfants, parce que c'est ça les principes du scoutisme. Bien sûr, il y a des adultes qui sont là, qui encadrent, mais voilà. Et donc, il y a un truc qui me touche vachement aussi des rapports d'enfants de différents âges les uns avec les autres. C'est un groupe mixte. Ils ont de 6 à 15 ans pour les enfants qui sont là, et puis les chefs et les chefs-taines, ils ont en gros de 17 à 20 ans, 24 ans max, selon les années. Et donc... Ce que j'aime trop, c'est que moi, c'est un projet où je les regarde grandir. C'est aussi un projet sur leur rapport à l'enfance. Donc, comment il y a la religion qui vient, qui est très solennelle, mais aussi la légèreté de l'enfance, leur rapport à la nature quand ils viennent de quartiers plus bétonnés. Comment ils apprennent la vie, notamment les ados et les enfants. Les enfants n'en ont pas, sont coupés de leur téléphone. Il y a un rapport au présent très fort et ils ont un truc hyper mignon et bienveillant. Et c'est vrai que moi, pour le coup, j'ai grandi avec une éducation catholique. Donc, enfant, en tout cas, je me suis construite en partie dans la religion. Par exemple, je parlais à Dieu tous les soirs, je lui racontais ma journée, je faisais un peu le bilan de là où j'avais été pas cool ou là où les gens avaient été pas cool. Et puis, en gros, je faisais un peu le bilan de ça tous les soirs. Et puis, je me disais bon, bah... J'ai merdé là-dessus, franchement, j'ai pas fait bien. Mais lui, il a été pas sympa. Bon, bah, vas-y, je les pardonne. Et puis, hop, on recommence une nouvelle journée le lendemain, quoi. Et voilà. Bon, maintenant, je suis plus tellement croyante. Enfin, en tout cas, pas catholique ou j'ai pas de dogme auquel j'appartiens. Mais j'ai trouvé que c'était un truc intéressant avec lequel me construire, quoi. Je suis ni pro-religion, ni anti-religion, mais je... Je trouve ça intéressant. Après, ce n'est pas un projet non plus sur la religion, à proprement parler, mais plus sur la construction de soi, notamment quand on est enfant. C'est plus ça qui me travaille en ce moment, ce que deviennent les gens aussi par rapport à leur enfance, en tant qu'adulte, après. Ce projet, l'AMU, avec les scouts, j'ai très envie d'en faire un film. Et ce qui est le projet pour l'été prochain, j'attends des réponses de financement, croiser les doigts pour moi et je les croise aussi. De toute façon, si je ne les ai pas, je ferai quand même le film parce que voilà. Mais je trouverai des moyens. plus à l'arrache de le faire juste s'il est financé ça sera très beau, extrêmement beau c'est promis mais oui voilà, en fait j'ai fait les arts déco et en photo vidéo et pendant mon cursus j'ai fait pas mal de films et je me suis un peu traumate avec des projets très ambitieux notamment de fiction et du coup ça m'avait un peu fâchée avec la vidéo je trouve que c'est des processus, de toute façon là c'est pareil, même pour ce projet que j'aimerais faire, c'est des longs processus d'écriture, même si c'est du scénario c'est des travaux en équipe donc on ne peut pas être indépendant et un peu seul et se débrouiller comme en photo donc c'est vraiment d'autres méthodes de travail plus conséquentes Et plus sur le long terme. Mais là, c'est... En tout cas, les scouts de Lyon m'ont donné vachement envie de retourner au film documentaire. Merci d'avoir écouté ce podcast. 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