- Speaker #0
Le Musée Sacerbe présente un podcast créé et dialogué par Vanessa Bertrand. Devine qui vient doubler. Devine qui vient doubler. Devine qui vient doubler. Devine qui vient doubler. Non Bart, arrête de te sonner, c'est n'importe qui. Va te faire shampooiner, c'est pas n'importe qui. On est chez Juliette Vigouroux et Alain Cassar. C'est eux qui font parler les acteurs en français. Dans une petite allée bucolique de l'Est parisien, Juliette Vigouroux nous accueille chez elle, dans un salon à la décoration sobre, à l'image de cette adaptatrice modeste malgré sa carrière. Une carrière menée en tandem avec son co-auteur et époux Alain Cassar. Si vous avez déjà vu au moins un épisode des Simpsons ou un film de la saga Harry Potter, Alors, vous avez entendu quelques-unes de leurs répliques. Juliette aime le cinéma, elle aime écrire pour les comédiens, et elle nous a tous régalé de ses dialogues d'Underground de Kusturiza à Arrête-moi si tu peux de Spielberg, en passant par la leçon de piano de Jane Campion ou encore Invictus de Clint Eastwood. Rencontre avec une autrice à la filmographie éclectique, dont je rêvais depuis longtemps de recueillir les souvenirs, de connaître le regard qu'elle porte sur notre métier, et d'entendre quelques-unes de ses savoureuses anecdotes. Tu fais les voix de qui ? Les voix de qui ? De personne. Mais tu fais quoi alors ?
Eh bien, ce que je fais, c'est que j'adapte donc des dialogues, c'est-à-dire que je traduis et j'écris des dialogues qui seront joués par des acteurs. Donc, ce qui n'est pas une traduction ordinaire. Contrairement aux traducteurs de livres qui n'ont pas de contraintes, nous avons les contraintes bien sûr de synchro, de longueur et de jeu des acteurs, surtout de la musique, du rythme.
- Speaker #1
Est-ce que tu avais exercé une autre profession avant ? Ou est-ce que tu étais déjà dans l'écriture ?
- Speaker #0
Pas du tout, j'étais attachée de presse, de théâtre. Un jour j'ai été contactée. par Michel Gast, qui avait été réalisateur d'un certain nombre de films et qui avait mis en scène une pièce avec beaucoup d'acteurs de doublage, puisqu'il avait une société de doublage. Je me suis dit, pourquoi pas ? J'aimais écrire, j'adore le cinéma, je suis très attachée au dialogue. Donc j'ai demandé à Michel Gast si je pouvais faire un essai et c'est comme ça que tout a commencé. mon mari, je travaillais avec mon mari, et mon mari et moi avons fait un essai, c'était... C'était... C'était difficile parce que on nous a plongés, du jour au lendemain, dans une série, une vague série obscure qui s'appelait Rotel, et nous ne savions absolument rien du doublage. On nous a jetés dans le bassin. Sans savoir nager.
- Speaker #1
Personne ne vous expliquait ce qu'était la détection ?
- Speaker #0
Rien, rien, rien. Donc on a fait un ou deux épisodes, tant bien que mal. C'était dirigé par Arlette Thomas, que j'avais bien connue parce que j'avais été attachée de presse d'un théâtre qu'elle dirigeait à la Villette. Et donc Michel Gasse avait dit, écoute, tu fais l'essai, si ça ne va pas, je ne lèverai pas le petit doigt. pour que tu bosses avec nous. Donc, le retour du plateau n'a pas été trop mauvais. Ça ne devait pas être terrible au niveau de la synchro. Mais le dialogue, quand même, était là, peut-être. Et donc, c'est comme ça que j'ai commencé.
- Speaker #1
Et donc, vous avez d'emblée commencé ensemble avec Alain Cazan.
- Speaker #0
Ah oui, ensemble. Après, on était sur des séries différentes. Et bon, alors, on a fait des séries obscures. truc brésilien insipide. Et un jour, j'ai eu la chance qu'on me mette sur la série Mâche, tirée du film qui avait eu la palme je ne sais plus en quelle année, qui est une série formidable, extrêmement difficile, parce que bourrée de jeux de mots. Il y avait un directeur de plateau à l'époque qui s'appelait Claude Joseph. Tu l'as connu ? Oui. Et que Joseph est allé faire auprès de Jenny Gérard et de Michel Gast, c'est-à-dire qu'il était très très content des dialogues. C'est comme ça que tout a démarré, qu'on a eu des séries de plus en plus intéressantes, des premiers longs métrages.
- Speaker #1
Et tu te souviens en quelle année vous avez fait la première série ?
- Speaker #0
Les premiers épisodes d'Hôtel, c'est en décembre 88.
- Speaker #1
Tu t'en souviens très précisément.
- Speaker #0
Très précisément, oui.
- Speaker #1
Par la suite, est-ce que vous n'avez pas demandé justement à rencontrer... Est-ce que vous n'avez pas été donné la possibilité de rencontrer les détecteurs, d'aller sur le plateau ?
- Speaker #0
Non, non, pas du tout à l'époque. Oui, oui, pas du tout. et puis... Euh... Voilà, il y avait peut-être pas mal d'auteurs qui ne voyaient pas d'un bon oeil l'arrivée de nouveau, je ne sais pas. Donc nous n'avons pas été très aidés effectivement et on a tout découvert sur le tas.
- Speaker #1
Alors à quoi ressemble la journée d'un dialoguiste,
- Speaker #0
du lever au coucher ?
- Speaker #1
Et puis est-ce que par exemple tu as déjà travaillé en pyjama ?
- Speaker #0
Ah en pyjama non, parce que je n'en porte pas. En robe de chambre, oui, oui, oui. La journée d'un dialoguiste, surtout sur des films assez importants où les conditions sont extrêmement difficiles, c'est très peu de temps, des versions multiples, donc une course contre la montre terrible. Oui, oui, c'est très souvent 8h du matin. matin, 11h, minuit, soir, sans arrêt. Oui, c'est une véritable course contre la montre. Tu connais les conditions, mais elles sont devenues de plus en plus difficiles. Surtout quand on fait des gros films, disons, entre guillemets. Avec les nouvelles versions qui t'arrivent et les conformations à faire. Le pire a été les Hobbits de Jackson. Ça a été épouvantable. Ça a été... effrayant, effrayant. On avait une version que tu connais qu'on appelle Preliminary 1, 2, 3. Dans la 3, dans la 3e, on remettait ce qu'on avait enlevé dans la 2. Enfin bon, sans cesse, sans cesse, des nouvelles versions. Il a travaillé sur son montage jusqu'à l'ultime minute, quoi. Les comédiens avaient fini d'enregistrer, tout était fini quand on a eu la version finale. Ils ont fait des retecs, vraiment, et après on a eu une final revise, une version finale révisée. Non mais c'était affreux, je ne savais plus, je ne comprenais plus rien, je ne savais plus ce qui se passait. Tout ça avec en plus une image complètement... Pas fini, noir et blanc, avec Warner, Dubbing, qui défilent sur l'écran en permanence pour éviter le piratage.
- Speaker #1
Il faut être solide.
- Speaker #0
Il faut être solide et parfois on a du mal à s'en remettre.
- Speaker #1
Comment est-ce que tu appellerais ta profession ? Parce qu'il y a un flou. Alors souvent les gens de l'extérieur nous appellent les doubleurs, donc si bien que les doubleurs, au mieux ça se désigne des entreprises. mais bon après il y a entre adapter Têteur, dialoguiste, je sais que Fred Savied, que tu as dû connaître, lui, il se disait doublaturge. Mais toi, comment tu appelles ton métier ?
- Speaker #0
Moi, je dis dialoguiste. Parce que dialogue, pour moi, c'est ce qu'il y a de plus important. Je dis dialoguiste en précisant que c'est pour le doublage. Mais bon, adaptateur, je trouve ça horrible comme mot.
- Speaker #1
Tu es bien d'accord qu'on n'est pas des traducteurs ?
- Speaker #0
Ah non, ah non, ah non. Pas du tout, nous ne sommes pas des traducteurs. Ça n'a rien à voir avec le métier de traducteur. C'est juste le début,
- Speaker #1
c'est la première partie de la mission.
- Speaker #0
La première partie, voilà, et la plus facile, comme tu sais, parce que... Au principe, on arrive à trouver tout de suite la phrase à peu près bien, à peu près drôle, à peu près... Mais après, il faut qu'elle rentre dans les clous. La difficulté, c'est d'être synchrone, c'est d'être en rythme, c'est de ne jamais, jamais perdre de vue que ton texte va être joué par des acteurs. C'est pourquoi, moi, j'ai toujours écrit, par exemple, avec le son. avec la voix originale. Ce que des confrères ne font pas, et ça m'étonne toujours, j'ai toujours mis le son un peu baissé bien entendu, mais toujours avec le son de façon à être parfaitement collé au rythme, à la musicalité. Et c'est en général ce qu'aiment les comédiens. Parce qu'écrire sans le son, bien sûr, on voit tout de suite que c'est bien, synchrone ou pas synchrone, mais il n'y a pas forcément la musique, il n'y a pas forcément le rythme, les respirations, etc. Donc moi j'écris toujours, toujours avec le... Et d'ailleurs j'étais souvent un peu ennuyé, frustré, puisque pour les gros films on avait toujours des... des séances de vérification comme tu le sais avec les responsables Warner ou Fox ou autres et le directeur artistique et en général ils demandent pendant la vérif à ce qu'on coupe le son et heureusement je mémorise chaque mot et chaque phrase et je me souviens assez mais quand même Tu es gêné parce que tu n'as plus l'original et tu ne peux pas le jouer comme il faut, en rythme.
- Speaker #1
Est-ce que tu as écrit souvent les versions sous-titrées des films ?
- Speaker #0
Non, très peu, très très peu.
- Speaker #1
Mais tu l'as quand même fait.
- Speaker #0
Oui, oui, oui, j'ai dû faire Arrête-moi si tu peux de Spielberg. Agent spécial Enrati FBI. Bonsoir Carpe. Je serais arrêté, c'est comme à Las Vegas, le casino gagne toujours. Un cinglé se balade en avion en se faisant passer pour un pilote, on l'appelle le James Bond du ciel. Hello, poupée. Un gamin, c'est pour ça qu'il n'est pas fiché. 30 mg de codéine toutes les 4 heures. Confirmez ? Je confirme. Docteur Harris. Oui ? Vous confirmez ? Confirmez quoi, monsieur ? J'en ai fait une. Deux ou trois, c'est tout.
- Speaker #1
Est-ce que tu as aimé l'écriture de sous-titres ?
- Speaker #0
Non, trop. Trop frustré. Trop frustré. Avec l'habitude que j'avais de tout couvrir, de tout... Trop frustré. On est obligé de, non pas de s'éloigner du texte, bien sûr, mais enfin, d'adapter là vraiment énormément. Je suis dialoguiste, j'adore les dialogues, et c'était trop frustrant pour moi. C'est pour ça que ça me fait beaucoup sourire quand les gens se piquent de voir des films en VO. À moins d'être parfaitement bilingue...
- Speaker #1
Tu rates une partie du film.
- Speaker #0
Tu rates une partie du film.
- Speaker #1
Et tu regardes moins l'image en plus.
- Speaker #0
Moi, il m'est arrivé de... Je me souviens d'un film italien, parce que j'adore le cinéma italien, mais un film pas très ancien qui s'appelait Quelle heure est-il ? Je comprends vachement l'italien, mais quand même, c'est très bavard. Ce film n'avait jamais été doublé en français, donc je l'ai vu sous-titré. J'ai... passé mon temps à regarder les sous-titres, je n'ai quasiment rien vu du film. On le sait bien nous qui travaillons sur l'image, combien de fois avec Alain on est revenu en arrière, on s'est passé 5 fois, 10 fois, une phrase juste pour voir la petite lumière dans l'œil de l'acteur et tout. Quand tu regardes des sous-titres, tu ne les vois pas, tu perds beaucoup. Et on perd aussi beaucoup de dialogues. Quand tu as une scène avec cinq personnes autour d'une table qui parlent en même temps, tu es obligé d'une sous-titre que l'idée principale, et tout le reste...
- Speaker #1
Mais quelques fois, tu as fait les sous-titres aussi ? Tu avais fait les deux en parallèle, ou l'un après l'autre ?
- Speaker #0
L'un après l'autre.
- Speaker #1
Tu avais trouvé ça moins chronophage de faire les sous-titres que d'écrire l'adaptation ? Ah oui. Et sinon, pour les autres films, est-ce que tu as été en contact ? avec l'auteur des sous-titres ? Est-ce qu'il vous a été demandé de vous concerter pour certains termes ?
- Speaker #0
Pas souvent. Je l'ai fait sur les derniers films volontairement, parce que j'ai aidé un jeune auteur, mais pas souvent. Si pour les Harry Potter, on s'est un peu concerté, mais non, en général, non. Aucune concertation, je le déplore beaucoup, beaucoup, beaucoup. C'est pourquoi... Parfois on voit des gens qui écrivent sur Internet, comment ça se fait ? C'est pas du tout la même chose, les sous-titres. Et d'ailleurs, à propos de sous-titres, les rares fois où j'ai travaillé avec des personnes qui faisaient les sous-titres des films que j'écrivais pour le doublage, c'était très amusant parce qu'ils avaient une tendance, mais vraiment très marquée, à faire se tutoyer. Ça prend moins de place. Tu as et ça prend moins de caractère. Voilà, mais non, c'est vraiment au feeling.
- Speaker #1
Depuis qu'on est passé de l'écriture sur la bande celluloïde, ce qu'on appelle entre nous le traditionnel, au virtuel, donc sur l'ordinateur où la bande rythmo est dématérialisée, est-ce que tu trouves que le métier a changé ? Est-ce que tu prends tant de plaisir à écrire ? Est-ce que... Tu es tout à ton écriture ?
- Speaker #0
Je dois dire que j'ai freiné des quatre fers pour me mettre à l'ordinateur. J'adorais écrire avec mon crayon. J'avais l'impression que la main vraiment et la pensée étaient vraiment... parfaitement synchrone quoi, et comme tu peux prétouiller en plus sur l'ordinateur. Non, j'adorais écrire au crayon, j'adorais ma gomme, j'adorais étirer les mots, j'adorais cette souplesse en fait que je n'ai pas vraiment retrouvée dans les logiciels. Mais bon, je ne suis peut-être pas très bien placé pour... parler de ça je suis un peu de la vieille école j'ai fait pendant plus de 20 ans des films écrits voilà et donc le logiciel je m'en suis servi de façon très sommaire disons.
- Speaker #1
Une de tes particularités c'est d'avoir travaillé en tandem avec ton époux Alain Cassar Comment se passait la collaboration entre vous ? Est-ce que vous partagez le film ? Vous coupiez le film en deux ? Est-ce que vous étiez assis l'un à côté de l'autre pour chaque réplique ? Est-ce que ça créait des scènes de ménage ?
- Speaker #0
Comment ça se passait ? Oui, bien sûr. Oui, nous étions... Non, non, non, on ne se partageait pas le film. Je ne vois pas comment on aurait pu faire ça, mais on travaillait côte à côte. En général, c'est moi qui écrivais, parce que je ne suis pas... Ça me démangeait tellement de crayons que je ne le laissais pas être. mais non on travaillait côte à côte oui il y avait quelques scènes de ménage de temps en temps parce que chacun est arc-bouté à ses phases mais non voilà c'était une collaboration Tout à fait, comment dirais-je, fructueux, sympathique. C'est bien de travailler avec quelqu'un, je trouve. Parfois, on se sent bien seul, on aimerait avoir un regard. Sauf, effectivement, par contre pour les Simpsons, les premières saisons, on les a écrites ensemble. À un moment donné, parce qu'on avait déjà des longs-métrages à écrire, il fallait donc écrire la série beaucoup plus vite, donc on s'est partagé et on lisait l'épisode à l'autre. Mais on faisait chacun nos épisodes.
- Speaker #1
Alors les Simpsons, parlons-en, justement. Une des particularités de cette série, c'est qu'elle fait référence à beaucoup de personnalités de la culture nord-américaine qui ne sont pas très connues en France, que ce soit les sportifs, les talk-shows, etc. Donc, comment vous faisiez pour trouver des équivalents ? Sur quels critères vous vous basiez ?
- Speaker #0
Je dirais, moi, que c'est quasiment la chose la plus difficile qu'on ait écrite de toute notre carrière, qu'il y a des films qui sont... C'est un merveilleux film, son piano qu'on a écrit, qu'on a écrit vraiment en huit jours sans problème. Il a été écrit tout seul, ça, oui. Oui, mais j'ai trouvé, donc évidemment, c'est le rêve. Mais non, je plaisante, mais les Simpsons, c'était effectivement extrêmement difficile, parce qu'on est dans un contexte nord-américain que c'est truffé d'allusions à des personnages. On a une amie aux États-Unis, à Los Angeles, qui est parfaitement bilingue, qui avait beaucoup vécu en France, et on l'appelait quasiment pour chaque épisode, en lui disant, mais qui c'est ? Et elle-même, elle-même parfois, ne savait pas à qui il faisait allusion. Elle appelait son père, son oncle, faisait allusion à un obscur comédien, troisième couteau dans une série des années 50. Non mais c'est vrai, donc... Eh bien selon le contexte, selon la blague, ou alors il était caricaturé, enfin il était à l'image, et on s'arrangeait toujours dans une phrase présentée. pour qu'on sache de qui on parle, ou alors qu'il n'y était pas l'image, et il nous arrivait de complètement changer le texte, en prenant des personnages célèbres, Michael Jackson, pourquoi les blagues sur la reine d'Angleterre ?
- Speaker #1
Plus accessible.
- Speaker #0
Voilà, plus accessible, sans jamais faire allusion à des personnages pensés.
- Speaker #1
Est-ce qu'Alain et toi vous avez eu à inventer des mots ?
- Speaker #0
Alors il y a eu une réplique d'Homère qui est très connue C'est Alain qui l'avait trouvée parce qu'Homère souvent disait Oh my God, oh my God, oh my God, oh my God Il n'était pas question de mettre au mon Dieu bien sûr Le fameux Oh my God des Américains qui est toujours, c'est une véritable calamité. Et donc Alain avait trouvé Opunès, Opunès, Opunès, qui était parfaitement synchrone, et Philippe Pétieu, l'acteur qu'il double, a transformé ça en Pinès. Mais l'Opunès, oui, c'est Alain qui l'a inventé.
- Speaker #1
À l'arrivée des Simpsons, en France, on ne parlait pas tellement de Donat, et qu'est-ce qu'il a fait ? que tous les deux vous êtes dit mais si on laisse de notes, le Beignet, non ?
- Speaker #0
Oui, à partir du moment où ce n'était pas très connu en France, autant lui laisser son nom original.
- Speaker #1
Mais ça a contribué, je pense, à ce que les Français s'habituent au domaine.
- Speaker #0
Oui, oui.
- Speaker #1
Quelle est la partie la moins agréable de notre métier ?
- Speaker #0
Le contexte, je sais que les conditions sont extrêmement difficiles. Enfin bon, moi je ne parle pas financièrement là, pas trop. parce que j'avais la chance d'écrire des longs métrages, donc j'étais payé correctement. Mais oui, les conditions sont extrêmement... difficile en ce sens. Enfin, je parle encore une fois des longs métrages parce que je n'ai pas du tout d'expérience sur les séries sauf quand j'ai débuté mais les conditions étaient différentes. Mais c'est toujours une question de temps quoi, de course dont on peut la montre et c'est absolument... c'est invraisemblable maintenant comment faire autrement mais quand je vois qu'il y a des équipes entières de dialoguistes qui travaillent sur un dialogue de film aux États-Unis pendant des semaines, des mois, etc. et que toi on te donne 15 jours à chaque fois c'est un véritable tour de force et un miracle Voilà, que le doublas soit réussi, parce que, non, non, ça c'est vraiment ce que je trouve le plus pénible. Oui, finalement,
- Speaker #1
c'est les conditions dans lesquelles...
- Speaker #0
C'est les conditions, mais c'est très bien que tout travail d'écriture peut être amélioré, mérite de laisser reposer, pour y revenir. Par exemple, tout à l'heure, tu parlais du tout-oui-moi et du tout-oui-moi, mais... Il y a aussi la façon de faire parler les gens, des mots qu'on leur met en bouche. L'idéal serait d'avoir le temps, une fois qu'on a fini le film, de le reprendre dès la première bobine. Parce qu'au fur et à mesure qu'on avance dans le film, on est de plus en plus à l'aise. avec les personnages. On sait beaucoup plus facilement comment les faire parler. Mais ça, ça s'acquiert au fur et à mesure qu'on se familiarise avec le personnage, avec l'histoire, etc. Et donc, ce serait formidable de pouvoir revenir au départ et de les premières bobines, notamment, et peut-être de corriger parce qu'on n'écrirait peut-être pas tout à fait les mêmes phrases. Au début du film, en revenant dessus, on l'a fait en attaquant le film. Et ça, on n'a jamais le temps. De même que laisser reposer son dialogue. Combien de fois ça nous est arrivé, avec mon mari, d'assister à la projection. et de se dire surtout dans l'humour et tout, « Ah, mais on aurait dû écrire ça, c'était tellement mieux ! » Mais bon, quand on t'arrache, maintenant, avec le travail sur l'ordi, sur le logiciel, on peut envoyer un peu au dernier moment, mais avant, on avait un coursier qui venait chercher tous les jours les bobines. de 10 ou 20, 10 minutes, on s'obligeait à écrire 10 minutes par jour, je me souviens. Et donc, on avait ce coursier où nous-mêmes on allait les déposer, qui venait chercher la bande, la bande mère sur laquelle on avait écrit, et parce qu'après ça allait chez une... Calligraphe ? Personne qui faisait la calligraphie, la frappe, voilà, et donc on avait parfois même pas à peine le temps de relire.
- Speaker #1
Une petite question à propos d'Harry Potter. Les sorts et les noms, est-ce que tu as eu une liste qui t'a été fournie, un peu comme quand on a des bibles où tu sais exactement dans tel terme utilisé dans telle boucle, tu vas avoir l'équivalent qui était pris dans la traduction littéraire, ou alors est-ce qu'il a fallu que tu ailles fouiller toi-même dans les romans, page par page,
- Speaker #0
pour retrouver tes petits... Ah oui, non absolument, on n'a jamais eu de liste, non non. Les premières années doivent savoir qu'il est strict. interdit de pénétrer dans la forêt aucun tour de magie ne doit être fait dans les couloirs entre les tours mais comme les films notamment les premiers parce que dans les derniers comme notamment les deux derniers puisqu'ils ont fait deux films avec un seul roman ça a été un peu délayé il y a des scènes qui n'y avait pas dans les romans etc mais au départ les premiers les premiers films étaient extrêmement fidèles aux romans et donc bien entendu on avait les instructions Warner de comme les enfants avaient lu les romans Évidemment, on a réutilisé tout le merveilleux travail du traducteur des Harry Potter, Jean-François Ménard, qui a fait un travail merveilleux.
- Speaker #1
Et vous l'avez rencontré ?
- Speaker #0
Non, on ne l'a pas rencontré. Mais bon, il y avait des accords de prix et donc il fallait qu'on l'utilise. Si tu veux, on n'a aucun mérite. je dois dire aucun mérite parce que tout ce qui est inventé, les noms de sorts les maisons, les objets les noms de professeurs extraordinaires tout ça c'est Jean-François Ménard en revanche un des mérites ça devait être de pouvoir recaser et de devoir trouver des parades quand il fallait caser des sorts qui n'étaient pas du tout simples ah oui ça c'est certain c'est certain Je vous remercie. Qu'est-ce qu'il y avait comme maison ? Pouf, souffle, c'était off, c'était très synchrone, Serpentard, Sylvain, il y avait des choses qui n'étaient pas synchrones du tout. The Dark Lord, trois syllabes, Le Seigneur des Ténèbres,
- Speaker #1
avec une belle labiale à la fin.
- Speaker #0
Donc, non, non, c'était... Mais bon.
- Speaker #1
Quel exemple de parade, justement, vous avez pu trouver ?
- Speaker #0
Ah bah, c'est-à-dire que... Tu sais bien comment ça se passe, si c'est au sein d'une phrase, tu déplaces, tu arrives à le caser et tout. Maintenant, effectivement, quand... Quand c'est une interpellation ? Voilà, un des personnages qui hurle « The Dark Lord » , il fallait que ça rentre, comme on peut. Et je vais terminer par quelques petites questions sur Underground. Là, on fait un peu un grand écart culturel, puisqu'on passe d'un film américain à un film germano-franco-hongro-bulgaro-checo-yougoslav. Un film magnifique, qui a eu la panne de Meudor à Cannes en 1995, que je trouvais extrêmement fantaisiste. J'ai adoré ce film quand je l'ai vu. et il me semble qu'il y avait... Il y avait trois langues. Qui a été ton meilleur conseiller culturel pour l'écriture de ce film ?
- Speaker #1
Tu vas rire. La personne qui m'a le plus aidée, c'est ma femme de ménage de l'époque, qui était croate. Et voilà, parce que, comme nous avons travaillé à partir de sous-titres anglais... C'était effroyable parce que, évidemment, tu connais justement le problème des sous-titres, c'est quand même très résumé et tout. Et donc, il y a des moments où on nageait complètement, parce qu'il y avait des phrases entières, ou presque, qui n'étaient pas traduites en anglais. Et donc, j'avais cette femme de ménage, Maria. Et on avait la VHS à la maison, alors de temps en temps, le texte, je montrais des phrases, elles paraissent pas trop bien françaises, mais elles ébrouillaient assez pour que je comprenne. Mais ce qui a été très drôle, c'est que dans ce film, je ne sais pas, puisque tu l'as aimé, tu dois t'en souvenir, le personnage de Blackie. tu vois qui je veux dire peter peter popara qui s'appelle black qui jure comme dit sans arrêt des horreurs l'enculé nazi de voilà je me dis et dans les sous titres on avait envoyé bien que plusieurs fois c'est parce que ces phrases sont revenus plusieurs fois plus revenait plusieurs fois dans le film et il en disait non comme ça et c'était vraiment d'un seul g les insultes et des grosses IRT. Et nous on avait du genre fucking nazi, c'est tout, tu vois, trois mots. Et donc un jour j'ai montré ça à Maria, il a fallu la coucher au forceps, elle était rouge comme une tomate. Ah non, je ne peux pas, je ne peux pas le dire, je ne suis pas Maria. Il parle de la mer, je me suis dit, ça doit être un jour, nique ta mère, non, non, non, cerveau croate. enfin voilà et c'est comme ça qu'on avait mis au point cette forêt qui est revenu plusieurs fois j'ai adoré j'adore j'adore j'ai adoré ça personne ne pédale dans la cave personne non non non je n'ai personne qui pédale dans la Merci.
- Speaker #0
c'est vraiment un très grand réalisateur puis la musique de goran bobovitch tu as d'été un film qui parlait de la mythologie grecque qu'on
- Speaker #1
ne citera pas ah oui voilà 300
- Speaker #0
Et tu avais parlé des enfers et tu avais eu une étrange réaction du client.
- Speaker #1
Oui, tout à l'heure nous parlions, tu me demandais si parfois il y avait eu des échanges un peu difficiles en vérification parce que je marquais bouté à un texte et que le client ou la cliente voulait autre chose. Mais là, ça a été le cas et je n'ai pas eu rien de cause. Oui, on avait écrit « les enfers » , je ne sais pas où vous retrouverez « aux enfers » , je ne sais plus la phrase exacte. Et la cliente a voulu l'enfer.
- Speaker #0
Alors que c'est anachronique ?
- Speaker #1
L'enfer est une notion chrétienne et les enfers c'est autre chose.
- Speaker #0
Et tu ne sais pas s'il y a eu des réactions par la suite d'internautes, etc., qui ont dit...
- Speaker #1
Sûrement, je ne disais jamais les réactions, non, mais sûrement, sûrement, oui. Les auteurs, les traducteurs, comme disent les traducteurs, mais ils ont mis l'enfer, c'est les enfers. Oui, sans doute, sans doute.
- Speaker #0
Alors, la prochaine fois que vous regarderez Harry Potter en VF, pensez à Juliette Vigrou. Dialoguiste cinéphile autodidacte Et en attendant, découvrez d'autres aspects du doublage et du sous-titrage dans l'un des podcasts de la série Devine qui vient doubler.