- Speaker #0
Hello les voyageurs et bienvenue sur A ton tour du monde, le rĂ©cit des voyageurs. Aujourd'hui je vous emmĂšne Ă la rencontre de nouveaux aventuriers. Alors prĂ©parez-vous Ă ĂȘtre transportĂ©s au bout du monde. Bonne Ă©coute ! Aujourd'hui, j'ai la chance de recevoir Denis Van Den Berghe, marin professionnel, le premier Belge Ă avoir bouclĂ© le VendĂ©e Globe, cette course autour du monde Ă la voile, en solitaire, sans escale et sans assistance, et sans option de retour. Son bateau faisait partie des plus anciens, une Ă©quipe 100% bĂ©nĂ©vole, et pourtant tellement soudĂ©e qu'elle aurait mĂȘme pu traverser l'Atlantique Ă la nage derriĂšre lui. Il est devenu l'un des plus grands vainqueurs mĂ©diatiques de cette Ă©dition. Non pas pour sa vitesse, mais pour sa rĂ©silience, son courage et sa simplicitĂ©. Finir le VendĂ©e Globe, c'est mieux que fumer un pĂ©tard. C'est Denis qui le dit. Et pourtant, il n'en a jamais fumĂ©, mais il plane, il pleure, il repleure. Et franchement, on comprend pourquoi. Ce qui m'a donnĂ© envie de tendre mon micro Ă Denis aujourd'hui, ce n'est pas juste le dĂ©fi sportif, mais c'est ce qui rĂ©vĂšle de l'humain. Parce que cette combinaison rare de doutes, de fatigue, de solitude et de sens. Alors dans cet Ă©pisode, on va parler de rĂȘves qui viennent rĂ©alitĂ©, de sacrifices, de grands dĂ©parts, de casse matĂ©rielle et mentale, mais aussi de joie inattendue, de pleurs sur les vagues, et surtout, ce qui peut pousser un homme comme Denis Ă tout risquer pour vivre quelque chose de grand, trĂšs grand, de vrai et d'essentiel. PrĂ©parez-vous pour un voyage intĂ©rieur et bienvenue dans le sillage de Denis. Est-ce que cette prĂ©sentation te convient ?
- Speaker #1
Oui, c'est beaucoup d'éloges. Grosse mission pour moi dans le podcast.
- Speaker #0
Avant qu'on monte sur ton bateau, je voudrais qu'on revienne juste un petit peu la veille du dĂ©part parce que je sais que c'est souvent des nuits un peu agitĂ©es, un peu folles. Je voudrais que tu nous fasses revivre cette nuit-lĂ . Qu'est-ce qui se passe dans ta tĂȘte la veille du dĂ©part ?
- Speaker #1
J'ai un peu l'impression d'ĂȘtre sur RTL dans les histoires de Pierre Belmar. J'Ă©coutais justement quand j'Ă©tais... gamin sur le bateau de mes parents. La veille du dĂ©part, dernier repas avec les enfants. En toute simplicitĂ©, lĂ oĂč j'ai logĂ© pendant deux ans et demi pour ma prĂ©paration du VendĂ©e Globe, j'ai d'abord logĂ© longtemps dans le bateau parce qu'on n'avait pas de budget. C'est quand mĂȘme des bateaux qui ne sont pas confortables puisque c'est des bateaux de course. Il n'y a pas de sanitaire, il n'y a pas de toilette, il n'y a pas de douche, il n'y a Ă peine une mini-cuisine. Et puis aprĂšs, j'ai eu la chance d'avoir un partenaire technique qui Ă©tait Ă un camping prĂšs et Sable de Lonne et il me... Ils me prĂȘtaient un bungalow 10 mois par an. Et donc, la veille du dĂ©part, dĂźner avec les enfants dans ma cabane, comme je l'appelais. Tu te demandes un peu oĂč t'es, mais de toute façon, t'es au pied du mur et il n'y a plus beaucoup d'Ă©chappatoires. Donc, il y a un moment, il faut y aller. Puis, c'est une nuit aussi, on se lĂšve assez tĂŽt parce qu'on a rendez-vous. Moi, je pense que j'avais rendez-vous Ă 6h15. Et puis l'anecdote, c'est que toutes les routes sont barrĂ©es pour arriver jusqu'au Sable d'Olonne. Et que lĂ , on a laissĂ© passer, mais on se fait quand mĂȘme arrĂȘter par un ou deux contrĂŽleurs Ă un moment, qui me demandent « Mais qu'est-ce que vous faites lĂ ? » Et je dis « Excusez-moi, je vais prendre le dĂ©part. » « Ah pardon, pardon ! » Ils me laissent passer, donc c'est assez rigolo, assez loquace, mais c'est vrai que tu ne fais pas le malin. Ceci dit, on s'est retrouvĂ©s les 40 skippers ensemble, et tu vois que mĂȘme lĂ , les skippers qui ont dĂ©jĂ fait un, deux, trois ou quatre VendĂ©e Globe, ils ne font pas beaucoup plus les malins finalement. On est tous quand mĂȘme dans nos petits souliers. Mais aprĂšs, ça reste quand mĂȘme aussi un grand moment. C'est beaucoup d'Ă©motion. Et c'est vrai que tu arrives sur le ponton. Et lĂ , tu sais que c'est parti. Donc, c'est assez impressionnant.
- Speaker #0
Je me souviens, moi, j'ai eu la chance de te rencontrer justement quelques semaines avant le départ. Tu avais donné une conférence et on avait surtout parlé de la préparation. Comment on se prépare pour une expérience comme celle-là pour le Vendée Globe ?
- Speaker #1
DĂ©jĂ , il y a le volet qualification. Donc, c'est quatre ans en total de qualification. donc j'ai fait Presque 20 000 milles, donc 40 km avec le bateau juste en qualification. Donc ça, c'Ă©tait un volet qui Ă©tait impĂ©ratif pour pouvoir prendre le dĂ©part. Et puis aprĂšs, tu as toute la prĂ©paration physique que toi, tu peux faire en amont. Donc l'idĂ©e, c'Ă©tait un maximum naviguĂ©, parce que c'est quand mĂȘme la meilleure des prĂ©parations. Donc pendant tout le mois d'aoĂ»t, j'ai naviguĂ© 7 jours sur 7 en faisant des nav' de 24 Ă 48 heures, plus des journĂ©es. Et puis, il y a tout un volet prĂ©paration physique. Donc, c'Ă©tait aller Ă la salle avec un kinĂ© et un coach. C'Ă©tait nager, c'Ă©tait rouler Ă vĂ©lo. Donc, quatre fois par semaine pratiquement du sport. Et puis, un petit volet prĂ©paration mentale aussi avec un coach mental. Imagerie, sophrologie pour pouvoir se relaxer, travailler la respiration aussi. Avec quelqu'un que je connaissais qui Ă©tait spĂ©cialisĂ© dans tout ce qui est respiration profonde et des choses comme ça, respiration en cycle pour pouvoir se relaxer, pour pouvoir s'endormir facilement. Ăa fait partie d'un atout. Il y a aussi un aspect diĂ©tĂ©tique. Moi, ça avait une influence directe aussi sur le mal de mer. Donc, c'Ă©tait important que je fasse attention. Les dix jours avant le dĂ©part, de faire attention Ă ce que je mangeais, Ă ce que je buvais, comment je m'alimentais.
- Speaker #0
Ăa me paraĂźt dingue ce que tu viens de dire. Ăa veut dire qu'un marin professionnel, il a encore des fois le mal de mer ?
- Speaker #1
On a tous le mal de mer. C'est un mythe de croire qu'on n'a pas le mal de mer. Et finalement, c'est tout Ă fait normal. On n'est pas Ă©gaux devant le mal de mer. On peut tous ĂȘtre sujet au mal de mer, mais c'est quelque chose de normal puisque c'est un bug dans le cerveau entre les informations de l'oreille interne et de la vision. Et donc, il faut que le cerveau s'habitue. Heureusement, on a eu des conditions lĂ©gĂšres au dĂ©part du VendĂ©e Globe, donc ça a permis de s'acclimater facilement.
- Speaker #0
La préparation a été intense et longue puisque tu parles de quatre ans. C'est quoi justement tout ce qui est arrivé, tous les aléas auxquels tu n'as pas pu te préparer ?
- Speaker #1
Alors, il y en a beaucoup, puisqu'on a beau... beaucoup, beaucoup s'entraĂźner. C'est pour faire face justement Ă l'imprĂ©vu qu'on s'entraĂźne beaucoup. Donc voilĂ , il y a eu des casses matĂ©rielles, il y a eu des phĂ©nomĂšnes mĂ©tĂ©o auxquels on n'Ă©tait pas prĂ©parĂ©, il y a eu la gestion de la solitude quand mĂȘme, qui Ă©tait un vrai dossier Ă partir d'un certain moment. VoilĂ , donc la chose Ă laquelle on n'est pas prĂ©parĂ©, c'est qu'on fait plein de courses pour s'entraĂźner. Le plus long, c'est les transats. Donc c'est, on va dire, 14 jours maximum en mer. Donc on n'est jamais prĂ©parĂ© aprĂšs Ă faire⊠Au-delĂ d'une trentaine de jours, ça commence Ă devenir un vrai dossier. Une fois que moi, au mois de juin, j'Ă©tais qualifiĂ© pour le VendĂ©e Globe, on est rentrĂ© dans un autre volet de prĂ©paration et tout prend une dimension tout Ă fait diffĂ©rente et tout est hors norme. Ne fĂ»t-ce que la nourriture, on part avec 100 jours de nourriture et donc je pouvais prĂ©parer moi-mĂȘme tranquillement avec mes deux petits sacs de nourriture quand je faisais une transat, c'est-Ă -dire le sucrĂ© et le salĂ©. Et lĂ , il y a eu deux personnes pendant une semaine qui ont prĂ©parĂ© la nourriture. Les sacs semaine par semaine, avec un sac journalier, avec tout ce qu'il fallait dedans, la barre de chocolat, la barre de cĂ©rĂ©ales, les diffĂ©rents repas en fonction des endroits oĂč on est. Donc, on ne mange pas la mĂȘme chose quand on est Ă l'Ă©quateur que quand on est en Grand Sud, puisqu'on dĂ©pense plus de calories, puisqu'il fait chaud et puis il fait trĂšs froid. Tout Ă l'avenant, les histoires de communication aussi. Quand il se passe quelque chose sur le bateau, comment on communique en fonction de la gravitĂ© de l'incident. Et puis, s'il y a quelque chose de grave qui se passe Ă terre, par exemple dans la famille. quelles sont les personnes ressources, quelles sont les personnes rĂ©fĂ©rences. On aborde des problĂšmes auxquels on n'a jamais Ă©tĂ© confrontĂ© avant dans des courses classiques.
- Speaker #0
Oui, c'est vrai qu'on pense surtout à toi et au bateau, mais on ne pense pas aussi à ce qui peut se passer pendant ton départ sur Terre, ne serait-ce que pour ta famille. Comment tu avais appréhendé ça ?
- Speaker #1
C'est simple, il y avait des personnes ressources qui Ă©taient censĂ©es me communiquer l'Ă©tat de santĂ© de certains membres de ma famille. Et puis on avait aussi une procĂ©dure. L'idĂ©e, c'est que j'arrĂȘte tellement des globes que s'il y avait un problĂšme vital pour mes enfants, si un de mes parents dĂ©cĂ©dait malheureusement, l'idĂ©e, c'Ă©tait qu'il reste au frais en attendant que j'arrive. C'est assez cynique et assez pragmatique, mais il faut le dĂ©finir avant, parce que sinon, si on est dans des situations comme ça, qu'est-ce qu'on fait quand on est au milieu de l'eau et qui prend la responsabilitĂ© de te donner les informations ? J'ai deux trĂšs bons amis qui sont mĂ©decins. Et c'est vrai que c'Ă©tait leur responsabilitĂ© de dire, Ă©coute, voilĂ , lĂ , il y a quelque chose d'important qui se passe par rapport Ă tes enfants. Il y a une communication, il y a des protocoles Ă mettre dans les deux sens, ce qu'on ne fait pas nĂ©cessairement sur les courses plus courtes, parce que sur une Transat, sur 10 jours, la proportion pour qu'il y ait quelque chose qui se passe de grave, elle est quand mĂȘme assez infime. Et puis aprĂšs, on est facilement accessible et on peut facilement s'arrĂȘter aussi.
- Speaker #0
Moi, j'aimerais voir aussi comment tu as apprĂ©hendĂ© la solitude. Je sais qu'il y avait quand mĂȘme les rĂ©seaux sociaux parce qu'on a vu passer justement des vidĂ©os sur Insta et ça, c'est quand mĂȘme gĂ©nial parce qu'on avait l'impression de le vivre avec toi. Mais tu Ă©tais quand mĂȘme tout seul pendant 117 jours. Comment on a... prendre cette solitude et avec qui tu pouvais communiquer au quotidien ?
- Speaker #1
C'est devenu trĂšs facile en fait maintenant. de communiquer depuis un an et demi, deux ans. Il y a quelque chose qui a vraiment rĂ©volutionnĂ©, c'est les fameuses antennes Starlink, parce que du coup, on a une facilitĂ© de communication partout dans le monde et surtout, ça coĂ»te Ă peine 200 euros par mois pour avoir 90 gigas de bandes passantes. Donc, c'est plus que ce qu'on a sur l'abonnement Internet Ă la maison. Alors, ça rend l'accĂšs Ă la mĂ©tĂ©o trĂšs facile, ça c'est important en termes de sĂ©curitĂ©. Et puis aprĂšs, ça rend vraiment la communication via les rĂ©seaux trĂšs facile, puisqu'en fait, on peut faire une visio quand on veut. Moi, j'ai fait des rĂ©unions au Teams avec 200 personnes pour les sponsors, entre l'Australie et le Cap Horn. Donc, ça change pas mal de choses. En mĂȘme temps, l'isolement, il reste quand mĂȘme important parce qu'il n'y a rien qui remplace autre chose que les vrais contacts sociaux. Et donc, il n'y a rien Ă faire. Les contacts via Ă©cran, il y a toujours au minimum deux Ă©crans entre les personnes. Et donc, c'est sĂ»r que ça change le rapport, ça change les Ă©motions, ça change le... Le body language, le mindset aussi. Donc forcĂ©ment, ce ne sont pas les mĂȘmes contacts. Et c'est vrai que quand tu arrives, tu es content de rĂ©avoir de nouveau des vrais contacts sociaux. Et voilĂ , on peut se rappeler, il y a quatre ans, pendant le confinement, on a tous Ă©tĂ© super contents de faire des apĂ©ros via des applications avec nos copains. Mais la premiĂšre chose qu'on a faite, quand il n'y a plus les couvre-feu et les restrictions, c'est quand mĂȘme faire un apĂ©ro avec deux ou trois personnes parce que c'Ă©tait tout Ă fait diffĂ©rent.
- Speaker #0
Heureusement d'ailleurs.
- Speaker #1
Oui, heureusement, évidemment. Donc voilà , c'est beaucoup plus facile, mais ça ne remplacera jamais les vrais contacts sociaux.
- Speaker #0
Alors du coup, je rebondis parce que c'est vrai que ça ne remplacera jamais, mais je m'imagine que par exemple pour tes fils, c'est gĂ©nial parce qu'ils ont pu vivre quand mĂȘme des moments quasiment rĂ©els avec toi, mĂȘme s'ils n'Ă©taient pas sur le bateau. Sentir tes Ă©motions en moment oĂč tu les vivais, je trouve que c'est quand mĂȘme dingo.
- Speaker #1
Oui, c'est clair que c'est beaucoup plus sympa en termes de contacts et je pense qu'on n'arriverait plus Ă faire sans. Parce qu'on n'est plus habituĂ© Ă ne plus avoir de contact pendant 3 ou 4 jours avec des personnes qui nous entourent. Autant avant, on partait en expĂ©dition, on partait un tour du monde, on partait faire une course, on Ă©tait habituĂ© Ă ce qu'on n'ait qu'un contact tous les 3 ou 4 jours. Moi, je me souviens, au dĂ©but, quand je faisais la course au large, on envoyait un petit mail quand ça se passait bien et on n'Ă©crivait pas trop de mots parce que sinon c'est trop lourd et ça coĂ»tait cher en connexion satellite. Et mĂȘme la premiĂšre course que j'ai faite, on n'avait pas de contact. On avait zĂ©ro tĂ©lĂ©phone satellite, donc on n'avait pas de contact avec des proches. Donc, je pense qu'on n'est plus habituĂ©s et on n'aurait plus Ă couper comme ça pendant 10, 15, 20 jours tous les contacts qu'on a puisqu'on est hyper connectĂ©s tout le temps. Donc, sur le fond, sur la forme, c'est sympa. Mais sur le fond, ça pose aussi question sur notre rapport Ă ces mĂ©dias et Ă ces relais sociaux. Et c'est vrai que ça permettait de communiquer assez facilement avec tout le monde et d'avoir des relations privilĂ©giĂ©es avec les proches. Et dans les moments difficiles, c'est vrai que ça fait partie d'un vrai soutien moral.
- Speaker #0
Ăvidemment. Tu parlais de l'apĂ©ro tout Ă l'heure pendant les confinements, mais j'ai cru comprendre que tu t'Ă©tais accordĂ© aussi des petites binous de temps en temps. Il y a eu la petite apĂ©ro quand mĂȘme. Donc dans ces cas-lĂ , c'est autorisĂ©, on a le droit de se prendre sa petite biĂšre au coucher de soleil ?
- Speaker #1
Oui, exactement. Ăa faisait partie moi aussi d'une maniĂšre de dĂ©connecter, de sortir du mode course. Alors voilĂ , aprĂšs on fait super attention à ça parce que les Ă©tudes scientifiques et mĂ©dicales montrent qu'avec la fatigue qu'on a, c'est comme si on Ă©tait dĂ©jĂ Ă 0,5 degrĂ©s d'alcool. Donc voilĂ , et moi c'est vrai que j'avais quelques petites biĂšres, mais c'Ă©tait des 25 centilitres, donc c'est vraiment deux fois rien. Et puis on offre dĂ©jĂ une partie, un Ă©pume suivant la tradition, une partie au bateau et puis on boit ce qui reste. Donc voilĂ , mais c'est plus la symbolique quelque part. de rĂ©instaurer ou de recrĂ©er ou de s'inventer une sorte de moment social en fait.
- Speaker #0
C'est hyper chouette. à l'inverse, quand tu as eu les gros aléas, notamment avec la voile, comment on gÚre ce stress, ces peurs ? Parce qu'il y avait forcément des peurs que tu as dû surmonter. Comment on gÚre ça quand on est tout seul et c'est le genre de crise de panique tout seul sur l'eau ?
- Speaker #1
Alors, crise de panique, quand tu es dans l'action, tu n'as pas de crise de panique. Au contraire, euh parce que de toute façon, tu es tout seul. C'est une crise de panique, il n'y a rien qui se passe. Ăa ne marche pas. Non, tu gĂšres, tu fais face et tu rĂ©flĂ©chis aux diffĂ©rentes solutions. Tu essaies de trouver des points positifs. MĂȘme quand tu as des grosses avaries, le point positif, c'est que tu es toujours en course. En fait, nous, on savait que tant qu'on n'allait pas perdre le mĂąt ou perdre la quille ou avoir une grosse voie d'eau dans le bateau, on pouvait continuer la course et on pouvait espĂ©rer terminer. C'Ă©tait quand mĂȘme l'objectif. Donc voilĂ , on est plus dans l'action. AprĂšs, je dirais qu'il y a plus des moments, parfois des crises de nerfs ou des gros moments d'aoĂ»t. C'est plus dans d'autres moments, quand il n'y a pas de vent, quand on n'avance pas, quand c'est compliquĂ© au niveau de la mĂ©tĂ©o. VoilĂ , c'est plus des trucs comme ça. Mais c'est vrai que quand tu as des avaries, tu cherches les. Il y a un moment oĂč tu te dis, OK, comment on va faire ? Comment on va gĂ©rer ça ? Comment on va pouvoir continuer ? Et puis, tu rĂ©flĂ©chis, tu trouves des solutions. Tu peux ĂȘtre en contact avec ton Ă©quipe quand mĂȘme Ă ce moment-lĂ , puisque c'est des conseils techniques. Donc, voilĂ , il y a une sorte de cellule de crise qui se met en place. Et puis, on rĂ©flĂ©chit. MĂȘme si moi, comme tu l'as dit en intro, c'est une Ă©quipe de bĂ©nĂ©voles. Et aussi, surtout, c'est une Ă©quipe qui ne navigue pas. donc Donc, c'est sĂ»r que quand moi, je navigue et que j'ai des problĂšmes comme ça, je n'ai pas de conseil de bon marin qui a beaucoup d'expĂ©rience. J'ai des conseils de gens qui sont techniques, donc c'est super important pour moi. Mais c'est vrai que du coup, moi, je m'oblige aussi Ă prendre plus de recul pour analyser les options stratĂ©giques et tactiques que je peux avoir par rapport Ă telle ou telle route ou aller Ă tel endroit pour ĂȘtre plus en sĂ©curitĂ© et pouvoir rĂ©parer. Donc, voilĂ , c'est un peu diffĂ©rent aussi comme approche du coup.
- Speaker #0
Ce cÎté justement trÚs pragmatique de dire, ben voilà , on prend les choses comme elles viennent, on va trouver une solution. Est-ce que c'est à force justement de naviguer ou ça toujours fait partie de ta personnalité ?
- Speaker #1
Alors, je ne sais pas. Je ne sais pas si ça fait partie de ma personnalitĂ©, mais en tout cas, quand tu navigues en solitaire, c'est la seule des solutions. C'est la seule voie Ă avoir parce qu'il n'y a que toi qui peux rĂ©soudre le problĂšme, mĂȘme si tu as un appui technique par rapport Ă ton Ă©quipe. VoilĂ . Et c'est vrai qu'Ă force d'avoir fait des courses en solitaire, tu arrives Ă trouver des solutions Ă diffĂ©rents moments et puis tu te dĂ©brouilles aprĂšs. Je pense que ça fait partie aussi un peu de ma personnalitĂ© d'essayer d'abord de trouver la solution avant de commencer Ă pleurnicher ou de se plaindre. Et puis, c'est une maniĂšre aussi de rester maĂźtre de la situation. C'est-Ă -dire, si tu commences directement Ă essayer de trouver les solutions, tu as plus l'impression que c'est toi qui dĂ©cides, alors que finalement, ce n'est pas toi qui as dĂ©cidĂ©, mais ce n'est pas grave. Mais voilĂ , je pense que psychologiquement, ça, c'est important aussi.
- Speaker #0
Je sais que dans le passé, tu as été entrepreneur. C'est ce genre de qualité qu'on retrouve aussi.
- Speaker #1
Oui, si ce n'est que je pense que quand tu es entrepreneur, tu as plus le temps de gamberger parce qu'il n'y a parfois pas nĂ©cessairement beaucoup, beaucoup d'urgence. Enfin, pas d'urgence impĂ©rative et vitale. Donc oui, tu as peut-ĂȘtre une urgence financiĂšre, une urgence pour un client. Mais la terre ne va pas s'arrĂȘter de tourner. Ton projet ne va pas s'arrĂȘter de tourner. tu as toujours un peu plus de temps, je veux dire, sur un bateau en solitaire, dans des coins hostiles, assez reculĂ©s, tu sais bien qu'il y a quand mĂȘme un impĂ©ratif de moyens Ă avoir et de mettre des choses en place pour dĂ©jĂ ĂȘtre en sĂ©curitĂ© et pouvoir continuer Ă avancer. Donc c'est vrai que tu es dans une autre logique quand mĂȘme.
- Speaker #0
Dans une interview sur le Vendée Globe, tu avais notamment dit que tu avais essayé de naviguer comme un bon pÚre.
- Speaker #1
De famille.
- Speaker #0
Exactement, comme un bon pĂšre de famille. Est-ce que tu peux nous expliquer cette comparaison ?
- Speaker #1
Oui, alors c'Ă©tait surtout par rapport Ă la gestion du projet, parce que c'est vrai qu'on n'avait pas un grand budget, on Ă©tait un des plus petits budgets sur la course, donc vraiment faire attention et ne pas jeter un genre par les fenĂȘtres. rĂ©flĂ©chir aux dĂ©penses, aux diffĂ©rents postes budgĂ©taires, Ă faire des choix dans les dĂ©penses. Puis aprĂšs, naviguer en bon pĂšre de famille, je pense que c'est naviguer en marin, en fait. Et c'est peut-ĂȘtre... VoilĂ , moi, je suis plutĂŽt marin que rĂ©gatier, et c'est peut-ĂȘtre mon souci, et je dirais, c'est que je fais plus attention au bateau et au bonhomme que... VoilĂ , les gars qui sont dans la compĂ©tition, ils savent bien qu'ils peuvent casser le bateau, ou bien s'ils cassent le bateau, ça fait partie de l'histoire. Moi, c'est vrai que j'aime pas quand il y a un truc qui te casse sur le bateau, donc Donc, parfois, je mets... Je ne mets pas le curseur Ă 120% sur les performances du bateau, mais plutĂŽt Ă 85-90%, donc ça remplit des choix de routes. C'est aussi pour ça, par exemple, que je n'ai pas Ă©tĂ© trĂšs sud dans le Grand Sud, que j'ai fait plus de routes parce que je ne voulais pas aller dans le plus fort des dĂ©pressions. On avait un monsieur en Indien qui Ă©tait assez compliquĂ© sur cette Ă©dition. Il n'y a pas que moi qui le dit, j'ai peu d'expĂ©rience par rapport à ça, mais quand on voit... Jean Le Cam entre autres qui Ă©tait devant moi et qui fait des routes assez nord tu regardes un peu les vents, les Ă©tats de la mer et tu vois que c'est quand mĂȘme plus fort que d'habitude donc voilĂ c'Ă©tait plutĂŽt une notion,
- Speaker #0
nous l'idĂ©e c'Ă©tait de terminer le VendĂ©e Globe donc Ă partir de ce moment lĂ tu as aussi une autre maniĂšre de gĂ©rer les choses tu parles de budget tout Ă l'heure tu disais que c'Ă©tait pas le plus gros des budgets mais moi je me souviens, est-ce que tu peux nous parler quand mĂȘme de ce budget parce que ça me paraissait quand mĂȘme des chiffres assez colossaux alors
- Speaker #1
Alors oui, c'est ça le problĂšme, c'est que c'est des chiffres colossaux, mais qu'en mĂȘme temps, nous, dans notre milieu, ce n'est pas des chiffres colossaux du tout, on est sur des rapports de de 1 Ă 10, voire 1 Ă 15 par rapport Ă certaines Ă©quipes. Donc quand nous on avait 100 euros, eux ils en avaient 1 800, c'est aussi simple que ça, voire 2 000. Le problĂšme c'est que tout coĂ»te trĂšs cher dans ce monde de la voile, et puis on reste sur des budgets quand mĂȘme... Il y a le Tour de France pour le moment, on sait qu'une petite Ă©quipe du Tour de France c'est 25 Ă 30 millions par an, et que la plus grosse Ă©quipe c'est 70 millions par an. Donc on reste quand mĂȘme sur des budgets trĂšs trĂšs raisonnables comparĂ© Ă d'autres sports. MĂȘme si c'est beaucoup d'argent et que moi, on est plusieurs skippers, armateurs et chefs d'entreprise, Ă ĂȘtre un peu effrayĂ©s par les budgets, la course au budget, pour acheter certaines choses qui coĂ»tent une fortune alors que ça reste que des piĂšces mĂ©caniques. Mais voilĂ , nous, pour donner quelques exemples, juste s'inscrire au VendĂ©e Globe, c'est 20 000 euros. Et c'est 20 000 euros de caution en plus, donc on a dĂ©jĂ 40 000 euros qui partent avant de rien faire. Une assurance de bateau, on est entre 60 et 80 000 euros en fonction des annĂ©es. Donc voilĂ , et avec ça, on n'a pas encore naviguĂ©, on n'a pas encore rien fait. Les inscriptions de courses, toutes les transats, c'est pratiquement 15 000 euros Ă chaque fois. VoilĂ , on en a fait six sur le projet, donc ça fait dĂ©jĂ des budgets importants. Donc voilĂ , c'est vraiment une course au budget. Avant d'ĂȘtre sur l'eau, il faut d'abord trouver les budgets.
- Speaker #0
Il y a forcĂ©ment beaucoup de gens qui ont du mal Ă visualiser ce que ça peut ĂȘtre. Il n'y a pas de journĂ©e type sur une course comme celle-lĂ , mais est-ce que tu peux nous raconter soit la journĂ©e de la plus galĂšre, soit la journĂ©e la plus facile ? mais est-ce que tu peux nous en raconter une seule que tu auras peut-ĂȘtre envie justement de revivre ?
- Speaker #1
Non, aprĂšs, je dirais qu'il y a quatre grands piliers dans une journĂ©e. DĂ©jĂ , on a des journĂ©es de 24 heures. On n'a pas des journĂ©es de 14 ou 15 heures. On va dire, on a des journĂ©es de 24 heures, et puis aprĂšs, on rĂ©partit ça. Le premier gros poste, en fait, dans nos journĂ©es, c'est vraiment faire la mĂ©tĂ©o, parce qu'on utilise les bulletins mĂ©tĂ©o qu'on va chercher Ă gauche et Ă droite, des fichiers mĂ©tĂ©o, en fait. On utilise dans un logiciel de routage qui nous permet de donner les routes optimum en fonction des vitesses cibles et des vents qu'on a sur zone. Maintenant, ça prend vraiment beaucoup de temps parce qu'on a plusieurs sources mĂ©tĂ©o. Donc, on fait ça le matin et le soir. On va chercher plein de sources mĂ©tĂ©o en fonction de la provenance. C'est des modĂšles europĂ©ens, c'est des modĂšles français, c'est des modĂšles amĂ©ricains, des modĂšles allemands en fonction. Ăa prend dĂ©jĂ 4 Ă 5 heures par jour, juste cette activitĂ©-lĂ . Puis aprĂšs, souvent, il y a tout ce qui est manĆuvre, le volet manĆuvre. Donc sur un bateau comme ça, qui fait 18,40 mĂštres de long, avec un mĂąt de 28 mĂštres, avec la plus grande voile qui fait 300 mĂštres carrĂ©s, et puis ma grande voile derriĂšre qui fait 140 mĂštres carrĂ©s, forcĂ©ment dĂ©jĂ les manĆuvres ça prend du temps aussi. Un virement de bord ou un empannage, donc changer de direction, c'est on va dire entre une heure et demie et deux heures. Il y a aussi un poste lĂ -dedans qui est trĂšs important, c'est qu'on change tout le matĂ©riel de place Ă l'intĂ©rieur du bateau pour Ă©quilibrer le bateau. Donc on a 350 kilos grosso modo de nourriture, de matĂ©riel. de rechange de piĂšces pour des rĂ©parations dans diffĂ©rents sacs, donc tout ça en bouge. Puis aprĂšs, il y a l'aspect quand mĂȘme nourriture, donc il faut se nourrir. C'est une partie qui est quand mĂȘme importante. Et puis aussi, c'est un petit moment oĂč on essaie d'avoir parfois du plaisir, mĂȘme si on ne mange que de la nourriture lyophilisĂ©e Ă 100%, sauf qu'au dĂ©but de la course, on avait des produits frais, mais trĂšs peu finalement. Quand mĂȘme, une petite partie plaisir, c'est tout ce qui est bout de chocolat, petite gĂąterie. Biscuit, moi j'avais une Ă©cole qui avait travaillĂ© avec moi, l'Ă©cole du CERIA Ă Anderlecht, qui m'avait prĂ©parĂ© plein de choses. On avait beaucoup travaillĂ© ça en amont sur les deux transats qu'on avait fait en 2024 pour ce qu'il y a d'ici. Et puis il y a la partie dormir, on dort vraiment tranche par tranche en fonction des endroits oĂč on est. Quand on est prĂšs des cĂŽtes, on dort des 20-30 minutes en fonction du trafic et de ce qu'on pourrait rencontrer. Et puis c'est vrai que quand on est au milieu de l'Atlantique ou bien dans les mers du Sud, dans les mers du Sud il n'y a pas de trafic commercial donc il n'y a pas de trafic commercial. Il y a zĂ©ro risque de collision avec un autre bateau. Et donc lĂ , on peut faire des slots d'une heure et demie, on peut essayer d'enchaĂźner les slots deux, trois ou quatre fois parfois sur une mĂȘme nuit, mais toujours en se rĂ©veillant, en faisant un petit quelque chose, en allant voir dehors ou bien en vĂ©rifiant les instruments ou l'ordinateur et puis on peut se redormir. Donc voilĂ , ça permet parfois d'enchaĂźner trois ou quatre slots sur la mĂȘme pĂ©riode. L'idĂ©e, c'Ă©tait d'avoir presque sept heures de sommeil sur vingt.
- Speaker #0
Quand mĂȘme, oui. Mais tu ne dors pas profondĂ©ment, donc ce n'est pas le mĂȘme sommeil rĂ©parateur, mais en mĂȘme temps, tu es tellement Ă©puisĂ© queâŠ
- Speaker #1
Oui, il y a des moments oĂč tu dors bien. Tu vas quand mĂȘme dormir bien profondĂ©ment et vraiment trĂšs rapidement. Ăa permet de tenir le coup. Et puis, ce qui compte, en fait, c'est d'arriver dans ton sommeil lent profond. C'est ça le plus important. C'est vrai qu'on s'entraĂźne à ça, qu'on est habituĂ© à ça. AprĂšs, c'est facile de tenir le coup sur, on va dire, deux semaines ou trois semaines, sur des pĂ©riodes plus longues. forcĂ©ment il faut qu'il y ait des... des routines qui s'installent et il faut faire attention Ă sa rĂ©cupĂ©ration, Ă son sommeil.
- Speaker #0
Tu parlais de chocolat, c'était ça le plus gros kiff ?
- Speaker #1
Oui, c'Ă©tait un des plus gros kiffs, vraiment le chocolat. AprĂšs non, c'est sĂ»r qu'il y a des chouettes moments. mais c'est vraiment des moments qui sont Ă©phĂ©mĂšres par rapport Ă l'endroit oĂč on est et par rapport Ă ce qu'on vit. Et puis ce qu'il y a, c'est qu'il y a... Moi, en tout cas, personnellement, j'Ă©tais toujours dans la perspective de ce qui va arriver. Donc c'est vrai qu'il y a des grosses, grosses Ă©chĂ©ances et qu'on ne peut jamais vraiment totalement se lĂącher parce qu'il y a toujours quelque chose d'important et de gros qui arrive et de phĂ©nomĂ©nal mĂȘme, que ce soit l'entrĂ©e dans les mers du Sud, que ce soit passer le Cap de Bonne EspĂ©rance. le Cap Leouine par le point des mots, le Cap Horn, remonter l'Atlantique, puis repasser l'Ă©quateur, c'est toujours des grosses, grosses Ă©chĂ©ances. Et on sait bien que tout peut s'arrĂȘter quand mĂȘme presque d'une minute Ă l'autre. Un mĂąt, ça peut tomber, on peut perdre un quai, on peut taper dans quelque chose avant une voie d'eau, perdre quelque chose de primordial sur le bateau. Donc voilĂ , on est quand mĂȘme toujours un peu dans l'attente du pire qui pourrait arriver.
- Speaker #0
Toi, c'est un peu ce qui t'est arrivĂ© quand mĂȘme avec ce problĂšme de voile qui t'empĂȘchait d'avancer. Est-ce qu'Ă un moment donnĂ©, tu as pensĂ© Ă abandonner ou jamais ?
- Speaker #1
Oui, oui, non, vraiment. Ăa a Ă©tĂ© envisagĂ© Ă un moment. Quand j'ai mon problĂšme de voile qui est quand mĂȘme important, lĂ , je suis prĂšs des Açores. Donc, grosso modo, c'Ă©tait simple de m'arrĂȘter aux Açores. Je pense qu'aprĂšs 10 ou 12 heures, j'Ă©tais dans un port, en sĂ©curitĂ©, au chaud, prendre une douche, aller au resto, dormir dans un vrai lit. Tu rĂ©flĂ©chis à ça et puis tu dis, moi, j'avais notĂ© sur un bout de papier. Et puis, je me dis, OK, mais c'est trĂšs bien. Mais dans 24 heures, dans un mois, dans un an, dans 10 ans, comment je fais pour me lever du pied droit tout le matin et me regarder droit dans la glace ? Donc, je me dis, non, c'est impossible. Et puis, je n'ai pas fait six ans de sacrifice et six ans de projet et de passer par tout ça pour abandonner juste parce que j'ai un problĂšme de voile. Donc, tant que je pourrais continuer, mĂȘme si j'avais dĂ» continuer juste avec la voile d'avant, j'aurais continuĂ©. Ăa s'est passĂ© quand mĂȘme pendant⊠pendant 4-5 jours pour aller jusque vers le Portugal. Et puis aprĂšs, on a discutĂ© aussi avec l'Ă©quipe et la direction de course aussi. La sĂ©curitĂ© n'Ă©tait pas mise en pĂ©ril, que ce soit du bateau ou que ce soit du skipper, c'est-Ă -dire moi, il n'y avait pas de raison de ne pas continuer. AprĂšs, il faut savoir qu'avec ces bateaux-lĂ , c'est compliquĂ© de s'arrĂȘter quelque part et on ne s'arrĂȘte pas facilement. Et donc, on avait dĂ©terminĂ© trois points, Ă©tapes oĂč on aurait pu s'arrĂȘter. Un, Ă Cascais au Portugal, un peu plus au nord en Espagne et puis Ă la pointe nord de l'Espagne, Ă la Corogne. Et aprĂšs, on savait que, enfin, je savais que si j'Ă©tais Ă la Corogne, j'Ă©tais vraiment plus trĂšs loin. Donc, c'est des coins qu'on connaĂźt, c'est des coins oĂč on est dĂ©jĂ beaucoup plus en sĂ©curitĂ© aussi. Il n'y a pas eu de dĂ©bat, finalement, sur abandonner. Ăa m'est passĂ© par l'esprit, mais je me suis dit, non, ce n'est pas possible avec tout ce qu'il y a eu avant. On ne va pas abandonner juste pour ce problĂšme. Et c'est un problĂšme important, c'est un petit problĂšme, finalement, par rapport Ă un abandon.
- Speaker #0
il y a quand mĂȘme un truc qui fait partie de toi, et je l'ai entendu dans plusieurs moments d'interview, c'est aussi de dire, je ne veux pas de regrets, je ne veux pas ce vieux goĂ»t d'amertume dans ma bouche, je prĂ©fĂšre des Ă©checs. Et en mĂȘme temps, je rebondis aussi sur autre chose, c'est que dans ce podcast, tu vois, souvent, on interview des gens qui font du voyage pour des rencontres, pour des moments de plaisir. Toi, je sais que, que ce soit sur ce VendĂ©e Globe ou aussi dans ton parcours, parce que je sais que tu as fait aussi pas mal de bĂ©nĂ©volat, mais dans des trucs assez extrĂȘmes. J'ai l'impression que tout ce que tu vises aussi dans toutes ces expĂ©riences et ce voyage, c'est d'aller un peu au bout de toi-mĂȘme, d'aller presque dans la souffrance. Donc ça, il faut que tu me l'expliques.
- Speaker #1
Oui, alors c'est vrai que nous, on a fait un tour du monde, mais je n'ai rien vu. J'ai vu de l'eau et des couchers de soleil, des levĂ©es de soleil. Mais j'ai vu un peu la cordillĂšre des Andes quand mĂȘme avant d'arriver au Cap Horn, mais mĂȘme le Cap Horn, je n'ai pas vu parce que je suis passĂ© de nuit. En plus, il y avait tempĂȘte. Donc voilĂ . AprĂšs, c'est paradoxal sur un VendĂ©e Globe. J'ai eu des super moments, mais comme je disais, c'est vraiment Ă©phĂ©mĂšre. Ce n'est pas 20% du temps. Au contraire, on est quand mĂȘme dans des conditions qui sont compliquĂ©es tout le temps. Et puis, un bateau, ça bouge. Tout aborde un bateau. Surtout en plus en compĂ©tition, quand on essaye d'aller le plus vite possible. Tout est compliquĂ©. donc la vie quotidienne est compliquĂ©e donc se laver les dents ça est compliquĂ© se doucher on n'en parle mĂȘme pas se faire Ă manger aller Ă la toilette toutes les tĂąches quotidiennes des choses simples sont vraiment compliquĂ©es ça prend une dimension Ă©norme donc voilĂ oui aprĂšs c'est vrai que moi j'aime bien faire des trucs qui ont l'air un peu impossibles comme ça je pense que c'est ça aussi qui fait la richesse des choses si on faisait que des choses possibles ben Il n'y aurait pas beaucoup d'excitation et les choses possibles. Ce n'est pas ça qui fait avancer grand-chose. Les choses possibles, c'est plutĂŽt les choses impossibles. Et puis aprĂšs, sur la notion du regret, oui, c'est ça aussi. Par rapport Ă l'abandon, je ne voulais pas avoir de regrets. Si le bateau coule, il coule. Mais lĂ , on ne sait rien faire. Mais tant qu'il y a moyen de continuer, il faut continuer. Et puis, ça a Ă©tĂ© aussi le...
- Speaker #0
l'histoire du projet, puisque moi, je voulais dĂ©jĂ faire le VendĂ©e Globe en 2020, puis je n'ai pas trouvĂ© les financements. Et puis, j'ai recommencĂ© en 2021, aprĂšs le confinement, Ă chercher des partenaires et des choses comme ça. Donc, moi, je pense que c'est mieux d'avoir... Ăa ne fonctionne pas, mais au moins, c'est de donner Ă fond. Et puis, comme ça, au moins, on est, je dirais, en raccord et en paix avec soi-mĂȘme quand on peut repenser aprĂšs. Mais,
- Speaker #1
quand mĂȘme, d'oĂč ça vient, ce goĂ»t pour les dĂ©fis ? De vivre des choses grandes, quoi, de rĂ©aliser des rĂȘves ? Ăa n'appartient pas Ă tout le monde ? Est-ce qu'il y a quelque chose qui t'anime plus que tout ?
- Speaker #0
Je pense que non. Au contraire, ça appartient Ă tout le monde. On a tous des rĂȘves. Il n'y a pas de petits ou de grands rĂȘves. Je prends toujours l'exemple du gars qui est banquier et qui veut devenir fleuriste, mais qui ne le fera pas parce que, socialement, ce n'est pas acceptĂ©, parce qu'il va gagner moins bien sa vie, parce qu'il n'aura plus son petit confort, parce que ses copains vont rigoler, parce que sa famille va lui dire « Non, tu ne peux pas ĂȘtre fleuriste. » des banquiers. J'aime bien ce parallĂšle, cette mĂ©taphore-lĂ . Ce n'est pas pour ça qu'on doit changer diamĂ©tralement de vie. Il y a plein de gens qui sont trĂšs heureux dans leur vie, mais on a tous des petites choses qu'on a envie, que ce soit faire un marathon, que ce soit partir voyager. Il y a un moment oĂč il faut oser, il faut se donner les moyens d'eux. Et puis si ça ne fonctionne pas, ce n'est pas grave, mais au moins on n'aura pas de regrets plus tard. Je pense que ça, c'est important, c'est l'idĂ©e de ne pas avoir de regrets. Et puis, il y a aussi oĂč on se dit, quelle est la chose que moi je peux faire, que personne d'autre pourrait faire ? Quand on veut changer de carriĂšre, on est le seul maĂźtre Ă bord, on est le seul Ă avoir les rĂȘnes entre les mains pour pouvoir changer de carriĂšre, si on le sent comme ça, Ă©videmment ce n'est pas une finalitĂ© pour tout le monde.
- Speaker #1
On a vécu un petit peu avec toi sur le bateau. On va juste parler maintenant du retour sur la terre ferme et des retrouvailles. Est-ce que tu peux nous parler de ces retrouvailles dans le chenal aprÚs ces 117 jours ? J'ai vu tellement de larmes, tellement d'émotions, mais forcément, je voudrais que tu nous en parles.
- Speaker #0
Oui, c'est vraiment paradoxal, c'est vraiment particulier. MĂȘme encore maintenant, c'est que quand je vois les images que je me rends compte de la... ferveur et de l'Ă©motion. Moi, j'Ă©tais vraiment dans le cri par l'Ă©vĂ©nement. On n'est pas prĂ©parĂ© à ça, on n'est pas entraĂźnĂ© à ça. On ne fait pas non plus un VendĂ©e Globe et un projet comme ça pour ça, mĂȘme si c'est gĂ©nial. Mais c'est vrai que c'est difficile de mettre des mots sur tout ce que tu ressens. Ă ce moment-lĂ , j'en discutais avec certains copains sportifs qui ont Ă©tĂ© champions de Belgique ou champions olympiques dans le hockey. Et voilĂ , ils me disent la mĂȘme chose aussi. Donc, je pense qu'on peut ressentir ce genre d'Ă©motion et de revivre ce genre de moment que quand on a atteint un certain graal peut-ĂȘtre, donc ĂȘtre champion de Belgique, ĂȘtre champion olympique ou participer aux Jeux olympiques. VoilĂ , moi, c'est tout ça. C'est comme quand on arrive Ă la grande place ou quand on est reçu par le roi. VoilĂ , c'est difficile Ă expliquer. C'est Ă©norme. VoilĂ , c'est tout Ă©norme. Puis aprĂšs, c'est quand mĂȘme sympa Ă 57 ans d'avoir encore des premiĂšres fois. Donc ça, c'est rigolo.
- Speaker #1
C'est les meilleurs.
- Speaker #0
Oui, pas toujours, mais ça dĂ©pend pourquoi. Mais ma premiĂšre cuite, ce n'Ă©tait pas la meilleure. Donc voilĂ , par exemple. Mais donc voilĂ , c'est vrai qu'il y a beaucoup d'Ă©motions. Et c'est vrai que mĂȘme, j'ai encore vu quelqu'un derniĂšrement et je ne me rappelais plus de l'avoir vu les premiĂšres 24 heures parce qu'en fait, on ne se rend pas compte de ce qui se passe. On a deux, trois flashs. Et puis, c'est que par aprĂšs, quand on dĂ©briefe et qu'on redescend un petit tapis sur terre, on se rend compte que telle personne Ă©tait lĂ , telle personne Ă©tait lĂ . Moi, j'ai plein de copains qui Ă©taient lĂ Ă l'arrivĂ©e. J'ai vu cinq, six jours aprĂšs en arrivant Ă Bruxelles. Et c'est qu'Ă ce moment-lĂ que je me suis rendu compte qu'ils Ă©taient lĂ . Parce que pourtant, je les avais vus, je les avais serrĂ©s dans mes bras, j'avais parlĂ© avec eux, j'avais rigolĂ© avec eux. Mais en fait, on est tellement pris dans l'Ă©vĂ©nement qu'on ne se rend pas compte de tout.
- Speaker #1
Là , pour le coup, je pense qu'on peut parler de vrais shoots, shoots de bonheur. Par contre, je pense qu'une fois que tu as goûté ça une fois dans ta vie, tu as tellement envie de le revivre, non ?
- Speaker #0
Oui et non. Le VendĂ©e Globe, peut-ĂȘtre pas. C'est vrai que c'est des grosses doses de bonheur, comme tu disais. Maintenant, il faut quand mĂȘme raison garder. Je pense qu'heureusement, je vis ça Ă un certain Ăąge oĂč on commence normalement Ă avoir un peu de maturitĂ©. Normalement. Mais je peux comprendre que quand on est sportif de haut niveau, ou star, ou artiste, Merci. et qu'on a 21, 22, 23 ans, ça peut vite monter Ă la tĂȘte. Ce n'est pas une excuse, mais c'est vrai qu'aprĂšs, c'est addictif. et que lui aussi ben Comme beaucoup de sportifs, aprĂšs une Ă©preuve comme ça, tu as un don. Ăa fait maintenant mars, 4 mois et demi, 5 mois. C'est vrai que tu mets du temps Ă te remettre de ça parce que tu as Ă©tĂ© au centre de l'attention, tout le monde est focalisĂ© sur toi. Tu arrives, tu vas faire tes courses la premiĂšre fois, tu ne sais presque pas faire tes courses parce que beaucoup de gens viennent parler avec toi et c'est super bienveillant, super sympa. Donc voilĂ , c'est surprenant. Donc voilĂ , il faut se remettre de ça et puis aprĂšs il faut retrouver aussi du plaisir dans des choses simples. La vie, ce n'est pas que des grands moments comme ça, il y a plein de plaisir. C'est partager des moments avec tes enfants, c'est avec des copains, c'est aller rouler un vĂ©lo, c'est ça aussi. Et c'est ça qui est bien, c'est de pouvoir redescendre tranquillement et sans qu'on vienne trop t'embĂȘter par rapport à ça. Je pense que c'est important aussi.
- Speaker #1
Ce qui est gĂ©nial, c'est que toi, tu as goĂ»tĂ© Ă cette notoriĂ©tĂ© d'un coup. Et puis aprĂšs, comme tu dis, ça ne t'empĂȘchera pas de pouvoir profiter de moments simples aussi.
- Speaker #0
J'espĂšre, heureusement, parce que sinon, ça va ĂȘtre compliquĂ©. Non, non, c'est ça. Je veux dire, aprĂšs, c'est des moments incroyables, privilĂ©giĂ©s. Moi, je les prends vraiment comme des moments privilĂ©giĂ©s et comme des moments, en me disant, c'est une fois ou deux fois dans ta vie et je n'ai pas envie d'en faire une maniĂšre de vivre. Le VendĂ©e Globe, c'est un gras Ă aller chercher. C'est fait. Il y a plein d'autres choses Ă faire, mais je ne me vois pas refaire un VendĂ©e Globe en tout cas comme skipper.
- Speaker #1
On sait que tu es arrivé, je crois que c'est 24 heures avant la fermeture. AprÚs, pardon. AprÚs la fermeture. Pour autant, je pense que tu as été un de ceux qui a été le plus médiatisé comme le grand champion, comme le héros de Belgique. selon toi qu'est-ce que t'as gagné en fait ?
- Speaker #0
ben Ă©coute alors je pense qu'en Belgique de toute façon quand t'es le premier comme j'aurais Ă©tĂ© ça change rien j'Ă©tais le premier belge Ă terminer le VendĂ©e Globe donc je pense que l'emballement mĂ©diatique il aurait Ă©tĂ© lĂ je pense et voilĂ le fait aprĂšs qu'il y ait tout ce dĂ©bat sur cette ligne qui se ferme, qui se ferme pas savoir si les organisateurs vont ĂȘtre un peu complaisants faire... plaies ou Ă©lĂ©gants par rapport à ça. Ăa a rajoutĂ© Ă©videmment de la dramaturgie dans l'histoire, ça a fait grandir l'histoire et que du coup, c'est sĂ»r qu'on passe un peu pour les lucky losers, le gars sympa, le poulidor du moment. Donc on a eu du coup, au niveau international aussi en France, beaucoup de mĂ©diatisation par rapport à ça. Maintenant, on aurait prĂ©fĂ©rĂ© que ça se passe 24 heures avant et qu'il n'y ait pas cet emballement mĂ©diatique juste dĂ» à ça. AprĂšs, c'est comme ça. Moi, ce que je dis, c'est que le job, il est fait. J'ai fait le tour du monde sans escale, sans assistance et en solitaire. Donc, le VendĂ©e Globe, il est fait. Et ça, on ne peut pas l'enlever, mĂȘme si du coup, les ordinateurs, il y a quand mĂȘme un problĂšme de reconnaissance par rapport à ça. C'est des questions rĂ©glementaires, on va dire, qui ne font pas beaucoup de sens, qui sont Ă©muliques par rapport à ça. Mais voilĂ , est-ce que ça vaut la peine de se battre aprĂšs contre eux ? C'est un autre dĂ©bat.
- Speaker #1
C'est quoi la suite ? Comment tu vois les choses ? Comment tu gĂšres justement l'aprĂšs-VendĂ©e Globe ? Et qu'est-ce qui va encore te faire rĂȘver ?
- Speaker #0
la suite concrĂšte c'est qu'on est occupĂ© Ă Ă©crire un livre avec un ami journaliste qui arrivera bientĂŽt dans les rayons c'est prĂ©vu pour fin octobre dĂ©but novembre c'est juste bien pour les cadeaux gĂ©nial pour les cadeaux de NoĂ«l pour la Saint-Nicolas et pour NoĂ«l je fais un appel des pieds donc voilà ça c'est l'idĂ©e ça prend quand mĂȘme pas mal de temps et puis c'est vrai que ça a Ă©tĂ© 4 annĂ©es qui ont Ă©tĂ© vraiment trĂšs pronom trĂšs euphorisante aussi, mais voilĂ , oĂč il y a plein de choses que je n'ai pas eu l'occasion de faire et que je fais maintenant. Et donc, voilĂ , par exemple, tout le mois de juillet, je reste Ă la maison tranquillement. Enfin, rester Ă la maison, c'est un grand mot, mais je m'occupe de plein de choses que je n'ai pas eu l'occasion de faire, que ce soit en administratif. Les impĂŽts. Oui, oui, genre ça. Enfin, voilĂ , donc, non, les impĂŽts, j'ai toujours payĂ©. Mais voilĂ , donc, non, mais plein de petites choses que je n'ai pas eu l'occasion de faire. et puis voilĂ , prendre le temps aussi de... d'ĂȘtre ici, de faire une terrasse, de ne pas devoir chaque fois faire quelque chose avec « ok, dans deux heures je dois ĂȘtre lĂ -bas, dans quatre heures je dois faire ça » . Parce qu'on avait une vie trĂšs organisĂ©e, trĂšs rĂ©glementĂ©e, plus tous les imprĂ©vus, toute la prĂ©paration du bateau, la prĂ©paration du skipper, les impĂ©ratifs mĂ©dias. LĂ , ça permet d'ĂȘtre un peu plus cool, de faire les trucs plus Ă son rythme, on va dire, de se mettre dedans plus en profondeur. Donc, c'est bien aussi. Puis aprĂšs, on a toujours plein de projets. Qu'est-ce qui me fait rĂȘver ? Il y a plein de choses qui me font encore rĂȘver. C'est trop tĂŽt pour en parler.
- Speaker #1
Il faut le temps, j'imagine, aussi, de redéfinir.
- Speaker #0
Oui, moi, j'en vois plein qui sont dĂ©jĂ rĂ©occupĂ©s, nouveaux Ă naviguer, Ă ĂȘtre dans un mode cours, Ă reparler de 2028 pour le projet 2028. HonnĂȘtement, pour moi, c'est trop tĂŽt. J'ai envie de prendre le temps, j'ai envie de savourer tout ça. AprĂšs, on a fait beaucoup de confĂ©rences. Quand j'Ă©tais en Belgique, on a encore pas mal de confĂ©rences. Donc, c'est aussi une chouette activitĂ©. Ăa permet de partager, d'expliquer dans plein d'endroits diffĂ©rents. Et c'est lĂ aussi qu'on se rend compte que le projet a vraiment suscitĂ© beaucoup d'attrait, je dirais, de la part de tout le monde, du grand public. Je suis vraiment impressionnĂ© par rapport à ça. Et donc, ça, c'est top. Ăa permet aussi d'expliquer comment... Parce que les gens, ils voient le VendĂ©e Globe et en fait, c'est que la face visible de l'iceberg. Il y a eu quatre ans, mĂȘme six ans de projet au total. Et comme je dis dans mes confĂ©rences, mon fils, il fait mĂ©decine et en six ans, on est mĂ©decin. Donc, c'est quand mĂȘme pour vous donner l'emploi du projet. Ăa permet d'aller expliquer tout ça. Puis, c'est une source aussi de rentrĂ©e financiĂšre. Je gagne mieux ma vie comme confĂ©rencier que comme skipper. Donc, ce n'est pas rien et c'est quand mĂȘme intĂ©ressant aussi. Donc, voilĂ , tout ça fait... C'est le court et le moyen terme. Et puis, on verra sur le plus long terme les opportunitĂ©s, ce qu'on va dĂ©velopper, ce qu'on peut travailler. Puis, les rencontres qu'on aura. Et il y aura certainement des choses qui vont arriver petit Ă petit.
- Speaker #1
Et je sais que pour toi, c'est aussi important de transmettre. Et donc, tu le fais forcĂ©ment dans les confĂ©rences. S'il y avait un message, entre guillemets, que tu avais envie de vĂ©hiculer, ça serait lequel ? Le message le plus important. Alors, pas de regrets, ça, on a compris. Ăa, c'est sĂ»r. Oui,
- Speaker #0
oui, voilĂ . C'est comme je l'ai dĂ©jĂ dit plusieurs fois. On n'ose pas faire le truc. On a plus un petit VendĂ©e Globe dans la tĂȘte ou dans le cĆur. Et puis, en fait, on n'ose pas se lancer. Mon VendĂ©e Globe, c'est une mĂ©taphore de ça, finalement. C'est des gens qui, Ă 75 ans, se disent « Ah, mais j'aurais dĂ». » Ă 75 ans, il sera trop tard. Mais par contre, Ă 52, 53, 54, 60 mĂȘme, il n'est pas trop tard. C'est l'idĂ©e, oui, c'est l'idĂ©e de pas de regrets. Et puis aprĂšs, si on veut avoir un projet ambitieux quelque part, il va falloir... vraiment sortir de sa zone de confort et ça veut dire faire des sacrifices. Sans sacrifice, ça n'existe pas. Et aprĂšs, si on a un peu de chance et qu'on bosse beaucoup, il faut quand mĂȘme une part de chance pour que tout s'aligne Ă un moment, mais il faut quand mĂȘme aller la chercher et un peu la forcer.
- Speaker #1
Ăvidemment. Je vais finir le podcast par deux petites questions signatures. Je sais qu'il y a une chanson qui fait partie du projet « Je rĂȘvais d'un autre monde » . Je ne sais pas s'il y a une histoire avec cette chanson-lĂ ou pas, mais sinon, est-ce qu'il y a une chanson qui t'a accompagnĂ©e sur le bateau ?
- Speaker #0
Alors oui, il y a une histoire avec cette chanson-là , mais on ne peut pas la raconter. Non, non, voilà , mais elle parle à beaucoup de gens. Et en plus, voilà , c'est tout à fait... Enfin, ce n'est pas par hasard, parce que moi, c'est une chanson qui me parle. C'est une chanson de quand j'étais ado, forcément, mais il n'y a pas que ça. Mais quand je suis arrivé, elle était vraiment d'à propos, parce que moi, quand je suis parti en novembre et quand je suis arrivé en mars, le monde, il a vraiment changé. On est vraiment dans une bipolarisation du monde qui était déjà latente en partant, mais qui est encore plus forte avec l'élection de Trump. Forcément, c'était un petit message aussi.
- Speaker #1
Tu as écouté la musique un peu sur le bateau ?
- Speaker #0
J'ai écouté un peu de musique. On pouvait se connecter facilement, comme j'expliquais. Donc, j'écoutais la radio. Et en fait, c'est rigolo parce que comme on est décalé complÚtement, j'arrivais à me connecter entre 9 et 10 heures du matin sur Tipeee qu'à l'ancienne. Donc, c'était plein de vieux morceaux de « Oh, c'est techno ! »
- Speaker #1
qui parle Ă nos gĂ©nĂ©rations belges de surcroĂźt donc voilĂ c'Ă©tait plutĂŽt sympa trĂšs chouette et la petite derniĂšre est-ce qu'il y a eu un moment on va pas dire de solitude parce que ça c'Ă©tait tous les jours mais oĂč tu t'es vraiment dit mais qu'est-ce que je fous lĂ et qui te fait encore rire aujourd'hui ah oui oui ça a commencĂ© le 10 novembre Ă 6h du matin et ça s'est terminĂ© le 8 mars oui mais
- Speaker #0
vraiment et Ă chaque fois je me dis mais de nouveau Denis avec ta grande gueule t'aurais bien fermĂ© qui a fait de la fermĂ©e, et ça aurait Ă©tĂ© mieux, plus simple. Mais voilĂ , tu te dis ça, et puis, non, aprĂšs, chaque fois, honnĂȘtement, chaque fois que je pensais à ça, je me dis, mais voilĂ , je suis quand mĂȘme, et ça, je l'ai rĂ©pĂ©tĂ© souvent, je suis quand mĂȘme un VIP sur les ocĂ©ans, je veux dire, c'est incroyable de vivre des trucs comme ça. Il n'y a que 140 skippers au monde qui ont terminĂ© Ă VendĂ©e Globe. Il y en a 600 qui vont au sommet de l'Everest chaque annĂ©e, et il y en a 700 qu'on a Ă©tĂ© dans l'espace donc on n'est mĂȘme plus dans ce domaine lĂ donc c'est dire que c'est une telle chance voilĂ c'est un vrai privilĂšge ok on a On en a bavĂ© avant, mais ça reste un privilĂšge, ça reste une chance unique, incroyable d'avoir pu ĂȘtre lĂ , prendre le dĂ©part, enfin se qualifier, prendre le dĂ©part et puis terminer. C'est Ă©norme, il n'y a pas d'autre mot, c'est Ă©norme. Ăa, on a tous le... Tous les skippers, on a le mĂȘme sentiment par rapport à ça. On se rend bien compte que c'est totalement hors norme et c'est vraiment privilĂ©giĂ©. On a trop de chance. C'est pour ça aussi qu'on n'a pas le droit de se plaindre. Parce que mĂȘme si c'est dur, on fait quand mĂȘme quelque chose qui est tellement exceptionnel. MĂȘme s'ils mettaient tout en place, il y a tellement d'alĂ©as avant d'y arriver. MĂȘme quand on est qualifiĂ©, il peut encore arriver tellement de choses dans les quatre mois avant le dĂ©part que parfois, il y a des gars qui ne prennent pas le dĂ©part alors qu'ils sont qualifiĂ©s. C'est Ă©norme. c'est juste une chance incroyable Et ça, c'est vraiment trop sympa d'avoir pu vivre ça.
- Speaker #1
Et je pense que l'Ă©quipe qui t'a soutenu aussi, lĂ tu parlais des bĂ©nĂ©voles, mĂȘme pour eux, ça doit ĂȘtre un vide d'un coup. Ils ont, vous avez vĂ©cu quelque chose de tellement fort que quand ça s'arrĂȘte, ça doit ĂȘtre assez particulier.
- Speaker #0
Ben oui, oui, je pense qu'il y a aussi un poste VendĂ©e Globe pour eux. Donc voilĂ , Ă gĂ©rer. Alors ce qu'il y a, c'est qu'ils sont retournĂ©s dans leur vie. Donc ils ont un mĂ©tier. Donc ils sont retournĂ©s travailler. donc ça permet aussi sans doute de passer plus facilement le cap mĂȘme si c'est sĂ»r que parfois la routine peut sembler encore plus ennuyante qu'avant mais ça fait partie aussi de la gestion quotidienne et des choses comme ça dans un projet hors normes, on sait bien qu'on va revenir Ă des choses qui peuvent paraĂźtre plus embĂȘtantes ou plus futiles mais voilĂ , ça fait partie de la vie tout simplement, donc c'est comme ça c'est bien de... d'avoir fait des chouettes trucs et puis de revenir faire la vaisselle. Vider un lave-vaisselle, ça fait partie des choses quotidiennes et c'est bien aussi.
- Speaker #1
Ăa devient quand mĂȘme pas un kiff, mais bon. Non,
- Speaker #0
mais quand il est vide, il est vide. C'est content quand mĂȘme.
- Speaker #1
En tout cas, Denis, un immense merci parce que je savais que j'allais passer un moment. Mais c'Ă©tait vraiment trĂšs chouette. Je trouve que t'es une personne vraiment chouette, solaire, sympa, accessible et qui nous fait vraiment rĂȘver. Merci pour ce bon moment de partage.
- Speaker #0
Avec plaisir, Ă trĂšs bientĂŽt.
- Speaker #1
Et on attend avec impatience la sortie de ce bouquin pour Noël.
- Speaker #0
Alors, c'est facile, en plus, quand mĂȘme, on a jouĂ© un peu sur le marketing, donc le titre, ce sera « Inclassable » .
- Speaker #1
Ah bah génial, on sait déjà le titre, donc on note « Inclassable » , parfait.
- Speaker #0
Petit pied de nez au passage. VoilĂ .
- Speaker #2
Et voilà , cet épisode est terminé, j'espÚre qu'il vous a plu, si c'est le cas, n'hésitez pas à le partager avec votre entourage. Abonnez-vous pour ne manquer aucun épisode et prenez quelques instants pour laisser un avis ou une note sur votre plateforme préférée. Vos retours sont précieux et m'aideront énormément, merci d'avance et à bientÎt pour de nouvelles aventures.