Speaker #0Salut à tous et bienvenue sur Tentative, le podcast qui laisse la parole à celles et à ceux qui ont tenté de nouvelles expériences et qui en sont ressorties grandies. Vous écoutez l'épisode de Perrine qui est partie en itinérance à cheval pour rencontrer des artisans qui innovent en Bretagne. Bonne écoute ! Je m'appelle Perrine, je vis à Paris depuis le début de mes études et je suis consultante. pour des thématiques environnementales et notamment en finance. Je pourrais aussi également dire que je suis une personne assez enjouée, souriante, que j'ai un peu la FOMO, que j'adore la nature et que ça me manque à Paris. On va parler d'un projet que j'ai réalisé maintenant il y a deux ans, qui me tenait énormément à cœur, une itinérance à cheval en autonomie et tout ça dans une région que j'adore, la Bretagne. Au moment de la fin de mes études, j'ai une espèce d'angoisse de l'engagement. Tous mes collègues d'école et tout ça sont lancés à pleine balle sur la route du CDI. Et moi, j'ai une énorme angoisse de me dire « mais non, j'ai pas envie d'aller tout de suite maintenant » . dans ce genre de schéma de vie métro boulot dodo et du coup j'ai l'idée de ce projet j'avais envie de voyager de m'extirper un peu de l'urbanité de paris et de faire quelque chose qui me sort de ma zone de confort mais j'avais pas envie de faire un voyage lointain parce que parce que ça faisait écho à mes engagements écolo, que partir loin, prendre l'avion et se dépayser complètement dans une culture dont on ne va pas forcément connaître la langue, où il y aura un énorme gap social, ça me dérangeait en fait. Même si les contrées lointaines, les paysages fabuleux qu'on peut avoir à l'autre bout du monde sont très attirants, j'avais peur de ne pas connecter avec les gens que je vais rencontrer autant que si je pars dans un pays, la France, où c'est ma langue, où je comprends l'univers social et je peux creuser plus les relations. Donc c'est pour ça que j'ai choisi de voyager. au plus près mais avec des conditions un peu particulières. Comme mon CV me colle à la peau quand même, je n'avais pas envie que cette expérience soit vue comme juste bon elle a pété un câble, elle est partie faire son délire et que ça n'a aucun lien avec finalement le domaine dans lequel j'allais exercer un métier. J'ai décidé de faire un travail de créatrice comme j'avais fait plusieurs stages dans l'investissement et dans le VC, on parle beaucoup de projets, projets, projets. J'avais été dans un univers assez techno solutionniste dans le dernier stage que j'avais fait et là je voulais prendre un virage à 180 et aller plutôt vers des initiatives en lien avec la résilience des... territoires, qui pour moi faisait écho à l'élothèque, à comment construire une envie de faire ensemble, de vivre ensemble en accord aussi avec la nature et les gens qui y habitent. Donc c'est ça que j'avais envie de creuser et c'est comme ça qu'un peu j'ai justifié mentalement mon projet, où en fait j'avais aussi beaucoup envie de faire du cheval et de partir à l'aventure. Cette justification, elle vient de la pression sociale qu'on a en tant que jeune diplômé, de devoir occuper son temps avec toujours des expériences pertinentes pour la suite. de voir toujours à long terme ce qu'on fait à court terme, toujours dans la société du résultat, de comment se vendre et on l'a mais tout au long de notre parcours d'études pour candidater à des stages, pour candidater à des bonnes formations et en fait à chaque fois on se justifie. Je pense qu'il y avait cet aspect là et évidemment il y avait aussi l'aspect familial où je me disais c'est quand même bien si j'arrive à justifier devant mes parents, mes oncles, les tantes, mes soeurs, que je vais pas juste faire du cheval, que je vais aussi essayer de... raconter quelque chose, de comprendre quelque chose. Et j'avoue que ça ne les rassurait pas que je ne prenne pas un CDI avec un revenu directement étroit. troisième raison on va dire, je suis issue d'un milieu privilégié qui m'a donné énormément de chance, j'avais pas la pression d'un prêt à étudiant par exemple et ça ça fait énormément de différence avec d'autres personnes qui peuvent pas faire ce pas et se jeter à l'eau dans un projet, financièrement j'étais quand même assez confortable pour le réaliser j'avais aussi l'ambition de créer un podcast à partir des témoignages que j'avais recueillis, j'avais acheté tout le matos je m'étais un peu formée à comment faire un podcast et aussi à prendre des sons etc, à prendre des notes J'avais aussi l'ambition de faire un carnet de voyage pour retracer un peu tout ce parcours-là et surtout montrer qu'on peut faire un voyage à côté et vivre des choses fabuleuses et genre pas partir forcément prendre l'avion à l'autre bout du monde. Ça, ça me tenait vraiment à cœur, donc plutôt créer un nouvel imaginaire. On a besoin d'avoir des exemples de voyages plus près parce qu'on est inondé sur les réseaux sociaux de copains, copines qui partent. Et c'est vrai que ce qu'ils montrent évidemment est magnifique, mais on a un paysage et on a des ressources. gigantesque qui est magnifique en France. Et je pense que parfois, ça manque. Et aussi de montrer tout l'envers du décor ou se dire que logistiquement, en fait, c'est pas si compliqué, que le train, c'est simple. On peut aussi utiliser d'autres modes de transport comme ils appellent mobilité douce. Bon, le cheval, c'est un peu exotique, mais au moins, on vit des trucs assez forts. Et on se fait remarquer quand on arrive dans un village. Le cheval, c'est quand même un moyen de mobilité qu'on a complètement oublié. Pourtant, il y a deux siècles, on va dire, dans les rues de Paris, on voyait encore des chevaux. Et c'est un animal que je trouve fabuleux, hyper intéressant, hyper sensible. Et puis tout simplement, je n'avais pas envie de partir en vélo. Je n'ai jamais fait vraiment de vélo. Par contre, le cheval, c'est présent dans ma vie depuis que je suis gamine. J'en fais depuis l'âge de 5 ans. J'ai fait des itinérances à cheval que j'ai adoré. Et j'avais envie de le faire avec mes moyens. Ma relation au cheval a beaucoup évolué du moment où j'ai fait mes premiers pas comme cavalière quand j'étais gamine dans les centres équestres, où là du coup c'est un modèle qu'on nous propose très très très différent des besoins naturels du cheval. Et c'est, si je caricature, assez carcéral, des poneys club un peu usines où le cheval est juste un moyen d'apprendre et un loisir qu'on va vendre à des gamins qui sont tout seuls ou séparés par des grilles. Ils mangent des granulés trois fois par jour et un peu de foin. toute la journée. Et puis, ils sont sortis une à trois fois par jour avec un cavalier toujours différent. Et donc, il n'y a pas de construction de relation avec le cheval. Et c'est hyper dommageable. Après, je ne dis pas que tous les chevaux de France sont malheureux parce qu'il y a des poneys club qui font très, très bien les choses. Mais dans beaucoup de clubs, les chevaux, ils deviennent tarés. J'ai eu du mal à déconstruire cette vision. et j'ai réussi à la déconstruire dès lors que je suis partie à cheval en itinérance, avec du coup des randonnées qui étaient organisées. Et là, on est au rythme du cheval. Donc un cheval, c'est assez simple, ça a besoin de manger au moins 15h à 16h par jour, de marcher, puisque c'est important pour lui et c'est un grand marcheur dans le monde naturel. Et ça a surtout besoin de ses congénères et d'être en troupeau, etc. La préparation, elle a commencé 4 à 5 mois avant. Le plus gros challenge, c'était de trouver le cheval, parce que je n'en possède pas, et que le milieu du cheval est tel que louer un cheval, ce n'est pas du tout dans les mœurs, et donc ce n'est vraiment pas évident. Et ça, ça a été un coup de bol, en vrai. J'ai fait des recherches en Bretagne, parce que faire un convoi de cheval de Paris, ça aurait été un peu chelou. J'ai contacté pas mal de monde dans le Morbihan notamment. Et puis finalement, je suis tombée sur le pays du roi Morvan, qui est une communauté de communes qui promeut un peu le tourisme à cheval. Et j'ai eu le contact d'Anouk, qui est mon ange gardien dans cette aventure, parce qu'elle a été finalement la clé de voûte ou même la personne ressource qui m'a donné des ailes en vrai, parce qu'elle avait déjà fait des itinérances à cheval et elle possédait un cheval qui, au moment où on s'est parlé, allait être un peu... dans une phase où il n'allait pas faire grand-chose parce qu'elle, enceinte, elle ne pouvait pas faire grand-chose avec sa jument. Et donc, c'est elle qui, après plusieurs rencontres, donc on s'est déjà vues à Paris, ensuite on s'est vues en Bretagne, elle m'a présenté la jument et tout. Il y a eu un feeling, elle m'a dit, bah vas-y, bingo, on travaille la jument ensemble pour qu'elle n'ait plus peur de grand-chose et qu'elle puisse, du coup, partir avec toi un mois. Sachant que c'est une jument demi-sang très breton, donc pour ceux qui ne connaissent pas, c'est des chevaux oranges avec les crins un peu plus clairs et c'est un cheval. très imposant, massif, mais une force tranquille. Donc c'était parfait parce qu'en plus elle avait un peu de sang breton, donc ça faisait cheval itinérant sans Bretagne avec un cheval breton, ça claque quoi. Donc ça c'était l'aspect cheval, et parallèlement à ça donc il y a la préparation du cheval où on la désensibilise, etc. Mais il y a aussi, moi il faut que je me forme à pas mal de sujets, à commencer par l'orientation. évidemment parce qu'on va pas se mentir il faut savoir lire une carte quand on part en itinérance même si c'est pas loin de chez nous et donc ça j'ai appris à détecter un peu les chemins lesquels sont faits pour le cheval lesquels peuvent être dangereux pour le cheval et il y en a beaucoup en Bretagne qui sont très intéressants qui sont mappés d'ailleurs par une association mais on peut pas faire que avec ça donc on utilise aussi les GR on utilise aussi les routes ensuite il y avait aussi tout l'aspect pratique Donc se former aux réparations de sacoches, ça s'appelle la bourrellerie. La maréchalerie, c'est un énorme point du voyage et de la préparation. C'est les pieds du cheval. Donc je ne sais plus qui avait dit ça ou quel adage c'est, mais un cheval sans pied, ce n'est pas un cheval. Et ça, je l'ai bien vécu parce qu'il y a eu pas mal de galères avec les sabots du cheval et notamment les fers. On ferre un cheval parce que quand on fait beaucoup de kilomètres, la corne va s'user. Et du coup, il y a plusieurs pratiques, mais la... La plus simple et la plus conventionnelle, c'est de ferrer le cheval. Donc ça repose sur l'ongle, donc ça lui fait pas mal évidemment. Mais faut-il encore qu'il ait des aplombs, c'est-à-dire qu'il soit, on va dire, assez carré au niveau de ses pieds. Ce qui n'était pas trop le cas de cette jument. Du coup, j'ai déferré pas mal de fois. Et pour referrer un cheval, donc planter les clous ou adapter la ferrure, là on a besoin d'un professionnel. Donc je pouvais remettre un clou, mais disons que j'avais vraiment besoin de gens pour m'aider et de professionnels. Les maréchaux ferrants, qui sont vraiment des personnes clés d'une itinérance. Quand on défaire, déjà ça ne fait pas le même bruit, surtout si on est sur du bitume, parce que c'est vrai que le bruit est assez régulier et on peut vite s'en rendre compte quand le bruit du fer va être un peu différent. C'est comme quand on tape dans un mur creux et dans un mur plein, il n'y aura pas le même son et c'est typiquement ce qu'on peut entendre. Donc là, il faut resserrer le fer ou alors s'il n'y a plus de fer, ça ne fait plus de bruit parce que c'est comme si nous on était pieds nus et avec des talons. On ne fait pas du tout le même bruit. Puis, c'est visible. On voit aussi que le fer, au fur et à mesure du temps, il va complètement s'affiner, s'élimer. Il y a aussi des clous. Donc, le fer est prépercé. Et donc, c'est dans ces trous qu'on va mettre le clou. Et si on ne voit plus la tête du clou dans le fer, alors ça veut dire que la ferrure commence à être un peu vieillissante et qu'il faut faire quelque chose parce qu'il y a moyen que le fer sorte du pied. En fait, la ferrure, il faut toujours anticiper. Ça va avec l'observation. Si on n'a pas anticipé, le fer tombe et là, on est dans la merde parce qu'on est obligé de s'arrêter pour le bien du cheval. C'est comme si nous, on marchait avec une seule pompe. Ce n'est pas idéal. Tout ce qui est matériel, c'était une grande, grande, grande question. Qu'est-ce que j'amène ? Est-ce que je dors en bivouac ? Est-ce que je dors chez les gens ? Comment je m'allège ? Sachant que je partais sans cheval de bas, c'est-à-dire je partais avec un seul cheval sur lequel tout mon chargement allait reposer. Plus moi, si je la monte, du coup, il fallait être assez spartiate dans l'organisation du voyage. J'ai choisi de prendre une tente parce que j'avais peur d'être à la rue à un moment. J'ai pris quelques affaires et donc tout reposait dans deux sacoches qui étaient sur les flancs du cheval. Deux fonds de ce qu'on appelle en fait des sacoches aussi, mais qui sont devant et qui sont plus profondes pour mettre les gourdes, etc. Et après, j'avais un espèce de boudin qu'on appelle un charvin qui, lui, reposait sur le trousse 15, c'est-à-dire l'arrière de la selle. Donc ça, ça faisait quand même assez mastoc. Et quand j'arrivais dans les villages et tout, on voyait que j'étais voyageuse vagabonde parce que ça, c'est assez visuel. Et puis après, pour l'équipement du cheval, la selle et tout ça, elle appartenait à Anouk. On avait tout rembourré en peau de mouton pour que ça soit hyper smooth pour le cheval. Et puis après, il y a eu cette association que j'ai trouvée à Lyon qui m'a permis de faire un grand saut dans cette aventure en testant l'itinérance à cheval pendant deux jours et en me formant à tous ces aspects d'orientation, de bourrellerie et de maréchalerie. Et j'ai trop kiffé, surtout que leurs chevaux étaient vraiment fantastiques et très très bien dans leur tête, donc ça a été un vrai plaisir. La désensibilisation d'un cheval, elle se fait par un travail sur l'éthologie. Il faut s'imaginer un peu l'homme qui murmure à l'oreille d'un cheval. Dans la caricature, c'est un peu ça, mais en fait c'est tout un travail d'observation sur comment fonctionne le cheval. Et puis ensuite, c'est des exercices pour mettre en confiance le cheval avec des choses qui lui font peur. Le cheval, c'est une proie. Donc, évidemment, il y a plein de choses qui ne sont pas naturelles pour lui. Par exemple, une branche qui va être un peu basse et qui va venir effleurer le cheval ou faire un bruit particulier, il va la considérer comme une menace extérieure qui pourrait très bien être un prédateur. Et donc, il faut l'habituer en se disant, ça, ce n'est pas grave, ce n'est qu'une feuille, ce n'est qu'une branche. Et donc, il faut répéter l'exercice avec des stimulations positives. Donc, le cheval, il a réussi à ne pas avoir... peur, hop, on va lui faire une caresse, on va relâcher la pression. Ça, c'est beaucoup d'exercices répétitifs. Et ensuite, il y avait aussi faire en sorte que le cheval soit vraiment très très très malléable, et notamment, comme en randonnée, on monte et on descend souvent pour soit alléger le cheval, soit passer un obstacle, soit ouvrir une porte, par exemple, et bah que le cheval puisse venir à nous quand on est notamment sur un montoir pour éviter de lui faire mal au dos et qui se range en fait comme une voiture dans sa place de parking et qu'on est juste à mettre une jambe par-dessus la selle. Bon, ça, on n'a pas vraiment réussi. Mais il y avait un début et franchement, Lou est super top pour ça. Les chemins qui sont à éviter pour les chevaux, il y a les trucs trop caillouteux où on sait qu'on ne va pas pouvoir avancer aussi rapidement. Mais il y a surtout les chemins trop meubles où il y a eu un peu de boue, il a plu. Et en fait, on fait un pas et le cheval s'enfonce. Et alors là, warning, warning. Le cheval peut vite être un peu comme dans un sable mouvant. Ça m'est arrivé une fois, j'ai eu la peur de ma vie. Elle avait mis un pied, mais elle arrivait encore à avoir un équilibre, donc tout n'était pas perdu. Malgré ça, le cheval a un fonctionnement un peu en élastique. Ça va être un peu comme si nous, au Mont-Saint-Michel, on va faire une randonnée, on se retrouve dans un sable mouvant, on arrive jusqu'à la... taille et qu'en fait on n'arrive plus à se dégager par nos bras parce qu'on n'a pas assez de force. Le cheval c'est un peu pareil, s'il a de la boue jusqu'au genou, il n'a pas assez de force en haut du corps pour pouvoir s'extirper et donc on appelle un tracteur et on essaye de l'extirper. Et là en l'occurrence il n'y avait vraiment pas moyen d'appeler un tracteur parce qu'on était dans un chemin creux, ça aurait été une galère sans nom. Heureusement la lucidité de la jument a repris le dessus. et elle a réussi à trouver un passage pour sortir de l'ornière. J'étais là en mode belle gosse. Et pourtant Lou m'avait bien mis le warning, mais j'avoue, je n'avais pas vu cette flaque. La préparation du cheval a commencé en mi-février, mars. Moi, je partais en mai et la jument a chopé un parasite fin mars. Et elle a perdu du poids, du poil. Elle était complètement mal, quoi. Elle était malade. Elle a repris un peu de poil de la bête. Et Anouk ne m'avait pas prévenu parce que je n'étais pas sur place quand ça s'est passé. Et vraiment, jusqu'à deux, trois semaines avant de partir, j'étais là, bon, est-ce que ça va le faire ? Est-ce qu'elle a repris ? assez de force pour partir parce que sinon si je n'avais pas le cheval, je n'allais pas en trouver un autre en trois semaines et c'était mort. Donc il y a un roc, c'est du jument qui s'appelle Mignon. Je ne l'ai pas cité donc je ne pense pas qu'elle écoutera le podcast mais c'est quand même important. Je n'étais pas très sereine le soir du départ et même une semaine avant. Déjà, il y avait cette histoire de cheval qui était un peu tombé malade mais maintenant il était rétabli donc ça allait. Et puis surtout... tout. C'est là, mais comment vont prendre les gens la chose ? J'ai prévu mes étapes pour savoir où je dormais, etc. Mais j'avais peur de la suite où j'avais moins prévu. Et puis aussi, j'avais ce délire de parisienne. Je voulais être dans les temps, ne pas faire perdre du temps aux gens et du coup être dans une optique de respecter les heures d'arrivée et de départ pour que les gens ne soient pas en mode elle squat ou qu'est-ce qu'il faut, elle n'est toujours pas arrivée. Mais bon, en fait... Il n'y a jamais eu un moment où on m'a dit « ouais, t'es en retard » . Le jour du départ était la première semaine de mai. Bon, c'était un temps breton un peu plus vieux. C'est bien, en vrai, c'est matin plus vieux, matin heureux. J'étais hyper motivée, avec un peu ce petit stress de se dire « ça y est, c'est le grand départ » . Bon, même si la première étape n'était pas non plus gigantesque, on part tranquillement, évidemment pour l'ajument, pour l'habituer, pour ne pas cueillir un effort trop important dès le début. Enfin, je pense que pour tout. Toutes les itinérances sportives, c'est ça. Donc ça s'est fait plutôt comme une continuité. Mais je savais que c'était en ligne droite. Là, je partais et je revenais pas parce qu'on avait fait que des boucles pour le moment avec la jument. Et ça, mentalement, pour le cheval, c'est quand même très, très, très différent. La ligne droite... vs la boucle, parce que la boucle dans les derniers moments de la journée il voit qu'on arrive et qu'il y a un entrain, il y a une motivation encore plus que quand on arrive dans un lieu complètement inconnu, il faut se refaire des repères, il faut analyser tout le quartier pour voir s'il n'y a pas des prédateurs, où c'est que je m'échappe s'il y a un problème, donc ouais tout ça c'est hyper dépaysant je pense pour le cheval, mais bon on n'est pas allé très très loin la première journée on a dû faire 15-20 kilomètres enfin c'était pas énorme On partait du Bel Air. Le Bel Air, c'est un éco-village en centre-Bretagne où cohabitent, en bonne intelligence, mais surtout avec des valeurs hyper fortes et vraiment trop belles. J'ai beaucoup aimé l'ambiance et la façon de vivre. Ils vivent sur un lieu qui est très très joli, au bord d'un lac, sur une espèce de forêt où ils ont des habitats légers, donc des yurts, des roulottes, des dômes. géodésiques ou des espèces de mobilhomes et ils ont un mode de vie plutôt, on dirait alternatif mais en fait ils sont très liés à la communauté des gens là-bas ils font pas sécession, au contraire ils ont envie de construire quelque chose avec les gens autour d'eux, avec les collectivités locales et ils ont un espèce de soleil, je trouve ils irradient et c'est vraiment assez fou et c'est pas non plus une communauté de béni-oui-oui, je l'exprime très très mal mais vraiment c'est un projet pour vivre en commun, mais surtout pour vivre, en fait. Ils n'essayent pas de prouver un truc forcément politique, ils n'essayent pas à tout prix que ça se passe bien. Non, c'est juste une façon de vivre qui est un peu différente. En respect avec les limites planétaires, ils ne sont pas parfaits, il n'y a pas une exigence sur on ne mangera pas de viande, on ne boira pas d'alcool. C'est très flex et c'est du coup très bien, je pense, pour évoluer. Et donc j'ai adoré vivre avec eux. Merci qui m'est aussi acceptée, parce que ce n'est pas évident d'arriver comme ça, comme un cheveu sur la soupe. Donc ça a été un peu mon premier projet finalement que j'ai découvert et une façon de vivre très résiliente. Ça m'a permis vraiment de faire le sas entre la vie parisienne un peu effrénée, les bars, le béton, les engagements, le taf et l'itinérance, le cheval, le quotidien avec la nature et tout. La première journée, j'avais prévu d'aller à la mélangerie où vivent Plume et Martin, qui sont deux conteurs qui organisent chaque année un festival de contes. Et donc c'est un endroit assez bucolique où il y a des moutons, ils ont des enfants hyper mignons. Et j'arrive, déjà il pleut, j'étais un peu en retard sans doute, donc j'étais là en mode mince, j'espère qu'ils sont là, etc. Et je suis accueillie par Martin avec un grand sourire. On décèle le cheval, évidemment. On lui trouve un endroit sympa avec les moutons qu'ils ont. Ils ont un super jardin avec pas mal de choses dans le potager. Tout de suite, je suis accueillie à l'intérieur. On commence à boire un peu. pot et puis les enfants arrivent. Plume était revenue du marché avec des légumes et je me souviens qu'il y avait un des gamins qui mangeait les pois comme ça, crus. Sa mère lui disait non mais arrête on va manger mais au final il en a mangé pas mal comme ça. Après je m'étais dit que comme snacks c'était quand même plutôt stylé plutôt que des sneakers ou des barres chocolatées. Et donc on a dîné ensemble et on a pas mal discuté du coup de leur projet de compte. C'est un festival quand même assez fou. Au fin fond de la Bretagne ils accueillent sur plusieurs jours des compteurs ... de partout dans le monde, des personnes qui viennent écouter des contes. Et l'intérêt aussi, c'est qu'il y a beaucoup de gens qui viennent, parce que c'est assez peu commun des festivals de contes, donc ils font venir des gens de très loin, mais ils ont parfois du mal à faire venir des gens de très près, qui sont en fait des gens qui partagent peut-être pas les mêmes valeurs qu'eux, et qui sont un peu méfiants parfois de ce genre d'initiative, et trouver ça dommage. J'ai adoré cette première nuit parce qu'elle m'a énormément rassurée sur « Ah bah je retrouve des gens hyper mignons qui sont intéressés par le projet, qui ont envie de me connaître, qui sont aussi bavards sur leur vie » parce que c'est ça que je venais chercher, c'était un peu rentrer dans l'intimité des gens. Finalement, il m'a cœur. Ils me connaissent ni d'Ève ni d'Adam. En plus, j'arrive à un cheval qui va leur manger de l'herbe et qui va peut-être faire des dégâts chez eux. Donc, grande confiance dans l'humain, en fait, avec ce premier accueil. Et puis, en plus, il pleuvait des cordes. J'avais dit que j'allais planter ma tente. Ils ont eu pitié de moi. Donc, du coup, ils m'ont dit d'aller dans leur van, un van aménagé, mais qui est un ancien camion de pompiers. Et c'est dans ce camion de pompiers qu'ils ont fait toute leur tournée quand ils étaient plus jeunes, où ils allaient faire plein de festivals, etc. Donc, ma première nuit, c'était dans un camion de pompiers. Et ça, c'est quand même stylé. plusieurs porteurs de projets qui m'ont assez marqué une micro filature de laine qui permet d'un mouton une laine d'un mouton de faire des choses en feutre, de l'artisanat textile etc Et ça, ça paraît assez banal et finalement c'est une technique qui est assez ancestrale on va dire. Mais en France, la plupart des laines de mouton sont en fait des déchets et c'est jeté. Parce que pour les petites productions, les filatures locales ou les filatures à l'échelle de la France ne sont pas en capacité en fait de faire la collecte pour des tout petits montants de laine. Donc c'est hyper triste. Et là, l'avantage de cette microfilature, déjà les deux personnes qui la font sont géniaux, Émilie et Nicolas. en fait ils prennent vraiment la laine de ton mouton pour faire un produit que tu pourras porter que tu pourras transmettre sur des générations parce que ça sera de la super qualité et en plus c'est pas un déchet alors que pour le coup on parle de ressources renouvelables, de matières renouvelables le mouton chaque année il fait de la laine et pour le coup c'est trop bête de la jeter donc ça j'avais trouvé ça trop trop cool Il y a eu également un monsieur qui s'appelle Michael, que j'ai vraiment adoré, qui a fondé la ferme du Mazadou. Il a un parti pris assez radical, c'est de ne plus utiliser les moyens mécaniques et le pétrole pour faire une production de pain, de céréales et de pizzas, et on va dire tout ce qui est autour du céréale. Il a repris les terres de son grand-père, il a eu la découverte aussi de se dire... qu'il fallait qu'il passe du coup le BPREA pour obtenir ses terres, qui étaient lorgniées par ses voisins agriculteurs. Mais il s'est battu, il a réussi à les garder. Et lui, à la base, il n'était pas du tout agriculteur, il était pharmacien. Il avait son officine, je crois, vers Morlaix, un truc comme ça. Et du jour au lendemain, il s'est dit, bah non, en vrai, mais qu'est-ce que je fous là ? Je vais repartir chez mon grand-père et faire quelque chose de mes mains. Et avec ce niveau de difficulté supplémentaire, où il travaille tout à la main, avec des chevaux. pour faire les travaux des champs et aussi pour se transporter parce que le pain qu'il produit, les pizzas, il les emporte au bourg d'à côté, Pulat Pestivien, et là-bas, il vend le pain. Il arrive en calèche, c'est quand même fou. Chez lui, j'ai passé plusieurs jours et j'ai eu la chance aussi de faire un atelier pain et pizza. Et c'était trop bien. Donc on a pétri la pâte, on a fait les pizzas, on a goûté le pain. Et il n'y a rien de mieux, franchement, qu'un pain au levain avec du beurre salé dessus. C'est un délire comme c'est bon. Et c'est simple. Je suis allée aussi à la Convergence des Loutres. Déjà, le nom, il est pépite, la Convergence des Loutres. Et c'est un tiers-lieu qui a Louguivy-Plougrasse, tenu par quatre nanas. Celle que j'avais contactée s'appelle... Aude et cette fille elle est incroyable elle a tout de suite été séduite par l'aspect cheval et tout et en fait le cheval quand je suis arrivée là-bas donc c'est une grande demeure qui est un tiers lieu où vit ces quatre femmes mais également ils organisent énormément d'événements culturels, de projections de lectures, d'ateliers créatifs etc avec les gens de la commune et on a mis le cheval dans le jardin cette fois-ci c'était drôle parce que quand on prenait l'apéro au soleil dans le jardin t'avais le cheval qui était à côté de nous qui mangeait des chips et en vrai c'était très drôle ... Ça m'a énormément marquée parce qu'elle avait prévu qu'on aille à l'EHPAD avec le cheval. J'étais là, mais waouh, au niveau sanitaire, ça va peut-être être compliqué et tout. Et en fait, l'EHPAD, c'est une petite maison de retraite où il y a un jardin. Et du coup, on a emmené le cheval. La plupart des personnes qui pouvaient se mouvoir et tout, être debout, sont venues autour du cheval, l'ont caressé, l'ont brossé, etc. Et c'était hyper émouvant parce que déjà, ça change du quotidien, je pense, pour eux. Et puis j'avais vu aussi des vidéos sur Insta en mode un cheval qui vient dans les EHPAD, dans les hôpitaux, et je trouvais ça, mais waouh, c'est fabuleux. Et du coup, on a fait ça, et c'était même pas mon initiative, parce que je pensais pas que ça serait possible, c'était l'initiative de la Convergence des Loutres. Et ce que j'ai aussi beaucoup aimé, c'est que ça a fait ressurgir des choses chez certains des personnes qui étaient là-bas, qui ont témoigné de ces chevaux de trait, parce que c'était un cheval de trait que j'avais, qu'ils avaient dans leurs enfances, et qui... était hyper important dans la famille et c'est eux qui le nourrissaient, c'est eux qui le gardaient et tout ça en breton en fait et c'était drôle, bon du coup j'ai rien compris parce que voilà, mais ensuite ils m'ont traduit en français et du coup ça a fait pas mal de conversations comme ça entre deux vieux qui parlaient en breton et qui se remémoraient des moments de leur enfance où leurs parents avaient encore des chevaux, ça a aussi amené la question du premier tracteur et tout ça et récemment il y a eu une super bande dessinée justement sur les histoires du remembrement par une fille qui habite au centre Bretagne qui est une journaliste hyper hyper stylé Inès Léraud, qui travaille sur ces sujets agricoles en Centre-Bretagne. Et j'invite vraiment les gens à s'intéresser à ces histoires locales parce qu'elles sont assez folles en vrai. Et donc là, j'avais un petit pied dedans et ça m'a fait trop plaisir d'avoir ces témoignages de personnes plus âgées sur l'histoire de ce cheval, en fait. C'est quoi le cheval breton pour un breton, quoi ? Les enclos étaient un peu expérimentaux. Je pense que les gens du cheval qui vont m'écouter, ils vont me dire, bah évidemment que ça n'aurait pas marché. Mais je voulais pas prendre trop de poids. Et surtout, je voulais pas attacher le cheval parce que c'est un risque énorme. Si le cheval tire au renard, c'est-à-dire tire violemment sur la corde, bah il peut se faire le coup du lapin. Et donc, un enclos avec quoi ? Des bâtons de marche. Des bâtons de marche... télescopique que je pouvais ranger la journée dans une sacoche et la nuit du coup que je plantais avec des bandes et du fil pour faire un enclos d'à peu près 20, 30, 50 mètres carrés. Enfin ça dépendait de ce que je pouvais m'aider aussi, des arbres etc. Donc vous allez me dire c'est pas énorme pour un cheval mais du coup je faisais en sorte que je le déplace plusieurs fois dans la soirée pour que du coup elle ait toujours de l'herbe mais parfois ça suffisait pas et l'herbe est toujours plus verte ailleurs. Donc du coup elle avait envie de passer derrière et ça résistait pas très bien. C'était pas électrifié non plus. Il y a un jour où je me réveille, en plus chez des inconnus parce que c'était la première nuit. Il est 9h, grand soleil. Je vais vers le pré que j'avais fait pour la jument et là, pas de jument. Donc je me dis, bon, pas de panique, peut-être que quelqu'un l'a bougé parce que c'est vrai que j'avais fait une petite grasse mat quand même 9h. Et puis les gens qui étaient à prendre le café dehors disent, ben non, on ne l'a pas vu ce matin. Donc la grande panique. Mais où est passé le cheval ? Donc on est au mois de mai, il y a quand même des herbes assez hautes. Donc on arrive à voir par où elle est passée parce qu'elle est quand même imposante. Et puis elle aplatie l'herbe à son passage. Et tout mène vers un ravin. Donc je suis là, bon, merde. Un ravin tout broussailleux comme on peut le voir au printemps. Donc je commence à un peu, voilà, je me pique avec les orties, les ronces et tout pour essayer de descendre dans ce trou. Je vois rien, mais en même temps, c'est très foisonnant, donc on ne peut pas en avoir la certitude. Je remonte, j'appelle les flics qui me disent en fait, c'est la mairie qui a cette responsabilité des animaux en divagation. Donc si ça vous arrive un jour, le mot divagation, c'est tous les animaux qui se sont échappés et qui du coup sont en divagation dans un territoire. Et donc, heureusement, une amie que j'avais rencontrée plus tôt sur mon itinéraire. est venue en renfort, et puis du coup, on a débroussaillé le trou. Au final, on s'est dit, bah non, elle est pas là. Et donc, on a décidé de plutôt suivre la route. Et puis après, on a fait du porte-à-porte sur toutes les maisons qu'on croisait. C'était un peu, ah oui, j'ai entendu un truc à 6h du matin, des pas de chevaux, de cavaliers. Mais je trouvais ça étrange, quand même, ils sont fous, ces gens, à partir aussitôt, en balade. Donc du coup, ok, ok, ok. Et puis on entend, ah oui, moi j'ai vu, je partais au boulot. J'ai vu un truc par la fenêtre avant de partir. Oh, bah oui. Et vous avez pas appelé quelqu'un ? Oh, bah non. OK, OK, on avance, on avance. Et puis, on reçoit un appel de la mairie, finalement, vers 16h. Bonjour, madame. C'est bien vous qui avez perdu le cheval orange ? Oui, on nous a appelé. Il est chez une dame. Il commence à manger ses bégonias. Bah, elle commence à s'énerver. Donc, venez vite. Et donc là, on est allé à l'endroit. C'était genre 4 km plus loin. Enfin, peut-être un peu moins. Et en fait, la jument avait ses chaleurs. Et du coup, comme... l'enclos que je lui avais préparé, il était quand même pas fabuleux, elle s'était échappée, elle avait fait son petit bonhomme de chemin, et en fait elle s'était fourrée à un endroit où il y avait des chevaux, mâles ou des étalons, et ça l'avait attirée, voilà. J'avais décidé de faire un stop à un endroit qui s'appelle La Dérive, où on apprend des pratiques de charpente traditionnelle. Un endroit fabuleux, avec des gens fabuleux. Et là-bas, il y avait un type qui s'appelait Yuna, et qui était allemand. compagnon allemand, donc quelqu'un qui par essence est itinérant et qui va de chantier en chantier pour apprendre le métier de la charpenterie et du bois et lui du coup il était en totale roue libre à faire du stop partout en France voire en Europe et j'avais prévu d'aller voir un atelier de tiny house donc en bois et ça ça l'intéressait pas mal donc on a fait un bout de chemin ensemble et on avait de l'allure il faut le dire parce que moi j'étais avec mon cheval tout emboumouté dans du mouton avec une jolie selle un peu western et tout ... Et lui, il était habillé comme au 19e siècle avec un espèce de sceptre qui est en fait l'habit traditionnel des compagnons du devoir allemands. C'est vrai que ça avait de l'allure. Il avait un beau chapeau aussi. On aurait dit qu'on était dans une autre époque. Et on a fait quelques étapes ensemble et ouais, c'était très sympa. J'ai jamais eu trop peur en tant que femme. Par contre, j'ai reçu beaucoup de vibrations de personnes qui avaient... peur pour moi. Et notamment, c'est drôle comme c'est très rangé dans des cases selon les personnes qui m'interpellent. Il y a les hommes et les jeunes de moins de 30 ans qui sont là, waouh, trop bien, super. Et par contre, les femmes de plus de 40, 50, voire même plus à la retraite et tout, qui sont dans des schémas sans doute un peu différents et qui n'ont pas vécu les mêmes émancipations que ma génération. Là, par contre, c'est genre, mais vous n'avez pas peur ? Et le soir, vous dormez où ? Et les mauvaises rencontres ? et je n'avais pas du tout anticipé ça avant qu'on m'en parle. Ça m'a un peu interpellée. J'ai fait une randonnée où je suis allée pas loin d'une église. Il y en a énormément en Bretagne qui sont magnifiques. Et il y avait un club de petits vieux qui s'était donné rendez-vous là-bas et faisait tout un itinéraire pour visiter les églises. Et je les ai croisées à cheval. Et c'était vraiment drôle comme la réaction des hommes, parce qu'ils étaient tous en couple, était tellement différente de celle des femmes. Il y avait de l'admiration ou de la curiosité dans les yeux des hommes et il y avait de la... peur et une sorte peut-être d'envie aussi dans les yeux des femmes, ou dans leurs discours, peut-être que j'interprète beaucoup, mais c'est ce que j'ai ressenti et ça m'a... C'est assez fou, je trouve. Je me dis que c'est compréhensible quand on retrace l'histoire du féminisme et de finalement les droits de nos grands-mères, voire nos mères quand elles sont arrivées au monde. Tout ce qui avait été incarné par leur mère, il y a une transmission quand même de ces peurs, etc. Et plus on est vieux, j'ai l'impression que plus on a peur. C'est comme on a le vertige, on a plus peur parce que peut-être on a plus à... à perdre aussi. J'ai fait un périple qui n'est pas si énorme, mais j'ai traversé quand même trois régions biotopes ou biorégions, ça dépend comment on l'appelle, très différentes. Donc j'ai commencé dans le centre-Bretagne, une région qui est gorgée d'eau avec des chemins creux. On a l'impression qu'il y a un corrigan ou un elfe qui va sortir du coin du chêne centenaire ou multicentenaire. Vraiment, c'est un endroit magique pour ça, avec des trop belles forêts et plein de ruisseaux. Ensuite, je me suis dirigée vers la mer, vers les côtes d'Armor. où là, dès qu'on passe, en fait, la RN12 est sur le royaume de la maison secondaire. Donc vraiment rien à voir. C'est beaucoup plus « riche » , même si en fait, c'est pas si riche parce qu'il y a beaucoup de maisons secondaires, voire parfois 40% dans certains villages. Et ça, c'est pas fou. Mais de l'autre côté, il y a des gens qui sont à l'année et qui sont pas forcément très riches. Et ça, c'était trop beau. Bref, c'est magnifique. La côte de Granit Rose, les plages énormes, des espèces de baies. Je suis allée aussi sur la plage de Saint-Michel-en-Grève, qui est un lieu assez connu des cavaliers parce que c'est une grande plage de sable blanc, qui est très grande pour faire des grands galops. Et c'est là-bas aussi qu'il y avait eu un cheval qui était mort à cause des algues vertes. Donc elle est assez emblématique de ce territoire-là. J'ai fini par les Monts d'Arrêt. Donc c'est assez méconnu aussi quand on parle de la Bretagne. Personne ne sait qu'on a un point culminant à 340 mètres. comme ça, Saint-Michel de Braspar. Là-bas, c'est une terre de brouillère, c'est une terre un peu dévastée. Il y a eu des incendies aussi, il n'y a pas si longtemps. Donc, c'est à la fois beau et pareil, il y a un côté très mystique. Et avant d'entrer dans ce territoire assez particulier, je suis passée par une forêt qui est enchanteresse, qui s'appelle la forêt de Welgwatz. Elle est, pareil, très mystique. Il y a des grandes pierres affleurantes et une forêt très, très belle. Et c'est... J'espère que ça a donné envie d'aller en Bretagne. En peu de kilomètres, on peut avoir des paysages radicalement différents. Des structures socio-économiques aussi très très différentes. Le centre-Bretagne, c'est assez modeste, il y a très peu de transports en commun et c'est le pays de la débrouille, de l'industrie agroalimentaire, mais aussi de tous les gens qui ont envie d'un nouvel idéal de vie, qui s'installent en éco-villages, en lieux plutôt communautaires, et c'est la cohésion aussi. C'était prévu que je rentre à telle période. Les pieds du cheval ne pouvaient pas supporter non plus beaucoup de jours supplémentaires. Et il y a même un moment où j'ai cru devoir arrêter le périple parce que justement les fers commençaient à fatiguer sévère et qu'on ne pouvait pas refaire. ferrer derrière parce qu'on avait déjà referré plusieurs fois, donc quand on refaire, on lime un peu plus les ondes du cheval, le sabot, et donc on a fait la dernière étape était assez longue en se disant, bon, si ça va pas être ce jour-là, ça sera demain que les fers vont tomber, donc ça aurait été très dommage de finir l'aventure en camion, c'est-à-dire qu'on embarque le cheval et qu'on fait les dix derniers kilomètres, ça aurait été trop dommage, et surtout psychologiquement pour le cheval de se dire, bah ouais, je l'ai fait j'ai fait toute cette boucle et je suis rentrée à bon port, elle s'est pas foutue de ma gueule elle m'a quand même ramenée dans mon pré j'ai confiance en l'humain quoi en gros et ça on l'a réussi et en vrai bravo à la jument mais je serais bien restée plus longtemps en vrai ou je serais bien repartie la semaine d'après quand je suis arrivée au Bélair donc de retour après 5-6 semaines j'étais le sourire jusqu'aux oreilles plein de gratitude. Enfin, je n'aime pas tellement ce terme, mais c'est vrai que c'est aussi grâce à eux que j'ai pu faire ce voyage. Donc, j'avais envie de leur redonner, de rayonner à nouveau sur tout ce qu'ils m'avaient donné. Et on a organisé un grand repas avec les gens qui étaient là. C'était un peu mon repas de départ également parce que je n'allais pas revenir de sitôt au Bel Air parce qu'ensuite, j'avais un sas de décompression chez ma tante dans le sud de la Bretagne qui était très bénéfique. Et ensuite, je suis retournée à Paris. Donc, peut-être une semaine après. dans le bouillon de la vie parisienne, arriver à Montparnasse en plein juin 2023, qui a été caniculaire, c'était horrible. Pourtant, juin, j'adore. C'est hyper joyeux. Les gens sont trop motivés. Ils sont bonne mine parce qu'ils ont pris le soleil et tout. Et pour autant, j'étais vidée. Je restais un peu prostrée sur mon canapé à écouter des podcasts ou à juste réfléchir comme ça. Et ça m'a pas mal déprimée, le retour. Ce qui m'a... permis de me projeter, c'est que l'été allait se dérouler un peu en dehors de Paris pour moi parce que j'allais faire plein de petits voyages en France, aller voir des amis, aller faire des festivals. Ça, ça m'a sauvée parce que du coup, j'ai pu revoir plein de gens et surtout sortir de Paris et me remettre dans un bain un peu plus bucolique et ça, ça m'a fait beaucoup de bien. Et après, j'avais envie de repartir et j'ai toujours cette idée dans la tête de repartir parce que j'ai tellement aimé ce voyage. Je le ferai sans doute un peu différemment. Faire un truc un peu plus fou, partir d'un endroit en France où je me serais installée plus ou moins à mi-temps pour entraîner un cheval, vivre un petit peu, et de faire cet endroit en France jusqu'au Maroc. Il y a l'eau à passer, évidemment, le petit détroit, mais ça, j'ai compris qu'on pouvait le faire quand même avec un cheval, s'il a ses papiers. On le met dans un van et ensuite on le met sur le bateau et ça marche. J'avais promis à les parents d'une super amie que j'irais à cheval au Maroc les revoir. parce que je suis allée une fois les voir. Et maintenant que je ne prends plus l'avion, ça devient un peu délicat. Je peux y aller en train et tout, mais c'est quand même plus fun d'y aller à cheval. Et donc, c'est un peu un pari que je me suis fait. Je ne sais pas si ça se réalisera dans 2, 3 ou 5 ans, mais je pense que c'est réalisable. Donc, j'ai envie de le faire. J'ai adoré justement voyager seule parce qu'on est toujours entouré et ça nous oblige toujours à aller vers les autres, à demander son chemin. Et ça, c'est trop sympa. Et c'est pour ça que si je repars, je pense que je repartirai peut-être seule. Et c'est vraiment pas du tout la même expérience que d'être à deux, où du coup on se repose beaucoup sur l'autre personne. Donc c'est moins énergivore d'être à deux, je pense. Par contre, je pense qu'on fait moins de rencontres. Il y a peut-être un côté aussi vulnérable qu'on pense de nous quand on est seul, qui met tout de suite de l'empathie dans le regard des autres et facilite beaucoup les choses, je pense. Ce qui m'a le plus plu, il y a les rencontres, les imprévus aussi, et comment on arrive à les déjouer et en fait à en rigoler à la fin. Et moi, j'ai beaucoup aimé le switch en mode, on arrive chez des gens, donc on s'impose entre guillemets, même si on les a prévenus, et parfois ils sont ravis de nous accueillir, ou parfois c'est pas le bon moment, ou ils sont en plein charbon pour embouteiller du cidre, et bah tant pis, genre on va mettre la main à la pâte, et puis derrière, du coup on a l'impression de s'être rapprochés grave des gens. et qui nous livrent des trucs qu'on n'aurait pas pu avoir si on était juste resté une nuit et qu'on avait juste partagé quelque chose de mercantile, comme quand on fait du tourisme. Pour moi, c'est un peu plus le vrai voyage, ou en tout cas le voyage que j'ai envie de faire quand je pars. Je ne sais pas, les gens sont tellement bienveillants, souriants et tout. Il suffit d'enclencher sur quelque chose et peu importe leur personnalité, ça marche toujours. Il y a toujours un atome crochu qui permet de parler de choses et d'autres. Et parfois, on tombe sur des pépites. En bref, c'est des parcours de vie trop... trop fou et hyper inspirant et je pense que c'est ça aussi que je venais chercher. C'est m'inspirer parce que j'étais un peu perdue et me dire, ces gens, ils ont fait ce choix-là. Moi, je suis sur la lisière encore. Est-ce que je reste dans le système pour lutter de l'intérieur pour mes convictions écologistes ou est-ce que je fais, entre guillemets, d'affection même si c'est pas tout à fait sortir du système parce qu'on y reste et oh ! Au contraire, on inspire peut-être les autres qui restent dans un truc un peu conventionnel. Et pour le moment, je suis toujours dans le système pour essayer de lutter de mon intérieur. Mais par contre, ça me trotte dans la tête de les rejoindre, quoi. De me dire, vas-y, je fais ça, je quitte Paris, enfin. Et je me lance dans un truc, entre guillemets, alternatif. Ce qui m'empêche de faire ça, c'est... la promesse que je m'étais faite d'essayer quand même de lutter de l'intérieur, de faire des choses avec ce que j'aurais su de mes parents, de l'éducation et des études qui ont coûté cher à mes parents, à la société. Et je me dis qu'il faut quand même essayer de faire pivoter ce monde capitaliste, même si en fait, ma conviction profonde, c'est que peut-être on ne va pas du tout réussir à changer les choses d'un monde en utilisant ces règles, parce qu'il faudrait complètement mettre à bas le... Ah bah non ! Anti-capitaliste ! Non, il faudrait. peut-être envisager d'autres voies pour changer le système, et l'une d'entre elles, du coup, c'est de construire sa propre résilience en dehors de ces schémas-là, et d'inspirer peut-être par ce pied de nez qu'on fait au système, en étant radical dans l'approche, mais toujours inclusif dans le rapport aux autres. C'est un juste milieu, je trouve, à trouver. C'est ce que j'avais trouvé au Bel Air qui était très inspirant et pas du tout culpabilisant de la part d'autres modes de vie. J'ai appris que je pouvais voyager seule en gérant des galères, ça donne confiance en soi. J'ai appris aussi qu'il faut péter un coup parfois sur la considération qu'on a de certaines choses et que le plus simple c'est le mieux parfois. Que ne pas se doucher pendant trois jours, en fait c'est pas si grave. Quand j'y repense, j'ai trop envie d'y retourner. Et à la fois je me dis, je me suis peut-être un peu... éloignée parfois du nectar que ça avait généré dans ma façon de penser et dans ma façon d'agir. Et en même temps, dès que j'y repense, je me dis, bah non, en fait, ça m'a grave construite et je sais que je vais y retourner à un moment. Donc ça me rassure en même temps. Et je pense que ça m'a apporté énormément de choses, énormément d'ouverture d'esprit, évidemment. Maintenant, je peux partir en voyage avec vraiment pas beaucoup d'habits, alors qu'avant, j'avais besoin de me changer quasi tous les jours. Mais bon, ça, dès qu'on fait de l'itinérance, on se rend bien compte que c'est cool d'avoir juste... un change. Si, maintenant, j'ai énormément confiance en l'autre. C'est pas comme si j'avais une défiance avant des autres. Mais je me dis l'humain est génial. Ça fait très face de Miss France. Mais c'est vrai qu'on peut avoir confiance dans les autres. Ils nous le rendent énormément au centuple. Et ça, c'est ce qu'on apprend quand on voyage seul. On apprend à faire confiance. Et ça, c'est trop bien. En vrai, je suis trop fière de cette expérience. Je suis contente de l'avoir fait et d'être allée au bout. parce que souvent quand j'ai des idées de projet parfois ça aboutit pas tellement mais là je suis allée au bout du voyage après j'ai encore quelques frustrations sur me dire du coup je repars avec mes mots tels que le système me les a inculqués un peu est-ce que j'ai assez capitalisé sur cette expérience et redonner également à ceux qui m'ont donné pendant cette expérience et pour inspirer donc typiquement avec un carnet de voyage un podcast etc donc ça c'est un peu des trucs qui sont un peu le caillou dans ma chaussure en me disant ah t'es pas là de ne pas aller jusqu'au bout. Mais en même temps, ce n'est pas si grave et je dois être un peu indulgente en me disant ce que j'ai fait et ce que j'ai réalisé pendant ce voyage était déjà trop bien. À chaque fois que j'en parle, les gens sont un peu en mode mais what the fuck, c'est bizarre et en même temps, c'est stylé. Et puis déjà, rien que de pouvoir parler de ça, c'est trop bien. Donc non, je suis fière. Je pense quand on a envie de tenter un truc, mais qu'on hésite, il faut y aller à fond. Ça fait très bisounours comme ça, mais souvent il y a des fenêtres qui s'ouvrent en se disant « Ah ben là c'est le bon moment, il faut y aller à fond en fait. » En se disant « Peut-être qu'on ne pourra pas le faire plus tard. » Et du coup, il ne faut pas laisser passer sa chance là-dessus. Et en même temps, ne pas se mettre trop la pression parce que... Moi, ce qui revenait souvent, c'était le commentaire. Ah bah oui, c'est bien, tu vas le faire maintenant, avant de commencer vraiment la vie professionnelle, parce qu'après, tu ne pourras plus. C'était souvent des femmes un peu plus âgées qui, du coup, avaient aussi l'horloge bouléologique qui se mettait en marche et qui, je pense, se mettait dans un schéma familial, etc. Mais en vrai, il ne faut pas hésiter à faire des ruptures dans ces schémas et venir un peu à contre-pied de ce que... que la société nous impose plus ou moins insidieusement et justement créer ces nouveaux imaginaires pour inspirer d'autres personnes. Et c'est le cas pour plein de choses, les droits des femmes, les femmes chefs d'entreprise. En fait, il faut soit avoir des modèles, soit se dire qu'on va être le modèle de quelqu'un et du coup, ça peut aussi aider sur des sujets qui ne sont pas du tout élagués pour le moment et qui sont complètement neufs. Moi, j'avais des modèles, en vrai. inspirations, des gens qui, je me dis, c'est possible en fait. Et même si pour le commun des mortels, ça paraît chelou, il y a plein de gens qui l'ont fait et c'est grave possible. Merci d'avoir écouté cet épisode. Si l'histoire de Perrine vous a plu, n'hésitez pas à vous abonner au podcast et à écouter d'autres épisodes. Et si vous aussi, vous voulez partager une expérience qui vous a marquée, N'hésitez pas à me contacter sur Instagram. En attendant, je vous dis à dans quelques semaines pour un nouvel épisode de Tentative. Ciao !