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"L'IA ne sera pas incontournable pour tout le monde et tous les usages" 🎙️ Benoît Georges, journaliste IA aux Echos - Deep Media 🎧 cover
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"L'IA ne sera pas incontournable pour tout le monde et tous les usages" 🎙️ Benoît Georges, journaliste IA aux Echos - Deep Media 🎧

"L'IA ne sera pas incontournable pour tout le monde et tous les usages" 🎙️ Benoît Georges, journaliste IA aux Echos - Deep Media 🎧

17min |14/10/2025|

4

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"L'IA ne sera pas incontournable pour tout le monde et tous les usages" 🎙️ Benoît Georges, journaliste IA aux Echos - Deep Media 🎧

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17min |14/10/2025|

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Description

Benoît Georges, journaliste en charge de l'implantation de l'intelligence artificielle à la rédaction pour Les Echos est le cinquième invité de Deep Media.

Avec lui, nous allons voir comment se passe l'arrivée de l'IA générative au sein d'un quotidien national. Grâce à Benoît Georges qui a largement étudié le sujet depuis les Etats-Unis nous ferons un état des lieux de l'implantation de la technologie outre Atlantique avant de voir comment un titre de presse s'est emparé de ces outils, pour quels périmètres avec quels usages concrets et surtout pour quels publics. Entre journalistes enthousiastes et journalistes plus en retrait, le sujet est abordé selon le rythme et les envies de chacun. Entre achats de technologies extérieures et ajustements locaux, l'IA est vécue à hauteur de journalistes avec une volonté farouche de les mettre au centre du système. Nous évoquerons dans cet épisode plusieurs cas d'usage concrets ainsi que l'aspect formation tout comme la mise en place d'une charte d'usage au sein du titre. Enfin, nous tenterons de répondre à une question centrale, l'IA est-elle devenue indispensable ?


Deep Media l'interview épisode 13 🎙️ Benoît Georges, journaliste en charge de l'implantation de l'intelligence artificielle à la rédaction pour Les Echos


Deep Media, c'est le podcast qui prend le temps d'explorer les médias et leur mutation numérique aux côtés des professionnels et experts du secteur.

Dans un univers numérique à marche forcée, comment les médias se positionnent ils ? Comment s'organiseront ils demain ? Quels rapports développeront ils avec les outils et principaux acteurs du numérique pour préserver leur activité et assurer leur pérennité ?


Ces questions et bien d'autres vous passionnent ? Ca tombe bien, moi aussi.


Je m’appelle Julien Boujot, connaisseur et curieux de l'univers médiatique depuis plus de 15 ans, et je vous retrouve régulièrement pour Deep Media, le podcast qui prend le temps d’interroger le futur des médias auprès des professionnels du secteur.


Deep Media est un podcast auto produit par Follow Me Conseil, agence de formation et conseils stratégiques spécialisée en IA générative et social media.


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Il a fallu du temps pour les habituer, ils ont commencé à l'utiliser, et puis un jour ils sont venus me voir en me disant tu pourrais pas nous faire un titre, un prompt différent pour avoir des titres plus courts pour le print, parce que les titres web que vous avez ils sont un peu longs, et on l'a fait ensemble, j'ai dit d'accord mais vous le testez, avec moi.

  • Speaker #1

    Bienvenue dans DeepMedia, le podcast qui décrypte les médias à l'heure du numérique. Je suis Julien Bougeot, consultant social-média et IA générative, mais avant tout passionné et curieux de l'univers média depuis plus de 15 ans. Dans un écosystème en perpétuelle transformation, comment les médias s'adaptent-ils ? Comment se réinventer face aux nouvelles technologies et aux géants du numérique ? Quel avenir pour l'information et ceux qui la produisent ? Si ces questions vous intriguent, alors vous êtes au bon endroit. Deep Media, c'est un temps de réflexion et d'échange avec celles et ceux qui façonnent l'avenir du secteur. Benoît Georges, bonjour et merci de participer à ce podcast et d'être le cinquième invité au micro de Deep Media. Je vous présente comme journaliste en charge de l'implantation de l'intelligence artificielle à la rédaction pour les échos. En tout cas, je vous remercie d'être présent dans ce podcast. Tout d'abord, on va commencer par une petite présentation. Voilà votre périmètre d'activité au sein des échos et notamment dans cette partie intelligence artificielle.

  • Speaker #0

    Bonjour Julien, merci pour l'invitation. Alors je suis, comme vous l'avez dit, journaliste aux échos. Je suis arrivé depuis un bon moment, ça fait quasiment 25 ans que je suis arrivé à la rédaction. Je me suis occupé de différents sujets. j'ai été édit j'ai été chargé des pages idées débat et ça fait une dizaine d'années que je suis les sujets d'intelligence artificielle comme journaliste donc j'ai rencontré pas mal de chercheurs avant même qui est le gros buzz que l'on a pu connaître depuis 2-3 ans à l'arrivée de chat GPT et je suis rentré l'an dernier à Paris après cinq ans aux Etats-Unis à New York où j'avais continué à couvrir les sujets tech et comme il fallait que je trouve un nouveau travail j'ai proposé de faire quelque chose qu'on commence à voir dans les rédactions américaines, notamment au New York Times ou chez Bloomberg, qui est d'avoir quelqu'un dans la rédaction avec un profil de journaliste et qui s'occupe de tous les projets liés à l'IA. Et ça concerne les partenariats, ça concerne la formation des équipes, qui est un sujet super important, et ça concerne aussi le prototypage et l'adoption des outils. Parce que depuis presque un an maintenant à la rédaction, on a des outils d'IA qu'on a en partie développés nous-mêmes ou parfois qu'on achète sous étagère et qu'on donne à nos journalistes.

  • Speaker #1

    D'accord. Donc effectivement, on va revenir sur un peu ces outils. Donc c'est vraiment cette inspiration des États-Unis qui vous a poussé aussi à embrayer le pas et à mettre ça en place aux échos. Et c'est quoi en gros ce qui vous a motivé, ce que vous avez vu aux États-Unis où vous vous êtes dit, bon ben allez, il faut qu'on y aille en France, on ne peut pas passer à côté ?

  • Speaker #0

    Alors les États-Unis ne sont pas forcément les plus avancés. Les pays du nord de l'Europe, par exemple, sont très bons aussi sur ces sujets-là, la Suède notamment. mais ce qu'on a pu voir c'est qu'il y a eu en gros deux phases pour les médias après l'arrivée de ChatGPT. D'un seul coup, les journalistes se sont un peu réveillés, plus ou moins, avec des outils qui étaient capables d'écrire. Et donc, comme toujours face aux machines, on se dit, si ça fait des choses que je fais, ça va prendre mon boulot ou ça va le modifier. La première phase, juste après ChatGPT, on va dire, sur la fin 2022, début 2023, c'était des médias plutôt en perte de vitesse qui ont essayé de remplacer, parfois sans le dire, leurs journalistes par des IA. Ça s'est globalement planté. On pourra revenir dessus si vous voulez. Et la deuxième phase qui est arrivée à peu près autour de la fin 2023, début 2024, c'est que les rédactions ont commencé à dire, parce que ça impacte nos métiers de producteurs d'informations, il faut que ce soit des journalistes qui s'en occupent et qui pilotent ça. Ce n'est pas un sujet tech, ce n'est pas un sujet data science, il y en a bien sûr. Il faut absolument que les équipes tech soient alignées, mais ça ne doit peut-être pas partir, mais en tout cas être fait. en accord avec la rédaction pour des questions de valeur, d'outils utiles, pour développer des choses qui sont réellement utilisées par les équipes, pour plein de raisons. Et donc ça, l'agence Associated Press était assez pionnière aux États-Unis là-dessus, et la grosse annonce, c'était fin 2023, quand le New York Times a embauché Zach Seward, qui était un journaliste venu du monde des startups. pour créer une équipe de cinq personnes chargées de faire ce boulot-là. Moi, je les ai rencontrés, j'ai un peu étudié ce qu'ont fait les différents médias et je me suis dit que c'était une bonne idée de proposer ça à la rédaction.

  • Speaker #1

    Ok, super. Donc concrètement, là, on va dire, depuis la mise en place progressive au sein des Echos, ça se matérialise comment ? C'est quoi les premiers chantiers ? J'imagine qu'on n'est pas passé de zéro à 100%, les choses se font par étapes. C'est quoi les premiers jalons et puis les premiers exemples concrets qui ont été mis en place ? au sein du journal ?

  • Speaker #0

    Il y a un gros volet qu'on a lancé au cours de l'année dernière, entre janvier et juin, qui est la formation. On en reparlera. Il y a un volet... Depuis que j'ai pris mon poste, c'était en septembre, il y a pile un an, je rassemble et communique à tous ceux qui le veulent, toutes les infos sur le sujet, sous forme de newsletters, sous forme de plein de choses. Et quand les journalistes ont des questions sur l'IA, ils peuvent aussi venir me voir. Et le plus important, ça a été de travailler par cas d'usage pour proposer des outils aux gens. Et ça, ça avait commencé avant moi. C'est-à-dire qu'il faut imaginer qu'au printemps 2024, on a réuni des représentants de toute la rédaction, métier par métier, en disant, voilà ce que peut faire l'IA, vous en avez entendu parler, qu'est-ce que vous avez, vous, comme problème, ou comme, on appelle ça des points de friction parfois en anglais, comme besoin, comme cas d'usage pour lequel l'IA peut vous servir. Et donc, il y a eu des besoins qui n'étaient pas forcément les mêmes selon qu'on venait des gens de l'infographie, des gens, des rédacteurs, des journalistes qui font des interviews, des éditeurs, et on a rassemblé tout ça, avec les équipes de la direction numérique, pour voir ce qui était possible, ce qui était... On servait le plus de gens, ce qui pouvait être fait plus ou moins facilement, et en fonction de ça, on s'est fait un calendrier, et on a essayé de répondre un peu besoin par besoin. Et c'était très vaste, ça allait d'avoir un bon outil, et un outil sûr pour retranscrire nos interviews en fichiers audio, pas que chacun prenne ce qu'il trouve sur Internet, mais qu'on ait vraiment un outil qui corresponde à tous les besoins juridiques et cybersécurité d'un groupe de médias important. qu'est-ce qu'on a encore ? On avait des questions sur l'editing, des outils pour proposer des prompts, pour proposer avec des prompts des titres, des chapeaux, des légendes à nos articles. Et c'est tout ça qu'on a mis en place. Il y a aussi quelques outils pour l'infographie, par exemple, pour, à partir d'une photo, générer un fichier Excel qui facilite le travail des infographistes. On est vraiment parti, le point commun, c'est qu'on est vraiment parti des besoins de la rédaction et des besoins qui ont été exprimés par les gens.

  • Speaker #1

    Ok. Et donc avec une phase de test, et vous êtes parti avec principalement des outils sur étagère, où vous avez quand même aussi mené une politique de développement d'outils propres, avec aussi un petit peu nourri selon les valeurs du journal, selon aussi ses archives, etc. Comment ça s'est matérialisé ?

  • Speaker #0

    On est hyper pragmatique, en fait. On est hyper pragmatique. C'est-à-dire qu'il y a des cas où c'était plus simple. On a travaillé très étroitement avec la direction numérique, la rédaction. on a une super équipe d'informatique rédactionnelle, donc des gens qui travaillent sur les outils de la rédaction, qui dans certains cas ont adapté l'outil dans lequel on écrit nos articles, ce qu'on appelle un CMS dans la presse écrite, dans les médias, dans les sites web, l'outil de gestion de l'information, donc on a une espèce de super word dans lequel on écrit en référence, on rajoute des métadonnées à nos articles, on rajoute des vidéos, etc. Et bien ça, on a développé en interne, à partir d'un outil qu'on achète, on a développé une extension interne. Pour faire à la fois, pour suggérer aux auteurs des articles, aux éditeurs des titres, des chapeaux, des résumés ou des posts LinkedIn à partir de leurs articles. Et ça, on a aussi développé un bac à sable. C'est-à-dire qu'on peut nous-mêmes faire les prompts, les prototyper, en faire de nouveau, les changer, les modifier en toute transparence. Donc, il y a une partie de gens qui sont des prompteurs. Il y avait une partie de la rédaction qui était des testeurs. Et au bout de 3-4 mois, quand on a considéré que ça marchait bien. Donc, en janvier l'année dernière, on a commencé à proposer ces... C'est prompt, préparé à l'ensemble de la rédaction. Et aujourd'hui, tout le monde les a et est libre de les utiliser ou pas, ça dépend des cas. Mais là aussi, c'est une question de besoin. C'est-à-dire parfois, on cale sur... Il y a des fois où on a le titre en tête, il y a des fois où on cale sur le titre. L'IA va de façon sécurisée, avec plein de règles de sécurité et techniques derrière, proposer des titres qui correspondent à des titres des échos, qui correspondent à des règles de SEO, etc. Directement à nos journalistes.

  • Speaker #1

    Et donc, vous voyez en termes d'adoption de la part de la rédaction, de la part des journalistes, est-ce que c'est une adoption massive, est-ce que c'est une adoption prudente ? On évoquait tout à l'heure vraiment à demi-mot l'enjeu de la formation. Comment est-ce que ça se développe progressivement au sein de la rédaction ? Avec un enthousiasme fou, avec une prudence affichée ?

  • Speaker #0

    Ça dépend vraiment des personnes. Et d'abord, nous, on a voulu faire coïncider ça avec la formation. à l'IA, qui sont faites par un organisme extérieur, SAMSA pour ne pas le nommer, qui est un organisme de formation qui travaille beaucoup dans la presse. On a un formateur qui est venu, on a proposé à l'ensemble des journalistes, on a formé plus de 120 personnes, 150 je crois à peu près à date, et on a fait démarrer ça avec l'arrivée des outils, pour que les gens connaissent un peu les bases de l'IA, comprennent ce qu'est un prompt, et en même temps puissent utiliser dans leur travail quotidien. Donc ça a joué sur l'adoption après. Un choix qui a été fait aussi, c'est de ne pas fliquer les gens sur l'usage. Donne des outils à disposition, on est là pour répondre à leurs questions. On sait que certains les utilisent beaucoup, d'autres pas, il n'y a aucune obligation. C'est un outil en plus qui permet de... le boulot qui répond à des cas d'usage précis, mais ce n'est pas une obligation. Et voilà, donc ça c'est un choix. On monite dans certains cas, on voit à peu près, moi par exemple, je sais exactement combien d'heures d'interview sont retranscrites chaque semaine parce que ça m'aide à savoir si le contrat qu'on a avec un fournisseur européen est respecté parce que c'est un contrat commercial là pour le coup. Pour les outils qu'on fait nous-mêmes, on est plutôt dans la phase d'encourager l'adoption et de l'accompagner. plutôt que d'obliger les gens à l'utiliser.

  • Speaker #1

    Oui, c'est ça. Là, c'est vraiment, on est dans de l'adoption, de l'acculturation, si j'ai bien compris au départ, pour comprendre un petit peu de quoi il s'agissait. Est-ce que vous considérez déjà que l'IA, c'est déjà un outil qui, à votre sens, dans votre perception, est incontournable dans la rédaction ? Ou est-ce que ça va le devenir ? Est-ce qu'il l'est déjà ? Ou est-ce qu'il va le devenir ?

  • Speaker #0

    Incontournable, j'en sais rien. Rien n'est incontournable. On peut très bien faire des titres sans IA, on peut très bien retranscrire une interview sans IA. Simplement, si vous arrivez d'une interview assez longue où vous avez interrogé 10 personnes pour une enquête, avoir un transcript rapide, voir un outil qui va vous permettre d'aller directement aux bonnes citations et d'être sûr de ne pas vous être trompé dans la citation, c'est quand même mieux pour certaines personnes. Encore une fois, ça dépend. Il y a des gens qui sont encore très accrochés à leur stylo et leur cahier, mais il y a plein de gens qui sont... ça a été un super facteur d'adoption de proposer un outil qui marche bien, qui est solide, qui est sûr. à nos journalistes. Et donc, je pense que c'est, oui, incontournable, ça l'est déjà, mais ça ne sera pas incontournable pour tout le monde et pour tous les usages. Ça va vraiment dépendre des personnes et c'est pour ça qu'il faut suivre. Et c'est aussi pour ça que c'est bien d'être dans la rédaction, parce que ça permet de voir comment les gens l'utilisent. Parfois, j'ai par exemple des équipes de secrétaires de rédaction qui n'étaient pas totalement convaincus au départ de la titraille, parce que c'est leur métier, la titraille. Ils n'étaient pas tout à fait sûrs. il a fallu du temps pour les habituer, ils ont commencé à l'utiliser et puis un jour ils sont venus me voir en me disant tu ne pourrais pas nous faire un titre un prompt différent pour avoir des titres plus courts pour le print, parce que les titres web que vous avez ils sont un peu longs, et on l'a fait ensemble j'ai dit d'accord mais vous le testez, avec moi et voilà, et du coup ils l'ont adopté et encore une fois. certains l'adoptent, d'autres non,

  • Speaker #1

    ça dépend des personnes. C'est intéressant aussi cette espèce d'isymétrie entre les personnes, en tout cas il n'y a pas quelque chose qui est imposé, chacun l'adopte à son rythme et selon ses usages, comme vous le dites. Est-ce que du côté des échos...

  • Speaker #0

    On est souvent surpris de qui adopte et qui adopte pas. Moi je connais bien, ça fait un quart de siècle ou presque que je passe à la rédaction, je connais à peu près tous les journalistes depuis longtemps, et ce n'est pas forcément ceux auxquels je m'adopte. Tendez qui adoptent le plus ou qui sont le plus enthousiastes. Ça dépend vraiment des gens. Il y a des gens qui m'ont dit, tiens, c'est un geek, mais en fait, il n'aime pas trop ça ou ça ne lui parle pas trop. Il y en a d'autres dont je me disais, ce n'est pas trop son truc, la tech, et qui adorent parce que, par exemple, il déteste faire des chapeaux. Et quand l'IA lui propose, nous, ça propose trois chapeaux différents, il prend le meilleur. parfois il adapte un peu mais il a gagné 10 minutes à la fin de son papier il est content c'est ça

  • Speaker #1

    C'est bien en tout cas si dans ce que vous voyez ça ne creuse pas en plus une espèce de fracture numérique qui pourrait y avoir dans la rédaction. Pas du tout,

  • Speaker #0

    je le constate pas du tout. À partir du moment où on va prendre tout le monde et former tout le monde et proposer à tout le monde d'être formé, et où tout le monde a à peu près les mêmes bases de connaissances, d'acculturation pour reprendre le mot que vous utilisiez, ça ne se passe pas trop mal.

  • Speaker #1

    D'accord. Et ce que je voulais dire par rapport à ça, est-ce qu'il y a... Je ne sais pas, une charte d'usage de l'IA qui est mise en place au sein des échos ? Ou est-ce que vous êtes vraiment dans le mode un peu bac à sable ? Moi aussi, je vais reprendre un terme que vous utilisiez sur le côté, voilà, on teste, on voit comment chacun s'en empare et on fait des micro-tests dans son coin. Ou est-ce qu'il y a déjà quelque chose qui est charté, qui est assez cadré sur, là, on peut y aller. Là, pour le coup, c'est chasse gardée, on n'y va pas.

  • Speaker #0

    On a une charte très, très précise qui est... Je crois que le groupe Les Echos, alors j'étais aux Etats-Unis à l'époque, mais de mémoire, c'était le premier groupe de médias en France, Les Echos le parisien, on est dans le même groupe, qui a proposé une charte encadrant l'usage de l'intelligence artificielle. On est arrivé très très tôt, ça doit remonter à 2023. Elle n'a pas tellement évoqué, ça veut dire que par exemple on s'interdit d'écrire des articles avec l'IA, que l'IA écrive des articles ou fasse des images. Sauf dans des cas très particuliers où on veut illustrer. Par contre on l'utilise comme l'outil le plus possible en disant ce qu'on fait et en essayant d'être le plus transparent. Et sans forcer personne à l'adopter dans la rédaction. Et cette charte couvre ces éléments-là. Et c'est important d'en avoir une, parce que ça nous guide. Après, ça évolue et ça laisse de la place à l'expérimentation, bien évidemment. Par exemple, nous, on se sert de l'IA sur des textes qu'on a déjà écrits. Ce n'est jamais l'IA qui va les écrire. Donc, tout part, et la façon dont on paramètre les outils, ce sont qui vont rester dans le corpus de nos articles. Ils ne vont pas aller chercher... des compléments ou des phrases ou des éléments sur le web ou sur TGPT. Ailleurs, ça reste un outil. Nous sommes les producteurs de l'information. L'IA peut nous aider à la produire de façon... à différents formats, par exemple pour faire un poste à partir d'un article déjà écrit, ce genre de choses. Mais ce n'est pas elle qui écrit les articles, c'est toujours l'humain qui décide. Et ça c'est très clair dans notre charte.

  • Speaker #1

    Donc ça vous permet peut-être d'éviter un écueil aussi parfois qu'on peut avoir avec l'utilisation des LLM et puis de l'IA générative en général, c'est la standardisation aussi des contenus. Et on a vu, on parlait tout à l'heure un petit peu des médias qui se sont un peu pris le mur de l'IA générative en 2022, début 2023, c'était aussi par rapport à une forme de standardisation. des contenus où on voyait des papiers qui sortaient, qui étaient vraiment tous de la même teneur, qui étaient écrits exactement de la même manière. Peut-être qu'avec cette démarche-là, ça vous permet d'éviter cet écueil-là et de garder encore la singularité de vos journalistes et de votre titre.

  • Speaker #0

    Oui, et puis c'est important. Typiquement, c'est un des points qu'on aborde dans nos formations. L'IA a plein d'avantages, mais elle a aussi plein d'inconvénients. Elle peut halluciner, elle peut moyenniser, comme on dit, c'est pas un très joli mot. Elle peut rendre tout un peu pareil. Et puis on rappelle à nos journalistes dans les formations, on leur dit tout ce qu'ils peuvent faire avec, on peut aussi dire tout ce qu'ils ne peuvent pas faire avec, parce que, par exemple, ce n'est pas parce qu'il y a un super outil qui fait un super truc, et qu'on est pressé, qu'on n'a pas le temps de trouver une photo, qu'il faut aller demander à Dali ou à notre générateur d'images de la faire. Non, on a des iconographes aux échos, on a des rapports avec des agences, on choisit des photos d'une certaine manière, et l'IA pourrait générer des images, mais on ne souhaite pas le faire parce qu'on veut montrer la réalité. à nos lecteurs et c'est quelque chose qu'on leur doit et ça se fait avec les gens du service photo et les gens le comprennent très bien à partir du moment où on prend le temps de leur expliquer.

  • Speaker #2

    C'est la fin de la première partie de cette interview de Deep Media avec Benoît Georges, journaliste en charge de l'implantation de l'intelligence artificielle à la rédaction pour les Echos. Je vous donne rendez-vous prochainement pour la suite de cet échange où l'on va continuer d'explorer le futur des médias à l'heure du numérique. En attendant, pour ne pas manquer les prochains épisodes, abonnez-vous à ce podcast et mettez les commentaires et étoiles adéquates. DeepMedia est un podcast autoproduit par FollowMeConseil, agence de formation et conseil stratégique spécialisé en IA générative et social media. A très bientôt !

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Benoît Georges, journaliste en charge de l'implantation de l'intelligence artificielle à la rédaction pour Les Echos est le cinquième invité de Deep Media.

Avec lui, nous allons voir comment se passe l'arrivée de l'IA générative au sein d'un quotidien national. Grâce à Benoît Georges qui a largement étudié le sujet depuis les Etats-Unis nous ferons un état des lieux de l'implantation de la technologie outre Atlantique avant de voir comment un titre de presse s'est emparé de ces outils, pour quels périmètres avec quels usages concrets et surtout pour quels publics. Entre journalistes enthousiastes et journalistes plus en retrait, le sujet est abordé selon le rythme et les envies de chacun. Entre achats de technologies extérieures et ajustements locaux, l'IA est vécue à hauteur de journalistes avec une volonté farouche de les mettre au centre du système. Nous évoquerons dans cet épisode plusieurs cas d'usage concrets ainsi que l'aspect formation tout comme la mise en place d'une charte d'usage au sein du titre. Enfin, nous tenterons de répondre à une question centrale, l'IA est-elle devenue indispensable ?


Deep Media l'interview épisode 13 🎙️ Benoît Georges, journaliste en charge de l'implantation de l'intelligence artificielle à la rédaction pour Les Echos


Deep Media, c'est le podcast qui prend le temps d'explorer les médias et leur mutation numérique aux côtés des professionnels et experts du secteur.

Dans un univers numérique à marche forcée, comment les médias se positionnent ils ? Comment s'organiseront ils demain ? Quels rapports développeront ils avec les outils et principaux acteurs du numérique pour préserver leur activité et assurer leur pérennité ?


Ces questions et bien d'autres vous passionnent ? Ca tombe bien, moi aussi.


Je m’appelle Julien Boujot, connaisseur et curieux de l'univers médiatique depuis plus de 15 ans, et je vous retrouve régulièrement pour Deep Media, le podcast qui prend le temps d’interroger le futur des médias auprès des professionnels du secteur.


Deep Media est un podcast auto produit par Follow Me Conseil, agence de formation et conseils stratégiques spécialisée en IA générative et social media.


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Il a fallu du temps pour les habituer, ils ont commencé à l'utiliser, et puis un jour ils sont venus me voir en me disant tu pourrais pas nous faire un titre, un prompt différent pour avoir des titres plus courts pour le print, parce que les titres web que vous avez ils sont un peu longs, et on l'a fait ensemble, j'ai dit d'accord mais vous le testez, avec moi.

  • Speaker #1

    Bienvenue dans DeepMedia, le podcast qui décrypte les médias à l'heure du numérique. Je suis Julien Bougeot, consultant social-média et IA générative, mais avant tout passionné et curieux de l'univers média depuis plus de 15 ans. Dans un écosystème en perpétuelle transformation, comment les médias s'adaptent-ils ? Comment se réinventer face aux nouvelles technologies et aux géants du numérique ? Quel avenir pour l'information et ceux qui la produisent ? Si ces questions vous intriguent, alors vous êtes au bon endroit. Deep Media, c'est un temps de réflexion et d'échange avec celles et ceux qui façonnent l'avenir du secteur. Benoît Georges, bonjour et merci de participer à ce podcast et d'être le cinquième invité au micro de Deep Media. Je vous présente comme journaliste en charge de l'implantation de l'intelligence artificielle à la rédaction pour les échos. En tout cas, je vous remercie d'être présent dans ce podcast. Tout d'abord, on va commencer par une petite présentation. Voilà votre périmètre d'activité au sein des échos et notamment dans cette partie intelligence artificielle.

  • Speaker #0

    Bonjour Julien, merci pour l'invitation. Alors je suis, comme vous l'avez dit, journaliste aux échos. Je suis arrivé depuis un bon moment, ça fait quasiment 25 ans que je suis arrivé à la rédaction. Je me suis occupé de différents sujets. j'ai été édit j'ai été chargé des pages idées débat et ça fait une dizaine d'années que je suis les sujets d'intelligence artificielle comme journaliste donc j'ai rencontré pas mal de chercheurs avant même qui est le gros buzz que l'on a pu connaître depuis 2-3 ans à l'arrivée de chat GPT et je suis rentré l'an dernier à Paris après cinq ans aux Etats-Unis à New York où j'avais continué à couvrir les sujets tech et comme il fallait que je trouve un nouveau travail j'ai proposé de faire quelque chose qu'on commence à voir dans les rédactions américaines, notamment au New York Times ou chez Bloomberg, qui est d'avoir quelqu'un dans la rédaction avec un profil de journaliste et qui s'occupe de tous les projets liés à l'IA. Et ça concerne les partenariats, ça concerne la formation des équipes, qui est un sujet super important, et ça concerne aussi le prototypage et l'adoption des outils. Parce que depuis presque un an maintenant à la rédaction, on a des outils d'IA qu'on a en partie développés nous-mêmes ou parfois qu'on achète sous étagère et qu'on donne à nos journalistes.

  • Speaker #1

    D'accord. Donc effectivement, on va revenir sur un peu ces outils. Donc c'est vraiment cette inspiration des États-Unis qui vous a poussé aussi à embrayer le pas et à mettre ça en place aux échos. Et c'est quoi en gros ce qui vous a motivé, ce que vous avez vu aux États-Unis où vous vous êtes dit, bon ben allez, il faut qu'on y aille en France, on ne peut pas passer à côté ?

  • Speaker #0

    Alors les États-Unis ne sont pas forcément les plus avancés. Les pays du nord de l'Europe, par exemple, sont très bons aussi sur ces sujets-là, la Suède notamment. mais ce qu'on a pu voir c'est qu'il y a eu en gros deux phases pour les médias après l'arrivée de ChatGPT. D'un seul coup, les journalistes se sont un peu réveillés, plus ou moins, avec des outils qui étaient capables d'écrire. Et donc, comme toujours face aux machines, on se dit, si ça fait des choses que je fais, ça va prendre mon boulot ou ça va le modifier. La première phase, juste après ChatGPT, on va dire, sur la fin 2022, début 2023, c'était des médias plutôt en perte de vitesse qui ont essayé de remplacer, parfois sans le dire, leurs journalistes par des IA. Ça s'est globalement planté. On pourra revenir dessus si vous voulez. Et la deuxième phase qui est arrivée à peu près autour de la fin 2023, début 2024, c'est que les rédactions ont commencé à dire, parce que ça impacte nos métiers de producteurs d'informations, il faut que ce soit des journalistes qui s'en occupent et qui pilotent ça. Ce n'est pas un sujet tech, ce n'est pas un sujet data science, il y en a bien sûr. Il faut absolument que les équipes tech soient alignées, mais ça ne doit peut-être pas partir, mais en tout cas être fait. en accord avec la rédaction pour des questions de valeur, d'outils utiles, pour développer des choses qui sont réellement utilisées par les équipes, pour plein de raisons. Et donc ça, l'agence Associated Press était assez pionnière aux États-Unis là-dessus, et la grosse annonce, c'était fin 2023, quand le New York Times a embauché Zach Seward, qui était un journaliste venu du monde des startups. pour créer une équipe de cinq personnes chargées de faire ce boulot-là. Moi, je les ai rencontrés, j'ai un peu étudié ce qu'ont fait les différents médias et je me suis dit que c'était une bonne idée de proposer ça à la rédaction.

  • Speaker #1

    Ok, super. Donc concrètement, là, on va dire, depuis la mise en place progressive au sein des Echos, ça se matérialise comment ? C'est quoi les premiers chantiers ? J'imagine qu'on n'est pas passé de zéro à 100%, les choses se font par étapes. C'est quoi les premiers jalons et puis les premiers exemples concrets qui ont été mis en place ? au sein du journal ?

  • Speaker #0

    Il y a un gros volet qu'on a lancé au cours de l'année dernière, entre janvier et juin, qui est la formation. On en reparlera. Il y a un volet... Depuis que j'ai pris mon poste, c'était en septembre, il y a pile un an, je rassemble et communique à tous ceux qui le veulent, toutes les infos sur le sujet, sous forme de newsletters, sous forme de plein de choses. Et quand les journalistes ont des questions sur l'IA, ils peuvent aussi venir me voir. Et le plus important, ça a été de travailler par cas d'usage pour proposer des outils aux gens. Et ça, ça avait commencé avant moi. C'est-à-dire qu'il faut imaginer qu'au printemps 2024, on a réuni des représentants de toute la rédaction, métier par métier, en disant, voilà ce que peut faire l'IA, vous en avez entendu parler, qu'est-ce que vous avez, vous, comme problème, ou comme, on appelle ça des points de friction parfois en anglais, comme besoin, comme cas d'usage pour lequel l'IA peut vous servir. Et donc, il y a eu des besoins qui n'étaient pas forcément les mêmes selon qu'on venait des gens de l'infographie, des gens, des rédacteurs, des journalistes qui font des interviews, des éditeurs, et on a rassemblé tout ça, avec les équipes de la direction numérique, pour voir ce qui était possible, ce qui était... On servait le plus de gens, ce qui pouvait être fait plus ou moins facilement, et en fonction de ça, on s'est fait un calendrier, et on a essayé de répondre un peu besoin par besoin. Et c'était très vaste, ça allait d'avoir un bon outil, et un outil sûr pour retranscrire nos interviews en fichiers audio, pas que chacun prenne ce qu'il trouve sur Internet, mais qu'on ait vraiment un outil qui corresponde à tous les besoins juridiques et cybersécurité d'un groupe de médias important. qu'est-ce qu'on a encore ? On avait des questions sur l'editing, des outils pour proposer des prompts, pour proposer avec des prompts des titres, des chapeaux, des légendes à nos articles. Et c'est tout ça qu'on a mis en place. Il y a aussi quelques outils pour l'infographie, par exemple, pour, à partir d'une photo, générer un fichier Excel qui facilite le travail des infographistes. On est vraiment parti, le point commun, c'est qu'on est vraiment parti des besoins de la rédaction et des besoins qui ont été exprimés par les gens.

  • Speaker #1

    Ok. Et donc avec une phase de test, et vous êtes parti avec principalement des outils sur étagère, où vous avez quand même aussi mené une politique de développement d'outils propres, avec aussi un petit peu nourri selon les valeurs du journal, selon aussi ses archives, etc. Comment ça s'est matérialisé ?

  • Speaker #0

    On est hyper pragmatique, en fait. On est hyper pragmatique. C'est-à-dire qu'il y a des cas où c'était plus simple. On a travaillé très étroitement avec la direction numérique, la rédaction. on a une super équipe d'informatique rédactionnelle, donc des gens qui travaillent sur les outils de la rédaction, qui dans certains cas ont adapté l'outil dans lequel on écrit nos articles, ce qu'on appelle un CMS dans la presse écrite, dans les médias, dans les sites web, l'outil de gestion de l'information, donc on a une espèce de super word dans lequel on écrit en référence, on rajoute des métadonnées à nos articles, on rajoute des vidéos, etc. Et bien ça, on a développé en interne, à partir d'un outil qu'on achète, on a développé une extension interne. Pour faire à la fois, pour suggérer aux auteurs des articles, aux éditeurs des titres, des chapeaux, des résumés ou des posts LinkedIn à partir de leurs articles. Et ça, on a aussi développé un bac à sable. C'est-à-dire qu'on peut nous-mêmes faire les prompts, les prototyper, en faire de nouveau, les changer, les modifier en toute transparence. Donc, il y a une partie de gens qui sont des prompteurs. Il y avait une partie de la rédaction qui était des testeurs. Et au bout de 3-4 mois, quand on a considéré que ça marchait bien. Donc, en janvier l'année dernière, on a commencé à proposer ces... C'est prompt, préparé à l'ensemble de la rédaction. Et aujourd'hui, tout le monde les a et est libre de les utiliser ou pas, ça dépend des cas. Mais là aussi, c'est une question de besoin. C'est-à-dire parfois, on cale sur... Il y a des fois où on a le titre en tête, il y a des fois où on cale sur le titre. L'IA va de façon sécurisée, avec plein de règles de sécurité et techniques derrière, proposer des titres qui correspondent à des titres des échos, qui correspondent à des règles de SEO, etc. Directement à nos journalistes.

  • Speaker #1

    Et donc, vous voyez en termes d'adoption de la part de la rédaction, de la part des journalistes, est-ce que c'est une adoption massive, est-ce que c'est une adoption prudente ? On évoquait tout à l'heure vraiment à demi-mot l'enjeu de la formation. Comment est-ce que ça se développe progressivement au sein de la rédaction ? Avec un enthousiasme fou, avec une prudence affichée ?

  • Speaker #0

    Ça dépend vraiment des personnes. Et d'abord, nous, on a voulu faire coïncider ça avec la formation. à l'IA, qui sont faites par un organisme extérieur, SAMSA pour ne pas le nommer, qui est un organisme de formation qui travaille beaucoup dans la presse. On a un formateur qui est venu, on a proposé à l'ensemble des journalistes, on a formé plus de 120 personnes, 150 je crois à peu près à date, et on a fait démarrer ça avec l'arrivée des outils, pour que les gens connaissent un peu les bases de l'IA, comprennent ce qu'est un prompt, et en même temps puissent utiliser dans leur travail quotidien. Donc ça a joué sur l'adoption après. Un choix qui a été fait aussi, c'est de ne pas fliquer les gens sur l'usage. Donne des outils à disposition, on est là pour répondre à leurs questions. On sait que certains les utilisent beaucoup, d'autres pas, il n'y a aucune obligation. C'est un outil en plus qui permet de... le boulot qui répond à des cas d'usage précis, mais ce n'est pas une obligation. Et voilà, donc ça c'est un choix. On monite dans certains cas, on voit à peu près, moi par exemple, je sais exactement combien d'heures d'interview sont retranscrites chaque semaine parce que ça m'aide à savoir si le contrat qu'on a avec un fournisseur européen est respecté parce que c'est un contrat commercial là pour le coup. Pour les outils qu'on fait nous-mêmes, on est plutôt dans la phase d'encourager l'adoption et de l'accompagner. plutôt que d'obliger les gens à l'utiliser.

  • Speaker #1

    Oui, c'est ça. Là, c'est vraiment, on est dans de l'adoption, de l'acculturation, si j'ai bien compris au départ, pour comprendre un petit peu de quoi il s'agissait. Est-ce que vous considérez déjà que l'IA, c'est déjà un outil qui, à votre sens, dans votre perception, est incontournable dans la rédaction ? Ou est-ce que ça va le devenir ? Est-ce qu'il l'est déjà ? Ou est-ce qu'il va le devenir ?

  • Speaker #0

    Incontournable, j'en sais rien. Rien n'est incontournable. On peut très bien faire des titres sans IA, on peut très bien retranscrire une interview sans IA. Simplement, si vous arrivez d'une interview assez longue où vous avez interrogé 10 personnes pour une enquête, avoir un transcript rapide, voir un outil qui va vous permettre d'aller directement aux bonnes citations et d'être sûr de ne pas vous être trompé dans la citation, c'est quand même mieux pour certaines personnes. Encore une fois, ça dépend. Il y a des gens qui sont encore très accrochés à leur stylo et leur cahier, mais il y a plein de gens qui sont... ça a été un super facteur d'adoption de proposer un outil qui marche bien, qui est solide, qui est sûr. à nos journalistes. Et donc, je pense que c'est, oui, incontournable, ça l'est déjà, mais ça ne sera pas incontournable pour tout le monde et pour tous les usages. Ça va vraiment dépendre des personnes et c'est pour ça qu'il faut suivre. Et c'est aussi pour ça que c'est bien d'être dans la rédaction, parce que ça permet de voir comment les gens l'utilisent. Parfois, j'ai par exemple des équipes de secrétaires de rédaction qui n'étaient pas totalement convaincus au départ de la titraille, parce que c'est leur métier, la titraille. Ils n'étaient pas tout à fait sûrs. il a fallu du temps pour les habituer, ils ont commencé à l'utiliser et puis un jour ils sont venus me voir en me disant tu ne pourrais pas nous faire un titre un prompt différent pour avoir des titres plus courts pour le print, parce que les titres web que vous avez ils sont un peu longs, et on l'a fait ensemble j'ai dit d'accord mais vous le testez, avec moi et voilà, et du coup ils l'ont adopté et encore une fois. certains l'adoptent, d'autres non,

  • Speaker #1

    ça dépend des personnes. C'est intéressant aussi cette espèce d'isymétrie entre les personnes, en tout cas il n'y a pas quelque chose qui est imposé, chacun l'adopte à son rythme et selon ses usages, comme vous le dites. Est-ce que du côté des échos...

  • Speaker #0

    On est souvent surpris de qui adopte et qui adopte pas. Moi je connais bien, ça fait un quart de siècle ou presque que je passe à la rédaction, je connais à peu près tous les journalistes depuis longtemps, et ce n'est pas forcément ceux auxquels je m'adopte. Tendez qui adoptent le plus ou qui sont le plus enthousiastes. Ça dépend vraiment des gens. Il y a des gens qui m'ont dit, tiens, c'est un geek, mais en fait, il n'aime pas trop ça ou ça ne lui parle pas trop. Il y en a d'autres dont je me disais, ce n'est pas trop son truc, la tech, et qui adorent parce que, par exemple, il déteste faire des chapeaux. Et quand l'IA lui propose, nous, ça propose trois chapeaux différents, il prend le meilleur. parfois il adapte un peu mais il a gagné 10 minutes à la fin de son papier il est content c'est ça

  • Speaker #1

    C'est bien en tout cas si dans ce que vous voyez ça ne creuse pas en plus une espèce de fracture numérique qui pourrait y avoir dans la rédaction. Pas du tout,

  • Speaker #0

    je le constate pas du tout. À partir du moment où on va prendre tout le monde et former tout le monde et proposer à tout le monde d'être formé, et où tout le monde a à peu près les mêmes bases de connaissances, d'acculturation pour reprendre le mot que vous utilisiez, ça ne se passe pas trop mal.

  • Speaker #1

    D'accord. Et ce que je voulais dire par rapport à ça, est-ce qu'il y a... Je ne sais pas, une charte d'usage de l'IA qui est mise en place au sein des échos ? Ou est-ce que vous êtes vraiment dans le mode un peu bac à sable ? Moi aussi, je vais reprendre un terme que vous utilisiez sur le côté, voilà, on teste, on voit comment chacun s'en empare et on fait des micro-tests dans son coin. Ou est-ce qu'il y a déjà quelque chose qui est charté, qui est assez cadré sur, là, on peut y aller. Là, pour le coup, c'est chasse gardée, on n'y va pas.

  • Speaker #0

    On a une charte très, très précise qui est... Je crois que le groupe Les Echos, alors j'étais aux Etats-Unis à l'époque, mais de mémoire, c'était le premier groupe de médias en France, Les Echos le parisien, on est dans le même groupe, qui a proposé une charte encadrant l'usage de l'intelligence artificielle. On est arrivé très très tôt, ça doit remonter à 2023. Elle n'a pas tellement évoqué, ça veut dire que par exemple on s'interdit d'écrire des articles avec l'IA, que l'IA écrive des articles ou fasse des images. Sauf dans des cas très particuliers où on veut illustrer. Par contre on l'utilise comme l'outil le plus possible en disant ce qu'on fait et en essayant d'être le plus transparent. Et sans forcer personne à l'adopter dans la rédaction. Et cette charte couvre ces éléments-là. Et c'est important d'en avoir une, parce que ça nous guide. Après, ça évolue et ça laisse de la place à l'expérimentation, bien évidemment. Par exemple, nous, on se sert de l'IA sur des textes qu'on a déjà écrits. Ce n'est jamais l'IA qui va les écrire. Donc, tout part, et la façon dont on paramètre les outils, ce sont qui vont rester dans le corpus de nos articles. Ils ne vont pas aller chercher... des compléments ou des phrases ou des éléments sur le web ou sur TGPT. Ailleurs, ça reste un outil. Nous sommes les producteurs de l'information. L'IA peut nous aider à la produire de façon... à différents formats, par exemple pour faire un poste à partir d'un article déjà écrit, ce genre de choses. Mais ce n'est pas elle qui écrit les articles, c'est toujours l'humain qui décide. Et ça c'est très clair dans notre charte.

  • Speaker #1

    Donc ça vous permet peut-être d'éviter un écueil aussi parfois qu'on peut avoir avec l'utilisation des LLM et puis de l'IA générative en général, c'est la standardisation aussi des contenus. Et on a vu, on parlait tout à l'heure un petit peu des médias qui se sont un peu pris le mur de l'IA générative en 2022, début 2023, c'était aussi par rapport à une forme de standardisation. des contenus où on voyait des papiers qui sortaient, qui étaient vraiment tous de la même teneur, qui étaient écrits exactement de la même manière. Peut-être qu'avec cette démarche-là, ça vous permet d'éviter cet écueil-là et de garder encore la singularité de vos journalistes et de votre titre.

  • Speaker #0

    Oui, et puis c'est important. Typiquement, c'est un des points qu'on aborde dans nos formations. L'IA a plein d'avantages, mais elle a aussi plein d'inconvénients. Elle peut halluciner, elle peut moyenniser, comme on dit, c'est pas un très joli mot. Elle peut rendre tout un peu pareil. Et puis on rappelle à nos journalistes dans les formations, on leur dit tout ce qu'ils peuvent faire avec, on peut aussi dire tout ce qu'ils ne peuvent pas faire avec, parce que, par exemple, ce n'est pas parce qu'il y a un super outil qui fait un super truc, et qu'on est pressé, qu'on n'a pas le temps de trouver une photo, qu'il faut aller demander à Dali ou à notre générateur d'images de la faire. Non, on a des iconographes aux échos, on a des rapports avec des agences, on choisit des photos d'une certaine manière, et l'IA pourrait générer des images, mais on ne souhaite pas le faire parce qu'on veut montrer la réalité. à nos lecteurs et c'est quelque chose qu'on leur doit et ça se fait avec les gens du service photo et les gens le comprennent très bien à partir du moment où on prend le temps de leur expliquer.

  • Speaker #2

    C'est la fin de la première partie de cette interview de Deep Media avec Benoît Georges, journaliste en charge de l'implantation de l'intelligence artificielle à la rédaction pour les Echos. Je vous donne rendez-vous prochainement pour la suite de cet échange où l'on va continuer d'explorer le futur des médias à l'heure du numérique. En attendant, pour ne pas manquer les prochains épisodes, abonnez-vous à ce podcast et mettez les commentaires et étoiles adéquates. DeepMedia est un podcast autoproduit par FollowMeConseil, agence de formation et conseil stratégique spécialisé en IA générative et social media. A très bientôt !

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Description

Benoît Georges, journaliste en charge de l'implantation de l'intelligence artificielle à la rédaction pour Les Echos est le cinquième invité de Deep Media.

Avec lui, nous allons voir comment se passe l'arrivée de l'IA générative au sein d'un quotidien national. Grâce à Benoît Georges qui a largement étudié le sujet depuis les Etats-Unis nous ferons un état des lieux de l'implantation de la technologie outre Atlantique avant de voir comment un titre de presse s'est emparé de ces outils, pour quels périmètres avec quels usages concrets et surtout pour quels publics. Entre journalistes enthousiastes et journalistes plus en retrait, le sujet est abordé selon le rythme et les envies de chacun. Entre achats de technologies extérieures et ajustements locaux, l'IA est vécue à hauteur de journalistes avec une volonté farouche de les mettre au centre du système. Nous évoquerons dans cet épisode plusieurs cas d'usage concrets ainsi que l'aspect formation tout comme la mise en place d'une charte d'usage au sein du titre. Enfin, nous tenterons de répondre à une question centrale, l'IA est-elle devenue indispensable ?


Deep Media l'interview épisode 13 🎙️ Benoît Georges, journaliste en charge de l'implantation de l'intelligence artificielle à la rédaction pour Les Echos


Deep Media, c'est le podcast qui prend le temps d'explorer les médias et leur mutation numérique aux côtés des professionnels et experts du secteur.

Dans un univers numérique à marche forcée, comment les médias se positionnent ils ? Comment s'organiseront ils demain ? Quels rapports développeront ils avec les outils et principaux acteurs du numérique pour préserver leur activité et assurer leur pérennité ?


Ces questions et bien d'autres vous passionnent ? Ca tombe bien, moi aussi.


Je m’appelle Julien Boujot, connaisseur et curieux de l'univers médiatique depuis plus de 15 ans, et je vous retrouve régulièrement pour Deep Media, le podcast qui prend le temps d’interroger le futur des médias auprès des professionnels du secteur.


Deep Media est un podcast auto produit par Follow Me Conseil, agence de formation et conseils stratégiques spécialisée en IA générative et social media.


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Il a fallu du temps pour les habituer, ils ont commencé à l'utiliser, et puis un jour ils sont venus me voir en me disant tu pourrais pas nous faire un titre, un prompt différent pour avoir des titres plus courts pour le print, parce que les titres web que vous avez ils sont un peu longs, et on l'a fait ensemble, j'ai dit d'accord mais vous le testez, avec moi.

  • Speaker #1

    Bienvenue dans DeepMedia, le podcast qui décrypte les médias à l'heure du numérique. Je suis Julien Bougeot, consultant social-média et IA générative, mais avant tout passionné et curieux de l'univers média depuis plus de 15 ans. Dans un écosystème en perpétuelle transformation, comment les médias s'adaptent-ils ? Comment se réinventer face aux nouvelles technologies et aux géants du numérique ? Quel avenir pour l'information et ceux qui la produisent ? Si ces questions vous intriguent, alors vous êtes au bon endroit. Deep Media, c'est un temps de réflexion et d'échange avec celles et ceux qui façonnent l'avenir du secteur. Benoît Georges, bonjour et merci de participer à ce podcast et d'être le cinquième invité au micro de Deep Media. Je vous présente comme journaliste en charge de l'implantation de l'intelligence artificielle à la rédaction pour les échos. En tout cas, je vous remercie d'être présent dans ce podcast. Tout d'abord, on va commencer par une petite présentation. Voilà votre périmètre d'activité au sein des échos et notamment dans cette partie intelligence artificielle.

  • Speaker #0

    Bonjour Julien, merci pour l'invitation. Alors je suis, comme vous l'avez dit, journaliste aux échos. Je suis arrivé depuis un bon moment, ça fait quasiment 25 ans que je suis arrivé à la rédaction. Je me suis occupé de différents sujets. j'ai été édit j'ai été chargé des pages idées débat et ça fait une dizaine d'années que je suis les sujets d'intelligence artificielle comme journaliste donc j'ai rencontré pas mal de chercheurs avant même qui est le gros buzz que l'on a pu connaître depuis 2-3 ans à l'arrivée de chat GPT et je suis rentré l'an dernier à Paris après cinq ans aux Etats-Unis à New York où j'avais continué à couvrir les sujets tech et comme il fallait que je trouve un nouveau travail j'ai proposé de faire quelque chose qu'on commence à voir dans les rédactions américaines, notamment au New York Times ou chez Bloomberg, qui est d'avoir quelqu'un dans la rédaction avec un profil de journaliste et qui s'occupe de tous les projets liés à l'IA. Et ça concerne les partenariats, ça concerne la formation des équipes, qui est un sujet super important, et ça concerne aussi le prototypage et l'adoption des outils. Parce que depuis presque un an maintenant à la rédaction, on a des outils d'IA qu'on a en partie développés nous-mêmes ou parfois qu'on achète sous étagère et qu'on donne à nos journalistes.

  • Speaker #1

    D'accord. Donc effectivement, on va revenir sur un peu ces outils. Donc c'est vraiment cette inspiration des États-Unis qui vous a poussé aussi à embrayer le pas et à mettre ça en place aux échos. Et c'est quoi en gros ce qui vous a motivé, ce que vous avez vu aux États-Unis où vous vous êtes dit, bon ben allez, il faut qu'on y aille en France, on ne peut pas passer à côté ?

  • Speaker #0

    Alors les États-Unis ne sont pas forcément les plus avancés. Les pays du nord de l'Europe, par exemple, sont très bons aussi sur ces sujets-là, la Suède notamment. mais ce qu'on a pu voir c'est qu'il y a eu en gros deux phases pour les médias après l'arrivée de ChatGPT. D'un seul coup, les journalistes se sont un peu réveillés, plus ou moins, avec des outils qui étaient capables d'écrire. Et donc, comme toujours face aux machines, on se dit, si ça fait des choses que je fais, ça va prendre mon boulot ou ça va le modifier. La première phase, juste après ChatGPT, on va dire, sur la fin 2022, début 2023, c'était des médias plutôt en perte de vitesse qui ont essayé de remplacer, parfois sans le dire, leurs journalistes par des IA. Ça s'est globalement planté. On pourra revenir dessus si vous voulez. Et la deuxième phase qui est arrivée à peu près autour de la fin 2023, début 2024, c'est que les rédactions ont commencé à dire, parce que ça impacte nos métiers de producteurs d'informations, il faut que ce soit des journalistes qui s'en occupent et qui pilotent ça. Ce n'est pas un sujet tech, ce n'est pas un sujet data science, il y en a bien sûr. Il faut absolument que les équipes tech soient alignées, mais ça ne doit peut-être pas partir, mais en tout cas être fait. en accord avec la rédaction pour des questions de valeur, d'outils utiles, pour développer des choses qui sont réellement utilisées par les équipes, pour plein de raisons. Et donc ça, l'agence Associated Press était assez pionnière aux États-Unis là-dessus, et la grosse annonce, c'était fin 2023, quand le New York Times a embauché Zach Seward, qui était un journaliste venu du monde des startups. pour créer une équipe de cinq personnes chargées de faire ce boulot-là. Moi, je les ai rencontrés, j'ai un peu étudié ce qu'ont fait les différents médias et je me suis dit que c'était une bonne idée de proposer ça à la rédaction.

  • Speaker #1

    Ok, super. Donc concrètement, là, on va dire, depuis la mise en place progressive au sein des Echos, ça se matérialise comment ? C'est quoi les premiers chantiers ? J'imagine qu'on n'est pas passé de zéro à 100%, les choses se font par étapes. C'est quoi les premiers jalons et puis les premiers exemples concrets qui ont été mis en place ? au sein du journal ?

  • Speaker #0

    Il y a un gros volet qu'on a lancé au cours de l'année dernière, entre janvier et juin, qui est la formation. On en reparlera. Il y a un volet... Depuis que j'ai pris mon poste, c'était en septembre, il y a pile un an, je rassemble et communique à tous ceux qui le veulent, toutes les infos sur le sujet, sous forme de newsletters, sous forme de plein de choses. Et quand les journalistes ont des questions sur l'IA, ils peuvent aussi venir me voir. Et le plus important, ça a été de travailler par cas d'usage pour proposer des outils aux gens. Et ça, ça avait commencé avant moi. C'est-à-dire qu'il faut imaginer qu'au printemps 2024, on a réuni des représentants de toute la rédaction, métier par métier, en disant, voilà ce que peut faire l'IA, vous en avez entendu parler, qu'est-ce que vous avez, vous, comme problème, ou comme, on appelle ça des points de friction parfois en anglais, comme besoin, comme cas d'usage pour lequel l'IA peut vous servir. Et donc, il y a eu des besoins qui n'étaient pas forcément les mêmes selon qu'on venait des gens de l'infographie, des gens, des rédacteurs, des journalistes qui font des interviews, des éditeurs, et on a rassemblé tout ça, avec les équipes de la direction numérique, pour voir ce qui était possible, ce qui était... On servait le plus de gens, ce qui pouvait être fait plus ou moins facilement, et en fonction de ça, on s'est fait un calendrier, et on a essayé de répondre un peu besoin par besoin. Et c'était très vaste, ça allait d'avoir un bon outil, et un outil sûr pour retranscrire nos interviews en fichiers audio, pas que chacun prenne ce qu'il trouve sur Internet, mais qu'on ait vraiment un outil qui corresponde à tous les besoins juridiques et cybersécurité d'un groupe de médias important. qu'est-ce qu'on a encore ? On avait des questions sur l'editing, des outils pour proposer des prompts, pour proposer avec des prompts des titres, des chapeaux, des légendes à nos articles. Et c'est tout ça qu'on a mis en place. Il y a aussi quelques outils pour l'infographie, par exemple, pour, à partir d'une photo, générer un fichier Excel qui facilite le travail des infographistes. On est vraiment parti, le point commun, c'est qu'on est vraiment parti des besoins de la rédaction et des besoins qui ont été exprimés par les gens.

  • Speaker #1

    Ok. Et donc avec une phase de test, et vous êtes parti avec principalement des outils sur étagère, où vous avez quand même aussi mené une politique de développement d'outils propres, avec aussi un petit peu nourri selon les valeurs du journal, selon aussi ses archives, etc. Comment ça s'est matérialisé ?

  • Speaker #0

    On est hyper pragmatique, en fait. On est hyper pragmatique. C'est-à-dire qu'il y a des cas où c'était plus simple. On a travaillé très étroitement avec la direction numérique, la rédaction. on a une super équipe d'informatique rédactionnelle, donc des gens qui travaillent sur les outils de la rédaction, qui dans certains cas ont adapté l'outil dans lequel on écrit nos articles, ce qu'on appelle un CMS dans la presse écrite, dans les médias, dans les sites web, l'outil de gestion de l'information, donc on a une espèce de super word dans lequel on écrit en référence, on rajoute des métadonnées à nos articles, on rajoute des vidéos, etc. Et bien ça, on a développé en interne, à partir d'un outil qu'on achète, on a développé une extension interne. Pour faire à la fois, pour suggérer aux auteurs des articles, aux éditeurs des titres, des chapeaux, des résumés ou des posts LinkedIn à partir de leurs articles. Et ça, on a aussi développé un bac à sable. C'est-à-dire qu'on peut nous-mêmes faire les prompts, les prototyper, en faire de nouveau, les changer, les modifier en toute transparence. Donc, il y a une partie de gens qui sont des prompteurs. Il y avait une partie de la rédaction qui était des testeurs. Et au bout de 3-4 mois, quand on a considéré que ça marchait bien. Donc, en janvier l'année dernière, on a commencé à proposer ces... C'est prompt, préparé à l'ensemble de la rédaction. Et aujourd'hui, tout le monde les a et est libre de les utiliser ou pas, ça dépend des cas. Mais là aussi, c'est une question de besoin. C'est-à-dire parfois, on cale sur... Il y a des fois où on a le titre en tête, il y a des fois où on cale sur le titre. L'IA va de façon sécurisée, avec plein de règles de sécurité et techniques derrière, proposer des titres qui correspondent à des titres des échos, qui correspondent à des règles de SEO, etc. Directement à nos journalistes.

  • Speaker #1

    Et donc, vous voyez en termes d'adoption de la part de la rédaction, de la part des journalistes, est-ce que c'est une adoption massive, est-ce que c'est une adoption prudente ? On évoquait tout à l'heure vraiment à demi-mot l'enjeu de la formation. Comment est-ce que ça se développe progressivement au sein de la rédaction ? Avec un enthousiasme fou, avec une prudence affichée ?

  • Speaker #0

    Ça dépend vraiment des personnes. Et d'abord, nous, on a voulu faire coïncider ça avec la formation. à l'IA, qui sont faites par un organisme extérieur, SAMSA pour ne pas le nommer, qui est un organisme de formation qui travaille beaucoup dans la presse. On a un formateur qui est venu, on a proposé à l'ensemble des journalistes, on a formé plus de 120 personnes, 150 je crois à peu près à date, et on a fait démarrer ça avec l'arrivée des outils, pour que les gens connaissent un peu les bases de l'IA, comprennent ce qu'est un prompt, et en même temps puissent utiliser dans leur travail quotidien. Donc ça a joué sur l'adoption après. Un choix qui a été fait aussi, c'est de ne pas fliquer les gens sur l'usage. Donne des outils à disposition, on est là pour répondre à leurs questions. On sait que certains les utilisent beaucoup, d'autres pas, il n'y a aucune obligation. C'est un outil en plus qui permet de... le boulot qui répond à des cas d'usage précis, mais ce n'est pas une obligation. Et voilà, donc ça c'est un choix. On monite dans certains cas, on voit à peu près, moi par exemple, je sais exactement combien d'heures d'interview sont retranscrites chaque semaine parce que ça m'aide à savoir si le contrat qu'on a avec un fournisseur européen est respecté parce que c'est un contrat commercial là pour le coup. Pour les outils qu'on fait nous-mêmes, on est plutôt dans la phase d'encourager l'adoption et de l'accompagner. plutôt que d'obliger les gens à l'utiliser.

  • Speaker #1

    Oui, c'est ça. Là, c'est vraiment, on est dans de l'adoption, de l'acculturation, si j'ai bien compris au départ, pour comprendre un petit peu de quoi il s'agissait. Est-ce que vous considérez déjà que l'IA, c'est déjà un outil qui, à votre sens, dans votre perception, est incontournable dans la rédaction ? Ou est-ce que ça va le devenir ? Est-ce qu'il l'est déjà ? Ou est-ce qu'il va le devenir ?

  • Speaker #0

    Incontournable, j'en sais rien. Rien n'est incontournable. On peut très bien faire des titres sans IA, on peut très bien retranscrire une interview sans IA. Simplement, si vous arrivez d'une interview assez longue où vous avez interrogé 10 personnes pour une enquête, avoir un transcript rapide, voir un outil qui va vous permettre d'aller directement aux bonnes citations et d'être sûr de ne pas vous être trompé dans la citation, c'est quand même mieux pour certaines personnes. Encore une fois, ça dépend. Il y a des gens qui sont encore très accrochés à leur stylo et leur cahier, mais il y a plein de gens qui sont... ça a été un super facteur d'adoption de proposer un outil qui marche bien, qui est solide, qui est sûr. à nos journalistes. Et donc, je pense que c'est, oui, incontournable, ça l'est déjà, mais ça ne sera pas incontournable pour tout le monde et pour tous les usages. Ça va vraiment dépendre des personnes et c'est pour ça qu'il faut suivre. Et c'est aussi pour ça que c'est bien d'être dans la rédaction, parce que ça permet de voir comment les gens l'utilisent. Parfois, j'ai par exemple des équipes de secrétaires de rédaction qui n'étaient pas totalement convaincus au départ de la titraille, parce que c'est leur métier, la titraille. Ils n'étaient pas tout à fait sûrs. il a fallu du temps pour les habituer, ils ont commencé à l'utiliser et puis un jour ils sont venus me voir en me disant tu ne pourrais pas nous faire un titre un prompt différent pour avoir des titres plus courts pour le print, parce que les titres web que vous avez ils sont un peu longs, et on l'a fait ensemble j'ai dit d'accord mais vous le testez, avec moi et voilà, et du coup ils l'ont adopté et encore une fois. certains l'adoptent, d'autres non,

  • Speaker #1

    ça dépend des personnes. C'est intéressant aussi cette espèce d'isymétrie entre les personnes, en tout cas il n'y a pas quelque chose qui est imposé, chacun l'adopte à son rythme et selon ses usages, comme vous le dites. Est-ce que du côté des échos...

  • Speaker #0

    On est souvent surpris de qui adopte et qui adopte pas. Moi je connais bien, ça fait un quart de siècle ou presque que je passe à la rédaction, je connais à peu près tous les journalistes depuis longtemps, et ce n'est pas forcément ceux auxquels je m'adopte. Tendez qui adoptent le plus ou qui sont le plus enthousiastes. Ça dépend vraiment des gens. Il y a des gens qui m'ont dit, tiens, c'est un geek, mais en fait, il n'aime pas trop ça ou ça ne lui parle pas trop. Il y en a d'autres dont je me disais, ce n'est pas trop son truc, la tech, et qui adorent parce que, par exemple, il déteste faire des chapeaux. Et quand l'IA lui propose, nous, ça propose trois chapeaux différents, il prend le meilleur. parfois il adapte un peu mais il a gagné 10 minutes à la fin de son papier il est content c'est ça

  • Speaker #1

    C'est bien en tout cas si dans ce que vous voyez ça ne creuse pas en plus une espèce de fracture numérique qui pourrait y avoir dans la rédaction. Pas du tout,

  • Speaker #0

    je le constate pas du tout. À partir du moment où on va prendre tout le monde et former tout le monde et proposer à tout le monde d'être formé, et où tout le monde a à peu près les mêmes bases de connaissances, d'acculturation pour reprendre le mot que vous utilisiez, ça ne se passe pas trop mal.

  • Speaker #1

    D'accord. Et ce que je voulais dire par rapport à ça, est-ce qu'il y a... Je ne sais pas, une charte d'usage de l'IA qui est mise en place au sein des échos ? Ou est-ce que vous êtes vraiment dans le mode un peu bac à sable ? Moi aussi, je vais reprendre un terme que vous utilisiez sur le côté, voilà, on teste, on voit comment chacun s'en empare et on fait des micro-tests dans son coin. Ou est-ce qu'il y a déjà quelque chose qui est charté, qui est assez cadré sur, là, on peut y aller. Là, pour le coup, c'est chasse gardée, on n'y va pas.

  • Speaker #0

    On a une charte très, très précise qui est... Je crois que le groupe Les Echos, alors j'étais aux Etats-Unis à l'époque, mais de mémoire, c'était le premier groupe de médias en France, Les Echos le parisien, on est dans le même groupe, qui a proposé une charte encadrant l'usage de l'intelligence artificielle. On est arrivé très très tôt, ça doit remonter à 2023. Elle n'a pas tellement évoqué, ça veut dire que par exemple on s'interdit d'écrire des articles avec l'IA, que l'IA écrive des articles ou fasse des images. Sauf dans des cas très particuliers où on veut illustrer. Par contre on l'utilise comme l'outil le plus possible en disant ce qu'on fait et en essayant d'être le plus transparent. Et sans forcer personne à l'adopter dans la rédaction. Et cette charte couvre ces éléments-là. Et c'est important d'en avoir une, parce que ça nous guide. Après, ça évolue et ça laisse de la place à l'expérimentation, bien évidemment. Par exemple, nous, on se sert de l'IA sur des textes qu'on a déjà écrits. Ce n'est jamais l'IA qui va les écrire. Donc, tout part, et la façon dont on paramètre les outils, ce sont qui vont rester dans le corpus de nos articles. Ils ne vont pas aller chercher... des compléments ou des phrases ou des éléments sur le web ou sur TGPT. Ailleurs, ça reste un outil. Nous sommes les producteurs de l'information. L'IA peut nous aider à la produire de façon... à différents formats, par exemple pour faire un poste à partir d'un article déjà écrit, ce genre de choses. Mais ce n'est pas elle qui écrit les articles, c'est toujours l'humain qui décide. Et ça c'est très clair dans notre charte.

  • Speaker #1

    Donc ça vous permet peut-être d'éviter un écueil aussi parfois qu'on peut avoir avec l'utilisation des LLM et puis de l'IA générative en général, c'est la standardisation aussi des contenus. Et on a vu, on parlait tout à l'heure un petit peu des médias qui se sont un peu pris le mur de l'IA générative en 2022, début 2023, c'était aussi par rapport à une forme de standardisation. des contenus où on voyait des papiers qui sortaient, qui étaient vraiment tous de la même teneur, qui étaient écrits exactement de la même manière. Peut-être qu'avec cette démarche-là, ça vous permet d'éviter cet écueil-là et de garder encore la singularité de vos journalistes et de votre titre.

  • Speaker #0

    Oui, et puis c'est important. Typiquement, c'est un des points qu'on aborde dans nos formations. L'IA a plein d'avantages, mais elle a aussi plein d'inconvénients. Elle peut halluciner, elle peut moyenniser, comme on dit, c'est pas un très joli mot. Elle peut rendre tout un peu pareil. Et puis on rappelle à nos journalistes dans les formations, on leur dit tout ce qu'ils peuvent faire avec, on peut aussi dire tout ce qu'ils ne peuvent pas faire avec, parce que, par exemple, ce n'est pas parce qu'il y a un super outil qui fait un super truc, et qu'on est pressé, qu'on n'a pas le temps de trouver une photo, qu'il faut aller demander à Dali ou à notre générateur d'images de la faire. Non, on a des iconographes aux échos, on a des rapports avec des agences, on choisit des photos d'une certaine manière, et l'IA pourrait générer des images, mais on ne souhaite pas le faire parce qu'on veut montrer la réalité. à nos lecteurs et c'est quelque chose qu'on leur doit et ça se fait avec les gens du service photo et les gens le comprennent très bien à partir du moment où on prend le temps de leur expliquer.

  • Speaker #2

    C'est la fin de la première partie de cette interview de Deep Media avec Benoît Georges, journaliste en charge de l'implantation de l'intelligence artificielle à la rédaction pour les Echos. Je vous donne rendez-vous prochainement pour la suite de cet échange où l'on va continuer d'explorer le futur des médias à l'heure du numérique. En attendant, pour ne pas manquer les prochains épisodes, abonnez-vous à ce podcast et mettez les commentaires et étoiles adéquates. DeepMedia est un podcast autoproduit par FollowMeConseil, agence de formation et conseil stratégique spécialisé en IA générative et social media. A très bientôt !

Description

Benoît Georges, journaliste en charge de l'implantation de l'intelligence artificielle à la rédaction pour Les Echos est le cinquième invité de Deep Media.

Avec lui, nous allons voir comment se passe l'arrivée de l'IA générative au sein d'un quotidien national. Grâce à Benoît Georges qui a largement étudié le sujet depuis les Etats-Unis nous ferons un état des lieux de l'implantation de la technologie outre Atlantique avant de voir comment un titre de presse s'est emparé de ces outils, pour quels périmètres avec quels usages concrets et surtout pour quels publics. Entre journalistes enthousiastes et journalistes plus en retrait, le sujet est abordé selon le rythme et les envies de chacun. Entre achats de technologies extérieures et ajustements locaux, l'IA est vécue à hauteur de journalistes avec une volonté farouche de les mettre au centre du système. Nous évoquerons dans cet épisode plusieurs cas d'usage concrets ainsi que l'aspect formation tout comme la mise en place d'une charte d'usage au sein du titre. Enfin, nous tenterons de répondre à une question centrale, l'IA est-elle devenue indispensable ?


Deep Media l'interview épisode 13 🎙️ Benoît Georges, journaliste en charge de l'implantation de l'intelligence artificielle à la rédaction pour Les Echos


Deep Media, c'est le podcast qui prend le temps d'explorer les médias et leur mutation numérique aux côtés des professionnels et experts du secteur.

Dans un univers numérique à marche forcée, comment les médias se positionnent ils ? Comment s'organiseront ils demain ? Quels rapports développeront ils avec les outils et principaux acteurs du numérique pour préserver leur activité et assurer leur pérennité ?


Ces questions et bien d'autres vous passionnent ? Ca tombe bien, moi aussi.


Je m’appelle Julien Boujot, connaisseur et curieux de l'univers médiatique depuis plus de 15 ans, et je vous retrouve régulièrement pour Deep Media, le podcast qui prend le temps d’interroger le futur des médias auprès des professionnels du secteur.


Deep Media est un podcast auto produit par Follow Me Conseil, agence de formation et conseils stratégiques spécialisée en IA générative et social media.


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Il a fallu du temps pour les habituer, ils ont commencé à l'utiliser, et puis un jour ils sont venus me voir en me disant tu pourrais pas nous faire un titre, un prompt différent pour avoir des titres plus courts pour le print, parce que les titres web que vous avez ils sont un peu longs, et on l'a fait ensemble, j'ai dit d'accord mais vous le testez, avec moi.

  • Speaker #1

    Bienvenue dans DeepMedia, le podcast qui décrypte les médias à l'heure du numérique. Je suis Julien Bougeot, consultant social-média et IA générative, mais avant tout passionné et curieux de l'univers média depuis plus de 15 ans. Dans un écosystème en perpétuelle transformation, comment les médias s'adaptent-ils ? Comment se réinventer face aux nouvelles technologies et aux géants du numérique ? Quel avenir pour l'information et ceux qui la produisent ? Si ces questions vous intriguent, alors vous êtes au bon endroit. Deep Media, c'est un temps de réflexion et d'échange avec celles et ceux qui façonnent l'avenir du secteur. Benoît Georges, bonjour et merci de participer à ce podcast et d'être le cinquième invité au micro de Deep Media. Je vous présente comme journaliste en charge de l'implantation de l'intelligence artificielle à la rédaction pour les échos. En tout cas, je vous remercie d'être présent dans ce podcast. Tout d'abord, on va commencer par une petite présentation. Voilà votre périmètre d'activité au sein des échos et notamment dans cette partie intelligence artificielle.

  • Speaker #0

    Bonjour Julien, merci pour l'invitation. Alors je suis, comme vous l'avez dit, journaliste aux échos. Je suis arrivé depuis un bon moment, ça fait quasiment 25 ans que je suis arrivé à la rédaction. Je me suis occupé de différents sujets. j'ai été édit j'ai été chargé des pages idées débat et ça fait une dizaine d'années que je suis les sujets d'intelligence artificielle comme journaliste donc j'ai rencontré pas mal de chercheurs avant même qui est le gros buzz que l'on a pu connaître depuis 2-3 ans à l'arrivée de chat GPT et je suis rentré l'an dernier à Paris après cinq ans aux Etats-Unis à New York où j'avais continué à couvrir les sujets tech et comme il fallait que je trouve un nouveau travail j'ai proposé de faire quelque chose qu'on commence à voir dans les rédactions américaines, notamment au New York Times ou chez Bloomberg, qui est d'avoir quelqu'un dans la rédaction avec un profil de journaliste et qui s'occupe de tous les projets liés à l'IA. Et ça concerne les partenariats, ça concerne la formation des équipes, qui est un sujet super important, et ça concerne aussi le prototypage et l'adoption des outils. Parce que depuis presque un an maintenant à la rédaction, on a des outils d'IA qu'on a en partie développés nous-mêmes ou parfois qu'on achète sous étagère et qu'on donne à nos journalistes.

  • Speaker #1

    D'accord. Donc effectivement, on va revenir sur un peu ces outils. Donc c'est vraiment cette inspiration des États-Unis qui vous a poussé aussi à embrayer le pas et à mettre ça en place aux échos. Et c'est quoi en gros ce qui vous a motivé, ce que vous avez vu aux États-Unis où vous vous êtes dit, bon ben allez, il faut qu'on y aille en France, on ne peut pas passer à côté ?

  • Speaker #0

    Alors les États-Unis ne sont pas forcément les plus avancés. Les pays du nord de l'Europe, par exemple, sont très bons aussi sur ces sujets-là, la Suède notamment. mais ce qu'on a pu voir c'est qu'il y a eu en gros deux phases pour les médias après l'arrivée de ChatGPT. D'un seul coup, les journalistes se sont un peu réveillés, plus ou moins, avec des outils qui étaient capables d'écrire. Et donc, comme toujours face aux machines, on se dit, si ça fait des choses que je fais, ça va prendre mon boulot ou ça va le modifier. La première phase, juste après ChatGPT, on va dire, sur la fin 2022, début 2023, c'était des médias plutôt en perte de vitesse qui ont essayé de remplacer, parfois sans le dire, leurs journalistes par des IA. Ça s'est globalement planté. On pourra revenir dessus si vous voulez. Et la deuxième phase qui est arrivée à peu près autour de la fin 2023, début 2024, c'est que les rédactions ont commencé à dire, parce que ça impacte nos métiers de producteurs d'informations, il faut que ce soit des journalistes qui s'en occupent et qui pilotent ça. Ce n'est pas un sujet tech, ce n'est pas un sujet data science, il y en a bien sûr. Il faut absolument que les équipes tech soient alignées, mais ça ne doit peut-être pas partir, mais en tout cas être fait. en accord avec la rédaction pour des questions de valeur, d'outils utiles, pour développer des choses qui sont réellement utilisées par les équipes, pour plein de raisons. Et donc ça, l'agence Associated Press était assez pionnière aux États-Unis là-dessus, et la grosse annonce, c'était fin 2023, quand le New York Times a embauché Zach Seward, qui était un journaliste venu du monde des startups. pour créer une équipe de cinq personnes chargées de faire ce boulot-là. Moi, je les ai rencontrés, j'ai un peu étudié ce qu'ont fait les différents médias et je me suis dit que c'était une bonne idée de proposer ça à la rédaction.

  • Speaker #1

    Ok, super. Donc concrètement, là, on va dire, depuis la mise en place progressive au sein des Echos, ça se matérialise comment ? C'est quoi les premiers chantiers ? J'imagine qu'on n'est pas passé de zéro à 100%, les choses se font par étapes. C'est quoi les premiers jalons et puis les premiers exemples concrets qui ont été mis en place ? au sein du journal ?

  • Speaker #0

    Il y a un gros volet qu'on a lancé au cours de l'année dernière, entre janvier et juin, qui est la formation. On en reparlera. Il y a un volet... Depuis que j'ai pris mon poste, c'était en septembre, il y a pile un an, je rassemble et communique à tous ceux qui le veulent, toutes les infos sur le sujet, sous forme de newsletters, sous forme de plein de choses. Et quand les journalistes ont des questions sur l'IA, ils peuvent aussi venir me voir. Et le plus important, ça a été de travailler par cas d'usage pour proposer des outils aux gens. Et ça, ça avait commencé avant moi. C'est-à-dire qu'il faut imaginer qu'au printemps 2024, on a réuni des représentants de toute la rédaction, métier par métier, en disant, voilà ce que peut faire l'IA, vous en avez entendu parler, qu'est-ce que vous avez, vous, comme problème, ou comme, on appelle ça des points de friction parfois en anglais, comme besoin, comme cas d'usage pour lequel l'IA peut vous servir. Et donc, il y a eu des besoins qui n'étaient pas forcément les mêmes selon qu'on venait des gens de l'infographie, des gens, des rédacteurs, des journalistes qui font des interviews, des éditeurs, et on a rassemblé tout ça, avec les équipes de la direction numérique, pour voir ce qui était possible, ce qui était... On servait le plus de gens, ce qui pouvait être fait plus ou moins facilement, et en fonction de ça, on s'est fait un calendrier, et on a essayé de répondre un peu besoin par besoin. Et c'était très vaste, ça allait d'avoir un bon outil, et un outil sûr pour retranscrire nos interviews en fichiers audio, pas que chacun prenne ce qu'il trouve sur Internet, mais qu'on ait vraiment un outil qui corresponde à tous les besoins juridiques et cybersécurité d'un groupe de médias important. qu'est-ce qu'on a encore ? On avait des questions sur l'editing, des outils pour proposer des prompts, pour proposer avec des prompts des titres, des chapeaux, des légendes à nos articles. Et c'est tout ça qu'on a mis en place. Il y a aussi quelques outils pour l'infographie, par exemple, pour, à partir d'une photo, générer un fichier Excel qui facilite le travail des infographistes. On est vraiment parti, le point commun, c'est qu'on est vraiment parti des besoins de la rédaction et des besoins qui ont été exprimés par les gens.

  • Speaker #1

    Ok. Et donc avec une phase de test, et vous êtes parti avec principalement des outils sur étagère, où vous avez quand même aussi mené une politique de développement d'outils propres, avec aussi un petit peu nourri selon les valeurs du journal, selon aussi ses archives, etc. Comment ça s'est matérialisé ?

  • Speaker #0

    On est hyper pragmatique, en fait. On est hyper pragmatique. C'est-à-dire qu'il y a des cas où c'était plus simple. On a travaillé très étroitement avec la direction numérique, la rédaction. on a une super équipe d'informatique rédactionnelle, donc des gens qui travaillent sur les outils de la rédaction, qui dans certains cas ont adapté l'outil dans lequel on écrit nos articles, ce qu'on appelle un CMS dans la presse écrite, dans les médias, dans les sites web, l'outil de gestion de l'information, donc on a une espèce de super word dans lequel on écrit en référence, on rajoute des métadonnées à nos articles, on rajoute des vidéos, etc. Et bien ça, on a développé en interne, à partir d'un outil qu'on achète, on a développé une extension interne. Pour faire à la fois, pour suggérer aux auteurs des articles, aux éditeurs des titres, des chapeaux, des résumés ou des posts LinkedIn à partir de leurs articles. Et ça, on a aussi développé un bac à sable. C'est-à-dire qu'on peut nous-mêmes faire les prompts, les prototyper, en faire de nouveau, les changer, les modifier en toute transparence. Donc, il y a une partie de gens qui sont des prompteurs. Il y avait une partie de la rédaction qui était des testeurs. Et au bout de 3-4 mois, quand on a considéré que ça marchait bien. Donc, en janvier l'année dernière, on a commencé à proposer ces... C'est prompt, préparé à l'ensemble de la rédaction. Et aujourd'hui, tout le monde les a et est libre de les utiliser ou pas, ça dépend des cas. Mais là aussi, c'est une question de besoin. C'est-à-dire parfois, on cale sur... Il y a des fois où on a le titre en tête, il y a des fois où on cale sur le titre. L'IA va de façon sécurisée, avec plein de règles de sécurité et techniques derrière, proposer des titres qui correspondent à des titres des échos, qui correspondent à des règles de SEO, etc. Directement à nos journalistes.

  • Speaker #1

    Et donc, vous voyez en termes d'adoption de la part de la rédaction, de la part des journalistes, est-ce que c'est une adoption massive, est-ce que c'est une adoption prudente ? On évoquait tout à l'heure vraiment à demi-mot l'enjeu de la formation. Comment est-ce que ça se développe progressivement au sein de la rédaction ? Avec un enthousiasme fou, avec une prudence affichée ?

  • Speaker #0

    Ça dépend vraiment des personnes. Et d'abord, nous, on a voulu faire coïncider ça avec la formation. à l'IA, qui sont faites par un organisme extérieur, SAMSA pour ne pas le nommer, qui est un organisme de formation qui travaille beaucoup dans la presse. On a un formateur qui est venu, on a proposé à l'ensemble des journalistes, on a formé plus de 120 personnes, 150 je crois à peu près à date, et on a fait démarrer ça avec l'arrivée des outils, pour que les gens connaissent un peu les bases de l'IA, comprennent ce qu'est un prompt, et en même temps puissent utiliser dans leur travail quotidien. Donc ça a joué sur l'adoption après. Un choix qui a été fait aussi, c'est de ne pas fliquer les gens sur l'usage. Donne des outils à disposition, on est là pour répondre à leurs questions. On sait que certains les utilisent beaucoup, d'autres pas, il n'y a aucune obligation. C'est un outil en plus qui permet de... le boulot qui répond à des cas d'usage précis, mais ce n'est pas une obligation. Et voilà, donc ça c'est un choix. On monite dans certains cas, on voit à peu près, moi par exemple, je sais exactement combien d'heures d'interview sont retranscrites chaque semaine parce que ça m'aide à savoir si le contrat qu'on a avec un fournisseur européen est respecté parce que c'est un contrat commercial là pour le coup. Pour les outils qu'on fait nous-mêmes, on est plutôt dans la phase d'encourager l'adoption et de l'accompagner. plutôt que d'obliger les gens à l'utiliser.

  • Speaker #1

    Oui, c'est ça. Là, c'est vraiment, on est dans de l'adoption, de l'acculturation, si j'ai bien compris au départ, pour comprendre un petit peu de quoi il s'agissait. Est-ce que vous considérez déjà que l'IA, c'est déjà un outil qui, à votre sens, dans votre perception, est incontournable dans la rédaction ? Ou est-ce que ça va le devenir ? Est-ce qu'il l'est déjà ? Ou est-ce qu'il va le devenir ?

  • Speaker #0

    Incontournable, j'en sais rien. Rien n'est incontournable. On peut très bien faire des titres sans IA, on peut très bien retranscrire une interview sans IA. Simplement, si vous arrivez d'une interview assez longue où vous avez interrogé 10 personnes pour une enquête, avoir un transcript rapide, voir un outil qui va vous permettre d'aller directement aux bonnes citations et d'être sûr de ne pas vous être trompé dans la citation, c'est quand même mieux pour certaines personnes. Encore une fois, ça dépend. Il y a des gens qui sont encore très accrochés à leur stylo et leur cahier, mais il y a plein de gens qui sont... ça a été un super facteur d'adoption de proposer un outil qui marche bien, qui est solide, qui est sûr. à nos journalistes. Et donc, je pense que c'est, oui, incontournable, ça l'est déjà, mais ça ne sera pas incontournable pour tout le monde et pour tous les usages. Ça va vraiment dépendre des personnes et c'est pour ça qu'il faut suivre. Et c'est aussi pour ça que c'est bien d'être dans la rédaction, parce que ça permet de voir comment les gens l'utilisent. Parfois, j'ai par exemple des équipes de secrétaires de rédaction qui n'étaient pas totalement convaincus au départ de la titraille, parce que c'est leur métier, la titraille. Ils n'étaient pas tout à fait sûrs. il a fallu du temps pour les habituer, ils ont commencé à l'utiliser et puis un jour ils sont venus me voir en me disant tu ne pourrais pas nous faire un titre un prompt différent pour avoir des titres plus courts pour le print, parce que les titres web que vous avez ils sont un peu longs, et on l'a fait ensemble j'ai dit d'accord mais vous le testez, avec moi et voilà, et du coup ils l'ont adopté et encore une fois. certains l'adoptent, d'autres non,

  • Speaker #1

    ça dépend des personnes. C'est intéressant aussi cette espèce d'isymétrie entre les personnes, en tout cas il n'y a pas quelque chose qui est imposé, chacun l'adopte à son rythme et selon ses usages, comme vous le dites. Est-ce que du côté des échos...

  • Speaker #0

    On est souvent surpris de qui adopte et qui adopte pas. Moi je connais bien, ça fait un quart de siècle ou presque que je passe à la rédaction, je connais à peu près tous les journalistes depuis longtemps, et ce n'est pas forcément ceux auxquels je m'adopte. Tendez qui adoptent le plus ou qui sont le plus enthousiastes. Ça dépend vraiment des gens. Il y a des gens qui m'ont dit, tiens, c'est un geek, mais en fait, il n'aime pas trop ça ou ça ne lui parle pas trop. Il y en a d'autres dont je me disais, ce n'est pas trop son truc, la tech, et qui adorent parce que, par exemple, il déteste faire des chapeaux. Et quand l'IA lui propose, nous, ça propose trois chapeaux différents, il prend le meilleur. parfois il adapte un peu mais il a gagné 10 minutes à la fin de son papier il est content c'est ça

  • Speaker #1

    C'est bien en tout cas si dans ce que vous voyez ça ne creuse pas en plus une espèce de fracture numérique qui pourrait y avoir dans la rédaction. Pas du tout,

  • Speaker #0

    je le constate pas du tout. À partir du moment où on va prendre tout le monde et former tout le monde et proposer à tout le monde d'être formé, et où tout le monde a à peu près les mêmes bases de connaissances, d'acculturation pour reprendre le mot que vous utilisiez, ça ne se passe pas trop mal.

  • Speaker #1

    D'accord. Et ce que je voulais dire par rapport à ça, est-ce qu'il y a... Je ne sais pas, une charte d'usage de l'IA qui est mise en place au sein des échos ? Ou est-ce que vous êtes vraiment dans le mode un peu bac à sable ? Moi aussi, je vais reprendre un terme que vous utilisiez sur le côté, voilà, on teste, on voit comment chacun s'en empare et on fait des micro-tests dans son coin. Ou est-ce qu'il y a déjà quelque chose qui est charté, qui est assez cadré sur, là, on peut y aller. Là, pour le coup, c'est chasse gardée, on n'y va pas.

  • Speaker #0

    On a une charte très, très précise qui est... Je crois que le groupe Les Echos, alors j'étais aux Etats-Unis à l'époque, mais de mémoire, c'était le premier groupe de médias en France, Les Echos le parisien, on est dans le même groupe, qui a proposé une charte encadrant l'usage de l'intelligence artificielle. On est arrivé très très tôt, ça doit remonter à 2023. Elle n'a pas tellement évoqué, ça veut dire que par exemple on s'interdit d'écrire des articles avec l'IA, que l'IA écrive des articles ou fasse des images. Sauf dans des cas très particuliers où on veut illustrer. Par contre on l'utilise comme l'outil le plus possible en disant ce qu'on fait et en essayant d'être le plus transparent. Et sans forcer personne à l'adopter dans la rédaction. Et cette charte couvre ces éléments-là. Et c'est important d'en avoir une, parce que ça nous guide. Après, ça évolue et ça laisse de la place à l'expérimentation, bien évidemment. Par exemple, nous, on se sert de l'IA sur des textes qu'on a déjà écrits. Ce n'est jamais l'IA qui va les écrire. Donc, tout part, et la façon dont on paramètre les outils, ce sont qui vont rester dans le corpus de nos articles. Ils ne vont pas aller chercher... des compléments ou des phrases ou des éléments sur le web ou sur TGPT. Ailleurs, ça reste un outil. Nous sommes les producteurs de l'information. L'IA peut nous aider à la produire de façon... à différents formats, par exemple pour faire un poste à partir d'un article déjà écrit, ce genre de choses. Mais ce n'est pas elle qui écrit les articles, c'est toujours l'humain qui décide. Et ça c'est très clair dans notre charte.

  • Speaker #1

    Donc ça vous permet peut-être d'éviter un écueil aussi parfois qu'on peut avoir avec l'utilisation des LLM et puis de l'IA générative en général, c'est la standardisation aussi des contenus. Et on a vu, on parlait tout à l'heure un petit peu des médias qui se sont un peu pris le mur de l'IA générative en 2022, début 2023, c'était aussi par rapport à une forme de standardisation. des contenus où on voyait des papiers qui sortaient, qui étaient vraiment tous de la même teneur, qui étaient écrits exactement de la même manière. Peut-être qu'avec cette démarche-là, ça vous permet d'éviter cet écueil-là et de garder encore la singularité de vos journalistes et de votre titre.

  • Speaker #0

    Oui, et puis c'est important. Typiquement, c'est un des points qu'on aborde dans nos formations. L'IA a plein d'avantages, mais elle a aussi plein d'inconvénients. Elle peut halluciner, elle peut moyenniser, comme on dit, c'est pas un très joli mot. Elle peut rendre tout un peu pareil. Et puis on rappelle à nos journalistes dans les formations, on leur dit tout ce qu'ils peuvent faire avec, on peut aussi dire tout ce qu'ils ne peuvent pas faire avec, parce que, par exemple, ce n'est pas parce qu'il y a un super outil qui fait un super truc, et qu'on est pressé, qu'on n'a pas le temps de trouver une photo, qu'il faut aller demander à Dali ou à notre générateur d'images de la faire. Non, on a des iconographes aux échos, on a des rapports avec des agences, on choisit des photos d'une certaine manière, et l'IA pourrait générer des images, mais on ne souhaite pas le faire parce qu'on veut montrer la réalité. à nos lecteurs et c'est quelque chose qu'on leur doit et ça se fait avec les gens du service photo et les gens le comprennent très bien à partir du moment où on prend le temps de leur expliquer.

  • Speaker #2

    C'est la fin de la première partie de cette interview de Deep Media avec Benoît Georges, journaliste en charge de l'implantation de l'intelligence artificielle à la rédaction pour les Echos. Je vous donne rendez-vous prochainement pour la suite de cet échange où l'on va continuer d'explorer le futur des médias à l'heure du numérique. En attendant, pour ne pas manquer les prochains épisodes, abonnez-vous à ce podcast et mettez les commentaires et étoiles adéquates. DeepMedia est un podcast autoproduit par FollowMeConseil, agence de formation et conseil stratégique spécialisé en IA générative et social media. A très bientôt !

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