Speaker #0Salut internet et bienvenue sur Vie, ma vie d'artiste raté, le podcast qui vous dévoile l'enfer du décor d'une vocation très souvent fantasmée. Aujourd'hui, mâchoire carrée, épaules cassées. Je m'appelle Adrien, je suis musicien professionnel depuis 20 ans et je propose également des séances d'accompagnement, des séances de mentorat, pour vous aider de l'intention à la vocation à développer confiance et écrire. Alors aujourd'hui c'est un épisode particulier qui me tient relativement à cœur parce que je vais vous parler de la blessure. on parle beaucoup de la blessure du sportif on parle moins de la blessure du musicien et entre musiciens on parle rarement des moments où on est blessé, assez peu c'est marrant, c'est un métier où on est censé beaucoup se servir de son émotionnel pour véhiculer justement des tas de choses à partir de ça et on a un peu de mal parfois à se confier là-dessus sur nos fragilités, nos faiblesses, notamment quand elles sont corporelles La question que je vais me poser aujourd'hui, c'est un peu comment se remettre d'une blessure, comment faire avec une blessure quand on a des échéances, des concours, des concerts, etc. Et puis une autre question peut-être un peu plus profonde, qui engage aussi une de mes croyances, c'est la signification de la blessure à certains moments de vie. Qu'est-ce que ça veut dire ? Quel enseignement je peux en tirer ? C'est un sujet qui me touche parce que moi, jusqu'à l'âge de 24 ans, et peut-être que ça sera pareil pour certains d'entre vous, peut-être que ça résonne pour toi aussi, j'avais pas de corps. C'est-à-dire que je n'avais pas de corps, je ne faisais pas de sport. Pour moi, mon corps, c'était un réceptacle à plaisir. C'était un espèce de véhicule pour passer du bon temps, faire la fête, faire de la musique. Et puis, point barre, je ne sais pas, peut-être mon plus haut fait d'arme en tant que sportif jeune, c'était d'avoir couru 40 minutes pour le bac de sport. Mais vraiment, c'était le bout du monde. Je me rappelle, suite à ça, j'avais séché toute la journée de cours tellement j'étais arraché. Euh... Et bref, c'est un sujet auquel je reviendrai de toute façon au cours de ce podcast, des émissions à venir. Mais bref, jusqu'à 24 ans, je n'avais pas de corps, pas tellement. Et puis en fait, c'est vraiment la douleur qui m'a fait prendre conscience de ce corps et qui m'a fait dire, mais tiens, il faut peut-être que tu prennes soin de toi et que tu explores un peu cette facette-là parce que tu ne vas pas tenir. À 24 ans, en fait, j'avais tellement mal au dos. J'étais un jeune musicien, j'arrivais à Paris. J'avais tellement mal au dos le soir en me couchant que je n'arrivais même plus à savoir si j'avais mal au dos. mal au dos, ou si j'avais mal au ventre, aux côtes. La douleur irradiait tellement. Et en plus, à l'époque, je ne prenais pas vraiment soin de moi. J'allais rarement voir un médecin, des thérapeutes, des soignants, un ostéopathe, des kinés, etc. Et bref, l'anecdote que j'ai envie de raconter spécifiquement aujourd'hui, c'est vraiment une anecdote, c'est un peu plus tard dans ma vie, c'est la même année où j'ai échoué à mon prix, a été la même année où j'ai vécu une grosse séparation amoureuse, et ça a été également la même année où j'ai dû annuler ma participation au concours pour un conservatoire supérieur, parce que je me suis lamentablement cassé la clavicule. Waouh ! Ouais, c'est... Pas une anecdote folle, mais je vais juste la raconter. Donc, fin d'année très éprouvante pour moi, puisque échec au prix, rupture amoureuse. Donc, mais voilà, on arrive fin juin, début juillet. J'ai un peu le cœur en peine sur tous les domaines de ma vie et je pars quelques jours en vacances, sachant qu'après ces vacances, je devais rejoindre des collègues contrebassistes à un festival. Enfin, oui, c'est ça, une académie de contrebasse. Et on devait jouer en septuor de contrebasse des pièces qu'on avait travaillées dans l'année. Et puis je devais travailler avec des super profs, enfin bon bref, c'est un chouette truc. Et puis j'arrive à ses vacances et je fais du surf. Donc à l'époque je ne suis pas un très très grand sportif. je ne suis pas un surfeur du tout donc je fais du surf et j'accroche bien c'est cool, ça me plaît bien seulement au bout de 3 jours de surf je suis rincé explosé, j'en peux plus et là mon corps clairement me dit arrête toi, fais une pause mais vu que j'ai tendance à ne jamais écouter mon corps le dernier après ces 3 jours de surf je décide de faire une petite pause pour le surf mais de quand même aller à la plage et de prendre avec moi un skimboard, alors pour ceux qui ne savent pas ce que c'est c'est Une espèce de petite planche en bois que balancent les enfants au bord de l'eau pour glisser sur les petits filets d'eau quand il y a des vaguelettes au bord de l'eau. Moi j'avais une planche un peu plus stylée parce que j'aimais bien faire ça quand j'étais ado. Et donc voilà, du haut de ma bonhomie d'adulte, je balance la planche une fois. Bon je sens que je suis un peu raide mais ça va. Je la balance une deuxième fois, je fais une petite glissade sympa, j'ai une petite sensation de ride. Et je rebalance cette planche une troisième fois très fort, je glisse. 10 et là En arrivant sur la planche, la planche n'avance absolument pas, et moi je fais un espèce de vol plané de ninja. J'arrive dans l'eau, en faisant une pirouette littéralement, et j'entends vraiment un petit bruit. Je sors de l'eau, et là, une douleur m'a pleuré, a pleuré. Et je regarde au niveau de mon épaule gauche, et là je... Je vois pas un os qui sort, mais je vois une espèce de bosse, mais énorme, un truc, et là, au moment où je vois ça, je me dis, oh putain, j'ai vraiment passé une année de merde, et là, c'est le pompon, mais vraiment. Et c'est pour ça que je me posais la question de la signification, je me dis, parfois, t'es dans une espèce de roue de la louse, comme ça, et va s'enchaîner, sans que t'aies fait quoi que ce soit, sans que t'aies rien demandé, un enchevêtrement de trucs nazes qui vont t'arriver. Et donc, je vois ma clavicule. Puis je me dis, mes vacances sont foirées. Donc je sors de l'eau, je ramène ma petite planche. En boitant, franchement, c'était vraiment... C'était à hurler, comme douleur. Vraiment, je crois qu'en termes de douleur, c'était le climax de ce que j'ai connu. Et je me traîne tel un boiteux ivre jusqu'au poste de secours, en espérant, vraiment en espérant, que les mecs me disent, c'est rien du tout, elle est juste déboîtée, tiens, on va te la remettre. Tiens, nous, on est les super sauveteurs, on sait toujours tout faire. Et là, les mecs me voient arriver avec le truc, et je vois à leur gueule que ça pue. Je vois leur gueule que c'est pas juste mais non, t'inquiète pas, c'est juste une bosse. Donc les mecs appellent les pompiers. En plus, j'ai la honte. Je me retrouve à susciter les services publics alors que moi, jeune homme, c'est juste parce que j'étais en vacances. Enfin bon, bref. Paraît-il qu'on paye des impôts pour ça. et je me retrouve aux urgences voilà j'ai toujours mal et puis tu vois quand t'arrives aux urgences et que t'es pas soit mort soit en train de mourir, en général t'attends un peu donc je suis aux urgences en maillot de bain recouvert de sable et avec cette putain de clavicule qui me fait une bosse mais énorme et je vais finir par voir un médecin, un chirurgien ils vont me dire voilà, verdict la clavicule est cassée, c'est pas une fracture ouverte mais vous l'avez quand même vraiment vraiment bien pété. Donc le chirurgien me dit bah non, non, non, on va pas opérer, machin. Il me met une espèce de petite attelle qui me tient le dos comme ça. Et bah voilà. donc je lui dis combien de temps j'avais machin il me dit bah là de toute façon vu qu'on opère pas vu qu'on immobilise pas il va falloir chaque jour que vous regagnez un peu en mobilité puis vous allez voir combien de temps ça va prendre donc là l'angoisse mais terrible je sais pas peut-être que t'as connu ça toi aussi à un moment où tu t'es blessé et tu t'es dit bah ça se trouve je vais jamais retrouver ma mobilité je vais jamais pouvoir jouer ou tu te dis ça se trouve c'est juste en fait la fin de ma carrière ou tu te dis bah voilà ouh Enfin, je sais pas, ça va pas, quoi. Et puis à ce moment-là, la prise de conscience a été tardive, mais je me dis, je vais pas pouvoir passer le SUP, quoi, en fait. Je vais pas pouvoir passer le concours du SUP. En plus, je me rappelle le moment où j'avais dit, je m'étais lancé pour le passé, mon prof m'avait dit, ouais, c'est cool, vas-y à fond, comme ça, là-bas, ils vont voir comment on joue dans la classe. J'étais un peu boosté par mon prof, quoi, qui aimait bien, comme ça, nous chauffer un peu quand on se mettait des grosses échéances. Et puis c'était un programme sur lequel j'étais bien, enfin bon, bref. Mais voilà, je ne sais pas, le destin a voulu que ce projet soit avorté. Et là, c'est une des rares fois de ma vie où je vais devoir arrêter de jouer, mais pas parce qu'il n'y a pas de plan, pas parce qu'il n'y a pas de travail, pas parce que j'ai des doutes, pas parce que j'ai envie d'abandonner ou quoi que ce soit, mais parce que je ne peux pas jouer physiquement. Et donc j'appelle mes copains contre-assises que je devais rejoindre cette académie après, et puis je leur dis, ben voilà, je ne vais pas pouvoir jouer, ça va être compliqué de me remplacer parce qu'il y avait quand même beaucoup de taf, Donc bon ils me disent on comprend, tout le monde est un peu déçu, un peu triste, c'était une échéance assez chouette pour ce Septuor qui est un beau projet de classe. en plus on était entouré de plein de bassistes donc c'était l'occasion de montrer un truc un peu rigolo un peu différent pour la contrebasse et j'ai une copine du septuor elle m'appelle elle me dit ok Adrien tu peux pas faire l'académie tu peux pas jouer mais viens on vient quand même passer quelques jours pour voir les copains machin et moi je suis un peu en dedans je dis non non mais laisse tomber machin et elle me met un peu la pression elle me dit quand même non non Adrien allez vas-y c'est important les copains machin Donc je me dis, ok, vas-y, je rentre de vacances. Je ne vais pas dire que je boite, mais tu vois, tu ne peux rien faire d'un bras, franchement. Tu viens d'une dépendance. Et donc finalement, on va se retrouver à cette académie. On va être logé chez une copine. C'est super chouette de retrouver les copains. Je vais reprendre une contrebasse pour la première fois depuis, je ne sais plus, deux semaines. Alors, je ne peux pas remonter l'épaule gauche. L'épaule gauche, c'est vraiment l'épaule qui tient la main ou on joue sur la touche. Mais petit à petit je peux la remonter et cette semaine je vais faire beaucoup de cordes à vide tous les jours Et puis petit à petit je vais remonter, je vais regagner Et en fait cette semaine quelque part va me donner en confiance Et en fait le fait d'être entouré des autres, des contrebassistes, des copains, tout ça, ça va... Je sais pas, ça va quelque part me déstresser. Et puis après, du retour de ce stage, petit à petit, tous les jours, j'ai remonté. Alors, ça c'est absurde, mais le chirurgien que j'avais vu en vacances m'a dit Non, non, mais pas besoin de rééducation, vous allez vous la faire toute seule, vous êtes jeune, vous êtes costaud, ça va aller. Tu parles. J'ai vu un autre médecin, bien après, quand j'ai repris ma mobilité, il m'a dit Mais vous êtes malade ! Il me dit N'importe quel sportif, on l'opère directement quand il y a une fracture. Parce que si le calosso se forme mal, ça peut complètement nuire à sa mobilité. Il m'a dit, là vous avez de la chance de ne pas avoir perdu de mobilité. Et il dit, en plus vous n'avez même pas fait de kiné. Je lui ai dit, bah non, je me suis rééduqué tout seul en jouant de la contrebasse tous les jours. Donc heureusement j'ai regagné ma mobilité. Mais quelque part c'était un peu... Voilà, c'était un peu... C'était un peu risqué. Je pense qu'il y a eu une mini-forme d'errance médicale où j'ai eu de la chance, j'ai joué un peu avec le feu parce que j'aurais très bien pu ne jamais remonter l'épaule. Ça arrive suite à des clavicules cassées. Enfin bon bref, ce qui m'intéresse aussi derrière ça, c'est ces momentums dans la vie où rien ne va. Et là je me dis, mais cette année, entre l'échec au prix, la rupture, le fait de ne pas pouvoir présenter le SUP, cette épaule qui se casse... Qu'est-ce qui se passe ? Qu'est-ce qui se passe dans ma vie ? Qu'est-ce qu'il a à me raconter cet accident ? Parce que finalement cet accident il a été généré parce que j'étais dans un état émotionnel où j'avais besoin de me surdépenser dans le sport pour compenser. J'étais dans un état où j'étais pas apte à écouter mon corps et où je me suis pas écouté et ça m'a conduit directement à aller commettre une faute technique et à me vautrer comme un lamentable cachalot échoué sur la plage. Et... Donc je trouve que c'est intéressant parfois, enfin je sais par exemple en médecine chinoise c'est quelque chose que les praticiens font beaucoup, c'est d'entendre, de comprendre. d'écouter et d'accepter l'histoire du patient et de voir que tout a un sens, tout est signifiant en fait. Et je pense que quelque chose que je retiens de cette période, c'est que la clavicule, la clavicula, c'est une porte, c'est une clé. Et quelque part, c'était un moment où j'avais verrouillé beaucoup de choses. J'avais verrouillé beaucoup de choses sur l'émotionnel. Je n'avais pas assez pleuré cette rupture, je n'avais pas assez pleuré ce... cet échec au prix parce que moi à la base je suis un être pas très émotionnel je suis surtout vachement dans ma tête et vachement dans le fait de dire je veux faire des choses je veux kiffer mais voilà je veux pas trop aller ressentir des trucs parce que ça me fait flipper alors avec les années je me suis un peu ouvert petit à petit le travail étant court mais voilà pour mon anecdote je crois que j'arrive à la fin de cet épisode alors j'ai soulevé une question et je pense que cette question la soulevant peut-être que j'ai encore ouvert plus de questions que je n'ai répondu à quoi que ce soit je ne sais pas si ma phrase est bien française, mais bon, je m'entends, je me comprends, donc soyez gentils, essayez de me comprendre. Comment on vit avec une blessure ? Je pense qu'il y a la meute, se faire entourer des bonnes personnes. Je pense ne pas faire comme moi, voir des bons soignants, se faire encadrer. Moi, je sais que maintenant, j'ai une petite liste de thérapeutes en tout genre et que je donne notamment aux gens que je peux accompagner. des ostéos en qui j'ai confiance, des thérapeutes, des kinés, parce que c'est hyper important. Et aujourd'hui, en plus, on a des spécialistes pour la musique, donc vraiment... Et puis, j'insistais sur la meute, sur le fait d'avoir ce cocon d'amis, de musiciens, de pères qui peuvent nous aider. Et puis, je pense que le deuxième aspect qui m'intéressait, c'était vraiment cette question de sens, de symbole. C'est aussi, oui, on n'est pas responsable de ce qui nous arrive, c'est sûr. Mais peut-être qu'on peut donner une lecture à ce qui nous arrive et que la blessure, c'est aussi le moment de remettre en question des choses, de poser des questions, d'aller voir les endroits qu'on ne voulait pas voir avant, notamment sur tout ce qui est émotionnel. Ça, c'est maintenant quelque chose. Alors moi, après l'ouverture au corps, comme je le disais jusqu'à mes 24 ans, il y a eu toutes les ouvertures sur l'émotionnel que je ne voulais pas aller voir. Et ça pareil, ça a été une porte que j'ai trouvée incroyable. Et aujourd'hui, cette porte sur l'émotionnel, c'est une porte qui nourrit directement ma créativité dans tout ce qui est écriture, composition. Voilà, je pense que quelque part, si je n'avais pas commis des erreurs, des impairs, ça ne m'aurait pas nourri et ça n'aurait pas fait la personne que je suis aujourd'hui. Bon, c'est sûr, la personne que je suis aujourd'hui est au moins d'être parfaite, et tant mieux. Mais voilà, au moins je... je vieille sereinement avec mes failles et mes fêlures, parce que je suis un peu fêlé. Bref, voilà, c'est tout pour aujourd'hui. Si ça t'a parlé, si ça a résonné pour toi, n'hésite pas à partager, mets des étoiles sur tout ce qui est notifications, notes, machin, ça aide vachement au référencement de ce podcast. On se retrouve pour un prochain épisode la semaine prochaine. D'ici là... Portez-vous bien, continuez à manger 5 fruits et légumes par jour et à très bientôt !