Japon : entre tradition et modernité cover
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Parlez-moi d’ailleurs

Japon : entre tradition et modernité

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31min |03/02/2025
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Parlez-moi d’ailleurs

Japon : entre tradition et modernité

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Description

S’envoler au bout du monde et s’immerger dans une culture à la fois ancestrale et futuriste… Les gratte-ciel, la pop culture, l’univers kawaii mais aussi, les samouraïs, la cérémonie du thé, les jardins et les temples, c’est un curieux et fascinant mélange que nous offre le Japon.

 

Avant votre départ, laissez-vous guider par nos deux invitées passionnées. En première partie, Aimie Eliot, autrice des guides Coups de cœur Japon et En Train au Japon aux Éditions Voyages Gallimard nous donne quelques clés pour cerner les particularités de la culture nippone. De Tokyo, où elle réside, elle nous livre ses coups de cœur : participer à un atelier culinaire pour maîtriser les sobas, se lever de bonne heure pour se rendre au sanctuaire shinto de Meiji, flâner parmi les authentiques maisons de bois de Tomonoura, petit village de pêcheurs qui a inspiré aux studios Ghibli, le film d’animation Ponyo sur la falaise ou encore prendre le train pour explorer tous les trésors de l’archipel.

 

On pense connaître la gastronomie japonaise par les bribes qui viennent jusqu’à nous, les ramen, les sushis, les yakitoris, mais est-ce vraiment ça, la cuisine japonaise ? En seconde partie, Chihiro Masui, journaliste culinaire japonaise vivant à Paris nous guidera dans les méandres des traditions culinaires de son archipel avec évidemment plein de conseils à la clé. Et pour accompagner vos repas, elle vous dira tout sur le saké, le thé, le whisky japonais ou le shochu.


Réalisation et interviews Marjolaine Koch. Habillage sonore Hélène Bizieau.

 

Enfin, la dernière partie de ce podcast « voyage » nous plongera dans le Japon de la Seconde Guerre mondiale avec la lecture d’un extrait du roman Suite Inoubliable d’Akira Mizubayashi, paru dans la collection Écoutez Lire aux Éditions Gallimard.


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Marjolaine

    Parlez-moi d'ailleurs, un podcast Voyage Gallimard. Bienvenue. Aujourd'hui, laissez-vous raconter le Japon par celles et ceux qui le vivent au quotidien. S'envoler au bout du monde et s'immerger dans une culture à la fois ancestrale et futuriste, les gratte-ciels, la pop-culture, l'univers kawaii, mais aussi... Les samouraïs, la cérémonie du thé, les jardins et les temples, c'est un curieux et fascinant mélange que nous offre le Japon. Avant votre départ, écoutez les recommandations de nos deux invités. En première partie, Aimie Eliot, autrice du guide Coup de cœur Japon aux éditions Voyage Gallimard, nous donne quelques clés pour cerner les particularités de la culture nippone. Et puis, en seconde partie, Chihiro Masui, journaliste culinaire japonaise vivant à Paris, nous guidera dans les méandres de la cuisine de son archipel, avec, évidemment, quelques recommandations. Enfin, la dernière partie de ce podcast nous plongera dans le Japon de la Seconde Guerre mondiale, avec la lecture d'un extrait du roman, suite inoubliable, d'Akira Mizubayashi. Préparez-vous à entrer dans une autre dimension. Tokyo, c'est 14 millions d'habitants, Intramuros, 40 millions avec son agglomération. Une ville verticale en son centre qui vous engloutit et vous propulse dans un univers pop et traditionnel. Aimie Eliott a choisi d'y vivre il y a 4 ans. Elle a notamment travaillé sur le guide Coup de cœur Japon Mais elle a aussi écrit En train au Japon, une trentaine d'itinéraires pour voyager autrement deux ouvrages publiés aux éditions Gallimard. Aimie, bonjour.

  • Aimie Eliot

    Bonjour.

  • Marjolaine

    Tu es au Japon depuis 4 ans. Alors toi-même, la première fois que tu as mis les pieds dans ce pays, à l'aéroport, qu'est-ce qui t'a le plus surpris ?

  • Aimie Eliot

    Je crois que c'est la propreté des lieux. Au Japon, c'est très important. La propreté, c'est lié à l'héritage de Shinto. On fait très attention à ce que les lieux publics soient immaculés. Et c'est vrai que ça a été une grande surprise. Ensuite, bien sûr, il y a le gigantisme de Tokyo. Lorsqu'on navigue dans la gare de Shinjuku, la gare la plus passante du monde, c'est frappant. Lorsqu'on prend la ligne aérienne à Odaiba et qu'on survole la baie avec tous ces gratte-ciels, ça semble surréel. Et malgré tout, on ressent aussi un grand calme. Je trouve que ce contraste est toujours très intéressant, à la fois dans la rue, dans le train, dans les gares. On est dans la plus grande ville du monde, là je parle de Tokyo, et pourtant il y a une espèce de fluidité, une espèce d'harmonie, parce qu'au Japon finalement on accorde beaucoup d'importance au vivre ensemble, il y a une espèce de respect du collectif. On fait parfois passer avant l'individu, donc c'est ce qui fait qu'on va parler à voix basse dans les trains, faire attention à ne pas se bouculer. C'est à là qu'avant de monter dans un wagon, alors bien sûr, il y a des exceptions, c'est sûr, durant les heures de pointe, dans le train ou le métro japonais, toujours des coups de poudre. Mais ce calme et cette espèce d'organisation comme ça, je trouve que c'est très marrant.

  • Marjolaine

    Et justement, pour connaître cette culture, est-ce que tu aurais un conseil à nous donner de lieux à découvrir, que ce soit un quartier, un musée ou même une expérience qui nous permettrait de mieux l'appréhender ?

  • Aimie Eliot

    Il y en a des tonnes. On parle d'expérience, par exemple. On peut, par exemple, réserver un atelier pour apprendre à confectionner des soba et s'imprimer de la grande culture gastronomique japonaise.

  • Marjolaine

    Alors, les soba, un atelier culinaire de nouilles japonaises, donc.

  • Aimie Eliot

    Oui, tout à fait. J'aime bien aussi les ateliers qui permettent de teindre, par exemple, un titu à l'indigo. On expérimente une tradition, un savoir-faire. Et puis, c'est souvent l'occasion de parler avec les artisans. C'est souvent un moment d'échange. En termes de lieu, je pense à Tokyo parce que c'est ma ville, on peut se lever de très bonne heure pour se rendre au sanctuaire Shinto de Meiji. Le temple ouvre lorsque le soleil se lève. Et à cette heure-ci, il n'y a plus de touristes et on croise beaucoup plus d'habitants qui s'y rendent pour prier, mais aussi pour faire leur jogging, pour se promener, pour prendre un bol d'air. Et ça je trouve que c'est intéressant de voir que ces lieux-là, qu'on voit en tant que touristes comme des grands lieux touristiques, sont aussi des lieux très vivants.

  • Marjolaine

    Une fois qu'on sort de Tokyo, est-ce que tu aurais un circuit à nous proposer ?

  • Aimie Eliot

    Oui, alors il y en a énormément, car le train quadrille vraiment très finement l'archipel. J'en ai imaginé plusieurs, près d'une trentaine dans mon livre Entrant au Japon. Shinkansen ! Il est très mythique. Il a quand même de la gueule. Ça, vous voyez, pour quelqu'un qui aime le train, c'est vraiment le train culte, parce que l'air de rien, c'est le premier train à grande vitesse du monde, bien avant le TGV, puisque la première ligne rapide ici a été inaugurée au départ de Tokyo en 1964. Je crois que l'un de mes préférés, c'est celui qui parle de Kyoto, et qui... permet de pérégriner autour de l'ex-capitale. J'aime bien cette région parce qu'elle permet de découvrir d'autres facettes des alentours et de s'échapper du tumulte de Kyoto qui peut parfois être un peu étouffant. C'est une ville qui est en proie au surtourisme depuis plusieurs années et sa région, en fait, elle vaut vraiment le détour. Donc on peut prendre le train depuis Kyoto jusqu'à Amano Ashidate, qui se trouve au nord. Et en fait, cette ville-là, elle borde une baie. Elle est très connue pour abriter l'une des trois plus belles vues du Japon, selon un classement ancien qui date de l'époque Heian, autour du 8e siècle. En fait, cet endroit présente une particularité géographique assez étonnante. Lorsqu'on monte en haut d'un petit vallon, par un funiculaire très mignon, qui sont des petites chaises qui nous montent jusqu'à la colline, on aperçoit une étonnante bande de sable qui serpente entre la mer intérieure et la baie de Miyazu. Cette bande de sable qui résiste aux différents changements climatiques, il a été très représenté par les artistes et loué par les poètes. C'est vraiment un paysage très atypique. Une fois qu'on a admiré ce panorama, on peut redescendre et arpenter ce banc de sable qui est planté de grands pins. On peut l'arpenter à pied ou à vélo et ces grands pins sont assez majestueux, ont presque l'air vivants. Ensuite, on peut prendre un bus lorsqu'on a rejoint l'autre rive, qui va allonger d'abord la côte de la péninsule de Dangot, qui est encore un peu plus au nord. Et puis là, on arrive dans le village de Hine. Ce petit village, il est pensé comme un des plus beaux du Japon. Ceux qui ont vu le film des studios Ghibli, Ponyu sur la falaise, m'ont fait un petit peu penser à l'ambiance du film. Un poisson rouge !

  • Chihiro Masui

    Bizarre cette vague !

  • Aimie Eliot

    Une ville de pêcheurs qui comporte des architectures assez uniques. On y trouve des FUNAYA, c'est des maisons hangars de deux étages, où le rez-de-chaussée est ouvert sur les flots. C'est à cet endroit qu'on garait les bateaux. Aujourd'hui, des pêcheurs vivent encore dans ces funayas, mais elles ont aussi été transformées en cafés, en restaurants, en chambres d'hôtes. C'est aussi un très bon moyen de les visiter pour comprendre ces architectures-là assez uniques et se régaler aussi de la pêche du jour parce qu'il y a du très bon placement sur ces côtes.

  • Marjolaine

    Oui, on comprend qu'au Japon, on peut vraiment passer de la mégapole aux grands espaces et profiter d'un éventail d'ambiance du coup. Et tu nous as parlé de trains, de bus aussi. Quel mode de déplacement tu nous recommandes pour visiter le Japon ?

  • Aimie Eliot

    Alors le train, c'est un moyen de transport idéal au Japon, très ponctuel, très propre, comme je disais, qui cadre très finement l'archipel. On connaît le Shinkansen, le train à grande vitesse, mais il y a aussi un très dense réseau de petits trains locaux, très charmants, qui sont plus lents bien sûr, mais qui permettent de rejoindre des endroits qui sont peu touristiques et souvent qui valent au beaucoup. Et puis à Kyoto, je trouve que le vélo, c'est un mode de transport idéal. Et je dirais que le vélo électrique, c'est encore mieux, parce que la ville, elle s'est développée dans une cuvette, mais les temples se trouvent dans les hauteurs. Et là, les chemins sont un petit peu plus ponctus.

  • Marjolaine

    D'accord. Et est-ce que tu dirais que le Japon est un pays accueillant pour les enfants ?

  • Aimie Eliot

    Oui, oui, oui. C'est un pays dans lequel on voyage assez facilement avec des enfants. parce que c'est un pays très pratique, c'est aussi un pays très stimulant pour les enfants, la population est très accueillante, c'est un pays qui a son lot de mascottes, très colorées, on trouve aussi des salles de jeu un peu partout. Pour moi, c'est un pays très agréable pour un voyage en famille.

  • Marjolaine

    Et quels sont les incontournables à faire en famille alors ?

  • Aimie Eliot

    Je dirais à Tokyo, le Musée Team Lab, une collectif d'artistes numériques japonais qui a ouvert à Zabudai East, au rez-de-chaussée de la plus haute tour résidentielle du Japon. Ce sont des œuvres très interactives. Et pour le coup, je pense que c'est beaucoup mieux d'aller à Disneyland. Pour les amateurs des... des films, des studios de bibliothèque, j'en parlais tout à l'heure, il y a le musée des studios de bibliothèque, donc il y a le musée historique qui se trouve dans l'ouest de Tokyo, à Nisaka, et puis le nouveau parc près d'Osaka, et puis il y a bien sûr le parc Nintendo, et puis le tout nouveau musée Nintendo qui est ouvert près de Kyoto, à Uji. Et puis on peut aussi acheter un de ces jolis carnets dans les tapeteries. qu'on remplit au fil de son séjour, des tampons, des villes ou des gares qu'on peut trouver dans les stations ou dans les offices du tourisme. Ou alors dessiner, si on aime dessiner, dessiner les belles plaques d'égout qu'on trouve aussi dans les villes et qui sont toujours très jolies. Ça fait peut-être partie des souvenirs que je préfère.

  • Marjolaine

    Merci beaucoup, Aimie.

  • Aimie Eliot

    Merci.

  • Marjolaine

    On pense connaître la cuisine du Japon par les bribes qui viennent jusqu'à nous, les nouilles soba, les sushis, les yakitori. Mais dans le fond, est-ce que c'est vraiment ça, la cuisine japonaise ? C'est la question que j'ai posée à Chihiro Masui, fine gastronome de son pays qui aime partager ses découvertes à travers sa newsletter française, The Spoon of Paris. Déjà, quel est le rythme des repas, tout simplement, quand on arrive au Japon ?

  • Chihiro Masui

    Le Japon, c'est un peu comme dans l'Est de l'Asie. les horaires des repas sont beaucoup beaucoup moins rigides et codifiés qu'en France. Par exemple, en France, si à 15h vous voulez déjeuner, c'est un peu compliqué hormis le fast-food et le café du coin. Au Japon, évidemment, si vous allez dans un restaurant gastronomique, ça va être aux horaires des repas. Mais sinon, il y a quand même pas mal d'établissements qui sont ouverts, pas à toute heure, mais enfin qui sont ouverts, notamment l'après-midi. Alors, sinon, bah... Le petit déjeuner, c'est l'heure du petit déjeuner normal. Le déjeuner est à midi. Le dîner, pour ceux qui dînent tôt, ça peut être à 17h. Pour ceux qui dînent tard, c'est 19h. 20h, c'est très tard. Donc, c'est beaucoup plus tôt qu'en France.

  • Marjolaine

    Et alors, on parle du petit déjeuner. Si on veut prendre un petit déjeuner classique japonais, qu'est-ce qu'on a sur sa table ?

  • Chihiro Masui

    Alors, si vous êtes dans un hôtel... Il y a de fortes chances que vous auriez un buffet avec tout le petit déjeuner occidental. Et de l'autre côté, vous aurez aussi le petit déjeuner classique, traditionnel japonais, riz, soupe, miso. Souvent des tsukimono, qui sont des légumes légèrement fermentés qui accompagnent le riz. Il y aura sans doute un oeuf, donc ça va être le tamagoyaki, qui est l'omelette japonaise. C'est coupé en tranches, donc vous aurez des rectangles jaunes en tranches. Très, très, très souvent, un bout de poisson grillé, assez simplement au sel.

  • Marjolaine

    Et comment vous décrivez les bases de la cuisine japonaise ?

  • Chihiro Masui

    Ce qui surprend souvent les non-japonais quand ils viennent au Japon, c'est l'immense variété de ce qu'on mange au Japon quotidiennement. C'est-à-dire que, par exemple, vous allez dans un restaurant tout à fait moyen, très abordable. Vous allez avoir autant des spaghettis que des soba, des nouilles soba. que du riz, que du poulet, que du poisson, enfin, vous pouvez avoir un gratin, c'est très très très commun au Japon, de la pizza. Et en même temps, vous allez avoir par exemple du tonkatsu, c'est du porc pané, du curry. Le curry est, je crois, le plat le plus consommé au Japon. Donc c'est le curry japonais qui n'a rien à voir avec le curry indien, qui est arrivé au Japon via l'Angleterre à la fin du 19e siècle, et c'est vraiment un plat japonais. Donc le curry se mange avec du riz blanc.

  • Marjolaine

    En quoi il est différent de l'indien ?

  • Chihiro Masui

    D'abord, c'est fait à partir d'un roux. Ça veut dire que c'est épaissi à la farine. Donc, la consistance à la fin, c'est une sauce qu'on verse sur le riz, mais qui est épaisse, vraiment. Ensuite, dedans, il va y avoir des bouts de viande. En gros, c'est bœuf, parfois porc, beaucoup poulet et ça peut être crevette. Voilà, c'est en gros les quatre ingrédients qu'il peut y avoir dans un curry, séparément. Avec pommes de terre, carottes. Ça, c'est le classique. C'est... En général, pas très épicé, pas très piquant, léger.

  • Marjolaine

    Alors, quels sont les plats que vous recommandez de tester et qu'on ne connaît pas forcément dans les restaurants japonais ou dans la cuisine japonaise qui est venue jusqu'en France ?

  • Chihiro Masui

    Ce qui est sympa quand même, c'est d'aller dans un vrai yakitori, les brochettes yakitori. Tout le monde les connaît, mais en fait, ce n'est pas du tout ça. Ça ressemble, c'est-à-dire que c'est des bâtons sur lesquels on a mis la viande qu'on a fait griller. En fait, la caractéristique japonaise, c'est que chaque restaurant a sa spécialité. Il y a une raison historique à ça. Donc le restaurant de Yakitori ne fera que ça. Vous ne trouverez pas un restaurant où vous aurez du Yakitori, des lamens et des sushis, ça n'existera pas. Donc, le restaurant de Yakitori, d'abord, ça peut être impressionnant parce que ça gueule dans tous les sens. Les gens parlent hyper fort. Et comme tout le monde parle fort, tout le monde parlera encore plus fort. C'est comme ça. Donc quand on parle du japonais qui est très calme et réservé, là non, c'est tout le contraire. Souvent, on s'assoit à un comptoir où on va commander des brochettes une par une directement au cuisinier qui est de l'autre côté du comptoir. Vous commandez par exemple, gésier, vous avez une brochette de gésier. Coeur, vous avez une brochette de coeur. Foie, vous avez une brochette de foie. Peau, vous avez une brochette de peau. Cartilage, vous avez une brochette de cartilage, etc. Vous pouvez évidemment avoir une brochette de neguima, poulet et poireau alterné. Mais en général, c'est vraiment une partie du poulet par brochette. Donc ça, c'est grillé sur du charbon régulier. Et c'est soit trempé dans une sauce sucrée salée à base de sauce soja, sake, mirin, une sauce sucrée salée ou au sel. Ça, c'est Ausha du client en général. Alors évidemment, mon mari qui est français, lui, l'idée de manger toute une brochette de cartilage, il me dit mais pourquoi faire ? Ça ne se mange pas. Ben si, c'est très bon. Nous, on pense que c'est très bon pour les articulations. Donc ça, c'est le yakitori et ce sont des restaurants que j'aime beaucoup parce que c'est très populaire, c'est très abordable, c'est joyeux. C'est un aspect du Japon qui est quand même sympathique et qu'il n'y a pas en France. Ensuite, évidemment, il faut faire un sushi. Le sushi, c'est un peu pareil. C'est tellement galvaudé maintenant. Le sushi est devenu un méplanétaire. Mais il faut savoir que le sushi tel qu'on le conçoit à l'étranger, c'est-à-dire la boulette de riz avec la tranche de poisson crue dessus ou le maki, ça, c'est un type de sushi très, très, très spécifique. En fait, au Japon, quand on parle de sushi, on parle de n'importe quel plat qui est fait avec du riz vinaigré. Donc, selon la région, etc., le style de sushi change énormément. Il y a le sushi tournant qui est vraiment extrêmement abordable en termes de prix. Et c'est assez fin parce que ça permet de choisir ce qu'on veut. Et puis de l'autre côté, il y a les sushis très très très haut de gamme. Vous allez payer 300 euros. Évidemment, ce n'est pas du tout la même qualité, ce n'est pas du tout la même ambiance. Le sushi à très haut de gamme, c'est 8 couverts au comptoir avec le mètre qui vous sert directement. Donc vous avez tout le spectacle, que ce soit la découpe du poisson. La préparation du sushi, à ce niveau-là, c'est quand même un beau spectacle.

  • Marjolaine

    Alors maintenant, du côté des boissons chaudes, est-ce qu'il y a des boissons qu'on ne connaît pas ici et qui seraient à tester ?

  • Chihiro Masui

    Déjà, il y a du café partout. Moi, je ne bois pas de café, alors je ne peux pas juger, mais mon mari qui est français et qui boit du café me dit que le café au Japon est vraiment imbuvable. C'est du café américain, ça va allonger. Qui paraît-il, il a quand même la caractéristique d'être généralement très amer. Sinon... Évidemment, c'est un pays de thé. Le thé qu'on boit le plus, c'est le sencha, qui est un thé vert, non fermenté. Sinon, ce que les Français aiment parmi les thés japonais, c'est le gemmaicha. Et le gemmaicha, c'est du thé vert dans lequel on a mis du riz soufflé. Riz soufflé comme du popcorn. Ça donne un côté un peu torréfié. Sachant que pour nous, c'est le thé le plus bas de gamme qu'on ne sert jamais à l'inviter. Bizarrement, c'est celui que les Français semblent plébisciter. Sinon, dans les thés haut de gamme, il y a le gyokuro. Le gyokuro, c'est un thé vert qu'on recouvre pendant les trois dernières semaines avant la récolte pour qu'il n'y ait pas de lumière. Et ça donne des petites feuilles extrêmement tendres. Le gyokuro, en fait, est un thé qui est extrêmement riche en glutamate. mais là c'est la forme donc naturelle de glutamate et ça a vraiment un goût de glutamate qui n'est pas à la portée tout le monde c'est quand même un goût assez spécial c'est pas un thé désaltérant du tout c'est un thé un tout petit peu sur le peu qu'on voit en toute petite quantité Et sinon, évidemment, il y a le matcha. Le matcha n'est pas un thé qu'on sert avec un repas. Ce n'est absolument pas désaltérant. C'est très, très chargé en théine. Et ça se boit vraiment dans le cadre de la cérémonie du thé. Ou, évidemment, vous pouvez le boire comme ça, avec un petit gâteau pour contrebalancer le côté un peu fort. C'est un thé qui est très fort. Il y a... notamment à Kyoto, des salons de thé qui sont très sympas, avec un jardin japonais, où on vous sert un matcha avec un gâteau, un wagashi, un gâteau japonais. Dans ce cadre-là, c'est bien. Sinon, on n'en voit pas beaucoup.

  • Marjolaine

    Alors, du côté des alcools maintenant, est-ce que vous avez des recommandations ?

  • Chihiro Masui

    Il faut savoir quand même que le Japon est un pays... Enfin, nous sommes un peuple assez psychovégide. Ce n'est pas un scoop. Et donc, si vous allez dans un restaurant japonais, Sushi, Kaiseki, etc. Vous aurez un ou plusieurs sake, mais pas beaucoup. Jamais autant qu'une liste de vin dans un restaurant hollandais en France. Traditionnellement, dans un sushi, il y avait un seul sake. Celui que le patron choisissait, c'est tout. Donc, vous aurez quelques sake. Et sinon, si vous allez dans des izakaya, izakaya veut dire le lieu où on boit du vin. C'est ce qu'on appelle aujourd'hui en France, bar à tapas. On vous sert des petits plats guignotés, mais pour accompagner le saké. Là, vous aurez une sélection de saké, une sélection de Ausha et une sélection de bière, des whisky peut-être, et quelques vins. Le Ausha, c'est un alcool fait à partir de patates douces. Ça titre à 25°C, c'est plus fort que le saké. Pendant longtemps. C'était un peu mal vu parce que c'était un alcool pas cher, vulgaire, etc. Là, c'est en train de revenir un peu à la mode. Sinon, il y a des vins japonais. Honnêtement, en venant de France, je ne vois pas trop l'intérêt. Il y en a qui sont très bons. Alors, ceux qui sont très bons sont rarissimes, dans le sens où ce sont de toutes petites productions et c'est impossible d'en avoir. Alors, la boisson type du japonais, c'est la bière. Quand vous entrez dans un restaurant, la première chose qu'on vous demande, c'est qu'est-ce que vous buvez. Typiquement, c'est bière. Et après, ça va être Mizuhari, qui veut dire du whisky à l'eau. Ça, c'est le grand classique japonais. Ah oui, puis alors, depuis quelques temps, c'est récent, le highball est à la mode. Donc, il y a partout des canettes de highball. C'est du whisky avec de l'eau gazeuse, je crois. Ça se vend comme la bière.

  • Marjolaine

    Donc, un mélange d'eau gazeuse et de whisky en canette.

  • Chihiro Masui

    C'est parfois parfumé. Je ne sais pas, citron, yuzu, enfin des choses, mais en gros c'est ça.

  • Marjolaine

    Et alors, à l'heure de quitter le pays, qu'est-ce qu'il faut mettre dans sa valise côté alimentaire ? Qu'est-ce qu'on rapporte ?

  • Chihiro Masui

    Ce que les touristes ramènent beaucoup du Japon maintenant, ce sont les couteaux japonais. Les couteaux japonais ont une très juste réputation dans le monde. À Tokyo, il y a un quartier qui s'appelle Kababashi, qui est le quartier des fournitures de cuisine. Et là, les boutiques de couteaux sont assaillies par des non-japonais qui veulent en ramener. Et sinon, la fille, par exemple, elle ramène des tas de merdouilles de type Kit Kat au matcha, mais ça va être des pokis à la fraise. Et les pokis, c'est un peu comme les mikados, les petits troncs là. Les pokis à la fraise, mais ce qu'il n'y a pas ici, c'est qu'il y a des petits bouts de fraises dessus, collés dessus, elle adore. Des gelées de konjac au raisin. Ça fait des mini-mini gobelets en plastique, fermés évidemment, en forme de cœur. Ça, tout le monde adore. Les jeunes rapportent quand même des choses un peu moins austères que ce que moi je choisis. Et il y a... énormément, il y a une telle variété de choses comme ça qui sont mignonnes, qui sont fun, qui sont rigolos, c'est des confiseries, on va dire, on s'en serait très là.

  • Marjolaine

    Ce podcast se termine toujours par une plongée dans un roman. Cette fois-ci, c'est l'histoire de Pamina, une jeune luthière dont la grand-mère japonaise exerçait le même métier pendant la Seconde Guerre mondiale. Son histoire la rattrape lorsque, travaillant dans un atelier parisien, elle se voit confier un violoncelle dans lequel elle découvre, dissimulée dans un tasseau, une lettre. Celle d'un prodige contraint d'abandonner son art pour rejoindre les troupes japonaises au cœur des conflits des années 40. Ce roman, c'est celui d'Akira Mizubayashi, intitulé Suite inoubliable et paru chez Gallimard en 2023. Vous écoutez un extrait du livre audio lu par Constance Dolé, paru dans la collection Écoutez lire.

  • Suite Inoubliable, d’Akira Mizubayashi

    Je m'appelle Hortense Schmitt, j'ai 36 ans, je suis luthière. J'ai mon atelier dans le quartier de l'École nationale de musique à Tokyo. Mais en raison de l'intensification des bombardements dans la région de la capitale nippone, Je me suis réfugiée sur le conseil de Ken Mizutani, dans ce hameau de Shinano-Oiwake, qui appartient à la commune de Karuizawa, où un nombre assez considérable d'Occidentaux vivent parqués, si j'ose dire, sous l'ordre des autorités gouvernementales. La proximité de cette communauté d'étrangers est un point positif pour moi, car je désire avoir des informations qui ne viennent pas du quartier général impérial. Mais ce qui m'a décidé à m'éloigner de Tokyo pour une durée indéterminée, en acceptant l'aimable proposition de Ken, c'est le désastre inqualifiable du 10 mars, occasionné par les raids aériens américains. J'y ai échappé miraculeusement. Mon atelier aussi. Les Américains ont-ils eu la sagesse d'épargner le secteur du Hainaut, où se concentrent musées et écoles ? Je loue ici, moyennant un loyer dérisoire symbolique, une vieille baraque dont la plus grande pièce fait office d'atelier. Quelqu'un frappe à la porte. Je me demande qui c'est à cette heure tardive où le soleil se retire vite. Une seule lampe d'une faible lumière orange éclaire mon atelier. Quelques secondes après, j'entends C'est moi, Ken Je suis soulagée. J'ouvre la porte. Quelle surprise de te voir à cette heure-ci, tu ne m'avais pas dit que tu venais ? Ken a 25 ans, il est violoncelliste. Depuis qu'il est rentré de France à l'automne 1939, il me confie son instrument chaque fois qu'il a une inquiétude à son sujet. Son professeur Saito et ses camarades en font autant. C'est parce que certainement j'ai gagné leur confiance à force de travailler sérieusement, toujours à leur écoute, mobilisant toutes les techniques que je maîtrise. Je viens te voir pour quelque chose d'important, me dit-il d'une voix un peu tremblante. Entre. Tu transpires. Tu es venu à pied avec ton gaufrileur ? Il a marché environ une heure, son instrument sur le dos, pour venir de chez ses parents. Je lui demande s'il veut partager mon dîner. Il me répond honteusement. Non, excuse-moi, je suis bête, je n'ai pas pensé que c'était l'heure du repas. Tu n'as pas encore mangé ? Puisque je vais manger, tu ne veux pas m'accompagner ? Il hoche la tête d'un air embarrassé. J'improvise ainsi un petit repas pour nous deux avec des œufs, quelques légumes et de minces tranches de jambon qu'un journaliste français m'a donné ce matin. Nous sommes maintenant assis l'un en face de l'autre autour d'une table ronde, chacun dans un fauteuil dont le tissu est troué par endroit. Je viens d'allumer une lampe de bureau posée sur mon établi. Une grande et épaisse planche de pain posée sur deux petits meubles de même hauteur. Elle éclaire nos visages. Un silence énigmatique, un peu pesant, règne dans mon atelier. Ni moi, ni lui n'osons le rompre. Je suis perplexe devant l'étrange nouveauté de la situation. Je suis seule avec Ken, à sept heures de la nuit, dans mon atelier. Qu'est-ce qui se passe ? Enfin, je me décide à ouvrir la bouche. Il n'y a pas grand-chose, mais bon appétit quand même, Ken. Il a la tête baissée. Il me remercie, lave la tête, me regarde une fraction de seconde. Intrigué, je ne quitte pas des yeux le visiteur du soir. Il soupire profondément, puis commence à parler d'une voix toujours tremblante, comme s'il avouait une faute. En fait... Je suis venue te dire au revoir. Je dois aller au régiment. J'ai reçu le fatidique petit papier rouge d'incorporation. Je tombe des nues parce que d'une part il ne m'avait jamais dit qu'une telle possibilité existait, et que d'autre part je croyais que les étudiants comme lui bénéficiaient d'un traitement préférentiel. Tu le sais depuis quand ? Depuis quinze jours.

  • Marjolaine

    Il est temps d'atterrir. Merci d'avoir exploré le Japon avec nous. L'habillage sonore est signé Hélène Biziot, la réalisation et les interviews Marjolaine Corr. Vous avez pu entendre des extraits de l'émission Un train pas comme les autres diffusée sur France Télévisions, du film Pogneaux sur la falaise signé Miyazaki, et en dernière partie, un extrait du quintet pour cordes numéro 2 d'Ernst Noman. Un podcast créé sur une idée originale des éditions Voyages Gallimard. Retrouvez-nous sur toutes les plateformes et n'hésitez pas à nous laisser des étoiles si ce contenu vous a plu. A bientôt et bon voyage !

Chapters

  • Rencontre avec Aimie Eliot

    01:25

  • Gastronomie japonaise avec Chihiro Masui

    11:30

  • Suite inoubliable d'Akira Mizubayashi, extrait

    24:50

Description

S’envoler au bout du monde et s’immerger dans une culture à la fois ancestrale et futuriste… Les gratte-ciel, la pop culture, l’univers kawaii mais aussi, les samouraïs, la cérémonie du thé, les jardins et les temples, c’est un curieux et fascinant mélange que nous offre le Japon.

 

Avant votre départ, laissez-vous guider par nos deux invitées passionnées. En première partie, Aimie Eliot, autrice des guides Coups de cœur Japon et En Train au Japon aux Éditions Voyages Gallimard nous donne quelques clés pour cerner les particularités de la culture nippone. De Tokyo, où elle réside, elle nous livre ses coups de cœur : participer à un atelier culinaire pour maîtriser les sobas, se lever de bonne heure pour se rendre au sanctuaire shinto de Meiji, flâner parmi les authentiques maisons de bois de Tomonoura, petit village de pêcheurs qui a inspiré aux studios Ghibli, le film d’animation Ponyo sur la falaise ou encore prendre le train pour explorer tous les trésors de l’archipel.

 

On pense connaître la gastronomie japonaise par les bribes qui viennent jusqu’à nous, les ramen, les sushis, les yakitoris, mais est-ce vraiment ça, la cuisine japonaise ? En seconde partie, Chihiro Masui, journaliste culinaire japonaise vivant à Paris nous guidera dans les méandres des traditions culinaires de son archipel avec évidemment plein de conseils à la clé. Et pour accompagner vos repas, elle vous dira tout sur le saké, le thé, le whisky japonais ou le shochu.


Réalisation et interviews Marjolaine Koch. Habillage sonore Hélène Bizieau.

 

Enfin, la dernière partie de ce podcast « voyage » nous plongera dans le Japon de la Seconde Guerre mondiale avec la lecture d’un extrait du roman Suite Inoubliable d’Akira Mizubayashi, paru dans la collection Écoutez Lire aux Éditions Gallimard.


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Marjolaine

    Parlez-moi d'ailleurs, un podcast Voyage Gallimard. Bienvenue. Aujourd'hui, laissez-vous raconter le Japon par celles et ceux qui le vivent au quotidien. S'envoler au bout du monde et s'immerger dans une culture à la fois ancestrale et futuriste, les gratte-ciels, la pop-culture, l'univers kawaii, mais aussi... Les samouraïs, la cérémonie du thé, les jardins et les temples, c'est un curieux et fascinant mélange que nous offre le Japon. Avant votre départ, écoutez les recommandations de nos deux invités. En première partie, Aimie Eliot, autrice du guide Coup de cœur Japon aux éditions Voyage Gallimard, nous donne quelques clés pour cerner les particularités de la culture nippone. Et puis, en seconde partie, Chihiro Masui, journaliste culinaire japonaise vivant à Paris, nous guidera dans les méandres de la cuisine de son archipel, avec, évidemment, quelques recommandations. Enfin, la dernière partie de ce podcast nous plongera dans le Japon de la Seconde Guerre mondiale, avec la lecture d'un extrait du roman, suite inoubliable, d'Akira Mizubayashi. Préparez-vous à entrer dans une autre dimension. Tokyo, c'est 14 millions d'habitants, Intramuros, 40 millions avec son agglomération. Une ville verticale en son centre qui vous engloutit et vous propulse dans un univers pop et traditionnel. Aimie Eliott a choisi d'y vivre il y a 4 ans. Elle a notamment travaillé sur le guide Coup de cœur Japon Mais elle a aussi écrit En train au Japon, une trentaine d'itinéraires pour voyager autrement deux ouvrages publiés aux éditions Gallimard. Aimie, bonjour.

  • Aimie Eliot

    Bonjour.

  • Marjolaine

    Tu es au Japon depuis 4 ans. Alors toi-même, la première fois que tu as mis les pieds dans ce pays, à l'aéroport, qu'est-ce qui t'a le plus surpris ?

  • Aimie Eliot

    Je crois que c'est la propreté des lieux. Au Japon, c'est très important. La propreté, c'est lié à l'héritage de Shinto. On fait très attention à ce que les lieux publics soient immaculés. Et c'est vrai que ça a été une grande surprise. Ensuite, bien sûr, il y a le gigantisme de Tokyo. Lorsqu'on navigue dans la gare de Shinjuku, la gare la plus passante du monde, c'est frappant. Lorsqu'on prend la ligne aérienne à Odaiba et qu'on survole la baie avec tous ces gratte-ciels, ça semble surréel. Et malgré tout, on ressent aussi un grand calme. Je trouve que ce contraste est toujours très intéressant, à la fois dans la rue, dans le train, dans les gares. On est dans la plus grande ville du monde, là je parle de Tokyo, et pourtant il y a une espèce de fluidité, une espèce d'harmonie, parce qu'au Japon finalement on accorde beaucoup d'importance au vivre ensemble, il y a une espèce de respect du collectif. On fait parfois passer avant l'individu, donc c'est ce qui fait qu'on va parler à voix basse dans les trains, faire attention à ne pas se bouculer. C'est à là qu'avant de monter dans un wagon, alors bien sûr, il y a des exceptions, c'est sûr, durant les heures de pointe, dans le train ou le métro japonais, toujours des coups de poudre. Mais ce calme et cette espèce d'organisation comme ça, je trouve que c'est très marrant.

  • Marjolaine

    Et justement, pour connaître cette culture, est-ce que tu aurais un conseil à nous donner de lieux à découvrir, que ce soit un quartier, un musée ou même une expérience qui nous permettrait de mieux l'appréhender ?

  • Aimie Eliot

    Il y en a des tonnes. On parle d'expérience, par exemple. On peut, par exemple, réserver un atelier pour apprendre à confectionner des soba et s'imprimer de la grande culture gastronomique japonaise.

  • Marjolaine

    Alors, les soba, un atelier culinaire de nouilles japonaises, donc.

  • Aimie Eliot

    Oui, tout à fait. J'aime bien aussi les ateliers qui permettent de teindre, par exemple, un titu à l'indigo. On expérimente une tradition, un savoir-faire. Et puis, c'est souvent l'occasion de parler avec les artisans. C'est souvent un moment d'échange. En termes de lieu, je pense à Tokyo parce que c'est ma ville, on peut se lever de très bonne heure pour se rendre au sanctuaire Shinto de Meiji. Le temple ouvre lorsque le soleil se lève. Et à cette heure-ci, il n'y a plus de touristes et on croise beaucoup plus d'habitants qui s'y rendent pour prier, mais aussi pour faire leur jogging, pour se promener, pour prendre un bol d'air. Et ça je trouve que c'est intéressant de voir que ces lieux-là, qu'on voit en tant que touristes comme des grands lieux touristiques, sont aussi des lieux très vivants.

  • Marjolaine

    Une fois qu'on sort de Tokyo, est-ce que tu aurais un circuit à nous proposer ?

  • Aimie Eliot

    Oui, alors il y en a énormément, car le train quadrille vraiment très finement l'archipel. J'en ai imaginé plusieurs, près d'une trentaine dans mon livre Entrant au Japon. Shinkansen ! Il est très mythique. Il a quand même de la gueule. Ça, vous voyez, pour quelqu'un qui aime le train, c'est vraiment le train culte, parce que l'air de rien, c'est le premier train à grande vitesse du monde, bien avant le TGV, puisque la première ligne rapide ici a été inaugurée au départ de Tokyo en 1964. Je crois que l'un de mes préférés, c'est celui qui parle de Kyoto, et qui... permet de pérégriner autour de l'ex-capitale. J'aime bien cette région parce qu'elle permet de découvrir d'autres facettes des alentours et de s'échapper du tumulte de Kyoto qui peut parfois être un peu étouffant. C'est une ville qui est en proie au surtourisme depuis plusieurs années et sa région, en fait, elle vaut vraiment le détour. Donc on peut prendre le train depuis Kyoto jusqu'à Amano Ashidate, qui se trouve au nord. Et en fait, cette ville-là, elle borde une baie. Elle est très connue pour abriter l'une des trois plus belles vues du Japon, selon un classement ancien qui date de l'époque Heian, autour du 8e siècle. En fait, cet endroit présente une particularité géographique assez étonnante. Lorsqu'on monte en haut d'un petit vallon, par un funiculaire très mignon, qui sont des petites chaises qui nous montent jusqu'à la colline, on aperçoit une étonnante bande de sable qui serpente entre la mer intérieure et la baie de Miyazu. Cette bande de sable qui résiste aux différents changements climatiques, il a été très représenté par les artistes et loué par les poètes. C'est vraiment un paysage très atypique. Une fois qu'on a admiré ce panorama, on peut redescendre et arpenter ce banc de sable qui est planté de grands pins. On peut l'arpenter à pied ou à vélo et ces grands pins sont assez majestueux, ont presque l'air vivants. Ensuite, on peut prendre un bus lorsqu'on a rejoint l'autre rive, qui va allonger d'abord la côte de la péninsule de Dangot, qui est encore un peu plus au nord. Et puis là, on arrive dans le village de Hine. Ce petit village, il est pensé comme un des plus beaux du Japon. Ceux qui ont vu le film des studios Ghibli, Ponyu sur la falaise, m'ont fait un petit peu penser à l'ambiance du film. Un poisson rouge !

  • Chihiro Masui

    Bizarre cette vague !

  • Aimie Eliot

    Une ville de pêcheurs qui comporte des architectures assez uniques. On y trouve des FUNAYA, c'est des maisons hangars de deux étages, où le rez-de-chaussée est ouvert sur les flots. C'est à cet endroit qu'on garait les bateaux. Aujourd'hui, des pêcheurs vivent encore dans ces funayas, mais elles ont aussi été transformées en cafés, en restaurants, en chambres d'hôtes. C'est aussi un très bon moyen de les visiter pour comprendre ces architectures-là assez uniques et se régaler aussi de la pêche du jour parce qu'il y a du très bon placement sur ces côtes.

  • Marjolaine

    Oui, on comprend qu'au Japon, on peut vraiment passer de la mégapole aux grands espaces et profiter d'un éventail d'ambiance du coup. Et tu nous as parlé de trains, de bus aussi. Quel mode de déplacement tu nous recommandes pour visiter le Japon ?

  • Aimie Eliot

    Alors le train, c'est un moyen de transport idéal au Japon, très ponctuel, très propre, comme je disais, qui cadre très finement l'archipel. On connaît le Shinkansen, le train à grande vitesse, mais il y a aussi un très dense réseau de petits trains locaux, très charmants, qui sont plus lents bien sûr, mais qui permettent de rejoindre des endroits qui sont peu touristiques et souvent qui valent au beaucoup. Et puis à Kyoto, je trouve que le vélo, c'est un mode de transport idéal. Et je dirais que le vélo électrique, c'est encore mieux, parce que la ville, elle s'est développée dans une cuvette, mais les temples se trouvent dans les hauteurs. Et là, les chemins sont un petit peu plus ponctus.

  • Marjolaine

    D'accord. Et est-ce que tu dirais que le Japon est un pays accueillant pour les enfants ?

  • Aimie Eliot

    Oui, oui, oui. C'est un pays dans lequel on voyage assez facilement avec des enfants. parce que c'est un pays très pratique, c'est aussi un pays très stimulant pour les enfants, la population est très accueillante, c'est un pays qui a son lot de mascottes, très colorées, on trouve aussi des salles de jeu un peu partout. Pour moi, c'est un pays très agréable pour un voyage en famille.

  • Marjolaine

    Et quels sont les incontournables à faire en famille alors ?

  • Aimie Eliot

    Je dirais à Tokyo, le Musée Team Lab, une collectif d'artistes numériques japonais qui a ouvert à Zabudai East, au rez-de-chaussée de la plus haute tour résidentielle du Japon. Ce sont des œuvres très interactives. Et pour le coup, je pense que c'est beaucoup mieux d'aller à Disneyland. Pour les amateurs des... des films, des studios de bibliothèque, j'en parlais tout à l'heure, il y a le musée des studios de bibliothèque, donc il y a le musée historique qui se trouve dans l'ouest de Tokyo, à Nisaka, et puis le nouveau parc près d'Osaka, et puis il y a bien sûr le parc Nintendo, et puis le tout nouveau musée Nintendo qui est ouvert près de Kyoto, à Uji. Et puis on peut aussi acheter un de ces jolis carnets dans les tapeteries. qu'on remplit au fil de son séjour, des tampons, des villes ou des gares qu'on peut trouver dans les stations ou dans les offices du tourisme. Ou alors dessiner, si on aime dessiner, dessiner les belles plaques d'égout qu'on trouve aussi dans les villes et qui sont toujours très jolies. Ça fait peut-être partie des souvenirs que je préfère.

  • Marjolaine

    Merci beaucoup, Aimie.

  • Aimie Eliot

    Merci.

  • Marjolaine

    On pense connaître la cuisine du Japon par les bribes qui viennent jusqu'à nous, les nouilles soba, les sushis, les yakitori. Mais dans le fond, est-ce que c'est vraiment ça, la cuisine japonaise ? C'est la question que j'ai posée à Chihiro Masui, fine gastronome de son pays qui aime partager ses découvertes à travers sa newsletter française, The Spoon of Paris. Déjà, quel est le rythme des repas, tout simplement, quand on arrive au Japon ?

  • Chihiro Masui

    Le Japon, c'est un peu comme dans l'Est de l'Asie. les horaires des repas sont beaucoup beaucoup moins rigides et codifiés qu'en France. Par exemple, en France, si à 15h vous voulez déjeuner, c'est un peu compliqué hormis le fast-food et le café du coin. Au Japon, évidemment, si vous allez dans un restaurant gastronomique, ça va être aux horaires des repas. Mais sinon, il y a quand même pas mal d'établissements qui sont ouverts, pas à toute heure, mais enfin qui sont ouverts, notamment l'après-midi. Alors, sinon, bah... Le petit déjeuner, c'est l'heure du petit déjeuner normal. Le déjeuner est à midi. Le dîner, pour ceux qui dînent tôt, ça peut être à 17h. Pour ceux qui dînent tard, c'est 19h. 20h, c'est très tard. Donc, c'est beaucoup plus tôt qu'en France.

  • Marjolaine

    Et alors, on parle du petit déjeuner. Si on veut prendre un petit déjeuner classique japonais, qu'est-ce qu'on a sur sa table ?

  • Chihiro Masui

    Alors, si vous êtes dans un hôtel... Il y a de fortes chances que vous auriez un buffet avec tout le petit déjeuner occidental. Et de l'autre côté, vous aurez aussi le petit déjeuner classique, traditionnel japonais, riz, soupe, miso. Souvent des tsukimono, qui sont des légumes légèrement fermentés qui accompagnent le riz. Il y aura sans doute un oeuf, donc ça va être le tamagoyaki, qui est l'omelette japonaise. C'est coupé en tranches, donc vous aurez des rectangles jaunes en tranches. Très, très, très souvent, un bout de poisson grillé, assez simplement au sel.

  • Marjolaine

    Et comment vous décrivez les bases de la cuisine japonaise ?

  • Chihiro Masui

    Ce qui surprend souvent les non-japonais quand ils viennent au Japon, c'est l'immense variété de ce qu'on mange au Japon quotidiennement. C'est-à-dire que, par exemple, vous allez dans un restaurant tout à fait moyen, très abordable. Vous allez avoir autant des spaghettis que des soba, des nouilles soba. que du riz, que du poulet, que du poisson, enfin, vous pouvez avoir un gratin, c'est très très très commun au Japon, de la pizza. Et en même temps, vous allez avoir par exemple du tonkatsu, c'est du porc pané, du curry. Le curry est, je crois, le plat le plus consommé au Japon. Donc c'est le curry japonais qui n'a rien à voir avec le curry indien, qui est arrivé au Japon via l'Angleterre à la fin du 19e siècle, et c'est vraiment un plat japonais. Donc le curry se mange avec du riz blanc.

  • Marjolaine

    En quoi il est différent de l'indien ?

  • Chihiro Masui

    D'abord, c'est fait à partir d'un roux. Ça veut dire que c'est épaissi à la farine. Donc, la consistance à la fin, c'est une sauce qu'on verse sur le riz, mais qui est épaisse, vraiment. Ensuite, dedans, il va y avoir des bouts de viande. En gros, c'est bœuf, parfois porc, beaucoup poulet et ça peut être crevette. Voilà, c'est en gros les quatre ingrédients qu'il peut y avoir dans un curry, séparément. Avec pommes de terre, carottes. Ça, c'est le classique. C'est... En général, pas très épicé, pas très piquant, léger.

  • Marjolaine

    Alors, quels sont les plats que vous recommandez de tester et qu'on ne connaît pas forcément dans les restaurants japonais ou dans la cuisine japonaise qui est venue jusqu'en France ?

  • Chihiro Masui

    Ce qui est sympa quand même, c'est d'aller dans un vrai yakitori, les brochettes yakitori. Tout le monde les connaît, mais en fait, ce n'est pas du tout ça. Ça ressemble, c'est-à-dire que c'est des bâtons sur lesquels on a mis la viande qu'on a fait griller. En fait, la caractéristique japonaise, c'est que chaque restaurant a sa spécialité. Il y a une raison historique à ça. Donc le restaurant de Yakitori ne fera que ça. Vous ne trouverez pas un restaurant où vous aurez du Yakitori, des lamens et des sushis, ça n'existera pas. Donc, le restaurant de Yakitori, d'abord, ça peut être impressionnant parce que ça gueule dans tous les sens. Les gens parlent hyper fort. Et comme tout le monde parle fort, tout le monde parlera encore plus fort. C'est comme ça. Donc quand on parle du japonais qui est très calme et réservé, là non, c'est tout le contraire. Souvent, on s'assoit à un comptoir où on va commander des brochettes une par une directement au cuisinier qui est de l'autre côté du comptoir. Vous commandez par exemple, gésier, vous avez une brochette de gésier. Coeur, vous avez une brochette de coeur. Foie, vous avez une brochette de foie. Peau, vous avez une brochette de peau. Cartilage, vous avez une brochette de cartilage, etc. Vous pouvez évidemment avoir une brochette de neguima, poulet et poireau alterné. Mais en général, c'est vraiment une partie du poulet par brochette. Donc ça, c'est grillé sur du charbon régulier. Et c'est soit trempé dans une sauce sucrée salée à base de sauce soja, sake, mirin, une sauce sucrée salée ou au sel. Ça, c'est Ausha du client en général. Alors évidemment, mon mari qui est français, lui, l'idée de manger toute une brochette de cartilage, il me dit mais pourquoi faire ? Ça ne se mange pas. Ben si, c'est très bon. Nous, on pense que c'est très bon pour les articulations. Donc ça, c'est le yakitori et ce sont des restaurants que j'aime beaucoup parce que c'est très populaire, c'est très abordable, c'est joyeux. C'est un aspect du Japon qui est quand même sympathique et qu'il n'y a pas en France. Ensuite, évidemment, il faut faire un sushi. Le sushi, c'est un peu pareil. C'est tellement galvaudé maintenant. Le sushi est devenu un méplanétaire. Mais il faut savoir que le sushi tel qu'on le conçoit à l'étranger, c'est-à-dire la boulette de riz avec la tranche de poisson crue dessus ou le maki, ça, c'est un type de sushi très, très, très spécifique. En fait, au Japon, quand on parle de sushi, on parle de n'importe quel plat qui est fait avec du riz vinaigré. Donc, selon la région, etc., le style de sushi change énormément. Il y a le sushi tournant qui est vraiment extrêmement abordable en termes de prix. Et c'est assez fin parce que ça permet de choisir ce qu'on veut. Et puis de l'autre côté, il y a les sushis très très très haut de gamme. Vous allez payer 300 euros. Évidemment, ce n'est pas du tout la même qualité, ce n'est pas du tout la même ambiance. Le sushi à très haut de gamme, c'est 8 couverts au comptoir avec le mètre qui vous sert directement. Donc vous avez tout le spectacle, que ce soit la découpe du poisson. La préparation du sushi, à ce niveau-là, c'est quand même un beau spectacle.

  • Marjolaine

    Alors maintenant, du côté des boissons chaudes, est-ce qu'il y a des boissons qu'on ne connaît pas ici et qui seraient à tester ?

  • Chihiro Masui

    Déjà, il y a du café partout. Moi, je ne bois pas de café, alors je ne peux pas juger, mais mon mari qui est français et qui boit du café me dit que le café au Japon est vraiment imbuvable. C'est du café américain, ça va allonger. Qui paraît-il, il a quand même la caractéristique d'être généralement très amer. Sinon... Évidemment, c'est un pays de thé. Le thé qu'on boit le plus, c'est le sencha, qui est un thé vert, non fermenté. Sinon, ce que les Français aiment parmi les thés japonais, c'est le gemmaicha. Et le gemmaicha, c'est du thé vert dans lequel on a mis du riz soufflé. Riz soufflé comme du popcorn. Ça donne un côté un peu torréfié. Sachant que pour nous, c'est le thé le plus bas de gamme qu'on ne sert jamais à l'inviter. Bizarrement, c'est celui que les Français semblent plébisciter. Sinon, dans les thés haut de gamme, il y a le gyokuro. Le gyokuro, c'est un thé vert qu'on recouvre pendant les trois dernières semaines avant la récolte pour qu'il n'y ait pas de lumière. Et ça donne des petites feuilles extrêmement tendres. Le gyokuro, en fait, est un thé qui est extrêmement riche en glutamate. mais là c'est la forme donc naturelle de glutamate et ça a vraiment un goût de glutamate qui n'est pas à la portée tout le monde c'est quand même un goût assez spécial c'est pas un thé désaltérant du tout c'est un thé un tout petit peu sur le peu qu'on voit en toute petite quantité Et sinon, évidemment, il y a le matcha. Le matcha n'est pas un thé qu'on sert avec un repas. Ce n'est absolument pas désaltérant. C'est très, très chargé en théine. Et ça se boit vraiment dans le cadre de la cérémonie du thé. Ou, évidemment, vous pouvez le boire comme ça, avec un petit gâteau pour contrebalancer le côté un peu fort. C'est un thé qui est très fort. Il y a... notamment à Kyoto, des salons de thé qui sont très sympas, avec un jardin japonais, où on vous sert un matcha avec un gâteau, un wagashi, un gâteau japonais. Dans ce cadre-là, c'est bien. Sinon, on n'en voit pas beaucoup.

  • Marjolaine

    Alors, du côté des alcools maintenant, est-ce que vous avez des recommandations ?

  • Chihiro Masui

    Il faut savoir quand même que le Japon est un pays... Enfin, nous sommes un peuple assez psychovégide. Ce n'est pas un scoop. Et donc, si vous allez dans un restaurant japonais, Sushi, Kaiseki, etc. Vous aurez un ou plusieurs sake, mais pas beaucoup. Jamais autant qu'une liste de vin dans un restaurant hollandais en France. Traditionnellement, dans un sushi, il y avait un seul sake. Celui que le patron choisissait, c'est tout. Donc, vous aurez quelques sake. Et sinon, si vous allez dans des izakaya, izakaya veut dire le lieu où on boit du vin. C'est ce qu'on appelle aujourd'hui en France, bar à tapas. On vous sert des petits plats guignotés, mais pour accompagner le saké. Là, vous aurez une sélection de saké, une sélection de Ausha et une sélection de bière, des whisky peut-être, et quelques vins. Le Ausha, c'est un alcool fait à partir de patates douces. Ça titre à 25°C, c'est plus fort que le saké. Pendant longtemps. C'était un peu mal vu parce que c'était un alcool pas cher, vulgaire, etc. Là, c'est en train de revenir un peu à la mode. Sinon, il y a des vins japonais. Honnêtement, en venant de France, je ne vois pas trop l'intérêt. Il y en a qui sont très bons. Alors, ceux qui sont très bons sont rarissimes, dans le sens où ce sont de toutes petites productions et c'est impossible d'en avoir. Alors, la boisson type du japonais, c'est la bière. Quand vous entrez dans un restaurant, la première chose qu'on vous demande, c'est qu'est-ce que vous buvez. Typiquement, c'est bière. Et après, ça va être Mizuhari, qui veut dire du whisky à l'eau. Ça, c'est le grand classique japonais. Ah oui, puis alors, depuis quelques temps, c'est récent, le highball est à la mode. Donc, il y a partout des canettes de highball. C'est du whisky avec de l'eau gazeuse, je crois. Ça se vend comme la bière.

  • Marjolaine

    Donc, un mélange d'eau gazeuse et de whisky en canette.

  • Chihiro Masui

    C'est parfois parfumé. Je ne sais pas, citron, yuzu, enfin des choses, mais en gros c'est ça.

  • Marjolaine

    Et alors, à l'heure de quitter le pays, qu'est-ce qu'il faut mettre dans sa valise côté alimentaire ? Qu'est-ce qu'on rapporte ?

  • Chihiro Masui

    Ce que les touristes ramènent beaucoup du Japon maintenant, ce sont les couteaux japonais. Les couteaux japonais ont une très juste réputation dans le monde. À Tokyo, il y a un quartier qui s'appelle Kababashi, qui est le quartier des fournitures de cuisine. Et là, les boutiques de couteaux sont assaillies par des non-japonais qui veulent en ramener. Et sinon, la fille, par exemple, elle ramène des tas de merdouilles de type Kit Kat au matcha, mais ça va être des pokis à la fraise. Et les pokis, c'est un peu comme les mikados, les petits troncs là. Les pokis à la fraise, mais ce qu'il n'y a pas ici, c'est qu'il y a des petits bouts de fraises dessus, collés dessus, elle adore. Des gelées de konjac au raisin. Ça fait des mini-mini gobelets en plastique, fermés évidemment, en forme de cœur. Ça, tout le monde adore. Les jeunes rapportent quand même des choses un peu moins austères que ce que moi je choisis. Et il y a... énormément, il y a une telle variété de choses comme ça qui sont mignonnes, qui sont fun, qui sont rigolos, c'est des confiseries, on va dire, on s'en serait très là.

  • Marjolaine

    Ce podcast se termine toujours par une plongée dans un roman. Cette fois-ci, c'est l'histoire de Pamina, une jeune luthière dont la grand-mère japonaise exerçait le même métier pendant la Seconde Guerre mondiale. Son histoire la rattrape lorsque, travaillant dans un atelier parisien, elle se voit confier un violoncelle dans lequel elle découvre, dissimulée dans un tasseau, une lettre. Celle d'un prodige contraint d'abandonner son art pour rejoindre les troupes japonaises au cœur des conflits des années 40. Ce roman, c'est celui d'Akira Mizubayashi, intitulé Suite inoubliable et paru chez Gallimard en 2023. Vous écoutez un extrait du livre audio lu par Constance Dolé, paru dans la collection Écoutez lire.

  • Suite Inoubliable, d’Akira Mizubayashi

    Je m'appelle Hortense Schmitt, j'ai 36 ans, je suis luthière. J'ai mon atelier dans le quartier de l'École nationale de musique à Tokyo. Mais en raison de l'intensification des bombardements dans la région de la capitale nippone, Je me suis réfugiée sur le conseil de Ken Mizutani, dans ce hameau de Shinano-Oiwake, qui appartient à la commune de Karuizawa, où un nombre assez considérable d'Occidentaux vivent parqués, si j'ose dire, sous l'ordre des autorités gouvernementales. La proximité de cette communauté d'étrangers est un point positif pour moi, car je désire avoir des informations qui ne viennent pas du quartier général impérial. Mais ce qui m'a décidé à m'éloigner de Tokyo pour une durée indéterminée, en acceptant l'aimable proposition de Ken, c'est le désastre inqualifiable du 10 mars, occasionné par les raids aériens américains. J'y ai échappé miraculeusement. Mon atelier aussi. Les Américains ont-ils eu la sagesse d'épargner le secteur du Hainaut, où se concentrent musées et écoles ? Je loue ici, moyennant un loyer dérisoire symbolique, une vieille baraque dont la plus grande pièce fait office d'atelier. Quelqu'un frappe à la porte. Je me demande qui c'est à cette heure tardive où le soleil se retire vite. Une seule lampe d'une faible lumière orange éclaire mon atelier. Quelques secondes après, j'entends C'est moi, Ken Je suis soulagée. J'ouvre la porte. Quelle surprise de te voir à cette heure-ci, tu ne m'avais pas dit que tu venais ? Ken a 25 ans, il est violoncelliste. Depuis qu'il est rentré de France à l'automne 1939, il me confie son instrument chaque fois qu'il a une inquiétude à son sujet. Son professeur Saito et ses camarades en font autant. C'est parce que certainement j'ai gagné leur confiance à force de travailler sérieusement, toujours à leur écoute, mobilisant toutes les techniques que je maîtrise. Je viens te voir pour quelque chose d'important, me dit-il d'une voix un peu tremblante. Entre. Tu transpires. Tu es venu à pied avec ton gaufrileur ? Il a marché environ une heure, son instrument sur le dos, pour venir de chez ses parents. Je lui demande s'il veut partager mon dîner. Il me répond honteusement. Non, excuse-moi, je suis bête, je n'ai pas pensé que c'était l'heure du repas. Tu n'as pas encore mangé ? Puisque je vais manger, tu ne veux pas m'accompagner ? Il hoche la tête d'un air embarrassé. J'improvise ainsi un petit repas pour nous deux avec des œufs, quelques légumes et de minces tranches de jambon qu'un journaliste français m'a donné ce matin. Nous sommes maintenant assis l'un en face de l'autre autour d'une table ronde, chacun dans un fauteuil dont le tissu est troué par endroit. Je viens d'allumer une lampe de bureau posée sur mon établi. Une grande et épaisse planche de pain posée sur deux petits meubles de même hauteur. Elle éclaire nos visages. Un silence énigmatique, un peu pesant, règne dans mon atelier. Ni moi, ni lui n'osons le rompre. Je suis perplexe devant l'étrange nouveauté de la situation. Je suis seule avec Ken, à sept heures de la nuit, dans mon atelier. Qu'est-ce qui se passe ? Enfin, je me décide à ouvrir la bouche. Il n'y a pas grand-chose, mais bon appétit quand même, Ken. Il a la tête baissée. Il me remercie, lave la tête, me regarde une fraction de seconde. Intrigué, je ne quitte pas des yeux le visiteur du soir. Il soupire profondément, puis commence à parler d'une voix toujours tremblante, comme s'il avouait une faute. En fait... Je suis venue te dire au revoir. Je dois aller au régiment. J'ai reçu le fatidique petit papier rouge d'incorporation. Je tombe des nues parce que d'une part il ne m'avait jamais dit qu'une telle possibilité existait, et que d'autre part je croyais que les étudiants comme lui bénéficiaient d'un traitement préférentiel. Tu le sais depuis quand ? Depuis quinze jours.

  • Marjolaine

    Il est temps d'atterrir. Merci d'avoir exploré le Japon avec nous. L'habillage sonore est signé Hélène Biziot, la réalisation et les interviews Marjolaine Corr. Vous avez pu entendre des extraits de l'émission Un train pas comme les autres diffusée sur France Télévisions, du film Pogneaux sur la falaise signé Miyazaki, et en dernière partie, un extrait du quintet pour cordes numéro 2 d'Ernst Noman. Un podcast créé sur une idée originale des éditions Voyages Gallimard. Retrouvez-nous sur toutes les plateformes et n'hésitez pas à nous laisser des étoiles si ce contenu vous a plu. A bientôt et bon voyage !

Chapters

  • Rencontre avec Aimie Eliot

    01:25

  • Gastronomie japonaise avec Chihiro Masui

    11:30

  • Suite inoubliable d'Akira Mizubayashi, extrait

    24:50

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Description

S’envoler au bout du monde et s’immerger dans une culture à la fois ancestrale et futuriste… Les gratte-ciel, la pop culture, l’univers kawaii mais aussi, les samouraïs, la cérémonie du thé, les jardins et les temples, c’est un curieux et fascinant mélange que nous offre le Japon.

 

Avant votre départ, laissez-vous guider par nos deux invitées passionnées. En première partie, Aimie Eliot, autrice des guides Coups de cœur Japon et En Train au Japon aux Éditions Voyages Gallimard nous donne quelques clés pour cerner les particularités de la culture nippone. De Tokyo, où elle réside, elle nous livre ses coups de cœur : participer à un atelier culinaire pour maîtriser les sobas, se lever de bonne heure pour se rendre au sanctuaire shinto de Meiji, flâner parmi les authentiques maisons de bois de Tomonoura, petit village de pêcheurs qui a inspiré aux studios Ghibli, le film d’animation Ponyo sur la falaise ou encore prendre le train pour explorer tous les trésors de l’archipel.

 

On pense connaître la gastronomie japonaise par les bribes qui viennent jusqu’à nous, les ramen, les sushis, les yakitoris, mais est-ce vraiment ça, la cuisine japonaise ? En seconde partie, Chihiro Masui, journaliste culinaire japonaise vivant à Paris nous guidera dans les méandres des traditions culinaires de son archipel avec évidemment plein de conseils à la clé. Et pour accompagner vos repas, elle vous dira tout sur le saké, le thé, le whisky japonais ou le shochu.


Réalisation et interviews Marjolaine Koch. Habillage sonore Hélène Bizieau.

 

Enfin, la dernière partie de ce podcast « voyage » nous plongera dans le Japon de la Seconde Guerre mondiale avec la lecture d’un extrait du roman Suite Inoubliable d’Akira Mizubayashi, paru dans la collection Écoutez Lire aux Éditions Gallimard.


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Marjolaine

    Parlez-moi d'ailleurs, un podcast Voyage Gallimard. Bienvenue. Aujourd'hui, laissez-vous raconter le Japon par celles et ceux qui le vivent au quotidien. S'envoler au bout du monde et s'immerger dans une culture à la fois ancestrale et futuriste, les gratte-ciels, la pop-culture, l'univers kawaii, mais aussi... Les samouraïs, la cérémonie du thé, les jardins et les temples, c'est un curieux et fascinant mélange que nous offre le Japon. Avant votre départ, écoutez les recommandations de nos deux invités. En première partie, Aimie Eliot, autrice du guide Coup de cœur Japon aux éditions Voyage Gallimard, nous donne quelques clés pour cerner les particularités de la culture nippone. Et puis, en seconde partie, Chihiro Masui, journaliste culinaire japonaise vivant à Paris, nous guidera dans les méandres de la cuisine de son archipel, avec, évidemment, quelques recommandations. Enfin, la dernière partie de ce podcast nous plongera dans le Japon de la Seconde Guerre mondiale, avec la lecture d'un extrait du roman, suite inoubliable, d'Akira Mizubayashi. Préparez-vous à entrer dans une autre dimension. Tokyo, c'est 14 millions d'habitants, Intramuros, 40 millions avec son agglomération. Une ville verticale en son centre qui vous engloutit et vous propulse dans un univers pop et traditionnel. Aimie Eliott a choisi d'y vivre il y a 4 ans. Elle a notamment travaillé sur le guide Coup de cœur Japon Mais elle a aussi écrit En train au Japon, une trentaine d'itinéraires pour voyager autrement deux ouvrages publiés aux éditions Gallimard. Aimie, bonjour.

  • Aimie Eliot

    Bonjour.

  • Marjolaine

    Tu es au Japon depuis 4 ans. Alors toi-même, la première fois que tu as mis les pieds dans ce pays, à l'aéroport, qu'est-ce qui t'a le plus surpris ?

  • Aimie Eliot

    Je crois que c'est la propreté des lieux. Au Japon, c'est très important. La propreté, c'est lié à l'héritage de Shinto. On fait très attention à ce que les lieux publics soient immaculés. Et c'est vrai que ça a été une grande surprise. Ensuite, bien sûr, il y a le gigantisme de Tokyo. Lorsqu'on navigue dans la gare de Shinjuku, la gare la plus passante du monde, c'est frappant. Lorsqu'on prend la ligne aérienne à Odaiba et qu'on survole la baie avec tous ces gratte-ciels, ça semble surréel. Et malgré tout, on ressent aussi un grand calme. Je trouve que ce contraste est toujours très intéressant, à la fois dans la rue, dans le train, dans les gares. On est dans la plus grande ville du monde, là je parle de Tokyo, et pourtant il y a une espèce de fluidité, une espèce d'harmonie, parce qu'au Japon finalement on accorde beaucoup d'importance au vivre ensemble, il y a une espèce de respect du collectif. On fait parfois passer avant l'individu, donc c'est ce qui fait qu'on va parler à voix basse dans les trains, faire attention à ne pas se bouculer. C'est à là qu'avant de monter dans un wagon, alors bien sûr, il y a des exceptions, c'est sûr, durant les heures de pointe, dans le train ou le métro japonais, toujours des coups de poudre. Mais ce calme et cette espèce d'organisation comme ça, je trouve que c'est très marrant.

  • Marjolaine

    Et justement, pour connaître cette culture, est-ce que tu aurais un conseil à nous donner de lieux à découvrir, que ce soit un quartier, un musée ou même une expérience qui nous permettrait de mieux l'appréhender ?

  • Aimie Eliot

    Il y en a des tonnes. On parle d'expérience, par exemple. On peut, par exemple, réserver un atelier pour apprendre à confectionner des soba et s'imprimer de la grande culture gastronomique japonaise.

  • Marjolaine

    Alors, les soba, un atelier culinaire de nouilles japonaises, donc.

  • Aimie Eliot

    Oui, tout à fait. J'aime bien aussi les ateliers qui permettent de teindre, par exemple, un titu à l'indigo. On expérimente une tradition, un savoir-faire. Et puis, c'est souvent l'occasion de parler avec les artisans. C'est souvent un moment d'échange. En termes de lieu, je pense à Tokyo parce que c'est ma ville, on peut se lever de très bonne heure pour se rendre au sanctuaire Shinto de Meiji. Le temple ouvre lorsque le soleil se lève. Et à cette heure-ci, il n'y a plus de touristes et on croise beaucoup plus d'habitants qui s'y rendent pour prier, mais aussi pour faire leur jogging, pour se promener, pour prendre un bol d'air. Et ça je trouve que c'est intéressant de voir que ces lieux-là, qu'on voit en tant que touristes comme des grands lieux touristiques, sont aussi des lieux très vivants.

  • Marjolaine

    Une fois qu'on sort de Tokyo, est-ce que tu aurais un circuit à nous proposer ?

  • Aimie Eliot

    Oui, alors il y en a énormément, car le train quadrille vraiment très finement l'archipel. J'en ai imaginé plusieurs, près d'une trentaine dans mon livre Entrant au Japon. Shinkansen ! Il est très mythique. Il a quand même de la gueule. Ça, vous voyez, pour quelqu'un qui aime le train, c'est vraiment le train culte, parce que l'air de rien, c'est le premier train à grande vitesse du monde, bien avant le TGV, puisque la première ligne rapide ici a été inaugurée au départ de Tokyo en 1964. Je crois que l'un de mes préférés, c'est celui qui parle de Kyoto, et qui... permet de pérégriner autour de l'ex-capitale. J'aime bien cette région parce qu'elle permet de découvrir d'autres facettes des alentours et de s'échapper du tumulte de Kyoto qui peut parfois être un peu étouffant. C'est une ville qui est en proie au surtourisme depuis plusieurs années et sa région, en fait, elle vaut vraiment le détour. Donc on peut prendre le train depuis Kyoto jusqu'à Amano Ashidate, qui se trouve au nord. Et en fait, cette ville-là, elle borde une baie. Elle est très connue pour abriter l'une des trois plus belles vues du Japon, selon un classement ancien qui date de l'époque Heian, autour du 8e siècle. En fait, cet endroit présente une particularité géographique assez étonnante. Lorsqu'on monte en haut d'un petit vallon, par un funiculaire très mignon, qui sont des petites chaises qui nous montent jusqu'à la colline, on aperçoit une étonnante bande de sable qui serpente entre la mer intérieure et la baie de Miyazu. Cette bande de sable qui résiste aux différents changements climatiques, il a été très représenté par les artistes et loué par les poètes. C'est vraiment un paysage très atypique. Une fois qu'on a admiré ce panorama, on peut redescendre et arpenter ce banc de sable qui est planté de grands pins. On peut l'arpenter à pied ou à vélo et ces grands pins sont assez majestueux, ont presque l'air vivants. Ensuite, on peut prendre un bus lorsqu'on a rejoint l'autre rive, qui va allonger d'abord la côte de la péninsule de Dangot, qui est encore un peu plus au nord. Et puis là, on arrive dans le village de Hine. Ce petit village, il est pensé comme un des plus beaux du Japon. Ceux qui ont vu le film des studios Ghibli, Ponyu sur la falaise, m'ont fait un petit peu penser à l'ambiance du film. Un poisson rouge !

  • Chihiro Masui

    Bizarre cette vague !

  • Aimie Eliot

    Une ville de pêcheurs qui comporte des architectures assez uniques. On y trouve des FUNAYA, c'est des maisons hangars de deux étages, où le rez-de-chaussée est ouvert sur les flots. C'est à cet endroit qu'on garait les bateaux. Aujourd'hui, des pêcheurs vivent encore dans ces funayas, mais elles ont aussi été transformées en cafés, en restaurants, en chambres d'hôtes. C'est aussi un très bon moyen de les visiter pour comprendre ces architectures-là assez uniques et se régaler aussi de la pêche du jour parce qu'il y a du très bon placement sur ces côtes.

  • Marjolaine

    Oui, on comprend qu'au Japon, on peut vraiment passer de la mégapole aux grands espaces et profiter d'un éventail d'ambiance du coup. Et tu nous as parlé de trains, de bus aussi. Quel mode de déplacement tu nous recommandes pour visiter le Japon ?

  • Aimie Eliot

    Alors le train, c'est un moyen de transport idéal au Japon, très ponctuel, très propre, comme je disais, qui cadre très finement l'archipel. On connaît le Shinkansen, le train à grande vitesse, mais il y a aussi un très dense réseau de petits trains locaux, très charmants, qui sont plus lents bien sûr, mais qui permettent de rejoindre des endroits qui sont peu touristiques et souvent qui valent au beaucoup. Et puis à Kyoto, je trouve que le vélo, c'est un mode de transport idéal. Et je dirais que le vélo électrique, c'est encore mieux, parce que la ville, elle s'est développée dans une cuvette, mais les temples se trouvent dans les hauteurs. Et là, les chemins sont un petit peu plus ponctus.

  • Marjolaine

    D'accord. Et est-ce que tu dirais que le Japon est un pays accueillant pour les enfants ?

  • Aimie Eliot

    Oui, oui, oui. C'est un pays dans lequel on voyage assez facilement avec des enfants. parce que c'est un pays très pratique, c'est aussi un pays très stimulant pour les enfants, la population est très accueillante, c'est un pays qui a son lot de mascottes, très colorées, on trouve aussi des salles de jeu un peu partout. Pour moi, c'est un pays très agréable pour un voyage en famille.

  • Marjolaine

    Et quels sont les incontournables à faire en famille alors ?

  • Aimie Eliot

    Je dirais à Tokyo, le Musée Team Lab, une collectif d'artistes numériques japonais qui a ouvert à Zabudai East, au rez-de-chaussée de la plus haute tour résidentielle du Japon. Ce sont des œuvres très interactives. Et pour le coup, je pense que c'est beaucoup mieux d'aller à Disneyland. Pour les amateurs des... des films, des studios de bibliothèque, j'en parlais tout à l'heure, il y a le musée des studios de bibliothèque, donc il y a le musée historique qui se trouve dans l'ouest de Tokyo, à Nisaka, et puis le nouveau parc près d'Osaka, et puis il y a bien sûr le parc Nintendo, et puis le tout nouveau musée Nintendo qui est ouvert près de Kyoto, à Uji. Et puis on peut aussi acheter un de ces jolis carnets dans les tapeteries. qu'on remplit au fil de son séjour, des tampons, des villes ou des gares qu'on peut trouver dans les stations ou dans les offices du tourisme. Ou alors dessiner, si on aime dessiner, dessiner les belles plaques d'égout qu'on trouve aussi dans les villes et qui sont toujours très jolies. Ça fait peut-être partie des souvenirs que je préfère.

  • Marjolaine

    Merci beaucoup, Aimie.

  • Aimie Eliot

    Merci.

  • Marjolaine

    On pense connaître la cuisine du Japon par les bribes qui viennent jusqu'à nous, les nouilles soba, les sushis, les yakitori. Mais dans le fond, est-ce que c'est vraiment ça, la cuisine japonaise ? C'est la question que j'ai posée à Chihiro Masui, fine gastronome de son pays qui aime partager ses découvertes à travers sa newsletter française, The Spoon of Paris. Déjà, quel est le rythme des repas, tout simplement, quand on arrive au Japon ?

  • Chihiro Masui

    Le Japon, c'est un peu comme dans l'Est de l'Asie. les horaires des repas sont beaucoup beaucoup moins rigides et codifiés qu'en France. Par exemple, en France, si à 15h vous voulez déjeuner, c'est un peu compliqué hormis le fast-food et le café du coin. Au Japon, évidemment, si vous allez dans un restaurant gastronomique, ça va être aux horaires des repas. Mais sinon, il y a quand même pas mal d'établissements qui sont ouverts, pas à toute heure, mais enfin qui sont ouverts, notamment l'après-midi. Alors, sinon, bah... Le petit déjeuner, c'est l'heure du petit déjeuner normal. Le déjeuner est à midi. Le dîner, pour ceux qui dînent tôt, ça peut être à 17h. Pour ceux qui dînent tard, c'est 19h. 20h, c'est très tard. Donc, c'est beaucoup plus tôt qu'en France.

  • Marjolaine

    Et alors, on parle du petit déjeuner. Si on veut prendre un petit déjeuner classique japonais, qu'est-ce qu'on a sur sa table ?

  • Chihiro Masui

    Alors, si vous êtes dans un hôtel... Il y a de fortes chances que vous auriez un buffet avec tout le petit déjeuner occidental. Et de l'autre côté, vous aurez aussi le petit déjeuner classique, traditionnel japonais, riz, soupe, miso. Souvent des tsukimono, qui sont des légumes légèrement fermentés qui accompagnent le riz. Il y aura sans doute un oeuf, donc ça va être le tamagoyaki, qui est l'omelette japonaise. C'est coupé en tranches, donc vous aurez des rectangles jaunes en tranches. Très, très, très souvent, un bout de poisson grillé, assez simplement au sel.

  • Marjolaine

    Et comment vous décrivez les bases de la cuisine japonaise ?

  • Chihiro Masui

    Ce qui surprend souvent les non-japonais quand ils viennent au Japon, c'est l'immense variété de ce qu'on mange au Japon quotidiennement. C'est-à-dire que, par exemple, vous allez dans un restaurant tout à fait moyen, très abordable. Vous allez avoir autant des spaghettis que des soba, des nouilles soba. que du riz, que du poulet, que du poisson, enfin, vous pouvez avoir un gratin, c'est très très très commun au Japon, de la pizza. Et en même temps, vous allez avoir par exemple du tonkatsu, c'est du porc pané, du curry. Le curry est, je crois, le plat le plus consommé au Japon. Donc c'est le curry japonais qui n'a rien à voir avec le curry indien, qui est arrivé au Japon via l'Angleterre à la fin du 19e siècle, et c'est vraiment un plat japonais. Donc le curry se mange avec du riz blanc.

  • Marjolaine

    En quoi il est différent de l'indien ?

  • Chihiro Masui

    D'abord, c'est fait à partir d'un roux. Ça veut dire que c'est épaissi à la farine. Donc, la consistance à la fin, c'est une sauce qu'on verse sur le riz, mais qui est épaisse, vraiment. Ensuite, dedans, il va y avoir des bouts de viande. En gros, c'est bœuf, parfois porc, beaucoup poulet et ça peut être crevette. Voilà, c'est en gros les quatre ingrédients qu'il peut y avoir dans un curry, séparément. Avec pommes de terre, carottes. Ça, c'est le classique. C'est... En général, pas très épicé, pas très piquant, léger.

  • Marjolaine

    Alors, quels sont les plats que vous recommandez de tester et qu'on ne connaît pas forcément dans les restaurants japonais ou dans la cuisine japonaise qui est venue jusqu'en France ?

  • Chihiro Masui

    Ce qui est sympa quand même, c'est d'aller dans un vrai yakitori, les brochettes yakitori. Tout le monde les connaît, mais en fait, ce n'est pas du tout ça. Ça ressemble, c'est-à-dire que c'est des bâtons sur lesquels on a mis la viande qu'on a fait griller. En fait, la caractéristique japonaise, c'est que chaque restaurant a sa spécialité. Il y a une raison historique à ça. Donc le restaurant de Yakitori ne fera que ça. Vous ne trouverez pas un restaurant où vous aurez du Yakitori, des lamens et des sushis, ça n'existera pas. Donc, le restaurant de Yakitori, d'abord, ça peut être impressionnant parce que ça gueule dans tous les sens. Les gens parlent hyper fort. Et comme tout le monde parle fort, tout le monde parlera encore plus fort. C'est comme ça. Donc quand on parle du japonais qui est très calme et réservé, là non, c'est tout le contraire. Souvent, on s'assoit à un comptoir où on va commander des brochettes une par une directement au cuisinier qui est de l'autre côté du comptoir. Vous commandez par exemple, gésier, vous avez une brochette de gésier. Coeur, vous avez une brochette de coeur. Foie, vous avez une brochette de foie. Peau, vous avez une brochette de peau. Cartilage, vous avez une brochette de cartilage, etc. Vous pouvez évidemment avoir une brochette de neguima, poulet et poireau alterné. Mais en général, c'est vraiment une partie du poulet par brochette. Donc ça, c'est grillé sur du charbon régulier. Et c'est soit trempé dans une sauce sucrée salée à base de sauce soja, sake, mirin, une sauce sucrée salée ou au sel. Ça, c'est Ausha du client en général. Alors évidemment, mon mari qui est français, lui, l'idée de manger toute une brochette de cartilage, il me dit mais pourquoi faire ? Ça ne se mange pas. Ben si, c'est très bon. Nous, on pense que c'est très bon pour les articulations. Donc ça, c'est le yakitori et ce sont des restaurants que j'aime beaucoup parce que c'est très populaire, c'est très abordable, c'est joyeux. C'est un aspect du Japon qui est quand même sympathique et qu'il n'y a pas en France. Ensuite, évidemment, il faut faire un sushi. Le sushi, c'est un peu pareil. C'est tellement galvaudé maintenant. Le sushi est devenu un méplanétaire. Mais il faut savoir que le sushi tel qu'on le conçoit à l'étranger, c'est-à-dire la boulette de riz avec la tranche de poisson crue dessus ou le maki, ça, c'est un type de sushi très, très, très spécifique. En fait, au Japon, quand on parle de sushi, on parle de n'importe quel plat qui est fait avec du riz vinaigré. Donc, selon la région, etc., le style de sushi change énormément. Il y a le sushi tournant qui est vraiment extrêmement abordable en termes de prix. Et c'est assez fin parce que ça permet de choisir ce qu'on veut. Et puis de l'autre côté, il y a les sushis très très très haut de gamme. Vous allez payer 300 euros. Évidemment, ce n'est pas du tout la même qualité, ce n'est pas du tout la même ambiance. Le sushi à très haut de gamme, c'est 8 couverts au comptoir avec le mètre qui vous sert directement. Donc vous avez tout le spectacle, que ce soit la découpe du poisson. La préparation du sushi, à ce niveau-là, c'est quand même un beau spectacle.

  • Marjolaine

    Alors maintenant, du côté des boissons chaudes, est-ce qu'il y a des boissons qu'on ne connaît pas ici et qui seraient à tester ?

  • Chihiro Masui

    Déjà, il y a du café partout. Moi, je ne bois pas de café, alors je ne peux pas juger, mais mon mari qui est français et qui boit du café me dit que le café au Japon est vraiment imbuvable. C'est du café américain, ça va allonger. Qui paraît-il, il a quand même la caractéristique d'être généralement très amer. Sinon... Évidemment, c'est un pays de thé. Le thé qu'on boit le plus, c'est le sencha, qui est un thé vert, non fermenté. Sinon, ce que les Français aiment parmi les thés japonais, c'est le gemmaicha. Et le gemmaicha, c'est du thé vert dans lequel on a mis du riz soufflé. Riz soufflé comme du popcorn. Ça donne un côté un peu torréfié. Sachant que pour nous, c'est le thé le plus bas de gamme qu'on ne sert jamais à l'inviter. Bizarrement, c'est celui que les Français semblent plébisciter. Sinon, dans les thés haut de gamme, il y a le gyokuro. Le gyokuro, c'est un thé vert qu'on recouvre pendant les trois dernières semaines avant la récolte pour qu'il n'y ait pas de lumière. Et ça donne des petites feuilles extrêmement tendres. Le gyokuro, en fait, est un thé qui est extrêmement riche en glutamate. mais là c'est la forme donc naturelle de glutamate et ça a vraiment un goût de glutamate qui n'est pas à la portée tout le monde c'est quand même un goût assez spécial c'est pas un thé désaltérant du tout c'est un thé un tout petit peu sur le peu qu'on voit en toute petite quantité Et sinon, évidemment, il y a le matcha. Le matcha n'est pas un thé qu'on sert avec un repas. Ce n'est absolument pas désaltérant. C'est très, très chargé en théine. Et ça se boit vraiment dans le cadre de la cérémonie du thé. Ou, évidemment, vous pouvez le boire comme ça, avec un petit gâteau pour contrebalancer le côté un peu fort. C'est un thé qui est très fort. Il y a... notamment à Kyoto, des salons de thé qui sont très sympas, avec un jardin japonais, où on vous sert un matcha avec un gâteau, un wagashi, un gâteau japonais. Dans ce cadre-là, c'est bien. Sinon, on n'en voit pas beaucoup.

  • Marjolaine

    Alors, du côté des alcools maintenant, est-ce que vous avez des recommandations ?

  • Chihiro Masui

    Il faut savoir quand même que le Japon est un pays... Enfin, nous sommes un peuple assez psychovégide. Ce n'est pas un scoop. Et donc, si vous allez dans un restaurant japonais, Sushi, Kaiseki, etc. Vous aurez un ou plusieurs sake, mais pas beaucoup. Jamais autant qu'une liste de vin dans un restaurant hollandais en France. Traditionnellement, dans un sushi, il y avait un seul sake. Celui que le patron choisissait, c'est tout. Donc, vous aurez quelques sake. Et sinon, si vous allez dans des izakaya, izakaya veut dire le lieu où on boit du vin. C'est ce qu'on appelle aujourd'hui en France, bar à tapas. On vous sert des petits plats guignotés, mais pour accompagner le saké. Là, vous aurez une sélection de saké, une sélection de Ausha et une sélection de bière, des whisky peut-être, et quelques vins. Le Ausha, c'est un alcool fait à partir de patates douces. Ça titre à 25°C, c'est plus fort que le saké. Pendant longtemps. C'était un peu mal vu parce que c'était un alcool pas cher, vulgaire, etc. Là, c'est en train de revenir un peu à la mode. Sinon, il y a des vins japonais. Honnêtement, en venant de France, je ne vois pas trop l'intérêt. Il y en a qui sont très bons. Alors, ceux qui sont très bons sont rarissimes, dans le sens où ce sont de toutes petites productions et c'est impossible d'en avoir. Alors, la boisson type du japonais, c'est la bière. Quand vous entrez dans un restaurant, la première chose qu'on vous demande, c'est qu'est-ce que vous buvez. Typiquement, c'est bière. Et après, ça va être Mizuhari, qui veut dire du whisky à l'eau. Ça, c'est le grand classique japonais. Ah oui, puis alors, depuis quelques temps, c'est récent, le highball est à la mode. Donc, il y a partout des canettes de highball. C'est du whisky avec de l'eau gazeuse, je crois. Ça se vend comme la bière.

  • Marjolaine

    Donc, un mélange d'eau gazeuse et de whisky en canette.

  • Chihiro Masui

    C'est parfois parfumé. Je ne sais pas, citron, yuzu, enfin des choses, mais en gros c'est ça.

  • Marjolaine

    Et alors, à l'heure de quitter le pays, qu'est-ce qu'il faut mettre dans sa valise côté alimentaire ? Qu'est-ce qu'on rapporte ?

  • Chihiro Masui

    Ce que les touristes ramènent beaucoup du Japon maintenant, ce sont les couteaux japonais. Les couteaux japonais ont une très juste réputation dans le monde. À Tokyo, il y a un quartier qui s'appelle Kababashi, qui est le quartier des fournitures de cuisine. Et là, les boutiques de couteaux sont assaillies par des non-japonais qui veulent en ramener. Et sinon, la fille, par exemple, elle ramène des tas de merdouilles de type Kit Kat au matcha, mais ça va être des pokis à la fraise. Et les pokis, c'est un peu comme les mikados, les petits troncs là. Les pokis à la fraise, mais ce qu'il n'y a pas ici, c'est qu'il y a des petits bouts de fraises dessus, collés dessus, elle adore. Des gelées de konjac au raisin. Ça fait des mini-mini gobelets en plastique, fermés évidemment, en forme de cœur. Ça, tout le monde adore. Les jeunes rapportent quand même des choses un peu moins austères que ce que moi je choisis. Et il y a... énormément, il y a une telle variété de choses comme ça qui sont mignonnes, qui sont fun, qui sont rigolos, c'est des confiseries, on va dire, on s'en serait très là.

  • Marjolaine

    Ce podcast se termine toujours par une plongée dans un roman. Cette fois-ci, c'est l'histoire de Pamina, une jeune luthière dont la grand-mère japonaise exerçait le même métier pendant la Seconde Guerre mondiale. Son histoire la rattrape lorsque, travaillant dans un atelier parisien, elle se voit confier un violoncelle dans lequel elle découvre, dissimulée dans un tasseau, une lettre. Celle d'un prodige contraint d'abandonner son art pour rejoindre les troupes japonaises au cœur des conflits des années 40. Ce roman, c'est celui d'Akira Mizubayashi, intitulé Suite inoubliable et paru chez Gallimard en 2023. Vous écoutez un extrait du livre audio lu par Constance Dolé, paru dans la collection Écoutez lire.

  • Suite Inoubliable, d’Akira Mizubayashi

    Je m'appelle Hortense Schmitt, j'ai 36 ans, je suis luthière. J'ai mon atelier dans le quartier de l'École nationale de musique à Tokyo. Mais en raison de l'intensification des bombardements dans la région de la capitale nippone, Je me suis réfugiée sur le conseil de Ken Mizutani, dans ce hameau de Shinano-Oiwake, qui appartient à la commune de Karuizawa, où un nombre assez considérable d'Occidentaux vivent parqués, si j'ose dire, sous l'ordre des autorités gouvernementales. La proximité de cette communauté d'étrangers est un point positif pour moi, car je désire avoir des informations qui ne viennent pas du quartier général impérial. Mais ce qui m'a décidé à m'éloigner de Tokyo pour une durée indéterminée, en acceptant l'aimable proposition de Ken, c'est le désastre inqualifiable du 10 mars, occasionné par les raids aériens américains. J'y ai échappé miraculeusement. Mon atelier aussi. Les Américains ont-ils eu la sagesse d'épargner le secteur du Hainaut, où se concentrent musées et écoles ? Je loue ici, moyennant un loyer dérisoire symbolique, une vieille baraque dont la plus grande pièce fait office d'atelier. Quelqu'un frappe à la porte. Je me demande qui c'est à cette heure tardive où le soleil se retire vite. Une seule lampe d'une faible lumière orange éclaire mon atelier. Quelques secondes après, j'entends C'est moi, Ken Je suis soulagée. J'ouvre la porte. Quelle surprise de te voir à cette heure-ci, tu ne m'avais pas dit que tu venais ? Ken a 25 ans, il est violoncelliste. Depuis qu'il est rentré de France à l'automne 1939, il me confie son instrument chaque fois qu'il a une inquiétude à son sujet. Son professeur Saito et ses camarades en font autant. C'est parce que certainement j'ai gagné leur confiance à force de travailler sérieusement, toujours à leur écoute, mobilisant toutes les techniques que je maîtrise. Je viens te voir pour quelque chose d'important, me dit-il d'une voix un peu tremblante. Entre. Tu transpires. Tu es venu à pied avec ton gaufrileur ? Il a marché environ une heure, son instrument sur le dos, pour venir de chez ses parents. Je lui demande s'il veut partager mon dîner. Il me répond honteusement. Non, excuse-moi, je suis bête, je n'ai pas pensé que c'était l'heure du repas. Tu n'as pas encore mangé ? Puisque je vais manger, tu ne veux pas m'accompagner ? Il hoche la tête d'un air embarrassé. J'improvise ainsi un petit repas pour nous deux avec des œufs, quelques légumes et de minces tranches de jambon qu'un journaliste français m'a donné ce matin. Nous sommes maintenant assis l'un en face de l'autre autour d'une table ronde, chacun dans un fauteuil dont le tissu est troué par endroit. Je viens d'allumer une lampe de bureau posée sur mon établi. Une grande et épaisse planche de pain posée sur deux petits meubles de même hauteur. Elle éclaire nos visages. Un silence énigmatique, un peu pesant, règne dans mon atelier. Ni moi, ni lui n'osons le rompre. Je suis perplexe devant l'étrange nouveauté de la situation. Je suis seule avec Ken, à sept heures de la nuit, dans mon atelier. Qu'est-ce qui se passe ? Enfin, je me décide à ouvrir la bouche. Il n'y a pas grand-chose, mais bon appétit quand même, Ken. Il a la tête baissée. Il me remercie, lave la tête, me regarde une fraction de seconde. Intrigué, je ne quitte pas des yeux le visiteur du soir. Il soupire profondément, puis commence à parler d'une voix toujours tremblante, comme s'il avouait une faute. En fait... Je suis venue te dire au revoir. Je dois aller au régiment. J'ai reçu le fatidique petit papier rouge d'incorporation. Je tombe des nues parce que d'une part il ne m'avait jamais dit qu'une telle possibilité existait, et que d'autre part je croyais que les étudiants comme lui bénéficiaient d'un traitement préférentiel. Tu le sais depuis quand ? Depuis quinze jours.

  • Marjolaine

    Il est temps d'atterrir. Merci d'avoir exploré le Japon avec nous. L'habillage sonore est signé Hélène Biziot, la réalisation et les interviews Marjolaine Corr. Vous avez pu entendre des extraits de l'émission Un train pas comme les autres diffusée sur France Télévisions, du film Pogneaux sur la falaise signé Miyazaki, et en dernière partie, un extrait du quintet pour cordes numéro 2 d'Ernst Noman. Un podcast créé sur une idée originale des éditions Voyages Gallimard. Retrouvez-nous sur toutes les plateformes et n'hésitez pas à nous laisser des étoiles si ce contenu vous a plu. A bientôt et bon voyage !

Chapters

  • Rencontre avec Aimie Eliot

    01:25

  • Gastronomie japonaise avec Chihiro Masui

    11:30

  • Suite inoubliable d'Akira Mizubayashi, extrait

    24:50

Description

S’envoler au bout du monde et s’immerger dans une culture à la fois ancestrale et futuriste… Les gratte-ciel, la pop culture, l’univers kawaii mais aussi, les samouraïs, la cérémonie du thé, les jardins et les temples, c’est un curieux et fascinant mélange que nous offre le Japon.

 

Avant votre départ, laissez-vous guider par nos deux invitées passionnées. En première partie, Aimie Eliot, autrice des guides Coups de cœur Japon et En Train au Japon aux Éditions Voyages Gallimard nous donne quelques clés pour cerner les particularités de la culture nippone. De Tokyo, où elle réside, elle nous livre ses coups de cœur : participer à un atelier culinaire pour maîtriser les sobas, se lever de bonne heure pour se rendre au sanctuaire shinto de Meiji, flâner parmi les authentiques maisons de bois de Tomonoura, petit village de pêcheurs qui a inspiré aux studios Ghibli, le film d’animation Ponyo sur la falaise ou encore prendre le train pour explorer tous les trésors de l’archipel.

 

On pense connaître la gastronomie japonaise par les bribes qui viennent jusqu’à nous, les ramen, les sushis, les yakitoris, mais est-ce vraiment ça, la cuisine japonaise ? En seconde partie, Chihiro Masui, journaliste culinaire japonaise vivant à Paris nous guidera dans les méandres des traditions culinaires de son archipel avec évidemment plein de conseils à la clé. Et pour accompagner vos repas, elle vous dira tout sur le saké, le thé, le whisky japonais ou le shochu.


Réalisation et interviews Marjolaine Koch. Habillage sonore Hélène Bizieau.

 

Enfin, la dernière partie de ce podcast « voyage » nous plongera dans le Japon de la Seconde Guerre mondiale avec la lecture d’un extrait du roman Suite Inoubliable d’Akira Mizubayashi, paru dans la collection Écoutez Lire aux Éditions Gallimard.


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Marjolaine

    Parlez-moi d'ailleurs, un podcast Voyage Gallimard. Bienvenue. Aujourd'hui, laissez-vous raconter le Japon par celles et ceux qui le vivent au quotidien. S'envoler au bout du monde et s'immerger dans une culture à la fois ancestrale et futuriste, les gratte-ciels, la pop-culture, l'univers kawaii, mais aussi... Les samouraïs, la cérémonie du thé, les jardins et les temples, c'est un curieux et fascinant mélange que nous offre le Japon. Avant votre départ, écoutez les recommandations de nos deux invités. En première partie, Aimie Eliot, autrice du guide Coup de cœur Japon aux éditions Voyage Gallimard, nous donne quelques clés pour cerner les particularités de la culture nippone. Et puis, en seconde partie, Chihiro Masui, journaliste culinaire japonaise vivant à Paris, nous guidera dans les méandres de la cuisine de son archipel, avec, évidemment, quelques recommandations. Enfin, la dernière partie de ce podcast nous plongera dans le Japon de la Seconde Guerre mondiale, avec la lecture d'un extrait du roman, suite inoubliable, d'Akira Mizubayashi. Préparez-vous à entrer dans une autre dimension. Tokyo, c'est 14 millions d'habitants, Intramuros, 40 millions avec son agglomération. Une ville verticale en son centre qui vous engloutit et vous propulse dans un univers pop et traditionnel. Aimie Eliott a choisi d'y vivre il y a 4 ans. Elle a notamment travaillé sur le guide Coup de cœur Japon Mais elle a aussi écrit En train au Japon, une trentaine d'itinéraires pour voyager autrement deux ouvrages publiés aux éditions Gallimard. Aimie, bonjour.

  • Aimie Eliot

    Bonjour.

  • Marjolaine

    Tu es au Japon depuis 4 ans. Alors toi-même, la première fois que tu as mis les pieds dans ce pays, à l'aéroport, qu'est-ce qui t'a le plus surpris ?

  • Aimie Eliot

    Je crois que c'est la propreté des lieux. Au Japon, c'est très important. La propreté, c'est lié à l'héritage de Shinto. On fait très attention à ce que les lieux publics soient immaculés. Et c'est vrai que ça a été une grande surprise. Ensuite, bien sûr, il y a le gigantisme de Tokyo. Lorsqu'on navigue dans la gare de Shinjuku, la gare la plus passante du monde, c'est frappant. Lorsqu'on prend la ligne aérienne à Odaiba et qu'on survole la baie avec tous ces gratte-ciels, ça semble surréel. Et malgré tout, on ressent aussi un grand calme. Je trouve que ce contraste est toujours très intéressant, à la fois dans la rue, dans le train, dans les gares. On est dans la plus grande ville du monde, là je parle de Tokyo, et pourtant il y a une espèce de fluidité, une espèce d'harmonie, parce qu'au Japon finalement on accorde beaucoup d'importance au vivre ensemble, il y a une espèce de respect du collectif. On fait parfois passer avant l'individu, donc c'est ce qui fait qu'on va parler à voix basse dans les trains, faire attention à ne pas se bouculer. C'est à là qu'avant de monter dans un wagon, alors bien sûr, il y a des exceptions, c'est sûr, durant les heures de pointe, dans le train ou le métro japonais, toujours des coups de poudre. Mais ce calme et cette espèce d'organisation comme ça, je trouve que c'est très marrant.

  • Marjolaine

    Et justement, pour connaître cette culture, est-ce que tu aurais un conseil à nous donner de lieux à découvrir, que ce soit un quartier, un musée ou même une expérience qui nous permettrait de mieux l'appréhender ?

  • Aimie Eliot

    Il y en a des tonnes. On parle d'expérience, par exemple. On peut, par exemple, réserver un atelier pour apprendre à confectionner des soba et s'imprimer de la grande culture gastronomique japonaise.

  • Marjolaine

    Alors, les soba, un atelier culinaire de nouilles japonaises, donc.

  • Aimie Eliot

    Oui, tout à fait. J'aime bien aussi les ateliers qui permettent de teindre, par exemple, un titu à l'indigo. On expérimente une tradition, un savoir-faire. Et puis, c'est souvent l'occasion de parler avec les artisans. C'est souvent un moment d'échange. En termes de lieu, je pense à Tokyo parce que c'est ma ville, on peut se lever de très bonne heure pour se rendre au sanctuaire Shinto de Meiji. Le temple ouvre lorsque le soleil se lève. Et à cette heure-ci, il n'y a plus de touristes et on croise beaucoup plus d'habitants qui s'y rendent pour prier, mais aussi pour faire leur jogging, pour se promener, pour prendre un bol d'air. Et ça je trouve que c'est intéressant de voir que ces lieux-là, qu'on voit en tant que touristes comme des grands lieux touristiques, sont aussi des lieux très vivants.

  • Marjolaine

    Une fois qu'on sort de Tokyo, est-ce que tu aurais un circuit à nous proposer ?

  • Aimie Eliot

    Oui, alors il y en a énormément, car le train quadrille vraiment très finement l'archipel. J'en ai imaginé plusieurs, près d'une trentaine dans mon livre Entrant au Japon. Shinkansen ! Il est très mythique. Il a quand même de la gueule. Ça, vous voyez, pour quelqu'un qui aime le train, c'est vraiment le train culte, parce que l'air de rien, c'est le premier train à grande vitesse du monde, bien avant le TGV, puisque la première ligne rapide ici a été inaugurée au départ de Tokyo en 1964. Je crois que l'un de mes préférés, c'est celui qui parle de Kyoto, et qui... permet de pérégriner autour de l'ex-capitale. J'aime bien cette région parce qu'elle permet de découvrir d'autres facettes des alentours et de s'échapper du tumulte de Kyoto qui peut parfois être un peu étouffant. C'est une ville qui est en proie au surtourisme depuis plusieurs années et sa région, en fait, elle vaut vraiment le détour. Donc on peut prendre le train depuis Kyoto jusqu'à Amano Ashidate, qui se trouve au nord. Et en fait, cette ville-là, elle borde une baie. Elle est très connue pour abriter l'une des trois plus belles vues du Japon, selon un classement ancien qui date de l'époque Heian, autour du 8e siècle. En fait, cet endroit présente une particularité géographique assez étonnante. Lorsqu'on monte en haut d'un petit vallon, par un funiculaire très mignon, qui sont des petites chaises qui nous montent jusqu'à la colline, on aperçoit une étonnante bande de sable qui serpente entre la mer intérieure et la baie de Miyazu. Cette bande de sable qui résiste aux différents changements climatiques, il a été très représenté par les artistes et loué par les poètes. C'est vraiment un paysage très atypique. Une fois qu'on a admiré ce panorama, on peut redescendre et arpenter ce banc de sable qui est planté de grands pins. On peut l'arpenter à pied ou à vélo et ces grands pins sont assez majestueux, ont presque l'air vivants. Ensuite, on peut prendre un bus lorsqu'on a rejoint l'autre rive, qui va allonger d'abord la côte de la péninsule de Dangot, qui est encore un peu plus au nord. Et puis là, on arrive dans le village de Hine. Ce petit village, il est pensé comme un des plus beaux du Japon. Ceux qui ont vu le film des studios Ghibli, Ponyu sur la falaise, m'ont fait un petit peu penser à l'ambiance du film. Un poisson rouge !

  • Chihiro Masui

    Bizarre cette vague !

  • Aimie Eliot

    Une ville de pêcheurs qui comporte des architectures assez uniques. On y trouve des FUNAYA, c'est des maisons hangars de deux étages, où le rez-de-chaussée est ouvert sur les flots. C'est à cet endroit qu'on garait les bateaux. Aujourd'hui, des pêcheurs vivent encore dans ces funayas, mais elles ont aussi été transformées en cafés, en restaurants, en chambres d'hôtes. C'est aussi un très bon moyen de les visiter pour comprendre ces architectures-là assez uniques et se régaler aussi de la pêche du jour parce qu'il y a du très bon placement sur ces côtes.

  • Marjolaine

    Oui, on comprend qu'au Japon, on peut vraiment passer de la mégapole aux grands espaces et profiter d'un éventail d'ambiance du coup. Et tu nous as parlé de trains, de bus aussi. Quel mode de déplacement tu nous recommandes pour visiter le Japon ?

  • Aimie Eliot

    Alors le train, c'est un moyen de transport idéal au Japon, très ponctuel, très propre, comme je disais, qui cadre très finement l'archipel. On connaît le Shinkansen, le train à grande vitesse, mais il y a aussi un très dense réseau de petits trains locaux, très charmants, qui sont plus lents bien sûr, mais qui permettent de rejoindre des endroits qui sont peu touristiques et souvent qui valent au beaucoup. Et puis à Kyoto, je trouve que le vélo, c'est un mode de transport idéal. Et je dirais que le vélo électrique, c'est encore mieux, parce que la ville, elle s'est développée dans une cuvette, mais les temples se trouvent dans les hauteurs. Et là, les chemins sont un petit peu plus ponctus.

  • Marjolaine

    D'accord. Et est-ce que tu dirais que le Japon est un pays accueillant pour les enfants ?

  • Aimie Eliot

    Oui, oui, oui. C'est un pays dans lequel on voyage assez facilement avec des enfants. parce que c'est un pays très pratique, c'est aussi un pays très stimulant pour les enfants, la population est très accueillante, c'est un pays qui a son lot de mascottes, très colorées, on trouve aussi des salles de jeu un peu partout. Pour moi, c'est un pays très agréable pour un voyage en famille.

  • Marjolaine

    Et quels sont les incontournables à faire en famille alors ?

  • Aimie Eliot

    Je dirais à Tokyo, le Musée Team Lab, une collectif d'artistes numériques japonais qui a ouvert à Zabudai East, au rez-de-chaussée de la plus haute tour résidentielle du Japon. Ce sont des œuvres très interactives. Et pour le coup, je pense que c'est beaucoup mieux d'aller à Disneyland. Pour les amateurs des... des films, des studios de bibliothèque, j'en parlais tout à l'heure, il y a le musée des studios de bibliothèque, donc il y a le musée historique qui se trouve dans l'ouest de Tokyo, à Nisaka, et puis le nouveau parc près d'Osaka, et puis il y a bien sûr le parc Nintendo, et puis le tout nouveau musée Nintendo qui est ouvert près de Kyoto, à Uji. Et puis on peut aussi acheter un de ces jolis carnets dans les tapeteries. qu'on remplit au fil de son séjour, des tampons, des villes ou des gares qu'on peut trouver dans les stations ou dans les offices du tourisme. Ou alors dessiner, si on aime dessiner, dessiner les belles plaques d'égout qu'on trouve aussi dans les villes et qui sont toujours très jolies. Ça fait peut-être partie des souvenirs que je préfère.

  • Marjolaine

    Merci beaucoup, Aimie.

  • Aimie Eliot

    Merci.

  • Marjolaine

    On pense connaître la cuisine du Japon par les bribes qui viennent jusqu'à nous, les nouilles soba, les sushis, les yakitori. Mais dans le fond, est-ce que c'est vraiment ça, la cuisine japonaise ? C'est la question que j'ai posée à Chihiro Masui, fine gastronome de son pays qui aime partager ses découvertes à travers sa newsletter française, The Spoon of Paris. Déjà, quel est le rythme des repas, tout simplement, quand on arrive au Japon ?

  • Chihiro Masui

    Le Japon, c'est un peu comme dans l'Est de l'Asie. les horaires des repas sont beaucoup beaucoup moins rigides et codifiés qu'en France. Par exemple, en France, si à 15h vous voulez déjeuner, c'est un peu compliqué hormis le fast-food et le café du coin. Au Japon, évidemment, si vous allez dans un restaurant gastronomique, ça va être aux horaires des repas. Mais sinon, il y a quand même pas mal d'établissements qui sont ouverts, pas à toute heure, mais enfin qui sont ouverts, notamment l'après-midi. Alors, sinon, bah... Le petit déjeuner, c'est l'heure du petit déjeuner normal. Le déjeuner est à midi. Le dîner, pour ceux qui dînent tôt, ça peut être à 17h. Pour ceux qui dînent tard, c'est 19h. 20h, c'est très tard. Donc, c'est beaucoup plus tôt qu'en France.

  • Marjolaine

    Et alors, on parle du petit déjeuner. Si on veut prendre un petit déjeuner classique japonais, qu'est-ce qu'on a sur sa table ?

  • Chihiro Masui

    Alors, si vous êtes dans un hôtel... Il y a de fortes chances que vous auriez un buffet avec tout le petit déjeuner occidental. Et de l'autre côté, vous aurez aussi le petit déjeuner classique, traditionnel japonais, riz, soupe, miso. Souvent des tsukimono, qui sont des légumes légèrement fermentés qui accompagnent le riz. Il y aura sans doute un oeuf, donc ça va être le tamagoyaki, qui est l'omelette japonaise. C'est coupé en tranches, donc vous aurez des rectangles jaunes en tranches. Très, très, très souvent, un bout de poisson grillé, assez simplement au sel.

  • Marjolaine

    Et comment vous décrivez les bases de la cuisine japonaise ?

  • Chihiro Masui

    Ce qui surprend souvent les non-japonais quand ils viennent au Japon, c'est l'immense variété de ce qu'on mange au Japon quotidiennement. C'est-à-dire que, par exemple, vous allez dans un restaurant tout à fait moyen, très abordable. Vous allez avoir autant des spaghettis que des soba, des nouilles soba. que du riz, que du poulet, que du poisson, enfin, vous pouvez avoir un gratin, c'est très très très commun au Japon, de la pizza. Et en même temps, vous allez avoir par exemple du tonkatsu, c'est du porc pané, du curry. Le curry est, je crois, le plat le plus consommé au Japon. Donc c'est le curry japonais qui n'a rien à voir avec le curry indien, qui est arrivé au Japon via l'Angleterre à la fin du 19e siècle, et c'est vraiment un plat japonais. Donc le curry se mange avec du riz blanc.

  • Marjolaine

    En quoi il est différent de l'indien ?

  • Chihiro Masui

    D'abord, c'est fait à partir d'un roux. Ça veut dire que c'est épaissi à la farine. Donc, la consistance à la fin, c'est une sauce qu'on verse sur le riz, mais qui est épaisse, vraiment. Ensuite, dedans, il va y avoir des bouts de viande. En gros, c'est bœuf, parfois porc, beaucoup poulet et ça peut être crevette. Voilà, c'est en gros les quatre ingrédients qu'il peut y avoir dans un curry, séparément. Avec pommes de terre, carottes. Ça, c'est le classique. C'est... En général, pas très épicé, pas très piquant, léger.

  • Marjolaine

    Alors, quels sont les plats que vous recommandez de tester et qu'on ne connaît pas forcément dans les restaurants japonais ou dans la cuisine japonaise qui est venue jusqu'en France ?

  • Chihiro Masui

    Ce qui est sympa quand même, c'est d'aller dans un vrai yakitori, les brochettes yakitori. Tout le monde les connaît, mais en fait, ce n'est pas du tout ça. Ça ressemble, c'est-à-dire que c'est des bâtons sur lesquels on a mis la viande qu'on a fait griller. En fait, la caractéristique japonaise, c'est que chaque restaurant a sa spécialité. Il y a une raison historique à ça. Donc le restaurant de Yakitori ne fera que ça. Vous ne trouverez pas un restaurant où vous aurez du Yakitori, des lamens et des sushis, ça n'existera pas. Donc, le restaurant de Yakitori, d'abord, ça peut être impressionnant parce que ça gueule dans tous les sens. Les gens parlent hyper fort. Et comme tout le monde parle fort, tout le monde parlera encore plus fort. C'est comme ça. Donc quand on parle du japonais qui est très calme et réservé, là non, c'est tout le contraire. Souvent, on s'assoit à un comptoir où on va commander des brochettes une par une directement au cuisinier qui est de l'autre côté du comptoir. Vous commandez par exemple, gésier, vous avez une brochette de gésier. Coeur, vous avez une brochette de coeur. Foie, vous avez une brochette de foie. Peau, vous avez une brochette de peau. Cartilage, vous avez une brochette de cartilage, etc. Vous pouvez évidemment avoir une brochette de neguima, poulet et poireau alterné. Mais en général, c'est vraiment une partie du poulet par brochette. Donc ça, c'est grillé sur du charbon régulier. Et c'est soit trempé dans une sauce sucrée salée à base de sauce soja, sake, mirin, une sauce sucrée salée ou au sel. Ça, c'est Ausha du client en général. Alors évidemment, mon mari qui est français, lui, l'idée de manger toute une brochette de cartilage, il me dit mais pourquoi faire ? Ça ne se mange pas. Ben si, c'est très bon. Nous, on pense que c'est très bon pour les articulations. Donc ça, c'est le yakitori et ce sont des restaurants que j'aime beaucoup parce que c'est très populaire, c'est très abordable, c'est joyeux. C'est un aspect du Japon qui est quand même sympathique et qu'il n'y a pas en France. Ensuite, évidemment, il faut faire un sushi. Le sushi, c'est un peu pareil. C'est tellement galvaudé maintenant. Le sushi est devenu un méplanétaire. Mais il faut savoir que le sushi tel qu'on le conçoit à l'étranger, c'est-à-dire la boulette de riz avec la tranche de poisson crue dessus ou le maki, ça, c'est un type de sushi très, très, très spécifique. En fait, au Japon, quand on parle de sushi, on parle de n'importe quel plat qui est fait avec du riz vinaigré. Donc, selon la région, etc., le style de sushi change énormément. Il y a le sushi tournant qui est vraiment extrêmement abordable en termes de prix. Et c'est assez fin parce que ça permet de choisir ce qu'on veut. Et puis de l'autre côté, il y a les sushis très très très haut de gamme. Vous allez payer 300 euros. Évidemment, ce n'est pas du tout la même qualité, ce n'est pas du tout la même ambiance. Le sushi à très haut de gamme, c'est 8 couverts au comptoir avec le mètre qui vous sert directement. Donc vous avez tout le spectacle, que ce soit la découpe du poisson. La préparation du sushi, à ce niveau-là, c'est quand même un beau spectacle.

  • Marjolaine

    Alors maintenant, du côté des boissons chaudes, est-ce qu'il y a des boissons qu'on ne connaît pas ici et qui seraient à tester ?

  • Chihiro Masui

    Déjà, il y a du café partout. Moi, je ne bois pas de café, alors je ne peux pas juger, mais mon mari qui est français et qui boit du café me dit que le café au Japon est vraiment imbuvable. C'est du café américain, ça va allonger. Qui paraît-il, il a quand même la caractéristique d'être généralement très amer. Sinon... Évidemment, c'est un pays de thé. Le thé qu'on boit le plus, c'est le sencha, qui est un thé vert, non fermenté. Sinon, ce que les Français aiment parmi les thés japonais, c'est le gemmaicha. Et le gemmaicha, c'est du thé vert dans lequel on a mis du riz soufflé. Riz soufflé comme du popcorn. Ça donne un côté un peu torréfié. Sachant que pour nous, c'est le thé le plus bas de gamme qu'on ne sert jamais à l'inviter. Bizarrement, c'est celui que les Français semblent plébisciter. Sinon, dans les thés haut de gamme, il y a le gyokuro. Le gyokuro, c'est un thé vert qu'on recouvre pendant les trois dernières semaines avant la récolte pour qu'il n'y ait pas de lumière. Et ça donne des petites feuilles extrêmement tendres. Le gyokuro, en fait, est un thé qui est extrêmement riche en glutamate. mais là c'est la forme donc naturelle de glutamate et ça a vraiment un goût de glutamate qui n'est pas à la portée tout le monde c'est quand même un goût assez spécial c'est pas un thé désaltérant du tout c'est un thé un tout petit peu sur le peu qu'on voit en toute petite quantité Et sinon, évidemment, il y a le matcha. Le matcha n'est pas un thé qu'on sert avec un repas. Ce n'est absolument pas désaltérant. C'est très, très chargé en théine. Et ça se boit vraiment dans le cadre de la cérémonie du thé. Ou, évidemment, vous pouvez le boire comme ça, avec un petit gâteau pour contrebalancer le côté un peu fort. C'est un thé qui est très fort. Il y a... notamment à Kyoto, des salons de thé qui sont très sympas, avec un jardin japonais, où on vous sert un matcha avec un gâteau, un wagashi, un gâteau japonais. Dans ce cadre-là, c'est bien. Sinon, on n'en voit pas beaucoup.

  • Marjolaine

    Alors, du côté des alcools maintenant, est-ce que vous avez des recommandations ?

  • Chihiro Masui

    Il faut savoir quand même que le Japon est un pays... Enfin, nous sommes un peuple assez psychovégide. Ce n'est pas un scoop. Et donc, si vous allez dans un restaurant japonais, Sushi, Kaiseki, etc. Vous aurez un ou plusieurs sake, mais pas beaucoup. Jamais autant qu'une liste de vin dans un restaurant hollandais en France. Traditionnellement, dans un sushi, il y avait un seul sake. Celui que le patron choisissait, c'est tout. Donc, vous aurez quelques sake. Et sinon, si vous allez dans des izakaya, izakaya veut dire le lieu où on boit du vin. C'est ce qu'on appelle aujourd'hui en France, bar à tapas. On vous sert des petits plats guignotés, mais pour accompagner le saké. Là, vous aurez une sélection de saké, une sélection de Ausha et une sélection de bière, des whisky peut-être, et quelques vins. Le Ausha, c'est un alcool fait à partir de patates douces. Ça titre à 25°C, c'est plus fort que le saké. Pendant longtemps. C'était un peu mal vu parce que c'était un alcool pas cher, vulgaire, etc. Là, c'est en train de revenir un peu à la mode. Sinon, il y a des vins japonais. Honnêtement, en venant de France, je ne vois pas trop l'intérêt. Il y en a qui sont très bons. Alors, ceux qui sont très bons sont rarissimes, dans le sens où ce sont de toutes petites productions et c'est impossible d'en avoir. Alors, la boisson type du japonais, c'est la bière. Quand vous entrez dans un restaurant, la première chose qu'on vous demande, c'est qu'est-ce que vous buvez. Typiquement, c'est bière. Et après, ça va être Mizuhari, qui veut dire du whisky à l'eau. Ça, c'est le grand classique japonais. Ah oui, puis alors, depuis quelques temps, c'est récent, le highball est à la mode. Donc, il y a partout des canettes de highball. C'est du whisky avec de l'eau gazeuse, je crois. Ça se vend comme la bière.

  • Marjolaine

    Donc, un mélange d'eau gazeuse et de whisky en canette.

  • Chihiro Masui

    C'est parfois parfumé. Je ne sais pas, citron, yuzu, enfin des choses, mais en gros c'est ça.

  • Marjolaine

    Et alors, à l'heure de quitter le pays, qu'est-ce qu'il faut mettre dans sa valise côté alimentaire ? Qu'est-ce qu'on rapporte ?

  • Chihiro Masui

    Ce que les touristes ramènent beaucoup du Japon maintenant, ce sont les couteaux japonais. Les couteaux japonais ont une très juste réputation dans le monde. À Tokyo, il y a un quartier qui s'appelle Kababashi, qui est le quartier des fournitures de cuisine. Et là, les boutiques de couteaux sont assaillies par des non-japonais qui veulent en ramener. Et sinon, la fille, par exemple, elle ramène des tas de merdouilles de type Kit Kat au matcha, mais ça va être des pokis à la fraise. Et les pokis, c'est un peu comme les mikados, les petits troncs là. Les pokis à la fraise, mais ce qu'il n'y a pas ici, c'est qu'il y a des petits bouts de fraises dessus, collés dessus, elle adore. Des gelées de konjac au raisin. Ça fait des mini-mini gobelets en plastique, fermés évidemment, en forme de cœur. Ça, tout le monde adore. Les jeunes rapportent quand même des choses un peu moins austères que ce que moi je choisis. Et il y a... énormément, il y a une telle variété de choses comme ça qui sont mignonnes, qui sont fun, qui sont rigolos, c'est des confiseries, on va dire, on s'en serait très là.

  • Marjolaine

    Ce podcast se termine toujours par une plongée dans un roman. Cette fois-ci, c'est l'histoire de Pamina, une jeune luthière dont la grand-mère japonaise exerçait le même métier pendant la Seconde Guerre mondiale. Son histoire la rattrape lorsque, travaillant dans un atelier parisien, elle se voit confier un violoncelle dans lequel elle découvre, dissimulée dans un tasseau, une lettre. Celle d'un prodige contraint d'abandonner son art pour rejoindre les troupes japonaises au cœur des conflits des années 40. Ce roman, c'est celui d'Akira Mizubayashi, intitulé Suite inoubliable et paru chez Gallimard en 2023. Vous écoutez un extrait du livre audio lu par Constance Dolé, paru dans la collection Écoutez lire.

  • Suite Inoubliable, d’Akira Mizubayashi

    Je m'appelle Hortense Schmitt, j'ai 36 ans, je suis luthière. J'ai mon atelier dans le quartier de l'École nationale de musique à Tokyo. Mais en raison de l'intensification des bombardements dans la région de la capitale nippone, Je me suis réfugiée sur le conseil de Ken Mizutani, dans ce hameau de Shinano-Oiwake, qui appartient à la commune de Karuizawa, où un nombre assez considérable d'Occidentaux vivent parqués, si j'ose dire, sous l'ordre des autorités gouvernementales. La proximité de cette communauté d'étrangers est un point positif pour moi, car je désire avoir des informations qui ne viennent pas du quartier général impérial. Mais ce qui m'a décidé à m'éloigner de Tokyo pour une durée indéterminée, en acceptant l'aimable proposition de Ken, c'est le désastre inqualifiable du 10 mars, occasionné par les raids aériens américains. J'y ai échappé miraculeusement. Mon atelier aussi. Les Américains ont-ils eu la sagesse d'épargner le secteur du Hainaut, où se concentrent musées et écoles ? Je loue ici, moyennant un loyer dérisoire symbolique, une vieille baraque dont la plus grande pièce fait office d'atelier. Quelqu'un frappe à la porte. Je me demande qui c'est à cette heure tardive où le soleil se retire vite. Une seule lampe d'une faible lumière orange éclaire mon atelier. Quelques secondes après, j'entends C'est moi, Ken Je suis soulagée. J'ouvre la porte. Quelle surprise de te voir à cette heure-ci, tu ne m'avais pas dit que tu venais ? Ken a 25 ans, il est violoncelliste. Depuis qu'il est rentré de France à l'automne 1939, il me confie son instrument chaque fois qu'il a une inquiétude à son sujet. Son professeur Saito et ses camarades en font autant. C'est parce que certainement j'ai gagné leur confiance à force de travailler sérieusement, toujours à leur écoute, mobilisant toutes les techniques que je maîtrise. Je viens te voir pour quelque chose d'important, me dit-il d'une voix un peu tremblante. Entre. Tu transpires. Tu es venu à pied avec ton gaufrileur ? Il a marché environ une heure, son instrument sur le dos, pour venir de chez ses parents. Je lui demande s'il veut partager mon dîner. Il me répond honteusement. Non, excuse-moi, je suis bête, je n'ai pas pensé que c'était l'heure du repas. Tu n'as pas encore mangé ? Puisque je vais manger, tu ne veux pas m'accompagner ? Il hoche la tête d'un air embarrassé. J'improvise ainsi un petit repas pour nous deux avec des œufs, quelques légumes et de minces tranches de jambon qu'un journaliste français m'a donné ce matin. Nous sommes maintenant assis l'un en face de l'autre autour d'une table ronde, chacun dans un fauteuil dont le tissu est troué par endroit. Je viens d'allumer une lampe de bureau posée sur mon établi. Une grande et épaisse planche de pain posée sur deux petits meubles de même hauteur. Elle éclaire nos visages. Un silence énigmatique, un peu pesant, règne dans mon atelier. Ni moi, ni lui n'osons le rompre. Je suis perplexe devant l'étrange nouveauté de la situation. Je suis seule avec Ken, à sept heures de la nuit, dans mon atelier. Qu'est-ce qui se passe ? Enfin, je me décide à ouvrir la bouche. Il n'y a pas grand-chose, mais bon appétit quand même, Ken. Il a la tête baissée. Il me remercie, lave la tête, me regarde une fraction de seconde. Intrigué, je ne quitte pas des yeux le visiteur du soir. Il soupire profondément, puis commence à parler d'une voix toujours tremblante, comme s'il avouait une faute. En fait... Je suis venue te dire au revoir. Je dois aller au régiment. J'ai reçu le fatidique petit papier rouge d'incorporation. Je tombe des nues parce que d'une part il ne m'avait jamais dit qu'une telle possibilité existait, et que d'autre part je croyais que les étudiants comme lui bénéficiaient d'un traitement préférentiel. Tu le sais depuis quand ? Depuis quinze jours.

  • Marjolaine

    Il est temps d'atterrir. Merci d'avoir exploré le Japon avec nous. L'habillage sonore est signé Hélène Biziot, la réalisation et les interviews Marjolaine Corr. Vous avez pu entendre des extraits de l'émission Un train pas comme les autres diffusée sur France Télévisions, du film Pogneaux sur la falaise signé Miyazaki, et en dernière partie, un extrait du quintet pour cordes numéro 2 d'Ernst Noman. Un podcast créé sur une idée originale des éditions Voyages Gallimard. Retrouvez-nous sur toutes les plateformes et n'hésitez pas à nous laisser des étoiles si ce contenu vous a plu. A bientôt et bon voyage !

Chapters

  • Rencontre avec Aimie Eliot

    01:25

  • Gastronomie japonaise avec Chihiro Masui

    11:30

  • Suite inoubliable d'Akira Mizubayashi, extrait

    24:50

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