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Le cartel des panneaux - Episode 1 - La bible du cartel cover
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Cartels & Cie

Le cartel des panneaux - Episode 1 - La bible du cartel

Le cartel des panneaux - Episode 1 - La bible du cartel

11min |10/07/2024
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Le cartel des panneaux - Episode 1 - La bible du cartel

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11min |10/07/2024
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Description

8 fabricants leaders dans le secteur de la fourniture et de la pose de panneaux de signalisation se sont entendus aux dépens de l’État et des collectivités locales pendant près de 10 ans. Et sur une durée plus longue pour deux d’entre eux Les entreprises ont dû s’acquitter de 52,7 millions d’euros d’amende.


Cartels & Cie est une série de podcasts, proposée par l’Autorité de la concurrence, qui revient sur des grandes affaires de lutte contre les pratiques anticoncurrentielles en France. Cette première saison revient sur trois grands cartels, qui se déclinent en 2 ou 3 épisodes.

Les affaires sont restituées au travers du récit d’une journaliste, Isabelle Souquet, ainsi que de nombreux témoignages de personnes travaillant à l’Autorité de la concurrence et d’acteurs publics et privés.  

 

RÉSUMÉ DE L’AFFAIRE

Entre 1997 et 2006, 8 entreprises ont régné sur tout un secteur en s’entendant sur les prix et en se répartissant la quasi-totalité des marchés publics lancés en France. C’est une perquisition, menée lors d’une réunion du « club » dans un grand restaurant parisien, qui a mis au jour le cartel.

Au cours de réunions régulières, les membres se répartissaient les marchés, fixaient les prix et les remises qui pouvaient être consenties aux acheteurs, selon des modalités formalisées dans un document intitulé « Règles ». Chaque société était tenue de respecter ces dernières sous peine de se voir infliger des pénalités financières. Une fois le cartel démasqué, les prix ont immédiatement fortement chuté. A la suite de la décision de l’Autorité, plusieurs départements ont obtenu des indemnisations à l’issue d’actions en réparation introduites auprès des tribunaux.

Épisode 1 : La bible du cartel 

Épisode 2 : Flagrant délit au restaurant

 

TÉMOIGNAGES PAR ORDRE D’APPARITION

  • Stanislas Martin, rapporteur général à l’Autorité de la concurrence

  • Irène Luc, magistrate et vice-présidente de l’Autorité de la concurrence

  • Virginie Beaumeunier, anciennement rapporteure générale de l’Autorité de la concurrence

  • Frédéric Farigoule, directeur de la gestion des routes au Conseil départemental de l’Orne

 

DÉCISION INTÉGRALE 

https://www.autoritedelaconcurrence.fr/sites/default/files/commitments//10d39.pdf

 

COMMUNIQUÉ DE PRESSE 

https://www.autoritedelaconcurrence.fr/fr/communiques-de-presse/lautorite-de-la-concurrence-sanctionne-un-cartel-dans-le-secteur-des-panneaux

 

RECOURS ET POURVOIS

Cette décision est définitive, les juridictions de contrôle ont confirmé la décision sur le fond. La sanction a été réduite par la Cour d’appel de Paris.

 

POUR ALLER PLUS LOIN 

Consultez la rubrique sur notre mission contentieuse : https://www.autoritedelaconcurrence.fr/fr/competence-contentieuse

Consultez les chiffres clés de l’Autorité : https://www.autoritedelaconcurrence.fr/fr/chiffres-cles

 

SUIVEZ-NOUS SUR

  • Instagram : @autoritedelaconcurrence

  • X : @adlc_

  • LinkedIn : @Autorité de la concurrence

 

Cette série constitue un support pédagogique qui a vocation à informer le grand public. La présentation des cartels concernés ne prétend pas à l’exhaustivité et les témoignages recueillis peuvent par ailleurs manquer de précision ou emprunter certains raccourcis de langage. L’Autorité invite les auditeurs à consulter les décisions dans leur version intégrale ainsi que les arrêts des juridictions de contrôle, le cas échéant, pour apprécier de façon exacte le contexte et la portée des informations présentées.

 

Transcription

  • Speaker #0

    Ce podcast vous est proposé par l'Autorité de la concurrence. L'Autorité de la concurrence est une autorité administrative indépendante chargée notamment de sanctionner les pratiques anticoncurrentielles. On l'appelle aussi le gendarme de la concurrence. Vous écoutez Cartel et compagnie, un podcast sur de grandes affaires de fraude économique française. Je m'appelle Isabelle Souquet, je suis journaliste. Et dans cette série en huit épisodes, je vous emmène dans les coulisses des enquêtes de l'autorité de la concurrence, au cœur de scandales qui impliquent des entreprises mondiales. J'ai décidé de vous raconter les mécanismes des cartels, ces accords secrets de grande envergure qui ont des conséquences préjudiciables directes sur nous, les consommateurs, sur le prix final de certains produits que l'on achète régulièrement, et même sur les impôts que nous payons. Vous entendrez également le témoignage de ceux qui luttent au quotidien contre ces tricheries et ces manipulations de marché. Troisième enquête, le cartel des panneaux. Je vais vous raconter comment les plus grands fabricants de panneaux de signalisation sont parvenus à prendre la main sur des centaines de marchés publics à travers la France et à régner en maître sur l'ensemble du secteur. Épisode 1, la bible du cartel.

  • Speaker #1

    Stop, interdit de tourner à droite ou tout simplement destination X, Y kilomètres, tous ces panneaux qui constituent le cadre de la vie moderne, savez-vous qu'ils sont une industrie locale florissante ? Florissante à un point tel que l'usine actuelle de Saint-André-de-Nice s'avère trop petite et s'implante dans la zone industrielle de Caroz.

  • Speaker #0

    Les panneaux routiers sont depuis longtemps un enjeu économique crucial pour les industriels. Dès les années 1910, la marque de pneus Michelin conçoit et offre des panneaux aux municipalités. A l'époque, ils sont en béton armé. Puis Citroën offre à son tour des panneaux routiers à l'État français. Il s'agit de co-marketing, les noms des marques figurent sur les panneaux et sont donc visibles par tous les automobilistes. Dans les années 50, la concurrence s'intensifie sur le marché des panneaux. Les premières autoroutes sont créées. La demande en panneaux augmente et en conséquence, des entreprises de fabrication vont éclore aux quatre coins du territoire pour répondre aux appels d'offres des pouvoirs publics.

  • Speaker #1

    Découpage des tôles, mise en forme sous presse de 400 tonnes, décapage, métallisation, peinture spéciale. Une main d'œuvre plus importante du matériel modernisé à 50% est répartie dans des conditions assurant le maximum de commodité et de sécurité. ont permis d'accroître de 50% la production de panneaux de signalisation.

  • Speaker #0

    Aujourd'hui, la majorité des panneaux de signalisation est commandée et achetée par les collectivités qui gèrent les routes, les départements et les communes. Le réseau routier français représente plus d'un million de kilomètres. Ce sont donc plusieurs millions de panneaux de signalisation qui doivent être remplacés ou modifiés régulièrement. C'est donc un marché très important. Pour s'approvisionner au meilleur prix, les collectivités locales passent par un processus classique d'appel d'offres. Mais certaines entreprises vont tout faire pour tirer leur épingle du jeu, quitte à utiliser des pratiques frauduleuses. Huit d'entre elles vont se retrouver au cœur d'une affaire d'entente illicite, un scandale qui fait la une des journaux télévisés un soir d'octobre 2006. On va revenir maintenant sur une affaire qui aurait coûté plus d'un milliard d'euros aux contribuables français pendant dix ans, les huit plus grandes sociétés de signalisation autoroutière, ce n'est pas entendu, pour se partager presque tous les marchés publics et donc gonfler artificiellement les prix. Tout commence en 1997. Plusieurs entreprises de pose et de fourniture de panneaux routiers décident de se répartir les marchés en se mettant d'accord à l'avance sur leurs prix. Il détourne alors complètement le système des appels d'offres. Ces entreprises, leaders du secteur, se sont accordées pour remporter tour à tour des marchés par un mécanisme illégal, les offres de couverture. Le principe est simple, avant de répondre à l'appel d'offres, une entreprise est choisie au sein du cartel pour remporter la mise. Les autres se coordonnent pour proposer des prix plus élevés pour s'assurer que l'entreprise désignée remportera bien le marché. Sous-titrage Société Merci. Bonjour monsieur. Stanislas Martin est rapporteur général à l'autorité de la concurrence. Il m'a expliqué le mécanisme de ces offres de couverture.

  • Speaker #2

    Il y a une entreprise qui est désignée pour obtenir le marché, un prix donné, et ensuite d'autres entreprises. qui sont désignées pour la couvrir, on dit, donc pour faire des offres de couverture, donc qui vont répondre à l'appel d'offres, mais avec des prix plus élevés que celui qui a été désigné par le cartel pour remporter le marché. Ce qui se passe, c'est que c'est l'entreprise qui est désignée pour faire le marché qui établit les documents pour le compte de ses concurrents. Ce ne sont plus vraiment des concurrents, mais pour les comptes d'autres entreprises. Parfois, on peut retrouver la même faute d'orthographe dans le document. Donc, il y a tout un tas de petits indices qui peuvent servir à identifier les offres de couverture.

  • Speaker #0

    Irene Luc, magistrate, est l'une des vice-présidentes de l'autorité de la concurrence. Elle nous précise en quoi ces pratiques sont néfastes. Lorsque des entreprises, avant de répondre à un appel d'offres, se répartissent par avance les marchés en disant « moi je vais te couvrir en faisant une offre supérieure et comme ça tu auras le marché » , par contre, lors du prochain marché, ça sera l'inverse, c'est toi qui me couvriras. On voit bien qu'au final, ce sont les collectivités, et puis au travers des collectivités, l'argent public, qui ont subi les conséquences. Et dans cette affaire, ces conséquences vont perdurer près de dix ans. Il faut dire que le cartel a bâti une organisation très sophistiquée. Absolument tous les cas de figure sont prévus et détaillés dans un document confidentiel et totalement illicite que les membres du cartel surnomment entre eux la Bible.

  • Speaker #2

    Nos collègues de la police judiciaire ont eu beaucoup de chance et ont dû être très contents parce qu'ils sont tombés sur un document que les membres du cartel appelaient la Bible. Et documents qui fixaient les règles de fonctionnement du cartel.

  • Speaker #0

    Stanislas Martin est le rapporteur général de l'autorité de la concurrence.

  • Speaker #2

    Documents qui fixaient des sanctions, des mesures de rétention pour ceux qui déviraient de l'accord du cartel. Et puis qui fixaient les répartitions de marché pour tous les niveaux de communes, les grandes communes, les départements, les plus petites communes, les communes de moins de 5000 habitants. Donc on avait un document finalement qui retracait tout le fonctionnement du cartel.

  • Speaker #0

    Tout est répertorié dans cette Bible. On y trouve en premier lieu les principes généraux qui régissent l'organisation des réunions et la tenue de l'ordre du jour. Un tableau liste aussi spécifiquement les marchés renouvelables et détenus à titre exclusif par chaque entreprise et donc intouchables dans le cadre de l'entente. Chacune sait donc à l'avance quel marché elle obtiendra et à quel prix. Une fois par an, les membres du cartel font les comptes pour vérifier que chacun s'y retrouve. Si un appel d'offres ne se passe pas comme prévu, les membres du cartel ont même convenu d'un système de compensation pour l'entreprise lésée. Et un véritable système de police est même mis en place, puisque si une société s'affranchit des règles définies par le cartel, elle est sanctionnée d'une pénalité financière, selon un système de crédit et de dette au sein même de l'entente. Les membres du cartel ont également établi une liste d'entreprises avec lesquelles il est interdit de collaborer parce qu'elles seraient trop inclines à baisser leur prix pour obtenir des parts de marché. Ces dispositions permettent donc de maîtriser toute la chaîne de concurrence. C'est ce que m'a expliqué Virginie Beauménier, anciennement rapporteure générale de l'autorité de la concurrence.

  • Speaker #3

    Dans le cas du cartel des panneaux, les entreprises qui étaient parties à l'entente avaient monté un club et établi une liste noire des entreprises qu'il fallait évincer, et notamment qui étaient des revendeurs. Donc en ne leur fournissant pas à de bonnes conditions les panneaux, évidemment, elles ne pouvaient pas les concurrencer directement. Donc en fait, c'est une forme d'éviction des entreprises qui veulent stimuler la concurrence.

  • Speaker #0

    Cette liste noire, longue d'une... quinzaine d'entreprises est régulièrement mise à jour. Pour les entreprises blacklistées, les conséquences financières peuvent être très lourdes. Elles n'ont plus accès au marché public et perdent des opportunités commerciales, ce qui empêche leur développement économique et peut conduire à leur disparition. Le dirigeant de Signal Concept, un fabricant de panneaux implantés dans la région de Tours, raconte comment cette mise à l'index a compliqué la croissance de son entreprise. Il témoigne en 2011, interrogé par une télévision locale.

  • Speaker #1

    Il y avait une blacklist, on en faisait partie, parce que justement on ne rentrait pas dans cette discussion. Vous perdez un certain chiffre d'affaires, donc automatiquement vous ne pouvez pas vous développer de façon durable. Donc on a été un peu sclérosé sur ces dix ans, sur ces dix années.

  • Speaker #0

    La fraude fonctionne pendant une dizaine d'années. D'un côté, les commanditaires publics sont bernés par le système de couverture et de l'autre, les entreprises évincées des marchés publics s'imaginent qu'il ne s'agit que du jeu de la concurrence propre aux appels d'offres. Le système paraît sans faille. Pourtant, en février 2006, un chef d'entreprise mis à l'écart par le cartel va écrire à un juge d'instruction de montée « il a des révélations à faire » . C'est la fin de ce premier épisode consacré au cartel des panneaux routiers. Dans le prochain épisode, vous découvrirez comment tout a basculé. Cartel & Compagnie est un podcast proposé par l'autorité de la concurrence et produit par Insider Podcast.

Description

8 fabricants leaders dans le secteur de la fourniture et de la pose de panneaux de signalisation se sont entendus aux dépens de l’État et des collectivités locales pendant près de 10 ans. Et sur une durée plus longue pour deux d’entre eux Les entreprises ont dû s’acquitter de 52,7 millions d’euros d’amende.


Cartels & Cie est une série de podcasts, proposée par l’Autorité de la concurrence, qui revient sur des grandes affaires de lutte contre les pratiques anticoncurrentielles en France. Cette première saison revient sur trois grands cartels, qui se déclinent en 2 ou 3 épisodes.

Les affaires sont restituées au travers du récit d’une journaliste, Isabelle Souquet, ainsi que de nombreux témoignages de personnes travaillant à l’Autorité de la concurrence et d’acteurs publics et privés.  

 

RÉSUMÉ DE L’AFFAIRE

Entre 1997 et 2006, 8 entreprises ont régné sur tout un secteur en s’entendant sur les prix et en se répartissant la quasi-totalité des marchés publics lancés en France. C’est une perquisition, menée lors d’une réunion du « club » dans un grand restaurant parisien, qui a mis au jour le cartel.

Au cours de réunions régulières, les membres se répartissaient les marchés, fixaient les prix et les remises qui pouvaient être consenties aux acheteurs, selon des modalités formalisées dans un document intitulé « Règles ». Chaque société était tenue de respecter ces dernières sous peine de se voir infliger des pénalités financières. Une fois le cartel démasqué, les prix ont immédiatement fortement chuté. A la suite de la décision de l’Autorité, plusieurs départements ont obtenu des indemnisations à l’issue d’actions en réparation introduites auprès des tribunaux.

Épisode 1 : La bible du cartel 

Épisode 2 : Flagrant délit au restaurant

 

TÉMOIGNAGES PAR ORDRE D’APPARITION

  • Stanislas Martin, rapporteur général à l’Autorité de la concurrence

  • Irène Luc, magistrate et vice-présidente de l’Autorité de la concurrence

  • Virginie Beaumeunier, anciennement rapporteure générale de l’Autorité de la concurrence

  • Frédéric Farigoule, directeur de la gestion des routes au Conseil départemental de l’Orne

 

DÉCISION INTÉGRALE 

https://www.autoritedelaconcurrence.fr/sites/default/files/commitments//10d39.pdf

 

COMMUNIQUÉ DE PRESSE 

https://www.autoritedelaconcurrence.fr/fr/communiques-de-presse/lautorite-de-la-concurrence-sanctionne-un-cartel-dans-le-secteur-des-panneaux

 

RECOURS ET POURVOIS

Cette décision est définitive, les juridictions de contrôle ont confirmé la décision sur le fond. La sanction a été réduite par la Cour d’appel de Paris.

 

POUR ALLER PLUS LOIN 

Consultez la rubrique sur notre mission contentieuse : https://www.autoritedelaconcurrence.fr/fr/competence-contentieuse

Consultez les chiffres clés de l’Autorité : https://www.autoritedelaconcurrence.fr/fr/chiffres-cles

 

SUIVEZ-NOUS SUR

  • Instagram : @autoritedelaconcurrence

  • X : @adlc_

  • LinkedIn : @Autorité de la concurrence

 

Cette série constitue un support pédagogique qui a vocation à informer le grand public. La présentation des cartels concernés ne prétend pas à l’exhaustivité et les témoignages recueillis peuvent par ailleurs manquer de précision ou emprunter certains raccourcis de langage. L’Autorité invite les auditeurs à consulter les décisions dans leur version intégrale ainsi que les arrêts des juridictions de contrôle, le cas échéant, pour apprécier de façon exacte le contexte et la portée des informations présentées.

 

Transcription

  • Speaker #0

    Ce podcast vous est proposé par l'Autorité de la concurrence. L'Autorité de la concurrence est une autorité administrative indépendante chargée notamment de sanctionner les pratiques anticoncurrentielles. On l'appelle aussi le gendarme de la concurrence. Vous écoutez Cartel et compagnie, un podcast sur de grandes affaires de fraude économique française. Je m'appelle Isabelle Souquet, je suis journaliste. Et dans cette série en huit épisodes, je vous emmène dans les coulisses des enquêtes de l'autorité de la concurrence, au cœur de scandales qui impliquent des entreprises mondiales. J'ai décidé de vous raconter les mécanismes des cartels, ces accords secrets de grande envergure qui ont des conséquences préjudiciables directes sur nous, les consommateurs, sur le prix final de certains produits que l'on achète régulièrement, et même sur les impôts que nous payons. Vous entendrez également le témoignage de ceux qui luttent au quotidien contre ces tricheries et ces manipulations de marché. Troisième enquête, le cartel des panneaux. Je vais vous raconter comment les plus grands fabricants de panneaux de signalisation sont parvenus à prendre la main sur des centaines de marchés publics à travers la France et à régner en maître sur l'ensemble du secteur. Épisode 1, la bible du cartel.

  • Speaker #1

    Stop, interdit de tourner à droite ou tout simplement destination X, Y kilomètres, tous ces panneaux qui constituent le cadre de la vie moderne, savez-vous qu'ils sont une industrie locale florissante ? Florissante à un point tel que l'usine actuelle de Saint-André-de-Nice s'avère trop petite et s'implante dans la zone industrielle de Caroz.

  • Speaker #0

    Les panneaux routiers sont depuis longtemps un enjeu économique crucial pour les industriels. Dès les années 1910, la marque de pneus Michelin conçoit et offre des panneaux aux municipalités. A l'époque, ils sont en béton armé. Puis Citroën offre à son tour des panneaux routiers à l'État français. Il s'agit de co-marketing, les noms des marques figurent sur les panneaux et sont donc visibles par tous les automobilistes. Dans les années 50, la concurrence s'intensifie sur le marché des panneaux. Les premières autoroutes sont créées. La demande en panneaux augmente et en conséquence, des entreprises de fabrication vont éclore aux quatre coins du territoire pour répondre aux appels d'offres des pouvoirs publics.

  • Speaker #1

    Découpage des tôles, mise en forme sous presse de 400 tonnes, décapage, métallisation, peinture spéciale. Une main d'œuvre plus importante du matériel modernisé à 50% est répartie dans des conditions assurant le maximum de commodité et de sécurité. ont permis d'accroître de 50% la production de panneaux de signalisation.

  • Speaker #0

    Aujourd'hui, la majorité des panneaux de signalisation est commandée et achetée par les collectivités qui gèrent les routes, les départements et les communes. Le réseau routier français représente plus d'un million de kilomètres. Ce sont donc plusieurs millions de panneaux de signalisation qui doivent être remplacés ou modifiés régulièrement. C'est donc un marché très important. Pour s'approvisionner au meilleur prix, les collectivités locales passent par un processus classique d'appel d'offres. Mais certaines entreprises vont tout faire pour tirer leur épingle du jeu, quitte à utiliser des pratiques frauduleuses. Huit d'entre elles vont se retrouver au cœur d'une affaire d'entente illicite, un scandale qui fait la une des journaux télévisés un soir d'octobre 2006. On va revenir maintenant sur une affaire qui aurait coûté plus d'un milliard d'euros aux contribuables français pendant dix ans, les huit plus grandes sociétés de signalisation autoroutière, ce n'est pas entendu, pour se partager presque tous les marchés publics et donc gonfler artificiellement les prix. Tout commence en 1997. Plusieurs entreprises de pose et de fourniture de panneaux routiers décident de se répartir les marchés en se mettant d'accord à l'avance sur leurs prix. Il détourne alors complètement le système des appels d'offres. Ces entreprises, leaders du secteur, se sont accordées pour remporter tour à tour des marchés par un mécanisme illégal, les offres de couverture. Le principe est simple, avant de répondre à l'appel d'offres, une entreprise est choisie au sein du cartel pour remporter la mise. Les autres se coordonnent pour proposer des prix plus élevés pour s'assurer que l'entreprise désignée remportera bien le marché. Sous-titrage Société Merci. Bonjour monsieur. Stanislas Martin est rapporteur général à l'autorité de la concurrence. Il m'a expliqué le mécanisme de ces offres de couverture.

  • Speaker #2

    Il y a une entreprise qui est désignée pour obtenir le marché, un prix donné, et ensuite d'autres entreprises. qui sont désignées pour la couvrir, on dit, donc pour faire des offres de couverture, donc qui vont répondre à l'appel d'offres, mais avec des prix plus élevés que celui qui a été désigné par le cartel pour remporter le marché. Ce qui se passe, c'est que c'est l'entreprise qui est désignée pour faire le marché qui établit les documents pour le compte de ses concurrents. Ce ne sont plus vraiment des concurrents, mais pour les comptes d'autres entreprises. Parfois, on peut retrouver la même faute d'orthographe dans le document. Donc, il y a tout un tas de petits indices qui peuvent servir à identifier les offres de couverture.

  • Speaker #0

    Irene Luc, magistrate, est l'une des vice-présidentes de l'autorité de la concurrence. Elle nous précise en quoi ces pratiques sont néfastes. Lorsque des entreprises, avant de répondre à un appel d'offres, se répartissent par avance les marchés en disant « moi je vais te couvrir en faisant une offre supérieure et comme ça tu auras le marché » , par contre, lors du prochain marché, ça sera l'inverse, c'est toi qui me couvriras. On voit bien qu'au final, ce sont les collectivités, et puis au travers des collectivités, l'argent public, qui ont subi les conséquences. Et dans cette affaire, ces conséquences vont perdurer près de dix ans. Il faut dire que le cartel a bâti une organisation très sophistiquée. Absolument tous les cas de figure sont prévus et détaillés dans un document confidentiel et totalement illicite que les membres du cartel surnomment entre eux la Bible.

  • Speaker #2

    Nos collègues de la police judiciaire ont eu beaucoup de chance et ont dû être très contents parce qu'ils sont tombés sur un document que les membres du cartel appelaient la Bible. Et documents qui fixaient les règles de fonctionnement du cartel.

  • Speaker #0

    Stanislas Martin est le rapporteur général de l'autorité de la concurrence.

  • Speaker #2

    Documents qui fixaient des sanctions, des mesures de rétention pour ceux qui déviraient de l'accord du cartel. Et puis qui fixaient les répartitions de marché pour tous les niveaux de communes, les grandes communes, les départements, les plus petites communes, les communes de moins de 5000 habitants. Donc on avait un document finalement qui retracait tout le fonctionnement du cartel.

  • Speaker #0

    Tout est répertorié dans cette Bible. On y trouve en premier lieu les principes généraux qui régissent l'organisation des réunions et la tenue de l'ordre du jour. Un tableau liste aussi spécifiquement les marchés renouvelables et détenus à titre exclusif par chaque entreprise et donc intouchables dans le cadre de l'entente. Chacune sait donc à l'avance quel marché elle obtiendra et à quel prix. Une fois par an, les membres du cartel font les comptes pour vérifier que chacun s'y retrouve. Si un appel d'offres ne se passe pas comme prévu, les membres du cartel ont même convenu d'un système de compensation pour l'entreprise lésée. Et un véritable système de police est même mis en place, puisque si une société s'affranchit des règles définies par le cartel, elle est sanctionnée d'une pénalité financière, selon un système de crédit et de dette au sein même de l'entente. Les membres du cartel ont également établi une liste d'entreprises avec lesquelles il est interdit de collaborer parce qu'elles seraient trop inclines à baisser leur prix pour obtenir des parts de marché. Ces dispositions permettent donc de maîtriser toute la chaîne de concurrence. C'est ce que m'a expliqué Virginie Beauménier, anciennement rapporteure générale de l'autorité de la concurrence.

  • Speaker #3

    Dans le cas du cartel des panneaux, les entreprises qui étaient parties à l'entente avaient monté un club et établi une liste noire des entreprises qu'il fallait évincer, et notamment qui étaient des revendeurs. Donc en ne leur fournissant pas à de bonnes conditions les panneaux, évidemment, elles ne pouvaient pas les concurrencer directement. Donc en fait, c'est une forme d'éviction des entreprises qui veulent stimuler la concurrence.

  • Speaker #0

    Cette liste noire, longue d'une... quinzaine d'entreprises est régulièrement mise à jour. Pour les entreprises blacklistées, les conséquences financières peuvent être très lourdes. Elles n'ont plus accès au marché public et perdent des opportunités commerciales, ce qui empêche leur développement économique et peut conduire à leur disparition. Le dirigeant de Signal Concept, un fabricant de panneaux implantés dans la région de Tours, raconte comment cette mise à l'index a compliqué la croissance de son entreprise. Il témoigne en 2011, interrogé par une télévision locale.

  • Speaker #1

    Il y avait une blacklist, on en faisait partie, parce que justement on ne rentrait pas dans cette discussion. Vous perdez un certain chiffre d'affaires, donc automatiquement vous ne pouvez pas vous développer de façon durable. Donc on a été un peu sclérosé sur ces dix ans, sur ces dix années.

  • Speaker #0

    La fraude fonctionne pendant une dizaine d'années. D'un côté, les commanditaires publics sont bernés par le système de couverture et de l'autre, les entreprises évincées des marchés publics s'imaginent qu'il ne s'agit que du jeu de la concurrence propre aux appels d'offres. Le système paraît sans faille. Pourtant, en février 2006, un chef d'entreprise mis à l'écart par le cartel va écrire à un juge d'instruction de montée « il a des révélations à faire » . C'est la fin de ce premier épisode consacré au cartel des panneaux routiers. Dans le prochain épisode, vous découvrirez comment tout a basculé. Cartel & Compagnie est un podcast proposé par l'autorité de la concurrence et produit par Insider Podcast.

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8 fabricants leaders dans le secteur de la fourniture et de la pose de panneaux de signalisation se sont entendus aux dépens de l’État et des collectivités locales pendant près de 10 ans. Et sur une durée plus longue pour deux d’entre eux Les entreprises ont dû s’acquitter de 52,7 millions d’euros d’amende.


Cartels & Cie est une série de podcasts, proposée par l’Autorité de la concurrence, qui revient sur des grandes affaires de lutte contre les pratiques anticoncurrentielles en France. Cette première saison revient sur trois grands cartels, qui se déclinent en 2 ou 3 épisodes.

Les affaires sont restituées au travers du récit d’une journaliste, Isabelle Souquet, ainsi que de nombreux témoignages de personnes travaillant à l’Autorité de la concurrence et d’acteurs publics et privés.  

 

RÉSUMÉ DE L’AFFAIRE

Entre 1997 et 2006, 8 entreprises ont régné sur tout un secteur en s’entendant sur les prix et en se répartissant la quasi-totalité des marchés publics lancés en France. C’est une perquisition, menée lors d’une réunion du « club » dans un grand restaurant parisien, qui a mis au jour le cartel.

Au cours de réunions régulières, les membres se répartissaient les marchés, fixaient les prix et les remises qui pouvaient être consenties aux acheteurs, selon des modalités formalisées dans un document intitulé « Règles ». Chaque société était tenue de respecter ces dernières sous peine de se voir infliger des pénalités financières. Une fois le cartel démasqué, les prix ont immédiatement fortement chuté. A la suite de la décision de l’Autorité, plusieurs départements ont obtenu des indemnisations à l’issue d’actions en réparation introduites auprès des tribunaux.

Épisode 1 : La bible du cartel 

Épisode 2 : Flagrant délit au restaurant

 

TÉMOIGNAGES PAR ORDRE D’APPARITION

  • Stanislas Martin, rapporteur général à l’Autorité de la concurrence

  • Irène Luc, magistrate et vice-présidente de l’Autorité de la concurrence

  • Virginie Beaumeunier, anciennement rapporteure générale de l’Autorité de la concurrence

  • Frédéric Farigoule, directeur de la gestion des routes au Conseil départemental de l’Orne

 

DÉCISION INTÉGRALE 

https://www.autoritedelaconcurrence.fr/sites/default/files/commitments//10d39.pdf

 

COMMUNIQUÉ DE PRESSE 

https://www.autoritedelaconcurrence.fr/fr/communiques-de-presse/lautorite-de-la-concurrence-sanctionne-un-cartel-dans-le-secteur-des-panneaux

 

RECOURS ET POURVOIS

Cette décision est définitive, les juridictions de contrôle ont confirmé la décision sur le fond. La sanction a été réduite par la Cour d’appel de Paris.

 

POUR ALLER PLUS LOIN 

Consultez la rubrique sur notre mission contentieuse : https://www.autoritedelaconcurrence.fr/fr/competence-contentieuse

Consultez les chiffres clés de l’Autorité : https://www.autoritedelaconcurrence.fr/fr/chiffres-cles

 

SUIVEZ-NOUS SUR

  • Instagram : @autoritedelaconcurrence

  • X : @adlc_

  • LinkedIn : @Autorité de la concurrence

 

Cette série constitue un support pédagogique qui a vocation à informer le grand public. La présentation des cartels concernés ne prétend pas à l’exhaustivité et les témoignages recueillis peuvent par ailleurs manquer de précision ou emprunter certains raccourcis de langage. L’Autorité invite les auditeurs à consulter les décisions dans leur version intégrale ainsi que les arrêts des juridictions de contrôle, le cas échéant, pour apprécier de façon exacte le contexte et la portée des informations présentées.

 

Transcription

  • Speaker #0

    Ce podcast vous est proposé par l'Autorité de la concurrence. L'Autorité de la concurrence est une autorité administrative indépendante chargée notamment de sanctionner les pratiques anticoncurrentielles. On l'appelle aussi le gendarme de la concurrence. Vous écoutez Cartel et compagnie, un podcast sur de grandes affaires de fraude économique française. Je m'appelle Isabelle Souquet, je suis journaliste. Et dans cette série en huit épisodes, je vous emmène dans les coulisses des enquêtes de l'autorité de la concurrence, au cœur de scandales qui impliquent des entreprises mondiales. J'ai décidé de vous raconter les mécanismes des cartels, ces accords secrets de grande envergure qui ont des conséquences préjudiciables directes sur nous, les consommateurs, sur le prix final de certains produits que l'on achète régulièrement, et même sur les impôts que nous payons. Vous entendrez également le témoignage de ceux qui luttent au quotidien contre ces tricheries et ces manipulations de marché. Troisième enquête, le cartel des panneaux. Je vais vous raconter comment les plus grands fabricants de panneaux de signalisation sont parvenus à prendre la main sur des centaines de marchés publics à travers la France et à régner en maître sur l'ensemble du secteur. Épisode 1, la bible du cartel.

  • Speaker #1

    Stop, interdit de tourner à droite ou tout simplement destination X, Y kilomètres, tous ces panneaux qui constituent le cadre de la vie moderne, savez-vous qu'ils sont une industrie locale florissante ? Florissante à un point tel que l'usine actuelle de Saint-André-de-Nice s'avère trop petite et s'implante dans la zone industrielle de Caroz.

  • Speaker #0

    Les panneaux routiers sont depuis longtemps un enjeu économique crucial pour les industriels. Dès les années 1910, la marque de pneus Michelin conçoit et offre des panneaux aux municipalités. A l'époque, ils sont en béton armé. Puis Citroën offre à son tour des panneaux routiers à l'État français. Il s'agit de co-marketing, les noms des marques figurent sur les panneaux et sont donc visibles par tous les automobilistes. Dans les années 50, la concurrence s'intensifie sur le marché des panneaux. Les premières autoroutes sont créées. La demande en panneaux augmente et en conséquence, des entreprises de fabrication vont éclore aux quatre coins du territoire pour répondre aux appels d'offres des pouvoirs publics.

  • Speaker #1

    Découpage des tôles, mise en forme sous presse de 400 tonnes, décapage, métallisation, peinture spéciale. Une main d'œuvre plus importante du matériel modernisé à 50% est répartie dans des conditions assurant le maximum de commodité et de sécurité. ont permis d'accroître de 50% la production de panneaux de signalisation.

  • Speaker #0

    Aujourd'hui, la majorité des panneaux de signalisation est commandée et achetée par les collectivités qui gèrent les routes, les départements et les communes. Le réseau routier français représente plus d'un million de kilomètres. Ce sont donc plusieurs millions de panneaux de signalisation qui doivent être remplacés ou modifiés régulièrement. C'est donc un marché très important. Pour s'approvisionner au meilleur prix, les collectivités locales passent par un processus classique d'appel d'offres. Mais certaines entreprises vont tout faire pour tirer leur épingle du jeu, quitte à utiliser des pratiques frauduleuses. Huit d'entre elles vont se retrouver au cœur d'une affaire d'entente illicite, un scandale qui fait la une des journaux télévisés un soir d'octobre 2006. On va revenir maintenant sur une affaire qui aurait coûté plus d'un milliard d'euros aux contribuables français pendant dix ans, les huit plus grandes sociétés de signalisation autoroutière, ce n'est pas entendu, pour se partager presque tous les marchés publics et donc gonfler artificiellement les prix. Tout commence en 1997. Plusieurs entreprises de pose et de fourniture de panneaux routiers décident de se répartir les marchés en se mettant d'accord à l'avance sur leurs prix. Il détourne alors complètement le système des appels d'offres. Ces entreprises, leaders du secteur, se sont accordées pour remporter tour à tour des marchés par un mécanisme illégal, les offres de couverture. Le principe est simple, avant de répondre à l'appel d'offres, une entreprise est choisie au sein du cartel pour remporter la mise. Les autres se coordonnent pour proposer des prix plus élevés pour s'assurer que l'entreprise désignée remportera bien le marché. Sous-titrage Société Merci. Bonjour monsieur. Stanislas Martin est rapporteur général à l'autorité de la concurrence. Il m'a expliqué le mécanisme de ces offres de couverture.

  • Speaker #2

    Il y a une entreprise qui est désignée pour obtenir le marché, un prix donné, et ensuite d'autres entreprises. qui sont désignées pour la couvrir, on dit, donc pour faire des offres de couverture, donc qui vont répondre à l'appel d'offres, mais avec des prix plus élevés que celui qui a été désigné par le cartel pour remporter le marché. Ce qui se passe, c'est que c'est l'entreprise qui est désignée pour faire le marché qui établit les documents pour le compte de ses concurrents. Ce ne sont plus vraiment des concurrents, mais pour les comptes d'autres entreprises. Parfois, on peut retrouver la même faute d'orthographe dans le document. Donc, il y a tout un tas de petits indices qui peuvent servir à identifier les offres de couverture.

  • Speaker #0

    Irene Luc, magistrate, est l'une des vice-présidentes de l'autorité de la concurrence. Elle nous précise en quoi ces pratiques sont néfastes. Lorsque des entreprises, avant de répondre à un appel d'offres, se répartissent par avance les marchés en disant « moi je vais te couvrir en faisant une offre supérieure et comme ça tu auras le marché » , par contre, lors du prochain marché, ça sera l'inverse, c'est toi qui me couvriras. On voit bien qu'au final, ce sont les collectivités, et puis au travers des collectivités, l'argent public, qui ont subi les conséquences. Et dans cette affaire, ces conséquences vont perdurer près de dix ans. Il faut dire que le cartel a bâti une organisation très sophistiquée. Absolument tous les cas de figure sont prévus et détaillés dans un document confidentiel et totalement illicite que les membres du cartel surnomment entre eux la Bible.

  • Speaker #2

    Nos collègues de la police judiciaire ont eu beaucoup de chance et ont dû être très contents parce qu'ils sont tombés sur un document que les membres du cartel appelaient la Bible. Et documents qui fixaient les règles de fonctionnement du cartel.

  • Speaker #0

    Stanislas Martin est le rapporteur général de l'autorité de la concurrence.

  • Speaker #2

    Documents qui fixaient des sanctions, des mesures de rétention pour ceux qui déviraient de l'accord du cartel. Et puis qui fixaient les répartitions de marché pour tous les niveaux de communes, les grandes communes, les départements, les plus petites communes, les communes de moins de 5000 habitants. Donc on avait un document finalement qui retracait tout le fonctionnement du cartel.

  • Speaker #0

    Tout est répertorié dans cette Bible. On y trouve en premier lieu les principes généraux qui régissent l'organisation des réunions et la tenue de l'ordre du jour. Un tableau liste aussi spécifiquement les marchés renouvelables et détenus à titre exclusif par chaque entreprise et donc intouchables dans le cadre de l'entente. Chacune sait donc à l'avance quel marché elle obtiendra et à quel prix. Une fois par an, les membres du cartel font les comptes pour vérifier que chacun s'y retrouve. Si un appel d'offres ne se passe pas comme prévu, les membres du cartel ont même convenu d'un système de compensation pour l'entreprise lésée. Et un véritable système de police est même mis en place, puisque si une société s'affranchit des règles définies par le cartel, elle est sanctionnée d'une pénalité financière, selon un système de crédit et de dette au sein même de l'entente. Les membres du cartel ont également établi une liste d'entreprises avec lesquelles il est interdit de collaborer parce qu'elles seraient trop inclines à baisser leur prix pour obtenir des parts de marché. Ces dispositions permettent donc de maîtriser toute la chaîne de concurrence. C'est ce que m'a expliqué Virginie Beauménier, anciennement rapporteure générale de l'autorité de la concurrence.

  • Speaker #3

    Dans le cas du cartel des panneaux, les entreprises qui étaient parties à l'entente avaient monté un club et établi une liste noire des entreprises qu'il fallait évincer, et notamment qui étaient des revendeurs. Donc en ne leur fournissant pas à de bonnes conditions les panneaux, évidemment, elles ne pouvaient pas les concurrencer directement. Donc en fait, c'est une forme d'éviction des entreprises qui veulent stimuler la concurrence.

  • Speaker #0

    Cette liste noire, longue d'une... quinzaine d'entreprises est régulièrement mise à jour. Pour les entreprises blacklistées, les conséquences financières peuvent être très lourdes. Elles n'ont plus accès au marché public et perdent des opportunités commerciales, ce qui empêche leur développement économique et peut conduire à leur disparition. Le dirigeant de Signal Concept, un fabricant de panneaux implantés dans la région de Tours, raconte comment cette mise à l'index a compliqué la croissance de son entreprise. Il témoigne en 2011, interrogé par une télévision locale.

  • Speaker #1

    Il y avait une blacklist, on en faisait partie, parce que justement on ne rentrait pas dans cette discussion. Vous perdez un certain chiffre d'affaires, donc automatiquement vous ne pouvez pas vous développer de façon durable. Donc on a été un peu sclérosé sur ces dix ans, sur ces dix années.

  • Speaker #0

    La fraude fonctionne pendant une dizaine d'années. D'un côté, les commanditaires publics sont bernés par le système de couverture et de l'autre, les entreprises évincées des marchés publics s'imaginent qu'il ne s'agit que du jeu de la concurrence propre aux appels d'offres. Le système paraît sans faille. Pourtant, en février 2006, un chef d'entreprise mis à l'écart par le cartel va écrire à un juge d'instruction de montée « il a des révélations à faire » . C'est la fin de ce premier épisode consacré au cartel des panneaux routiers. Dans le prochain épisode, vous découvrirez comment tout a basculé. Cartel & Compagnie est un podcast proposé par l'autorité de la concurrence et produit par Insider Podcast.

Description

8 fabricants leaders dans le secteur de la fourniture et de la pose de panneaux de signalisation se sont entendus aux dépens de l’État et des collectivités locales pendant près de 10 ans. Et sur une durée plus longue pour deux d’entre eux Les entreprises ont dû s’acquitter de 52,7 millions d’euros d’amende.


Cartels & Cie est une série de podcasts, proposée par l’Autorité de la concurrence, qui revient sur des grandes affaires de lutte contre les pratiques anticoncurrentielles en France. Cette première saison revient sur trois grands cartels, qui se déclinent en 2 ou 3 épisodes.

Les affaires sont restituées au travers du récit d’une journaliste, Isabelle Souquet, ainsi que de nombreux témoignages de personnes travaillant à l’Autorité de la concurrence et d’acteurs publics et privés.  

 

RÉSUMÉ DE L’AFFAIRE

Entre 1997 et 2006, 8 entreprises ont régné sur tout un secteur en s’entendant sur les prix et en se répartissant la quasi-totalité des marchés publics lancés en France. C’est une perquisition, menée lors d’une réunion du « club » dans un grand restaurant parisien, qui a mis au jour le cartel.

Au cours de réunions régulières, les membres se répartissaient les marchés, fixaient les prix et les remises qui pouvaient être consenties aux acheteurs, selon des modalités formalisées dans un document intitulé « Règles ». Chaque société était tenue de respecter ces dernières sous peine de se voir infliger des pénalités financières. Une fois le cartel démasqué, les prix ont immédiatement fortement chuté. A la suite de la décision de l’Autorité, plusieurs départements ont obtenu des indemnisations à l’issue d’actions en réparation introduites auprès des tribunaux.

Épisode 1 : La bible du cartel 

Épisode 2 : Flagrant délit au restaurant

 

TÉMOIGNAGES PAR ORDRE D’APPARITION

  • Stanislas Martin, rapporteur général à l’Autorité de la concurrence

  • Irène Luc, magistrate et vice-présidente de l’Autorité de la concurrence

  • Virginie Beaumeunier, anciennement rapporteure générale de l’Autorité de la concurrence

  • Frédéric Farigoule, directeur de la gestion des routes au Conseil départemental de l’Orne

 

DÉCISION INTÉGRALE 

https://www.autoritedelaconcurrence.fr/sites/default/files/commitments//10d39.pdf

 

COMMUNIQUÉ DE PRESSE 

https://www.autoritedelaconcurrence.fr/fr/communiques-de-presse/lautorite-de-la-concurrence-sanctionne-un-cartel-dans-le-secteur-des-panneaux

 

RECOURS ET POURVOIS

Cette décision est définitive, les juridictions de contrôle ont confirmé la décision sur le fond. La sanction a été réduite par la Cour d’appel de Paris.

 

POUR ALLER PLUS LOIN 

Consultez la rubrique sur notre mission contentieuse : https://www.autoritedelaconcurrence.fr/fr/competence-contentieuse

Consultez les chiffres clés de l’Autorité : https://www.autoritedelaconcurrence.fr/fr/chiffres-cles

 

SUIVEZ-NOUS SUR

  • Instagram : @autoritedelaconcurrence

  • X : @adlc_

  • LinkedIn : @Autorité de la concurrence

 

Cette série constitue un support pédagogique qui a vocation à informer le grand public. La présentation des cartels concernés ne prétend pas à l’exhaustivité et les témoignages recueillis peuvent par ailleurs manquer de précision ou emprunter certains raccourcis de langage. L’Autorité invite les auditeurs à consulter les décisions dans leur version intégrale ainsi que les arrêts des juridictions de contrôle, le cas échéant, pour apprécier de façon exacte le contexte et la portée des informations présentées.

 

Transcription

  • Speaker #0

    Ce podcast vous est proposé par l'Autorité de la concurrence. L'Autorité de la concurrence est une autorité administrative indépendante chargée notamment de sanctionner les pratiques anticoncurrentielles. On l'appelle aussi le gendarme de la concurrence. Vous écoutez Cartel et compagnie, un podcast sur de grandes affaires de fraude économique française. Je m'appelle Isabelle Souquet, je suis journaliste. Et dans cette série en huit épisodes, je vous emmène dans les coulisses des enquêtes de l'autorité de la concurrence, au cœur de scandales qui impliquent des entreprises mondiales. J'ai décidé de vous raconter les mécanismes des cartels, ces accords secrets de grande envergure qui ont des conséquences préjudiciables directes sur nous, les consommateurs, sur le prix final de certains produits que l'on achète régulièrement, et même sur les impôts que nous payons. Vous entendrez également le témoignage de ceux qui luttent au quotidien contre ces tricheries et ces manipulations de marché. Troisième enquête, le cartel des panneaux. Je vais vous raconter comment les plus grands fabricants de panneaux de signalisation sont parvenus à prendre la main sur des centaines de marchés publics à travers la France et à régner en maître sur l'ensemble du secteur. Épisode 1, la bible du cartel.

  • Speaker #1

    Stop, interdit de tourner à droite ou tout simplement destination X, Y kilomètres, tous ces panneaux qui constituent le cadre de la vie moderne, savez-vous qu'ils sont une industrie locale florissante ? Florissante à un point tel que l'usine actuelle de Saint-André-de-Nice s'avère trop petite et s'implante dans la zone industrielle de Caroz.

  • Speaker #0

    Les panneaux routiers sont depuis longtemps un enjeu économique crucial pour les industriels. Dès les années 1910, la marque de pneus Michelin conçoit et offre des panneaux aux municipalités. A l'époque, ils sont en béton armé. Puis Citroën offre à son tour des panneaux routiers à l'État français. Il s'agit de co-marketing, les noms des marques figurent sur les panneaux et sont donc visibles par tous les automobilistes. Dans les années 50, la concurrence s'intensifie sur le marché des panneaux. Les premières autoroutes sont créées. La demande en panneaux augmente et en conséquence, des entreprises de fabrication vont éclore aux quatre coins du territoire pour répondre aux appels d'offres des pouvoirs publics.

  • Speaker #1

    Découpage des tôles, mise en forme sous presse de 400 tonnes, décapage, métallisation, peinture spéciale. Une main d'œuvre plus importante du matériel modernisé à 50% est répartie dans des conditions assurant le maximum de commodité et de sécurité. ont permis d'accroître de 50% la production de panneaux de signalisation.

  • Speaker #0

    Aujourd'hui, la majorité des panneaux de signalisation est commandée et achetée par les collectivités qui gèrent les routes, les départements et les communes. Le réseau routier français représente plus d'un million de kilomètres. Ce sont donc plusieurs millions de panneaux de signalisation qui doivent être remplacés ou modifiés régulièrement. C'est donc un marché très important. Pour s'approvisionner au meilleur prix, les collectivités locales passent par un processus classique d'appel d'offres. Mais certaines entreprises vont tout faire pour tirer leur épingle du jeu, quitte à utiliser des pratiques frauduleuses. Huit d'entre elles vont se retrouver au cœur d'une affaire d'entente illicite, un scandale qui fait la une des journaux télévisés un soir d'octobre 2006. On va revenir maintenant sur une affaire qui aurait coûté plus d'un milliard d'euros aux contribuables français pendant dix ans, les huit plus grandes sociétés de signalisation autoroutière, ce n'est pas entendu, pour se partager presque tous les marchés publics et donc gonfler artificiellement les prix. Tout commence en 1997. Plusieurs entreprises de pose et de fourniture de panneaux routiers décident de se répartir les marchés en se mettant d'accord à l'avance sur leurs prix. Il détourne alors complètement le système des appels d'offres. Ces entreprises, leaders du secteur, se sont accordées pour remporter tour à tour des marchés par un mécanisme illégal, les offres de couverture. Le principe est simple, avant de répondre à l'appel d'offres, une entreprise est choisie au sein du cartel pour remporter la mise. Les autres se coordonnent pour proposer des prix plus élevés pour s'assurer que l'entreprise désignée remportera bien le marché. Sous-titrage Société Merci. Bonjour monsieur. Stanislas Martin est rapporteur général à l'autorité de la concurrence. Il m'a expliqué le mécanisme de ces offres de couverture.

  • Speaker #2

    Il y a une entreprise qui est désignée pour obtenir le marché, un prix donné, et ensuite d'autres entreprises. qui sont désignées pour la couvrir, on dit, donc pour faire des offres de couverture, donc qui vont répondre à l'appel d'offres, mais avec des prix plus élevés que celui qui a été désigné par le cartel pour remporter le marché. Ce qui se passe, c'est que c'est l'entreprise qui est désignée pour faire le marché qui établit les documents pour le compte de ses concurrents. Ce ne sont plus vraiment des concurrents, mais pour les comptes d'autres entreprises. Parfois, on peut retrouver la même faute d'orthographe dans le document. Donc, il y a tout un tas de petits indices qui peuvent servir à identifier les offres de couverture.

  • Speaker #0

    Irene Luc, magistrate, est l'une des vice-présidentes de l'autorité de la concurrence. Elle nous précise en quoi ces pratiques sont néfastes. Lorsque des entreprises, avant de répondre à un appel d'offres, se répartissent par avance les marchés en disant « moi je vais te couvrir en faisant une offre supérieure et comme ça tu auras le marché » , par contre, lors du prochain marché, ça sera l'inverse, c'est toi qui me couvriras. On voit bien qu'au final, ce sont les collectivités, et puis au travers des collectivités, l'argent public, qui ont subi les conséquences. Et dans cette affaire, ces conséquences vont perdurer près de dix ans. Il faut dire que le cartel a bâti une organisation très sophistiquée. Absolument tous les cas de figure sont prévus et détaillés dans un document confidentiel et totalement illicite que les membres du cartel surnomment entre eux la Bible.

  • Speaker #2

    Nos collègues de la police judiciaire ont eu beaucoup de chance et ont dû être très contents parce qu'ils sont tombés sur un document que les membres du cartel appelaient la Bible. Et documents qui fixaient les règles de fonctionnement du cartel.

  • Speaker #0

    Stanislas Martin est le rapporteur général de l'autorité de la concurrence.

  • Speaker #2

    Documents qui fixaient des sanctions, des mesures de rétention pour ceux qui déviraient de l'accord du cartel. Et puis qui fixaient les répartitions de marché pour tous les niveaux de communes, les grandes communes, les départements, les plus petites communes, les communes de moins de 5000 habitants. Donc on avait un document finalement qui retracait tout le fonctionnement du cartel.

  • Speaker #0

    Tout est répertorié dans cette Bible. On y trouve en premier lieu les principes généraux qui régissent l'organisation des réunions et la tenue de l'ordre du jour. Un tableau liste aussi spécifiquement les marchés renouvelables et détenus à titre exclusif par chaque entreprise et donc intouchables dans le cadre de l'entente. Chacune sait donc à l'avance quel marché elle obtiendra et à quel prix. Une fois par an, les membres du cartel font les comptes pour vérifier que chacun s'y retrouve. Si un appel d'offres ne se passe pas comme prévu, les membres du cartel ont même convenu d'un système de compensation pour l'entreprise lésée. Et un véritable système de police est même mis en place, puisque si une société s'affranchit des règles définies par le cartel, elle est sanctionnée d'une pénalité financière, selon un système de crédit et de dette au sein même de l'entente. Les membres du cartel ont également établi une liste d'entreprises avec lesquelles il est interdit de collaborer parce qu'elles seraient trop inclines à baisser leur prix pour obtenir des parts de marché. Ces dispositions permettent donc de maîtriser toute la chaîne de concurrence. C'est ce que m'a expliqué Virginie Beauménier, anciennement rapporteure générale de l'autorité de la concurrence.

  • Speaker #3

    Dans le cas du cartel des panneaux, les entreprises qui étaient parties à l'entente avaient monté un club et établi une liste noire des entreprises qu'il fallait évincer, et notamment qui étaient des revendeurs. Donc en ne leur fournissant pas à de bonnes conditions les panneaux, évidemment, elles ne pouvaient pas les concurrencer directement. Donc en fait, c'est une forme d'éviction des entreprises qui veulent stimuler la concurrence.

  • Speaker #0

    Cette liste noire, longue d'une... quinzaine d'entreprises est régulièrement mise à jour. Pour les entreprises blacklistées, les conséquences financières peuvent être très lourdes. Elles n'ont plus accès au marché public et perdent des opportunités commerciales, ce qui empêche leur développement économique et peut conduire à leur disparition. Le dirigeant de Signal Concept, un fabricant de panneaux implantés dans la région de Tours, raconte comment cette mise à l'index a compliqué la croissance de son entreprise. Il témoigne en 2011, interrogé par une télévision locale.

  • Speaker #1

    Il y avait une blacklist, on en faisait partie, parce que justement on ne rentrait pas dans cette discussion. Vous perdez un certain chiffre d'affaires, donc automatiquement vous ne pouvez pas vous développer de façon durable. Donc on a été un peu sclérosé sur ces dix ans, sur ces dix années.

  • Speaker #0

    La fraude fonctionne pendant une dizaine d'années. D'un côté, les commanditaires publics sont bernés par le système de couverture et de l'autre, les entreprises évincées des marchés publics s'imaginent qu'il ne s'agit que du jeu de la concurrence propre aux appels d'offres. Le système paraît sans faille. Pourtant, en février 2006, un chef d'entreprise mis à l'écart par le cartel va écrire à un juge d'instruction de montée « il a des révélations à faire » . C'est la fin de ce premier épisode consacré au cartel des panneaux routiers. Dans le prochain épisode, vous découvrirez comment tout a basculé. Cartel & Compagnie est un podcast proposé par l'autorité de la concurrence et produit par Insider Podcast.

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