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Un beau jour

#51 : L'histoire de Rodrigue Tandu, la conversion extraordinaire d'un dealer de Bondy

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41min |02/03/2025
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#51 : L'histoire de Rodrigue Tandu, la conversion extraordinaire d'un dealer de Bondy

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Description

Rodrigue Tandu est arrivé du Congo à Bondy, dans une cité de la région parisienne, à l'âge de 7 ans. Sa scolarité se passe sans histoire, jusqu’au lycée, situé à Noisy-le-Sec, en territoire ennemi. Quand une bande de Noisy croise ceux de Bondy, c’est la bagarre assurée. Il ne va plus à l’école, traîne dans la rue… Commencent les petits trafics, puis les gros, la drogue notamment, qui lui assure des revenus conséquents. Le jeune homme devient un caïd, qui donne des coups et les encaisse. Jusqu'au jour où il croise des consacrées de la communauté de l'Emmanuel, qui le persuadent de venir avec elles à Paray-le Monial. Le dealer fait alors une rencontre bouleversante avec le Christ qui transforme radicalement sa vie.

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Ce podcast est réalisé par Famille Chrétienne


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Transcription

  • Benjamin

    Bonjour, je m'appelle Benjamin et je vous souhaite la bienvenue dans la cinquième saison d'Un beau jour, un podcast de famille chrétienne. Un beau jour, c'est l'histoire d'hommes et de femmes croyants qui menaient une vie tranquille, tracée d'avance. Et puis, Un beau jour, un événement inattendu et bouleversant a complètement infléchi le cours de leur existence. Il nous raconte comment ils en ont été bousculés, changés, rabotés, transformés dans leur vie et dans leur foi. Je suis sûr que vous serez comme moi édifiés et enrichis par ces récits livrés, le cœur et l'âme grands ou morts. Il était un des caïds de Bondy en Seine-Saint-Denis. Jamais passé par la case prison, Roderick Tendu n'en est passé... pas loin, mouillé alors dans le trafic de drogue. Jusqu'au jour, un beau jour, où le jeune homme a rencontré celui qui allait changer radicalement son existence. Bonjour Rodrigue et merci de nous avoir rejoint pour venir raconter aux auditeurs d'un beau jour ton incroyable histoire. Pour commencer cet entretien et comme c'est la tradition dans notre émission, peux-tu nous présenter l'objet symbolique de ton itinéraire que tu as amené ? avec toi aujourd'hui.

  • Rodrigue Tandu

    Bonjour Benjamin, moi je vais ramener une croix. C'est une croix que ma grand-mère m'a offerte. Voilà, c'est une croix que je garde souvent dans ma poche et qui me permet quand je suis tenté ou il y a des tentations, je la garde auprès de moi pour aussi la présence du Seigneur.

  • Benjamin

    C'est une croix que tu as avec toi depuis longtemps.

  • Rodrigue Tandu

    Oui, ça fait depuis plus de 20 ans que je l'ai, que je garde ça.

  • Benjamin

    Toujours dans ta poche. Alors Rodrigue, avant d'en venir au jour de ta conversion, est-ce que tu peux nous parler un peu de toi ? Je sais que tu es né en 1979, en République démocratique du Congo, un pays que tu as quitté à l'âge de 7 ans pour la France et donc une cité de Bondy, cette ville de Seine-Saint-Denis près de Paris. tout simplement de ces premières années en France, du souvenir que tu en as, de comment ça se passait vraiment au quotidien.

  • Rodrigue Tandu

    Je suis arrivé l'hiver, il y avait de la neige, je me rappelle. Je ne savais pas c'était quoi. J'ai cru que c'était des plumes d'oiseaux.

  • Benjamin

    Des plumes d'oiseaux ?

  • Rodrigue Tandu

    Je me suis dit, mais tiens, il y a une usine de volailles ici. Et voilà, il faisait horriblement froid et c'était... Et je me suis dit que c'était une ville éclairée. il y avait de la lumière partout et pour moi c'était étonnant voilà ça c'était mon rapport d'étonnement quand je suis arrivé en France et après ça se passait très très bien tu habitais où ?

  • Benjamin

    je suis arrivé à Bondy direct dans le livre tu parles de cet appartement dans ce bâtiment qui est un parallépipède je crois c'est la cité pour les bondylois c'est la cité du marché en face du marché donc

  • Rodrigue Tandu

    il y avait un 5 étages on habitait au 5ème étage c'est là que je suis arrivé

  • Benjamin

    Donc tu es orphelin quand tu arrives en France. Tu rejoins, je crois, ton oncle. Non, mon père. Ton père, voilà.

  • Rodrigue Tandu

    C'est ma mère qui est décédée par la République démocratique du Congo quand j'avais 7 mois. Donc je rejoins mon père. D'accord. Avec une belle mère. Et j'avais déjà mes oncles, les petits frères de mon père, tout ça, qui étaient là. C'est après que ma grand-mère nous a rejoints.

  • Benjamin

    Mais est-ce que, c'est vrai qu'on se pose la question, est-ce que ces premiers mois, ces premières années se font ? Assez facilement, quand on vient d'Afrique, on imagine que c'est, tu l'as décrit d'ailleurs, que c'est un choc, il y a plein de choses qui diffèrent. Est-ce que tu le vis sereinement, paisiblement, ou est-ce que c'est, j'imagine aussi, un peu compliqué par certains aspects ?

  • Rodrigue Tandu

    Je découvre un monde où il y a une certaine froideur quand même. Chacun est chez soi, personne n'est dehors.

  • Benjamin

    Pas qu'à cause de la neige alors ? Non,

  • Rodrigue Tandu

    non, non. Et qu'on passe plus de temps chez soi que dehors.

  • Benjamin

    Je reviens à l'école parce que donc, si je comprends bien, la scolarité se passe bon an, mal an, plutôt bien jusqu'aux primaires, collèges et autres. Et puis toujours dans ce livre dont je donnerai la référence tout à l'heure. Eh bien, tu expliques que le lycée, il faut aller dans une autre commune, Noisy-le-Sec. Il faut sortir du quartier, il y a le problème déjà des bandes et autres. Et... Pour toi, j'ai l'impression que ça marque vraiment le début d'une dégringolade assez vite. Un basculement. Alors, est-ce que tu peux...

  • Rodrigue Tandu

    Donc, le collège, ça va, donc on est tous orientés. Au troisième, on est tous confrontés à la question de l'orientation. Moi, je me rappelle, j'avais choisi Polytechnique. Je ne savais même pas c'était quoi, mais le nom, il me paraissait bien.

  • Benjamin

    Ça faisait chic.

  • Rodrigue Tandu

    Polytechnique, ça faisait bien. Tous ceux qui avaient choisi un peu ces lycées professionnels électroniques de Bondy, on a été orientés dans un lycée qui s'appelait Moulin Fondu, à Noisilles-Sec. Donc, c'est une ville limitrophe de Bondy. Et en face de ce lycée, il y avait une cité. Et cette cité-là, elle est en guerre avec Bondy. Donc, c'est là le début du basculement.

  • Benjamin

    Parce que tu décris aussi dans le livre, il y a cette fameuse ligne de bus qu'il faut prendre. Et il y a un sentiment de danger, c'est ça ? Comment tu te sens justement à cette époque quand il s'agit d'aller dans ce...

  • Rodrigue Tandu

    Non, au début, ça va. Au début, ça allait. Mais c'est après. Donc, on y allait, on allait en bande. Donc, on se rejoignait, on partait. Cinq ou six ou sept. Ça ne nous faisait pas d'angoisse. Ça nous faisait au contraire un peu voyager. C'était un changement. Sauf qu'après, un jour, j'ai un pote à moi qui se bat avec un mec de ce quartier. Et moi, je viens parce que dans ce bar, on est solidaires. Je rentre dans la bagarre. C'est un peu lâche, mais on tape le monsieur à deux. Et on rentre au cours et depuis ce jour-là, c'était compliqué pour nous d'aller à l'école. Parce que la cité nous attendait tous les jours pour nous faire la peau. Ils cherchaient tous les mecs de Bondy. Donc c'est comme ça que la bascule a commencé.

  • Benjamin

    Ta famille te pense au lycée, mais en fait, toi, tu commences à faire l'école de Saunière.

  • Rodrigue Tandu

    On allait tous à l'école. Et du coup, comme on risque notre peau, on n'y va plus. Donc comme on est dans un milieu où on se livre peu, on fait le fort. malgré qu'on a des soucis, on ne dit rien.

  • Benjamin

    Tu parles matin à l'école, normal, tu rentres le soir, tu expliques que quand tu rentres, tu t'arrêtes à la boîte aux lettres pour récupérer les éventuels courriers du lycée, c'est ça ? C'est ça. Pour intercepter ?

  • Rodrigue Tandu

    C'est ça, le matin.

  • Benjamin

    Parle-nous de ces journées, de quoi elles sont faites, parce que s'il n'y a pas l'école pour un jeune...

  • Rodrigue Tandu

    Dans les quartiers, il y a des caves. On avait aménagé une cave. avec des canapés, on a volé un peu l'électricité, on a mis une télé, des consoles, c'était ça notre journée.

  • Benjamin

    Donc c'était quoi, un peu...

  • Rodrigue Tandu

    Voilà, on sort, on va, on se pose, et voilà, après on se bat un peu, on s'entraîne à la bagarre, c'était ça, c'était à l'âge de 16-17 ans.

  • Benjamin

    Et alors à quel moment tout ça, j'allais dire, peut paraître sympathique, non c'est pas tout à fait le terme, mais en tout cas à quel moment tout ça prend une tournure un peu plus... grave avec l'entrée dans peut-être le commerce de la drogue.

  • Rodrigue Tandu

    On a commencé à avoir pas mal de gens aussi autour de nous qui n'allaient plus à l'école. Et ces fréquentations-là, il y en a, ils avaient déjà basculé un peu dans tout ce qui est cambriolage, tout ça. Donc on a commencé à cambrioler. Je ne suis pas fier de ça, mais ça, c'est ma vie. cambriolé. Du coup, on cambriolait. Donc, on trouvait des fusils. Ces fusils-là, on les gardait. Et c'est un âge où tu commences à t'affirmer aussi physiquement. Et voilà. Donc, on commence à être craint. Ça veut dire qu'on est armé, on n'a plus peur. Donc, on se bat tout le temps. Et du coup, on commence à être craint. Et c'est là qu'on commence à avoir une réputation. Parce que Bondy, ce n'est pas une ville qui fait des émeutes gratuites. Mais c'est une ville beaucoup de... de grand banditisme, beaucoup de business en fait. On ne fait pas de...

  • Benjamin

    Donc il vaut mieux qu'il n'y ait pas de trop... Non,

  • Rodrigue Tandu

    tu ne vas pas aller en prison parce que tu as tapé un flic et ça ne sert à rien. C'est con. Mais tu vas en prison parce que tu as risqué de l'argent.

  • Benjamin

    Il faut qu'il y ait un intérêt.

  • Rodrigue Tandu

    C'est pécunier. Et ça, ça a été toujours inculqué par les grands.

  • Benjamin

    Donc si je comprends bien, votre bande commence à prendre de l'épaisseur, j'allais dire, commence à être respectée, comme tu l'as dit. Et donc vous êtes repéré par des...

  • Rodrigue Tandu

    de plus grands qui vont vous mettre dans le j'allais dire dans le circuit du narcotrafic comme les grands ils étaient bien placés nos grands bandits dans le banditisme ils ont placé aussi donc voilà moi les grands qui m'ont mis dedans ils m'aimaient bien parce qu'ils m'ont vu depuis tout petit tout le monde se connait bien évidemment depuis longtemps depuis très très longtemps même quartier même quartier et voilà t'envis aussi un peu les grands parce que tu vois qu'ils s'habillent bien

  • Benjamin

    Tu te souviens dans quel état d'esprit tu es à l'époque ? Est-ce que déjà, dans un coin de ton âme, tu te dis « Finalement, ce que je fais, c'est quand même peut-être pas clean, c'est pas bien. »

  • Rodrigue Tandu

    Après, dans le quartier, on est tous croyants. On sait que ce qu'on fait, c'est bien ou pas bien. On connaît déjà le bien et le mal. Toi,

  • Benjamin

    tu te présentes comme un chrétien auprès de tes amis musulmans ?

  • Rodrigue Tandu

    Oui, mais j'étais toujours chrétien.

  • Benjamin

    Toi, tu te disais chrétien, pardon.

  • Rodrigue Tandu

    Parce que j'étais baptisé, j'ai eu la première communion. Mais je n'ai pas fait la confirmation à cause des entraînements de foot. Oui. Voilà. Et l'état d'esprit, parce que du coup, à ce moment-là, on commence déjà à fumer du cannabis. Du coup, le cannabis, ça te met en état d'esprit où tu t'en fous de tout. C'est un esprit où tu ne sais pas où tu vas. Mais comme tu sais qu'il faut que tu n'existes pas parce que tu es, tu existes parce que tu as, donc tu es dans cet état d'esprit-là, la quête du truc. Mais tu te dis qu'un jour, je vais arrêter. Un jour, j'aurai une vie normale. Mais du coup, tu rentres dans une certaine forme de spirale.

  • Benjamin

    Donc tu te dis que ça va être provisoire pour un moment.

  • Rodrigue Tandu

    Voilà, tu fixes une somme, après tu fais une autre. Oui,

  • Benjamin

    parce que pareil, dans le livre et d'écrit, c'est quand même des sommes conséquentes, jusqu'à 3 000 euros par jour, tu l'expliques, qui peuvent être le fruit de ce trafic.

  • Rodrigue Tandu

    Oui, parce qu'on était quand même dans... On était grand dans ce business. Donc voilà, et c'était le début aussi de la structuration de ce business. Tu expérimentes pas mal de choses, et du coup, t'as ça inverse, tes codes. Tu découvres que tu peux avoir les filles que tu veux, tu peux avoir les habits que tu veux, et du coup, tu te dis que être gentil, c'est pas bien. Être méchant, c'est bien. Être fidèle à une copine, c'est pas bien. Avoir plusieurs meufs, copines, c'est bien.

  • Benjamin

    Est-ce qu'il n'y a pas un moment où ça frotte ?

  • Rodrigue Tandu

    Tu découvres, c'est là que le diable, il est fort. Parce que c'est une forme de puissance qu'on avait. Et puis tu possèdes les autres. Tu achètes les autres. Parce que tout le monde est corruptible. Et tu découvres ça. C'est tout ça, en fait.

  • Benjamin

    Donc c'est vraiment le pouvoir de l'argent, du sexe, la force. Voilà.

  • Rodrigue Tandu

    Et la liberté, en fait. Tu te prives de rien.

  • Benjamin

    Et tout, tout de suite.

  • Rodrigue Tandu

    Tout, tout de suite. Instantané.

  • Benjamin

    Il y a un moment, donc tu expliques dans le livre, qu'il y a cette rencontre avec Arlette. Claire et Eliane.

  • Rodrigue Tandu

    Voilà, les trois sœurs.

  • Benjamin

    Des laïcs consacrés, c'est ça, pour être précis ? De la communauté de l'Emmanuel, qui sont installés à Bondy. Est-ce que tu peux nous expliquer comment se passe la rencontre ? Comment ça se passe ?

  • Rodrigue Tandu

    Moi, on était dans le coin où on faisait nos trafics, donc je m'apprêtais, moi, j'allais récupérer des sous. Et on voit trois bonnes sœurs qui rentrent. Trois blanches, mais des blanches pas comme nous, quoi. Parce qu'on se connaît tous. Mais les blancs de quartier sont comme nous. Ils parlent comme nous, voilà. Et je vois ces trois, on les fouille.

  • Benjamin

    Ah oui, carrément.

  • Rodrigue Tandu

    Ah oui, on les affiche. On pensait que c'était des flics. Et on se rend compte que c'est des sœurs. Et on se rend compte que c'est des sœurs. On se dit, mais moi, je me dis, on respecte quand même le religieux. On respecte pas le religieux pour respecter, on se dit que... S'ils ont fait le choix de prier Dieu, de donner leur vie à Dieu, que ce soit le musulman ou la sœur consacrée ou le prêtre, Dieu peut nous punir. C'est comme ça qu'on voit les choses. Et du coup, moi, je lui dis, écoute, ma sœur, mes sœurs, priez pour moi, mais cassez-vous d'ici. Je ne voulais pas... Priez, faites votre rôle, mais ne venez plus. Et c'est là que mes problèmes ont commencé. Du coup, en leur disant ça, je leur ai dit que j'étais catholique, chrétien. Moi, je pensais qu'ils allaient arrêter. Et comme, du coup, quand il me voyait dans le quartier, il me parlait souvent, « Rodrigue, on prie pour toi, Rodrigue, il faut que tu changes d'ami, oui. »

  • Benjamin

    Ça, c'est surtout Sœur Claire, si je me souviens bien.

  • Rodrigue Tandu

    Oui, après, Claire, elle était assistante au CED, les autres, elles travaillaient. Du coup, le lien de confiance était plutôt avec Claire. D'accord. Mais ça, elle a mis du temps avant que je puisse lui faire confiance.

  • Benjamin

    Elle a mis combien de temps ?

  • Rodrigue Tandu

    Ça a duré deux ans, quand même.

  • Benjamin

    Deux ans ?

  • Rodrigue Tandu

    Mais ce lien, je dirais qu'ils se le louent parce qu'elles habitaient aussi le quartier. Donc elles étaient devenues comme nous. Ce n'étaient pas des gens qui venaient et qui partaient. Donc on les voyait tout le temps faire leurs courses. Leur vie quotidienne, elle était avec nous. Et ça, ça interpelle. Et comme on est tous croyants, parce que comme on ne se livre pas, quand t'es angoissé ou culé, tu ne te livres pas. Tu ne vas pas dire à tes potes, j'ai mal dormi. Ou une meuf, elle t'a quitté, que t'aimes. une copine que t'aimes, tu vas pas lui dire je souffre, tu vas dire à toi, qu'est-ce qu'on a ? Tu fais le dur, mais on peut pas dire à nos parents, on peut dire à personne, donc c'est souvent, c'est dans la prière, mais des prières, ouais, Dieu, je recommencerai plus, des prières comme ça.

  • Benjamin

    Et donc, il y a une bagarre à Paris, il y a un garçon...

  • Rodrigue Tandu

    Comme on était armé, moi, j'hésitais pas à tirer, mais j'ai tiré sur un mec. Et ce mec-là, il n'est pas mort. Et comme j'avais peur d'aller en prison pour une grosse peine, du coup, il fallait que je prie parce que j'ai mal dormi. Et j'ai dit à la sœur, c'était chaud. Mais du coup, elle m'a ouvert l'église. Et ça m'a fait plaisir. Et du coup, j'ai prié, mais je n'ai pas prié beaucoup. J'ai dit, Dieu, si tu me sauves de cette peine, je ne recommencerai plus les prières comme ça.

  • Benjamin

    Mais il y a déjà quelque chose qui se passe là, parce que tu expliques qu'il y a eu une... paix quand même.

  • Rodrigue Tandu

    Oui, et là, je sentais une paix, je sentais une présence. Et c'est là que je me suis dit, peut-être qu'il y a quelque chose et tout. Et du coup, dans cet élan-là, la sœur a revu à la charge, tu sais, Rodrigue, il faut que tu changes d'ami et tout. Et du coup, je lui ai dit, d'accord, mais je pourrais aller là où...

  • Benjamin

    Quelle est la proposition que sœur Claire, assez vite, finalement,

  • Rodrigue Tandu

    t'a fait ? Elle m'a dit qu'on a un lieu où tu peux aller aussi prier comme ça, voilà. Et je lui ai dit, ok. Et ce lieu, c'est ? C'est Paray-le-Mognal.

  • Benjamin

    Paray-le-Mognal.

  • Rodrigue Tandu

    Et je connaissais pas du tout, je savais même pas c'était quoi. Même la communauté d'Emmanuel, je ne savais même pas ce que c'était. Et du coup, je lui ai dit OK. Et du coup, on s'est donné rendez-vous. Elle m'a ramené les papiers d'inscription. Donc, elle m'a inscrit à Parallel Monial.

  • Benjamin

    On est en quelle année là ?

  • Rodrigue Tandu

    C'était quelle année ? 2000, 2001, 2002,

  • Benjamin

    je crois. Et tu te retrouves donc, tu quittes Bondy, que j'imagine que tu ne dois pas quitter très, très souvent.

  • Rodrigue Tandu

    Non, on va en vacances quand même. Avec l'argent qu'on a. On va en Thaïlande.

  • Benjamin

    En tout cas, tu n'es jamais allé à Parelmonial. Donc, tu débarques à Parelmonial, dans ce petit village bourguignon. Pareil, raconte-moi comment...

  • Rodrigue Tandu

    Quand j'arrive là-bas, je vois une grande tante, je vois beaucoup de blancs qui rigolent, qui sont gentils. Tous mes codes sont bouleversés. Et je me dis, mais ils se foutent de ma gueule. C'est comment ? Pas des blancs comme les nôtres, mais des blancs un peu des têtes de juge, des blancs policiers, des militaires, des trucs comme ça. Et tu te dis, mais qu'est-ce que je fous là ? Parce que c'est pas un traquenard. C'était un peu ça, mon impression au départ.

  • Benjamin

    Qu'est-ce qui fait que tu restes ?

  • Rodrigue Tandu

    Je suis là, déjà.

  • Benjamin

    Parce que t'aurais pu te dire...

  • Rodrigue Tandu

    Je suis là avec la sœur. Je suis quelqu'un, quand je donne une parole, j'aime bien qu'elle... Et après, comme ça, les sœurs, elles vont plus me prendre la tête.

  • Benjamin

    C'est une manière de payer un peu ta dette.

  • Rodrigue Tandu

    Voilà, et quand je rentre...

  • Benjamin

    Sauf qu'il va se passer quand même un truc étonnant. C'est-à-dire qu'à un moment, tu vas rentrer sous la grande tente, tu vas voir...

  • Rodrigue Tandu

    Donc je vois le Saint-Sacrement.

  • Benjamin

    Dont tu ne sais pas ce que c'est à l'époque. Voilà,

  • Rodrigue Tandu

    je ne sais pas. Pour moi, c'est une boule. Et je vois... Ils mettent le lançant, tout ça, voilà. Et là, mon côté congolais reprend. Je me dis, attends, ils sont en train de prendre une boule. C'est des sorciers. Du coup, je me suis dit, c'est quoi ce truc ? Mais je sens que ça m'attire. Et c'est là que je me suis rapproché. Je suis tombé à genoux et j'ai commencé à demander pardon. Et à pleurer, surtout. Et je me suis dit, soit c'est le shit que j'ai fumé qui me joue des tours, ou ça ne va pas.

  • Benjamin

    Est-ce que tu peux nous en dire un peu plus ? Parce que ça semble complètement dingue.

  • Rodrigue Tandu

    J'ai senti un amour immense, mais pas un truc agressif. Et c'est ça qui m'a demandé... Je sentis une présence aimante. C'est aimante d'un amour que je n'avais jamais expérimenté et d'un amour que tu ne peux pas faire du mal.

  • Benjamin

    Mais quelle est cette force qui te fait te mettre à genoux, qui te tire des larmes ?

  • Rodrigue Tandu

    C'est cette présence qui m'a englopé, que là, je me suis mis à genoux. Parce que ça m'a désarmé, en fait. Et du coup, c'est là que je suis tombé à genoux. Et il a demandé pardon, mais sans le calculer, en fait. Il a demandé pardon et a pleuré.

  • Benjamin

    En même temps, tu dis que tu étais croyant, que tu connaissais Dieu, tu étais baptisé. Bon, on peut être baptisé sans croire, mais tu avais cette foi. Qu'est-ce qui fait qu'à ce moment-là, cette foi devient, j'allais dire, concrète, qu'elle va changer quelque chose ?

  • Rodrigue Tandu

    Après, ça, c'est la volonté de Dieu. Il vient chercher qui il veut. Il choisit les gens. Moïse, par exemple. Dieu, il choisit qui il veut. Il a des projets pour chacun d'entre nous, mais à la hauteur de ce qu'il veut pour chacun d'entre nous. Voilà, donc c'est cet amour-là que je ne peux pas le dire. Je ne suis pas dans la tête de Dieu. C'est ce jour-là qui m'a sauvé. Qui ne m'a pas sauvé. Mais voilà, donc après, j'ai entendu une voix intérieure qui m'a dit, va et jette le truc que tu as ramené, parce que comme je suis addict au cannabis, moi, je voulais fumer mes joints tranquilles, fermer cinq jours et rentrer, et jette-le. Et même là, mon côté bondinois a repris. Quand je marchais pour aller le chercher, je me suis dit, peut-être que je peux le vendre là. Je peux trouver un client. Mais je l'ai jeté quand même, le cannabis, parce que c'était une voie obéissante. Et depuis ce jour-là, je n'ai plus jamais fumé. Il n'y a que la force de Dieu qui peut faire ça. C'est cet amour absolu qui te désarme, en fait. Et du coup, c'est cette rencontre.

  • Benjamin

    Qu'on comprenne bien, Rodrigue, du moment où tu sors de cette tente de l'adoration, tu es devenu chrétien ? Ça y est, tu es croyant ? Tu vas changer de vie ?

  • Rodrigue Tandu

    Non, je me pose d'abord beaucoup de questions. Si c'est le shit qui me joue des tours, si j'entends de voix, si ce n'est pas la psychiatrie, tout ça. Au départ, je suis bouleversé quand même. Ce n'est pas être croyant, c'est là-bas que je suis bouleversé. Et c'est petit à petit que, quand il t'arrive un truc comme ça, c'est petit à petit, c'est des signes. Mais ce n'est pas tout tout de suite, en fait. Après, je me dis, bon, puisque j'ai vécu ça et ça te rend mendiant. Donc du coup, moi, je n'allais pas trop à la messe. Du coup, je cherchais la boule. Le saint Saint-Camban. Donc, j'ai passé beaucoup de temps à adorer, à donner pardon. Et j'ai cru que je t'ai donné ça. Et je me suis dit, quand je vais rentrer à Bondy, je vais dire à mes potes, ouais, j'ai trouvé une boule magique. Et aussi, ils vont devenir comme moi.

  • Benjamin

    Parce que ce que tu as vécu là, en fait, si je comprends bien, tu n'as pas pu, sur ces cinq jours, les cinq jours de ce Forum des Jeunes, tu n'as pas pu en parler à quelqu'un, expliquer ce que tu avais vécu ?

  • Rodrigue Tandu

    Et à Claire, j'en ai parlé. Elle m'a accompagné quand même. Donc à Claire, mais je me suis confessé aussi.

  • Benjamin

    Tu vas rentrer au bout de ces cinq jours à Bondy, forcément un peu différent, mais jusqu'à quel point différent en fait ? Ce que tu as vécu là, ces jours-là, qu'est-ce que ça va changer directement dans ta vie ?

  • Rodrigue Tandu

    En gros, ce que j'ai vécu, ça donne du courage. Voilà, c'est du courage. D'assumer ce que... Parce que j'ai découvert un amour que personne ne peut me donner. Même pas mes amis, rien. Donc tu le vois dans le courage qui te pousse à t'affirmer. Et c'est là que je commençais à chanter des Alléluia, Nanani. Et je commençais à être maintenant dans la morale. Ça veut dire dans le bien, pas le bien ou le mal. Donc je ne pouvais plus faire les trucs d'avant. Je ne pouvais plus faire du mal aux gens. C'est là où c'était dur, parce qu'il fallait qu'on se détache. J'avais ramené mes copains, voire aussi l'adoration au Christ ressuscité, l'église de Bondy. Mais ça n'avait rien passé pour eux. Donc l'adoration, ils m'ont pris pour un menteur, un mytho. Donc c'était plutôt ça. Donc petit à petit, je commençais à m'éloigner d'eux.

  • Benjamin

    Quand tu dis petit à petit, ça a pris combien de temps en fait ? C'est un processus qui se fait en quelques mois ou c'est plus long, plus court ?

  • Rodrigue Tandu

    Après moi, je dirais pour moi. Donc il y en a, c'est plus radical, moins, mais moins.

  • Benjamin

    Mais toi, je veux dire, ton changement de vie et puis le fait... de te sentir...

  • Rodrigue Tandu

    Le jour où ça a commencé que je ne pouvais plus. Donc petit à petit, l'esprit que tu dégages te fait rejeter par les autres. Parce que vous n'êtes plus dans le même état d'esprit en fin de compte. Donc toi, c'est comme si tu venais éclairer leur... Donc du coup, il y a un rejet parce qu'ils ne sont pas prêts. Donc du coup, petit à petit, tu es rejeté un peu et petit à petit, tu t'éloignes en fait.

  • Benjamin

    Tu as même pensé à un moment devenir être prêtre ? Tu t'es posé la question.

  • Rodrigue Tandu

    Après, avec Claire, comme elle m'éclairait beaucoup, je me suis...

  • Benjamin

    Donc cette laïque de l'Emmanuel, je rappelle.

  • Rodrigue Tandu

    Elle m'a beaucoup fait... Je fais l'école de château et de mission. Donc je me suis approché de... J'ai rencontré d'autres types de chrétiens de mon âge. Et c'est là que j'ai compris qu'il y en avait. Ils faisaient des grandes écoles, polytechniques, ESSEC, HEC, tout ça. Avant, je ne savais pas que ça existait. On n'était pas dans le même monde. On était dans le même pays, mais pas dans le même monde. Et ces jeunes-là, on est en parté, donc l'école de chartes et de missions, c'était une école de réflexion. Et c'est de là que j'ai commencé à me poser cette question. Mais après, je me suis dit, mais ce n'est pas possible. Moi, Rodrigue, prêtre, j'aurais... L'Église serait barrée en live.

  • Benjamin

    Donc, ça ne sera pas la prêtrise, mais par le biais de... pas mal de rencontres, il y a la possibilité de devenir un jour éducateur, et pareil, c'est de l'ordre d'un appel intérieur. Est-ce que tu peux nous raconter comment ça s'est passé ?

  • Rodrigue Tandu

    Et du coup, voilà, je me posais cette question, et je repars à Paris le Mondial, donc du coup avec Cyril Tisserand, là, cette fois-ci. Cyril Tisserand, c'est le fondateur de l'association Le Rocher, qui était venu habiter dans le quartier, dans le cadre de Fidesco, et petit à petit, il a monté l'association Le Rocher. C'était une personne que je connaissais peu, mais petit à petit, je commence à le connaître grâce à... Parce que c'est quelqu'un qui est quand même beaucoup ancré dans la foi. Et je vais à Parallel Monial. Du coup, je vais dans une église, je prie et j'entends la voix intérieure. « Rodrigue, ce n'est pas dans une église que je te veux, c'est dans la rue. Va et relève les genoux d'affaibli. » Et c'est là que je découvre ma vocation. Et j'ai une mot, je discute un peu avec lui comme éducateur. Et du coup, il me dit, tiens, je rencontre un directeur de formation des apprentis d'auteuil. Et c'est là que... Mais c'était facile parce que du coup, une fois que j'ai dit oui pour ça, pour cette vocation-là, tout s'est déroulé facilement. Donc du coup, je suis rentré au centre de formation des apprentis d'auteuil.

  • Benjamin

    Les portes se sont ouvertes facilement.

  • Rodrigue Tandu

    Voilà, c'est ça. On dirait le Seigneur m'avait précédé.

  • Benjamin

    Il y a un passage qui est amusant dans le livre, c'est que tu expliques que tu préfères te confronter aux fortes têtes qu'à ceux qui ont peut-être plus un profil de victime. C'est aussi l'héritage de se passer à la rue avec d'autres.

  • Rodrigue Tandu

    J'étais fragile autrement, mais j'avais une carapace. Donc moi, je connais plus ces codes-là. J'ai dû... Quelqu'un qui est fragile, fragile par mon charisme. Je peux faire plus de mal que de bien. Parce que je peux être brut. Il y a une certaine forme dans l'éducatif. Il y a une forme de prudence et de bienveillance. Et quelqu'un qui est très, très fragile, des profils comme moi, ça peut être compliqué. Parce que tu peux arriver comme un bourrin dans quelque chose qui...

  • Benjamin

    Où il faut arriver avec un peu plus de délicatesse.

  • Rodrigue Tandu

    Voilà.

  • Benjamin

    Pareil, quand tu entends, je reviens sur cet appel entendu à Paray-le-Monial de devenir éducateur. Est-ce qu'à un moment, ça ne t'a pas semblé aussi un peu incongru ? Quand on a l'histoire que tu as, est-ce qu'il n'y a pas un moment où on se dit mais est-ce que je suis légitime pour aider d'autres jeunes à s'en sortir ?

  • Rodrigue Tandu

    Moi, dans mon histoire, on ne se pose pas trop de questions. C'est quand je suis sorti que j'ai vu beaucoup de gens. de ces écoles qui intellectualisent, qui posent... Nous, en tout cas, on ne se pose pas beaucoup de questions. On avance, en fait. Une fois que tu as dit oui, tu avances. Et après, tu vois. On n'est pas des gens qui se projettent, qui s'assoient, qui créent un projet, qui font un tout doux. On n'est pas des gens comme ça. On avance et on avise après.

  • Benjamin

    Alors, Rodrigue, tu vas travailler, donc tu l'as dit, tu vas bénéficier d'une formation. Tu vas travailler avec les orphelins apprentis d'Auteuil, avec l'association Le Rocher. En 2019, tu crées le réseau des deux cités avec un garçon qui s'appelle Antoine Déjar, qui a fondé un cabinet de conseil en stratégie en 2019. Et donc, c'est un parti pris assez novateur, parce que ce réseau, il a pour but de mettre en relation des chefs d'entreprise et des caïds repentis. Explique-moi comment ça marche.

  • Rodrigue Tandu

    Moi, quand j'étais au Rocher, j'ai vu des étudiants polytechniques, HEC, tout ça. Et je me suis dit, c'est des mecs qui sont brillants, méthodiques. Ils résinent pas la tâche, ils abattent pas mal de tâches de travail, mais ils intellectualisent tous les mecs. Et ils ont pas ce courage, cet élan qu'on peut avoir, nous. Cette simplicité relationnelle. Ils marchent un peu sur un pied. Et nous, à l'inverse... On a tous ce côté un peu spontanéité, intuitif, et la simplicité dans la relation à l'autre. Mais on n'a pas toutes ces méthodes, toutes ces capacités à être méthodiques, rigoureux, tout ça. Et je me suis dit, le contact des deux peut être une richesse. Nous aussi, on marche sur un pied. Donc quand on contacte les deux, ça peut être que bénéfique pour nous deux. Puisqu'on va apprendre à l'autre à se simplifier. Et nous, ils vont nous apprendre à être un peu méthodologiques. Et comme... Souvent, c'est beaucoup de personnes qui ont fait beaucoup de trucs pour des jeunes, des quartiers. Je me suis dit, pourquoi pas le faire au degré des cahiers des repentis ? Parce qu'il y en a beaucoup. Il y en a beaucoup qui sortent de prison ou ils n'en veulent plus. Mais il n'y a personne pour les accompagner. Et c'est comme ça qu'on la rencontre d'Antoine Desjardes, que j'ai rencontré grâce au pèlerinage de père de famille.

  • Benjamin

    Ah oui,

  • Rodrigue Tandu

    à Vézelay. À Vézelay, il sortait d'ordinaire. Donc, c'était un peu du jumelage quand je tourne chez les Mureaux. Et lui, c'était Le Chesnay. Vous voyez un peu le truc.

  • Benjamin

    Oui, ça fait un attelage un peu étonnant.

  • Rodrigue Tandu

    Et du coup, voilà, donc on s'est vus et on a sympathisé. Et quand je lui ai parlé, il m'a dit bingo. Donc, on a monté un groupe. Donc, ça se passe comment ? Ça se passe dans un truc très, très simple. Donc, Antoine, il a ramené deux amis à lui. Moi, j'ai ramené deux gars que je connaissais aussi.

  • Benjamin

    Et voilà, petit à petit, c'est de créer un petit réseau, tout discret, pas de pub, rien. Des moments de rencontre, une fois par mois, dans un café.

  • Rodrigue Tandu

    Et l'objectif, il est lequel ? Parce que j'entends bien l'idée de faire se rencontrer deux mondes qui ne se côtoient pas, qui ne se connaissent même pas. Mais c'est pour quelle finalité ? Pour quel but ?

  • Benjamin

    Vous voyez bien, ma vie, il n'y avait pas d'objectif. Je suis venu à Paris de Montréal. C'est la rencontre qui a changé ma vie. Moi, je crois beaucoup à la puissance de la rencontre. Moi, ma vocation, en fait, Relever les genoux affaiblis, passe par mettre des moyens, organiser des rencontres entre des personnes qui ne vont jamais pouvoir se rencontrer si je n'organise pas ces étapes. Et l'intuition même de ces groupes-là va se réaliser à travers des membres. Donc chaque groupe ne se ressemble pas, en fait. Il n'y a pas de projet précis, mais il y a quelque chose de commun entre ces deux mondes, c'est que les deux, ce sont des leaders. Et dans ce leadership-là, qu'est-ce qu'on fait ensemble ? Pour aussi la société française, pour ces jeunes.

  • Rodrigue Tandu

    Donc ce réseau existe depuis 2019 ? Voilà. Il existe toujours ?

  • Benjamin

    Il existe toujours. Il y a combien de groupes ? Il y a 7-8 groupes. Donc il y a une trentaine de personnes.

  • Rodrigue Tandu

    Et donc il est un peu le terreau sur lequel vous êtes... sur lequel vous avez pu cultiver votre activité aujourd'hui que vous menez au sein de KPMG. Alors ça, c'est pareil, c'est très étonnant, très inattendu. Mais est-ce que tu peux m'expliquer où est-ce que tu œuvres maintenant ?

  • Benjamin

    J'ai plein de projets. Vous voyez bien qu'avec le Seigneur, je suis père de famille, il faut que je me nourrisse, d'accord ? Il y a plein de projets, on peut être dans l'élan, mais il faut aussi nourrir ses enfants. Le réseau des deux cités, vous voyez que je ne peux pas en vivre.

  • Rodrigue Tandu

    Oui, c'est bénévole.

  • Benjamin

    Voilà, donc... Et après, il fallait faire des projets. Par exemple, Antoine, il a bougé. Donc, quand il est parti chez KPMG, il a dit, il faut qu'on monte une cellule pour la réinsertion des jeunes. Donc, on s'est regardé, on s'est dit, ben voilà, Rodrigue, parce qu'on était plusieurs. Du coup, c'était moi qui ai pris l'initiative d'aller encadrer ces jeunes-là. Donc,

  • Rodrigue Tandu

    KPMG, je n'ai pas précisé, c'est un grand cabinet d'audit et de conseil, l'un des plus importants en France. Et donc c'est là où tous les matins, toi tu es à la défense, tu prends la direction de cette société et où tu rejoins 7 ou 8 jeunes.

  • Benjamin

    Voilà, je suis le manager de ce groupe-là.

  • Rodrigue Tandu

    Voilà,

  • Benjamin

    tu manages. Voilà, je manage ces jeunes-là.

  • Rodrigue Tandu

    Donc l'intuition c'est peut-être aussi d'arriver un peu plus tôt dans l'histoire de ces jeunes, plutôt que de jouer les pompiers une fois qu'ils sont trop pompiers.

  • Benjamin

    Là c'est de la prévention qu'on fait. C'est de la prévention. On prend des jeunes qui nous sont envoyés par les CAID aussi. C'est des jeunes qui ont des bacs pro. technologiques, c'est un peu les neveux, les nièces des caïds, et qui ne travaillaient pas en fait. Et l'objectif, c'est de les prendre, qu'ils fassent des slides les présentations Powerpoint et de l'Excel, pour que les consultants gagnent du temps dans leurs réflexions, qu'ils fassent aussi des belles présentations, parce que les consultants leur outil de travail, c'est des présentations. L'objectif final, c'est que ils grandissent en rigueur, en méthodologie et puis voilà, se construire. une certaine forme de rigueur et de résilience, pour que par la suite, ils puissent reprendre l'école aussi. Les écoles, soit en alternance avec les métiers de KPMG, s'ils sont intéressés ou pas. Il y a ça, il y a tout ce qui est un peu... Voilà, de ce groupe, par exemple, là, on va monter avec Yann Boucaille, peut-être, un Café Joyeux, le fondateur de Café Joyeux, à Bondy. On a vu le maire. Oui, je fais plein d'actions comme ça. J'ai envie de faire, par exemple, de l'aide de devoir à domicile. En même temps, j'ai aussi cette mission, ma mission à moi aussi. Aujourd'hui, je suis chez vous pour témoigner aussi de ce Christ qui peut changer des vies. J'ai plein de projets, en fait. Oui,

  • Rodrigue Tandu

    Rodrigue Tendu ne reste jamais très longtemps au même endroit.

  • Benjamin

    Quand tu es trop tranquille, c'est là qu'il faut que tu te poses la question. Quand tu es trop à l'aise, est-ce que tu es dans la bonne voie ? C'est plutôt ça l'indicateur. Quand tu as fait cette rencontre, quand tu es comme ça, c'est ça en fait. Tu es un missionnaire permanent. Et moi, je le sais que ma vie ne sera jamais comme avant. Je ne serai jamais en paix. Je le sais. Mais il me donne la force et les moyens par les rencontres que je peux faire pour pouvoir mener à bien mon projet.

  • Rodrigue Tandu

    Comment, justement, ta foi, le fait que tu chemines avec le Seigneur, change ta manière d'être un leader, un manager ? Qu'est-ce qui fait que tu es différent peut-être d'un autre ?

  • Benjamin

    C'est quoi un bon manager ou un leader ? Un leader, c'est celui qui donne la vision. Ma vision, elle est tournée vers le ciel. Et c'est lui qui inspire confiance. Inspirer confiance, c'est que il faut que l'autre y sente que tu lui veux du bien. Et comment tu fais grandir l'autre ? C'est lui proposant un autre chemin. Que ça soit ses caïds, que ce soit n'importe qui que je rencontre. En laissant l'autre aussi libre. Parce qu'il peut nous arriver aussi des échecs, parce que le pauvre, c'est pas que celui que tu donnes à manger qui te dit merci, le pauvre c'est celui aussi qui n'est pas agréable et qui ne te dit pas merci. Parce que ta joie de vivre, ça peut être une source de violence pour cette personne. Et peut-être c'est cette pauvreté que j'ai témou. de cette violence-là. Donc j'ai appris tout ça. Comme moi, je suis tourné vers le ciel et je suis détaché. Il faut être détaché pour mener à bien cette mission. Il faut être courageux. Le courage, c'est le Seigneur qui le donne. Le détachement, ça veut dire de tout. De l'argent, de tout. Il faut être détaché de tout. Et le Seigneur le donnera.

  • Rodrigue Tandu

    Quel conseil tu donnerais à un jeune, qu'il soit décité ou pas d'ailleurs ? Qui serait tenté par l'argent facile, par la drogue ? Comment résister finalement, plus généralement, comment résister aux tentations de ce monde ? Quel conseil tu donnerais à un jeune ?

  • Benjamin

    Un jeune qui cherche enfin une évasion. Quand tu es addict au cannabis, ou un jeune qui va acheter, qui va acheter une image, qui va acheter des choses, je lui dirais que l'essentiel est ailleurs, parce qu'on croit tous à des choses qui nous dépassent. Et je dirais à ces jeunes-là, déjà, il faut qu'ils prennent le temps de s'aimer lui-même. Parce que c'est ça, la clé. La clé, elle est de l'ordre de l'amour. Donc souvent, c'est des personnes comme moi, quand je relis, c'est un conseil, c'est de prendre le temps. Je ne dis pas que je ne suis pas là pour faire la morale, lui disant c'est bien ou c'est pas bien. Prendre le temps de réfléchir. De réfléchir parce qu'on le sait. Est-ce que c'est un délire ? Parce que souvent, quand on veut prendre la drogue, c'est un délire. Donc comme nous, on avait commencé le joint, on aimait bien le foot à l'époque. On se disait qu'on allait arrêter, mais on s'est fait prendre. On s'est fait prendre. Donc ça veut dire, ce soif de liberté qu'on veut avoir, parce qu'on possède de l'argent, donc on achète, on a l'impression d'être libre. Ou bien fumer, s'évader de sa propre réalité, est-ce qu'on pense qu'on est libre ? Prendre de la cocaïne, voilà. C'est ça en fait que le jeune recherche, une évasion. Mais du coup, il faudrait qu'il prenne le temps de se dire, je veux fuir quoi ? C'est une fuite, en fait. Qu'est-ce que je veux fuir ? Qu'est-ce que je veux fuir ? C'est cette question-là. Prendre le temps. Est-ce que c'est un délire ? Pourquoi je vais délirer ? Soit c'est le pourquoi.

  • Rodrigue Tandu

    Le sens. La question du sens.

  • Benjamin

    Poser la question du sens. Ça, c'est le conseil que je leur donnerais.

  • Rodrigue Tandu

    L'autre question qu'on pose de façon traditionnelle, c'est de demander à notre invité s'il a un livre qu'il aime bien, qui a vraiment du sens pour lui. Et quand je t'ai posé la question en amont de cette émission, tu m'as dit, moi, ce n'est pas un livre, c'est plutôt une musique. Donc, quelle est cette musique ? Et pourquoi elle a fait le sens pour toi ?

  • Benjamin

    Moi, c'est Céleste Jérusalem, que je chante tous les matins. Notre cité se trouve dans les cieux. Nous verrons l'épouse de l'agneau resplendissante de la gloire de Dieu. Céleste Jérusalem Moi c'est notre cité quoi, je viens d'une cité et maintenant je me tourne vers la cité céleste, j'ai le réseau de deux cités, la cité des dieux et la cité des hommes. Le mot cité c'est quelque chose, voilà, parce que je suis tourné vers... J'ai envie de faire partie de cette cité céleste. Et c'est ça que je chante tous les matins, qui me donne la force, qui me donne... Parce que voilà, je suis humain, je reste humain, des fois il y a des combats, des fois voilà. Mais voilà, il y a des tentations, je tombe aussi. On est des pêcheurs, on pêche aussi. Mais quand on est tourné vers ça, on sait que Dieu est au-dessus de ça.

  • Rodrigue Tandu

    Il y a aussi ta prière préférée, celle que tu, peut-être comme ce chant, que tu aimes réciter régulièrement, qui te parle, qui a un écho profond en toi.

  • Benjamin

    Moi, j'aime bien l'hymne. L'hymne à la vie de Mère Thérésa. Moi j'aime bien, la vie est une chance, saisis-la. La vie est une beauté, admire-la. La vie est une béatitude, savoure-la. La vie est un rêve, réalise-le. La vie est un défi, relève-le. La vie est un devoir, accomplis-le. La vie est un jeu, joue-le. La vie est richesse, conserve-la. La vie est amour, partage-le. La vie est mystère, perce-le. La vie est promesse, remplis-la. La vie est tristesse, surmonte-la. La vie est une hymne, est un hymne, chante-le. La vie est un combat, accepte-le. La vie est aventure, Ausha. La vie est bonheur, mérite-le. La vie est la vie, défends-la. Parce que ce Dieu compris, c'est la vie, c'est la source de toute vie.

  • Rodrigue Tandu

    Et toute dernière question, Rodrigue, question assez personnelle, mais... S'il a, dans cette pièce où on est en train de réaliser cet entretien, le Christ apparaissait, qu'est-ce que tu lui demanderais ? Qu'est-ce que tu lui poserais comme question ? Qu'est-ce que tu aurais envie de lui dire ?

  • Benjamin

    Moi, je demanderais s'il me reste encore beaucoup de temps sur terre. Parce que je pense que... S'il ne peut pas m'emmener avec lui, parce que je pense que... On sera tellement plus heureux là-bas, avec lui. C'est ça que je lui demanderais. Voilà.

  • Rodrigue Tandu

    Eh bien, on arrive au terme de cet entretien. Merci beaucoup, Rodrigue, de ces réponses.

  • Benjamin

    Merci à toi.

  • Rodrigue Tandu

    Je rappelle que ton livre témoignage de la cité de Bondy à la cité du bon Dieu est disponible déjà depuis quelques temps aux éditions Artej, et donc dans toutes les bonnes librairies.

  • Benjamin

    Merci.

  • Merci de nous avoir écoutés. Si ce podcast vous a plu, n'hésitez pas à le partager autour de vous, à laisser un commentaire et une note de 5 étoiles sur les plateformes d'écoute et les réseaux sociaux Les Podcasts de 2FC pour faire bénéficier de ce podcast un maximum de personnes. Pour découvrir d'autres témoignages de feu, vous pouvez bien sûr écouter les autres épisodes du podcast, mais aussi lire chaque semaine la rencontre avec un témoin touché par la grâce dans le magazine Famille Chrétienne et... Et enfin, n'hésitez pas à découvrir les autres podcasts de Famille Chrétienne. Toussaint, ces témoins de la foi racontés par Bénédicte de Lelys, Maman Prie, Sexo, Sacrée Histoire et d'autres encore. Un grand merci et au prochain premier lundi du mois pour un nouvel épisode.

Description

Rodrigue Tandu est arrivé du Congo à Bondy, dans une cité de la région parisienne, à l'âge de 7 ans. Sa scolarité se passe sans histoire, jusqu’au lycée, situé à Noisy-le-Sec, en territoire ennemi. Quand une bande de Noisy croise ceux de Bondy, c’est la bagarre assurée. Il ne va plus à l’école, traîne dans la rue… Commencent les petits trafics, puis les gros, la drogue notamment, qui lui assure des revenus conséquents. Le jeune homme devient un caïd, qui donne des coups et les encaisse. Jusqu'au jour où il croise des consacrées de la communauté de l'Emmanuel, qui le persuadent de venir avec elles à Paray-le Monial. Le dealer fait alors une rencontre bouleversante avec le Christ qui transforme radicalement sa vie.

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Ce podcast est réalisé par Famille Chrétienne


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Transcription

  • Benjamin

    Bonjour, je m'appelle Benjamin et je vous souhaite la bienvenue dans la cinquième saison d'Un beau jour, un podcast de famille chrétienne. Un beau jour, c'est l'histoire d'hommes et de femmes croyants qui menaient une vie tranquille, tracée d'avance. Et puis, Un beau jour, un événement inattendu et bouleversant a complètement infléchi le cours de leur existence. Il nous raconte comment ils en ont été bousculés, changés, rabotés, transformés dans leur vie et dans leur foi. Je suis sûr que vous serez comme moi édifiés et enrichis par ces récits livrés, le cœur et l'âme grands ou morts. Il était un des caïds de Bondy en Seine-Saint-Denis. Jamais passé par la case prison, Roderick Tendu n'en est passé... pas loin, mouillé alors dans le trafic de drogue. Jusqu'au jour, un beau jour, où le jeune homme a rencontré celui qui allait changer radicalement son existence. Bonjour Rodrigue et merci de nous avoir rejoint pour venir raconter aux auditeurs d'un beau jour ton incroyable histoire. Pour commencer cet entretien et comme c'est la tradition dans notre émission, peux-tu nous présenter l'objet symbolique de ton itinéraire que tu as amené ? avec toi aujourd'hui.

  • Rodrigue Tandu

    Bonjour Benjamin, moi je vais ramener une croix. C'est une croix que ma grand-mère m'a offerte. Voilà, c'est une croix que je garde souvent dans ma poche et qui me permet quand je suis tenté ou il y a des tentations, je la garde auprès de moi pour aussi la présence du Seigneur.

  • Benjamin

    C'est une croix que tu as avec toi depuis longtemps.

  • Rodrigue Tandu

    Oui, ça fait depuis plus de 20 ans que je l'ai, que je garde ça.

  • Benjamin

    Toujours dans ta poche. Alors Rodrigue, avant d'en venir au jour de ta conversion, est-ce que tu peux nous parler un peu de toi ? Je sais que tu es né en 1979, en République démocratique du Congo, un pays que tu as quitté à l'âge de 7 ans pour la France et donc une cité de Bondy, cette ville de Seine-Saint-Denis près de Paris. tout simplement de ces premières années en France, du souvenir que tu en as, de comment ça se passait vraiment au quotidien.

  • Rodrigue Tandu

    Je suis arrivé l'hiver, il y avait de la neige, je me rappelle. Je ne savais pas c'était quoi. J'ai cru que c'était des plumes d'oiseaux.

  • Benjamin

    Des plumes d'oiseaux ?

  • Rodrigue Tandu

    Je me suis dit, mais tiens, il y a une usine de volailles ici. Et voilà, il faisait horriblement froid et c'était... Et je me suis dit que c'était une ville éclairée. il y avait de la lumière partout et pour moi c'était étonnant voilà ça c'était mon rapport d'étonnement quand je suis arrivé en France et après ça se passait très très bien tu habitais où ?

  • Benjamin

    je suis arrivé à Bondy direct dans le livre tu parles de cet appartement dans ce bâtiment qui est un parallépipède je crois c'est la cité pour les bondylois c'est la cité du marché en face du marché donc

  • Rodrigue Tandu

    il y avait un 5 étages on habitait au 5ème étage c'est là que je suis arrivé

  • Benjamin

    Donc tu es orphelin quand tu arrives en France. Tu rejoins, je crois, ton oncle. Non, mon père. Ton père, voilà.

  • Rodrigue Tandu

    C'est ma mère qui est décédée par la République démocratique du Congo quand j'avais 7 mois. Donc je rejoins mon père. D'accord. Avec une belle mère. Et j'avais déjà mes oncles, les petits frères de mon père, tout ça, qui étaient là. C'est après que ma grand-mère nous a rejoints.

  • Benjamin

    Mais est-ce que, c'est vrai qu'on se pose la question, est-ce que ces premiers mois, ces premières années se font ? Assez facilement, quand on vient d'Afrique, on imagine que c'est, tu l'as décrit d'ailleurs, que c'est un choc, il y a plein de choses qui diffèrent. Est-ce que tu le vis sereinement, paisiblement, ou est-ce que c'est, j'imagine aussi, un peu compliqué par certains aspects ?

  • Rodrigue Tandu

    Je découvre un monde où il y a une certaine froideur quand même. Chacun est chez soi, personne n'est dehors.

  • Benjamin

    Pas qu'à cause de la neige alors ? Non,

  • Rodrigue Tandu

    non, non. Et qu'on passe plus de temps chez soi que dehors.

  • Benjamin

    Je reviens à l'école parce que donc, si je comprends bien, la scolarité se passe bon an, mal an, plutôt bien jusqu'aux primaires, collèges et autres. Et puis toujours dans ce livre dont je donnerai la référence tout à l'heure. Eh bien, tu expliques que le lycée, il faut aller dans une autre commune, Noisy-le-Sec. Il faut sortir du quartier, il y a le problème déjà des bandes et autres. Et... Pour toi, j'ai l'impression que ça marque vraiment le début d'une dégringolade assez vite. Un basculement. Alors, est-ce que tu peux...

  • Rodrigue Tandu

    Donc, le collège, ça va, donc on est tous orientés. Au troisième, on est tous confrontés à la question de l'orientation. Moi, je me rappelle, j'avais choisi Polytechnique. Je ne savais même pas c'était quoi, mais le nom, il me paraissait bien.

  • Benjamin

    Ça faisait chic.

  • Rodrigue Tandu

    Polytechnique, ça faisait bien. Tous ceux qui avaient choisi un peu ces lycées professionnels électroniques de Bondy, on a été orientés dans un lycée qui s'appelait Moulin Fondu, à Noisilles-Sec. Donc, c'est une ville limitrophe de Bondy. Et en face de ce lycée, il y avait une cité. Et cette cité-là, elle est en guerre avec Bondy. Donc, c'est là le début du basculement.

  • Benjamin

    Parce que tu décris aussi dans le livre, il y a cette fameuse ligne de bus qu'il faut prendre. Et il y a un sentiment de danger, c'est ça ? Comment tu te sens justement à cette époque quand il s'agit d'aller dans ce...

  • Rodrigue Tandu

    Non, au début, ça va. Au début, ça allait. Mais c'est après. Donc, on y allait, on allait en bande. Donc, on se rejoignait, on partait. Cinq ou six ou sept. Ça ne nous faisait pas d'angoisse. Ça nous faisait au contraire un peu voyager. C'était un changement. Sauf qu'après, un jour, j'ai un pote à moi qui se bat avec un mec de ce quartier. Et moi, je viens parce que dans ce bar, on est solidaires. Je rentre dans la bagarre. C'est un peu lâche, mais on tape le monsieur à deux. Et on rentre au cours et depuis ce jour-là, c'était compliqué pour nous d'aller à l'école. Parce que la cité nous attendait tous les jours pour nous faire la peau. Ils cherchaient tous les mecs de Bondy. Donc c'est comme ça que la bascule a commencé.

  • Benjamin

    Ta famille te pense au lycée, mais en fait, toi, tu commences à faire l'école de Saunière.

  • Rodrigue Tandu

    On allait tous à l'école. Et du coup, comme on risque notre peau, on n'y va plus. Donc comme on est dans un milieu où on se livre peu, on fait le fort. malgré qu'on a des soucis, on ne dit rien.

  • Benjamin

    Tu parles matin à l'école, normal, tu rentres le soir, tu expliques que quand tu rentres, tu t'arrêtes à la boîte aux lettres pour récupérer les éventuels courriers du lycée, c'est ça ? C'est ça. Pour intercepter ?

  • Rodrigue Tandu

    C'est ça, le matin.

  • Benjamin

    Parle-nous de ces journées, de quoi elles sont faites, parce que s'il n'y a pas l'école pour un jeune...

  • Rodrigue Tandu

    Dans les quartiers, il y a des caves. On avait aménagé une cave. avec des canapés, on a volé un peu l'électricité, on a mis une télé, des consoles, c'était ça notre journée.

  • Benjamin

    Donc c'était quoi, un peu...

  • Rodrigue Tandu

    Voilà, on sort, on va, on se pose, et voilà, après on se bat un peu, on s'entraîne à la bagarre, c'était ça, c'était à l'âge de 16-17 ans.

  • Benjamin

    Et alors à quel moment tout ça, j'allais dire, peut paraître sympathique, non c'est pas tout à fait le terme, mais en tout cas à quel moment tout ça prend une tournure un peu plus... grave avec l'entrée dans peut-être le commerce de la drogue.

  • Rodrigue Tandu

    On a commencé à avoir pas mal de gens aussi autour de nous qui n'allaient plus à l'école. Et ces fréquentations-là, il y en a, ils avaient déjà basculé un peu dans tout ce qui est cambriolage, tout ça. Donc on a commencé à cambrioler. Je ne suis pas fier de ça, mais ça, c'est ma vie. cambriolé. Du coup, on cambriolait. Donc, on trouvait des fusils. Ces fusils-là, on les gardait. Et c'est un âge où tu commences à t'affirmer aussi physiquement. Et voilà. Donc, on commence à être craint. Ça veut dire qu'on est armé, on n'a plus peur. Donc, on se bat tout le temps. Et du coup, on commence à être craint. Et c'est là qu'on commence à avoir une réputation. Parce que Bondy, ce n'est pas une ville qui fait des émeutes gratuites. Mais c'est une ville beaucoup de... de grand banditisme, beaucoup de business en fait. On ne fait pas de...

  • Benjamin

    Donc il vaut mieux qu'il n'y ait pas de trop... Non,

  • Rodrigue Tandu

    tu ne vas pas aller en prison parce que tu as tapé un flic et ça ne sert à rien. C'est con. Mais tu vas en prison parce que tu as risqué de l'argent.

  • Benjamin

    Il faut qu'il y ait un intérêt.

  • Rodrigue Tandu

    C'est pécunier. Et ça, ça a été toujours inculqué par les grands.

  • Benjamin

    Donc si je comprends bien, votre bande commence à prendre de l'épaisseur, j'allais dire, commence à être respectée, comme tu l'as dit. Et donc vous êtes repéré par des...

  • Rodrigue Tandu

    de plus grands qui vont vous mettre dans le j'allais dire dans le circuit du narcotrafic comme les grands ils étaient bien placés nos grands bandits dans le banditisme ils ont placé aussi donc voilà moi les grands qui m'ont mis dedans ils m'aimaient bien parce qu'ils m'ont vu depuis tout petit tout le monde se connait bien évidemment depuis longtemps depuis très très longtemps même quartier même quartier et voilà t'envis aussi un peu les grands parce que tu vois qu'ils s'habillent bien

  • Benjamin

    Tu te souviens dans quel état d'esprit tu es à l'époque ? Est-ce que déjà, dans un coin de ton âme, tu te dis « Finalement, ce que je fais, c'est quand même peut-être pas clean, c'est pas bien. »

  • Rodrigue Tandu

    Après, dans le quartier, on est tous croyants. On sait que ce qu'on fait, c'est bien ou pas bien. On connaît déjà le bien et le mal. Toi,

  • Benjamin

    tu te présentes comme un chrétien auprès de tes amis musulmans ?

  • Rodrigue Tandu

    Oui, mais j'étais toujours chrétien.

  • Benjamin

    Toi, tu te disais chrétien, pardon.

  • Rodrigue Tandu

    Parce que j'étais baptisé, j'ai eu la première communion. Mais je n'ai pas fait la confirmation à cause des entraînements de foot. Oui. Voilà. Et l'état d'esprit, parce que du coup, à ce moment-là, on commence déjà à fumer du cannabis. Du coup, le cannabis, ça te met en état d'esprit où tu t'en fous de tout. C'est un esprit où tu ne sais pas où tu vas. Mais comme tu sais qu'il faut que tu n'existes pas parce que tu es, tu existes parce que tu as, donc tu es dans cet état d'esprit-là, la quête du truc. Mais tu te dis qu'un jour, je vais arrêter. Un jour, j'aurai une vie normale. Mais du coup, tu rentres dans une certaine forme de spirale.

  • Benjamin

    Donc tu te dis que ça va être provisoire pour un moment.

  • Rodrigue Tandu

    Voilà, tu fixes une somme, après tu fais une autre. Oui,

  • Benjamin

    parce que pareil, dans le livre et d'écrit, c'est quand même des sommes conséquentes, jusqu'à 3 000 euros par jour, tu l'expliques, qui peuvent être le fruit de ce trafic.

  • Rodrigue Tandu

    Oui, parce qu'on était quand même dans... On était grand dans ce business. Donc voilà, et c'était le début aussi de la structuration de ce business. Tu expérimentes pas mal de choses, et du coup, t'as ça inverse, tes codes. Tu découvres que tu peux avoir les filles que tu veux, tu peux avoir les habits que tu veux, et du coup, tu te dis que être gentil, c'est pas bien. Être méchant, c'est bien. Être fidèle à une copine, c'est pas bien. Avoir plusieurs meufs, copines, c'est bien.

  • Benjamin

    Est-ce qu'il n'y a pas un moment où ça frotte ?

  • Rodrigue Tandu

    Tu découvres, c'est là que le diable, il est fort. Parce que c'est une forme de puissance qu'on avait. Et puis tu possèdes les autres. Tu achètes les autres. Parce que tout le monde est corruptible. Et tu découvres ça. C'est tout ça, en fait.

  • Benjamin

    Donc c'est vraiment le pouvoir de l'argent, du sexe, la force. Voilà.

  • Rodrigue Tandu

    Et la liberté, en fait. Tu te prives de rien.

  • Benjamin

    Et tout, tout de suite.

  • Rodrigue Tandu

    Tout, tout de suite. Instantané.

  • Benjamin

    Il y a un moment, donc tu expliques dans le livre, qu'il y a cette rencontre avec Arlette. Claire et Eliane.

  • Rodrigue Tandu

    Voilà, les trois sœurs.

  • Benjamin

    Des laïcs consacrés, c'est ça, pour être précis ? De la communauté de l'Emmanuel, qui sont installés à Bondy. Est-ce que tu peux nous expliquer comment se passe la rencontre ? Comment ça se passe ?

  • Rodrigue Tandu

    Moi, on était dans le coin où on faisait nos trafics, donc je m'apprêtais, moi, j'allais récupérer des sous. Et on voit trois bonnes sœurs qui rentrent. Trois blanches, mais des blanches pas comme nous, quoi. Parce qu'on se connaît tous. Mais les blancs de quartier sont comme nous. Ils parlent comme nous, voilà. Et je vois ces trois, on les fouille.

  • Benjamin

    Ah oui, carrément.

  • Rodrigue Tandu

    Ah oui, on les affiche. On pensait que c'était des flics. Et on se rend compte que c'est des sœurs. Et on se rend compte que c'est des sœurs. On se dit, mais moi, je me dis, on respecte quand même le religieux. On respecte pas le religieux pour respecter, on se dit que... S'ils ont fait le choix de prier Dieu, de donner leur vie à Dieu, que ce soit le musulman ou la sœur consacrée ou le prêtre, Dieu peut nous punir. C'est comme ça qu'on voit les choses. Et du coup, moi, je lui dis, écoute, ma sœur, mes sœurs, priez pour moi, mais cassez-vous d'ici. Je ne voulais pas... Priez, faites votre rôle, mais ne venez plus. Et c'est là que mes problèmes ont commencé. Du coup, en leur disant ça, je leur ai dit que j'étais catholique, chrétien. Moi, je pensais qu'ils allaient arrêter. Et comme, du coup, quand il me voyait dans le quartier, il me parlait souvent, « Rodrigue, on prie pour toi, Rodrigue, il faut que tu changes d'ami, oui. »

  • Benjamin

    Ça, c'est surtout Sœur Claire, si je me souviens bien.

  • Rodrigue Tandu

    Oui, après, Claire, elle était assistante au CED, les autres, elles travaillaient. Du coup, le lien de confiance était plutôt avec Claire. D'accord. Mais ça, elle a mis du temps avant que je puisse lui faire confiance.

  • Benjamin

    Elle a mis combien de temps ?

  • Rodrigue Tandu

    Ça a duré deux ans, quand même.

  • Benjamin

    Deux ans ?

  • Rodrigue Tandu

    Mais ce lien, je dirais qu'ils se le louent parce qu'elles habitaient aussi le quartier. Donc elles étaient devenues comme nous. Ce n'étaient pas des gens qui venaient et qui partaient. Donc on les voyait tout le temps faire leurs courses. Leur vie quotidienne, elle était avec nous. Et ça, ça interpelle. Et comme on est tous croyants, parce que comme on ne se livre pas, quand t'es angoissé ou culé, tu ne te livres pas. Tu ne vas pas dire à tes potes, j'ai mal dormi. Ou une meuf, elle t'a quitté, que t'aimes. une copine que t'aimes, tu vas pas lui dire je souffre, tu vas dire à toi, qu'est-ce qu'on a ? Tu fais le dur, mais on peut pas dire à nos parents, on peut dire à personne, donc c'est souvent, c'est dans la prière, mais des prières, ouais, Dieu, je recommencerai plus, des prières comme ça.

  • Benjamin

    Et donc, il y a une bagarre à Paris, il y a un garçon...

  • Rodrigue Tandu

    Comme on était armé, moi, j'hésitais pas à tirer, mais j'ai tiré sur un mec. Et ce mec-là, il n'est pas mort. Et comme j'avais peur d'aller en prison pour une grosse peine, du coup, il fallait que je prie parce que j'ai mal dormi. Et j'ai dit à la sœur, c'était chaud. Mais du coup, elle m'a ouvert l'église. Et ça m'a fait plaisir. Et du coup, j'ai prié, mais je n'ai pas prié beaucoup. J'ai dit, Dieu, si tu me sauves de cette peine, je ne recommencerai plus les prières comme ça.

  • Benjamin

    Mais il y a déjà quelque chose qui se passe là, parce que tu expliques qu'il y a eu une... paix quand même.

  • Rodrigue Tandu

    Oui, et là, je sentais une paix, je sentais une présence. Et c'est là que je me suis dit, peut-être qu'il y a quelque chose et tout. Et du coup, dans cet élan-là, la sœur a revu à la charge, tu sais, Rodrigue, il faut que tu changes d'ami et tout. Et du coup, je lui ai dit, d'accord, mais je pourrais aller là où...

  • Benjamin

    Quelle est la proposition que sœur Claire, assez vite, finalement,

  • Rodrigue Tandu

    t'a fait ? Elle m'a dit qu'on a un lieu où tu peux aller aussi prier comme ça, voilà. Et je lui ai dit, ok. Et ce lieu, c'est ? C'est Paray-le-Mognal.

  • Benjamin

    Paray-le-Mognal.

  • Rodrigue Tandu

    Et je connaissais pas du tout, je savais même pas c'était quoi. Même la communauté d'Emmanuel, je ne savais même pas ce que c'était. Et du coup, je lui ai dit OK. Et du coup, on s'est donné rendez-vous. Elle m'a ramené les papiers d'inscription. Donc, elle m'a inscrit à Parallel Monial.

  • Benjamin

    On est en quelle année là ?

  • Rodrigue Tandu

    C'était quelle année ? 2000, 2001, 2002,

  • Benjamin

    je crois. Et tu te retrouves donc, tu quittes Bondy, que j'imagine que tu ne dois pas quitter très, très souvent.

  • Rodrigue Tandu

    Non, on va en vacances quand même. Avec l'argent qu'on a. On va en Thaïlande.

  • Benjamin

    En tout cas, tu n'es jamais allé à Parelmonial. Donc, tu débarques à Parelmonial, dans ce petit village bourguignon. Pareil, raconte-moi comment...

  • Rodrigue Tandu

    Quand j'arrive là-bas, je vois une grande tante, je vois beaucoup de blancs qui rigolent, qui sont gentils. Tous mes codes sont bouleversés. Et je me dis, mais ils se foutent de ma gueule. C'est comment ? Pas des blancs comme les nôtres, mais des blancs un peu des têtes de juge, des blancs policiers, des militaires, des trucs comme ça. Et tu te dis, mais qu'est-ce que je fous là ? Parce que c'est pas un traquenard. C'était un peu ça, mon impression au départ.

  • Benjamin

    Qu'est-ce qui fait que tu restes ?

  • Rodrigue Tandu

    Je suis là, déjà.

  • Benjamin

    Parce que t'aurais pu te dire...

  • Rodrigue Tandu

    Je suis là avec la sœur. Je suis quelqu'un, quand je donne une parole, j'aime bien qu'elle... Et après, comme ça, les sœurs, elles vont plus me prendre la tête.

  • Benjamin

    C'est une manière de payer un peu ta dette.

  • Rodrigue Tandu

    Voilà, et quand je rentre...

  • Benjamin

    Sauf qu'il va se passer quand même un truc étonnant. C'est-à-dire qu'à un moment, tu vas rentrer sous la grande tente, tu vas voir...

  • Rodrigue Tandu

    Donc je vois le Saint-Sacrement.

  • Benjamin

    Dont tu ne sais pas ce que c'est à l'époque. Voilà,

  • Rodrigue Tandu

    je ne sais pas. Pour moi, c'est une boule. Et je vois... Ils mettent le lançant, tout ça, voilà. Et là, mon côté congolais reprend. Je me dis, attends, ils sont en train de prendre une boule. C'est des sorciers. Du coup, je me suis dit, c'est quoi ce truc ? Mais je sens que ça m'attire. Et c'est là que je me suis rapproché. Je suis tombé à genoux et j'ai commencé à demander pardon. Et à pleurer, surtout. Et je me suis dit, soit c'est le shit que j'ai fumé qui me joue des tours, ou ça ne va pas.

  • Benjamin

    Est-ce que tu peux nous en dire un peu plus ? Parce que ça semble complètement dingue.

  • Rodrigue Tandu

    J'ai senti un amour immense, mais pas un truc agressif. Et c'est ça qui m'a demandé... Je sentis une présence aimante. C'est aimante d'un amour que je n'avais jamais expérimenté et d'un amour que tu ne peux pas faire du mal.

  • Benjamin

    Mais quelle est cette force qui te fait te mettre à genoux, qui te tire des larmes ?

  • Rodrigue Tandu

    C'est cette présence qui m'a englopé, que là, je me suis mis à genoux. Parce que ça m'a désarmé, en fait. Et du coup, c'est là que je suis tombé à genoux. Et il a demandé pardon, mais sans le calculer, en fait. Il a demandé pardon et a pleuré.

  • Benjamin

    En même temps, tu dis que tu étais croyant, que tu connaissais Dieu, tu étais baptisé. Bon, on peut être baptisé sans croire, mais tu avais cette foi. Qu'est-ce qui fait qu'à ce moment-là, cette foi devient, j'allais dire, concrète, qu'elle va changer quelque chose ?

  • Rodrigue Tandu

    Après, ça, c'est la volonté de Dieu. Il vient chercher qui il veut. Il choisit les gens. Moïse, par exemple. Dieu, il choisit qui il veut. Il a des projets pour chacun d'entre nous, mais à la hauteur de ce qu'il veut pour chacun d'entre nous. Voilà, donc c'est cet amour-là que je ne peux pas le dire. Je ne suis pas dans la tête de Dieu. C'est ce jour-là qui m'a sauvé. Qui ne m'a pas sauvé. Mais voilà, donc après, j'ai entendu une voix intérieure qui m'a dit, va et jette le truc que tu as ramené, parce que comme je suis addict au cannabis, moi, je voulais fumer mes joints tranquilles, fermer cinq jours et rentrer, et jette-le. Et même là, mon côté bondinois a repris. Quand je marchais pour aller le chercher, je me suis dit, peut-être que je peux le vendre là. Je peux trouver un client. Mais je l'ai jeté quand même, le cannabis, parce que c'était une voie obéissante. Et depuis ce jour-là, je n'ai plus jamais fumé. Il n'y a que la force de Dieu qui peut faire ça. C'est cet amour absolu qui te désarme, en fait. Et du coup, c'est cette rencontre.

  • Benjamin

    Qu'on comprenne bien, Rodrigue, du moment où tu sors de cette tente de l'adoration, tu es devenu chrétien ? Ça y est, tu es croyant ? Tu vas changer de vie ?

  • Rodrigue Tandu

    Non, je me pose d'abord beaucoup de questions. Si c'est le shit qui me joue des tours, si j'entends de voix, si ce n'est pas la psychiatrie, tout ça. Au départ, je suis bouleversé quand même. Ce n'est pas être croyant, c'est là-bas que je suis bouleversé. Et c'est petit à petit que, quand il t'arrive un truc comme ça, c'est petit à petit, c'est des signes. Mais ce n'est pas tout tout de suite, en fait. Après, je me dis, bon, puisque j'ai vécu ça et ça te rend mendiant. Donc du coup, moi, je n'allais pas trop à la messe. Du coup, je cherchais la boule. Le saint Saint-Camban. Donc, j'ai passé beaucoup de temps à adorer, à donner pardon. Et j'ai cru que je t'ai donné ça. Et je me suis dit, quand je vais rentrer à Bondy, je vais dire à mes potes, ouais, j'ai trouvé une boule magique. Et aussi, ils vont devenir comme moi.

  • Benjamin

    Parce que ce que tu as vécu là, en fait, si je comprends bien, tu n'as pas pu, sur ces cinq jours, les cinq jours de ce Forum des Jeunes, tu n'as pas pu en parler à quelqu'un, expliquer ce que tu avais vécu ?

  • Rodrigue Tandu

    Et à Claire, j'en ai parlé. Elle m'a accompagné quand même. Donc à Claire, mais je me suis confessé aussi.

  • Benjamin

    Tu vas rentrer au bout de ces cinq jours à Bondy, forcément un peu différent, mais jusqu'à quel point différent en fait ? Ce que tu as vécu là, ces jours-là, qu'est-ce que ça va changer directement dans ta vie ?

  • Rodrigue Tandu

    En gros, ce que j'ai vécu, ça donne du courage. Voilà, c'est du courage. D'assumer ce que... Parce que j'ai découvert un amour que personne ne peut me donner. Même pas mes amis, rien. Donc tu le vois dans le courage qui te pousse à t'affirmer. Et c'est là que je commençais à chanter des Alléluia, Nanani. Et je commençais à être maintenant dans la morale. Ça veut dire dans le bien, pas le bien ou le mal. Donc je ne pouvais plus faire les trucs d'avant. Je ne pouvais plus faire du mal aux gens. C'est là où c'était dur, parce qu'il fallait qu'on se détache. J'avais ramené mes copains, voire aussi l'adoration au Christ ressuscité, l'église de Bondy. Mais ça n'avait rien passé pour eux. Donc l'adoration, ils m'ont pris pour un menteur, un mytho. Donc c'était plutôt ça. Donc petit à petit, je commençais à m'éloigner d'eux.

  • Benjamin

    Quand tu dis petit à petit, ça a pris combien de temps en fait ? C'est un processus qui se fait en quelques mois ou c'est plus long, plus court ?

  • Rodrigue Tandu

    Après moi, je dirais pour moi. Donc il y en a, c'est plus radical, moins, mais moins.

  • Benjamin

    Mais toi, je veux dire, ton changement de vie et puis le fait... de te sentir...

  • Rodrigue Tandu

    Le jour où ça a commencé que je ne pouvais plus. Donc petit à petit, l'esprit que tu dégages te fait rejeter par les autres. Parce que vous n'êtes plus dans le même état d'esprit en fin de compte. Donc toi, c'est comme si tu venais éclairer leur... Donc du coup, il y a un rejet parce qu'ils ne sont pas prêts. Donc du coup, petit à petit, tu es rejeté un peu et petit à petit, tu t'éloignes en fait.

  • Benjamin

    Tu as même pensé à un moment devenir être prêtre ? Tu t'es posé la question.

  • Rodrigue Tandu

    Après, avec Claire, comme elle m'éclairait beaucoup, je me suis...

  • Benjamin

    Donc cette laïque de l'Emmanuel, je rappelle.

  • Rodrigue Tandu

    Elle m'a beaucoup fait... Je fais l'école de château et de mission. Donc je me suis approché de... J'ai rencontré d'autres types de chrétiens de mon âge. Et c'est là que j'ai compris qu'il y en avait. Ils faisaient des grandes écoles, polytechniques, ESSEC, HEC, tout ça. Avant, je ne savais pas que ça existait. On n'était pas dans le même monde. On était dans le même pays, mais pas dans le même monde. Et ces jeunes-là, on est en parté, donc l'école de chartes et de missions, c'était une école de réflexion. Et c'est de là que j'ai commencé à me poser cette question. Mais après, je me suis dit, mais ce n'est pas possible. Moi, Rodrigue, prêtre, j'aurais... L'Église serait barrée en live.

  • Benjamin

    Donc, ça ne sera pas la prêtrise, mais par le biais de... pas mal de rencontres, il y a la possibilité de devenir un jour éducateur, et pareil, c'est de l'ordre d'un appel intérieur. Est-ce que tu peux nous raconter comment ça s'est passé ?

  • Rodrigue Tandu

    Et du coup, voilà, je me posais cette question, et je repars à Paris le Mondial, donc du coup avec Cyril Tisserand, là, cette fois-ci. Cyril Tisserand, c'est le fondateur de l'association Le Rocher, qui était venu habiter dans le quartier, dans le cadre de Fidesco, et petit à petit, il a monté l'association Le Rocher. C'était une personne que je connaissais peu, mais petit à petit, je commence à le connaître grâce à... Parce que c'est quelqu'un qui est quand même beaucoup ancré dans la foi. Et je vais à Parallel Monial. Du coup, je vais dans une église, je prie et j'entends la voix intérieure. « Rodrigue, ce n'est pas dans une église que je te veux, c'est dans la rue. Va et relève les genoux d'affaibli. » Et c'est là que je découvre ma vocation. Et j'ai une mot, je discute un peu avec lui comme éducateur. Et du coup, il me dit, tiens, je rencontre un directeur de formation des apprentis d'auteuil. Et c'est là que... Mais c'était facile parce que du coup, une fois que j'ai dit oui pour ça, pour cette vocation-là, tout s'est déroulé facilement. Donc du coup, je suis rentré au centre de formation des apprentis d'auteuil.

  • Benjamin

    Les portes se sont ouvertes facilement.

  • Rodrigue Tandu

    Voilà, c'est ça. On dirait le Seigneur m'avait précédé.

  • Benjamin

    Il y a un passage qui est amusant dans le livre, c'est que tu expliques que tu préfères te confronter aux fortes têtes qu'à ceux qui ont peut-être plus un profil de victime. C'est aussi l'héritage de se passer à la rue avec d'autres.

  • Rodrigue Tandu

    J'étais fragile autrement, mais j'avais une carapace. Donc moi, je connais plus ces codes-là. J'ai dû... Quelqu'un qui est fragile, fragile par mon charisme. Je peux faire plus de mal que de bien. Parce que je peux être brut. Il y a une certaine forme dans l'éducatif. Il y a une forme de prudence et de bienveillance. Et quelqu'un qui est très, très fragile, des profils comme moi, ça peut être compliqué. Parce que tu peux arriver comme un bourrin dans quelque chose qui...

  • Benjamin

    Où il faut arriver avec un peu plus de délicatesse.

  • Rodrigue Tandu

    Voilà.

  • Benjamin

    Pareil, quand tu entends, je reviens sur cet appel entendu à Paray-le-Monial de devenir éducateur. Est-ce qu'à un moment, ça ne t'a pas semblé aussi un peu incongru ? Quand on a l'histoire que tu as, est-ce qu'il n'y a pas un moment où on se dit mais est-ce que je suis légitime pour aider d'autres jeunes à s'en sortir ?

  • Rodrigue Tandu

    Moi, dans mon histoire, on ne se pose pas trop de questions. C'est quand je suis sorti que j'ai vu beaucoup de gens. de ces écoles qui intellectualisent, qui posent... Nous, en tout cas, on ne se pose pas beaucoup de questions. On avance, en fait. Une fois que tu as dit oui, tu avances. Et après, tu vois. On n'est pas des gens qui se projettent, qui s'assoient, qui créent un projet, qui font un tout doux. On n'est pas des gens comme ça. On avance et on avise après.

  • Benjamin

    Alors, Rodrigue, tu vas travailler, donc tu l'as dit, tu vas bénéficier d'une formation. Tu vas travailler avec les orphelins apprentis d'Auteuil, avec l'association Le Rocher. En 2019, tu crées le réseau des deux cités avec un garçon qui s'appelle Antoine Déjar, qui a fondé un cabinet de conseil en stratégie en 2019. Et donc, c'est un parti pris assez novateur, parce que ce réseau, il a pour but de mettre en relation des chefs d'entreprise et des caïds repentis. Explique-moi comment ça marche.

  • Rodrigue Tandu

    Moi, quand j'étais au Rocher, j'ai vu des étudiants polytechniques, HEC, tout ça. Et je me suis dit, c'est des mecs qui sont brillants, méthodiques. Ils résinent pas la tâche, ils abattent pas mal de tâches de travail, mais ils intellectualisent tous les mecs. Et ils ont pas ce courage, cet élan qu'on peut avoir, nous. Cette simplicité relationnelle. Ils marchent un peu sur un pied. Et nous, à l'inverse... On a tous ce côté un peu spontanéité, intuitif, et la simplicité dans la relation à l'autre. Mais on n'a pas toutes ces méthodes, toutes ces capacités à être méthodiques, rigoureux, tout ça. Et je me suis dit, le contact des deux peut être une richesse. Nous aussi, on marche sur un pied. Donc quand on contacte les deux, ça peut être que bénéfique pour nous deux. Puisqu'on va apprendre à l'autre à se simplifier. Et nous, ils vont nous apprendre à être un peu méthodologiques. Et comme... Souvent, c'est beaucoup de personnes qui ont fait beaucoup de trucs pour des jeunes, des quartiers. Je me suis dit, pourquoi pas le faire au degré des cahiers des repentis ? Parce qu'il y en a beaucoup. Il y en a beaucoup qui sortent de prison ou ils n'en veulent plus. Mais il n'y a personne pour les accompagner. Et c'est comme ça qu'on la rencontre d'Antoine Desjardes, que j'ai rencontré grâce au pèlerinage de père de famille.

  • Benjamin

    Ah oui,

  • Rodrigue Tandu

    à Vézelay. À Vézelay, il sortait d'ordinaire. Donc, c'était un peu du jumelage quand je tourne chez les Mureaux. Et lui, c'était Le Chesnay. Vous voyez un peu le truc.

  • Benjamin

    Oui, ça fait un attelage un peu étonnant.

  • Rodrigue Tandu

    Et du coup, voilà, donc on s'est vus et on a sympathisé. Et quand je lui ai parlé, il m'a dit bingo. Donc, on a monté un groupe. Donc, ça se passe comment ? Ça se passe dans un truc très, très simple. Donc, Antoine, il a ramené deux amis à lui. Moi, j'ai ramené deux gars que je connaissais aussi.

  • Benjamin

    Et voilà, petit à petit, c'est de créer un petit réseau, tout discret, pas de pub, rien. Des moments de rencontre, une fois par mois, dans un café.

  • Rodrigue Tandu

    Et l'objectif, il est lequel ? Parce que j'entends bien l'idée de faire se rencontrer deux mondes qui ne se côtoient pas, qui ne se connaissent même pas. Mais c'est pour quelle finalité ? Pour quel but ?

  • Benjamin

    Vous voyez bien, ma vie, il n'y avait pas d'objectif. Je suis venu à Paris de Montréal. C'est la rencontre qui a changé ma vie. Moi, je crois beaucoup à la puissance de la rencontre. Moi, ma vocation, en fait, Relever les genoux affaiblis, passe par mettre des moyens, organiser des rencontres entre des personnes qui ne vont jamais pouvoir se rencontrer si je n'organise pas ces étapes. Et l'intuition même de ces groupes-là va se réaliser à travers des membres. Donc chaque groupe ne se ressemble pas, en fait. Il n'y a pas de projet précis, mais il y a quelque chose de commun entre ces deux mondes, c'est que les deux, ce sont des leaders. Et dans ce leadership-là, qu'est-ce qu'on fait ensemble ? Pour aussi la société française, pour ces jeunes.

  • Rodrigue Tandu

    Donc ce réseau existe depuis 2019 ? Voilà. Il existe toujours ?

  • Benjamin

    Il existe toujours. Il y a combien de groupes ? Il y a 7-8 groupes. Donc il y a une trentaine de personnes.

  • Rodrigue Tandu

    Et donc il est un peu le terreau sur lequel vous êtes... sur lequel vous avez pu cultiver votre activité aujourd'hui que vous menez au sein de KPMG. Alors ça, c'est pareil, c'est très étonnant, très inattendu. Mais est-ce que tu peux m'expliquer où est-ce que tu œuvres maintenant ?

  • Benjamin

    J'ai plein de projets. Vous voyez bien qu'avec le Seigneur, je suis père de famille, il faut que je me nourrisse, d'accord ? Il y a plein de projets, on peut être dans l'élan, mais il faut aussi nourrir ses enfants. Le réseau des deux cités, vous voyez que je ne peux pas en vivre.

  • Rodrigue Tandu

    Oui, c'est bénévole.

  • Benjamin

    Voilà, donc... Et après, il fallait faire des projets. Par exemple, Antoine, il a bougé. Donc, quand il est parti chez KPMG, il a dit, il faut qu'on monte une cellule pour la réinsertion des jeunes. Donc, on s'est regardé, on s'est dit, ben voilà, Rodrigue, parce qu'on était plusieurs. Du coup, c'était moi qui ai pris l'initiative d'aller encadrer ces jeunes-là. Donc,

  • Rodrigue Tandu

    KPMG, je n'ai pas précisé, c'est un grand cabinet d'audit et de conseil, l'un des plus importants en France. Et donc c'est là où tous les matins, toi tu es à la défense, tu prends la direction de cette société et où tu rejoins 7 ou 8 jeunes.

  • Benjamin

    Voilà, je suis le manager de ce groupe-là.

  • Rodrigue Tandu

    Voilà,

  • Benjamin

    tu manages. Voilà, je manage ces jeunes-là.

  • Rodrigue Tandu

    Donc l'intuition c'est peut-être aussi d'arriver un peu plus tôt dans l'histoire de ces jeunes, plutôt que de jouer les pompiers une fois qu'ils sont trop pompiers.

  • Benjamin

    Là c'est de la prévention qu'on fait. C'est de la prévention. On prend des jeunes qui nous sont envoyés par les CAID aussi. C'est des jeunes qui ont des bacs pro. technologiques, c'est un peu les neveux, les nièces des caïds, et qui ne travaillaient pas en fait. Et l'objectif, c'est de les prendre, qu'ils fassent des slides les présentations Powerpoint et de l'Excel, pour que les consultants gagnent du temps dans leurs réflexions, qu'ils fassent aussi des belles présentations, parce que les consultants leur outil de travail, c'est des présentations. L'objectif final, c'est que ils grandissent en rigueur, en méthodologie et puis voilà, se construire. une certaine forme de rigueur et de résilience, pour que par la suite, ils puissent reprendre l'école aussi. Les écoles, soit en alternance avec les métiers de KPMG, s'ils sont intéressés ou pas. Il y a ça, il y a tout ce qui est un peu... Voilà, de ce groupe, par exemple, là, on va monter avec Yann Boucaille, peut-être, un Café Joyeux, le fondateur de Café Joyeux, à Bondy. On a vu le maire. Oui, je fais plein d'actions comme ça. J'ai envie de faire, par exemple, de l'aide de devoir à domicile. En même temps, j'ai aussi cette mission, ma mission à moi aussi. Aujourd'hui, je suis chez vous pour témoigner aussi de ce Christ qui peut changer des vies. J'ai plein de projets, en fait. Oui,

  • Rodrigue Tandu

    Rodrigue Tendu ne reste jamais très longtemps au même endroit.

  • Benjamin

    Quand tu es trop tranquille, c'est là qu'il faut que tu te poses la question. Quand tu es trop à l'aise, est-ce que tu es dans la bonne voie ? C'est plutôt ça l'indicateur. Quand tu as fait cette rencontre, quand tu es comme ça, c'est ça en fait. Tu es un missionnaire permanent. Et moi, je le sais que ma vie ne sera jamais comme avant. Je ne serai jamais en paix. Je le sais. Mais il me donne la force et les moyens par les rencontres que je peux faire pour pouvoir mener à bien mon projet.

  • Rodrigue Tandu

    Comment, justement, ta foi, le fait que tu chemines avec le Seigneur, change ta manière d'être un leader, un manager ? Qu'est-ce qui fait que tu es différent peut-être d'un autre ?

  • Benjamin

    C'est quoi un bon manager ou un leader ? Un leader, c'est celui qui donne la vision. Ma vision, elle est tournée vers le ciel. Et c'est lui qui inspire confiance. Inspirer confiance, c'est que il faut que l'autre y sente que tu lui veux du bien. Et comment tu fais grandir l'autre ? C'est lui proposant un autre chemin. Que ça soit ses caïds, que ce soit n'importe qui que je rencontre. En laissant l'autre aussi libre. Parce qu'il peut nous arriver aussi des échecs, parce que le pauvre, c'est pas que celui que tu donnes à manger qui te dit merci, le pauvre c'est celui aussi qui n'est pas agréable et qui ne te dit pas merci. Parce que ta joie de vivre, ça peut être une source de violence pour cette personne. Et peut-être c'est cette pauvreté que j'ai témou. de cette violence-là. Donc j'ai appris tout ça. Comme moi, je suis tourné vers le ciel et je suis détaché. Il faut être détaché pour mener à bien cette mission. Il faut être courageux. Le courage, c'est le Seigneur qui le donne. Le détachement, ça veut dire de tout. De l'argent, de tout. Il faut être détaché de tout. Et le Seigneur le donnera.

  • Rodrigue Tandu

    Quel conseil tu donnerais à un jeune, qu'il soit décité ou pas d'ailleurs ? Qui serait tenté par l'argent facile, par la drogue ? Comment résister finalement, plus généralement, comment résister aux tentations de ce monde ? Quel conseil tu donnerais à un jeune ?

  • Benjamin

    Un jeune qui cherche enfin une évasion. Quand tu es addict au cannabis, ou un jeune qui va acheter, qui va acheter une image, qui va acheter des choses, je lui dirais que l'essentiel est ailleurs, parce qu'on croit tous à des choses qui nous dépassent. Et je dirais à ces jeunes-là, déjà, il faut qu'ils prennent le temps de s'aimer lui-même. Parce que c'est ça, la clé. La clé, elle est de l'ordre de l'amour. Donc souvent, c'est des personnes comme moi, quand je relis, c'est un conseil, c'est de prendre le temps. Je ne dis pas que je ne suis pas là pour faire la morale, lui disant c'est bien ou c'est pas bien. Prendre le temps de réfléchir. De réfléchir parce qu'on le sait. Est-ce que c'est un délire ? Parce que souvent, quand on veut prendre la drogue, c'est un délire. Donc comme nous, on avait commencé le joint, on aimait bien le foot à l'époque. On se disait qu'on allait arrêter, mais on s'est fait prendre. On s'est fait prendre. Donc ça veut dire, ce soif de liberté qu'on veut avoir, parce qu'on possède de l'argent, donc on achète, on a l'impression d'être libre. Ou bien fumer, s'évader de sa propre réalité, est-ce qu'on pense qu'on est libre ? Prendre de la cocaïne, voilà. C'est ça en fait que le jeune recherche, une évasion. Mais du coup, il faudrait qu'il prenne le temps de se dire, je veux fuir quoi ? C'est une fuite, en fait. Qu'est-ce que je veux fuir ? Qu'est-ce que je veux fuir ? C'est cette question-là. Prendre le temps. Est-ce que c'est un délire ? Pourquoi je vais délirer ? Soit c'est le pourquoi.

  • Rodrigue Tandu

    Le sens. La question du sens.

  • Benjamin

    Poser la question du sens. Ça, c'est le conseil que je leur donnerais.

  • Rodrigue Tandu

    L'autre question qu'on pose de façon traditionnelle, c'est de demander à notre invité s'il a un livre qu'il aime bien, qui a vraiment du sens pour lui. Et quand je t'ai posé la question en amont de cette émission, tu m'as dit, moi, ce n'est pas un livre, c'est plutôt une musique. Donc, quelle est cette musique ? Et pourquoi elle a fait le sens pour toi ?

  • Benjamin

    Moi, c'est Céleste Jérusalem, que je chante tous les matins. Notre cité se trouve dans les cieux. Nous verrons l'épouse de l'agneau resplendissante de la gloire de Dieu. Céleste Jérusalem Moi c'est notre cité quoi, je viens d'une cité et maintenant je me tourne vers la cité céleste, j'ai le réseau de deux cités, la cité des dieux et la cité des hommes. Le mot cité c'est quelque chose, voilà, parce que je suis tourné vers... J'ai envie de faire partie de cette cité céleste. Et c'est ça que je chante tous les matins, qui me donne la force, qui me donne... Parce que voilà, je suis humain, je reste humain, des fois il y a des combats, des fois voilà. Mais voilà, il y a des tentations, je tombe aussi. On est des pêcheurs, on pêche aussi. Mais quand on est tourné vers ça, on sait que Dieu est au-dessus de ça.

  • Rodrigue Tandu

    Il y a aussi ta prière préférée, celle que tu, peut-être comme ce chant, que tu aimes réciter régulièrement, qui te parle, qui a un écho profond en toi.

  • Benjamin

    Moi, j'aime bien l'hymne. L'hymne à la vie de Mère Thérésa. Moi j'aime bien, la vie est une chance, saisis-la. La vie est une beauté, admire-la. La vie est une béatitude, savoure-la. La vie est un rêve, réalise-le. La vie est un défi, relève-le. La vie est un devoir, accomplis-le. La vie est un jeu, joue-le. La vie est richesse, conserve-la. La vie est amour, partage-le. La vie est mystère, perce-le. La vie est promesse, remplis-la. La vie est tristesse, surmonte-la. La vie est une hymne, est un hymne, chante-le. La vie est un combat, accepte-le. La vie est aventure, Ausha. La vie est bonheur, mérite-le. La vie est la vie, défends-la. Parce que ce Dieu compris, c'est la vie, c'est la source de toute vie.

  • Rodrigue Tandu

    Et toute dernière question, Rodrigue, question assez personnelle, mais... S'il a, dans cette pièce où on est en train de réaliser cet entretien, le Christ apparaissait, qu'est-ce que tu lui demanderais ? Qu'est-ce que tu lui poserais comme question ? Qu'est-ce que tu aurais envie de lui dire ?

  • Benjamin

    Moi, je demanderais s'il me reste encore beaucoup de temps sur terre. Parce que je pense que... S'il ne peut pas m'emmener avec lui, parce que je pense que... On sera tellement plus heureux là-bas, avec lui. C'est ça que je lui demanderais. Voilà.

  • Rodrigue Tandu

    Eh bien, on arrive au terme de cet entretien. Merci beaucoup, Rodrigue, de ces réponses.

  • Benjamin

    Merci à toi.

  • Rodrigue Tandu

    Je rappelle que ton livre témoignage de la cité de Bondy à la cité du bon Dieu est disponible déjà depuis quelques temps aux éditions Artej, et donc dans toutes les bonnes librairies.

  • Benjamin

    Merci.

  • Merci de nous avoir écoutés. Si ce podcast vous a plu, n'hésitez pas à le partager autour de vous, à laisser un commentaire et une note de 5 étoiles sur les plateformes d'écoute et les réseaux sociaux Les Podcasts de 2FC pour faire bénéficier de ce podcast un maximum de personnes. Pour découvrir d'autres témoignages de feu, vous pouvez bien sûr écouter les autres épisodes du podcast, mais aussi lire chaque semaine la rencontre avec un témoin touché par la grâce dans le magazine Famille Chrétienne et... Et enfin, n'hésitez pas à découvrir les autres podcasts de Famille Chrétienne. Toussaint, ces témoins de la foi racontés par Bénédicte de Lelys, Maman Prie, Sexo, Sacrée Histoire et d'autres encore. Un grand merci et au prochain premier lundi du mois pour un nouvel épisode.

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Description

Rodrigue Tandu est arrivé du Congo à Bondy, dans une cité de la région parisienne, à l'âge de 7 ans. Sa scolarité se passe sans histoire, jusqu’au lycée, situé à Noisy-le-Sec, en territoire ennemi. Quand une bande de Noisy croise ceux de Bondy, c’est la bagarre assurée. Il ne va plus à l’école, traîne dans la rue… Commencent les petits trafics, puis les gros, la drogue notamment, qui lui assure des revenus conséquents. Le jeune homme devient un caïd, qui donne des coups et les encaisse. Jusqu'au jour où il croise des consacrées de la communauté de l'Emmanuel, qui le persuadent de venir avec elles à Paray-le Monial. Le dealer fait alors une rencontre bouleversante avec le Christ qui transforme radicalement sa vie.

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Ce podcast est réalisé par Famille Chrétienne


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Transcription

  • Benjamin

    Bonjour, je m'appelle Benjamin et je vous souhaite la bienvenue dans la cinquième saison d'Un beau jour, un podcast de famille chrétienne. Un beau jour, c'est l'histoire d'hommes et de femmes croyants qui menaient une vie tranquille, tracée d'avance. Et puis, Un beau jour, un événement inattendu et bouleversant a complètement infléchi le cours de leur existence. Il nous raconte comment ils en ont été bousculés, changés, rabotés, transformés dans leur vie et dans leur foi. Je suis sûr que vous serez comme moi édifiés et enrichis par ces récits livrés, le cœur et l'âme grands ou morts. Il était un des caïds de Bondy en Seine-Saint-Denis. Jamais passé par la case prison, Roderick Tendu n'en est passé... pas loin, mouillé alors dans le trafic de drogue. Jusqu'au jour, un beau jour, où le jeune homme a rencontré celui qui allait changer radicalement son existence. Bonjour Rodrigue et merci de nous avoir rejoint pour venir raconter aux auditeurs d'un beau jour ton incroyable histoire. Pour commencer cet entretien et comme c'est la tradition dans notre émission, peux-tu nous présenter l'objet symbolique de ton itinéraire que tu as amené ? avec toi aujourd'hui.

  • Rodrigue Tandu

    Bonjour Benjamin, moi je vais ramener une croix. C'est une croix que ma grand-mère m'a offerte. Voilà, c'est une croix que je garde souvent dans ma poche et qui me permet quand je suis tenté ou il y a des tentations, je la garde auprès de moi pour aussi la présence du Seigneur.

  • Benjamin

    C'est une croix que tu as avec toi depuis longtemps.

  • Rodrigue Tandu

    Oui, ça fait depuis plus de 20 ans que je l'ai, que je garde ça.

  • Benjamin

    Toujours dans ta poche. Alors Rodrigue, avant d'en venir au jour de ta conversion, est-ce que tu peux nous parler un peu de toi ? Je sais que tu es né en 1979, en République démocratique du Congo, un pays que tu as quitté à l'âge de 7 ans pour la France et donc une cité de Bondy, cette ville de Seine-Saint-Denis près de Paris. tout simplement de ces premières années en France, du souvenir que tu en as, de comment ça se passait vraiment au quotidien.

  • Rodrigue Tandu

    Je suis arrivé l'hiver, il y avait de la neige, je me rappelle. Je ne savais pas c'était quoi. J'ai cru que c'était des plumes d'oiseaux.

  • Benjamin

    Des plumes d'oiseaux ?

  • Rodrigue Tandu

    Je me suis dit, mais tiens, il y a une usine de volailles ici. Et voilà, il faisait horriblement froid et c'était... Et je me suis dit que c'était une ville éclairée. il y avait de la lumière partout et pour moi c'était étonnant voilà ça c'était mon rapport d'étonnement quand je suis arrivé en France et après ça se passait très très bien tu habitais où ?

  • Benjamin

    je suis arrivé à Bondy direct dans le livre tu parles de cet appartement dans ce bâtiment qui est un parallépipède je crois c'est la cité pour les bondylois c'est la cité du marché en face du marché donc

  • Rodrigue Tandu

    il y avait un 5 étages on habitait au 5ème étage c'est là que je suis arrivé

  • Benjamin

    Donc tu es orphelin quand tu arrives en France. Tu rejoins, je crois, ton oncle. Non, mon père. Ton père, voilà.

  • Rodrigue Tandu

    C'est ma mère qui est décédée par la République démocratique du Congo quand j'avais 7 mois. Donc je rejoins mon père. D'accord. Avec une belle mère. Et j'avais déjà mes oncles, les petits frères de mon père, tout ça, qui étaient là. C'est après que ma grand-mère nous a rejoints.

  • Benjamin

    Mais est-ce que, c'est vrai qu'on se pose la question, est-ce que ces premiers mois, ces premières années se font ? Assez facilement, quand on vient d'Afrique, on imagine que c'est, tu l'as décrit d'ailleurs, que c'est un choc, il y a plein de choses qui diffèrent. Est-ce que tu le vis sereinement, paisiblement, ou est-ce que c'est, j'imagine aussi, un peu compliqué par certains aspects ?

  • Rodrigue Tandu

    Je découvre un monde où il y a une certaine froideur quand même. Chacun est chez soi, personne n'est dehors.

  • Benjamin

    Pas qu'à cause de la neige alors ? Non,

  • Rodrigue Tandu

    non, non. Et qu'on passe plus de temps chez soi que dehors.

  • Benjamin

    Je reviens à l'école parce que donc, si je comprends bien, la scolarité se passe bon an, mal an, plutôt bien jusqu'aux primaires, collèges et autres. Et puis toujours dans ce livre dont je donnerai la référence tout à l'heure. Eh bien, tu expliques que le lycée, il faut aller dans une autre commune, Noisy-le-Sec. Il faut sortir du quartier, il y a le problème déjà des bandes et autres. Et... Pour toi, j'ai l'impression que ça marque vraiment le début d'une dégringolade assez vite. Un basculement. Alors, est-ce que tu peux...

  • Rodrigue Tandu

    Donc, le collège, ça va, donc on est tous orientés. Au troisième, on est tous confrontés à la question de l'orientation. Moi, je me rappelle, j'avais choisi Polytechnique. Je ne savais même pas c'était quoi, mais le nom, il me paraissait bien.

  • Benjamin

    Ça faisait chic.

  • Rodrigue Tandu

    Polytechnique, ça faisait bien. Tous ceux qui avaient choisi un peu ces lycées professionnels électroniques de Bondy, on a été orientés dans un lycée qui s'appelait Moulin Fondu, à Noisilles-Sec. Donc, c'est une ville limitrophe de Bondy. Et en face de ce lycée, il y avait une cité. Et cette cité-là, elle est en guerre avec Bondy. Donc, c'est là le début du basculement.

  • Benjamin

    Parce que tu décris aussi dans le livre, il y a cette fameuse ligne de bus qu'il faut prendre. Et il y a un sentiment de danger, c'est ça ? Comment tu te sens justement à cette époque quand il s'agit d'aller dans ce...

  • Rodrigue Tandu

    Non, au début, ça va. Au début, ça allait. Mais c'est après. Donc, on y allait, on allait en bande. Donc, on se rejoignait, on partait. Cinq ou six ou sept. Ça ne nous faisait pas d'angoisse. Ça nous faisait au contraire un peu voyager. C'était un changement. Sauf qu'après, un jour, j'ai un pote à moi qui se bat avec un mec de ce quartier. Et moi, je viens parce que dans ce bar, on est solidaires. Je rentre dans la bagarre. C'est un peu lâche, mais on tape le monsieur à deux. Et on rentre au cours et depuis ce jour-là, c'était compliqué pour nous d'aller à l'école. Parce que la cité nous attendait tous les jours pour nous faire la peau. Ils cherchaient tous les mecs de Bondy. Donc c'est comme ça que la bascule a commencé.

  • Benjamin

    Ta famille te pense au lycée, mais en fait, toi, tu commences à faire l'école de Saunière.

  • Rodrigue Tandu

    On allait tous à l'école. Et du coup, comme on risque notre peau, on n'y va plus. Donc comme on est dans un milieu où on se livre peu, on fait le fort. malgré qu'on a des soucis, on ne dit rien.

  • Benjamin

    Tu parles matin à l'école, normal, tu rentres le soir, tu expliques que quand tu rentres, tu t'arrêtes à la boîte aux lettres pour récupérer les éventuels courriers du lycée, c'est ça ? C'est ça. Pour intercepter ?

  • Rodrigue Tandu

    C'est ça, le matin.

  • Benjamin

    Parle-nous de ces journées, de quoi elles sont faites, parce que s'il n'y a pas l'école pour un jeune...

  • Rodrigue Tandu

    Dans les quartiers, il y a des caves. On avait aménagé une cave. avec des canapés, on a volé un peu l'électricité, on a mis une télé, des consoles, c'était ça notre journée.

  • Benjamin

    Donc c'était quoi, un peu...

  • Rodrigue Tandu

    Voilà, on sort, on va, on se pose, et voilà, après on se bat un peu, on s'entraîne à la bagarre, c'était ça, c'était à l'âge de 16-17 ans.

  • Benjamin

    Et alors à quel moment tout ça, j'allais dire, peut paraître sympathique, non c'est pas tout à fait le terme, mais en tout cas à quel moment tout ça prend une tournure un peu plus... grave avec l'entrée dans peut-être le commerce de la drogue.

  • Rodrigue Tandu

    On a commencé à avoir pas mal de gens aussi autour de nous qui n'allaient plus à l'école. Et ces fréquentations-là, il y en a, ils avaient déjà basculé un peu dans tout ce qui est cambriolage, tout ça. Donc on a commencé à cambrioler. Je ne suis pas fier de ça, mais ça, c'est ma vie. cambriolé. Du coup, on cambriolait. Donc, on trouvait des fusils. Ces fusils-là, on les gardait. Et c'est un âge où tu commences à t'affirmer aussi physiquement. Et voilà. Donc, on commence à être craint. Ça veut dire qu'on est armé, on n'a plus peur. Donc, on se bat tout le temps. Et du coup, on commence à être craint. Et c'est là qu'on commence à avoir une réputation. Parce que Bondy, ce n'est pas une ville qui fait des émeutes gratuites. Mais c'est une ville beaucoup de... de grand banditisme, beaucoup de business en fait. On ne fait pas de...

  • Benjamin

    Donc il vaut mieux qu'il n'y ait pas de trop... Non,

  • Rodrigue Tandu

    tu ne vas pas aller en prison parce que tu as tapé un flic et ça ne sert à rien. C'est con. Mais tu vas en prison parce que tu as risqué de l'argent.

  • Benjamin

    Il faut qu'il y ait un intérêt.

  • Rodrigue Tandu

    C'est pécunier. Et ça, ça a été toujours inculqué par les grands.

  • Benjamin

    Donc si je comprends bien, votre bande commence à prendre de l'épaisseur, j'allais dire, commence à être respectée, comme tu l'as dit. Et donc vous êtes repéré par des...

  • Rodrigue Tandu

    de plus grands qui vont vous mettre dans le j'allais dire dans le circuit du narcotrafic comme les grands ils étaient bien placés nos grands bandits dans le banditisme ils ont placé aussi donc voilà moi les grands qui m'ont mis dedans ils m'aimaient bien parce qu'ils m'ont vu depuis tout petit tout le monde se connait bien évidemment depuis longtemps depuis très très longtemps même quartier même quartier et voilà t'envis aussi un peu les grands parce que tu vois qu'ils s'habillent bien

  • Benjamin

    Tu te souviens dans quel état d'esprit tu es à l'époque ? Est-ce que déjà, dans un coin de ton âme, tu te dis « Finalement, ce que je fais, c'est quand même peut-être pas clean, c'est pas bien. »

  • Rodrigue Tandu

    Après, dans le quartier, on est tous croyants. On sait que ce qu'on fait, c'est bien ou pas bien. On connaît déjà le bien et le mal. Toi,

  • Benjamin

    tu te présentes comme un chrétien auprès de tes amis musulmans ?

  • Rodrigue Tandu

    Oui, mais j'étais toujours chrétien.

  • Benjamin

    Toi, tu te disais chrétien, pardon.

  • Rodrigue Tandu

    Parce que j'étais baptisé, j'ai eu la première communion. Mais je n'ai pas fait la confirmation à cause des entraînements de foot. Oui. Voilà. Et l'état d'esprit, parce que du coup, à ce moment-là, on commence déjà à fumer du cannabis. Du coup, le cannabis, ça te met en état d'esprit où tu t'en fous de tout. C'est un esprit où tu ne sais pas où tu vas. Mais comme tu sais qu'il faut que tu n'existes pas parce que tu es, tu existes parce que tu as, donc tu es dans cet état d'esprit-là, la quête du truc. Mais tu te dis qu'un jour, je vais arrêter. Un jour, j'aurai une vie normale. Mais du coup, tu rentres dans une certaine forme de spirale.

  • Benjamin

    Donc tu te dis que ça va être provisoire pour un moment.

  • Rodrigue Tandu

    Voilà, tu fixes une somme, après tu fais une autre. Oui,

  • Benjamin

    parce que pareil, dans le livre et d'écrit, c'est quand même des sommes conséquentes, jusqu'à 3 000 euros par jour, tu l'expliques, qui peuvent être le fruit de ce trafic.

  • Rodrigue Tandu

    Oui, parce qu'on était quand même dans... On était grand dans ce business. Donc voilà, et c'était le début aussi de la structuration de ce business. Tu expérimentes pas mal de choses, et du coup, t'as ça inverse, tes codes. Tu découvres que tu peux avoir les filles que tu veux, tu peux avoir les habits que tu veux, et du coup, tu te dis que être gentil, c'est pas bien. Être méchant, c'est bien. Être fidèle à une copine, c'est pas bien. Avoir plusieurs meufs, copines, c'est bien.

  • Benjamin

    Est-ce qu'il n'y a pas un moment où ça frotte ?

  • Rodrigue Tandu

    Tu découvres, c'est là que le diable, il est fort. Parce que c'est une forme de puissance qu'on avait. Et puis tu possèdes les autres. Tu achètes les autres. Parce que tout le monde est corruptible. Et tu découvres ça. C'est tout ça, en fait.

  • Benjamin

    Donc c'est vraiment le pouvoir de l'argent, du sexe, la force. Voilà.

  • Rodrigue Tandu

    Et la liberté, en fait. Tu te prives de rien.

  • Benjamin

    Et tout, tout de suite.

  • Rodrigue Tandu

    Tout, tout de suite. Instantané.

  • Benjamin

    Il y a un moment, donc tu expliques dans le livre, qu'il y a cette rencontre avec Arlette. Claire et Eliane.

  • Rodrigue Tandu

    Voilà, les trois sœurs.

  • Benjamin

    Des laïcs consacrés, c'est ça, pour être précis ? De la communauté de l'Emmanuel, qui sont installés à Bondy. Est-ce que tu peux nous expliquer comment se passe la rencontre ? Comment ça se passe ?

  • Rodrigue Tandu

    Moi, on était dans le coin où on faisait nos trafics, donc je m'apprêtais, moi, j'allais récupérer des sous. Et on voit trois bonnes sœurs qui rentrent. Trois blanches, mais des blanches pas comme nous, quoi. Parce qu'on se connaît tous. Mais les blancs de quartier sont comme nous. Ils parlent comme nous, voilà. Et je vois ces trois, on les fouille.

  • Benjamin

    Ah oui, carrément.

  • Rodrigue Tandu

    Ah oui, on les affiche. On pensait que c'était des flics. Et on se rend compte que c'est des sœurs. Et on se rend compte que c'est des sœurs. On se dit, mais moi, je me dis, on respecte quand même le religieux. On respecte pas le religieux pour respecter, on se dit que... S'ils ont fait le choix de prier Dieu, de donner leur vie à Dieu, que ce soit le musulman ou la sœur consacrée ou le prêtre, Dieu peut nous punir. C'est comme ça qu'on voit les choses. Et du coup, moi, je lui dis, écoute, ma sœur, mes sœurs, priez pour moi, mais cassez-vous d'ici. Je ne voulais pas... Priez, faites votre rôle, mais ne venez plus. Et c'est là que mes problèmes ont commencé. Du coup, en leur disant ça, je leur ai dit que j'étais catholique, chrétien. Moi, je pensais qu'ils allaient arrêter. Et comme, du coup, quand il me voyait dans le quartier, il me parlait souvent, « Rodrigue, on prie pour toi, Rodrigue, il faut que tu changes d'ami, oui. »

  • Benjamin

    Ça, c'est surtout Sœur Claire, si je me souviens bien.

  • Rodrigue Tandu

    Oui, après, Claire, elle était assistante au CED, les autres, elles travaillaient. Du coup, le lien de confiance était plutôt avec Claire. D'accord. Mais ça, elle a mis du temps avant que je puisse lui faire confiance.

  • Benjamin

    Elle a mis combien de temps ?

  • Rodrigue Tandu

    Ça a duré deux ans, quand même.

  • Benjamin

    Deux ans ?

  • Rodrigue Tandu

    Mais ce lien, je dirais qu'ils se le louent parce qu'elles habitaient aussi le quartier. Donc elles étaient devenues comme nous. Ce n'étaient pas des gens qui venaient et qui partaient. Donc on les voyait tout le temps faire leurs courses. Leur vie quotidienne, elle était avec nous. Et ça, ça interpelle. Et comme on est tous croyants, parce que comme on ne se livre pas, quand t'es angoissé ou culé, tu ne te livres pas. Tu ne vas pas dire à tes potes, j'ai mal dormi. Ou une meuf, elle t'a quitté, que t'aimes. une copine que t'aimes, tu vas pas lui dire je souffre, tu vas dire à toi, qu'est-ce qu'on a ? Tu fais le dur, mais on peut pas dire à nos parents, on peut dire à personne, donc c'est souvent, c'est dans la prière, mais des prières, ouais, Dieu, je recommencerai plus, des prières comme ça.

  • Benjamin

    Et donc, il y a une bagarre à Paris, il y a un garçon...

  • Rodrigue Tandu

    Comme on était armé, moi, j'hésitais pas à tirer, mais j'ai tiré sur un mec. Et ce mec-là, il n'est pas mort. Et comme j'avais peur d'aller en prison pour une grosse peine, du coup, il fallait que je prie parce que j'ai mal dormi. Et j'ai dit à la sœur, c'était chaud. Mais du coup, elle m'a ouvert l'église. Et ça m'a fait plaisir. Et du coup, j'ai prié, mais je n'ai pas prié beaucoup. J'ai dit, Dieu, si tu me sauves de cette peine, je ne recommencerai plus les prières comme ça.

  • Benjamin

    Mais il y a déjà quelque chose qui se passe là, parce que tu expliques qu'il y a eu une... paix quand même.

  • Rodrigue Tandu

    Oui, et là, je sentais une paix, je sentais une présence. Et c'est là que je me suis dit, peut-être qu'il y a quelque chose et tout. Et du coup, dans cet élan-là, la sœur a revu à la charge, tu sais, Rodrigue, il faut que tu changes d'ami et tout. Et du coup, je lui ai dit, d'accord, mais je pourrais aller là où...

  • Benjamin

    Quelle est la proposition que sœur Claire, assez vite, finalement,

  • Rodrigue Tandu

    t'a fait ? Elle m'a dit qu'on a un lieu où tu peux aller aussi prier comme ça, voilà. Et je lui ai dit, ok. Et ce lieu, c'est ? C'est Paray-le-Mognal.

  • Benjamin

    Paray-le-Mognal.

  • Rodrigue Tandu

    Et je connaissais pas du tout, je savais même pas c'était quoi. Même la communauté d'Emmanuel, je ne savais même pas ce que c'était. Et du coup, je lui ai dit OK. Et du coup, on s'est donné rendez-vous. Elle m'a ramené les papiers d'inscription. Donc, elle m'a inscrit à Parallel Monial.

  • Benjamin

    On est en quelle année là ?

  • Rodrigue Tandu

    C'était quelle année ? 2000, 2001, 2002,

  • Benjamin

    je crois. Et tu te retrouves donc, tu quittes Bondy, que j'imagine que tu ne dois pas quitter très, très souvent.

  • Rodrigue Tandu

    Non, on va en vacances quand même. Avec l'argent qu'on a. On va en Thaïlande.

  • Benjamin

    En tout cas, tu n'es jamais allé à Parelmonial. Donc, tu débarques à Parelmonial, dans ce petit village bourguignon. Pareil, raconte-moi comment...

  • Rodrigue Tandu

    Quand j'arrive là-bas, je vois une grande tante, je vois beaucoup de blancs qui rigolent, qui sont gentils. Tous mes codes sont bouleversés. Et je me dis, mais ils se foutent de ma gueule. C'est comment ? Pas des blancs comme les nôtres, mais des blancs un peu des têtes de juge, des blancs policiers, des militaires, des trucs comme ça. Et tu te dis, mais qu'est-ce que je fous là ? Parce que c'est pas un traquenard. C'était un peu ça, mon impression au départ.

  • Benjamin

    Qu'est-ce qui fait que tu restes ?

  • Rodrigue Tandu

    Je suis là, déjà.

  • Benjamin

    Parce que t'aurais pu te dire...

  • Rodrigue Tandu

    Je suis là avec la sœur. Je suis quelqu'un, quand je donne une parole, j'aime bien qu'elle... Et après, comme ça, les sœurs, elles vont plus me prendre la tête.

  • Benjamin

    C'est une manière de payer un peu ta dette.

  • Rodrigue Tandu

    Voilà, et quand je rentre...

  • Benjamin

    Sauf qu'il va se passer quand même un truc étonnant. C'est-à-dire qu'à un moment, tu vas rentrer sous la grande tente, tu vas voir...

  • Rodrigue Tandu

    Donc je vois le Saint-Sacrement.

  • Benjamin

    Dont tu ne sais pas ce que c'est à l'époque. Voilà,

  • Rodrigue Tandu

    je ne sais pas. Pour moi, c'est une boule. Et je vois... Ils mettent le lançant, tout ça, voilà. Et là, mon côté congolais reprend. Je me dis, attends, ils sont en train de prendre une boule. C'est des sorciers. Du coup, je me suis dit, c'est quoi ce truc ? Mais je sens que ça m'attire. Et c'est là que je me suis rapproché. Je suis tombé à genoux et j'ai commencé à demander pardon. Et à pleurer, surtout. Et je me suis dit, soit c'est le shit que j'ai fumé qui me joue des tours, ou ça ne va pas.

  • Benjamin

    Est-ce que tu peux nous en dire un peu plus ? Parce que ça semble complètement dingue.

  • Rodrigue Tandu

    J'ai senti un amour immense, mais pas un truc agressif. Et c'est ça qui m'a demandé... Je sentis une présence aimante. C'est aimante d'un amour que je n'avais jamais expérimenté et d'un amour que tu ne peux pas faire du mal.

  • Benjamin

    Mais quelle est cette force qui te fait te mettre à genoux, qui te tire des larmes ?

  • Rodrigue Tandu

    C'est cette présence qui m'a englopé, que là, je me suis mis à genoux. Parce que ça m'a désarmé, en fait. Et du coup, c'est là que je suis tombé à genoux. Et il a demandé pardon, mais sans le calculer, en fait. Il a demandé pardon et a pleuré.

  • Benjamin

    En même temps, tu dis que tu étais croyant, que tu connaissais Dieu, tu étais baptisé. Bon, on peut être baptisé sans croire, mais tu avais cette foi. Qu'est-ce qui fait qu'à ce moment-là, cette foi devient, j'allais dire, concrète, qu'elle va changer quelque chose ?

  • Rodrigue Tandu

    Après, ça, c'est la volonté de Dieu. Il vient chercher qui il veut. Il choisit les gens. Moïse, par exemple. Dieu, il choisit qui il veut. Il a des projets pour chacun d'entre nous, mais à la hauteur de ce qu'il veut pour chacun d'entre nous. Voilà, donc c'est cet amour-là que je ne peux pas le dire. Je ne suis pas dans la tête de Dieu. C'est ce jour-là qui m'a sauvé. Qui ne m'a pas sauvé. Mais voilà, donc après, j'ai entendu une voix intérieure qui m'a dit, va et jette le truc que tu as ramené, parce que comme je suis addict au cannabis, moi, je voulais fumer mes joints tranquilles, fermer cinq jours et rentrer, et jette-le. Et même là, mon côté bondinois a repris. Quand je marchais pour aller le chercher, je me suis dit, peut-être que je peux le vendre là. Je peux trouver un client. Mais je l'ai jeté quand même, le cannabis, parce que c'était une voie obéissante. Et depuis ce jour-là, je n'ai plus jamais fumé. Il n'y a que la force de Dieu qui peut faire ça. C'est cet amour absolu qui te désarme, en fait. Et du coup, c'est cette rencontre.

  • Benjamin

    Qu'on comprenne bien, Rodrigue, du moment où tu sors de cette tente de l'adoration, tu es devenu chrétien ? Ça y est, tu es croyant ? Tu vas changer de vie ?

  • Rodrigue Tandu

    Non, je me pose d'abord beaucoup de questions. Si c'est le shit qui me joue des tours, si j'entends de voix, si ce n'est pas la psychiatrie, tout ça. Au départ, je suis bouleversé quand même. Ce n'est pas être croyant, c'est là-bas que je suis bouleversé. Et c'est petit à petit que, quand il t'arrive un truc comme ça, c'est petit à petit, c'est des signes. Mais ce n'est pas tout tout de suite, en fait. Après, je me dis, bon, puisque j'ai vécu ça et ça te rend mendiant. Donc du coup, moi, je n'allais pas trop à la messe. Du coup, je cherchais la boule. Le saint Saint-Camban. Donc, j'ai passé beaucoup de temps à adorer, à donner pardon. Et j'ai cru que je t'ai donné ça. Et je me suis dit, quand je vais rentrer à Bondy, je vais dire à mes potes, ouais, j'ai trouvé une boule magique. Et aussi, ils vont devenir comme moi.

  • Benjamin

    Parce que ce que tu as vécu là, en fait, si je comprends bien, tu n'as pas pu, sur ces cinq jours, les cinq jours de ce Forum des Jeunes, tu n'as pas pu en parler à quelqu'un, expliquer ce que tu avais vécu ?

  • Rodrigue Tandu

    Et à Claire, j'en ai parlé. Elle m'a accompagné quand même. Donc à Claire, mais je me suis confessé aussi.

  • Benjamin

    Tu vas rentrer au bout de ces cinq jours à Bondy, forcément un peu différent, mais jusqu'à quel point différent en fait ? Ce que tu as vécu là, ces jours-là, qu'est-ce que ça va changer directement dans ta vie ?

  • Rodrigue Tandu

    En gros, ce que j'ai vécu, ça donne du courage. Voilà, c'est du courage. D'assumer ce que... Parce que j'ai découvert un amour que personne ne peut me donner. Même pas mes amis, rien. Donc tu le vois dans le courage qui te pousse à t'affirmer. Et c'est là que je commençais à chanter des Alléluia, Nanani. Et je commençais à être maintenant dans la morale. Ça veut dire dans le bien, pas le bien ou le mal. Donc je ne pouvais plus faire les trucs d'avant. Je ne pouvais plus faire du mal aux gens. C'est là où c'était dur, parce qu'il fallait qu'on se détache. J'avais ramené mes copains, voire aussi l'adoration au Christ ressuscité, l'église de Bondy. Mais ça n'avait rien passé pour eux. Donc l'adoration, ils m'ont pris pour un menteur, un mytho. Donc c'était plutôt ça. Donc petit à petit, je commençais à m'éloigner d'eux.

  • Benjamin

    Quand tu dis petit à petit, ça a pris combien de temps en fait ? C'est un processus qui se fait en quelques mois ou c'est plus long, plus court ?

  • Rodrigue Tandu

    Après moi, je dirais pour moi. Donc il y en a, c'est plus radical, moins, mais moins.

  • Benjamin

    Mais toi, je veux dire, ton changement de vie et puis le fait... de te sentir...

  • Rodrigue Tandu

    Le jour où ça a commencé que je ne pouvais plus. Donc petit à petit, l'esprit que tu dégages te fait rejeter par les autres. Parce que vous n'êtes plus dans le même état d'esprit en fin de compte. Donc toi, c'est comme si tu venais éclairer leur... Donc du coup, il y a un rejet parce qu'ils ne sont pas prêts. Donc du coup, petit à petit, tu es rejeté un peu et petit à petit, tu t'éloignes en fait.

  • Benjamin

    Tu as même pensé à un moment devenir être prêtre ? Tu t'es posé la question.

  • Rodrigue Tandu

    Après, avec Claire, comme elle m'éclairait beaucoup, je me suis...

  • Benjamin

    Donc cette laïque de l'Emmanuel, je rappelle.

  • Rodrigue Tandu

    Elle m'a beaucoup fait... Je fais l'école de château et de mission. Donc je me suis approché de... J'ai rencontré d'autres types de chrétiens de mon âge. Et c'est là que j'ai compris qu'il y en avait. Ils faisaient des grandes écoles, polytechniques, ESSEC, HEC, tout ça. Avant, je ne savais pas que ça existait. On n'était pas dans le même monde. On était dans le même pays, mais pas dans le même monde. Et ces jeunes-là, on est en parté, donc l'école de chartes et de missions, c'était une école de réflexion. Et c'est de là que j'ai commencé à me poser cette question. Mais après, je me suis dit, mais ce n'est pas possible. Moi, Rodrigue, prêtre, j'aurais... L'Église serait barrée en live.

  • Benjamin

    Donc, ça ne sera pas la prêtrise, mais par le biais de... pas mal de rencontres, il y a la possibilité de devenir un jour éducateur, et pareil, c'est de l'ordre d'un appel intérieur. Est-ce que tu peux nous raconter comment ça s'est passé ?

  • Rodrigue Tandu

    Et du coup, voilà, je me posais cette question, et je repars à Paris le Mondial, donc du coup avec Cyril Tisserand, là, cette fois-ci. Cyril Tisserand, c'est le fondateur de l'association Le Rocher, qui était venu habiter dans le quartier, dans le cadre de Fidesco, et petit à petit, il a monté l'association Le Rocher. C'était une personne que je connaissais peu, mais petit à petit, je commence à le connaître grâce à... Parce que c'est quelqu'un qui est quand même beaucoup ancré dans la foi. Et je vais à Parallel Monial. Du coup, je vais dans une église, je prie et j'entends la voix intérieure. « Rodrigue, ce n'est pas dans une église que je te veux, c'est dans la rue. Va et relève les genoux d'affaibli. » Et c'est là que je découvre ma vocation. Et j'ai une mot, je discute un peu avec lui comme éducateur. Et du coup, il me dit, tiens, je rencontre un directeur de formation des apprentis d'auteuil. Et c'est là que... Mais c'était facile parce que du coup, une fois que j'ai dit oui pour ça, pour cette vocation-là, tout s'est déroulé facilement. Donc du coup, je suis rentré au centre de formation des apprentis d'auteuil.

  • Benjamin

    Les portes se sont ouvertes facilement.

  • Rodrigue Tandu

    Voilà, c'est ça. On dirait le Seigneur m'avait précédé.

  • Benjamin

    Il y a un passage qui est amusant dans le livre, c'est que tu expliques que tu préfères te confronter aux fortes têtes qu'à ceux qui ont peut-être plus un profil de victime. C'est aussi l'héritage de se passer à la rue avec d'autres.

  • Rodrigue Tandu

    J'étais fragile autrement, mais j'avais une carapace. Donc moi, je connais plus ces codes-là. J'ai dû... Quelqu'un qui est fragile, fragile par mon charisme. Je peux faire plus de mal que de bien. Parce que je peux être brut. Il y a une certaine forme dans l'éducatif. Il y a une forme de prudence et de bienveillance. Et quelqu'un qui est très, très fragile, des profils comme moi, ça peut être compliqué. Parce que tu peux arriver comme un bourrin dans quelque chose qui...

  • Benjamin

    Où il faut arriver avec un peu plus de délicatesse.

  • Rodrigue Tandu

    Voilà.

  • Benjamin

    Pareil, quand tu entends, je reviens sur cet appel entendu à Paray-le-Monial de devenir éducateur. Est-ce qu'à un moment, ça ne t'a pas semblé aussi un peu incongru ? Quand on a l'histoire que tu as, est-ce qu'il n'y a pas un moment où on se dit mais est-ce que je suis légitime pour aider d'autres jeunes à s'en sortir ?

  • Rodrigue Tandu

    Moi, dans mon histoire, on ne se pose pas trop de questions. C'est quand je suis sorti que j'ai vu beaucoup de gens. de ces écoles qui intellectualisent, qui posent... Nous, en tout cas, on ne se pose pas beaucoup de questions. On avance, en fait. Une fois que tu as dit oui, tu avances. Et après, tu vois. On n'est pas des gens qui se projettent, qui s'assoient, qui créent un projet, qui font un tout doux. On n'est pas des gens comme ça. On avance et on avise après.

  • Benjamin

    Alors, Rodrigue, tu vas travailler, donc tu l'as dit, tu vas bénéficier d'une formation. Tu vas travailler avec les orphelins apprentis d'Auteuil, avec l'association Le Rocher. En 2019, tu crées le réseau des deux cités avec un garçon qui s'appelle Antoine Déjar, qui a fondé un cabinet de conseil en stratégie en 2019. Et donc, c'est un parti pris assez novateur, parce que ce réseau, il a pour but de mettre en relation des chefs d'entreprise et des caïds repentis. Explique-moi comment ça marche.

  • Rodrigue Tandu

    Moi, quand j'étais au Rocher, j'ai vu des étudiants polytechniques, HEC, tout ça. Et je me suis dit, c'est des mecs qui sont brillants, méthodiques. Ils résinent pas la tâche, ils abattent pas mal de tâches de travail, mais ils intellectualisent tous les mecs. Et ils ont pas ce courage, cet élan qu'on peut avoir, nous. Cette simplicité relationnelle. Ils marchent un peu sur un pied. Et nous, à l'inverse... On a tous ce côté un peu spontanéité, intuitif, et la simplicité dans la relation à l'autre. Mais on n'a pas toutes ces méthodes, toutes ces capacités à être méthodiques, rigoureux, tout ça. Et je me suis dit, le contact des deux peut être une richesse. Nous aussi, on marche sur un pied. Donc quand on contacte les deux, ça peut être que bénéfique pour nous deux. Puisqu'on va apprendre à l'autre à se simplifier. Et nous, ils vont nous apprendre à être un peu méthodologiques. Et comme... Souvent, c'est beaucoup de personnes qui ont fait beaucoup de trucs pour des jeunes, des quartiers. Je me suis dit, pourquoi pas le faire au degré des cahiers des repentis ? Parce qu'il y en a beaucoup. Il y en a beaucoup qui sortent de prison ou ils n'en veulent plus. Mais il n'y a personne pour les accompagner. Et c'est comme ça qu'on la rencontre d'Antoine Desjardes, que j'ai rencontré grâce au pèlerinage de père de famille.

  • Benjamin

    Ah oui,

  • Rodrigue Tandu

    à Vézelay. À Vézelay, il sortait d'ordinaire. Donc, c'était un peu du jumelage quand je tourne chez les Mureaux. Et lui, c'était Le Chesnay. Vous voyez un peu le truc.

  • Benjamin

    Oui, ça fait un attelage un peu étonnant.

  • Rodrigue Tandu

    Et du coup, voilà, donc on s'est vus et on a sympathisé. Et quand je lui ai parlé, il m'a dit bingo. Donc, on a monté un groupe. Donc, ça se passe comment ? Ça se passe dans un truc très, très simple. Donc, Antoine, il a ramené deux amis à lui. Moi, j'ai ramené deux gars que je connaissais aussi.

  • Benjamin

    Et voilà, petit à petit, c'est de créer un petit réseau, tout discret, pas de pub, rien. Des moments de rencontre, une fois par mois, dans un café.

  • Rodrigue Tandu

    Et l'objectif, il est lequel ? Parce que j'entends bien l'idée de faire se rencontrer deux mondes qui ne se côtoient pas, qui ne se connaissent même pas. Mais c'est pour quelle finalité ? Pour quel but ?

  • Benjamin

    Vous voyez bien, ma vie, il n'y avait pas d'objectif. Je suis venu à Paris de Montréal. C'est la rencontre qui a changé ma vie. Moi, je crois beaucoup à la puissance de la rencontre. Moi, ma vocation, en fait, Relever les genoux affaiblis, passe par mettre des moyens, organiser des rencontres entre des personnes qui ne vont jamais pouvoir se rencontrer si je n'organise pas ces étapes. Et l'intuition même de ces groupes-là va se réaliser à travers des membres. Donc chaque groupe ne se ressemble pas, en fait. Il n'y a pas de projet précis, mais il y a quelque chose de commun entre ces deux mondes, c'est que les deux, ce sont des leaders. Et dans ce leadership-là, qu'est-ce qu'on fait ensemble ? Pour aussi la société française, pour ces jeunes.

  • Rodrigue Tandu

    Donc ce réseau existe depuis 2019 ? Voilà. Il existe toujours ?

  • Benjamin

    Il existe toujours. Il y a combien de groupes ? Il y a 7-8 groupes. Donc il y a une trentaine de personnes.

  • Rodrigue Tandu

    Et donc il est un peu le terreau sur lequel vous êtes... sur lequel vous avez pu cultiver votre activité aujourd'hui que vous menez au sein de KPMG. Alors ça, c'est pareil, c'est très étonnant, très inattendu. Mais est-ce que tu peux m'expliquer où est-ce que tu œuvres maintenant ?

  • Benjamin

    J'ai plein de projets. Vous voyez bien qu'avec le Seigneur, je suis père de famille, il faut que je me nourrisse, d'accord ? Il y a plein de projets, on peut être dans l'élan, mais il faut aussi nourrir ses enfants. Le réseau des deux cités, vous voyez que je ne peux pas en vivre.

  • Rodrigue Tandu

    Oui, c'est bénévole.

  • Benjamin

    Voilà, donc... Et après, il fallait faire des projets. Par exemple, Antoine, il a bougé. Donc, quand il est parti chez KPMG, il a dit, il faut qu'on monte une cellule pour la réinsertion des jeunes. Donc, on s'est regardé, on s'est dit, ben voilà, Rodrigue, parce qu'on était plusieurs. Du coup, c'était moi qui ai pris l'initiative d'aller encadrer ces jeunes-là. Donc,

  • Rodrigue Tandu

    KPMG, je n'ai pas précisé, c'est un grand cabinet d'audit et de conseil, l'un des plus importants en France. Et donc c'est là où tous les matins, toi tu es à la défense, tu prends la direction de cette société et où tu rejoins 7 ou 8 jeunes.

  • Benjamin

    Voilà, je suis le manager de ce groupe-là.

  • Rodrigue Tandu

    Voilà,

  • Benjamin

    tu manages. Voilà, je manage ces jeunes-là.

  • Rodrigue Tandu

    Donc l'intuition c'est peut-être aussi d'arriver un peu plus tôt dans l'histoire de ces jeunes, plutôt que de jouer les pompiers une fois qu'ils sont trop pompiers.

  • Benjamin

    Là c'est de la prévention qu'on fait. C'est de la prévention. On prend des jeunes qui nous sont envoyés par les CAID aussi. C'est des jeunes qui ont des bacs pro. technologiques, c'est un peu les neveux, les nièces des caïds, et qui ne travaillaient pas en fait. Et l'objectif, c'est de les prendre, qu'ils fassent des slides les présentations Powerpoint et de l'Excel, pour que les consultants gagnent du temps dans leurs réflexions, qu'ils fassent aussi des belles présentations, parce que les consultants leur outil de travail, c'est des présentations. L'objectif final, c'est que ils grandissent en rigueur, en méthodologie et puis voilà, se construire. une certaine forme de rigueur et de résilience, pour que par la suite, ils puissent reprendre l'école aussi. Les écoles, soit en alternance avec les métiers de KPMG, s'ils sont intéressés ou pas. Il y a ça, il y a tout ce qui est un peu... Voilà, de ce groupe, par exemple, là, on va monter avec Yann Boucaille, peut-être, un Café Joyeux, le fondateur de Café Joyeux, à Bondy. On a vu le maire. Oui, je fais plein d'actions comme ça. J'ai envie de faire, par exemple, de l'aide de devoir à domicile. En même temps, j'ai aussi cette mission, ma mission à moi aussi. Aujourd'hui, je suis chez vous pour témoigner aussi de ce Christ qui peut changer des vies. J'ai plein de projets, en fait. Oui,

  • Rodrigue Tandu

    Rodrigue Tendu ne reste jamais très longtemps au même endroit.

  • Benjamin

    Quand tu es trop tranquille, c'est là qu'il faut que tu te poses la question. Quand tu es trop à l'aise, est-ce que tu es dans la bonne voie ? C'est plutôt ça l'indicateur. Quand tu as fait cette rencontre, quand tu es comme ça, c'est ça en fait. Tu es un missionnaire permanent. Et moi, je le sais que ma vie ne sera jamais comme avant. Je ne serai jamais en paix. Je le sais. Mais il me donne la force et les moyens par les rencontres que je peux faire pour pouvoir mener à bien mon projet.

  • Rodrigue Tandu

    Comment, justement, ta foi, le fait que tu chemines avec le Seigneur, change ta manière d'être un leader, un manager ? Qu'est-ce qui fait que tu es différent peut-être d'un autre ?

  • Benjamin

    C'est quoi un bon manager ou un leader ? Un leader, c'est celui qui donne la vision. Ma vision, elle est tournée vers le ciel. Et c'est lui qui inspire confiance. Inspirer confiance, c'est que il faut que l'autre y sente que tu lui veux du bien. Et comment tu fais grandir l'autre ? C'est lui proposant un autre chemin. Que ça soit ses caïds, que ce soit n'importe qui que je rencontre. En laissant l'autre aussi libre. Parce qu'il peut nous arriver aussi des échecs, parce que le pauvre, c'est pas que celui que tu donnes à manger qui te dit merci, le pauvre c'est celui aussi qui n'est pas agréable et qui ne te dit pas merci. Parce que ta joie de vivre, ça peut être une source de violence pour cette personne. Et peut-être c'est cette pauvreté que j'ai témou. de cette violence-là. Donc j'ai appris tout ça. Comme moi, je suis tourné vers le ciel et je suis détaché. Il faut être détaché pour mener à bien cette mission. Il faut être courageux. Le courage, c'est le Seigneur qui le donne. Le détachement, ça veut dire de tout. De l'argent, de tout. Il faut être détaché de tout. Et le Seigneur le donnera.

  • Rodrigue Tandu

    Quel conseil tu donnerais à un jeune, qu'il soit décité ou pas d'ailleurs ? Qui serait tenté par l'argent facile, par la drogue ? Comment résister finalement, plus généralement, comment résister aux tentations de ce monde ? Quel conseil tu donnerais à un jeune ?

  • Benjamin

    Un jeune qui cherche enfin une évasion. Quand tu es addict au cannabis, ou un jeune qui va acheter, qui va acheter une image, qui va acheter des choses, je lui dirais que l'essentiel est ailleurs, parce qu'on croit tous à des choses qui nous dépassent. Et je dirais à ces jeunes-là, déjà, il faut qu'ils prennent le temps de s'aimer lui-même. Parce que c'est ça, la clé. La clé, elle est de l'ordre de l'amour. Donc souvent, c'est des personnes comme moi, quand je relis, c'est un conseil, c'est de prendre le temps. Je ne dis pas que je ne suis pas là pour faire la morale, lui disant c'est bien ou c'est pas bien. Prendre le temps de réfléchir. De réfléchir parce qu'on le sait. Est-ce que c'est un délire ? Parce que souvent, quand on veut prendre la drogue, c'est un délire. Donc comme nous, on avait commencé le joint, on aimait bien le foot à l'époque. On se disait qu'on allait arrêter, mais on s'est fait prendre. On s'est fait prendre. Donc ça veut dire, ce soif de liberté qu'on veut avoir, parce qu'on possède de l'argent, donc on achète, on a l'impression d'être libre. Ou bien fumer, s'évader de sa propre réalité, est-ce qu'on pense qu'on est libre ? Prendre de la cocaïne, voilà. C'est ça en fait que le jeune recherche, une évasion. Mais du coup, il faudrait qu'il prenne le temps de se dire, je veux fuir quoi ? C'est une fuite, en fait. Qu'est-ce que je veux fuir ? Qu'est-ce que je veux fuir ? C'est cette question-là. Prendre le temps. Est-ce que c'est un délire ? Pourquoi je vais délirer ? Soit c'est le pourquoi.

  • Rodrigue Tandu

    Le sens. La question du sens.

  • Benjamin

    Poser la question du sens. Ça, c'est le conseil que je leur donnerais.

  • Rodrigue Tandu

    L'autre question qu'on pose de façon traditionnelle, c'est de demander à notre invité s'il a un livre qu'il aime bien, qui a vraiment du sens pour lui. Et quand je t'ai posé la question en amont de cette émission, tu m'as dit, moi, ce n'est pas un livre, c'est plutôt une musique. Donc, quelle est cette musique ? Et pourquoi elle a fait le sens pour toi ?

  • Benjamin

    Moi, c'est Céleste Jérusalem, que je chante tous les matins. Notre cité se trouve dans les cieux. Nous verrons l'épouse de l'agneau resplendissante de la gloire de Dieu. Céleste Jérusalem Moi c'est notre cité quoi, je viens d'une cité et maintenant je me tourne vers la cité céleste, j'ai le réseau de deux cités, la cité des dieux et la cité des hommes. Le mot cité c'est quelque chose, voilà, parce que je suis tourné vers... J'ai envie de faire partie de cette cité céleste. Et c'est ça que je chante tous les matins, qui me donne la force, qui me donne... Parce que voilà, je suis humain, je reste humain, des fois il y a des combats, des fois voilà. Mais voilà, il y a des tentations, je tombe aussi. On est des pêcheurs, on pêche aussi. Mais quand on est tourné vers ça, on sait que Dieu est au-dessus de ça.

  • Rodrigue Tandu

    Il y a aussi ta prière préférée, celle que tu, peut-être comme ce chant, que tu aimes réciter régulièrement, qui te parle, qui a un écho profond en toi.

  • Benjamin

    Moi, j'aime bien l'hymne. L'hymne à la vie de Mère Thérésa. Moi j'aime bien, la vie est une chance, saisis-la. La vie est une beauté, admire-la. La vie est une béatitude, savoure-la. La vie est un rêve, réalise-le. La vie est un défi, relève-le. La vie est un devoir, accomplis-le. La vie est un jeu, joue-le. La vie est richesse, conserve-la. La vie est amour, partage-le. La vie est mystère, perce-le. La vie est promesse, remplis-la. La vie est tristesse, surmonte-la. La vie est une hymne, est un hymne, chante-le. La vie est un combat, accepte-le. La vie est aventure, Ausha. La vie est bonheur, mérite-le. La vie est la vie, défends-la. Parce que ce Dieu compris, c'est la vie, c'est la source de toute vie.

  • Rodrigue Tandu

    Et toute dernière question, Rodrigue, question assez personnelle, mais... S'il a, dans cette pièce où on est en train de réaliser cet entretien, le Christ apparaissait, qu'est-ce que tu lui demanderais ? Qu'est-ce que tu lui poserais comme question ? Qu'est-ce que tu aurais envie de lui dire ?

  • Benjamin

    Moi, je demanderais s'il me reste encore beaucoup de temps sur terre. Parce que je pense que... S'il ne peut pas m'emmener avec lui, parce que je pense que... On sera tellement plus heureux là-bas, avec lui. C'est ça que je lui demanderais. Voilà.

  • Rodrigue Tandu

    Eh bien, on arrive au terme de cet entretien. Merci beaucoup, Rodrigue, de ces réponses.

  • Benjamin

    Merci à toi.

  • Rodrigue Tandu

    Je rappelle que ton livre témoignage de la cité de Bondy à la cité du bon Dieu est disponible déjà depuis quelques temps aux éditions Artej, et donc dans toutes les bonnes librairies.

  • Benjamin

    Merci.

  • Merci de nous avoir écoutés. Si ce podcast vous a plu, n'hésitez pas à le partager autour de vous, à laisser un commentaire et une note de 5 étoiles sur les plateformes d'écoute et les réseaux sociaux Les Podcasts de 2FC pour faire bénéficier de ce podcast un maximum de personnes. Pour découvrir d'autres témoignages de feu, vous pouvez bien sûr écouter les autres épisodes du podcast, mais aussi lire chaque semaine la rencontre avec un témoin touché par la grâce dans le magazine Famille Chrétienne et... Et enfin, n'hésitez pas à découvrir les autres podcasts de Famille Chrétienne. Toussaint, ces témoins de la foi racontés par Bénédicte de Lelys, Maman Prie, Sexo, Sacrée Histoire et d'autres encore. Un grand merci et au prochain premier lundi du mois pour un nouvel épisode.

Description

Rodrigue Tandu est arrivé du Congo à Bondy, dans une cité de la région parisienne, à l'âge de 7 ans. Sa scolarité se passe sans histoire, jusqu’au lycée, situé à Noisy-le-Sec, en territoire ennemi. Quand une bande de Noisy croise ceux de Bondy, c’est la bagarre assurée. Il ne va plus à l’école, traîne dans la rue… Commencent les petits trafics, puis les gros, la drogue notamment, qui lui assure des revenus conséquents. Le jeune homme devient un caïd, qui donne des coups et les encaisse. Jusqu'au jour où il croise des consacrées de la communauté de l'Emmanuel, qui le persuadent de venir avec elles à Paray-le Monial. Le dealer fait alors une rencontre bouleversante avec le Christ qui transforme radicalement sa vie.

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Ce podcast est réalisé par Famille Chrétienne


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Transcription

  • Benjamin

    Bonjour, je m'appelle Benjamin et je vous souhaite la bienvenue dans la cinquième saison d'Un beau jour, un podcast de famille chrétienne. Un beau jour, c'est l'histoire d'hommes et de femmes croyants qui menaient une vie tranquille, tracée d'avance. Et puis, Un beau jour, un événement inattendu et bouleversant a complètement infléchi le cours de leur existence. Il nous raconte comment ils en ont été bousculés, changés, rabotés, transformés dans leur vie et dans leur foi. Je suis sûr que vous serez comme moi édifiés et enrichis par ces récits livrés, le cœur et l'âme grands ou morts. Il était un des caïds de Bondy en Seine-Saint-Denis. Jamais passé par la case prison, Roderick Tendu n'en est passé... pas loin, mouillé alors dans le trafic de drogue. Jusqu'au jour, un beau jour, où le jeune homme a rencontré celui qui allait changer radicalement son existence. Bonjour Rodrigue et merci de nous avoir rejoint pour venir raconter aux auditeurs d'un beau jour ton incroyable histoire. Pour commencer cet entretien et comme c'est la tradition dans notre émission, peux-tu nous présenter l'objet symbolique de ton itinéraire que tu as amené ? avec toi aujourd'hui.

  • Rodrigue Tandu

    Bonjour Benjamin, moi je vais ramener une croix. C'est une croix que ma grand-mère m'a offerte. Voilà, c'est une croix que je garde souvent dans ma poche et qui me permet quand je suis tenté ou il y a des tentations, je la garde auprès de moi pour aussi la présence du Seigneur.

  • Benjamin

    C'est une croix que tu as avec toi depuis longtemps.

  • Rodrigue Tandu

    Oui, ça fait depuis plus de 20 ans que je l'ai, que je garde ça.

  • Benjamin

    Toujours dans ta poche. Alors Rodrigue, avant d'en venir au jour de ta conversion, est-ce que tu peux nous parler un peu de toi ? Je sais que tu es né en 1979, en République démocratique du Congo, un pays que tu as quitté à l'âge de 7 ans pour la France et donc une cité de Bondy, cette ville de Seine-Saint-Denis près de Paris. tout simplement de ces premières années en France, du souvenir que tu en as, de comment ça se passait vraiment au quotidien.

  • Rodrigue Tandu

    Je suis arrivé l'hiver, il y avait de la neige, je me rappelle. Je ne savais pas c'était quoi. J'ai cru que c'était des plumes d'oiseaux.

  • Benjamin

    Des plumes d'oiseaux ?

  • Rodrigue Tandu

    Je me suis dit, mais tiens, il y a une usine de volailles ici. Et voilà, il faisait horriblement froid et c'était... Et je me suis dit que c'était une ville éclairée. il y avait de la lumière partout et pour moi c'était étonnant voilà ça c'était mon rapport d'étonnement quand je suis arrivé en France et après ça se passait très très bien tu habitais où ?

  • Benjamin

    je suis arrivé à Bondy direct dans le livre tu parles de cet appartement dans ce bâtiment qui est un parallépipède je crois c'est la cité pour les bondylois c'est la cité du marché en face du marché donc

  • Rodrigue Tandu

    il y avait un 5 étages on habitait au 5ème étage c'est là que je suis arrivé

  • Benjamin

    Donc tu es orphelin quand tu arrives en France. Tu rejoins, je crois, ton oncle. Non, mon père. Ton père, voilà.

  • Rodrigue Tandu

    C'est ma mère qui est décédée par la République démocratique du Congo quand j'avais 7 mois. Donc je rejoins mon père. D'accord. Avec une belle mère. Et j'avais déjà mes oncles, les petits frères de mon père, tout ça, qui étaient là. C'est après que ma grand-mère nous a rejoints.

  • Benjamin

    Mais est-ce que, c'est vrai qu'on se pose la question, est-ce que ces premiers mois, ces premières années se font ? Assez facilement, quand on vient d'Afrique, on imagine que c'est, tu l'as décrit d'ailleurs, que c'est un choc, il y a plein de choses qui diffèrent. Est-ce que tu le vis sereinement, paisiblement, ou est-ce que c'est, j'imagine aussi, un peu compliqué par certains aspects ?

  • Rodrigue Tandu

    Je découvre un monde où il y a une certaine froideur quand même. Chacun est chez soi, personne n'est dehors.

  • Benjamin

    Pas qu'à cause de la neige alors ? Non,

  • Rodrigue Tandu

    non, non. Et qu'on passe plus de temps chez soi que dehors.

  • Benjamin

    Je reviens à l'école parce que donc, si je comprends bien, la scolarité se passe bon an, mal an, plutôt bien jusqu'aux primaires, collèges et autres. Et puis toujours dans ce livre dont je donnerai la référence tout à l'heure. Eh bien, tu expliques que le lycée, il faut aller dans une autre commune, Noisy-le-Sec. Il faut sortir du quartier, il y a le problème déjà des bandes et autres. Et... Pour toi, j'ai l'impression que ça marque vraiment le début d'une dégringolade assez vite. Un basculement. Alors, est-ce que tu peux...

  • Rodrigue Tandu

    Donc, le collège, ça va, donc on est tous orientés. Au troisième, on est tous confrontés à la question de l'orientation. Moi, je me rappelle, j'avais choisi Polytechnique. Je ne savais même pas c'était quoi, mais le nom, il me paraissait bien.

  • Benjamin

    Ça faisait chic.

  • Rodrigue Tandu

    Polytechnique, ça faisait bien. Tous ceux qui avaient choisi un peu ces lycées professionnels électroniques de Bondy, on a été orientés dans un lycée qui s'appelait Moulin Fondu, à Noisilles-Sec. Donc, c'est une ville limitrophe de Bondy. Et en face de ce lycée, il y avait une cité. Et cette cité-là, elle est en guerre avec Bondy. Donc, c'est là le début du basculement.

  • Benjamin

    Parce que tu décris aussi dans le livre, il y a cette fameuse ligne de bus qu'il faut prendre. Et il y a un sentiment de danger, c'est ça ? Comment tu te sens justement à cette époque quand il s'agit d'aller dans ce...

  • Rodrigue Tandu

    Non, au début, ça va. Au début, ça allait. Mais c'est après. Donc, on y allait, on allait en bande. Donc, on se rejoignait, on partait. Cinq ou six ou sept. Ça ne nous faisait pas d'angoisse. Ça nous faisait au contraire un peu voyager. C'était un changement. Sauf qu'après, un jour, j'ai un pote à moi qui se bat avec un mec de ce quartier. Et moi, je viens parce que dans ce bar, on est solidaires. Je rentre dans la bagarre. C'est un peu lâche, mais on tape le monsieur à deux. Et on rentre au cours et depuis ce jour-là, c'était compliqué pour nous d'aller à l'école. Parce que la cité nous attendait tous les jours pour nous faire la peau. Ils cherchaient tous les mecs de Bondy. Donc c'est comme ça que la bascule a commencé.

  • Benjamin

    Ta famille te pense au lycée, mais en fait, toi, tu commences à faire l'école de Saunière.

  • Rodrigue Tandu

    On allait tous à l'école. Et du coup, comme on risque notre peau, on n'y va plus. Donc comme on est dans un milieu où on se livre peu, on fait le fort. malgré qu'on a des soucis, on ne dit rien.

  • Benjamin

    Tu parles matin à l'école, normal, tu rentres le soir, tu expliques que quand tu rentres, tu t'arrêtes à la boîte aux lettres pour récupérer les éventuels courriers du lycée, c'est ça ? C'est ça. Pour intercepter ?

  • Rodrigue Tandu

    C'est ça, le matin.

  • Benjamin

    Parle-nous de ces journées, de quoi elles sont faites, parce que s'il n'y a pas l'école pour un jeune...

  • Rodrigue Tandu

    Dans les quartiers, il y a des caves. On avait aménagé une cave. avec des canapés, on a volé un peu l'électricité, on a mis une télé, des consoles, c'était ça notre journée.

  • Benjamin

    Donc c'était quoi, un peu...

  • Rodrigue Tandu

    Voilà, on sort, on va, on se pose, et voilà, après on se bat un peu, on s'entraîne à la bagarre, c'était ça, c'était à l'âge de 16-17 ans.

  • Benjamin

    Et alors à quel moment tout ça, j'allais dire, peut paraître sympathique, non c'est pas tout à fait le terme, mais en tout cas à quel moment tout ça prend une tournure un peu plus... grave avec l'entrée dans peut-être le commerce de la drogue.

  • Rodrigue Tandu

    On a commencé à avoir pas mal de gens aussi autour de nous qui n'allaient plus à l'école. Et ces fréquentations-là, il y en a, ils avaient déjà basculé un peu dans tout ce qui est cambriolage, tout ça. Donc on a commencé à cambrioler. Je ne suis pas fier de ça, mais ça, c'est ma vie. cambriolé. Du coup, on cambriolait. Donc, on trouvait des fusils. Ces fusils-là, on les gardait. Et c'est un âge où tu commences à t'affirmer aussi physiquement. Et voilà. Donc, on commence à être craint. Ça veut dire qu'on est armé, on n'a plus peur. Donc, on se bat tout le temps. Et du coup, on commence à être craint. Et c'est là qu'on commence à avoir une réputation. Parce que Bondy, ce n'est pas une ville qui fait des émeutes gratuites. Mais c'est une ville beaucoup de... de grand banditisme, beaucoup de business en fait. On ne fait pas de...

  • Benjamin

    Donc il vaut mieux qu'il n'y ait pas de trop... Non,

  • Rodrigue Tandu

    tu ne vas pas aller en prison parce que tu as tapé un flic et ça ne sert à rien. C'est con. Mais tu vas en prison parce que tu as risqué de l'argent.

  • Benjamin

    Il faut qu'il y ait un intérêt.

  • Rodrigue Tandu

    C'est pécunier. Et ça, ça a été toujours inculqué par les grands.

  • Benjamin

    Donc si je comprends bien, votre bande commence à prendre de l'épaisseur, j'allais dire, commence à être respectée, comme tu l'as dit. Et donc vous êtes repéré par des...

  • Rodrigue Tandu

    de plus grands qui vont vous mettre dans le j'allais dire dans le circuit du narcotrafic comme les grands ils étaient bien placés nos grands bandits dans le banditisme ils ont placé aussi donc voilà moi les grands qui m'ont mis dedans ils m'aimaient bien parce qu'ils m'ont vu depuis tout petit tout le monde se connait bien évidemment depuis longtemps depuis très très longtemps même quartier même quartier et voilà t'envis aussi un peu les grands parce que tu vois qu'ils s'habillent bien

  • Benjamin

    Tu te souviens dans quel état d'esprit tu es à l'époque ? Est-ce que déjà, dans un coin de ton âme, tu te dis « Finalement, ce que je fais, c'est quand même peut-être pas clean, c'est pas bien. »

  • Rodrigue Tandu

    Après, dans le quartier, on est tous croyants. On sait que ce qu'on fait, c'est bien ou pas bien. On connaît déjà le bien et le mal. Toi,

  • Benjamin

    tu te présentes comme un chrétien auprès de tes amis musulmans ?

  • Rodrigue Tandu

    Oui, mais j'étais toujours chrétien.

  • Benjamin

    Toi, tu te disais chrétien, pardon.

  • Rodrigue Tandu

    Parce que j'étais baptisé, j'ai eu la première communion. Mais je n'ai pas fait la confirmation à cause des entraînements de foot. Oui. Voilà. Et l'état d'esprit, parce que du coup, à ce moment-là, on commence déjà à fumer du cannabis. Du coup, le cannabis, ça te met en état d'esprit où tu t'en fous de tout. C'est un esprit où tu ne sais pas où tu vas. Mais comme tu sais qu'il faut que tu n'existes pas parce que tu es, tu existes parce que tu as, donc tu es dans cet état d'esprit-là, la quête du truc. Mais tu te dis qu'un jour, je vais arrêter. Un jour, j'aurai une vie normale. Mais du coup, tu rentres dans une certaine forme de spirale.

  • Benjamin

    Donc tu te dis que ça va être provisoire pour un moment.

  • Rodrigue Tandu

    Voilà, tu fixes une somme, après tu fais une autre. Oui,

  • Benjamin

    parce que pareil, dans le livre et d'écrit, c'est quand même des sommes conséquentes, jusqu'à 3 000 euros par jour, tu l'expliques, qui peuvent être le fruit de ce trafic.

  • Rodrigue Tandu

    Oui, parce qu'on était quand même dans... On était grand dans ce business. Donc voilà, et c'était le début aussi de la structuration de ce business. Tu expérimentes pas mal de choses, et du coup, t'as ça inverse, tes codes. Tu découvres que tu peux avoir les filles que tu veux, tu peux avoir les habits que tu veux, et du coup, tu te dis que être gentil, c'est pas bien. Être méchant, c'est bien. Être fidèle à une copine, c'est pas bien. Avoir plusieurs meufs, copines, c'est bien.

  • Benjamin

    Est-ce qu'il n'y a pas un moment où ça frotte ?

  • Rodrigue Tandu

    Tu découvres, c'est là que le diable, il est fort. Parce que c'est une forme de puissance qu'on avait. Et puis tu possèdes les autres. Tu achètes les autres. Parce que tout le monde est corruptible. Et tu découvres ça. C'est tout ça, en fait.

  • Benjamin

    Donc c'est vraiment le pouvoir de l'argent, du sexe, la force. Voilà.

  • Rodrigue Tandu

    Et la liberté, en fait. Tu te prives de rien.

  • Benjamin

    Et tout, tout de suite.

  • Rodrigue Tandu

    Tout, tout de suite. Instantané.

  • Benjamin

    Il y a un moment, donc tu expliques dans le livre, qu'il y a cette rencontre avec Arlette. Claire et Eliane.

  • Rodrigue Tandu

    Voilà, les trois sœurs.

  • Benjamin

    Des laïcs consacrés, c'est ça, pour être précis ? De la communauté de l'Emmanuel, qui sont installés à Bondy. Est-ce que tu peux nous expliquer comment se passe la rencontre ? Comment ça se passe ?

  • Rodrigue Tandu

    Moi, on était dans le coin où on faisait nos trafics, donc je m'apprêtais, moi, j'allais récupérer des sous. Et on voit trois bonnes sœurs qui rentrent. Trois blanches, mais des blanches pas comme nous, quoi. Parce qu'on se connaît tous. Mais les blancs de quartier sont comme nous. Ils parlent comme nous, voilà. Et je vois ces trois, on les fouille.

  • Benjamin

    Ah oui, carrément.

  • Rodrigue Tandu

    Ah oui, on les affiche. On pensait que c'était des flics. Et on se rend compte que c'est des sœurs. Et on se rend compte que c'est des sœurs. On se dit, mais moi, je me dis, on respecte quand même le religieux. On respecte pas le religieux pour respecter, on se dit que... S'ils ont fait le choix de prier Dieu, de donner leur vie à Dieu, que ce soit le musulman ou la sœur consacrée ou le prêtre, Dieu peut nous punir. C'est comme ça qu'on voit les choses. Et du coup, moi, je lui dis, écoute, ma sœur, mes sœurs, priez pour moi, mais cassez-vous d'ici. Je ne voulais pas... Priez, faites votre rôle, mais ne venez plus. Et c'est là que mes problèmes ont commencé. Du coup, en leur disant ça, je leur ai dit que j'étais catholique, chrétien. Moi, je pensais qu'ils allaient arrêter. Et comme, du coup, quand il me voyait dans le quartier, il me parlait souvent, « Rodrigue, on prie pour toi, Rodrigue, il faut que tu changes d'ami, oui. »

  • Benjamin

    Ça, c'est surtout Sœur Claire, si je me souviens bien.

  • Rodrigue Tandu

    Oui, après, Claire, elle était assistante au CED, les autres, elles travaillaient. Du coup, le lien de confiance était plutôt avec Claire. D'accord. Mais ça, elle a mis du temps avant que je puisse lui faire confiance.

  • Benjamin

    Elle a mis combien de temps ?

  • Rodrigue Tandu

    Ça a duré deux ans, quand même.

  • Benjamin

    Deux ans ?

  • Rodrigue Tandu

    Mais ce lien, je dirais qu'ils se le louent parce qu'elles habitaient aussi le quartier. Donc elles étaient devenues comme nous. Ce n'étaient pas des gens qui venaient et qui partaient. Donc on les voyait tout le temps faire leurs courses. Leur vie quotidienne, elle était avec nous. Et ça, ça interpelle. Et comme on est tous croyants, parce que comme on ne se livre pas, quand t'es angoissé ou culé, tu ne te livres pas. Tu ne vas pas dire à tes potes, j'ai mal dormi. Ou une meuf, elle t'a quitté, que t'aimes. une copine que t'aimes, tu vas pas lui dire je souffre, tu vas dire à toi, qu'est-ce qu'on a ? Tu fais le dur, mais on peut pas dire à nos parents, on peut dire à personne, donc c'est souvent, c'est dans la prière, mais des prières, ouais, Dieu, je recommencerai plus, des prières comme ça.

  • Benjamin

    Et donc, il y a une bagarre à Paris, il y a un garçon...

  • Rodrigue Tandu

    Comme on était armé, moi, j'hésitais pas à tirer, mais j'ai tiré sur un mec. Et ce mec-là, il n'est pas mort. Et comme j'avais peur d'aller en prison pour une grosse peine, du coup, il fallait que je prie parce que j'ai mal dormi. Et j'ai dit à la sœur, c'était chaud. Mais du coup, elle m'a ouvert l'église. Et ça m'a fait plaisir. Et du coup, j'ai prié, mais je n'ai pas prié beaucoup. J'ai dit, Dieu, si tu me sauves de cette peine, je ne recommencerai plus les prières comme ça.

  • Benjamin

    Mais il y a déjà quelque chose qui se passe là, parce que tu expliques qu'il y a eu une... paix quand même.

  • Rodrigue Tandu

    Oui, et là, je sentais une paix, je sentais une présence. Et c'est là que je me suis dit, peut-être qu'il y a quelque chose et tout. Et du coup, dans cet élan-là, la sœur a revu à la charge, tu sais, Rodrigue, il faut que tu changes d'ami et tout. Et du coup, je lui ai dit, d'accord, mais je pourrais aller là où...

  • Benjamin

    Quelle est la proposition que sœur Claire, assez vite, finalement,

  • Rodrigue Tandu

    t'a fait ? Elle m'a dit qu'on a un lieu où tu peux aller aussi prier comme ça, voilà. Et je lui ai dit, ok. Et ce lieu, c'est ? C'est Paray-le-Mognal.

  • Benjamin

    Paray-le-Mognal.

  • Rodrigue Tandu

    Et je connaissais pas du tout, je savais même pas c'était quoi. Même la communauté d'Emmanuel, je ne savais même pas ce que c'était. Et du coup, je lui ai dit OK. Et du coup, on s'est donné rendez-vous. Elle m'a ramené les papiers d'inscription. Donc, elle m'a inscrit à Parallel Monial.

  • Benjamin

    On est en quelle année là ?

  • Rodrigue Tandu

    C'était quelle année ? 2000, 2001, 2002,

  • Benjamin

    je crois. Et tu te retrouves donc, tu quittes Bondy, que j'imagine que tu ne dois pas quitter très, très souvent.

  • Rodrigue Tandu

    Non, on va en vacances quand même. Avec l'argent qu'on a. On va en Thaïlande.

  • Benjamin

    En tout cas, tu n'es jamais allé à Parelmonial. Donc, tu débarques à Parelmonial, dans ce petit village bourguignon. Pareil, raconte-moi comment...

  • Rodrigue Tandu

    Quand j'arrive là-bas, je vois une grande tante, je vois beaucoup de blancs qui rigolent, qui sont gentils. Tous mes codes sont bouleversés. Et je me dis, mais ils se foutent de ma gueule. C'est comment ? Pas des blancs comme les nôtres, mais des blancs un peu des têtes de juge, des blancs policiers, des militaires, des trucs comme ça. Et tu te dis, mais qu'est-ce que je fous là ? Parce que c'est pas un traquenard. C'était un peu ça, mon impression au départ.

  • Benjamin

    Qu'est-ce qui fait que tu restes ?

  • Rodrigue Tandu

    Je suis là, déjà.

  • Benjamin

    Parce que t'aurais pu te dire...

  • Rodrigue Tandu

    Je suis là avec la sœur. Je suis quelqu'un, quand je donne une parole, j'aime bien qu'elle... Et après, comme ça, les sœurs, elles vont plus me prendre la tête.

  • Benjamin

    C'est une manière de payer un peu ta dette.

  • Rodrigue Tandu

    Voilà, et quand je rentre...

  • Benjamin

    Sauf qu'il va se passer quand même un truc étonnant. C'est-à-dire qu'à un moment, tu vas rentrer sous la grande tente, tu vas voir...

  • Rodrigue Tandu

    Donc je vois le Saint-Sacrement.

  • Benjamin

    Dont tu ne sais pas ce que c'est à l'époque. Voilà,

  • Rodrigue Tandu

    je ne sais pas. Pour moi, c'est une boule. Et je vois... Ils mettent le lançant, tout ça, voilà. Et là, mon côté congolais reprend. Je me dis, attends, ils sont en train de prendre une boule. C'est des sorciers. Du coup, je me suis dit, c'est quoi ce truc ? Mais je sens que ça m'attire. Et c'est là que je me suis rapproché. Je suis tombé à genoux et j'ai commencé à demander pardon. Et à pleurer, surtout. Et je me suis dit, soit c'est le shit que j'ai fumé qui me joue des tours, ou ça ne va pas.

  • Benjamin

    Est-ce que tu peux nous en dire un peu plus ? Parce que ça semble complètement dingue.

  • Rodrigue Tandu

    J'ai senti un amour immense, mais pas un truc agressif. Et c'est ça qui m'a demandé... Je sentis une présence aimante. C'est aimante d'un amour que je n'avais jamais expérimenté et d'un amour que tu ne peux pas faire du mal.

  • Benjamin

    Mais quelle est cette force qui te fait te mettre à genoux, qui te tire des larmes ?

  • Rodrigue Tandu

    C'est cette présence qui m'a englopé, que là, je me suis mis à genoux. Parce que ça m'a désarmé, en fait. Et du coup, c'est là que je suis tombé à genoux. Et il a demandé pardon, mais sans le calculer, en fait. Il a demandé pardon et a pleuré.

  • Benjamin

    En même temps, tu dis que tu étais croyant, que tu connaissais Dieu, tu étais baptisé. Bon, on peut être baptisé sans croire, mais tu avais cette foi. Qu'est-ce qui fait qu'à ce moment-là, cette foi devient, j'allais dire, concrète, qu'elle va changer quelque chose ?

  • Rodrigue Tandu

    Après, ça, c'est la volonté de Dieu. Il vient chercher qui il veut. Il choisit les gens. Moïse, par exemple. Dieu, il choisit qui il veut. Il a des projets pour chacun d'entre nous, mais à la hauteur de ce qu'il veut pour chacun d'entre nous. Voilà, donc c'est cet amour-là que je ne peux pas le dire. Je ne suis pas dans la tête de Dieu. C'est ce jour-là qui m'a sauvé. Qui ne m'a pas sauvé. Mais voilà, donc après, j'ai entendu une voix intérieure qui m'a dit, va et jette le truc que tu as ramené, parce que comme je suis addict au cannabis, moi, je voulais fumer mes joints tranquilles, fermer cinq jours et rentrer, et jette-le. Et même là, mon côté bondinois a repris. Quand je marchais pour aller le chercher, je me suis dit, peut-être que je peux le vendre là. Je peux trouver un client. Mais je l'ai jeté quand même, le cannabis, parce que c'était une voie obéissante. Et depuis ce jour-là, je n'ai plus jamais fumé. Il n'y a que la force de Dieu qui peut faire ça. C'est cet amour absolu qui te désarme, en fait. Et du coup, c'est cette rencontre.

  • Benjamin

    Qu'on comprenne bien, Rodrigue, du moment où tu sors de cette tente de l'adoration, tu es devenu chrétien ? Ça y est, tu es croyant ? Tu vas changer de vie ?

  • Rodrigue Tandu

    Non, je me pose d'abord beaucoup de questions. Si c'est le shit qui me joue des tours, si j'entends de voix, si ce n'est pas la psychiatrie, tout ça. Au départ, je suis bouleversé quand même. Ce n'est pas être croyant, c'est là-bas que je suis bouleversé. Et c'est petit à petit que, quand il t'arrive un truc comme ça, c'est petit à petit, c'est des signes. Mais ce n'est pas tout tout de suite, en fait. Après, je me dis, bon, puisque j'ai vécu ça et ça te rend mendiant. Donc du coup, moi, je n'allais pas trop à la messe. Du coup, je cherchais la boule. Le saint Saint-Camban. Donc, j'ai passé beaucoup de temps à adorer, à donner pardon. Et j'ai cru que je t'ai donné ça. Et je me suis dit, quand je vais rentrer à Bondy, je vais dire à mes potes, ouais, j'ai trouvé une boule magique. Et aussi, ils vont devenir comme moi.

  • Benjamin

    Parce que ce que tu as vécu là, en fait, si je comprends bien, tu n'as pas pu, sur ces cinq jours, les cinq jours de ce Forum des Jeunes, tu n'as pas pu en parler à quelqu'un, expliquer ce que tu avais vécu ?

  • Rodrigue Tandu

    Et à Claire, j'en ai parlé. Elle m'a accompagné quand même. Donc à Claire, mais je me suis confessé aussi.

  • Benjamin

    Tu vas rentrer au bout de ces cinq jours à Bondy, forcément un peu différent, mais jusqu'à quel point différent en fait ? Ce que tu as vécu là, ces jours-là, qu'est-ce que ça va changer directement dans ta vie ?

  • Rodrigue Tandu

    En gros, ce que j'ai vécu, ça donne du courage. Voilà, c'est du courage. D'assumer ce que... Parce que j'ai découvert un amour que personne ne peut me donner. Même pas mes amis, rien. Donc tu le vois dans le courage qui te pousse à t'affirmer. Et c'est là que je commençais à chanter des Alléluia, Nanani. Et je commençais à être maintenant dans la morale. Ça veut dire dans le bien, pas le bien ou le mal. Donc je ne pouvais plus faire les trucs d'avant. Je ne pouvais plus faire du mal aux gens. C'est là où c'était dur, parce qu'il fallait qu'on se détache. J'avais ramené mes copains, voire aussi l'adoration au Christ ressuscité, l'église de Bondy. Mais ça n'avait rien passé pour eux. Donc l'adoration, ils m'ont pris pour un menteur, un mytho. Donc c'était plutôt ça. Donc petit à petit, je commençais à m'éloigner d'eux.

  • Benjamin

    Quand tu dis petit à petit, ça a pris combien de temps en fait ? C'est un processus qui se fait en quelques mois ou c'est plus long, plus court ?

  • Rodrigue Tandu

    Après moi, je dirais pour moi. Donc il y en a, c'est plus radical, moins, mais moins.

  • Benjamin

    Mais toi, je veux dire, ton changement de vie et puis le fait... de te sentir...

  • Rodrigue Tandu

    Le jour où ça a commencé que je ne pouvais plus. Donc petit à petit, l'esprit que tu dégages te fait rejeter par les autres. Parce que vous n'êtes plus dans le même état d'esprit en fin de compte. Donc toi, c'est comme si tu venais éclairer leur... Donc du coup, il y a un rejet parce qu'ils ne sont pas prêts. Donc du coup, petit à petit, tu es rejeté un peu et petit à petit, tu t'éloignes en fait.

  • Benjamin

    Tu as même pensé à un moment devenir être prêtre ? Tu t'es posé la question.

  • Rodrigue Tandu

    Après, avec Claire, comme elle m'éclairait beaucoup, je me suis...

  • Benjamin

    Donc cette laïque de l'Emmanuel, je rappelle.

  • Rodrigue Tandu

    Elle m'a beaucoup fait... Je fais l'école de château et de mission. Donc je me suis approché de... J'ai rencontré d'autres types de chrétiens de mon âge. Et c'est là que j'ai compris qu'il y en avait. Ils faisaient des grandes écoles, polytechniques, ESSEC, HEC, tout ça. Avant, je ne savais pas que ça existait. On n'était pas dans le même monde. On était dans le même pays, mais pas dans le même monde. Et ces jeunes-là, on est en parté, donc l'école de chartes et de missions, c'était une école de réflexion. Et c'est de là que j'ai commencé à me poser cette question. Mais après, je me suis dit, mais ce n'est pas possible. Moi, Rodrigue, prêtre, j'aurais... L'Église serait barrée en live.

  • Benjamin

    Donc, ça ne sera pas la prêtrise, mais par le biais de... pas mal de rencontres, il y a la possibilité de devenir un jour éducateur, et pareil, c'est de l'ordre d'un appel intérieur. Est-ce que tu peux nous raconter comment ça s'est passé ?

  • Rodrigue Tandu

    Et du coup, voilà, je me posais cette question, et je repars à Paris le Mondial, donc du coup avec Cyril Tisserand, là, cette fois-ci. Cyril Tisserand, c'est le fondateur de l'association Le Rocher, qui était venu habiter dans le quartier, dans le cadre de Fidesco, et petit à petit, il a monté l'association Le Rocher. C'était une personne que je connaissais peu, mais petit à petit, je commence à le connaître grâce à... Parce que c'est quelqu'un qui est quand même beaucoup ancré dans la foi. Et je vais à Parallel Monial. Du coup, je vais dans une église, je prie et j'entends la voix intérieure. « Rodrigue, ce n'est pas dans une église que je te veux, c'est dans la rue. Va et relève les genoux d'affaibli. » Et c'est là que je découvre ma vocation. Et j'ai une mot, je discute un peu avec lui comme éducateur. Et du coup, il me dit, tiens, je rencontre un directeur de formation des apprentis d'auteuil. Et c'est là que... Mais c'était facile parce que du coup, une fois que j'ai dit oui pour ça, pour cette vocation-là, tout s'est déroulé facilement. Donc du coup, je suis rentré au centre de formation des apprentis d'auteuil.

  • Benjamin

    Les portes se sont ouvertes facilement.

  • Rodrigue Tandu

    Voilà, c'est ça. On dirait le Seigneur m'avait précédé.

  • Benjamin

    Il y a un passage qui est amusant dans le livre, c'est que tu expliques que tu préfères te confronter aux fortes têtes qu'à ceux qui ont peut-être plus un profil de victime. C'est aussi l'héritage de se passer à la rue avec d'autres.

  • Rodrigue Tandu

    J'étais fragile autrement, mais j'avais une carapace. Donc moi, je connais plus ces codes-là. J'ai dû... Quelqu'un qui est fragile, fragile par mon charisme. Je peux faire plus de mal que de bien. Parce que je peux être brut. Il y a une certaine forme dans l'éducatif. Il y a une forme de prudence et de bienveillance. Et quelqu'un qui est très, très fragile, des profils comme moi, ça peut être compliqué. Parce que tu peux arriver comme un bourrin dans quelque chose qui...

  • Benjamin

    Où il faut arriver avec un peu plus de délicatesse.

  • Rodrigue Tandu

    Voilà.

  • Benjamin

    Pareil, quand tu entends, je reviens sur cet appel entendu à Paray-le-Monial de devenir éducateur. Est-ce qu'à un moment, ça ne t'a pas semblé aussi un peu incongru ? Quand on a l'histoire que tu as, est-ce qu'il n'y a pas un moment où on se dit mais est-ce que je suis légitime pour aider d'autres jeunes à s'en sortir ?

  • Rodrigue Tandu

    Moi, dans mon histoire, on ne se pose pas trop de questions. C'est quand je suis sorti que j'ai vu beaucoup de gens. de ces écoles qui intellectualisent, qui posent... Nous, en tout cas, on ne se pose pas beaucoup de questions. On avance, en fait. Une fois que tu as dit oui, tu avances. Et après, tu vois. On n'est pas des gens qui se projettent, qui s'assoient, qui créent un projet, qui font un tout doux. On n'est pas des gens comme ça. On avance et on avise après.

  • Benjamin

    Alors, Rodrigue, tu vas travailler, donc tu l'as dit, tu vas bénéficier d'une formation. Tu vas travailler avec les orphelins apprentis d'Auteuil, avec l'association Le Rocher. En 2019, tu crées le réseau des deux cités avec un garçon qui s'appelle Antoine Déjar, qui a fondé un cabinet de conseil en stratégie en 2019. Et donc, c'est un parti pris assez novateur, parce que ce réseau, il a pour but de mettre en relation des chefs d'entreprise et des caïds repentis. Explique-moi comment ça marche.

  • Rodrigue Tandu

    Moi, quand j'étais au Rocher, j'ai vu des étudiants polytechniques, HEC, tout ça. Et je me suis dit, c'est des mecs qui sont brillants, méthodiques. Ils résinent pas la tâche, ils abattent pas mal de tâches de travail, mais ils intellectualisent tous les mecs. Et ils ont pas ce courage, cet élan qu'on peut avoir, nous. Cette simplicité relationnelle. Ils marchent un peu sur un pied. Et nous, à l'inverse... On a tous ce côté un peu spontanéité, intuitif, et la simplicité dans la relation à l'autre. Mais on n'a pas toutes ces méthodes, toutes ces capacités à être méthodiques, rigoureux, tout ça. Et je me suis dit, le contact des deux peut être une richesse. Nous aussi, on marche sur un pied. Donc quand on contacte les deux, ça peut être que bénéfique pour nous deux. Puisqu'on va apprendre à l'autre à se simplifier. Et nous, ils vont nous apprendre à être un peu méthodologiques. Et comme... Souvent, c'est beaucoup de personnes qui ont fait beaucoup de trucs pour des jeunes, des quartiers. Je me suis dit, pourquoi pas le faire au degré des cahiers des repentis ? Parce qu'il y en a beaucoup. Il y en a beaucoup qui sortent de prison ou ils n'en veulent plus. Mais il n'y a personne pour les accompagner. Et c'est comme ça qu'on la rencontre d'Antoine Desjardes, que j'ai rencontré grâce au pèlerinage de père de famille.

  • Benjamin

    Ah oui,

  • Rodrigue Tandu

    à Vézelay. À Vézelay, il sortait d'ordinaire. Donc, c'était un peu du jumelage quand je tourne chez les Mureaux. Et lui, c'était Le Chesnay. Vous voyez un peu le truc.

  • Benjamin

    Oui, ça fait un attelage un peu étonnant.

  • Rodrigue Tandu

    Et du coup, voilà, donc on s'est vus et on a sympathisé. Et quand je lui ai parlé, il m'a dit bingo. Donc, on a monté un groupe. Donc, ça se passe comment ? Ça se passe dans un truc très, très simple. Donc, Antoine, il a ramené deux amis à lui. Moi, j'ai ramené deux gars que je connaissais aussi.

  • Benjamin

    Et voilà, petit à petit, c'est de créer un petit réseau, tout discret, pas de pub, rien. Des moments de rencontre, une fois par mois, dans un café.

  • Rodrigue Tandu

    Et l'objectif, il est lequel ? Parce que j'entends bien l'idée de faire se rencontrer deux mondes qui ne se côtoient pas, qui ne se connaissent même pas. Mais c'est pour quelle finalité ? Pour quel but ?

  • Benjamin

    Vous voyez bien, ma vie, il n'y avait pas d'objectif. Je suis venu à Paris de Montréal. C'est la rencontre qui a changé ma vie. Moi, je crois beaucoup à la puissance de la rencontre. Moi, ma vocation, en fait, Relever les genoux affaiblis, passe par mettre des moyens, organiser des rencontres entre des personnes qui ne vont jamais pouvoir se rencontrer si je n'organise pas ces étapes. Et l'intuition même de ces groupes-là va se réaliser à travers des membres. Donc chaque groupe ne se ressemble pas, en fait. Il n'y a pas de projet précis, mais il y a quelque chose de commun entre ces deux mondes, c'est que les deux, ce sont des leaders. Et dans ce leadership-là, qu'est-ce qu'on fait ensemble ? Pour aussi la société française, pour ces jeunes.

  • Rodrigue Tandu

    Donc ce réseau existe depuis 2019 ? Voilà. Il existe toujours ?

  • Benjamin

    Il existe toujours. Il y a combien de groupes ? Il y a 7-8 groupes. Donc il y a une trentaine de personnes.

  • Rodrigue Tandu

    Et donc il est un peu le terreau sur lequel vous êtes... sur lequel vous avez pu cultiver votre activité aujourd'hui que vous menez au sein de KPMG. Alors ça, c'est pareil, c'est très étonnant, très inattendu. Mais est-ce que tu peux m'expliquer où est-ce que tu œuvres maintenant ?

  • Benjamin

    J'ai plein de projets. Vous voyez bien qu'avec le Seigneur, je suis père de famille, il faut que je me nourrisse, d'accord ? Il y a plein de projets, on peut être dans l'élan, mais il faut aussi nourrir ses enfants. Le réseau des deux cités, vous voyez que je ne peux pas en vivre.

  • Rodrigue Tandu

    Oui, c'est bénévole.

  • Benjamin

    Voilà, donc... Et après, il fallait faire des projets. Par exemple, Antoine, il a bougé. Donc, quand il est parti chez KPMG, il a dit, il faut qu'on monte une cellule pour la réinsertion des jeunes. Donc, on s'est regardé, on s'est dit, ben voilà, Rodrigue, parce qu'on était plusieurs. Du coup, c'était moi qui ai pris l'initiative d'aller encadrer ces jeunes-là. Donc,

  • Rodrigue Tandu

    KPMG, je n'ai pas précisé, c'est un grand cabinet d'audit et de conseil, l'un des plus importants en France. Et donc c'est là où tous les matins, toi tu es à la défense, tu prends la direction de cette société et où tu rejoins 7 ou 8 jeunes.

  • Benjamin

    Voilà, je suis le manager de ce groupe-là.

  • Rodrigue Tandu

    Voilà,

  • Benjamin

    tu manages. Voilà, je manage ces jeunes-là.

  • Rodrigue Tandu

    Donc l'intuition c'est peut-être aussi d'arriver un peu plus tôt dans l'histoire de ces jeunes, plutôt que de jouer les pompiers une fois qu'ils sont trop pompiers.

  • Benjamin

    Là c'est de la prévention qu'on fait. C'est de la prévention. On prend des jeunes qui nous sont envoyés par les CAID aussi. C'est des jeunes qui ont des bacs pro. technologiques, c'est un peu les neveux, les nièces des caïds, et qui ne travaillaient pas en fait. Et l'objectif, c'est de les prendre, qu'ils fassent des slides les présentations Powerpoint et de l'Excel, pour que les consultants gagnent du temps dans leurs réflexions, qu'ils fassent aussi des belles présentations, parce que les consultants leur outil de travail, c'est des présentations. L'objectif final, c'est que ils grandissent en rigueur, en méthodologie et puis voilà, se construire. une certaine forme de rigueur et de résilience, pour que par la suite, ils puissent reprendre l'école aussi. Les écoles, soit en alternance avec les métiers de KPMG, s'ils sont intéressés ou pas. Il y a ça, il y a tout ce qui est un peu... Voilà, de ce groupe, par exemple, là, on va monter avec Yann Boucaille, peut-être, un Café Joyeux, le fondateur de Café Joyeux, à Bondy. On a vu le maire. Oui, je fais plein d'actions comme ça. J'ai envie de faire, par exemple, de l'aide de devoir à domicile. En même temps, j'ai aussi cette mission, ma mission à moi aussi. Aujourd'hui, je suis chez vous pour témoigner aussi de ce Christ qui peut changer des vies. J'ai plein de projets, en fait. Oui,

  • Rodrigue Tandu

    Rodrigue Tendu ne reste jamais très longtemps au même endroit.

  • Benjamin

    Quand tu es trop tranquille, c'est là qu'il faut que tu te poses la question. Quand tu es trop à l'aise, est-ce que tu es dans la bonne voie ? C'est plutôt ça l'indicateur. Quand tu as fait cette rencontre, quand tu es comme ça, c'est ça en fait. Tu es un missionnaire permanent. Et moi, je le sais que ma vie ne sera jamais comme avant. Je ne serai jamais en paix. Je le sais. Mais il me donne la force et les moyens par les rencontres que je peux faire pour pouvoir mener à bien mon projet.

  • Rodrigue Tandu

    Comment, justement, ta foi, le fait que tu chemines avec le Seigneur, change ta manière d'être un leader, un manager ? Qu'est-ce qui fait que tu es différent peut-être d'un autre ?

  • Benjamin

    C'est quoi un bon manager ou un leader ? Un leader, c'est celui qui donne la vision. Ma vision, elle est tournée vers le ciel. Et c'est lui qui inspire confiance. Inspirer confiance, c'est que il faut que l'autre y sente que tu lui veux du bien. Et comment tu fais grandir l'autre ? C'est lui proposant un autre chemin. Que ça soit ses caïds, que ce soit n'importe qui que je rencontre. En laissant l'autre aussi libre. Parce qu'il peut nous arriver aussi des échecs, parce que le pauvre, c'est pas que celui que tu donnes à manger qui te dit merci, le pauvre c'est celui aussi qui n'est pas agréable et qui ne te dit pas merci. Parce que ta joie de vivre, ça peut être une source de violence pour cette personne. Et peut-être c'est cette pauvreté que j'ai témou. de cette violence-là. Donc j'ai appris tout ça. Comme moi, je suis tourné vers le ciel et je suis détaché. Il faut être détaché pour mener à bien cette mission. Il faut être courageux. Le courage, c'est le Seigneur qui le donne. Le détachement, ça veut dire de tout. De l'argent, de tout. Il faut être détaché de tout. Et le Seigneur le donnera.

  • Rodrigue Tandu

    Quel conseil tu donnerais à un jeune, qu'il soit décité ou pas d'ailleurs ? Qui serait tenté par l'argent facile, par la drogue ? Comment résister finalement, plus généralement, comment résister aux tentations de ce monde ? Quel conseil tu donnerais à un jeune ?

  • Benjamin

    Un jeune qui cherche enfin une évasion. Quand tu es addict au cannabis, ou un jeune qui va acheter, qui va acheter une image, qui va acheter des choses, je lui dirais que l'essentiel est ailleurs, parce qu'on croit tous à des choses qui nous dépassent. Et je dirais à ces jeunes-là, déjà, il faut qu'ils prennent le temps de s'aimer lui-même. Parce que c'est ça, la clé. La clé, elle est de l'ordre de l'amour. Donc souvent, c'est des personnes comme moi, quand je relis, c'est un conseil, c'est de prendre le temps. Je ne dis pas que je ne suis pas là pour faire la morale, lui disant c'est bien ou c'est pas bien. Prendre le temps de réfléchir. De réfléchir parce qu'on le sait. Est-ce que c'est un délire ? Parce que souvent, quand on veut prendre la drogue, c'est un délire. Donc comme nous, on avait commencé le joint, on aimait bien le foot à l'époque. On se disait qu'on allait arrêter, mais on s'est fait prendre. On s'est fait prendre. Donc ça veut dire, ce soif de liberté qu'on veut avoir, parce qu'on possède de l'argent, donc on achète, on a l'impression d'être libre. Ou bien fumer, s'évader de sa propre réalité, est-ce qu'on pense qu'on est libre ? Prendre de la cocaïne, voilà. C'est ça en fait que le jeune recherche, une évasion. Mais du coup, il faudrait qu'il prenne le temps de se dire, je veux fuir quoi ? C'est une fuite, en fait. Qu'est-ce que je veux fuir ? Qu'est-ce que je veux fuir ? C'est cette question-là. Prendre le temps. Est-ce que c'est un délire ? Pourquoi je vais délirer ? Soit c'est le pourquoi.

  • Rodrigue Tandu

    Le sens. La question du sens.

  • Benjamin

    Poser la question du sens. Ça, c'est le conseil que je leur donnerais.

  • Rodrigue Tandu

    L'autre question qu'on pose de façon traditionnelle, c'est de demander à notre invité s'il a un livre qu'il aime bien, qui a vraiment du sens pour lui. Et quand je t'ai posé la question en amont de cette émission, tu m'as dit, moi, ce n'est pas un livre, c'est plutôt une musique. Donc, quelle est cette musique ? Et pourquoi elle a fait le sens pour toi ?

  • Benjamin

    Moi, c'est Céleste Jérusalem, que je chante tous les matins. Notre cité se trouve dans les cieux. Nous verrons l'épouse de l'agneau resplendissante de la gloire de Dieu. Céleste Jérusalem Moi c'est notre cité quoi, je viens d'une cité et maintenant je me tourne vers la cité céleste, j'ai le réseau de deux cités, la cité des dieux et la cité des hommes. Le mot cité c'est quelque chose, voilà, parce que je suis tourné vers... J'ai envie de faire partie de cette cité céleste. Et c'est ça que je chante tous les matins, qui me donne la force, qui me donne... Parce que voilà, je suis humain, je reste humain, des fois il y a des combats, des fois voilà. Mais voilà, il y a des tentations, je tombe aussi. On est des pêcheurs, on pêche aussi. Mais quand on est tourné vers ça, on sait que Dieu est au-dessus de ça.

  • Rodrigue Tandu

    Il y a aussi ta prière préférée, celle que tu, peut-être comme ce chant, que tu aimes réciter régulièrement, qui te parle, qui a un écho profond en toi.

  • Benjamin

    Moi, j'aime bien l'hymne. L'hymne à la vie de Mère Thérésa. Moi j'aime bien, la vie est une chance, saisis-la. La vie est une beauté, admire-la. La vie est une béatitude, savoure-la. La vie est un rêve, réalise-le. La vie est un défi, relève-le. La vie est un devoir, accomplis-le. La vie est un jeu, joue-le. La vie est richesse, conserve-la. La vie est amour, partage-le. La vie est mystère, perce-le. La vie est promesse, remplis-la. La vie est tristesse, surmonte-la. La vie est une hymne, est un hymne, chante-le. La vie est un combat, accepte-le. La vie est aventure, Ausha. La vie est bonheur, mérite-le. La vie est la vie, défends-la. Parce que ce Dieu compris, c'est la vie, c'est la source de toute vie.

  • Rodrigue Tandu

    Et toute dernière question, Rodrigue, question assez personnelle, mais... S'il a, dans cette pièce où on est en train de réaliser cet entretien, le Christ apparaissait, qu'est-ce que tu lui demanderais ? Qu'est-ce que tu lui poserais comme question ? Qu'est-ce que tu aurais envie de lui dire ?

  • Benjamin

    Moi, je demanderais s'il me reste encore beaucoup de temps sur terre. Parce que je pense que... S'il ne peut pas m'emmener avec lui, parce que je pense que... On sera tellement plus heureux là-bas, avec lui. C'est ça que je lui demanderais. Voilà.

  • Rodrigue Tandu

    Eh bien, on arrive au terme de cet entretien. Merci beaucoup, Rodrigue, de ces réponses.

  • Benjamin

    Merci à toi.

  • Rodrigue Tandu

    Je rappelle que ton livre témoignage de la cité de Bondy à la cité du bon Dieu est disponible déjà depuis quelques temps aux éditions Artej, et donc dans toutes les bonnes librairies.

  • Benjamin

    Merci.

  • Merci de nous avoir écoutés. Si ce podcast vous a plu, n'hésitez pas à le partager autour de vous, à laisser un commentaire et une note de 5 étoiles sur les plateformes d'écoute et les réseaux sociaux Les Podcasts de 2FC pour faire bénéficier de ce podcast un maximum de personnes. Pour découvrir d'autres témoignages de feu, vous pouvez bien sûr écouter les autres épisodes du podcast, mais aussi lire chaque semaine la rencontre avec un témoin touché par la grâce dans le magazine Famille Chrétienne et... Et enfin, n'hésitez pas à découvrir les autres podcasts de Famille Chrétienne. Toussaint, ces témoins de la foi racontés par Bénédicte de Lelys, Maman Prie, Sexo, Sacrée Histoire et d'autres encore. Un grand merci et au prochain premier lundi du mois pour un nouvel épisode.

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