- Speaker #0
Salut et bienvenue sur Allez, le podcast qui parle d'escalade. Que tu sois en train de pédaler, de courir, de conduire ou de t'entraîner, avec cette émission tu vas pouvoir écouter des grimpeuses et des grimpeurs te raconter leur histoire. Le but c'est qu'ils te partagent leurs visions, leurs expériences, leurs difficultés, bref, qu'ils te transmettent leur passion et t'inspirent à repousser tes propres limites. Allez, c'est un rendez-vous hebdomadaire, dispo gratuitement tous les samedis sur les plateformes d'écoute. et sur YouTube. Allez, à tout de suite. Bonjour à tous les deux. Merci beaucoup d'avoir répondu à mon invitation.
- Speaker #1
Salut.
- Speaker #0
Alors déjà, on va peut-être commencer par des présentations, puisque vous êtes deux derrière le micro aujourd'hui. Il y a donc Laurence et Olivier. Est-ce qu'on peut faire un petit détour personnel sur qui vous êtes ?
- Speaker #2
Sur notre parcours un peu, j'attaque. Donc moi, je suis Laurence Bouillon, je suis une ancienne grimpeuse de compétition. Je faisais de la compétition dans les années 90, j'ai gagné plusieurs étapes de Pays du Monde, et puis le Master d'Arco par exemple. Et ensuite, j'ai continué à grimper en falaise en faisant des voies jusqu'au 8C. Je grimpe encore régulièrement dans ce niveau de performance. Au niveau de mon parcours professionnel, j'ai été rédactrice en chef d'un magazine gratuit qui s'appelait Escalade Mag. Et ensuite, avec Olivier, on a... monter le site qui s'appelle la fabrique verticale sur laquelle je pense qu'on aura l'occasion de discuter un peu plus mais qui est un site qui est un site de partage de connaissances
- Speaker #1
Donc moi je suis donc je suis un grimpeur avant tout J'ai fait une petite expérience de compétition sans grand succès. J'ai commencé assez tardivement l'escalade, en fait j'ai commencé en étant à la fac, j'ai fait ce qui s'appelle actuellement STAPS. J'ai commencé à ce moment là et ça m'a passionné. Donc si on fait référence à mon expérience en falaise, elle est un peu la même que celle de Laurence, on grimpe tout le temps ensemble. J'ai un brevet d'état d'escalade, de ski aussi. Et puis, d'un point de vue professionnel, je suis maître de conférence à l'Université de Corse. Ma spécialité, c'est la physiologie de l'exercice musculaire. Et donc, tout ce qui va avec ça, c'est-à-dire le fonctionnement de l'organisme, l'entraînement.
- Speaker #0
Ok, très bien. Comment vous vous êtes rencontrés, tous les deux ?
- Speaker #2
Dans le cadre de l'escalade, comme tu peux l'imaginer. Je m'en doutais un peu. Ce qui est assez rigolo, c'est que... Moi, mon meilleur ami, quand j'étais à la maternelle, je l'ai complètement perdu de vue. Et il se trouve que je l'ai retrouvé en escalade. Mais des années après, je lui ai dit, tu grimpes, toi. On s'est vraiment croisés par hasard. Et il se trouve que c'était le compagnon de cordée d'Olivier. Voilà, c'est comme ça que j'ai rencontré Olivier.
- Speaker #1
En fait, moi, j'avais fait la première partie de mes études à Grenoble, puisque je suis au départ skieur. Et puis pour faire la thèse, je suis revenu à Clermont-Ferrand, qui est le lieu de naissance de Laurence. Et on s'est rencontrés, on s'est croisés sur le mur universitaire qui était le lieu de rencontre des grimpeurs du secteur.
- Speaker #0
C'était à l'époque où vous faisiez de la compétition déjà ?
- Speaker #2
Oui. Oui, c'est ça, dans les années 90. Et après, j'ai refait un passage par... Après, j'ai continué mes études à Aix-en-Provence. Et j'étais au Pôle France, au CREPS, à Aix-en-Provence, qui ne s'appelait pas encore Pôle France, mais enfin voilà, c'était les prémices de la chose. Et là, il y avait un très beau mur de escalade, qui existait toujours d'ailleurs, et qui permettait aux gens à haut niveau... s'entraîner donc ça fédérait déjà un petit groupe de gens. Pour moi ça a été l'occasion de grimper plus en extérieur, c'est un peu comme ça je me suis mis à la falaise. On avait toutes les falaises autour de Aix-en-Provence à dispo. Les études à Aix-en-Provence, c'était pas mal.
- Speaker #0
Est-ce que vous diriez que vous avez toujours eu un peu l'escalade dans votre vie ?
- Speaker #2
Pour moi, beaucoup. Parce que moi, j'ai commencé à grimper en 82. J'avais 12 ans. Et en plus, c'est quelque chose que j'ai eu. J'ai toujours eu envie de faire, même avant de grimper. Je faisais rire mes parents parce qu'eux, qui n'étaient pas du tout grimpeurs, ils me voyaient emprunter des livres à la bibliothèque municipale, tous des livres de montagne, et ils se demandaient d'où ça venait. J'avais vraiment cette envie de pratiquer. Et lors de vacances à Chamonix, je les ai tellement tannées qu'on a fait une initiation à l'escalade. Ils se sont dit que ça devait être quand même ma voie. Et après, je n'ai jamais arrêté. Sauf les sueurs, sinon ça reste une passion hyper forte qui structure notre vie.
- Speaker #1
Pour ma part, ça n'a pas été vraiment le cas. J'ai lu Friesenroth, mais la première fois où j'ai grimpé, c'était à la fac. Parce qu'on avait un stage à choisir, et j'avais choisi l'escalade avec mon copain de ski. Et puis, ça m'a plu. Il se trouvait que la préparation physique qu'on faisait pour le ski à la fac, on se retrouvait en fin de séance avec les grimpeurs. Il y avait d'ailleurs un des premiers pans sur la fac à Grenoble qui était assez particulier, qui constitue presque une pièce de musée. Et donc on jouait avec eux. Il y a des grimpeurs comme Henri Luc Rille, dont je me souviens très bien, parce que c'était quelqu'un qui faisait partie d'une première équipe professionnelle d'ailleurs à l'époque. Et donc en fait on s'amuse avec eux et puis voilà on s'amusait quoi vraiment. Et puis je fréquentais un peu les grimpeurs mais c'était pas encore une passion vraiment affirmée à tel point que je pense que deux ans après avoir commencé à grimper en fait on a eu un voyage où on s'est dit voilà on est parti pour grimper, on est allé à Séuse, à Séuse on avait pas très de chemin, on était monté droit dans la pente-cul et en haut j'avais pas grimper, ça m'avait gonflé, ça m'avait fait la marche d'accroche, on était pourtant à Séuse quoi. Donc quand j'y repense, ça me fait rire. Et puis, progressivement, ça a supplanté, je faisais du ski, initialement, de la planche à voile, et finalement, l'escalade a supplanté ces deux autres activités. Alors même si je continue à skier, on continue à skier ensemble avec Laurence, l'escalade a, en 3-4 années, finalement, pris toute la place dans ma passion sportive.
- Speaker #0
Alors là, on en parlait juste avant le début, vous êtes en Corse. Alors je me demande comment vous êtes arrivé là. C'est par l'escalade ou c'est…
- Speaker #1
Non, alors en fait, c'est arrivé par le travail. C'est-à-dire qu'une fois que j'ai eu ma thèse, que j'ai été qualifié, j'ai postulé dans les différentes universités qui proposaient des postes. Et j'ai été recruté à l'université de Corse en 1998. C'est ce qui nous a conduit à arriver ici. J'étais allé en Corse avec mes parents quand j'étais tout petit. On n'avait pas d'a priori sur ce pays-là. On s'est dit que soit ça se passe bien et on reste, soit ça se passe mal et on s'en va. On est toujours là. On a été très bien accueillis. C'est un beau pays, les gens sont bien et on s'y convient.
- Speaker #2
C'est un endroit qui est vraiment plaisant, pas seulement pour l'escalade, mais de manière générale quand on a une qualité de vie qui est assez exceptionnelle. Et puis, ça allie la mer, la montagne, la nature avec des paysages qui changent très vite. C'est chouette. Et puis, je trouve que les Corses aussi sont des gens qui gagnent à être connus parce qu'ils ont une réputation terrible sur le continent. des gens vraiment adorables. Et nous, on a vraiment été super bien accueillis.
- Speaker #0
C'est chouette. Alors, c'est vrai qu'il n'y a pas que l'escalade en Corse, mais il y a aussi pas mal quand même d'escalades. Si vous deviez un petit peu vendre la Corse à quelqu'un qui grimpe sur le continent, qui n'est jamais venu en Corse, de quoi vous lui parleriez ?
- Speaker #2
En fait, de la diversité des types de rochers. Des grandes voix, bien sûr hyper connues, qu'on peut faire dans le massif de Babel, des grandes voix grammites. mais peut-être aussi d'autres facettes un peu moins connues, comme le bloc. Il y a pas mal de blocs qui sont ouverts et il y a énormément de potentiel partout, que ce soit sur la côte ou à l'intérieur. Et puis des falaises, finalement on a du calcaire, du granit. Alors évidemment on a un peu moins de falaises qu'en Sardaigne. Mais il y a ce côté quand même très sympa où on a à la fois des grandes bois, des falaises, des blocs, le fait qu'on puisse grimper quasi toute l'année dehors.
- Speaker #1
Alors c'est vrai que c'est une région où les gens viennent principalement en vacances, ils viennent principalement en vacances l'été et on est quand même dans le sud. Donc il y a peu de sites qui fonctionnent réellement à plein l'été. Donc la vision actuellement de... pense qu'on les jantes de l'escalade en corse et c'est une pratique estivale de pratique de vacances finalement qui passe quasiment spécialement porté vers le haut niveau alors il se trouve que quand même dans les grandes voies depuis quand même 5 à 10 ans il ya une dynamique en fait d'ouverture de voies de voies de haut niveau en fait et donc finalement bon ben on a cette voilà on a cette cette facette là aussi qui est ici
- Speaker #0
Alors, si on a déjà entendu votre nom, je pense que c'est à travers les livres que vous avez publiés. Je pense notamment à un livre qui est sorti en 2004, que beaucoup de gens connaissent, qui s'appelle L'escalade des performances D'ailleurs, que j'ai retrouvé dans ma bibliothèque. Je le montre quand même. Parce que maintenant, je ne sais pas s'il est encore en vente.
- Speaker #2
Quasi épuisé, on en a... On est tord.
- Speaker #1
On est tord,
- Speaker #2
mais on est franchi. et en fait on a failli le rééditer enfin Enfora nous avait contacté pour une réédition et puis finalement la mise à jour était assez compliquée à faire on se coltinait un peu le côté très aride de l'ouvrage on voulait le rendre un peu plus pratique, utilisable avec des fiches pratiques des exercices immédiatement faisables et donc quitte à le remanier, finalement on a eu envie d'en faire un deuxième qui s'appelle Escalade à bloc et qui là pour le coup est beaucoup plus organisé sous forme de fiches et qui est assez complémentaire finalement par rapport au premier qui balayait vraiment de manière théorique tous les grands chapitres de la pratique et puis que Olivier avait voulu très axer justement physio pour...
- Speaker #1
Pour faire un petit peu le point à l'époque sur les connaissances, le stade où elles en étaient à l'époque. Et surtout, dans l'escalade des performances, ce à quoi on avait tenu, mais encore une fois, il faut recontextualiser par rapport à il y a 20 ans, c'est-à-dire finalement, par rapport à tout ce qui se faisait sur l'entraînement. Les repères qui étaient utilisés classiquement, alors on ne va pas rentrer dans des schémas trop techniques, mais les repères utilisés classiquement par rapport à l'intensité, c'était uniquement des pourcentages par rapport au maximum, 70%, 80%, etc. Or, l'escalade, c'est une activité qui est quand même éminemment complexe et ce n'est pas un geste standardisé. Et donc, finalement, ces repères qui étaient habituellement utilisés à ce moment-là pour essayer de définir les intensités de travail pour faire de la force, d'arriver, etc. Tellement, il n'y avait aucun sens en termes de personnes, c'est-à-dire que tellement comment savoir si j'étais en grimpant à 70 ou à 80 de mon maximum. Et donc, ce qu'on avait vraiment voulu faire à ce moment-là, c'était d'arriver à donner des repères qui n'étaient pas forcément, d'ailleurs, qui n'avaient pas forcément une valeur scientifique à tester, mais qui étaient des repères qui pouvaient être utilisés par les grimpeurs pour se construire. puisque c'était aussi notre objectif que chacun puisse se construire un entraînement et commencer à planifier son entraînement, à trouver des exercices, etc. Et donc, c'était vraiment l'idée de départ. Alors maintenant, avec le travail qui a été fait depuis quelques années par Laurent Vigouroux et par Clément Lechapetois avec la Smartboard, ces aspects-là ont vraiment beaucoup évolué. On a passé la marge d'après par rapport à ces... ces repères d'entraînement mais c'était notre objectif à l'époque
- Speaker #0
Vous aviez cette casquette d'entraîneur en supplément de votre activité de grimpe et puis aussi en supplément de ce que tu faisais à l'université
- Speaker #2
Olivier quand est-ce que c'est arrivé cette envie d'entraîner des grimpeurs et de leur fournir des clés de progression le livre finalement est antérieur à notre pratique d'entraîneur Olivier a beaucoup coaché en ski... pas mal en ski, en escalade on avait aussi aidé des copains à se préparer par exemple pour le BDE, et puis c'est vrai qu'en 2004 quand on a fait l'escalade et les performances, l'envie de départ c'était de croiser un peu nos compétences et nos parcours, c'est-à-dire que moi j'avais un parcours en compétition avec une expérience d'entraînement assez empirique. finalement et Olivier avait cette connaissance théorique et on avait vraiment envie de croiser les deux et après pour ce qui est de l'entraînement,
- Speaker #1
comment parler en est-ce que là ? De mon point de vue, l'entraînement a finalement, dès mes études en fait, a fait partie de ma pratique, c'est-à-dire que j'avais fait une maîtrise, ce qui s'appelle maintenant en astral, une maîtrise en entraînement. Et donc, j'avais entraîné en ski depuis que j'avais 20 ans, j'ai entraîné des gamins en ski. Donc, ce mode de transmission, plus que l'enseignement, m'intéressait dans la mesure où l'entraînement est vraiment l'interface entre finalement des connaissances scientifiques et puis ce qu'on a dans la relation interpersonnelle avec. Et donc, pour revenir à l'escalade, quand on a démarré… la fabrique verticale, l'entraînement était toujours en arrière-plan dans nos pensées, mais on n'avait pas fait un objectif de façon claire. Et puis, c'est qu'on a été sollicité par le père de Pyrène Santal, en l'occurrence. Et puis, on s'est posé quand même pas mal de questions, parce que le fait d'entraîner à distance, c'était quelque chose qui allait être nouveau pour nous. qui n'allait pas sans réticence parce que finalement l'entraînement à distance met beaucoup de choses de côté justement dans la relation interpersonnelle, on n'est pas là avec l'athlète où il grimpe, où il s'entraîne. Et puis voilà, on a tenté l'expérience et finalement on a découvert une forme d'activité qui apporte beaucoup de satisfaction, qui est complexe mais qui est aussi très riche.
- Speaker #0
En pratique, la date, c'est 2015. Là, vous parlez du site La Fabrique Verticale, qui est à la fois intéressant à un médian, puisqu'il y a beaucoup d'articles de connaissances générales, de tests sur la santé, etc. Il y a énormément de contenus de très bonne qualité. Et il y a aussi cette partie coaching. et que vous avez commencé en 2015.
- Speaker #2
Oui, c'est-à-dire que ça faisait un peu partie de... Le site, c'est chouette que tu le définisses comme ça, en tout cas, ça fait plaisir, parce que c'est vraiment ce qu'on voulait, c'est-à-dire balayer un peu tous azimuts, tous les champs de la connaissance en escalade, c'est-à-dire à la fois une vision des tests produits, d'avoir des conseils d'entraînement. Oui, c'était... vision un peu à 360 degrés de l'escalade sur le plan et puis la partie entraînement on l'avait un peu on l'avait quand même dans un coin de notre tête on s'était dit quand on aura bien lancé le site pourquoi pas quelque chose qu'on pourra proposer mais finalement la demande de Patrick Santal pour sa fille nous a devancé et puis par le bouche à oreille après Et après comme elle, elle a fait des super résultats en compétition, elle a gagné les championnats de France en cadette. Et la même année, elle a été surclassée, donc elle a fait les championnats de France senior, et puis elle a fait les trois, les troisièmes. Donc tu vois, c'était vraiment chouette, c'était une belle réussite. Et parallèlement, elle a fait des Coupes d'Europe chez les jeunes, et puis des voies en falaise, donc c'est vraiment… épanouie et puis en en parlant enfin les gens autour d'elle ont eu envie elles se sont dit bah tiens mais comment ça se fait ça a vachement progressé ces dernières années, qui c'est qui t'entraîne, etc. Et par le bouche à oreille, comme ça, on s'est mis à entraîner un peu des gens dans sa région et puis petit à petit, ça a s'aimé. Mais en final, c'est vrai qu'on n'a pas beaucoup communiqué sur cette activité, sur le site, parce qu'on a beaucoup de demandes spontanées de grimpeurs et qu'on a déjà du mal à... Comment on... On cherche vraiment à avoir une relation très étroite avec le grimpeur parce qu'on ne propose pas des recettes. C'est-à-dire qu'on ne va pas donner un plan d'entraînement l'an dernier qui serait applicable à tous les grimpeurs. On a vraiment une phase de premier rendez-vous en vidéo pour rencontrer la personne, cerner bien ses objectifs. un audit de ce qui se fait déjà en entrainement. Et puis après, petit à petit, dans le processus, on avance comme ça pas à pas et on propose vraiment de l'entraînement à quelques humains. Et donc pour faire ça, on ne peut pas avoir, comme tu l'imagines, en étant deux entraîneurs, là maintenant on est plus nombreux, mais à l'époque au début on était deux, ça ne nous paraissait pas possible.
- Speaker #1
tous les grimpeurs. Il a fallu en fait, il a fallu aussi apprendre, avec cette demande là on a été projeté dans le grand bain directement, c'est-à-dire que se poser la question de la transmission, des questions qui étaient très pragmatiques, c'est-à-dire comment transmettre le programme, sous quels moyens, et ensuite la question qui était très importante c'était comment faire en sorte que la description parce que finalement on dit on peut très bien dire tu vas faire de la force, tu vas faire de la continuité enfin voilà le bas c'est un peu de ça mais finalement in fine quand l'athlète reçoit son programme il faut qu'il comprenne le sens, qu'il ait des repères très précis etc. donc ne serait-ce que dans le libellé, dans l'explication de chaque licence ça a demandé en fait un travail assez important pour réduire la distance et pour pas que la personne se retrouve devant un livre de recettes qui soit complètement impersonnel voilà donc c'est là où Cette aventure-là, elle a été intéressante dès le début et elle nous intéresse toujours. Et sachant que la cerise sur le gâteau à chaque fois, c'est lorsque, bien, on a la possibilité de grimper vraiment, enfin de se rencontrer avec les personnes. Alors avec Pyrène, ça a été finalement assez rapide. Je pense que c'est la personne avec qui ça a été le plus rapide parce que finalement, sur un sujet où on était en Autriche, elle avait une... couple d'Europe à côté et puis on a grimpé ensuite une semaine, 15 jours ensemble et ça s'est reproduit avec d'autres grimpeurs et c'est vraiment des moments qui sont exceptionnels, en tout cas qui sont significatifs dans ces relations-là.
- Speaker #0
Ce qu'il faut bien préciser et j'ai vraiment envie que les personnes qui nous écoutent le comprennent, c'est que tout se fait à distance et Et donc, il y a quand même cette problématique, effectivement, c'est ce que vous disiez, de transmettre un programme alors que vous n'êtes pas derrière les personnes que vous coachez à l'entraînement. Vous ne savez pas quel niveau de forme ils ont, vous ne savez pas dans quel état mental ils sont non plus.
- Speaker #2
C'est pour ça qu'on échange quotidiennement avec les grimpeurs. On se crée des groupes WhatsApp où on est tous les entraîneurs de la fabrique verticale. C'est-à-dire que... Il y a Olivier et moi et puis maintenant il y a plusieurs entraîneurs qui nous ont rejoints dans l'équipe. Il y a Mélanie Son, Harry aussi qui entraîne avec nous. Et maintenant aussi Pyrène parce que là vous pouvez vous plaider. Donc voilà, on se crée des groupes même s'il y a un seul des entraîneurs qui est l'interlocuteur privilégié de l'accord. On est tous là dans le groupe et en capacité de répondre si une question se pose à nous.
- Speaker #1
Les grimpeurs sont les éléments centraux de chaque dispositif. C'est-à-dire que nous, on met à leur disposition des éléments par lesquels on va pouvoir recueillir des feedbacks à l'issue des séances et des feedbacks quotidiens sur leur niveau de motivation, sur leur niveau de forme, sur leur niveau de fatigue. Là aussi on s'adapte en fonction des grimpeurs, certains ça se fait par le moyen du WhatsApp, par d'autres ça se fait par le moyen de formulaire que l'on diffuse au travers de l'interface qu'on utilise. Mais en tout cas, nous, c'est notre première préoccupation, c'est d'avoir quand même, de recueillir des informations de la part des grimpeurs pour adapter au mieux ce qu'on va leur proposer les jours et les semaines qui suivent.
- Speaker #0
Alors, j'imagine qu'il n'y a pas une réponse à la question que je vais vous poser, mais quel est le profil d'un peu type des personnes qui vous contactent ?
- Speaker #2
Eh bien, justement, c'est ça qui est assez… C'est chouette, c'est qu'il y a une grande diversité. Pour imaginer, au départ, moi, je m'étais imaginée que, quand le père de Pyrène nous a contactés, je me suis dit, tiens, on va faire, en gros, on va avoir des jeunes compétiteurs. Et en fait, ce profil-là, il n'y en a pas tant dans l'équipe des personnes. Et il y a un peu tous les niveaux de pratique, toutes les motivations. Ça peut être un grimpeur, par exemple, qui a commencé à faire du bloc en salle il y a deux ans, en salle à Paris, et puis qui se trouve confronté un peu à un plateau, qui arrive par exemple à faire les bleus de la salle, puis à faire les rouges, ce genre de problématiques.
- Speaker #1
Ça peut être un guide, des guides d'Haute-Montagne qui… pendant la saison hivernale où ils font beaucoup de ski, finalement n'ont pas beaucoup de temps pour penser à leur entraînement et ont des besoins d'aide sur l'organisation. Et ça peut être là en l'occurrence, je pense à des gens qui sont même des amis maintenant, qui sont des très forts grimpeurs, qui ont fait du 8 à bloc quand ils étaient jeunes, et à qui on propose notre soutien pour organiser leur temps libre. disponible pendant la saison de ski pour arriver à la saison d'été.
- Speaker #2
Ça peut être aussi des cadres, des professions où il y a déjà une grosse surcharge de travail et ils ont déjà des agendas qui sont bien remplis et ils n'ont pas envie en termes d'organisation de se rajouter une charge mentale sur le fait d'organiser leur propre entraînement. même si pour la plupart, ils auraient les compétences pour le faire. Mais donc, ils viennent vers nous un peu pour qu'on organise un peu leurs pratiques par rapport à leur agenda professionnel et que ça s'agence au mieux possible.
- Speaker #0
D'ailleurs, c'est quelque chose dont on a parlé récemment avec une de vos élèves. Je ne sais pas si on peut dire élève, mais on a parlé beaucoup de vous avec Delphine Chenevier.
- Speaker #2
Ah oui.
- Speaker #1
Oui, alors élèves, ça ne correspond pas vraiment, le terme n'est pas très approprié dans la mesure où même si on souhaite transmettre des éléments de connaissances qui permettront ensuite aux grimpeurs d'être autonomes, on ne les considère pas comme des élèves, c'est plutôt des partenaires parce que finalement on retire aussi beaucoup de la relation qu'on a avec eux et encore une fois ce sont eux les grimpeurs qui… qui doivent diriger la barque en quelque sorte. Et nous, on n'est là que pour les guider. Et c'est en l'occurrence ce qui s'est passé avec Delphine, qu'on connaît par ailleurs depuis très longtemps. Et ce qui était assez intéressant avec elle, du point de vue du travail, c'était que c'était une grimpeuse d'expérience et qui nous a sollicité suite à une blessure à l'épaule et pour laquelle on a fait que... peut orienter sans doute un peu le travail par rapport à des besoins, par rapport à des objectifs qu'elle pouvait avoir. Et au final, ça a marché et c'est très bien.
- Speaker #0
Je pense à une autre personne qui est une compétitrice française en para-escalade qui s'appelle Solène Piret, qui a fait appel à vous aussi.
- Speaker #1
Oui, et Solène, c'est une super aventure puisque... En fait, la première, la prise de contact avec Suleyn, l'objectif était un peu en arrière-plan, mais qui était peut-être celui de faire de la compétition. Mais il était déjà de résoudre des difficultés qu'elle pouvait ressentir, difficultés qui peuvent se résumer en termes de douleur, en termes d'inconfort, et qui étaient liées à sa forme de pratique.
- Speaker #0
assez caractéristiques. Et donc, finalement, le travail, la première étape de la collaboration avec elle, ça a été de travailler sur des aspects posturaux, plus que sur de l'entraînement lui-même, même si ça se traduisait, de son point de vue, par des entraînements, une pratique régulière, organisée, etc. Et puis, finalement, la motivation pour la compétition, on va dire, s'est sans doute accrue. Et puis... a commencé finalement une relation qui était très sympa, à trois, une relation triangulaire, puisqu'en fait, à l'époque, son interlocuteur dans le club, c'était Harry Ljontos, dont on a parlé tout à l'heure. Et finalement, les premiers championnats du monde qu'elle a gagnés, finalement, ça a été le résultat de cette collaboration. Ça a été le résultat de son travail à elle, prioritairement, parce qu'elle s'est beaucoup, beaucoup investie. Et puis, c'était le résultat d'une relation triangulaire dans laquelle chacun a pris sa petite part pour arriver à ce résultat-là. Donc, c'est une aventure qui se continue encore aujourd'hui et qu'on est très content de continuer. Parce que, par ailleurs, on attache beaucoup d'importance au personnel même. C'est-à-dire, peu importe que la personne soit championne du monde ou qu'elle fasse du 5D, la qualité de la relation humaine aussi est primordiale. pour nous. Et en l'occurrence, avec Solène, la qualité de la relation, elle est excellente. C'est une belle personne. On est content, au-delà de tous ces résultats, de travailler avec elle.
- Speaker #1
Super. Big up à Solène. Et puis, pour sa super année aussi.
- Speaker #0
Oui, et puis c'est dur parce que là, en fin de compte, c'est bien de gagner une fois, mais là, il fallait qu'elle continue à gagner. Le fait d'avoir un statut à défendre, elle était attendue au tournant. Pour elle, je ne pense pas trahir quelque chose, mais il y avait quand même beaucoup de pression pour ce championnat du monde-là. Et elle a maîtrisé.
- Speaker #1
C'est clair. Vous le disiez tout à l'heure, vous n'arrivez pas toujours à honorer les demandes qui sont faites. Est-ce que... Comment est-ce que vous... Comment est-ce que vous décidez finalement que vous n'allez pas pouvoir coacher une personne ? Est-ce qu'il y a des critères ?
- Speaker #0
Le critère, c'est un critère de nombre. C'est un critère bêtement quantitatif. Nous, on considère qu'au-delà d'un certain nombre de grimpeurs, on ne pourra pas assumer de manière satisfaisante la relation. Et donc, à ce moment-là, ce qu'on propose aux personnes, c'est de nous recontacter plus tard. Sachant qu'évidemment... On fonctionne d'une façon qui est extrêmement souple dans la mesure où il n'y a aucun engagement en termes de durée haute. C'est-à-dire que si la personne, au bout d'un mois, elle s'aperçoit que la relation ne lui convient pas, elle décide d'arrêter et puis voilà, on s'arrête. Ou alors ça continue plusieurs années. Donc on ne peut pas savoir à l'avance pour combien de temps on s'embarque ensemble. Et donc, c'est un peu au gré de turnover que se fait le recrutement. Après, sur des personnes qui, chez des grimpeurs, qui ont assez peu d'expérience d'escalade et qui nous contactent, chez qui on détecte que finalement les besoins sont sans doute plus liés à l'apprentissage de l'escalade elle-même qu'à des besoins de renforcement musculaire, j'allais dire qu'on fait en sorte de suggérer à la personne qu'il y a peut-être d'autres façons d'envisager. d'autres manières d'envisager leur progression à ce moment-là, c'est-à-dire en regardant, en grimpant avec des grimpeurs plus forts, éventuellement en travaillant avec quelqu'un qui est diplômé mais sur place, qui va les aider à progresser techniquement avant de venir faire de la préparation. C'est un peu ce qu'on est en train de penser.
- Speaker #2
Oui, parce que pour ce qui est des corrections techniques, on fonctionne beaucoup en échangeant des vidéos, mais je trouve que ça ne remplace pas quand même le fait de... d'être vraiment sur place et de grimper avec la personne.
- Speaker #0
Il y a toujours, finalement, le feedback qu'on peut apporter, il aura toujours du retard par rapport à l'émission de la vidéo. Donc, il y a toujours ce petit gap temporel, ce petit hiatus qui fait que nous, on n'agit pas directement sur la... Si je m'exprime un peu plus clairement, quand on regarde un grimpeur grimper, quand il descend de la voie, on lui dit tiens, tu as fait ça, tu as fait ci, est-ce que tu as ressenti ça, est-ce que tu as ressenti ci ? Et donc ça peut faire sens pour le grimpeur qui vient de vivre l'expérience corporelle. Dès lors qu'il y a un média qui s'interpose, c'est-à-dire que la vidéo ou autre, il y a une distance temporelle. qui font place et du coup nous la correction qu'on peut faire derrière elle sera un petit peu en décalage et le lien avec les sensations du grimpeur il ne sera pas forcément directement là. Donc c'est sûr pour des grimpeurs qui sont au démarrage de leur expérience on les incite plus finalement à avoir une progression qui est plus axée sur la pratique elle-même et une pratique éclairée notamment par le regard d'autres personnes. qui va leur permettre de progresser de façon harmonieuse, sachant en outre que le fait de grimper, ce n'est pas naturel, de tirer sur des prises avec les doigts qui ne sont pas habitués à faire ça, c'est quelque chose qui n'est pas naturel. Donc, les sollicitations déjà de l'escalade sont suffisantes pour permettre une progression physique.
- Speaker #1
Et puis, il y a aussi cet aspect de comprendre ce qu'on fait, de ressentir un petit peu aussi ce qui se passe. et de pouvoir l'expliquer parce que sinon, à distance, c'est vraiment compliqué de pouvoir apporter du conseil.
- Speaker #2
C'est ça, de verbaliser ce qu'on fait au niveau des boutons, des placements,
- Speaker #1
c'est sûr. Il y a une question qui me vient parce que je regarde le livre juste à côté. Je me demande, puisqu'il a été écrit il y a plus de 20 ans maintenant, s'il y a des grands principes sur l'entraînement et à propos de la progression qui ont changé. depuis que vous avez écrit ce livre ?
- Speaker #0
Je pense que ce qui a évolué, ce qui est normal, c'est des conceptions liées à la planification. C'est-à-dire qu'il n'y a pas une planification unique, il y a plein d'observations.
- Speaker #1
Est-ce que je peux t'interrompre juste une seconde ? Qu'est-ce que c'est la planification ?
- Speaker #0
La planification, c'est... Comment je vais organiser mon entraînement au fil des...
- Speaker #2
À l'échelle d'une saison.
- Speaker #0
À l'échelle d'une saison, au fil des semaines, au fil des mois, pour parvenir à mon objectif. Donc, qu'est-ce que je dois développer comme qualité ? Dans quel ordre je dois développer ces qualités ? Est-ce que je dois les développer de façon simultanée ou de façon successive ? Voilà, c'est toutes ces questions-là qui se posent et qu'on... auxquels on cherche à apporter une réponse satisfaisante en planifiant l'entraînement.
- Speaker #1
D'accord. Est-ce que c'est la même chose que la périodisation ? D'accord. Donc sur la planification, il y a des choses qui ont évolué, tu disais.
- Speaker #0
Oui, puisque finalement, un des principes de l'entraînement, c'est que lorsqu'on a... réaliser, on va dire, une planification donnée, lorsqu'on s'est déjà entraîné, lorsqu'on a déjà reçu une forme de stimulation, on s'est adapté à cette stimulation-là, et en général, si on reproduit la même stimulation, que ce soit à l'échelle de la séance ou à l'échelle de l'année, ça marche moins bien. Donc, d'une année sur l'autre, en fait, on est conduit, en tant que pratiquant, à faire évoluer notre pratique et à trouver d'autres moyens d'organisation pour pouvoir solliciter. aller plus loin dans la sollicitation et donc continuer à progresser. Donc de fait, depuis 20 ans, des choses qu'on pouvait faire quant à l'organisation du développement des qualités les unes par rapport aux autres ont forcément évolué, puisque à un moment donné, on pouvait plus reproduire des choses que d'une année sur l'autre. Ça n'avait pas tellement de sens, et surtout plus d'efficacité.
- Speaker #1
Ce que tu veux dire, c'est qu'on ne peut pas appliquer les mêmes recettes d'une saison à l'autre. Ça, ça ne marche pas.
- Speaker #0
Oui, on peut. On est amené à les faire évoluer parce que si on les applique stricto sensu, c'est-à-dire si on reprenait une planification donnée et qu'on fasse exactement la même chose l'année suivante, ça ne marcherait pas parce qu'on n'est plus la même personne, d'une part. Le contexte a pu évoluer. Si on est un adolescent, on a changé. On n'a plus les mêmes qualités. Et puis surtout, si je recontextualise par rapport aux gens qu'on entraîne, les gens qu'on entraîne, ce n'est pas quelqu'un qui... qui ont la possibilité de s'entraîner et même, je pense même à Solène, ce ne sont pas des gens qui peuvent s'entraîner 40 heures par semaine. Ce n'est pas Adam Ondra qui peut faire trois séances par jour. Donc, des gens travaillent, ils ont des contraintes temporaires, ce qui fait que on n'a pas le loisir de pouvoir tout entraîner ce qu'on souhaite entraîner sur une saison. Donc, on est obligé de faire des choix qui sont, on va dire, les plus cohérents par rapport aux objectifs qui sont visés et ça laisse aussi la place, finalement, d'une année sur l'autre. de faire évoluer ses choix vers d'autres qualités pour construire des grimpeurs complets, pour aller vers d'autres objectifs.
- Speaker #2
Après, il y a des grands principes qui restent valables, qui étaient vrais il y a 20 ans, et qui sont toujours, comme le fait de… d'avoir de la progressivité dans l'entraînement, d'être régulier dans l'entraînement. La progressivité, la régularité, l'alternance des sollicitations, ça c'est des règles qui sont très classiques, qui sont utilisées dans d'autres sports et qui restent vraies.
- Speaker #1
Si je vous comprends bien, est-ce que ça vous arrive de réorienter une personne par rapport à ses objectifs parce que justement, il faut réussir à faire des choix et les choix ne sont pas toujours compatibles avec peut-être ce qu'ils veulent faire ou alors est-ce que vous vous adaptez en fonction de l'objectif final de la personne ?
- Speaker #2
Comme dit Olivier, quand tu as des grimpeurs qui n'ont pas beaucoup de temps pour s'entraîner, forcément il va falloir hiérarchiser il va falloir donner des priorités et ces priorités elles vont découler et ben... d'une part des qualités et des lacunes des grimpeurs, et d'autre part des projets qu'ils peuvent avoir en falaise. C'est-à-dire qu'il faut faire croiser les qualités du grimpeur avec les qualités à développer pour enchaîner l'aventure.
- Speaker #0
Et après, il se trouve aussi que pour tous les grimpeurs, on revient aussi aux grimpeurs eux-mêmes qui sont le centre de notre réflexion ce sont des personnes qui grimpent parce qu'elles ont une passion, une passion sportive c'est un loisir pour la plupart du temps donc ça veut dire que l'entraînement qui est associé à ce loisir là pour qu'il fonctionne et même je dirais avant tout il faut qu'il puisse être réalisé avec joie et donc notre première préoccupation va être l'endance, c'est-à-dire que tellement un mondain on peut prendre certaines libertés, on va dire, avec des conceptions même scientifiques de l'entraînement. Faire en sorte que les entraînements qu'on va proposer soient agrapes, soient adaptés aux contraintes de la personne. J'ai une heure entre midi et deux. Si on dit j'ai une heure entre midi et deux, moi si on me dit ça, quand je vois que nous on s'échauffe, il nous faut 40 minutes, il ne nous reste plus grand-chose derrière. Donc voilà, là on va prendre... En fait, on va prendre... peut-être des libertés par rapport à des nécessités physiologiques et qui sont validées scientifiquement pour faire en sorte que la personne puisse quand même passer une heure où elle va s'entraîner, où elle va faire quelque chose qui est efficace, bien qu'on sache a priori qu'il aurait mieux valu que ce soit peut-être deux heures avec un échauffement un peu plus long, etc. Donc on est vraiment dans cette quête de... de trouver le meilleur compromis qui soit entre la liberté des personnes, leurs envies, ce qui nous conduit des fois à recadrer aussi des objectifs, ou en tout cas à reformuler des objectifs qui soient plus cohérents avec les possibilités des grimpeurs, et puis le plaisir qu'ils vont aussi avoir à s'entraider, parce que c'est sans doute la première chose qui vaut. On peut avoir des exemples de grimpeurs qui vont faire n'importe quoi, mais qui ont plaisir à faire ce qu'ils font. qui sont convaincus que ça va marcher et à la fin ça marche quand même.
- Speaker #2
Une grosse partie du travail est aussi souvent de formaliser, de les amener à verbaliser leurs objectifs. Beaucoup de grimpeurs arrivent en disant j'ai envie de progresser Progresser, mais dans quel domaine ? C'est vague. Plus tu as un objectif qui va être précis, mieux ce sera parce que tu vas pouvoir adapter l'entraînement, tu vas pouvoir réfléchir finement à ce que tu fais et utiliser au mieux le temps.
- Speaker #1
Un objectif précis, d'après vous, c'est quoi ?
- Speaker #0
Un objectif précis, c'est un objectif qui, d'une part, est réalisable, qui n'est pas utopique. si quelqu'un fait du CISA il nous dit je veux faire la Dura Dura l'année prochaine on va lui dire que c'est pas réaliste c'est quelque chose qui peut dont on va pouvoir mesurer la réalisation c'est à dire qu'à un moment donné on pourra dire ok j'ai envie de faire telle voie à Saint-Léger-du-Ventoux par exemple je veux faire le mur des Cyclopes au Ashtanage et du Ventoux au mois de juin 2024. Au mois de juin 2024, on pourra voir si la personne aura effectivement réalisé ce boulot ou pas. Et c'est un petit peu différent. C'est-à-dire que nous, en fait, on va différencier des objectifs d'entraînement et des objectifs de réalisation. Là, on parle d'objectifs de réalisation. Et ce qui va baliser la préparation, ça peut être des objectifs ou des buts d'entraînement. C'est-à-dire que la personne, on peut dire, voilà, pour faire cette voie-là, il faut que tu sois capable de faire, je vais dire n'importe quoi. 10 tractions à un bras, où tu sois capable de tenir 20 secondes sur telle prise. Ça fait partie des objectifs d'entraînement. Donc, ce qui donne sens quand même à l'entraînement des personnes, c'est d'avoir des objectifs qui soient clairement verbalisés et qui soient identifiables. C'est-à-dire, j'ai envie de faire telle voie à tel moment, ou j'ai envie de faire un podium. Par exemple, l'année dernière, l'objectif de Lison Bernus, qui est une autre grimpeuse que l'on entraîne, son objectif, c'était d'être sur la boîte aux championnats de France de difficulté. Donc, à l'issue de la saison, elle était sur la boîte, donc l'objectif était actif.
- Speaker #2
Et même quand on dit, par exemple en falaise, il y a des grimpeurs qui vont nous contacter et qui disent j'aimerais faire du huita Alors, ok, du huita, quel huita ? Est-ce que tu as déjà mis les doigts dans un huita ? Est-ce que tu as déjà des voix en tête qui t'ont rêvé ? Et c'est toujours… Ce qui est important quand on s'entraîne, c'est de mettre du sens derrière ce qu'on fait, parce que sinon on enchaîne les séances. et puis comme des robots, mais comme on n'est pas des robots, ça ne fonctionne pas, il faut qu'il y ait un trait de lumière.
- Speaker #0
Et puis par rapport à l'objectif, en fait, quand on dit qu'on s'entraîne par rapport à un objectif, ou en vue d'un objectif, ça veut dire qu'en fait, on fait en sorte de tout mettre en œuvre pour qu'au moment où on va se confronter à la réalisation de cet objectif, notre corps puisse réaliser et s'adapter aux contraintes qui sont proposées par l'objectif. Donc ça veut dire que autant... autant dire je veux faire du 8a n'a aucun sens autant dire je veux faire telle voie qui va faire 30 mètres de haut dans du dévers sur du pouding ou dans des trous avec un crux au premier tiers ou un crux au dernier tiers, ça a du sens parce qu'en fait on va pouvoir finalement préparer la personne à répondre à cette contrainte là de la meilleure manière qu'il soit au moment où elle souhaite c'est intéressant de le dire parce que plus on est spécifique
- Speaker #1
et plus on est capable de verbaliser ce qu'on veut faire, plus finalement on a des chances d'y arriver parce qu'on sait sur quoi on doit travailler. Exact. Alors, je me demandais un petit peu en termes d'outils, la palette d'outils que vous avez à votre disposition en tant qu'entraîneur, qu'est-ce que vous avez en fait pour aujourd'hui permettre à des gens de progresser ?
- Speaker #0
Alors, en termes d'outils, c'est-à-dire de...
- Speaker #1
Alors, oui, ça peut être une poutre, un pan, une barre de trésor, un mur, un bloc.
- Speaker #2
On utilise avec les grimpeurs régulièrement. Justement, on essaie de s'adapter vraiment à l'outil que la personne a à sa disposition. Mais oui, ça peut être.
- Speaker #0
Au minimum, c'est au minimum la poutre. C'est vrai que pendant le confinement, pour donner un exemple un petit peu décalé, pendant le confinement, on a été beaucoup sollicité et on avait des grimpeurs. qui ne disposaient chez eux que d'une barre de traction. Donc, il est certain qu'avec une barre de traction, on ne peut pas aller très loin dans la spécificité de l'entraînement. Donc, à ce moment-là, notre travail a consisté à proposer des choses qui étaient réalisables, qui pouvaient avoir un intérêt ensuite quand la personne allait regrimper avec cette simple barre de traction. Donc, je dirais que finalement, pour nous, plus la personne a d'outils à sa disposition, plus on a de choix. dans l'outil qu'on va privilégier à telle ou telle période. Mais bon, il est vrai que la poutre, et même en tant que pratiquant, la poutre, c'est vraiment un outil qui n'apprend pas à grimper, mais qui reste néanmoins une vraie valeur sûre pour progresser physiquement.
- Speaker #1
Quand on est sur une poutre, on ne grimpe pas. Alors, est-ce qu'il vaut mieux grimper ou est-ce qu'il vaut mieux être sur une poutre ?
- Speaker #0
Ah ben, si on a le choix.
- Speaker #2
Je pense qu'il vaut mieux grimper.
- Speaker #0
Voilà, pareil.
- Speaker #1
Mais est-ce que ça, c'est toujours la réponse alors ? Si on a le choix entre s'entraîner et être en falaises.
- Speaker #0
C'est grimper, c'est pour ça, je reviens à ce que je disais tout à l'heure, c'est grimper de façon éclairée. C'est-à-dire, si la personne va tous les soirs à la salle en grimpant, et j'ai en tête un copain qui faisait ça il y a très longtemps. Le résultat, c'est que la personne va être fatiguée de manière chronique, elle ne va pas progresser. Et en fait, cette non-progression, elle découlera directement de sa pratique, qui est une pratique non réfléchie, non éclairée ou non réfléchie. Finalement, si je parle d'une pratique réfléchie, c'est-à-dire quelqu'un qui va faire du blog, par exemple. On voit par exemple dans une salle de blog, quelqu'un qui essaye un blog. Il essaye, il tombe, il récupère. un peu, il réessaye, il tombe au même endroit. Il récupère, il réessaye, il tombe au même endroit. Et en fin de compte, si cette personne-là avait eu, dès la première chute, une forme de réflexion pour identifier quelles étaient les raisons réelles pour lesquelles elle était tombée. Peut-être que finalement, on n'aurait pas une personne qui reproduit la même erreur, essai après essai, alors que cette personne-là, à la fin de la séance, aura pu avoir la sensation juste de s'être entraînée, parce que physiquement elle sera rôtie, mais elle n'aura rien appris. Alors je suis un peu caricatural, mais elle n'aura rien appris. Et surtout, elle n'aura pas... eu les clés pour finalement mieux faire la fois d'après. Donc finalement, la progression lorsqu'on va grimper, elle va se faire, je dirais, entre les moments d'escalade, par un travail cognitif qui est très compliqué, qui est très long, et justement qui demande d'être éclairé. Et c'est là où le regard d'une personne extérieure va être intéressant, parce qu'elle peut nous permettre de comprendre des choses qu'on n'a pas ressenties. C'est-à-dire,
- Speaker #1
il ne suffit pas de... d'aligner les séances et de faire de la quantité, il faut aussi s'interroger sur ce qu'on fait, comment on le fait, vraiment avoir conscience de tout ce qu'on fait.
- Speaker #0
Exactement. Et souvent, chez les grimpeurs qui démarrent une pratique d'entraînement, ce à quoi ces grimpeurs s'attachent, et c'est le cas un peu de tous quand on réfléchit parfois à un échec. ce sont des symptômes qui sont d'ordre physique, c'est-à-dire je ne tiens pas la prise, j'ai les avant-bras qui sont daubés, je n'ai pas de force, je n'ai pas assez de résine, je n'ai pas assez de force, je n'ai pas assez de résine. En fait, c'est cette litanie qu'on a tout le temps et qui est acceptable dans une analyse à chaud d'un résultat parce que ce sont les symptômes qui sont les plus visibles. Et néanmoins, ces symptômes-là sont la conséquence de... de choses qu'on a moins bien faites avant, qu'on n'a pas faites avant, dans la voie, on a fait des erreurs techniques, on n'a pas été assez vite, on était trop vite, on s'est pas arrêté au bon endroit, on n'a pas utilisé de bonne méthode. Et toute cette réflexion-là, elle est essentielle parce qu'elle va donner des indicateurs sur ce sur quoi travailler la fois d'après. Donc c'est vrai que pour nous, c'est important d'avoir un carnet. d'avoir un carnet pour marquer les ressentis qu'on a. Je suis tombé, j'ai tel ressenti, et même avant de tomber, qu'est-ce que j'avais comme ressenti ? Et finalement, le fait de s'interroger, ne serait-ce que de s'interroger sur ses sensations, sur ses sensations fines, ça va être un moyen d'éclairer sa pratique, de réfléchir à sa pratique, et puis de progresser.
- Speaker #2
Et on peut utiliser aussi ce carnet pour noter des intentions, ou des intentions. Je ne vais pas à la salle de manière automatique, mais je vais à la salle aujourd'hui, qu'est-ce que j'ai vraiment envie de faire ? Je vais essayer tel bloc, et qu'est-ce que je vais mettre dans telle voie ? Qu'est-ce que je vais essayer dedans ? Est-ce que, par exemple, je change ma séquence de mouvement ? Je change ma méthode ? Ça peut être mille choses, mais en tout cas, de savoir précisément ce qu'on veut faire ce jour-là, quand on va à la salle. Et ça évite. Justement, cette monotonie qui est vraiment, je pense, un des écueils de l'entraînement et qui fait que beaucoup de grimpeurs plafonnent et finissent même par se démotiver. Parce qu'en faisant toujours, on voit bien même dans la vie de tous les jours, c'est vrai dans tous les domaines, si on fait toujours la même chose, au bout d'un moment, on trouve moins de plaisir à le faire et on est moins impliqué.
- Speaker #0
Et souvent aussi, quand on fait les choses de manière automatique, on va faire des choses qui nous conviennent. Parce que quand on va grimper à la salle ou quand on va s'entraîner, on va déjà chercher du plaisir. Et donc, finalement, quand on s'entraîne en recherchant du plaisir, on va s'entraîner et quand on ne recherche que ça, on va faire des choses qui nous apportent de la satisfaction. Donc moi, si je suis mutant en doigt, je vais faire des blocs à doigt en fin de compte. Parce que ça va me satisfaire, je vais avoir des réalisations lors de ma séance. Et puis... petit à petit, je vais oublier qu'il n'y a pas que la force de doigt, qu'il y a la manière de poser les pieds, il y a différentes choses qui sont tout aussi importantes que le fait de broyer la prise qui nous permet de réussir.
- Speaker #1
Oui, il faut savoir sortir un petit peu de sa zone de confort.
- Speaker #0
Ou l'élargir. Ou l'élargir, oui. Je pense que c'est bien d'en sortir, de revenir dedans parce que ça donne confiance et d'en ressortir ensuite.
- Speaker #1
Il y a quelque chose que je trouve intéressant avec le carnet, c'est aussi qu'on... En fait, ça permet aussi de mettre plus d'intention dans ce qu'on veut faire pour chaque séance. Et effectivement, ne pas y aller avec des œillères et de se dire, voilà, c'est une séance comme une autre aujourd'hui, je vais grimper, je vais me ruiner.
- Speaker #2
C'est ça.
- Speaker #0
Oui, parce qu'en fin de compte, souvent, le fait de se ruiner, c'est synonyme. Il faut qu'il y ait une dépense physique. En fait, il faut que la séance, elle est associée à une dépense physique importante. Ça n'empêche pas que cette dépense physique, elle va avoir une certaine importance, mais ce n'est pas la seule manière de progresser.
- Speaker #1
Alors, concrètement, quand vous faites un programme d'entraînement avec... une des personnes que vous accompagnez, à quoi ça ressemble ? Quelle forme ça va prendre ?
- Speaker #0
Sur notre bureau, on va avoir une date ou plusieurs dates qui correspondent aux échéances que se fixe la personne. Ça peut être une échéance finale et des dates intermédiaires. Ça peut être des vacances, des déplacements, etc. Et puis... Cette date, on va avoir un rétro-planning qui va se mettre en place durant lequel on va faire en sorte d'organiser une progression vers cet objectif. Ce sont des grandes lignes, des grandes tendances dans un premier temps. Le deuxième temps, c'est dans chacune des tendances, on va faire un choix parmi les exercices. les types d'exercices qu'on peut mettre en œuvre en fonction du temps, des dispositifs dont la personne dispose. Et puis le dernier temps, c'est presque au jour le jour, d'une semaine à l'autre, c'est de réguler la quantité de travail en fonction de la manière dont la personne va encaisser, va digérer le travail qu'elle réalise.
- Speaker #1
Ok, très bien. Est-ce qu'on avait d'autres choses à dire sur la partie entraînement ?
- Speaker #0
On peut en parler une nuit.
- Speaker #1
Oui, c'est le problème. Si vous voulez, on peut faire une deuxième partie.
- Speaker #0
Non, je pense qu'on a pas mal abordé d'autres choses.
- Speaker #1
Est-ce que ça vous va si on conclut avec peut-être une question qui vous concerne plus un peu tous les deux ? Quels sont vos projets du moment, peut-être vos obsessions en ce moment ou alors vos rêves à atteindre en escalade ?
- Speaker #0
C'est une bonne question.
- Speaker #2
Alors, moi, c'est un moment de ma vie où finalement, je réfléchis plus à... à avoir une approche de l'escalade qui est toujours axée sur la performance, mais dans laquelle la performance va se faire à tout prix. C'est-à-dire que pendant des années, j'ai beaucoup grimpé, je me suis beaucoup entraînée, j'ai connu aussi des blessures. Et en entraînant aussi d'autres personnes, j'ai pris conscience de cette répétition des blessures. en dépit d'un entraînement qui réfléchit et qui est poussé pour l'éviter au maximum, qui quand même surviennent. Et je me dis que ces répétitions-là, elles ne sont pas complètement liées au hasard. J'ai envie d'avoir une approche un peu plus apaisée de la performance, tout en continuant quand même à faire des voix en falaise, comme tu vois tout le paradoxe.
- Speaker #1
mais voilà ça se joue plus ma réflexion en ce moment elle est plus là dessus mais parce que pour pour faire de l'escalade ou n'importe quel sport de un niveau de performance il faut quand même faire des sacrifices est
- Speaker #2
ce que ça veut dire que non non pas spécialement alors c'est perçu comme des sacrifices par les gens autour de toi c'est à dire que mais toi sur le moment quand tu le fais Moi, je n'ai jamais eu la sensation de faire des sacrifices par rapport à l'escalade parce que j'ai toujours adoré m'entraîner.
- Speaker #0
j'ai toujours adoré aller en falaise essayer des bois durs donc si tu veux j'ai pas eu la sensation de faire des sacrifices mais peut-être que quelqu'un qui aimerait je sais pas faire la fête tous les soirs tout ça dirait bah ouais
- Speaker #1
c'est des sacrifices parce que je peux pas me coucher tard etc t'as une vie d'hermite à partir du moment en fait où on choisit d'avoir tel ou tel mode de pratique euh De fait, c'est que ça nous satisfait et on n'est pas sûr finalement que ces choix, quand on les fait, soient les bons choix. Mais c'est ce qu'on a envie de faire. Donc, on a cette liberté-là à ce moment-là et donc à aucun moment, on a la sensation de faire un sacrifice. Sinon, on aurait fait un autre choix à ce moment-là. Et c'est toujours le cas. Alors et toi Olivier ? Alors moi, c'est difficile comme question. Moi, j'en suis... C'est pareil, on n'est pas tout jeune. Et moi, j'ai la sensation, en fait, après près de 60 ans, que j'ai toujours une possibilité de progression. Depuis plusieurs années déjà, je sens que si je veux progresser physiquement... Bon... Ne serait-ce que sur certains aspects de me maintenir, ça me demande beaucoup plus d'efforts qu'auparavant. Que je me fatigue plus vite, que j'ai des moments de fatigue un peu inexpliqués. Mais c'est normal en raison de... c'est en lien avec l'âge. Néanmoins, je suis toujours persuadé que je peux progresser et surtout que je progresse. C'est-à-dire finalement, là où je trouve de l'intérêt en ce moment à l'escalade, c'est que je sens que je progresse sur d'autres aspects que des aspects physiques. sur la connaissance de moi-même et sur des aspects qui sont extrêmement fins, qui peuvent même être ressentis comme étant purement futiles. C'est-à-dire que je prends cet exemple-là des ressentis que je peux avoir, par exemple, des fois en m'échauffant avec un élastique. Donc l'exercice est con comme une valise. Mais néanmoins, je vais avoir des ressentis sur des équilibres, par exemple sur des tensions musculaires que je n'avais pas il y a 20 ans et dont je suis persuadé que... que ces ressentis-là vont me servir à un moment donné ou à un autre dans une voie d'escalade parce qu'il y aura une tension musculaire qui sera dans ce sens-là. Donc finalement, dans la pratique en conscience, je pense qu'on progresse encore même à des âges relativement élevés dans la conscience de ce qu'on fait, donc dans l'explication de ce qu'on fait, des résultats. Et ça, je pense que ça peut finalement suppléer, compléter ou remplacer peut-être des progrès physiques auxquels au moment donné on ne pourra plus accéder. Ce qui fait que si j'aime comparer, je pense que je n'ai jamais été aussi fort physiquement que en 2006-2007. Je pense que c'est vraiment les années de ma vie où j'étais le plus fort. Et pourtant, en 2015 et même après. après j'ai refait du 8C et donc avec moins de qualité physique. Donc des fois, je me dis tiens, si j'étais encore en 2007, je ferais peut-être du 9A+. Mais ce que je veux dire, c'est que la progression, et c'est ce que je ressens actuellement, la progression est certes rattachée à des cotations, il y a des boîtes difficiles qu'on a envie de faire ou qu'on peut faire, mais elle est aussi ressentie beaucoup sur le... une connaissance de plus en plus fine de la manière dont on agit quand on grimpe.
- Speaker #2
Hyper intéressant. Ce qui m'amène à une autre question, c'est vers quel âge, à ton avis, est-ce qu'on s'arrête de progresser physiquement ?
- Speaker #1
Je pense qu'on peut... L'escalade, en fait, c'est une activité de force, donc c'est une activité... qui est aussi relativement jeune en tant que pratique d'entraînement. Donc si on regarde des paramètres qui sont liés à la force, la force en fait elle tient à deux grands types de facteurs. Des facteurs qu'on qualifie de facteurs nerveux, qui finalement résument la qualité de la sollicitation nerveuse qui va conduire à la contraction musculaire. Et puis des facteurs dits musculaires qui sont liés tout bêtement à la quantité de viande qui va être mobilisée. Donc cette quantité de viande qui va être amenée à mobiliser, c'est-à-dire le volume musculaire, c'est quelque chose qui va de façon... mécanique je dirais avec l'âge et bien se réduire en fait on perd de la masse musculaire avec l'âge au delà de 50 60 ans néanmoins Le fait de continuer à faire des exercices de force et d'ailleurs c'est ce qui est c'est ce qu'on préconise même dans des EHPAD chez des gens qui qui sont en perte d'autonomie le fait de pouvoir réaliser des exercices de force même si ces niveaux de force seront réduits par rapport à ce qu'on faisait il y a très longtemps, le fait de faire des exercices de force permet de maintenir des qualités physiques, des qualités de force. Donc dire qu'on va progresser en force, je dirais au-delà de 70 ans, ça serait sans doute une contre-vérité. Néanmoins, le fait de maintenir des niveaux de force qui sont cohérents avec la pratique, et surtout d'être capable de, et c'est là où je reviens à ce que je disais il y a cinq minutes, le fait d'être capable de mobiliser ses forces. d'une manière qui est encore plus efficace qu'auparavant, parce que les sensations sont meilleures, parce que les coordinations sont meilleures, ça peut permettre de maintenir des niveaux élevés. Et encore une fois, la notion de niveau, je pense qu'il faut la… Enfin, moi, je la conçois comme étant un niveau qui est intrinsèque. C'est-à-dire qu'à 90 ans, peut-être je ferai du CISA, mais si c'est le meilleur niveau que je peux faire à ce moment-là, ça sera quelque chose de satisfaisant. C'est-à-dire qu'en gros, moi, ce qui me fait plaisir en escalade, c'est d'être dans une voie. de rire sur une voie où je peux tomber. Si je ne peux pas tomber, ça me fait chier, clairement. Mais si à un moment donné, il y a un risque, un challenge, et qu'il y a un risque que je puisse tomber, et que je peux me mettre tout en oeuvre pour ne pas tomber, je considère que je fais une performance quand je réussis. Donc, c'est quelque chose à la cotation.
- Speaker #0
Et puis, il y a plein d'exemples, finalement, de grimpeurs assez âgés qui évoluent encore à des élevés. Donc, on voit que... même si au niveau de force, ils ont certainement des difficultés à maintenir ce niveau de force, en tout cas, ça demande beaucoup d'efforts, mais sur le plan gestuel, ils progressent encore. Je pense à un grimpeur comme Jackie Goddard, c'est quelqu'un qui m'impressionne beaucoup, parce qu'il a un gros niveau de force encore, mais surtout gestuellement. Il a une réflexion sur son escalade et une finesse dans la réalisation. Oui, beaucoup pourraient s'inspirer. Respect.
- Speaker #2
Bon, excellent. Je suis super content de cet entretien avec vous. C'était vraiment hyper intéressant. Est-ce qu'on a raté des choses ? Est-ce qu'il y a des choses que vous vouliez aborder qu'on n'a pas encore abordées ?
- Speaker #1
Il y a un peu la... Après, c'est beaucoup plus général, ça ne dépend pas. Mais c'est vrai que finalement, les sujets actuellement de réflexion tournent beaucoup autour de l'évolution de la pratique ou des pratiques de l'escalade, puisque finalement, l'émergence des jeux... a fait qu'il y a, a accompagné on va dire, ou a peut-être catalysé une pratique urbaine très très très forte, et qui est en plus, et donc se pose la question de pratiques qui deviennent presque dichotomiques entre la falaise, la pratique à l'extérieur, celle que nous on a vécue, par laquelle on a débuté, et puis la pratique en salle, non pas... Non pas pour finalement stigmatiser l'une ou l'autre, mais plutôt pour finalement se poser la question de la manière dont les grimpeurs peuvent évoluer. Parce que nous, parfois, en connaissant la falaise et le plaisir qu'on peut en retirer, et puis la qualité de cette pratique-là, on souffre de voir que certains grimpeurs n'y ont pas accès, forcément, et même parfois ont complètement ôté ça de leur imaginaire de pratique. Voilà. Et nous... Moi, la manière, quand j'ai commencé l'escalade, dans mon imaginaire, il y avait l'ingé, il y avait Patrick et tout ce qu'il y avait derrière ça. Et en fin de compte, ça fait partie de l'évolution des choses. Je me parle comme un vieux con, mais le fait que des gens qui commencent puissent n'avoir qu'une vision très, très lointaine comme ça et qui n'appartient pas à leur imaginaire, finalement. ça pose question en fait, voilà, ça pose question sur l'évolution de la pratique. C'est bien qu'elle évolue comme ça qu'il y ait une évolution. Mais sans doute que il y a Il y a une problématique qui est celui du rôle des salles pour pouvoir faire découvrir une activité et que les personnes découvrent les milieux naturels. Avec en cascade une autre problématique qui est que les milieux naturels ne sont pas non plus expansibles, qu'ils sont fragiles et qu'en ce moment on a une espèce de carrefour où finalement on voit arriver en falaise des personnes qui n'ont pas des codes. le comportement dans le milieu naturel en général, et a fortiori en falaise. Et donc, il y a des points de friction qui apparaissent et qui peuvent être préjudiciables à la pratique du plus grand nombre. La pratique du plus grand nombre, je parle ça des randonneurs, des montagneurs, des peintures, etc.
- Speaker #2
Tous les usagers de la montagne, oui. Oui, je suis... Je suis d'accord avec toi, c'est vrai que l'outdoor est une source de motivation pour beaucoup de gens qui ont commencé l'escalade, c'est le point de départ de leur pratique. C'est vrai que c'est questionnant, comme tu le dis, de s'imaginer qu'il y a beaucoup de gens qui ne s'y intéressent pas et qui font quand même de l'escalade un fil conducteur de leur vie sans avoir particulièrement envie d'aller dehors.
- Speaker #1
Oui, c'est vrai. Finalement, c'est sans doute un peu la réflexion de quelqu'un pour qui, pour tous les deux, finalement, l'escalade, c'est pour nous le point central de notre vie. Et donc, on va dire que c'est un mode de vie. Et on comprend aussi que ça puisse être simplement un sport, en fait, ou une pratique récréative sans que ça soit un mode de vie, en fait. Mais c'est certain que... On est nous à des âges où finalement ces pratiques de sport de nature, c'est des pratiques qui découlaient de la contre-culture californienne, quoi qu'on en dise, et donc qui étaient empruntes en grande partie de cette notion de mode de vie. On n'était pas marginaux comme pouvaient l'être nos prédécesseurs en escalade ou dans d'autres activités, mais néanmoins on était imprégnés de cette culture-là. et donc effectivement c'est un mode de vie on peut passer une pratique qui est uniquement récréative et simplement je dirais même de type fitness ouais effectivement il faudrait peut-être un
- Speaker #2
épisode complet à ce sujet il y a un vaste programme oui oui
- Speaker #1
Il y a des interlocuteurs qui sont plus qualifiés aussi. Il y a un échange.
- Speaker #0
On pourrait peut-être envisager un épisode avec plusieurs intervenants. Chacun un peu exprimerait son point de vue sur les conditions actuelles de l'escalade.
- Speaker #2
A voir. Effectivement, tu fais bien d'en parler parce que c'est quelque chose à laquelle je réfléchis. Je vais faire des formats plus table ronde avec plusieurs personnes. peuvent intervenir sur un sujet alors il ya par exemple le sujet de la nutrition dont d'ailleurs vous vous parlez sur la fabrique verticale il ya aussi effectivement le sujet des jeux olympiques du fait que l'escalade va devenir un sport est déjà devenu un sport très mainstream en fait avec l'explosion des salles privées il y a énormément de choses en fait où il faut plus d'un intervenant en fait pour faire le tour d'un sujet Sur ce, je vais vous dire un grand merci à tous les deux.
- Speaker #1
Merci à toi.
- Speaker #0
C'était bien sympa d'échanger.
- Speaker #2
J'espère que vous avez passé un bon moment. J'essaie de ne pas cuisiner mes invités, mais je vous ai quand même posé beaucoup de questions difficiles. Je réalise parfois après que je posais des questions qui demandent un peu la réflexion.
- Speaker #0
C'était hyper intéressant.
- Speaker #1
Je trouve ça intéressant, ça peut nous conduire à réfléchir à nouveau sur nos pratiques, et puis de partager notre manière, notre point de vue. Finalement, c'est ce qu'on aime aussi quand on va en falaise et quand on rencontre de nouvelles personnes. C'est autour des sclènes et partager des expériences.
- Speaker #2
Et voilà, c'est fini pour cette fois. Merci d'avoir écouté cette interview jusqu'au bout. J'espère que tu as appris plein de choses. Si tu as la moindre remarque, question ou suggestion, tu peux me contacter par email ou sur Instagram. Tous les liens sont dans la description de l'émission. Allez, bonne grimpe et à bientôt.