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Un beau jour

Après 15 années d'infertilité, cette mère de famille raconte l'arrivée de leur bébé miracle

Après 15 années d'infertilité, cette mère de famille raconte l'arrivée de leur bébé miracle

39min |03/08/2025
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Description

Inès Rouy, avec son mari Bruno, a vécu l'épreuve de l'attente d'un enfant qui n'arrive pas... pendant 15 longues années. Une période faite d'espoir fou et de déceptions cruelles, marquée par six fausses couches successives, mais vécue, malgré tout, dans la foi en la bonté de Dieu. Puis, un beau jour, alors qu'ils avaient mis de côté ce projet d'avoir un enfant et décidé de se mettre au service de l'Eglise au sanctuaire Notre-Dame de Verdelais à proximité de Bordeaux, leur fils Philibert est arrivé, miraculeusement. Un chemin d'abandon et de foi qu'elle raconte comme un témoignage de l'action de Dieu dans nos vies.


P.S : joyeux anniversaire à Philibert :)

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Ce podcast est réalisé par Famille Chrétienne


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Transcription

  • Anne-Françoise

    Bonjour, je m'appelle Anne-Françoise et vous écoutez Un beau jour, le podcast qui donne la parole à des croyants dont la vie et la foi ont été changés à jamais par un événement imprévu. Et dans cet épisode, je reçois Inès qui, avec son mari Bruno, a vécu l'épreuve de l'attente d'un enfant qui n'arrive pas pendant 15 ans. Une période faite d'espoir et de déception, marquée par six fausses couches successives. mais toujours vécu dans la foi, en la bonté de Dieu. Puis, un beau jour, alors qu'ils avaient mis de côté ce projet d'avoir un enfant et décidé de se mettre au service de l'église au sanctuaire Notre-Dame de Verdelet, à proximité de Bordeaux, leur fils Philibert est arrivé. Un chemin d'abandon et de foi qu'ils racontent comme un témoignage de l'action de Dieu dans nos vies. Bonjour Inès.

  • Inès Rouy

    Bonjour Anne-Françoise.

  • Anne-Françoise

    Merci pour votre présence au micro d'un beau jour. Pour commencer, pouvez-vous nous présenter l'objet symbolique que vous avez apporté ?

  • Inès Rouy

    L'objet que j'ai choisi est une croix de berceau qui nous a été offerte par ma mère au moment de la naissance de Philibert. Cette croix de berceau nous a beaucoup touché parce que ma mère l'avait acheté des années auparavant. Elle l'avait conservée pour le jour où. Sans nous le dire. J'ai été frappée par cette foi, par la persévérance de sa prière. Et j'ai réalisé à ce moment-là que nous n'étions pas seules. Bien sûr, il y a eu cette croix, mais il y a eu aussi toutes ces personnes qui se sont manifestées au moment où nous avons annoncé la prochaine venue de notre bébé et qui nous ont dit pendant toutes ces années, nous prions pour vous. Ces prières fidèles, constantes. nous ont touchés, nous ont fait réaliser que non seulement le Seigneur ne nous avait jamais fait défaut, mais qu'en plus il avait placé sur notre route des personnes qui persévéraient elles aussi dans la foi, dans la charité, des personnes connues de notre entourage ou inconnues, nous avons entendu parler bien plus tard. Cela nous a fait penser que nous n'étions jamais seuls. Et cette prière d'intercession nous a semblé primordiale.

  • Anne-Françoise

    Merci beaucoup Inès. Alors on va revenir sur votre histoire. Peut-être que d'abord vous pouvez nous raconter comment est-ce que vous avez rencontré Bruno.

  • Inès Rouy

    Oui, alors j'ai rencontré Bruno en 2004. Il arrivait de Bourgogne, il venait faire du vin dans le Médoc. Moi-même j'étais bordelaise, étudiante. Et nous nous sommes connus grâce au groupe Mission des Dominicains, groupe fait pour les jeunes professionnels. Donc notre histoire a d'abord été une histoire d'amitié approfondie, creusée, et qui nous a conduit à finalement nous marier en 2007.

  • Anne-Françoise

    Vous avez rapidement désiré un enfant. Comment est-ce que l'inquiétude de ne pas pouvoir en avoir s'est manifestée ?

  • Inès Rouy

    Compte tenu de mon tempérament impatient, du grand désir que nous avions de voir notre famille s'agrandir, l'attente à tout de suite était... Difficile. Alors, à relativiser, parce que je commençais à m'inquiéter deux mois après notre mariage, et je n'étais pas au bout de mes peines, mais ça a été difficile parce que ce désir d'avoir des enfants est non seulement légitime, mais en plus c'est un des piliers du mariage chrétien. Et puis on se dit, le Seigneur le veut, lui aussi. Il bénit normalement notre union en nous accordant des enfants. Donc, ça peut être vécu comme une injustice. Et puis, une inquiétude, évidemment, parce qu'au départ, on ne sait pas trop pourquoi. On rencontre ces difficultés, il faut creuser. Et c'est difficile. C'est difficile de regarder la réalité en face, de s'exposer à des réponses de la médecine qui ne vont pas dans le sens de notre espoir, évidemment. Et puis, d'entreprendre des démarches pesantes, éprouvantes. dont on ne sait pas si elles aboutiront.

  • Anne-Françoise

    Alors comment est-ce que vous avez été accompagnée justement médicalement ?

  • Inès Rouy

    Nous avons fait le choix dès le départ de faire confiance à la Napro-Technologie qui faisait ses débuts en France à ce moment-là. Donc c'était, je pense, en 2009 ou 2010. Et à cette époque-là, il y avait seulement un médecin qui exerçait la Napro-Technologie à Aix-en-Provence, à la Clinique de l'Étoile. Et nous avons fait ce choix-là parce que les alternatives qu'on nous proposait ne nous allaient pas, ne nous convenaient pas. La naprotechnologie consiste à restaurer la fertilité en en cherchant d'abord les raisons. C'est-à-dire qu'au lieu de mettre, si je puis dire ainsi, un pansement sur une jambe de bois, on va chercher vraiment les raisons de l'infertilité masculine et féminine pour y remédier. Il s'agit de méthodes naturelles, mais on n'agit pas avec des tisanes et des plantes. Quelquefois, il peut s'agir de chirurgie ou autre, mais on ne se substitue jamais au couple. Et pour nous, c'était très important de vivre ça en couple.

  • Anne-Françoise

    Alors justement, comment est-ce que vous avez réagi l'un et l'autre dans cette période d'attente ? Qu'est-ce qui s'est joué dans votre couple ?

  • Inès Rouy

    Nous avons réagi nécessairement différemment en tant qu'hommes et en tant que femmes. Comme je le disais tout à l'heure, moi je suis d'un naturel très impatient. Bruno, lui, est peut-être plus placide, plus patient et peut-être d'humeur plus égale. Ce que nous avons trouvé merveilleux, c'était de pouvoir se soutenir l'un l'autre, la plupart du temps, la majorité du temps. Quand l'un flanchait, l'autre était là pour l'écouter, pour le soutenir. Et tout ça, c'est joué sur des années. Donc, nous avons évolué aussi. Nous avons appris à prendre notre mal en patience, à se relever après les épreuves des fausses couches. Ce n'est jamais gagné, évidemment. Ce n'est pas parce qu'une fois on triomphe de sa propre tristesse qu'on en triomphera toujours et aussi facilement. Mais c'est vrai que le fait de pouvoir s'appuyer l'un sur l'autre, c'est une aide inestimable. Et nous en avions vraiment conscience.

  • Anne-Françoise

    Et vous étiez d'accord rapidement sur ce que vous vouliez faire, justement, d'un point de vue médical aussi ?

  • Inès Rouy

    Nous étions d'accord, mais je dois dire qu'un jour, j'ai été confrontée à la tentation de contourner ce que l'Église nous proposait. Un jour, un médecin m'a dit, c'était avant qu'on connaisse la naprotechnologie, et m'a dit « maintenant, je ne vois pas d'autre alternative que la fécondation in vitro » . Quand elle m'a dit ça, j'ai été désemparée, je me suis sentie... découragée et je me suis demandé comment je pouvais contourner ce que l'Église préconisait. Donc j'ai regardé le catéchisme de l'Église catholique, je l'ai disséqué et puis je me suis rendu compte que malheureusement je ne pouvais pas lui faire dire autre chose que ce qu'il disait. Bruno n'était pas là à ce moment-là, mais il m'a dit au téléphone « Faisons confiance et obéissons à l'Église. » Et puis... on comprendra, on se fera expliquer. On a suffisamment de prêtres dans notre entourage pour nous accompagner, nous expliquer pour que notre cœur et notre raison fonctionnent ensemble. Mais ce principe de l'obéissance, je l'ai trouvé très important, je l'ai trouvé apaisant et je l'ai trouvé libérateur. J'ai tout de suite compris que l'Église ne nous propose pas un chemin de contrainte, de punition, de restriction. Ce qu'elle nous propose, c'est exigeant, certes, mais en fait, c'est un vrai chemin de bonheur et de liberté. Finalement, l'Église ne propose pas autre chose que ce que l'Évangile nous enseigne. En tout cas, l'Église, me semble-t-il, marche dans la droite ligne de ce que Jésus nous dit dans l'Évangile. Donc, voilà, on a pris ce parti, on a fait ce choix de faire confiance, d'obéir. Obéir, ça ne veut pas dire être soumis. Ce n'est pas de la soumission, de la servilité. Je crois que l'obéissance, c'est de la confiance. Rien ne nous empêche de faire fonctionner notre intelligence pour comprendre pourquoi il nous est demandé ceci ou cela. Alors bien sûr, c'est difficile, mais encore une fois, c'est ce qui nous a rendus vraiment heureux.

  • Qu'est-ce qui a été le plus difficile pour vous,

  • Anne-Françoise

    justement, dans ces 15 ans d'attente, peut-être dans vos relations aux autres ou à vous-même ?

  • Inès Rouy

    Beaucoup de choses sont difficiles. Les annonces, évidemment. Combien de couples qui sont passés par là nous ont confiés, quand on était aussi dans cette situation, que c'était le plus difficile pour eux. Ces annonces qui vous vrillent le cœur, la vision des ventres qui s'arrondissent autour de soi. En ce qui me concerne, les baptêmes, c'était souvent le plus délicat. à vivre, parce que c'était des jours mêlés de joie et de peine, avec la culpabilité en plus de ressentir de l'envie. Ce sentiment qui s'insinue comme un poison, qui peut devenir de la jalousie. Et j'essayais de lutter contre ça. Mais pour autant, je n'empêchais pas mes larmes de couler. Alors c'est toujours très difficile, parce qu'on n'est pas tout seul. Et essayer de ne pas trop faire peser ça sur eux. Sur nos familles respectives, j'avoue que je n'ai pas toujours été à la hauteur, mais je savais aussi pouvoir compter sur l'indulgence de chaque membre de notre famille. Donc ça, ça a été difficile. Et puis le fait de voir les années passer, on ne se voit pas vieillir quand on a... Quand on n'a pas d'enfant, le temps passe différemment parce qu'il n'est pas marqué par des événements qui ponctuent une vie de famille. Voilà, baptême, première communion, anniversaire. Donc on a l'impression de vieillir un petit peu différemment.

  • Anne-Françoise

    Quand on s'est parlé la première fois, vous disiez cependant que vous n'avez pas attendu la naissance de votre fils pour être heureux. Qu'est-ce qui vous a rendu heureux ? Qu'est-ce qui vous a aidé à trouver de la joie dans cette période ?

  • Inès Rouy

    Beaucoup de choses nous ont rendu heureux. heureux déjà le fait d'être tous les deux, de pouvoir apprendre à nous aimer parce que nous avons passé 15 ans seuls, disponibles entièrement l'un pour l'autre alors bien sûr ce n'était pas choisi, c'était par un peu la force des choses que nous n'étions que deux et pourtant nous mesurions la chance d'avoir cette grande disponibilité l'un pour l'autre, de pouvoir prendre soin de notre couple et je pense que Il en reste évidemment quelque chose aujourd'hui. Je suis convaincue par ailleurs que la naissance de Philibert, son arrivée n'était pas une condition à notre bonheur. Nous étions très heureux quand Philibert est arrivé. Qu'est-ce qui nous a rendus heureux ? C'est aussi tout simplement de voir d'autres enfants arriver dans d'autres foyers. Comme je le disais tout à l'heure, c'est une joie mêlée de chagrin. pour soi-même, d'envie, mais quel bonheur nous avons eu de nous voir confier aussi le rôle de parrain et de marraine, de pouvoir exercer une forme de paternité et de maternité un peu différente. Une autre chose qui m'a rendue heureuse quelques années après notre mariage, c'est le jour où j'ai réalisé que j'aimais Bruno pour lui-même et pas pour le père potentiel et hypothétique qu'il pourrait être. C'est-à-dire que Je crois que le jour de mon mariage, j'avais l'impression d'avoir coché un peu toutes les cases. Nous étions mariés, nous aurions des enfants, le conte de fées. Et puis finalement, le conte de fées, inabouti, m'a permis d'ouvrir les yeux et d'ouvrir les yeux en regardant Bruno tel qu'il était. Ça, ça a été une source de joie parce que je me confrontais à une réalité qui était différente de celle que j'imaginais, mais qui était bien plus riche finalement et plus vraie surtout.

  • Anne-Françoise

    Qu'est-ce qui s'est joué dans votre relation à Dieu à ce moment-là ? Est-ce que vous lui en avez voulu ?

  • Inès Rouy

    Je dois reconnaître que j'en ai voulu à Dieu. J'en ai voulu à notre père de ne pas faire de nous des parents, de ne pas nous accorder cette joie d'être parent. Je repense à un moment spécial il y a quelques années. En plein été, Bruno était parti marcher à Cotignac. Il a pris cette habitude il y a maintenant pas mal d'années de faire ce pèlerinage des pères de famille de Cotignac. Et cette année-là, je lui avais demandé d'être plus précis avec Saint-Joseph. Il paraît qu'il faut être très précis avec Saint-Joseph. Et je lui avais dit, demande à Saint-Joseph que nous ayons un enfant vivant, que nous puissions tenir dans nos bras. Parce que nous avions déjà perdu pas mal de petits bébés et ses épreuves successives musées. Donc j'avais demandé à Bruno d'être très précis dans ses demandes. Il en est revenu et un mois plus tard, nous étions... Dans ma famille, en vacances, dans le lot, à Rocamadour, c'était un dimanche matin, et au moment où sonne l'angélus, je découvre que je suis enceinte. Alors là, ce n'était plus des signes du ciel, c'était des thromboscopes géants qui nous faisaient hurler « Magnificat » dans nos cœurs. Nous étions convaincus que cette fois-ci serait la bonne. Ce n'était pas possible qu'il y ait autant de réponses évidentes à nos supplications, et que ça reste vain. Notre joie était de courte durée puisque quelques jours plus tard, tout était terminé. Et là, j'en ai vraiment voulu au Seigneur, j'étais en colère. J'ai dit au Seigneur, maintenant, finis de jouer. C'est trop cruel de nous agiter des petits paquets cadeaux sous le nez pour nous les retirer. Vraiment, je voyais le Seigneur comme quelqu'un de cruel et j'ai décidé de bouder, tout simplement. Et puis, quelques jours plus tard, au moment de la... je crois, de l'Homélie ou pendant l'Évangile, je ne sais plus très bien. J'ai senti que le Seigneur me prenait un peu par la peau du cou pour me dire « Tu peux bouder, mais moi je suis là, je suis avec vous » . Alors c'est quelque chose de très mystérieux de sentir cette conversion, mais ça a été fondateur pour moi. Et cette émission s'appelle « Un beau jour » et pour moi, ça a été un beau jour parce que depuis, j'ai la conviction que notre Père du Ciel Nous aime qu'il veut le bonheur de ses enfants et que nos vicissitudes ne sont jamais vécues seules. Il est avec nous, il nous porte, il nous tient dans sa main. Donc, depuis ce jour, je crois que je n'en ai plus voulu au Seigneur. J'ai compris que le Seigneur souffrait avec nous, qu'il partageait. Il partageait tout, il l'a fait déjà sur la croix. Il est vainqueur du mal. Alors, il n'empêche pas la souffrance, il n'empêche pas les épreuves, mais il a gagné une bonne fois pour toutes. Et il nous l'a dit, je reste avec vous, je suis avec vous tous les jours de votre vie.

  • Anne-Françoise

    À ce moment-là, vous espériez encore avoir un enfant. À quel moment est-ce que vous avez renoncé ?

  • Inès Rouy

    Nous avons renoncé au bout de, je dirais, 12 ans de mariage, je crois, à peu près, quand les médecins qui nous suivaient en aprotechnologie nous ont dit « Bon, maintenant, on voit bien que ce n'est pas un petit caillou dans l'engrenage, c'est une poignée de gravier. Il y a trop de choses qui sont incompatibles. Il y a trop de choses qui ne vont pas. Il y a trop de problèmes. Là, on ne pourra plus aller plus loin. » Raisonablement, j'avais été traitée pour de l'endométriose. J'avais déjà subi deux opérations. Et puis, on découvrait d'autres choses qui ne fonctionnaient pas. Et on s'est dit, raisonnablement, on va arrêter et on arrête d'attendre. Alors, ça ne veut pas dire qu'on arrêtait d'espérer, mais en tout cas, on n'était plus tendu vers cette attente. Donc, ce renoncement a été très difficile, très douloureux. Au départ, pour moi, je me suis dit que c'était impossible de renoncer à ce rêve. Et puis, en fait, ce qui m'a consolée petit à petit... c'est de regarder en face cette béance dans notre vie, d'oser l'affronter et de me dire que rien ne viendrait combler ce manque-là. Je me souviens, c'est un ami prêtre qui m'avait dit, vous savez, nous en tant que prêtre, mais c'est le c'est valable pour les religieux, les religieuses, qui ont renoncé à être père et mère. Ils ont renoncé à avoir une famille, ils ont renoncé pour l'amour du Christ. Eh bien, ce manque... Il n'est pas comblé. Il ne faut pas croire que Jésus comble ce manque. Pas du tout. C'est un manque. Il faut le regarder tel quel. Et ça m'a beaucoup consolée parce que j'avais l'impression d'être effectivement de marcher sur un chemin, main dans la main avec Bruno, sur un chemin qui longeait un précipice, un gouffre. Alors, ça peut être inquiétant, un précipice, sauf que si on regarde le chemin et qu'on en voit l'horizon, l'horizon, c'est... c'est notre Père du ciel qui nous tend les bras et puis je marche encore une fois main dans la main avec mon mari donc ça a été une consolation ce qui ne veut pas dire que la souffrance n'existe plus mais bénéficie de grâces quand même sensibles quand on les demande avec foi et ça, ça m'a énormément soutenue

  • Anne-Françoise

    Et c'est peu de temps après que vous avez choisi de vous mettre au service de l'église, donc à Verdelet Est-ce que vous pouvez nous raconter ce choix ?

  • Inès Rouy

    Alors, ça faisait déjà quelques années que notre disponibilité, de fait, nous faisait penser que nous pouvions donner un peu de notre temps pour une mission, quelle qu'elle soit. Moi, je ne suis pas très aventurière. Assez vite, nous avons mis Fidesco de côté, parce que Fidesco implique de partir souvent loin. Et par ailleurs, nous nous disions que nous avions sans doute un moyen de servir. près de chez nous, à savoir en Gironde. Pourquoi Verdelay ? Alors Verdelay, nous avions fait un pèlerinage, il y a longtemps maintenant, de Bordeaux à Verdelay, en déposant comme intention le fait de voir notre famille s'agrandir. Et nous n'avons pas fait le retour tout de suite. J'avais fait mon petit chantage à la Sainte Vierge en lui disant, nous ferons le retour quand nous viendrons déposer un ex-voto pour vous dire merci. C'était du chantage, j'assume. Mais en 2019, après une année difficile, année de la mort de mon père, année de ma dernière fausse couche, Bruno m'a dit, écoute, on ne va pas reporter ce retour, ce pèlerinage de retour. Alors peut-être qu'on ne va pas poser d'ex voto, l'année a été difficile, mais est-ce qu'on n'a pas quand même plein de raisons de remercier le Seigneur ? J'ai trouvé ça très beau. J'étais peut-être un peu moins convaincue et paisible que lui, mais... Mais je savais qu'il avait raison et qu'il y avait plein de raisons pour lesquelles on pouvait dire merci au Seigneur. Et donc, nous avons décidé de faire ce pèlerinage de retour les 31 décembre et 1er janvier pour terminer l'année 2019 et commencer l'année 2020 avec le Seigneur et aussi avec un couple de chers amis très présents. Donc, ce retour de Verdelay a été l'occasion pour nous de nous intéresser. d'un peu plus près à ce sanctuaire que, par ailleurs, je connaissais bien depuis toute petite, puisque je passais mes vacances dans cette région. Je le connaissais partiellement, je n'en connaissais pas toute l'histoire. C'est un sanctuaire qui a plus de 900 ans. et qui est dédiée à Notre-Dame, consolatrice des affligés. Ça, c'est une chose que j'ai approfondie pendant les deux ans de notre mission. Mais à l'époque, je ne le savais pas tellement. Nous savions juste que l'hôtellerie du sanctuaire avait besoin d'être redynamisée. Donc, nous nous en sommes ouverts à un couple d'amis qui nous a dit « Mais vous savez que le recteur a l'intuition qu'il faut un couple pour s'occuper de l'hôtellerie. » Qu'à cela ne tienne, nous allons voir le recteur, que nous connaissions bien par ailleurs, puisqu'il y a eu... Il était notre curé autrefois dans le Médoc. Et puis, de fil en aiguille, en en parlant avec Mgr Jam, puis l'économe diocésain, les contours de notre mission se sont dessinés et nous avons commencé notre mission en 2021.

  • Anne-Françoise

    Et c'est cette année-là ou celle d'après que Philibert est arrivé ?

  • Inès Rouy

    Alors, Philibert s'est annoncé à la fin de notre première année de mission, dans des circonstances quand même pas banales. puisque c'était à l'avant-veille de notre 15e anniversaire de mariage. Notre anniversaire de mariage étant le 1er décembre. Il se trouve que le 16 novembre, nous étions en vacances dans le Gers, chez un oncle et une tante, qui nous suggèrent de passer à Boulor, qui n'est pas très loin. Nous connaissions Boulor l'un et l'autre, Bruno et moi, séparément, mais nous n'y étions jamais allés ensemble et nous décidons de faire un saut. de quelques minutes. Devant le cercueil de Claire de Castelbajac, j'ai l'intuition qu'il faut que je lui demande un miracle suffisamment percutant pour étayer son dossier de béatification qui semble ne pas tellement avancé. Et pour que ce soit suffisamment fort, je lui dis, Claire obtient que je sois enceinte d'ici la fin de l'année. 16 novembre. Il y avait du défi quand même. Il se trouve que... quinze jours plus tard, j'apprenais que j'étais enceinte. Alors, évidemment, nous nous sommes ouverts par la suite au postulateur de la cause de Claire de Castelbajac qui a estimé qu'on ne pouvait pas parler d'un miracle selon les critères de l'Église. C'est quand même très précis. Mais en revanche, une grâce obtenue par son intercession, sans doute, d'autant que après, j'ai relu la biographie de Claire de Castelbajac. et j'ai réalisé que sa propre mère l'avait eu à l'âge de 40 ans, mon âge au moment où j'attendais et où j'ai eu Philibert.

  • Anne-Françoise

    Et quelles émotions est-ce que vous avez traversées quand vous avez découvert que vous étiez enceinte, après toutes ces fausses couches ? Est-ce que vous y avez cru finalement ?

  • Inès Rouy

    Je dois dire qu'au départ, je n'étais pas tellement à la fête, c'est-à-dire que les premiers jours et les premières semaines, c'était du déjà vu et du déjà connu. Ce contraste entre la folle joie, l'espoir, l'angoisse, la terreur à l'idée de reperdre un bébé, ça a été vraiment des montagnes russes, d'autant qu'il y a eu quelques passages aux urgences qui nous ont alertés, évidemment. Donc non, les premières semaines, je dois dire qu'on n'était pas du tout sûrs que nous tiendrions un jour ce bébé dans nos bras. Et puis les jours ont passé, nous avons fini par... Passer le cap fatidique de la date à laquelle je perdais d'habitude mes bébés. Et petit à petit, l'espoir a pris le dessus. Mais je dois dire que pendant toute ma grossesse, j'ai eu peur. J'ai eu peur de ne jamais le voir, de ne jamais le tenir dans mes bras. Et à ce moment-là, c'est la prière du Notre Père qui m'a soutenue véritablement. Parce que le fait de dire « Donnez-nous aujourd'hui notre pain de ce jour » , c'était pour moi demander chaque jour la force pour aujourd'hui et demain. je redemanderai la force pour ce jour. Mais voilà, je ne demande pas au Seigneur qu'il me conforte jusqu'à la fin de ma grossesse. C'est chaque jour qu'il faut lui demander le pain pour aujourd'hui. Et ça a changé ma manière de demander à mon Père du Ciel.

  • Anne-Françoise

    Et le jour de la naissance, est-ce que vous voulez nous en dire quelques mots ?

  • Inès Rouy

    Je crois que c'est une journée que nous ne voulions pas voir s'achever. Je me souviens que... Voilà, Philibert est né à 13h30 ce 6 août, jour de la fête de la Transfiguration et jour aussi de la première fête de Saint-Dominique. Aujourd'hui, en fait, Saint-Dominique, le 8 août. Et d'ailleurs, c'est à cette date-là qu'aurait dû naître initialement Philibert. Il est arrivé avec deux jours d'avance. Pour moi, ça avait une résonance très particulière parce que mon père, qui est mort en 2019, s'appelait Dominique. Quand on veut voir des signes, on n'a qu'à ouvrir les yeux et on peut en voir beaucoup. En tout cas, je gardais ça dans mon cœur. Et finalement, Philibert est arrivé ce 6 août à 13h30. Et je me souviens qu'à 2h du matin... On se disait avec Bruno, on ne peut pas éteindre la lumière, on ne peut pas voir cette journée s'arrêter tellement on était heureux, éblouis, émerveillés, confondus de gratitude. Et cette gratitude qui dure encore et encore et encore. Trois ans après, on n'a pas fini de s'émerveiller.

  • Anne-Françoise

    Alors effectivement, aujourd'hui, il libère à trois ans. Comment est-ce que vous relisez votre histoire trois ans après ? Qu'est-ce que cette naissance a changé dans votre vie ? dans votre vie, dans votre relation à Dieu aussi ?

  • Inès Rouy

    Alors, la naissance de Philibert a tout changé. Je ne vais pas dire le contraire. Son arrivée a tout changé, a tout rééquilibré, ou plutôt déséquilibré, mais de manière très joyeuse, évidemment. C'est-à-dire que vous imaginez, au bout de 15 ans, après 15 ans de mariage, on prend des habitudes de petit couple, et puis on peut... On peut, et c'est normal, avoir une certaine routine à deux. On s'habitue à l'idée qu'on passera notre vie seulement tous les deux. Nous, c'était le cas depuis trois ans. Et puis Philibert arrive, donc ça renverse tout. Déjà, notre mission a été un petit peu mise à mal à Verdelay parce que moi, je ne valais plus grand-chose en tant que maîtresse de maison. Heureusement que Bruno était là pour faire les choses à ma place. Mais c'est vrai que la mission en tant que telle en a pris un petit coup. Donc déjà, ça nous a un petit peu bouleversés. Et puis évidemment, quel merveilleux bouleversement de voir ce petit garçon arriver dans nos vies. Ça change toutes les perspectives et ça déséquilibre aussi le couple. Donc ça, c'est à nous après de retrouver un équilibre, de repenser à toutes ces années où nous avons pris soin de notre couple et d'essayer de tendre à ça. Comme je le disais tout à l'heure, Philibert n'était pas une condition à notre bonheur et on a tôt fait de l'oublier. quand il se présente parce qu'on a l'impression qu'il nous comble après autant d'attentes. Mais c'est faire peser sur ses épaules beaucoup de choses dont il n'est absolument pas responsable. Notre propre bonheur, notre bonheur de couple et notre bonheur de famille. Ce n'est pas lui qui en est le garant.

  • Anne-Françoise

    Quel conseil est-ce que vous pourriez donner à un couple en espérance d'enfant qui peut-être n'arrive jamais ?

  • Inès Rouy

    Je me garderai de donner des conseils parce que, étant passée par là, je trouve que les conseils sont souvent peu valables. Combien de fois nous avons eu des conseils, avec toujours cette impression de rester sur le quai de la gare pendant que le TGV avance, démarre, on a envie de dire, aux autres couples, continuez sans nous, on va vous ralentir. Mais c'est vrai que nombre de fois, des couples qui étaient dans la même situation que nous, nous ont annoncé, ça y est, c'est bon, après 5, 10... 15 ans d'attente, j'en sais rien mais les conseils dans ces cas-là c'est pire que tout parce que ce qui marche pour les uns ne marche pas pour les autres chaque histoire de couple est unique la seule chose qui n'est pas un conseil qui est au mieux une suggestion c'est peut-être de relire le psaume 54 dans les moments de souffrance ça m'a aidée parce que ça m'a permis de me... à la fois de me sentir rejointe et en même temps de me décentrer en réalisant que ces paroles écrites il y a quand même pas mal d'années, dites il y a pas mal d'années, étaient tout à fait universelles. C'est-à-dire qu'elles parlent de souffrances qu'on peut tous connaître, qu'on peut tous s'appliquer, de cris vers le ciel qui sont les nôtres. Donc c'est tout à fait actuel et contemporain ces psaumes. dans le psaume 54. « Décharge ton fardeau sur le Seigneur, il prendra soin de toi » . C'est vraiment ce que j'ai ressenti et ce que j'essaie d'appliquer encore aujourd'hui. Ce n'est pas toujours facile de se décharger et d'avoir la conviction que le Seigneur est notre Père, qu'il prend soin de nous, alors pas selon nos propres désirs, aussi légitimes soient-ils, pas toujours en tout cas, mais sa providence agit continuellement. Et après, le Seigneur, non seulement il prend soin de nous, mais il nous laisse entière liberté. Donc que fait-on face à cette providence agissante ? Eh bien là, on est laissé à notre discernement et c'est à la fois beau, à la fois difficile, à la fois exigeant. Mais en tout cas, quoi qu'il en soit, je suis convaincue que le Seigneur prend vraiment soin de nous comme un père. Donc, pas de conseil, mais s'il nous arrive d'en douter, demandons à l'Esprit-Saint. De toute façon, je crois aussi, c'est quelque chose que j'ai réalisé pendant toutes ces années, c'est que notre croix pendant 15 ans, ça a été cette attente. Ça aurait pu être une autre croix, c'était celle-là. On ne l'aurait pas échangée avec celle du voisin, parce que le voisin... à d'autres croix, à une autre croix. Ça peut être la solitude, ça peut être la maladie, le handicap, pas de travail, pas de perspective, dépression, enfin j'en sais rien, tragédie, que sais-je. Donc notre croix, on ne l'échangerait pas avec celle du voisin, ça c'est sûr. Je prends l'exemple du célibat. Nous pensions souvent à nos amis célibataires quand on... Voilà, pendant cette période d'attente, alors on y pense encore, l'arrivée de Philibert, heureusement, n'a pas gommé ça. Mais nous mesurions aussi à quel point nous avions la chance de vivre les choses à deux. Donc, il ne s'agit pas de relativiser sa propre épreuve, ce n'est pas ça. C'est se dire, regardons aussi ce que nous avons. Et ce que nous avions pendant cette attente, c'était la grâce d'être à deux, d'être soutenu par le sacrement du mariage. de pouvoir puiser dedans, de nous consoler mutuellement, de nous aimer tout simplement. Et voilà, chaque croix est taillée pour... C'est un peu facile, je crois que ceux qui nous écoutent se diront que c'est peut-être un petit peu facile, s'ils en bavent particulièrement en ce moment. Mais dans le fond, est-ce qu'on aimerait échanger notre croix contre celle du voisin ? Je ne suis pas sûre. Je ne suis pas sûre, et puis de toute façon, ce n'est pas souhaitable. Et une autre... Un autre écueil, me semble-t-il, c'est vouloir répondre à d'éventuels pourquoi. J'ai été un petit peu surprise quand nous avons annoncé la future naissance de Philibert. Alors bien sûr, beaucoup se sont réjouis et certains ont tout de suite voulu apporter une réponse. Alors on n'en cherchait pas, nous, de réponse, mais nous disant c'est parce que vous avez lâché du lest, c'est parce que vous n'y pensiez plus. C'est parce que vous êtes venu servir à Verdelet, c'est parce que vous étiez détendu, j'en sais rien. J'avoue qu'on ne s'est pas du tout posé ces questions, on n'aura pas la réponse. On ne peut que constater que notre prière à Claire de Castelmagiac a été suivie de la naissance de Philibert, c'est un constat, rien d'autre. Mais voilà, pas de pourquoi, parce qu'à ce moment-là, se tape la tête contre les murs, comme dans l'épreuve, quoi, nous. Il n'y a aucune raison. On n'a pas plus de mérite que d'autres. Je pense très souvent au roi Baudouin et à la reine Fabiola qui avaient une pression autrement supérieure à la nôtre dans leur attente. La reine Fabiola a connu aussi des fausses couches successives et puis ô combien cruelles parce qu'elles étaient connues. Et pour autant, ils n'ont pas été exaucés de ce point de vue-là. Voilà, c'est mystérieux. Renonçons à chercher des réponses à c'est pourquoi. Ça ne sert à rien. Ça ne sert à rien. Je repense aussi à la Sainte Vierge, quand elle a reçu l'annonce de l'ange Gabriel, elle n'a pas demandé pourquoi, elle a demandé comment est-ce que ça va se faire. Essayons peut-être de suivre ce modèle.

  • Comment justement, dans toutes ces souffrances, comment croire et rester attentif à l'action de Dieu dans nos vies ?

  • Anne-Françoise

    La première chose, je crois, c'est de le demander à l'Esprit-Saint. Et je repense à ces prières de demande. Et finalement, dans l'Évangile, Jésus nous dit « Celui qui demandera l'Esprit Saint, il sera exaucé » . Jésus dit que notre Père du Ciel veut nous donner de bonnes choses, qu'il ne nous donnera jamais de mauvaises choses. Et celui qui demande l'Esprit Saint, il sera exaucé. Donc déjà, si on demande l'Esprit Saint, on est sûr d'obtenir beaucoup, y compris dans notre foi, dans notre espérance et dans la charité. L'autre chose qui me semble importante et à laquelle on tend, on essaie de tendre, c'est de ne pas oublier notre horizon. Je trouve que quand nous étions seulement deux, c'était relativement facile de se dire que notre horizon, c'était le ciel, parce que nous n'avions pas d'autres soucis que de nous y conduire mutuellement. Je trouve que c'est un peu plus difficile depuis que Philibert est né. Alors pardon, je ne veux pas faire l'enfant gâté, mais je dis juste que c'est une difficulté, en tout cas une attention à avoir, c'est de ne pas faire trop baisser notre horizon à des choses terre à terre. Alors c'est un petit peu normal, parce que nous sommes affairés par des préoccupations toutes terrestres. Nourrir son enfant, le vêtir. Le faire croître, tout ça, c'est très terre à terre. Mais pour quel but ? Finalement, c'est pour le ciel, comme pour nous-mêmes. Et je me souviens quand Philibert était encore tout petit petit, Bruno le confiait dans notre prière familiale en disant « Seigneur, que nous le conduisions à toi » . Antérieurement, mon cœur de mère bondissait. « Attends, pas trop vite, pas trop vite. Le Seigneur a déjà six de nos enfants auprès de lui, ça va » . Mais en fait, il a complètement raison. Notre but de parents, c'est de conduire ce petit enfant que le Seigneur nous a confié à lui, qu'il soit saint. Donc ça, c'est une chose primordiale. Mais quelquefois, on peut être un peu pris par les préoccupations terrestres et ne pas avoir toujours ça en tête. En tout cas, peut-être un peu moins que quand nous étions seulement, entre guillemets, un couple. Est-ce qu'il y a un livre qui vous a aidé pendant cette période d'attente ?

  • Inès Rouy

    Alors, je dois dire que la littérature consacrée à la famille, aux épreuves rencontrées en famille, etc., à toutes ces questions à la fois de bioéthique, familiale, de procréation. Cette littérature est très abondante. Moi, il y a un livre qui m'a aidée, c'est « Attendre et espérer, itinéraire d'un couple sans enfant » d'Olivier Matona aux éditions de l'Emmanuel. Déjà le titre, Attendre et espérer, ça rejoint tout à fait ce que nous avons vécu, l'attente et l'espoir. Au bout de douze ans, nous n'attendions plus, mais nous espérions toujours. Voilà, donc c'est ce livre principalement qui m'a marquée. Il y en a énormément d'autres. Moi, je lis beaucoup, donc je ne saurais pas vous dire précisément. Après, il y a les psaumes, comme je vous disais tout à l'heure. Les psaumes qui m'ont soutenue parce que j'ai fait mienne ces paroles. qui quelquefois sont assez violentes, qui sont des cris du cœur. Et je les ai fait miennes très souvent pendant cette attente.

  • Anne-Françoise

    Il y a une prière particulièrement qui vous a accompagnée ?

  • Inès Rouy

    Oui, la prière du Magnificat. Alors, le Magnificat, nous avions pris l'habitude de la dire en couple grâce aux équipes Notre-Dame, dont nous avons fait partie pendant plusieurs années, jeunes mariées. Donc, nous connaissions par cœur cette prière. Et je rêvais du jour où ce Magnificat se concrétiserait pour moi. Et évidemment, ça a été mon cri du cœur quand j'ai tenu Philibert dans mes bras, ce magnifique acte. Donc ça, c'est vraiment, oui, je crois, la prière la plus emblématique pour moi, en tout cas.

  • Anne-Françoise

    Alors, si vous aviez le Christ en face de vous aujourd'hui, que lui diriez-vous en lien avec votre histoire ?

  • Inès Rouy

    Je crois que je lui dirais, Seigneur, je ne suis pas digne de vous recevoir, mais dites seulement une parole et je serai guéri. J'espère... Pouvoir dire que quelles que soient les épreuves que je rencontrerai dans la vie, j'aurai cette conviction que le Seigneur peut tout, qu'il est tout-puissant, qu'il veut mon bonheur. Moi, j'en suis évidemment indigne. Lui le sait, encore plus que moi, mais il peut tout.

  • Anne-Françoise

    Merci beaucoup Inès.

  • Inès Rouy

    Merci Anne-Françoise, c'était un plaisir de discuter avec vous.

  • Anne-Françoise

    Merci pour votre écoute et merci d'être toujours plus nombreux à écouter Un beau jour, à vous abonner, à partager cet épisode sur les réseaux sociaux et à mettre 5 étoiles et des commentaires sur Apple Podcasts et Spotify. Pour découvrir d'autres témoignages de feu, vous pouvez bien sûr écouter les autres épisodes du podcast, mais aussi lire chaque semaine la rencontre avec un témoin touché par la grâce dans le magazine Famille Chrétienne. Et enfin, n'hésitez pas à découvrir les autres podcasts de Famille Chrétienne, Tous Saints, Maman Prie, Sexo, Sacrée Histoire et d'autres encore. Merci et au prochain premier lundi du mois pour un nouvel épisode.

Description

Inès Rouy, avec son mari Bruno, a vécu l'épreuve de l'attente d'un enfant qui n'arrive pas... pendant 15 longues années. Une période faite d'espoir fou et de déceptions cruelles, marquée par six fausses couches successives, mais vécue, malgré tout, dans la foi en la bonté de Dieu. Puis, un beau jour, alors qu'ils avaient mis de côté ce projet d'avoir un enfant et décidé de se mettre au service de l'Eglise au sanctuaire Notre-Dame de Verdelais à proximité de Bordeaux, leur fils Philibert est arrivé, miraculeusement. Un chemin d'abandon et de foi qu'elle raconte comme un témoignage de l'action de Dieu dans nos vies.


P.S : joyeux anniversaire à Philibert :)

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Ce podcast est réalisé par Famille Chrétienne


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Transcription

  • Anne-Françoise

    Bonjour, je m'appelle Anne-Françoise et vous écoutez Un beau jour, le podcast qui donne la parole à des croyants dont la vie et la foi ont été changés à jamais par un événement imprévu. Et dans cet épisode, je reçois Inès qui, avec son mari Bruno, a vécu l'épreuve de l'attente d'un enfant qui n'arrive pas pendant 15 ans. Une période faite d'espoir et de déception, marquée par six fausses couches successives. mais toujours vécu dans la foi, en la bonté de Dieu. Puis, un beau jour, alors qu'ils avaient mis de côté ce projet d'avoir un enfant et décidé de se mettre au service de l'église au sanctuaire Notre-Dame de Verdelet, à proximité de Bordeaux, leur fils Philibert est arrivé. Un chemin d'abandon et de foi qu'ils racontent comme un témoignage de l'action de Dieu dans nos vies. Bonjour Inès.

  • Inès Rouy

    Bonjour Anne-Françoise.

  • Anne-Françoise

    Merci pour votre présence au micro d'un beau jour. Pour commencer, pouvez-vous nous présenter l'objet symbolique que vous avez apporté ?

  • Inès Rouy

    L'objet que j'ai choisi est une croix de berceau qui nous a été offerte par ma mère au moment de la naissance de Philibert. Cette croix de berceau nous a beaucoup touché parce que ma mère l'avait acheté des années auparavant. Elle l'avait conservée pour le jour où. Sans nous le dire. J'ai été frappée par cette foi, par la persévérance de sa prière. Et j'ai réalisé à ce moment-là que nous n'étions pas seules. Bien sûr, il y a eu cette croix, mais il y a eu aussi toutes ces personnes qui se sont manifestées au moment où nous avons annoncé la prochaine venue de notre bébé et qui nous ont dit pendant toutes ces années, nous prions pour vous. Ces prières fidèles, constantes. nous ont touchés, nous ont fait réaliser que non seulement le Seigneur ne nous avait jamais fait défaut, mais qu'en plus il avait placé sur notre route des personnes qui persévéraient elles aussi dans la foi, dans la charité, des personnes connues de notre entourage ou inconnues, nous avons entendu parler bien plus tard. Cela nous a fait penser que nous n'étions jamais seuls. Et cette prière d'intercession nous a semblé primordiale.

  • Anne-Françoise

    Merci beaucoup Inès. Alors on va revenir sur votre histoire. Peut-être que d'abord vous pouvez nous raconter comment est-ce que vous avez rencontré Bruno.

  • Inès Rouy

    Oui, alors j'ai rencontré Bruno en 2004. Il arrivait de Bourgogne, il venait faire du vin dans le Médoc. Moi-même j'étais bordelaise, étudiante. Et nous nous sommes connus grâce au groupe Mission des Dominicains, groupe fait pour les jeunes professionnels. Donc notre histoire a d'abord été une histoire d'amitié approfondie, creusée, et qui nous a conduit à finalement nous marier en 2007.

  • Anne-Françoise

    Vous avez rapidement désiré un enfant. Comment est-ce que l'inquiétude de ne pas pouvoir en avoir s'est manifestée ?

  • Inès Rouy

    Compte tenu de mon tempérament impatient, du grand désir que nous avions de voir notre famille s'agrandir, l'attente à tout de suite était... Difficile. Alors, à relativiser, parce que je commençais à m'inquiéter deux mois après notre mariage, et je n'étais pas au bout de mes peines, mais ça a été difficile parce que ce désir d'avoir des enfants est non seulement légitime, mais en plus c'est un des piliers du mariage chrétien. Et puis on se dit, le Seigneur le veut, lui aussi. Il bénit normalement notre union en nous accordant des enfants. Donc, ça peut être vécu comme une injustice. Et puis, une inquiétude, évidemment, parce qu'au départ, on ne sait pas trop pourquoi. On rencontre ces difficultés, il faut creuser. Et c'est difficile. C'est difficile de regarder la réalité en face, de s'exposer à des réponses de la médecine qui ne vont pas dans le sens de notre espoir, évidemment. Et puis, d'entreprendre des démarches pesantes, éprouvantes. dont on ne sait pas si elles aboutiront.

  • Anne-Françoise

    Alors comment est-ce que vous avez été accompagnée justement médicalement ?

  • Inès Rouy

    Nous avons fait le choix dès le départ de faire confiance à la Napro-Technologie qui faisait ses débuts en France à ce moment-là. Donc c'était, je pense, en 2009 ou 2010. Et à cette époque-là, il y avait seulement un médecin qui exerçait la Napro-Technologie à Aix-en-Provence, à la Clinique de l'Étoile. Et nous avons fait ce choix-là parce que les alternatives qu'on nous proposait ne nous allaient pas, ne nous convenaient pas. La naprotechnologie consiste à restaurer la fertilité en en cherchant d'abord les raisons. C'est-à-dire qu'au lieu de mettre, si je puis dire ainsi, un pansement sur une jambe de bois, on va chercher vraiment les raisons de l'infertilité masculine et féminine pour y remédier. Il s'agit de méthodes naturelles, mais on n'agit pas avec des tisanes et des plantes. Quelquefois, il peut s'agir de chirurgie ou autre, mais on ne se substitue jamais au couple. Et pour nous, c'était très important de vivre ça en couple.

  • Anne-Françoise

    Alors justement, comment est-ce que vous avez réagi l'un et l'autre dans cette période d'attente ? Qu'est-ce qui s'est joué dans votre couple ?

  • Inès Rouy

    Nous avons réagi nécessairement différemment en tant qu'hommes et en tant que femmes. Comme je le disais tout à l'heure, moi je suis d'un naturel très impatient. Bruno, lui, est peut-être plus placide, plus patient et peut-être d'humeur plus égale. Ce que nous avons trouvé merveilleux, c'était de pouvoir se soutenir l'un l'autre, la plupart du temps, la majorité du temps. Quand l'un flanchait, l'autre était là pour l'écouter, pour le soutenir. Et tout ça, c'est joué sur des années. Donc, nous avons évolué aussi. Nous avons appris à prendre notre mal en patience, à se relever après les épreuves des fausses couches. Ce n'est jamais gagné, évidemment. Ce n'est pas parce qu'une fois on triomphe de sa propre tristesse qu'on en triomphera toujours et aussi facilement. Mais c'est vrai que le fait de pouvoir s'appuyer l'un sur l'autre, c'est une aide inestimable. Et nous en avions vraiment conscience.

  • Anne-Françoise

    Et vous étiez d'accord rapidement sur ce que vous vouliez faire, justement, d'un point de vue médical aussi ?

  • Inès Rouy

    Nous étions d'accord, mais je dois dire qu'un jour, j'ai été confrontée à la tentation de contourner ce que l'Église nous proposait. Un jour, un médecin m'a dit, c'était avant qu'on connaisse la naprotechnologie, et m'a dit « maintenant, je ne vois pas d'autre alternative que la fécondation in vitro » . Quand elle m'a dit ça, j'ai été désemparée, je me suis sentie... découragée et je me suis demandé comment je pouvais contourner ce que l'Église préconisait. Donc j'ai regardé le catéchisme de l'Église catholique, je l'ai disséqué et puis je me suis rendu compte que malheureusement je ne pouvais pas lui faire dire autre chose que ce qu'il disait. Bruno n'était pas là à ce moment-là, mais il m'a dit au téléphone « Faisons confiance et obéissons à l'Église. » Et puis... on comprendra, on se fera expliquer. On a suffisamment de prêtres dans notre entourage pour nous accompagner, nous expliquer pour que notre cœur et notre raison fonctionnent ensemble. Mais ce principe de l'obéissance, je l'ai trouvé très important, je l'ai trouvé apaisant et je l'ai trouvé libérateur. J'ai tout de suite compris que l'Église ne nous propose pas un chemin de contrainte, de punition, de restriction. Ce qu'elle nous propose, c'est exigeant, certes, mais en fait, c'est un vrai chemin de bonheur et de liberté. Finalement, l'Église ne propose pas autre chose que ce que l'Évangile nous enseigne. En tout cas, l'Église, me semble-t-il, marche dans la droite ligne de ce que Jésus nous dit dans l'Évangile. Donc, voilà, on a pris ce parti, on a fait ce choix de faire confiance, d'obéir. Obéir, ça ne veut pas dire être soumis. Ce n'est pas de la soumission, de la servilité. Je crois que l'obéissance, c'est de la confiance. Rien ne nous empêche de faire fonctionner notre intelligence pour comprendre pourquoi il nous est demandé ceci ou cela. Alors bien sûr, c'est difficile, mais encore une fois, c'est ce qui nous a rendus vraiment heureux.

  • Qu'est-ce qui a été le plus difficile pour vous,

  • Anne-Françoise

    justement, dans ces 15 ans d'attente, peut-être dans vos relations aux autres ou à vous-même ?

  • Inès Rouy

    Beaucoup de choses sont difficiles. Les annonces, évidemment. Combien de couples qui sont passés par là nous ont confiés, quand on était aussi dans cette situation, que c'était le plus difficile pour eux. Ces annonces qui vous vrillent le cœur, la vision des ventres qui s'arrondissent autour de soi. En ce qui me concerne, les baptêmes, c'était souvent le plus délicat. à vivre, parce que c'était des jours mêlés de joie et de peine, avec la culpabilité en plus de ressentir de l'envie. Ce sentiment qui s'insinue comme un poison, qui peut devenir de la jalousie. Et j'essayais de lutter contre ça. Mais pour autant, je n'empêchais pas mes larmes de couler. Alors c'est toujours très difficile, parce qu'on n'est pas tout seul. Et essayer de ne pas trop faire peser ça sur eux. Sur nos familles respectives, j'avoue que je n'ai pas toujours été à la hauteur, mais je savais aussi pouvoir compter sur l'indulgence de chaque membre de notre famille. Donc ça, ça a été difficile. Et puis le fait de voir les années passer, on ne se voit pas vieillir quand on a... Quand on n'a pas d'enfant, le temps passe différemment parce qu'il n'est pas marqué par des événements qui ponctuent une vie de famille. Voilà, baptême, première communion, anniversaire. Donc on a l'impression de vieillir un petit peu différemment.

  • Anne-Françoise

    Quand on s'est parlé la première fois, vous disiez cependant que vous n'avez pas attendu la naissance de votre fils pour être heureux. Qu'est-ce qui vous a rendu heureux ? Qu'est-ce qui vous a aidé à trouver de la joie dans cette période ?

  • Inès Rouy

    Beaucoup de choses nous ont rendu heureux. heureux déjà le fait d'être tous les deux, de pouvoir apprendre à nous aimer parce que nous avons passé 15 ans seuls, disponibles entièrement l'un pour l'autre alors bien sûr ce n'était pas choisi, c'était par un peu la force des choses que nous n'étions que deux et pourtant nous mesurions la chance d'avoir cette grande disponibilité l'un pour l'autre, de pouvoir prendre soin de notre couple et je pense que Il en reste évidemment quelque chose aujourd'hui. Je suis convaincue par ailleurs que la naissance de Philibert, son arrivée n'était pas une condition à notre bonheur. Nous étions très heureux quand Philibert est arrivé. Qu'est-ce qui nous a rendus heureux ? C'est aussi tout simplement de voir d'autres enfants arriver dans d'autres foyers. Comme je le disais tout à l'heure, c'est une joie mêlée de chagrin. pour soi-même, d'envie, mais quel bonheur nous avons eu de nous voir confier aussi le rôle de parrain et de marraine, de pouvoir exercer une forme de paternité et de maternité un peu différente. Une autre chose qui m'a rendue heureuse quelques années après notre mariage, c'est le jour où j'ai réalisé que j'aimais Bruno pour lui-même et pas pour le père potentiel et hypothétique qu'il pourrait être. C'est-à-dire que Je crois que le jour de mon mariage, j'avais l'impression d'avoir coché un peu toutes les cases. Nous étions mariés, nous aurions des enfants, le conte de fées. Et puis finalement, le conte de fées, inabouti, m'a permis d'ouvrir les yeux et d'ouvrir les yeux en regardant Bruno tel qu'il était. Ça, ça a été une source de joie parce que je me confrontais à une réalité qui était différente de celle que j'imaginais, mais qui était bien plus riche finalement et plus vraie surtout.

  • Anne-Françoise

    Qu'est-ce qui s'est joué dans votre relation à Dieu à ce moment-là ? Est-ce que vous lui en avez voulu ?

  • Inès Rouy

    Je dois reconnaître que j'en ai voulu à Dieu. J'en ai voulu à notre père de ne pas faire de nous des parents, de ne pas nous accorder cette joie d'être parent. Je repense à un moment spécial il y a quelques années. En plein été, Bruno était parti marcher à Cotignac. Il a pris cette habitude il y a maintenant pas mal d'années de faire ce pèlerinage des pères de famille de Cotignac. Et cette année-là, je lui avais demandé d'être plus précis avec Saint-Joseph. Il paraît qu'il faut être très précis avec Saint-Joseph. Et je lui avais dit, demande à Saint-Joseph que nous ayons un enfant vivant, que nous puissions tenir dans nos bras. Parce que nous avions déjà perdu pas mal de petits bébés et ses épreuves successives musées. Donc j'avais demandé à Bruno d'être très précis dans ses demandes. Il en est revenu et un mois plus tard, nous étions... Dans ma famille, en vacances, dans le lot, à Rocamadour, c'était un dimanche matin, et au moment où sonne l'angélus, je découvre que je suis enceinte. Alors là, ce n'était plus des signes du ciel, c'était des thromboscopes géants qui nous faisaient hurler « Magnificat » dans nos cœurs. Nous étions convaincus que cette fois-ci serait la bonne. Ce n'était pas possible qu'il y ait autant de réponses évidentes à nos supplications, et que ça reste vain. Notre joie était de courte durée puisque quelques jours plus tard, tout était terminé. Et là, j'en ai vraiment voulu au Seigneur, j'étais en colère. J'ai dit au Seigneur, maintenant, finis de jouer. C'est trop cruel de nous agiter des petits paquets cadeaux sous le nez pour nous les retirer. Vraiment, je voyais le Seigneur comme quelqu'un de cruel et j'ai décidé de bouder, tout simplement. Et puis, quelques jours plus tard, au moment de la... je crois, de l'Homélie ou pendant l'Évangile, je ne sais plus très bien. J'ai senti que le Seigneur me prenait un peu par la peau du cou pour me dire « Tu peux bouder, mais moi je suis là, je suis avec vous » . Alors c'est quelque chose de très mystérieux de sentir cette conversion, mais ça a été fondateur pour moi. Et cette émission s'appelle « Un beau jour » et pour moi, ça a été un beau jour parce que depuis, j'ai la conviction que notre Père du Ciel Nous aime qu'il veut le bonheur de ses enfants et que nos vicissitudes ne sont jamais vécues seules. Il est avec nous, il nous porte, il nous tient dans sa main. Donc, depuis ce jour, je crois que je n'en ai plus voulu au Seigneur. J'ai compris que le Seigneur souffrait avec nous, qu'il partageait. Il partageait tout, il l'a fait déjà sur la croix. Il est vainqueur du mal. Alors, il n'empêche pas la souffrance, il n'empêche pas les épreuves, mais il a gagné une bonne fois pour toutes. Et il nous l'a dit, je reste avec vous, je suis avec vous tous les jours de votre vie.

  • Anne-Françoise

    À ce moment-là, vous espériez encore avoir un enfant. À quel moment est-ce que vous avez renoncé ?

  • Inès Rouy

    Nous avons renoncé au bout de, je dirais, 12 ans de mariage, je crois, à peu près, quand les médecins qui nous suivaient en aprotechnologie nous ont dit « Bon, maintenant, on voit bien que ce n'est pas un petit caillou dans l'engrenage, c'est une poignée de gravier. Il y a trop de choses qui sont incompatibles. Il y a trop de choses qui ne vont pas. Il y a trop de problèmes. Là, on ne pourra plus aller plus loin. » Raisonablement, j'avais été traitée pour de l'endométriose. J'avais déjà subi deux opérations. Et puis, on découvrait d'autres choses qui ne fonctionnaient pas. Et on s'est dit, raisonnablement, on va arrêter et on arrête d'attendre. Alors, ça ne veut pas dire qu'on arrêtait d'espérer, mais en tout cas, on n'était plus tendu vers cette attente. Donc, ce renoncement a été très difficile, très douloureux. Au départ, pour moi, je me suis dit que c'était impossible de renoncer à ce rêve. Et puis, en fait, ce qui m'a consolée petit à petit... c'est de regarder en face cette béance dans notre vie, d'oser l'affronter et de me dire que rien ne viendrait combler ce manque-là. Je me souviens, c'est un ami prêtre qui m'avait dit, vous savez, nous en tant que prêtre, mais c'est le c'est valable pour les religieux, les religieuses, qui ont renoncé à être père et mère. Ils ont renoncé à avoir une famille, ils ont renoncé pour l'amour du Christ. Eh bien, ce manque... Il n'est pas comblé. Il ne faut pas croire que Jésus comble ce manque. Pas du tout. C'est un manque. Il faut le regarder tel quel. Et ça m'a beaucoup consolée parce que j'avais l'impression d'être effectivement de marcher sur un chemin, main dans la main avec Bruno, sur un chemin qui longeait un précipice, un gouffre. Alors, ça peut être inquiétant, un précipice, sauf que si on regarde le chemin et qu'on en voit l'horizon, l'horizon, c'est... c'est notre Père du ciel qui nous tend les bras et puis je marche encore une fois main dans la main avec mon mari donc ça a été une consolation ce qui ne veut pas dire que la souffrance n'existe plus mais bénéficie de grâces quand même sensibles quand on les demande avec foi et ça, ça m'a énormément soutenue

  • Anne-Françoise

    Et c'est peu de temps après que vous avez choisi de vous mettre au service de l'église, donc à Verdelet Est-ce que vous pouvez nous raconter ce choix ?

  • Inès Rouy

    Alors, ça faisait déjà quelques années que notre disponibilité, de fait, nous faisait penser que nous pouvions donner un peu de notre temps pour une mission, quelle qu'elle soit. Moi, je ne suis pas très aventurière. Assez vite, nous avons mis Fidesco de côté, parce que Fidesco implique de partir souvent loin. Et par ailleurs, nous nous disions que nous avions sans doute un moyen de servir. près de chez nous, à savoir en Gironde. Pourquoi Verdelay ? Alors Verdelay, nous avions fait un pèlerinage, il y a longtemps maintenant, de Bordeaux à Verdelay, en déposant comme intention le fait de voir notre famille s'agrandir. Et nous n'avons pas fait le retour tout de suite. J'avais fait mon petit chantage à la Sainte Vierge en lui disant, nous ferons le retour quand nous viendrons déposer un ex-voto pour vous dire merci. C'était du chantage, j'assume. Mais en 2019, après une année difficile, année de la mort de mon père, année de ma dernière fausse couche, Bruno m'a dit, écoute, on ne va pas reporter ce retour, ce pèlerinage de retour. Alors peut-être qu'on ne va pas poser d'ex voto, l'année a été difficile, mais est-ce qu'on n'a pas quand même plein de raisons de remercier le Seigneur ? J'ai trouvé ça très beau. J'étais peut-être un peu moins convaincue et paisible que lui, mais... Mais je savais qu'il avait raison et qu'il y avait plein de raisons pour lesquelles on pouvait dire merci au Seigneur. Et donc, nous avons décidé de faire ce pèlerinage de retour les 31 décembre et 1er janvier pour terminer l'année 2019 et commencer l'année 2020 avec le Seigneur et aussi avec un couple de chers amis très présents. Donc, ce retour de Verdelay a été l'occasion pour nous de nous intéresser. d'un peu plus près à ce sanctuaire que, par ailleurs, je connaissais bien depuis toute petite, puisque je passais mes vacances dans cette région. Je le connaissais partiellement, je n'en connaissais pas toute l'histoire. C'est un sanctuaire qui a plus de 900 ans. et qui est dédiée à Notre-Dame, consolatrice des affligés. Ça, c'est une chose que j'ai approfondie pendant les deux ans de notre mission. Mais à l'époque, je ne le savais pas tellement. Nous savions juste que l'hôtellerie du sanctuaire avait besoin d'être redynamisée. Donc, nous nous en sommes ouverts à un couple d'amis qui nous a dit « Mais vous savez que le recteur a l'intuition qu'il faut un couple pour s'occuper de l'hôtellerie. » Qu'à cela ne tienne, nous allons voir le recteur, que nous connaissions bien par ailleurs, puisqu'il y a eu... Il était notre curé autrefois dans le Médoc. Et puis, de fil en aiguille, en en parlant avec Mgr Jam, puis l'économe diocésain, les contours de notre mission se sont dessinés et nous avons commencé notre mission en 2021.

  • Anne-Françoise

    Et c'est cette année-là ou celle d'après que Philibert est arrivé ?

  • Inès Rouy

    Alors, Philibert s'est annoncé à la fin de notre première année de mission, dans des circonstances quand même pas banales. puisque c'était à l'avant-veille de notre 15e anniversaire de mariage. Notre anniversaire de mariage étant le 1er décembre. Il se trouve que le 16 novembre, nous étions en vacances dans le Gers, chez un oncle et une tante, qui nous suggèrent de passer à Boulor, qui n'est pas très loin. Nous connaissions Boulor l'un et l'autre, Bruno et moi, séparément, mais nous n'y étions jamais allés ensemble et nous décidons de faire un saut. de quelques minutes. Devant le cercueil de Claire de Castelbajac, j'ai l'intuition qu'il faut que je lui demande un miracle suffisamment percutant pour étayer son dossier de béatification qui semble ne pas tellement avancé. Et pour que ce soit suffisamment fort, je lui dis, Claire obtient que je sois enceinte d'ici la fin de l'année. 16 novembre. Il y avait du défi quand même. Il se trouve que... quinze jours plus tard, j'apprenais que j'étais enceinte. Alors, évidemment, nous nous sommes ouverts par la suite au postulateur de la cause de Claire de Castelbajac qui a estimé qu'on ne pouvait pas parler d'un miracle selon les critères de l'Église. C'est quand même très précis. Mais en revanche, une grâce obtenue par son intercession, sans doute, d'autant que après, j'ai relu la biographie de Claire de Castelbajac. et j'ai réalisé que sa propre mère l'avait eu à l'âge de 40 ans, mon âge au moment où j'attendais et où j'ai eu Philibert.

  • Anne-Françoise

    Et quelles émotions est-ce que vous avez traversées quand vous avez découvert que vous étiez enceinte, après toutes ces fausses couches ? Est-ce que vous y avez cru finalement ?

  • Inès Rouy

    Je dois dire qu'au départ, je n'étais pas tellement à la fête, c'est-à-dire que les premiers jours et les premières semaines, c'était du déjà vu et du déjà connu. Ce contraste entre la folle joie, l'espoir, l'angoisse, la terreur à l'idée de reperdre un bébé, ça a été vraiment des montagnes russes, d'autant qu'il y a eu quelques passages aux urgences qui nous ont alertés, évidemment. Donc non, les premières semaines, je dois dire qu'on n'était pas du tout sûrs que nous tiendrions un jour ce bébé dans nos bras. Et puis les jours ont passé, nous avons fini par... Passer le cap fatidique de la date à laquelle je perdais d'habitude mes bébés. Et petit à petit, l'espoir a pris le dessus. Mais je dois dire que pendant toute ma grossesse, j'ai eu peur. J'ai eu peur de ne jamais le voir, de ne jamais le tenir dans mes bras. Et à ce moment-là, c'est la prière du Notre Père qui m'a soutenue véritablement. Parce que le fait de dire « Donnez-nous aujourd'hui notre pain de ce jour » , c'était pour moi demander chaque jour la force pour aujourd'hui et demain. je redemanderai la force pour ce jour. Mais voilà, je ne demande pas au Seigneur qu'il me conforte jusqu'à la fin de ma grossesse. C'est chaque jour qu'il faut lui demander le pain pour aujourd'hui. Et ça a changé ma manière de demander à mon Père du Ciel.

  • Anne-Françoise

    Et le jour de la naissance, est-ce que vous voulez nous en dire quelques mots ?

  • Inès Rouy

    Je crois que c'est une journée que nous ne voulions pas voir s'achever. Je me souviens que... Voilà, Philibert est né à 13h30 ce 6 août, jour de la fête de la Transfiguration et jour aussi de la première fête de Saint-Dominique. Aujourd'hui, en fait, Saint-Dominique, le 8 août. Et d'ailleurs, c'est à cette date-là qu'aurait dû naître initialement Philibert. Il est arrivé avec deux jours d'avance. Pour moi, ça avait une résonance très particulière parce que mon père, qui est mort en 2019, s'appelait Dominique. Quand on veut voir des signes, on n'a qu'à ouvrir les yeux et on peut en voir beaucoup. En tout cas, je gardais ça dans mon cœur. Et finalement, Philibert est arrivé ce 6 août à 13h30. Et je me souviens qu'à 2h du matin... On se disait avec Bruno, on ne peut pas éteindre la lumière, on ne peut pas voir cette journée s'arrêter tellement on était heureux, éblouis, émerveillés, confondus de gratitude. Et cette gratitude qui dure encore et encore et encore. Trois ans après, on n'a pas fini de s'émerveiller.

  • Anne-Françoise

    Alors effectivement, aujourd'hui, il libère à trois ans. Comment est-ce que vous relisez votre histoire trois ans après ? Qu'est-ce que cette naissance a changé dans votre vie ? dans votre vie, dans votre relation à Dieu aussi ?

  • Inès Rouy

    Alors, la naissance de Philibert a tout changé. Je ne vais pas dire le contraire. Son arrivée a tout changé, a tout rééquilibré, ou plutôt déséquilibré, mais de manière très joyeuse, évidemment. C'est-à-dire que vous imaginez, au bout de 15 ans, après 15 ans de mariage, on prend des habitudes de petit couple, et puis on peut... On peut, et c'est normal, avoir une certaine routine à deux. On s'habitue à l'idée qu'on passera notre vie seulement tous les deux. Nous, c'était le cas depuis trois ans. Et puis Philibert arrive, donc ça renverse tout. Déjà, notre mission a été un petit peu mise à mal à Verdelay parce que moi, je ne valais plus grand-chose en tant que maîtresse de maison. Heureusement que Bruno était là pour faire les choses à ma place. Mais c'est vrai que la mission en tant que telle en a pris un petit coup. Donc déjà, ça nous a un petit peu bouleversés. Et puis évidemment, quel merveilleux bouleversement de voir ce petit garçon arriver dans nos vies. Ça change toutes les perspectives et ça déséquilibre aussi le couple. Donc ça, c'est à nous après de retrouver un équilibre, de repenser à toutes ces années où nous avons pris soin de notre couple et d'essayer de tendre à ça. Comme je le disais tout à l'heure, Philibert n'était pas une condition à notre bonheur et on a tôt fait de l'oublier. quand il se présente parce qu'on a l'impression qu'il nous comble après autant d'attentes. Mais c'est faire peser sur ses épaules beaucoup de choses dont il n'est absolument pas responsable. Notre propre bonheur, notre bonheur de couple et notre bonheur de famille. Ce n'est pas lui qui en est le garant.

  • Anne-Françoise

    Quel conseil est-ce que vous pourriez donner à un couple en espérance d'enfant qui peut-être n'arrive jamais ?

  • Inès Rouy

    Je me garderai de donner des conseils parce que, étant passée par là, je trouve que les conseils sont souvent peu valables. Combien de fois nous avons eu des conseils, avec toujours cette impression de rester sur le quai de la gare pendant que le TGV avance, démarre, on a envie de dire, aux autres couples, continuez sans nous, on va vous ralentir. Mais c'est vrai que nombre de fois, des couples qui étaient dans la même situation que nous, nous ont annoncé, ça y est, c'est bon, après 5, 10... 15 ans d'attente, j'en sais rien mais les conseils dans ces cas-là c'est pire que tout parce que ce qui marche pour les uns ne marche pas pour les autres chaque histoire de couple est unique la seule chose qui n'est pas un conseil qui est au mieux une suggestion c'est peut-être de relire le psaume 54 dans les moments de souffrance ça m'a aidée parce que ça m'a permis de me... à la fois de me sentir rejointe et en même temps de me décentrer en réalisant que ces paroles écrites il y a quand même pas mal d'années, dites il y a pas mal d'années, étaient tout à fait universelles. C'est-à-dire qu'elles parlent de souffrances qu'on peut tous connaître, qu'on peut tous s'appliquer, de cris vers le ciel qui sont les nôtres. Donc c'est tout à fait actuel et contemporain ces psaumes. dans le psaume 54. « Décharge ton fardeau sur le Seigneur, il prendra soin de toi » . C'est vraiment ce que j'ai ressenti et ce que j'essaie d'appliquer encore aujourd'hui. Ce n'est pas toujours facile de se décharger et d'avoir la conviction que le Seigneur est notre Père, qu'il prend soin de nous, alors pas selon nos propres désirs, aussi légitimes soient-ils, pas toujours en tout cas, mais sa providence agit continuellement. Et après, le Seigneur, non seulement il prend soin de nous, mais il nous laisse entière liberté. Donc que fait-on face à cette providence agissante ? Eh bien là, on est laissé à notre discernement et c'est à la fois beau, à la fois difficile, à la fois exigeant. Mais en tout cas, quoi qu'il en soit, je suis convaincue que le Seigneur prend vraiment soin de nous comme un père. Donc, pas de conseil, mais s'il nous arrive d'en douter, demandons à l'Esprit-Saint. De toute façon, je crois aussi, c'est quelque chose que j'ai réalisé pendant toutes ces années, c'est que notre croix pendant 15 ans, ça a été cette attente. Ça aurait pu être une autre croix, c'était celle-là. On ne l'aurait pas échangée avec celle du voisin, parce que le voisin... à d'autres croix, à une autre croix. Ça peut être la solitude, ça peut être la maladie, le handicap, pas de travail, pas de perspective, dépression, enfin j'en sais rien, tragédie, que sais-je. Donc notre croix, on ne l'échangerait pas avec celle du voisin, ça c'est sûr. Je prends l'exemple du célibat. Nous pensions souvent à nos amis célibataires quand on... Voilà, pendant cette période d'attente, alors on y pense encore, l'arrivée de Philibert, heureusement, n'a pas gommé ça. Mais nous mesurions aussi à quel point nous avions la chance de vivre les choses à deux. Donc, il ne s'agit pas de relativiser sa propre épreuve, ce n'est pas ça. C'est se dire, regardons aussi ce que nous avons. Et ce que nous avions pendant cette attente, c'était la grâce d'être à deux, d'être soutenu par le sacrement du mariage. de pouvoir puiser dedans, de nous consoler mutuellement, de nous aimer tout simplement. Et voilà, chaque croix est taillée pour... C'est un peu facile, je crois que ceux qui nous écoutent se diront que c'est peut-être un petit peu facile, s'ils en bavent particulièrement en ce moment. Mais dans le fond, est-ce qu'on aimerait échanger notre croix contre celle du voisin ? Je ne suis pas sûre. Je ne suis pas sûre, et puis de toute façon, ce n'est pas souhaitable. Et une autre... Un autre écueil, me semble-t-il, c'est vouloir répondre à d'éventuels pourquoi. J'ai été un petit peu surprise quand nous avons annoncé la future naissance de Philibert. Alors bien sûr, beaucoup se sont réjouis et certains ont tout de suite voulu apporter une réponse. Alors on n'en cherchait pas, nous, de réponse, mais nous disant c'est parce que vous avez lâché du lest, c'est parce que vous n'y pensiez plus. C'est parce que vous êtes venu servir à Verdelet, c'est parce que vous étiez détendu, j'en sais rien. J'avoue qu'on ne s'est pas du tout posé ces questions, on n'aura pas la réponse. On ne peut que constater que notre prière à Claire de Castelmagiac a été suivie de la naissance de Philibert, c'est un constat, rien d'autre. Mais voilà, pas de pourquoi, parce qu'à ce moment-là, se tape la tête contre les murs, comme dans l'épreuve, quoi, nous. Il n'y a aucune raison. On n'a pas plus de mérite que d'autres. Je pense très souvent au roi Baudouin et à la reine Fabiola qui avaient une pression autrement supérieure à la nôtre dans leur attente. La reine Fabiola a connu aussi des fausses couches successives et puis ô combien cruelles parce qu'elles étaient connues. Et pour autant, ils n'ont pas été exaucés de ce point de vue-là. Voilà, c'est mystérieux. Renonçons à chercher des réponses à c'est pourquoi. Ça ne sert à rien. Ça ne sert à rien. Je repense aussi à la Sainte Vierge, quand elle a reçu l'annonce de l'ange Gabriel, elle n'a pas demandé pourquoi, elle a demandé comment est-ce que ça va se faire. Essayons peut-être de suivre ce modèle.

  • Comment justement, dans toutes ces souffrances, comment croire et rester attentif à l'action de Dieu dans nos vies ?

  • Anne-Françoise

    La première chose, je crois, c'est de le demander à l'Esprit-Saint. Et je repense à ces prières de demande. Et finalement, dans l'Évangile, Jésus nous dit « Celui qui demandera l'Esprit Saint, il sera exaucé » . Jésus dit que notre Père du Ciel veut nous donner de bonnes choses, qu'il ne nous donnera jamais de mauvaises choses. Et celui qui demande l'Esprit Saint, il sera exaucé. Donc déjà, si on demande l'Esprit Saint, on est sûr d'obtenir beaucoup, y compris dans notre foi, dans notre espérance et dans la charité. L'autre chose qui me semble importante et à laquelle on tend, on essaie de tendre, c'est de ne pas oublier notre horizon. Je trouve que quand nous étions seulement deux, c'était relativement facile de se dire que notre horizon, c'était le ciel, parce que nous n'avions pas d'autres soucis que de nous y conduire mutuellement. Je trouve que c'est un peu plus difficile depuis que Philibert est né. Alors pardon, je ne veux pas faire l'enfant gâté, mais je dis juste que c'est une difficulté, en tout cas une attention à avoir, c'est de ne pas faire trop baisser notre horizon à des choses terre à terre. Alors c'est un petit peu normal, parce que nous sommes affairés par des préoccupations toutes terrestres. Nourrir son enfant, le vêtir. Le faire croître, tout ça, c'est très terre à terre. Mais pour quel but ? Finalement, c'est pour le ciel, comme pour nous-mêmes. Et je me souviens quand Philibert était encore tout petit petit, Bruno le confiait dans notre prière familiale en disant « Seigneur, que nous le conduisions à toi » . Antérieurement, mon cœur de mère bondissait. « Attends, pas trop vite, pas trop vite. Le Seigneur a déjà six de nos enfants auprès de lui, ça va » . Mais en fait, il a complètement raison. Notre but de parents, c'est de conduire ce petit enfant que le Seigneur nous a confié à lui, qu'il soit saint. Donc ça, c'est une chose primordiale. Mais quelquefois, on peut être un peu pris par les préoccupations terrestres et ne pas avoir toujours ça en tête. En tout cas, peut-être un peu moins que quand nous étions seulement, entre guillemets, un couple. Est-ce qu'il y a un livre qui vous a aidé pendant cette période d'attente ?

  • Inès Rouy

    Alors, je dois dire que la littérature consacrée à la famille, aux épreuves rencontrées en famille, etc., à toutes ces questions à la fois de bioéthique, familiale, de procréation. Cette littérature est très abondante. Moi, il y a un livre qui m'a aidée, c'est « Attendre et espérer, itinéraire d'un couple sans enfant » d'Olivier Matona aux éditions de l'Emmanuel. Déjà le titre, Attendre et espérer, ça rejoint tout à fait ce que nous avons vécu, l'attente et l'espoir. Au bout de douze ans, nous n'attendions plus, mais nous espérions toujours. Voilà, donc c'est ce livre principalement qui m'a marquée. Il y en a énormément d'autres. Moi, je lis beaucoup, donc je ne saurais pas vous dire précisément. Après, il y a les psaumes, comme je vous disais tout à l'heure. Les psaumes qui m'ont soutenue parce que j'ai fait mienne ces paroles. qui quelquefois sont assez violentes, qui sont des cris du cœur. Et je les ai fait miennes très souvent pendant cette attente.

  • Anne-Françoise

    Il y a une prière particulièrement qui vous a accompagnée ?

  • Inès Rouy

    Oui, la prière du Magnificat. Alors, le Magnificat, nous avions pris l'habitude de la dire en couple grâce aux équipes Notre-Dame, dont nous avons fait partie pendant plusieurs années, jeunes mariées. Donc, nous connaissions par cœur cette prière. Et je rêvais du jour où ce Magnificat se concrétiserait pour moi. Et évidemment, ça a été mon cri du cœur quand j'ai tenu Philibert dans mes bras, ce magnifique acte. Donc ça, c'est vraiment, oui, je crois, la prière la plus emblématique pour moi, en tout cas.

  • Anne-Françoise

    Alors, si vous aviez le Christ en face de vous aujourd'hui, que lui diriez-vous en lien avec votre histoire ?

  • Inès Rouy

    Je crois que je lui dirais, Seigneur, je ne suis pas digne de vous recevoir, mais dites seulement une parole et je serai guéri. J'espère... Pouvoir dire que quelles que soient les épreuves que je rencontrerai dans la vie, j'aurai cette conviction que le Seigneur peut tout, qu'il est tout-puissant, qu'il veut mon bonheur. Moi, j'en suis évidemment indigne. Lui le sait, encore plus que moi, mais il peut tout.

  • Anne-Françoise

    Merci beaucoup Inès.

  • Inès Rouy

    Merci Anne-Françoise, c'était un plaisir de discuter avec vous.

  • Anne-Françoise

    Merci pour votre écoute et merci d'être toujours plus nombreux à écouter Un beau jour, à vous abonner, à partager cet épisode sur les réseaux sociaux et à mettre 5 étoiles et des commentaires sur Apple Podcasts et Spotify. Pour découvrir d'autres témoignages de feu, vous pouvez bien sûr écouter les autres épisodes du podcast, mais aussi lire chaque semaine la rencontre avec un témoin touché par la grâce dans le magazine Famille Chrétienne. Et enfin, n'hésitez pas à découvrir les autres podcasts de Famille Chrétienne, Tous Saints, Maman Prie, Sexo, Sacrée Histoire et d'autres encore. Merci et au prochain premier lundi du mois pour un nouvel épisode.

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Description

Inès Rouy, avec son mari Bruno, a vécu l'épreuve de l'attente d'un enfant qui n'arrive pas... pendant 15 longues années. Une période faite d'espoir fou et de déceptions cruelles, marquée par six fausses couches successives, mais vécue, malgré tout, dans la foi en la bonté de Dieu. Puis, un beau jour, alors qu'ils avaient mis de côté ce projet d'avoir un enfant et décidé de se mettre au service de l'Eglise au sanctuaire Notre-Dame de Verdelais à proximité de Bordeaux, leur fils Philibert est arrivé, miraculeusement. Un chemin d'abandon et de foi qu'elle raconte comme un témoignage de l'action de Dieu dans nos vies.


P.S : joyeux anniversaire à Philibert :)

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Ce podcast est réalisé par Famille Chrétienne


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Transcription

  • Anne-Françoise

    Bonjour, je m'appelle Anne-Françoise et vous écoutez Un beau jour, le podcast qui donne la parole à des croyants dont la vie et la foi ont été changés à jamais par un événement imprévu. Et dans cet épisode, je reçois Inès qui, avec son mari Bruno, a vécu l'épreuve de l'attente d'un enfant qui n'arrive pas pendant 15 ans. Une période faite d'espoir et de déception, marquée par six fausses couches successives. mais toujours vécu dans la foi, en la bonté de Dieu. Puis, un beau jour, alors qu'ils avaient mis de côté ce projet d'avoir un enfant et décidé de se mettre au service de l'église au sanctuaire Notre-Dame de Verdelet, à proximité de Bordeaux, leur fils Philibert est arrivé. Un chemin d'abandon et de foi qu'ils racontent comme un témoignage de l'action de Dieu dans nos vies. Bonjour Inès.

  • Inès Rouy

    Bonjour Anne-Françoise.

  • Anne-Françoise

    Merci pour votre présence au micro d'un beau jour. Pour commencer, pouvez-vous nous présenter l'objet symbolique que vous avez apporté ?

  • Inès Rouy

    L'objet que j'ai choisi est une croix de berceau qui nous a été offerte par ma mère au moment de la naissance de Philibert. Cette croix de berceau nous a beaucoup touché parce que ma mère l'avait acheté des années auparavant. Elle l'avait conservée pour le jour où. Sans nous le dire. J'ai été frappée par cette foi, par la persévérance de sa prière. Et j'ai réalisé à ce moment-là que nous n'étions pas seules. Bien sûr, il y a eu cette croix, mais il y a eu aussi toutes ces personnes qui se sont manifestées au moment où nous avons annoncé la prochaine venue de notre bébé et qui nous ont dit pendant toutes ces années, nous prions pour vous. Ces prières fidèles, constantes. nous ont touchés, nous ont fait réaliser que non seulement le Seigneur ne nous avait jamais fait défaut, mais qu'en plus il avait placé sur notre route des personnes qui persévéraient elles aussi dans la foi, dans la charité, des personnes connues de notre entourage ou inconnues, nous avons entendu parler bien plus tard. Cela nous a fait penser que nous n'étions jamais seuls. Et cette prière d'intercession nous a semblé primordiale.

  • Anne-Françoise

    Merci beaucoup Inès. Alors on va revenir sur votre histoire. Peut-être que d'abord vous pouvez nous raconter comment est-ce que vous avez rencontré Bruno.

  • Inès Rouy

    Oui, alors j'ai rencontré Bruno en 2004. Il arrivait de Bourgogne, il venait faire du vin dans le Médoc. Moi-même j'étais bordelaise, étudiante. Et nous nous sommes connus grâce au groupe Mission des Dominicains, groupe fait pour les jeunes professionnels. Donc notre histoire a d'abord été une histoire d'amitié approfondie, creusée, et qui nous a conduit à finalement nous marier en 2007.

  • Anne-Françoise

    Vous avez rapidement désiré un enfant. Comment est-ce que l'inquiétude de ne pas pouvoir en avoir s'est manifestée ?

  • Inès Rouy

    Compte tenu de mon tempérament impatient, du grand désir que nous avions de voir notre famille s'agrandir, l'attente à tout de suite était... Difficile. Alors, à relativiser, parce que je commençais à m'inquiéter deux mois après notre mariage, et je n'étais pas au bout de mes peines, mais ça a été difficile parce que ce désir d'avoir des enfants est non seulement légitime, mais en plus c'est un des piliers du mariage chrétien. Et puis on se dit, le Seigneur le veut, lui aussi. Il bénit normalement notre union en nous accordant des enfants. Donc, ça peut être vécu comme une injustice. Et puis, une inquiétude, évidemment, parce qu'au départ, on ne sait pas trop pourquoi. On rencontre ces difficultés, il faut creuser. Et c'est difficile. C'est difficile de regarder la réalité en face, de s'exposer à des réponses de la médecine qui ne vont pas dans le sens de notre espoir, évidemment. Et puis, d'entreprendre des démarches pesantes, éprouvantes. dont on ne sait pas si elles aboutiront.

  • Anne-Françoise

    Alors comment est-ce que vous avez été accompagnée justement médicalement ?

  • Inès Rouy

    Nous avons fait le choix dès le départ de faire confiance à la Napro-Technologie qui faisait ses débuts en France à ce moment-là. Donc c'était, je pense, en 2009 ou 2010. Et à cette époque-là, il y avait seulement un médecin qui exerçait la Napro-Technologie à Aix-en-Provence, à la Clinique de l'Étoile. Et nous avons fait ce choix-là parce que les alternatives qu'on nous proposait ne nous allaient pas, ne nous convenaient pas. La naprotechnologie consiste à restaurer la fertilité en en cherchant d'abord les raisons. C'est-à-dire qu'au lieu de mettre, si je puis dire ainsi, un pansement sur une jambe de bois, on va chercher vraiment les raisons de l'infertilité masculine et féminine pour y remédier. Il s'agit de méthodes naturelles, mais on n'agit pas avec des tisanes et des plantes. Quelquefois, il peut s'agir de chirurgie ou autre, mais on ne se substitue jamais au couple. Et pour nous, c'était très important de vivre ça en couple.

  • Anne-Françoise

    Alors justement, comment est-ce que vous avez réagi l'un et l'autre dans cette période d'attente ? Qu'est-ce qui s'est joué dans votre couple ?

  • Inès Rouy

    Nous avons réagi nécessairement différemment en tant qu'hommes et en tant que femmes. Comme je le disais tout à l'heure, moi je suis d'un naturel très impatient. Bruno, lui, est peut-être plus placide, plus patient et peut-être d'humeur plus égale. Ce que nous avons trouvé merveilleux, c'était de pouvoir se soutenir l'un l'autre, la plupart du temps, la majorité du temps. Quand l'un flanchait, l'autre était là pour l'écouter, pour le soutenir. Et tout ça, c'est joué sur des années. Donc, nous avons évolué aussi. Nous avons appris à prendre notre mal en patience, à se relever après les épreuves des fausses couches. Ce n'est jamais gagné, évidemment. Ce n'est pas parce qu'une fois on triomphe de sa propre tristesse qu'on en triomphera toujours et aussi facilement. Mais c'est vrai que le fait de pouvoir s'appuyer l'un sur l'autre, c'est une aide inestimable. Et nous en avions vraiment conscience.

  • Anne-Françoise

    Et vous étiez d'accord rapidement sur ce que vous vouliez faire, justement, d'un point de vue médical aussi ?

  • Inès Rouy

    Nous étions d'accord, mais je dois dire qu'un jour, j'ai été confrontée à la tentation de contourner ce que l'Église nous proposait. Un jour, un médecin m'a dit, c'était avant qu'on connaisse la naprotechnologie, et m'a dit « maintenant, je ne vois pas d'autre alternative que la fécondation in vitro » . Quand elle m'a dit ça, j'ai été désemparée, je me suis sentie... découragée et je me suis demandé comment je pouvais contourner ce que l'Église préconisait. Donc j'ai regardé le catéchisme de l'Église catholique, je l'ai disséqué et puis je me suis rendu compte que malheureusement je ne pouvais pas lui faire dire autre chose que ce qu'il disait. Bruno n'était pas là à ce moment-là, mais il m'a dit au téléphone « Faisons confiance et obéissons à l'Église. » Et puis... on comprendra, on se fera expliquer. On a suffisamment de prêtres dans notre entourage pour nous accompagner, nous expliquer pour que notre cœur et notre raison fonctionnent ensemble. Mais ce principe de l'obéissance, je l'ai trouvé très important, je l'ai trouvé apaisant et je l'ai trouvé libérateur. J'ai tout de suite compris que l'Église ne nous propose pas un chemin de contrainte, de punition, de restriction. Ce qu'elle nous propose, c'est exigeant, certes, mais en fait, c'est un vrai chemin de bonheur et de liberté. Finalement, l'Église ne propose pas autre chose que ce que l'Évangile nous enseigne. En tout cas, l'Église, me semble-t-il, marche dans la droite ligne de ce que Jésus nous dit dans l'Évangile. Donc, voilà, on a pris ce parti, on a fait ce choix de faire confiance, d'obéir. Obéir, ça ne veut pas dire être soumis. Ce n'est pas de la soumission, de la servilité. Je crois que l'obéissance, c'est de la confiance. Rien ne nous empêche de faire fonctionner notre intelligence pour comprendre pourquoi il nous est demandé ceci ou cela. Alors bien sûr, c'est difficile, mais encore une fois, c'est ce qui nous a rendus vraiment heureux.

  • Qu'est-ce qui a été le plus difficile pour vous,

  • Anne-Françoise

    justement, dans ces 15 ans d'attente, peut-être dans vos relations aux autres ou à vous-même ?

  • Inès Rouy

    Beaucoup de choses sont difficiles. Les annonces, évidemment. Combien de couples qui sont passés par là nous ont confiés, quand on était aussi dans cette situation, que c'était le plus difficile pour eux. Ces annonces qui vous vrillent le cœur, la vision des ventres qui s'arrondissent autour de soi. En ce qui me concerne, les baptêmes, c'était souvent le plus délicat. à vivre, parce que c'était des jours mêlés de joie et de peine, avec la culpabilité en plus de ressentir de l'envie. Ce sentiment qui s'insinue comme un poison, qui peut devenir de la jalousie. Et j'essayais de lutter contre ça. Mais pour autant, je n'empêchais pas mes larmes de couler. Alors c'est toujours très difficile, parce qu'on n'est pas tout seul. Et essayer de ne pas trop faire peser ça sur eux. Sur nos familles respectives, j'avoue que je n'ai pas toujours été à la hauteur, mais je savais aussi pouvoir compter sur l'indulgence de chaque membre de notre famille. Donc ça, ça a été difficile. Et puis le fait de voir les années passer, on ne se voit pas vieillir quand on a... Quand on n'a pas d'enfant, le temps passe différemment parce qu'il n'est pas marqué par des événements qui ponctuent une vie de famille. Voilà, baptême, première communion, anniversaire. Donc on a l'impression de vieillir un petit peu différemment.

  • Anne-Françoise

    Quand on s'est parlé la première fois, vous disiez cependant que vous n'avez pas attendu la naissance de votre fils pour être heureux. Qu'est-ce qui vous a rendu heureux ? Qu'est-ce qui vous a aidé à trouver de la joie dans cette période ?

  • Inès Rouy

    Beaucoup de choses nous ont rendu heureux. heureux déjà le fait d'être tous les deux, de pouvoir apprendre à nous aimer parce que nous avons passé 15 ans seuls, disponibles entièrement l'un pour l'autre alors bien sûr ce n'était pas choisi, c'était par un peu la force des choses que nous n'étions que deux et pourtant nous mesurions la chance d'avoir cette grande disponibilité l'un pour l'autre, de pouvoir prendre soin de notre couple et je pense que Il en reste évidemment quelque chose aujourd'hui. Je suis convaincue par ailleurs que la naissance de Philibert, son arrivée n'était pas une condition à notre bonheur. Nous étions très heureux quand Philibert est arrivé. Qu'est-ce qui nous a rendus heureux ? C'est aussi tout simplement de voir d'autres enfants arriver dans d'autres foyers. Comme je le disais tout à l'heure, c'est une joie mêlée de chagrin. pour soi-même, d'envie, mais quel bonheur nous avons eu de nous voir confier aussi le rôle de parrain et de marraine, de pouvoir exercer une forme de paternité et de maternité un peu différente. Une autre chose qui m'a rendue heureuse quelques années après notre mariage, c'est le jour où j'ai réalisé que j'aimais Bruno pour lui-même et pas pour le père potentiel et hypothétique qu'il pourrait être. C'est-à-dire que Je crois que le jour de mon mariage, j'avais l'impression d'avoir coché un peu toutes les cases. Nous étions mariés, nous aurions des enfants, le conte de fées. Et puis finalement, le conte de fées, inabouti, m'a permis d'ouvrir les yeux et d'ouvrir les yeux en regardant Bruno tel qu'il était. Ça, ça a été une source de joie parce que je me confrontais à une réalité qui était différente de celle que j'imaginais, mais qui était bien plus riche finalement et plus vraie surtout.

  • Anne-Françoise

    Qu'est-ce qui s'est joué dans votre relation à Dieu à ce moment-là ? Est-ce que vous lui en avez voulu ?

  • Inès Rouy

    Je dois reconnaître que j'en ai voulu à Dieu. J'en ai voulu à notre père de ne pas faire de nous des parents, de ne pas nous accorder cette joie d'être parent. Je repense à un moment spécial il y a quelques années. En plein été, Bruno était parti marcher à Cotignac. Il a pris cette habitude il y a maintenant pas mal d'années de faire ce pèlerinage des pères de famille de Cotignac. Et cette année-là, je lui avais demandé d'être plus précis avec Saint-Joseph. Il paraît qu'il faut être très précis avec Saint-Joseph. Et je lui avais dit, demande à Saint-Joseph que nous ayons un enfant vivant, que nous puissions tenir dans nos bras. Parce que nous avions déjà perdu pas mal de petits bébés et ses épreuves successives musées. Donc j'avais demandé à Bruno d'être très précis dans ses demandes. Il en est revenu et un mois plus tard, nous étions... Dans ma famille, en vacances, dans le lot, à Rocamadour, c'était un dimanche matin, et au moment où sonne l'angélus, je découvre que je suis enceinte. Alors là, ce n'était plus des signes du ciel, c'était des thromboscopes géants qui nous faisaient hurler « Magnificat » dans nos cœurs. Nous étions convaincus que cette fois-ci serait la bonne. Ce n'était pas possible qu'il y ait autant de réponses évidentes à nos supplications, et que ça reste vain. Notre joie était de courte durée puisque quelques jours plus tard, tout était terminé. Et là, j'en ai vraiment voulu au Seigneur, j'étais en colère. J'ai dit au Seigneur, maintenant, finis de jouer. C'est trop cruel de nous agiter des petits paquets cadeaux sous le nez pour nous les retirer. Vraiment, je voyais le Seigneur comme quelqu'un de cruel et j'ai décidé de bouder, tout simplement. Et puis, quelques jours plus tard, au moment de la... je crois, de l'Homélie ou pendant l'Évangile, je ne sais plus très bien. J'ai senti que le Seigneur me prenait un peu par la peau du cou pour me dire « Tu peux bouder, mais moi je suis là, je suis avec vous » . Alors c'est quelque chose de très mystérieux de sentir cette conversion, mais ça a été fondateur pour moi. Et cette émission s'appelle « Un beau jour » et pour moi, ça a été un beau jour parce que depuis, j'ai la conviction que notre Père du Ciel Nous aime qu'il veut le bonheur de ses enfants et que nos vicissitudes ne sont jamais vécues seules. Il est avec nous, il nous porte, il nous tient dans sa main. Donc, depuis ce jour, je crois que je n'en ai plus voulu au Seigneur. J'ai compris que le Seigneur souffrait avec nous, qu'il partageait. Il partageait tout, il l'a fait déjà sur la croix. Il est vainqueur du mal. Alors, il n'empêche pas la souffrance, il n'empêche pas les épreuves, mais il a gagné une bonne fois pour toutes. Et il nous l'a dit, je reste avec vous, je suis avec vous tous les jours de votre vie.

  • Anne-Françoise

    À ce moment-là, vous espériez encore avoir un enfant. À quel moment est-ce que vous avez renoncé ?

  • Inès Rouy

    Nous avons renoncé au bout de, je dirais, 12 ans de mariage, je crois, à peu près, quand les médecins qui nous suivaient en aprotechnologie nous ont dit « Bon, maintenant, on voit bien que ce n'est pas un petit caillou dans l'engrenage, c'est une poignée de gravier. Il y a trop de choses qui sont incompatibles. Il y a trop de choses qui ne vont pas. Il y a trop de problèmes. Là, on ne pourra plus aller plus loin. » Raisonablement, j'avais été traitée pour de l'endométriose. J'avais déjà subi deux opérations. Et puis, on découvrait d'autres choses qui ne fonctionnaient pas. Et on s'est dit, raisonnablement, on va arrêter et on arrête d'attendre. Alors, ça ne veut pas dire qu'on arrêtait d'espérer, mais en tout cas, on n'était plus tendu vers cette attente. Donc, ce renoncement a été très difficile, très douloureux. Au départ, pour moi, je me suis dit que c'était impossible de renoncer à ce rêve. Et puis, en fait, ce qui m'a consolée petit à petit... c'est de regarder en face cette béance dans notre vie, d'oser l'affronter et de me dire que rien ne viendrait combler ce manque-là. Je me souviens, c'est un ami prêtre qui m'avait dit, vous savez, nous en tant que prêtre, mais c'est le c'est valable pour les religieux, les religieuses, qui ont renoncé à être père et mère. Ils ont renoncé à avoir une famille, ils ont renoncé pour l'amour du Christ. Eh bien, ce manque... Il n'est pas comblé. Il ne faut pas croire que Jésus comble ce manque. Pas du tout. C'est un manque. Il faut le regarder tel quel. Et ça m'a beaucoup consolée parce que j'avais l'impression d'être effectivement de marcher sur un chemin, main dans la main avec Bruno, sur un chemin qui longeait un précipice, un gouffre. Alors, ça peut être inquiétant, un précipice, sauf que si on regarde le chemin et qu'on en voit l'horizon, l'horizon, c'est... c'est notre Père du ciel qui nous tend les bras et puis je marche encore une fois main dans la main avec mon mari donc ça a été une consolation ce qui ne veut pas dire que la souffrance n'existe plus mais bénéficie de grâces quand même sensibles quand on les demande avec foi et ça, ça m'a énormément soutenue

  • Anne-Françoise

    Et c'est peu de temps après que vous avez choisi de vous mettre au service de l'église, donc à Verdelet Est-ce que vous pouvez nous raconter ce choix ?

  • Inès Rouy

    Alors, ça faisait déjà quelques années que notre disponibilité, de fait, nous faisait penser que nous pouvions donner un peu de notre temps pour une mission, quelle qu'elle soit. Moi, je ne suis pas très aventurière. Assez vite, nous avons mis Fidesco de côté, parce que Fidesco implique de partir souvent loin. Et par ailleurs, nous nous disions que nous avions sans doute un moyen de servir. près de chez nous, à savoir en Gironde. Pourquoi Verdelay ? Alors Verdelay, nous avions fait un pèlerinage, il y a longtemps maintenant, de Bordeaux à Verdelay, en déposant comme intention le fait de voir notre famille s'agrandir. Et nous n'avons pas fait le retour tout de suite. J'avais fait mon petit chantage à la Sainte Vierge en lui disant, nous ferons le retour quand nous viendrons déposer un ex-voto pour vous dire merci. C'était du chantage, j'assume. Mais en 2019, après une année difficile, année de la mort de mon père, année de ma dernière fausse couche, Bruno m'a dit, écoute, on ne va pas reporter ce retour, ce pèlerinage de retour. Alors peut-être qu'on ne va pas poser d'ex voto, l'année a été difficile, mais est-ce qu'on n'a pas quand même plein de raisons de remercier le Seigneur ? J'ai trouvé ça très beau. J'étais peut-être un peu moins convaincue et paisible que lui, mais... Mais je savais qu'il avait raison et qu'il y avait plein de raisons pour lesquelles on pouvait dire merci au Seigneur. Et donc, nous avons décidé de faire ce pèlerinage de retour les 31 décembre et 1er janvier pour terminer l'année 2019 et commencer l'année 2020 avec le Seigneur et aussi avec un couple de chers amis très présents. Donc, ce retour de Verdelay a été l'occasion pour nous de nous intéresser. d'un peu plus près à ce sanctuaire que, par ailleurs, je connaissais bien depuis toute petite, puisque je passais mes vacances dans cette région. Je le connaissais partiellement, je n'en connaissais pas toute l'histoire. C'est un sanctuaire qui a plus de 900 ans. et qui est dédiée à Notre-Dame, consolatrice des affligés. Ça, c'est une chose que j'ai approfondie pendant les deux ans de notre mission. Mais à l'époque, je ne le savais pas tellement. Nous savions juste que l'hôtellerie du sanctuaire avait besoin d'être redynamisée. Donc, nous nous en sommes ouverts à un couple d'amis qui nous a dit « Mais vous savez que le recteur a l'intuition qu'il faut un couple pour s'occuper de l'hôtellerie. » Qu'à cela ne tienne, nous allons voir le recteur, que nous connaissions bien par ailleurs, puisqu'il y a eu... Il était notre curé autrefois dans le Médoc. Et puis, de fil en aiguille, en en parlant avec Mgr Jam, puis l'économe diocésain, les contours de notre mission se sont dessinés et nous avons commencé notre mission en 2021.

  • Anne-Françoise

    Et c'est cette année-là ou celle d'après que Philibert est arrivé ?

  • Inès Rouy

    Alors, Philibert s'est annoncé à la fin de notre première année de mission, dans des circonstances quand même pas banales. puisque c'était à l'avant-veille de notre 15e anniversaire de mariage. Notre anniversaire de mariage étant le 1er décembre. Il se trouve que le 16 novembre, nous étions en vacances dans le Gers, chez un oncle et une tante, qui nous suggèrent de passer à Boulor, qui n'est pas très loin. Nous connaissions Boulor l'un et l'autre, Bruno et moi, séparément, mais nous n'y étions jamais allés ensemble et nous décidons de faire un saut. de quelques minutes. Devant le cercueil de Claire de Castelbajac, j'ai l'intuition qu'il faut que je lui demande un miracle suffisamment percutant pour étayer son dossier de béatification qui semble ne pas tellement avancé. Et pour que ce soit suffisamment fort, je lui dis, Claire obtient que je sois enceinte d'ici la fin de l'année. 16 novembre. Il y avait du défi quand même. Il se trouve que... quinze jours plus tard, j'apprenais que j'étais enceinte. Alors, évidemment, nous nous sommes ouverts par la suite au postulateur de la cause de Claire de Castelbajac qui a estimé qu'on ne pouvait pas parler d'un miracle selon les critères de l'Église. C'est quand même très précis. Mais en revanche, une grâce obtenue par son intercession, sans doute, d'autant que après, j'ai relu la biographie de Claire de Castelbajac. et j'ai réalisé que sa propre mère l'avait eu à l'âge de 40 ans, mon âge au moment où j'attendais et où j'ai eu Philibert.

  • Anne-Françoise

    Et quelles émotions est-ce que vous avez traversées quand vous avez découvert que vous étiez enceinte, après toutes ces fausses couches ? Est-ce que vous y avez cru finalement ?

  • Inès Rouy

    Je dois dire qu'au départ, je n'étais pas tellement à la fête, c'est-à-dire que les premiers jours et les premières semaines, c'était du déjà vu et du déjà connu. Ce contraste entre la folle joie, l'espoir, l'angoisse, la terreur à l'idée de reperdre un bébé, ça a été vraiment des montagnes russes, d'autant qu'il y a eu quelques passages aux urgences qui nous ont alertés, évidemment. Donc non, les premières semaines, je dois dire qu'on n'était pas du tout sûrs que nous tiendrions un jour ce bébé dans nos bras. Et puis les jours ont passé, nous avons fini par... Passer le cap fatidique de la date à laquelle je perdais d'habitude mes bébés. Et petit à petit, l'espoir a pris le dessus. Mais je dois dire que pendant toute ma grossesse, j'ai eu peur. J'ai eu peur de ne jamais le voir, de ne jamais le tenir dans mes bras. Et à ce moment-là, c'est la prière du Notre Père qui m'a soutenue véritablement. Parce que le fait de dire « Donnez-nous aujourd'hui notre pain de ce jour » , c'était pour moi demander chaque jour la force pour aujourd'hui et demain. je redemanderai la force pour ce jour. Mais voilà, je ne demande pas au Seigneur qu'il me conforte jusqu'à la fin de ma grossesse. C'est chaque jour qu'il faut lui demander le pain pour aujourd'hui. Et ça a changé ma manière de demander à mon Père du Ciel.

  • Anne-Françoise

    Et le jour de la naissance, est-ce que vous voulez nous en dire quelques mots ?

  • Inès Rouy

    Je crois que c'est une journée que nous ne voulions pas voir s'achever. Je me souviens que... Voilà, Philibert est né à 13h30 ce 6 août, jour de la fête de la Transfiguration et jour aussi de la première fête de Saint-Dominique. Aujourd'hui, en fait, Saint-Dominique, le 8 août. Et d'ailleurs, c'est à cette date-là qu'aurait dû naître initialement Philibert. Il est arrivé avec deux jours d'avance. Pour moi, ça avait une résonance très particulière parce que mon père, qui est mort en 2019, s'appelait Dominique. Quand on veut voir des signes, on n'a qu'à ouvrir les yeux et on peut en voir beaucoup. En tout cas, je gardais ça dans mon cœur. Et finalement, Philibert est arrivé ce 6 août à 13h30. Et je me souviens qu'à 2h du matin... On se disait avec Bruno, on ne peut pas éteindre la lumière, on ne peut pas voir cette journée s'arrêter tellement on était heureux, éblouis, émerveillés, confondus de gratitude. Et cette gratitude qui dure encore et encore et encore. Trois ans après, on n'a pas fini de s'émerveiller.

  • Anne-Françoise

    Alors effectivement, aujourd'hui, il libère à trois ans. Comment est-ce que vous relisez votre histoire trois ans après ? Qu'est-ce que cette naissance a changé dans votre vie ? dans votre vie, dans votre relation à Dieu aussi ?

  • Inès Rouy

    Alors, la naissance de Philibert a tout changé. Je ne vais pas dire le contraire. Son arrivée a tout changé, a tout rééquilibré, ou plutôt déséquilibré, mais de manière très joyeuse, évidemment. C'est-à-dire que vous imaginez, au bout de 15 ans, après 15 ans de mariage, on prend des habitudes de petit couple, et puis on peut... On peut, et c'est normal, avoir une certaine routine à deux. On s'habitue à l'idée qu'on passera notre vie seulement tous les deux. Nous, c'était le cas depuis trois ans. Et puis Philibert arrive, donc ça renverse tout. Déjà, notre mission a été un petit peu mise à mal à Verdelay parce que moi, je ne valais plus grand-chose en tant que maîtresse de maison. Heureusement que Bruno était là pour faire les choses à ma place. Mais c'est vrai que la mission en tant que telle en a pris un petit coup. Donc déjà, ça nous a un petit peu bouleversés. Et puis évidemment, quel merveilleux bouleversement de voir ce petit garçon arriver dans nos vies. Ça change toutes les perspectives et ça déséquilibre aussi le couple. Donc ça, c'est à nous après de retrouver un équilibre, de repenser à toutes ces années où nous avons pris soin de notre couple et d'essayer de tendre à ça. Comme je le disais tout à l'heure, Philibert n'était pas une condition à notre bonheur et on a tôt fait de l'oublier. quand il se présente parce qu'on a l'impression qu'il nous comble après autant d'attentes. Mais c'est faire peser sur ses épaules beaucoup de choses dont il n'est absolument pas responsable. Notre propre bonheur, notre bonheur de couple et notre bonheur de famille. Ce n'est pas lui qui en est le garant.

  • Anne-Françoise

    Quel conseil est-ce que vous pourriez donner à un couple en espérance d'enfant qui peut-être n'arrive jamais ?

  • Inès Rouy

    Je me garderai de donner des conseils parce que, étant passée par là, je trouve que les conseils sont souvent peu valables. Combien de fois nous avons eu des conseils, avec toujours cette impression de rester sur le quai de la gare pendant que le TGV avance, démarre, on a envie de dire, aux autres couples, continuez sans nous, on va vous ralentir. Mais c'est vrai que nombre de fois, des couples qui étaient dans la même situation que nous, nous ont annoncé, ça y est, c'est bon, après 5, 10... 15 ans d'attente, j'en sais rien mais les conseils dans ces cas-là c'est pire que tout parce que ce qui marche pour les uns ne marche pas pour les autres chaque histoire de couple est unique la seule chose qui n'est pas un conseil qui est au mieux une suggestion c'est peut-être de relire le psaume 54 dans les moments de souffrance ça m'a aidée parce que ça m'a permis de me... à la fois de me sentir rejointe et en même temps de me décentrer en réalisant que ces paroles écrites il y a quand même pas mal d'années, dites il y a pas mal d'années, étaient tout à fait universelles. C'est-à-dire qu'elles parlent de souffrances qu'on peut tous connaître, qu'on peut tous s'appliquer, de cris vers le ciel qui sont les nôtres. Donc c'est tout à fait actuel et contemporain ces psaumes. dans le psaume 54. « Décharge ton fardeau sur le Seigneur, il prendra soin de toi » . C'est vraiment ce que j'ai ressenti et ce que j'essaie d'appliquer encore aujourd'hui. Ce n'est pas toujours facile de se décharger et d'avoir la conviction que le Seigneur est notre Père, qu'il prend soin de nous, alors pas selon nos propres désirs, aussi légitimes soient-ils, pas toujours en tout cas, mais sa providence agit continuellement. Et après, le Seigneur, non seulement il prend soin de nous, mais il nous laisse entière liberté. Donc que fait-on face à cette providence agissante ? Eh bien là, on est laissé à notre discernement et c'est à la fois beau, à la fois difficile, à la fois exigeant. Mais en tout cas, quoi qu'il en soit, je suis convaincue que le Seigneur prend vraiment soin de nous comme un père. Donc, pas de conseil, mais s'il nous arrive d'en douter, demandons à l'Esprit-Saint. De toute façon, je crois aussi, c'est quelque chose que j'ai réalisé pendant toutes ces années, c'est que notre croix pendant 15 ans, ça a été cette attente. Ça aurait pu être une autre croix, c'était celle-là. On ne l'aurait pas échangée avec celle du voisin, parce que le voisin... à d'autres croix, à une autre croix. Ça peut être la solitude, ça peut être la maladie, le handicap, pas de travail, pas de perspective, dépression, enfin j'en sais rien, tragédie, que sais-je. Donc notre croix, on ne l'échangerait pas avec celle du voisin, ça c'est sûr. Je prends l'exemple du célibat. Nous pensions souvent à nos amis célibataires quand on... Voilà, pendant cette période d'attente, alors on y pense encore, l'arrivée de Philibert, heureusement, n'a pas gommé ça. Mais nous mesurions aussi à quel point nous avions la chance de vivre les choses à deux. Donc, il ne s'agit pas de relativiser sa propre épreuve, ce n'est pas ça. C'est se dire, regardons aussi ce que nous avons. Et ce que nous avions pendant cette attente, c'était la grâce d'être à deux, d'être soutenu par le sacrement du mariage. de pouvoir puiser dedans, de nous consoler mutuellement, de nous aimer tout simplement. Et voilà, chaque croix est taillée pour... C'est un peu facile, je crois que ceux qui nous écoutent se diront que c'est peut-être un petit peu facile, s'ils en bavent particulièrement en ce moment. Mais dans le fond, est-ce qu'on aimerait échanger notre croix contre celle du voisin ? Je ne suis pas sûre. Je ne suis pas sûre, et puis de toute façon, ce n'est pas souhaitable. Et une autre... Un autre écueil, me semble-t-il, c'est vouloir répondre à d'éventuels pourquoi. J'ai été un petit peu surprise quand nous avons annoncé la future naissance de Philibert. Alors bien sûr, beaucoup se sont réjouis et certains ont tout de suite voulu apporter une réponse. Alors on n'en cherchait pas, nous, de réponse, mais nous disant c'est parce que vous avez lâché du lest, c'est parce que vous n'y pensiez plus. C'est parce que vous êtes venu servir à Verdelet, c'est parce que vous étiez détendu, j'en sais rien. J'avoue qu'on ne s'est pas du tout posé ces questions, on n'aura pas la réponse. On ne peut que constater que notre prière à Claire de Castelmagiac a été suivie de la naissance de Philibert, c'est un constat, rien d'autre. Mais voilà, pas de pourquoi, parce qu'à ce moment-là, se tape la tête contre les murs, comme dans l'épreuve, quoi, nous. Il n'y a aucune raison. On n'a pas plus de mérite que d'autres. Je pense très souvent au roi Baudouin et à la reine Fabiola qui avaient une pression autrement supérieure à la nôtre dans leur attente. La reine Fabiola a connu aussi des fausses couches successives et puis ô combien cruelles parce qu'elles étaient connues. Et pour autant, ils n'ont pas été exaucés de ce point de vue-là. Voilà, c'est mystérieux. Renonçons à chercher des réponses à c'est pourquoi. Ça ne sert à rien. Ça ne sert à rien. Je repense aussi à la Sainte Vierge, quand elle a reçu l'annonce de l'ange Gabriel, elle n'a pas demandé pourquoi, elle a demandé comment est-ce que ça va se faire. Essayons peut-être de suivre ce modèle.

  • Comment justement, dans toutes ces souffrances, comment croire et rester attentif à l'action de Dieu dans nos vies ?

  • Anne-Françoise

    La première chose, je crois, c'est de le demander à l'Esprit-Saint. Et je repense à ces prières de demande. Et finalement, dans l'Évangile, Jésus nous dit « Celui qui demandera l'Esprit Saint, il sera exaucé » . Jésus dit que notre Père du Ciel veut nous donner de bonnes choses, qu'il ne nous donnera jamais de mauvaises choses. Et celui qui demande l'Esprit Saint, il sera exaucé. Donc déjà, si on demande l'Esprit Saint, on est sûr d'obtenir beaucoup, y compris dans notre foi, dans notre espérance et dans la charité. L'autre chose qui me semble importante et à laquelle on tend, on essaie de tendre, c'est de ne pas oublier notre horizon. Je trouve que quand nous étions seulement deux, c'était relativement facile de se dire que notre horizon, c'était le ciel, parce que nous n'avions pas d'autres soucis que de nous y conduire mutuellement. Je trouve que c'est un peu plus difficile depuis que Philibert est né. Alors pardon, je ne veux pas faire l'enfant gâté, mais je dis juste que c'est une difficulté, en tout cas une attention à avoir, c'est de ne pas faire trop baisser notre horizon à des choses terre à terre. Alors c'est un petit peu normal, parce que nous sommes affairés par des préoccupations toutes terrestres. Nourrir son enfant, le vêtir. Le faire croître, tout ça, c'est très terre à terre. Mais pour quel but ? Finalement, c'est pour le ciel, comme pour nous-mêmes. Et je me souviens quand Philibert était encore tout petit petit, Bruno le confiait dans notre prière familiale en disant « Seigneur, que nous le conduisions à toi » . Antérieurement, mon cœur de mère bondissait. « Attends, pas trop vite, pas trop vite. Le Seigneur a déjà six de nos enfants auprès de lui, ça va » . Mais en fait, il a complètement raison. Notre but de parents, c'est de conduire ce petit enfant que le Seigneur nous a confié à lui, qu'il soit saint. Donc ça, c'est une chose primordiale. Mais quelquefois, on peut être un peu pris par les préoccupations terrestres et ne pas avoir toujours ça en tête. En tout cas, peut-être un peu moins que quand nous étions seulement, entre guillemets, un couple. Est-ce qu'il y a un livre qui vous a aidé pendant cette période d'attente ?

  • Inès Rouy

    Alors, je dois dire que la littérature consacrée à la famille, aux épreuves rencontrées en famille, etc., à toutes ces questions à la fois de bioéthique, familiale, de procréation. Cette littérature est très abondante. Moi, il y a un livre qui m'a aidée, c'est « Attendre et espérer, itinéraire d'un couple sans enfant » d'Olivier Matona aux éditions de l'Emmanuel. Déjà le titre, Attendre et espérer, ça rejoint tout à fait ce que nous avons vécu, l'attente et l'espoir. Au bout de douze ans, nous n'attendions plus, mais nous espérions toujours. Voilà, donc c'est ce livre principalement qui m'a marquée. Il y en a énormément d'autres. Moi, je lis beaucoup, donc je ne saurais pas vous dire précisément. Après, il y a les psaumes, comme je vous disais tout à l'heure. Les psaumes qui m'ont soutenue parce que j'ai fait mienne ces paroles. qui quelquefois sont assez violentes, qui sont des cris du cœur. Et je les ai fait miennes très souvent pendant cette attente.

  • Anne-Françoise

    Il y a une prière particulièrement qui vous a accompagnée ?

  • Inès Rouy

    Oui, la prière du Magnificat. Alors, le Magnificat, nous avions pris l'habitude de la dire en couple grâce aux équipes Notre-Dame, dont nous avons fait partie pendant plusieurs années, jeunes mariées. Donc, nous connaissions par cœur cette prière. Et je rêvais du jour où ce Magnificat se concrétiserait pour moi. Et évidemment, ça a été mon cri du cœur quand j'ai tenu Philibert dans mes bras, ce magnifique acte. Donc ça, c'est vraiment, oui, je crois, la prière la plus emblématique pour moi, en tout cas.

  • Anne-Françoise

    Alors, si vous aviez le Christ en face de vous aujourd'hui, que lui diriez-vous en lien avec votre histoire ?

  • Inès Rouy

    Je crois que je lui dirais, Seigneur, je ne suis pas digne de vous recevoir, mais dites seulement une parole et je serai guéri. J'espère... Pouvoir dire que quelles que soient les épreuves que je rencontrerai dans la vie, j'aurai cette conviction que le Seigneur peut tout, qu'il est tout-puissant, qu'il veut mon bonheur. Moi, j'en suis évidemment indigne. Lui le sait, encore plus que moi, mais il peut tout.

  • Anne-Françoise

    Merci beaucoup Inès.

  • Inès Rouy

    Merci Anne-Françoise, c'était un plaisir de discuter avec vous.

  • Anne-Françoise

    Merci pour votre écoute et merci d'être toujours plus nombreux à écouter Un beau jour, à vous abonner, à partager cet épisode sur les réseaux sociaux et à mettre 5 étoiles et des commentaires sur Apple Podcasts et Spotify. Pour découvrir d'autres témoignages de feu, vous pouvez bien sûr écouter les autres épisodes du podcast, mais aussi lire chaque semaine la rencontre avec un témoin touché par la grâce dans le magazine Famille Chrétienne. Et enfin, n'hésitez pas à découvrir les autres podcasts de Famille Chrétienne, Tous Saints, Maman Prie, Sexo, Sacrée Histoire et d'autres encore. Merci et au prochain premier lundi du mois pour un nouvel épisode.

Description

Inès Rouy, avec son mari Bruno, a vécu l'épreuve de l'attente d'un enfant qui n'arrive pas... pendant 15 longues années. Une période faite d'espoir fou et de déceptions cruelles, marquée par six fausses couches successives, mais vécue, malgré tout, dans la foi en la bonté de Dieu. Puis, un beau jour, alors qu'ils avaient mis de côté ce projet d'avoir un enfant et décidé de se mettre au service de l'Eglise au sanctuaire Notre-Dame de Verdelais à proximité de Bordeaux, leur fils Philibert est arrivé, miraculeusement. Un chemin d'abandon et de foi qu'elle raconte comme un témoignage de l'action de Dieu dans nos vies.


P.S : joyeux anniversaire à Philibert :)

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Ce podcast est réalisé par Famille Chrétienne


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Transcription

  • Anne-Françoise

    Bonjour, je m'appelle Anne-Françoise et vous écoutez Un beau jour, le podcast qui donne la parole à des croyants dont la vie et la foi ont été changés à jamais par un événement imprévu. Et dans cet épisode, je reçois Inès qui, avec son mari Bruno, a vécu l'épreuve de l'attente d'un enfant qui n'arrive pas pendant 15 ans. Une période faite d'espoir et de déception, marquée par six fausses couches successives. mais toujours vécu dans la foi, en la bonté de Dieu. Puis, un beau jour, alors qu'ils avaient mis de côté ce projet d'avoir un enfant et décidé de se mettre au service de l'église au sanctuaire Notre-Dame de Verdelet, à proximité de Bordeaux, leur fils Philibert est arrivé. Un chemin d'abandon et de foi qu'ils racontent comme un témoignage de l'action de Dieu dans nos vies. Bonjour Inès.

  • Inès Rouy

    Bonjour Anne-Françoise.

  • Anne-Françoise

    Merci pour votre présence au micro d'un beau jour. Pour commencer, pouvez-vous nous présenter l'objet symbolique que vous avez apporté ?

  • Inès Rouy

    L'objet que j'ai choisi est une croix de berceau qui nous a été offerte par ma mère au moment de la naissance de Philibert. Cette croix de berceau nous a beaucoup touché parce que ma mère l'avait acheté des années auparavant. Elle l'avait conservée pour le jour où. Sans nous le dire. J'ai été frappée par cette foi, par la persévérance de sa prière. Et j'ai réalisé à ce moment-là que nous n'étions pas seules. Bien sûr, il y a eu cette croix, mais il y a eu aussi toutes ces personnes qui se sont manifestées au moment où nous avons annoncé la prochaine venue de notre bébé et qui nous ont dit pendant toutes ces années, nous prions pour vous. Ces prières fidèles, constantes. nous ont touchés, nous ont fait réaliser que non seulement le Seigneur ne nous avait jamais fait défaut, mais qu'en plus il avait placé sur notre route des personnes qui persévéraient elles aussi dans la foi, dans la charité, des personnes connues de notre entourage ou inconnues, nous avons entendu parler bien plus tard. Cela nous a fait penser que nous n'étions jamais seuls. Et cette prière d'intercession nous a semblé primordiale.

  • Anne-Françoise

    Merci beaucoup Inès. Alors on va revenir sur votre histoire. Peut-être que d'abord vous pouvez nous raconter comment est-ce que vous avez rencontré Bruno.

  • Inès Rouy

    Oui, alors j'ai rencontré Bruno en 2004. Il arrivait de Bourgogne, il venait faire du vin dans le Médoc. Moi-même j'étais bordelaise, étudiante. Et nous nous sommes connus grâce au groupe Mission des Dominicains, groupe fait pour les jeunes professionnels. Donc notre histoire a d'abord été une histoire d'amitié approfondie, creusée, et qui nous a conduit à finalement nous marier en 2007.

  • Anne-Françoise

    Vous avez rapidement désiré un enfant. Comment est-ce que l'inquiétude de ne pas pouvoir en avoir s'est manifestée ?

  • Inès Rouy

    Compte tenu de mon tempérament impatient, du grand désir que nous avions de voir notre famille s'agrandir, l'attente à tout de suite était... Difficile. Alors, à relativiser, parce que je commençais à m'inquiéter deux mois après notre mariage, et je n'étais pas au bout de mes peines, mais ça a été difficile parce que ce désir d'avoir des enfants est non seulement légitime, mais en plus c'est un des piliers du mariage chrétien. Et puis on se dit, le Seigneur le veut, lui aussi. Il bénit normalement notre union en nous accordant des enfants. Donc, ça peut être vécu comme une injustice. Et puis, une inquiétude, évidemment, parce qu'au départ, on ne sait pas trop pourquoi. On rencontre ces difficultés, il faut creuser. Et c'est difficile. C'est difficile de regarder la réalité en face, de s'exposer à des réponses de la médecine qui ne vont pas dans le sens de notre espoir, évidemment. Et puis, d'entreprendre des démarches pesantes, éprouvantes. dont on ne sait pas si elles aboutiront.

  • Anne-Françoise

    Alors comment est-ce que vous avez été accompagnée justement médicalement ?

  • Inès Rouy

    Nous avons fait le choix dès le départ de faire confiance à la Napro-Technologie qui faisait ses débuts en France à ce moment-là. Donc c'était, je pense, en 2009 ou 2010. Et à cette époque-là, il y avait seulement un médecin qui exerçait la Napro-Technologie à Aix-en-Provence, à la Clinique de l'Étoile. Et nous avons fait ce choix-là parce que les alternatives qu'on nous proposait ne nous allaient pas, ne nous convenaient pas. La naprotechnologie consiste à restaurer la fertilité en en cherchant d'abord les raisons. C'est-à-dire qu'au lieu de mettre, si je puis dire ainsi, un pansement sur une jambe de bois, on va chercher vraiment les raisons de l'infertilité masculine et féminine pour y remédier. Il s'agit de méthodes naturelles, mais on n'agit pas avec des tisanes et des plantes. Quelquefois, il peut s'agir de chirurgie ou autre, mais on ne se substitue jamais au couple. Et pour nous, c'était très important de vivre ça en couple.

  • Anne-Françoise

    Alors justement, comment est-ce que vous avez réagi l'un et l'autre dans cette période d'attente ? Qu'est-ce qui s'est joué dans votre couple ?

  • Inès Rouy

    Nous avons réagi nécessairement différemment en tant qu'hommes et en tant que femmes. Comme je le disais tout à l'heure, moi je suis d'un naturel très impatient. Bruno, lui, est peut-être plus placide, plus patient et peut-être d'humeur plus égale. Ce que nous avons trouvé merveilleux, c'était de pouvoir se soutenir l'un l'autre, la plupart du temps, la majorité du temps. Quand l'un flanchait, l'autre était là pour l'écouter, pour le soutenir. Et tout ça, c'est joué sur des années. Donc, nous avons évolué aussi. Nous avons appris à prendre notre mal en patience, à se relever après les épreuves des fausses couches. Ce n'est jamais gagné, évidemment. Ce n'est pas parce qu'une fois on triomphe de sa propre tristesse qu'on en triomphera toujours et aussi facilement. Mais c'est vrai que le fait de pouvoir s'appuyer l'un sur l'autre, c'est une aide inestimable. Et nous en avions vraiment conscience.

  • Anne-Françoise

    Et vous étiez d'accord rapidement sur ce que vous vouliez faire, justement, d'un point de vue médical aussi ?

  • Inès Rouy

    Nous étions d'accord, mais je dois dire qu'un jour, j'ai été confrontée à la tentation de contourner ce que l'Église nous proposait. Un jour, un médecin m'a dit, c'était avant qu'on connaisse la naprotechnologie, et m'a dit « maintenant, je ne vois pas d'autre alternative que la fécondation in vitro » . Quand elle m'a dit ça, j'ai été désemparée, je me suis sentie... découragée et je me suis demandé comment je pouvais contourner ce que l'Église préconisait. Donc j'ai regardé le catéchisme de l'Église catholique, je l'ai disséqué et puis je me suis rendu compte que malheureusement je ne pouvais pas lui faire dire autre chose que ce qu'il disait. Bruno n'était pas là à ce moment-là, mais il m'a dit au téléphone « Faisons confiance et obéissons à l'Église. » Et puis... on comprendra, on se fera expliquer. On a suffisamment de prêtres dans notre entourage pour nous accompagner, nous expliquer pour que notre cœur et notre raison fonctionnent ensemble. Mais ce principe de l'obéissance, je l'ai trouvé très important, je l'ai trouvé apaisant et je l'ai trouvé libérateur. J'ai tout de suite compris que l'Église ne nous propose pas un chemin de contrainte, de punition, de restriction. Ce qu'elle nous propose, c'est exigeant, certes, mais en fait, c'est un vrai chemin de bonheur et de liberté. Finalement, l'Église ne propose pas autre chose que ce que l'Évangile nous enseigne. En tout cas, l'Église, me semble-t-il, marche dans la droite ligne de ce que Jésus nous dit dans l'Évangile. Donc, voilà, on a pris ce parti, on a fait ce choix de faire confiance, d'obéir. Obéir, ça ne veut pas dire être soumis. Ce n'est pas de la soumission, de la servilité. Je crois que l'obéissance, c'est de la confiance. Rien ne nous empêche de faire fonctionner notre intelligence pour comprendre pourquoi il nous est demandé ceci ou cela. Alors bien sûr, c'est difficile, mais encore une fois, c'est ce qui nous a rendus vraiment heureux.

  • Qu'est-ce qui a été le plus difficile pour vous,

  • Anne-Françoise

    justement, dans ces 15 ans d'attente, peut-être dans vos relations aux autres ou à vous-même ?

  • Inès Rouy

    Beaucoup de choses sont difficiles. Les annonces, évidemment. Combien de couples qui sont passés par là nous ont confiés, quand on était aussi dans cette situation, que c'était le plus difficile pour eux. Ces annonces qui vous vrillent le cœur, la vision des ventres qui s'arrondissent autour de soi. En ce qui me concerne, les baptêmes, c'était souvent le plus délicat. à vivre, parce que c'était des jours mêlés de joie et de peine, avec la culpabilité en plus de ressentir de l'envie. Ce sentiment qui s'insinue comme un poison, qui peut devenir de la jalousie. Et j'essayais de lutter contre ça. Mais pour autant, je n'empêchais pas mes larmes de couler. Alors c'est toujours très difficile, parce qu'on n'est pas tout seul. Et essayer de ne pas trop faire peser ça sur eux. Sur nos familles respectives, j'avoue que je n'ai pas toujours été à la hauteur, mais je savais aussi pouvoir compter sur l'indulgence de chaque membre de notre famille. Donc ça, ça a été difficile. Et puis le fait de voir les années passer, on ne se voit pas vieillir quand on a... Quand on n'a pas d'enfant, le temps passe différemment parce qu'il n'est pas marqué par des événements qui ponctuent une vie de famille. Voilà, baptême, première communion, anniversaire. Donc on a l'impression de vieillir un petit peu différemment.

  • Anne-Françoise

    Quand on s'est parlé la première fois, vous disiez cependant que vous n'avez pas attendu la naissance de votre fils pour être heureux. Qu'est-ce qui vous a rendu heureux ? Qu'est-ce qui vous a aidé à trouver de la joie dans cette période ?

  • Inès Rouy

    Beaucoup de choses nous ont rendu heureux. heureux déjà le fait d'être tous les deux, de pouvoir apprendre à nous aimer parce que nous avons passé 15 ans seuls, disponibles entièrement l'un pour l'autre alors bien sûr ce n'était pas choisi, c'était par un peu la force des choses que nous n'étions que deux et pourtant nous mesurions la chance d'avoir cette grande disponibilité l'un pour l'autre, de pouvoir prendre soin de notre couple et je pense que Il en reste évidemment quelque chose aujourd'hui. Je suis convaincue par ailleurs que la naissance de Philibert, son arrivée n'était pas une condition à notre bonheur. Nous étions très heureux quand Philibert est arrivé. Qu'est-ce qui nous a rendus heureux ? C'est aussi tout simplement de voir d'autres enfants arriver dans d'autres foyers. Comme je le disais tout à l'heure, c'est une joie mêlée de chagrin. pour soi-même, d'envie, mais quel bonheur nous avons eu de nous voir confier aussi le rôle de parrain et de marraine, de pouvoir exercer une forme de paternité et de maternité un peu différente. Une autre chose qui m'a rendue heureuse quelques années après notre mariage, c'est le jour où j'ai réalisé que j'aimais Bruno pour lui-même et pas pour le père potentiel et hypothétique qu'il pourrait être. C'est-à-dire que Je crois que le jour de mon mariage, j'avais l'impression d'avoir coché un peu toutes les cases. Nous étions mariés, nous aurions des enfants, le conte de fées. Et puis finalement, le conte de fées, inabouti, m'a permis d'ouvrir les yeux et d'ouvrir les yeux en regardant Bruno tel qu'il était. Ça, ça a été une source de joie parce que je me confrontais à une réalité qui était différente de celle que j'imaginais, mais qui était bien plus riche finalement et plus vraie surtout.

  • Anne-Françoise

    Qu'est-ce qui s'est joué dans votre relation à Dieu à ce moment-là ? Est-ce que vous lui en avez voulu ?

  • Inès Rouy

    Je dois reconnaître que j'en ai voulu à Dieu. J'en ai voulu à notre père de ne pas faire de nous des parents, de ne pas nous accorder cette joie d'être parent. Je repense à un moment spécial il y a quelques années. En plein été, Bruno était parti marcher à Cotignac. Il a pris cette habitude il y a maintenant pas mal d'années de faire ce pèlerinage des pères de famille de Cotignac. Et cette année-là, je lui avais demandé d'être plus précis avec Saint-Joseph. Il paraît qu'il faut être très précis avec Saint-Joseph. Et je lui avais dit, demande à Saint-Joseph que nous ayons un enfant vivant, que nous puissions tenir dans nos bras. Parce que nous avions déjà perdu pas mal de petits bébés et ses épreuves successives musées. Donc j'avais demandé à Bruno d'être très précis dans ses demandes. Il en est revenu et un mois plus tard, nous étions... Dans ma famille, en vacances, dans le lot, à Rocamadour, c'était un dimanche matin, et au moment où sonne l'angélus, je découvre que je suis enceinte. Alors là, ce n'était plus des signes du ciel, c'était des thromboscopes géants qui nous faisaient hurler « Magnificat » dans nos cœurs. Nous étions convaincus que cette fois-ci serait la bonne. Ce n'était pas possible qu'il y ait autant de réponses évidentes à nos supplications, et que ça reste vain. Notre joie était de courte durée puisque quelques jours plus tard, tout était terminé. Et là, j'en ai vraiment voulu au Seigneur, j'étais en colère. J'ai dit au Seigneur, maintenant, finis de jouer. C'est trop cruel de nous agiter des petits paquets cadeaux sous le nez pour nous les retirer. Vraiment, je voyais le Seigneur comme quelqu'un de cruel et j'ai décidé de bouder, tout simplement. Et puis, quelques jours plus tard, au moment de la... je crois, de l'Homélie ou pendant l'Évangile, je ne sais plus très bien. J'ai senti que le Seigneur me prenait un peu par la peau du cou pour me dire « Tu peux bouder, mais moi je suis là, je suis avec vous » . Alors c'est quelque chose de très mystérieux de sentir cette conversion, mais ça a été fondateur pour moi. Et cette émission s'appelle « Un beau jour » et pour moi, ça a été un beau jour parce que depuis, j'ai la conviction que notre Père du Ciel Nous aime qu'il veut le bonheur de ses enfants et que nos vicissitudes ne sont jamais vécues seules. Il est avec nous, il nous porte, il nous tient dans sa main. Donc, depuis ce jour, je crois que je n'en ai plus voulu au Seigneur. J'ai compris que le Seigneur souffrait avec nous, qu'il partageait. Il partageait tout, il l'a fait déjà sur la croix. Il est vainqueur du mal. Alors, il n'empêche pas la souffrance, il n'empêche pas les épreuves, mais il a gagné une bonne fois pour toutes. Et il nous l'a dit, je reste avec vous, je suis avec vous tous les jours de votre vie.

  • Anne-Françoise

    À ce moment-là, vous espériez encore avoir un enfant. À quel moment est-ce que vous avez renoncé ?

  • Inès Rouy

    Nous avons renoncé au bout de, je dirais, 12 ans de mariage, je crois, à peu près, quand les médecins qui nous suivaient en aprotechnologie nous ont dit « Bon, maintenant, on voit bien que ce n'est pas un petit caillou dans l'engrenage, c'est une poignée de gravier. Il y a trop de choses qui sont incompatibles. Il y a trop de choses qui ne vont pas. Il y a trop de problèmes. Là, on ne pourra plus aller plus loin. » Raisonablement, j'avais été traitée pour de l'endométriose. J'avais déjà subi deux opérations. Et puis, on découvrait d'autres choses qui ne fonctionnaient pas. Et on s'est dit, raisonnablement, on va arrêter et on arrête d'attendre. Alors, ça ne veut pas dire qu'on arrêtait d'espérer, mais en tout cas, on n'était plus tendu vers cette attente. Donc, ce renoncement a été très difficile, très douloureux. Au départ, pour moi, je me suis dit que c'était impossible de renoncer à ce rêve. Et puis, en fait, ce qui m'a consolée petit à petit... c'est de regarder en face cette béance dans notre vie, d'oser l'affronter et de me dire que rien ne viendrait combler ce manque-là. Je me souviens, c'est un ami prêtre qui m'avait dit, vous savez, nous en tant que prêtre, mais c'est le c'est valable pour les religieux, les religieuses, qui ont renoncé à être père et mère. Ils ont renoncé à avoir une famille, ils ont renoncé pour l'amour du Christ. Eh bien, ce manque... Il n'est pas comblé. Il ne faut pas croire que Jésus comble ce manque. Pas du tout. C'est un manque. Il faut le regarder tel quel. Et ça m'a beaucoup consolée parce que j'avais l'impression d'être effectivement de marcher sur un chemin, main dans la main avec Bruno, sur un chemin qui longeait un précipice, un gouffre. Alors, ça peut être inquiétant, un précipice, sauf que si on regarde le chemin et qu'on en voit l'horizon, l'horizon, c'est... c'est notre Père du ciel qui nous tend les bras et puis je marche encore une fois main dans la main avec mon mari donc ça a été une consolation ce qui ne veut pas dire que la souffrance n'existe plus mais bénéficie de grâces quand même sensibles quand on les demande avec foi et ça, ça m'a énormément soutenue

  • Anne-Françoise

    Et c'est peu de temps après que vous avez choisi de vous mettre au service de l'église, donc à Verdelet Est-ce que vous pouvez nous raconter ce choix ?

  • Inès Rouy

    Alors, ça faisait déjà quelques années que notre disponibilité, de fait, nous faisait penser que nous pouvions donner un peu de notre temps pour une mission, quelle qu'elle soit. Moi, je ne suis pas très aventurière. Assez vite, nous avons mis Fidesco de côté, parce que Fidesco implique de partir souvent loin. Et par ailleurs, nous nous disions que nous avions sans doute un moyen de servir. près de chez nous, à savoir en Gironde. Pourquoi Verdelay ? Alors Verdelay, nous avions fait un pèlerinage, il y a longtemps maintenant, de Bordeaux à Verdelay, en déposant comme intention le fait de voir notre famille s'agrandir. Et nous n'avons pas fait le retour tout de suite. J'avais fait mon petit chantage à la Sainte Vierge en lui disant, nous ferons le retour quand nous viendrons déposer un ex-voto pour vous dire merci. C'était du chantage, j'assume. Mais en 2019, après une année difficile, année de la mort de mon père, année de ma dernière fausse couche, Bruno m'a dit, écoute, on ne va pas reporter ce retour, ce pèlerinage de retour. Alors peut-être qu'on ne va pas poser d'ex voto, l'année a été difficile, mais est-ce qu'on n'a pas quand même plein de raisons de remercier le Seigneur ? J'ai trouvé ça très beau. J'étais peut-être un peu moins convaincue et paisible que lui, mais... Mais je savais qu'il avait raison et qu'il y avait plein de raisons pour lesquelles on pouvait dire merci au Seigneur. Et donc, nous avons décidé de faire ce pèlerinage de retour les 31 décembre et 1er janvier pour terminer l'année 2019 et commencer l'année 2020 avec le Seigneur et aussi avec un couple de chers amis très présents. Donc, ce retour de Verdelay a été l'occasion pour nous de nous intéresser. d'un peu plus près à ce sanctuaire que, par ailleurs, je connaissais bien depuis toute petite, puisque je passais mes vacances dans cette région. Je le connaissais partiellement, je n'en connaissais pas toute l'histoire. C'est un sanctuaire qui a plus de 900 ans. et qui est dédiée à Notre-Dame, consolatrice des affligés. Ça, c'est une chose que j'ai approfondie pendant les deux ans de notre mission. Mais à l'époque, je ne le savais pas tellement. Nous savions juste que l'hôtellerie du sanctuaire avait besoin d'être redynamisée. Donc, nous nous en sommes ouverts à un couple d'amis qui nous a dit « Mais vous savez que le recteur a l'intuition qu'il faut un couple pour s'occuper de l'hôtellerie. » Qu'à cela ne tienne, nous allons voir le recteur, que nous connaissions bien par ailleurs, puisqu'il y a eu... Il était notre curé autrefois dans le Médoc. Et puis, de fil en aiguille, en en parlant avec Mgr Jam, puis l'économe diocésain, les contours de notre mission se sont dessinés et nous avons commencé notre mission en 2021.

  • Anne-Françoise

    Et c'est cette année-là ou celle d'après que Philibert est arrivé ?

  • Inès Rouy

    Alors, Philibert s'est annoncé à la fin de notre première année de mission, dans des circonstances quand même pas banales. puisque c'était à l'avant-veille de notre 15e anniversaire de mariage. Notre anniversaire de mariage étant le 1er décembre. Il se trouve que le 16 novembre, nous étions en vacances dans le Gers, chez un oncle et une tante, qui nous suggèrent de passer à Boulor, qui n'est pas très loin. Nous connaissions Boulor l'un et l'autre, Bruno et moi, séparément, mais nous n'y étions jamais allés ensemble et nous décidons de faire un saut. de quelques minutes. Devant le cercueil de Claire de Castelbajac, j'ai l'intuition qu'il faut que je lui demande un miracle suffisamment percutant pour étayer son dossier de béatification qui semble ne pas tellement avancé. Et pour que ce soit suffisamment fort, je lui dis, Claire obtient que je sois enceinte d'ici la fin de l'année. 16 novembre. Il y avait du défi quand même. Il se trouve que... quinze jours plus tard, j'apprenais que j'étais enceinte. Alors, évidemment, nous nous sommes ouverts par la suite au postulateur de la cause de Claire de Castelbajac qui a estimé qu'on ne pouvait pas parler d'un miracle selon les critères de l'Église. C'est quand même très précis. Mais en revanche, une grâce obtenue par son intercession, sans doute, d'autant que après, j'ai relu la biographie de Claire de Castelbajac. et j'ai réalisé que sa propre mère l'avait eu à l'âge de 40 ans, mon âge au moment où j'attendais et où j'ai eu Philibert.

  • Anne-Françoise

    Et quelles émotions est-ce que vous avez traversées quand vous avez découvert que vous étiez enceinte, après toutes ces fausses couches ? Est-ce que vous y avez cru finalement ?

  • Inès Rouy

    Je dois dire qu'au départ, je n'étais pas tellement à la fête, c'est-à-dire que les premiers jours et les premières semaines, c'était du déjà vu et du déjà connu. Ce contraste entre la folle joie, l'espoir, l'angoisse, la terreur à l'idée de reperdre un bébé, ça a été vraiment des montagnes russes, d'autant qu'il y a eu quelques passages aux urgences qui nous ont alertés, évidemment. Donc non, les premières semaines, je dois dire qu'on n'était pas du tout sûrs que nous tiendrions un jour ce bébé dans nos bras. Et puis les jours ont passé, nous avons fini par... Passer le cap fatidique de la date à laquelle je perdais d'habitude mes bébés. Et petit à petit, l'espoir a pris le dessus. Mais je dois dire que pendant toute ma grossesse, j'ai eu peur. J'ai eu peur de ne jamais le voir, de ne jamais le tenir dans mes bras. Et à ce moment-là, c'est la prière du Notre Père qui m'a soutenue véritablement. Parce que le fait de dire « Donnez-nous aujourd'hui notre pain de ce jour » , c'était pour moi demander chaque jour la force pour aujourd'hui et demain. je redemanderai la force pour ce jour. Mais voilà, je ne demande pas au Seigneur qu'il me conforte jusqu'à la fin de ma grossesse. C'est chaque jour qu'il faut lui demander le pain pour aujourd'hui. Et ça a changé ma manière de demander à mon Père du Ciel.

  • Anne-Françoise

    Et le jour de la naissance, est-ce que vous voulez nous en dire quelques mots ?

  • Inès Rouy

    Je crois que c'est une journée que nous ne voulions pas voir s'achever. Je me souviens que... Voilà, Philibert est né à 13h30 ce 6 août, jour de la fête de la Transfiguration et jour aussi de la première fête de Saint-Dominique. Aujourd'hui, en fait, Saint-Dominique, le 8 août. Et d'ailleurs, c'est à cette date-là qu'aurait dû naître initialement Philibert. Il est arrivé avec deux jours d'avance. Pour moi, ça avait une résonance très particulière parce que mon père, qui est mort en 2019, s'appelait Dominique. Quand on veut voir des signes, on n'a qu'à ouvrir les yeux et on peut en voir beaucoup. En tout cas, je gardais ça dans mon cœur. Et finalement, Philibert est arrivé ce 6 août à 13h30. Et je me souviens qu'à 2h du matin... On se disait avec Bruno, on ne peut pas éteindre la lumière, on ne peut pas voir cette journée s'arrêter tellement on était heureux, éblouis, émerveillés, confondus de gratitude. Et cette gratitude qui dure encore et encore et encore. Trois ans après, on n'a pas fini de s'émerveiller.

  • Anne-Françoise

    Alors effectivement, aujourd'hui, il libère à trois ans. Comment est-ce que vous relisez votre histoire trois ans après ? Qu'est-ce que cette naissance a changé dans votre vie ? dans votre vie, dans votre relation à Dieu aussi ?

  • Inès Rouy

    Alors, la naissance de Philibert a tout changé. Je ne vais pas dire le contraire. Son arrivée a tout changé, a tout rééquilibré, ou plutôt déséquilibré, mais de manière très joyeuse, évidemment. C'est-à-dire que vous imaginez, au bout de 15 ans, après 15 ans de mariage, on prend des habitudes de petit couple, et puis on peut... On peut, et c'est normal, avoir une certaine routine à deux. On s'habitue à l'idée qu'on passera notre vie seulement tous les deux. Nous, c'était le cas depuis trois ans. Et puis Philibert arrive, donc ça renverse tout. Déjà, notre mission a été un petit peu mise à mal à Verdelay parce que moi, je ne valais plus grand-chose en tant que maîtresse de maison. Heureusement que Bruno était là pour faire les choses à ma place. Mais c'est vrai que la mission en tant que telle en a pris un petit coup. Donc déjà, ça nous a un petit peu bouleversés. Et puis évidemment, quel merveilleux bouleversement de voir ce petit garçon arriver dans nos vies. Ça change toutes les perspectives et ça déséquilibre aussi le couple. Donc ça, c'est à nous après de retrouver un équilibre, de repenser à toutes ces années où nous avons pris soin de notre couple et d'essayer de tendre à ça. Comme je le disais tout à l'heure, Philibert n'était pas une condition à notre bonheur et on a tôt fait de l'oublier. quand il se présente parce qu'on a l'impression qu'il nous comble après autant d'attentes. Mais c'est faire peser sur ses épaules beaucoup de choses dont il n'est absolument pas responsable. Notre propre bonheur, notre bonheur de couple et notre bonheur de famille. Ce n'est pas lui qui en est le garant.

  • Anne-Françoise

    Quel conseil est-ce que vous pourriez donner à un couple en espérance d'enfant qui peut-être n'arrive jamais ?

  • Inès Rouy

    Je me garderai de donner des conseils parce que, étant passée par là, je trouve que les conseils sont souvent peu valables. Combien de fois nous avons eu des conseils, avec toujours cette impression de rester sur le quai de la gare pendant que le TGV avance, démarre, on a envie de dire, aux autres couples, continuez sans nous, on va vous ralentir. Mais c'est vrai que nombre de fois, des couples qui étaient dans la même situation que nous, nous ont annoncé, ça y est, c'est bon, après 5, 10... 15 ans d'attente, j'en sais rien mais les conseils dans ces cas-là c'est pire que tout parce que ce qui marche pour les uns ne marche pas pour les autres chaque histoire de couple est unique la seule chose qui n'est pas un conseil qui est au mieux une suggestion c'est peut-être de relire le psaume 54 dans les moments de souffrance ça m'a aidée parce que ça m'a permis de me... à la fois de me sentir rejointe et en même temps de me décentrer en réalisant que ces paroles écrites il y a quand même pas mal d'années, dites il y a pas mal d'années, étaient tout à fait universelles. C'est-à-dire qu'elles parlent de souffrances qu'on peut tous connaître, qu'on peut tous s'appliquer, de cris vers le ciel qui sont les nôtres. Donc c'est tout à fait actuel et contemporain ces psaumes. dans le psaume 54. « Décharge ton fardeau sur le Seigneur, il prendra soin de toi » . C'est vraiment ce que j'ai ressenti et ce que j'essaie d'appliquer encore aujourd'hui. Ce n'est pas toujours facile de se décharger et d'avoir la conviction que le Seigneur est notre Père, qu'il prend soin de nous, alors pas selon nos propres désirs, aussi légitimes soient-ils, pas toujours en tout cas, mais sa providence agit continuellement. Et après, le Seigneur, non seulement il prend soin de nous, mais il nous laisse entière liberté. Donc que fait-on face à cette providence agissante ? Eh bien là, on est laissé à notre discernement et c'est à la fois beau, à la fois difficile, à la fois exigeant. Mais en tout cas, quoi qu'il en soit, je suis convaincue que le Seigneur prend vraiment soin de nous comme un père. Donc, pas de conseil, mais s'il nous arrive d'en douter, demandons à l'Esprit-Saint. De toute façon, je crois aussi, c'est quelque chose que j'ai réalisé pendant toutes ces années, c'est que notre croix pendant 15 ans, ça a été cette attente. Ça aurait pu être une autre croix, c'était celle-là. On ne l'aurait pas échangée avec celle du voisin, parce que le voisin... à d'autres croix, à une autre croix. Ça peut être la solitude, ça peut être la maladie, le handicap, pas de travail, pas de perspective, dépression, enfin j'en sais rien, tragédie, que sais-je. Donc notre croix, on ne l'échangerait pas avec celle du voisin, ça c'est sûr. Je prends l'exemple du célibat. Nous pensions souvent à nos amis célibataires quand on... Voilà, pendant cette période d'attente, alors on y pense encore, l'arrivée de Philibert, heureusement, n'a pas gommé ça. Mais nous mesurions aussi à quel point nous avions la chance de vivre les choses à deux. Donc, il ne s'agit pas de relativiser sa propre épreuve, ce n'est pas ça. C'est se dire, regardons aussi ce que nous avons. Et ce que nous avions pendant cette attente, c'était la grâce d'être à deux, d'être soutenu par le sacrement du mariage. de pouvoir puiser dedans, de nous consoler mutuellement, de nous aimer tout simplement. Et voilà, chaque croix est taillée pour... C'est un peu facile, je crois que ceux qui nous écoutent se diront que c'est peut-être un petit peu facile, s'ils en bavent particulièrement en ce moment. Mais dans le fond, est-ce qu'on aimerait échanger notre croix contre celle du voisin ? Je ne suis pas sûre. Je ne suis pas sûre, et puis de toute façon, ce n'est pas souhaitable. Et une autre... Un autre écueil, me semble-t-il, c'est vouloir répondre à d'éventuels pourquoi. J'ai été un petit peu surprise quand nous avons annoncé la future naissance de Philibert. Alors bien sûr, beaucoup se sont réjouis et certains ont tout de suite voulu apporter une réponse. Alors on n'en cherchait pas, nous, de réponse, mais nous disant c'est parce que vous avez lâché du lest, c'est parce que vous n'y pensiez plus. C'est parce que vous êtes venu servir à Verdelet, c'est parce que vous étiez détendu, j'en sais rien. J'avoue qu'on ne s'est pas du tout posé ces questions, on n'aura pas la réponse. On ne peut que constater que notre prière à Claire de Castelmagiac a été suivie de la naissance de Philibert, c'est un constat, rien d'autre. Mais voilà, pas de pourquoi, parce qu'à ce moment-là, se tape la tête contre les murs, comme dans l'épreuve, quoi, nous. Il n'y a aucune raison. On n'a pas plus de mérite que d'autres. Je pense très souvent au roi Baudouin et à la reine Fabiola qui avaient une pression autrement supérieure à la nôtre dans leur attente. La reine Fabiola a connu aussi des fausses couches successives et puis ô combien cruelles parce qu'elles étaient connues. Et pour autant, ils n'ont pas été exaucés de ce point de vue-là. Voilà, c'est mystérieux. Renonçons à chercher des réponses à c'est pourquoi. Ça ne sert à rien. Ça ne sert à rien. Je repense aussi à la Sainte Vierge, quand elle a reçu l'annonce de l'ange Gabriel, elle n'a pas demandé pourquoi, elle a demandé comment est-ce que ça va se faire. Essayons peut-être de suivre ce modèle.

  • Comment justement, dans toutes ces souffrances, comment croire et rester attentif à l'action de Dieu dans nos vies ?

  • Anne-Françoise

    La première chose, je crois, c'est de le demander à l'Esprit-Saint. Et je repense à ces prières de demande. Et finalement, dans l'Évangile, Jésus nous dit « Celui qui demandera l'Esprit Saint, il sera exaucé » . Jésus dit que notre Père du Ciel veut nous donner de bonnes choses, qu'il ne nous donnera jamais de mauvaises choses. Et celui qui demande l'Esprit Saint, il sera exaucé. Donc déjà, si on demande l'Esprit Saint, on est sûr d'obtenir beaucoup, y compris dans notre foi, dans notre espérance et dans la charité. L'autre chose qui me semble importante et à laquelle on tend, on essaie de tendre, c'est de ne pas oublier notre horizon. Je trouve que quand nous étions seulement deux, c'était relativement facile de se dire que notre horizon, c'était le ciel, parce que nous n'avions pas d'autres soucis que de nous y conduire mutuellement. Je trouve que c'est un peu plus difficile depuis que Philibert est né. Alors pardon, je ne veux pas faire l'enfant gâté, mais je dis juste que c'est une difficulté, en tout cas une attention à avoir, c'est de ne pas faire trop baisser notre horizon à des choses terre à terre. Alors c'est un petit peu normal, parce que nous sommes affairés par des préoccupations toutes terrestres. Nourrir son enfant, le vêtir. Le faire croître, tout ça, c'est très terre à terre. Mais pour quel but ? Finalement, c'est pour le ciel, comme pour nous-mêmes. Et je me souviens quand Philibert était encore tout petit petit, Bruno le confiait dans notre prière familiale en disant « Seigneur, que nous le conduisions à toi » . Antérieurement, mon cœur de mère bondissait. « Attends, pas trop vite, pas trop vite. Le Seigneur a déjà six de nos enfants auprès de lui, ça va » . Mais en fait, il a complètement raison. Notre but de parents, c'est de conduire ce petit enfant que le Seigneur nous a confié à lui, qu'il soit saint. Donc ça, c'est une chose primordiale. Mais quelquefois, on peut être un peu pris par les préoccupations terrestres et ne pas avoir toujours ça en tête. En tout cas, peut-être un peu moins que quand nous étions seulement, entre guillemets, un couple. Est-ce qu'il y a un livre qui vous a aidé pendant cette période d'attente ?

  • Inès Rouy

    Alors, je dois dire que la littérature consacrée à la famille, aux épreuves rencontrées en famille, etc., à toutes ces questions à la fois de bioéthique, familiale, de procréation. Cette littérature est très abondante. Moi, il y a un livre qui m'a aidée, c'est « Attendre et espérer, itinéraire d'un couple sans enfant » d'Olivier Matona aux éditions de l'Emmanuel. Déjà le titre, Attendre et espérer, ça rejoint tout à fait ce que nous avons vécu, l'attente et l'espoir. Au bout de douze ans, nous n'attendions plus, mais nous espérions toujours. Voilà, donc c'est ce livre principalement qui m'a marquée. Il y en a énormément d'autres. Moi, je lis beaucoup, donc je ne saurais pas vous dire précisément. Après, il y a les psaumes, comme je vous disais tout à l'heure. Les psaumes qui m'ont soutenue parce que j'ai fait mienne ces paroles. qui quelquefois sont assez violentes, qui sont des cris du cœur. Et je les ai fait miennes très souvent pendant cette attente.

  • Anne-Françoise

    Il y a une prière particulièrement qui vous a accompagnée ?

  • Inès Rouy

    Oui, la prière du Magnificat. Alors, le Magnificat, nous avions pris l'habitude de la dire en couple grâce aux équipes Notre-Dame, dont nous avons fait partie pendant plusieurs années, jeunes mariées. Donc, nous connaissions par cœur cette prière. Et je rêvais du jour où ce Magnificat se concrétiserait pour moi. Et évidemment, ça a été mon cri du cœur quand j'ai tenu Philibert dans mes bras, ce magnifique acte. Donc ça, c'est vraiment, oui, je crois, la prière la plus emblématique pour moi, en tout cas.

  • Anne-Françoise

    Alors, si vous aviez le Christ en face de vous aujourd'hui, que lui diriez-vous en lien avec votre histoire ?

  • Inès Rouy

    Je crois que je lui dirais, Seigneur, je ne suis pas digne de vous recevoir, mais dites seulement une parole et je serai guéri. J'espère... Pouvoir dire que quelles que soient les épreuves que je rencontrerai dans la vie, j'aurai cette conviction que le Seigneur peut tout, qu'il est tout-puissant, qu'il veut mon bonheur. Moi, j'en suis évidemment indigne. Lui le sait, encore plus que moi, mais il peut tout.

  • Anne-Françoise

    Merci beaucoup Inès.

  • Inès Rouy

    Merci Anne-Françoise, c'était un plaisir de discuter avec vous.

  • Anne-Françoise

    Merci pour votre écoute et merci d'être toujours plus nombreux à écouter Un beau jour, à vous abonner, à partager cet épisode sur les réseaux sociaux et à mettre 5 étoiles et des commentaires sur Apple Podcasts et Spotify. Pour découvrir d'autres témoignages de feu, vous pouvez bien sûr écouter les autres épisodes du podcast, mais aussi lire chaque semaine la rencontre avec un témoin touché par la grâce dans le magazine Famille Chrétienne. Et enfin, n'hésitez pas à découvrir les autres podcasts de Famille Chrétienne, Tous Saints, Maman Prie, Sexo, Sacrée Histoire et d'autres encore. Merci et au prochain premier lundi du mois pour un nouvel épisode.

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