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Dino Sapiens - le podcast des organisations en mutation

Rodéric Maubras & Dino Sapiens : faire équipe, faire société

Rodéric Maubras & Dino Sapiens : faire équipe, faire société

27min |11/07/2025
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Rodéric Maubras & Dino Sapiens : faire équipe, faire société

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27min |11/07/2025
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Description

🎙️ Épisode 32 – Rodéric Maubras : Faire équipe, faire société

Et si apprendre à faire équipe était aujourd’hui une compétence aussi essentielle que la stratégie ou la gestion du temps ?

Dans cet épisode de Dino Sapiens, Rodéric Maubras — coach d’équipe, fondateur de l’école Team Intelligence et auteur de Coacher les équipes grâce à la psychologie sociale — partage une vision puissante du collectif, nourrie de psychologie sociale, d’expérience terrain… et d’humanité.

💬 À quoi ressemble une équipe au XXIe siècle ?
À un groupe mouvant, éclaté, souvent désengagé…
Mais aussi à un formidable espace d’expérimentation, à condition de repenser nos manières de faire collectif, de créer du lien, de construire une vision partagée.

💡 Rodéric nous guide à travers :

  • les défis des équipes à géométrie variable et en télétravail

  • le passage d’une collection d’individus à un collectif qui coopère

  • l’importance de conjuguer cohésion humaine et cohésion technique

  • la manière dont les transformations doivent intégrer les processus sociaux, et non seulement les schémas organisationnels

  • et une conviction forte : faire société, ça s’apprend — dans l’entreprise, à l’école, et partout où l’on vit et travaille ensemble

🎯 Pas d’équipe parfaite, mais des équipes fières, alignées et rayonnantes.
Pas de transformation durable sans intelligence collective, écoute active et courage relationnel.

📌 Un épisode pour toutes celles et ceux qui œuvrent à une conduite du changement plus humaine, écrivent de nouveaux récits du travail, et croient que les aventures humaines sont au cœur du futur du travail.


Bibliographie:

Rodéric Maubras : Coacher les équipes avec la Psychologie Sociale

Rodérice Maubras : La boîte à Outils du coaching d'équipe

Olivier Devillard : La dynamique des équipes et l’intelligence collective (2017)



🎧 À écouter sur votre plateforme d'écoute préférée (et si vous pensez à laisser une revue sur Apple Podcast, et des étoiles... merci merci!)


#DinoSapiens #FaireÉquipe #CoachingDEquipe #TransformationDesOrganisations
#IntelligenceCollective #ConduiteDuChangement #FuturDuTravail
#NouveauxRécits #AventuresHumaines #VisionPartagée #LeadershipÉthique
#TeamIntelligence #ProcessusSocial #FaireSociété #Leadership


Générique : Clean Success by Boomer.


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Ce que l'on constate souvent, c'est qu'une équipe excellente a cette capacité de rayonnement sur son écosystème, cette capacité d'inspirer d'autres collectifs dans les organisations.

  • Speaker #1

    Bienvenue sur DinoSapiens, le podcast qui explore la transformation des organisations sans bullshit ni jargon. Je suis Bérangère du cimetière et chaque épisode, je tends le micro à celles et ceux qui, à leur manière, font évoluer nos façons de travailler, de décider, de manager. Parce que transformer, ce n'est pas imposer, c'est comprendre, embarquer, expérimenter. Parce que, dans un monde qui change vite, c'est notre capacité à rester humain qui fera toute la différence. Alors embarquez avec moi sur Dinosapiens et ensemble, évitons l'extinction ! J'ai la très grande joie de recevoir aujourd'hui Roderick Maubras, que j'admire pour une ambition peu commune qu'il incarne, sans grande éloquence, mais plutôt avec simplicité, celle d'apprendre et d'enseigner à mieux faire société. Je l'admire aussi parce qu'il a été mon professeur en coaching d'équipe. Son approche sur le sujet, qui me correspond bien puisqu'elle s'appuie sur les sciences sociales, lui a permis de fonder une école, Team Intelligence, qui forme les coachs à devenir coach d'équipe et d'organisation. Roderick se vouait à devenir économiste. Il en a d'ailleurs suivi le chemin universitaire, mais contre toute attente, il a rejoint le monde des médias et de la tech pour sa première partie de carrière, en commençant par un stage. Il est devenu au fil de douze années directeur du marketing et de la diffusion. Ce parcours lui a permis de vivre d'abord une forte croissance du secteur de la presse informatique, avant de traverser une concentration à l'arrivée d'Internet et la transformation du modèle de la presse écrite. Voir une entreprise en difficulté de l'intérieur n'est pas une expérience simple à vivre, et mais encore moins en tant que manager. Optimisation, rationalisation, restrictions budgétaires, les termes courants qui précèdent souvent à des restructurations, Roderick a été impliqué pendant six ans dans des situations complexes et douloureuses. Il quitte en 2007 son entreprise avec le sixième plan social. Il part pour s'éloigner des logiques centrées uniquement sur les chiffres, l'efficacité, et qui passe complètement à côté de l'aspect humain. Il crée alors sa propre agence de team building, le Good & One Chose, qui propose des cours de cuisine, d'onologie, de dégustation. Ce concept, à l'attention des entreprises qui veulent marquer un temps de pause, un temps de cohésion avec leurs équipes, lui permet de remarquer une chose fondamentale. Le team building, s'il permet de célébrer les équipes qui vont bien, ne résout en revanche pas grand-chose pour les équipes qui vont mal. Roderick Maubras s'intéresse alors au coaching d'équipe. Il se forme. puis monte une autre structure de coaching d'équipe cette fois. Atteint d'une véritable boulimie de coaching d'équipe, Roderick explore les techniques dans tout type d'organisation, de culture, de problématiques. Cela l'amène à reprendre avec enthousiasme le chemin de la fac pour se former en psychologie sociale. Il étudie pendant cinq ans au cours du soir jusqu'à obtenir un master en psychologie sociale. S'ensuit la publication d'un livre, coacher une équipe grâce à la psychologie sociale et la création de l'école Team Intelligence. Il s'agit alors pour Roderick de former des élèves à savoir comment déployer une stratégie de coaching d'équipe efficace qui ne réduise pas la complexité mais aide à mieux l'appréhender, tout en proposant aux équipes des chemins de transformation fonctionnels. Aujourd'hui, avec la création de Team Intelligence, Roderick Maubras transmet sa passion d'un coaching d'équipe s'appuyant sur une démarche analytique et sur les sciences sociales d'une manière générale. Il nous explique aujourd'hui ce que c'est que faire équipe en 2025. Quels sont les enjeux des transformations pour les processus sociaux des équipes ? Il nous partage enfin ses prochaines étapes et sa vision de franchir les murs des organisations pour faire grandir la société dans un projet relationnel commun. Bonjour Roderick.

  • Speaker #0

    Bonjour Bérengère.

  • Speaker #1

    Ravi de t'accueillir aujourd'hui sur l'Univers Sapiens pour parler du coaching d'équipe et parler des équipes et de faire société. Qu'est-ce que ça veut dire faire équipe au XXIe siècle ?

  • Speaker #0

    Ça, c'est une bonne question, Bérangère. Ça pourrait sous-entendre que faire équipe aujourd'hui, c'est différent que de faire équipe hier ou faire équipe au XXe siècle. En effet, je pense qu'on peut constater quelques phénomènes qui font que le collectif, faire collectif aujourd'hui en entreprise, c'est différent. Alors peut-être on peut citer d'abord la question de la volatilité grandissante des effectifs. Les équipes que je rencontre aujourd'hui sont des équipes à effectifs de plus en plus variables. le temps d'un coaching d'équipe, donc trois à six mois, on peut trouver des effectifs dans lesquels on n'a pas les mêmes personnes entre le début et la fin de la mission. Alors certainement plusieurs facteurs expliquent cela. La question peut-être du marché de l'emploi plus ouvert aujourd'hui, la question des jeunes générations qui finalement s'autorisent peut-être plus facilement à passer d'une entreprise à l'autre par rapport à leurs aînés. également peut-être la digitalisation du marché de l'emploi qui rend plus facile finalement ces mouvements, et puis un certain nombre de bouleversements économiques dans un certain nombre de secteurs qui créent beaucoup de réorganisations, qui créent beaucoup de chamboulements en termes d'effectifs. Donc premier phénomène, la volatilité grandissante des effectifs qui modifie quand même la configuration d'une équipe au XXIe siècle. Deuxième phénomène, la dispersion des effectifs, c'est-à-dire que depuis le Covid, on a vu se multiplier les accords de télétravail. se multipliaient les projets de flex office. Et de fait, les équipes sont de moins en moins réunies dans l'espace de travail que constituait le bureau avant. Donc on se retrouve face à des équipes qui ne se rencontrent plus jamais en globalité au bureau. Je caricature un petit peu, mais on assiste quand même à une difficulté pour un certain nombre de chefs d'équipe de réunir ensemble toutes leurs équipes parce qu'on a toujours une partie d'équipe en télétravail. Donc deuxième facteur qui... contribue à reconfigurer l'équipe au XXIe siècle, le fait de ne pas avoir tout le temps l'effectif sur site, au même endroit, en même temps. Et ça crée effectivement plein de nouvelles difficultés, en termes de cohésion on peut s'en douter. Et puis, troisième facteur, la perte du sentiment d'appartenance du commun. Je constate, au travers des missions que je peux réaliser aujourd'hui, c'est D'avoir des équipes qui, finalement, ne se retrouvent plus spontanément autour de l'appartenance au projet d'équipe et de manière plus globale au projet d'entreprise. C'est de plus en plus difficile pour les dirigeants et pour les managers de vendre, entre guillemets, un projet d'appartenance, d'un projet d'entreprise. On assiste quand même beaucoup à une forme de repli sur soi généralisé, alors qu'il est certainement lié à un contexte global un peu plus anxiogène. Donc ces événements successifs, peut-être on peut les qualifier, le Covid, l'incertitude géopolitique, l'instabilité politique nationale, même récemment, de manière générale l'insécurité économique, peuvent contribuer à ce que les membres d'une équipe, et nous tous d'ailleurs je dirais spontanément, pensions avant tout à nous-mêmes, avant de penser à un projet d'équipe, à un projet de collectif. Et cette reconfiguration de la vision des uns et des autres pèse sur la capacité à faire collectif. Donc troisième phénomène qui contribue à faire que les équipes aujourd'hui sont différentes, Je trouve, c'est cette difficulté à créer un sens collectif, un sens commun, autour d'un projet qui fédérait l'ensemble des membres d'une équipe.

  • Speaker #1

    C'est un peu comme une crise permanente, où il y a des gens qui partent, qui viennent, un contact incertain, on se replie sur soi-même plutôt que sur le groupe ?

  • Speaker #0

    Exactement, et d'ailleurs ce concept de crise permanente devient de plus en plus à la mode, c'est-à-dire qu'on finit par tous normaliser. le fait d'être dans un changement perpétuel avec devant nous des événements potentiellement difficiles à vivre. Mais finalement, ça devient notre nouvelle norme.

  • Speaker #1

    Dans ce contexte incertain, comment est-ce qu'on passe, selon toi, d'une collection d'individus qui est centrée vers son propre intérêt, vers une équipe ?

  • Speaker #0

    C'est une vaste question qui occupe les coachs d'équipe depuis que ce métier existe. Il y a de nouveaux enjeux à travailler avec les équipes aujourd'hui. liés à ces nouveaux phénomènes. Et en effet, il est de plus en plus difficile actuellement de créer ce collectif et de partir de ces individus qui chacun composent une équipe avec leur diversité de parcours, leur diversité de personnalité, leur diversité d'ambition, et qui viennent finalement rejoindre un projet d'entreprise, mais avant tout, je dirais, qui viennent exercer un métier, qui ont signé un contrat de travail. On se retrouve donc avec une difficulté qui est de faire passer ces individus, de chacun pour soi, l'un à côté de l'autre, si possible dans le même bureau, mais comme on disait tout à l'heure, ce n'est pas toujours le cas, à la capacité de fonctionner ensemble, de se projeter ensemble, de créer une ambition commune. Comment on fait pour ça ? Eh bien, il y a plusieurs manières de travailler avec un collectif. D'abord, on va faire en sorte que les individus apprennent à se connaître. Ensuite, on va espérer qu'ils puissent également avoir l'opportunité de s'accepter. dans leur diversité, dans leur richesse. On va les aider à apprendre à réguler leurs différends, leurs désaccords de manière pacifique, plutôt que d'attendre que les conflits sont venus et ne dégénèrent. On va leur insuffler des mécanismes de coopération et d'entraide pour qu'ils aient spontanément l'envie d'aller se mettre aussi au service des autres et ne pas que cultiver leur propre sillon. Et on peut également leur... proposer des mécanismes pour optimiser l'action collective, donc ça passe par la réorganisation des équipes, un travail peut-être de clarification de qui fait quoi dans le collectif, un travail sur les canaux de communication pour les rendre peut-être plus opérationnels, plus simples à utiliser, et qu'il n'y ait pas d'utilisation anarchique des différents canaux à disposition de l'équipe. Et puis enfin, on va essayer de se mettre tous ensemble autour de la table pour se dire c'est quoi notre projet commun, c'est quoi notre projet d'équipe. Et plus on va réussir à faire en sorte que le projet soit quelque chose qui soit co-imaginé, co-porté par le collectif, plus on va avoir d'élan de l'individu vers le collectif. La grande erreur que l'on constate encore souvent aujourd'hui de la part d'un certain nombre de managers, c'est de vouloir imposer une vision collective, imposer une ambition de groupe, sans prendre la peine d'essayer d'y réfléchir avec le collectif. Les études en psychosocial ont montré notamment, plein de choses, mais notamment que plus l'individu se voit imposer une vision, moins il a tendance à la suivre. Je renvoie aux travaux de Kurt Lewin sur l'engagement, mais aussi de nombreux autres auteurs sur la théorie de l'engagement, comment on fait pour qu'un individu ait envie de s'engager dans un groupe, eh bien, on le responsabilise, on lui donne la possibilité de donner son avis et de co-créer, de se projeter avec les autres et de co-porter finalement une vision. Donc, tout ça... permet effectivement de passer d'un individu à un collectif.

  • Speaker #1

    Roderick, est-ce qu'il existe une équipe parfaite ?

  • Speaker #0

    On aimerait beaucoup imaginer, rêver, on rêve de l'équipe parfaite, mais pas plus qu'il n'existe d'individu parfait, il n'existe de collectif parfait. Alors qu'on peut toutefois tendre vers une forme d'excellence collective, ça c'est une ambition qu'il est possible de poser avec les équipes. Alors l'excellence collective, elle pourrait se caractériser de la manière suivante, chacun se sent à sa place dans l'équipe sans empiéter sur la place des autres. Chacun accepte et respecte ses collègues, aussi différents et variés soient-ils, finalement. Chacun sait exprimer ses désaccords, posément, et se sent autorisé à proposer de nouvelles idées. Également, dans ces collectifs où l'on peut trouver de l'excellence à plusieurs, chacun accepte les critiques sans en faire une remise en question personnelle, donc il y a une facilité de régulation assez spontanée. Ce sont également des équipes dans lesquelles la coopération a pris une dimension systématique, c'est-à-dire qu'on s'intéresse... presque avant tout aux problématiques des autres avant de s'intéresser aux siennes. En tout cas, je dirais qu'à même niveau, on peut trouver effectivement un intérêt pour les problèmes des autres et ses propres problèmes. Et donc le collectif est capable de traiter l'adversité avec beaucoup d'agilité, on le termine à la mode, mais c'est vrai qu'on va trouver ça dans ces collectifs excellents. L'excellence collective, c'est aussi une capacité à optimiser l'organisation du travail. Il y a très peu de déperdition d'énergie et de temps dans des équipes qui parviennent à cette forme d'excellence collective, parce que L'information circule de manière très fluide, les rôles sont très clairs, les processus de décision le sont tout autant, etc. L'équipe est également habitée par une vision très positive d'elle-même. Ça, c'est quelque chose qui caractérise aussi l'excellence collective, c'est que le collectif est convaincu de sa propre puissance et des ressources qu'il est capable de générer. Donc, il y a quelque chose d'assez magique, quelque part, dans ces collectifs qui ont atteint une forme d'excellence, c'est que l'excellence, quelque part, permet de faire perdurer l'excellence. Il y a une forme de vision de soi qui consolide. les acquis de manière assez spontanée. Et puis, ce que l'on constate souvent, c'est qu'une équipe excellente a cette capacité de rayonnement sur son écosystème, cette capacité d'inspirer d'autres collectifs dans les organisations. Alors, elle peut aussi créer des envieux, il ne faut pas se leurrer, mais c'est vrai qu'on a souvent des équipes qui créent une forme d'inspiration pour les autres. Donc, on a tout intérêt, non pas à rêver de l'équipe parfaite, mais à construire de l'excellence collective.

  • Speaker #1

    Donc, en fait, ce que tu décris, une équipe parfaite, c'est une équipe qui a un processus social qui fonctionne bien.

  • Speaker #0

    Oui, un processus social, mais aussi un processus technique. Je renvoie aux travaux d'Olivier Devillard sur la cohésion humaine et la cohésion technique. Pour rappel, la cohésion humaine, c'est ce qu'on appelle les processus subjectifs, c'est la qualité du lien qu'on va trouver dans une équipe. Et la cohésion technique renvoie au processus objectif, c'est-à-dire la qualité de l'organisation, du travail de l'équipe. Et donc... Ce que l'on peut constater dans un certain nombre d'organisations et dans un certain nombre d'équipes, c'est qu'il est plus spontanément facile de s'intéresser au processus technique qu'au processus socio, c'est-à-dire qu'au lien social dans l'équipe. Or, tout changement réussi passe par un travail sur ces deux aspects. Il est impossible d'avoir un collectif qui se projette mieux dans un travail ensemble si on ne s'intéresse pas à la manière dont les changements, les bouleversements vont impacter les relations entre les individus.

  • Speaker #1

    Trop de technique et ça devient vide, et trop d'humains et c'est cafouilleux.

  • Speaker #0

    Oui, c'est peut-être une bonne manière de résumer les choses. Trop de technique et on passe à côté de ce qui va permettre à une équipe de fonctionner efficacement en pleine tempête. Parce que s'il n'y a pas d'intérêt pour l'autre, s'il n'y a pas eu de construction de lien, spontanément, il y aura moins d'entraide dans le collectif. Et trop d'humains, alors est-ce qu'on peut être dans trop d'humains ? Oui, c'est vrai. Il y a une dynamique caractéristique de certaines équipes, que j'appelle la démixture affective, qui caractérise des collectifs dans lesquels la qualité du lien prédomine sur la qualité du travail. Et ce sont des bandes avant d'être des collègues. Ce sont souvent des gens qui se voient en dehors du travail, etc. Effectivement, dans ce type d'équipe, il peut y avoir des difficultés spécifiques, comme l'intégration de nouveaux membres qui ne font pas partie de la bande. mais aussi le départ de certains membres qui vont conduire les autres à avoir une difficulté de deuil parce qu'on perd presque un membre de son corps quand on perd un membre de l'équipe tellement on est en fusion relationnelle.

  • Speaker #1

    On arrive sur la partie transformation. Une transformation dans une organisation ne doit-elle pas porter cet impératif de processus social ?

  • Speaker #0

    Oui, en tout cas, c'est ma conviction liée à ce que je peux constater dans les accompagnements que je peux réaliser. Dans un certain nombre de situations, les réorganisations oublient de prendre en considération cet impératif de lien social. Deux raisons qui me paraissent fondamentales. d'évoquer, c'est que d'abord, en premier lieu, la réorganisation spontanément comporte une forte dimension technique, c'est-à-dire qu'on va y mettre des enjeux de répartition fonctionnelle, des enjeux de processus techniques, des enjeux de réagencement des moyens. Évidemment que tout ceci est absolument nécessaire, mais il faut également prendre en compte les impacts sur les individus qui composent ces réorganisations et qui vont les traverser. Et il y a une dimension tout aussi inévitable des réorganisations qui consiste à traiter l'évolution des relations, l'évolution des jalousies, les bouleversements de perspectives et d'ambitions individuelles que les réorganisations vont imposer et qui vont souvent de pair si elles ne sont pas traitées avec une explosion des craintes et des résistances. Et souvent, les coachs d'équipe et les coachs d'organisation sont appelés justement parce que les dirigeants, les managers se trouvent démunis par rapport à cette puissance de la résistance des groupes. qui souvent est liée à une non prise en compte de ce que ces transformations techniques, ces transformations de moyens ont généré sur les aspirations, les craintes et les trajectoires des individus. Et si on ne traite pas ça, nécessairement les relations dans les collectifs se dégradent. Donc c'est un premier point important, effectivement, sur la nécessité de prendre en compte le maillage relationnel de l'équipe et les aspirations des individus. Et sans doute une deuxième raison qui devrait conduire les organisations à penser le lien social dans les réorganisations sont liées à la manière dont la valeur travail va évoluer dans les décennies et certainement dans les siècles à venir, oserais-je dire. En tout cas, dans les décennies, on pressent que... l'essor de l'intelligence artificielle, l'arrivée des nouvelles générations au travail vont complètement bouleverser ce rapport au travail et aussi la fonction du travail dans la vie des individus. Et on peut s'interroger, alors là je vais peut-être un petit peu, j'extrapole un petit peu sur la manière dont les organisations vont devoir devenir aussi finalement peut-être pas seulement des acteurs de production de biens et services, mais aussi des espaces de développement. du lien et des espaces de développement de l'individu au travail, avec certainement une remise en question de ce que c'est que la valeur du travail portée par l'individu. Parce qu'il y aura d'autres entités, on pourrait dire, pour porter cette valeur.

  • Speaker #1

    Est-ce qu'on peut dire que dans une organisation et dans une organisation en transformation, une équipe, c'est une micro-société ?

  • Speaker #0

    Oui, moi je suis convaincu de cela. C'est une nécessité que de considérer qu'une équipe est une micro-société. Alors, parlons déjà du temps que l'on y passe dans une équipe. et c'est ce n'est pas la moitié de notre vie, mais quasi, quelque part. On pourrait considérer que finalement, le travail n'est que le travail et que chaque individu qui signe un contrat vient chercher un salaire en essence de sa valeur travail, quelque part dans une vision un peu Karl Marx. Moi, je crois que notre responsabilité, et je dis notre en tant qu'individu, membre d'équipe, manager, dirigeant, coach d'équipe, coach d'organisation, on a tous quelque part cette responsabilité de considérer l'équipe comme une micro-société. Ça veut dire aussi, lui, porter des ambitions à la fois d'optimisation des fonctionnalités collectives, d'optimisation technique, mais aussi d'optimisation humaine. Et ça veut dire quoi ? Ça veut dire qu'en effet, dans une micro-société fonctionnelle, le respect de l'autre est important, la place de chacun est importante, la considération des ambitions de chacun est importante, à condition qu'elle n'empiète pas sur les ambitions des autres. Il y a tout un aspect de travailler ensemble qui certes est fondamental, mais le vivre ensemble est tout aussi fondamental, et spécifiquement quand on s'intéresse à des réorganisations. Il n'y a pas de réorganisation réussie sans une capacité des entreprises à s'intéresser à la question du vivre ensemble avant la réorganisation. Qu'est-ce que c'était pendant la réorganisation ? Qu'est-ce que ça va être après la réorganisation ? Qu'est-ce que ça va devenir ?

  • Speaker #1

    Et à ce titre, qu'est-ce que c'est pour toi que faire société ? Donc, dans notre société qui est en... perpétuelle réorganisation et avec beaucoup d'incertitudes. Quel regard portes-tu sur notre capacité à faire société actuellement ?

  • Speaker #0

    On est dans un contexte international très particulier où finalement, le paradigme qui est en train de s'installer, c'est le dirigeant providentiel plus que jamais, qui décide de manière autocratique et autoritaire de ce qui est bon et de ce qui est mal, de ce qui est bien et de ce qui est mauvais. On a une sorte de vision un peu manichéenne du monde qui est en train de s'installer et qui est... pour moi, très préoccupante, et qui va induire quoi sur les sociétés qui le subissent ? Eh bien, du repli sur soi, du rejet de l'autre, la stigmatisation de tout ce qui est différent, le besoin de dominer l'autre pour exister. Donc, je dirais que tout ceci nous donne quelque part, par le contraire, l'indication vers quoi il faut tendre pour que l'on puisse créer des sociétés fonctionnelles. Donc, qui dit protectionniste, dit considérer l'autre non plus comme une menace, mais peut-être comme une ressource, comme un facteur de richesse, si on prend le contre-pied. Qui dit repli sur soi, dit m'intéresser à plutôt une action collective qu'à mes propres enjeux individuels. Et qui dit stigmatisation, dit, si on prend le contre-pied de cela, aller vers la diversité, considérer qu'il y a de la place pour chacun dans une société.

  • Speaker #1

    Est-ce que ça a un rapport avec le fait que faire société, ça ne se décrète pas ? C'est pas parce qu'on est en démocratie qu'on est capable de faire société, et que faire société, ça se réfléchit au niveau collectif, mais aussi individuel ?

  • Speaker #0

    Oui, je suis assez convaincu de ça. Je pense que faire société, ça ne se décrète pas, mais ça s'apprend. Spontanément, nous ne sommes pas outillés pour savoir faire équipe, et quelque part, faire équipe ou faire société, en tout cas la manière dont je le conçois. Ce que peut devenir une équipe, pour moi, c'est un petit peu pareil. C'est-à-dire, à quel moment je m'inscris dans un projet collectif, à quel moment je fais ma part, à quel moment j'y trouve une forme d'épanouissement individuel et je contribue en même temps à une certaine forme d'épanouissement collectif.

  • Speaker #1

    Alors, le lien naturel de cette question, c'est qu'aujourd'hui, tu t'engages au-delà de ton équipe team intelligence, tu cherches à dépasser les murs de l'entreprise et tu apportes ton savoir-faire et tes techniques à d'autres endroits de la société. qui sont absolument clés pour notre capacité en tant qu'être humain à faire société plus tard. Tu peux nous en dire plus ?

  • Speaker #0

    Oui, avec plaisir. En effet, mon ambition aujourd'hui, elle est plus portée sur d'autres secteurs, d'autres domaines, d'autres mondes que celui de l'entreprise. Mais ça part quand même d'un constat, alors je vais y revenir après, mais peut-être quand même dire que ce monde de l'entreprise qui souvent est un petit peu décrié, critiqué pour ses logiques justement d'ultra-performance, d'individualisme. ces logiques très centrées sur l'économique. Il faut quand même dire aujourd'hui que c'est un terrain d'expérimentation extraordinaire pour le travail collectif. Et s'il y a un endroit où il s'est développé cette discipline que je pratique, qui est le coaching d'équipe, c'est bien l'entreprise. Donc c'est un endroit où, quelque part, on a fait évoluer cette capacité de faire monter en épanouissement, monter en performance des collectifs et donc monter en excellence, quelque part. On pourrait presque dire que l'entreprise est un territoire qui a permis de faire évoluer ce que ça pouvait être que faire des sociétés fonctionnelles, des micro-sociétés fonctionnelles. Et c'est pour ça que cette idée d'exporter ces savoirs vivre et ces savoirs être collectifs de l'entreprise vers d'autres domaines, je trouve ça assez important aujourd'hui. Et donc ça prend une forme assez concrète aujourd'hui, puisque je suis en train de développer avec des personnes qui travaillent à l'éducation nationale. une association qui s'appelle Faire équipe à l'école, dont l'objectif est d'aller permettre à tous ces individus qui composent le monde de l'éducation, donc les élèves, les professeurs, tout le personnel qui peut travailler dans les établissements, les directeurs d'établissements, mais aussi finalement les inspecteurs, toutes ces strates finalement qui composent ce monde de l'éducation, qui accompagnent nos enfants pour devenir des citoyens, et de doter en fait tous ces individus d'outils complémentaires pour... apprendre à fonctionner ensemble, apprendre à travailler ensemble, apprendre à vivre ensemble, et de s'apercevoir que finalement, c'est là que ça commence. Et si on veut, derrière, que les individus apprennent à faire société, à faire équipe, faut-il encore qu'ils apprennent à le faire. Donc c'est cette ambition que je porte actuellement à travers l'association Faire équipe à l'école.

  • Speaker #1

    Pour finir, Roderick, on arrive à la fin de cet épisode. Quels sont tes conseils pour trouver ses marques et faire société dans une équipe ?

  • Speaker #0

    Je dirais en premier lieu considérer l'autre comme une richesse et non comme une menace. Ça pourrait être un premier prérequis. Donc autoriser l'autre à être aussi différent, soit-il quelqu'un de fréquentable. Et cette question d'autorisation, elle est importante parce que spontanément, la psychologie sociale nous raconte que nous sommes pétris de préjugés et de stéréotypes et que si nous n'y prenons garde, lorsque nous rentrons dans un nouveau collectif, nous avons tendance à créer une sorte de prédéfinition de qui est qui. Et cette tendance que nous avons peut spontanément nous mettre à distance de... différences qui sont autant de richesses. Et donc, je dirais avoir cette capacité, développer cette capacité, parce que c'est une compétence, c'est un savoir-faire, d'aller spontanément s'intéresser à ceux qui composent le collectif, au-delà des préjugés que je peux avoir au début. On s'aperçoit que plus les gens se rencontrent, c'est ce qui s'appelle l'hypothèse de contact en psychologie sociale, et plus les stéréotypes mutuels diminuent. Donc c'est vraiment un prérequis indispensable. Ne pas hésiter, je dirais également, à parler, exprimer ses forces, exprimer ses faiblesses et les mettre finalement comme quelque chose de précieux pour le groupe. Savoir qui je suis, savoir là où je suis bon, savoir là où je suis moins bon, ce sont des informations absolument précieuses pour le collectif. Si tout le monde est capable de faire ça, on a les prérequis de la coopération. Et puis, j'ai envie de dire peut-être pour terminer, y croire souvent dans des collectifs fatigués que je rencontre. C'est l'espoir qu'il manque, c'est l'espoir en la capacité du groupe à changer son histoire. Bien souvent, il y a comme une forme de renoncement collectif. On a tout essayé, si on avait pu changer quelque chose, ça se saurait, etc. Et en réalité, je m'aperçois qu'au-delà de tous les outils que l'on peut donner à un collectif pour aller mieux, qu'est-ce qui va... déclencher un renouveau, une renaissance, c'est la petite étincelle d'espoir que l'on est capable de réactiver dans l'esprit des membres de l'équipe. Donc y croire, et y croire encore, et y croire de nouveau, et y croire différemment.

  • Speaker #1

    On va terminer là-dessus sur ce message d'espoir et d'y croire. Un grand merci Roderick d'être venu au micro de Dino Sapiens pour nous parler des équipes et du coaching d'équipe.

  • Speaker #0

    Merci à toi, merci Bérangère, et à très bientôt.

  • Speaker #1

    Merci à Roderick Maubras pour cet échange éclairant sur ce que signifie faire équipe aujourd'hui. Dans un monde mouvant, fragmenté, où l'individualisme prend souvent le dessus, Roderick nous rappelle une évidence trop souvent oubliée, c'est qu'on ne fait pas société sans l'autre. Pas d'équipe sans lien, pas de transformation sans écoute, pas de collectif sans apprentissage. Il n'existe pas d'équipe parfaite, dit-il, mais des équipes optimisées, fières d'elles-mêmes, capables de rayonner bien au-delà de leurs frontières. Des équipes ? qui apprennent à coopérer plutôt qu'à s'aligner de force, à accueillir les différences plutôt qu'à les neutraliser. Alors si vous aussi, vous croyez qu'il est temps de repenser nos façons de travailler ensemble, de construire un avenir qui réconcilie performance et humanité, cet épisode est pour vous. Et si vous voulez creuser, je vous mets dans les notes du podcast les références vers les deux ouvrages de Roderick et les références qu'il partage comme celles d'Olivier de Villars. Merci pour votre écoute et à très bientôt pour un nouvel épisode de DinoSapiens. Et d'ici là, évitons l'extinction !

Description

🎙️ Épisode 32 – Rodéric Maubras : Faire équipe, faire société

Et si apprendre à faire équipe était aujourd’hui une compétence aussi essentielle que la stratégie ou la gestion du temps ?

Dans cet épisode de Dino Sapiens, Rodéric Maubras — coach d’équipe, fondateur de l’école Team Intelligence et auteur de Coacher les équipes grâce à la psychologie sociale — partage une vision puissante du collectif, nourrie de psychologie sociale, d’expérience terrain… et d’humanité.

💬 À quoi ressemble une équipe au XXIe siècle ?
À un groupe mouvant, éclaté, souvent désengagé…
Mais aussi à un formidable espace d’expérimentation, à condition de repenser nos manières de faire collectif, de créer du lien, de construire une vision partagée.

💡 Rodéric nous guide à travers :

  • les défis des équipes à géométrie variable et en télétravail

  • le passage d’une collection d’individus à un collectif qui coopère

  • l’importance de conjuguer cohésion humaine et cohésion technique

  • la manière dont les transformations doivent intégrer les processus sociaux, et non seulement les schémas organisationnels

  • et une conviction forte : faire société, ça s’apprend — dans l’entreprise, à l’école, et partout où l’on vit et travaille ensemble

🎯 Pas d’équipe parfaite, mais des équipes fières, alignées et rayonnantes.
Pas de transformation durable sans intelligence collective, écoute active et courage relationnel.

📌 Un épisode pour toutes celles et ceux qui œuvrent à une conduite du changement plus humaine, écrivent de nouveaux récits du travail, et croient que les aventures humaines sont au cœur du futur du travail.


Bibliographie:

Rodéric Maubras : Coacher les équipes avec la Psychologie Sociale

Rodérice Maubras : La boîte à Outils du coaching d'équipe

Olivier Devillard : La dynamique des équipes et l’intelligence collective (2017)



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Générique : Clean Success by Boomer.


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Ce que l'on constate souvent, c'est qu'une équipe excellente a cette capacité de rayonnement sur son écosystème, cette capacité d'inspirer d'autres collectifs dans les organisations.

  • Speaker #1

    Bienvenue sur DinoSapiens, le podcast qui explore la transformation des organisations sans bullshit ni jargon. Je suis Bérangère du cimetière et chaque épisode, je tends le micro à celles et ceux qui, à leur manière, font évoluer nos façons de travailler, de décider, de manager. Parce que transformer, ce n'est pas imposer, c'est comprendre, embarquer, expérimenter. Parce que, dans un monde qui change vite, c'est notre capacité à rester humain qui fera toute la différence. Alors embarquez avec moi sur Dinosapiens et ensemble, évitons l'extinction ! J'ai la très grande joie de recevoir aujourd'hui Roderick Maubras, que j'admire pour une ambition peu commune qu'il incarne, sans grande éloquence, mais plutôt avec simplicité, celle d'apprendre et d'enseigner à mieux faire société. Je l'admire aussi parce qu'il a été mon professeur en coaching d'équipe. Son approche sur le sujet, qui me correspond bien puisqu'elle s'appuie sur les sciences sociales, lui a permis de fonder une école, Team Intelligence, qui forme les coachs à devenir coach d'équipe et d'organisation. Roderick se vouait à devenir économiste. Il en a d'ailleurs suivi le chemin universitaire, mais contre toute attente, il a rejoint le monde des médias et de la tech pour sa première partie de carrière, en commençant par un stage. Il est devenu au fil de douze années directeur du marketing et de la diffusion. Ce parcours lui a permis de vivre d'abord une forte croissance du secteur de la presse informatique, avant de traverser une concentration à l'arrivée d'Internet et la transformation du modèle de la presse écrite. Voir une entreprise en difficulté de l'intérieur n'est pas une expérience simple à vivre, et mais encore moins en tant que manager. Optimisation, rationalisation, restrictions budgétaires, les termes courants qui précèdent souvent à des restructurations, Roderick a été impliqué pendant six ans dans des situations complexes et douloureuses. Il quitte en 2007 son entreprise avec le sixième plan social. Il part pour s'éloigner des logiques centrées uniquement sur les chiffres, l'efficacité, et qui passe complètement à côté de l'aspect humain. Il crée alors sa propre agence de team building, le Good & One Chose, qui propose des cours de cuisine, d'onologie, de dégustation. Ce concept, à l'attention des entreprises qui veulent marquer un temps de pause, un temps de cohésion avec leurs équipes, lui permet de remarquer une chose fondamentale. Le team building, s'il permet de célébrer les équipes qui vont bien, ne résout en revanche pas grand-chose pour les équipes qui vont mal. Roderick Maubras s'intéresse alors au coaching d'équipe. Il se forme. puis monte une autre structure de coaching d'équipe cette fois. Atteint d'une véritable boulimie de coaching d'équipe, Roderick explore les techniques dans tout type d'organisation, de culture, de problématiques. Cela l'amène à reprendre avec enthousiasme le chemin de la fac pour se former en psychologie sociale. Il étudie pendant cinq ans au cours du soir jusqu'à obtenir un master en psychologie sociale. S'ensuit la publication d'un livre, coacher une équipe grâce à la psychologie sociale et la création de l'école Team Intelligence. Il s'agit alors pour Roderick de former des élèves à savoir comment déployer une stratégie de coaching d'équipe efficace qui ne réduise pas la complexité mais aide à mieux l'appréhender, tout en proposant aux équipes des chemins de transformation fonctionnels. Aujourd'hui, avec la création de Team Intelligence, Roderick Maubras transmet sa passion d'un coaching d'équipe s'appuyant sur une démarche analytique et sur les sciences sociales d'une manière générale. Il nous explique aujourd'hui ce que c'est que faire équipe en 2025. Quels sont les enjeux des transformations pour les processus sociaux des équipes ? Il nous partage enfin ses prochaines étapes et sa vision de franchir les murs des organisations pour faire grandir la société dans un projet relationnel commun. Bonjour Roderick.

  • Speaker #0

    Bonjour Bérengère.

  • Speaker #1

    Ravi de t'accueillir aujourd'hui sur l'Univers Sapiens pour parler du coaching d'équipe et parler des équipes et de faire société. Qu'est-ce que ça veut dire faire équipe au XXIe siècle ?

  • Speaker #0

    Ça, c'est une bonne question, Bérangère. Ça pourrait sous-entendre que faire équipe aujourd'hui, c'est différent que de faire équipe hier ou faire équipe au XXe siècle. En effet, je pense qu'on peut constater quelques phénomènes qui font que le collectif, faire collectif aujourd'hui en entreprise, c'est différent. Alors peut-être on peut citer d'abord la question de la volatilité grandissante des effectifs. Les équipes que je rencontre aujourd'hui sont des équipes à effectifs de plus en plus variables. le temps d'un coaching d'équipe, donc trois à six mois, on peut trouver des effectifs dans lesquels on n'a pas les mêmes personnes entre le début et la fin de la mission. Alors certainement plusieurs facteurs expliquent cela. La question peut-être du marché de l'emploi plus ouvert aujourd'hui, la question des jeunes générations qui finalement s'autorisent peut-être plus facilement à passer d'une entreprise à l'autre par rapport à leurs aînés. également peut-être la digitalisation du marché de l'emploi qui rend plus facile finalement ces mouvements, et puis un certain nombre de bouleversements économiques dans un certain nombre de secteurs qui créent beaucoup de réorganisations, qui créent beaucoup de chamboulements en termes d'effectifs. Donc premier phénomène, la volatilité grandissante des effectifs qui modifie quand même la configuration d'une équipe au XXIe siècle. Deuxième phénomène, la dispersion des effectifs, c'est-à-dire que depuis le Covid, on a vu se multiplier les accords de télétravail. se multipliaient les projets de flex office. Et de fait, les équipes sont de moins en moins réunies dans l'espace de travail que constituait le bureau avant. Donc on se retrouve face à des équipes qui ne se rencontrent plus jamais en globalité au bureau. Je caricature un petit peu, mais on assiste quand même à une difficulté pour un certain nombre de chefs d'équipe de réunir ensemble toutes leurs équipes parce qu'on a toujours une partie d'équipe en télétravail. Donc deuxième facteur qui... contribue à reconfigurer l'équipe au XXIe siècle, le fait de ne pas avoir tout le temps l'effectif sur site, au même endroit, en même temps. Et ça crée effectivement plein de nouvelles difficultés, en termes de cohésion on peut s'en douter. Et puis, troisième facteur, la perte du sentiment d'appartenance du commun. Je constate, au travers des missions que je peux réaliser aujourd'hui, c'est D'avoir des équipes qui, finalement, ne se retrouvent plus spontanément autour de l'appartenance au projet d'équipe et de manière plus globale au projet d'entreprise. C'est de plus en plus difficile pour les dirigeants et pour les managers de vendre, entre guillemets, un projet d'appartenance, d'un projet d'entreprise. On assiste quand même beaucoup à une forme de repli sur soi généralisé, alors qu'il est certainement lié à un contexte global un peu plus anxiogène. Donc ces événements successifs, peut-être on peut les qualifier, le Covid, l'incertitude géopolitique, l'instabilité politique nationale, même récemment, de manière générale l'insécurité économique, peuvent contribuer à ce que les membres d'une équipe, et nous tous d'ailleurs je dirais spontanément, pensions avant tout à nous-mêmes, avant de penser à un projet d'équipe, à un projet de collectif. Et cette reconfiguration de la vision des uns et des autres pèse sur la capacité à faire collectif. Donc troisième phénomène qui contribue à faire que les équipes aujourd'hui sont différentes, Je trouve, c'est cette difficulté à créer un sens collectif, un sens commun, autour d'un projet qui fédérait l'ensemble des membres d'une équipe.

  • Speaker #1

    C'est un peu comme une crise permanente, où il y a des gens qui partent, qui viennent, un contact incertain, on se replie sur soi-même plutôt que sur le groupe ?

  • Speaker #0

    Exactement, et d'ailleurs ce concept de crise permanente devient de plus en plus à la mode, c'est-à-dire qu'on finit par tous normaliser. le fait d'être dans un changement perpétuel avec devant nous des événements potentiellement difficiles à vivre. Mais finalement, ça devient notre nouvelle norme.

  • Speaker #1

    Dans ce contexte incertain, comment est-ce qu'on passe, selon toi, d'une collection d'individus qui est centrée vers son propre intérêt, vers une équipe ?

  • Speaker #0

    C'est une vaste question qui occupe les coachs d'équipe depuis que ce métier existe. Il y a de nouveaux enjeux à travailler avec les équipes aujourd'hui. liés à ces nouveaux phénomènes. Et en effet, il est de plus en plus difficile actuellement de créer ce collectif et de partir de ces individus qui chacun composent une équipe avec leur diversité de parcours, leur diversité de personnalité, leur diversité d'ambition, et qui viennent finalement rejoindre un projet d'entreprise, mais avant tout, je dirais, qui viennent exercer un métier, qui ont signé un contrat de travail. On se retrouve donc avec une difficulté qui est de faire passer ces individus, de chacun pour soi, l'un à côté de l'autre, si possible dans le même bureau, mais comme on disait tout à l'heure, ce n'est pas toujours le cas, à la capacité de fonctionner ensemble, de se projeter ensemble, de créer une ambition commune. Comment on fait pour ça ? Eh bien, il y a plusieurs manières de travailler avec un collectif. D'abord, on va faire en sorte que les individus apprennent à se connaître. Ensuite, on va espérer qu'ils puissent également avoir l'opportunité de s'accepter. dans leur diversité, dans leur richesse. On va les aider à apprendre à réguler leurs différends, leurs désaccords de manière pacifique, plutôt que d'attendre que les conflits sont venus et ne dégénèrent. On va leur insuffler des mécanismes de coopération et d'entraide pour qu'ils aient spontanément l'envie d'aller se mettre aussi au service des autres et ne pas que cultiver leur propre sillon. Et on peut également leur... proposer des mécanismes pour optimiser l'action collective, donc ça passe par la réorganisation des équipes, un travail peut-être de clarification de qui fait quoi dans le collectif, un travail sur les canaux de communication pour les rendre peut-être plus opérationnels, plus simples à utiliser, et qu'il n'y ait pas d'utilisation anarchique des différents canaux à disposition de l'équipe. Et puis enfin, on va essayer de se mettre tous ensemble autour de la table pour se dire c'est quoi notre projet commun, c'est quoi notre projet d'équipe. Et plus on va réussir à faire en sorte que le projet soit quelque chose qui soit co-imaginé, co-porté par le collectif, plus on va avoir d'élan de l'individu vers le collectif. La grande erreur que l'on constate encore souvent aujourd'hui de la part d'un certain nombre de managers, c'est de vouloir imposer une vision collective, imposer une ambition de groupe, sans prendre la peine d'essayer d'y réfléchir avec le collectif. Les études en psychosocial ont montré notamment, plein de choses, mais notamment que plus l'individu se voit imposer une vision, moins il a tendance à la suivre. Je renvoie aux travaux de Kurt Lewin sur l'engagement, mais aussi de nombreux autres auteurs sur la théorie de l'engagement, comment on fait pour qu'un individu ait envie de s'engager dans un groupe, eh bien, on le responsabilise, on lui donne la possibilité de donner son avis et de co-créer, de se projeter avec les autres et de co-porter finalement une vision. Donc, tout ça... permet effectivement de passer d'un individu à un collectif.

  • Speaker #1

    Roderick, est-ce qu'il existe une équipe parfaite ?

  • Speaker #0

    On aimerait beaucoup imaginer, rêver, on rêve de l'équipe parfaite, mais pas plus qu'il n'existe d'individu parfait, il n'existe de collectif parfait. Alors qu'on peut toutefois tendre vers une forme d'excellence collective, ça c'est une ambition qu'il est possible de poser avec les équipes. Alors l'excellence collective, elle pourrait se caractériser de la manière suivante, chacun se sent à sa place dans l'équipe sans empiéter sur la place des autres. Chacun accepte et respecte ses collègues, aussi différents et variés soient-ils, finalement. Chacun sait exprimer ses désaccords, posément, et se sent autorisé à proposer de nouvelles idées. Également, dans ces collectifs où l'on peut trouver de l'excellence à plusieurs, chacun accepte les critiques sans en faire une remise en question personnelle, donc il y a une facilité de régulation assez spontanée. Ce sont également des équipes dans lesquelles la coopération a pris une dimension systématique, c'est-à-dire qu'on s'intéresse... presque avant tout aux problématiques des autres avant de s'intéresser aux siennes. En tout cas, je dirais qu'à même niveau, on peut trouver effectivement un intérêt pour les problèmes des autres et ses propres problèmes. Et donc le collectif est capable de traiter l'adversité avec beaucoup d'agilité, on le termine à la mode, mais c'est vrai qu'on va trouver ça dans ces collectifs excellents. L'excellence collective, c'est aussi une capacité à optimiser l'organisation du travail. Il y a très peu de déperdition d'énergie et de temps dans des équipes qui parviennent à cette forme d'excellence collective, parce que L'information circule de manière très fluide, les rôles sont très clairs, les processus de décision le sont tout autant, etc. L'équipe est également habitée par une vision très positive d'elle-même. Ça, c'est quelque chose qui caractérise aussi l'excellence collective, c'est que le collectif est convaincu de sa propre puissance et des ressources qu'il est capable de générer. Donc, il y a quelque chose d'assez magique, quelque part, dans ces collectifs qui ont atteint une forme d'excellence, c'est que l'excellence, quelque part, permet de faire perdurer l'excellence. Il y a une forme de vision de soi qui consolide. les acquis de manière assez spontanée. Et puis, ce que l'on constate souvent, c'est qu'une équipe excellente a cette capacité de rayonnement sur son écosystème, cette capacité d'inspirer d'autres collectifs dans les organisations. Alors, elle peut aussi créer des envieux, il ne faut pas se leurrer, mais c'est vrai qu'on a souvent des équipes qui créent une forme d'inspiration pour les autres. Donc, on a tout intérêt, non pas à rêver de l'équipe parfaite, mais à construire de l'excellence collective.

  • Speaker #1

    Donc, en fait, ce que tu décris, une équipe parfaite, c'est une équipe qui a un processus social qui fonctionne bien.

  • Speaker #0

    Oui, un processus social, mais aussi un processus technique. Je renvoie aux travaux d'Olivier Devillard sur la cohésion humaine et la cohésion technique. Pour rappel, la cohésion humaine, c'est ce qu'on appelle les processus subjectifs, c'est la qualité du lien qu'on va trouver dans une équipe. Et la cohésion technique renvoie au processus objectif, c'est-à-dire la qualité de l'organisation, du travail de l'équipe. Et donc... Ce que l'on peut constater dans un certain nombre d'organisations et dans un certain nombre d'équipes, c'est qu'il est plus spontanément facile de s'intéresser au processus technique qu'au processus socio, c'est-à-dire qu'au lien social dans l'équipe. Or, tout changement réussi passe par un travail sur ces deux aspects. Il est impossible d'avoir un collectif qui se projette mieux dans un travail ensemble si on ne s'intéresse pas à la manière dont les changements, les bouleversements vont impacter les relations entre les individus.

  • Speaker #1

    Trop de technique et ça devient vide, et trop d'humains et c'est cafouilleux.

  • Speaker #0

    Oui, c'est peut-être une bonne manière de résumer les choses. Trop de technique et on passe à côté de ce qui va permettre à une équipe de fonctionner efficacement en pleine tempête. Parce que s'il n'y a pas d'intérêt pour l'autre, s'il n'y a pas eu de construction de lien, spontanément, il y aura moins d'entraide dans le collectif. Et trop d'humains, alors est-ce qu'on peut être dans trop d'humains ? Oui, c'est vrai. Il y a une dynamique caractéristique de certaines équipes, que j'appelle la démixture affective, qui caractérise des collectifs dans lesquels la qualité du lien prédomine sur la qualité du travail. Et ce sont des bandes avant d'être des collègues. Ce sont souvent des gens qui se voient en dehors du travail, etc. Effectivement, dans ce type d'équipe, il peut y avoir des difficultés spécifiques, comme l'intégration de nouveaux membres qui ne font pas partie de la bande. mais aussi le départ de certains membres qui vont conduire les autres à avoir une difficulté de deuil parce qu'on perd presque un membre de son corps quand on perd un membre de l'équipe tellement on est en fusion relationnelle.

  • Speaker #1

    On arrive sur la partie transformation. Une transformation dans une organisation ne doit-elle pas porter cet impératif de processus social ?

  • Speaker #0

    Oui, en tout cas, c'est ma conviction liée à ce que je peux constater dans les accompagnements que je peux réaliser. Dans un certain nombre de situations, les réorganisations oublient de prendre en considération cet impératif de lien social. Deux raisons qui me paraissent fondamentales. d'évoquer, c'est que d'abord, en premier lieu, la réorganisation spontanément comporte une forte dimension technique, c'est-à-dire qu'on va y mettre des enjeux de répartition fonctionnelle, des enjeux de processus techniques, des enjeux de réagencement des moyens. Évidemment que tout ceci est absolument nécessaire, mais il faut également prendre en compte les impacts sur les individus qui composent ces réorganisations et qui vont les traverser. Et il y a une dimension tout aussi inévitable des réorganisations qui consiste à traiter l'évolution des relations, l'évolution des jalousies, les bouleversements de perspectives et d'ambitions individuelles que les réorganisations vont imposer et qui vont souvent de pair si elles ne sont pas traitées avec une explosion des craintes et des résistances. Et souvent, les coachs d'équipe et les coachs d'organisation sont appelés justement parce que les dirigeants, les managers se trouvent démunis par rapport à cette puissance de la résistance des groupes. qui souvent est liée à une non prise en compte de ce que ces transformations techniques, ces transformations de moyens ont généré sur les aspirations, les craintes et les trajectoires des individus. Et si on ne traite pas ça, nécessairement les relations dans les collectifs se dégradent. Donc c'est un premier point important, effectivement, sur la nécessité de prendre en compte le maillage relationnel de l'équipe et les aspirations des individus. Et sans doute une deuxième raison qui devrait conduire les organisations à penser le lien social dans les réorganisations sont liées à la manière dont la valeur travail va évoluer dans les décennies et certainement dans les siècles à venir, oserais-je dire. En tout cas, dans les décennies, on pressent que... l'essor de l'intelligence artificielle, l'arrivée des nouvelles générations au travail vont complètement bouleverser ce rapport au travail et aussi la fonction du travail dans la vie des individus. Et on peut s'interroger, alors là je vais peut-être un petit peu, j'extrapole un petit peu sur la manière dont les organisations vont devoir devenir aussi finalement peut-être pas seulement des acteurs de production de biens et services, mais aussi des espaces de développement. du lien et des espaces de développement de l'individu au travail, avec certainement une remise en question de ce que c'est que la valeur du travail portée par l'individu. Parce qu'il y aura d'autres entités, on pourrait dire, pour porter cette valeur.

  • Speaker #1

    Est-ce qu'on peut dire que dans une organisation et dans une organisation en transformation, une équipe, c'est une micro-société ?

  • Speaker #0

    Oui, moi je suis convaincu de cela. C'est une nécessité que de considérer qu'une équipe est une micro-société. Alors, parlons déjà du temps que l'on y passe dans une équipe. et c'est ce n'est pas la moitié de notre vie, mais quasi, quelque part. On pourrait considérer que finalement, le travail n'est que le travail et que chaque individu qui signe un contrat vient chercher un salaire en essence de sa valeur travail, quelque part dans une vision un peu Karl Marx. Moi, je crois que notre responsabilité, et je dis notre en tant qu'individu, membre d'équipe, manager, dirigeant, coach d'équipe, coach d'organisation, on a tous quelque part cette responsabilité de considérer l'équipe comme une micro-société. Ça veut dire aussi, lui, porter des ambitions à la fois d'optimisation des fonctionnalités collectives, d'optimisation technique, mais aussi d'optimisation humaine. Et ça veut dire quoi ? Ça veut dire qu'en effet, dans une micro-société fonctionnelle, le respect de l'autre est important, la place de chacun est importante, la considération des ambitions de chacun est importante, à condition qu'elle n'empiète pas sur les ambitions des autres. Il y a tout un aspect de travailler ensemble qui certes est fondamental, mais le vivre ensemble est tout aussi fondamental, et spécifiquement quand on s'intéresse à des réorganisations. Il n'y a pas de réorganisation réussie sans une capacité des entreprises à s'intéresser à la question du vivre ensemble avant la réorganisation. Qu'est-ce que c'était pendant la réorganisation ? Qu'est-ce que ça va être après la réorganisation ? Qu'est-ce que ça va devenir ?

  • Speaker #1

    Et à ce titre, qu'est-ce que c'est pour toi que faire société ? Donc, dans notre société qui est en... perpétuelle réorganisation et avec beaucoup d'incertitudes. Quel regard portes-tu sur notre capacité à faire société actuellement ?

  • Speaker #0

    On est dans un contexte international très particulier où finalement, le paradigme qui est en train de s'installer, c'est le dirigeant providentiel plus que jamais, qui décide de manière autocratique et autoritaire de ce qui est bon et de ce qui est mal, de ce qui est bien et de ce qui est mauvais. On a une sorte de vision un peu manichéenne du monde qui est en train de s'installer et qui est... pour moi, très préoccupante, et qui va induire quoi sur les sociétés qui le subissent ? Eh bien, du repli sur soi, du rejet de l'autre, la stigmatisation de tout ce qui est différent, le besoin de dominer l'autre pour exister. Donc, je dirais que tout ceci nous donne quelque part, par le contraire, l'indication vers quoi il faut tendre pour que l'on puisse créer des sociétés fonctionnelles. Donc, qui dit protectionniste, dit considérer l'autre non plus comme une menace, mais peut-être comme une ressource, comme un facteur de richesse, si on prend le contre-pied. Qui dit repli sur soi, dit m'intéresser à plutôt une action collective qu'à mes propres enjeux individuels. Et qui dit stigmatisation, dit, si on prend le contre-pied de cela, aller vers la diversité, considérer qu'il y a de la place pour chacun dans une société.

  • Speaker #1

    Est-ce que ça a un rapport avec le fait que faire société, ça ne se décrète pas ? C'est pas parce qu'on est en démocratie qu'on est capable de faire société, et que faire société, ça se réfléchit au niveau collectif, mais aussi individuel ?

  • Speaker #0

    Oui, je suis assez convaincu de ça. Je pense que faire société, ça ne se décrète pas, mais ça s'apprend. Spontanément, nous ne sommes pas outillés pour savoir faire équipe, et quelque part, faire équipe ou faire société, en tout cas la manière dont je le conçois. Ce que peut devenir une équipe, pour moi, c'est un petit peu pareil. C'est-à-dire, à quel moment je m'inscris dans un projet collectif, à quel moment je fais ma part, à quel moment j'y trouve une forme d'épanouissement individuel et je contribue en même temps à une certaine forme d'épanouissement collectif.

  • Speaker #1

    Alors, le lien naturel de cette question, c'est qu'aujourd'hui, tu t'engages au-delà de ton équipe team intelligence, tu cherches à dépasser les murs de l'entreprise et tu apportes ton savoir-faire et tes techniques à d'autres endroits de la société. qui sont absolument clés pour notre capacité en tant qu'être humain à faire société plus tard. Tu peux nous en dire plus ?

  • Speaker #0

    Oui, avec plaisir. En effet, mon ambition aujourd'hui, elle est plus portée sur d'autres secteurs, d'autres domaines, d'autres mondes que celui de l'entreprise. Mais ça part quand même d'un constat, alors je vais y revenir après, mais peut-être quand même dire que ce monde de l'entreprise qui souvent est un petit peu décrié, critiqué pour ses logiques justement d'ultra-performance, d'individualisme. ces logiques très centrées sur l'économique. Il faut quand même dire aujourd'hui que c'est un terrain d'expérimentation extraordinaire pour le travail collectif. Et s'il y a un endroit où il s'est développé cette discipline que je pratique, qui est le coaching d'équipe, c'est bien l'entreprise. Donc c'est un endroit où, quelque part, on a fait évoluer cette capacité de faire monter en épanouissement, monter en performance des collectifs et donc monter en excellence, quelque part. On pourrait presque dire que l'entreprise est un territoire qui a permis de faire évoluer ce que ça pouvait être que faire des sociétés fonctionnelles, des micro-sociétés fonctionnelles. Et c'est pour ça que cette idée d'exporter ces savoirs vivre et ces savoirs être collectifs de l'entreprise vers d'autres domaines, je trouve ça assez important aujourd'hui. Et donc ça prend une forme assez concrète aujourd'hui, puisque je suis en train de développer avec des personnes qui travaillent à l'éducation nationale. une association qui s'appelle Faire équipe à l'école, dont l'objectif est d'aller permettre à tous ces individus qui composent le monde de l'éducation, donc les élèves, les professeurs, tout le personnel qui peut travailler dans les établissements, les directeurs d'établissements, mais aussi finalement les inspecteurs, toutes ces strates finalement qui composent ce monde de l'éducation, qui accompagnent nos enfants pour devenir des citoyens, et de doter en fait tous ces individus d'outils complémentaires pour... apprendre à fonctionner ensemble, apprendre à travailler ensemble, apprendre à vivre ensemble, et de s'apercevoir que finalement, c'est là que ça commence. Et si on veut, derrière, que les individus apprennent à faire société, à faire équipe, faut-il encore qu'ils apprennent à le faire. Donc c'est cette ambition que je porte actuellement à travers l'association Faire équipe à l'école.

  • Speaker #1

    Pour finir, Roderick, on arrive à la fin de cet épisode. Quels sont tes conseils pour trouver ses marques et faire société dans une équipe ?

  • Speaker #0

    Je dirais en premier lieu considérer l'autre comme une richesse et non comme une menace. Ça pourrait être un premier prérequis. Donc autoriser l'autre à être aussi différent, soit-il quelqu'un de fréquentable. Et cette question d'autorisation, elle est importante parce que spontanément, la psychologie sociale nous raconte que nous sommes pétris de préjugés et de stéréotypes et que si nous n'y prenons garde, lorsque nous rentrons dans un nouveau collectif, nous avons tendance à créer une sorte de prédéfinition de qui est qui. Et cette tendance que nous avons peut spontanément nous mettre à distance de... différences qui sont autant de richesses. Et donc, je dirais avoir cette capacité, développer cette capacité, parce que c'est une compétence, c'est un savoir-faire, d'aller spontanément s'intéresser à ceux qui composent le collectif, au-delà des préjugés que je peux avoir au début. On s'aperçoit que plus les gens se rencontrent, c'est ce qui s'appelle l'hypothèse de contact en psychologie sociale, et plus les stéréotypes mutuels diminuent. Donc c'est vraiment un prérequis indispensable. Ne pas hésiter, je dirais également, à parler, exprimer ses forces, exprimer ses faiblesses et les mettre finalement comme quelque chose de précieux pour le groupe. Savoir qui je suis, savoir là où je suis bon, savoir là où je suis moins bon, ce sont des informations absolument précieuses pour le collectif. Si tout le monde est capable de faire ça, on a les prérequis de la coopération. Et puis, j'ai envie de dire peut-être pour terminer, y croire souvent dans des collectifs fatigués que je rencontre. C'est l'espoir qu'il manque, c'est l'espoir en la capacité du groupe à changer son histoire. Bien souvent, il y a comme une forme de renoncement collectif. On a tout essayé, si on avait pu changer quelque chose, ça se saurait, etc. Et en réalité, je m'aperçois qu'au-delà de tous les outils que l'on peut donner à un collectif pour aller mieux, qu'est-ce qui va... déclencher un renouveau, une renaissance, c'est la petite étincelle d'espoir que l'on est capable de réactiver dans l'esprit des membres de l'équipe. Donc y croire, et y croire encore, et y croire de nouveau, et y croire différemment.

  • Speaker #1

    On va terminer là-dessus sur ce message d'espoir et d'y croire. Un grand merci Roderick d'être venu au micro de Dino Sapiens pour nous parler des équipes et du coaching d'équipe.

  • Speaker #0

    Merci à toi, merci Bérangère, et à très bientôt.

  • Speaker #1

    Merci à Roderick Maubras pour cet échange éclairant sur ce que signifie faire équipe aujourd'hui. Dans un monde mouvant, fragmenté, où l'individualisme prend souvent le dessus, Roderick nous rappelle une évidence trop souvent oubliée, c'est qu'on ne fait pas société sans l'autre. Pas d'équipe sans lien, pas de transformation sans écoute, pas de collectif sans apprentissage. Il n'existe pas d'équipe parfaite, dit-il, mais des équipes optimisées, fières d'elles-mêmes, capables de rayonner bien au-delà de leurs frontières. Des équipes ? qui apprennent à coopérer plutôt qu'à s'aligner de force, à accueillir les différences plutôt qu'à les neutraliser. Alors si vous aussi, vous croyez qu'il est temps de repenser nos façons de travailler ensemble, de construire un avenir qui réconcilie performance et humanité, cet épisode est pour vous. Et si vous voulez creuser, je vous mets dans les notes du podcast les références vers les deux ouvrages de Roderick et les références qu'il partage comme celles d'Olivier de Villars. Merci pour votre écoute et à très bientôt pour un nouvel épisode de DinoSapiens. Et d'ici là, évitons l'extinction !

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  • l’importance de conjuguer cohésion humaine et cohésion technique

  • la manière dont les transformations doivent intégrer les processus sociaux, et non seulement les schémas organisationnels

  • et une conviction forte : faire société, ça s’apprend — dans l’entreprise, à l’école, et partout où l’on vit et travaille ensemble

🎯 Pas d’équipe parfaite, mais des équipes fières, alignées et rayonnantes.
Pas de transformation durable sans intelligence collective, écoute active et courage relationnel.

📌 Un épisode pour toutes celles et ceux qui œuvrent à une conduite du changement plus humaine, écrivent de nouveaux récits du travail, et croient que les aventures humaines sont au cœur du futur du travail.


Bibliographie:

Rodéric Maubras : Coacher les équipes avec la Psychologie Sociale

Rodérice Maubras : La boîte à Outils du coaching d'équipe

Olivier Devillard : La dynamique des équipes et l’intelligence collective (2017)



🎧 À écouter sur votre plateforme d'écoute préférée (et si vous pensez à laisser une revue sur Apple Podcast, et des étoiles... merci merci!)


#DinoSapiens #FaireÉquipe #CoachingDEquipe #TransformationDesOrganisations
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#NouveauxRécits #AventuresHumaines #VisionPartagée #LeadershipÉthique
#TeamIntelligence #ProcessusSocial #FaireSociété #Leadership


Générique : Clean Success by Boomer.


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Ce que l'on constate souvent, c'est qu'une équipe excellente a cette capacité de rayonnement sur son écosystème, cette capacité d'inspirer d'autres collectifs dans les organisations.

  • Speaker #1

    Bienvenue sur DinoSapiens, le podcast qui explore la transformation des organisations sans bullshit ni jargon. Je suis Bérangère du cimetière et chaque épisode, je tends le micro à celles et ceux qui, à leur manière, font évoluer nos façons de travailler, de décider, de manager. Parce que transformer, ce n'est pas imposer, c'est comprendre, embarquer, expérimenter. Parce que, dans un monde qui change vite, c'est notre capacité à rester humain qui fera toute la différence. Alors embarquez avec moi sur Dinosapiens et ensemble, évitons l'extinction ! J'ai la très grande joie de recevoir aujourd'hui Roderick Maubras, que j'admire pour une ambition peu commune qu'il incarne, sans grande éloquence, mais plutôt avec simplicité, celle d'apprendre et d'enseigner à mieux faire société. Je l'admire aussi parce qu'il a été mon professeur en coaching d'équipe. Son approche sur le sujet, qui me correspond bien puisqu'elle s'appuie sur les sciences sociales, lui a permis de fonder une école, Team Intelligence, qui forme les coachs à devenir coach d'équipe et d'organisation. Roderick se vouait à devenir économiste. Il en a d'ailleurs suivi le chemin universitaire, mais contre toute attente, il a rejoint le monde des médias et de la tech pour sa première partie de carrière, en commençant par un stage. Il est devenu au fil de douze années directeur du marketing et de la diffusion. Ce parcours lui a permis de vivre d'abord une forte croissance du secteur de la presse informatique, avant de traverser une concentration à l'arrivée d'Internet et la transformation du modèle de la presse écrite. Voir une entreprise en difficulté de l'intérieur n'est pas une expérience simple à vivre, et mais encore moins en tant que manager. Optimisation, rationalisation, restrictions budgétaires, les termes courants qui précèdent souvent à des restructurations, Roderick a été impliqué pendant six ans dans des situations complexes et douloureuses. Il quitte en 2007 son entreprise avec le sixième plan social. Il part pour s'éloigner des logiques centrées uniquement sur les chiffres, l'efficacité, et qui passe complètement à côté de l'aspect humain. Il crée alors sa propre agence de team building, le Good & One Chose, qui propose des cours de cuisine, d'onologie, de dégustation. Ce concept, à l'attention des entreprises qui veulent marquer un temps de pause, un temps de cohésion avec leurs équipes, lui permet de remarquer une chose fondamentale. Le team building, s'il permet de célébrer les équipes qui vont bien, ne résout en revanche pas grand-chose pour les équipes qui vont mal. Roderick Maubras s'intéresse alors au coaching d'équipe. Il se forme. puis monte une autre structure de coaching d'équipe cette fois. Atteint d'une véritable boulimie de coaching d'équipe, Roderick explore les techniques dans tout type d'organisation, de culture, de problématiques. Cela l'amène à reprendre avec enthousiasme le chemin de la fac pour se former en psychologie sociale. Il étudie pendant cinq ans au cours du soir jusqu'à obtenir un master en psychologie sociale. S'ensuit la publication d'un livre, coacher une équipe grâce à la psychologie sociale et la création de l'école Team Intelligence. Il s'agit alors pour Roderick de former des élèves à savoir comment déployer une stratégie de coaching d'équipe efficace qui ne réduise pas la complexité mais aide à mieux l'appréhender, tout en proposant aux équipes des chemins de transformation fonctionnels. Aujourd'hui, avec la création de Team Intelligence, Roderick Maubras transmet sa passion d'un coaching d'équipe s'appuyant sur une démarche analytique et sur les sciences sociales d'une manière générale. Il nous explique aujourd'hui ce que c'est que faire équipe en 2025. Quels sont les enjeux des transformations pour les processus sociaux des équipes ? Il nous partage enfin ses prochaines étapes et sa vision de franchir les murs des organisations pour faire grandir la société dans un projet relationnel commun. Bonjour Roderick.

  • Speaker #0

    Bonjour Bérengère.

  • Speaker #1

    Ravi de t'accueillir aujourd'hui sur l'Univers Sapiens pour parler du coaching d'équipe et parler des équipes et de faire société. Qu'est-ce que ça veut dire faire équipe au XXIe siècle ?

  • Speaker #0

    Ça, c'est une bonne question, Bérangère. Ça pourrait sous-entendre que faire équipe aujourd'hui, c'est différent que de faire équipe hier ou faire équipe au XXe siècle. En effet, je pense qu'on peut constater quelques phénomènes qui font que le collectif, faire collectif aujourd'hui en entreprise, c'est différent. Alors peut-être on peut citer d'abord la question de la volatilité grandissante des effectifs. Les équipes que je rencontre aujourd'hui sont des équipes à effectifs de plus en plus variables. le temps d'un coaching d'équipe, donc trois à six mois, on peut trouver des effectifs dans lesquels on n'a pas les mêmes personnes entre le début et la fin de la mission. Alors certainement plusieurs facteurs expliquent cela. La question peut-être du marché de l'emploi plus ouvert aujourd'hui, la question des jeunes générations qui finalement s'autorisent peut-être plus facilement à passer d'une entreprise à l'autre par rapport à leurs aînés. également peut-être la digitalisation du marché de l'emploi qui rend plus facile finalement ces mouvements, et puis un certain nombre de bouleversements économiques dans un certain nombre de secteurs qui créent beaucoup de réorganisations, qui créent beaucoup de chamboulements en termes d'effectifs. Donc premier phénomène, la volatilité grandissante des effectifs qui modifie quand même la configuration d'une équipe au XXIe siècle. Deuxième phénomène, la dispersion des effectifs, c'est-à-dire que depuis le Covid, on a vu se multiplier les accords de télétravail. se multipliaient les projets de flex office. Et de fait, les équipes sont de moins en moins réunies dans l'espace de travail que constituait le bureau avant. Donc on se retrouve face à des équipes qui ne se rencontrent plus jamais en globalité au bureau. Je caricature un petit peu, mais on assiste quand même à une difficulté pour un certain nombre de chefs d'équipe de réunir ensemble toutes leurs équipes parce qu'on a toujours une partie d'équipe en télétravail. Donc deuxième facteur qui... contribue à reconfigurer l'équipe au XXIe siècle, le fait de ne pas avoir tout le temps l'effectif sur site, au même endroit, en même temps. Et ça crée effectivement plein de nouvelles difficultés, en termes de cohésion on peut s'en douter. Et puis, troisième facteur, la perte du sentiment d'appartenance du commun. Je constate, au travers des missions que je peux réaliser aujourd'hui, c'est D'avoir des équipes qui, finalement, ne se retrouvent plus spontanément autour de l'appartenance au projet d'équipe et de manière plus globale au projet d'entreprise. C'est de plus en plus difficile pour les dirigeants et pour les managers de vendre, entre guillemets, un projet d'appartenance, d'un projet d'entreprise. On assiste quand même beaucoup à une forme de repli sur soi généralisé, alors qu'il est certainement lié à un contexte global un peu plus anxiogène. Donc ces événements successifs, peut-être on peut les qualifier, le Covid, l'incertitude géopolitique, l'instabilité politique nationale, même récemment, de manière générale l'insécurité économique, peuvent contribuer à ce que les membres d'une équipe, et nous tous d'ailleurs je dirais spontanément, pensions avant tout à nous-mêmes, avant de penser à un projet d'équipe, à un projet de collectif. Et cette reconfiguration de la vision des uns et des autres pèse sur la capacité à faire collectif. Donc troisième phénomène qui contribue à faire que les équipes aujourd'hui sont différentes, Je trouve, c'est cette difficulté à créer un sens collectif, un sens commun, autour d'un projet qui fédérait l'ensemble des membres d'une équipe.

  • Speaker #1

    C'est un peu comme une crise permanente, où il y a des gens qui partent, qui viennent, un contact incertain, on se replie sur soi-même plutôt que sur le groupe ?

  • Speaker #0

    Exactement, et d'ailleurs ce concept de crise permanente devient de plus en plus à la mode, c'est-à-dire qu'on finit par tous normaliser. le fait d'être dans un changement perpétuel avec devant nous des événements potentiellement difficiles à vivre. Mais finalement, ça devient notre nouvelle norme.

  • Speaker #1

    Dans ce contexte incertain, comment est-ce qu'on passe, selon toi, d'une collection d'individus qui est centrée vers son propre intérêt, vers une équipe ?

  • Speaker #0

    C'est une vaste question qui occupe les coachs d'équipe depuis que ce métier existe. Il y a de nouveaux enjeux à travailler avec les équipes aujourd'hui. liés à ces nouveaux phénomènes. Et en effet, il est de plus en plus difficile actuellement de créer ce collectif et de partir de ces individus qui chacun composent une équipe avec leur diversité de parcours, leur diversité de personnalité, leur diversité d'ambition, et qui viennent finalement rejoindre un projet d'entreprise, mais avant tout, je dirais, qui viennent exercer un métier, qui ont signé un contrat de travail. On se retrouve donc avec une difficulté qui est de faire passer ces individus, de chacun pour soi, l'un à côté de l'autre, si possible dans le même bureau, mais comme on disait tout à l'heure, ce n'est pas toujours le cas, à la capacité de fonctionner ensemble, de se projeter ensemble, de créer une ambition commune. Comment on fait pour ça ? Eh bien, il y a plusieurs manières de travailler avec un collectif. D'abord, on va faire en sorte que les individus apprennent à se connaître. Ensuite, on va espérer qu'ils puissent également avoir l'opportunité de s'accepter. dans leur diversité, dans leur richesse. On va les aider à apprendre à réguler leurs différends, leurs désaccords de manière pacifique, plutôt que d'attendre que les conflits sont venus et ne dégénèrent. On va leur insuffler des mécanismes de coopération et d'entraide pour qu'ils aient spontanément l'envie d'aller se mettre aussi au service des autres et ne pas que cultiver leur propre sillon. Et on peut également leur... proposer des mécanismes pour optimiser l'action collective, donc ça passe par la réorganisation des équipes, un travail peut-être de clarification de qui fait quoi dans le collectif, un travail sur les canaux de communication pour les rendre peut-être plus opérationnels, plus simples à utiliser, et qu'il n'y ait pas d'utilisation anarchique des différents canaux à disposition de l'équipe. Et puis enfin, on va essayer de se mettre tous ensemble autour de la table pour se dire c'est quoi notre projet commun, c'est quoi notre projet d'équipe. Et plus on va réussir à faire en sorte que le projet soit quelque chose qui soit co-imaginé, co-porté par le collectif, plus on va avoir d'élan de l'individu vers le collectif. La grande erreur que l'on constate encore souvent aujourd'hui de la part d'un certain nombre de managers, c'est de vouloir imposer une vision collective, imposer une ambition de groupe, sans prendre la peine d'essayer d'y réfléchir avec le collectif. Les études en psychosocial ont montré notamment, plein de choses, mais notamment que plus l'individu se voit imposer une vision, moins il a tendance à la suivre. Je renvoie aux travaux de Kurt Lewin sur l'engagement, mais aussi de nombreux autres auteurs sur la théorie de l'engagement, comment on fait pour qu'un individu ait envie de s'engager dans un groupe, eh bien, on le responsabilise, on lui donne la possibilité de donner son avis et de co-créer, de se projeter avec les autres et de co-porter finalement une vision. Donc, tout ça... permet effectivement de passer d'un individu à un collectif.

  • Speaker #1

    Roderick, est-ce qu'il existe une équipe parfaite ?

  • Speaker #0

    On aimerait beaucoup imaginer, rêver, on rêve de l'équipe parfaite, mais pas plus qu'il n'existe d'individu parfait, il n'existe de collectif parfait. Alors qu'on peut toutefois tendre vers une forme d'excellence collective, ça c'est une ambition qu'il est possible de poser avec les équipes. Alors l'excellence collective, elle pourrait se caractériser de la manière suivante, chacun se sent à sa place dans l'équipe sans empiéter sur la place des autres. Chacun accepte et respecte ses collègues, aussi différents et variés soient-ils, finalement. Chacun sait exprimer ses désaccords, posément, et se sent autorisé à proposer de nouvelles idées. Également, dans ces collectifs où l'on peut trouver de l'excellence à plusieurs, chacun accepte les critiques sans en faire une remise en question personnelle, donc il y a une facilité de régulation assez spontanée. Ce sont également des équipes dans lesquelles la coopération a pris une dimension systématique, c'est-à-dire qu'on s'intéresse... presque avant tout aux problématiques des autres avant de s'intéresser aux siennes. En tout cas, je dirais qu'à même niveau, on peut trouver effectivement un intérêt pour les problèmes des autres et ses propres problèmes. Et donc le collectif est capable de traiter l'adversité avec beaucoup d'agilité, on le termine à la mode, mais c'est vrai qu'on va trouver ça dans ces collectifs excellents. L'excellence collective, c'est aussi une capacité à optimiser l'organisation du travail. Il y a très peu de déperdition d'énergie et de temps dans des équipes qui parviennent à cette forme d'excellence collective, parce que L'information circule de manière très fluide, les rôles sont très clairs, les processus de décision le sont tout autant, etc. L'équipe est également habitée par une vision très positive d'elle-même. Ça, c'est quelque chose qui caractérise aussi l'excellence collective, c'est que le collectif est convaincu de sa propre puissance et des ressources qu'il est capable de générer. Donc, il y a quelque chose d'assez magique, quelque part, dans ces collectifs qui ont atteint une forme d'excellence, c'est que l'excellence, quelque part, permet de faire perdurer l'excellence. Il y a une forme de vision de soi qui consolide. les acquis de manière assez spontanée. Et puis, ce que l'on constate souvent, c'est qu'une équipe excellente a cette capacité de rayonnement sur son écosystème, cette capacité d'inspirer d'autres collectifs dans les organisations. Alors, elle peut aussi créer des envieux, il ne faut pas se leurrer, mais c'est vrai qu'on a souvent des équipes qui créent une forme d'inspiration pour les autres. Donc, on a tout intérêt, non pas à rêver de l'équipe parfaite, mais à construire de l'excellence collective.

  • Speaker #1

    Donc, en fait, ce que tu décris, une équipe parfaite, c'est une équipe qui a un processus social qui fonctionne bien.

  • Speaker #0

    Oui, un processus social, mais aussi un processus technique. Je renvoie aux travaux d'Olivier Devillard sur la cohésion humaine et la cohésion technique. Pour rappel, la cohésion humaine, c'est ce qu'on appelle les processus subjectifs, c'est la qualité du lien qu'on va trouver dans une équipe. Et la cohésion technique renvoie au processus objectif, c'est-à-dire la qualité de l'organisation, du travail de l'équipe. Et donc... Ce que l'on peut constater dans un certain nombre d'organisations et dans un certain nombre d'équipes, c'est qu'il est plus spontanément facile de s'intéresser au processus technique qu'au processus socio, c'est-à-dire qu'au lien social dans l'équipe. Or, tout changement réussi passe par un travail sur ces deux aspects. Il est impossible d'avoir un collectif qui se projette mieux dans un travail ensemble si on ne s'intéresse pas à la manière dont les changements, les bouleversements vont impacter les relations entre les individus.

  • Speaker #1

    Trop de technique et ça devient vide, et trop d'humains et c'est cafouilleux.

  • Speaker #0

    Oui, c'est peut-être une bonne manière de résumer les choses. Trop de technique et on passe à côté de ce qui va permettre à une équipe de fonctionner efficacement en pleine tempête. Parce que s'il n'y a pas d'intérêt pour l'autre, s'il n'y a pas eu de construction de lien, spontanément, il y aura moins d'entraide dans le collectif. Et trop d'humains, alors est-ce qu'on peut être dans trop d'humains ? Oui, c'est vrai. Il y a une dynamique caractéristique de certaines équipes, que j'appelle la démixture affective, qui caractérise des collectifs dans lesquels la qualité du lien prédomine sur la qualité du travail. Et ce sont des bandes avant d'être des collègues. Ce sont souvent des gens qui se voient en dehors du travail, etc. Effectivement, dans ce type d'équipe, il peut y avoir des difficultés spécifiques, comme l'intégration de nouveaux membres qui ne font pas partie de la bande. mais aussi le départ de certains membres qui vont conduire les autres à avoir une difficulté de deuil parce qu'on perd presque un membre de son corps quand on perd un membre de l'équipe tellement on est en fusion relationnelle.

  • Speaker #1

    On arrive sur la partie transformation. Une transformation dans une organisation ne doit-elle pas porter cet impératif de processus social ?

  • Speaker #0

    Oui, en tout cas, c'est ma conviction liée à ce que je peux constater dans les accompagnements que je peux réaliser. Dans un certain nombre de situations, les réorganisations oublient de prendre en considération cet impératif de lien social. Deux raisons qui me paraissent fondamentales. d'évoquer, c'est que d'abord, en premier lieu, la réorganisation spontanément comporte une forte dimension technique, c'est-à-dire qu'on va y mettre des enjeux de répartition fonctionnelle, des enjeux de processus techniques, des enjeux de réagencement des moyens. Évidemment que tout ceci est absolument nécessaire, mais il faut également prendre en compte les impacts sur les individus qui composent ces réorganisations et qui vont les traverser. Et il y a une dimension tout aussi inévitable des réorganisations qui consiste à traiter l'évolution des relations, l'évolution des jalousies, les bouleversements de perspectives et d'ambitions individuelles que les réorganisations vont imposer et qui vont souvent de pair si elles ne sont pas traitées avec une explosion des craintes et des résistances. Et souvent, les coachs d'équipe et les coachs d'organisation sont appelés justement parce que les dirigeants, les managers se trouvent démunis par rapport à cette puissance de la résistance des groupes. qui souvent est liée à une non prise en compte de ce que ces transformations techniques, ces transformations de moyens ont généré sur les aspirations, les craintes et les trajectoires des individus. Et si on ne traite pas ça, nécessairement les relations dans les collectifs se dégradent. Donc c'est un premier point important, effectivement, sur la nécessité de prendre en compte le maillage relationnel de l'équipe et les aspirations des individus. Et sans doute une deuxième raison qui devrait conduire les organisations à penser le lien social dans les réorganisations sont liées à la manière dont la valeur travail va évoluer dans les décennies et certainement dans les siècles à venir, oserais-je dire. En tout cas, dans les décennies, on pressent que... l'essor de l'intelligence artificielle, l'arrivée des nouvelles générations au travail vont complètement bouleverser ce rapport au travail et aussi la fonction du travail dans la vie des individus. Et on peut s'interroger, alors là je vais peut-être un petit peu, j'extrapole un petit peu sur la manière dont les organisations vont devoir devenir aussi finalement peut-être pas seulement des acteurs de production de biens et services, mais aussi des espaces de développement. du lien et des espaces de développement de l'individu au travail, avec certainement une remise en question de ce que c'est que la valeur du travail portée par l'individu. Parce qu'il y aura d'autres entités, on pourrait dire, pour porter cette valeur.

  • Speaker #1

    Est-ce qu'on peut dire que dans une organisation et dans une organisation en transformation, une équipe, c'est une micro-société ?

  • Speaker #0

    Oui, moi je suis convaincu de cela. C'est une nécessité que de considérer qu'une équipe est une micro-société. Alors, parlons déjà du temps que l'on y passe dans une équipe. et c'est ce n'est pas la moitié de notre vie, mais quasi, quelque part. On pourrait considérer que finalement, le travail n'est que le travail et que chaque individu qui signe un contrat vient chercher un salaire en essence de sa valeur travail, quelque part dans une vision un peu Karl Marx. Moi, je crois que notre responsabilité, et je dis notre en tant qu'individu, membre d'équipe, manager, dirigeant, coach d'équipe, coach d'organisation, on a tous quelque part cette responsabilité de considérer l'équipe comme une micro-société. Ça veut dire aussi, lui, porter des ambitions à la fois d'optimisation des fonctionnalités collectives, d'optimisation technique, mais aussi d'optimisation humaine. Et ça veut dire quoi ? Ça veut dire qu'en effet, dans une micro-société fonctionnelle, le respect de l'autre est important, la place de chacun est importante, la considération des ambitions de chacun est importante, à condition qu'elle n'empiète pas sur les ambitions des autres. Il y a tout un aspect de travailler ensemble qui certes est fondamental, mais le vivre ensemble est tout aussi fondamental, et spécifiquement quand on s'intéresse à des réorganisations. Il n'y a pas de réorganisation réussie sans une capacité des entreprises à s'intéresser à la question du vivre ensemble avant la réorganisation. Qu'est-ce que c'était pendant la réorganisation ? Qu'est-ce que ça va être après la réorganisation ? Qu'est-ce que ça va devenir ?

  • Speaker #1

    Et à ce titre, qu'est-ce que c'est pour toi que faire société ? Donc, dans notre société qui est en... perpétuelle réorganisation et avec beaucoup d'incertitudes. Quel regard portes-tu sur notre capacité à faire société actuellement ?

  • Speaker #0

    On est dans un contexte international très particulier où finalement, le paradigme qui est en train de s'installer, c'est le dirigeant providentiel plus que jamais, qui décide de manière autocratique et autoritaire de ce qui est bon et de ce qui est mal, de ce qui est bien et de ce qui est mauvais. On a une sorte de vision un peu manichéenne du monde qui est en train de s'installer et qui est... pour moi, très préoccupante, et qui va induire quoi sur les sociétés qui le subissent ? Eh bien, du repli sur soi, du rejet de l'autre, la stigmatisation de tout ce qui est différent, le besoin de dominer l'autre pour exister. Donc, je dirais que tout ceci nous donne quelque part, par le contraire, l'indication vers quoi il faut tendre pour que l'on puisse créer des sociétés fonctionnelles. Donc, qui dit protectionniste, dit considérer l'autre non plus comme une menace, mais peut-être comme une ressource, comme un facteur de richesse, si on prend le contre-pied. Qui dit repli sur soi, dit m'intéresser à plutôt une action collective qu'à mes propres enjeux individuels. Et qui dit stigmatisation, dit, si on prend le contre-pied de cela, aller vers la diversité, considérer qu'il y a de la place pour chacun dans une société.

  • Speaker #1

    Est-ce que ça a un rapport avec le fait que faire société, ça ne se décrète pas ? C'est pas parce qu'on est en démocratie qu'on est capable de faire société, et que faire société, ça se réfléchit au niveau collectif, mais aussi individuel ?

  • Speaker #0

    Oui, je suis assez convaincu de ça. Je pense que faire société, ça ne se décrète pas, mais ça s'apprend. Spontanément, nous ne sommes pas outillés pour savoir faire équipe, et quelque part, faire équipe ou faire société, en tout cas la manière dont je le conçois. Ce que peut devenir une équipe, pour moi, c'est un petit peu pareil. C'est-à-dire, à quel moment je m'inscris dans un projet collectif, à quel moment je fais ma part, à quel moment j'y trouve une forme d'épanouissement individuel et je contribue en même temps à une certaine forme d'épanouissement collectif.

  • Speaker #1

    Alors, le lien naturel de cette question, c'est qu'aujourd'hui, tu t'engages au-delà de ton équipe team intelligence, tu cherches à dépasser les murs de l'entreprise et tu apportes ton savoir-faire et tes techniques à d'autres endroits de la société. qui sont absolument clés pour notre capacité en tant qu'être humain à faire société plus tard. Tu peux nous en dire plus ?

  • Speaker #0

    Oui, avec plaisir. En effet, mon ambition aujourd'hui, elle est plus portée sur d'autres secteurs, d'autres domaines, d'autres mondes que celui de l'entreprise. Mais ça part quand même d'un constat, alors je vais y revenir après, mais peut-être quand même dire que ce monde de l'entreprise qui souvent est un petit peu décrié, critiqué pour ses logiques justement d'ultra-performance, d'individualisme. ces logiques très centrées sur l'économique. Il faut quand même dire aujourd'hui que c'est un terrain d'expérimentation extraordinaire pour le travail collectif. Et s'il y a un endroit où il s'est développé cette discipline que je pratique, qui est le coaching d'équipe, c'est bien l'entreprise. Donc c'est un endroit où, quelque part, on a fait évoluer cette capacité de faire monter en épanouissement, monter en performance des collectifs et donc monter en excellence, quelque part. On pourrait presque dire que l'entreprise est un territoire qui a permis de faire évoluer ce que ça pouvait être que faire des sociétés fonctionnelles, des micro-sociétés fonctionnelles. Et c'est pour ça que cette idée d'exporter ces savoirs vivre et ces savoirs être collectifs de l'entreprise vers d'autres domaines, je trouve ça assez important aujourd'hui. Et donc ça prend une forme assez concrète aujourd'hui, puisque je suis en train de développer avec des personnes qui travaillent à l'éducation nationale. une association qui s'appelle Faire équipe à l'école, dont l'objectif est d'aller permettre à tous ces individus qui composent le monde de l'éducation, donc les élèves, les professeurs, tout le personnel qui peut travailler dans les établissements, les directeurs d'établissements, mais aussi finalement les inspecteurs, toutes ces strates finalement qui composent ce monde de l'éducation, qui accompagnent nos enfants pour devenir des citoyens, et de doter en fait tous ces individus d'outils complémentaires pour... apprendre à fonctionner ensemble, apprendre à travailler ensemble, apprendre à vivre ensemble, et de s'apercevoir que finalement, c'est là que ça commence. Et si on veut, derrière, que les individus apprennent à faire société, à faire équipe, faut-il encore qu'ils apprennent à le faire. Donc c'est cette ambition que je porte actuellement à travers l'association Faire équipe à l'école.

  • Speaker #1

    Pour finir, Roderick, on arrive à la fin de cet épisode. Quels sont tes conseils pour trouver ses marques et faire société dans une équipe ?

  • Speaker #0

    Je dirais en premier lieu considérer l'autre comme une richesse et non comme une menace. Ça pourrait être un premier prérequis. Donc autoriser l'autre à être aussi différent, soit-il quelqu'un de fréquentable. Et cette question d'autorisation, elle est importante parce que spontanément, la psychologie sociale nous raconte que nous sommes pétris de préjugés et de stéréotypes et que si nous n'y prenons garde, lorsque nous rentrons dans un nouveau collectif, nous avons tendance à créer une sorte de prédéfinition de qui est qui. Et cette tendance que nous avons peut spontanément nous mettre à distance de... différences qui sont autant de richesses. Et donc, je dirais avoir cette capacité, développer cette capacité, parce que c'est une compétence, c'est un savoir-faire, d'aller spontanément s'intéresser à ceux qui composent le collectif, au-delà des préjugés que je peux avoir au début. On s'aperçoit que plus les gens se rencontrent, c'est ce qui s'appelle l'hypothèse de contact en psychologie sociale, et plus les stéréotypes mutuels diminuent. Donc c'est vraiment un prérequis indispensable. Ne pas hésiter, je dirais également, à parler, exprimer ses forces, exprimer ses faiblesses et les mettre finalement comme quelque chose de précieux pour le groupe. Savoir qui je suis, savoir là où je suis bon, savoir là où je suis moins bon, ce sont des informations absolument précieuses pour le collectif. Si tout le monde est capable de faire ça, on a les prérequis de la coopération. Et puis, j'ai envie de dire peut-être pour terminer, y croire souvent dans des collectifs fatigués que je rencontre. C'est l'espoir qu'il manque, c'est l'espoir en la capacité du groupe à changer son histoire. Bien souvent, il y a comme une forme de renoncement collectif. On a tout essayé, si on avait pu changer quelque chose, ça se saurait, etc. Et en réalité, je m'aperçois qu'au-delà de tous les outils que l'on peut donner à un collectif pour aller mieux, qu'est-ce qui va... déclencher un renouveau, une renaissance, c'est la petite étincelle d'espoir que l'on est capable de réactiver dans l'esprit des membres de l'équipe. Donc y croire, et y croire encore, et y croire de nouveau, et y croire différemment.

  • Speaker #1

    On va terminer là-dessus sur ce message d'espoir et d'y croire. Un grand merci Roderick d'être venu au micro de Dino Sapiens pour nous parler des équipes et du coaching d'équipe.

  • Speaker #0

    Merci à toi, merci Bérangère, et à très bientôt.

  • Speaker #1

    Merci à Roderick Maubras pour cet échange éclairant sur ce que signifie faire équipe aujourd'hui. Dans un monde mouvant, fragmenté, où l'individualisme prend souvent le dessus, Roderick nous rappelle une évidence trop souvent oubliée, c'est qu'on ne fait pas société sans l'autre. Pas d'équipe sans lien, pas de transformation sans écoute, pas de collectif sans apprentissage. Il n'existe pas d'équipe parfaite, dit-il, mais des équipes optimisées, fières d'elles-mêmes, capables de rayonner bien au-delà de leurs frontières. Des équipes ? qui apprennent à coopérer plutôt qu'à s'aligner de force, à accueillir les différences plutôt qu'à les neutraliser. Alors si vous aussi, vous croyez qu'il est temps de repenser nos façons de travailler ensemble, de construire un avenir qui réconcilie performance et humanité, cet épisode est pour vous. Et si vous voulez creuser, je vous mets dans les notes du podcast les références vers les deux ouvrages de Roderick et les références qu'il partage comme celles d'Olivier de Villars. Merci pour votre écoute et à très bientôt pour un nouvel épisode de DinoSapiens. Et d'ici là, évitons l'extinction !

Description

🎙️ Épisode 32 – Rodéric Maubras : Faire équipe, faire société

Et si apprendre à faire équipe était aujourd’hui une compétence aussi essentielle que la stratégie ou la gestion du temps ?

Dans cet épisode de Dino Sapiens, Rodéric Maubras — coach d’équipe, fondateur de l’école Team Intelligence et auteur de Coacher les équipes grâce à la psychologie sociale — partage une vision puissante du collectif, nourrie de psychologie sociale, d’expérience terrain… et d’humanité.

💬 À quoi ressemble une équipe au XXIe siècle ?
À un groupe mouvant, éclaté, souvent désengagé…
Mais aussi à un formidable espace d’expérimentation, à condition de repenser nos manières de faire collectif, de créer du lien, de construire une vision partagée.

💡 Rodéric nous guide à travers :

  • les défis des équipes à géométrie variable et en télétravail

  • le passage d’une collection d’individus à un collectif qui coopère

  • l’importance de conjuguer cohésion humaine et cohésion technique

  • la manière dont les transformations doivent intégrer les processus sociaux, et non seulement les schémas organisationnels

  • et une conviction forte : faire société, ça s’apprend — dans l’entreprise, à l’école, et partout où l’on vit et travaille ensemble

🎯 Pas d’équipe parfaite, mais des équipes fières, alignées et rayonnantes.
Pas de transformation durable sans intelligence collective, écoute active et courage relationnel.

📌 Un épisode pour toutes celles et ceux qui œuvrent à une conduite du changement plus humaine, écrivent de nouveaux récits du travail, et croient que les aventures humaines sont au cœur du futur du travail.


Bibliographie:

Rodéric Maubras : Coacher les équipes avec la Psychologie Sociale

Rodérice Maubras : La boîte à Outils du coaching d'équipe

Olivier Devillard : La dynamique des équipes et l’intelligence collective (2017)



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#DinoSapiens #FaireÉquipe #CoachingDEquipe #TransformationDesOrganisations
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Générique : Clean Success by Boomer.


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Transcription

  • Speaker #0

    Ce que l'on constate souvent, c'est qu'une équipe excellente a cette capacité de rayonnement sur son écosystème, cette capacité d'inspirer d'autres collectifs dans les organisations.

  • Speaker #1

    Bienvenue sur DinoSapiens, le podcast qui explore la transformation des organisations sans bullshit ni jargon. Je suis Bérangère du cimetière et chaque épisode, je tends le micro à celles et ceux qui, à leur manière, font évoluer nos façons de travailler, de décider, de manager. Parce que transformer, ce n'est pas imposer, c'est comprendre, embarquer, expérimenter. Parce que, dans un monde qui change vite, c'est notre capacité à rester humain qui fera toute la différence. Alors embarquez avec moi sur Dinosapiens et ensemble, évitons l'extinction ! J'ai la très grande joie de recevoir aujourd'hui Roderick Maubras, que j'admire pour une ambition peu commune qu'il incarne, sans grande éloquence, mais plutôt avec simplicité, celle d'apprendre et d'enseigner à mieux faire société. Je l'admire aussi parce qu'il a été mon professeur en coaching d'équipe. Son approche sur le sujet, qui me correspond bien puisqu'elle s'appuie sur les sciences sociales, lui a permis de fonder une école, Team Intelligence, qui forme les coachs à devenir coach d'équipe et d'organisation. Roderick se vouait à devenir économiste. Il en a d'ailleurs suivi le chemin universitaire, mais contre toute attente, il a rejoint le monde des médias et de la tech pour sa première partie de carrière, en commençant par un stage. Il est devenu au fil de douze années directeur du marketing et de la diffusion. Ce parcours lui a permis de vivre d'abord une forte croissance du secteur de la presse informatique, avant de traverser une concentration à l'arrivée d'Internet et la transformation du modèle de la presse écrite. Voir une entreprise en difficulté de l'intérieur n'est pas une expérience simple à vivre, et mais encore moins en tant que manager. Optimisation, rationalisation, restrictions budgétaires, les termes courants qui précèdent souvent à des restructurations, Roderick a été impliqué pendant six ans dans des situations complexes et douloureuses. Il quitte en 2007 son entreprise avec le sixième plan social. Il part pour s'éloigner des logiques centrées uniquement sur les chiffres, l'efficacité, et qui passe complètement à côté de l'aspect humain. Il crée alors sa propre agence de team building, le Good & One Chose, qui propose des cours de cuisine, d'onologie, de dégustation. Ce concept, à l'attention des entreprises qui veulent marquer un temps de pause, un temps de cohésion avec leurs équipes, lui permet de remarquer une chose fondamentale. Le team building, s'il permet de célébrer les équipes qui vont bien, ne résout en revanche pas grand-chose pour les équipes qui vont mal. Roderick Maubras s'intéresse alors au coaching d'équipe. Il se forme. puis monte une autre structure de coaching d'équipe cette fois. Atteint d'une véritable boulimie de coaching d'équipe, Roderick explore les techniques dans tout type d'organisation, de culture, de problématiques. Cela l'amène à reprendre avec enthousiasme le chemin de la fac pour se former en psychologie sociale. Il étudie pendant cinq ans au cours du soir jusqu'à obtenir un master en psychologie sociale. S'ensuit la publication d'un livre, coacher une équipe grâce à la psychologie sociale et la création de l'école Team Intelligence. Il s'agit alors pour Roderick de former des élèves à savoir comment déployer une stratégie de coaching d'équipe efficace qui ne réduise pas la complexité mais aide à mieux l'appréhender, tout en proposant aux équipes des chemins de transformation fonctionnels. Aujourd'hui, avec la création de Team Intelligence, Roderick Maubras transmet sa passion d'un coaching d'équipe s'appuyant sur une démarche analytique et sur les sciences sociales d'une manière générale. Il nous explique aujourd'hui ce que c'est que faire équipe en 2025. Quels sont les enjeux des transformations pour les processus sociaux des équipes ? Il nous partage enfin ses prochaines étapes et sa vision de franchir les murs des organisations pour faire grandir la société dans un projet relationnel commun. Bonjour Roderick.

  • Speaker #0

    Bonjour Bérengère.

  • Speaker #1

    Ravi de t'accueillir aujourd'hui sur l'Univers Sapiens pour parler du coaching d'équipe et parler des équipes et de faire société. Qu'est-ce que ça veut dire faire équipe au XXIe siècle ?

  • Speaker #0

    Ça, c'est une bonne question, Bérangère. Ça pourrait sous-entendre que faire équipe aujourd'hui, c'est différent que de faire équipe hier ou faire équipe au XXe siècle. En effet, je pense qu'on peut constater quelques phénomènes qui font que le collectif, faire collectif aujourd'hui en entreprise, c'est différent. Alors peut-être on peut citer d'abord la question de la volatilité grandissante des effectifs. Les équipes que je rencontre aujourd'hui sont des équipes à effectifs de plus en plus variables. le temps d'un coaching d'équipe, donc trois à six mois, on peut trouver des effectifs dans lesquels on n'a pas les mêmes personnes entre le début et la fin de la mission. Alors certainement plusieurs facteurs expliquent cela. La question peut-être du marché de l'emploi plus ouvert aujourd'hui, la question des jeunes générations qui finalement s'autorisent peut-être plus facilement à passer d'une entreprise à l'autre par rapport à leurs aînés. également peut-être la digitalisation du marché de l'emploi qui rend plus facile finalement ces mouvements, et puis un certain nombre de bouleversements économiques dans un certain nombre de secteurs qui créent beaucoup de réorganisations, qui créent beaucoup de chamboulements en termes d'effectifs. Donc premier phénomène, la volatilité grandissante des effectifs qui modifie quand même la configuration d'une équipe au XXIe siècle. Deuxième phénomène, la dispersion des effectifs, c'est-à-dire que depuis le Covid, on a vu se multiplier les accords de télétravail. se multipliaient les projets de flex office. Et de fait, les équipes sont de moins en moins réunies dans l'espace de travail que constituait le bureau avant. Donc on se retrouve face à des équipes qui ne se rencontrent plus jamais en globalité au bureau. Je caricature un petit peu, mais on assiste quand même à une difficulté pour un certain nombre de chefs d'équipe de réunir ensemble toutes leurs équipes parce qu'on a toujours une partie d'équipe en télétravail. Donc deuxième facteur qui... contribue à reconfigurer l'équipe au XXIe siècle, le fait de ne pas avoir tout le temps l'effectif sur site, au même endroit, en même temps. Et ça crée effectivement plein de nouvelles difficultés, en termes de cohésion on peut s'en douter. Et puis, troisième facteur, la perte du sentiment d'appartenance du commun. Je constate, au travers des missions que je peux réaliser aujourd'hui, c'est D'avoir des équipes qui, finalement, ne se retrouvent plus spontanément autour de l'appartenance au projet d'équipe et de manière plus globale au projet d'entreprise. C'est de plus en plus difficile pour les dirigeants et pour les managers de vendre, entre guillemets, un projet d'appartenance, d'un projet d'entreprise. On assiste quand même beaucoup à une forme de repli sur soi généralisé, alors qu'il est certainement lié à un contexte global un peu plus anxiogène. Donc ces événements successifs, peut-être on peut les qualifier, le Covid, l'incertitude géopolitique, l'instabilité politique nationale, même récemment, de manière générale l'insécurité économique, peuvent contribuer à ce que les membres d'une équipe, et nous tous d'ailleurs je dirais spontanément, pensions avant tout à nous-mêmes, avant de penser à un projet d'équipe, à un projet de collectif. Et cette reconfiguration de la vision des uns et des autres pèse sur la capacité à faire collectif. Donc troisième phénomène qui contribue à faire que les équipes aujourd'hui sont différentes, Je trouve, c'est cette difficulté à créer un sens collectif, un sens commun, autour d'un projet qui fédérait l'ensemble des membres d'une équipe.

  • Speaker #1

    C'est un peu comme une crise permanente, où il y a des gens qui partent, qui viennent, un contact incertain, on se replie sur soi-même plutôt que sur le groupe ?

  • Speaker #0

    Exactement, et d'ailleurs ce concept de crise permanente devient de plus en plus à la mode, c'est-à-dire qu'on finit par tous normaliser. le fait d'être dans un changement perpétuel avec devant nous des événements potentiellement difficiles à vivre. Mais finalement, ça devient notre nouvelle norme.

  • Speaker #1

    Dans ce contexte incertain, comment est-ce qu'on passe, selon toi, d'une collection d'individus qui est centrée vers son propre intérêt, vers une équipe ?

  • Speaker #0

    C'est une vaste question qui occupe les coachs d'équipe depuis que ce métier existe. Il y a de nouveaux enjeux à travailler avec les équipes aujourd'hui. liés à ces nouveaux phénomènes. Et en effet, il est de plus en plus difficile actuellement de créer ce collectif et de partir de ces individus qui chacun composent une équipe avec leur diversité de parcours, leur diversité de personnalité, leur diversité d'ambition, et qui viennent finalement rejoindre un projet d'entreprise, mais avant tout, je dirais, qui viennent exercer un métier, qui ont signé un contrat de travail. On se retrouve donc avec une difficulté qui est de faire passer ces individus, de chacun pour soi, l'un à côté de l'autre, si possible dans le même bureau, mais comme on disait tout à l'heure, ce n'est pas toujours le cas, à la capacité de fonctionner ensemble, de se projeter ensemble, de créer une ambition commune. Comment on fait pour ça ? Eh bien, il y a plusieurs manières de travailler avec un collectif. D'abord, on va faire en sorte que les individus apprennent à se connaître. Ensuite, on va espérer qu'ils puissent également avoir l'opportunité de s'accepter. dans leur diversité, dans leur richesse. On va les aider à apprendre à réguler leurs différends, leurs désaccords de manière pacifique, plutôt que d'attendre que les conflits sont venus et ne dégénèrent. On va leur insuffler des mécanismes de coopération et d'entraide pour qu'ils aient spontanément l'envie d'aller se mettre aussi au service des autres et ne pas que cultiver leur propre sillon. Et on peut également leur... proposer des mécanismes pour optimiser l'action collective, donc ça passe par la réorganisation des équipes, un travail peut-être de clarification de qui fait quoi dans le collectif, un travail sur les canaux de communication pour les rendre peut-être plus opérationnels, plus simples à utiliser, et qu'il n'y ait pas d'utilisation anarchique des différents canaux à disposition de l'équipe. Et puis enfin, on va essayer de se mettre tous ensemble autour de la table pour se dire c'est quoi notre projet commun, c'est quoi notre projet d'équipe. Et plus on va réussir à faire en sorte que le projet soit quelque chose qui soit co-imaginé, co-porté par le collectif, plus on va avoir d'élan de l'individu vers le collectif. La grande erreur que l'on constate encore souvent aujourd'hui de la part d'un certain nombre de managers, c'est de vouloir imposer une vision collective, imposer une ambition de groupe, sans prendre la peine d'essayer d'y réfléchir avec le collectif. Les études en psychosocial ont montré notamment, plein de choses, mais notamment que plus l'individu se voit imposer une vision, moins il a tendance à la suivre. Je renvoie aux travaux de Kurt Lewin sur l'engagement, mais aussi de nombreux autres auteurs sur la théorie de l'engagement, comment on fait pour qu'un individu ait envie de s'engager dans un groupe, eh bien, on le responsabilise, on lui donne la possibilité de donner son avis et de co-créer, de se projeter avec les autres et de co-porter finalement une vision. Donc, tout ça... permet effectivement de passer d'un individu à un collectif.

  • Speaker #1

    Roderick, est-ce qu'il existe une équipe parfaite ?

  • Speaker #0

    On aimerait beaucoup imaginer, rêver, on rêve de l'équipe parfaite, mais pas plus qu'il n'existe d'individu parfait, il n'existe de collectif parfait. Alors qu'on peut toutefois tendre vers une forme d'excellence collective, ça c'est une ambition qu'il est possible de poser avec les équipes. Alors l'excellence collective, elle pourrait se caractériser de la manière suivante, chacun se sent à sa place dans l'équipe sans empiéter sur la place des autres. Chacun accepte et respecte ses collègues, aussi différents et variés soient-ils, finalement. Chacun sait exprimer ses désaccords, posément, et se sent autorisé à proposer de nouvelles idées. Également, dans ces collectifs où l'on peut trouver de l'excellence à plusieurs, chacun accepte les critiques sans en faire une remise en question personnelle, donc il y a une facilité de régulation assez spontanée. Ce sont également des équipes dans lesquelles la coopération a pris une dimension systématique, c'est-à-dire qu'on s'intéresse... presque avant tout aux problématiques des autres avant de s'intéresser aux siennes. En tout cas, je dirais qu'à même niveau, on peut trouver effectivement un intérêt pour les problèmes des autres et ses propres problèmes. Et donc le collectif est capable de traiter l'adversité avec beaucoup d'agilité, on le termine à la mode, mais c'est vrai qu'on va trouver ça dans ces collectifs excellents. L'excellence collective, c'est aussi une capacité à optimiser l'organisation du travail. Il y a très peu de déperdition d'énergie et de temps dans des équipes qui parviennent à cette forme d'excellence collective, parce que L'information circule de manière très fluide, les rôles sont très clairs, les processus de décision le sont tout autant, etc. L'équipe est également habitée par une vision très positive d'elle-même. Ça, c'est quelque chose qui caractérise aussi l'excellence collective, c'est que le collectif est convaincu de sa propre puissance et des ressources qu'il est capable de générer. Donc, il y a quelque chose d'assez magique, quelque part, dans ces collectifs qui ont atteint une forme d'excellence, c'est que l'excellence, quelque part, permet de faire perdurer l'excellence. Il y a une forme de vision de soi qui consolide. les acquis de manière assez spontanée. Et puis, ce que l'on constate souvent, c'est qu'une équipe excellente a cette capacité de rayonnement sur son écosystème, cette capacité d'inspirer d'autres collectifs dans les organisations. Alors, elle peut aussi créer des envieux, il ne faut pas se leurrer, mais c'est vrai qu'on a souvent des équipes qui créent une forme d'inspiration pour les autres. Donc, on a tout intérêt, non pas à rêver de l'équipe parfaite, mais à construire de l'excellence collective.

  • Speaker #1

    Donc, en fait, ce que tu décris, une équipe parfaite, c'est une équipe qui a un processus social qui fonctionne bien.

  • Speaker #0

    Oui, un processus social, mais aussi un processus technique. Je renvoie aux travaux d'Olivier Devillard sur la cohésion humaine et la cohésion technique. Pour rappel, la cohésion humaine, c'est ce qu'on appelle les processus subjectifs, c'est la qualité du lien qu'on va trouver dans une équipe. Et la cohésion technique renvoie au processus objectif, c'est-à-dire la qualité de l'organisation, du travail de l'équipe. Et donc... Ce que l'on peut constater dans un certain nombre d'organisations et dans un certain nombre d'équipes, c'est qu'il est plus spontanément facile de s'intéresser au processus technique qu'au processus socio, c'est-à-dire qu'au lien social dans l'équipe. Or, tout changement réussi passe par un travail sur ces deux aspects. Il est impossible d'avoir un collectif qui se projette mieux dans un travail ensemble si on ne s'intéresse pas à la manière dont les changements, les bouleversements vont impacter les relations entre les individus.

  • Speaker #1

    Trop de technique et ça devient vide, et trop d'humains et c'est cafouilleux.

  • Speaker #0

    Oui, c'est peut-être une bonne manière de résumer les choses. Trop de technique et on passe à côté de ce qui va permettre à une équipe de fonctionner efficacement en pleine tempête. Parce que s'il n'y a pas d'intérêt pour l'autre, s'il n'y a pas eu de construction de lien, spontanément, il y aura moins d'entraide dans le collectif. Et trop d'humains, alors est-ce qu'on peut être dans trop d'humains ? Oui, c'est vrai. Il y a une dynamique caractéristique de certaines équipes, que j'appelle la démixture affective, qui caractérise des collectifs dans lesquels la qualité du lien prédomine sur la qualité du travail. Et ce sont des bandes avant d'être des collègues. Ce sont souvent des gens qui se voient en dehors du travail, etc. Effectivement, dans ce type d'équipe, il peut y avoir des difficultés spécifiques, comme l'intégration de nouveaux membres qui ne font pas partie de la bande. mais aussi le départ de certains membres qui vont conduire les autres à avoir une difficulté de deuil parce qu'on perd presque un membre de son corps quand on perd un membre de l'équipe tellement on est en fusion relationnelle.

  • Speaker #1

    On arrive sur la partie transformation. Une transformation dans une organisation ne doit-elle pas porter cet impératif de processus social ?

  • Speaker #0

    Oui, en tout cas, c'est ma conviction liée à ce que je peux constater dans les accompagnements que je peux réaliser. Dans un certain nombre de situations, les réorganisations oublient de prendre en considération cet impératif de lien social. Deux raisons qui me paraissent fondamentales. d'évoquer, c'est que d'abord, en premier lieu, la réorganisation spontanément comporte une forte dimension technique, c'est-à-dire qu'on va y mettre des enjeux de répartition fonctionnelle, des enjeux de processus techniques, des enjeux de réagencement des moyens. Évidemment que tout ceci est absolument nécessaire, mais il faut également prendre en compte les impacts sur les individus qui composent ces réorganisations et qui vont les traverser. Et il y a une dimension tout aussi inévitable des réorganisations qui consiste à traiter l'évolution des relations, l'évolution des jalousies, les bouleversements de perspectives et d'ambitions individuelles que les réorganisations vont imposer et qui vont souvent de pair si elles ne sont pas traitées avec une explosion des craintes et des résistances. Et souvent, les coachs d'équipe et les coachs d'organisation sont appelés justement parce que les dirigeants, les managers se trouvent démunis par rapport à cette puissance de la résistance des groupes. qui souvent est liée à une non prise en compte de ce que ces transformations techniques, ces transformations de moyens ont généré sur les aspirations, les craintes et les trajectoires des individus. Et si on ne traite pas ça, nécessairement les relations dans les collectifs se dégradent. Donc c'est un premier point important, effectivement, sur la nécessité de prendre en compte le maillage relationnel de l'équipe et les aspirations des individus. Et sans doute une deuxième raison qui devrait conduire les organisations à penser le lien social dans les réorganisations sont liées à la manière dont la valeur travail va évoluer dans les décennies et certainement dans les siècles à venir, oserais-je dire. En tout cas, dans les décennies, on pressent que... l'essor de l'intelligence artificielle, l'arrivée des nouvelles générations au travail vont complètement bouleverser ce rapport au travail et aussi la fonction du travail dans la vie des individus. Et on peut s'interroger, alors là je vais peut-être un petit peu, j'extrapole un petit peu sur la manière dont les organisations vont devoir devenir aussi finalement peut-être pas seulement des acteurs de production de biens et services, mais aussi des espaces de développement. du lien et des espaces de développement de l'individu au travail, avec certainement une remise en question de ce que c'est que la valeur du travail portée par l'individu. Parce qu'il y aura d'autres entités, on pourrait dire, pour porter cette valeur.

  • Speaker #1

    Est-ce qu'on peut dire que dans une organisation et dans une organisation en transformation, une équipe, c'est une micro-société ?

  • Speaker #0

    Oui, moi je suis convaincu de cela. C'est une nécessité que de considérer qu'une équipe est une micro-société. Alors, parlons déjà du temps que l'on y passe dans une équipe. et c'est ce n'est pas la moitié de notre vie, mais quasi, quelque part. On pourrait considérer que finalement, le travail n'est que le travail et que chaque individu qui signe un contrat vient chercher un salaire en essence de sa valeur travail, quelque part dans une vision un peu Karl Marx. Moi, je crois que notre responsabilité, et je dis notre en tant qu'individu, membre d'équipe, manager, dirigeant, coach d'équipe, coach d'organisation, on a tous quelque part cette responsabilité de considérer l'équipe comme une micro-société. Ça veut dire aussi, lui, porter des ambitions à la fois d'optimisation des fonctionnalités collectives, d'optimisation technique, mais aussi d'optimisation humaine. Et ça veut dire quoi ? Ça veut dire qu'en effet, dans une micro-société fonctionnelle, le respect de l'autre est important, la place de chacun est importante, la considération des ambitions de chacun est importante, à condition qu'elle n'empiète pas sur les ambitions des autres. Il y a tout un aspect de travailler ensemble qui certes est fondamental, mais le vivre ensemble est tout aussi fondamental, et spécifiquement quand on s'intéresse à des réorganisations. Il n'y a pas de réorganisation réussie sans une capacité des entreprises à s'intéresser à la question du vivre ensemble avant la réorganisation. Qu'est-ce que c'était pendant la réorganisation ? Qu'est-ce que ça va être après la réorganisation ? Qu'est-ce que ça va devenir ?

  • Speaker #1

    Et à ce titre, qu'est-ce que c'est pour toi que faire société ? Donc, dans notre société qui est en... perpétuelle réorganisation et avec beaucoup d'incertitudes. Quel regard portes-tu sur notre capacité à faire société actuellement ?

  • Speaker #0

    On est dans un contexte international très particulier où finalement, le paradigme qui est en train de s'installer, c'est le dirigeant providentiel plus que jamais, qui décide de manière autocratique et autoritaire de ce qui est bon et de ce qui est mal, de ce qui est bien et de ce qui est mauvais. On a une sorte de vision un peu manichéenne du monde qui est en train de s'installer et qui est... pour moi, très préoccupante, et qui va induire quoi sur les sociétés qui le subissent ? Eh bien, du repli sur soi, du rejet de l'autre, la stigmatisation de tout ce qui est différent, le besoin de dominer l'autre pour exister. Donc, je dirais que tout ceci nous donne quelque part, par le contraire, l'indication vers quoi il faut tendre pour que l'on puisse créer des sociétés fonctionnelles. Donc, qui dit protectionniste, dit considérer l'autre non plus comme une menace, mais peut-être comme une ressource, comme un facteur de richesse, si on prend le contre-pied. Qui dit repli sur soi, dit m'intéresser à plutôt une action collective qu'à mes propres enjeux individuels. Et qui dit stigmatisation, dit, si on prend le contre-pied de cela, aller vers la diversité, considérer qu'il y a de la place pour chacun dans une société.

  • Speaker #1

    Est-ce que ça a un rapport avec le fait que faire société, ça ne se décrète pas ? C'est pas parce qu'on est en démocratie qu'on est capable de faire société, et que faire société, ça se réfléchit au niveau collectif, mais aussi individuel ?

  • Speaker #0

    Oui, je suis assez convaincu de ça. Je pense que faire société, ça ne se décrète pas, mais ça s'apprend. Spontanément, nous ne sommes pas outillés pour savoir faire équipe, et quelque part, faire équipe ou faire société, en tout cas la manière dont je le conçois. Ce que peut devenir une équipe, pour moi, c'est un petit peu pareil. C'est-à-dire, à quel moment je m'inscris dans un projet collectif, à quel moment je fais ma part, à quel moment j'y trouve une forme d'épanouissement individuel et je contribue en même temps à une certaine forme d'épanouissement collectif.

  • Speaker #1

    Alors, le lien naturel de cette question, c'est qu'aujourd'hui, tu t'engages au-delà de ton équipe team intelligence, tu cherches à dépasser les murs de l'entreprise et tu apportes ton savoir-faire et tes techniques à d'autres endroits de la société. qui sont absolument clés pour notre capacité en tant qu'être humain à faire société plus tard. Tu peux nous en dire plus ?

  • Speaker #0

    Oui, avec plaisir. En effet, mon ambition aujourd'hui, elle est plus portée sur d'autres secteurs, d'autres domaines, d'autres mondes que celui de l'entreprise. Mais ça part quand même d'un constat, alors je vais y revenir après, mais peut-être quand même dire que ce monde de l'entreprise qui souvent est un petit peu décrié, critiqué pour ses logiques justement d'ultra-performance, d'individualisme. ces logiques très centrées sur l'économique. Il faut quand même dire aujourd'hui que c'est un terrain d'expérimentation extraordinaire pour le travail collectif. Et s'il y a un endroit où il s'est développé cette discipline que je pratique, qui est le coaching d'équipe, c'est bien l'entreprise. Donc c'est un endroit où, quelque part, on a fait évoluer cette capacité de faire monter en épanouissement, monter en performance des collectifs et donc monter en excellence, quelque part. On pourrait presque dire que l'entreprise est un territoire qui a permis de faire évoluer ce que ça pouvait être que faire des sociétés fonctionnelles, des micro-sociétés fonctionnelles. Et c'est pour ça que cette idée d'exporter ces savoirs vivre et ces savoirs être collectifs de l'entreprise vers d'autres domaines, je trouve ça assez important aujourd'hui. Et donc ça prend une forme assez concrète aujourd'hui, puisque je suis en train de développer avec des personnes qui travaillent à l'éducation nationale. une association qui s'appelle Faire équipe à l'école, dont l'objectif est d'aller permettre à tous ces individus qui composent le monde de l'éducation, donc les élèves, les professeurs, tout le personnel qui peut travailler dans les établissements, les directeurs d'établissements, mais aussi finalement les inspecteurs, toutes ces strates finalement qui composent ce monde de l'éducation, qui accompagnent nos enfants pour devenir des citoyens, et de doter en fait tous ces individus d'outils complémentaires pour... apprendre à fonctionner ensemble, apprendre à travailler ensemble, apprendre à vivre ensemble, et de s'apercevoir que finalement, c'est là que ça commence. Et si on veut, derrière, que les individus apprennent à faire société, à faire équipe, faut-il encore qu'ils apprennent à le faire. Donc c'est cette ambition que je porte actuellement à travers l'association Faire équipe à l'école.

  • Speaker #1

    Pour finir, Roderick, on arrive à la fin de cet épisode. Quels sont tes conseils pour trouver ses marques et faire société dans une équipe ?

  • Speaker #0

    Je dirais en premier lieu considérer l'autre comme une richesse et non comme une menace. Ça pourrait être un premier prérequis. Donc autoriser l'autre à être aussi différent, soit-il quelqu'un de fréquentable. Et cette question d'autorisation, elle est importante parce que spontanément, la psychologie sociale nous raconte que nous sommes pétris de préjugés et de stéréotypes et que si nous n'y prenons garde, lorsque nous rentrons dans un nouveau collectif, nous avons tendance à créer une sorte de prédéfinition de qui est qui. Et cette tendance que nous avons peut spontanément nous mettre à distance de... différences qui sont autant de richesses. Et donc, je dirais avoir cette capacité, développer cette capacité, parce que c'est une compétence, c'est un savoir-faire, d'aller spontanément s'intéresser à ceux qui composent le collectif, au-delà des préjugés que je peux avoir au début. On s'aperçoit que plus les gens se rencontrent, c'est ce qui s'appelle l'hypothèse de contact en psychologie sociale, et plus les stéréotypes mutuels diminuent. Donc c'est vraiment un prérequis indispensable. Ne pas hésiter, je dirais également, à parler, exprimer ses forces, exprimer ses faiblesses et les mettre finalement comme quelque chose de précieux pour le groupe. Savoir qui je suis, savoir là où je suis bon, savoir là où je suis moins bon, ce sont des informations absolument précieuses pour le collectif. Si tout le monde est capable de faire ça, on a les prérequis de la coopération. Et puis, j'ai envie de dire peut-être pour terminer, y croire souvent dans des collectifs fatigués que je rencontre. C'est l'espoir qu'il manque, c'est l'espoir en la capacité du groupe à changer son histoire. Bien souvent, il y a comme une forme de renoncement collectif. On a tout essayé, si on avait pu changer quelque chose, ça se saurait, etc. Et en réalité, je m'aperçois qu'au-delà de tous les outils que l'on peut donner à un collectif pour aller mieux, qu'est-ce qui va... déclencher un renouveau, une renaissance, c'est la petite étincelle d'espoir que l'on est capable de réactiver dans l'esprit des membres de l'équipe. Donc y croire, et y croire encore, et y croire de nouveau, et y croire différemment.

  • Speaker #1

    On va terminer là-dessus sur ce message d'espoir et d'y croire. Un grand merci Roderick d'être venu au micro de Dino Sapiens pour nous parler des équipes et du coaching d'équipe.

  • Speaker #0

    Merci à toi, merci Bérangère, et à très bientôt.

  • Speaker #1

    Merci à Roderick Maubras pour cet échange éclairant sur ce que signifie faire équipe aujourd'hui. Dans un monde mouvant, fragmenté, où l'individualisme prend souvent le dessus, Roderick nous rappelle une évidence trop souvent oubliée, c'est qu'on ne fait pas société sans l'autre. Pas d'équipe sans lien, pas de transformation sans écoute, pas de collectif sans apprentissage. Il n'existe pas d'équipe parfaite, dit-il, mais des équipes optimisées, fières d'elles-mêmes, capables de rayonner bien au-delà de leurs frontières. Des équipes ? qui apprennent à coopérer plutôt qu'à s'aligner de force, à accueillir les différences plutôt qu'à les neutraliser. Alors si vous aussi, vous croyez qu'il est temps de repenser nos façons de travailler ensemble, de construire un avenir qui réconcilie performance et humanité, cet épisode est pour vous. Et si vous voulez creuser, je vous mets dans les notes du podcast les références vers les deux ouvrages de Roderick et les références qu'il partage comme celles d'Olivier de Villars. Merci pour votre écoute et à très bientôt pour un nouvel épisode de DinoSapiens. Et d'ici là, évitons l'extinction !

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