Trump et Harris face aux crises internationales - avec Jean-Marie Guéhenno cover
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C'est ça l'Amérique

Trump et Harris face aux crises internationales - avec Jean-Marie Guéhenno

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26min |16/10/2024|

670

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26min |16/10/2024|

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Description

C’est ça l’Amérique, saison 3


Alors que Donald Trump mise sur l’image d’un monde en désordre sous l’administration Biden-Harris, dans quelle mesure les conflits mondiaux comme la guerre en Ukraine et au Proche-Orient influenceront-ils le résultat de l’élection américaine ?


Épisode 6/8 :


D’ordinaire, les électeurs Américains ne se soucient guère des questions de politique étrangère quand ils se rendent aux urnes. En sera-t-il autrement pour l’élection de 2024 ? Entre la guerre en Ukraine, la peur de la menace chinoise, et le conflit au Proche-Orient qui empoisonne la présidence Biden, il est impossible d’ignorer le contexte international explosif. Donald Trump en joue en arguant que les États-Unis sont au bord de "la troisième guerre mondiale". Kamala Harris pourrait également être lâchée par la communauté arabo-américaine du Michigan, un électorat assez important pour lui faire perdre ce "swing state" décisif dans la course à la Maison-Blanche.


Comment les crises qui ont marqué la présidence Biden vont-elles peser sur le scrutin du 5 novembre ? Pour ce sixième épisode de "C’est ça l’Amérique", Alexis Buisson, correspondant de "La Croix" à New York, a rencontré Jean-Marie Guéhenno, professeur à l’université Columbia et ancien secrétaire général adjoint au Département des opérations de maintien de la paix aux Nations Unies.


CRÉDITS :


Écriture et réalisation : Alexis Buisson. Rédaction en chef : Jean-Christophe Ploquin et Paul De Coustin. Production : Célestine Albert-Steward. Mixage : Flavien Edenne. Musique : Emmanuel Viau. Illustration : Olivier Balez.


► Vous avez une question ou une remarque ? Écrivez-nous à cette adresse : podcast.lacroix@groupebayard.com


"C'est ça l'Amérique" est un podcast original de LA CROIX - Octobre 2024.


En partenariat avec le programme Alliance – Columbia et ses partenaires (Sciences-Po, Polytechnique, La Sorbonne), et French Morning, le premier web magazine des Français d’Amérique.


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Kamala !

  • Speaker #1

    It will make the world stronger. Because I believe everyone has a right to safety, to dignity.

  • Speaker #2

    Bonjour, je suis Alexis Buisson,

  • Speaker #3

    le correspondant de La Croix à New York.

  • Speaker #2

    Bienvenue dans C'est ça l'Amérique, le podcast qui explore les enjeux des élections américaines de 2024.

  • Speaker #1

    I know where the United States belongs. Kamala !

  • Speaker #2

    Chaque semaine et jusqu'au scrutin, Découvrez les éclairages d'experts francophones établis aux États-Unis.

  • Speaker #0

    C'est ça l'Amérique et ça commence maintenant.

  • Speaker #2

    On commence cet épisode de ces salles américaines dans la cour d'un hôtel du Michigan. J'ai en face de moi un homme en colère. Il s'agit d'Assan Abdel Salam, un professeur à l'université du Minnesota. Comme beaucoup d'Arabes et musulmans américains, il cherche par tous les moyens à mettre un terme à ce qu'il appelle le génocide commis par Israël au Proche-Orient. Il est l'un des fondateurs du mouvement Abandon Harris. qui vise à couler la candidature de la vice-présidente. Il appelle en effet les électeurs arabes et musulmans, qui sont majoritairement démocrates, à voter pour un candidat tiers en novembre, en l'occurrence l'écologiste Jill Stein. Ce n'est pas un hasard s'il est aujourd'hui dans le Michigan, c'est l'un des swing states de l'élection, l'un des états décisifs de cette présidentielle. En 2020, Joe Biden l'avait remporté de 160 000 voix, mais les électeurs arabes représentent 300 000 personnes. S'ils se détournent tous de la démocrate, Cela pourrait rendre le chemin de Kamala Harris vers la Maison-Blanche plus compliqué, tout en faisant comprendre au parti républicain qu'il doit écouter la communauté arabe et le mouvement anti-guerre. Hassan Abdel Salah. Notre stratégie, comme vous le savez, est troisfold. Premièrement, nous voulons punir le président et la vice-présidente pour leur génocide. Deuxièmement, nous voulons être vus comme les responsables de leur défaite après les avoir mis au pouvoir en 2020. Et enfin... Nous souhaitons utiliser notre pouvoir pour nous assurer qu'il n'y ait plus jamais de génocide. Nous voulons que les élections soient le plus serrées possible dans les États bascules, les swing states, pour montrer à tout le monde que nous avons fait la différence et que le Parti démocrate a fait une grosse erreur en nous ignorant encore et encore. Ils n'auront pas d'autre choix que d'adopter un programme pro-palestinien et anti-génocide. Dans ce sixième épisode de C'est ça l'Amérique, nous nous intéressons à la façon dont les conflits à l'étranger peuvent peser sur le scrutin de novembre. J'ai tendu mon micro à Jean-Marie Guéhenno, professeure à l'Université Columbia et ancien secrétaire général adjoint au département des opérations de maintien de la paix aux Nations Unies.

  • Speaker #3

    Bonjour Jean-Marie Guéhenno.

  • Speaker #0

    Bonjour.

  • Speaker #3

    Merci beaucoup de nous accueillir ici pour parler politique étrangère des États-Unis. Alors, il y a un peu un paradoxe finalement quand on s'intéresse aux élections américaines. Les États-Unis sont bien sûr la première puissance économique, diplomatique, militaire. mondiale, mais les Américains eux-mêmes s'intéressent très peu à la politique étrangère. Ce n'est pas vraiment un sujet de préoccupation pour eux. Je me demandais si vous pensiez que cette année, ça serait peut-être différent avec les crises que l'on voit au Proche-Orient ou en Ukraine, ou la menace chinoise qui s'accroît.

  • Speaker #0

    Je crois que l'élection de cette année, elle se jouera quand même d'abord sur la politique intérieure, sur l'état de l'économie. Cela dit, les crises internationales qu'on voit en ce moment peuvent avoir un impact Non pas que les Américains aient nécessairement une préférence sur une ligne politique pour un candidat ou pour un autre, mais parce que ce qui se joue, je pense, dans une élection présidentielle américaine, c'est l'idée que les Américains se font de la capacité de leadership d'un président. Et le risque là, c'est que Trump apparaisse comme quelqu'un de fort, qui ne se laisse pas bousculer. Kamala Harris a montré dans le débat avec Trump qu'elle savait tout à fait... tenir, mais malgré tout, elle n'a pas cette image, d'une certaine manière, heureusement pour elle, de brutalité de Trump. Je pense que si la situation internationale se détériore encore plus qu'elle n'est déjà détériorée aujourd'hui, s'il y a une escalade massive, par exemple, au Proche-Orient, qui devait entraîner les États-Unis dans une nouvelle guerre au Proche-Orient, je crois que ça, ça jouerait très fortement en faveur de Trump.

  • Speaker #3

    Même si elle est vice-présidente, elle reste dans l'ombre. de Joe Biden, c'est un peu la nature du poste. Du coup, vous pensez que c'est plus difficile, d'une certaine manière, pour elle, de montrer ses capacités de leadership dont vous parlez ?

  • Speaker #0

    Je crois que oui, tout vice-président, évidemment, est un peu dans l'ombre et ne peut pas se démarquer trop de la politique de Biden. Donc là, elle est un peu condamnée à défendre l'héritage. Mais je ne crois pas que ce soit le plus grand problème, parce que l'héritage de Biden, c'est un débat pour experts. plus qu'un débat pour le grand public américain. Ce qui compte, c'est l'image qu'on projette d'un leader, ou au contraire de quelqu'un qui peut se faire bousculer par les leaders étrangers.

  • Speaker #3

    Quand on voit par exemple qu'il y a des électeurs arabes dans le Michigan, qui est un état très important pour cette élection présidentielle, un des swing states de cette élection présidentielle, et qui disent qu'ils vont essayer de faire perdre Kamala Harris, ne pas voter pour elle, alors que ce sont des électeurs qui sont très démocrates, selon vous c'est un souci pour elle ? C'est un danger ?

  • Speaker #0

    Je pense que ça c'est un vrai souci, parce que évidemment avec le système électoral américain, l'élection se joue sur une poignée d'états, et le Michigan se trouve être l'un d'eux. C'est le seul État des États-Unis où il y a une forte communauté d'origine arabe. Et tous les reportages qu'on lit sur le Michigan montrent que le soutien très fort des États-Unis à Israël va nuire à Kamala Harris. Mais elle est obligée de se tenir à la ligne officielle, à la fois parce qu'elle est la vice-présidente et parce qu'à l'échelle des États-Unis, il y a quand même beaucoup plus de soutien pour Israël. que pour les Palestiniens.

  • Speaker #3

    Elle donne l'impression, en tout cas elle a donné l'impression dans le passé, d'être plus sensible à la cause palestinienne. Et quand elle est devenue candidate, il y a beaucoup de militants pro-palestiniens qui disaient tiens, elle est plus sensible à notre cause que Joe Biden Est-ce qu'aujourd'hui vous pensez que c'est le cas ?

  • Speaker #0

    Je crois qu'elle est plus sensible, mais elle ne peut pas trop le montrer parce qu'elle perdrait sur l'aile pro-israélienne de l'électorat et elle ne peut pas prendre ce risque. Kamala, tu es en train de se tuer,

  • Speaker #1

    sort de là ! Et comment il utiliserait les puissances immenses de la présidence des États-Unis ?

  • Speaker #2

    Avant de poursuivre la conversation, arrêtons-nous sur l'une des revendications des défenseurs de la cause palestinienne. Ces derniers réclament la fin des livraisons d'armes américaines à Israël. Ils mettent notamment en avant l'existence d'une loi américaine appelée LIHI, du nom de son auteur, le sénateur démocrate Patrick LIHI. Le texte prohibe la livraison d'armes à des unités militaires qui commettent des entorses aux droits humanitaires. Or, d'après le sénateur et d'autres élus et militants, les contrôles prévus dans la loi ne s'appliquent pas. à Israël à l'heure actuelle. Stopper les ventes d'armes à l'État hébreu est cependant plus facile à dire qu'à faire quand on sait qu'une grande partie des armes envoyées découlent d'un protocole d'accord contraignant sur le plan légal qui oblige les États-Unis à donner chaque année pendant 10 ans des milliards de dollars à Israël en assistance militaire. Le dernier accord en date a été signé en 2016 et promet quelques 38 milliards de dollars d'aides sur la décennie. L'écrasante majorité de cette somme est transférée régulièrement à Israël, qui à son tour s'en sert pour acheter les armes et les équipements dont elle a besoin aux Etats-Unis. La position officielle de Washington demeure que son allié a le droit de se défendre après l'attaque terroriste du Hamas le 7 octobre 2023, mais doit limiter autant que possible les morts et les blessures de civils. Jean-Marie Guéhenno, est-il naïf de penser que la politique de livraison d'armes à Israël changerait si Kamala Harris est élue présidente ?

  • Speaker #0

    Non, je pense que la politique évoluerait. Tous les présidents américains, enfin pas toujours, mais depuis les années 60, ont été très pro-israéliens. Ils ne l'ont pas toujours été parce qu'au moment, par exemple, de la crise de Suez, c'était la France qui était aux côtés d'Israël. Les États-Unis ont dit à la France et la Grande-Bretagne Arrêtez, vous en faites trop pas dire que c'est une constante américaine d'être aux côtés d'israël mais depuis plusieurs décennies c'est le cas et by donne est sans doute le plus pro israélien des présidents américains par son histoire par ses relations personnelles avec un certain nombre de responsables israéliens donc je crois que par rapport à ce qu'on voit de la politique de by donne j'ai lu que cette année les états unis ont livré en dollars constants plus d'armement qui n'en ont jamais livré à Israël. Donc le soutien à Israël est considérable aux États-Unis, malgré en même temps une demande à Israël de se modérer, mais les actes contredisent un peu ces demandes, lesquelles les États-Unis ne font pas de pression vraiment concrète sur Israël. Je pense que si Kamala Harris est élue, Il y aura probablement une évolution, mais pas une révolution, parce que pour la majorité des Américains, Israël reste quand même un partenaire privilégié au Proche-Orient.

  • Speaker #3

    Qu'est-ce qu'une présidente Kamala Harris ferait différemment finalement de Joe Biden ? Vous parliez d'évolution, pas de révolution. Est-ce que c'est le ton qui changerait peut-être vis-à-vis de Netanyahou ou d'autres aspects des rapports avec Israël ?

  • Speaker #0

    Je pense qu'il y aurait peut-être de nouveau un effort. pour relancer un processus diplomatique, pour arriver à deux états, pour arriver à une solution qui donne aux Palestiniens une vraie souveraineté politique. Je crois que cet effort avait été en fait jusqu'à l'attaque terroriste du 7 octobre. de l'année dernière. Cet effort avait été abandonné. L'administration américaine se disait qu'il y avait plus de coûts à prendre que de prix Nobel à gagner et donc il n'y avait pas d'efforts sérieux. Je crois qu'il pourrait y avoir un certain effort de l'administration. américaine dans cette direction. Mais en même temps, il ne faut pas se faire trop d'illusions. Tout ça dépendra d'abord de l'évolution en Israël, avec le gouvernement israélien tel qu'il est, et au-delà de ce gouvernement, avec le déplacement du centre de gravité politique d'Israël vers la droite, voire l'extrême droite, les partisans d'une solution à deux États sont très minoritaires aujourd'hui. Et la situation sur le terrain, rend cette solution, elle a toujours été difficile, mais elle est encore plus difficile aujourd'hui qu'elle ne l'était il y a 20 ans ou 15 ans, quand les dernières négociations sérieuses se sont engagées.

  • Speaker #3

    On a l'impression que Joe Biden renvoie une image un peu d'impuissance face à Netanyahou, face à cette situation qui escalade au Proche-Orient. Est-ce que c'est juste, selon vous, de dire qu'il a une part de responsabilité dans l'escalade qu'on en voit aujourd'hui ?

  • Speaker #0

    L'impuissance américaine, effectivement, elle est éclatante. Je crois que ce n'est pas une bonne nouvelle, parce que ça permet à toutes sortes d'acteurs de jouer un jeu qui est souvent plus le jeu de la puissance et de la guerre que le jeu de la paix. Est-ce qu'une Amérique... plus forte, plus affirmative, aurait pu vraiment changer le cours des choses. Je pense que quand même le cœur du sujet, il est dans l'évolution politique d'Israël, qui à chaque vague d'attentats terroristes, à glisser un peu plus vers la droite. Et ça, toutes les études d'opinion sur Israël le montrent. Le terrorisme ne convainc pas les Israéliens qu'il faut aller vers une solution politique, il les convainc qu'il faut dominer et intimider. dire c'est un peu la réaction de tous les pays quand il ya eu le 11 septembre ici aux états unis bas les états unis se sont durcies internationalement sur le terrorisme quand il ya eu des attentats terroristes en france même chose le terrorisme pousse vers des régimes de disons où la force l'emportent sur la négociation ce qu'un président trump

  • Speaker #3

    Changerait quelque chose finalement à ce dossier qui, comme vous le dites, dépend avant tout de la situation intérieure à Israël ?

  • Speaker #0

    Moi, je pense que non. Je pense que Trump, sa vision des choses, c'est une vision qui n'est pas très éloignée de celle des dirigeants israéliens actuels. Quand il a poussé aux accords d'Abraham, au fond, c'est l'idée que la sécurité d'Israël, on normalise les relations avec les États. Et puis les Palestiniens, on les passe un peu par... pertes et profits. Je crois que ça a été ça la réalité des accords d'Abraham parce que la plupart des États arabes, à vrai dire, seraient très contents si Israël pouvait complètement écraser le Hamas. Le Hamas, c'est au départ une branche des frères musulmans. Les frères musulmans, c'est ce que le régime égyptien déteste le plus aujourd'hui. C'est ce que les Émirats arabes unis détestent, l'Arabie saoudite également. Si cette solution était possible, si on pouvait complètement oublier les Palestiniens, ça satisferait beaucoup d'acteurs régionaux. Ça ne satisferait peut-être pas une partie significative des peuples de la région, mais ça satisferait leurs dirigeants. C'est ça la logique de Netanyahou. Je crois que ce serait la logique de Trump. Quel serait le résultat ultime ? Je pense que ce serait une recrudescence à terme. Du terrorisme, même si le Hezbollah, même si le Hamas s'était écrasé, on ne peut pas passer par pertes et profits un peuple qui a montré son endurance.

  • Speaker #3

    Quoi qu'il en soit, le locataire de la Maison-Blanche va changer en janvier après l'investiture. Ce sera soit Donald Trump, soit Kamala Harris. Je voudrais qu'on se projette peut-être un peu sur les quatre années qui viennent. Quelles sont selon vous les grandes menaces auxquelles les États-Unis devront faire face, auxquelles ce nouveau commandant en chef devra se préparer ?

  • Speaker #0

    Je dirais plus loin que menaces. Quels sont les grands changements dans l'équilibre du monde auxquels les États-Unis doivent se préparer ? Je crois que ce changement est déjà en cours. C'est le fait que les États-Unis restent de loin la première puissance militaire du monde. Leur budget militaire écrase tous ceux de leurs concurrents, de leurs adversaires. Et quand on ajoute au budget militaire des États-Unis le budget de leurs alliés, à ce moment-là, la domination est encore plus écrasante. Mais en même temps, politiquement, les États-Unis ne sont plus le modèle incontesté. On parlait du monde multipolaire déjà dans les années 80. Il n'était pas multipolaire, il était bipolaire. Ensuite, on a eu un monde unipolaire avec l'effondrement de l'Union soviétique. Aujourd'hui, on est vraiment en train de voir apparaître un monde multipolaire. Et donc, pour un président américain ou pour une présidente américaine, le grand défi, c'est un défi presque d'identité. Est-ce que les États-Unis peuvent se penser autrement que comme le numéro un ? et accepter que sur beaucoup de sujets, il faut négocier, il faut faire des compromis avec d'autres qui n'ont pas forcément la même vision des choses. Je dirais que c'est devenu un peu le code génétique des Européens, parce qu'on vit ensemble, on s'est tapé dessus pendant des siècles, et on comprend qu'aujourd'hui, on est obligé de s'entendre. Les États-Unis ont une autre histoire, et donc le mot que... tous les dirigeants américains, sans exception emploi, c'est leadership. Et donc, les autres sont derrière. Et demain, ça va être de plus en plus difficile. Et ça va être de plus en plus difficile. Sur le dossier qui préoccupe le plus les États-Unis, c'est celui de la Chine. L'ambiguïté de la position américaine sur la Chine, c'est qu'on ne sait pas si vraiment leur peur, c'est que demain, il y a une guerre avec la Chine, donc il faut s'y préparer. Ou si c'est simplement que la Chine devienne leur égale. Ce qu'elle est loin d'être aujourd'hui, malgré tout. Mais il y a cette inquiétude que la Chine, c'est aujourd'hui un modèle pour beaucoup de pays. Attoro a raison, mais c'est un modèle. Et donc ça, c'est une révolution psychologique. Alors pour faire face à la Chine, je crois que si c'est Kamala Harris, le pivot vers l'Asie, comme on dit aux États-Unis, sera un pivot nuancé. Parce qu'elle aura un certain nombre de ses conseillers, notamment Phil Gordon. qui est un spécialiste de l'Europe et qu'on dit proche de Kamala Harris, un certain nombre de ses conseillers lui diront Oui, la Chine, c'est peut-être le défi numéro un, mais aborder la Chine sans l'appui des Européens, ce n'est pas la politique la plus intelligente. Donc il faut mettre les Européens dans notre jeu. Et là, je vois de sérieuses difficultés possibles dans les relations entre les États-Unis et l'Europe. Parce que l'Europe dépend beaucoup aujourd'hui des États-Unis pour le soutien à l'Ukraine. L'Europe dépense plus que les États-Unis sur l'Ukraine, ça n'est pas assez dit. Mais militairement, malgré tout, les États-Unis sont de loin l'élément crucial du soutien à l'Ukraine. Et donc les États-Unis sont en position de force pour dire aux Européens, écoutez, on vous appuie sur l'Ukraine, mais il faut globaliser l'Alliance Atlantique. La question de la Chine, c'est une question pour vous autant que pour nous. Les Européens ont évolué là-dessus. Ils se rendent compte que les Chinois ont tendance à piller leur technologie, à faire une concurrence déloyale. On voit les réactions en Europe sur les véhicules électriques, etc. Mais malgré tout... Ils ne sont pas sur la ligne américaine aujourd'hui. Ils ont quand même envie de garder une relation beaucoup plus positive avec la Chine que les États-Unis.

  • Speaker #3

    Vous avez mentionné l'Ukraine, c'est bien sûr un sujet très important pour nous, Européens. Si Donald Trump repasse et qu'il est réélu en novembre, qu'est-ce qui se passe selon vous en Ukraine ?

  • Speaker #0

    Je crois que si Donald Trump est élu, ça c'est une très mauvaise nouvelle pour l'Ukraine. Je crois qu'il sera assez brutal. dans sa volonté de se dégager. Il est convaincu qu'il peut faire la paix en Ukraine, mais je crois que la manière dont il pense la faire, c'est sur le dos des Ukrainiens. Donc là, se posera une question un peu existentielle pour les Européens. C'est-à-dire qu'on voit bien, on se rapproche d'un moment de négociation avec la Russie, parce que l'Ukraine est épuisée aussi. Il n'a pas les mêmes ressources humaines que la Russie. Ces villes sont de plus en plus dévastées. Donc on se rapproche d'un moment de négociation. Mais est-ce que cette négociation sera une sorte de capitulation ? Ou est-ce qu'elle sauvegarde la possibilité d'un pays indépendant ? Je crois que sur la question de la ligne de cesser le feu, parce que je n'imagine pas un accord de paix, j'imagine un cesser le feu, il est bien possible qu'on finisse par arriver à une situation où l'Ukraine ne récupère pas non seulement les territoires qu'il a perdus en 2014, mais même une bonne partie de ceux qui ont été élu. que la Russie a gagné depuis. Si c'est le cas, mais que l'Ukraine a des très solides garanties de sécurité, à ce moment-là, d'une certaine manière, quelque chose est sauvé. Mais l'Ukraine voudra sans doute avoir la présence de troupes sur son territoire qui garantissent les engagements de sécurité qui auront été pris. Alors les Américains, à mon avis, n'auront aucune envie de cela, même les démocrates. Trump, c'est totalement exclu. Est-ce que les Européens seront prêts à prendre ce risque ? On a vu que quand le président Macron avait lancé une sorte de ballon d'essai là-dessus, il s'est plutôt fait taper sur les doigts. Alors est-ce que face au désastre d'un effondrement possible de l'Ukraine, les esprits changeraient ? Peut-être. Mais ça sera, je crois, un peu l'heure de vérité pour l'Europe si Trump est élu.

  • Speaker #3

    Vous sentez qu'il y a une pression grandissante de l'opinion publique américaine pour... Trouvez une solution à cette guerre ?

  • Speaker #0

    Il n'y a pas des morts américains dans cette guerre. L'argument des démocrates, c'est de dire, écoutez, en défendant l'Ukraine, on défend les États-Unis, on n'a pas un soldat sur le terrain, on n'a pas de morts. Finalement, c'est une manière très économique d'affaiblir la Russie. C'est un raisonnement qui a son poids. Cela dit, pour les Américains, et Trump insiste là-dessus, l'Europe est un continent riche. Et qu'il soit nécessaire que les États-Unis aillent faire la sécurité aux confins de l'Europe, à la place des Européens. Il y a beaucoup d'Américains qui se disent que ce n'est plus très raisonnable. Donc je crois qu'il y a une sorte de fatigue générale des États-Unis à l'égard des engagements extérieurs. Ils ont eu l'Irak. Ils ont eu l'Afghanistan, alors là il y avait des soldats américains, là qui sont morts, alors dans des proportions bien moindres que la guerre du Vietnam. Mais malgré tout, l'engagement qui a coûté de l'argent, cette idée que les États-Unis doivent régler tous les problèmes du monde, alors qu'ils ont de grands problèmes intérieurs, que les infrastructures américaines ont besoin de grands travaux, disons, il y a beaucoup d'Américains qui se disent, est-ce que ça vaut vraiment la peine ? En même temps, c'est là qu'il y a une certaine contradiction, je dirais, dans la psychologie américaine. L'idée du leadership reste très importante. Et le leadership, c'est aussi d'avoir une grande puissance militaire. Donc tous les candidats, et Kamala Harris y compris, disent Ah, mais on ne va pas couper les budgets militaires, on va rester très puissants Donc vous avez à la fois la fatigue de l'engagement international et la volonté que les États-Unis maintiennent le drapeau américain haut et fort.

  • Speaker #3

    Je voudrais revenir en guise de dernière question sur quelque chose de très important que vous avez dit à mon sens, c'est la capacité des États-Unis à finalement concevoir un monde multipolaire, et pas simplement un monde où ils sont les leaders. Est-ce qu'aujourd'hui vous voyez des raisons de croire qu'une bascule peut se faire justement dans cette vision américaine du monde ?

  • Speaker #0

    C'est très difficile. Alors évidemment Kamala Harris, elle a un profil intéressant de ce point de vue, d'origine à la fois indienne et jamaïcaine. Elle est multipolaire à sa façon. La plupart des présidents américains, leurs ancêtres, c'était des Européens. Il y a Obama qui compliquait un peu les choses avec le Kenya. Kamala Harris avec l'Inde, qui est justement un des nouveaux pôles de ce monde qui émerge, ou qui a émergé d'ailleurs déjà. C'est une nouveauté. En même temps, et de ce point de vue, le précédent d'Obama est intéressant. Obama, il ne s'est pas tellement intéressé à l'Afrique. Il s'est beaucoup moins intéressé à l'Afrique que Bush, parce qu'il ne voulait pas être classé comme le noir qui s'intéresse à l'Afrique. Il est très possible que Kamala Harris, si elle est élue, fasse le même raisonnement, qu'elle tienne bien à montrer qu'elle est d'abord une Américaine. Mais ça ne l'empêchera pas de comprendre peut-être un peu mieux le fait que le monde... Il est aujourd'hui beaucoup plus compliqué qu'il ne l'était et que les États-Unis doivent jouer là-dessus et doivent essayer de bâtir des alliances avec ces nouveaux acteurs. Je crois qu'aujourd'hui la question du Moyen-Orient est un grand obstacle à cela parce que le reste du monde a du mal à comprendre comment les États-Unis apportent un soutien aussi inconditionnel. à Israël. Et donc, pour se rapprocher du reste du monde, ce sera une raison supplémentaire pour Kamala Harris de montrer qu'elle veut faire quelque chose sur le Moyen-Orient. Ça lui donnerait plus de crédibilité, à mon avis, vis-à-vis de tous ces acteurs émergents.

  • Speaker #3

    Merci beaucoup Jean-Marie Guénon.

  • Speaker #0

    Vous en prie, avec plaisir.

  • Speaker #2

    À la différence de Donald Trump, qui a fait de America First l'Amérique d'abord, la ligne conductrice de sa politique étrangère, La philosophie de Kamala Harris reste mal définie. Avant de devenir vice-présidente, elle n'avait presque aucune expérience internationale. Elle l'a étoffée bien sûr aux côtés de Joe Biden ces quatre dernières années. Mais si l'on en croit un récent sondage du think tank Cato Institute, la majeure partie des électeurs dans trois États-clés pour la présidentielle, Pennsylvanie, le Wisconsin et le Michigan, pensent que les États-Unis sont au bord de la Troisième Guerre mondiale et font davantage confiance à Donald Trump pour gérer la politique internationale du pays. Merci d'avoir suivi cet épisode de C'est ça l'Amérique. On se retrouve la semaine prochaine.

  • Speaker #0

    C'est ça l'Amérique, un podcast proposé par La Croix, le programme Alliance Columbia et le site d'information French Morning.

  • Speaker #1

    Pour être présidente pour tous les Américains, vous pouvez toujours m'assurer de mettre le pays en avant, la partie et moi-même.

Chapters

  • Les électeurs américains s'intéressent-ils vraiment à la politique étrangère des États-Unis ?

    03:27

  • Kamala Harris inspire-t-elle confiance dans sa capacité à assurer le leadership des États-Unis sur la scène internationale ?

    05:12

  • Des électeurs démocrates arabes du Michigan ont annoncé qu'ils ne voteront pas pour Kamala Harris, est-ce un danger pour elle ?

    06:04

  • Kamala Harris est-elle plus sensible que Joe Bident à la cause palestienne ?

    07:04

  • Est-il naïf de penser que la politique de livraison d'armes à Israël changerait si Kamala Harris était élue présidente ?

    09:08

  • Qu'est-ce que Kamala Harris ferait différemment de Joe Biden dans les rapports des États-Unis avec Israël ?

    10:37

  • Joe Biden a-t-il une part de responsabilité dans l'escalade du conflit au Proche-Orient ?

    12:06

  • Donald Trump pourrait-il vraiment changer quelque chose à cette situation s'il était élu président ?

    13:32

  • Quelles sont les grandes menaces auxquelles les États-Unis devront faire face dans les années qui viennent ?

    15:14

  • Que se passerait-il en Ukraine si Donald Trump était élu président ?

    19:33

  • Y a-t-il une pression grandissante de l'opinion publique américaine pour trouver une solution à la guerre en Ukraine ?

    21:42

  • Les États-Unis ont-ils la capacité à concevoir le monde comme multipolaire, et pas simplement un monde où ils seraient les leaders ?

    23:33

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C’est ça l’Amérique, saison 3


Alors que Donald Trump mise sur l’image d’un monde en désordre sous l’administration Biden-Harris, dans quelle mesure les conflits mondiaux comme la guerre en Ukraine et au Proche-Orient influenceront-ils le résultat de l’élection américaine ?


Épisode 6/8 :


D’ordinaire, les électeurs Américains ne se soucient guère des questions de politique étrangère quand ils se rendent aux urnes. En sera-t-il autrement pour l’élection de 2024 ? Entre la guerre en Ukraine, la peur de la menace chinoise, et le conflit au Proche-Orient qui empoisonne la présidence Biden, il est impossible d’ignorer le contexte international explosif. Donald Trump en joue en arguant que les États-Unis sont au bord de "la troisième guerre mondiale". Kamala Harris pourrait également être lâchée par la communauté arabo-américaine du Michigan, un électorat assez important pour lui faire perdre ce "swing state" décisif dans la course à la Maison-Blanche.


Comment les crises qui ont marqué la présidence Biden vont-elles peser sur le scrutin du 5 novembre ? Pour ce sixième épisode de "C’est ça l’Amérique", Alexis Buisson, correspondant de "La Croix" à New York, a rencontré Jean-Marie Guéhenno, professeur à l’université Columbia et ancien secrétaire général adjoint au Département des opérations de maintien de la paix aux Nations Unies.


CRÉDITS :


Écriture et réalisation : Alexis Buisson. Rédaction en chef : Jean-Christophe Ploquin et Paul De Coustin. Production : Célestine Albert-Steward. Mixage : Flavien Edenne. Musique : Emmanuel Viau. Illustration : Olivier Balez.


► Vous avez une question ou une remarque ? Écrivez-nous à cette adresse : podcast.lacroix@groupebayard.com


"C'est ça l'Amérique" est un podcast original de LA CROIX - Octobre 2024.


En partenariat avec le programme Alliance – Columbia et ses partenaires (Sciences-Po, Polytechnique, La Sorbonne), et French Morning, le premier web magazine des Français d’Amérique.


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Kamala !

  • Speaker #1

    It will make the world stronger. Because I believe everyone has a right to safety, to dignity.

  • Speaker #2

    Bonjour, je suis Alexis Buisson,

  • Speaker #3

    le correspondant de La Croix à New York.

  • Speaker #2

    Bienvenue dans C'est ça l'Amérique, le podcast qui explore les enjeux des élections américaines de 2024.

  • Speaker #1

    I know where the United States belongs. Kamala !

  • Speaker #2

    Chaque semaine et jusqu'au scrutin, Découvrez les éclairages d'experts francophones établis aux États-Unis.

  • Speaker #0

    C'est ça l'Amérique et ça commence maintenant.

  • Speaker #2

    On commence cet épisode de ces salles américaines dans la cour d'un hôtel du Michigan. J'ai en face de moi un homme en colère. Il s'agit d'Assan Abdel Salam, un professeur à l'université du Minnesota. Comme beaucoup d'Arabes et musulmans américains, il cherche par tous les moyens à mettre un terme à ce qu'il appelle le génocide commis par Israël au Proche-Orient. Il est l'un des fondateurs du mouvement Abandon Harris. qui vise à couler la candidature de la vice-présidente. Il appelle en effet les électeurs arabes et musulmans, qui sont majoritairement démocrates, à voter pour un candidat tiers en novembre, en l'occurrence l'écologiste Jill Stein. Ce n'est pas un hasard s'il est aujourd'hui dans le Michigan, c'est l'un des swing states de l'élection, l'un des états décisifs de cette présidentielle. En 2020, Joe Biden l'avait remporté de 160 000 voix, mais les électeurs arabes représentent 300 000 personnes. S'ils se détournent tous de la démocrate, Cela pourrait rendre le chemin de Kamala Harris vers la Maison-Blanche plus compliqué, tout en faisant comprendre au parti républicain qu'il doit écouter la communauté arabe et le mouvement anti-guerre. Hassan Abdel Salah. Notre stratégie, comme vous le savez, est troisfold. Premièrement, nous voulons punir le président et la vice-présidente pour leur génocide. Deuxièmement, nous voulons être vus comme les responsables de leur défaite après les avoir mis au pouvoir en 2020. Et enfin... Nous souhaitons utiliser notre pouvoir pour nous assurer qu'il n'y ait plus jamais de génocide. Nous voulons que les élections soient le plus serrées possible dans les États bascules, les swing states, pour montrer à tout le monde que nous avons fait la différence et que le Parti démocrate a fait une grosse erreur en nous ignorant encore et encore. Ils n'auront pas d'autre choix que d'adopter un programme pro-palestinien et anti-génocide. Dans ce sixième épisode de C'est ça l'Amérique, nous nous intéressons à la façon dont les conflits à l'étranger peuvent peser sur le scrutin de novembre. J'ai tendu mon micro à Jean-Marie Guéhenno, professeure à l'Université Columbia et ancien secrétaire général adjoint au département des opérations de maintien de la paix aux Nations Unies.

  • Speaker #3

    Bonjour Jean-Marie Guéhenno.

  • Speaker #0

    Bonjour.

  • Speaker #3

    Merci beaucoup de nous accueillir ici pour parler politique étrangère des États-Unis. Alors, il y a un peu un paradoxe finalement quand on s'intéresse aux élections américaines. Les États-Unis sont bien sûr la première puissance économique, diplomatique, militaire. mondiale, mais les Américains eux-mêmes s'intéressent très peu à la politique étrangère. Ce n'est pas vraiment un sujet de préoccupation pour eux. Je me demandais si vous pensiez que cette année, ça serait peut-être différent avec les crises que l'on voit au Proche-Orient ou en Ukraine, ou la menace chinoise qui s'accroît.

  • Speaker #0

    Je crois que l'élection de cette année, elle se jouera quand même d'abord sur la politique intérieure, sur l'état de l'économie. Cela dit, les crises internationales qu'on voit en ce moment peuvent avoir un impact Non pas que les Américains aient nécessairement une préférence sur une ligne politique pour un candidat ou pour un autre, mais parce que ce qui se joue, je pense, dans une élection présidentielle américaine, c'est l'idée que les Américains se font de la capacité de leadership d'un président. Et le risque là, c'est que Trump apparaisse comme quelqu'un de fort, qui ne se laisse pas bousculer. Kamala Harris a montré dans le débat avec Trump qu'elle savait tout à fait... tenir, mais malgré tout, elle n'a pas cette image, d'une certaine manière, heureusement pour elle, de brutalité de Trump. Je pense que si la situation internationale se détériore encore plus qu'elle n'est déjà détériorée aujourd'hui, s'il y a une escalade massive, par exemple, au Proche-Orient, qui devait entraîner les États-Unis dans une nouvelle guerre au Proche-Orient, je crois que ça, ça jouerait très fortement en faveur de Trump.

  • Speaker #3

    Même si elle est vice-présidente, elle reste dans l'ombre. de Joe Biden, c'est un peu la nature du poste. Du coup, vous pensez que c'est plus difficile, d'une certaine manière, pour elle, de montrer ses capacités de leadership dont vous parlez ?

  • Speaker #0

    Je crois que oui, tout vice-président, évidemment, est un peu dans l'ombre et ne peut pas se démarquer trop de la politique de Biden. Donc là, elle est un peu condamnée à défendre l'héritage. Mais je ne crois pas que ce soit le plus grand problème, parce que l'héritage de Biden, c'est un débat pour experts. plus qu'un débat pour le grand public américain. Ce qui compte, c'est l'image qu'on projette d'un leader, ou au contraire de quelqu'un qui peut se faire bousculer par les leaders étrangers.

  • Speaker #3

    Quand on voit par exemple qu'il y a des électeurs arabes dans le Michigan, qui est un état très important pour cette élection présidentielle, un des swing states de cette élection présidentielle, et qui disent qu'ils vont essayer de faire perdre Kamala Harris, ne pas voter pour elle, alors que ce sont des électeurs qui sont très démocrates, selon vous c'est un souci pour elle ? C'est un danger ?

  • Speaker #0

    Je pense que ça c'est un vrai souci, parce que évidemment avec le système électoral américain, l'élection se joue sur une poignée d'états, et le Michigan se trouve être l'un d'eux. C'est le seul État des États-Unis où il y a une forte communauté d'origine arabe. Et tous les reportages qu'on lit sur le Michigan montrent que le soutien très fort des États-Unis à Israël va nuire à Kamala Harris. Mais elle est obligée de se tenir à la ligne officielle, à la fois parce qu'elle est la vice-présidente et parce qu'à l'échelle des États-Unis, il y a quand même beaucoup plus de soutien pour Israël. que pour les Palestiniens.

  • Speaker #3

    Elle donne l'impression, en tout cas elle a donné l'impression dans le passé, d'être plus sensible à la cause palestinienne. Et quand elle est devenue candidate, il y a beaucoup de militants pro-palestiniens qui disaient tiens, elle est plus sensible à notre cause que Joe Biden Est-ce qu'aujourd'hui vous pensez que c'est le cas ?

  • Speaker #0

    Je crois qu'elle est plus sensible, mais elle ne peut pas trop le montrer parce qu'elle perdrait sur l'aile pro-israélienne de l'électorat et elle ne peut pas prendre ce risque. Kamala, tu es en train de se tuer,

  • Speaker #1

    sort de là ! Et comment il utiliserait les puissances immenses de la présidence des États-Unis ?

  • Speaker #2

    Avant de poursuivre la conversation, arrêtons-nous sur l'une des revendications des défenseurs de la cause palestinienne. Ces derniers réclament la fin des livraisons d'armes américaines à Israël. Ils mettent notamment en avant l'existence d'une loi américaine appelée LIHI, du nom de son auteur, le sénateur démocrate Patrick LIHI. Le texte prohibe la livraison d'armes à des unités militaires qui commettent des entorses aux droits humanitaires. Or, d'après le sénateur et d'autres élus et militants, les contrôles prévus dans la loi ne s'appliquent pas. à Israël à l'heure actuelle. Stopper les ventes d'armes à l'État hébreu est cependant plus facile à dire qu'à faire quand on sait qu'une grande partie des armes envoyées découlent d'un protocole d'accord contraignant sur le plan légal qui oblige les États-Unis à donner chaque année pendant 10 ans des milliards de dollars à Israël en assistance militaire. Le dernier accord en date a été signé en 2016 et promet quelques 38 milliards de dollars d'aides sur la décennie. L'écrasante majorité de cette somme est transférée régulièrement à Israël, qui à son tour s'en sert pour acheter les armes et les équipements dont elle a besoin aux Etats-Unis. La position officielle de Washington demeure que son allié a le droit de se défendre après l'attaque terroriste du Hamas le 7 octobre 2023, mais doit limiter autant que possible les morts et les blessures de civils. Jean-Marie Guéhenno, est-il naïf de penser que la politique de livraison d'armes à Israël changerait si Kamala Harris est élue présidente ?

  • Speaker #0

    Non, je pense que la politique évoluerait. Tous les présidents américains, enfin pas toujours, mais depuis les années 60, ont été très pro-israéliens. Ils ne l'ont pas toujours été parce qu'au moment, par exemple, de la crise de Suez, c'était la France qui était aux côtés d'Israël. Les États-Unis ont dit à la France et la Grande-Bretagne Arrêtez, vous en faites trop pas dire que c'est une constante américaine d'être aux côtés d'israël mais depuis plusieurs décennies c'est le cas et by donne est sans doute le plus pro israélien des présidents américains par son histoire par ses relations personnelles avec un certain nombre de responsables israéliens donc je crois que par rapport à ce qu'on voit de la politique de by donne j'ai lu que cette année les états unis ont livré en dollars constants plus d'armement qui n'en ont jamais livré à Israël. Donc le soutien à Israël est considérable aux États-Unis, malgré en même temps une demande à Israël de se modérer, mais les actes contredisent un peu ces demandes, lesquelles les États-Unis ne font pas de pression vraiment concrète sur Israël. Je pense que si Kamala Harris est élue, Il y aura probablement une évolution, mais pas une révolution, parce que pour la majorité des Américains, Israël reste quand même un partenaire privilégié au Proche-Orient.

  • Speaker #3

    Qu'est-ce qu'une présidente Kamala Harris ferait différemment finalement de Joe Biden ? Vous parliez d'évolution, pas de révolution. Est-ce que c'est le ton qui changerait peut-être vis-à-vis de Netanyahou ou d'autres aspects des rapports avec Israël ?

  • Speaker #0

    Je pense qu'il y aurait peut-être de nouveau un effort. pour relancer un processus diplomatique, pour arriver à deux états, pour arriver à une solution qui donne aux Palestiniens une vraie souveraineté politique. Je crois que cet effort avait été en fait jusqu'à l'attaque terroriste du 7 octobre. de l'année dernière. Cet effort avait été abandonné. L'administration américaine se disait qu'il y avait plus de coûts à prendre que de prix Nobel à gagner et donc il n'y avait pas d'efforts sérieux. Je crois qu'il pourrait y avoir un certain effort de l'administration. américaine dans cette direction. Mais en même temps, il ne faut pas se faire trop d'illusions. Tout ça dépendra d'abord de l'évolution en Israël, avec le gouvernement israélien tel qu'il est, et au-delà de ce gouvernement, avec le déplacement du centre de gravité politique d'Israël vers la droite, voire l'extrême droite, les partisans d'une solution à deux États sont très minoritaires aujourd'hui. Et la situation sur le terrain, rend cette solution, elle a toujours été difficile, mais elle est encore plus difficile aujourd'hui qu'elle ne l'était il y a 20 ans ou 15 ans, quand les dernières négociations sérieuses se sont engagées.

  • Speaker #3

    On a l'impression que Joe Biden renvoie une image un peu d'impuissance face à Netanyahou, face à cette situation qui escalade au Proche-Orient. Est-ce que c'est juste, selon vous, de dire qu'il a une part de responsabilité dans l'escalade qu'on en voit aujourd'hui ?

  • Speaker #0

    L'impuissance américaine, effectivement, elle est éclatante. Je crois que ce n'est pas une bonne nouvelle, parce que ça permet à toutes sortes d'acteurs de jouer un jeu qui est souvent plus le jeu de la puissance et de la guerre que le jeu de la paix. Est-ce qu'une Amérique... plus forte, plus affirmative, aurait pu vraiment changer le cours des choses. Je pense que quand même le cœur du sujet, il est dans l'évolution politique d'Israël, qui à chaque vague d'attentats terroristes, à glisser un peu plus vers la droite. Et ça, toutes les études d'opinion sur Israël le montrent. Le terrorisme ne convainc pas les Israéliens qu'il faut aller vers une solution politique, il les convainc qu'il faut dominer et intimider. dire c'est un peu la réaction de tous les pays quand il ya eu le 11 septembre ici aux états unis bas les états unis se sont durcies internationalement sur le terrorisme quand il ya eu des attentats terroristes en france même chose le terrorisme pousse vers des régimes de disons où la force l'emportent sur la négociation ce qu'un président trump

  • Speaker #3

    Changerait quelque chose finalement à ce dossier qui, comme vous le dites, dépend avant tout de la situation intérieure à Israël ?

  • Speaker #0

    Moi, je pense que non. Je pense que Trump, sa vision des choses, c'est une vision qui n'est pas très éloignée de celle des dirigeants israéliens actuels. Quand il a poussé aux accords d'Abraham, au fond, c'est l'idée que la sécurité d'Israël, on normalise les relations avec les États. Et puis les Palestiniens, on les passe un peu par... pertes et profits. Je crois que ça a été ça la réalité des accords d'Abraham parce que la plupart des États arabes, à vrai dire, seraient très contents si Israël pouvait complètement écraser le Hamas. Le Hamas, c'est au départ une branche des frères musulmans. Les frères musulmans, c'est ce que le régime égyptien déteste le plus aujourd'hui. C'est ce que les Émirats arabes unis détestent, l'Arabie saoudite également. Si cette solution était possible, si on pouvait complètement oublier les Palestiniens, ça satisferait beaucoup d'acteurs régionaux. Ça ne satisferait peut-être pas une partie significative des peuples de la région, mais ça satisferait leurs dirigeants. C'est ça la logique de Netanyahou. Je crois que ce serait la logique de Trump. Quel serait le résultat ultime ? Je pense que ce serait une recrudescence à terme. Du terrorisme, même si le Hezbollah, même si le Hamas s'était écrasé, on ne peut pas passer par pertes et profits un peuple qui a montré son endurance.

  • Speaker #3

    Quoi qu'il en soit, le locataire de la Maison-Blanche va changer en janvier après l'investiture. Ce sera soit Donald Trump, soit Kamala Harris. Je voudrais qu'on se projette peut-être un peu sur les quatre années qui viennent. Quelles sont selon vous les grandes menaces auxquelles les États-Unis devront faire face, auxquelles ce nouveau commandant en chef devra se préparer ?

  • Speaker #0

    Je dirais plus loin que menaces. Quels sont les grands changements dans l'équilibre du monde auxquels les États-Unis doivent se préparer ? Je crois que ce changement est déjà en cours. C'est le fait que les États-Unis restent de loin la première puissance militaire du monde. Leur budget militaire écrase tous ceux de leurs concurrents, de leurs adversaires. Et quand on ajoute au budget militaire des États-Unis le budget de leurs alliés, à ce moment-là, la domination est encore plus écrasante. Mais en même temps, politiquement, les États-Unis ne sont plus le modèle incontesté. On parlait du monde multipolaire déjà dans les années 80. Il n'était pas multipolaire, il était bipolaire. Ensuite, on a eu un monde unipolaire avec l'effondrement de l'Union soviétique. Aujourd'hui, on est vraiment en train de voir apparaître un monde multipolaire. Et donc, pour un président américain ou pour une présidente américaine, le grand défi, c'est un défi presque d'identité. Est-ce que les États-Unis peuvent se penser autrement que comme le numéro un ? et accepter que sur beaucoup de sujets, il faut négocier, il faut faire des compromis avec d'autres qui n'ont pas forcément la même vision des choses. Je dirais que c'est devenu un peu le code génétique des Européens, parce qu'on vit ensemble, on s'est tapé dessus pendant des siècles, et on comprend qu'aujourd'hui, on est obligé de s'entendre. Les États-Unis ont une autre histoire, et donc le mot que... tous les dirigeants américains, sans exception emploi, c'est leadership. Et donc, les autres sont derrière. Et demain, ça va être de plus en plus difficile. Et ça va être de plus en plus difficile. Sur le dossier qui préoccupe le plus les États-Unis, c'est celui de la Chine. L'ambiguïté de la position américaine sur la Chine, c'est qu'on ne sait pas si vraiment leur peur, c'est que demain, il y a une guerre avec la Chine, donc il faut s'y préparer. Ou si c'est simplement que la Chine devienne leur égale. Ce qu'elle est loin d'être aujourd'hui, malgré tout. Mais il y a cette inquiétude que la Chine, c'est aujourd'hui un modèle pour beaucoup de pays. Attoro a raison, mais c'est un modèle. Et donc ça, c'est une révolution psychologique. Alors pour faire face à la Chine, je crois que si c'est Kamala Harris, le pivot vers l'Asie, comme on dit aux États-Unis, sera un pivot nuancé. Parce qu'elle aura un certain nombre de ses conseillers, notamment Phil Gordon. qui est un spécialiste de l'Europe et qu'on dit proche de Kamala Harris, un certain nombre de ses conseillers lui diront Oui, la Chine, c'est peut-être le défi numéro un, mais aborder la Chine sans l'appui des Européens, ce n'est pas la politique la plus intelligente. Donc il faut mettre les Européens dans notre jeu. Et là, je vois de sérieuses difficultés possibles dans les relations entre les États-Unis et l'Europe. Parce que l'Europe dépend beaucoup aujourd'hui des États-Unis pour le soutien à l'Ukraine. L'Europe dépense plus que les États-Unis sur l'Ukraine, ça n'est pas assez dit. Mais militairement, malgré tout, les États-Unis sont de loin l'élément crucial du soutien à l'Ukraine. Et donc les États-Unis sont en position de force pour dire aux Européens, écoutez, on vous appuie sur l'Ukraine, mais il faut globaliser l'Alliance Atlantique. La question de la Chine, c'est une question pour vous autant que pour nous. Les Européens ont évolué là-dessus. Ils se rendent compte que les Chinois ont tendance à piller leur technologie, à faire une concurrence déloyale. On voit les réactions en Europe sur les véhicules électriques, etc. Mais malgré tout... Ils ne sont pas sur la ligne américaine aujourd'hui. Ils ont quand même envie de garder une relation beaucoup plus positive avec la Chine que les États-Unis.

  • Speaker #3

    Vous avez mentionné l'Ukraine, c'est bien sûr un sujet très important pour nous, Européens. Si Donald Trump repasse et qu'il est réélu en novembre, qu'est-ce qui se passe selon vous en Ukraine ?

  • Speaker #0

    Je crois que si Donald Trump est élu, ça c'est une très mauvaise nouvelle pour l'Ukraine. Je crois qu'il sera assez brutal. dans sa volonté de se dégager. Il est convaincu qu'il peut faire la paix en Ukraine, mais je crois que la manière dont il pense la faire, c'est sur le dos des Ukrainiens. Donc là, se posera une question un peu existentielle pour les Européens. C'est-à-dire qu'on voit bien, on se rapproche d'un moment de négociation avec la Russie, parce que l'Ukraine est épuisée aussi. Il n'a pas les mêmes ressources humaines que la Russie. Ces villes sont de plus en plus dévastées. Donc on se rapproche d'un moment de négociation. Mais est-ce que cette négociation sera une sorte de capitulation ? Ou est-ce qu'elle sauvegarde la possibilité d'un pays indépendant ? Je crois que sur la question de la ligne de cesser le feu, parce que je n'imagine pas un accord de paix, j'imagine un cesser le feu, il est bien possible qu'on finisse par arriver à une situation où l'Ukraine ne récupère pas non seulement les territoires qu'il a perdus en 2014, mais même une bonne partie de ceux qui ont été élu. que la Russie a gagné depuis. Si c'est le cas, mais que l'Ukraine a des très solides garanties de sécurité, à ce moment-là, d'une certaine manière, quelque chose est sauvé. Mais l'Ukraine voudra sans doute avoir la présence de troupes sur son territoire qui garantissent les engagements de sécurité qui auront été pris. Alors les Américains, à mon avis, n'auront aucune envie de cela, même les démocrates. Trump, c'est totalement exclu. Est-ce que les Européens seront prêts à prendre ce risque ? On a vu que quand le président Macron avait lancé une sorte de ballon d'essai là-dessus, il s'est plutôt fait taper sur les doigts. Alors est-ce que face au désastre d'un effondrement possible de l'Ukraine, les esprits changeraient ? Peut-être. Mais ça sera, je crois, un peu l'heure de vérité pour l'Europe si Trump est élu.

  • Speaker #3

    Vous sentez qu'il y a une pression grandissante de l'opinion publique américaine pour... Trouvez une solution à cette guerre ?

  • Speaker #0

    Il n'y a pas des morts américains dans cette guerre. L'argument des démocrates, c'est de dire, écoutez, en défendant l'Ukraine, on défend les États-Unis, on n'a pas un soldat sur le terrain, on n'a pas de morts. Finalement, c'est une manière très économique d'affaiblir la Russie. C'est un raisonnement qui a son poids. Cela dit, pour les Américains, et Trump insiste là-dessus, l'Europe est un continent riche. Et qu'il soit nécessaire que les États-Unis aillent faire la sécurité aux confins de l'Europe, à la place des Européens. Il y a beaucoup d'Américains qui se disent que ce n'est plus très raisonnable. Donc je crois qu'il y a une sorte de fatigue générale des États-Unis à l'égard des engagements extérieurs. Ils ont eu l'Irak. Ils ont eu l'Afghanistan, alors là il y avait des soldats américains, là qui sont morts, alors dans des proportions bien moindres que la guerre du Vietnam. Mais malgré tout, l'engagement qui a coûté de l'argent, cette idée que les États-Unis doivent régler tous les problèmes du monde, alors qu'ils ont de grands problèmes intérieurs, que les infrastructures américaines ont besoin de grands travaux, disons, il y a beaucoup d'Américains qui se disent, est-ce que ça vaut vraiment la peine ? En même temps, c'est là qu'il y a une certaine contradiction, je dirais, dans la psychologie américaine. L'idée du leadership reste très importante. Et le leadership, c'est aussi d'avoir une grande puissance militaire. Donc tous les candidats, et Kamala Harris y compris, disent Ah, mais on ne va pas couper les budgets militaires, on va rester très puissants Donc vous avez à la fois la fatigue de l'engagement international et la volonté que les États-Unis maintiennent le drapeau américain haut et fort.

  • Speaker #3

    Je voudrais revenir en guise de dernière question sur quelque chose de très important que vous avez dit à mon sens, c'est la capacité des États-Unis à finalement concevoir un monde multipolaire, et pas simplement un monde où ils sont les leaders. Est-ce qu'aujourd'hui vous voyez des raisons de croire qu'une bascule peut se faire justement dans cette vision américaine du monde ?

  • Speaker #0

    C'est très difficile. Alors évidemment Kamala Harris, elle a un profil intéressant de ce point de vue, d'origine à la fois indienne et jamaïcaine. Elle est multipolaire à sa façon. La plupart des présidents américains, leurs ancêtres, c'était des Européens. Il y a Obama qui compliquait un peu les choses avec le Kenya. Kamala Harris avec l'Inde, qui est justement un des nouveaux pôles de ce monde qui émerge, ou qui a émergé d'ailleurs déjà. C'est une nouveauté. En même temps, et de ce point de vue, le précédent d'Obama est intéressant. Obama, il ne s'est pas tellement intéressé à l'Afrique. Il s'est beaucoup moins intéressé à l'Afrique que Bush, parce qu'il ne voulait pas être classé comme le noir qui s'intéresse à l'Afrique. Il est très possible que Kamala Harris, si elle est élue, fasse le même raisonnement, qu'elle tienne bien à montrer qu'elle est d'abord une Américaine. Mais ça ne l'empêchera pas de comprendre peut-être un peu mieux le fait que le monde... Il est aujourd'hui beaucoup plus compliqué qu'il ne l'était et que les États-Unis doivent jouer là-dessus et doivent essayer de bâtir des alliances avec ces nouveaux acteurs. Je crois qu'aujourd'hui la question du Moyen-Orient est un grand obstacle à cela parce que le reste du monde a du mal à comprendre comment les États-Unis apportent un soutien aussi inconditionnel. à Israël. Et donc, pour se rapprocher du reste du monde, ce sera une raison supplémentaire pour Kamala Harris de montrer qu'elle veut faire quelque chose sur le Moyen-Orient. Ça lui donnerait plus de crédibilité, à mon avis, vis-à-vis de tous ces acteurs émergents.

  • Speaker #3

    Merci beaucoup Jean-Marie Guénon.

  • Speaker #0

    Vous en prie, avec plaisir.

  • Speaker #2

    À la différence de Donald Trump, qui a fait de America First l'Amérique d'abord, la ligne conductrice de sa politique étrangère, La philosophie de Kamala Harris reste mal définie. Avant de devenir vice-présidente, elle n'avait presque aucune expérience internationale. Elle l'a étoffée bien sûr aux côtés de Joe Biden ces quatre dernières années. Mais si l'on en croit un récent sondage du think tank Cato Institute, la majeure partie des électeurs dans trois États-clés pour la présidentielle, Pennsylvanie, le Wisconsin et le Michigan, pensent que les États-Unis sont au bord de la Troisième Guerre mondiale et font davantage confiance à Donald Trump pour gérer la politique internationale du pays. Merci d'avoir suivi cet épisode de C'est ça l'Amérique. On se retrouve la semaine prochaine.

  • Speaker #0

    C'est ça l'Amérique, un podcast proposé par La Croix, le programme Alliance Columbia et le site d'information French Morning.

  • Speaker #1

    Pour être présidente pour tous les Américains, vous pouvez toujours m'assurer de mettre le pays en avant, la partie et moi-même.

Chapters

  • Les électeurs américains s'intéressent-ils vraiment à la politique étrangère des États-Unis ?

    03:27

  • Kamala Harris inspire-t-elle confiance dans sa capacité à assurer le leadership des États-Unis sur la scène internationale ?

    05:12

  • Des électeurs démocrates arabes du Michigan ont annoncé qu'ils ne voteront pas pour Kamala Harris, est-ce un danger pour elle ?

    06:04

  • Kamala Harris est-elle plus sensible que Joe Bident à la cause palestienne ?

    07:04

  • Est-il naïf de penser que la politique de livraison d'armes à Israël changerait si Kamala Harris était élue présidente ?

    09:08

  • Qu'est-ce que Kamala Harris ferait différemment de Joe Biden dans les rapports des États-Unis avec Israël ?

    10:37

  • Joe Biden a-t-il une part de responsabilité dans l'escalade du conflit au Proche-Orient ?

    12:06

  • Donald Trump pourrait-il vraiment changer quelque chose à cette situation s'il était élu président ?

    13:32

  • Quelles sont les grandes menaces auxquelles les États-Unis devront faire face dans les années qui viennent ?

    15:14

  • Que se passerait-il en Ukraine si Donald Trump était élu président ?

    19:33

  • Y a-t-il une pression grandissante de l'opinion publique américaine pour trouver une solution à la guerre en Ukraine ?

    21:42

  • Les États-Unis ont-ils la capacité à concevoir le monde comme multipolaire, et pas simplement un monde où ils seraient les leaders ?

    23:33

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Description

C’est ça l’Amérique, saison 3


Alors que Donald Trump mise sur l’image d’un monde en désordre sous l’administration Biden-Harris, dans quelle mesure les conflits mondiaux comme la guerre en Ukraine et au Proche-Orient influenceront-ils le résultat de l’élection américaine ?


Épisode 6/8 :


D’ordinaire, les électeurs Américains ne se soucient guère des questions de politique étrangère quand ils se rendent aux urnes. En sera-t-il autrement pour l’élection de 2024 ? Entre la guerre en Ukraine, la peur de la menace chinoise, et le conflit au Proche-Orient qui empoisonne la présidence Biden, il est impossible d’ignorer le contexte international explosif. Donald Trump en joue en arguant que les États-Unis sont au bord de "la troisième guerre mondiale". Kamala Harris pourrait également être lâchée par la communauté arabo-américaine du Michigan, un électorat assez important pour lui faire perdre ce "swing state" décisif dans la course à la Maison-Blanche.


Comment les crises qui ont marqué la présidence Biden vont-elles peser sur le scrutin du 5 novembre ? Pour ce sixième épisode de "C’est ça l’Amérique", Alexis Buisson, correspondant de "La Croix" à New York, a rencontré Jean-Marie Guéhenno, professeur à l’université Columbia et ancien secrétaire général adjoint au Département des opérations de maintien de la paix aux Nations Unies.


CRÉDITS :


Écriture et réalisation : Alexis Buisson. Rédaction en chef : Jean-Christophe Ploquin et Paul De Coustin. Production : Célestine Albert-Steward. Mixage : Flavien Edenne. Musique : Emmanuel Viau. Illustration : Olivier Balez.


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    Kamala !

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  • Speaker #2

    Bonjour, je suis Alexis Buisson,

  • Speaker #3

    le correspondant de La Croix à New York.

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    C'est ça l'Amérique et ça commence maintenant.

  • Speaker #2

    On commence cet épisode de ces salles américaines dans la cour d'un hôtel du Michigan. J'ai en face de moi un homme en colère. Il s'agit d'Assan Abdel Salam, un professeur à l'université du Minnesota. Comme beaucoup d'Arabes et musulmans américains, il cherche par tous les moyens à mettre un terme à ce qu'il appelle le génocide commis par Israël au Proche-Orient. Il est l'un des fondateurs du mouvement Abandon Harris. qui vise à couler la candidature de la vice-présidente. Il appelle en effet les électeurs arabes et musulmans, qui sont majoritairement démocrates, à voter pour un candidat tiers en novembre, en l'occurrence l'écologiste Jill Stein. Ce n'est pas un hasard s'il est aujourd'hui dans le Michigan, c'est l'un des swing states de l'élection, l'un des états décisifs de cette présidentielle. En 2020, Joe Biden l'avait remporté de 160 000 voix, mais les électeurs arabes représentent 300 000 personnes. S'ils se détournent tous de la démocrate, Cela pourrait rendre le chemin de Kamala Harris vers la Maison-Blanche plus compliqué, tout en faisant comprendre au parti républicain qu'il doit écouter la communauté arabe et le mouvement anti-guerre. Hassan Abdel Salah. Notre stratégie, comme vous le savez, est troisfold. Premièrement, nous voulons punir le président et la vice-présidente pour leur génocide. Deuxièmement, nous voulons être vus comme les responsables de leur défaite après les avoir mis au pouvoir en 2020. Et enfin... Nous souhaitons utiliser notre pouvoir pour nous assurer qu'il n'y ait plus jamais de génocide. Nous voulons que les élections soient le plus serrées possible dans les États bascules, les swing states, pour montrer à tout le monde que nous avons fait la différence et que le Parti démocrate a fait une grosse erreur en nous ignorant encore et encore. Ils n'auront pas d'autre choix que d'adopter un programme pro-palestinien et anti-génocide. Dans ce sixième épisode de C'est ça l'Amérique, nous nous intéressons à la façon dont les conflits à l'étranger peuvent peser sur le scrutin de novembre. J'ai tendu mon micro à Jean-Marie Guéhenno, professeure à l'Université Columbia et ancien secrétaire général adjoint au département des opérations de maintien de la paix aux Nations Unies.

  • Speaker #3

    Bonjour Jean-Marie Guéhenno.

  • Speaker #0

    Bonjour.

  • Speaker #3

    Merci beaucoup de nous accueillir ici pour parler politique étrangère des États-Unis. Alors, il y a un peu un paradoxe finalement quand on s'intéresse aux élections américaines. Les États-Unis sont bien sûr la première puissance économique, diplomatique, militaire. mondiale, mais les Américains eux-mêmes s'intéressent très peu à la politique étrangère. Ce n'est pas vraiment un sujet de préoccupation pour eux. Je me demandais si vous pensiez que cette année, ça serait peut-être différent avec les crises que l'on voit au Proche-Orient ou en Ukraine, ou la menace chinoise qui s'accroît.

  • Speaker #0

    Je crois que l'élection de cette année, elle se jouera quand même d'abord sur la politique intérieure, sur l'état de l'économie. Cela dit, les crises internationales qu'on voit en ce moment peuvent avoir un impact Non pas que les Américains aient nécessairement une préférence sur une ligne politique pour un candidat ou pour un autre, mais parce que ce qui se joue, je pense, dans une élection présidentielle américaine, c'est l'idée que les Américains se font de la capacité de leadership d'un président. Et le risque là, c'est que Trump apparaisse comme quelqu'un de fort, qui ne se laisse pas bousculer. Kamala Harris a montré dans le débat avec Trump qu'elle savait tout à fait... tenir, mais malgré tout, elle n'a pas cette image, d'une certaine manière, heureusement pour elle, de brutalité de Trump. Je pense que si la situation internationale se détériore encore plus qu'elle n'est déjà détériorée aujourd'hui, s'il y a une escalade massive, par exemple, au Proche-Orient, qui devait entraîner les États-Unis dans une nouvelle guerre au Proche-Orient, je crois que ça, ça jouerait très fortement en faveur de Trump.

  • Speaker #3

    Même si elle est vice-présidente, elle reste dans l'ombre. de Joe Biden, c'est un peu la nature du poste. Du coup, vous pensez que c'est plus difficile, d'une certaine manière, pour elle, de montrer ses capacités de leadership dont vous parlez ?

  • Speaker #0

    Je crois que oui, tout vice-président, évidemment, est un peu dans l'ombre et ne peut pas se démarquer trop de la politique de Biden. Donc là, elle est un peu condamnée à défendre l'héritage. Mais je ne crois pas que ce soit le plus grand problème, parce que l'héritage de Biden, c'est un débat pour experts. plus qu'un débat pour le grand public américain. Ce qui compte, c'est l'image qu'on projette d'un leader, ou au contraire de quelqu'un qui peut se faire bousculer par les leaders étrangers.

  • Speaker #3

    Quand on voit par exemple qu'il y a des électeurs arabes dans le Michigan, qui est un état très important pour cette élection présidentielle, un des swing states de cette élection présidentielle, et qui disent qu'ils vont essayer de faire perdre Kamala Harris, ne pas voter pour elle, alors que ce sont des électeurs qui sont très démocrates, selon vous c'est un souci pour elle ? C'est un danger ?

  • Speaker #0

    Je pense que ça c'est un vrai souci, parce que évidemment avec le système électoral américain, l'élection se joue sur une poignée d'états, et le Michigan se trouve être l'un d'eux. C'est le seul État des États-Unis où il y a une forte communauté d'origine arabe. Et tous les reportages qu'on lit sur le Michigan montrent que le soutien très fort des États-Unis à Israël va nuire à Kamala Harris. Mais elle est obligée de se tenir à la ligne officielle, à la fois parce qu'elle est la vice-présidente et parce qu'à l'échelle des États-Unis, il y a quand même beaucoup plus de soutien pour Israël. que pour les Palestiniens.

  • Speaker #3

    Elle donne l'impression, en tout cas elle a donné l'impression dans le passé, d'être plus sensible à la cause palestinienne. Et quand elle est devenue candidate, il y a beaucoup de militants pro-palestiniens qui disaient tiens, elle est plus sensible à notre cause que Joe Biden Est-ce qu'aujourd'hui vous pensez que c'est le cas ?

  • Speaker #0

    Je crois qu'elle est plus sensible, mais elle ne peut pas trop le montrer parce qu'elle perdrait sur l'aile pro-israélienne de l'électorat et elle ne peut pas prendre ce risque. Kamala, tu es en train de se tuer,

  • Speaker #1

    sort de là ! Et comment il utiliserait les puissances immenses de la présidence des États-Unis ?

  • Speaker #2

    Avant de poursuivre la conversation, arrêtons-nous sur l'une des revendications des défenseurs de la cause palestinienne. Ces derniers réclament la fin des livraisons d'armes américaines à Israël. Ils mettent notamment en avant l'existence d'une loi américaine appelée LIHI, du nom de son auteur, le sénateur démocrate Patrick LIHI. Le texte prohibe la livraison d'armes à des unités militaires qui commettent des entorses aux droits humanitaires. Or, d'après le sénateur et d'autres élus et militants, les contrôles prévus dans la loi ne s'appliquent pas. à Israël à l'heure actuelle. Stopper les ventes d'armes à l'État hébreu est cependant plus facile à dire qu'à faire quand on sait qu'une grande partie des armes envoyées découlent d'un protocole d'accord contraignant sur le plan légal qui oblige les États-Unis à donner chaque année pendant 10 ans des milliards de dollars à Israël en assistance militaire. Le dernier accord en date a été signé en 2016 et promet quelques 38 milliards de dollars d'aides sur la décennie. L'écrasante majorité de cette somme est transférée régulièrement à Israël, qui à son tour s'en sert pour acheter les armes et les équipements dont elle a besoin aux Etats-Unis. La position officielle de Washington demeure que son allié a le droit de se défendre après l'attaque terroriste du Hamas le 7 octobre 2023, mais doit limiter autant que possible les morts et les blessures de civils. Jean-Marie Guéhenno, est-il naïf de penser que la politique de livraison d'armes à Israël changerait si Kamala Harris est élue présidente ?

  • Speaker #0

    Non, je pense que la politique évoluerait. Tous les présidents américains, enfin pas toujours, mais depuis les années 60, ont été très pro-israéliens. Ils ne l'ont pas toujours été parce qu'au moment, par exemple, de la crise de Suez, c'était la France qui était aux côtés d'Israël. Les États-Unis ont dit à la France et la Grande-Bretagne Arrêtez, vous en faites trop pas dire que c'est une constante américaine d'être aux côtés d'israël mais depuis plusieurs décennies c'est le cas et by donne est sans doute le plus pro israélien des présidents américains par son histoire par ses relations personnelles avec un certain nombre de responsables israéliens donc je crois que par rapport à ce qu'on voit de la politique de by donne j'ai lu que cette année les états unis ont livré en dollars constants plus d'armement qui n'en ont jamais livré à Israël. Donc le soutien à Israël est considérable aux États-Unis, malgré en même temps une demande à Israël de se modérer, mais les actes contredisent un peu ces demandes, lesquelles les États-Unis ne font pas de pression vraiment concrète sur Israël. Je pense que si Kamala Harris est élue, Il y aura probablement une évolution, mais pas une révolution, parce que pour la majorité des Américains, Israël reste quand même un partenaire privilégié au Proche-Orient.

  • Speaker #3

    Qu'est-ce qu'une présidente Kamala Harris ferait différemment finalement de Joe Biden ? Vous parliez d'évolution, pas de révolution. Est-ce que c'est le ton qui changerait peut-être vis-à-vis de Netanyahou ou d'autres aspects des rapports avec Israël ?

  • Speaker #0

    Je pense qu'il y aurait peut-être de nouveau un effort. pour relancer un processus diplomatique, pour arriver à deux états, pour arriver à une solution qui donne aux Palestiniens une vraie souveraineté politique. Je crois que cet effort avait été en fait jusqu'à l'attaque terroriste du 7 octobre. de l'année dernière. Cet effort avait été abandonné. L'administration américaine se disait qu'il y avait plus de coûts à prendre que de prix Nobel à gagner et donc il n'y avait pas d'efforts sérieux. Je crois qu'il pourrait y avoir un certain effort de l'administration. américaine dans cette direction. Mais en même temps, il ne faut pas se faire trop d'illusions. Tout ça dépendra d'abord de l'évolution en Israël, avec le gouvernement israélien tel qu'il est, et au-delà de ce gouvernement, avec le déplacement du centre de gravité politique d'Israël vers la droite, voire l'extrême droite, les partisans d'une solution à deux États sont très minoritaires aujourd'hui. Et la situation sur le terrain, rend cette solution, elle a toujours été difficile, mais elle est encore plus difficile aujourd'hui qu'elle ne l'était il y a 20 ans ou 15 ans, quand les dernières négociations sérieuses se sont engagées.

  • Speaker #3

    On a l'impression que Joe Biden renvoie une image un peu d'impuissance face à Netanyahou, face à cette situation qui escalade au Proche-Orient. Est-ce que c'est juste, selon vous, de dire qu'il a une part de responsabilité dans l'escalade qu'on en voit aujourd'hui ?

  • Speaker #0

    L'impuissance américaine, effectivement, elle est éclatante. Je crois que ce n'est pas une bonne nouvelle, parce que ça permet à toutes sortes d'acteurs de jouer un jeu qui est souvent plus le jeu de la puissance et de la guerre que le jeu de la paix. Est-ce qu'une Amérique... plus forte, plus affirmative, aurait pu vraiment changer le cours des choses. Je pense que quand même le cœur du sujet, il est dans l'évolution politique d'Israël, qui à chaque vague d'attentats terroristes, à glisser un peu plus vers la droite. Et ça, toutes les études d'opinion sur Israël le montrent. Le terrorisme ne convainc pas les Israéliens qu'il faut aller vers une solution politique, il les convainc qu'il faut dominer et intimider. dire c'est un peu la réaction de tous les pays quand il ya eu le 11 septembre ici aux états unis bas les états unis se sont durcies internationalement sur le terrorisme quand il ya eu des attentats terroristes en france même chose le terrorisme pousse vers des régimes de disons où la force l'emportent sur la négociation ce qu'un président trump

  • Speaker #3

    Changerait quelque chose finalement à ce dossier qui, comme vous le dites, dépend avant tout de la situation intérieure à Israël ?

  • Speaker #0

    Moi, je pense que non. Je pense que Trump, sa vision des choses, c'est une vision qui n'est pas très éloignée de celle des dirigeants israéliens actuels. Quand il a poussé aux accords d'Abraham, au fond, c'est l'idée que la sécurité d'Israël, on normalise les relations avec les États. Et puis les Palestiniens, on les passe un peu par... pertes et profits. Je crois que ça a été ça la réalité des accords d'Abraham parce que la plupart des États arabes, à vrai dire, seraient très contents si Israël pouvait complètement écraser le Hamas. Le Hamas, c'est au départ une branche des frères musulmans. Les frères musulmans, c'est ce que le régime égyptien déteste le plus aujourd'hui. C'est ce que les Émirats arabes unis détestent, l'Arabie saoudite également. Si cette solution était possible, si on pouvait complètement oublier les Palestiniens, ça satisferait beaucoup d'acteurs régionaux. Ça ne satisferait peut-être pas une partie significative des peuples de la région, mais ça satisferait leurs dirigeants. C'est ça la logique de Netanyahou. Je crois que ce serait la logique de Trump. Quel serait le résultat ultime ? Je pense que ce serait une recrudescence à terme. Du terrorisme, même si le Hezbollah, même si le Hamas s'était écrasé, on ne peut pas passer par pertes et profits un peuple qui a montré son endurance.

  • Speaker #3

    Quoi qu'il en soit, le locataire de la Maison-Blanche va changer en janvier après l'investiture. Ce sera soit Donald Trump, soit Kamala Harris. Je voudrais qu'on se projette peut-être un peu sur les quatre années qui viennent. Quelles sont selon vous les grandes menaces auxquelles les États-Unis devront faire face, auxquelles ce nouveau commandant en chef devra se préparer ?

  • Speaker #0

    Je dirais plus loin que menaces. Quels sont les grands changements dans l'équilibre du monde auxquels les États-Unis doivent se préparer ? Je crois que ce changement est déjà en cours. C'est le fait que les États-Unis restent de loin la première puissance militaire du monde. Leur budget militaire écrase tous ceux de leurs concurrents, de leurs adversaires. Et quand on ajoute au budget militaire des États-Unis le budget de leurs alliés, à ce moment-là, la domination est encore plus écrasante. Mais en même temps, politiquement, les États-Unis ne sont plus le modèle incontesté. On parlait du monde multipolaire déjà dans les années 80. Il n'était pas multipolaire, il était bipolaire. Ensuite, on a eu un monde unipolaire avec l'effondrement de l'Union soviétique. Aujourd'hui, on est vraiment en train de voir apparaître un monde multipolaire. Et donc, pour un président américain ou pour une présidente américaine, le grand défi, c'est un défi presque d'identité. Est-ce que les États-Unis peuvent se penser autrement que comme le numéro un ? et accepter que sur beaucoup de sujets, il faut négocier, il faut faire des compromis avec d'autres qui n'ont pas forcément la même vision des choses. Je dirais que c'est devenu un peu le code génétique des Européens, parce qu'on vit ensemble, on s'est tapé dessus pendant des siècles, et on comprend qu'aujourd'hui, on est obligé de s'entendre. Les États-Unis ont une autre histoire, et donc le mot que... tous les dirigeants américains, sans exception emploi, c'est leadership. Et donc, les autres sont derrière. Et demain, ça va être de plus en plus difficile. Et ça va être de plus en plus difficile. Sur le dossier qui préoccupe le plus les États-Unis, c'est celui de la Chine. L'ambiguïté de la position américaine sur la Chine, c'est qu'on ne sait pas si vraiment leur peur, c'est que demain, il y a une guerre avec la Chine, donc il faut s'y préparer. Ou si c'est simplement que la Chine devienne leur égale. Ce qu'elle est loin d'être aujourd'hui, malgré tout. Mais il y a cette inquiétude que la Chine, c'est aujourd'hui un modèle pour beaucoup de pays. Attoro a raison, mais c'est un modèle. Et donc ça, c'est une révolution psychologique. Alors pour faire face à la Chine, je crois que si c'est Kamala Harris, le pivot vers l'Asie, comme on dit aux États-Unis, sera un pivot nuancé. Parce qu'elle aura un certain nombre de ses conseillers, notamment Phil Gordon. qui est un spécialiste de l'Europe et qu'on dit proche de Kamala Harris, un certain nombre de ses conseillers lui diront Oui, la Chine, c'est peut-être le défi numéro un, mais aborder la Chine sans l'appui des Européens, ce n'est pas la politique la plus intelligente. Donc il faut mettre les Européens dans notre jeu. Et là, je vois de sérieuses difficultés possibles dans les relations entre les États-Unis et l'Europe. Parce que l'Europe dépend beaucoup aujourd'hui des États-Unis pour le soutien à l'Ukraine. L'Europe dépense plus que les États-Unis sur l'Ukraine, ça n'est pas assez dit. Mais militairement, malgré tout, les États-Unis sont de loin l'élément crucial du soutien à l'Ukraine. Et donc les États-Unis sont en position de force pour dire aux Européens, écoutez, on vous appuie sur l'Ukraine, mais il faut globaliser l'Alliance Atlantique. La question de la Chine, c'est une question pour vous autant que pour nous. Les Européens ont évolué là-dessus. Ils se rendent compte que les Chinois ont tendance à piller leur technologie, à faire une concurrence déloyale. On voit les réactions en Europe sur les véhicules électriques, etc. Mais malgré tout... Ils ne sont pas sur la ligne américaine aujourd'hui. Ils ont quand même envie de garder une relation beaucoup plus positive avec la Chine que les États-Unis.

  • Speaker #3

    Vous avez mentionné l'Ukraine, c'est bien sûr un sujet très important pour nous, Européens. Si Donald Trump repasse et qu'il est réélu en novembre, qu'est-ce qui se passe selon vous en Ukraine ?

  • Speaker #0

    Je crois que si Donald Trump est élu, ça c'est une très mauvaise nouvelle pour l'Ukraine. Je crois qu'il sera assez brutal. dans sa volonté de se dégager. Il est convaincu qu'il peut faire la paix en Ukraine, mais je crois que la manière dont il pense la faire, c'est sur le dos des Ukrainiens. Donc là, se posera une question un peu existentielle pour les Européens. C'est-à-dire qu'on voit bien, on se rapproche d'un moment de négociation avec la Russie, parce que l'Ukraine est épuisée aussi. Il n'a pas les mêmes ressources humaines que la Russie. Ces villes sont de plus en plus dévastées. Donc on se rapproche d'un moment de négociation. Mais est-ce que cette négociation sera une sorte de capitulation ? Ou est-ce qu'elle sauvegarde la possibilité d'un pays indépendant ? Je crois que sur la question de la ligne de cesser le feu, parce que je n'imagine pas un accord de paix, j'imagine un cesser le feu, il est bien possible qu'on finisse par arriver à une situation où l'Ukraine ne récupère pas non seulement les territoires qu'il a perdus en 2014, mais même une bonne partie de ceux qui ont été élu. que la Russie a gagné depuis. Si c'est le cas, mais que l'Ukraine a des très solides garanties de sécurité, à ce moment-là, d'une certaine manière, quelque chose est sauvé. Mais l'Ukraine voudra sans doute avoir la présence de troupes sur son territoire qui garantissent les engagements de sécurité qui auront été pris. Alors les Américains, à mon avis, n'auront aucune envie de cela, même les démocrates. Trump, c'est totalement exclu. Est-ce que les Européens seront prêts à prendre ce risque ? On a vu que quand le président Macron avait lancé une sorte de ballon d'essai là-dessus, il s'est plutôt fait taper sur les doigts. Alors est-ce que face au désastre d'un effondrement possible de l'Ukraine, les esprits changeraient ? Peut-être. Mais ça sera, je crois, un peu l'heure de vérité pour l'Europe si Trump est élu.

  • Speaker #3

    Vous sentez qu'il y a une pression grandissante de l'opinion publique américaine pour... Trouvez une solution à cette guerre ?

  • Speaker #0

    Il n'y a pas des morts américains dans cette guerre. L'argument des démocrates, c'est de dire, écoutez, en défendant l'Ukraine, on défend les États-Unis, on n'a pas un soldat sur le terrain, on n'a pas de morts. Finalement, c'est une manière très économique d'affaiblir la Russie. C'est un raisonnement qui a son poids. Cela dit, pour les Américains, et Trump insiste là-dessus, l'Europe est un continent riche. Et qu'il soit nécessaire que les États-Unis aillent faire la sécurité aux confins de l'Europe, à la place des Européens. Il y a beaucoup d'Américains qui se disent que ce n'est plus très raisonnable. Donc je crois qu'il y a une sorte de fatigue générale des États-Unis à l'égard des engagements extérieurs. Ils ont eu l'Irak. Ils ont eu l'Afghanistan, alors là il y avait des soldats américains, là qui sont morts, alors dans des proportions bien moindres que la guerre du Vietnam. Mais malgré tout, l'engagement qui a coûté de l'argent, cette idée que les États-Unis doivent régler tous les problèmes du monde, alors qu'ils ont de grands problèmes intérieurs, que les infrastructures américaines ont besoin de grands travaux, disons, il y a beaucoup d'Américains qui se disent, est-ce que ça vaut vraiment la peine ? En même temps, c'est là qu'il y a une certaine contradiction, je dirais, dans la psychologie américaine. L'idée du leadership reste très importante. Et le leadership, c'est aussi d'avoir une grande puissance militaire. Donc tous les candidats, et Kamala Harris y compris, disent Ah, mais on ne va pas couper les budgets militaires, on va rester très puissants Donc vous avez à la fois la fatigue de l'engagement international et la volonté que les États-Unis maintiennent le drapeau américain haut et fort.

  • Speaker #3

    Je voudrais revenir en guise de dernière question sur quelque chose de très important que vous avez dit à mon sens, c'est la capacité des États-Unis à finalement concevoir un monde multipolaire, et pas simplement un monde où ils sont les leaders. Est-ce qu'aujourd'hui vous voyez des raisons de croire qu'une bascule peut se faire justement dans cette vision américaine du monde ?

  • Speaker #0

    C'est très difficile. Alors évidemment Kamala Harris, elle a un profil intéressant de ce point de vue, d'origine à la fois indienne et jamaïcaine. Elle est multipolaire à sa façon. La plupart des présidents américains, leurs ancêtres, c'était des Européens. Il y a Obama qui compliquait un peu les choses avec le Kenya. Kamala Harris avec l'Inde, qui est justement un des nouveaux pôles de ce monde qui émerge, ou qui a émergé d'ailleurs déjà. C'est une nouveauté. En même temps, et de ce point de vue, le précédent d'Obama est intéressant. Obama, il ne s'est pas tellement intéressé à l'Afrique. Il s'est beaucoup moins intéressé à l'Afrique que Bush, parce qu'il ne voulait pas être classé comme le noir qui s'intéresse à l'Afrique. Il est très possible que Kamala Harris, si elle est élue, fasse le même raisonnement, qu'elle tienne bien à montrer qu'elle est d'abord une Américaine. Mais ça ne l'empêchera pas de comprendre peut-être un peu mieux le fait que le monde... Il est aujourd'hui beaucoup plus compliqué qu'il ne l'était et que les États-Unis doivent jouer là-dessus et doivent essayer de bâtir des alliances avec ces nouveaux acteurs. Je crois qu'aujourd'hui la question du Moyen-Orient est un grand obstacle à cela parce que le reste du monde a du mal à comprendre comment les États-Unis apportent un soutien aussi inconditionnel. à Israël. Et donc, pour se rapprocher du reste du monde, ce sera une raison supplémentaire pour Kamala Harris de montrer qu'elle veut faire quelque chose sur le Moyen-Orient. Ça lui donnerait plus de crédibilité, à mon avis, vis-à-vis de tous ces acteurs émergents.

  • Speaker #3

    Merci beaucoup Jean-Marie Guénon.

  • Speaker #0

    Vous en prie, avec plaisir.

  • Speaker #2

    À la différence de Donald Trump, qui a fait de America First l'Amérique d'abord, la ligne conductrice de sa politique étrangère, La philosophie de Kamala Harris reste mal définie. Avant de devenir vice-présidente, elle n'avait presque aucune expérience internationale. Elle l'a étoffée bien sûr aux côtés de Joe Biden ces quatre dernières années. Mais si l'on en croit un récent sondage du think tank Cato Institute, la majeure partie des électeurs dans trois États-clés pour la présidentielle, Pennsylvanie, le Wisconsin et le Michigan, pensent que les États-Unis sont au bord de la Troisième Guerre mondiale et font davantage confiance à Donald Trump pour gérer la politique internationale du pays. Merci d'avoir suivi cet épisode de C'est ça l'Amérique. On se retrouve la semaine prochaine.

  • Speaker #0

    C'est ça l'Amérique, un podcast proposé par La Croix, le programme Alliance Columbia et le site d'information French Morning.

  • Speaker #1

    Pour être présidente pour tous les Américains, vous pouvez toujours m'assurer de mettre le pays en avant, la partie et moi-même.

Chapters

  • Les électeurs américains s'intéressent-ils vraiment à la politique étrangère des États-Unis ?

    03:27

  • Kamala Harris inspire-t-elle confiance dans sa capacité à assurer le leadership des États-Unis sur la scène internationale ?

    05:12

  • Des électeurs démocrates arabes du Michigan ont annoncé qu'ils ne voteront pas pour Kamala Harris, est-ce un danger pour elle ?

    06:04

  • Kamala Harris est-elle plus sensible que Joe Bident à la cause palestienne ?

    07:04

  • Est-il naïf de penser que la politique de livraison d'armes à Israël changerait si Kamala Harris était élue présidente ?

    09:08

  • Qu'est-ce que Kamala Harris ferait différemment de Joe Biden dans les rapports des États-Unis avec Israël ?

    10:37

  • Joe Biden a-t-il une part de responsabilité dans l'escalade du conflit au Proche-Orient ?

    12:06

  • Donald Trump pourrait-il vraiment changer quelque chose à cette situation s'il était élu président ?

    13:32

  • Quelles sont les grandes menaces auxquelles les États-Unis devront faire face dans les années qui viennent ?

    15:14

  • Que se passerait-il en Ukraine si Donald Trump était élu président ?

    19:33

  • Y a-t-il une pression grandissante de l'opinion publique américaine pour trouver une solution à la guerre en Ukraine ?

    21:42

  • Les États-Unis ont-ils la capacité à concevoir le monde comme multipolaire, et pas simplement un monde où ils seraient les leaders ?

    23:33

Description

C’est ça l’Amérique, saison 3


Alors que Donald Trump mise sur l’image d’un monde en désordre sous l’administration Biden-Harris, dans quelle mesure les conflits mondiaux comme la guerre en Ukraine et au Proche-Orient influenceront-ils le résultat de l’élection américaine ?


Épisode 6/8 :


D’ordinaire, les électeurs Américains ne se soucient guère des questions de politique étrangère quand ils se rendent aux urnes. En sera-t-il autrement pour l’élection de 2024 ? Entre la guerre en Ukraine, la peur de la menace chinoise, et le conflit au Proche-Orient qui empoisonne la présidence Biden, il est impossible d’ignorer le contexte international explosif. Donald Trump en joue en arguant que les États-Unis sont au bord de "la troisième guerre mondiale". Kamala Harris pourrait également être lâchée par la communauté arabo-américaine du Michigan, un électorat assez important pour lui faire perdre ce "swing state" décisif dans la course à la Maison-Blanche.


Comment les crises qui ont marqué la présidence Biden vont-elles peser sur le scrutin du 5 novembre ? Pour ce sixième épisode de "C’est ça l’Amérique", Alexis Buisson, correspondant de "La Croix" à New York, a rencontré Jean-Marie Guéhenno, professeur à l’université Columbia et ancien secrétaire général adjoint au Département des opérations de maintien de la paix aux Nations Unies.


CRÉDITS :


Écriture et réalisation : Alexis Buisson. Rédaction en chef : Jean-Christophe Ploquin et Paul De Coustin. Production : Célestine Albert-Steward. Mixage : Flavien Edenne. Musique : Emmanuel Viau. Illustration : Olivier Balez.


► Vous avez une question ou une remarque ? Écrivez-nous à cette adresse : podcast.lacroix@groupebayard.com


"C'est ça l'Amérique" est un podcast original de LA CROIX - Octobre 2024.


En partenariat avec le programme Alliance – Columbia et ses partenaires (Sciences-Po, Polytechnique, La Sorbonne), et French Morning, le premier web magazine des Français d’Amérique.


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Kamala !

  • Speaker #1

    It will make the world stronger. Because I believe everyone has a right to safety, to dignity.

  • Speaker #2

    Bonjour, je suis Alexis Buisson,

  • Speaker #3

    le correspondant de La Croix à New York.

  • Speaker #2

    Bienvenue dans C'est ça l'Amérique, le podcast qui explore les enjeux des élections américaines de 2024.

  • Speaker #1

    I know where the United States belongs. Kamala !

  • Speaker #2

    Chaque semaine et jusqu'au scrutin, Découvrez les éclairages d'experts francophones établis aux États-Unis.

  • Speaker #0

    C'est ça l'Amérique et ça commence maintenant.

  • Speaker #2

    On commence cet épisode de ces salles américaines dans la cour d'un hôtel du Michigan. J'ai en face de moi un homme en colère. Il s'agit d'Assan Abdel Salam, un professeur à l'université du Minnesota. Comme beaucoup d'Arabes et musulmans américains, il cherche par tous les moyens à mettre un terme à ce qu'il appelle le génocide commis par Israël au Proche-Orient. Il est l'un des fondateurs du mouvement Abandon Harris. qui vise à couler la candidature de la vice-présidente. Il appelle en effet les électeurs arabes et musulmans, qui sont majoritairement démocrates, à voter pour un candidat tiers en novembre, en l'occurrence l'écologiste Jill Stein. Ce n'est pas un hasard s'il est aujourd'hui dans le Michigan, c'est l'un des swing states de l'élection, l'un des états décisifs de cette présidentielle. En 2020, Joe Biden l'avait remporté de 160 000 voix, mais les électeurs arabes représentent 300 000 personnes. S'ils se détournent tous de la démocrate, Cela pourrait rendre le chemin de Kamala Harris vers la Maison-Blanche plus compliqué, tout en faisant comprendre au parti républicain qu'il doit écouter la communauté arabe et le mouvement anti-guerre. Hassan Abdel Salah. Notre stratégie, comme vous le savez, est troisfold. Premièrement, nous voulons punir le président et la vice-présidente pour leur génocide. Deuxièmement, nous voulons être vus comme les responsables de leur défaite après les avoir mis au pouvoir en 2020. Et enfin... Nous souhaitons utiliser notre pouvoir pour nous assurer qu'il n'y ait plus jamais de génocide. Nous voulons que les élections soient le plus serrées possible dans les États bascules, les swing states, pour montrer à tout le monde que nous avons fait la différence et que le Parti démocrate a fait une grosse erreur en nous ignorant encore et encore. Ils n'auront pas d'autre choix que d'adopter un programme pro-palestinien et anti-génocide. Dans ce sixième épisode de C'est ça l'Amérique, nous nous intéressons à la façon dont les conflits à l'étranger peuvent peser sur le scrutin de novembre. J'ai tendu mon micro à Jean-Marie Guéhenno, professeure à l'Université Columbia et ancien secrétaire général adjoint au département des opérations de maintien de la paix aux Nations Unies.

  • Speaker #3

    Bonjour Jean-Marie Guéhenno.

  • Speaker #0

    Bonjour.

  • Speaker #3

    Merci beaucoup de nous accueillir ici pour parler politique étrangère des États-Unis. Alors, il y a un peu un paradoxe finalement quand on s'intéresse aux élections américaines. Les États-Unis sont bien sûr la première puissance économique, diplomatique, militaire. mondiale, mais les Américains eux-mêmes s'intéressent très peu à la politique étrangère. Ce n'est pas vraiment un sujet de préoccupation pour eux. Je me demandais si vous pensiez que cette année, ça serait peut-être différent avec les crises que l'on voit au Proche-Orient ou en Ukraine, ou la menace chinoise qui s'accroît.

  • Speaker #0

    Je crois que l'élection de cette année, elle se jouera quand même d'abord sur la politique intérieure, sur l'état de l'économie. Cela dit, les crises internationales qu'on voit en ce moment peuvent avoir un impact Non pas que les Américains aient nécessairement une préférence sur une ligne politique pour un candidat ou pour un autre, mais parce que ce qui se joue, je pense, dans une élection présidentielle américaine, c'est l'idée que les Américains se font de la capacité de leadership d'un président. Et le risque là, c'est que Trump apparaisse comme quelqu'un de fort, qui ne se laisse pas bousculer. Kamala Harris a montré dans le débat avec Trump qu'elle savait tout à fait... tenir, mais malgré tout, elle n'a pas cette image, d'une certaine manière, heureusement pour elle, de brutalité de Trump. Je pense que si la situation internationale se détériore encore plus qu'elle n'est déjà détériorée aujourd'hui, s'il y a une escalade massive, par exemple, au Proche-Orient, qui devait entraîner les États-Unis dans une nouvelle guerre au Proche-Orient, je crois que ça, ça jouerait très fortement en faveur de Trump.

  • Speaker #3

    Même si elle est vice-présidente, elle reste dans l'ombre. de Joe Biden, c'est un peu la nature du poste. Du coup, vous pensez que c'est plus difficile, d'une certaine manière, pour elle, de montrer ses capacités de leadership dont vous parlez ?

  • Speaker #0

    Je crois que oui, tout vice-président, évidemment, est un peu dans l'ombre et ne peut pas se démarquer trop de la politique de Biden. Donc là, elle est un peu condamnée à défendre l'héritage. Mais je ne crois pas que ce soit le plus grand problème, parce que l'héritage de Biden, c'est un débat pour experts. plus qu'un débat pour le grand public américain. Ce qui compte, c'est l'image qu'on projette d'un leader, ou au contraire de quelqu'un qui peut se faire bousculer par les leaders étrangers.

  • Speaker #3

    Quand on voit par exemple qu'il y a des électeurs arabes dans le Michigan, qui est un état très important pour cette élection présidentielle, un des swing states de cette élection présidentielle, et qui disent qu'ils vont essayer de faire perdre Kamala Harris, ne pas voter pour elle, alors que ce sont des électeurs qui sont très démocrates, selon vous c'est un souci pour elle ? C'est un danger ?

  • Speaker #0

    Je pense que ça c'est un vrai souci, parce que évidemment avec le système électoral américain, l'élection se joue sur une poignée d'états, et le Michigan se trouve être l'un d'eux. C'est le seul État des États-Unis où il y a une forte communauté d'origine arabe. Et tous les reportages qu'on lit sur le Michigan montrent que le soutien très fort des États-Unis à Israël va nuire à Kamala Harris. Mais elle est obligée de se tenir à la ligne officielle, à la fois parce qu'elle est la vice-présidente et parce qu'à l'échelle des États-Unis, il y a quand même beaucoup plus de soutien pour Israël. que pour les Palestiniens.

  • Speaker #3

    Elle donne l'impression, en tout cas elle a donné l'impression dans le passé, d'être plus sensible à la cause palestinienne. Et quand elle est devenue candidate, il y a beaucoup de militants pro-palestiniens qui disaient tiens, elle est plus sensible à notre cause que Joe Biden Est-ce qu'aujourd'hui vous pensez que c'est le cas ?

  • Speaker #0

    Je crois qu'elle est plus sensible, mais elle ne peut pas trop le montrer parce qu'elle perdrait sur l'aile pro-israélienne de l'électorat et elle ne peut pas prendre ce risque. Kamala, tu es en train de se tuer,

  • Speaker #1

    sort de là ! Et comment il utiliserait les puissances immenses de la présidence des États-Unis ?

  • Speaker #2

    Avant de poursuivre la conversation, arrêtons-nous sur l'une des revendications des défenseurs de la cause palestinienne. Ces derniers réclament la fin des livraisons d'armes américaines à Israël. Ils mettent notamment en avant l'existence d'une loi américaine appelée LIHI, du nom de son auteur, le sénateur démocrate Patrick LIHI. Le texte prohibe la livraison d'armes à des unités militaires qui commettent des entorses aux droits humanitaires. Or, d'après le sénateur et d'autres élus et militants, les contrôles prévus dans la loi ne s'appliquent pas. à Israël à l'heure actuelle. Stopper les ventes d'armes à l'État hébreu est cependant plus facile à dire qu'à faire quand on sait qu'une grande partie des armes envoyées découlent d'un protocole d'accord contraignant sur le plan légal qui oblige les États-Unis à donner chaque année pendant 10 ans des milliards de dollars à Israël en assistance militaire. Le dernier accord en date a été signé en 2016 et promet quelques 38 milliards de dollars d'aides sur la décennie. L'écrasante majorité de cette somme est transférée régulièrement à Israël, qui à son tour s'en sert pour acheter les armes et les équipements dont elle a besoin aux Etats-Unis. La position officielle de Washington demeure que son allié a le droit de se défendre après l'attaque terroriste du Hamas le 7 octobre 2023, mais doit limiter autant que possible les morts et les blessures de civils. Jean-Marie Guéhenno, est-il naïf de penser que la politique de livraison d'armes à Israël changerait si Kamala Harris est élue présidente ?

  • Speaker #0

    Non, je pense que la politique évoluerait. Tous les présidents américains, enfin pas toujours, mais depuis les années 60, ont été très pro-israéliens. Ils ne l'ont pas toujours été parce qu'au moment, par exemple, de la crise de Suez, c'était la France qui était aux côtés d'Israël. Les États-Unis ont dit à la France et la Grande-Bretagne Arrêtez, vous en faites trop pas dire que c'est une constante américaine d'être aux côtés d'israël mais depuis plusieurs décennies c'est le cas et by donne est sans doute le plus pro israélien des présidents américains par son histoire par ses relations personnelles avec un certain nombre de responsables israéliens donc je crois que par rapport à ce qu'on voit de la politique de by donne j'ai lu que cette année les états unis ont livré en dollars constants plus d'armement qui n'en ont jamais livré à Israël. Donc le soutien à Israël est considérable aux États-Unis, malgré en même temps une demande à Israël de se modérer, mais les actes contredisent un peu ces demandes, lesquelles les États-Unis ne font pas de pression vraiment concrète sur Israël. Je pense que si Kamala Harris est élue, Il y aura probablement une évolution, mais pas une révolution, parce que pour la majorité des Américains, Israël reste quand même un partenaire privilégié au Proche-Orient.

  • Speaker #3

    Qu'est-ce qu'une présidente Kamala Harris ferait différemment finalement de Joe Biden ? Vous parliez d'évolution, pas de révolution. Est-ce que c'est le ton qui changerait peut-être vis-à-vis de Netanyahou ou d'autres aspects des rapports avec Israël ?

  • Speaker #0

    Je pense qu'il y aurait peut-être de nouveau un effort. pour relancer un processus diplomatique, pour arriver à deux états, pour arriver à une solution qui donne aux Palestiniens une vraie souveraineté politique. Je crois que cet effort avait été en fait jusqu'à l'attaque terroriste du 7 octobre. de l'année dernière. Cet effort avait été abandonné. L'administration américaine se disait qu'il y avait plus de coûts à prendre que de prix Nobel à gagner et donc il n'y avait pas d'efforts sérieux. Je crois qu'il pourrait y avoir un certain effort de l'administration. américaine dans cette direction. Mais en même temps, il ne faut pas se faire trop d'illusions. Tout ça dépendra d'abord de l'évolution en Israël, avec le gouvernement israélien tel qu'il est, et au-delà de ce gouvernement, avec le déplacement du centre de gravité politique d'Israël vers la droite, voire l'extrême droite, les partisans d'une solution à deux États sont très minoritaires aujourd'hui. Et la situation sur le terrain, rend cette solution, elle a toujours été difficile, mais elle est encore plus difficile aujourd'hui qu'elle ne l'était il y a 20 ans ou 15 ans, quand les dernières négociations sérieuses se sont engagées.

  • Speaker #3

    On a l'impression que Joe Biden renvoie une image un peu d'impuissance face à Netanyahou, face à cette situation qui escalade au Proche-Orient. Est-ce que c'est juste, selon vous, de dire qu'il a une part de responsabilité dans l'escalade qu'on en voit aujourd'hui ?

  • Speaker #0

    L'impuissance américaine, effectivement, elle est éclatante. Je crois que ce n'est pas une bonne nouvelle, parce que ça permet à toutes sortes d'acteurs de jouer un jeu qui est souvent plus le jeu de la puissance et de la guerre que le jeu de la paix. Est-ce qu'une Amérique... plus forte, plus affirmative, aurait pu vraiment changer le cours des choses. Je pense que quand même le cœur du sujet, il est dans l'évolution politique d'Israël, qui à chaque vague d'attentats terroristes, à glisser un peu plus vers la droite. Et ça, toutes les études d'opinion sur Israël le montrent. Le terrorisme ne convainc pas les Israéliens qu'il faut aller vers une solution politique, il les convainc qu'il faut dominer et intimider. dire c'est un peu la réaction de tous les pays quand il ya eu le 11 septembre ici aux états unis bas les états unis se sont durcies internationalement sur le terrorisme quand il ya eu des attentats terroristes en france même chose le terrorisme pousse vers des régimes de disons où la force l'emportent sur la négociation ce qu'un président trump

  • Speaker #3

    Changerait quelque chose finalement à ce dossier qui, comme vous le dites, dépend avant tout de la situation intérieure à Israël ?

  • Speaker #0

    Moi, je pense que non. Je pense que Trump, sa vision des choses, c'est une vision qui n'est pas très éloignée de celle des dirigeants israéliens actuels. Quand il a poussé aux accords d'Abraham, au fond, c'est l'idée que la sécurité d'Israël, on normalise les relations avec les États. Et puis les Palestiniens, on les passe un peu par... pertes et profits. Je crois que ça a été ça la réalité des accords d'Abraham parce que la plupart des États arabes, à vrai dire, seraient très contents si Israël pouvait complètement écraser le Hamas. Le Hamas, c'est au départ une branche des frères musulmans. Les frères musulmans, c'est ce que le régime égyptien déteste le plus aujourd'hui. C'est ce que les Émirats arabes unis détestent, l'Arabie saoudite également. Si cette solution était possible, si on pouvait complètement oublier les Palestiniens, ça satisferait beaucoup d'acteurs régionaux. Ça ne satisferait peut-être pas une partie significative des peuples de la région, mais ça satisferait leurs dirigeants. C'est ça la logique de Netanyahou. Je crois que ce serait la logique de Trump. Quel serait le résultat ultime ? Je pense que ce serait une recrudescence à terme. Du terrorisme, même si le Hezbollah, même si le Hamas s'était écrasé, on ne peut pas passer par pertes et profits un peuple qui a montré son endurance.

  • Speaker #3

    Quoi qu'il en soit, le locataire de la Maison-Blanche va changer en janvier après l'investiture. Ce sera soit Donald Trump, soit Kamala Harris. Je voudrais qu'on se projette peut-être un peu sur les quatre années qui viennent. Quelles sont selon vous les grandes menaces auxquelles les États-Unis devront faire face, auxquelles ce nouveau commandant en chef devra se préparer ?

  • Speaker #0

    Je dirais plus loin que menaces. Quels sont les grands changements dans l'équilibre du monde auxquels les États-Unis doivent se préparer ? Je crois que ce changement est déjà en cours. C'est le fait que les États-Unis restent de loin la première puissance militaire du monde. Leur budget militaire écrase tous ceux de leurs concurrents, de leurs adversaires. Et quand on ajoute au budget militaire des États-Unis le budget de leurs alliés, à ce moment-là, la domination est encore plus écrasante. Mais en même temps, politiquement, les États-Unis ne sont plus le modèle incontesté. On parlait du monde multipolaire déjà dans les années 80. Il n'était pas multipolaire, il était bipolaire. Ensuite, on a eu un monde unipolaire avec l'effondrement de l'Union soviétique. Aujourd'hui, on est vraiment en train de voir apparaître un monde multipolaire. Et donc, pour un président américain ou pour une présidente américaine, le grand défi, c'est un défi presque d'identité. Est-ce que les États-Unis peuvent se penser autrement que comme le numéro un ? et accepter que sur beaucoup de sujets, il faut négocier, il faut faire des compromis avec d'autres qui n'ont pas forcément la même vision des choses. Je dirais que c'est devenu un peu le code génétique des Européens, parce qu'on vit ensemble, on s'est tapé dessus pendant des siècles, et on comprend qu'aujourd'hui, on est obligé de s'entendre. Les États-Unis ont une autre histoire, et donc le mot que... tous les dirigeants américains, sans exception emploi, c'est leadership. Et donc, les autres sont derrière. Et demain, ça va être de plus en plus difficile. Et ça va être de plus en plus difficile. Sur le dossier qui préoccupe le plus les États-Unis, c'est celui de la Chine. L'ambiguïté de la position américaine sur la Chine, c'est qu'on ne sait pas si vraiment leur peur, c'est que demain, il y a une guerre avec la Chine, donc il faut s'y préparer. Ou si c'est simplement que la Chine devienne leur égale. Ce qu'elle est loin d'être aujourd'hui, malgré tout. Mais il y a cette inquiétude que la Chine, c'est aujourd'hui un modèle pour beaucoup de pays. Attoro a raison, mais c'est un modèle. Et donc ça, c'est une révolution psychologique. Alors pour faire face à la Chine, je crois que si c'est Kamala Harris, le pivot vers l'Asie, comme on dit aux États-Unis, sera un pivot nuancé. Parce qu'elle aura un certain nombre de ses conseillers, notamment Phil Gordon. qui est un spécialiste de l'Europe et qu'on dit proche de Kamala Harris, un certain nombre de ses conseillers lui diront Oui, la Chine, c'est peut-être le défi numéro un, mais aborder la Chine sans l'appui des Européens, ce n'est pas la politique la plus intelligente. Donc il faut mettre les Européens dans notre jeu. Et là, je vois de sérieuses difficultés possibles dans les relations entre les États-Unis et l'Europe. Parce que l'Europe dépend beaucoup aujourd'hui des États-Unis pour le soutien à l'Ukraine. L'Europe dépense plus que les États-Unis sur l'Ukraine, ça n'est pas assez dit. Mais militairement, malgré tout, les États-Unis sont de loin l'élément crucial du soutien à l'Ukraine. Et donc les États-Unis sont en position de force pour dire aux Européens, écoutez, on vous appuie sur l'Ukraine, mais il faut globaliser l'Alliance Atlantique. La question de la Chine, c'est une question pour vous autant que pour nous. Les Européens ont évolué là-dessus. Ils se rendent compte que les Chinois ont tendance à piller leur technologie, à faire une concurrence déloyale. On voit les réactions en Europe sur les véhicules électriques, etc. Mais malgré tout... Ils ne sont pas sur la ligne américaine aujourd'hui. Ils ont quand même envie de garder une relation beaucoup plus positive avec la Chine que les États-Unis.

  • Speaker #3

    Vous avez mentionné l'Ukraine, c'est bien sûr un sujet très important pour nous, Européens. Si Donald Trump repasse et qu'il est réélu en novembre, qu'est-ce qui se passe selon vous en Ukraine ?

  • Speaker #0

    Je crois que si Donald Trump est élu, ça c'est une très mauvaise nouvelle pour l'Ukraine. Je crois qu'il sera assez brutal. dans sa volonté de se dégager. Il est convaincu qu'il peut faire la paix en Ukraine, mais je crois que la manière dont il pense la faire, c'est sur le dos des Ukrainiens. Donc là, se posera une question un peu existentielle pour les Européens. C'est-à-dire qu'on voit bien, on se rapproche d'un moment de négociation avec la Russie, parce que l'Ukraine est épuisée aussi. Il n'a pas les mêmes ressources humaines que la Russie. Ces villes sont de plus en plus dévastées. Donc on se rapproche d'un moment de négociation. Mais est-ce que cette négociation sera une sorte de capitulation ? Ou est-ce qu'elle sauvegarde la possibilité d'un pays indépendant ? Je crois que sur la question de la ligne de cesser le feu, parce que je n'imagine pas un accord de paix, j'imagine un cesser le feu, il est bien possible qu'on finisse par arriver à une situation où l'Ukraine ne récupère pas non seulement les territoires qu'il a perdus en 2014, mais même une bonne partie de ceux qui ont été élu. que la Russie a gagné depuis. Si c'est le cas, mais que l'Ukraine a des très solides garanties de sécurité, à ce moment-là, d'une certaine manière, quelque chose est sauvé. Mais l'Ukraine voudra sans doute avoir la présence de troupes sur son territoire qui garantissent les engagements de sécurité qui auront été pris. Alors les Américains, à mon avis, n'auront aucune envie de cela, même les démocrates. Trump, c'est totalement exclu. Est-ce que les Européens seront prêts à prendre ce risque ? On a vu que quand le président Macron avait lancé une sorte de ballon d'essai là-dessus, il s'est plutôt fait taper sur les doigts. Alors est-ce que face au désastre d'un effondrement possible de l'Ukraine, les esprits changeraient ? Peut-être. Mais ça sera, je crois, un peu l'heure de vérité pour l'Europe si Trump est élu.

  • Speaker #3

    Vous sentez qu'il y a une pression grandissante de l'opinion publique américaine pour... Trouvez une solution à cette guerre ?

  • Speaker #0

    Il n'y a pas des morts américains dans cette guerre. L'argument des démocrates, c'est de dire, écoutez, en défendant l'Ukraine, on défend les États-Unis, on n'a pas un soldat sur le terrain, on n'a pas de morts. Finalement, c'est une manière très économique d'affaiblir la Russie. C'est un raisonnement qui a son poids. Cela dit, pour les Américains, et Trump insiste là-dessus, l'Europe est un continent riche. Et qu'il soit nécessaire que les États-Unis aillent faire la sécurité aux confins de l'Europe, à la place des Européens. Il y a beaucoup d'Américains qui se disent que ce n'est plus très raisonnable. Donc je crois qu'il y a une sorte de fatigue générale des États-Unis à l'égard des engagements extérieurs. Ils ont eu l'Irak. Ils ont eu l'Afghanistan, alors là il y avait des soldats américains, là qui sont morts, alors dans des proportions bien moindres que la guerre du Vietnam. Mais malgré tout, l'engagement qui a coûté de l'argent, cette idée que les États-Unis doivent régler tous les problèmes du monde, alors qu'ils ont de grands problèmes intérieurs, que les infrastructures américaines ont besoin de grands travaux, disons, il y a beaucoup d'Américains qui se disent, est-ce que ça vaut vraiment la peine ? En même temps, c'est là qu'il y a une certaine contradiction, je dirais, dans la psychologie américaine. L'idée du leadership reste très importante. Et le leadership, c'est aussi d'avoir une grande puissance militaire. Donc tous les candidats, et Kamala Harris y compris, disent Ah, mais on ne va pas couper les budgets militaires, on va rester très puissants Donc vous avez à la fois la fatigue de l'engagement international et la volonté que les États-Unis maintiennent le drapeau américain haut et fort.

  • Speaker #3

    Je voudrais revenir en guise de dernière question sur quelque chose de très important que vous avez dit à mon sens, c'est la capacité des États-Unis à finalement concevoir un monde multipolaire, et pas simplement un monde où ils sont les leaders. Est-ce qu'aujourd'hui vous voyez des raisons de croire qu'une bascule peut se faire justement dans cette vision américaine du monde ?

  • Speaker #0

    C'est très difficile. Alors évidemment Kamala Harris, elle a un profil intéressant de ce point de vue, d'origine à la fois indienne et jamaïcaine. Elle est multipolaire à sa façon. La plupart des présidents américains, leurs ancêtres, c'était des Européens. Il y a Obama qui compliquait un peu les choses avec le Kenya. Kamala Harris avec l'Inde, qui est justement un des nouveaux pôles de ce monde qui émerge, ou qui a émergé d'ailleurs déjà. C'est une nouveauté. En même temps, et de ce point de vue, le précédent d'Obama est intéressant. Obama, il ne s'est pas tellement intéressé à l'Afrique. Il s'est beaucoup moins intéressé à l'Afrique que Bush, parce qu'il ne voulait pas être classé comme le noir qui s'intéresse à l'Afrique. Il est très possible que Kamala Harris, si elle est élue, fasse le même raisonnement, qu'elle tienne bien à montrer qu'elle est d'abord une Américaine. Mais ça ne l'empêchera pas de comprendre peut-être un peu mieux le fait que le monde... Il est aujourd'hui beaucoup plus compliqué qu'il ne l'était et que les États-Unis doivent jouer là-dessus et doivent essayer de bâtir des alliances avec ces nouveaux acteurs. Je crois qu'aujourd'hui la question du Moyen-Orient est un grand obstacle à cela parce que le reste du monde a du mal à comprendre comment les États-Unis apportent un soutien aussi inconditionnel. à Israël. Et donc, pour se rapprocher du reste du monde, ce sera une raison supplémentaire pour Kamala Harris de montrer qu'elle veut faire quelque chose sur le Moyen-Orient. Ça lui donnerait plus de crédibilité, à mon avis, vis-à-vis de tous ces acteurs émergents.

  • Speaker #3

    Merci beaucoup Jean-Marie Guénon.

  • Speaker #0

    Vous en prie, avec plaisir.

  • Speaker #2

    À la différence de Donald Trump, qui a fait de America First l'Amérique d'abord, la ligne conductrice de sa politique étrangère, La philosophie de Kamala Harris reste mal définie. Avant de devenir vice-présidente, elle n'avait presque aucune expérience internationale. Elle l'a étoffée bien sûr aux côtés de Joe Biden ces quatre dernières années. Mais si l'on en croit un récent sondage du think tank Cato Institute, la majeure partie des électeurs dans trois États-clés pour la présidentielle, Pennsylvanie, le Wisconsin et le Michigan, pensent que les États-Unis sont au bord de la Troisième Guerre mondiale et font davantage confiance à Donald Trump pour gérer la politique internationale du pays. Merci d'avoir suivi cet épisode de C'est ça l'Amérique. On se retrouve la semaine prochaine.

  • Speaker #0

    C'est ça l'Amérique, un podcast proposé par La Croix, le programme Alliance Columbia et le site d'information French Morning.

  • Speaker #1

    Pour être présidente pour tous les Américains, vous pouvez toujours m'assurer de mettre le pays en avant, la partie et moi-même.

Chapters

  • Les électeurs américains s'intéressent-ils vraiment à la politique étrangère des États-Unis ?

    03:27

  • Kamala Harris inspire-t-elle confiance dans sa capacité à assurer le leadership des États-Unis sur la scène internationale ?

    05:12

  • Des électeurs démocrates arabes du Michigan ont annoncé qu'ils ne voteront pas pour Kamala Harris, est-ce un danger pour elle ?

    06:04

  • Kamala Harris est-elle plus sensible que Joe Bident à la cause palestienne ?

    07:04

  • Est-il naïf de penser que la politique de livraison d'armes à Israël changerait si Kamala Harris était élue présidente ?

    09:08

  • Qu'est-ce que Kamala Harris ferait différemment de Joe Biden dans les rapports des États-Unis avec Israël ?

    10:37

  • Joe Biden a-t-il une part de responsabilité dans l'escalade du conflit au Proche-Orient ?

    12:06

  • Donald Trump pourrait-il vraiment changer quelque chose à cette situation s'il était élu président ?

    13:32

  • Quelles sont les grandes menaces auxquelles les États-Unis devront faire face dans les années qui viennent ?

    15:14

  • Que se passerait-il en Ukraine si Donald Trump était élu président ?

    19:33

  • Y a-t-il une pression grandissante de l'opinion publique américaine pour trouver une solution à la guerre en Ukraine ?

    21:42

  • Les États-Unis ont-ils la capacité à concevoir le monde comme multipolaire, et pas simplement un monde où ils seraient les leaders ?

    23:33

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