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Dino Sapiens

Vanina Lanfranchi : parlons des équipes

Vanina Lanfranchi : parlons des équipes

21min |17/10/2024
Play
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Dino Sapiens

Vanina Lanfranchi : parlons des équipes

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21min |17/10/2024
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Description

Avec Vanina Lanfranchi, 📘 Autrice de : Equipe n.f.: Animal fantastique qui (nous) travaille

Ex-secrétaire générale - COO en charge des volets structuration, process, conformité, juridique, finance, RH, digitalisation... ✅ Experte capital investissement ⏐ Dynamiques d'équipes ⏐Transformation


Avec son enquête auprès de 102 managers, publiée dans un livre qui s'intitule : "Equipe n.f.: animal fantastique qui nous travaille", Vanina Lanfranchi nous emmène dans cet épisode sur la piste des équipes.

Au delà de la performance d'équipe, et des recettes de management parfois "classiques", son analyse décortique des dynamiques collectives à travers le regard de leaders, provenant d'une grande diversité d'organisations, de problématiques et de contextes.


Cet épisode couvre de nombreux aspects partagés par ces 102 leaders et analysés avec finesse par Vanina:

  • Quelles solutions les leaders mettent ils en oeuvre lorsque leur équipe dysfonctionne? Quelle posture adoptent ils?

Quelles sont les fausses solutions et les vraies problématiques?

Nous découvrons que certaines pratiques et croyances pourtant courantes dans l'ensemble des secteurs, qui visent à résoudre les situations critiques, ne sont pas efficaces.

  • Vanina nous partage également des pistes de réflexion pour résoudre les dysfonctionnements d'équipes, à commencer par un diagnostic de leur fonctionnement mais également trouver un juste équilibre entre processus et relations.

  • Elle nous explique que dans certains contextes, aucune solution ne peut être trouvée pour solutionner les dysfonctionnements d'équipes. Elle évoque avec exemple à l'appui des situations où la culture d'entreprise peut empêcher les améliorations, où le manque de moyens et les logiques de réductions continues découragent les équipes et font tarir la créativité des leaders.

  • Puis Vanina nous parle plus en détail de cet animal fantastique et de sa relation au leader. Comment se positionne le manager, quelle est la juste distance à adopter pour guider l'équipe?

  • Enfin, elle nous partage quelques exemples de situations de transformation avec des situations difficiles, mais aussi de grandes réussites, inspirées par un leadership humain et ouvert au dialogue. Ce qui permet d'engager une démarche d'amélioration continue du fonctionnement des équipes, pour plus de bien-être au travail, et plus de performance.


Quelques ouvrages proposés pour bien nourrir l'animal fantastique:




Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Bonjour, bienvenue sur ce nouvel épisode de DinoSapiens, le podcast qui parle de l'humain dans la transformation des organisations. C'est une vraie joie pour moi de recevoir aujourd'hui Vanina Lanfranchi, experte du monde de l'entreprise et particulièrement des équipes. Vanina a écrit un ouvrage intitulé Équipe, n.f.: animal fantastique qui nous travaille Ce livre est le fruit d'une enquête qu'elle a menée auprès de plus de 100 responsables d'équipe. Mais avant de se plonger dans le cœur du sujet et de son lien avec la transformation des organisations, je dois vous présenter Vanina et ce qui la rend exceptionnelle à mes yeux. Vanina s'est découverte dès l'enfance, une passion pour le monde du travail, en lisant pour la première fois Germinal d'Émile Zola lorsqu'elle était en quatrième. Après des études généralistes, elle a rejoint des fonds d'investissement et de capital risque. Elle y a travaillé pendant 15 ans en tant que secrétaire générale. En parallèle de son rôle, Vanina s'est ensuite formée au coaching, ce qui lui a permis d'accompagner pendant plusieurs années des professionnels et des équipes. Au fil du temps, elle a su se laisser guider par sa curiosité et sa passion première pour les dynamiques humaines en entreprise. Elle s'est intéressée de plus en plus, au travers de ses échanges avec les managers, à cet animal fantastique qu'est l'équipe. Et c'est ainsi qu'est née son ambition d'écrire un anti-guide du management pour nous permettre de reconnaître la diversité des équipes, et de sortir des règles parfois dogmatiques du management. Vanina L'Enfranchi a réalisé un travail massif d'enquête auprès de 102 responsables d'équipe. Elle nous explique aujourd'hui ce qu'elle a découvert à travers cette enquête. Bonjour Vanina, merci de venir nous parler de ton livre sur Dino Sapiens.

  • Speaker #1

    Bonjour Bérangère et je suis ravie que tu m'aies proposé d'intervenir sur Dino Sapiens, dont je suis une fidèle auditrice depuis les débuts.

  • Speaker #0

    Alors, tu as mis la barre très haute pour étudier les équipes. Un travail de plus de 100 interviews, c'est pas banal. Comment as-tu conçu ton enquête et qu'est-ce que tu as découvert ?

  • Speaker #1

    Merci d'avoir introduit ce travail, oui, 102 interviews même. Alors j'ai conçu mon panel avec un objectif de diversité. Je voulais interviewer des responsables d'équipe, donc des dirigeants et dirigeantes, entrepreneurs, managers, sur le thème de leur fonctionnement d'équipe. Et donc, pour que leur réponse soit vraiment focalisée sur le fonctionnement d'équipe, j'ai souhaité interviewer des gens très divers, avec une diversité de secteurs, de tailles d'équipes, secteurs publics ou privés, des personnes de différents pays, et aussi ma grande fierté, 51 femmes et 51 hommes. Et donc, qu'est-ce que j'ai découvert au cours de cette enquête ? Tout d'abord, c'est le sentiment d'humilité qui m'a saisie en premier, parce que j'ai réalisé que c'est 102 personnes, finalement, responsables d'équipe. faisaient comme elles pouvaient. Ce sont des personnes qui mènent des entreprises, des business, des équipes, comme elles peuvent, chaque jour. Donc face à ça, on est obligé d'être humble. Ce que j'ai constaté aussi, ce que j'ai découvert, c'est que les recettes managériales n'existent pas. Aucune des 102 personnes ne m'a dit je dirige comme ceci, je gère mon équipe comme cela Et ça fonctionne à coup sûr ? Non, non, c'est vraiment des essais-erreurs, des découvertes. Et donc, j'ai découvert des choses en même temps que ces personnes. D'où la notion d'anti-guide de management. Je vois ce livre, Équipe NF, comme un anti-guide de management.

  • Speaker #0

    Selon toi, quelles sont les fausses solutions aux problèmes exprimés par tes interlocuteurs ?

  • Speaker #1

    Alors là, je dis ça vraiment en ne voulant blesser personne. C'est que... Parmi les 102 interviewés, il y a bon nombre de personnes pour lesquelles il n'y a pas de problème. Leur équipe fonctionne bien, leurs affaires fonctionnent bien, et d'ailleurs tant mieux. Et pour une part de ces personnes-là, si jamais il y avait un problème concernant le fonctionnement d'équipe, ce serait un problème tout à fait exogène. Du type, c'est la guerre, c'est la pandémie, c'est le contexte géopolitique qui est compliqué, le coût des matières premières. Donc pour ces personnes-là, il n'y a pas vraiment de... prise de conscience que le fonctionnement d'équipe peut dysfonctionner, puisque toutes les causes et toutes les sources de difficultés sont exogènes. Donc là, rien à faire, en fait. Pas de problème, pas de solution à chercher, tout est exogène et on attend que ça passe. Sinon, on a des personnes qui identifient des problèmes en termes de fonctionnement d'équipe et qui adoptent à mon sens, deux fausses solutions, deux fausses pistes. La première fausse piste, ça va être de... de tout analyser sous le prisme des personnalités. Donc là, on peut s'imaginer quelque chose d'ultra logistique, comme si les personnes composant l'équipe étaient des stocks ou des flux. Il faut faire rentrer un mouton à cinq pattes, une perle rare, il faut faire sortir le vilain petit canard. Sauf qu'on se rend vite compte avec ce système que le vilain petit canard, il y en aura toujours un nouveau ou une nouvelle. et que quand le vilain petit canard est sorti, ce n'est pas la fin de tous les ennuis. Donc pour moi, ça, c'est une fausse piste. Et la deuxième fausse solution, on a des problèmes en termes de fonctionnement d'équipe. À mon sens, c'est de considérer que le manager est un super héros qui doit tout porter sur ses épaules, qui doit se former, s'améliorer, être à l'écoute, être bienveillant, tirer, pousser, faire se mouvoir l'équipe tout seul. Pour moi, cette cape de super héros, elle est trop lourde. et pas efficace hum quand on veut s'attaquer au fonctionnement d'équipe. L'équipe, ce n'est pas un manager sur le piédestal et puis tous les autres qui suivent, qui travaillent merveilleusement bien, etc.

  • Speaker #0

    Des fausses solutions qui sont courantes aux problèmes rencontrés par les équipes. Et alors, dans ce cas-là, quelles sont les vraies solutions aux problèmes remontés ou alors les zones d'attention ?

  • Speaker #1

    Oui, une partie de la vraie solution, à mon avis, elle découle de la méthodologie avec laquelle on s'attaque aux... Je pense que mener un diagnostic précis du fonctionnement de l'équipe va permettre de zoomer, de s'attaquer aux points de friction identifiés lors du diagnostic. Sinon, on peut vite partir sur des fausses pistes. Je pense qu'aussi une vraie piste de résolution va être, ça fait partie aussi de la démarche diagnostique, d'identifier des schémas de fonctionnement récurrents. au sein de l'équipe. Et le but va être ensuite, avec l'équipe, d'atteindre des prises de conscience sur le fait que ces schémas récurrents pourraient être modifiés pour améliorer le fonctionnement de l'équipe. Donc tout ça, c'est des pistes assez méthodologiques. Il n'y a pas de miracle là-dedans. Et la troisième piste, ça va être de s'attaquer aux deux extrêmes d'une sorte de fil tendu au sein du fonctionnement d'équipe. Et aux deux extrémités de ce fil, on a d'un côté... Tout ce qui est organisation, process et de l'autre, tout ce qui est interrelation, communication. Et ces deux pôles ne fonctionnent pas l'un sans l'autre. Donc avoir conscience de les traiter l'un et l'autre concomitamment, je pense que ça c'est une vraie piste. Et alors,

  • Speaker #0

    quelles sont les situations peut-être structurelles où l'on ne pourra rien faire pour répondre aux problématiques d'équipe ?

  • Speaker #1

    Oui, alors ça j'en parle en effet dans le livre... Mon idée, c'est qu'on n'a pas de recette managériale toute faite, mais ça va même encore plus loin. Alors, je ne voudrais pas verser dans le pessimisme le plus total, mais à mon avis, il y a des situations qui, structurellement, sont tellement sous contrainte, sous pression, qu'il est difficile d'avancer. Il est même difficile de faire croire aux gens qu'une solution pourrait exister. Et donc, ces situations sous contrainte... Elles prennent la forme de superstructures contraignantes qui peuvent s'être mises en place sous la pression, par exemple, d'un actionnariat, de la politique, de contraintes réglementaires, de contraintes de reporting, d'exigences de réduction des coûts ou simplement d'un marché ultra concurrentiel. Et en fait, cette superstructure, elle vient contraindre le fonctionnement d'équipe. Donc, il y a plusieurs exemples. Moi, j'ai interviewé des personnes qui sont dans des secteurs. où la pression des coûts est vraiment très très forte et donc le fait de sous-staffer les équipes devient la norme et par ricochet on est aussi dans certains secteurs très difficiles où le fait d'être un travailleur pauvre n'est plus une exception mais devient la norme aussi par exemple dans le secteur de la grande distribution ou le secteur des livraisons à domicile les drive etc j'ai interviewé une manager qui dit et ben auparavant on avait l'autorisation de recruter des personnes pour des petits contrats, mais pour soutenir l'équipe en place, pour faire face à des pics d'activité. Et elle constate que de plus en plus, ce n'est plus autorisé. Et donc, ça ne permet pas d'éviter les blessures, la fatigue. Et donc, on va dans un travail qui est très contraint. Et la manager ne peut pas lutter contre ça. On a aussi comme exemple de superstructure. hyper contraignantes, ce qui est lié à une certaine culture. Donc là, je pense à un interviewé qui était manager d'une équipe assez grosse dans ce qu'il appelait lui-même une maison. C'est un grand magasin plus que centenaire qui prend la terminologie de maison. Et donc lui, là, j'ai envie de citer ses propos parce qu'ils sont assez parlants. Il dit le cadre de travail semble y être immuable et rassurant. Les silos y sont aussi très marqués. pour la direction, ça permet de diviser pour mieux régner. Il dit que dans cet univers de la vente, la culture de la hiérarchie est très forte. Il dit qu'on connaît les prénoms, on se dit bonjour, mais en fait, on ne connaît pas les gens. Il dit que chaque univers, donc sous-entendu chaque rayon, a sa propre histoire, sa culture, mais que globalement, chacun est dans son coin, que chacun protège son précaré. Lui, il aurait aimé que chaque personne, que chaque employé puisse s'émanciper un petit peu de ce cadre, mais il... Il conclut que ce changement est réalisable, mais pas à mon niveau, pas même au niveau de mon pôle, quand on est face à un système entretenu par 2000 personnes. Donc là, on voit que la culture dans cette maison plus que centenaire a vraiment pesé sur tout le monde. Et donc là, pour faire changer les choses et transformer justement ce système, c'est très compliqué, voire impossible.

  • Speaker #0

    La culture d'entreprise peut véritablement être un frein à trouver des solutions pour que les équipes aillent mieux. Oui. Les responsables d'équipe que tu as interrogés, quelles questions se posent-ils ?

  • Speaker #1

    Alors, c'est vrai que sur les 102, il y a quand même des questions qui sont revenues de manière assez récurrente. On a par exemple la question de... Ce qui est jugé comme l'inertie. On est responsable de l'équipe et on voudrait que l'équipe avance, bouge et on trouve qu'il y a trop d'inertie. Ça, c'est une question très récurrente. Autre chose, ça pourrait être le thème de la délégation. Je suis manager et je subis moi-même une surcharge de travail. Il faudrait certainement que je délègue, mais comment faire ? Ça, c'est vraiment une question qui revient souvent et qui va avec la question de la bonne distance. managériale. Et donc là, ils s'interrogent beaucoup entre est-ce que je dois être sympathique ou autoritaire ? Est-ce qu'il y a un juste milieu entre les deux ? Quelle posture dois-je adopter ? Une question aussi assez récurrente, c'est où placer le curseur entre autonomie et contrôle ? Donc, donner de l'autonomie aux équipes où je voudrais que mes équipes soient autonomes, ça revient souvent. Mais j'ai aussi ma tendance naturelle à vouloir contrôler, savoir si ça avance ou pas, qui fait quoi, quand, comment, qui est souvent assez forte. Donc là, c'est pareil, c'est une question très récurrente. On a des questions qui interviennent aussi à des moments clés de l'entreprise, par exemple, ou de l'équipe. Mon entreprise connaît une phase de croissance ou une fusion entre plusieurs équipes. Il y a ce moment clé qui fait que les responsables d'équipe se posent des questions.

  • Speaker #0

    Que fait le manager face à l'animal fantastique ?

  • Speaker #1

    Ça, c'est une bonne question et je me la suis posée moi-même longtemps. Il faut simplement avouer que le manager a une place ambiguë face à cet animal fantastique équipe. Il peut y avoir trois pistes. Soit le manager se tient à distance de l'équipe animal fantastique et il peut vouloir le dompter, le dresser, l'apprivoiser. Soit le manager fait partie intégrante. de l'équipe Animal Fantastique. Et ensuite, il y a plein de sous-questions à tiroir. Est-ce que le manager est plutôt la tête, les yeux pour donner la vision, le cerveau, les jambes pour courir vite, les ailes pour prendre de l'élan, les griffes, enfin, qui sait ? Tout est imaginable. Et la troisième piste, c'est celle qu'on ne veut vraiment pas voir aboutir, c'est le manager qui est dévoré par son équipe Animal Fantastique. C'est sûr.

  • Speaker #0

    Dans les 102 personnes, certains vivaient une transformation de leur organisation. Comment cela se passait-il dans cette configuration particulière ?

  • Speaker #1

    Alors, tu te doutes bien, Bérangère, que sur les 102 personnes, il y a eu 102 récits à chaque fois différents. Et voilà, là, je vais essayer vraiment de condenser ça. Peut-être que je peux te parler dans un premier temps des cas où les transformations ne se passent pas de manière idyllique. Là, comme on l'a dit au début, ça peut être parce que l'un des volets... entre l'organisationnel d'une part et le relationnel d'autre part est délaissé. Donc par exemple, c'est certain que quand des interviewés m'ont dit que la transformation n'était basée que sur de l'organisationnel, ils ont eux-mêmes conclu que c'était souvent fait au détriment de la pédagogie et qu'assez rapidement dans la vie de la transformation, ça coûtait cher d'avoir oublié le volet relationnel. Idem, il y a beaucoup de transformations qui ne sont que techniques. Par exemple, une fondatrice d'entreprise et dirigeante a dit on a voulu implanter trop d'outils en même temps, or dans une transformation, il y a toute une phase préparatoire d'adhésion à penser en amont Là, elle fait le bilan, l'état des lieux à mi-transformation, et uniquement le volet technique n'est pas suffisant. Mais à l'inverse, si on n'a que le volet relationnel, c'est insuffisant également. Là, je voudrais citer une dirigeante et fondatrice d'une start-up qui a été rachetée par une entreprise plus grosse et il a fallu fusionner, mettre en adéquation les deux cultures. Et donc là, quand elle découvre les équipes et le fonctionnement de la nouvelle entreprise, elle dit tout est basé sur l'individualité des gens En arrivant, je me suis demandé comment ça pouvait tourner. Le projet passe au dixième plan derrière les personnalités, les individualités. Ça marche moins bien. On te raconte que c'est à ta humaine, etc. Or, les gens sont en souffrance, ils veulent tous des process, un cadre. Il y a des frictions permanentes, des non-dits, un manque de confiance. Une entreprise où on a l'impression d'être en famille ou entre potes, ce n'est pas sain. Donc là, voilà un peu les extrêmes. Quand une transformation ne se passe pas de manière idyllique, c'est aussi souvent parce qu'on veut et on ne veut pas la transformation en même temps. Donc on la veut, on fait venir justement une perle rare ou quelqu'un en interne qui va devoir gérer le projet, et on attend toute cette personne. Et d'ailleurs, le cahier des charges est souvent N'hésite pas, fais-nous tes recommandations, vas-y à fond. On est ouvert à la critique parce qu'il faut que ça change. Voilà, ça c'est le cahier des charges. Mais ensuite, au fil de l'eau, on se rend compte que la transformation, on la voulait, mais on ne la voulait pas. Et donc la personne qui a été en charge de ça peut se retrouver en haut ou même en bas de ce qu'on appelle une falaise de verre. C'est-à-dire qu'on la fait venir pour résoudre quelque chose, passer un cap, mais ce n'est pas possible et la personne peut finir par se retrouver éjectée de ce processus de transformation. Après, on a des cas où ça se passe bien. Donc là, j'ai un exemple assez frappant. J'ai interviewé la responsable ou la directrice d'un centre de distribution du courrier, qui a commencé par me dire qu'elle était elle-même sous la contrainte de procédures de restructuration lourdes, c'est-à-dire que régulièrement tous les deux ans, je crois, des effectifs, des personnes devaient être sorties. Donc, elle, elle appelait ça vraiment une épée de Damoclès. Tous les deux ans, l'équipe est réduite à peau de chagrin et ça ne va pas s'arrêter. Donc, elle, elle a essayé de trouver des interstices dans ses lourdeurs pour diriger et mener son équipe du mieux qu'elle pouvait. Donc, elle a tellement insufflé au sein de cette équipe de la solidarité, de la souplesse. une sorte de réciprocité, de donnant-donnant, c'est-à-dire, je ne sais pas, je fais tout pour que vous soyez formés sur tel nouveau sujet, j'écoute vos souhaits en termes d'emploi du temps, j'écoute vos remarques sur tel ou tel outil, sur l'organisation du centre de tri, enfin voilà. En échange, oui, elle a constaté, enfin ce n'est pas révolutionnaire, mais en retour, elle a constaté que les gens s'impliquaient beaucoup dans leur travail au quotidien, et même beaucoup plus que dans d'autres centres de tri. Et elle a constaté, parce que l'équipe lui disait, que quand ils étaient parfois détachés dans d'autres centres de tri pour aider ou qu'ils rencontraient d'autres collègues ailleurs, ils éprouvaient une grande fierté à travailler dans ce centre de tri-là, qui était reconnu par tous les autres. Tous les autres collègues ailleurs disaient, vous avez de la chance, vous avez de l'autonomie dans votre travail, vous êtes reconnus. Et donc, là, c'est un cas de transformation d'équipe, en partant d'une situation vraiment souveraine. grosse contrainte que cette responsable d'équipe, aidée par toute son équipe, a réussi à mener.

  • Speaker #0

    Beau challenge. Belle vision. Conclusion de cet épisode, qu'est-ce que tu conseilles à l'animal fantastique pour aller bien ?

  • Speaker #1

    Ça, c'est une bonne question. Déjà, je voudrais dire que ce n'est pas un animal fantastique de laboratoire qu'on peut catégoriser et auquel on peut apporter des recettes pour le... le traiter, entre guillemets, et le faire aller bien. Mais c'est un animal fantastique qu'on peut bien nourrir. Il faut lui donner de la nourriture de qualité. Donc, je dirais beaucoup de bouquins que j'ai envie de lui conseiller, à cet animal et à ses managers, peut-être. C'est des livres qui vont sortir du domaine de l'anecdotique ou du développement personnel un peu... un peu gnangnan, des livres de chercheurs, de sociologues qui... Alors, j'ai envie de conseiller, par exemple, Christophe Dejour, c'est un grand classique, Souffrance en France ou les suivants. J'ai envie de conseiller aussi le traditionnel Michel Crozier sur la sociologie des organisations, les systèmes, etc. Et une chercheuse qui s'appelle Suzy Canivinque qui déconstruit aussi tout plein... d'idées reçues sur le télétravail, les générations au travail. Et je trouve que c'est une nourriture saine pour notre animal fantastique. Ça le fait sortir justement des croyances et des on-dit. Et bien sûr, l'animal fantastique peut mettre dans ses oreilles Dino Sapiens.

  • Speaker #0

    Un grand merci Vanina pour cet épisode et pour nous avoir parlé de ton livre qui est extrêmement riche sur les équipes au travail. Et à très bientôt, je l'espère, sur Dinosapiens pour parler de la suite.

  • Speaker #1

    Oui, avec plaisir. Merci à toi Bérangère.

  • Speaker #0

    C'est la fin de ce nouvel épisode de Dinosapiens. Je vous mets dans les notes de l'épisode les références citées par Vanina, à commencer par son livre Équipe NF, animal fantastique qui nous travaille. N'hésitez pas à noter et laissez une revue pour le podcast sur votre plateforme préférée et sur Apple Podcast. Vous retrouverez bientôt la version YouTube à disposition. A très bientôt pour un nouvel épisode. Il est d'ailleurs en cours de préparation et je me réjouis de vous le proposer très bientôt. D'ici là, prenez soin de vous et évitons l'extinction !

Description

Avec Vanina Lanfranchi, 📘 Autrice de : Equipe n.f.: Animal fantastique qui (nous) travaille

Ex-secrétaire générale - COO en charge des volets structuration, process, conformité, juridique, finance, RH, digitalisation... ✅ Experte capital investissement ⏐ Dynamiques d'équipes ⏐Transformation


Avec son enquête auprès de 102 managers, publiée dans un livre qui s'intitule : "Equipe n.f.: animal fantastique qui nous travaille", Vanina Lanfranchi nous emmène dans cet épisode sur la piste des équipes.

Au delà de la performance d'équipe, et des recettes de management parfois "classiques", son analyse décortique des dynamiques collectives à travers le regard de leaders, provenant d'une grande diversité d'organisations, de problématiques et de contextes.


Cet épisode couvre de nombreux aspects partagés par ces 102 leaders et analysés avec finesse par Vanina:

  • Quelles solutions les leaders mettent ils en oeuvre lorsque leur équipe dysfonctionne? Quelle posture adoptent ils?

Quelles sont les fausses solutions et les vraies problématiques?

Nous découvrons que certaines pratiques et croyances pourtant courantes dans l'ensemble des secteurs, qui visent à résoudre les situations critiques, ne sont pas efficaces.

  • Vanina nous partage également des pistes de réflexion pour résoudre les dysfonctionnements d'équipes, à commencer par un diagnostic de leur fonctionnement mais également trouver un juste équilibre entre processus et relations.

  • Elle nous explique que dans certains contextes, aucune solution ne peut être trouvée pour solutionner les dysfonctionnements d'équipes. Elle évoque avec exemple à l'appui des situations où la culture d'entreprise peut empêcher les améliorations, où le manque de moyens et les logiques de réductions continues découragent les équipes et font tarir la créativité des leaders.

  • Puis Vanina nous parle plus en détail de cet animal fantastique et de sa relation au leader. Comment se positionne le manager, quelle est la juste distance à adopter pour guider l'équipe?

  • Enfin, elle nous partage quelques exemples de situations de transformation avec des situations difficiles, mais aussi de grandes réussites, inspirées par un leadership humain et ouvert au dialogue. Ce qui permet d'engager une démarche d'amélioration continue du fonctionnement des équipes, pour plus de bien-être au travail, et plus de performance.


Quelques ouvrages proposés pour bien nourrir l'animal fantastique:




Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Bonjour, bienvenue sur ce nouvel épisode de DinoSapiens, le podcast qui parle de l'humain dans la transformation des organisations. C'est une vraie joie pour moi de recevoir aujourd'hui Vanina Lanfranchi, experte du monde de l'entreprise et particulièrement des équipes. Vanina a écrit un ouvrage intitulé Équipe, n.f.: animal fantastique qui nous travaille Ce livre est le fruit d'une enquête qu'elle a menée auprès de plus de 100 responsables d'équipe. Mais avant de se plonger dans le cœur du sujet et de son lien avec la transformation des organisations, je dois vous présenter Vanina et ce qui la rend exceptionnelle à mes yeux. Vanina s'est découverte dès l'enfance, une passion pour le monde du travail, en lisant pour la première fois Germinal d'Émile Zola lorsqu'elle était en quatrième. Après des études généralistes, elle a rejoint des fonds d'investissement et de capital risque. Elle y a travaillé pendant 15 ans en tant que secrétaire générale. En parallèle de son rôle, Vanina s'est ensuite formée au coaching, ce qui lui a permis d'accompagner pendant plusieurs années des professionnels et des équipes. Au fil du temps, elle a su se laisser guider par sa curiosité et sa passion première pour les dynamiques humaines en entreprise. Elle s'est intéressée de plus en plus, au travers de ses échanges avec les managers, à cet animal fantastique qu'est l'équipe. Et c'est ainsi qu'est née son ambition d'écrire un anti-guide du management pour nous permettre de reconnaître la diversité des équipes, et de sortir des règles parfois dogmatiques du management. Vanina L'Enfranchi a réalisé un travail massif d'enquête auprès de 102 responsables d'équipe. Elle nous explique aujourd'hui ce qu'elle a découvert à travers cette enquête. Bonjour Vanina, merci de venir nous parler de ton livre sur Dino Sapiens.

  • Speaker #1

    Bonjour Bérangère et je suis ravie que tu m'aies proposé d'intervenir sur Dino Sapiens, dont je suis une fidèle auditrice depuis les débuts.

  • Speaker #0

    Alors, tu as mis la barre très haute pour étudier les équipes. Un travail de plus de 100 interviews, c'est pas banal. Comment as-tu conçu ton enquête et qu'est-ce que tu as découvert ?

  • Speaker #1

    Merci d'avoir introduit ce travail, oui, 102 interviews même. Alors j'ai conçu mon panel avec un objectif de diversité. Je voulais interviewer des responsables d'équipe, donc des dirigeants et dirigeantes, entrepreneurs, managers, sur le thème de leur fonctionnement d'équipe. Et donc, pour que leur réponse soit vraiment focalisée sur le fonctionnement d'équipe, j'ai souhaité interviewer des gens très divers, avec une diversité de secteurs, de tailles d'équipes, secteurs publics ou privés, des personnes de différents pays, et aussi ma grande fierté, 51 femmes et 51 hommes. Et donc, qu'est-ce que j'ai découvert au cours de cette enquête ? Tout d'abord, c'est le sentiment d'humilité qui m'a saisie en premier, parce que j'ai réalisé que c'est 102 personnes, finalement, responsables d'équipe. faisaient comme elles pouvaient. Ce sont des personnes qui mènent des entreprises, des business, des équipes, comme elles peuvent, chaque jour. Donc face à ça, on est obligé d'être humble. Ce que j'ai constaté aussi, ce que j'ai découvert, c'est que les recettes managériales n'existent pas. Aucune des 102 personnes ne m'a dit je dirige comme ceci, je gère mon équipe comme cela Et ça fonctionne à coup sûr ? Non, non, c'est vraiment des essais-erreurs, des découvertes. Et donc, j'ai découvert des choses en même temps que ces personnes. D'où la notion d'anti-guide de management. Je vois ce livre, Équipe NF, comme un anti-guide de management.

  • Speaker #0

    Selon toi, quelles sont les fausses solutions aux problèmes exprimés par tes interlocuteurs ?

  • Speaker #1

    Alors là, je dis ça vraiment en ne voulant blesser personne. C'est que... Parmi les 102 interviewés, il y a bon nombre de personnes pour lesquelles il n'y a pas de problème. Leur équipe fonctionne bien, leurs affaires fonctionnent bien, et d'ailleurs tant mieux. Et pour une part de ces personnes-là, si jamais il y avait un problème concernant le fonctionnement d'équipe, ce serait un problème tout à fait exogène. Du type, c'est la guerre, c'est la pandémie, c'est le contexte géopolitique qui est compliqué, le coût des matières premières. Donc pour ces personnes-là, il n'y a pas vraiment de... prise de conscience que le fonctionnement d'équipe peut dysfonctionner, puisque toutes les causes et toutes les sources de difficultés sont exogènes. Donc là, rien à faire, en fait. Pas de problème, pas de solution à chercher, tout est exogène et on attend que ça passe. Sinon, on a des personnes qui identifient des problèmes en termes de fonctionnement d'équipe et qui adoptent à mon sens, deux fausses solutions, deux fausses pistes. La première fausse piste, ça va être de... de tout analyser sous le prisme des personnalités. Donc là, on peut s'imaginer quelque chose d'ultra logistique, comme si les personnes composant l'équipe étaient des stocks ou des flux. Il faut faire rentrer un mouton à cinq pattes, une perle rare, il faut faire sortir le vilain petit canard. Sauf qu'on se rend vite compte avec ce système que le vilain petit canard, il y en aura toujours un nouveau ou une nouvelle. et que quand le vilain petit canard est sorti, ce n'est pas la fin de tous les ennuis. Donc pour moi, ça, c'est une fausse piste. Et la deuxième fausse solution, on a des problèmes en termes de fonctionnement d'équipe. À mon sens, c'est de considérer que le manager est un super héros qui doit tout porter sur ses épaules, qui doit se former, s'améliorer, être à l'écoute, être bienveillant, tirer, pousser, faire se mouvoir l'équipe tout seul. Pour moi, cette cape de super héros, elle est trop lourde. et pas efficace hum quand on veut s'attaquer au fonctionnement d'équipe. L'équipe, ce n'est pas un manager sur le piédestal et puis tous les autres qui suivent, qui travaillent merveilleusement bien, etc.

  • Speaker #0

    Des fausses solutions qui sont courantes aux problèmes rencontrés par les équipes. Et alors, dans ce cas-là, quelles sont les vraies solutions aux problèmes remontés ou alors les zones d'attention ?

  • Speaker #1

    Oui, une partie de la vraie solution, à mon avis, elle découle de la méthodologie avec laquelle on s'attaque aux... Je pense que mener un diagnostic précis du fonctionnement de l'équipe va permettre de zoomer, de s'attaquer aux points de friction identifiés lors du diagnostic. Sinon, on peut vite partir sur des fausses pistes. Je pense qu'aussi une vraie piste de résolution va être, ça fait partie aussi de la démarche diagnostique, d'identifier des schémas de fonctionnement récurrents. au sein de l'équipe. Et le but va être ensuite, avec l'équipe, d'atteindre des prises de conscience sur le fait que ces schémas récurrents pourraient être modifiés pour améliorer le fonctionnement de l'équipe. Donc tout ça, c'est des pistes assez méthodologiques. Il n'y a pas de miracle là-dedans. Et la troisième piste, ça va être de s'attaquer aux deux extrêmes d'une sorte de fil tendu au sein du fonctionnement d'équipe. Et aux deux extrémités de ce fil, on a d'un côté... Tout ce qui est organisation, process et de l'autre, tout ce qui est interrelation, communication. Et ces deux pôles ne fonctionnent pas l'un sans l'autre. Donc avoir conscience de les traiter l'un et l'autre concomitamment, je pense que ça c'est une vraie piste. Et alors,

  • Speaker #0

    quelles sont les situations peut-être structurelles où l'on ne pourra rien faire pour répondre aux problématiques d'équipe ?

  • Speaker #1

    Oui, alors ça j'en parle en effet dans le livre... Mon idée, c'est qu'on n'a pas de recette managériale toute faite, mais ça va même encore plus loin. Alors, je ne voudrais pas verser dans le pessimisme le plus total, mais à mon avis, il y a des situations qui, structurellement, sont tellement sous contrainte, sous pression, qu'il est difficile d'avancer. Il est même difficile de faire croire aux gens qu'une solution pourrait exister. Et donc, ces situations sous contrainte... Elles prennent la forme de superstructures contraignantes qui peuvent s'être mises en place sous la pression, par exemple, d'un actionnariat, de la politique, de contraintes réglementaires, de contraintes de reporting, d'exigences de réduction des coûts ou simplement d'un marché ultra concurrentiel. Et en fait, cette superstructure, elle vient contraindre le fonctionnement d'équipe. Donc, il y a plusieurs exemples. Moi, j'ai interviewé des personnes qui sont dans des secteurs. où la pression des coûts est vraiment très très forte et donc le fait de sous-staffer les équipes devient la norme et par ricochet on est aussi dans certains secteurs très difficiles où le fait d'être un travailleur pauvre n'est plus une exception mais devient la norme aussi par exemple dans le secteur de la grande distribution ou le secteur des livraisons à domicile les drive etc j'ai interviewé une manager qui dit et ben auparavant on avait l'autorisation de recruter des personnes pour des petits contrats, mais pour soutenir l'équipe en place, pour faire face à des pics d'activité. Et elle constate que de plus en plus, ce n'est plus autorisé. Et donc, ça ne permet pas d'éviter les blessures, la fatigue. Et donc, on va dans un travail qui est très contraint. Et la manager ne peut pas lutter contre ça. On a aussi comme exemple de superstructure. hyper contraignantes, ce qui est lié à une certaine culture. Donc là, je pense à un interviewé qui était manager d'une équipe assez grosse dans ce qu'il appelait lui-même une maison. C'est un grand magasin plus que centenaire qui prend la terminologie de maison. Et donc lui, là, j'ai envie de citer ses propos parce qu'ils sont assez parlants. Il dit le cadre de travail semble y être immuable et rassurant. Les silos y sont aussi très marqués. pour la direction, ça permet de diviser pour mieux régner. Il dit que dans cet univers de la vente, la culture de la hiérarchie est très forte. Il dit qu'on connaît les prénoms, on se dit bonjour, mais en fait, on ne connaît pas les gens. Il dit que chaque univers, donc sous-entendu chaque rayon, a sa propre histoire, sa culture, mais que globalement, chacun est dans son coin, que chacun protège son précaré. Lui, il aurait aimé que chaque personne, que chaque employé puisse s'émanciper un petit peu de ce cadre, mais il... Il conclut que ce changement est réalisable, mais pas à mon niveau, pas même au niveau de mon pôle, quand on est face à un système entretenu par 2000 personnes. Donc là, on voit que la culture dans cette maison plus que centenaire a vraiment pesé sur tout le monde. Et donc là, pour faire changer les choses et transformer justement ce système, c'est très compliqué, voire impossible.

  • Speaker #0

    La culture d'entreprise peut véritablement être un frein à trouver des solutions pour que les équipes aillent mieux. Oui. Les responsables d'équipe que tu as interrogés, quelles questions se posent-ils ?

  • Speaker #1

    Alors, c'est vrai que sur les 102, il y a quand même des questions qui sont revenues de manière assez récurrente. On a par exemple la question de... Ce qui est jugé comme l'inertie. On est responsable de l'équipe et on voudrait que l'équipe avance, bouge et on trouve qu'il y a trop d'inertie. Ça, c'est une question très récurrente. Autre chose, ça pourrait être le thème de la délégation. Je suis manager et je subis moi-même une surcharge de travail. Il faudrait certainement que je délègue, mais comment faire ? Ça, c'est vraiment une question qui revient souvent et qui va avec la question de la bonne distance. managériale. Et donc là, ils s'interrogent beaucoup entre est-ce que je dois être sympathique ou autoritaire ? Est-ce qu'il y a un juste milieu entre les deux ? Quelle posture dois-je adopter ? Une question aussi assez récurrente, c'est où placer le curseur entre autonomie et contrôle ? Donc, donner de l'autonomie aux équipes où je voudrais que mes équipes soient autonomes, ça revient souvent. Mais j'ai aussi ma tendance naturelle à vouloir contrôler, savoir si ça avance ou pas, qui fait quoi, quand, comment, qui est souvent assez forte. Donc là, c'est pareil, c'est une question très récurrente. On a des questions qui interviennent aussi à des moments clés de l'entreprise, par exemple, ou de l'équipe. Mon entreprise connaît une phase de croissance ou une fusion entre plusieurs équipes. Il y a ce moment clé qui fait que les responsables d'équipe se posent des questions.

  • Speaker #0

    Que fait le manager face à l'animal fantastique ?

  • Speaker #1

    Ça, c'est une bonne question et je me la suis posée moi-même longtemps. Il faut simplement avouer que le manager a une place ambiguë face à cet animal fantastique équipe. Il peut y avoir trois pistes. Soit le manager se tient à distance de l'équipe animal fantastique et il peut vouloir le dompter, le dresser, l'apprivoiser. Soit le manager fait partie intégrante. de l'équipe Animal Fantastique. Et ensuite, il y a plein de sous-questions à tiroir. Est-ce que le manager est plutôt la tête, les yeux pour donner la vision, le cerveau, les jambes pour courir vite, les ailes pour prendre de l'élan, les griffes, enfin, qui sait ? Tout est imaginable. Et la troisième piste, c'est celle qu'on ne veut vraiment pas voir aboutir, c'est le manager qui est dévoré par son équipe Animal Fantastique. C'est sûr.

  • Speaker #0

    Dans les 102 personnes, certains vivaient une transformation de leur organisation. Comment cela se passait-il dans cette configuration particulière ?

  • Speaker #1

    Alors, tu te doutes bien, Bérangère, que sur les 102 personnes, il y a eu 102 récits à chaque fois différents. Et voilà, là, je vais essayer vraiment de condenser ça. Peut-être que je peux te parler dans un premier temps des cas où les transformations ne se passent pas de manière idyllique. Là, comme on l'a dit au début, ça peut être parce que l'un des volets... entre l'organisationnel d'une part et le relationnel d'autre part est délaissé. Donc par exemple, c'est certain que quand des interviewés m'ont dit que la transformation n'était basée que sur de l'organisationnel, ils ont eux-mêmes conclu que c'était souvent fait au détriment de la pédagogie et qu'assez rapidement dans la vie de la transformation, ça coûtait cher d'avoir oublié le volet relationnel. Idem, il y a beaucoup de transformations qui ne sont que techniques. Par exemple, une fondatrice d'entreprise et dirigeante a dit on a voulu implanter trop d'outils en même temps, or dans une transformation, il y a toute une phase préparatoire d'adhésion à penser en amont Là, elle fait le bilan, l'état des lieux à mi-transformation, et uniquement le volet technique n'est pas suffisant. Mais à l'inverse, si on n'a que le volet relationnel, c'est insuffisant également. Là, je voudrais citer une dirigeante et fondatrice d'une start-up qui a été rachetée par une entreprise plus grosse et il a fallu fusionner, mettre en adéquation les deux cultures. Et donc là, quand elle découvre les équipes et le fonctionnement de la nouvelle entreprise, elle dit tout est basé sur l'individualité des gens En arrivant, je me suis demandé comment ça pouvait tourner. Le projet passe au dixième plan derrière les personnalités, les individualités. Ça marche moins bien. On te raconte que c'est à ta humaine, etc. Or, les gens sont en souffrance, ils veulent tous des process, un cadre. Il y a des frictions permanentes, des non-dits, un manque de confiance. Une entreprise où on a l'impression d'être en famille ou entre potes, ce n'est pas sain. Donc là, voilà un peu les extrêmes. Quand une transformation ne se passe pas de manière idyllique, c'est aussi souvent parce qu'on veut et on ne veut pas la transformation en même temps. Donc on la veut, on fait venir justement une perle rare ou quelqu'un en interne qui va devoir gérer le projet, et on attend toute cette personne. Et d'ailleurs, le cahier des charges est souvent N'hésite pas, fais-nous tes recommandations, vas-y à fond. On est ouvert à la critique parce qu'il faut que ça change. Voilà, ça c'est le cahier des charges. Mais ensuite, au fil de l'eau, on se rend compte que la transformation, on la voulait, mais on ne la voulait pas. Et donc la personne qui a été en charge de ça peut se retrouver en haut ou même en bas de ce qu'on appelle une falaise de verre. C'est-à-dire qu'on la fait venir pour résoudre quelque chose, passer un cap, mais ce n'est pas possible et la personne peut finir par se retrouver éjectée de ce processus de transformation. Après, on a des cas où ça se passe bien. Donc là, j'ai un exemple assez frappant. J'ai interviewé la responsable ou la directrice d'un centre de distribution du courrier, qui a commencé par me dire qu'elle était elle-même sous la contrainte de procédures de restructuration lourdes, c'est-à-dire que régulièrement tous les deux ans, je crois, des effectifs, des personnes devaient être sorties. Donc, elle, elle appelait ça vraiment une épée de Damoclès. Tous les deux ans, l'équipe est réduite à peau de chagrin et ça ne va pas s'arrêter. Donc, elle, elle a essayé de trouver des interstices dans ses lourdeurs pour diriger et mener son équipe du mieux qu'elle pouvait. Donc, elle a tellement insufflé au sein de cette équipe de la solidarité, de la souplesse. une sorte de réciprocité, de donnant-donnant, c'est-à-dire, je ne sais pas, je fais tout pour que vous soyez formés sur tel nouveau sujet, j'écoute vos souhaits en termes d'emploi du temps, j'écoute vos remarques sur tel ou tel outil, sur l'organisation du centre de tri, enfin voilà. En échange, oui, elle a constaté, enfin ce n'est pas révolutionnaire, mais en retour, elle a constaté que les gens s'impliquaient beaucoup dans leur travail au quotidien, et même beaucoup plus que dans d'autres centres de tri. Et elle a constaté, parce que l'équipe lui disait, que quand ils étaient parfois détachés dans d'autres centres de tri pour aider ou qu'ils rencontraient d'autres collègues ailleurs, ils éprouvaient une grande fierté à travailler dans ce centre de tri-là, qui était reconnu par tous les autres. Tous les autres collègues ailleurs disaient, vous avez de la chance, vous avez de l'autonomie dans votre travail, vous êtes reconnus. Et donc, là, c'est un cas de transformation d'équipe, en partant d'une situation vraiment souveraine. grosse contrainte que cette responsable d'équipe, aidée par toute son équipe, a réussi à mener.

  • Speaker #0

    Beau challenge. Belle vision. Conclusion de cet épisode, qu'est-ce que tu conseilles à l'animal fantastique pour aller bien ?

  • Speaker #1

    Ça, c'est une bonne question. Déjà, je voudrais dire que ce n'est pas un animal fantastique de laboratoire qu'on peut catégoriser et auquel on peut apporter des recettes pour le... le traiter, entre guillemets, et le faire aller bien. Mais c'est un animal fantastique qu'on peut bien nourrir. Il faut lui donner de la nourriture de qualité. Donc, je dirais beaucoup de bouquins que j'ai envie de lui conseiller, à cet animal et à ses managers, peut-être. C'est des livres qui vont sortir du domaine de l'anecdotique ou du développement personnel un peu... un peu gnangnan, des livres de chercheurs, de sociologues qui... Alors, j'ai envie de conseiller, par exemple, Christophe Dejour, c'est un grand classique, Souffrance en France ou les suivants. J'ai envie de conseiller aussi le traditionnel Michel Crozier sur la sociologie des organisations, les systèmes, etc. Et une chercheuse qui s'appelle Suzy Canivinque qui déconstruit aussi tout plein... d'idées reçues sur le télétravail, les générations au travail. Et je trouve que c'est une nourriture saine pour notre animal fantastique. Ça le fait sortir justement des croyances et des on-dit. Et bien sûr, l'animal fantastique peut mettre dans ses oreilles Dino Sapiens.

  • Speaker #0

    Un grand merci Vanina pour cet épisode et pour nous avoir parlé de ton livre qui est extrêmement riche sur les équipes au travail. Et à très bientôt, je l'espère, sur Dinosapiens pour parler de la suite.

  • Speaker #1

    Oui, avec plaisir. Merci à toi Bérangère.

  • Speaker #0

    C'est la fin de ce nouvel épisode de Dinosapiens. Je vous mets dans les notes de l'épisode les références citées par Vanina, à commencer par son livre Équipe NF, animal fantastique qui nous travaille. N'hésitez pas à noter et laissez une revue pour le podcast sur votre plateforme préférée et sur Apple Podcast. Vous retrouverez bientôt la version YouTube à disposition. A très bientôt pour un nouvel épisode. Il est d'ailleurs en cours de préparation et je me réjouis de vous le proposer très bientôt. D'ici là, prenez soin de vous et évitons l'extinction !

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Description

Avec Vanina Lanfranchi, 📘 Autrice de : Equipe n.f.: Animal fantastique qui (nous) travaille

Ex-secrétaire générale - COO en charge des volets structuration, process, conformité, juridique, finance, RH, digitalisation... ✅ Experte capital investissement ⏐ Dynamiques d'équipes ⏐Transformation


Avec son enquête auprès de 102 managers, publiée dans un livre qui s'intitule : "Equipe n.f.: animal fantastique qui nous travaille", Vanina Lanfranchi nous emmène dans cet épisode sur la piste des équipes.

Au delà de la performance d'équipe, et des recettes de management parfois "classiques", son analyse décortique des dynamiques collectives à travers le regard de leaders, provenant d'une grande diversité d'organisations, de problématiques et de contextes.


Cet épisode couvre de nombreux aspects partagés par ces 102 leaders et analysés avec finesse par Vanina:

  • Quelles solutions les leaders mettent ils en oeuvre lorsque leur équipe dysfonctionne? Quelle posture adoptent ils?

Quelles sont les fausses solutions et les vraies problématiques?

Nous découvrons que certaines pratiques et croyances pourtant courantes dans l'ensemble des secteurs, qui visent à résoudre les situations critiques, ne sont pas efficaces.

  • Vanina nous partage également des pistes de réflexion pour résoudre les dysfonctionnements d'équipes, à commencer par un diagnostic de leur fonctionnement mais également trouver un juste équilibre entre processus et relations.

  • Elle nous explique que dans certains contextes, aucune solution ne peut être trouvée pour solutionner les dysfonctionnements d'équipes. Elle évoque avec exemple à l'appui des situations où la culture d'entreprise peut empêcher les améliorations, où le manque de moyens et les logiques de réductions continues découragent les équipes et font tarir la créativité des leaders.

  • Puis Vanina nous parle plus en détail de cet animal fantastique et de sa relation au leader. Comment se positionne le manager, quelle est la juste distance à adopter pour guider l'équipe?

  • Enfin, elle nous partage quelques exemples de situations de transformation avec des situations difficiles, mais aussi de grandes réussites, inspirées par un leadership humain et ouvert au dialogue. Ce qui permet d'engager une démarche d'amélioration continue du fonctionnement des équipes, pour plus de bien-être au travail, et plus de performance.


Quelques ouvrages proposés pour bien nourrir l'animal fantastique:




Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Bonjour, bienvenue sur ce nouvel épisode de DinoSapiens, le podcast qui parle de l'humain dans la transformation des organisations. C'est une vraie joie pour moi de recevoir aujourd'hui Vanina Lanfranchi, experte du monde de l'entreprise et particulièrement des équipes. Vanina a écrit un ouvrage intitulé Équipe, n.f.: animal fantastique qui nous travaille Ce livre est le fruit d'une enquête qu'elle a menée auprès de plus de 100 responsables d'équipe. Mais avant de se plonger dans le cœur du sujet et de son lien avec la transformation des organisations, je dois vous présenter Vanina et ce qui la rend exceptionnelle à mes yeux. Vanina s'est découverte dès l'enfance, une passion pour le monde du travail, en lisant pour la première fois Germinal d'Émile Zola lorsqu'elle était en quatrième. Après des études généralistes, elle a rejoint des fonds d'investissement et de capital risque. Elle y a travaillé pendant 15 ans en tant que secrétaire générale. En parallèle de son rôle, Vanina s'est ensuite formée au coaching, ce qui lui a permis d'accompagner pendant plusieurs années des professionnels et des équipes. Au fil du temps, elle a su se laisser guider par sa curiosité et sa passion première pour les dynamiques humaines en entreprise. Elle s'est intéressée de plus en plus, au travers de ses échanges avec les managers, à cet animal fantastique qu'est l'équipe. Et c'est ainsi qu'est née son ambition d'écrire un anti-guide du management pour nous permettre de reconnaître la diversité des équipes, et de sortir des règles parfois dogmatiques du management. Vanina L'Enfranchi a réalisé un travail massif d'enquête auprès de 102 responsables d'équipe. Elle nous explique aujourd'hui ce qu'elle a découvert à travers cette enquête. Bonjour Vanina, merci de venir nous parler de ton livre sur Dino Sapiens.

  • Speaker #1

    Bonjour Bérangère et je suis ravie que tu m'aies proposé d'intervenir sur Dino Sapiens, dont je suis une fidèle auditrice depuis les débuts.

  • Speaker #0

    Alors, tu as mis la barre très haute pour étudier les équipes. Un travail de plus de 100 interviews, c'est pas banal. Comment as-tu conçu ton enquête et qu'est-ce que tu as découvert ?

  • Speaker #1

    Merci d'avoir introduit ce travail, oui, 102 interviews même. Alors j'ai conçu mon panel avec un objectif de diversité. Je voulais interviewer des responsables d'équipe, donc des dirigeants et dirigeantes, entrepreneurs, managers, sur le thème de leur fonctionnement d'équipe. Et donc, pour que leur réponse soit vraiment focalisée sur le fonctionnement d'équipe, j'ai souhaité interviewer des gens très divers, avec une diversité de secteurs, de tailles d'équipes, secteurs publics ou privés, des personnes de différents pays, et aussi ma grande fierté, 51 femmes et 51 hommes. Et donc, qu'est-ce que j'ai découvert au cours de cette enquête ? Tout d'abord, c'est le sentiment d'humilité qui m'a saisie en premier, parce que j'ai réalisé que c'est 102 personnes, finalement, responsables d'équipe. faisaient comme elles pouvaient. Ce sont des personnes qui mènent des entreprises, des business, des équipes, comme elles peuvent, chaque jour. Donc face à ça, on est obligé d'être humble. Ce que j'ai constaté aussi, ce que j'ai découvert, c'est que les recettes managériales n'existent pas. Aucune des 102 personnes ne m'a dit je dirige comme ceci, je gère mon équipe comme cela Et ça fonctionne à coup sûr ? Non, non, c'est vraiment des essais-erreurs, des découvertes. Et donc, j'ai découvert des choses en même temps que ces personnes. D'où la notion d'anti-guide de management. Je vois ce livre, Équipe NF, comme un anti-guide de management.

  • Speaker #0

    Selon toi, quelles sont les fausses solutions aux problèmes exprimés par tes interlocuteurs ?

  • Speaker #1

    Alors là, je dis ça vraiment en ne voulant blesser personne. C'est que... Parmi les 102 interviewés, il y a bon nombre de personnes pour lesquelles il n'y a pas de problème. Leur équipe fonctionne bien, leurs affaires fonctionnent bien, et d'ailleurs tant mieux. Et pour une part de ces personnes-là, si jamais il y avait un problème concernant le fonctionnement d'équipe, ce serait un problème tout à fait exogène. Du type, c'est la guerre, c'est la pandémie, c'est le contexte géopolitique qui est compliqué, le coût des matières premières. Donc pour ces personnes-là, il n'y a pas vraiment de... prise de conscience que le fonctionnement d'équipe peut dysfonctionner, puisque toutes les causes et toutes les sources de difficultés sont exogènes. Donc là, rien à faire, en fait. Pas de problème, pas de solution à chercher, tout est exogène et on attend que ça passe. Sinon, on a des personnes qui identifient des problèmes en termes de fonctionnement d'équipe et qui adoptent à mon sens, deux fausses solutions, deux fausses pistes. La première fausse piste, ça va être de... de tout analyser sous le prisme des personnalités. Donc là, on peut s'imaginer quelque chose d'ultra logistique, comme si les personnes composant l'équipe étaient des stocks ou des flux. Il faut faire rentrer un mouton à cinq pattes, une perle rare, il faut faire sortir le vilain petit canard. Sauf qu'on se rend vite compte avec ce système que le vilain petit canard, il y en aura toujours un nouveau ou une nouvelle. et que quand le vilain petit canard est sorti, ce n'est pas la fin de tous les ennuis. Donc pour moi, ça, c'est une fausse piste. Et la deuxième fausse solution, on a des problèmes en termes de fonctionnement d'équipe. À mon sens, c'est de considérer que le manager est un super héros qui doit tout porter sur ses épaules, qui doit se former, s'améliorer, être à l'écoute, être bienveillant, tirer, pousser, faire se mouvoir l'équipe tout seul. Pour moi, cette cape de super héros, elle est trop lourde. et pas efficace hum quand on veut s'attaquer au fonctionnement d'équipe. L'équipe, ce n'est pas un manager sur le piédestal et puis tous les autres qui suivent, qui travaillent merveilleusement bien, etc.

  • Speaker #0

    Des fausses solutions qui sont courantes aux problèmes rencontrés par les équipes. Et alors, dans ce cas-là, quelles sont les vraies solutions aux problèmes remontés ou alors les zones d'attention ?

  • Speaker #1

    Oui, une partie de la vraie solution, à mon avis, elle découle de la méthodologie avec laquelle on s'attaque aux... Je pense que mener un diagnostic précis du fonctionnement de l'équipe va permettre de zoomer, de s'attaquer aux points de friction identifiés lors du diagnostic. Sinon, on peut vite partir sur des fausses pistes. Je pense qu'aussi une vraie piste de résolution va être, ça fait partie aussi de la démarche diagnostique, d'identifier des schémas de fonctionnement récurrents. au sein de l'équipe. Et le but va être ensuite, avec l'équipe, d'atteindre des prises de conscience sur le fait que ces schémas récurrents pourraient être modifiés pour améliorer le fonctionnement de l'équipe. Donc tout ça, c'est des pistes assez méthodologiques. Il n'y a pas de miracle là-dedans. Et la troisième piste, ça va être de s'attaquer aux deux extrêmes d'une sorte de fil tendu au sein du fonctionnement d'équipe. Et aux deux extrémités de ce fil, on a d'un côté... Tout ce qui est organisation, process et de l'autre, tout ce qui est interrelation, communication. Et ces deux pôles ne fonctionnent pas l'un sans l'autre. Donc avoir conscience de les traiter l'un et l'autre concomitamment, je pense que ça c'est une vraie piste. Et alors,

  • Speaker #0

    quelles sont les situations peut-être structurelles où l'on ne pourra rien faire pour répondre aux problématiques d'équipe ?

  • Speaker #1

    Oui, alors ça j'en parle en effet dans le livre... Mon idée, c'est qu'on n'a pas de recette managériale toute faite, mais ça va même encore plus loin. Alors, je ne voudrais pas verser dans le pessimisme le plus total, mais à mon avis, il y a des situations qui, structurellement, sont tellement sous contrainte, sous pression, qu'il est difficile d'avancer. Il est même difficile de faire croire aux gens qu'une solution pourrait exister. Et donc, ces situations sous contrainte... Elles prennent la forme de superstructures contraignantes qui peuvent s'être mises en place sous la pression, par exemple, d'un actionnariat, de la politique, de contraintes réglementaires, de contraintes de reporting, d'exigences de réduction des coûts ou simplement d'un marché ultra concurrentiel. Et en fait, cette superstructure, elle vient contraindre le fonctionnement d'équipe. Donc, il y a plusieurs exemples. Moi, j'ai interviewé des personnes qui sont dans des secteurs. où la pression des coûts est vraiment très très forte et donc le fait de sous-staffer les équipes devient la norme et par ricochet on est aussi dans certains secteurs très difficiles où le fait d'être un travailleur pauvre n'est plus une exception mais devient la norme aussi par exemple dans le secteur de la grande distribution ou le secteur des livraisons à domicile les drive etc j'ai interviewé une manager qui dit et ben auparavant on avait l'autorisation de recruter des personnes pour des petits contrats, mais pour soutenir l'équipe en place, pour faire face à des pics d'activité. Et elle constate que de plus en plus, ce n'est plus autorisé. Et donc, ça ne permet pas d'éviter les blessures, la fatigue. Et donc, on va dans un travail qui est très contraint. Et la manager ne peut pas lutter contre ça. On a aussi comme exemple de superstructure. hyper contraignantes, ce qui est lié à une certaine culture. Donc là, je pense à un interviewé qui était manager d'une équipe assez grosse dans ce qu'il appelait lui-même une maison. C'est un grand magasin plus que centenaire qui prend la terminologie de maison. Et donc lui, là, j'ai envie de citer ses propos parce qu'ils sont assez parlants. Il dit le cadre de travail semble y être immuable et rassurant. Les silos y sont aussi très marqués. pour la direction, ça permet de diviser pour mieux régner. Il dit que dans cet univers de la vente, la culture de la hiérarchie est très forte. Il dit qu'on connaît les prénoms, on se dit bonjour, mais en fait, on ne connaît pas les gens. Il dit que chaque univers, donc sous-entendu chaque rayon, a sa propre histoire, sa culture, mais que globalement, chacun est dans son coin, que chacun protège son précaré. Lui, il aurait aimé que chaque personne, que chaque employé puisse s'émanciper un petit peu de ce cadre, mais il... Il conclut que ce changement est réalisable, mais pas à mon niveau, pas même au niveau de mon pôle, quand on est face à un système entretenu par 2000 personnes. Donc là, on voit que la culture dans cette maison plus que centenaire a vraiment pesé sur tout le monde. Et donc là, pour faire changer les choses et transformer justement ce système, c'est très compliqué, voire impossible.

  • Speaker #0

    La culture d'entreprise peut véritablement être un frein à trouver des solutions pour que les équipes aillent mieux. Oui. Les responsables d'équipe que tu as interrogés, quelles questions se posent-ils ?

  • Speaker #1

    Alors, c'est vrai que sur les 102, il y a quand même des questions qui sont revenues de manière assez récurrente. On a par exemple la question de... Ce qui est jugé comme l'inertie. On est responsable de l'équipe et on voudrait que l'équipe avance, bouge et on trouve qu'il y a trop d'inertie. Ça, c'est une question très récurrente. Autre chose, ça pourrait être le thème de la délégation. Je suis manager et je subis moi-même une surcharge de travail. Il faudrait certainement que je délègue, mais comment faire ? Ça, c'est vraiment une question qui revient souvent et qui va avec la question de la bonne distance. managériale. Et donc là, ils s'interrogent beaucoup entre est-ce que je dois être sympathique ou autoritaire ? Est-ce qu'il y a un juste milieu entre les deux ? Quelle posture dois-je adopter ? Une question aussi assez récurrente, c'est où placer le curseur entre autonomie et contrôle ? Donc, donner de l'autonomie aux équipes où je voudrais que mes équipes soient autonomes, ça revient souvent. Mais j'ai aussi ma tendance naturelle à vouloir contrôler, savoir si ça avance ou pas, qui fait quoi, quand, comment, qui est souvent assez forte. Donc là, c'est pareil, c'est une question très récurrente. On a des questions qui interviennent aussi à des moments clés de l'entreprise, par exemple, ou de l'équipe. Mon entreprise connaît une phase de croissance ou une fusion entre plusieurs équipes. Il y a ce moment clé qui fait que les responsables d'équipe se posent des questions.

  • Speaker #0

    Que fait le manager face à l'animal fantastique ?

  • Speaker #1

    Ça, c'est une bonne question et je me la suis posée moi-même longtemps. Il faut simplement avouer que le manager a une place ambiguë face à cet animal fantastique équipe. Il peut y avoir trois pistes. Soit le manager se tient à distance de l'équipe animal fantastique et il peut vouloir le dompter, le dresser, l'apprivoiser. Soit le manager fait partie intégrante. de l'équipe Animal Fantastique. Et ensuite, il y a plein de sous-questions à tiroir. Est-ce que le manager est plutôt la tête, les yeux pour donner la vision, le cerveau, les jambes pour courir vite, les ailes pour prendre de l'élan, les griffes, enfin, qui sait ? Tout est imaginable. Et la troisième piste, c'est celle qu'on ne veut vraiment pas voir aboutir, c'est le manager qui est dévoré par son équipe Animal Fantastique. C'est sûr.

  • Speaker #0

    Dans les 102 personnes, certains vivaient une transformation de leur organisation. Comment cela se passait-il dans cette configuration particulière ?

  • Speaker #1

    Alors, tu te doutes bien, Bérangère, que sur les 102 personnes, il y a eu 102 récits à chaque fois différents. Et voilà, là, je vais essayer vraiment de condenser ça. Peut-être que je peux te parler dans un premier temps des cas où les transformations ne se passent pas de manière idyllique. Là, comme on l'a dit au début, ça peut être parce que l'un des volets... entre l'organisationnel d'une part et le relationnel d'autre part est délaissé. Donc par exemple, c'est certain que quand des interviewés m'ont dit que la transformation n'était basée que sur de l'organisationnel, ils ont eux-mêmes conclu que c'était souvent fait au détriment de la pédagogie et qu'assez rapidement dans la vie de la transformation, ça coûtait cher d'avoir oublié le volet relationnel. Idem, il y a beaucoup de transformations qui ne sont que techniques. Par exemple, une fondatrice d'entreprise et dirigeante a dit on a voulu implanter trop d'outils en même temps, or dans une transformation, il y a toute une phase préparatoire d'adhésion à penser en amont Là, elle fait le bilan, l'état des lieux à mi-transformation, et uniquement le volet technique n'est pas suffisant. Mais à l'inverse, si on n'a que le volet relationnel, c'est insuffisant également. Là, je voudrais citer une dirigeante et fondatrice d'une start-up qui a été rachetée par une entreprise plus grosse et il a fallu fusionner, mettre en adéquation les deux cultures. Et donc là, quand elle découvre les équipes et le fonctionnement de la nouvelle entreprise, elle dit tout est basé sur l'individualité des gens En arrivant, je me suis demandé comment ça pouvait tourner. Le projet passe au dixième plan derrière les personnalités, les individualités. Ça marche moins bien. On te raconte que c'est à ta humaine, etc. Or, les gens sont en souffrance, ils veulent tous des process, un cadre. Il y a des frictions permanentes, des non-dits, un manque de confiance. Une entreprise où on a l'impression d'être en famille ou entre potes, ce n'est pas sain. Donc là, voilà un peu les extrêmes. Quand une transformation ne se passe pas de manière idyllique, c'est aussi souvent parce qu'on veut et on ne veut pas la transformation en même temps. Donc on la veut, on fait venir justement une perle rare ou quelqu'un en interne qui va devoir gérer le projet, et on attend toute cette personne. Et d'ailleurs, le cahier des charges est souvent N'hésite pas, fais-nous tes recommandations, vas-y à fond. On est ouvert à la critique parce qu'il faut que ça change. Voilà, ça c'est le cahier des charges. Mais ensuite, au fil de l'eau, on se rend compte que la transformation, on la voulait, mais on ne la voulait pas. Et donc la personne qui a été en charge de ça peut se retrouver en haut ou même en bas de ce qu'on appelle une falaise de verre. C'est-à-dire qu'on la fait venir pour résoudre quelque chose, passer un cap, mais ce n'est pas possible et la personne peut finir par se retrouver éjectée de ce processus de transformation. Après, on a des cas où ça se passe bien. Donc là, j'ai un exemple assez frappant. J'ai interviewé la responsable ou la directrice d'un centre de distribution du courrier, qui a commencé par me dire qu'elle était elle-même sous la contrainte de procédures de restructuration lourdes, c'est-à-dire que régulièrement tous les deux ans, je crois, des effectifs, des personnes devaient être sorties. Donc, elle, elle appelait ça vraiment une épée de Damoclès. Tous les deux ans, l'équipe est réduite à peau de chagrin et ça ne va pas s'arrêter. Donc, elle, elle a essayé de trouver des interstices dans ses lourdeurs pour diriger et mener son équipe du mieux qu'elle pouvait. Donc, elle a tellement insufflé au sein de cette équipe de la solidarité, de la souplesse. une sorte de réciprocité, de donnant-donnant, c'est-à-dire, je ne sais pas, je fais tout pour que vous soyez formés sur tel nouveau sujet, j'écoute vos souhaits en termes d'emploi du temps, j'écoute vos remarques sur tel ou tel outil, sur l'organisation du centre de tri, enfin voilà. En échange, oui, elle a constaté, enfin ce n'est pas révolutionnaire, mais en retour, elle a constaté que les gens s'impliquaient beaucoup dans leur travail au quotidien, et même beaucoup plus que dans d'autres centres de tri. Et elle a constaté, parce que l'équipe lui disait, que quand ils étaient parfois détachés dans d'autres centres de tri pour aider ou qu'ils rencontraient d'autres collègues ailleurs, ils éprouvaient une grande fierté à travailler dans ce centre de tri-là, qui était reconnu par tous les autres. Tous les autres collègues ailleurs disaient, vous avez de la chance, vous avez de l'autonomie dans votre travail, vous êtes reconnus. Et donc, là, c'est un cas de transformation d'équipe, en partant d'une situation vraiment souveraine. grosse contrainte que cette responsable d'équipe, aidée par toute son équipe, a réussi à mener.

  • Speaker #0

    Beau challenge. Belle vision. Conclusion de cet épisode, qu'est-ce que tu conseilles à l'animal fantastique pour aller bien ?

  • Speaker #1

    Ça, c'est une bonne question. Déjà, je voudrais dire que ce n'est pas un animal fantastique de laboratoire qu'on peut catégoriser et auquel on peut apporter des recettes pour le... le traiter, entre guillemets, et le faire aller bien. Mais c'est un animal fantastique qu'on peut bien nourrir. Il faut lui donner de la nourriture de qualité. Donc, je dirais beaucoup de bouquins que j'ai envie de lui conseiller, à cet animal et à ses managers, peut-être. C'est des livres qui vont sortir du domaine de l'anecdotique ou du développement personnel un peu... un peu gnangnan, des livres de chercheurs, de sociologues qui... Alors, j'ai envie de conseiller, par exemple, Christophe Dejour, c'est un grand classique, Souffrance en France ou les suivants. J'ai envie de conseiller aussi le traditionnel Michel Crozier sur la sociologie des organisations, les systèmes, etc. Et une chercheuse qui s'appelle Suzy Canivinque qui déconstruit aussi tout plein... d'idées reçues sur le télétravail, les générations au travail. Et je trouve que c'est une nourriture saine pour notre animal fantastique. Ça le fait sortir justement des croyances et des on-dit. Et bien sûr, l'animal fantastique peut mettre dans ses oreilles Dino Sapiens.

  • Speaker #0

    Un grand merci Vanina pour cet épisode et pour nous avoir parlé de ton livre qui est extrêmement riche sur les équipes au travail. Et à très bientôt, je l'espère, sur Dinosapiens pour parler de la suite.

  • Speaker #1

    Oui, avec plaisir. Merci à toi Bérangère.

  • Speaker #0

    C'est la fin de ce nouvel épisode de Dinosapiens. Je vous mets dans les notes de l'épisode les références citées par Vanina, à commencer par son livre Équipe NF, animal fantastique qui nous travaille. N'hésitez pas à noter et laissez une revue pour le podcast sur votre plateforme préférée et sur Apple Podcast. Vous retrouverez bientôt la version YouTube à disposition. A très bientôt pour un nouvel épisode. Il est d'ailleurs en cours de préparation et je me réjouis de vous le proposer très bientôt. D'ici là, prenez soin de vous et évitons l'extinction !

Description

Avec Vanina Lanfranchi, 📘 Autrice de : Equipe n.f.: Animal fantastique qui (nous) travaille

Ex-secrétaire générale - COO en charge des volets structuration, process, conformité, juridique, finance, RH, digitalisation... ✅ Experte capital investissement ⏐ Dynamiques d'équipes ⏐Transformation


Avec son enquête auprès de 102 managers, publiée dans un livre qui s'intitule : "Equipe n.f.: animal fantastique qui nous travaille", Vanina Lanfranchi nous emmène dans cet épisode sur la piste des équipes.

Au delà de la performance d'équipe, et des recettes de management parfois "classiques", son analyse décortique des dynamiques collectives à travers le regard de leaders, provenant d'une grande diversité d'organisations, de problématiques et de contextes.


Cet épisode couvre de nombreux aspects partagés par ces 102 leaders et analysés avec finesse par Vanina:

  • Quelles solutions les leaders mettent ils en oeuvre lorsque leur équipe dysfonctionne? Quelle posture adoptent ils?

Quelles sont les fausses solutions et les vraies problématiques?

Nous découvrons que certaines pratiques et croyances pourtant courantes dans l'ensemble des secteurs, qui visent à résoudre les situations critiques, ne sont pas efficaces.

  • Vanina nous partage également des pistes de réflexion pour résoudre les dysfonctionnements d'équipes, à commencer par un diagnostic de leur fonctionnement mais également trouver un juste équilibre entre processus et relations.

  • Elle nous explique que dans certains contextes, aucune solution ne peut être trouvée pour solutionner les dysfonctionnements d'équipes. Elle évoque avec exemple à l'appui des situations où la culture d'entreprise peut empêcher les améliorations, où le manque de moyens et les logiques de réductions continues découragent les équipes et font tarir la créativité des leaders.

  • Puis Vanina nous parle plus en détail de cet animal fantastique et de sa relation au leader. Comment se positionne le manager, quelle est la juste distance à adopter pour guider l'équipe?

  • Enfin, elle nous partage quelques exemples de situations de transformation avec des situations difficiles, mais aussi de grandes réussites, inspirées par un leadership humain et ouvert au dialogue. Ce qui permet d'engager une démarche d'amélioration continue du fonctionnement des équipes, pour plus de bien-être au travail, et plus de performance.


Quelques ouvrages proposés pour bien nourrir l'animal fantastique:




Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Bonjour, bienvenue sur ce nouvel épisode de DinoSapiens, le podcast qui parle de l'humain dans la transformation des organisations. C'est une vraie joie pour moi de recevoir aujourd'hui Vanina Lanfranchi, experte du monde de l'entreprise et particulièrement des équipes. Vanina a écrit un ouvrage intitulé Équipe, n.f.: animal fantastique qui nous travaille Ce livre est le fruit d'une enquête qu'elle a menée auprès de plus de 100 responsables d'équipe. Mais avant de se plonger dans le cœur du sujet et de son lien avec la transformation des organisations, je dois vous présenter Vanina et ce qui la rend exceptionnelle à mes yeux. Vanina s'est découverte dès l'enfance, une passion pour le monde du travail, en lisant pour la première fois Germinal d'Émile Zola lorsqu'elle était en quatrième. Après des études généralistes, elle a rejoint des fonds d'investissement et de capital risque. Elle y a travaillé pendant 15 ans en tant que secrétaire générale. En parallèle de son rôle, Vanina s'est ensuite formée au coaching, ce qui lui a permis d'accompagner pendant plusieurs années des professionnels et des équipes. Au fil du temps, elle a su se laisser guider par sa curiosité et sa passion première pour les dynamiques humaines en entreprise. Elle s'est intéressée de plus en plus, au travers de ses échanges avec les managers, à cet animal fantastique qu'est l'équipe. Et c'est ainsi qu'est née son ambition d'écrire un anti-guide du management pour nous permettre de reconnaître la diversité des équipes, et de sortir des règles parfois dogmatiques du management. Vanina L'Enfranchi a réalisé un travail massif d'enquête auprès de 102 responsables d'équipe. Elle nous explique aujourd'hui ce qu'elle a découvert à travers cette enquête. Bonjour Vanina, merci de venir nous parler de ton livre sur Dino Sapiens.

  • Speaker #1

    Bonjour Bérangère et je suis ravie que tu m'aies proposé d'intervenir sur Dino Sapiens, dont je suis une fidèle auditrice depuis les débuts.

  • Speaker #0

    Alors, tu as mis la barre très haute pour étudier les équipes. Un travail de plus de 100 interviews, c'est pas banal. Comment as-tu conçu ton enquête et qu'est-ce que tu as découvert ?

  • Speaker #1

    Merci d'avoir introduit ce travail, oui, 102 interviews même. Alors j'ai conçu mon panel avec un objectif de diversité. Je voulais interviewer des responsables d'équipe, donc des dirigeants et dirigeantes, entrepreneurs, managers, sur le thème de leur fonctionnement d'équipe. Et donc, pour que leur réponse soit vraiment focalisée sur le fonctionnement d'équipe, j'ai souhaité interviewer des gens très divers, avec une diversité de secteurs, de tailles d'équipes, secteurs publics ou privés, des personnes de différents pays, et aussi ma grande fierté, 51 femmes et 51 hommes. Et donc, qu'est-ce que j'ai découvert au cours de cette enquête ? Tout d'abord, c'est le sentiment d'humilité qui m'a saisie en premier, parce que j'ai réalisé que c'est 102 personnes, finalement, responsables d'équipe. faisaient comme elles pouvaient. Ce sont des personnes qui mènent des entreprises, des business, des équipes, comme elles peuvent, chaque jour. Donc face à ça, on est obligé d'être humble. Ce que j'ai constaté aussi, ce que j'ai découvert, c'est que les recettes managériales n'existent pas. Aucune des 102 personnes ne m'a dit je dirige comme ceci, je gère mon équipe comme cela Et ça fonctionne à coup sûr ? Non, non, c'est vraiment des essais-erreurs, des découvertes. Et donc, j'ai découvert des choses en même temps que ces personnes. D'où la notion d'anti-guide de management. Je vois ce livre, Équipe NF, comme un anti-guide de management.

  • Speaker #0

    Selon toi, quelles sont les fausses solutions aux problèmes exprimés par tes interlocuteurs ?

  • Speaker #1

    Alors là, je dis ça vraiment en ne voulant blesser personne. C'est que... Parmi les 102 interviewés, il y a bon nombre de personnes pour lesquelles il n'y a pas de problème. Leur équipe fonctionne bien, leurs affaires fonctionnent bien, et d'ailleurs tant mieux. Et pour une part de ces personnes-là, si jamais il y avait un problème concernant le fonctionnement d'équipe, ce serait un problème tout à fait exogène. Du type, c'est la guerre, c'est la pandémie, c'est le contexte géopolitique qui est compliqué, le coût des matières premières. Donc pour ces personnes-là, il n'y a pas vraiment de... prise de conscience que le fonctionnement d'équipe peut dysfonctionner, puisque toutes les causes et toutes les sources de difficultés sont exogènes. Donc là, rien à faire, en fait. Pas de problème, pas de solution à chercher, tout est exogène et on attend que ça passe. Sinon, on a des personnes qui identifient des problèmes en termes de fonctionnement d'équipe et qui adoptent à mon sens, deux fausses solutions, deux fausses pistes. La première fausse piste, ça va être de... de tout analyser sous le prisme des personnalités. Donc là, on peut s'imaginer quelque chose d'ultra logistique, comme si les personnes composant l'équipe étaient des stocks ou des flux. Il faut faire rentrer un mouton à cinq pattes, une perle rare, il faut faire sortir le vilain petit canard. Sauf qu'on se rend vite compte avec ce système que le vilain petit canard, il y en aura toujours un nouveau ou une nouvelle. et que quand le vilain petit canard est sorti, ce n'est pas la fin de tous les ennuis. Donc pour moi, ça, c'est une fausse piste. Et la deuxième fausse solution, on a des problèmes en termes de fonctionnement d'équipe. À mon sens, c'est de considérer que le manager est un super héros qui doit tout porter sur ses épaules, qui doit se former, s'améliorer, être à l'écoute, être bienveillant, tirer, pousser, faire se mouvoir l'équipe tout seul. Pour moi, cette cape de super héros, elle est trop lourde. et pas efficace hum quand on veut s'attaquer au fonctionnement d'équipe. L'équipe, ce n'est pas un manager sur le piédestal et puis tous les autres qui suivent, qui travaillent merveilleusement bien, etc.

  • Speaker #0

    Des fausses solutions qui sont courantes aux problèmes rencontrés par les équipes. Et alors, dans ce cas-là, quelles sont les vraies solutions aux problèmes remontés ou alors les zones d'attention ?

  • Speaker #1

    Oui, une partie de la vraie solution, à mon avis, elle découle de la méthodologie avec laquelle on s'attaque aux... Je pense que mener un diagnostic précis du fonctionnement de l'équipe va permettre de zoomer, de s'attaquer aux points de friction identifiés lors du diagnostic. Sinon, on peut vite partir sur des fausses pistes. Je pense qu'aussi une vraie piste de résolution va être, ça fait partie aussi de la démarche diagnostique, d'identifier des schémas de fonctionnement récurrents. au sein de l'équipe. Et le but va être ensuite, avec l'équipe, d'atteindre des prises de conscience sur le fait que ces schémas récurrents pourraient être modifiés pour améliorer le fonctionnement de l'équipe. Donc tout ça, c'est des pistes assez méthodologiques. Il n'y a pas de miracle là-dedans. Et la troisième piste, ça va être de s'attaquer aux deux extrêmes d'une sorte de fil tendu au sein du fonctionnement d'équipe. Et aux deux extrémités de ce fil, on a d'un côté... Tout ce qui est organisation, process et de l'autre, tout ce qui est interrelation, communication. Et ces deux pôles ne fonctionnent pas l'un sans l'autre. Donc avoir conscience de les traiter l'un et l'autre concomitamment, je pense que ça c'est une vraie piste. Et alors,

  • Speaker #0

    quelles sont les situations peut-être structurelles où l'on ne pourra rien faire pour répondre aux problématiques d'équipe ?

  • Speaker #1

    Oui, alors ça j'en parle en effet dans le livre... Mon idée, c'est qu'on n'a pas de recette managériale toute faite, mais ça va même encore plus loin. Alors, je ne voudrais pas verser dans le pessimisme le plus total, mais à mon avis, il y a des situations qui, structurellement, sont tellement sous contrainte, sous pression, qu'il est difficile d'avancer. Il est même difficile de faire croire aux gens qu'une solution pourrait exister. Et donc, ces situations sous contrainte... Elles prennent la forme de superstructures contraignantes qui peuvent s'être mises en place sous la pression, par exemple, d'un actionnariat, de la politique, de contraintes réglementaires, de contraintes de reporting, d'exigences de réduction des coûts ou simplement d'un marché ultra concurrentiel. Et en fait, cette superstructure, elle vient contraindre le fonctionnement d'équipe. Donc, il y a plusieurs exemples. Moi, j'ai interviewé des personnes qui sont dans des secteurs. où la pression des coûts est vraiment très très forte et donc le fait de sous-staffer les équipes devient la norme et par ricochet on est aussi dans certains secteurs très difficiles où le fait d'être un travailleur pauvre n'est plus une exception mais devient la norme aussi par exemple dans le secteur de la grande distribution ou le secteur des livraisons à domicile les drive etc j'ai interviewé une manager qui dit et ben auparavant on avait l'autorisation de recruter des personnes pour des petits contrats, mais pour soutenir l'équipe en place, pour faire face à des pics d'activité. Et elle constate que de plus en plus, ce n'est plus autorisé. Et donc, ça ne permet pas d'éviter les blessures, la fatigue. Et donc, on va dans un travail qui est très contraint. Et la manager ne peut pas lutter contre ça. On a aussi comme exemple de superstructure. hyper contraignantes, ce qui est lié à une certaine culture. Donc là, je pense à un interviewé qui était manager d'une équipe assez grosse dans ce qu'il appelait lui-même une maison. C'est un grand magasin plus que centenaire qui prend la terminologie de maison. Et donc lui, là, j'ai envie de citer ses propos parce qu'ils sont assez parlants. Il dit le cadre de travail semble y être immuable et rassurant. Les silos y sont aussi très marqués. pour la direction, ça permet de diviser pour mieux régner. Il dit que dans cet univers de la vente, la culture de la hiérarchie est très forte. Il dit qu'on connaît les prénoms, on se dit bonjour, mais en fait, on ne connaît pas les gens. Il dit que chaque univers, donc sous-entendu chaque rayon, a sa propre histoire, sa culture, mais que globalement, chacun est dans son coin, que chacun protège son précaré. Lui, il aurait aimé que chaque personne, que chaque employé puisse s'émanciper un petit peu de ce cadre, mais il... Il conclut que ce changement est réalisable, mais pas à mon niveau, pas même au niveau de mon pôle, quand on est face à un système entretenu par 2000 personnes. Donc là, on voit que la culture dans cette maison plus que centenaire a vraiment pesé sur tout le monde. Et donc là, pour faire changer les choses et transformer justement ce système, c'est très compliqué, voire impossible.

  • Speaker #0

    La culture d'entreprise peut véritablement être un frein à trouver des solutions pour que les équipes aillent mieux. Oui. Les responsables d'équipe que tu as interrogés, quelles questions se posent-ils ?

  • Speaker #1

    Alors, c'est vrai que sur les 102, il y a quand même des questions qui sont revenues de manière assez récurrente. On a par exemple la question de... Ce qui est jugé comme l'inertie. On est responsable de l'équipe et on voudrait que l'équipe avance, bouge et on trouve qu'il y a trop d'inertie. Ça, c'est une question très récurrente. Autre chose, ça pourrait être le thème de la délégation. Je suis manager et je subis moi-même une surcharge de travail. Il faudrait certainement que je délègue, mais comment faire ? Ça, c'est vraiment une question qui revient souvent et qui va avec la question de la bonne distance. managériale. Et donc là, ils s'interrogent beaucoup entre est-ce que je dois être sympathique ou autoritaire ? Est-ce qu'il y a un juste milieu entre les deux ? Quelle posture dois-je adopter ? Une question aussi assez récurrente, c'est où placer le curseur entre autonomie et contrôle ? Donc, donner de l'autonomie aux équipes où je voudrais que mes équipes soient autonomes, ça revient souvent. Mais j'ai aussi ma tendance naturelle à vouloir contrôler, savoir si ça avance ou pas, qui fait quoi, quand, comment, qui est souvent assez forte. Donc là, c'est pareil, c'est une question très récurrente. On a des questions qui interviennent aussi à des moments clés de l'entreprise, par exemple, ou de l'équipe. Mon entreprise connaît une phase de croissance ou une fusion entre plusieurs équipes. Il y a ce moment clé qui fait que les responsables d'équipe se posent des questions.

  • Speaker #0

    Que fait le manager face à l'animal fantastique ?

  • Speaker #1

    Ça, c'est une bonne question et je me la suis posée moi-même longtemps. Il faut simplement avouer que le manager a une place ambiguë face à cet animal fantastique équipe. Il peut y avoir trois pistes. Soit le manager se tient à distance de l'équipe animal fantastique et il peut vouloir le dompter, le dresser, l'apprivoiser. Soit le manager fait partie intégrante. de l'équipe Animal Fantastique. Et ensuite, il y a plein de sous-questions à tiroir. Est-ce que le manager est plutôt la tête, les yeux pour donner la vision, le cerveau, les jambes pour courir vite, les ailes pour prendre de l'élan, les griffes, enfin, qui sait ? Tout est imaginable. Et la troisième piste, c'est celle qu'on ne veut vraiment pas voir aboutir, c'est le manager qui est dévoré par son équipe Animal Fantastique. C'est sûr.

  • Speaker #0

    Dans les 102 personnes, certains vivaient une transformation de leur organisation. Comment cela se passait-il dans cette configuration particulière ?

  • Speaker #1

    Alors, tu te doutes bien, Bérangère, que sur les 102 personnes, il y a eu 102 récits à chaque fois différents. Et voilà, là, je vais essayer vraiment de condenser ça. Peut-être que je peux te parler dans un premier temps des cas où les transformations ne se passent pas de manière idyllique. Là, comme on l'a dit au début, ça peut être parce que l'un des volets... entre l'organisationnel d'une part et le relationnel d'autre part est délaissé. Donc par exemple, c'est certain que quand des interviewés m'ont dit que la transformation n'était basée que sur de l'organisationnel, ils ont eux-mêmes conclu que c'était souvent fait au détriment de la pédagogie et qu'assez rapidement dans la vie de la transformation, ça coûtait cher d'avoir oublié le volet relationnel. Idem, il y a beaucoup de transformations qui ne sont que techniques. Par exemple, une fondatrice d'entreprise et dirigeante a dit on a voulu implanter trop d'outils en même temps, or dans une transformation, il y a toute une phase préparatoire d'adhésion à penser en amont Là, elle fait le bilan, l'état des lieux à mi-transformation, et uniquement le volet technique n'est pas suffisant. Mais à l'inverse, si on n'a que le volet relationnel, c'est insuffisant également. Là, je voudrais citer une dirigeante et fondatrice d'une start-up qui a été rachetée par une entreprise plus grosse et il a fallu fusionner, mettre en adéquation les deux cultures. Et donc là, quand elle découvre les équipes et le fonctionnement de la nouvelle entreprise, elle dit tout est basé sur l'individualité des gens En arrivant, je me suis demandé comment ça pouvait tourner. Le projet passe au dixième plan derrière les personnalités, les individualités. Ça marche moins bien. On te raconte que c'est à ta humaine, etc. Or, les gens sont en souffrance, ils veulent tous des process, un cadre. Il y a des frictions permanentes, des non-dits, un manque de confiance. Une entreprise où on a l'impression d'être en famille ou entre potes, ce n'est pas sain. Donc là, voilà un peu les extrêmes. Quand une transformation ne se passe pas de manière idyllique, c'est aussi souvent parce qu'on veut et on ne veut pas la transformation en même temps. Donc on la veut, on fait venir justement une perle rare ou quelqu'un en interne qui va devoir gérer le projet, et on attend toute cette personne. Et d'ailleurs, le cahier des charges est souvent N'hésite pas, fais-nous tes recommandations, vas-y à fond. On est ouvert à la critique parce qu'il faut que ça change. Voilà, ça c'est le cahier des charges. Mais ensuite, au fil de l'eau, on se rend compte que la transformation, on la voulait, mais on ne la voulait pas. Et donc la personne qui a été en charge de ça peut se retrouver en haut ou même en bas de ce qu'on appelle une falaise de verre. C'est-à-dire qu'on la fait venir pour résoudre quelque chose, passer un cap, mais ce n'est pas possible et la personne peut finir par se retrouver éjectée de ce processus de transformation. Après, on a des cas où ça se passe bien. Donc là, j'ai un exemple assez frappant. J'ai interviewé la responsable ou la directrice d'un centre de distribution du courrier, qui a commencé par me dire qu'elle était elle-même sous la contrainte de procédures de restructuration lourdes, c'est-à-dire que régulièrement tous les deux ans, je crois, des effectifs, des personnes devaient être sorties. Donc, elle, elle appelait ça vraiment une épée de Damoclès. Tous les deux ans, l'équipe est réduite à peau de chagrin et ça ne va pas s'arrêter. Donc, elle, elle a essayé de trouver des interstices dans ses lourdeurs pour diriger et mener son équipe du mieux qu'elle pouvait. Donc, elle a tellement insufflé au sein de cette équipe de la solidarité, de la souplesse. une sorte de réciprocité, de donnant-donnant, c'est-à-dire, je ne sais pas, je fais tout pour que vous soyez formés sur tel nouveau sujet, j'écoute vos souhaits en termes d'emploi du temps, j'écoute vos remarques sur tel ou tel outil, sur l'organisation du centre de tri, enfin voilà. En échange, oui, elle a constaté, enfin ce n'est pas révolutionnaire, mais en retour, elle a constaté que les gens s'impliquaient beaucoup dans leur travail au quotidien, et même beaucoup plus que dans d'autres centres de tri. Et elle a constaté, parce que l'équipe lui disait, que quand ils étaient parfois détachés dans d'autres centres de tri pour aider ou qu'ils rencontraient d'autres collègues ailleurs, ils éprouvaient une grande fierté à travailler dans ce centre de tri-là, qui était reconnu par tous les autres. Tous les autres collègues ailleurs disaient, vous avez de la chance, vous avez de l'autonomie dans votre travail, vous êtes reconnus. Et donc, là, c'est un cas de transformation d'équipe, en partant d'une situation vraiment souveraine. grosse contrainte que cette responsable d'équipe, aidée par toute son équipe, a réussi à mener.

  • Speaker #0

    Beau challenge. Belle vision. Conclusion de cet épisode, qu'est-ce que tu conseilles à l'animal fantastique pour aller bien ?

  • Speaker #1

    Ça, c'est une bonne question. Déjà, je voudrais dire que ce n'est pas un animal fantastique de laboratoire qu'on peut catégoriser et auquel on peut apporter des recettes pour le... le traiter, entre guillemets, et le faire aller bien. Mais c'est un animal fantastique qu'on peut bien nourrir. Il faut lui donner de la nourriture de qualité. Donc, je dirais beaucoup de bouquins que j'ai envie de lui conseiller, à cet animal et à ses managers, peut-être. C'est des livres qui vont sortir du domaine de l'anecdotique ou du développement personnel un peu... un peu gnangnan, des livres de chercheurs, de sociologues qui... Alors, j'ai envie de conseiller, par exemple, Christophe Dejour, c'est un grand classique, Souffrance en France ou les suivants. J'ai envie de conseiller aussi le traditionnel Michel Crozier sur la sociologie des organisations, les systèmes, etc. Et une chercheuse qui s'appelle Suzy Canivinque qui déconstruit aussi tout plein... d'idées reçues sur le télétravail, les générations au travail. Et je trouve que c'est une nourriture saine pour notre animal fantastique. Ça le fait sortir justement des croyances et des on-dit. Et bien sûr, l'animal fantastique peut mettre dans ses oreilles Dino Sapiens.

  • Speaker #0

    Un grand merci Vanina pour cet épisode et pour nous avoir parlé de ton livre qui est extrêmement riche sur les équipes au travail. Et à très bientôt, je l'espère, sur Dinosapiens pour parler de la suite.

  • Speaker #1

    Oui, avec plaisir. Merci à toi Bérangère.

  • Speaker #0

    C'est la fin de ce nouvel épisode de Dinosapiens. Je vous mets dans les notes de l'épisode les références citées par Vanina, à commencer par son livre Équipe NF, animal fantastique qui nous travaille. N'hésitez pas à noter et laissez une revue pour le podcast sur votre plateforme préférée et sur Apple Podcast. Vous retrouverez bientôt la version YouTube à disposition. A très bientôt pour un nouvel épisode. Il est d'ailleurs en cours de préparation et je me réjouis de vous le proposer très bientôt. D'ici là, prenez soin de vous et évitons l'extinction !

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