- Speaker #0
On peut dire que l'Europe a été leader dans la découverte de ces technologies dans les années 50, 60, 70 et elle a perdu la commercialisation de ces technologies. Au final, l'Europe n'a que 2% de la capitalisation de marché dans la high-tech à l'échelle du monde. 2%. En ce qui compte, les Suisses ont une possibilité d'être leaders mondiaux dans des niches et plus elles sont deep-tech, plus elles sont liées à la haute précision, plus elles sont multisectorielles, plus les Suisses ont de la chance.
- Speaker #1
Quand tu dis ils mettent Israël met. La Suisse ne met que 2 milliards. C'est qui ?
- Speaker #0
Les chiffres parlent d'eux-mêmes. On met 22 milliards dans la recherche et le développement, une dizaine à peu près dans les institutions publiques, la moitié dans les institutions privées, les grands groupes, pour la recherche et le développement. Alors qu'on ne met que 2 milliards, 2,5 milliards dans le venture capital. 10 fois moins. Donc c'est un dixième. À nous de garder l'intelligence artificielle sur les secteurs dans lesquels l'Europe a encore son mot à dire.
- Speaker #1
Salut les amis et bienvenue sur mon podcast. Je suis Bryan Umana. associé gérant de l'entreprise WeLight Telecoms, spécialiste en infrastructures informatiques, COO et associé de la startup SolarSplit, une plateforme qui veut démocratiser l'investissement dans l'énergie solaire, enthousiaste de sport et de développement personnel. Pourquoi ce podcast ? Pour apprendre, être inspiré et partager tout ça avec toi. Dans cet épisode, j'échange avec Dominique Maigret, CEO d'Ecorobotix, une scale-up vaudoise pionnière en robotique agricole de précision. Dominique nous partage son parcours inspirant de son rôle chez Swisscom Ventures qui l'a fondé à la direction d'Ecorobotix. On parle de la souveraineté technologique des investisseurs en Suisse, du rythme de travail, de l'équilibre s'il y en a et de bien d'autres sujets. Tu le découvriras mais Dominique est également l'auteur du livre Deep Tech Nation Switzerland qui explore le modèle suisse en matière d'innovation technologique, en particulier des deep tech et du rôle du capital risk ou venture capital en Suisse. C'est un livre que je te recommande fortement de lire si cet univers t'intéresse et je ne fiche absolument rien pour dire ça. Pour m'aider à grandir et à continuer, je te demande une seule chose, c'est de t'abonner à la plateforme de podcast sur laquelle tu m'écoutes, de laisser ta meilleure note possible, c'est-à-dire 5 étoiles, et de commenter, ce qui fait grandir le podcast et qui me permet d'inviter plus de personnes. Je suis aussi sur Instagram, at bryanumana.swiss. Bienvenue dans mon podcast et bonne écoute. Dominique, tu as dit au journal Le Temps, j'ai désormais envie de mettre en pratique des théories auxquelles j'ai pensé ces dernières années. Lesquelles sont-elles ?
- Speaker #0
Tu fais allusion probablement à la notion Deep Tech Nation Switzerland, le livre que j'ai écrit pendant le Covid pour justement synthétiser ces idées sur la Suisse. Qu'est-ce que c'est que la Suisse ? Alors moi, je suis un nouveau Suisse naturalisé il y a 5-6 ans. Ça m'a fait réfléchir et je me suis dit qu'est-ce que je peux donner à la Suisse qui m'a accueilli il y a une vingtaine d'années, puisque je suis français d'origine, breton, et ensuite j'ai parcouru l'Europe et je suis tombé en Suisse il y a 22 ans précisément. Donc j'ai réfléchi à l'histoire de la Suisse, quelles sont les valeurs qui ont permis à la Suisse de devenir aussi concurrentielle, aussi compétente dans l'innovation d'une manière générale et dans la recherche scientifique. Ça m'a permis de prendre conscience qu'on bénéficie d'un environnement favorable pour la science, pour la très haute précision et aussi pour la high-tech. Donc des sciences appliquées pour résoudre des grands problèmes de ce monde. La Suisse le fait très bien depuis 250 ans. L'arrivée de l'horlogerie, ici on est à Neuchâtel, donc on le sent vraiment. Le berceau. Le berceau, la culture de la précision. Et un petit peu comme en France, on a la haute cuisine, c'est une culture particulière, comme la haute couture ou la haute finance à Londres. Ce sont des détails que les autres nations ne perçoivent pas forcément très bien, mais ces détails-là sont essentiels pour se différencier par rapport au reste du monde. Donc la Suisse a une culture de la très haute précision, et ça c'est très intéressant lorsqu'on parle de développement industriel. puisqu'il y a toute une catégorie de produits qui peuvent découler de cette culture-là. Les montres, par exemple, tout le monde sait faire des montres dans le monde, sauf que les Suisses excellent dans cette ultra-haute précision. Ça a donné toute une industrie. Mais aussi dans la médecine, pour la médecine de précision, on le voit pour la mesure, donc la métrologie, tout ce qui concerne la mesure, les instruments de mesure, de manière générale, la machine outil. Donc toujours sur un segment premium qui caractérise la Suisse par rapport aux autres mondes. Et ça c'est culturel. Tout ça, c'est lié à 250 ans d'histoire que je décris dans mon livre. Donc, tout ça, c'est bien de faire cette analyse, mais effectivement, à un moment, le destin m'a poussé à sauter de l'autre côté du business plan, puisqu'avant, j'étais un investisseur dans des sociétés de deep tech. Donc, deep tech, c'est ce qui est issu de la recherche scientifique, ce sont les technologies issues de la recherche scientifique, dont Eco Robotics, située à 20 kilomètres de chez moi. Et un événement tragique m'a forcé à prendre une décision. Est-ce que je reste en tant qu'investisseur chez Swisscom Ventures ? C'était une zone de confort finalement. Ou est-ce que je prends le risque de passer de l'autre côté du business plan et de prendre une fonction opérationnelle ? Donc c'est ce que j'ai fait puisque l'ancien directeur général a été malheureusement fauché en faisant du vélo sur la route, donc décédé il y a un an. C'était un ami proche que j'avais fait venir dans la société. Moi-même, je me sentais très proche de cette société. Et je me suis dit, c'est peut-être le moment de prendre une fonction opérationnelle, de quitter Swiss Convention pour reprendre la direction générale d'Eco-Robotics. Voilà, pour répondre à ta question, effectivement, c'est dans mon parcours de vie, parcours professionnel aussi, c'est une forme de mise en pratique de certaines idées auxquelles j'ai réfléchi ces dernières années.
- Speaker #1
C'est vrai que quand j'ai lu cette phrase dans le temps, je me suis dit évidemment qu'il y avait ce livre et où tu faisais référence à ça. Moi j'imaginais que tu faisais plus référence à justement ton bagage précédent. Tu as mentionné mais après je vais t'inviter à te présenter parce qu'il y a probablement des personnes qui ne te connaissent pas. Parce qu'avant tu étais dans l'ombre et maintenant tu es sorti de l'ombre. En tout cas, tu dois, parce que maintenant, tu es l'image, en quelque sorte. Disons, le CEO, c'est quand même généralement... Alors évidemment, il y a les entreprises qui ont des PR, des personnes dans leurs relations publiques, mais le CEO est quand même l'image de l'entreprise. Donc toi, dans ton bagage, avant, à 17 ans, 18 ans... chez Swiss Conventures, que tu as toi lancé. Il y avait aussi ce côté entrepreneuriat ou entrepreneuriat, comme on appelle quand on est dans les organisations. Pour revenir au livre, qu'est-ce qui t'a motivé à écrire ce livre ?
- Speaker #0
Je dirais que c'est d'abord un coup de cœur pour la Suisse. J'aime mon pays, ce nouveau pays qui m'a accueilli. Et je voulais mieux comprendre... comme je l'ai mentionné, ce qui en faisait sa caractéristique propre. Finalement, on pourrait parler de caractéristiques que n'ont pas les autres nations. Et c'est là-dessus qu'il faut, sur ses forces, qu'il faut baser son avenir. Donc ça, c'est vraiment très intéressant de bien le comprendre. Et l'histoire est très riche d'enseignements, parce que ce sont des acquis culturels qui ne sont pas faciles à répliquer. Dupliquer une technologie, la copier, mais on ne peut pas forcément, surtout dupliquer une culture à grande échelle, c'est extrêmement difficile. Donc voilà, c'est la raison d'être de la Suisse, c'est d'apporter au monde cette ultra haute qualité que le reste du monde aurait du mal à faire. Donc ça me semble intéressant de pouvoir témoigner de cela, ce qui me semble une évidence, peut-être qu'en tant que Français, je le perçois de manière encore plus évidente. Et deuxièmement, pouvoir aussi en faire une histoire que l'on peut vendre aux investisseurs, étrangers notamment, qui veulent investir en Suisse. Puisque l'idée, finalement, c'est de dire mettez du capital pour les entreprises ou les start-up suisses qui sortent des grandes universités comme le PFL, le TH Zurich. Et elles ont ces qualités-là qui sont assez uniques au monde. Et donc on peut construire un cluster, un groupe, de sociétés qui partagent les mêmes valeurs. Donc c'est important d'avoir un narratif, sinon on ne peut pas bien se vendre. Alors typiquement, la Silicon Valley, là où j'ai passé une douzaine d'années en allant tous les ans en Silicon Valley, une quinzaine même, ils savent très bien se vendre. Donc ils ont réussi à attirer des centaines de milliards de dollars du monde entier, pas forcément des Américains uniquement, mais la plupart du temps, c'était des étrangers qui investissaient en Californie parce qu'il y avait un narratif autour du digital et plus précisément... du logiciel standard à vocation mondiale. Alors que la Suisse est plus dans une logique de niche, sur des industries spécifiques dont on pourra parler. Mais il faut pouvoir raconter une histoire qui plaise, puisque sinon on se trouve en concurrence avec une centaine de clusters à l'échelle mondiale qui veulent capter une partie du venture capital, donc du capital d'innovation. Chaque narratif importe pour pouvoir se différencier. Donc en Europe par exemple, Berlin a réussi son histoire. Le maire de Berlin a été actif pour... pour promouvoir Berlin comme la capitale du B2C, c'est-à-dire de l'Internet pour les grands consommateurs. C'est pour ça que toutes les grandes sociétés européennes en B2C sont localisées à Berlin. Les développeurs se sont délocalisés là-bas aussi, puisque Berlin a une image de marque. Dans la fintech, c'est à Londres. Donc chaque pays essaye d'avoir un positionnement. Et la Suisse, c'est plutôt les technologies profondes, avec une très forte... propension à la recherche scientifique. Quand je parlais du B2C, le B2C n'a pas besoin de recherche scientifique. On peut copier le site de Airbnb directement sans avoir de recherche, alors qu'une start-up suisse typiquement a dix ans de recherche derrière elle avant même de mettre son produit sur le marché. Voilà donc il me semblait en tant que Swiss Conventious, j'avais besoin aussi de lever des fonds pour Swiss Conventious. Il fallait aussi une histoire. Pourquoi investir en Suisse ? Et c'est de là qu'a découlé ce livre Deep Tech Nation Switzerland.
- Speaker #1
Tu avais un peu de temps durant le Covid et tu t'es dit qu'il fallait vendre un peu mieux la Suisse.
- Speaker #0
Oui, un peu de temps, disons que j'ai pris toutes mes vacances, tous mes week-ends pendant quatre mois, sans que mon équipe ne le sache. Quatre mois ? Disons quatre mois très intenses, mille heures de travail. Je ne le referai pas, ça m'a certainement pris beaucoup d'énergie, mais quand c'est passionnant, on le fait. Une fois dans sa vie, je crois que quelqu'un dit dans sa vie, tout homme doit avoir construit sa maison, écrit un livre et je ne connais pas la troisième chose.
- Speaker #1
Avoir une Rolex.
- Speaker #0
Non, ça, je ne le dirai pas. Mais ça fait partie des rêves qu'on a tous. Et parfois, il faut se dire maintenant, c'est le moment, je le fais ou jamais, je ne le ferai jamais. Donc, ce n'était pas très raisonnable. Il faut être tout à fait. Et je remercie ma femme de m'avoir supporté dans cette aventure. 4 mois c'est court pour avoir parlé avec alors c'était pour l'écriture du livre ensuite la traduction et la publication a repris aussi 4 mois donc tous les auteurs le savent les 95% premiers qu'on pense que tout est terminé prennent la moitié du temps et les 5% qui restent notamment la traduction c'est encore au moins le même montant de travail donc c'est beaucoup de travail parce que vous l'avez traduit en
- Speaker #1
je dis vous, en anglais allemand toi tu parles ces 3 langues c'est correct... On parle d'autres ?
- Speaker #0
Non, pas vraiment. Pas vraiment. Ils ont un petit peu. Tu te débrouilles.
- Speaker #1
Voilà. Dominique, peut-être avant qu'on continue, parce que là, tu as déjà cité pas mal d'éléments. Swisscom Ventures, tu as cité des termes qui, pour toi, sont très naturels et très logiques. Mais je sais que pour mon audience, pas forcément, en tout cas pas tout. Qui es-tu, Dominique ?
- Speaker #0
Alors, je suis un breton d'origine. européen de cœur, j'ai la nationalité française, je suis devenu suisse et je dirais que je deviens de plus en plus vaudois. C'est étonnant ces dernières années, notamment avec mon travail chez Eco Robotics, je suis vraiment implanté dans le monde vaudois et le terroir notamment de l'agriculture au pays de Vaud, je me sens de plus en plus vaudois. Par ailleurs je suis... très curieux en ce qui concerne les sciences. Je ne suis pas un scientifique moi-même, mais j'ai toujours travaillé avec les scientifiques. Je les admire, j'aime. Pour moi, l'expérience de découverte scientifique est d'ordre, je dirais pas mystique, mais en tout cas artistique, comme quelqu'un qui crée un tableau ou une musique, quelqu'un qui découvre quelque chose, même si ce n'est pas forcément toujours des découvertes essentielles. Ça peut être simplement de créer un... un nouveau produit ou d'améliorer une fonctionnalité. Il y a une créativité extraordinaire que je retrouve à la fois chez les artistes et chez les scientifiques, surtout appliqués. Et ça, ça me passionne absolument et j'ai envie de consacrer ma vie à les aider puisque moi j'apporte plus le côté managerial, aussi financier, mais c'est une façon de contribuer à cette aventure humaine dans l'innovation scientifique. même si moi-même je ne suis pas un innovateur technique.
- Speaker #1
Et dans ton parcours professionnel, tu as cité Eco-Robotics, je crois qu'on ne l'avait pas encore cité, mais on avait dit que tu as repris justement la fonction de CEO cette année, après comme tu l'as dit, le moment tragique d'il y a environ un an, en mars de cette année, c'est juste ?
- Speaker #0
J'ai commencé à plein temps en mars, mais j'étais déjà mi-temps depuis Noël, on peut dire.
- Speaker #1
D'accord. Avant ça, tu étais dans le conseil d'administration, c'est juste ?
- Speaker #0
C'est correct.
- Speaker #1
Et avant ça, si on revient encore un peu en arrière, comme je disais, Swisscom Ventures qui est le plus grand fonds VC suisse ?
- Speaker #0
Voilà, on peut dire, qui investit en Suisse en tout cas, ça c'est clair. Il y a quelques fonds VC comme Roche Ventures, Novartis Ventures ou Index Ventures qui sont très grands mais qui sont… à 95% à vocation internationale, donc ils n'investissent pas en Suisse. Swisscom Ventures est beaucoup plus polarisé sur la Suisse, à peu près 50% de l'investissement. Il y a une quinzaine d'années, lorsque j'ai lancé cette activité, c'était uniquement une activité de corporate venturing en interne chez Swisscom, qui n'était pas un grand fonds. On parlait vraiment de quelques millions par an que Swisscom pouvait donner chaque année. Il n'y avait pas encore de structure réelle. C'était donc une entreprise, je dirais, ou même une activité confidentielle sans avoir d'apport de capital significatif. Ça, c'était entre 2007 et 2011. À partir de 2011, on a réussi à susciter de la survie finalement à l'intérieur d'un grand groupe. Mais après 2011, on a réussi à s'autofinancer par les sorties, c'est-à-dire les investissements qu'on a faits, on a pu sortir 28 sociétés. Ces 28 sorties ont permis de financer les nouveaux investissements, les nouvelles entrées. Ça c'était intéressant mais assez lent puisque ça prend entre 5 et 10 ans pour pouvoir revendre une participation qu'on a prise. Donc en 2018, j'ai pu lever des fonds à l'extérieur de Swisscom, 200 millions dans un premier temps en 2018 et 300 millions de francs. En 2021, toujours souvent le même modèle, un quart du capital investi par Swisscom et trois quarts par des sociétés externes, typiquement des caisses de pension, des family office, donc des sociétés qui sont liées à des familles riches ou des banques.
- Speaker #1
Suisse toujours ou pas forcément ?
- Speaker #0
La majorité suisse, donc une vingtaine de sociétés et donc de caisses de pension suisse, ce qui nous donne vraiment une très bonne... Assez Suisse, avec des institutions très connues de cantons ou de grandes villes ou de grandes sociétés suisses qui voulaient investir dans l'écosystème suisse, mais ils n'avaient pas forcément de canal d'investissement. Donc, c'est ce que fait Swiss Comanchers avec 650 millions en tout qui ont été investis en grande partie dans une centaine de sociétés, dont plus de la moitié en Suisse.
- Speaker #1
Donc, dans le livre... ce qu'on ne l'a pas vraiment dit, sauf erreur, mais tu explores le modèle suisse en matière d'innovation technologique, en particulier les deep tech et le rôle du capital risk en Suisse, donc venture capital. Tu abordes également d'autres éléments, comme la souveraineté, qui est un point très important et de plus en plus, parce qu'aujourd'hui, avec les GAFAM qui sont de plus en plus... prépondérante dans nos vies, même nos vies à titre privé, mais aussi dans les entreprises. Que ce soit, on peut le voir, et puis bon, je le cite, mais des Office 365 qui sont partout, et dès que tu prends une licence, il faut en prendre une autre, et une autre, et une autre. Et puis, d'un autre côté, on a des acteurs à Genève, comme Infomaniac, par exemple, qui, eux, luttent contre ça, pour qu'on puisse essayer d'avoir une alternative aux GAFAM, comme ils le disent. Et toi, tu soulèves ce point-là. Donc moi, je voulais justement savoir comment est-ce que tu vois la Suisse et l'Europe versus la Chine et les États-Unis, qui sont les grandes nations.
- Speaker #0
Alors quand je parle de souveraineté, je n'ai pas... Une ambition politique. Je parle avant tout de souveraineté technologique. Et par définition, lorsqu'on parle des sujets comme le logiciel de grand public, c'est une thématique européenne. La Suisse toute seule ne pourrait pas avoir sa propre gamme de produits, surtout sur les grands marchés. Ce que peut faire la Suisse, évidemment, c'est décliner par... En partenariat avec les grandes sociétés internationales, décliner des solutions un peu plus locales, c'est ce que fait Microsoft très bien dans tous les pays du monde. D'ailleurs, c'est pour ça qu'ils ont beaucoup de succès. C'est d'avoir un ancrage en Suisse et local dans le monde entier très, très fort via leurs partenaires. Alors, ce modèle-là, il est efficace. Ça nous permet d'avoir accès à toutes les technologies du monde. Mais ça nous donne une certaine dépendance en cas de problème. On n'est plus capable d'avoir nos propres champions. technologiques locaux, il n'y a plus d'alternative finalement. Et ça c'est un problème qu'il faut adresser à l'échelle de l'Europe. Donc si je parle de souveraineté technologique, c'est la thématique par exemple sur l'intelligence artificielle, sur les panneaux solaires, sur tout ce qui concerne les sub-conducteurs, des énormes industries dans lesquelles l'Europe a complètement perdu sa part de marché qu'elle avait au début. On peut dire que l'Europe a été leader... dans la découverte de ces technologies dans les années 50, 60, 70. Et elle a perdu la commercialisation de ces technologies. Au final, l'Europe n'a que 2% de la capitalisation de marché dans la high tech à l'échelle du monde. 2%, ce qui est incroyable puisqu'on a à peu près 24% du budget de la recherche dans le monde. Et ça se correspond à peu près à un quart de... du produit intérieur brut mondial. Donc l'Europe devrait avoir au moins un quart des innovations, donc un quart de la capitalisation pour la high-tech. Elle n'a que 2%. Les Américains ont 83% et les Chinois, disons, les Asiatiques ont le reste. Donc dans mon livre, lorsque j'ai fait ce constat-là, tous les ans je recalcule ces deux fameux 2%, c'est assez incroyable qu'on en soit arrivé là, alors que l'Europe a plus de 40%. des mathématiciens en termes de médailles Fields ou des prix Nobel scientifiques. Donc l'Europe reste extrêmement impliquée dans la recherche scientifique. On le voit en Suisse avec les ETH, avec toutes les universités qui font beaucoup de recherches. Mais pourquoi n'arrivons-nous pas à créer des champions technologiques ? C'est un vrai problème lorsque la situation se crispe. On l'a vu avec la Chine et on ne voudrait pas être totalement dépendant. des États-Unis pour le software et de la Chine pour le matériel. Sinon, l'Europe n'aurait pu s'en moindrir. En cas de crise, ça pose des problèmes. Donc, la grande question, c'est facile de faire le constat, mais qu'est-ce qu'on fait ? Bien souvent, on cite l'intelligence artificielle comme étant un domaine dans lequel l'Europe doit retrouver une certaine force de frappe. Le problème, c'est que les Américains sont toujours en avance d'une... d'une génération et surtout ils ont beaucoup plus de capital à investir que les européens. On voit OpenAI qui vient juste de terminer un tour à 7 milliards d'investissement. 7 milliards c'est deux fois plus que tout le venture capital investi en Suisse par an. Donc on parle même pour OpenAI d'un plan à 100 milliards. C'est complètement fou. 100 milliards c'est plus que tout ce qui a été investi en venture capital en Europe pour toutes les startups par an. Donc il y a un ordre de... Il y a une forme d'asymétrie flagrante entre les deux modèles. Le modèle européen qui est bien capitalisé pour la recherche, mais sous-capitalisé pour la commercialisation de la recherche, ce qui est le venture capital, c'est-à-dire une fois que les sociétés sortent des laboratoires, des universités, il faut du capital pour commercialiser, c'est ce qu'on appelle le venture capital ou le capital risque. Et là, l'Europe investit typiquement qu'un quart de ce que font les Américains, et ça depuis 50 ans. Et je pense fondamentalement que c'est la raison pour laquelle l'Europe a perdu sa position dans la technologie. Ce n'est pas pour des raisons scientifiques, c'est pour des raisons de financement, de la commercialisation de ces startups. Les Américains ont trouvé la solution. Ils n'investissent pas forcément leur propre argent, mais ils ont un narratif, donc une forme de marketing pour attirer les capitaux du monde entier pour investir dans leurs startups. Les startups n'étant pas elles-mêmes finalement... faite par des américains bien souvent ce sont des immigrés qui viennent d'europe d'ailleurs souvent même du moyen-orient dans les start up dans lequel j'ai investi en silicon valley j'avais et des start up dont une a fait un une IPO Nasdaq à plus d'un milliard dans les semi-conducteurs, financée par Sequoia, donc vraiment ce qu'on peut se faire de mieux en Silicon Valley, c'était d'abord un Irakien qui a fondé la société, et ensuite c'était un Syrien qui a mis la société en bourse. Et la plupart des sociétés dans lesquelles j'investis, c'était des immigrés, donc des pays qu'on pourrait considérer aujourd'hui, vu d'Europe, des pays qui n'ont pas... pas de savoir-faire technologique. Pourtant, ce sont les immigrés de ces pays-là, comme les Indiens aussi, on voit, qui gouvernent actuellement en Silicon Valley. Donc ça, c'est très intéressant, le modèle américain. C'est la capacité d'intégrer des ressources du monde entier, aussi bien capitalistiques qu'humaines. Et finalement, on voit bien avec Elon Musk, qui est africain du Sud, tout ça devient américain, devient stratégique pour l'Amérique. sans rien coûter aux contribuables américains. C'est un modèle extraordinaire, c'est ce qu'on appelle le venture capital. Et ça a été inventé aux Etats-Unis. Il y a tous les ans maintenant à peu près 250 milliards qui sont investis dans les startups en venture capital, dont plus de la moitié aux Etats-Unis. Et l'Europe a toujours sous-investi. On peut dire qu'il y a à peu près 10-20% de ce montant qui est investi en Europe. Et c'est ça le problème, il faut vraiment changer. Et c'est assez simple. Il suffit juste d'avoir un narratif et d'attirer les capitaux dans des sociétés européennes qui ont la qualité des Américains, puisque ce sont finalement les mêmes professeurs qui sont à Stanford, MIT ou à l'ETH Zurich ou le PFL. Ils ont le même calibre. Ils ont souvent d'ailleurs étudié dans différentes universités. Ce sont pratiquement les mêmes entrepreneurs. Je ne vois pas de différence entre un Californien et un bon entrepreneur suisse. Dans la deep tech, bien souvent, ils ont aussi un profil similaire. D'ailleurs, en Suisse, ce ne sont pas des Suisses, souvent, la plupart du temps. Mais on trouve des Suisses en Silicon Valley qui ont très bien réussi. Donc, c'est des gens qui sont prêts à prendre des risques, qui sont brillants, qui sont puissants et prêts à consacrer leur vie à une startup ou en tout cas à une période de leur vie. Donc, ça, c'est un phénomène massivement sous-estimé et mal compris des hommes et femmes politiques qui a fait... de la Californie un état très dynamique, qui maintenant, on voit bien, fait des États-Unis, c'est une grande force pour les États-Unis d'avoir les Tesla, SpaceX et autres, Google. S'ils n'avaient pas cette high-tech, qu'est-ce que seraient les États-Unis aujourd'hui ? Donc, c'est intéressant. Tout ça est arrivé avant tout avec du capital financé, je pense un tiers au moins par les Européens, ou en grande partie par le reste du monde, peut-être un tiers par les Américains eux-mêmes. Et donc, c'est une machine qui... tourne très bien et l'idée de mon livre c'était de faire la même chose en Suisse, d'attirer plus de capital étranger et j'espère surtout du capital suisse parce qu'il y a beaucoup d'argent ici, au lieu d'investir dans l'immobilier qui pour moi ne crée rien, c'est même spéculatif de vouloir investir soit en bourse, soit dans l'immobilier ou créer rien, alors que le venture capital c'est le financement de l'innovation, donc très en amont, à un moment où... Une société est faible, n'est pas encore profitable, et si vous lui donnez de l'argent, elle vit. Si vous lui retirez cet argent, elle arrête tout. Donc c'est vraiment intéressant d'investir à ce moment-là parce qu'il y a un effet énorme, un effet de levier extraordinaire sur le destin de ces entreprises. Et c'est là qu'il faut que les Suisses comprennent qu'ils ont tout intérêt à mettre l'accent. Et pour terminer, les chiffres parlent d'eux-mêmes. On met 22 milliards dans la recherche et le développement. une dizaine à peu près dans les institutions publiques et l'autre moitié dans les institutions privées, les grands groupes pour la recherche et le développement. Alors qu'on ne met que 2 milliards, 2,5 milliards dans le venture capital, 10 fois moins, donc c'est un dixième. Et c'est incroyable, dans d'autres pays, on met en règle générale, si tu prends la moyenne des 12 pays les plus innovants du monde, c'est à peu près la moitié, le ratio. La moitié du montant investi dans la recherche est investi dans le venture capital. Et certains pays comme Israël ou Singapour, ils mettent plus de venture capital que dans la recherche elle-même. Ils ont une efficacité, une productivité dans la recherche et développement qui est extraordinaire. Ils créent beaucoup de sociétés avec relativement peu d'investissement dans la recherche. Alors qu'en Suisse, c'est l'inverse. Et je pense que tout ça est culturel pour des raisons historiques que j'ai décrites dans ce livre.
- Speaker #1
Et quand tu dis... Ils mettent, Israël met, la Suisse ne met que du milliard. C'est qui, ils ?
- Speaker #0
Bonne question. C'est typiquement à peu près... 10-20% ce sont des familles riches, ce qu'on appelle des business angels. Donc si c'est des petits montants jusqu'à 1 million, on parle de business angels. Si c'est des montants importants par des grandes familles qui peuvent mettre des tickets, donc des montants d'investissement par tour, d'investissement de l'ordre de 2 à 10, 20, 30, 40 millions, là on parle plutôt de family office, c'est plus structuré. L'autre catégorie ce sont des... Ça, c'est plutôt en début, en phase d'amorçage. Ensuite, il y a des petits fonds locaux qui sont souvent financés par des entrepreneurs, qui ont quelques amis qui leur donnent de l'argent, et puis quelques institutions qui investissent aussi localement. Troisièmement, il y a les grands fonds de venture capital qui sont très puissants, qui eux sont financés souvent avant tout par des caisses de pension, par des grandes banques, et aussi en Europe. à 40% par des fonds institutionnels. La Banque Européenne d'Investissement, par exemple, ou en France, la BPI. Donc chaque pays a un financement étatique de ses grands fonds d'investissement. Sauf en Suisse. En Suisse, c'est le seul pays, pour des raisons de dogme libéral, où on ne veut pas investir dans les sociétés, en tout cas pas de cette manière-là. Donc on met beaucoup d'argent dans la recherche et le développement, mais pas dans le financement de ces fonds. de venture capital. Et donc, ça crée une, je dirais, une problématique pour les sociétés suisses, c'est qu'elles peuvent trouver beaucoup plus facilement du financement en Europe ou aux États-Unis qu'en Suisse, en étant tout en ayant la même qualité intrinsèque. Et c'est une distorsion de concurrence, on peut dire, qui est très dommage. Donc, je pense qu'il faut vraiment que les Suisses réussissent à, soit mettre de l'argent public, comme les Européens le font ou les Américains l'ont fait au début pour lancer la machine. Les Israéliens, c'est ce qu'ils ont fait. C'est de l'argent public, souvent militaire, qui a permis d'amorcer la pompe. Et ensuite, une fois qu'il y avait quelques belles sorties, quelques bons retours sur investissement, le monde entier a voulu financer ces structures-là. Et une fois que c'est parti, globalement, c'est quelque chose qui produit de l'argent et qui est autofinancé. En Suisse, néanmoins... pas eu d'argent public, pour des raisons libérales, et ayant assez peu d'argent privé, il y a un manque de financement flagrant. Et pourtant, le modèle, il marche bien. Il y a eu à peu près 24 milliards d'investissements sur les 50 dernières années dans le venture capital en Suisse. 100 milliards de créés, c'est-à-dire 100 milliards de créations de valeur, c'est à peu près 4 fois les montants investis. Donc, c'est un bon modèle pour un investisseur. Bien sûr, il faut être patient. Et il y a un certain taux de déchets, tous les investissements ne sont pas profitables, évidemment, mais d'une manière générale, ça a été une source de création de valeur extraordinaire. Sauf qu'en Suisse, à peu près 85% des investissements sont étrangers, dans les sociétés suisses. Et même, je dirais, sur les startups à succès, celles qui ont la plus grande visibilité, plus de 90% des capitaux investis viennent de l'étranger. Ce qui veut dire qu'au final, plus de 80% du capital appartient à des étrangers. Donc quand on voit les sociétés suisses qui ont réussi, ce sont avant tout les étrangers qui ont profité de cette création de valeur et pas les Suisses. Ce qui est vraiment dommage parce qu'on a besoin de Suisses qui réussissent, qui réinvestissent localement. Ça crée un effet de boule de neige. Et c'est pour ça que... J'essaie de faire un petit peu l'apologie de ce modèle qui est très vertueux et qui est directement lié au succès des grandes écoles. Donc l'un va très bien avec l'autre.
- Speaker #1
Tu as mentionné le risque quand tu parlais des entrepreneurs. Est-ce qu'il n'y a pas un lien entre le risque et la Suisse ? Étonné qu'on sait qu'en Suisse on est... On n'aime pas trop le risque de manière générale.
- Speaker #0
Alors là-dessus, je ne suis pas tellement d'accord. On le dit évidemment et c'est clair que le Suisse standard n'aime pas le risque. Mais c'est comme ça dans tous les pays. Et pour l'innovation, surtout scientifique, on ne parle pas du Suisse standard. On parle du 1%, la frange des meilleurs 1%, des scientifiques les plus brillants. On parle vraiment des gens qui ont des prix Nobel. On parle uniquement. des exceptions et là il n'y a absolument aucun problème de trouver en Suisse des entrepreneurs de génie, des scientifiques du plus haut niveau et donc des start-up du plus haut niveau. Absolument aucun problème et d'ailleurs l'histoire du pays le montre. Les Roche, Novartis et autres, Nestlé, proviennent d'entrepreneurs de génie qui ont réussi à partir d'un petit pays à conquérir le monde. Et ça, on ne le voit pas simplement dans les grandes sociétés que j'ai mentionnées, mais aussi dans tous les champions cachés, les Hidden Champions. C'est un concept issu des PME allemandes qui sont typiquement cachés. qui commencent dans des petits villages et qui réussissent à conquérir une niche à l'échelle mondiale, à devenir très puissants, très riches, mais sans qu'on le remarque, parce qu'ils sont sur des secteurs très technologiques, souvent pas grand public, mais plutôt techniques. Et ces gens-là sont extraordinairement, non seulement riches, mais en tout cas ambitieux. Et ils montrent que les Suisses peuvent faire des choses extraordinaires. On voit des sociétés comme Oman, Sika, Sonova. Tout ça c'est fabuleux, des sociétés qui valent plus de 10-20 milliards. Par exemple, Synthes, les hanches orthopédiques qui ont été vendues à plus de 22 milliards à Genji, au groupe américain Genji, Sonova ou Sika qui vaut plus de 30 milliards. Encore une fois, ça montre que l'entrepreneur suisse fait partie, je dirais au monde, c'est peut-être la Suisse qui a eu le plus de succès entrepreneurial par habitant. Quand on regarde la liste des 20 premiers groupes suisses, ils ont plus de valeur cumulée que les 20 premiers groupes allemands actuellement, que les 20 premiers groupes anglais. Quand je parle de la Manche, je parle de BMW, Mercedes, Siemens. Ils ont certes de la valeur, mais en cumul, c'est moins que les 20 premières sociétés suisses. Ça veut dire que les entrepreneurs suisses ont réussi à créer des champions mondiaux. Et ça, c'était pratiquement toujours dans des secteurs spécifiques, par exemple l'horlogerie, la chimie, la mécanique et aussi l'alimentation avec Nestlé, la banque. Donc ça, c'est des secteurs qui ont très bien réussi au XXe siècle et au XIXe. La question que je pose, c'est dans le monde digital, dominé par les Américains, au niveau du software et par les Asiatiques pour le matériel, hardware, comment les Européens, et les Suisses en particulier, peuvent-ils créer des nouveaux champions technologiques ? Et là, il y a une question assez fondamentale, stratégique, et on revient à cette idée de dépendance technologique dont on parlait avant, et ça, il faut répondre à cette question-là. Et ma réponse, c'est qu'on ne peut pas concurrencer les Américains sur des secteurs qui sont surcapitalisés, par exemple tout ce qui concerne l'intelligence artificielle. ou le B2C, les secteurs à grand public de l'Internet, parce que là, c'est une course au capital. Celui qui sait lever le plus de capital a typiquement gagné la bataille parce qu'il finit par agréger les autres, par consolider le marché. Par contre, les Suisses ont une possibilité d'être leaders mondiaux dans des niches. Et plus elles sont deep tech, plus elles sont liées à la haute précision, plus elles sont multi... sectorielle, plus les Suisses ont de la chance. Et ça, c'est prouvé historiquement. Et donc, il faut essayer de le faire dans des domaines où la digitalisation, par exemple, de l'agriculture ou de la médecine peut favoriser l'émergence d'un leader technologique. J'espère que tu me poseras la question concernant Eco-Robotics, qui est un exemple de ça.
- Speaker #1
Bien sûr.
- Speaker #0
Tu vois, là, c'est finalement Eco-Robotics qui est le leader mondial de l'ultra-haute précision pour... la pulvérisation des cultures. Ça demande des compétences à la fois dans la robotique, mais aussi le software, l'intelligence artificielle en particulier, la reconnaissance d'images. Et aussi dans la biotech, tout ce qui est le génie agronomique, la fluidique. Et ces trois industries ne marchent pas ensemble. Typiquement, en Silicon Valley, on est dans le software, la robotique, c'est... C'est moins localisé, mais on voit bien à Munich, par exemple, on se sent bien à l'aise. Mais réussir à lier ces industries ensemble permet d'avoir une... C'est très difficile à faire, certes, mais ça crée une barrière à l'entrée. Et on peut être leader mondial sur ces niches-là.
- Speaker #1
Avant de continuer sur le chemin d'Eco Robotics, Avant, quand je te posais la question par rapport au risque, tu as plutôt pris le chemin de l'entrepreneur. Moi, je posais la question plus par rapport à l'investisseur. Alors maintenant évidemment tu l'as mentionné quand on parle de l'entrepreneur de ces deep tech là donc de ces entreprises dans la deep tech tu l'as dit c'est le 1% voire moins de la population suisse et les investisseurs en termes de pourcentage je ne sais pas mais on est aussi dans un pourcentage très bas. Donc effectivement j'imagine que les investisseurs en Suisse. une appétence au risque qui est plus élevée que monsieur et madame tout le monde. Mais est-ce que toi, tu dirais, toi qui viens aussi, qui es issu de ce monde-là, que l'investisseur suisse a un lien particulier avec le risque versus les autres investisseurs dans le monde ou pas forcément ou pas du tout ?
- Speaker #0
Alors dans le venture capital, ceux qui sont gestionnaires de fonds de venture capital, je ne vois pas vraiment de différence. Ça ne change rien. Non, ils ont peut-être une compétence un peu plus spécifique au deep tech ou au hardware. En Suisse, à peu près 70% des spin-off académiques qu'on pourrait qualifier de deep tech, si on inclut la biotech, tout ce qui est pharma et lié aux biotechnologies et aux sciences de l'environnement. Donc la Suisse a cette spécialité-là, alors qu'un investisseur classique de Silicon Valley est plutôt orienté software pur. Mais au-delà de ça, il n'y a pas vraiment de différence. Maintenant, si tu parles des institutionnels, les caisses de pension, de toute façon, pour eux et pour elles, il s'agit de 1%, 2% maximum de leur montant sous gestion qui pourrait aller dans les classes d'actifs comme le venture capital. De toute façon, on parle d'un risque très limité. En termes absolus. Donc, il n'y a pas de problème pour elles de se diversifier, comme elles mettent aussi quelques pourcents de leur fortune dans l'or, les minerais ou même les cryptos. Donc, dans ce cadre-là, je pense que le débat n'a pas lieu d'être de parler de risque systémique lorsqu'on investit. En Suisse, il y a 1 000 milliards d'investis dans les caisses de pension. Si on parlait de 1%, ce serait 10 milliards. La réalité, c'est qu'il y a moins de 500 millions qui ont été investis dans l'écosystème suisse par les caisses de pension. Donc, on est encore très loin de prendre risque. On n'est même pas au 1 pour 1000. Donc, je ne vois aucun risque systémique. Et deuxièmement, je le répète, il faut que les gens comprennent que si on investit dans un portefeuille bien diversifié, si quelqu'un avait investi dans toutes les startups suisses, c'est-à-dire 2500... sociétés créées les 30 dernières années et Zoray, et multipliées par 5 leur investissement. Alors évidemment, certaines sociétés ont une part, les top 5 ont pris 80% de cette création de valeur. Ne pas avoir ces sociétés dans son portefeuille est un problème. Mais même le reste finirait par être, à mon avis, au moins à l'équilibre. C'est-à-dire qu'on retrouve sa mise. Et si on a une pépite comme Actelion qui a été... Finalement vendu 30 milliards, c'est une société de biotech basée à Bâle, 30 milliards de francs à Genji, où On Shoes, les chaussures, une quinzaine de milliards. On voit bien CRISPR dans le domaine de la biotech qui est aussi à plus de 10 milliards. Il y a eu de très belles sorties suisses et actuellement il y a quelques sociétés qui vont valoir quelques milliards comme Neckthink à l'EPFL ou Sonarsource Proton à Genève. Ça, c'est des sociétés qui valent des milliards. Donc, sincèrement, je pense qu'un investisseur qui serait suffisamment bien diversifié, qui aurait de grandes chances de retrouver son argent en Suisse. Et c'est pour moi un profil de risque tout à fait similaire à ce qu'on a dans le monde du ce qu'on appelle le private equity, c'est-à-dire l'investissement non coté. Quand on investit dans des sociétés qui ne sont pas en bourse, il y a toujours typiquement 20, 25 participations par... portefeuille pour éviter les risques de faillite qui existent mais qui peuvent être compensés par des réussites
- Speaker #1
Et maintenant que tu es sorti de Swisscom Ventures qui va se battre pour ça ? En fait en prenant le livre je me disais vraiment purée là Dominique il faut qu'il nous aide il faut qu'il aide la Suisse encore une fois je ne sais pas maintenant je confonds mais je sais pas si je l'ai dit ou là en enregistrant ou c'était en off mais vraiment En lisant une partie du livre, je me suis vraiment dit Purée, ce livre devrait être mis beaucoup plus en avant que ce qu'il est ou ce qu'il a été. Je me réjouis de l'avoir, je me réjouis d'en parler autour de moi aussi. J'ai un ami qui l'a lu, que tu as rencontré, je ne sais pas, Thibaut Castella, tu vois qui c'est ? Oui. De Dixie. Lui l'a lu, il m'en a parlé aussi, mais il n'y a pas assez de personnes qui l'ont eu ce livre.
- Speaker #0
Ça me fait plaisir quand des entrepreneurs le lisent. Certains l'ont donné d'ailleurs aux conseillers fédéraux en main propre. Si vous voulez comprendre notre profession, lisez ce livre. Je ne citerai pas les conseillers fédéraux qui l'ont reçu comme ça, mais c'est amusant. Donc oui, effectivement, il faut en parler parce qu'il faut développer surtout la confiance dans notre écosystème. Il faut avoir conscience parce qu'il y a trop de sujets défaitistes. sur le manque de capital, sur les échecs. Mais il faut surtout se dire qu'on a des atouts extraordinaires que nous envient le reste du monde. Comme je disais, cette image de marque liée à la qualité, la très haute précision, et donc la confiance qu'on a. Et ça, c'est vraiment essentiel pour faire de la high tech. Donc on a tout ce qu'il faut, et il faut juste avoir un peu plus d'entrepreneurs qui croient dans nous. Et c'est pour ça que moi, j'estime que je suis toujours dans le combat. En tant qu'entrepreneur, je lève aussi des capitaux et puis surtout je me bats tous les jours pour que, par exemple, Eco-Robotics soit un succès. Et au final, si ça l'est, je pourrais en parler à post-théorie comme étant un exemple de ce que la Suisse peut produire comme leader mondial dans une niche. Et c'est pour ça que c'est complémentaire d'une approche un peu plus high level, donc un peu plus superficielle en tant qu'investisseur. d'avoir une approche plus diversifiée. Lorsqu'on est entrepreneur, on met tous ses œufs dans le même panier, mais c'est toujours le même combat. Donc je n'abandonne pas mes collègues, ni investisseurs ni entrepreneurs, je considère qu'on est comme une grande famille. Il s'agit d'à peu près 2500 sociétés qui ont été financées. Donc actuellement, il y a à peu près 500 sociétés qu'on peut dire être start-up. La définition pour moi de start-up, c'est celles qui sont financées par le venture capital. Et je ne parle pas des milliers et dizaines de milliers de PME qui, elles, sont auto-financées ou qui ont des modèles d'affaires moins gourmands dans le capital, qui peuvent donc générer au début un petit peu d'argent pour pouvoir se développer elles-mêmes. Et celles-là ont aussi des thématiques similaires, même si elles ne sont pas financées par le venture capital, elles doivent quand même avoir du financement bancaire. et aussi vouloir conquérir des marchés mondiaux. Donc on est dans la même synergie, dans la même philosophie.
- Speaker #1
Qu'est-ce que tu penses de tokeniser des fonds VC ? Je dis ça parce que, tu vois, au début, là on parle encore une fois d'une minorité, je parle de la population en général. Et là, comme ça, je me dis, si on tokenisait peut-être une partie de certains fonds, déjà pour les personnes, ce serait un investissement quand même assez intéressant. En plus, potentiellement, on pourrait lever un peu plus.
- Speaker #0
Oui, c'est étonnant que ça n'ait pas été fait. Alors, ça semble évident de pouvoir émettre des actions, pas simplement pour les sociétés cotées en bourse, mais pour tout type de société qui se crée en Suisse. Ce que tu dis, d'émettre un token. qui peut être acheté par n'importe qui. Donc chacun pourrait, pour 100 francs, avoir un token, une action, en gros, même si c'était que 0,01 pour 1000 d'une société qui émerge, une startup. Effectivement, ça fait du sens. Et donc oui, ça devrait se faire à moyen terme. À court terme, il y a eu une première vague qui n'a pas abouti, c'était la vague des ICOs. comme tu le sais, il y a 3-4 ans, qui malheureusement manquaient de sérieux. Il y a beaucoup de business plan qui ont été financés comme ça, de manière active, sans véritablement vérifier la solidité de leur modèle d'affaires. Donc je pense que même si cette vague-là a fini par s'échouer sur la rive, sans qu'il y ait de suite, ça a été un premier essai. Dans le futur... Lorsqu'on va voir des sociétés sérieuses qui seront financées par la tokenisation, je ne vois pas de raison pour laquelle ça ne devrait pas devenir une tendance de fonds.
- Speaker #1
Oui, là ici, on en a parlé avec Cyrus Fazel de SwissBor.
- Speaker #0
Pour l'instant, c'est limité aux sociétés qui sont actives dans la blockchain ou les cryptos. Mais une fois que ces sociétés-là seront bien établies, je pense qu'elles vont montrer au reste des sociétés classiques l'intérêt d'être financées par cette méthode-là.
- Speaker #1
Sauf erreur, il y a Farmy à Zurich.
- Speaker #0
Oui.
- Speaker #1
qui a levé des fonds de cette façon-là. Il y a Neon aussi. C'est la néobanque. Donc effectivement, en t'écoutant, je me disais c'est assez fou qu'on n'ait pas encore démocratisé cet aspect-là. Et maintenant, pour parler d'Ecorobotix, on a parlé d'investissement. Je t'ai entendu dire dans un podcast anglophone Tu disais qu'Ecorobatic sont venus quatre fois vers Swisscom Ventures avant que vous acceptiez le deal ou que vous acceptiez l'investissement. Qu'est-ce qui change entre la première fois qu'eux viennent vers vous ou vice-versa et la dernière fois ?
- Speaker #0
L'ironie, c'est que c'est moi qui ai dit quatre fois non. Et ensuite, j'y contacte le reste de ma vie. C'est-à-dire que ce qui est intéressant, c'est que... Eco Robotics a plus de 10 ans d'âge. Et pendant 7 ans, ils ont développé un robot autonome dans les champs avec un panneau photovoltaïque qui permettait de ne pas avoir de moteur. Ça, ça fonctionnait tout seul. Mais ce n'était pas véritablement viable sur le plan économique. Il n'y avait pas assez de productivité. C'était un bel outil qui plaît aux journalistes, mais cet outil-là ne marchait pas. Donc c'est pour ça qu'à chaque fois, même si j'aimais bien l'équipe, c'était une belle histoire. Malheureusement, je n'y voyais pas de marché. Mais lorsqu'ils ont transformé cet outil en un engin agricole classique tiré par un tracteur, en étant 6 mètres de large, d'un seul coup, ça a parlé aux utilisateurs, aux agriculteurs, qui eux, savent comment utiliser ce type d'engin, alors que l'autonomie pure, on le voit avec la voiture autonome. à des exigences et contraintes encore non résolues. Donc voilà, pourquoi je mentionne ça, c'est que beaucoup de startups ont eu cette expérience de pivot, c'est-à-dire qu'il faut essayer plusieurs choses avant de réussir. Bien souvent, c'est la fin de la société lorsqu'on n'arrive pas à pivoter suffisamment rapidement, mais pratiquement toutes les sociétés dans lesquelles j'ai pu investir, j'en ai fait une centaine en tout dans ma vie, pas que chez Swiss Commercials, mais aussi dans une... société que j'avais créée avant, le rejoindre Swisscom, Kickstart Ventures, je dirais que 80% des sociétés ont eu un moment où ils étaient proches de la mort. Et donc, il a fallu changer le modèle. Et c'est cette capacité de se transformer très rapidement pour retrouver des capitaux, pour brûler moins d'argent ou changer même de personnel. En fait, une transformation immédiate sur la base d'une connaissance d'un marché qui fait qu'on finit par y arriver. Mais ça peut prendre typiquement 5 à 10 années avant de trouver sa voie. C'était le cas d'Ecorobotix. C'était dans l'année 7, 8, 9 que les choses ont décollé finalement. Et quand Swisscom, Anchor, s'est investi, on est en tout début de cette phase d'inflexion. L'année où il n'y avait pas encore de revenus, mais l'année suivante, les revenus ont décollé. Puis maintenant, on a des revenus intéressants à deux chiffres. Mais c'est spectaculaire de voir comment... Une société peut végéter, en tout cas dépérir, et puis d'un seul coup trouver sa voie et avoir une expansion rapide. Mais tous les ans ou tous les deux ans, il faut se poser cette question, est-ce qu'il y a un pivot qui est nécessaire pour aller encore plus haut ? Parce que les choses évoluent très vite. Donc cette capacité à se remettre en question fondamentalement très souvent, c'est ça qui caractérise les startups, et c'est ça qui est difficile à faire dans les grands groupes.
- Speaker #1
Tu as mentionné... En amont, on a parlé de l'IA que vous utilisiez chez Eco Robotics, cette intelligence artificielle. Mais je me posais la question parce qu'on avait parlé de la souveraineté ou la majorité de l'IA, en tout cas comme on l'entend, vient des États-Unis. Est-ce que chez Eco Robotics, vous utilisez l'IA de manière propriétaire ?
- Speaker #0
Alors, on utilise l'IA pour... Analyser les images de plantes et à 7 km heure pouvoir décider si on pulvérise ou pas une plante. C'est comme ça qu'on arrive à épargner jusqu'à 95-98% des produits phytosanitaires comme des pesticides, des herbicides notamment. grâce justement à cette analyse d'images ultra rapide. C'est très spécialisé. Et c'est d'ailleurs là que la Suisse peut être très compétitive. C'est l'IA, si c'est de la generative IA, donc la LLM, tout ce qui est à la mode actuellement.
- Speaker #1
Les CHGPT,
- Speaker #0
Claude et autres. Là, on n'a aucune chance parce que les montants investis par les sociétés américaines sont tellement grands. C'est tellement capitalistique. Il faut tellement de puissance de travail, de données, d'énergie que c'est très difficile d'être en concurrence. avec les grandes sociétés. Mais par contre, lorsqu'il s'agit de niches et d'applications concrètes, souvent en lien d'ailleurs avec une partie hardware, un matériel, et dans une niche spécifique, nous c'est l'agriculture, là on peut tout à fait être concurrentiel. Et c'est le cas d'ailleurs. Donc on a actuellement la meilleure précision au monde, ce qui nous permet d'avoir la seule machine actuellement déployée à grande échelle. Il y a quelques concurrents qui arrivent. On ne sera pas les seuls à moyen terme, c'est clair, mais dans le domaine du maraîchage, dans tout ce qui est légumes, là, on a pu développer des algorithmes spécifiques pour des cultures comme l'oignon, par exemple, où on a vraiment une qualité de reconnaissance qui s'est développée au fil du temps qui est vraiment exceptionnelle, ce qui permet de minimiser les pesticides dans les champs. Donc oui, la Suisse et l'Europe ont beaucoup d'avenir dans l'IA, mais il faut qu'ils soient appliqués à des secteurs. dans lequel l'Europe a été historiquement fort. Donc l'IA dans la médecine, bien sûr, on le voit avec des sociétés comme Sophia Genetics par exemple, à l'EPFL, c'est donc la précision dans la médecine, la précision dans l'agriculture avec Eco Robotics. On peut aussi imaginer un tas d'autres verticaux, la chimie, la machine outil comme j'ai mentionné etc. où la Suisse et l'Europe par exemple dans l'automobile doit développer... des technologies d'IA appliquées. C'est essentiel. Si on ne fait pas ça, qu'est-ce qu'on va faire d'autre ? Donc ça serait de l'argent perdu, du temps perdu, de vouloir concurrencer les Américains sur leur marché de logiciels à grande échelle qu'on a perdu, sur lesquels il y a une dominance quasi totale américaine. L'écosystème, il est en Silicon Valley, on le sait. Par contre, à nous de garder l'intelligence artificielle sur les secteurs dans lesquels l'Europe a encore son mot à dire.
- Speaker #1
Donc c'est orienté aussi tout en potentiellement utilisant cette technologie-là, mais d'une façon où justement ça va aider à développer notre secteur d'activité, notre segment via du machine learning, en l'alimentant avec nos propres données.
- Speaker #0
Exactement. On est en train de digitaliser des secteurs traditionnels comme la chimie, par exemple, où la protection des plantes, c'est de la chimie fine, c'est Syngenta en Suisse. Bayer, BSF, Monsanto. Historiquement, l'humanité avait eu des gains de compétitivité pour nourrir la planète grâce aux engrais mais aussi aux herbicides qui permettent de tuer les plantes de manière sélective. Donc en gros, on pulvérise tout et la chimie savait reconnaître une adventice, donc une mauvaise herbe, la détruire et garder les plantes, les cultures en vie. Ça c'était un progrès humain. On a vu les limites de ce modèle, et maintenant il faut grâce à la précision réussir à n'utiliser la chimie que sur des endroits, des applications très très précises, en l'occurrence des adventices, uniquement là où il y en a besoin. Et la prochaine phase, ça va non seulement réduire les quantités, mais aussi de remplacer les sources chimiques par des intrants, ce qu'on appelle des... produits d'origine organique. Et on voit le vinaigre, l'eau chaude, même les huiles essentielles peuvent être des herbicides à la place de la chimie. Mais ça, ça demande beaucoup de précision pour pouvoir être appliqué de manière concurrentielle. C'est là-dessus qu'il faut se polariser, grâce à une nouvelle intelligence qui n'est plus dans la chimie, mais qui est dans l'intelligence artificielle pour la reconnaissance d'images. C'est pour ça que j'utilise un petit mot... que les Américains comprennent bien parce qu'ils parlent toujours de AI en pensant active ingredient donc un ingrédient actif dans la chimie qui permet de faire le travail, un peu comme une chiméothérapie qui peut tuer les cellules cancéreuses et garder les autres cellules en vie. Donc je dis, on va de l'AI, de l'active ingredient, vers l'AI, donc Artificial Intelligence.
- Speaker #1
Et maintenant ?
- Speaker #0
Donc tu es passé du Venture Capital à la gestion d'entreprise. Quel défi est-ce que tu rencontres ?
- Speaker #1
Clairement, il était opérationnel. Pour moi, qui venait de l'investissement, typiquement, Eco-Robotics, c'était pour moi 4 journées par an, 5 journées, pour les conseils d'administration. Les choses étaient toujours bien préparées, il y avait des décisions à prendre, certes critiques, est-ce qu'on aurait investi dans la société, est-ce que l'on fait entrer de nouveaux investisseurs ? investisseurs, oui ou non, mais c'était assez éloigné finalement des problématiques opérationnelles. De l'autre côté du business plan où je suis, le monde est complètement différent. Là, il ne faut pas simplement avoir le bon produit au bon moment, il faut aussi pouvoir le produire. Ne serait-ce que trouver un bâtiment. Alors là, on cherche une usine actuellement dans la région d'Iverdon. Je pense qu'on l'a trouvée, on devrait signer la semaine prochaine. Mais c'est... Six mois de travail et de négociations pour pouvoir avoir ce bâtiment, ce qui m'aurait semblé être anecdotique en tant qu'investisseur. Avec de l'argent, bien sûr, on prend des bâtiments. Alors qu'un entrepreneur doit faire face à un tas de problématiques opérationnelles qui sont passionnantes. Moi, ce que j'ai découvert, c'est que j'aimais beaucoup ces problèmes-là, les problèmes à régler au quotidien. Finalement, c'est absolument passionnant. Lorsqu'on trouve une solution, assez souvent évidemment, les problèmes insolubles sont des casse-têtes. Alors j'en ai aussi, mais disons que j'apprécie cette dynamique opérationnelle énormément.
- Speaker #0
Notre épisode sortira le 14 octobre, donc c'est la semaine normalement, tu as dit dans une semaine, donc normalement c'est plus ou moins là.
- Speaker #1
Exactement.
- Speaker #0
Je prends chaque fois des éléments que je t'ai entendu dire. Justement, tu as dit qu'il fallait penser en grand. Typiquement, le modèle des États-Unis que tu as mentionné auparavant, c'est grand, c'est penser grand. Aux États-Unis, ils pensent grand. Comment est-ce qu'on peut penser grand en Suisse ? Comment est-ce que toi, tu vas faire pour penser grand avec Ecorobotix ? C'est déjà le cas. Vous avez levé au total 69 millions, je crois. Mais la dernière levée de fonds qui était en 2023, c'était environ 52 millions de dollars. Évidemment, avant, tu as mentionné OpenAI avec ses 10 milliards. et bientôt 100 milliards. Alors, on n'est pas dans ces ordres-là, mais ça reste quand même des belles sommes, des bons montants. Maintenant, quelles sont les prochaines étapes pour Ecorobotix ? Et toi, justement, comment est-ce que tu vas l'amener pour penser grand ?
- Speaker #1
La notion de taille, qu'est-ce que ça veut dire être grand ? C'est relatif à la taille du marché. Donc, si on définit le marché à l'échelle mondiale comme étant un marché de 1 000 milliards, comme certains disent pour l'open, pour tout ce qui est generative AI, ça devient hors de portée à des startups communes, même européennes de manière générale. Mais si le marché est plus spécifique, et s'il prend une dizaine d'années avant de se former lui-même, par exemple la digitalisation dans l'agriculture, c'est quelque chose qui ne va pas se faire du jour au lendemain. Donc là, on peut avoir l'ambition d'être leader mondial. Et il faut avoir cette ambition-là. Parce que 40% de la machine agricole en Europe, elle est produite en Suisse et Allemagne. C'est comme les grosses voitures, il faut que ça soit solide. Donc on a cette culture-là. On a la culture de l'alimentation avec les Nestlé, même aussi de la protection des plantes avec Syngenta, l'intelligence artificielle à l'EPFL. Donc réunir tout ça à moins de 100 kilomètres sur un territoire, c'est unique. Je pense que le leader mondial de l'agriculture de précision doit être Suisse, sur le plan objectif. Parce que c'est là qu'on a ces quatre cultures, quatre industries qui sont en train de fusionner. Et donc, pourquoi pas nous ? Si c'est nous qui sommes là, il faut se donner cette ambition-là. Donc, sur un marché comme ça, il faut lever suffisamment de capital pour pouvoir être dans les trois premiers mondiaux, en sachant qu'il y aura toujours un Américain qui sera en concurrence et un... un asiatique, mais il faut moins être le premier européen. Et ne pas vendre trop vite, c'est la grande problématique de ceux qui vendent après 5 ans, parce qu'ils sont sous pression de vendre par les actionnaires qui eux doivent sortir, puisque typiquement l'industrie du venture capital est organisée de telle manière qu'il faut 5-6 ans de temps pour sortir des investissements, ce qui est beaucoup trop tôt, puisqu'on voit bien même Google a mis une vingtaine d'années avant de devenir vraiment une société mondiale telle qu'elle est aujourd'hui. Il faut 10 ans pour, en gros, moi je dis souvent, il faut 5 ans pour trouver son modèle, encore 5 ans pour avoir une preuve que ça marche, et encore 5 ans pour être profitable, et puis les 5 dernières années, donc finalement, en s'approchant de la vingtaine d'années, on arrive à être leader mondial et avoir quelques milliers d'employés et d'être vraiment bien valorisé. Donc il faut avoir cette perspective-là sur 10 à 20 ans. Peut-être savoir... Vendre les actions des investisseurs, d'autres investisseurs plus matures, on peut parler de private equity, des gens qui investissent dans des sociétés déjà profitables ou presque profitables, ou alors une mise en bourse. Donc il faut se mettre dans cette perspective-là de dire, la fin de l'histoire, ce n'est pas dans trois ans ou quatre ans en ayant vendu au leader de marché. Non, la fin de l'histoire, c'est quand on est nous-mêmes leader de la nouvelle catégorie. à l'échelle mondiale. Et si quelqu'un veut nous racheter, il peut toujours faire une offre. On regardera l'offre. Peut-être que ça sera trop tenté, on l'acceptera, mais ce n'est pas vraiment l'option de base. L'option de base, c'est de s'inscrire dans cette logique ambitieuse. Ça veut dire qu'en tant que CEO, on ne pourra pas forcément rester tout le temps jusqu'à la fin. D'autres prendront le relais. Et la même chose pour les différents cadres. Donc il faut avoir une vision à très long terme. que n'ont pas la plupart des entrepreneurs parce qu'ils sont trop occupés à lever les fonds et ensuite à sortir le plus rapidement possible pour minimiser leurs risques ou simplement sous la pression de leurs investisseurs mais ça c'est pas comme ça qu'on construit des champions mondiaux les américains ont bien compris ça ils ont développé un écosystème qui permettait à des sociétés non cotées de lever quelques milliards même s'il fallait et d'attendre encore 5 à 10 ans avant d'être mis en bourse ça c'est un modèle intéressant ou alors il faut aller directement en bourse et continuer l'aventure entrepreneuriale sans être vendu.
- Speaker #0
Et là donc, en termes de levée de fonds, d'objectifs, vous avez une roadmap qui est claire, est-ce que tu peux en parler ? Est-ce que tu peux parler des prochaines levées de fonds que vous avez ?
- Speaker #1
Oui, je reprends mon modèle, on a 10 ans d'expérience, d'existence disons chez Eco-Robotics. Je pense que le modèle, la machine marche a été prouvé. Donc, sur les cinq prochaines années, c'est maintenant de prouver qu'on peut être profitable. C'est ça le défi actuellement. En faisant de la croissance rapide et en étant pour l'instant encore leader dans notre catégorie, il faut maintenant grandir plus vite que les autres qui vont arriver, qui vont nous concurrencer. Si on réussit à sauvegarder ce leadership dans les quatre, cinq prochaines années, on pourra ensuite s'inscrire dans une logique plus traditionnelle, d'industrielle. avec un peu moins de pression. Donc, en termes de levée de fonds, ça veut dire qu'on a effectivement des investisseurs qui nous ont suivis très bien et qui continuent à le faire. Mais maintenant, l'objectif, c'est de devenir profitable, donc de ne plus être dépendant de ces investisseurs. Donc maintenant, la prochaine étape, c'est la profitabilité.
- Speaker #0
D'accord, ok. Donc, tu as fait... Beaucoup d'années avec la casquette d'investisseur, maintenant tu es CEO, est-ce qu'il y a des traits qui caractérisent les fondateurs de bonnes startups ? Quand je dis bonnes, c'est bonnes pour un VC typiquement, ou au contraire, est-ce qu'il y a des traits où toi, vous, vos équipes, vous disiez là c'est… C'est no go, on voit clairement qu'il y a x ou y raisons qui font que.
- Speaker #1
Il y a différentes qualités nécessaires à différents stades de l'évolution d'une startup. Au début, c'est la curiosité, l'envie de changer le monde, de créer et de prendre des risques qui sont assez insensés, il faut le dire. La probabilité de réussite au tout début est encore très faible. Mais ensuite, plus on avance, plus... L'entrepreneur doit venir à un gestionnaire. Et c'est là que parfois certains n'arrivent pas à muter, à devenir, ce qui a changé complètement de personnalité, mais on peut dire. La plupart n'y arrivent pas d'ailleurs. Donc c'est important de savoir se mettre en retrait, d'avoir l'humilité pour laisser la place à d'autres au fil et à mesure que la société se développe. On l'a vu chez Microsoft ou chez Google, ils l'ont très bien fait. Et ça, c'est une qualité. Et je félicite toujours les entrepreneurs ou les cadres, même des corobotics qui. proposent d'eux-mêmes de laisser la place à d'autres et de se repositionner dans un domaine où ils se sentent encore valorisés et où ils peuvent amener de la valeur. Ça, c'est une grande qualité. L'ego est souvent mauvais conseillère. Et au-delà de ça, la définition de Schumpeter, l'économiste autrichien, m'intéresse toujours et est passionnante. Qu'est-ce que c'est un entrepreneur pour lui ? C'est quelqu'un d'abord, c'est le révolutionnaire. Du capitalisme. Sans. En gros, sans l'entrepreneur, le capitalisme produirait des monopoles. Et grâce à l'entrepreneur, il est entièrement renouvelé. Donc par la destruction créative que tu connais de Schumeter et qui renouvelle l'économie grâce à l'entrepreneur. Donc, il dit l'entrepreneur, c'est toujours quelqu'un qui est un créatif, qui a une certaine forme de naïveté, mais qui s'aventure dans des chemins. inconnu avec une certaine légèreté de sportif. Il emploie même le mot et Schumpeter il y a une centaine d'années qu'il écrit ça. Donc comme un sportif qui va gaiement au combat en étant très ouvert sur le monde et qui sait trouver sa voie. Et puis évidemment qui au fil du temps devient de plus en plus spécifique. Mais il y a... J'aime bien cette notion d'idéalisme. L'idéalisme d'un entrepreneur. Souvent il le fait pas pour des raisons d'argent d'ailleurs et même... Je vous peux être en noter, la plupart des entrepreneurs que je connais, ils le font parce qu'ils aiment la science, ils aiment une invention, ils veulent, dans le cas des corobotiques, c'est vraiment clairement l'impact, ce qui nous motive, moi c'est la raison aussi pour laquelle j'ai rejoint cette société, c'est pour pouvoir avoir un impact tous les jours, résoudre un des problèmes de la planète, qui est la surconsommation de produits chimiques dans l'agriculture. Et ça c'est extrêmement motivant, c'est pas l'argent qui me motive finalement. Et on ne se rend pas compte de ça. La plupart des entrepreneurs sont beaucoup moins intéressés par l'argent que leurs collègues des grandes écoles qui vont travailler dans la finance, par exemple, ou dans les grandes entreprises. Donc, ce sont des aspirations supérieures qui les motivent à prendre des risques énormes et ils le font de manière sportive. Voilà comment je décrirais un entrepreneur.
- Speaker #0
Merci pour cette belle définition. Et maintenant, j'aimerais... te poser des questions un peu plus personnelles. Oh là là !
- Speaker #1
Il faut que tu boives,
- Speaker #0
qu'est-ce que tu fais ? Malheureusement, je n'ai pas d'alcool. Je crois que normalement, dans la fermentation, il y a 0,0 et quelques pourcents.
- Speaker #1
Tu ne proposes pas d'herbes à fumer, comme dans certains podcasts ?
- Speaker #0
Non, non, non. En tout cas, pas encore. Non, non. Je parle de fermentation parce qu'on boit de la kombucha, pour celles et ceux qui nous écoutent et qui ne nous regardent pas. Donc Dominique, tu es venu en train jusqu'à Neuchâtel avec un livre. Tu as écrit un livre, donc j'imagine que la lecture fait partie de ta vie. Tu me le diras, mais est-ce que tu as des passions ou des activités extra-pro ?
- Speaker #1
Bien sûr, bien sûr. Je suis un homme de passion. Au-delà de la passion de l'entrepreneuriat, j'aime bien la lecture, effectivement. les livres m'ont toujours porté d'ailleurs tous les ans j'offre un livre à mes équipes le même ou bien ? toujours différemment mais toujours avec une raison pour lancer un débat donc et tu l'offres quand ? Noël typique quand ce n'est pas deux fois par an les gens me voient venir quand je suis avec une pile de livres bon c'est pas obligé de les lire mais souvent Intéressant, par exemple dernièrement chez Ecorobotix j'ai offert le livre de la biographie d'Elon Musk, d'Isaac Zon, parce qu'elle montre très bien comment il a réussi son défi. de production, c'est-à-dire comment on lance SpaceX ou Tesla. C'était un défi industriel extraordinaire, là où avaient échoué finalement la plupart des grandes sociétés. C'est-à-dire de construire des fusées avec des moyens très limités ou en laps de temps très court. C'était mission impossible pour la NASA. Il l'a fait. La même chose pour Tesla par rapport au reste de l'industrie automobile. Et ça, c'était... Pas le fait du hasard, il y avait une méthode qui est extrême, qui est d'ailleurs caricaturale chez lui, qui est, je dirais même, humainement quasi insoutenable parce que c'est trop extrême chez lui. Mais ça montre très bien quand même comment un entrepreneur peut réussir à créer, à stimuler des équipes pour réussir des missions impossibles. Donc sans être un fan d'Elon Musk dans tous les domaines. Je lui reconnais cette capacité-là, être assez unique, donc ça me permet de discuter avec mes équipes. Qu'est-ce que ça veut dire qu'être, par exemple, dans le lancement de nouveaux produits ? Qu'est-ce qui est important pour réussir quelque chose de nouveau dans les temps et avec des investissements moindres que la concurrence ? Donc, à une autre époque, le livre de Bill Gates sur les 52 milliards de tonnes de CO2 décarbonées, donc les émissions annuelles. et voir quelles sont les technologies qui peuvent contribuer à résoudre ce problème. Ça, c'était intéressant pour mes collègues investisseurs parce que ça permettait de passer en revue l'ensemble des technologies dans ce domaine. Donc à chaque fois, le livre permet de lancer une discussion.
- Speaker #0
Et tu as d'autres passions que l'entreprenariat ?
- Speaker #1
Bien sûr, la nature, le sport. J'aime beaucoup faire du sport dans la montagne, du trail en particulier. Ah, tu fais du trail. Voilà. Et ça, ça me ressource. Plus j'avance dans l'âge, je dirais, plus ça devient nécessaire. Et je vois l'énergie comme un temps qui commence en début de semaine à un certain niveau et qui baisse au fil de la semaine en fonction de l'intensité du travail. Il faut, grâce au sport, c'est étonnant, plus on fait de sport, plus on sent que l'énergie revient. C'est contre-intuitif, mais c'est essentiel pour moi. Et puis la famille. puisque ma famille était toujours un pilier fondamental pour moi. Donc voilà, j'ai six enfants. Six enfants ? Exactement. Ah oui,
- Speaker #0
c'est une grande famille.
- Speaker #1
Absolument. Avec ma femme qui m'accompagne depuis toujours. Et puis on a eu un parcours européen. On a commencé en France, en Espagne, l'Allemagne, sept ans, sept ans en Angleterre. Et puis le reste du temps en Suisse. Et donc un tour d'Europe avec la petite famille qui suivait un peu partout. Donc ma famille a toujours fait partie intégrale de ma personnalité. Et aussi, ce n'est pas une contradiction avec une carrière qui me prenait beaucoup de temps, mais c'est certainement le signe que ma femme m'a accompagné de manière absolument remarquable. Et je lui dois tout.
- Speaker #0
Et six enfants, de quel âge à quel âge ?
- Speaker #1
15 à 31. D'accord.
- Speaker #0
Et puis, les plus grands, ils sont en Suisse aussi ? Parce que finalement, tu l'as dit, vous avez beaucoup voyagé. Donc, eux-mêmes sont des... Les enfants du voyage dans le bon sens du terme, je veux dire.
- Speaker #1
Oui, alors la plupart sont en Suisse, mais ils ont tous fait des parcours européens dans leurs études. Donc c'est un petit peu une façon de dire, mes enfants, découvrez le parcours que nous-mêmes avons fait en tant que parents. Puis vous choisirez le pays qui vous plaît le mieux. C'est vrai que la Suisse est extrêmement attractive, mais il faut avoir vu d'autres pays pour pouvoir vraiment le comprendre.
- Speaker #0
Je suis tout à fait d'accord. Le trail, tu disais, donc, t'en as besoin maintenant, ça te vide la tête. Est-ce que tu fais des courses ? Tu le fais deux, trois fois, quatre fois, cinq fois par semaine ? C'est très régulier ou comment tu le pratiques ?
- Speaker #1
J'essaie d'être de plus en plus régulier, je dirais, notamment le samedi matin avec ma femme ou avec des amis. Donc, toujours une course en montagne, un sommet. Et d'ailleurs, je compte lancer dans deux semaines un cycle régulier de marche avec des entrepreneurs et avec toujours en tant que grand des jeunes, parce que c'est important pour moi de transmettre. Donc, responsable d'entreprise dans la tech, plus jeune, en montagne, en marchant tous les mois. Il y a un programme, c'est ce qu'on appelle Walk to Talk. Et donc, au lieu de faire mes podcasts, tu sais que j'avais à une époque envisagé de le faire. Je me suis dit finalement, au lieu de faire... De faire des réunions, les gens souvent sont très pris. L'idée c'est plutôt de les faire parler entre eux de manière informelle, en montagne, mais pas simplement entre nous. Nous sommes privilégiés qu'on peut assumer certaines fonctions dans les entreprises ou dans le monde scientifique. C'est mieux d'être dehors. et de faire venir des jeunes pour pouvoir avoir un dialogue. Donc c'est ça qui m'occupera, j'espère, les prochaines semaines de manière régulière.
- Speaker #0
C'est une très bonne idée, je trouve. Il y a quelques petites années, je voulais absolument lancer une sorte de... Tu sais, il y a tous les clubs-services, les organisations, les associations et autres où tu peux trouver des entrepreneurs, des entrepreneurs. Et ce qui me dérangeait un petit peu... Alors moi, je bois très peu. Quand je bois, c'est parce que je veux boire un bon verre de vin rouge avec ma femme ou avec ma famille. Ou tu vois, c'est un moment que j'ai décidé. Ce n'est pas à midi avec un client et puis tu sens un peu cette pression sociale que maintenant j'ai fait fi de cette pression. Mais il me fut un temps, quand j'ai commencé, vraiment, j'avais de la peine à dire non. Maintenant, je ne bois pas, je ne bois pas et je suis bien de cette façon. Mais je trouve quand même que... quand tu as une entreprise ou quand tu es dirigeant ou dirigeante et tu as énormément d'occasion pour boire, pour manger, tu as tout le temps des événements et je voulais lancer une sorte de, comme toi, une rencontre mensuelle les matins. Moi, je m'entraîne les matins à 6h du matin et je m'aperçois qu'il y a aussi pas mal d'entrepreneurs, d'entrepreneuses qui aiment bien cet horaire-là parce que personne ne t'embête à ce moment-là et je voulais le faire. peut-être aller au maximum à 6h30, sinon après ça devient un peu trop tard, plus un bon petit déj, mais sain. Finalement, je ne l'ai jamais fait, et là tu me motives à le faire. Donc parle d'en moins un petit peu plus.
- Speaker #1
Il faut le faire parce qu'on voit bien un facteur de déséquilibre actuellement dans les sociétés qui contribue au burnout, qui est vraiment préoccupant. Donc le facteur de stress, c'est qu'on a eu... Après le Covid, trop de distanciation physique. Alors certainement, on essaie de pallier ça avec d'autres événements, avec des goûters, avec des apéros. Mais ce n'est pas encore totalement naturel et sain. Et il faut réussir à faire revenir les gens au bureau. Ça, c'est un défi. Alors certaines entreprises veulent le faire de manière autoritaire, d'autres pas. Ce n'est pas encore gagné. On va voir quel modèle va finalement être le modèle d'avenir. Mais moi, ma réponse, c'est que, et chacun a une réponse un peu personnelle, c'est que le prochain défi, ça va être de renouer avec la nature. C'est-à-dire que la virtualisation permet de se rapprocher de la nature, sauf si on reste devant un écran, évidemment. Donc, il faut réussir à ce qu'un cadre où... un employé d'une société normale au XXIe siècle passe un tiers de son temps dehors chaque semaine et pas 90% de son temps ou 90% devant des écrans avec un apéro et quelques sorties qui ne sont pas vraiment naturelles. Il faut vraiment inscrire dans l'agenda et je suis en train de réfléchir à certaines façons même de concevoir la gestion d'entreprise. dans un cadre naturel. Ça tombe bien puisque chez Agrobotix on est très proche des plantes et j'ai quelques idées dont on en reparlera à ce niveau-là. Mais je pense qu'il faut vraiment que le corps, la capacité de l'humain à résister au stress et aux heures devant un écran soit augmentée par une revitalisation liée au contact avec la nature. Et j'espère que dans le futur, des collaborateurs travailleront dans un cadre naturel, c'est-à-dire littéralement dehors. Avec un peu de virtualisation, on peut faire beaucoup de choses. On peut marcher et avoir une réunion, courir tout en consultant des emails. On peut surtout se rencontrer en restant efficace. Ça, il faut organiser un petit peu l'organisation. Il faut organiser les sociétés du futur et les équipes du futur autour de cette thématique.
- Speaker #0
Et surtout,
- Speaker #1
c'est pas simplement bureau ou virtuel avec une espèce de flou artistique. Qu'est ce que ça veut dire le virtuel ? Non, je pense qu'il faut qu'on arrive à avoir un équilibre entre le bureau qui a ses raisons spécifiques. La maison aussi, ça donne une flexibilité personnelle et le contact avec la nature pour pouvoir se régénérer soi même. Ça, ça peut être fait de manière privée. Claire, certain. Mais pour certains métiers qui ont la chance d'avoir l'option de le faire dans différents cadres, là, il faut prendre cette opportunité pour encourager ce lien. Un producteur sur une chaîne dans une usine ne pourra pas le faire. Mais typiquement, cet employé a la chance le week-end de pouvoir compenser. Par contre, pour certaines fonctions telles que celles qui nous concernent, où c'est souvent du 24 heures sur 7 et beaucoup de temps passé, même pendant le temps libre devant les écrans, ça, il faut que ça change. Ce n'est pas un progrès pour la société.
- Speaker #0
Tout à fait. Et j'allais dire, en Suisse, on a la chance d'avoir justement... cette nature qui est proche de nous partout.
- Speaker #1
Et c'est un élément différenciation unique qui doit rentrer dans notre narratif pour lever des capitaux et pour devenir la deep tech nation du monde. C'est-à-dire un endroit où tout le monde doit savoir, à l'échelle de la planète, aussi bien un investisseur qu'un acheteur de société, ou que même, je dirais, les hommes et femmes politiques. Si vous voulez faire de la technologie de très haute précision à... C'est la Suisse parce que c'est là qu'il y a les meilleurs techniciens du monde, parce qu'ils apprécient le cadre de vie, parce qu'il y a cet écosystème qui encourage à l'équilibre entre une vie de travail et la nature. Donc ça, il faut un petit peu guider. Ça ne peut pas se faire forcément de manière totalement intuitive ou personnelle. Je pense qu'il faut que les structures mêmes soient adaptées et qu'on prenne cette opportunité très au sérieux. C'est un avantage comparatif énorme. Quand vous recrutez quelqu'un qui gagne un demi-million en Silicon Valley, ce qui est une somme énorme mais avec une qualité de vie très faible, on peut recruter avec beaucoup moins d'argent certaines personnes avec un package justement autour de ces valeurs-là.
- Speaker #0
Est-ce que tu as déjà pensé à faire de la politique ?
- Speaker #1
Non, parce que même si on m'a déjà demandé, mais j'estime que ma mission elle est dans ce que je fais, puis ma vie familiale. était trop importante pour moi. Je voulais consacrer mon temps libre à ma famille vu que ma vie professionnelle était déjà bien chargée.
- Speaker #0
Je ne disais pas forcément en complément, mais tu vois là, tu as fait ce pivot toi-même avec la reprise en tant que CEO d'Ecorobotix. Je te pose la question parce qu'en lisant le livre, encore une fois, je me suis aussi dit tu aurais fait un très bon politicien, surtout un politicien. auxquelles on veut vraiment croire. Tu sais, il n'y en a plus tant que ça, je trouve. Bon, c'est mon avis personnel, mais voilà, c'était une petite aparté. Peut-être que tu y réfléchiras dans 5-10 ans, qui sait. Est-ce que depuis, justement, cette reprise de fonction d'Ecorobotix, ton organisation ou ta vie a changé par rapport à avant ? Est-ce que tu travailles moins ou plus ? Est-ce que tu voyages plus ou moins ? Parce que vous êtes à l'international, vous êtes 150 dans le monde, je crois, c'est juste environ.
- Speaker #1
Voilà, on est à peu près 150 en Suisse et une vingtaine à l'international, notamment aux Etats-Unis et dans 17 pays, mais de manière assez virtuelle. Et en étant orienté... On est une B Corp, on essaie de limiter les voyages par avion au strict minimum. Donc je voyage beaucoup moins qu'avant. Et si je le fais, c'est pour des raisons vraiment précises, mais le moins possible. Donc ça, c'est un aspect positif, même si je consacre tout mon temps disponible raisonnable. Donc quand on reprend une société, il y a une telle profusion de dimensions à découvrir. sur le plan technique, sur le plan humain, que je dois avouer que je travaille. Je ne veux pas dire plus qu'avant, parce qu'avant, je travaillais beaucoup aussi, mais je dirais que ça reste très intense.
- Speaker #0
C'est quoi ?
- Speaker #1
C'est tous les jours ? Oui, tous les jours. Et la difficulté, c'est de ne pas y penser le week-end. Donc, je dirais que...
- Speaker #0
Tout compte, hein, vite, pour faire un podcast et parler que de ça.
- Speaker #1
Exactement. Dans un cadre d'une grande société comme Swisscom, on arrive plus facilement à prendre du recul, même en cas de problématique momentanée, parce qu'on se dit que ça ne va pas vraiment changer le cours des choses. Même si Swisscom Anchor était une forme d'entrepreneuriat à l'intérieur d'un groupe, il y avait quand même une base solide au fil du temps qui permettait de pouvoir déconnecter assez facilement. Mais là, lorsque l'on a la responsabilité d'une société qui... Tous les trois mois, elle peut prendre une mauvaise décision et elle peut aller dans le mur. Donc, même si la société se développe bien, ça reste une scale-up. qui demande beaucoup d'attention et beaucoup d'anticipation. On double ou triple tous les ans actuellement. Ça demande aussi de voir toujours à deux ans pour des actions immédiates.
- Speaker #0
Ça prend beaucoup d'énergie, donc le challenge c'est de réussir à se déconnecter. C'est pour ça que le trail, le triathlon, la nature de manière générale, est très bénéfique pour pouvoir avoir cette distance-là. Mais je dirais que j'ai dû travailler plus que ce que je recommanderais de travailler dans l'idéal, donc je pense que c'était plutôt lié à une phase de démarrage. Mon idéal c'est d'avoir cet équilibre dont je t'ai parlé. et le but c'est pas de travailler trop non plus, c'est justement de travailler juste ce qu'il faut.
- Speaker #1
Oui,
- Speaker #0
bon. Mais bon, j'arrive à préserver mes week-ends en règle générale, et c'est déjà beaucoup.
- Speaker #1
Bon, c'est sûr qu'avec six enfants aussi... En tout cas, je te remercie pour tout ce que tu partages parce que je n'ai pas encore d'enfant. On aimerait en avoir. Et puis, c'est toujours inspirant quand je rencontre des personnes qui justement ont aussi des enfants. Parce que parfois, je parle avec des gens qui n'ont pas d'enfant. Et je me dis que tout ce que cette personne fait, c'est très beau et c'est inspirant. Si tu veux, pour pouvoir s'identifier plus à une personne, il faut que cette personne ait plus de traits communs avec soi. Et donc là, quand je t'entends six enfants, je dis bon, j'ai une belle marge au corps.
- Speaker #0
Disons qu'il faut voir ça de manière intégrale. Pour moi, les enfants sont une source de motivation. comme aussi la motivation pour faire de la Suisse une nation prospère et en paix, démocratique dans le futur. Donc c'est ça qui me motive à travailler au quotidien. Ce n'est pas l'argent, il faut qu'on réussisse évidemment, mais pourquoi réussir ? Au final, c'est avant tout pour aider à résoudre une problématique environnementale. Ça, c'est extrêmement motivant. Et surtout quand on est des enfants, on se dit c'est pour eux que je fais ça. Ce n'est même pas pour moi parce qu'à court terme, il n'y a peut-être pas de... Péril en a la demeure, mais sur le moyen et long terme, je pense sincèrement qu'on peut décarboner pratiquement toutes les industries. C'est une mutation sur 10 à 50 ans qui peut être extrêmement bénéfique pour la Suisse, parce qu'on a tout pour réussir cette mutation et en bénéficier nous-mêmes en étant les fournisseurs de cette technologie. C'est toujours un mélange hardware et software et intelligence artificielle, et même de la biotech. Donc, c'est complexe, mais justement, c'est là que les Suisses ont prouvé qu'ils étaient capables d'être très pertinents. Donc, il faut faire ça pour ses enfants ou pour les gens qu'on aime. Il faut faire ça pour les autres, en fait. Et ça, c'est la meilleure source de motivation pour soi-même se dépasser et peut-être faire quelques heures de travail en plus. De temps en temps, je dois avouer, mais c'est pour la bonne cause. Donc, je l'ai fait avec plaisir.
- Speaker #1
C'est vrai que ça, c'est un trait que j'ai beaucoup... entendu parler, donc un trait de caractère que j'ai beaucoup entendu, tu l'as cité, là tu le recite, c'est une personne pour pouvoir avancer le plus longtemps possible aussi, le plus loin possible, évidemment il faut être bien entouré, mais c'est justement ne pas penser argent, typiquement là si on parle d'entreprise, souvent les deux sont liés. Mais c'est vraiment avoir cette grande image, cette motivation dont tu parles, que ce soit pour changer le monde, pour un avenir meilleur, pour ceux qu'on aime. Et c'est cette passion, cette motivation intrinsèque qu'on a, qui va faire qu'on va, comme tu dis, finalement, tu bosses, sans regarder combien d'heures tu bosses. Alors oui, il faut trouver un espèce de... une espèce de balance parce qu'on a de la famille, on a des gens autour de soi aussi qui nous aiment, qu'on aime.
- Speaker #0
Oui, alors c'est l'ikigai que tu connais bien. L'ikigai, oui, exactement. Voilà, essayer de trouver quelque chose qu'on aime, dans lequel on peut être compétent et qui a du sens et aussi qui peut être économiquement viable.
- Speaker #1
Tu l'as fait ton ikigai ?
- Speaker #0
Oui, pour moi, si tout se passe bien, c'est vraiment là que je peux trouver mon ikigai. C'est au sens de ma balance, une façon de faire tout en même temps. Mais pour la plupart des gens, et pour moi dans la plupart... La grande partie de ma carrière, je n'ai pas eu le luxe de pouvoir toujours tout combiner. Il y a parfois des métiers qui sont purement alimentaires, mais tant qu'ils ne sont pas en contradiction avec ses propres valeurs, ils sont juste alimentaires, on contribue juste comme un pion au fonctionnement de la société. Ça c'est tout à fait honorable, et parce que c'est important de le dire dans le sens que la plupart des gens sont dans cette situation-là. Mais il y a toujours la possibilité dans son temps libre de compenser. pour que dans sa vie on ait fait quelque chose d'utile et pas simplement gagner et consommer de l'argent. Ce n'est pas ça le but. Donc soit en étant un employé avec peu de marge de manœuvre, mais des activités secondaires pendant le temps libre très riches, ou soit en étant dans son entreprise très impliqué avec un sens de la créativité et d'impact à fort. Alors dans les deux cas de figure, on peut avoir au final... un équilibre et c'est ce qu'on dit l'ikagai donc ce concept japonais qui est mon sens très pertinent.
- Speaker #1
Complètement alors ce que je disais c'était juste pour dire parce que je t'avais posé la question quel trait de caractère est ce que vous voyez quand vous étiez enfin quand tu étais donc vous l'équipe Swisscom Ventures un trait de caractère des CEO et moi juste ce que je disais c'est qu'effectivement C'est vraiment ce qu'on voit. Tu citais Elon Musk avant, tu as cité Bill Gates. Je ne les connais pas, mais je suis persuadé que ces personnes-là ne l'ont pas fait pour l'argent. C'est au-delà, c'est une vision, c'est une mission, c'est un élément intrinsèque qui est beaucoup plus grand qu'eux. C'était juste ça. Après, je suis complètement d'accord avec toi. D'ailleurs, je n'en vis pas. J'aime ma vie, je suis épanoui, je suis très content. où je suis, mais parfois, c'est vrai que j'ai certains amis qui bossent dans des bonnes entreprises, qui ont fait des belles études, qui sont bien payés, qui font le 9 to 5, comme le disent les gens des US. De 8h à 17h, quand ils sont à la maison, ils n'ont plus d'email, ils n'ont plus de téléphone, ils font leur sport, ils ont une vie très équilibrée et ils sont heureux. Et tant mieux, il n'y a pas de bon, de mauvais là-dedans. C'est un peu pour rejoindre ce que tu dis et je suis complètement d'accord avec ça. Par rapport au B Corp, c'est vrai qu'on ne l'a pas mentionné. Généralement, j'aime bien mentionner quand une entreprise est B Corp. J'avais fait un épisode avec Jonathan Normand de B Lab. Je le mettrai dans les notes pour celles et ceux qui veulent en découvrir plus par rapport à ce label-là. Et je voulais te poser une question que tu as posée quand tu faisais des podcasts, c'est Dominique. Qui a été influent dans ta vie ?
- Speaker #0
Belle question.
- Speaker #1
Tu te lances des fleurs à toi-même parce que c'est toi qui l'as posée.
- Speaker #0
Ah non, non. Non, c'est-à-dire que plusieurs personnes l'ont été à différents moments. J'ai eu beaucoup d'inspiration de type d'émotions créatives. je dirais, par les grands créateurs de ce monde et aussi les grands artistes. Au niveau musical, c'est très aspirant, ça va du sens, mais des gens, et c'est un peu un sens, je dirais une tarte à la crème de dire, des gens comme Steve Jobs m'ont beaucoup inspiré parce que j'ai eu envie de retrouver Ce moment unique de la création d'un produit, d'un projet, c'est ce qui m'a poussé vers l'entrepreneuriat, c'est le côté créatif. J'ai créé, avant de rejoindre Swiss Coventures à Londres, j'ai créé un incubateur technologique qui s'appelait Kickstart Ventures, qui a créé une douzaine de sociétés co-créées, disons, dans différents domaines technologiques. Ça a permis d'assouvir cette passion pour la création multiple. Je suis un peu un homme de portefeuille finalement, et c'est une forme de curiosité. Donc je dirais que tous ces créateurs, à la fois scientifiques, culturels, artistiques, ou entrepreneurial, en entrepreneuriat, m'ont fasciné. J'aime bien lire les biographies, et j'aime bien retrouver ces moments clés, et souvent, je fais deux ou trois petits calculs, c'est avant 27 ans, la plupart des intuitions arrivent avant 30 ans, et la plupart des très grands entrepreneurs... avait déjà tout créé à 27 ans. Et d'ailleurs, malheureusement, beaucoup se sont suicidés aussi à cet âge-là. Donc il y a vraiment... C'est ma fascination pour la puissance de... de l'intuition créatrice. C'est ça, je pense, qui était un des leitmotivs de ma vie et qui m'a passionné, que j'essaye à petite dose, en toute humilité parce que je ne peux pas me comparer à ces gens-là, mais disons que j'essaie de retrouver ça au quotidien. Et dans une start-up comme Micorobotics, c'est régulier, des moments où on se dit waouh, si ça marche ça ! Par exemple, on découvre actuellement que lorsqu'on réduit la... L'utilisation de produits phytosanitaires sur des oignons, des légumes, on augmente les rendements parce qu'ils ont moins de produits chimiques, donc ils produisent 10-20% plus. Ça c'est extraordinaire. Ça voudrait dire qu'on pourrait, si c'était vrai à l'échelle de toute la planète, on pourrait produire plus avec moins de produits. Ça c'est extraordinaire. Et si on parle de plusieurs pourcents, sur un milliard d'hectares qui sont cultivés actuellement dans le monde, ça veut dire qu'on pourrait produire... 10 millions d'hectares en plus, par exemple, avec 10% d'augmentation. Là, je fais un calcul théorique. Mais quand on se rend compte de ça, on se dit, waouh, les conséquences de ça sur même la vision du monde, augmentation de la population, augmentation des besoins, diminution des surfaces cultivables, ça semble être une trajectoire sinistre. Mais en fait, il y a des réponses technologiques, des découvertes que l'on a au fil du temps qui permettent de changer la donne, changer les paramètres. Et ces derniers mois, j'ai eu plusieurs fois ce genre d'émotion, je dirais. Évidemment, tout est à prouver. On commence petit, il y a beaucoup de choses qui ne sont pas aussi impressionnantes que ça. Et puis, ça prendra beaucoup de temps avant de le mettre en œuvre à l'échelle de la planète. Mais au final, chacun doit se dire dans sa vie, il y a des petites choses qu'on peut découvrir qui peuvent changer beaucoup si on sait les identifier, avoir le regard vers la curiosité intellectuelle. pour se polariser sur les choses qui peuvent améliorer le sens de l'histoire. Ça, c'est quelque chose de très démocratique. Tout le monde peut avoir accès à ça, même au quotidien, sans être chercheur.
- Speaker #1
Tu as déjà cité quelques livres, mais est-ce qu'il y aurait d'autres livres que tu recommanderais ou des sources, peu importe, documentaires ou autres ?
- Speaker #0
J'ai bien les... Non, pas un, mais deux. Typiquement, dans les livres que j'offrais, c'était souvent thèse et antithèse parce qu'il n'y a pas une vérité. Donc, une thèse, c'était Bad Blood. C'était en gros l'histoire de Terranos, la startup à 10 milliards qui était en fait un scam, quelque chose qui s'est avéré être une fraude aux États-Unis, peut-être la plus grande fraude de l'industrie de la Medtech. Et ça permettait de voir comment tout un système pouvait être induit en erreur, comment les gens pouvaient être corrompus, même dans le venture capital, comment les avocats pouvaient être vraiment méchants. Et ça, c'est important de comprendre ça, parce que c'est aussi une vision du monde. Il faut avoir un regard assez cynique et sceptique sur beaucoup de choses, à une certaine distance. C'est pour ça que j'ai offert ce livre. Mais j'ai offert le même livre six mois plus tard ou un an plus tard. Un autre livre, pardon, qui était, qui s'appelait, je ne sais pas revenir tout de suite, qui était d'un médecin suédois qui montrait toutes les choses qui étaient améliorées dans le monde depuis 50 ans sur une base totalement factfulness, conseillée. Donc factfulness montre que le monde va mieux si on regarde les critères environnementaux. médicaux, sociaux, et cette personne-là s'est focalisée sur la pauvreté dans le monde. Donc ce n'est pas quelqu'un qui est théorique, mais c'est quelqu'un qui a vraiment travaillé sur le sujet et qui a beaucoup conseillé les grandes fondations comme Bill Gates Foundation et d'autres pour améliorer le monde, et donc sur des bases purement quantitatives. Et là, ça donnait un regard très optimiste sur le monde. Et pour moi, le monde, il est fait des deux. Donc c'est un mélange d'optimisme et de scepticisme. qu'il faut avoir pour bien comprendre le monde et de pouvoir rester idéaliste sans être naïf.
- Speaker #1
C'est vrai que le temps file, donc je ne crois pas que je vais te faire entrer dans ce débat. Mais tu sais, juste une petite anecdote, il y a 3 ou 4 semaines, on a enchaîné avec la startup dans laquelle je suis, Solar Split. Quelques événements en Valais, dans le canton de Vaud au Diableret et à Sion en Valais où on était finaliste et on a gagné un prix. Bravo. Merci, je ne te disais pas pour ça. Et en fait, tout était très optimiste. On était entouré d'autres startups qui veulent, comme vous, changer le monde, qui veulent accélérer la transition énergétique. Donc tout était très positif. Et vraiment, j'étais dans un environnement poussé par cet optimisme-là. Et quelques jours après, j'étais à un événement. Je ne me souviens plus du nom de cette femme, une française qui côtoie les hautes politiques, qui est dans plusieurs associations. Et elle, en fait, c'était pessimiste, mais pas pessimiste dans le sens du... pas dans la définition, mais vraiment, elle a donné énormément de faits à propos du monde aujourd'hui par rapport aux catastrophes. climatique qui se passe depuis les dernières années, qui s'enchaîne et qui s'aggrave par rapport au niveau des rivières en Europe, et même en Chine, je n'ai plus le nom de cette rivière en Chine, mais vraiment on a toutes les industries qui sont autour de ce fleuve, de cette rivière, et donc ça a bloqué les exportations pendant quelques semaines, ce qui a fait que ça a bloqué également la fabrication de certains produits ici en Europe. Mais donc tout était très pessimiste. En disant aussi qu'en 2050 ou en 2100, aux États-Unis, on fait un espèce de carré. Tout ce qui est côte ouest, côte est, on ne pourra plus y vivre. Les océans auront couvert cette partie-là. Je crois qu'au milieu des États-Unis, ce serait un désert. On n'aura plus que... une certaine partie qui sera vivable. Et c'était des éléments, et elle enchaînait, elle enchaînait. Et donc là, tu vois, moi, quand je parle avec des gens comme toi qui croient et qui ont une mission, de nouveau, je suis persuadé qu'on va réussir à changer le monde et qu'on va avancer et qu'on va faire avec les technologies, avec... avec les différents éléments qu'il y aura dans le monde. Et là, quand tu parles de factfulness, ça me fait penser, juste en termes de stats, je crois que c'est aux Etats-Unis, je ne crois pas que c'est dans le monde, mais en 1800, aux Etats-Unis, 80% de la population était dans le seuil de pauvreté. Aujourd'hui, c'est moins de 10%. Donc effectivement, tu vois, ça rejoint ce côté un peu plus optimiste de l'histoire. Et voilà, je voulais ajouter. toute cette partie-là, mais tu voulais rebondir, je crois ?
- Speaker #0
Non, non, non. Tout est dans le mot. Défaitisme, le mot montre bien que ça ne peut pas être motivant. Il faut un certain idéalisme. Dans le mot idéal, il y a la notion qu'on est conscient du fait qu'il y a une partie à risque qui n'est pas prouvable. Il n'y a pas de garantie de succès, mais autant tenter l'expérience. Et d'ailleurs, c'est pour ça que je voudrais... pas utiliser le mot capital risque, mais plutôt venture capital, parce que le mot venture, c'est en anglais, ça veut dire tenter quelque chose avec un esprit sportif, un peu dans la tradition de Schumpeter, adventure, une aventure. Et c'est ça l'aventure que je propose finalement à tout le monde. On doit avoir cette aventure une fois dans sa vie, même en retraite, on peut toujours tenter quelque chose si on n'a pas eu l'occasion d'être entrepreneur avant. Donc, tenter quelque chose qui semble idéaliste, mais faire une partie du chemin. Même si on n'aboutit pas, au moins, on n'aura pas de regrets et il faut le prendre de manière positive. Donc un problème automatiquement génère une opportunité de résoudre ce problème, donc une solution. Et finalement, c'est peut-être pour ça qu'on est les êtres humains. Et puis d'essayer de faire quelque chose dans ce domaine, c'est passionnant.
- Speaker #1
D'ailleurs, il y a pas mal d'exemples d'entrepreneurs, d'entrepreneuses qui ont créé des très belles entreprises. à la retraite je peux je crois que c'est je crois lui il était je vois il a plus de 60 même plus de 70 ans je crois juste pour rebondir sur ce que tu dis et puis dominique j'ai instauré depuis un petit moment un concept ou un ancien une ancienne invité pose une question à un futur invité donc il elle ne sait pas qui va poser de questions à en l'occurrence à toi La question est la suivante, quel est l'accomplissement dans ta vie dont tu es le plus fier et pourquoi ?
- Speaker #0
C'est une réponse toujours difficile, mais la plus spontanée, peut-être la plus naturelle, ce sont mes enfants, parce que c'est le prolongement de moi-même et de ma femme, même si en soi, ce n'est pas une fabrication personnelle, c'est juste une contribution, je dirais, et une aventure que l'on fait en famille. Donc rien n'est terminé, rien n'est finalisé, rien n'est garanti, mais c'est un petit peu comme l'aventure entrepreneuriale. C'est aussi ça qui fait que l'humain se passionne. C'est d'être dans un quotidien qui n'est pas totalement bien planifié, qui a quelques complexités, mais les victoires quotidiennes sont liées aux défis qu'on se pose aussi. Donc je dirais que ma famille reste pour moi la chose qui me semble centrale. Au final, plus on vieillit d'ailleurs, plus le pourcentage de son temps, on le passe. dans des activités liées à sa famille, à ce qu'on laisse derrière soi finalement, et de moins en moins liées à son métier. Donc plus j'avance dans ma vie, plus elle est déterminée par ce que j'ai créé, entre guillemets, à l'occurrence ce n'est pas forcément une entreprise, c'est plutôt ma famille. Donc c'est important pour moi de réussir ce pari-là, et je ne le saurais que le jour de ma mort si j'avais vraiment réussi, mais en tout cas... C'était la réponse spontanée à ta question.
- Speaker #1
Et comment est-ce que tu te développes ? Comment est-ce que tu apprends ou continues à apprendre ?
- Speaker #0
Je n'ai pas de développement personnel particulier en termes de méthode. Je dirais que c'est au contact des défis, learning by doing, et puis des défis que je me lance dans des domaines que je ne maîtrise pas a priori. Donc il faut d'abord survivre, apprendre, travailler. comprendre, écouter pour survivre et ensuite après une fois que ça devient monotone, je vais passer à autre chose.
- Speaker #1
Dominique, on arrive au bout de notre conversation. Ma dernière question que je pose à tous mes invités, qu'est-ce que le succès pour toi ?
- Speaker #0
Le succès pour moi c'est, alors il y a un titre personnel et puis objectif. Objectif c'est ce qu'on laisse derrière soi, en tant qu'entreprise sociale ou financière, il y a des chiffres tangibles, avec aussi des effets secondaires, donc les externalités dont on parle. Donc ce n'est pas simplement combien d'argent on a gagné dans une société, mais c'est qu'est-ce que cette société a légué au monde, qu'est-ce qu'elle laisse à la planète. Et je parle de manière générale. aussi bien en termes social qu'environnemental. Ça, c'est un objectif. Et puis, à titre personnel, c'est une sensation de bien-être liée à quelque chose que l'on a fait, qui radie son... Le fait d'y penser donne une bonne impression. Ça, c'est purement intuitif. Et donc, en fait, c'est pour reprendre les mots de ton interlocuteur précédent, Christian Petit, sur la cohérence. entre ce qu'on pense, ce qu'on fait et ce qu'on dit, c'est une grande cohérence. Et c'est ce qui donne cette paix de l'esprit, finalement. Si on arrive à ça, il y a ce sentiment de bien-être qui se dégage. Et voilà, pour moi, la réussite à titre intime et personnel.
- Speaker #1
Merci beaucoup, Dominique. Est-ce que tu as des éléments à ajouter avant qu'on termine ?
- Speaker #0
Non, merci. Désolé si j'ai été trop long. En tout cas, c'était très plaisant de parler avec toi et je te remercie.
- Speaker #1
Merci à toi. Pour moi, ce n'est jamais trop long. Ce n'est même jamais assez long. Merci beaucoup Dominique.
- Speaker #0
Merci. À bientôt. À bientôt. Au revoir.
- Speaker #1
Ciao, ciao. Merci d'avoir écouté l'épisode entier. Et pour m'aider à continuer, abonne-toi au podcast sur ta plateforme préférée et sur YouTube. N'oublie pas de donner ton avis en le notant avec la meilleure note possible, c'est-à-dire 5 étoiles, et de le partager autour de toi. C'est ce qui m'aide à continuer. Rendez-vous le 29 octobre pour ma cinquième collab avec IFJ. Ciao ciao !