- Speaker #0
Céder ou transmettre son entreprise est un moment important dans la vie d'un dirigeant. Il pose des questions de gestion, de fiscalité, de transmission familiale et il demande de s'y préparer à l'avance. Parmi les outils les plus importants pour accompagner cette étape, le pacte du treil, un dispositif souvent cité, parfois mal connu, qui peut pourtant offrir des avantages fiscaux significatifs. à condition d'être bien utilisés. Aujourd'hui, nous allons comprendre à quoi sert ce pacte, dans quel cas il est vraiment utile et comment l'intégrer dans une stratégie patrimoniale plus large. Pour en parler, j'ai le plaisir d'accueillir Bertrand Cosson, expert en ingénierie patrimoniale. Bienvenue dans « À l'écoute des marchés » , un podcast de la Banque Transatlantique. Et bonjour Bertrand, bienvenue.
- Speaker #1
Bonjour Marc-Antoine.
- Speaker #0
Alors Bertrand, première question, pourquoi la transmission d'entreprise est-elle une étape aussi sensible dans la vie patrimoniale d'un dirigeant ?
- Speaker #1
C'est une étape vraiment primordiale parce que souvent l'entreprise est l'élément principal, l'élément clé du dirigeant, son principal élément patrimonial. Donc soit parce qu'il l'a aussi créé, donc il y a aussi un attachement affectif, il lui a passé beaucoup de temps, beaucoup d'énergie, beaucoup d'argent. ... aussi parfois dans la création de son entreprise, ou même s'il en a hérité, il y a évidemment un héritage familial qui fait que c'est un élément clé de son patrimoine, d'où les questions de transmission.
- Speaker #0
Alors concrètement, qu'est-ce que c'est le pacte Dutreil ? Le pacte Dutreil qui a été mis en place en 2003 par le ministre Renaud Dutreil.
- Speaker #1
Le pacte Dutreil, comme son nom l'indique, c'est d'abord un pacte, c'est-à-dire un engagement de conservation de titres. Et moyennant cet engagement de conservation et un certain nombre d'autres conditions, on va avoir des avantages fiscaux. Le principal avantage fiscal du pacte du travail pour la transmission d'entreprise, c'est d'avoir un abattement de 75% sur la valeur de l'entreprise ou de la société qui est transmise. Et il n'y a pas de plafond. Donc plus l'entreprise a une grande valeur, plus l'avantage fiscal est important. Ça, c'est le premier avantage. Le deuxième avantage, c'est que si on fait une donation en pleine propriété avant les 70 ans du donateur, on a en plus une réduction de droit de 50%-60%. qui se cumulent justement avec l'abattement de 75%. Et si jamais on fait une donation en démembrement de propriété, c'est-à-dire on donne la nue propriété des titres et on se conserve l'usufruit, là aussi on a le droit à une décote liée à la valeur de l'usufruit. Et ça, ça se cumule aussi avec l'abattement de 75%.
- Speaker #0
Dans quel cas ce dispositif est-il plutôt le plus adapté ?
- Speaker #1
Le plus adapté, c'est en effet dans le cadre d'une transmission à titre gratuit. C'est soit pour préparer le cas échéant une succession, en disant que si jamais il arrive quelque chose aux dirigeants, on signe un pacte du trail qui permettra le cas échéant aux héritiers d'avoir les avantages fiscaux que je viens d'évoquer. Soit sinon, c'est plus souvent dans une dynamique de donation, c'est-à-dire qu'avant de faire une donation, on va signer un pacte du trail, on va ensuite faire la donation, et ensuite il y aura les engagements de conservation.
- Speaker #0
Alors j'imagine qu'il y a des conditions, à remplir pour en bénéficier ?
- Speaker #1
Comme il y a beaucoup d'avantages fiscaux, comme souvent en France, il y a beaucoup de conditions à respecter. Les principales conditions, c'est qu'il faut déjà au niveau de la société ou de l'entreprise avoir une activité économique. On ne peut pas avoir d'activité de gestion de patrimoine mobilier ou immobilier. On a eu beaucoup de polémiques à un moment sur la location meublée. On ne savait pas si la location meublée était éligible au pacte du travail. Aujourd'hui, on sait clairement que non. elle n'est pas éligible au pacte du travail. Donc première condition sur l'activité. Deuxième condition, c'est un engagement de conservation de titres. Quand on dit pacte du travail, c'est-à-dire qu'on va signer un pacte pour deux ans minimum de conservation des titres. Et ensuite, une fois qu'on aura fait la donation, à l'issue des deux ans d'engagement collectif, chaque donataire aura un engagement individuel de quatre ans. C'est pour ça qu'on parle souvent d'un délai global de six ans de conservation des titres. Et la troisième condition importante, c'est au niveau de la fonction de direction. Il faut que dans les signataires du pacte, il y ait un dirigeant qui exerce justement une fonction de direction pendant toute la première période de deux ans et puis pendant trois ans à l'issue de la donation.
- Speaker #0
Quelles erreurs, s'il y a, voyez-vous le plus souvent, Bertrand, dans la mise en œuvre de ce pacte du treil ?
- Speaker #1
Oui, comme c'est un dispositif relativement complexe, on peut facilement faire des erreurs. La principale erreur, c'est souvent sur la condition d'activité. On pense qu'on a une activité qui est éligible au pacte du travail et finalement, on ne l'a pas. Pourquoi ? Parce que la holding qu'on pense animatrice, finalement, elle n'est pas si animatrice que ça, ou en tout cas, on a du mal à le prouver. animatrice pendant toute la durée des six ans de pacte du trahi. Deuxième chose, c'est sur les attestations. On a un certain nombre de formalités à faire pour respecter justement les conditions et pouvoir prouver à l'administration qu'on respecte les conditions. Et si on oublie de faire des formalités, on peut là aussi avoir une remise en cause du pacte du trahi. Alors c'est vrai qu'elles ont été assouplies ces dernières années, mais il ne reste pas moins qu'il y a encore des formalités à faire. Et puis le troisième point, c'est sur la fonction de direction. Il y a notamment un piège dans lequel certains contribuables sont tombés. C'est que parfois, on peut avoir un pacte, ce qu'on appelle un pacte réputé acquis, ce qui évite d'avoir les deux ans d'engagement collectif. Et on va avoir directement les quatre ans d'engagement individuel. Dans le cadre de ce pacte réputé acquis, il faut forcément que les donataires aient une fonction de direction. Un des donataires doit avoir une fonction de direction. S'il n'en a pas... Ça remet en cause le pacte. C'est-à-dire que ce n'est pas que le donateur qui a la fonction de direction, il faut que le donateur ait une fonction de direction générale.
- Speaker #0
Est-ce qu'il y a eu des exemples de pactes non valables par exemple ?
- Speaker #1
Oui, on a beaucoup de contentieux fiscaux quasiment toutes les semaines ou au moins tous les mois. On a des jurisprudences sur le pacte du travail où l'administration fiscale va justement vérifier si les conditions du pacte du travail sont respectées et sinon... elle remettra en cause les avantages fiscaux. Donc en effet, les écueils, la holding finalement n'était pas animatrice, ou en tout cas le dirigeant n'a pas pu prouver qu'elle était animatrice, ou finalement il y a eu tellement de ventes de filiales que le côté animateur était finalement accessoire par rapport à de la gestion de patrimoine financier, donc là ça ne respectait plus les conditions.
- Speaker #0
Comment le pacte du trade peut-il s'intégrer au final dans une stratégie patrimoniale plus globale ?
- Speaker #1
Oui, ça doit s'intégrer en effet dans une stratégie patrimoniale globale, et notamment par exemple quand on a plusieurs enfants et un seul enfant qui est repreneur. Donc là, on va pouvoir utiliser le pacte du travail pour donner plus de titres à l'enfant repreneur, mais sans désavantager les autres. Donc là, il y a des mécanismes. On peut imaginer que l'enfant repreneur va avoir plus de titres et va devoir dédommager ses autres frères et sœurs par ce qu'on appelle une soult. Ça, c'est une première chose. Autre possibilité, s'il y a un patrimoine qui est quand même diversifié, c'est de dire on va plutôt diriger les titres vers l'enfant repreneur et on va en contrepartie donner aux autres enfants du patrimoine immobilier, de l'assurance vie ou un certain nombre d'autres biens pour conserver l'égalité en valeur tout en mettant quand même plus en avant celui qui va reprendre l'entreprise.
- Speaker #0
Dans les bonnes pratiques, justement, pour utiliser ce pacte du treillis au mieux, Est-ce que... Il faut tout mettre ou alors peut-être mettre juste une partie de son patrimoine ?
- Speaker #1
Oui, c'est une très bonne question. Il y a déjà quand même une quotité minimum imposée par la loi. C'est-à-dire que quand on est en présence de sociétés non cotées, il faut au moins que le pacte du trade soit sur 17% du capital financier, 34% des droits de vote. Donc ça, c'est déjà un minimum. Après, on peut aller jusqu'à 100%, bien sûr, des droits financiers et des droits de vote. Tout dépend un petit peu du... du volume qu'on veut faire au niveau de la donation. Si on veut donner l'intégralité de la société avec les avantages fiscaux, on aura intérêt à mettre 100% des titres. Mais on peut aussi se dire, je fais une première donation tout de suite et ensuite, pourquoi pas, je referai une autre donation, un autre pacte du trail plus tard. Mais c'est vrai que d'expérience, les dirigeants vont plutôt mettre une grande quantité quand même de titres dans le pacte du trail.
- Speaker #0
Le plus important, j'imagine, c'est de se faire... Bien accompagné sur ce type de pacte.
- Speaker #1
Tout à fait, c'est quand même un dispositif très intéressant, mais aussi très piégeux. Quand on voit en effet toutes les jurisprudences, tous les contentieux avec l'administration fiscale sur le pacte du TREI, il faut évidemment être très bien entouré, très bien conseillé, avec en effet en général un bon notaire, un bon expert comptable, pourquoi pas un bon avocat fiscaliste aussi en complément, et bien évidemment un banquier qui connaît. ce type de dispositif et qui a l'habitude justement de ce genre de transmission d'entreprise.
- Speaker #0
Il faut bien se faire accompagner aussi parce qu'il y a des évolutions dans ce pacte du trait, alors pas forcément tous les ans. Quelles évolutions principales et quel point de vigilance peut-être à avoir aujourd'hui ?
- Speaker #1
C'est vrai que c'est un dispositif dont on entend souvent parler en matière de futures modifications. Il existe depuis plus de 20 ans, il y a déjà eu beaucoup de modifications législatives. par le passé, souvent pour le rendre un petit peu plus souple. Mais malgré tout, on s'attend encore à des évolutions législatives, notamment sur les holdings animatrices. Aujourd'hui, même si on a un petit peu de patrimoine privé, on peut tout transmettre avec les avantages du trail. Et on se dit que le législateur va peut-être intervenir pour qu'on ait les avantages fiscaux que sur, on va dire, les vrais filiales animées, sans avoir les avantages fiscaux sur le patrimoine. sur le patrimoine privé. Parfois, on entend parler aussi de plafonnement des 75 %, c'est-à-dire qu'au-delà d'un certain montant, on aurait plus 75 % d'abattement, mais peut-être 50 % d'abattement. Voilà des idées qui circulent. Donc on pense qu'il y aura encore des évolutions sur le pacte d'Utrecht dans les années qui viennent.
- Speaker #0
Terminé, quel conseil vous donneriez, peut-être général, sur la transmission d'entreprise ?
- Speaker #1
D'analyser, en effet, si on est éligible au pacte du travail. Il faut au moins se poser la question de savoir si on est mûr pour une transmission familiale. C'est quand même un avantage fiscal très intéressant. Donc, si on en respecte les conditions, ça peut être intéressant d'en profiter, notamment via une donation. Après, la fiscalité est une chose. ça ne peut pas être notre... n'ont plus le seul élément moteur pour faire une transmission de patrimoine. Il y a plein d'autres aspects civils, financiers, bien sûr l'âge des parents, l'âge des enfants, avant de prendre une décision en ce sens.
- Speaker #0
Merci beaucoup Bertrand. On le rappelle, le pacte du treil, qui est un outil extrêmement efficace quand il est bien préparé, il permet vraiment de transmettre une entreprise dans de bonnes conditions, tout en préservant l'équilibre familial et la stabilité patrimoniale. Merci beaucoup Bertrand, à bientôt.
- Speaker #1
Merci Marc-Antoine.
- Speaker #0
Et merci à tous de nous avoir suivis. On se retrouve très bientôt pour un nouvel épisode d'À l'écoute des marchés, un podcast de la Banque transatlantique.