- Speaker #0
Et c'est vrai qu'il y a un déficit de connaissances et de formation des praticiens en santé, les personnes qui soignent pathologies psychologiques ou les mal-aides psychologiques, parce qu'ils ne sont pas au courant de la cause qui provoque les consciences. Ils ont l'impression que c'est un délire alors que c'est parfaitement rationnel. C'est la différence avec justement une psychopathologie qui nous déréalise comme les psychoses. Le délire du patient est totalement en dehors du réel, ça n'est pas un délire d'être écontifiant et de dire que la planète va mal. C'est documenté scientifiquement, donc c'est parfaitement rationnel. Et ceux qui sont irrationnels sont ceux qui sont les climato-sceptiques, qui doutent de ces choses-là qui sont en train d'arriver parce qu'ils ne veulent pas les voir.
- Speaker #1
Bonjour, je m'appelle Amélie et je te propose d'écouter. évidemment le podcast qui te relie aux mille et une facettes de tes écologies. Pour cela, évidemment, je te partage des témoignages de personnes qui ont mis de l'écologie dans leur vie, ainsi que des experts en écologie intérieure et extérieure. Sans oublier mes tips de coach qui vont te permettre d'appréhender ton éco-anxiété ou te donner envie ou la force de créer un projet à impact. Je te partagerai aussi mes propres expériences angoisses. Prise de recul, joie, bonnes nouvelles, questionnements liés à mes écologies. Pour cela, je te donne rendez-vous, surévidemment, tous les mardis, pour des tonnes de minutes de partage. Belle écoute ! Pierre-Éric Sutter est psychothérapeute spécialisé en éco-anxiété. Dans cet épisode, il revient sur son propre parcours d'éco-anxieux et de ce qu'il a découvert et mis en place pour venir en aide à ses patients. Il nous explique que cette peur qui nous paralyse, nous pouvons l'utiliser pour être au contraire mobile, que cette peur est notre alliée car elle nous informe et nous rend résilients. La courbe de l'éco-anxiété, qui connaît trois phases, la descente, le fond et la remontée, ainsi que les termes doxa, vallée de la mort, ou encore les trois mots-clés sens, Engagement et satisfaction n'auront plus aucun secret pour toi à la fin de cet épisode. L'éco-anxiété nous rend plus forts et on peut en faire quelque chose de beau. Soyons des nains perché sur des épaules de géants. Je vous laisse en compagnie de Pierre-Éric. Bonjour Pierre-Éric.
- Speaker #0
Bonjour Amélie.
- Speaker #1
Je suis ravie de vous avoir sur mon podcast. Alors, vous êtes psychologue du travail, philosophe praticien et psychothérapeute spécialisée dans l'éco-anxiété. Et c'est un peu pour cette dernière partie que je vous ai proposé de faire cette interview, parce que c'est un peu, évidemment, le podcast parle beaucoup de ça. Et la première question est, comment vous, vous allez si on vous parle d'écologie ?
- Speaker #0
C'est une très bonne question, parce qu'avant de recevoir des patients écranctieux à partir de 2016-2017, ils sont venus à moi, je n'étais pas du tout au courant du point auquel la planète était affectée par nos activités thermo-industrielles et je n'étais pas du tout écranctieux. Et même si l'écrancticité n'est pas une maladie, elle est transmissible et je suis devenu moi-même écranctieux. Et du coup, j'ai pris conscience en fait, je fais une méta-noïa, une prise de conscience. sur les enjeux et crises environnementales, ce qui fait que je suis moi-même devenu éco-anxieux. J'ai traversé ce que j'appelle la vallée de la mort. Mais heureusement, comme je suis psychothérapeute existentielle, j'ai des outils qui m'ont permis de remonter de la vallée de la mort et d'aller mieux. Je vais plutôt pas mal. Merci Amélie.
- Speaker #1
Ça va mieux, quoi, une fois que vous êtes passé par toutes ces étapes. Et vous l'avez un petit peu dit, mais comment vous vous présenteriez, vous ? Sous le prisme de l'écologie, comment est arrivé votre chemin ? Dès là, dans un premier temps, vous m'avez dit que les personnes étaient venues à vous. Mais vous, comment vous avez pris vraiment cette conscience ? Et qu'après, derrière, dans votre travail, vous avez décidé d'aller aider les éco-anxieux ?
- Speaker #0
En fait, mon parcours, c'est celui que j'ai vu voir après des éco-anxieux, au chevet des éco-anxieux que j'ai soigné, qui souffraient de cette éco-anxiété. Et heureusement qu'on avait un mot pour nommer cette souffrance, qui est les inquiétudes, voire les souffrances au regard de la sensibilité et de la résonance qu'on peut avoir vis-à-vis de la planète, du vent et de tout ce qui fait la nature, finalement. Ce mot des consciences permet effectivement de mettre un mot sur les mots, MAUX, que l'on peut avoir quand on voit la planète abîmée par nos activités thermo-industrielles. Et petit à petit, en accompagnant les éco-anxieux, qui étaient d'abord fortement éprouvés par les informations anxiogènes et les éco-stresseurs que ça provoque, comme je suis psychologue, j'avais des outils qui sont un peu universels, notamment par rapport au stress que peuvent provoquer ces informations anxiogènes. Petit à petit, j'ai forgé une courbe de l'éco-anxiété qui m'a permis de modéliser l'entrée dans l'éco-anxiété, mais aussi sa sortie. Et ce qui m'a permis de comprendre, de fil en aiguille aussi, en m'appuyant sur des travaux de recherche, quels étaient finalement les ressorts de l'éco-anxiété, et notamment comment on pouvait transformer cette énergie négatif qui est l'éco-anxiété au démarrage, en une énergie positive de passage à l'action et d'espérance pour l'humanité. Parce que les éco-anxiés m'ont enseigné qu'il y a beaucoup d'attentes, en s'appuyant bien sûr sur, non pas des croyances, mais des faits scientifiques qui sont documentés par des recherches académiques, que la planète va de plus en plus mal, et que si on ne change pas les choses, notre façon notamment de consommer, d'être au monde dans nos sociétés consuméristes, on risque quand même de menacer l'humanité. Donc il y a ce qu'on appelle chez les psys une angoisse de finitude qui est activée par tout ce processus de conscientisation qui fait qu'on a l'impression qu'on va tous mourir dans un premier temps, et ce qui est vrai d'ailleurs, on va tous mourir. De toute façon, c'est clair, c'est le terme de l'existence. mais pas forcément comme on l'avait imaginé dans les Trente Glorieuses et comme on nous le vend dans nos sociétés magiques consuméristes, enfin magiques avec des guillemets, bien sûr, où tout peut se trouver sur les rayons d'un supermarché, donc le bonheur qu'on achète, ce qui est une belle illusion. Et ce bonheur a une contrepartie qui affecte la planète, et qui peut donc par cruchement affecter la psyché des personnes qui conscientisent les excès du consumérisme.
- Speaker #1
Et donc à ce moment-là, vous vous êtes dit ? parce que j'ai un peu lu votre bouquin « Bien vivre son éco-anxiété, prendre soin de soi en prenant soin du monde » et j'ai vu qu'à un moment donné il y a aussi toute la partie « Trouver le sens » et donc mettre un éco-projet en place et en fin de compte, votre éco-projet ça a été ça, de mettre en place une sorte de spécialisation dans la psychothérapie liée à l'éco-anxiété.
- Speaker #0
Exactement. Oui, c'est bien que vous ayez compris ça. Peu de gens le comprennent et je vous en remercie. En fait, on a tous le pouvoir de retrouver la paix intérieure malgré les menaces qui planent aujourd'hui sur la planète et l'humanité à cause de nos comportements excessifs en matière de consumérisme, notamment, comme je le disais, des activités thermo-industrielles. Et en fait, la meilleure façon de mettre en place un éco-projet, c'est d'abord d'apprendre à se connaître soi-même, finalement, de faire ce que Socrate nous dit depuis 2500 ans, connais-toi toi-même. Cette connaissance-là, elle est hyper importante pour savoir quels sont... les qualités et les limites qu'on a pour pouvoir contribuer à faire en sorte que la planète aille mieux et que nous-mêmes aillons mieux. D'où le sous-titre d'ailleurs de mon ouvrage, « Prendre soin de soi pour prendre soin du monde » . C'est hyper important d'aller chercher en soi la solution et pas à l'extérieur de soi. On trouve la solution au regard de nos points forts et de la connaissance qu'on a de nos limites. Parce que ça ne sert à rien de s'improviser Superman ou Superwoman. alors qu'on n'a pas les qualités pour lutter, par exemple, contre la banquise. Et moi, de fait, humblement, qu'est-ce que je me suis dit ? Où est-ce que je suis le meilleur ? Dans mon métier, en fait, de psychothérapeute, de psychologue. Et je me suis dit, comment je peux aider les gens et qu'on a su aller mieux ? Justement, leur aidant à trouver la paix intérieure pour pouvoir, parce qu'il faut d'abord réguler les émotions négatives avant de se lancer dans l'action, mais pour pouvoir, ça c'est la recherche qui nous le dit, et puis la pratique aussi, le psychothérapeute qui nous le dit, pour pouvoir trouver justement un nœud. l'éco-projet qui leur ressemble le plus et le mieux. Et pas se calquer sur un éco-projet extérieur à soi qui va faire encore plus de mal que le mal. C'est-à-dire que la solution peut être pire que le mal dont on souffre. Donc c'est important de construire patiemment un éco-projet qui nous ressemble et qui nous permettra de retrouver la paix intérieure et une espérance pour le monde.
- Speaker #1
Et si on reprend un peu toutes les étapes pour que les auditeurs comprennent un peu par quoi on passe dans l'éco-anxiété, est-ce que vous pouvez... Je vais résumer rapidement toutes les étapes et après j'aurai des petites questions sur ces étapes qui me sont venues fonder la lecture.
- Speaker #0
Alors la courbe de l'éco-anxiété, c'est une courbe en U un peu classique pour ceux qui connaissent les méthodes projet. Il y a une phase de descente, puis une phase de remontée. Alors la phase de descente, elle commence par la première étape qui est la prise de connaissance des informations qui sont des informations anxiogènes. étapes, elle est cognitive, c'est-à-dire qu'on va accumuler beaucoup d'informations, parce que l'esprit humain est assez aimanté par les informations négatives, c'est d'ailleurs une des conditions de sa survie, c'est que si on n'était pas aimanté par les informations qui nous menacent, on serait tous morts avant l'âge. si j'ose dire. Et donc, les éco-onctueux, ceux qui vont le devenir, commencent par être sensibilisés aux problèmes environnementaux. Ils sont énormément impactés par les informations qui surrisent de partout, qu'ils vont tirer au fil des fils rouges qu'ils vont rencontrer, soit dans les médias, soit dans les rapports du GIEC, soit carrément même dans les recherches scientifiques. Et ils deviennent des experts des problématiques, des enjeux environnementaux. Mais ça, ça a un coût. psychique, enfin mentale plutôt, c'est que les informations négatives, au bout d'un moment, elles provoquent des ruminations, c'est-à-dire qu'on n'arrête pas d'y penser en permanence. Et ça va entraîner un deuxième point, c'est que ces informations anxiogènes vont générer de l'éco-stress, lié aux éco-stresseurs que sont, par exemple, la fente de la banquise, la baisse drastique de la biodiversité, la fin des ressources pas chères, qui font que on va avoir des problèmes. pour acheter son essence, mais en même temps, on prend conscience que l'essence, c'est pas qu'on met dans sa voiture pour aller faire ses courses, emmener ses enfants à l'école, c'est quelque chose qui provoque des gaz à feuille de serre et on prend conscience petit à petit d'un certain nombre d'éco-stresseurs qui sont des stresseurs qui provoquent notre stress. Et la mécanique que l'on a en nous, qui est le stress, c'est une mécanique qui est faite pour faire face à un enjeu ou à un danger perçu comme tel. faire face à un enjeu ou un danger perçu comme tel, ce qui veut dire qu'on va vouloir réagir. et trouver un comportement adéquat face à ces éco-stresseurs. Mais malheureusement, ces éco-stresseurs, c'est pour ça que je les appelle éco-stresseurs, ces stresseurs écologiques sont inédits et on n'a pas dans notre bibliothèque epigénétique de stratégie d'adaptation pour faire face à la fonte de la banquise, par exemple, ou tout seul, individuellement, mais même collectivement d'ailleurs, on s'en rend vite très compte, c'est que même tous les États réunis le voudraient-ils qu'ils ne pourraient pas empêcher la fonte de la banquise. Et donc du coup, certains vont être tentés de lutter contre eux. ce stresseur-là, en se disant, il faut absolument que je trouve un moyen. Et ça, ça va les précipiter vers la quatrième étape, je vous y reviendrai tout à l'heure, qui s'appelle la vallée de la mort. Mais avant, il y a une troisième étape, c'est, une fois qu'on a passé cette deuxième étape qui est d'affronter des éco-stresseurs, qui est d'affronter la doxa. La doxa, c'est quoi ? C'est la bien-pensance d'une société à un instant donné, et notamment en ce moment, ce qui surdétermine tout, c'est le consumérisme, voire l'excès du consumérisme, c'est-à-dire tout à portée de la main, facile, pas cher. mais qui a une contrepartie, c'est la pollution et la surexploitation de la planète et des ressources de la planète. Et donc, l'éconocute, tout d'un coup, prend conscience que lui-même fait partie de cette société qui contribue à se tirer une balle dans le pied, finalement, c'est-à-dire avec des comportements très simples qui ont l'air de rien, comme aller chercher son pain avec sa voiture, de se rendre compte que ça projette des gaz à effet de serre, non pas seulement à son petit niveau, mais au niveau de l'ensemble d'une population, et voire de la population planétaire. Et que ces comportements inaudits sont extrêmement... délétère pour la planète et donc pour l'avenir de l'humanité, puisque, si je prends l'exemple du gaz à effet de serre, le gaz à effet de serre provoque le réchauffement climatique, qui provoque les dérèglements climatiques, qui provoque les inondations, qui provoque les sécheresses, qui provoque donc, in fine, des atteintes à ce qui nous permet de nous nourrir, de bien vivre, de bien boire, bien manger, bien respirer. Et donc, tout d'un coup, il prend conscience qu'il est conscien, complice finalement de cette énorme machine à tuer, le vivant. Et qu'in fine, en haut de la chaîne alimentaire, c'est nous, en fait, que nous menaçons. Et donc, c'est ce qui l'entraîne dans la vallée de la mort, puisqu'il voit la mort partout, du fait de nos comportements délétères, sociétalement parlant et individuellement parlant. Et donc, il se trouve complice de cette doxa qui va vouloir refuser en bloc, d'ailleurs, ce qui n'est pas forcément une bonne chose. Il va vouloir, en fait, devenir Superman ou Superwoman en essayant de devenir intègre dans ses valeurs, en voulant les respecter. Le problème quand on est en état de stress, c'est qu'on devient tellement intègre qu'on risque de devenir intégriste et donc de devenir quelqu'un d'extrêmement virulent par rapport à l'écologie. C'est ce qui fait que ça entraîne un rejet de la plupart de nos concitoyens qui ne sont pas encore dans cette prise de conscience et finalement un isolement de l'éco-anxieux. Et c'est ce qui fait que petit à petit, il peut basculer vers des pathologies réactionnelles comme des pressions ou un trouble anxieux généralisé. Et c'est à ce moment-là qu'il tombe dans la vallée de la mort. Et là, quand il est dans la vallée de la mort, il faut faire très attention, parce qu'il est au fond du trou. Et s'il ne remonte pas, en termes d'énergie, il risque de basculer vers ses psychopathologies graves et donc d'être hospitalisé parfois. Donc il faut faire attention. C'est en ce sens-là que l'éco-anxiété, si elle n'est pas une maladie au démarrage, peut devenir une maladie. Enfin, peut entraîner d'autres maladies. C'est-à-dire que l'éco-anxiété, ce n'est pas une maladie, c'est ce qu'on appelle un mal-être, ou dans notre jargon de psy, une détresse psychologique. C'est un état intermédiaire entre une santé mentale positive... et psychopathologie, et donc si on ne soigne pas cette éco-anxiété-là, elle va basculer naturellement vers une psychopathologie, et donc vers quelque chose de psychiatrique. Il faut faire attention à ça. Et c'est pour ça... qu'il faut absolument remonter du fond de la vallée de la mort, et que parfois, c'est pour les cas les plus graves, et de patients qui viennent me voir parce qu'ils sont dans cet état-là, ils viennent me voir parce qu'ils ne savent plus comment faire pour sortir de la vallée de la mort, il va falloir cheminer vers un éco-projet. Alors heureusement, tout le monde n'est pas au fond de la vallée de la mort, des personnes vont pouvoir sortir de cet embûche en mettant en place un éco-projet, comme pour d'ailleurs les personnes qui sont au fond de la vallée de la mort. Pour les gens qui sont au fond de la vallée de la mort, il va falloir faire un travail psychothérapeutique plus simple portant sur la dimension affective et psychique, puisqu'ils sont plus atteints dans leur psyché. Et donc, la remontée, une fois qu'on a atteint cette espèce de trou, c'est la remontée, c'est la troisième partie du processus de la déconcité, qui est la sortie de la déconcité, qui est la mise en œuvre d'un éco-projet qui nous ressemble. Alors d'abord, comme je le disais tout à l'heure, avant de se lancer dans l'éco-projet, c'est d'identifier ses forces. et ses faiblesses, d'accord ? En fait, en retrouvant d'abord le sens de ces valeurs, c'est la cinquième étape après la vallée de la mort, c'est retrouver le sens de ces valeurs et voir si elles sont adaptées, c'est la sixième étape, avec l'environnement dans lequel on évolue, notamment la doxa de consumerisme. Parce qu'il ne s'agit pas de s'opposer à la doxa de consumerisme, mais de faire avec, pour faire du judo avec elle. En gros, pour vous donner un exemple concret, si je suis intéressé par, par exemple... justement je suis affecté par la faune de la banquise, il y a tout un travail d'acceptation du fait qu'on ne va pas pouvoir empêcher la banquise de fondre, mais par contre, on a peut-être l'opportunité de sauver la faune et la flore, en s'engageant par exemple dans une ONG ou en en fondant une, et parfois des projets qui paraissent impossibles peuvent se réaliser, comme l'exemple de Félix Finkbeiner, sur lequel je reviendrai peut-être tout à l'heure, qui a planté 14 milliards d'arbres à lui tout seul, enfin pas tout seul, avec son ONG qu'il a fondée à l'âge de 13 ans. et qui, au bout de 15 ans, 10-15 ans, par effettage d'huile, a permis de planter 14 milliards d'arbres. Donc, ce qui paraît impossible de démarrage peut être un éco-projet tout à fait pertinent pour une personne. Et si, quand bien même, on ne peut pas empêcher la déforestation de la forêt amazonienne, comme c'est le cas de Phil Biner, on peut compenser ces travers de l'humanité en ayant des éco-projets ambitieux. Alors, ce n'est pas à la portée de tout le monde. Il ne faut pas forcément se calquer sur Phil Biner qui a fait ça. Mais en tout cas, on a des éco-témoins qui peuvent nous édifier et nous permettre d'envisager des choses qui paraissent infaisables ou traiter des causes perdues. Et c'est ça l'éco-projet, c'est d'arriver en travaillant sur ces valeurs, ces ressources personnelles en termes de compétences, de pouvoir positionner un éco-projet. Et à partir de là, une fois qu'on a positionné son éco-projet, on va pouvoir le mettre en œuvre et donc changer nos modes de... de comportement et nos modes d'être. C'est la huitième et la neuvième et la dixième étape, pardon. Et c'est ce qui permet, in fine, de voir petit à petit l'éco-projet se mettre en œuvre et nous rassérener et contribuer à la paix intérieure qu'on doit retrouver. Et en fait, il y a trois mots-clés très importants dans ce processus de remontée du fond du trou de l'éco-anxiété, c'est sens, engagement et satisfaction. On ne part pas bille en tête dans l'action sans avoir une boussole. une boussole axiologique, comme on dit dans notre jargon de psy, c'est-à-dire une boussole de valeurs. C'est quelles valeurs que je veux mettre en œuvre pour pouvoir m'accomplir dans mon éco-projet. Et les valeurs sont différentes selon qu'on va, par exemple, sauver une cause animale, par exemple en luttant contre les abattages. Ça n'a rien à voir avec, justement, s'engager comme Félix Himbainer dans la sauvegarde des arbres. Ça n'a rien à voir, par exemple, à une action qui viserait, dans une OSG, à aider les migrants climatiques, par exemple. Vous voyez ? En fonction de ces valeurs, on va déterminer une direction vers laquelle on va positionner notre éco-projet. Et ensuite, comme on a fait ce travail aussi d'analyse de nos ressources, on va se dire, est-ce que je suis meilleur sur, je ne sais pas, sur une activité intellectuelle ou une activité plutôt physique ? Est-ce que je suis meilleur dans le concret ou dans, par exemple, dans les plaidoyers ? Donc, ça, c'est quelque chose qui est plus de l'ordre de l'intellectuel et d'une capacité de rhétorique, etc., et de juridique même. Donc, voilà, en fonction de ces compétences, on va… créer son éco-projet pour pouvoir l'orienter dans la bonne direction et y mettre les ressources dont on est porteur, seul. Puis ensuite, on va identifier des ressources à l'extérieur de soi, c'est-à-dire dans son environnement proche ou un peu plus lointain. Et là, c'est important d'aligner les ressources individuelles avec les ressources collectives, mais aussi sociétales. Parce que quand on aligne ces trois rayons d'action, on va beaucoup plus loin. C'est l'exemple de Félix Finkbeiner. Je vais quand même raconter cette histoire, si vous me permettez. Amélie, parce qu'elle est édifiante, montre à quel point Félix a compris qu'il fallait aligner les énergies individuelles, collectives et sociétales. Cette histoire a été documentée par Cyril Dion dans un documentaire qu'il a fait en octobre 2022. C'est là où j'en ai pris connaissance. C'est un cas réel et qui continue d'exister. Felix Humeiner, c'est un jeune Allemand qui, quand il a 9 ans, prend conscience qu'il y a la déforestation de la forêt amazonienne et ça le traumatise. Parce que lui, ce qui est un gros éco-stresseur pour lui, c'est de ne pas bien respirer. Et il se dit, quand je serai grand, je planterai un milliard d'arbres. Alors, tout le monde le regarde un peu dubitatif et lui dit, tu retournes. à tes devoirs et puis arrête de nous dire n'importe quoi. Sauf une personne, et c'est justement son maître d'école qui lui dit, écoute Félix, je crois en ton projet et pour t'aider à le mettre en œuvre, on va planter un arbre dans la cour d'école. Alors on est en Allemagne, donc en Allemagne, c'est plus facile de trouver des écoles avec des esplanades vertes et avec de la terre. Et donc, avec ses petits camarades, Félix Finkbeiner, aidé par son enseignant, va planter son premier arbre. Et là, Félix, il a une révélation, il se rend compte que tout seul, il n'aurait pas pu le faire et qu'il y avait trois niveaux. l'aide de ses petits camarades et une institution, c'est-à-dire l'école qui accueillait son projet. Et là, il réalise que c'est hyper important de démultiplier un rêve, finalement, de planter un milliard d'arbres avec l'aide des autres et de la société, parce que tout seul, il n'y serait pas à rêver. Et c'est ce qu'il va faire. Alors, il se trouve qu'il a des parents, un de ses deux parents qui est créateur d'entreprise, qui a une entreprise qui dit « tu devrais créer une ONG, parce qu'avec une organisation, on arrive à démultiplier des énergies que tout seul, on ne peut pas mettre en œuvre tout seul. Et il va donc créer une ONG, et on le voit, d'ailleurs dans le documentaire de Cyril Dion, on le voit à la tribune de l'ONU à l'âge de 13 ans, réclamer des subsides pour développer son projet. Et à l'âge de 22-23 ans, donc une quinzaine d'années plus tard, ce n'est pas un milliard d'arbres qu'il a plantés, c'est 14 milliards d'arbres faits de fil de bagnole. Et cet exemple, je le cite souvent à mes patients et congéos pour leur montrer que même ce qui paraît impossible est possible, et qu'on peut faire des choses extraordinaires. même à son petit niveau. Une patiente comme ça me disait, quand je lui avais raconté cette histoire, « Moi, je me sens nul quand je vous écoute parce qu'aujourd'hui, ce que je fais, c'est juste économiser dans un éco-geste les 5 litres de flotte que je perdrais si je ne les économisais pas quand je prends ma douche le matin, le temps que l'eau chauffe. Je les mets dans un seau et je vais arroser mes plantes. » Je lui dis « Mais c'est extraordinaire ce que vous faites. Est-ce que vous vous rendez compte ce que ça veut dire sur une année ? » Alors, elle fait le calcul et elle se rend compte Donc effectivement, 5 litres d'eau sur une année, ça fait une tonne 8. Et je lui dis, et si vous convainquiez 100 personnes de le faire autour de vous, ça ferait combien ? Et là, elle réalise, en fait, tout d'un coup, que seul, c'est bien de faire des choses, mais qu'à plusieurs, on est beaucoup plus fort. Et si on monte une ONG et on a des subsides qui permettent de déployer cet éco-projet à un niveau sociétal, on peut faire des grandes choses. Alors que l'idée, elle a germé toute seule dans l'esprit d'une seule personne. Et c'est là où on se rend compte que ce n'est pas seulement le groupe qui est important, mais c'est aussi la société. Et quand on arrive à faire passer. des idées individuelles et collectives au niveau d'une société, là on arrive à faire un effet tajoui extrêmement important.
- Speaker #1
Pendant que vous disiez ça, j'adore l'exemple et je le trouve hyper cool, surtout que ça vient d'un petit garçon, en plus à la base, même pas un adulte, c'est vraiment un enfant qui a parlé avec son cœur. Et il y a plusieurs questions qui me viennent parce que dites qu'on a besoin d'aide, et parfois, par exemple, si je prends mon cas à moi, vu que j'étais la première dans mon entourage à avoir eu cette... Cette compréhension qu'il y avait un problème écologique. Quand j'en parlais autour de moi, je n'avais aucune main tendue parce que j'étais vraiment toute seule et qu'ils étaient dans un moment où ils n'avaient pas envie de voir ce que moi je voyais ou qu'ils ne le comprenaient pas non plus parce que vous en parlez aussi qu'il y a des sensibilités et que souvent, il faut être touché par quelque chose qui nous sensibilise pour vraiment comprendre et rentrer dans l'éco-anxiété. Et donc, moi, j'ai aussi la sensation qu'il a eu de la chance. de tomber sur des personnes qui avaient déjà cette sensibilité. Et donc, comment trouver cette aide quand on se retrouve vraiment tout seul et qu'on n'a personne vraiment autour de nous pour nous aider ?
- Speaker #0
Alors, moi, ce que je dis souvent, c'est que la première alliée qu'on a, c'est notre propre peur. Ça peut paraître étonnant de dire ça parce que souvent, on nous apprend qu'il faut se départir de la peur. Or, la peur est une émotion et comme toutes les émotions. elle nous informe qu'il y a quelque chose qui se passe qui peut nous menacer. Et en l'occurrence, la peur, c'est justement l'émotion qui nous en informe le plus. Et très souvent, quand on est confronté aux informations anxiogènes, on est tétanisé de trouille. En fait, on est dans une peur qui nous immobilise. Et tout l'enjeu, d'ailleurs, du travail psychothérapeutique, c'est de passer d'une peur qui immobilise à une peur qui mobilise. Et c'est justement ce que vous venez de dire qui me fait penser à ça. Et comme je le disais pour Félix Schillmeiner, c'était la peur de mal respirer qui l'a mis en... en mouvement, c'est qu'il faut saisir cette première chance que nous donnent nos émotions, et en l'occurrence notre peur, puisqu'elle est très centrale dans les consciences. C'est la catégorie des symptômes les plus prégnants dans les consciences, les inquiétudes. non seulement pour l'avenir mais pour le présent, donc les peurs. Cette peur, en fait, elle nous renseigne qu'il y a un vrai problème et grâce à cette peur et grâce aussi au cognitif qui est en nous, c'est-à-dire la raison, on va se documenter. C'est ce que j'incite à faire mes patients et connoisseurs, c'est de se documenter sur ce qui cause leur peur et de devenir un expert du domaine. Parce qu'en faisant ça, on va découvrir qu'il y a des gens qui ont déjà fait des choses, qui sont passés par là et qui ont déjà fait des réalisations comme Philippe Swinbiner. des gens qui vont pouvoir nous édifier. Deuxième point, après avoir apprivoisé sa peur, c'est de se renseigner et de devenir un pro de son domaine. Félix, il était devenu un pro de planter des arbres, et il l'est devenu évidemment encore plus avec son RNG. Donc, quand on a une peur, c'est qu'on est sensible à un sujet, comme vous l'avez dit. Ça peut être la banquise, ça peut être les arbres, ça peut être les animaux, ça peut être les migrants, etc. Et c'est important de devenir un expert. Pourquoi ? Parce que en devenant un expert, on va éviter de réinventer le tien. Et on va devenir, comme le disait Nietzsche, des nains perchés sur des épaules de géants. C'est-à-dire qu'il y a des géants comme Félix Higbeiner qui nous ont montré la voie. Mais ils l'ont montré il y a déjà un certain temps. Et les choses évoluant de fil en aigu, on va pouvoir découvrir qu'il y a de nouvelles situations que Félix n'a pas forcément, que tous les grands éco-témoins ont traversées, n'ont pas encore traversées, et que nous, on a une nouvelle vision du problème. Et aussi petit soit-on... quand on se perche sur les épaules de géants comme Félix Ibaïna, on devient plus grand qu'eux, on voit plus loin qu'eux. Et donc c'est important de devenir un expert pour pouvoir voir plus loin que ceux qui nous ont précédés, dans un domaine dans lequel on devient expert. C'est comme ça d'ailleurs que la science progresse, ni plus ni moins. C'est parce qu'il y a eu des essais-erreurs avant qu'on va progresser, et d'ailleurs sociétalement aussi. Si on prend par exemple la place des femmes dans notre société, elle est devenue ce qu'elle est. que très récemment, alors que ça fait des millénaires que la femme est sous la férule de l'homme, qu'elle n'est pas aussi bien valorisée dans les sociétés d'antan qu'aujourd'hui. Donc, on peut tous devenir un visionnaire en se perchant sur les épaules de gens qui l'ont été avant nous et voir plus loin. Visionnaire, c'est voir plus loin, en avance, les problèmes qui vont arriver et s'y préparer. Et ça, c'est hyper important parce que, comme le disent des organismes spécialisés ou des institutions comme l'ADEME, face aux crises climatiques, il va falloir améliorer deux choses, c'est notre capacité à affronter les risques et de préparer notre résilience pour pouvoir absorber les chocs qu'on va vivre. Et donc cette capacité de visionnaire, elle est hyper importante pour pouvoir se dire je ne suis pas pris comme un oiseau dans une cage, je vois les choses, je voudrais m'envoler, mais je ne peux pas m'envoler à cause de la cage parce que je suis prisonnier finalement des problèmes environnementaux que nous créons nous-mêmes. La cage, c'est nous qui l'avons créée. Alors que si je vois plus loin, je suis capable d'ouvrir la cage et de m'envoler dessus. de cage parce que je connais, j'arrive à me créer par moi-même une porte de sortie par mon éco-projet. Et donc, je retrouve la paix intérieure et j'augmente ma résilience puisque je peux me mettre en marche vers une situation que je résous moi-même comme Félix Finkbeiner l'a fait. Et on n'est pas obligé d'être aussi performant que Félix Finkbeiner. Ma patiente que je citais là, qui a pris conscience qu'elle économisait beaucoup d'eau en faisant ça, elle s'est engagée dans une ONG qui maintenant... permet de militer sur la préservation de l'eau et d'éviter de polluer les nappes phréatiques, etc. Donc elle a trouvé finalement la paix intérieure en se mettant en marche sur cet éco-projet. Elle ne l'a pas fait toute seule et l'ONG existait avant elle, mais elle a retrouvé la paix par cette action qui est en phase avec ses valeurs et en phase avec les ressources qu'elle a, ses compétences, son engagement qu'elle a. Et là, on voit bien les trois pointes clés que je voulais dire, je ne les ai pas citées, sens, engagement, satisfaction. Le secret de la santé mentale positive, de la paix intérieure retrouvée dans le domaine de l'écologie, c'est de trouver un sens à son action, à son engagement. Sens, engagement, mais un engagement au niveau de nos ressources personnelles, nos compétences, nos savoirs, nos savoir-faire. Et parce qu'on arrive à s'engager dans une cause qui nous ressemble et qui ne vient pas de l'extérieur, qui est à la hauteur de notre niveau de compétence, on va être dans le flow, ce qu'appellent les psychologues le flow, c'est-à-dire le flux optimal de nos capacités. On va pouvoir s'engager. sans que ça soit une contrainte qui nous mène vers le burn-out ou le bore-out, c'est-à-dire l'ennui, ou le burn-out, c'est-à-dire se cramer, tout bêtement, ça tout le monde connaît. Et derrière, cet engagement va devenir satisfaisant parce qu'on arrive à avoir des résultats probants. Militer dans une ONG qui permet de sauvegarder l'eau naturelle et en évitant des effluents négatifs, on peut y arriver en se mettant d'ailleurs en lien avec des grands opérateurs de l'eau comme Suez, par exemple. Bref, et on peut voir d'ailleurs que eux bougent aussi sur ce sujet-là. Et donc, on est satisfait par notre action, et ce qui va reboucler sur le sens. J'avais bien raison de m'engager sur cette question, parce que j'en suis satisfait, et donc ça redonne du sens. encore plus fort à mon engagement et donc à mon existence. Farsurie de mon engagement éventuellement militant pour que les choses bougent. Et le militantisme, ce n'est pas forcément adhérer à une ONG militante comme Extinction Rebellion. Ça peut être s'engager d'une association de quartier ou une ONG un peu nationale, mais sans forcément qu'elle soit dans un militantisme agressif. Et je ne dis pas qu'il ne faut pas un militantisme agressif. On peut aussi s'engager dans quelque chose de plus agressif parce que c'est important de faire passer dans la société, dans la majorité passive. des idées de minorités actives. C'est d'ailleurs comme ça, si je reprends l'exemple des femmes tout à l'heure, qu'elles ont pu voter parce qu'il y a eu des suffragettes qui ont risqué leur vie dans leur militantisme pour que les choses bougent et que les femmes puissent voter en France, par exemple, ou même aux États-Unis, ou ailleurs, même si c'était avant.
- Speaker #1
Moi, je trouve ça vraiment ultra intéressant et surtout par rapport au militantisme. Ce que j'avais apprécié, c'était vraiment, en fait, si on va dans le militantisme et qu'on y trouve du sens à la base, et pas parce qu'on est insatisfait et donc on va dans le militantisme. Parce que si j'ai bien compris, ça c'est très dangereux et en fait derrière on ne peut plus s'abîmer qu'autre chose.
- Speaker #0
C'est ce qu'on appelle le burn-out écologique. C'est-à-dire qu'être satisfait par la situation qui fait qu'on s'engage dans le militantisme alors qu'on n'en a pas les ressources. C'est-à-dire qu'on n'est pas prêt à accepter d'être emprisonné, d'être violenté, etc. Il y en a qui sont prêts. Ceux-là, ils peuvent s'engager dans le militantisme. Mais ceux qui ne sont pas prêts à ça, ne fait pas qu'ils ne le fassent, ils vont s'abîmer la santé mentale. C'est ça qui est dangereux. Ça ne veut pas dire que c'est le militantisme qui est dangereux. C'est dangereux pour des personnes qui ne sont pas... au fait de ce qui leur attend et d'avoir les ressources pour le faire. Parce que, par exemple, faire un jeûne comme l'a fait celui qui a milité contre l'abattage des arbres sur la 69, si je me souviens bien, il l'a quand même payé cher au niveau de sa santé, mais il était prêt à faire ce sacrifice. Oui,
- Speaker #1
et le sens, même dans le militantisme, pas forcément que dans le militantisme, l'autre jour, j'ai interviewé une personne, Marion Cronier, qui me disait qu'elle était arrivée à un moment donné et qu'elle a créé un tiers-lieu. En fait, elle se donnait tellement dans ce tiers-lieu-là et qu'elle... ne pensait plus à elle, qu'elle a senti à un moment donné qu'elle retombait dans un burn-out, parce qu'elle en avait déjà fait un avant qui n'était pas lié à l'écologie, et donc en fait elle a senti les choses venir, et donc en fait il n'y a pas non plus que dans le militantisme le prendre soin de soi, en fait il est tout le temps dans tous les éco-projets, et pas que dans le militantisme.
- Speaker #0
Exactement. Oui, là c'est pour ça que je parle de burn-out, parce que c'est vraiment, on crame ses ressources pour une cause qui fait sens, et puis qui au bout d'un moment risque de ne plus faire sens, parce que finalement On n'arrive pas à l'atteindre parce qu'on n'a plus les ressources pour l'atteindre puisqu'on est arrivé au sommet des ressources qu'on peut mettre à disposition de ce projet. Et du coup, on doute sur le projet et on a une crise de sens. Le burn-out, c'est vraiment ça. J'ai beaucoup travaillé sur le burn-out. J'ai même écrit un bouquin pour le burn-out en 2016 parce que j'étais spécialisé en santé au travail et en souffrance au travail. Et le burn-out était quelque chose qui émergeait à l'orée des années 2010, même si les chercheurs y travaillent depuis 1975. Mais le burn-out, c'est quelque chose où... On va vivre une crise de sens parce qu'on n'arrive plus à mobiliser suffisamment d'énergie pour le projet qui nous tient à cœur. Et on va tomber de caribe en cilda, si vous voulez, en socramant, parce qu'on s'est tellement investi dans le projet, sans prendre la mesure des ressources qui étaient nécessaires pour s'y investir, qu'on va perdre le sens même du projet parce qu'on n'y arrive plus, tellement on est épuisé.
- Speaker #1
Oui, et donc ça peut arriver en fin de compte à tout moment. Et donc, le prendre soin de soi, il doit toujours être présent, peu importe. ce qu'on met en place ?
- Speaker #0
Prendre soin de soi, c'est au démarrage prendre conscience de là où on en est, à la juste mesure de ses capacités. Il n'y a pas de personnes qui sont plus fortes ou plus faibles, c'est des personnes adaptées à des situations qui leur conviennent. C'est ça le secret de la santé mentale. Ce n'est pas de se croire superman, superwoman pour toutes les situations écologiques, c'est de trouver la situation qui nous convient et sur laquelle on va pouvoir, comment dirais-je, prendre soin de soi en s'investissant au top, mais pas au-delà du top. sinon on fait un burn out
- Speaker #1
Et ce, c'est pas un cycle parce que c'est pas bon, mais toutes ces étapes-là, est-ce que, même si on est dans un éco-projet, on peut retomber à l'étape première parce qu'on re-rentre dans de l'infobésité, etc. Et donc, en fait, c'est quelque chose qu'on va avoir tout au long de notre vie, en fin de compte.
- Speaker #0
Alors, non, parce qu'avec l'âge, on progresse, heureusement, on se perfectionne et on apprend de nos erreurs. Enfin, en tout cas, c'est important et c'est d'ailleurs ce peu à quoi je... J'invite mes étudiants, parce que je fais des cours en psychologie existentielle, et je leur dis que le vrai échec, c'est de ne pas faire échouer l'échec. Comme disait déjà, il y a 2600 ans, Confucius. Donc, en fait, l'échec, c'est quelque chose qui nous permet d'apprendre sur nos limites. Donc, quand on échoue, il faut en faire un enseignement. Un enseignement pour éviter de retomber dans le même échec. Et c'est fort de cet enseignement sur l'échec qu'on va pouvoir progresser et éviter de retomber dans cet échec et donc être plus efficace dans son action. et dans son être au monde finalement. Et ça donne du sens à l'existence de tirer un enseignement de nos échecs, c'est de se dire J'étais peut-être un peu aveuglé par le projet que je portais, notamment pour le cas de Burnout, le cas de Burnout que vous citiez, c'est-à-dire qu'il était tellement beau ce projet, tellement édifiant et tellement motivant, que je n'ai pas vu que je n'avais pas forcément toutes les compétences et que j'ai cru que je pouvais faire des journées de 20 heures tout seul et sans m'appuyer sur d'autres personnes. Et donc, ça nous enseigne sur nos fragilités, sur notre vulnérabilité, qui est quelque chose de très important dans la psychologie existentielle, c'est que, loin de croire que les vulnérabilités sont un défaut, C'est une force, comme je l'ai découvert en accompagnant les personnes en burn-out, les mêmes éconcieuses. « Est vulnérable celui qui se croit fort, est fort celui qui se sait vulnérable. » Ça, c'est hyper important. C'est une sagesse qu'on découvre dans l'action, en ayant peut-être eu la tentation de se brûler les ailes, ou même de les avoir brûlées. Moi-même, j'ai fait un burn-out, donc je sais de quoi je parle. J'ai testé toutes les pathologies que mes patients ont, que j'accompagne dans leurs demandes. Alors, je plaisante à moitié, parce qu'évidemment, heureusement, il ne faut pas faire un cancer pour pouvoir soigner le cancer. Mais en psychologie, c'est un peu différent. C'est-à-dire qu'on est à la fois l'outil en tant que psychologue et en même temps le compagnon de route de celui qui chemine en haut de la montagne qui cherche à escalader, à dépasser, qui est la montagne de la problématique pour laquelle il vient consulter. Donc, forcément... même si on est guide de haute montagne, on accompagne celui qui va en haut de la montagne. On ne va pas lui dire, tu montes et puis tu te débrouilles tout seul. Donc, on l'accompagne. C'est en ce sens-là qu'on est à la fois l'outil et l'accompagnant, et c'est bien d'avoir éventuellement vécu ce que c'était qu'une éco-anxiété pour pouvoir accompagner les éco-anxiés. Parce que j'ai beaucoup de passion qui vient de me voir en me disant, je viens vous voir parce que j'ai été voir un de vos confrères ou un de vos consoeurs qui n'y connait rien en enjeux environnementaux Ils m'ont regardé avec des yeux ronds quand j'aurais parlé des effondrements de la planète, des effondrements de la biodiversité, du climat tempéré en France, etc. Et donc, je n'ai pas envie de leur faire un cours sur les problèmes environnementaux. Je viens vous voir parce que ça va plus vite avec. Et c'est vrai qu'il y a un déficit de connaissances et de formation des praticiens en santé, des personnes qui soignent des pathologies psychologiques ou les mal-aides psychologiques parce qu'ils ne sont pas au courant de la cause. qui provoquent les consciences. Ils ont l'impression que c'est un délire alors que c'est parfaitement rationnel. C'est la différence avec justement une psychopathologie qui nous déréalise comme par exemple les psychoses où le délire du patient est totalement en dehors du réel. Ce n'est pas un délire d'être inconscient et de dire que la planète va mal. C'est documenté scientifiquement donc c'est parfaitement rationnel. Et ceux qui sont irrationnels sont ceux qui sont les climato-sceptiques qui doutent de ces choses-là qui sont en train d'arriver parce qu'ils ne veulent pas les voir. Ils sont dans un déni qui frise justement la psychopathologie, parce qu'ils sont en train de sortir du réel.
- Speaker #1
Et en plus, ce que j'ai apprécié par rapport à la vallée de la mort, c'est déjà de prendre conscience que nous, on va mourir. Même si on le savait de base, c'est vraiment en prenant conscience et en plus de ça, de voir que dans la société, c'est quelque chose qu'on met vraiment de côté. Et la deuxième chose aussi, c'était la mort de ce qu'on connaît. Et j'ai l'impression que presque... C'est quelque chose qui fait, en tout cas dans mon entourage, quand je parle avec les gens, j'ai l'impression que c'est presque ce truc-là qui leur fait le plus peur, la mort de ce qu'ils connaissent.
- Speaker #0
Oui, ce que vous venez de dire, vous mettez le doigt sur quelque chose qui est essentiel depuis longtemps, c'est synthétisé d'ailleurs par Platon, c'est philosopher, c'est apprendre à mourir. En fait, il y a quelque chose d'assez étrange dans l'esprit humain, c'est qu'il y a une différence entre savoir et prendre conscience. Et souvent, on mélange les deux. Savoir qu'on va mourir, ce n'est pas la même chose qu'être conscient qu'on va mourir. Je vais vous donner un exemple. Par exemple, l'exemple de Fumé-tu sur les paquets de cigarettes. Tout le monde sait que c'est dangereux de fumer. Pourtant, les fumeurs qui n'arrêtent pas de fumer continuent de fumer. Et ils se racontent une petite histoire dans leur tête, plusieurs petites histoires. Par exemple, il y a une statistique qui est assez effrayante. C'est qu'à 65 ans, il y a une 9 chances sur 10 de faire un cancer à l'aryngopharyngée quand on a fumé depuis l'adolescence. vous avez des gens qui à 25 ans se disent j'ai 40 ans pour arrêter, tout va bien, je peux continuer à fumer puis quand ils ont 45 ans ils se disent bon j'ai encore 20 ans il faudrait que je m'y mette là parce que ça commence à devenir urgent et puis à 60 ans il y en a qui vont vous dire bon bah j'arrive pas, j'ai vraiment pas réussi à arrêter de fumer donc je vais être le 1 sur 10 qui va passer dans les mailles du filet donc c'est totalement presque un délire quoi parce que même si potentiellement ils peuvent être le 1 sur 10 une chance sur 10 qu'il le soit, mais c'est quand même dangereux quand même, puisqu'il y a quand même 78 personnes qui meurent par an d'un cancer lié à la cigarette. Donc c'est gigantesque, finalement. Et donc on prend un risque énorme à faire ça, dans le déni, finalement, de cette information-là. Et la prise de conscience, c'est quoi ? Justement, c'est tout d'un coup réaliser. C'est ce qu'on appelle une métanoïa. C'est changer d'état d'esprit, c'est avoir un état d'esprit beaucoup plus large que celui d'avant. C'est à la affectif et cognitif, c'est-à-dire qu'il faut l'information. Mais ici aussi, il faut avoir peur quelque part. Il faut avoir une peur extrême qui est de se dire « Ah ouais, je suis en train de foutre ma vie vraiment en l'air. » Je prends conscience tout d'un coup que je fous ma vie en l'air à fumer et que c'est moi le prochain sur la liste. Et souvent, ça peut arriver quand les choses se rapprochent de la personne. Quand par exemple, la personne qui a l'âge de 25 ans dit « Moi, j'ai encore 40 ans pour arrêter. » Tout d'un coup, son cousin Germain, qui est quelqu'un qu'elle apprécie beaucoup et qui fume comme elle, a un cancer foudroyant et en trois mois, elle est morte. là tout d'un coup on a une prise de conscience c'est plus une information puisque là tout d'un coup ça se rapproche de moi donc je sais je peux mourir avant l'âge quelque part et c'est pareil pour l'écologie, ça sert à rien et en même temps c'est nécessaire de dire pollues-tu parce que ça va mettre les gens dans un déni énorme et on voit qu'il y a beaucoup de climato-scepticisme et même des présidents de la république comme Trump qui disent que tout ça c'est des conneries, il ne faut pas y croire ça n'est pas de l'ordre de la croyance justement, c'est de l'ordre d'un fait réel, on a encore quelques années devant nous. parce que le système Terre est assez résilient, mais malheureusement, il y a des points de non-retour dont on ne mesure pas encore vraiment d'ailleurs l'effet que ça pourrait avoir, comme par exemple l'acidification des océans, qui pourrait être dramatique. Mais là, polluer va vraiment tuer, c'est-à-dire que ça va tuer le vivant, comme dans la troisième extinction massive, où il y a eu 95% du vivant sur Terre qui est mort par excès de CO2, et 75% dans les mers. Il a fallu 20 à 30 millions d'années pour que le vivant se reconstitue et qu'on en arrive à la quatrième extinction massive, etc. Donc le vivant trouve toujours un chemin. Mais nous, le vivant, à court terme, c'est l'humanité qui est menacée. Et donc il n'y aura plus d'humanité, il y aura peut-être autre chose. La Terre trouvera une autre stratégie pour faire évoluer le vivant, mais si on tient à l'humanité, c'est nous qui allons mourir. Et donc, j'en viens à un deuxième point de votre constat, c'est qu'il faut faire le deuil d'une certaine humanité qui se croit dans la puissance totale, dans l'hubris, comme on disait chez les Grecs, c'est un peu le mythe de Prométhée, qui peut voler le feu des dieux et faire n'importe quoi avec la nature. Ça nous retombe toujours sur le nez. Et c'est quelque chose qu'on connaît depuis longtemps, puisque certaines philosophies comme l'hédonisme, dans son passé, a montré qu'elle était une voie sans issue, puisque le fondateur de l'hédonisme s'est suicidé à force de trop plein de plaisirs. Donc il y a des plaisirs qui tuent, en fait. Et c'est ce que Épicure a montré dans sa propre philosophie, qui est l'épicurisme. Il y a des plaisirs naturels nécessaires qui vont nous maintenir en vie, et des plaisirs non nécessairement naturels qui peuvent nous tuer. Voilà, donc tout ça, c'est un long travail de conscientisation par métanoïa successif, c'est-à-dire élargissement de champs de conscience successifs, qui fait que tout d'un coup, l'information monte au pâté, si j'ose dire, et nous fait prendre conscience qu'on est en danger de mort, et qu'il faut changer nos comportements. Voilà, c'est tout le travail que doit faire une société humaine pour arriver à s'en sortir. Mais ceux qui l'ont fait individuellement s'en sortiront mieux que les autres et seront plus résilients quand les problèmes sont vraiment... nous serons face aux problèmes au pied du mur, comme au pied du mur, et qu'il faudra... montrer des capacités d'adaptation, de résilience forte. Je donne un exemple très simple. On l'a vécu il n'y a pas très longtemps, ce n'était pas l'hiver dernier, mais l'hiver d'avant, quand il y a eu des problèmes d'énergie et de surenchérissement qui sont toujours d'ailleurs là, de coûts de l'énergie. On est passé d'une essence à 1,50€ à plus de 2€. Et bien ça, mine de rien, c'est un risque qui se profile quand l'essence sera à 5€ et qu'on est dans un mode consumériste, on est dans le tout voiture, on ne pourra plus emmener ses enfants à l'école à 5km. On ne pourra plus aller faire ses courses dans le supermarché qui est à 10 km. On ne pourra plus travailler à son boulot qui est à 30 km. Ou voire beaucoup plus pour certains qui font par exemple le Paris-Rouen dans la journée en voiture. Une naissance à 5 euros, la personne est morte socialement dans ce schéma-là que je viens de décrire. Elle ne pourra plus emmener ses enfants à l'école ou peut-être qu'elle les emmènera en vélo parce que 100 km c'est faisable. Mais elle ne pourra plus aller bosser et faire ses courses toutes les semaines quand le supermarché est à 15 km ou même à 20 km. Et donc, on voit bien qu'il y a des exemples de sociétés quand l'essence coûtera ce prix-là, puisque l'essence va venir à manquer, comme le prédisent un certain nombre de personnes éminentes, comme Jean-Claude ici, ou en tout cas, on en aura toujours, mais elle sera à un tel coût d'exploitation que tout le monde ne pourra plus en avoir, et c'est évidemment les pauvres qui vont trinquer en premier, les personnes les moins riches, alors que les riches s'en sortiront toujours. Voilà, donc c'est ça les risques qu'on risque de voir arriver de plus en plus. Nos capacités de résilience devront être aiguisées, affûtées pour... pour pouvoir les affronter. Et tous ceux qui se préparent à ça en étant dans les mobilités douces, ils ont compris qu'un jour ou l'autre, le pétrole viendra à manquer et qu'il faudra avoir beaucoup d'idées pour pouvoir contrebalancer ces risques-là. Et rien ne nous empêche de commencer dès aujourd'hui à travailler nos résiliences et de l'indépendance au niveau de la mobilité, grâce aux mobilités douces, que ce soit au vélo ou la proximité des lieux. Donc accepter de déménager d'un endroit qui est trop loin par rapport à son travail, ou faire du télétravail, trouver des tas de stratégies qui permettent d'être plus résilient quand les problèmes arrivent. C'est un exemple évidemment métaphorique pour dire qu'on va avoir aussi des problèmes au niveau de l'autonomie alimentaire, etc.
- Speaker #1
Bon, j'aurais encore 10 000 questions à vous poser, mais j'ai un peu pris par le temps. Et donc, la dernière question que je pose à tout le monde, qui est un petit peu plus philosophique, c'est qu'est-ce que l'écologie pour vous ?
- Speaker #0
Alors, c'est certainement pas une idéologie. C'est souvent confondu avec ça. D'ailleurs, il y a des partis politiques qui l'intègrent dans leur nom. Ça devrait être une sagesse, l'écologie. C'est-à-dire, ça devrait être quelque chose que tout le monde intègre dans son sens étymologique. C'est-à-dire, Oikos, notre maison, et comme l'a dit Jacques Chirac, mais sans y croire, puisque c'était un discours qu'on lui avait soufflé, notre maison brûle. Et donc, il faut comprendre pourquoi elle brûle et comment on peut éteindre l'ascendu. Donc, ça devrait être une posture de responsabilité philosophique vis-à-vis. de notre maison, qui est ce merveilleux endroit qui nous donne, qui nous prodigue gratuitement à boire, à manger, à respirer et à vivre de façon merveilleuse si on est dans une logique de contemplation, si vous voulez, c'est-à-dire de comprendre comme c'est beau tout ça, comme c'est merveilleux si on le laisse fonctionner. Et on a la capacité, quand l'homme s'allie à la nature, de démultiplier l'abondance de la nature. C'est la permaculture qu'il a montrée, elle est 30 fois plus efficace que l'agriculture extensive. et quand on bafoue les lois de la nature, on se bafoue soi-même et on ne prend pas soin de soi et on risque d'avoir de gros problèmes. Alors que quand on s'allie avec les lois de la nature, comme on a en nous, et qui est un des plus grands qu'on soit qui nous habite, puisque nous sommes dans la nature comme la nature est en nous, par ses lois, quand on s'allie avec les lois de la nature, on peut avoir une existence paradisiaque. Voilà, c'est ça pour moi l'écologie.
- Speaker #1
Merci d'avoir écouté cet épisode. Si le cœur t'en dit, n'hésite pas à t'abonner. à me laisser un commentaire sur Spotify et iTunes ou encore à me contacter sur les réseaux sociaux. Évidemment, tu peux aussi participer financièrement à l'évolution de ce podcast en me retrouvant sur Tipeee. En attendant mardi prochain, je te souhaite évidemment de prendre soin de tes écologies.