- Speaker #0
Ça peut être extrêmement déstabilisant d'arriver sur son tapis et de ressentir son corps.
- Speaker #1
Cette déconnexion avec son corps dans l'état présent.
- Speaker #0
Comme si le corps était figé ailleurs, toute sa vie est polluée par les symptômes du psychotrauma.
- Speaker #1
Quelque chose est cassé en moi et il faut que j'aille me faire guérir, soigner.
- Speaker #0
Une espèce de promesse d'arriver à un état qui serait... Un peu en état parfait, de santé, d'équilibre, duquel on ne devrait plus bouger.
- Speaker #1
La meilleure version de toi.
- Speaker #0
Exactement.
- Speaker #1
Bienvenue, vous écoutez Safe Spaces, le podcast qui ouvre le dialogue sur le trauma et la santé mentale dans le milieu du yoga. Dans cet épisode d'introduction, je discute avec Alexane, psychologue clinicienne et aussi professeur de yoga. On échange autour de la question qui peut-être toi aussi te brûle les lèvres. Le yoga peut-il vraiment guérir le trauma ? Salut Alexane ! Hello ! Comment ça va ?
- Speaker #0
Ça va, et toi ?
- Speaker #1
Très bien, merci pour ta présence. Je suis hyper contente d'enregistrer cet épisode du podcast avec toi. Pour la petite histoire, Alexane et moi on s'est rencontrés... il y a presque un an, un petit peu plus d'un an, sur une... Ouais, presque deux ans, sur une formation de yoga restauratif avec Laetitia Lépuyer, professeure que je recommande, et aussi formation que je recommande. Alexandre, tu es... psychologue clinicienne et tu es psychothérapeute aussi et tu es aussi professeur de yoga. Yes. Donc aujourd'hui on va parler un petit peu de ton expérience avec le traumatisme, que ça soit du côté professionnel avec tes patients et aussi ton expérience avec le yoga et comment le lien se fait un petit peu entre les deux. Est-ce que tu veux commencer par nous raconter un petit peu ton parcours, qui tu es, ce que tu fais dans ta vie pro et dans ta vie de propre ? prof de yoga aussi.
- Speaker #0
Avec plaisir. Alors du coup, je suis psychologue depuis maintenant trois ans, après cinq ans de formation à la fac. Et très vite en psycho, je me suis spécialisée dans le psychotrauma et la psychiatrie parce que pendant mes études, j'ai rencontré une professeure géniale qui s'appelle Françoise Tironi, qui a beaucoup, beaucoup écrit sur plein de types de traumas et ça m'a... vraiment très très intéressé, très très stimulé à ce moment-là. Et donc je me suis mis à beaucoup lire, j'ai fait mes stages sur ça, mes mémoires sur ça, et je suis ressortie de la fac et j'ai travaillé avec des patients, des patientes psychotraumatisées, du coup en psychiatrie. Et maintenant, depuis quelques mois, je travaille en libéral, donc seule, mais toujours avec des patients qui viennent pour plein de raisons différentes, mais la plupart du temps, ils me sont adressés pour des raisons... de psychotrauma, donc ils souffrent de symptômes psychotraumatiques. Voilà, ça c'est pour la partie psycho. Pour la partie yoga, je le rencontre d'abord très personnellement pour ma pratique à moi. En vrai, je pense que je commence le yoga peut-être un an, un an avant le Covid, je pense, un truc comme ça. Et je le rencontre et moi, en vrai, je n'aime pas le yoga. Quand je le rencontre, je n'y vais pas. Ça arrive d'une pratique très intense du sport de haut niveau où je suis toute cassée au niveau du corps. Je ne me pose jamais, tout va très, très, très vite. Et pendant le Covid, comme beaucoup de gens, je pratique plus, plus et je ressors de là en aimant un peu plus ça. Et je me forme en vrai au yoga. Et comme en parallèle, je suis psy. Et que la santé mentale, c'est un sujet qui est extrêmement important pour moi au quotidien. Très rapidement, quand en formation, on parle d'adaptation pour le corps. Souvent, en teacher training, on va nous dire, voilà, s'il y a une blessure à tel endroit, on fait ça, etc. Je me rends compte qu'on ne parle pas trop de ce qui se passe s'il y a des blessures dans le cœur et dans la tête, donc si psychiquement ça ne va pas bien. Et je me suis mise à chercher ça, donc j'ai pas mal lu autour de ça. Un peu plus tard, je me suis formée à d'autres approches, le MDR, l'ICV, qui sont des approches de prise en charge. Et il y a le corps qui rentre en compte. Donc le yoga vient se mêler à tout ça, pour moi, à cet endroit-là, dans l'accompagnement.
- Speaker #1
C'est assez drôle parce qu'en fait les deux disciplines, la psychothérapie et le yoga, ça peut paraître être deux mondes complètement opposés, dans le sens où l'un est plutôt considéré comme une science et l'autre, le yoga, ça a un côté très abstrait avec parfois une dimension spirituelle qui est très importante chez certaines personnes. De ton point de vue, comment est-ce que tu penses qu'elles sont complémentaires ? Et est-ce que toi, tu nous raconteras peut-être un petit peu plus tard, comment tu les utilises avec tes patients ? Est-ce que c'est quelque chose que tu vas intégrer dans tes thérapies pour les aider ?
- Speaker #0
Oui, alors effectivement, de prime abord, je pense que ça paraît des mondes complètement différents. Moi, du coup, dans mon histoire personnelle, c'est très lié, très rapproché. Donc ça me paraît un peu moins éloigné. Mais c'est vrai que quand on pense psychologie, psychothérapie, on ne s'imagine pas du tout le yoga ou même presque pas trop le corps. En tout cas, il y a quelques années, on ne pensait pas trop au corps. Et moi, du coup, c'est vraiment les pratiques dites psychocorporelles qui m'ont beaucoup parlé aussi. Parce qu'en fait, le trauma, il touche la personne dans son entièreté. Donc il va toucher son corps, il va la traverser dans ses expériences. ses sens, la façon dont elle bouge, dont elle se mouvoie et tout. Et en fait, ça va modifier les postures et ça va venir intervenir dans le yoga. Donc moi, c'est ce qui m'a beaucoup parlé. Et en psychothérapie, de manière générale, il y a quand même cette idée que je reçois la personne, je ne reçois pas sa tête de manière isolée. Elle vient avec son corps et donc parfois avec des problématiques aussi corporelles. On voit comment l'anxiété, par exemple, ça peut toucher le corps. et dans le traumatisme c'est pareil ça vient toucher le corps ça vient toucher la posture donc en tant que thérapeute moi le corps de la personne c'est aussi des indicateurs que je peux regarder mon corps à moi c'est aussi des indicateurs quand je reçois quelqu'un, comment je vais me sentir, comment on se sent et comment on bouge dans la pièce ensemble et donc en fait il y a quand même pas mal d'approches maintenant qui se sont développées qui sont plus intégratives et qui prennent en compte le fait que on est des humains avec des têtes mais avec des corps aussi et qui traite à partir du corps, notamment le MDR, qui va partir des mouvements oculaires. Dans d'autres approches, on va inclure des exercices de respiration pour aider la personne à se réancrer quand on aborde les souvenirs traumatiques, par exemple en séance. C'est important de pouvoir recentrer la personne.
- Speaker #1
Je rebondis sur le fait que tu aies utilisé le mot entièreté parce que je trouve ça intéressant dans le sens où... C'est vrai qu'on a cette image, en tout cas en Occident, de la psychologie et même de la médecine, où on fait vraiment cette distinction entre l'esprit et le corps, et qu'on a un petit peu l'impression que le corps c'est le contenant du soi en fait, qu'il y a une hiérarchie entre corps et esprit, alors qu'à l'opposé dans le yoga et peut-être dans les cultures orientales. notamment je pense à l'Inde et la Chine, à la Ayurveda, la médecine chinoise, il y a cette question d'entièreté, d'unité. D'ailleurs, le mot yoga, c'est ce que ça veut dire, l'unité. Mais en tout cas, en ce qui concerne leur médecine, le corps et l'esprit sont en communication constante. C'est des entités qui sont interconnectées. Et la santé est vue comme un ensemble. En fait, l'un ne fonctionne pas sans l'autre. Et il y a même d'ailleurs une dimension... qui est additionnelle comme la dimension énergétique qui n'est pas du tout d'ailleurs présente dans la médecine occidentale. Mais je trouve ça intéressant de faire ce parallèle entre les deux. C'est très intéressant, je trouve.
- Speaker #0
Complètement. Mais cette dualité, pour moi, cette dualité corps-esprit, elle est assez historique. Ça fait partie, je pense, des choses que j'ai apprises peut-être en premier dans mes études. C'est que... de manière ancestrale, on différencie en Occident la tête et le corps. Et en fait, l'évolution de la recherche, de la psychothérapie, montre qu'on ne peut pas séparer les deux, c'est impossible. Et d'ailleurs, les approches qui font le plus leur preuve aujourd'hui dans la prise en charge du psychotrauma, c'est des approches qui prennent les deux en compte. On voit les approches psychocorporelles qui vont être avec des médiations, comme... La danse-thérapie, la yoga-thérapie, mais il y a aussi ça dans des approches plus traditionnelles, on va dire, comme le MDR ou comme l'ICV, qui prennent vraiment en compte qu'on doit ramener la personne dans son corps et que c'est par le corps que la personne va pouvoir aussi se rétablir et pas seulement en posant des mots sur un traumatisme, même si ça, c'est une partie très importante, mais les deux sont très complémentaires.
- Speaker #1
Ok. Ici, en fait, la... Être en bonne santé, c'est avoir l'absence de maladie, alors que dans l'Est, être en bonne santé, c'est atteindre un équilibre global, que ce soit physique, mental, énergétique, spirituel. C'est plutôt un style de vie, finalement. On est en prévention plutôt qu'en guérison, alors que je trouve que chez nous, c'est plutôt l'inverse. On vient traiter une fois qu'il y a un problème, une fois qu'on est malade ou une fois qu'on a eu un traumatisme. Mais il n'y a pas en fait cette... Cette volonté d'intégrer dans notre vie de tous les jours des pratiques qui permettent de rester en bonne santé, de créer une santé physique et mentale qui est durable sur le long terme.
- Speaker #0
Oui, carrément. Et d'ailleurs, je pense que même en Orient, de manière générale, on peut parler d'une médecine qui est préventive. Parce que, comme tu disais, ce n'est même pas une anticipation, c'est quelque chose qui est comme ça, c'est un lifestyle, c'est une manière de vivre. où il y a quand même cette idée qu'on n'atteint pas d'objectif ou d'état particulier. On cherche à rester en bonne santé globalement, là où effectivement nous on traite la maladie. Et d'ailleurs en santé mentale on vient se heurter à un peu cette fausse promesse, parce qu'en fait en santé mentale on se rend bien compte que, déjà par le challenge que sont les problématiques de santé mentale, que c'est parfois des choses qui nous poursuivent dans la continuité, dans le temps. Même si le but, c'est quand même d'arriver à un rétablissement. Et le rétablissement, ce n'est pas la même chose que la guérison. C'est vraiment l'idée qu'on se rétablit, qu'on apprend à vivre, en diminuant bien sûr les symptômes les plus embêtants, les plus intrusifs, mais qu'on apprend à vivre avec son fonctionnement, avec sa particularité, ses particularités en tant que personne, qu'elle soit physique, psychique, émotionnelle. Et du coup, souvent, moi, je vois des personnes qui arrivent en psychothérapie et qui attendent la guérison. Et donc, il y a quand même tout un processus de dire, mais en fait, on n'est pas moins bien parce qu'on a une problématique psychique, on n'a pas moins de valeur, il n'y a pas d'objectif à atteindre à être sans cette maladie. Bien sûr, individuellement, on a envie d'aller mieux et ça, c'est le but de tout thérapeute et de la relation patient-thérapeute. Mais il y a quand même cette idée que déjà dans le... Dans la base et dans la représentation, dans la santé mentale, la perception de la santé, de ce qu'est la santé en Occident, vient être heurtée, vient être remise en question, parce qu'en fait, la santé globale, c'est pas juste une absence de maladie, c'est comment j'arrive à mettre en place dans ma vie des choses qui sont pas là pour me guérir, mais qui sont là pour m'entourer, pour m'aider. Ça peut être des personnes, ça peut être des activités. Ça peut être le yoga, ça peut être plein de choses comme ça. Et surtout, comment ces choses-là, dans les moments de crise, elles peuvent m'accompagner ?
- Speaker #1
Oui, parce qu'en fait, dans notre façon de penser à nous, finalement, se sentir mal ou vivre un traumatisme, si on en est conscient, parce que beaucoup de personnes ne le sont pas, parce qu'on a un sentiment de mal-être, c'est forcément, il y a un problème, en fait. C'est forcément qu'il y a un truc à... à régler, qu'il y a quelque chose qui est cassé, qu'il y a quelque chose à changer pour aller mieux, alors que finalement, ce n'est pas tout simplement les aléas de la vie et parfois ça va aller, parfois ça va moins bien aller. mais on n'a pas ces outils à disposition pour pouvoir gérer ces aléas de la vie de la meilleure manière qu'ils soient, sans se dire que quelque chose est cassé en moi et il faut que j'aille me faire guérir, soigner. Selon toi, le yoga, c'est ça un petit peu, c'est un outil qui est mis à disposition pour avoir un petit peu plus de recul peut-être sur sa vie, de distance et d'acceptation aussi de ses phases de haut et de bas. Et peut-être des fois, ça va être très bas. effectivement il faut demander de l'aide et le yoga ça sera jamais la chose qui va tout solutionner mais est-ce que selon toi en tant que professionnelle de santé et yogi est-ce que tu penses que le yoga c'est quelque chose qui peut aider vraiment les personnes qui sont dans ces situations oui carrément alors ça aide à condition que ça soit quelque chose qui parle à la personne sans
- Speaker #0
être imposée ou la seule chose qui peut être un outil je pense que ça c'est la première chose c'est que ça doit avoir du sens... pour la personne. Mais ça reste quelque chose qui est très chouette à explorer et à proposer, parce qu'il y a quand même du coup ce rapport au corps et cet espace qu'on vient apprendre à créer ou continuer de créer sur son tapis et dans sa pratique, qui permet, comme tu disais, non seulement d'avoir un peu plus de recul, mais d'avoir des outils concrets, la respiration, des postures qui soulagent et qui font du bien dans le corps. des temps à soi où on ralentit quand tout va vite autour, que ce soit les émotions ou de manière générale quand sa vie va vite. Ça c'est vraiment quelque chose qui est à disposition et qui est à disposition tout le temps. Et d'ailleurs on n'a même pas besoin que ça aille mal en fait pour que ça soit là. Et c'est encore plus chouette parce que si c'est en continuité, ça veut dire qu'on a appris à le faire avant que ça aille mal. Donc quand ça va mal, c'est déjà disponible. Avoir des outils à moi qui me parlent, qui ont du sens, pour certains ça va être d'autres sports, mais le yoga... en lui-même regroupe un certain nombre d'outils qui font que cette approche est assez complémentaire et en elle-même propose plein de choses à la personne pour être contenue, ancrée, régulée, etc.
- Speaker #1
Pour les personnes qui nous écoutent et qui peut-être ne sont pas familières avec soit le yoga, soit le traumatisme, est-ce que tu peux nous donner des exemples de ce que tu observes chez les patients, patientes avec qui tu travailles ? Quels sont leurs symptômes, que ce soit mental ou physique ? lorsqu'elles sont dans des situations de trauma et comment toi tu utilises le yoga justement pour aider, soulager ces symptômes je pense que c'est important de comprendre comment le traumatisme affecte les personnes qui sont concernées et essentiellement de comprendre après pourquoi les techniques que tu mentionnais de respiration, d'ancrage et le yoga en général peut aider ces personnes à moins ressentir ces symptômes et à aller de l'avant avec l'accompagnement d'une thérapie aussi évidemment
- Speaker #0
Oui, alors pour ce qui est des symptômes, pour éviter de faire une liste de symptômes, mais plutôt de faire des grandes catégories de symptômes, tu en as je dirais quatre grandes catégories. Tu as ce qu'on appelle les symptômes d'intrusion, donc ça, ça va être plutôt des pensées qui vont s'imposer à soi en lien avec l'événement traumatique. ça peut aussi être des cauchemars pendant la nuit, des flashbacks etc. Du coup tu vas avoir toute cette catégorie là. Après tu vas avoir des symptômes d'évitement. Donc là c'est l'idée d'éviter, en tout cas de mettre beaucoup d'énergie à éviter de penser à la situation, aux personnes qui sont impliquées, au lieu, s'il y a un lieu en particulier, et d'éviter toute discussion. qui amènerait à ça aussi. Donc ça touche là directement aux interactions sociales, puisque en fonction de la personne... Il y a beaucoup de choses qui peuvent ramener à ça par association de pensée. Et donc il y a un cloisonnement mental et physique qui se crée déjà. Ensuite tu vas avoir tout ce qui va être au niveau de l'humeur et des émotions. Ça, ça va être très touché, très impacté. L'humeur, on peut voir l'humeur complètement dégringolée. Donc ça va être de la dépression, une humeur dépressive. Ça va être une irritabilité, de la colère. des sentiments persistants comme de la honte, de la rage. Vraiment, c'est très perturbé, c'est très pollué au niveau de la sphère des émotions, des affects.
- Speaker #1
Et de la difficulté à contrôler ces émotions, j'imagine.
- Speaker #0
Oui, il y a beaucoup d'impulsivité. Après, chaque personne va le présenter différemment, mais il y a beaucoup d'impulsivité, l'impression que ça s'impose à soi. Ce qui est beau. Beaucoup, beaucoup d'écrits, c'est quand même beaucoup de colère qui peut arriver d'un coup, ou beaucoup de culpabilité, ou beaucoup de honte. Ça, c'est vraiment les trois affects qu'on va avoir beaucoup, beaucoup. Et de manière incontrôlée. Il n'y a pas de possibilité de contrôler ça, même si on le cache très, très, très bien. Et le dernier, ça va être ce qu'on appelle une modification de la sphère de la vigilance et de la réactivité. Donc, c'est par exemple de l'hypervigilance. Je suis en train de marcher dans la rue et je vais être attentive à tous les bruits. rien ne peut me faire sursauter. Donc un claquement de porte, je vais sursauter de manière très exagérée et avoir du mal à redescendre. Un cri, je ne sais pas, un bruit de ballon qui éclate, hop, directement, ça va faire sursauter. C'est ces choses-là. Perturbation du sommeil aussi, donc ça c'est tout ce qui est vigilance. On a du mal à s'endormir, à rester endormi. Donc ça c'est les quatre grandes sphères. qui sont très perturbés, sachant que là, on est dans une liste de symptômes, en tout cas de catégories de symptômes, puisque dedans, il y a plein d'autres symptômes qu'on peut observer. Mais je pense que ce qu'il faut retenir, en dehors de ces symptômes-là, c'est que le traumatisme... vient faire effraction dans la vie de la personne. C'est-à-dire que moi, ce que mes patients, mes patientes me racontent, c'est qu'il y a le avant et il y a le après cet événement. Et qu'il y a la temporalité, elle est perturbée. Il y a l'idée d'être... ramené en permanence dans le passé et que le disque soit rayé et en boucle sur cet événement du passé et donc c'est beaucoup plus difficile de s'engager dans le présent au niveau des émotions au niveau des autres, au niveau de soi-même au niveau du monde de se sentir justement on parlait d'ancrage tout à l'heure, ancré dans le présent quand on est tous les jours ramené par tous les symptômes qu'on a cités dans le passé c'est super dur en fait de continuer à avancer ou même à se projeter dans le futur, là on a encore... on est encore plus loin. Donc ça c'est la chose, c'est qu'en gros ça perturbe le rapport qu'on a à soi-même, le rapport qu'on a au temps, le rapport qu'on a aux autres, et le rapport qu'on a au monde de manière générale.
- Speaker #1
Et cette notion de perte de temporalité, je pense qu'elle est hyper pertinente parce qu'effectivement, c'est une partie du yoga qui est très présente. Quand on pratique, on sait qu'en fait, on vient chercher justement à renforcer ce sentiment de présence. Donc, il y a la respiration, il y a l'étude des sensations corporelles. Vraiment, on vient chercher en fait à être témoin de toutes ces petites sensations qui nous ramènent à nous, à notre corps pour être présent et présente. Dans le cas où on est attaché à ce qui s'est passé, à cet épisode passé, les sensations sont bloquées un petit peu dans cet épisode et on a du mal à en sortir pour revenir à son présent.
- Speaker #0
Complètement. Et je pense que même dans certains cas, ça peut être extrêmement déstabilisant d'arriver sur son tapis et de ressentir son corps. C'est-à-dire qu'il y a le processus de je vais sur mon tapis, me poser à un endroit et je sens mon corps. Et ça, quand on ne le sent pas parce qu'on est pris par des trucs du passé et par le trauma, ça peut être déstabilisant, ça peut même être très perturbant. Mais c'est aller vers ça petit à petit qui va permettre de se réancrer et de se maintenir dans le présent, au fur et à mesure bien sûr du rétablissement et en parallèle d'un accompagnement. Mais pour moi, il y a cette idée-là, comme tu as dit, de retrouver le contact avec ses sensations. de reprendre conscience aussi de son corps dans l'espace maintenant. Et donc là, on sort complètement de à quoi doit ressembler la posture, combien de temps je dois tenir la posture, mais plutôt, je reviens à moi, qu'est-ce que je sens maintenant, de quoi j'ai besoin dans la posture. Et ça, c'est tout un apprentissage que, pendant les cours de yoga, on peut venir distiller avec, est-ce que je mets la brique ou je ne mets pas la brique ? Est-ce que je me sers des props pour venir me soutenir dans la posture ? Est-ce que j'arrive vraiment à m'écouter ou est-ce que je suis centrée sur autre chose ? Est-ce que je suis hyper vigilante sur les choses autour de moi dans la salle ? Ou est-ce que j'arrive à me concentrer sur ma respiration ? Et ça, l'idée, ce n'est pas d'y arriver tout le temps à 100%. C'est de se dire que dans cette pratique-là, dans le yoga, il y a des choses, des éléments qui peuvent nous aider à travailler ça, de revenir à nous-mêmes, à nos sensations, à une temporalité du présent. Et aussi, un élément extrêmement important pour moi, c'est que quand on pratique par exemple en studio, il y a quand même le groupe. Et on parlait de cloisonner quand on a des symptômes d'évitement par exemple. Il y a aussi pas mal de difficultés à tenir des relations dans le temps parfois, ou en tout cas à ressortir ou à revoir du monde. Et le groupe, il peut permettre d'être la première fois qu'on reprend contact aussi avec d'autres personnes, quand on a vécu un traumatisme. Ça peut aussi être le moyen de faire groupe et d'être soutenu dans une pratique qui n'est pas forcément évidente, c'est-à-dire d'être sur son tapis. tout seul d'entendre sa respiration, parfois c'est très perturbant. Donc il y a là cette dimension du groupe et tout seul cette dimension d'outils à la maison. Si je sens que ma respiration s'accélère parce que l'angoisse monte ou la colère monte, je sais qu'en fait j'ai quand même des outils de respiration que j'ai vus ou que je connais qui peuvent m'aider à revenir à maintenant et comme tu disais, à prendre un peu de distance avec ce qui est en train de se passer et sortir de l'impulsivité en direct qu'on ne peut pas contrôler. Voilà.
- Speaker #1
Ok, hyper intéressant. Est-ce que tu peux nous dire un petit peu comment tu intègres ces techniques de yoga ou de respiration ou autres dans les traitements et quels sont les bénéfices que tu vois sur tes clients, tes patients ?
- Speaker #0
Je pense que la première chose que j'ai intégrée, avant même peut-être de mentaliser que j'intégrais le yoga dans mes consultes, c'est la respiration. Ça c'est sûr, c'est la respiration, la cohérence cardiaque particulièrement. Donc l'idée d'inspirer sur 4 temps et d'expirer sur 4 temps, ou 5 ou 6, mais en tout cas de pouvoir revenir à son souffle et de resynchroniser les inspirer et les expirer. Et je le faisais en début de séance, quand les personnes arrivaient plus ou moins agitées, ou perturbées, ou émotionnellement que c'était intense, ou à la fin. Un peu comme une routine de fin pour finir la séance. Et j'insistais vraiment dessus quand on avait eu une séance qui était extrêmement intense. Parce que j'avais envie que le patient ou la patiente reparte correctement. Mon idée, ce n'était pas que je laisse la personne partir loin et que je me dise jusqu'à la prochaine fois, je ne sais pas, ça ne va pas. Donc ça, c'était vraiment un peu en routine dans mes séances. Et ça me permettait, moi, de revenir. Avec le patient dans un état, ce que j'appelle moi la fenêtre de tolérance, c'est un entre deux où je ne suis pas trop anxieuse, où je ne suis pas trop déprimée ou trop dissociée. Peu importe ce dont on a parlé avant, il est possible que ça ait varié. Tant que ça reste entre ces deux points-là, ces deux lignes-là, c'est OK pour moi. Et après, je me suis mis à m'en servir un peu comme un outil que je donnais au patient. Donc comme une routine, notamment dans la prise en charge de l'anxiété. un devoir à faire en fait à la maison donc vraiment en illimité mais souvent on commençait par une fois par jour et ils devaient voir un peu comment ça se passait pour eux et il y avait tout un travail presque de rééducation respiratoire à faire parce qu'avant de faire de la cohérence cardiaque parfois il faut déjà réapprendre à inspirer et à expirer complètement donc ça on le faisait en séance et puis après ils l'emportaient avec eux à la maison donc ça c'est le premier outil parce que ça me permettait qu'ils aient déjà un premier outil dans leur trousse à outils à eux. Et ce que j'observe et ce qu'on me rapporte surtout, c'est que le niveau d'anxiété, il baisse. Il baisse directement après l'exercice, mais il baisse surtout de plus en plus avec le temps, si je fais de plus en plus cet exercice. Et en fait, ça, ces petites routines-là de respiration, je me suis mise à les étoffer. Avec, je dirais plutôt une pratique d'étirement qui se rapproche du Yin Yoga, et puis du Yin Yoga en fonction de où la personne se situe par rapport à la pratique du yoga, parce qu'encore une fois, je n'impose pas le yoga à tout le monde en consultation, mais voilà, une posture simple, par exemple dans le lit, mettre les jambes un peu en l'air contre le mur, histoire de laisser le bassin redescendre, et du coup de lier à l'exercice de respiration cette posture-là, ça pouvait être une posture de l'enfant. peu importe, je montrais un petit peu différentes postures sur des photos et puis on choisit ensemble, on teste en fait la respiration elle est vachement liée à la posture je me souviens au début je donnais des exercices de respiration et tout puis je regardais et je me disais mais en fait le corps il est hyper fermé en fait moi je suis en train de dire à quelqu'un de respirer super profondément mais les épaules elles ne sont pas ouvertes et donc je me suis dit que c'était chouette de pouvoir amener ça et autre chose qui m'a fait amener le yoga... de manière un peu plus systématique, c'est les douleurs, qui étaient parfois très très présentes chez les personnes qui sont psychotraumatisées, parce que même si on est très dissocié, même si on sent plus ses sensations, ou plus trop, ou de manière plus très fiable, il y a la question de l'anxiété peut jouer sur le corps, les tensions, et donc les postures de yoga pouvaient agir là-dessus aussi.
- Speaker #1
Dissocié, ça veut dire quoi ? Tu peux nous expliquer s'il te plaît ?
- Speaker #0
Oui. Dissocier, c'est souvent une sensation des sensations qui sont décrites par les patients comme un sentiment de plus-être dans son corps. Donc à l'extrême, ça peut être carrément se voir de l'extérieur, observer la scène de l'extérieur ou avoir l'impression de flotter un peu à l'extérieur de son corps. On peut aussi avoir des personnes qui vont décrire l'impression que la vie se déroule comme un film, comme s'ils étaient très extérieurs. à ce qu'ils étaient en train de vivre.
- Speaker #1
On est toujours dans cette idée d'être bloqué dans l'expérience traumatique qui a été vécue avec la conscience de l'être ou de ne pas l'être, mais d'avoir complètement cette déconnexion avec son corps dans l'état présent dans lequel il est.
- Speaker #0
Oui, complètement. Comme si le corps était figé ailleurs. Et ça peut être quelque chose d'assez constant, assez continu quand il y a un trauma qui n'est pas traité. Ou ça peut arriver par moment. Parce qu'en fait, la dissociation, de base, ce n'est pas forcément pathologique. On peut tous se dissocier. Par exemple, je prends le métro et je me réveille quelques arrêts. Enfin, je me réveille, je me rends compte quelques arrêts plus tard que je n'ai pas vu les trois arrêts passer. C'est une absence. C'est une absence, oui. Sauf que là, l'idée, c'est que c'est là de manière assez répétée, que c'est là de manière plus intense que ça. Et ça touche du coup le corps, mais aussi le rapport aux autres. Ça peut être oublier beaucoup de choses, ça peut toucher ces choses-là. Et donc le corps, quand il se réveille de cette dissociation, par moment, il peut se ramener à nous avec des douleurs. Sachant qu'en plus, un niveau d'anxiété très important, un niveau de stress très important, ça amène des tensions musculaires concrètes, au niveau de la mâchoire, du cou, du dos, peu importe. Et du coup, ces douleurs-là, elles peuvent rester et être embêtantes. en elle-même dans le présent. Donc ça, c'est quelque chose que, dans la logique dont on n'oublie pas le corps en psychothérapie, même si je ne me substitue pas à un kiné ou un ostéopathe, je travaille quand même avec ça et prendre en compte ces douleurs-là. Et donc, dans les routines pour réduire l'anxiété, on essaye de réduire un petit peu les douleurs et ou de continuer à être avec son corps et se ramener dans le présent avec des postures de yoga. Donc ça, c'est plutôt des devoirs à la maison.
- Speaker #1
Mais j'adore parce qu'en fait, tu... Grâce à ces techniques de yoga, qui sont prises du yoga comme la respiration, ou des postures assez simples et accessibles, tu viens autonomiser tes patients et patientes vers leur propre guérison. Donc même si tu n'es pas là... et que, mettons, tu as une consultation une heure par semaine ou une heure tous les 15 jours, ils ont quand même des outils pour, eux, pouvoir gérer leur crise d'angoisse, gérer leur douleur, etc. Donc, je trouve ça génial.
- Speaker #0
Moi, je ne veux pas qu'ils soient dépendants de moi, mes patients. L'idée, c'est quand même qu'ils viennent me voir parce qu'ils ont besoin de voir une professionnelle, un professionnel. Non seulement, effectivement, comme tu dis, on se voit une heure par semaine si on est très rapprochés. Parfois, ça peut arriver plus, mais généralement, ça va être peut-être une heure toutes les deux semaines, une heure toutes les semaines. Il s'en passe du temps des choses à l'extérieur de la consultation. Et d'ailleurs, le plus gros du travail, il va être fait entre les séances, en fait. Quand on peut se rendre compte de certaines choses dont on a parlé, quand certains mots vont résonner autrement, quand on va revivre autrement des situations. Donc, il y a cette idée-là que le travail continue et qu'en fait, c'est leur travail. Moi, je suis là avec eux, on fait équipe face à ça, mais c'est leur travail, c'est leur parcours vers leur établissement. Et surtout, là, moi, je les reçois parce qu'il y a psychotrauma et parce qu'il y a des symptômes de psychotrauma. Mais les outils que je leur donne là, en fait, ils peuvent aussi servir à prévenir des coups de mou, comme on disait au début, des moments de stress. Et voilà, avant, moi j'ai des patients, patientes que je reçois, ils sont étudiants, il y a un psychotrauma, mais ils ont aussi des partiels, et la respiration, elle peut servir avant le partiel, ou à se recentrer pour réviser, ou à s'endormir, et tout n'est pas là parce qu'il y a pathologie, ou parce qu'il y a problématique, c'est des outils, comme on disait, pour prévenir, accompagner. Et bien sûr qu'ils s'autonomisent et qu'ils soient dans leur vie à eux et qu'ils puissent continuer à s'insérer ou se réinsérer bien dans leur vie et accomplir ce qu'ils ont envie d'accomplir. Mais surtout pas qu'ils soient enfermés dans la consultation. Après, ça peut durer toute la vie et c'est OK aussi, mais ce n'est pas le but initial.
- Speaker #1
Trop bien. Est-ce que, selon toi, on peut guérir le trauma grâce au yoga ou grâce à des pratiques ? des pratiques somatiques, des pratiques alternatives. On voit beaucoup de choses en ce moment sur les réseaux et dans l'offre en studio ou même en ligne. Le mot healing, c'est quelque chose qui est vachement tendance en ce moment, que ce soit le yoga, le breathwork, les activations Kundalini et j'en passe. Il y a beaucoup de choses qu'on trouve sur le marché qui sont accessibles à toutes et à tous. Qu'est-ce que tu penses, toi ? Oui. de toutes ces techniques, est-ce que c'est vraiment des outils qui peuvent permettre de guérir les personnes traumatisées ? Est-ce qu'il y a des contre-indications à pratiquer le yoga ou une autre technique ? Et est-ce qu'il y a vraiment un réel pouvoir de guérison finalement avec ces techniques ou est-ce que c'est simplement du marketing ?
- Speaker #0
Déjà, je pense que la première chose qui me vient du coup, c'est effectivement que healing, c'est guérison. Et que même s'il y a la différence de traduction, Moi, je préfère parler, et je tiens à parler de rétablissement, parce que derrière, du coup, le mot guérison, pour moi, il y a une espèce de promesse d'arriver à un état qui serait un peu en état parfait, de santé, d'équilibre, duquel on ne devrait plus bouger et vers lequel on devrait tendre toujours.
- Speaker #1
La meilleure version de toi, même. Exactement.
- Speaker #0
Voilà. Et du coup, ça, pour moi, déjà, c'est une fausse promesse, parce que... A mon avis, on ne peut pas tenir ça toute la vie. Et en plus de ça, il y a un revers à cette promesse-là, c'est qu'au-delà qu'elle ne puisse pas, selon moi, être tenue, elle arrive avec un rapport à soi qui est biaisé, qui est difficile. C'est-à-dire que ça voudrait dire que tant qu'on n'est pas à cette version de soi-même améliorée, parfaite, on est cassé, on a un problème, ou on ne peut pas avoir de coup de moins bien, ou alors que dès qu'on a un coup de moins bien, on doit rebondir et retourner vers un état... Du coup, on est la meilleure version de soi-même. Et du coup, déjà en termes de problématiques de santé mentale, ça ne prend pas en compte les pathologies de santé mentale. Donc l'idée qu'on ne guérit pas des problématiques de santé mentale, on s'en rétablit. Et on peut effectivement retrouver un équilibre ou tendre vers un équilibre qui n'a pas pour vocation d'être la meilleure version de soi-même, qui doit juste nous permettre d'aller mieux dans les moments où on a besoin d'aller mieux, d'apprendre et de prendre soin de soi. de pouvoir avoir un filet de sécurité, donc d'être entouré de gens qui sont bienveillants avec nous, de professionnels qui sont compétents et qui sont à notre écoute, qui nous suivent, et d'avoir des outils à notre disposition qu'on connaît, qui peuvent nous aider dans ces moments-là, et entre ces moments-là, pour vivre sa vie comme on a envie de la vivre, et pas sur un modèle de santé qui va aussi de pair avec des représentations d'un certain type de corps, d'un certain statut social. etc. Donc pour moi, il y a cette double fausse promesse un petit peu avec cette promesse de guérison là. Maintenant, est-ce que tout est à jeter dans ces choses-là ? Je ne pense pas. Dans le breathwork, il y a quand même l'idée qu'il y a de la respiration et il y a un vrai travail de respiration à faire. On en parlait juste avant, c'est très utile pour moi. Mais tout dépend quel objectif on a avec ça. Est-ce que c'est de vivre une expérience et de voir comment on le fait ? le souffle ça peut m'aider à me sentir mieux maintenant ou est-ce que le souffle il doit me guérir de ce que je vis là ou faire que je ne sois plus un problème comme personne et ça je pense que c'est pareil y compris pour les états de conscience modifiés donc les trans qui sont recherchés par exemple dans des méthodes comme la méthode Kundalini ou autre, c'est dans la recherche actuelle on travaille beaucoup là dans le milieu scientifique sur les états de conscience modifiés et de trans, on trouve des résultats qui fonctionnent très très bien y compris dans le trauma... Ça reste dans des contextes qui sont extrêmement encadrés, qui sont encore au stade expérimental. Donc je ne dirais pas qu'on ne peut rien faire avec ces Ausha. Je dirais que ça doit être cadré et que surtout les personnes, je pense, doivent pouvoir choisir et être éclairées dans la prise de décision de pouvoir se rendre dans ces expériences-là. C'est-à-dire que ça reste extrêmement activant. et exposant, par exemple, de faire de l'hyperventilation quand on est très angoissé. Et donc, si je ne sais pas ce que je veux faire là, et je n'ai pas d'outil pour revenir et me réancrer, et que je fais une crise d'angoisse, et qu'en face de moi, je n'ai pas un professionnel ou une professionnelle qui sait m'accompagner quand ça ne va pas, la contre-indication, je la place là, moi. C'est qu'il faut pouvoir le faire de manière encadrée, et en sécurité, et de manière éclairée. Ça reste complémentaire et tant que la personne y met du sens, pourquoi pas ? Même dans d'autres approches qui sont peut-être un peu moins impressionnantes, les yogas justement qui sont recommandés pour le trauma, qui sont plutôt des approches plus douces comme le yin yoga, le yoga restauratif, ça peut rester assez inaccessible pendant longtemps pour des personnes qui sont très très activées, qui ont de l'hypervigilance. Je pense que même là, je peux témoigner très personnellement. La première fois que je fais du yin yoga, je me rappelle, je suis en flexion avant. Au bout d'une minute trente, on avait dit qu'on restait trois minutes. Je suis en temps de ma respiration. Moi, je me dis, mais ça ne va pas être possible. Je sens l'angoisse monter. Je me dis, ce n'est pas possible. Je ne peux pas rester là toute seule. Et à ce moment-là, quand je vis ça, je ne suis pas dans un état d'hyperactivation comme certains ou certaines de mes patients peuvent être.
- Speaker #1
Oui, je suis complètement d'accord avec toi. Et quand j'ai commencé le yin, ça me générait énormément d'anxiété de rester avec mes sensations. Mais avec le temps, avec la pratique et surtout avec l'accompagnement de professeurs qui avaient une certaine sensibilité à ces sujets de santé mentale, ma pratique du yin et du yoga restauratif a vraiment évolué vers quelque chose de positif et de réparateur qui aujourd'hui est complètement essentiel à mon équilibre. Et j'enseigne moi-même le yin et je le vois, il y a des différences individuelles entre les élèves. entre ceux qui arrivent vraiment à lâcher prise tout de suite et ceux pour qui c'est un challenge et qui ont besoin d'une attention particulière.
- Speaker #0
Il y a des différences individuelles, mais pour moi ce qui va primer dans ce qui est bon ou ce qui n'est pas bon, c'est surtout comment je me sens, et surtout si je suis éclairée dans ce que je vais vivre. C'est-à-dire de prendre en compte, y compris en tant que prof de yoga, qu'en face de nous, oui on n'est pas thérapeute, mais du coup on a des personnes qui vont arriver avec différentes problématiques, y compris des problématiques de santé mentale. Et du coup, peut-être que c'est ok d'ouvrir les yeux en Shavasana, quand je ne peux pas fermer les yeux, par exemple. Ou c'est ok de ne pas faire toutes les respirations si je ne le sens pas aujourd'hui, ou toutes les postures, parce que ces pratiques-là, elles sont avant tout pour que dans le moment présent... on se sent bien. C'est-à-dire que ça ouvre un espace et une fenêtre où on se sent bien, là où parfois toute sa vie est polluée par les symptômes du psychotrauma. Donc c'est plutôt cet indicateur-là, je pense, qui prévaut sur toutes les indications et contre-indications. qu'on pourrait trouver. Il y a beaucoup de choses dans la psychologie actuelle et dans la médecine actuelle qui sont en train de bouger et qui sont très très très inspirées d'autres types de médecine et de prévention et je pense que c'est pour le mieux. Donc ça doit circuler, on ne doit pas fermer les portes mais ça doit être fait en connaissance de cause et en prenant en compte qu'on a un impact sur les gens qu'on reçoit, qu'on voit, qu'on guide dans ces pratiques-là.
- Speaker #1
En tout cas, S'il y a quelque chose de positif à souligner, c'est que le sujet de la santé mentale, dans le cadre du yoga ou d'autres pratiques, c'est un sujet qui est de plus en plus présent et dont on parle de plus en plus. Donc ça, c'est cool. Oui. Après, voilà. C'est bien de rappeler que les profs de yoga ne sont pas des psychothérapeutes. Il faut y aller de manière encadrée, se renseigner. Et nous, en tant que professeurs de yoga, faire attention à ne pas se positionner. dans quelque chose qu'on ne maîtrise pas et faire les choses de manière très ouverte et comme tu le disais très justement accepter que chaque personne va avoir une approche et une expérience différente de ce qu'on va avoir à offrir et que c'est tout à fait ok de ne
- Speaker #0
pas vivre l'expérience comme toi tu l'entends en tant que prof non carrément et puis d'ailleurs moi je vois la différence même en ayant les doubles casquettes quand je guide un cours de yoga en studio je ne suis pas psychologue donc forcément il y a il y a une sensibilité particulière, mais le contexte fait que dans l'accompagnement, ce ne sera pas la même chose, ce n'est pas individualisé, même s'il y a une attention aux élèves qui sont présents dans la salle. Je pense qu'effectivement, c'est comment je me place, dans quelle posture je me place, et qu'est-ce que je suis en train de faire là, c'est quoi mon objectif, comment je suis à l'aise, c'est déjà moi en tant que prof pour accompagner et contenir ce qui peut se passer dans la salle. parce que parfois ça peut être assez impressionnant, une crise d'angoisse c'est impressionnant. Donc comment même en tant que prof, je cherche même des infos, je demande et je vois comment je peux gérer s'il se passe ça, parce que même d'ailleurs sans breastwork et sans but de chercher à débloquer quoi que ce soit, il peut se passer des choses dans une salle de yoga. Et en tant que pratiquant, pratiquante, si concernée ou pas par des difficultés de santé mentale dans le présent, C'est intéressant justement d'avoir sa trousse à outils pour pouvoir continuer bien sûr à aller dans des cours où il y a le groupe, où pratiquer seul, mais s'autoriser à mettre en place des choses qui sont contenantes et rassurantes pour soi dans ces pratiques-là. Ouvrir les yeux, même si ce n'est pas nommé dans la salle, parce que parfois en tant que prof on guide un groupe et on ne dit pas à chaque fois vous pouvez ou pas fermer les yeux, mais garder en tête qu'on a le droit, que c'est sa pratique, que le but c'est de se sentir bien à cet endroit-là. Et pas autre chose, en fait. Ni guérir pour toujours, ni faire parfaitement les postures, juste se sentir bien, faire un truc qui nous fait nous sentir bien.
- Speaker #1
C'est parfait, parce qu'on va rebondir sur ma dernière question, du coup. Je voulais te demander si tu avais un conseil ou un message à faire passer à nos auditeuristes, qu'ils soient yogis ou pas yogis, qui sont dans une situation difficile ou stagnante. Quel serait ton conseil, ton message ?
- Speaker #0
Je pense que ça va être un conseil qui fait lien entre le yoga et la psychothérapie. C'est qu'on est déjà poussé ou pas à la porte d'un cabinet de psychothérapie ou d'un cours de yoga. Ce qui est intéressant, c'est que c'est des choses qu'on peut aller essayer et qui changent en fonction du lieu où on va le faire, de la personne avec qui on va le faire. Et que c'est ok de redouter ça, de ne pas en avoir envie maintenant. On n'a pas tous l'obligation de faire un cours de yoga ou une consultation. mais que c'est accessible, c'est des outils qui sont là, et c'est des choses que vous pouvez aller explorer, et même dans le cas où c'est des choses sur lesquelles vous avez un préjugé, aller tester différentes pratiques de yoga, du yin yoga, du vinyasa, avec différents profs, et ça peut être la même chose en psychothérapie, aller tester avec différents thérapeutes, c'est quelque chose quand même qui parle du relationnel, du rapport à l'autre. de se sentir bien et c'est ok d'explorer et de chercher jusqu'à ce qu'on trouve ce qui nous fait nous sentir bien que ça soit du yoga ou pas du yoga et avec différents thérapeutes trop bien merci beaucoup pour tout ce que tu nous as raconté aujourd'hui j'étais
- Speaker #1
super contente de partager ce moment avec toi je te dis à très bientôt merci Alice Merci d'avoir écouté cet épisode. Le plus important pour moi, c'est de sensibiliser et d'aider les personnes qui luttent ou ont lutté avec le stress post-traumatique. Si tu penses à quelqu'un qui a besoin d'écouter ce podcast, n'hésite pas à le partager. Et si tu veux soutenir mon travail, abonne-toi au podcast et n'hésite pas à me laisser un commentaire pour me dire ce que tu en as pensé.