- Speaker #0
Parait qu'on entreprend pour être libre. Charmante illusion, vous ne trouvez pas ? Je suis Sabrina Toibet, consultante en stratégie d'entreprise. Si vous cherchez des conseils, du partage d'expériences et des réponses qui résonnent pour développer votre activité, considérez cet humble chronique comme une invitation personnelle et un nouveau repère. Dans Chronique Business, seule ou avec mes invités, je vous partage ce qui se cache vraiment dans les coulisses de l'entrepreneuriat. Les décisions, les doutes et les déclics. votre dévouée chroniqueuse business. Bonjour et bienvenue pour ce nouvel épisode, je suis ravie de vous retrouver. Une question pour vous, chers auditeurs, la désinformation nuit-elle gravement à la santé des entreprises ? C'est la question qu'on va aborder aujourd'hui avec l'invité que j'ai l'honneur d'accueillir, Thomas Huchon. Bonjour Thomas.
- Speaker #1
Bonjour.
- Speaker #0
Alors Thomas, vous êtes journaliste, spécialiste de la lutte contre les fake news et vous avez décidé... de vous attaquer à ce phénomène un peu partout et notamment au cœur des entreprises, ce sera l'objet de notre épisode. Est-ce que vous pourriez nous en dire un petit peu plus et surtout, pourquoi cette lutte ?
- Speaker #1
Moi, déjà, je suis un journaliste, mais je suis un journaliste un peu bizarre parce que effectivement, moi, je ne m'intéresse que aux fausses informations. Je ne m'intéresse pas à d'autres fausses informations. Je ne fais même pas ce que mes confrères appellent du fact-checking. Le fact-checking, on vérifie des informations et c'est possible de tomber sur une info vraie. Moi, non. Moi, je fais du... debunking. Le debunking, c'est d'essayer de comprendre, de dire que quelque chose est faux, bien entendu, mais il faut être indique que la Terre est plate ou que l'égide Macron n'est pas en réalité un oeuvre déguisée, baptisée Jean-Michel Tramont. C'est à peu près fin de route. Moi, ce qui m'intéresse, c'est l'utilisation du mensonge. Qui le fabrique ? Pourquoi ? Quel impact il a ? Qui va y croire ? Qu'est-ce qu'il y a derrière tout ça ? Et du coup, comment se diffusent des informations aujourd'hui ? Comment les réseaux sociaux vont jouer comme une... caisse d'amplification, bien souvent, trop souvent, de tous ces phénomènes. Après, moi, m'être attaqué à ce phénomène de la désinformation dans le métier de journaliste, avec l'idée que les citoyens doivent bénéficier de la meilleure information possible, parce que c'est comme ça qu'ils font des choix éclairés, on va dire. Eh bien, j'ai été contacté par beaucoup d'anciens liens qui voyaient la problématique des théories de complot et des fake news rentrer dans leur casse. et des gamins leur dire des trucs un peu bizarres.
- Speaker #0
C'est très vrai.
- Speaker #1
Du coup, j'ai été contacté par des enseignants qui m'ont demandé d'aller dans leur classe pour faire des séances. Je vais passer cet automne ma 500e intervention en 10 ans dans plus d'une centaine de villes de France, même certaines à l'étranger, afin de faire de l'éducation aux médias, de l'éveil à l'esprit critique et d'amener les plus jeunes à se prémunir contre ce phénomène. Mais il y a un moment où... on s'est occupé des plus jeunes qui vont à l'école, on se pose aussi la question du reste de la société. Et afin d'essayer d'augmenter le niveau de résilience des Français face à la désinformation, comment est-ce qu'on fait pour parler aux adultes ? Comment on fait pour toucher les adultes ? Il y a des dispositifs d'éducation populaire mais qui restent un peu détruits de niche. Il y a des associations qui regroupent des gens mais ce sont souvent des gens qui sont un petit peu convaincus du truc. Et donc, comment on touche le plus grand nombre ? En réalité, il n'y a que dans les entreprises que tout ça peut se faire ou dans les grandes institutions. au travers de la forme professionnelle. Parce que si on voit bien le problème que ça peut poser d'un point de vue de la démocratie, on est tous à peu près conscients de ce truc-là aujourd'hui, on ne se rend pas compte que les fake news attaquent aussi à notre capacité à faire du business. Puisqu'elles attaquent la confiance, puisqu'elles attaquent la réalité des produits, puisqu'elles déforment un certain nombre de choses dans la vie réelle, donc pas virtuelle des réseaux, mais dans la vie réelle. Et donc, j'ai essayé d'adresser... ce public-là, et pour le faire, il faut passer par l'information et par les entreprises. Il y a quelque chose... Pardon, allez-y.
- Speaker #0
Pardon, je vous recoupe. Alors justement, pour que ce soit plus parlant pour celles et ceux qui nous écoutent, en entreprise concrètement, alors je sais qu'il y a plusieurs exemples, mais quel type de fake news on peut rencontrer en entreprise, que ce soit en interne, potentiellement, ou même des fake news qui peuvent venir mettre à mal la réputation d'une entreprise ? Est-ce que vous auriez un exemple à nous partager ?
- Speaker #1
Alors, on a des exemples. C'est très divers et très varié. Si on prend le cas du salarié qui tiendrait des propos complotistes ou de fake news, là, on a eu tout un tas d'anciens agents, notamment de la RATP, qui, au moment des attentats de 2015, ont tenu des discours niant l'existence des attentats, impliquant le gouvernement français et tout. et donc ces déclarations qui sont des déclarations faites par des citoyens qui ont bien le droit de dire ce qu'ils veulent ils rejaillissent sur l'image de l'entreprise parce qu'on dit c'est pas Jean-Claude du Puy, c'est Jean-Claude qui est machiniste à la RATP. Donc ça, déjà, ça fait un premier truc. Donc, ce cas-là, je crois qu'il est commun à peu près à tous les univers. Et la propension, enfin, entre guillemets, la part des gens qui adhèrent à ces idées-là, grandissant sans cesse depuis 15 ans, c'est à peu près logique qu'on le retrouve dans des discours publics. Mais ce n'est pas forcément là-dessus que les entreprises ont le plus de... Là, il y a un danger réputationnel, vous voyez bien. Ce n'est pas un danger de business. En gros, on a identifié trois cas. dans lesquelles les entreprises peuvent être victimes des faits de nous. Il y a le premier cas dans lequel elles sont attaquées. Ça, c'est ce qui est arrivé au groupe Vinci en 2016. Le groupe Vinci est victime d'un faux communiqué de presse qui usurpe son identité, qui est envoyé à toute la presse. Et la presse, voyant le logo, le nom de l'attaché de presse, le machin, il va dire « Qu'est-ce que disait ce communiqué de presse ? » Que le directeur des affaires financières de Vinci avait piqué dans la caisse. Et ça a une conséquence très, très directe en termes de business. En deux heures, Vinci perd. 7 milliards d'euros de capitalisation boursière. D'accord ? Donc, comment une fake news peut vous faire perdre 7 milliards d'euros ? Je pense que là, on a assez rapidement répondu au fait que ça touchait des questions de business. Mais là, dans ce cas-là, il y a une intention malveillante. Il y a quelqu'un qui fabrique un fake community. On ne sait pas qui est ce quelqu'un. Il y a une enquête. C'est très long. J'espère qu'on arrivera à le savoir. Mais en tout cas, vous voyez que là, l'entreprise est visée et elle en a une conséquence. C'est une attaque. Et les fake news peuvent être le véhicule de cette attaque. Le deuxième cas, il est... plus liées à la circulation de l'information aujourd'hui, c'est le moment où l'entreprise va être la victime collatérale d'une opération informationnelle. Vous vous souvenez des punaises de lit ? En octobre 2023, il n'y a plus une seule personne dans Paris qui veut s'asseoir dans le métro parce qu'il y a des punaises de lit partout. Et en fait, ce truc-là, c'est pas vrai. C'est une opération d'influence étrangère montée par les services secrets russes afin de décrédibiliser l'image de la France à six mois des Jeux Olympiques 2024. Mais ça a avoir une conséquence en termes de business. Il y a cinq entreprises françaises, six pardon, qui vont voir leur chiffre d'affaires baisser de manière très visible sur ces deux semaines où le buzz va exploser, qui sont les hôtels à corps, la SNCF, la R1TP, Air France et les cinémas Pathé et UGC, qui vont voir une baisse de leur chiffre d'affaires de manière très sensible, alors qu'il n'y a pas du tout de phénomène. Ce qui est assez intéressant dans cette histoire, c'est que là, on voit bien que les entreprises sont victimes d'une opération d'influence politique, une opération étrangère documentée par le service français Viginum, qui sont un peu les agents secrets qui monitorent les opérations d'influence étrangère dans le cadre de l'information. Et donc, là, on voit bien, on a un deuxième cas qui est différent. Les Russes n'avaient pas décidé de s'attaquer à Air France, à la SNCF, mais dans leur combat contre la France, ils touchent ces entreprises-là. Et qui vont avoir des conséquences parce que, notamment, et ça sera le point commun avec le troisième exemple, les entreprises n'ont pas sur-rééche.
- Speaker #0
Or, ça sera l'objet d'une autre question, donc on va être pas détaillés là. Vous me devancez.
- Speaker #1
En gros, le premier cas, c'est quand vous êtes ciblé. Le deuxième cas, c'est quand vous êtes la victime collatérale d'une opération informationnelle. Le troisième cas, à mon avis, va se multiplier au cours des semaines, des mois et des années à venir. C'est quand vous êtes victime d'un influenceur qui, pour défendre un point de vue, va s'attaquer à votre marque. On se transporte dans l'île de Mayotte au mois de mai 2024. Au mois de mai 2024, il y a une... Il y a plusieurs communications de l'ARS, l'agence régionale de santé à Mayotte, qui dit qu'il y a des packs d'eau cristalline qui sont rapatriés pour des raisons sanitaires. En janvier, premier communiqué, ils ne disent pas pourquoi, mais on rapatrie de l'eau cristalline. En mai, deuxième communiqué, il y a un problème d'eau cristalline, on rapatrie un certain nombre de packs. Quelques jours plus tard, l'ARS de Mayotte communique sur une épidémie de choléra sur l'île de Mayotte. Et bien, 48 heures après, vous avez une vidéo qui sort sur TikTok, qui est postée par une dame qui est... ni d'influenceuse russe, ni quelqu'un qui souhaite s'attaquer à Kristalline. Elle veut dénoncer le fait qu'un enfant est mort et que personne ne le fait. Elle dit qu'il y a un enfant de 3 ans qui est mort. Ça, c'est vrai. Et elle dit que cet enfant ne buvait que de la Kristalline. La vidéo fait 17 millions de vues sur TikTok en 3 jours. Et là, c'est terminé. Et du coup, là, l'image de Kristalline, d'un point de vue réputationnel, est attaquée, mais surtout dans la foulée. Vous pensez qu'à Mayotte, ils se sont jetés sur les packs de cristalline ? Pas du tout.
- Speaker #0
Non, ben non.
- Speaker #1
Donc ? L'image est de ce point de vue-là. On a un cas similaire, un peu plus récent, en 2025, autour des pattes Barilla. Les pattes Barilla, si vous tapez Barilla dans TikTok, vous allez voir tout de suite le mot insecte surgir, parce qu'il y a une théorie du complot autour du fait qu'il y aurait de la farine d'insectes dans les pattes Barilla. J'ai découvert que, visiblement, Panzani était eux aussi victime de cette cabale. Donc, vous voyez là qu'on est exactement dans un système où il y a une fausse information qui s'attaque à la réputation. bien entendu, mais qui derrière a des conséquences très claires en termes de business. Un tout petit point assez rigolo sur le deuxième exemple qu'on a donné, c'est qu'il y avait des punaises de ligne, soi-disant, dans les cinémas UGC, dans les cinémas Pathé. Mais visiblement, pas du tout dans les MK2. Elles sont quand même vachement tatillonnes, ces punaises de l'ident. Elles sont émettives. Elles ne vous pâchent sur un MK2. Non, en réalité, ce n'est pas ça. C'est que Bojan, à Saint-Pétersbourg, le petit agent secret russe, qui a fait les petits tweets d'Astroturfine pour amplifier la conversation autour des punaises de l'ident, il avait sur sa petite fiche, pâté, je sais, il n'avait pas aimé.
- Speaker #0
Alors bon, on va essayer de ne pas rentrer dans la psychose parce que c'est quand même assez flippant ce que vous nous partagez là, Thomas.
- Speaker #1
On n'a pas parlé de l'euro à peine là encore.
- Speaker #0
Alors pour les dirigeants, mais aussi les entrepreneurs qui nous écoutent et qui peuvent faire face ou qui peuvent être confrontés à ce type de fake news, les concernant ou concernant peut-être des collaborateurs, d'autres partenaires, etc. Quels sont les signaux faibles qui peuvent nous alerter ? Qu'est-ce qui peut nous mettre un peu la puce à l'oreille ? Alors, j'ai repartagé une de vos interviews, une de vos interventions récemment et j'avais beaucoup apprécié. cet exemple que vous nous aviez partagé sur le match du PSG et notamment, pourquoi est-ce que vous, vous aviez été tenté de croire, vous qui, désinformés, aviez été tenté de croire à une fake news ? Est-ce que vous pourriez nous partager ces petits signaux faibles ?
- Speaker #1
Alors, en réalité, il faut quand même avoir conscience d'un truc qui, probablement... Il y a des sondages qui montrent que la majorité des gens est persuadée qu'il y a un problème de fake news. On est à peu près à 70% des Français qui considèrent que les fake news sont un problème. et on a 80% des Français qui pensent que ça ne les concerne pas.
- Speaker #0
C'est un état qui n'est pas cohérent.
- Speaker #1
Mais ça veut dire, en fait, c'est quelque chose qu'on retrouve exactement dans les problématiques de sexisme en entreprise. C'est jamais moi. Ah non, attends, Jean-Pierre Delaconta, c'est un gros bosse. Ah mais moi, attends, on n'a pas de problème. Et donc, je crois qu'on a en plus sur les fake news le même problème. C'est-à-dire qu'on a tous l'impression d'être immunisés, prémunis, capables de se protéger. Et en réalité, on est tous un peu vitiles de nous-mêmes. Parce que les fake news,
- Speaker #0
ça marche avant tout parce qu'on a envie d'y croire.
- Speaker #1
effectivement ça même le plus grand fact-checker de la planète je ne dis pas ça pour moi mais même un expert de ces sujets quelqu'un qui depuis 10 ans travaille à lutter contre la désinformation peut tomber dans des pièges on est au mois de mai 2025 je regarde une vidéo sur TikTok comme je le fais 10 minutes par jour pour observer la désinformation TikTok est quand même une source assez fiable en termes de désinformation il y a une étude récente qui montre que 20% du total de TikTok est fake donc une sur une vidéo sur 5 c'est à peu près pas mal quand tu fais de la veille comme moi c'est très utile le verbe est vidéo et je vois passer une vidéo qui me montre des images de la dernière finale de la Ligue des Champions PSG-Interminant un match remporté haut la main par le PSG qui gagne sa première Ligue des Champions qui est le 2e que le français aime faire c'est génial c'est super ils sont ravis sauf que sur le premier but et bien on me montre des ralentis des images avec des angles un peu particuliers il y a 6 défenseurs de l'Interminant dans la surface de réparation et les mecs ils fuient ma pigue ils regardent même pas le ballon ils sont à l'ouest de Cotard mais ça c'est pas possible parce que même moi qui fais du foot amateur à un niveau très faible je sais que, enfin franchement quand il y a un mec qui rentre dans la surface, tu défends donc là c'est le match de leur vie c'est pas possible que les mecs ne jouent pas au ballon et ne défendent pas comme des dingues alors que le PSG attaque, bah c'est normal, c'est parce que tout ça c'est une arnaque, le PSG avec le Qatar a acheté la finale de la Ligue des Champions et a gagné le truc comme ça et je vois la vidéo et je me dis, waouh attends, c'est quand même vachement convaincant comme argument 5, 10 secondes, allez, et puis là je dis waouh, Thomas non pas toi, mais voilà je vais vous expliquer pourquoi moi J'ai cru à ce truc. Eh bien, parce que moi, je suis supporter de Noël. Elle n'a jamais répondu.
- Speaker #0
Quoi d'un ? La faille ?
- Speaker #1
Bah oui, aussi, c'est des failles. Mais je pense qu'on a tous des failles. Et donc, le premier truc qu'il faut se dire, c'est qu'on a tous une tendance à aller dans le sens de ce qu'on croit déjà un peu. Et que notre manière de nous informer joue beaucoup là-dessus. En gros, les algorithmes des plateformes, des réseaux sociaux, ont tendance à nous renforcer dans nos croyances et à se servir de nos croyances pour nous radicaliser dans nos croyances. Je ne crois pas qu'ils veulent nous radicaliser. parce que ça nous maintient connectés. Ça joue sur notre temps d'attention. Et plus on est connectés, plus il y a du temps d'attention, plus ils savent qui on est, plus ils nous montrent des publicités, plus ils captent notre temps d'attention. Enfin, boum, boum, boum, boum, boum, boum. Et à la fin, les entreprises qui n'existaient pas il y a 20 ans sont les cinq plus grosses entreprises de la planète aujourd'hui. Ça, c'est les réseaux sociaux. Et donc, on est effectivement à la fois un petit peu les acteurs de tout ça, parce que c'est notre propre crédulité qui est en jeu. Et on est surtout les victimes de gens... qui se servent de tout ça contre nous. Donc, le premier truc à faire, c'est de savoir qu'il y a un problème. Si je vous dis, allez vous balader en forêt, c'est cool. Si je vous dis, allez vous balader en forêt, c'est cool. Mais il y a des loups, vous ne faites pas la même balade. Et bien, quand on vous informe...
- Speaker #0
On transpose ça, du coup, au niveau d'une entreprise. Oui. Ça donnerait quoi ?
- Speaker #1
Et bien, informe-toi sur Internet. C'est super. Mais il y a des fécondes. Sache-le. À partir du moment où toi... En fait, il y a plusieurs niveaux pour se protéger. Il y a un premier niveau qui est la conscience. On sait que ça existe. vous savez que quand vous allez traverser la rue il y a potentiellement des voitures donc regardez avant de traverser et bien en fait c'est à peu près la même chose on a tout un tas de petits réflexes qu'on peut mettre en place mais pour les mettre en place il faut faire la deuxième partie il faut observer il faut observer, surveiller et... Il faut observer de manière assez fine, et aujourd'hui il existe des outils pour le faire, notamment des outils de social listening, qui permettent de savoir comment on parle de vous sur les réseaux quasiment en temps réel. Donc c'est possible de savoir en identifiant votre secteur d'activité, en identifiant la sémantique associée à votre secteur d'activité, quand les mots de votre entreprise touchent les sphères complotistes ou les médias de fake news. c'est que ça va taper. Et donc, il faut être en capacité de préaviser. Donc, il y a un travail de veille informationnelle à faire comme il était fait il y a 20 ans par les services communication ou les services marketing pour essayer de comprendre comment on parlait de la marque. En réalité, tout ça n'est pas si nouveau. Moi, en 2015, quand je fais l'opération Conspihunter, donc quand on invente une fake news pour la diffuser et essayer de voir comment ça se diffuse et comprendre tout ça, on travaille déjà avec une entreprise de social listening qui s'appelle Flunfy et qui va suivre. notre vidéo fake sur Facebook pour cartographier la diffusion d'une fake news en temps réel. Et donc, on avait travaillé là-dessus. Mais ces gens-là, ils ne travaillaient pas avec des journalistes d'investigation qui n'avaient pas un ordre. Ils travaillaient avec Coca-Cola et Decathlon, qui payaient très cher pour savoir comment on parlait d'eux sur les réseaux. Et du coup, ils adaptent leur stratégie marketing en conséquence. Ils adaptent leur communication en conséquence. Et ça y forme de logique, tout ça. Mais donc, oui, il y a un premier truc, c'est de savoir qu'on a un problème. Quand on sait qu'on a un problème, on met en place des dispositifs. Ces dispositifs, ils sont, un, d'observer, deux, de former les gens. Parce qu'il y a une nécessité, comme dans les... En fait, il faut prendre les questions de Fetmuse comme les questions de cybersécurité.
- Speaker #0
Alors justement, encore une fois, vous m'avez devancé. C'était l'objet de ma question de l'imap.
- Speaker #1
Je sais déjà.
- Speaker #0
Ce n'est pas moi qui l'ai dit. Arrêtez, je vais finir par y croire. Sur la question de la formation, justement, moi qui évolue beaucoup dans le milieu des entreprises, qui suis au contact aussi bien de petites entreprises, mais aussi de gros groupes, déjà, vous parlez de la question de la cybersécurité. Encore aujourd'hui, c'est un sujet qui est mineur dans beaucoup d'entreprises. C'est un sujet qui est mineur. Et je me dis, aujourd'hui, vous parlez d'abord d'un travail de veille qui, aujourd'hui, est quasiment pas réalisé ou très peu réalisé dans les entreprises. Peu réalisé.
- Speaker #1
Il est peu réalisé.
- Speaker #0
Il est peu réalisé.
- Speaker #1
Et c'est là qu'il y a peut-être quelque chose d'intéressant, c'est que ceux qui le réalisent ont un avantage concurrentiel terrible sur les autres.
- Speaker #0
Indéniable. C'est indéniable. Ça, c'est évident.
- Speaker #1
Mais,
- Speaker #0
mais... Deuxième point...
- Speaker #1
On parle à un patron et que tu lui dis qu'il y a la concurrence qui fait un truc, ça déclenche un peu plus vite.
- Speaker #0
Eh oui, mais la concurrence... En fait, la veille, elle se fait peut-être que sur le sujet concurrentiel, mais elle ne se fait pas de manière plus large. Et notamment dans le cas que vous nous avez partagé pour Crystalline, la fake news, elle ne viendra pas toujours du concurrent. En fait, c'est ça. elle viendra parfois même du collaborateur. Une fois qu'on a mis en place une veille et qu'on prend le sujet à bras-le-corps, il y a la question effectivement de former. Mais quand je vois aujourd'hui comment sont traités les sujets, notamment de cybersécurité, mais aussi de fake news, où on y croit sans trop y croire, et encore une fois, vous l'avez dit, c'est déjà de comprendre qu'il y a un problème à notre niveau pour pouvoir se poser la bonne question et mettre en place des choses. Le chantier, il est énorme aujourd'hui, et encore plus avec l'IA qui arrive. où aujourd'hui, on n'arrive plus à déceler une vidéo vraie d'une vidéo générée par l'IA, idem pour les photos. Je me dis, par où on commence ? Quand on est dirigeant ou entrepreneur, par où on commence ?
- Speaker #1
Je pense qu'il faut d'abord, encore une fois, c'est toujours la même histoire, il faut d'abord faire de la conscience. Il faut que les gens aient conscience qu'il y a un problème. Donc, il faut leur parler, il faut communiquer dessus, il faut faire des conférences, il faut en tout cas que le message passe qu'il y a un problème. parce que Quand on comprend qu'il y a un problème, déjà, on sait qu'il y a un problème et instinctivement, on modifie notre comportement. Deux, si on sait qu'il y a un problème, on peut mettre en place un certain nombre de dispositifs. On a parlé de veille et d'écoute. Et on peut aussi imaginer, effectivement, entraîner les collaborateurs. Parce que repérer une fake news et surtout déconstruire un mensonge et communiquer dessus, ça s'apprend, on s'entraide et c'est possible de le faire. Il ne faut pas se tromper dans l'objectif de ce travail-là. Ce travail-là ne convaincra jamais les complotistes. Mais ce n'est pas grave. Ils ne sont pas la majorité de nos concitoyens. Ils sont une minorité d'un côté. Les fact-checkers sont une minorité de l'autre, au milieu. Vous avez l'immense majorité des Français qui est indécise. Et le problème aujourd'hui, c'est que sur ces sujets, on laisse les complotistes être les seuls à leur parler. Donc il faut parler. Il faut prendre la parole. Il faut répondre, il faut déconstruire ces discours. Bien sûr que vous ne convaincrez pas les mecs complètement dingues qui ont fait 2000 tweets pour dire que Cristaline, c'était hyper dangereux. Mais tous les gens qui ne connaissent pas cette histoire, s'ils ne voient que la vidéo TikTok de la nana qui dit que Cristaline, c'est dangereux et que Cristaline ne réagit pas, à un moment, qui ne dit beau qu'on sent. Et donc, ça joue comme ça. Donc, il faut aller occuper ce terrain. Il faut aller parler. Et pendant très longtemps, on a eu peur d'un truc. On a eu peur de ce qu'on appelle des fesses très ondes. Vous savez, c'est l'idée que quand on parle d'une rumeur, pour la déconstruire, en réalité, on va lui donner une ampleur de dingue. Et donc, on aurait dû rire, ça serait bien passé. Et en fait, on en parle et c'est l'horreur. Mais ça, c'était vrai à l'époque où c'était la télévision. Je prends juste un exemple et je vais vous donner des chiffres très concrets pour que vous voyez bien le truc. En novembre 2021 sort l'affaire Brigitte Macron est un homme qui a lu des théories du complot les plus virales de ces dernières années, peut-être même la plus virale. Moi, à l'époque, j'ai une émission sur LCI qui s'appelle Anticomplot et... je choisis, en discussion avec les rédacteurs en chef, de ne pas parler de ce sujet. Parce que, franchement, ça me dégoûte. Ce truc est tellement dégueulasse, et tellement vil, tellement sale, tellement odieux, misogyne, homophobe. Il n'y a rien qui va dans cette histoire. Et moi, je ne veux pas en parler, parce que je trouve ça dégueulasse. Et on n'en parle pas. Et on n'en parle pas avec l'idée que si on en parle, on va légitimer l'histoire. À l'époque, mon édition sur NCI, elle fait 100 000 téléspectateurs. D'accord ? L'affaire Brigitte Macron est un homme en 2025. c'est 2 milliards de vues en français, 4 milliards et demi de vues dans le monde. Vous pensez vraiment que c'est dans mon émission de télé, à 100 000 téléspectateurs, que j'aurais fait un FES 13 ans ? Mais pas du tout. En réalité, si on avait fait ça à cette époque, on aurait donné à tous les gens qui ont posé la question de dire, en fait, non, attends, regarde, non, c'est pas sérieux ce truc. Et puis ça vient de machins, ça vient de mecs d'extrême droite qui sont connectés entre eux, peut-être même qu'il y a des... Donc, à un moment, il faut parler et il faut répondre à ces sujets. Alors, probablement qu'il ne faut pas le faire à toutes les mythes gros tweets qui sont publiés, mais il faut répondre. Et donc, Staline, quand on l'accuse de donner le choléra, doit dire, mais non, c'est pas vrai. On a 99% de nos bouteilles qui sont testées, on a 69 médecins qui répondent de la qualité de l'eau, on fait des ex-ex, des trucs tous les jours. Enfin, c'est pas possible, en réalité. Donc, il y a un moment. Il ne faut pas avoir peur de dire quelque chose de factuel. Et c'est pour cela que je fais la comparaison avec les questions de cybersécurité, parce qu'on voit bien que... Les questions de cybersécurité et les questions de lutte contre la désinformation ont quelque chose de commun. C'est que quand la crise surgit, il est trop tard pour se former. En fait, il n'y a que la prévention qui marche. Il faut que vos équipes soient formées sur le sujet parce que quand ça arrive, vous allez dire, « Oula, attends, quick news. Ok, d'abord, on regarde, on observe, on essaie de comprendre où ça vient. Ok. Deux, on déconstruit, on va apporter des éléments factuels, on va donner, on va communiquer. Trois, on va répondre à ces gens-là. Et on va aussi peut-être cravaguer, savoir qui sont les gens qui disent ça de nous. Parce qu'effectivement, si vous êtes une marque d'automobile et qu'il y a une info dégueulasse qui circule sur le fait que vos voitures n'ont pas de train, si le truc vient d'une autre marque automobile, ça dit quand même quelque chose. Donc, ce n'est pas inutile de l'expliquer au grand public. Je crois qu'il y a quelque chose sur lequel on a eu peur de réagir. Parce qu'on pensait vivre encore dans le monde d'avant. Mais on n'est plus dans le monde d'avant. On est dans un truc aujourd'hui. Et je voulais juste, parce que vous avez posé la question sur l'intelligence artificielle, Je ne fais pas du tout partie de ceux qui ont peur de l'IA de ce point de vue-là. Je pense qu'on se trompe de problème. Si vous prenez un papier à l'écran et que vous écrivez des poèmes ou des bonasses de mort, est-ce qu'on va vous interdire le papier à l'écran ? Non. On va réguler l'envoi du courriel.
- Speaker #0
Ah oui ? Ah non, la question, c'est de ne pas vraiment... Est-ce qu'il faut réguler ?
- Speaker #1
Non, mais moi, mon problème aujourd'hui, ce n'est pas l'IA. Je n'ai aucun problème avec le fait que Jean-Kévin de 14 ans et demi fasse une fausse vidéo de Macron dans sa cam. Je m'en fiche. Mon problème, c'est qu'il peut la diffuser sur Twitter et dire que c'est vrai. Et le problème, c'est X, Facebook, Meta, Instagram, TikTok, qui ne sont pas régulés. C'est cet espace qu'il faut réguler. Si on régule la circulation de l'information et qu'on rend les plateformes responsables de ce qu'elles diffusent, eh bien, c'est terminé. Si elles ont des amendes colossales à chaque fois qu'il y a une fake news, eh bien, vous allez voir, elles feront moins de bénéfices, mais ça sera plus simple. Et je crois qu'il y a un truc de cet endroit-là. Et là, on le voit. L'intelligence artificielle dont j'ai peur, c'est pas celle qui fait des photos et des vidéos, c'est celle d'Elon Musk. qui nous explique, comme ça a été découvert ce matin dans un article, que Grock, l'IA de X, explique que le réchauffement climatique, ce n'est pas vrai, que la Shoah, c'est un mytho, et tout ça. Donc, on est quand même sur un truc de dingue, de révisionnisme, d'initiationnisme, porté par l'homme le plus riche de la planète, qui a modifié l'algorithme de son outil numérique afin que, quand il rote, la totalité de la planète s'entend.
- Speaker #0
Pardon, excusez-moi,
- Speaker #1
ça ne me vient pas, c'était la réalité. J'ai hésité.
- Speaker #0
Mais l'image est très...
- Speaker #1
J'ai fallu aller un peu plus loin dans l'image.
- Speaker #0
Non. On va rester là.
- Speaker #1
Oui, mais parce qu'en fait, en réalité... En réalité, c'est vraiment ça. Quand Elon Musk s'exprime, il ne nous montre pas de l'intelligence. C'est une espèce de déruptation. Et déjà, rien que ça, ça ne devrait pas être diffusé à tout le monde. Et surtout, ce n'est pas lui qui doit décider de qui voit.
- Speaker #0
Et du coup, je reviens en fait sur mon questionnement et qui est, je pense, le questionnement de nombreux, nombreux, nombreux dirigeants et entrepreneurs. C'est face à ce chantier énorme, c'est-à-dire que là, on a le travail à faire en interne, de veille, d'information, etc. Mais on a quelque chose qui nous dépasse et que vous venez d'exprimer, qui est la régulation des réseaux sociaux. C'est-à-dire qu'on ne sait plus juger de la véracité ou pas. On est en difficulté et là-dessus, on n'a pas la main mise sur les réseaux sociaux.
- Speaker #1
Non, parce qu'en fait, en réalité, on n'a jamais su faire la différence entre le vrai et le faux. Il ne faut pas croire qu'on ait su le faire à un moment. Ce n'est pas vrai. On n'a jamais su le faire. On avait créé une société dans laquelle il existait des tiers de confiance sur lesquels on se reposait pour faire ce travail. On ne vit pas dans une société, on ne vit pas dans un monde dans lequel on fait tout nous-mêmes. On vit dans une société de la délégation. Vous n'êtes pas experte en carie ou en détartrage. Vous allez voir un tot, je vais le faire pour vous. Vous n'êtes pas experte en budget national. Vous votez pour un député qui va porter vos idées à l'Assemblée nationale. Vous ne savez pas faire du pain. Enfin si, peut-être, maintenant avec le Covid, on a tous appris à faire du pain.
- Speaker #0
C'est ça que je sais faire.
- Speaker #1
Vous voyez ce que je veux dire ? Il y a un nombre. Oui, oui,
- Speaker #0
oui.
- Speaker #1
Une société de la délégation dans laquelle on délègue un certain nombre d'actions et de fonctions à des tiers de confiance. Et ces tiers de confiance, en fait, ils s'appelaient les médias. Et ils avaient une forme de vertu parce que quand vous achetez un journal, faites un acte d'achat. C'est un contrat, l'acte d'achat. Vous achetez un produit. Le producteur de ce truc vous garantit la qualité de ce produit et ça coûte tant. Eh bien, vous avez une relation avec cette personne. Il vous informe, vous payez pour vous informer, il vous donne la meilleure information possible avec les limites de ses biais idéologiques. Mais il y avait ça. Et en réalité, c'est ça. C'est le fait que non seulement les tiers de confiance ont été décrédibilisés, que tout a été horizontalisé. En gros, Madame Bichu, c'est comme un spécialiste du GIEC pour nous parler du réchauffement. et si l'idée que tout le monde puisse s'exprimer librement à quelque chose de... d'extrêmement démocratique et libertaire et qui est merveilleux. Il y a l'idée que tout le monde doit être entendu à la même hauteur. En réalité, ce n'est pas ça l'histoire de nos civilisations. L'histoire de nos civilisations, c'est une modération de la parole et c'est une légitimation de la parole par un certain nombre de critères qui sont décidés par la société. C'est pour ça qu'il y a des paires, entre guillemets, que quand vous êtes un médecin, il y a d'autres médecins qui vous observent quand vous êtes un économiste. Il y a d'autres économistes qui vous observent quand vous êtes un patron. Il y a Merci. d'autres patrons qui vous observent, il y a vos salariés qui vous observent, il y a des syndicats. Donc, on a un système qui fonctionne là-dessus. Et ce système, il a explosé de plus en plus. Et le problème auquel on est confronté aujourd'hui, il est double. Il est à la fois de tout ce qu'on peut faire, nous, à notre échelle individuelle, de nos structures, de nos entreprises, et puis il y a un niveau qu'on ne peut pas toucher de cette manière-là. Donc, il y a un moment où il faudra réguler cet espace. Et il faudra que les politiques acceptent l'idée qu'il faut réguler cet espace. Le problème, c'est que le premier qui dit « j'ai élu les Facebook » , il n'a plus de page sur Facebook. En tout cas, il n'aura plus jamais de reach, d'audience. Et donc, il ne le fera jamais. Donc, il faut espérer quelque chose qui est très rare dans l'espoir de l'humanité. Mais il y arrive, qui est le moment où un petit groupe de gens décide de s'allier pour changer les choses de manière progressiste et positive. Les grandes transformations positives de l'histoire de l'humanité n'ont jamais été faites par la masse. Elles sont faites par des minorités éclairées.
- Speaker #0
il va nous falloir éclairer ces minorités et espérer qu'elles soient présentes dans les différentes couches de la société. C'est-à-dire à la fois, bien sûr, dans le travail de l'information, parce que c'est essentiel. C'est ce qui nous permet de faire nos opinions sur tout le reste. Donc la qualité de l'information, c'est fondamental. Mais il n'y a pas que ça. Il y aura tout un tas d'autres domaines dans lesquels il faudra être capable de s'améliorer sur ces sujets. Et en même temps, moi, j'ai quand même une forme d'espoir, à force de travailler sur ces sujets, à voir que... l'éducation, ça marche. La formation, ça marche. Ça a des impacts. Moi, je peux vous donner un exemple. Sur les entreprises, je n'ai pas assez de recul. Mais sur les ateliers que je fais en classe, il se trouve que l'université de Dijon a repris mon atelier pour en faire une expérimentation sociale dans l'académie de Dijon. Donc, ils ont fait passer l'atelier que je fais de lutte contre l'effet Gnouz à 1000 lycéens. Et ils ont fait un questionnaire autour d'eux le jour de l'exercice et un mois après pour voir si ça tombe de choses qui avaient changé. C'est du déclaratif. Je ne suis pas dans le téléphone des gamins pour savoir si c'est vrai. Mais il y a 60% des gamins ayant participé aux ateliers qui déclarent avoir modifié leur pratique informationnelle de manière positive.
- Speaker #1
Ça ne surprend pas.
- Speaker #0
En vérifiant les choses. Donc, ça dit quelque chose. Quand on fait une campagne pour que les gens arrêtent de fumer et qu'il y a 5% des gens qui arrêtent de fumer, on est ravi. C'est très dur de faire changer les comportements des gens. Là, on a 60% des gens qui changent sur 1000 lycéens dans une académie. ça dit quelque chose de la force de l'éducation, en réalité. Mais ça ne devrait pas nous surprendre.
- Speaker #1
Non, mais moi, ça me...
- Speaker #0
Que l'éducation, ça vince. Et que mettre des moyens dans l'éducation, ce n'est pas un truc d'épile pour préparer l'avenir.
- Speaker #1
Ah non, ah non.
- Speaker #0
Ça devrait peut-être nous convaincre. Mais voilà. Mais je crois donc que ce type de travail a une vraie vertu parce qu'il laisse des traces. Il laisse des traces qui sont un petit peu invisibles. Mais ne vous trompez pas. Saint-Exupéry le disait beaucoup mieux que nous. L'essentiel, c'est ce qui est invisible à l'œil.
- Speaker #1
En attendant que... les réseaux sociaux ou en tout cas qu'il y ait plus de régulation, il nous faut quand même des billes aujourd'hui pour pouvoir faire face aux fake news. Qu'est-ce que vous donneriez comme premier conseil à un dirigeant d'entreprise ou même à un entrepreneur ? Parce que je prends à l'échelle de l'entreprise, mais aujourd'hui, je suis entrepreneur et on a beaucoup d'entrepreneurs qui ont parfois une très très grosse visibilité et qui sont victimes aussi de fake news. Qu'est-ce que vous leur donneriez comme... premier conseil. Vous avez beaucoup parlé de la prise de parole et moi j'en suis convaincue aussi que de s'exprimer c'est aussi déjà éteindre un peu le feu qui est attisé ou en tout cas le réduire et recréer un certain lien de confiance, en tout cas d'essayer de le recréer. Qu'est-ce que vous leur donneriez éventuellement comme clé vraiment actionnable ?
- Speaker #0
Alors, la première clé, on sait que ça existe. La deuxième clé, comme on sait que ça existe, on observe. La troisième, Et bien c'est quand ça arrive. Il y a une fake news ? Ok. Qui me parle ? De quand ça date ? Quelle est la source ? On se pose des questions. En fait, il y a un moment, je suis désolé pour vos auditeurs, ils vont être obligés de faire un travail de journaliste s'ils veulent lutter contre ces fake news. Il n'y a pas vraiment d'autre manière. Mais non, mais en fait, c'est ça. C'est terrible à dire, mais si vous voulez, si les gens veulent s'informer seuls et produire de l'information seules sur leurs réseaux sociaux, ça me paraît un peu contradictoire d'imaginer qu'on peut faire tout ça sans jamais savoir ce que c'est que le métier de journaliste. Si on reprend l'exemple du pain pendant le Covid. Tout le monde a regardé des tutos. Il n'y a pas un mec qui dit « Je vais faire du pain et je le fais comme je veux. » Non. Il y a des règles, tu suis le truc et tout. Vérifier une info, c'est pareil. Donc, on vérifie. Donc, il y a les deux premières étapes qui sont un peu des étapes de prévention, on va dire de comportement. Et derrière, une fois qu'on a une info qui sort et qu'on veut la vérifier, il faut la vérifier. Donc, pour la vérifier, on peut commencer par se poser trois questions qui me parlent de quand ça date et quelle est la source. Quand on arrive à répondre à ça, on évite 75% des bêtises. Mais il reste quand même...
- Speaker #1
Quand ça prie le peu parole.
- Speaker #0
Déjà, dans ma vérification, on est à peu près capable d'éliminer 75% des pièges.
- Speaker #1
Ok.
- Speaker #0
Ok. Si on veut monter plus loin, il faut rajouter des questions. Et il faut se demander, est-ce que cette info que je vois circuler sur les pâtes barilla qui seraient plaides de farine d'insectes, est-ce qu'elle est recoupée ? Ça veut dire, est-ce que vous avez un seul site qui en parle ? Trois sites, une radio, une télé ? Douze sites ? trois médias, quatre télé, deux hommes politiques, une association. En gros, plus vous avez de personnes qui partagent la même information, plus ça doit nous aider à trouver qu'elle est vraie. Le meilleur exemple, c'est les chiffres du chômage. Les chiffres du chômage, dans Libération, c'est la faute des patrons, dans Le Figaro, c'est la faute des chômeurs, mais vous avez de bonnes chiffres. Donc, vous êtes à peu près sûr du chiffre du chômage. On a donc ces trois premières questions qui me parlent de quand la source. quatrième question, est-ce que c'est recoupé ? Et la cinquième question, c'est le contexte. Est-ce que cette information, elle est présentée dans le contexte dans lequel elle a été produite ? Et surtout, est-ce qu'on vous laisse juger de ce contexte vous-même ? En général, quand on ne vous laisse pas juger du contexte dans lequel l'information a été produite, c'est qu'il y a un « nous » . Et quand il y a un « nous » , il ne faut pas le laisser rentrer dans la bergerie. Donc il y a un moment où il faut aussi être capable de faire ce truc-là. Mais vous voyez que ça, ces cinq questions, ça va prendre entre 30-40 minutes dans les meilleurs temps, parfois 2, 3, 4, 5 heures, parfois plus. Et c'est dans ce temps-là qu'il y a la possibilité du piège. On a un exemple sur cette temporalité qui va vous intéresser. En 2016, durant la campagne américaine, il y a deux universités qui essaient de mesurer la propagation des rumeurs sur le réseau social Twitter à l'époque. Ils prennent des infos qui sont des rumeurs et qui vont s'avérer vraies ou fausses. En gros, une rumeur qui s'avère vraie, donc une vraie info, il faut deux heures pour le démontrer. Une rumeur qui va s'avérer fausse, il faut en moyenne 14 heures pour la déconstruire. Donc vous avez là 12 heures durant lesquelles le mensonge peut circuler sans être attaqué parce qu'on n'a pas le temps de le déconstruire.
- Speaker #1
Cette différence-là,
- Speaker #0
elle fait tout. Elle fait tout parce que pendant ces 12 heures, le mensonge profite des algorithmes pour se renforcer, se diffuser. Et à la fin, ça fait deux trucs. Le premier, c'est que le mensonge passe par l'ascenseur alors qu'il y a la vérité pour l'escalier. Et le deuxième, c'est que l'ampleur de buzz liée à l'information négative, parce que les fake news sont souvent des informations négatives, il est beaucoup plus fort que sur les informations positives. Ça, ce n'est pas la faute d'Elon Musk, même s'il n'a pas de problème. C'est la faute du cerveau humain. Il se trouve que les informations négatives captent mieux notre attention que les informations positives. Il se trouve même que, et ça c'est encore plus pervers, la quantité d'énergie en termes caloriques demandée par votre cerveau pour accepter une idée qui va dans le sens de ce que vous croyez déjà, est infiniment moindre que l'énergie nécessaire à votre cerveau pour rejeter une idée. Ça veut dire que physiologiquement, on est désavantagé par rapport à ceux qui savent. Ce qu'on comprend aujourd'hui, Et c'est vraiment là qu'on a, encore une fois, le problème le plus profond. C'est que, on l'a dit tout à l'heure, faire changer d'avis quelqu'un, c'est très difficile. Mais il y a un truc qui montre qu'on peut faire changer d'avis quelqu'un dans 3 à 4 cas sur 5. C'est quand je sais qui vous êtes, je sais ce que vous pensez, mais vous ne savez pas que je le sais.
- Speaker #1
Ça aussi, c'est un avantage concurrentiel.
- Speaker #0
Bah oui. Moi, je suis capable d'adapter mon discours en conséquence. Si je parle avec vous, je vais utiliser que des exemples de business. Et du coup, vous allez me trouver génial. Si on raccroche et que je parle avec un député de la France Insoumise et que je lui dis tout ce qui se passe à Gaza, il va me trouver génial. Si je raccroche et que je parle avec un député du Rassemblement National et que je lui dis à quel point on a un problème avec l'immigration dans ce pays, il va me trouver génial. Donc ça, c'est très pervers et c'est beaucoup plus puissant. Et là-dessus, on a un énorme problème parce que ceux qui nous connaissent le mieux aujourd'hui, c'est les réseaux sociaux. Et comme ils ont basculé dans la défense d'un certain truc... et notamment d'un courant idéologique extrêmement identifié désormais. Je pense qu'on pouvait se poser la question mais bon, quand Elon Musk fait des saluts nazis, je pense qu'il faut arrêter de se poser la question. Il fait des saluts nazis et donc il est sur cette ligne politique-là. Et donc il défend cette ligne politique-là. Donc ce n'est pas qu'une entreprise. Ce n'est plus qu'une entreprise. C'est une entreprise d'information qui défend des idées d'extrême-droite, qui essaye de les imposer. Donc on a quelque chose et si moi je peux accepter toutes les idées politiques, l'extrême-droite est clairement en dehors du champ démocratique de l'une pour l'autre. Donc il y a un truc qui ne va pas du tout dans ce que nous vivons aujourd'hui. Et si nous sommes capables de nous protéger d'un certain nombre de choses, il y aurait une étape supplémentaire qu'il faudra toucher. Mais déjà, si on apprenait à mieux nous connaître nous-mêmes, à mieux connaître nos failles émotionnelles, informationnelles, d'opinion, d'une certaine manière, on serait beaucoup plus capables de se protéger. Donc je crois que la vraie piste, elle est avant tout de se renforcer nous-mêmes. Là-dessus, ces étapes de renforcement, elles passeront par de la pédagogie. elles passeront par de la formation et c'est pour ça que moi j'ai j'ai pas commencé par créer une formation j'ai commencé par créer un quiz j'ai créé un quiz 20 minutes 20 questions pour s'auto-évaluer sur le fait là on a 6000 personnes qui ont pris ce quiz la note moyenne est de 9,5 sur 20 ah ouais et les gens qui ont fait ce quiz majoritairement des gens qui ont trouvé ce quiz sur LinkedIn suite à des publications qu'on avait fait nous qui sont des gens qui sont des CSP+, qui sont des gens qui sont dans la communication dans le marketing ah mais ça me surprend pas en fait Merci. Ce sont des gens qui sont persuadés d'avoir aucun problème avec les fépiques. Et quand ils ont la note, ils nous écrivent pour nous engueuler. Ben oui, il y a tout le truc. Ce qui est marrant, c'est qu'il y a deux types de comportements. Il y en a qui disent, attendez, vraiment, c'est abusé et tout. Et puis, il y en a qui publient eux-mêmes leur note en disant, j'ai un problème, mais j'ai une solution. Parce qu'effectivement, je n'allais pas laisser les gens avec une mauvaise note comme ça. J'ai aussi créé, donc avec le groupe Cidieux, une formation numérique d'une heure et demie en une heure d'eau qui est offerte, qui est mise à l'exposition de tous les Français s'ils veulent la faire. et qui permet effectivement de rattraper un certain nombre de trous dans la raquette qui auraient pu être détectés par sous-cuisse.
- Speaker #1
C'est un cuisse qu'on pourra partager en description de l'épisode, Thomas ?
- Speaker #0
Avec grand plaisir, il est là pour ça. Il est là pour ça,
- Speaker #1
un père.
- Speaker #0
Et d'ailleurs, on peut même dire aussi que ce quiz, il est un peu générique. Mais qu'effectivement, j'ai de plus en plus de demandes d'entreprises qui souhaitent disposer d'un quiz un peu personnalisé, soit sur leur marque, soit sur leur secteur d'activité, soit sur leur industrie. Et du coup, on fabrique aussi tout ça avec l'idée que plus on va fabriquer de contenu, d'information, plus on va mettre à la disposition du grand public des outils qui lui permettront de se protéger. Il n'y aura jamais une espèce d'outil numérique, de machine, d'algorithmie, d'intelligence artificielle qui nous protégera de la désinformation. Ce n'est pas du tout comme ça que ça va fonctionner. Votre meilleur outil, c'est ça, c'est votre cerveau. Entraînez-le, entraînez-le, faites-le fonctionner. Et plus vous le ferez fonctionner, mieux il va fonctionner.
- Speaker #1
Je crois qu'on a fait le tour de la question, Thomas. Et puis, je partagerai aussi les différents liens. Une dernière petite question. Je reviens sur ce fameux délai de 12 heures dont vous avez parlé. Quand on est, encore une fois, dirigeant et que son entreprise fait face à une fake news, comment est-ce qu'on peut juger du bon moment pour prendre la parole ? Est-ce qu'il faut un peu anticiper et dire qu'on est sur le sujet ? Est-ce qu'il faut attendre d'avoir suffisamment d'éléments pour prendre la parole ? Vous avez évoqué le fait qu'il soit décisif. Comment est-ce qu'on juge le bon moment ?
- Speaker #0
Il y a deux questions dans votre question. C'est-à-dire qu'un sensible... En fait, non, mais ce que je veux dire, c'est que... Grosso modo, toutes ces problématiques, elles prennent du temps. Vérifier, ça prend du temps. Réfléchir à comment on va communiquer, ça prend du temps. Si on veut communiquer, parfois, il faut bénéficier d'un carrefour d'audience. Et donc, il faut attendre d'avoir le passage dans un journal télévisé, dans une chaîne d'infos en continu et tout. Donc, il y a plein de questions de temporalité. Mais on l'a dit déjà, si on observe, on peut réagir plus vite. Donc, il y a quand même un premier truc qui est de... surveiller l'univers dans lequel on mène. Parce que quand on ne le surveille pas, on prend la crise au dernier moment, quand elle est déjà trop grosse. Donc il faut surveiller. Parce que quand on surveille, on peut prendre les choses un tout petit peu en amont. En tout cas, ne pas être complètement au moment où c'est terminé et où vous ne pouvez plus rien faire. La deuxième question que vous posez, c'est-à-dire à quel moment il faut parler, mais je crois qu'il faut réagir le plus rapidement possible parce que, en fait, la circulation de l'information fait que chaque seconde que vous perdez, Eh ben... le gorson. Elle nourrit encore. On gagne 12. Vous, vous perdiez une seconde, lui, il en gagne 12. Donc, si on reprend le chiffre de tout à l'heure. Donc, je crois qu'il y a quelque chose qu'il faut bien comprendre, c'est qu'il y a une question de temporalité, ça c'est certain, mais il y a une question aussi peut-être de communication au long cours. Si vous êtes Monsanto et que tout le monde vous déteste parce que vous polluez la planète, eh bien, ça va être difficile d'expliquer que vous êtes un mec vertueux. Si vous êtes Decathlon, une marque qui a plutôt une bonne image, qui, même cristalline. Cristaline avait misé sur Giroud, le coach de foot Houdon, voilà donc en fait, il y a quand même un peu l'idée que plus on travaille sur le temps long la question de la crédibilité de l'entreprise de la parole qui a été tenue et bien en réalité, mieux vous communiquez plus on va vous faire confiance quand j'aurai une crise si vous avez passé votre vie à, on va pas dire mentir mais à choisir le côté le plus intéressant de la vérité afin d'en tirer un avantage commercial Bien. vous prenez un risque au moment où il y aura quelque chose un peu dans les interstices entre le vrai et le faux, où on vous le reproche. Donc, il y a quelque chose qui est de l'ordre de la communication vertueuse au long cours, qui va vous aider ce jour-là. Si vous avez toujours été quelqu'un de crédible, quand plus vous avez souvent dans ces cas-là un peu des contacts avec certains journalistes, si vous avez déjà fait une interview, vous avez le moyen de communiquer. Et sans en faire une histoire de connivance, c'est absolument pas ce que je veux dire. B. il est possible d'avoir une relation de confiance avec quelqu'un, y compris quand on n'est pas d'accord avec lui.
- Speaker #1
Bien sûr. Oui, alors ça, oui.
- Speaker #0
Et donc, je pense que c'est important pour que cette confiance existe, qu'elle soit travaillée en amont. En fait, moi, je crois qu'on rentre dans une époque un peu bizarre, dans laquelle la fiabilité de l'information va être absolument fondamentale. Absolument. Et qu'il va falloir qu'elle soit garantie, d'une certaine manière. Et donc, on est en train d'aller un petit peu vers ça. Le problème, c'est que dans le même temps, on a tout un tas de gens qui nous disent qu'il faut... que les entreprises, les choix, les stratégies soient data-driven ? Oui, certainement, mais qu'est-ce qui se passe quand on est bad data-driven ? C'est exactement ce qui est en train d'arriver à tout un tas d'entreprises françaises qui se sont fait exploser par des histoires de fake news. Ils ont vu, moi je suis sûr, les gens de Crystalline, ils ont vu la vidéo à 17 millions de vues, ils ont dit si on met une pièce là-dedans, ça va faire 30 millions de vues. Ils ont été bad data-driven.
- Speaker #1
Alors, du coup, vous me donnez une piste pour un prochain épisode, Thomas, sur notamment la marque entreprise et comment est-ce qu'on fait au long cours avec cette communication pour avoir une marque, finalement, qui va inspirer confiance, même si on n'obtiendra pas l'acceptation de tous, mais qu'on soit quand même sur un certain degré de confiance. On arrive à la fin de cet épisode. Moi, j'ai été ravie vraiment de vous recevoir, Thomas. Merci encore d'être venu nous sensibiliser sur ce sujet. Je pense qu'il est très important. Je pense qu'il est plus que d'actualité. Je pense que de toute façon, le monde de l'entreprise est intrinsèquement lié au monde économique, politique, géopolitique. Et que toutes ces sphères s'entrechoquent, s'entremêlent. Et que, effectivement, et la désinformation et la sensibilisation sont vraiment... fondamentales. J'espère que vous avez passé aussi un agréable moment.
- Speaker #0
C'était super.
- Speaker #1
Si cet épisode vous a plu, je vous invite à le noter, à le commenter sur votre plateforme d'écoute préférée, à le partager à d'autres entrepreneurs et dirigeants à qui il pourrait être utile. C'est la meilleure façon de faire vivre ces chroniques. Je vous souhaite une excellente journée, une excellente semaine et je vous dis à très bientôt.