- Marion Watras
Brest dans l'oreillette, le podcast qui révèle les dessous de l'art et des patrimoines de Brest.
- Jean-Yves Besselièvre
Quand on songe un peu à tous les personnages qui sont passés par ici, des légionnaires romains en passant par François Ier, Vauban, Fraisier, avec ses prisonniers célèbres qui ont pu passer par ici, ou Anonyme, on touche vraiment du doigt l'épaisseur historique de la ville de Brest, du port de Brest, au fil du temps.
- Jean-François Quérat
C'est assez fascinant, très objectivement, pour tous ceux qui viennent travailler au château, de franchir la grande herse et de se dire, on rentre dans un endroit qui est quand même extraordinaire.
- Lénaïg L'Aot Lombard
Mon objectif c'est vraiment que les Brestois s'approprient le lieu. C'est leur histoire, c'est leur patrimoine qui est raconté à travers les murs et à travers les objets que l'on présente, à eux de s'en saisir.
- Marion Watras
Quand on visite le château de Brest, ce qui frappe souvent de prime abord, ce sont les points de vue panoramiques sur la rade et la pinfelde qu'offrent ces tours et ces courtines. Mais ce que l'on retient aussi, c'est qu'il est unique, de par sa double vocation, culturelle pour la partie musée national de la marine, et militaire pour la préfecture maritime de l'Atlantique qui l'abrite de l'autre côté de ses grilles. C'est d'ailleurs encore une singularité, le seul château en Europe à avoir conservé sa vocation militaire à travers les siècles. Pour ce nouvel épisode de Brest dans l'oreillette, direction cet édifice emblématique, classé Monument historique en 1923 et témoin de 17 siècles d'histoire. Nous commençons par emprunter la passerelle qui franchit les douves du château et mène à l'entrée du musée national de la marine. Là nous attendent l'administrateur Jean-Yves Besselièvre et son adjointe chargée de l'action culturelle, l'ENAIG La Haute Lombard.
- Jean-Yves Besselièvre
A l'origine du château de Brest, tel qu'on le voit aujourd'hui, il y a un castellum romain qui est construit au IIIe siècle. Et on voit encore aujourd'hui, notamment quand on accède à l'accueil du musée, des vestiges significatifs qui datent du IIIe siècle. Et puis ensuite on a Milan, pendant lesquels on ne sait rien de l'histoire du château et de Brest. Parce qu'il n'y a pas d'archives, il n'y a pas de fouilles archéologiques, il faut attendre le XIIIe siècle pour qu'un acte d'achat nous apprenne que le duc achète le château, la ville et le port. Et puis à partir de là, le château est un château ducal, il va être transformé au fil du temps.
- Marion Watras
Précisons que jusqu'au XVIe siècle, la ville de Brest se situe à l'intérieur même de l'enceinte du château.
- Lénaïg L'Aot Lombard
Brest était une ville close, comme Concarneau, comme Saint-Malo. La ville est née autour d'une église, Notre-Dame de Pitié, qui était à l'intérieur de l'enceinte qu'on appelait la ville. Et ce qui était le château, c'était la résidence justement du seigneur et puis du duc, le donjon.
- Marion Watras
Et le château que l'on voit aujourd'hui date en grande partie de cette époque.
- Jean-Yves Besselièvre
L'essentiel de l'architecture, c'est vraiment une architecture du XVe siècle. C'est un château du calme dont l'objet était en fait d'accueillir la garnison qui assurait la défense du château, d'accueillir aussi le duc ou la duchesse pendant ses déplacements dans la ville. dans le duché, ça a été le cas en 1505 d'Anne de Bretagne, qui à l'occasion d'un pèlerinage qu'elle fait, va séjourner ici au château. Et puis dans la partie qui correspond aujourd'hui à la cour de la préfecture maritime, il y avait la ville proprement dite, avec entre 1200 et 1500 habitants, dans un bâti à pans de bois avec des échoppes, des commerces, des lieux d'habitation. Donc ça bien sûr aujourd'hui ça a disparu, et ne reste finalement, on va dire, que les tours principales du XVe siècle. qui ont vu pour la plupart disparaître leurs toitures médiévales qui ont été remplacées par des terrasses pour y placer des canons.
- Marion Watras
Vauban jouera un rôle majeur dans la modernisation de la forteresse médiévale. Lorsqu'il arrive à Brest en 1683, il entreprend de l'adapter au progrès de l'artillerie. Pour lui, le château est un élément essentiel de la défense du port et de la ville. Certaines courtines voient ainsi leur épaisseur passer de 4 à 10 cm. à 19 mètres. Les années passent et le château évolue, mais une chose demeure, sa vocation militaire.
- Jean-Yves Besselièvre
C'est tout à fait exceptionnel parce que souvent les châteaux ont perdu leur rôle militaire au XVIe siècle, sont devenus des résidences ou on les a abandonnés. Et de ce fait, on l'a toujours adapté à l'évolution de l'art de la guerre jusqu'au XXe siècle. Les Allemands ont construit des souterrains importants sous le château pour protéger leur personnel et leurs installations. On peut donc dire que depuis 1700 ans, le château de Brest a une vocation militaire et opérationnelle. Et elle est illustrée aujourd'hui par un élément un peu anecdotique qui est la herse du château, qui tous les soirs a 20 ans de vie. Le château de Brest est fermé, ouvert tous les jours à 6h le matin et qui marque ce maintien de la fonction militaire.
- Marion Watras
Durant la Seconde Guerre mondiale, le château de Brest n'est pas totalement épargné, mais il en ressort assez miraculeusement préservé.
- Jean-Yves Besselièvre
Il n'y avait pas au château d'installation opérationnelle ou défensive majeure, donc ça n'a pas été une cible des Américains au moment du siège. En revanche, les toitures ont été endommagées, l'ensemble des casernes ont été fortement endommagées. Mais ça s'est limité à cela et de ce fait, la restauration a commencé très vite dans les années 50, ce qui a permis de le préserver, de l'entretenir depuis et de le présenter dans l'état où on le connaît aujourd'hui.
- Marion Watras
En 1958, le musée naval s'installe dans le château. Devenu musée national de la marine, il raconte aujourd'hui à travers ses expositions et sa scénographie l'histoire des activités maritimes de Brest au sens large. Le parcours de visite permet aussi de découvrir le lieu, nos deux guides. nous en donne un aperçu.
- Jean-Yves Besselièvre
Ici, on est autour du 15e siècle, qui était résidentiel au début, et à partir du 17e, est transformé en prison. Donc, lors des travaux de restauration, on a pu mettre au jour... Ce sont les portes des cachots, des inscriptions anciennes, qui sont sur le 19ème, prévenues, condamnées, etc. Donc on est vraiment dans des lieux authentiques de détention. Jusqu'à la Seconde Guerre mondiale, puisque des résistants ont été détenus ici en 1944, dans les dernières semaines d'occupation ici.
- Marion Watras
Nous ressortons pour descendre dans les souterrains, des espaces qui suscitent la curiosité des visiteurs.
- Jean-Yves Besselièvre
On est sans doute dans les espaces les plus beaux du château, c'est pour ça qu'on avait à coeur de l'exouveau au public. Ils sont ouverts dans le cadre de visites nocturnes des souterrains, qui proposent une expérience un peu particulière de nuit, circulation dans les souterrains et les communications souterraines avec des chauves-souris, avec une ambiance un peu particulière. Les casemates dans lesquelles on se trouve ici sont vraiment les plus importantes de l'ensemble du château.
- Lénaïg L'Aot Lombard
On a des casemates qui ont un cycle d'écart et donc on voit très bien... La différence de parements, c'est très parlant pour les visiteurs.
- Marion Watras
Sous le château, il existe donc de nombreux souterrains de différentes époques. Certains se visitent, d'autres sont strictement réservés aux personnes autorisées. C'est le cas des souterrains de la préfecture maritime. Mais que se passe-t-il dans ces lieux fermés au public ? Pour nous expliquer, l'amiral Jean-François Quérat, préfet maritime de l'Atlantique, a accepté. de nous ouvrir les portes de son bureau.
- Jean-François Quérat
La préfecture maritime, elle est sur deux niveaux. Le cœur, en fait, c'est ce que vous voyez dans la cour du château, dans lesquels vous avez tous les services liés à l'action de l'État en mer, à la défense du Finistère et à la sécurité du territoire. Et ensuite, vous avez une partie qui ne se voit pas, c'est le souterrain, c'est le cœur opérationnel et militaire qui est dédié aux opérations, oui, à mes activités, si vous voulez, de... commandant de zone maritime, de chef militaire, à la conduite des opérations extérieures et à la gestion de crise en temps réel. Et en fait, cette organisation illustre la double nature du préfet maritime que je suis, c'est-à-dire à la fois représentant de l'État en mer, mais aussi chef militaire. Et donc, c'est pour ça que le château, ici, est un endroit stratégique. C'est vrai que le cœur de notre mission, c'est notre milieu, c'est la mer, donc c'est loin des yeux. J'espère proche du cœur et effectivement c'est parfois un peu compliqué d'imaginer ce qui se passe en mer. La mer c'est l'espace d'aventure, l'espace de l'inconnu, c'est un espace qui est parfois dangereux, souvent dangereux d'ailleurs. Et donc il y a cette espèce de mystère et on ne va pas tout dire parce qu'on a quand même des choses secrètes bien évidemment. Mais c'est intéressant pour nous d'expliquer parce qu'au bout du bout il ne faut pas oublier que le cœur de notre mission c'est la protection de la France et des Français et de ses intérêts.
- Marion Watras
Si l'amiral Querat travaille dans l'enceinte du château, c'est aussi le lieu où il vit. La résidence du préfet maritime domine l'embouchure de la Pinfeld.
- Jean-François Quérat
On a des levées de soleil et des lumières de la rade qui sont absolument incroyables. Alors contrairement à ce que vous pourriez penser, et je dis ça avec une pointe de taquinerie, je ne passe pas mon temps à regarder la rade dans mon quotidien. Mais je dois dire que de temps en temps, je lève la tête et... Je regarde soit les bateaux gris, voire même les bateaux noirs, voire même les hélicos. Mais je vois aussi les voiles dans la rade. Et je me redis, comme s'était dit Vauban à l'époque, sans me comparer à Vauban, qu'on a la plus belle rade du monde.
- Marion Watras
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