Speaker #0Bonjour, je m'appelle Grégoire Couchois, je suis cardiologue. Je vous propose à travers ces podcasts de vous partager mon univers professionnel et de vous faire découvrir une étonnante machine, votre cœur. A travers des conseils pratiques, des interviews de soignants ou des récits et témoignages poignants de héros du quotidien, ce podcast a pour but de vous toucher en plein cœur. Petit disclaimer aussi pour vous rappeler que les sujets abordés sont là à titre informatif et s'appuient sur les données validées de la science dans le but de vous aider à prendre davantage soin de votre santé. Ces informations ne sauraient se substituer à un conseil médical. Par conséquent, en cas de doute, parlez-en avec votre médecin. Bonjour et bienvenue dans ce nouvel épisode consacré à la notion de risque cardiovasculaire. C'est extrêmement important. Pourquoi ? Parce que les maladies cardiovasculaires sont la première cause de décès dans le monde. En 2019, elles ont causé la mort de 17,9 millions de personnes, soit près d'un décès sur trois à l'échelle mondiale. En France, les maladies cardiovasculaires arrivent en seconde position après le cancer avec environ 140 000 décès par an. Ces chiffres peuvent faire peur, mais rassurez-vous, comprendre et évaluer son risque cardiovasculaire, cela permet d'agir et de prévenir bien des problèmes. Au cours de cet épisode, nous verrons ce qu'est exactement le risque cardiovasculaire, comment les médecins l'évaluent au moyen des facteurs de risque et de certains examens, Pourquoi c'est un concept central en cardiologie, que ce soit pour diagnostiquer, prévenir ou traiter les patients ? Nous ferons un petit détour par l'histoire pour comprendre d'où vient cette notion. Puis nous expliquerons le principe statistique qui se cache derrière, à savoir ce qu'est un risque en pourcentage, qu'il soit absolu ou relatif. Enfin, nous parlerons des perspectives d'avenir, comment l'intelligence artificielle Le big data et la médecine personnalisée pourraient révolutionner l'évaluation du risque dans les années à venir. Un programme chargé et passionnant qui, je l'espère, restera accessible, pédagogique et dynamique. C'est parti ! Mais avant de commencer, si vous ne voulez pas rater un épisode et en recevoir une notification, je vous invite à vous abonner à l'émission, cela fera aussi grandir la communauté Explosez également le bouton j'aime sur votre plateforme d'écoute préférée, cela m'aidera énormément et récompensera également le travail que je fais. N'hésitez pas à me faire part dans les commentaires des sujets que vous souhaiteriez que j'aborde, car c'est vous qui faites vivre le cœur de ce podcast. Faisons un bref rappel des épisodes que vous pourrez retrouver dans les différents liens en haut de la vidéo. Le premier vous expliquait ce qu'était donc le cholestérol, son rôle dans l'organisme et sa structure, et le lien se trouve par ici. Le second permettait de comprendre que le problème dans les maladies cardiovasculaires, ça n'était pas le cholestérol en lui-même, mais les transporteurs du cholestérol qui se déposent au niveau des artères que l'on appelle les lipoprotéines. Pareil, vous pouvez retrouver le lien en haut également. Le troisième traitait donc des trois lipoprotéines les plus impliquées dans les désordres autour du métabolisme du cholestérol, LDL, HDL et lipoprotéines a, les fameux bons et mauvais cholestérols pour simplifier, le lien de la vidéo est ici. Le quatrième consacré à la synthèse du cholestérol par le foie et du rôle de l'alimentation notamment du sucre dans l'hypercholestérolémie contre toute attente. vis-à-vis des graisses animales qui sont trop souvent mises en avant. Et encore une fois, le lien est par ici. Le cinquième parlait des différents traitements médicamenteux pour faire baisser le LDL cholestérol, statine, ezéthymib, anti-PCSK9, sans oublier les plus anciens et les petits nouveaux comme l'acide bimbédoïque. Par ici, le lien. Sixième épisode consacré aux statines, ces médicaments qui sont très puissants et qui ont autant de... autant sauvés de vie à lorsqu'ils ont été sous les projecteurs avec des débats enflammés sur le fond de fake news. Aujourd'hui, les idées sont claires et si vous souhaitez en savoir plus, je vous invite à retrouver l'épisode par ici. Le septième parlait des mesures non médicamenteuses pour faire baisser le mauvais cholestérol. On y parlait d'hygiène de vie, d'alimentation, de phytostérol, d'activité physique, de contrôle du poids. Bref, plein de conseils pratiques à retrouver également dans l'épisode par ici. Aujourd'hui, nous allons donc parler de la synthèse, en quelque sorte, donc de la prise en charge de l'hypercholestérolémie sous l'angle d'un concept très important qui est le risque cardiovasculaire. Mais avant de vous faire découvrir tout cela, place à la minute, réponse à vos questions. Aujourd'hui, je réponds à la question de GGTube. Comment interprétez-vous le résultat de l'étude coréenne portant sur 12 millions de personnes qui concluent par « plus le taux de cholestérol est bas, plus le risque de mourir prématurément, toute cause confondue est haut » . Alors, la question n'est pas simple, mais je vais essayer d'y répondre. Tout d'abord, plusieurs travaux ont mis en évidence ce que l'on appelle une courbe en U, entre le taux de cholestérol total, ou LDL, et la mortalité globale. Concrètement, des taux très bas, par exemple en dessous de 160 mg par décilitre, sont associés à une surmortalité, mais qui est souvent liée à des infections, des cancers ou un mauvais état nutritionnel qu'on peut nommer la dénutrition. Mais attention, corrélation n'implique pas causalité. L'idée, c'est que ce ne serait pas le cholestérol bas qui provoque la mort, mais plutôt le fait que des maladies graves, telles que des cancers, des infections, des inflammations chroniques ou un état de dénutrition, vont entraîner une baisse du cholestérol tout en augmentant donc la mortalité. Autrement dit, chez les personnes âgées ou fragiles, un cholestérol bas peut vraiment être un marqueur de fragilité ou de mauvaise santé, indépendamment de tout risque cardiovasculaire. En revanche, chez les personnes qui ont été étudiées dans de grands essais randomisés comme 4S, HPS ou Jupiter, où l'on abaisse intentionnellement le LDL par statine, ces études montrent clairement une baisse de la mortalité tant cardiovasculaire que globale. C'est la preuve aussi solide que faire baisser le LDL, c'est bénéfique lorsqu'on cible les bons patients. Revenons à l'étude coréenne. Oui, elle repose sur 12 millions de sujets, ce qui lui donne une puissance statistique énorme, c'est indiscutable, mais quand même, elle souffre de plusieurs biais méthodologiques. Tout d'abord, elle ne mesure que le cholestérol total, sans distinguer le LDL, le HDL, les triglycérides, la lipoprotéine petit a, etc. Ensuite, elle ne prend pas bien en compte des variables confondantes comme le tabac, l'alimentation, l'inflammation, le statut socio-économique, le poids, l'activité physique. Elle peut aussi être affectée par un biais de suivi, notamment dans les premiers mois après le prélèvement quand une maladie grave non encore diagnostiquée entraîne une baisse du cholestérol et un décès. Et enfin, on ignore si cette baisse de cholestérol était spontanée ou provoquée, à savoir par un traitement ou un changement de mode de vie. Au final, un cholestérol basse spontané dans ce contexte doit... plutôt être vu comme un signal d'alerte, un indicateur de fragilité ou de maladie. En revanche, un cholestérol abaissé volontairement chez un patient à risque, c'est un effet protecteur, comme démontré dans les essais randomisés. En conclusion, cette étude coréenne souligne bien la différence entre valeur biologique isolée et contexte clinique. Un chiffre, ça ne suffit pas à tout. Ce qu'il faut comprendre, c'est... pourquoi le cholestérol est bas. Dans la suite de l'émission donc, nous verrons justement pourquoi il est plus pertinent de choisir un traitement non pas en fonction d'un seuil, mais vraiment selon cette notion de risque cardiovasculaire global. Continuez donc à me poser vos questions et j'en choisirai une pour le prochain épisode. Alors, à vos claviers ! Allez ! On y va et commençons par le début. Qu'est-ce que l'on entend par risque cardiovasculaire ? En termes simples, il s'agit de la probabilité qu'une personne développe une maladie du cœur ou des vaisseaux comme un infarctus du myocarde, un accident vasculaire cérébral, un arrêt cardio-respiratoire dans une période de temps donnée. En quelque sorte, c'est comme une prévision météo pour votre cœur. Quelle est la chance, ou plutôt dans ce cas-là le risque, qu'un orage cardiovasculaire survienne ? La définition officielle le dit ainsi. Le risque cardiovasculaire, c'est la probabilité de survenue d'une maladie ou d'un accident cardiovasculaire pour un individu. Et pour mieux comprendre, prenons une illustration concrète. Si l'on vous dit, vous avez 10% de risque de faire un infarctus dans les 10 ans, Cela signifie qu'en moyenne, sur 100 personnes qui auraient le même profil que vous, 10 feront un infarctus dans la décennie à venir. Ce n'est évidemment pas une certitude pour vous personnellement, c'est une probabilité statistique basée sur des données médicales. Le risque cardiovasculaire n'est donc pas quelque chose de tangible en soi, c'est un calcul qui estime le risque que survienne un événement. Il dépend de nombreux facteurs qui sont propres à chaque individu, et... on va les détailler bientôt. Le risque global, ce n'est pas simplement donc la somme de petits risques, c'est vraiment multifactoriel. En effet, on a identifié un certain nombre de facteurs qui favorisent les maladies cardiovasculaires et ces facteurs, que l'on appelle des facteurs de risque, ne s'additionnent pas, ils se potentialisent. En clair, plus vous cumulez des facteurs de risque, plus il s'aggrave le danger les uns des autres. et élèvent exponentiellement votre risque global. C'est pourquoi deux personnes du même âge peuvent avoir un risque cardiovasculaire très différent, tout va dépendre de leur profil individuel. En résumé, le risque cardiovasculaire, c'est votre score personnel de probabilité de faire un problème cardiaque ou vasculaire, et donc connaître ce risque est crucial car Bonne nouvelle, on peut agir sur une partie de ce risque et on va y revenir. Avant de plonger dans les chiffres, il faut remettre un peu l'église au milieu du village sur quelques notions de statistiques. Rien de compliqué est promis, mais c'est utile pour comprendre ce que l'on lit parfois dans les études, mais c'est aussi intéressant dans la presse. En médecine, vous verrez souvent parler de risque absolu et de risque relatif. Le risque absolu, c'est assez simple. C'est votre probabilité brute d'avoir un événement dans un certain temps. Par exemple, vous avez 10% de risque de faire un infarctus dans les 10 ans. Autrement dit, 10 personnes sur 100 dans la même situation auront un problème. C'est très concret. Le risque relatif, lui, il va comparer deux groupes. Par exemple, fumer double le risque de crise cardiaque. Ça veut dire que les fumeurs ont deux fois plus de risques que les non-fumeurs d'avoir cet événement. Ou pour un médicament, quand on dit réduction du risque relatif de 20%, les personnes traitées ont 20% de risque en moins par rapport à celles qui ne sont pas traitées. Et le problème de ces deux notions, c'est que si votre risque de départ est faible, la réduction absolue va rester minime. Par exemple, passer de 1% à 0,8%, ce n'est évidemment pas la même chose que passer de 30% à 24%. Et pourtant dans les deux cas, le risque relatif a bien diminué de 20%. C'est pour ça que les médecins regardent d'abord le risque absolu. Une statine, après un infarctus, il va apporter un gros bénéfice. Par contre, chez quelqu'un qui est à faible risque, l'impact en risque absolu sera donc beaucoup plus modeste. C'est pour cela qu'on réserve certaines mesures à des patients qui sont à risque significatif d'événements en risque absolu. Et donc, j'espère que ces explications vous permettent aussi de mieux comprendre l'approche thérapeutique en cardiologie, ce que les cardiologues utilisent aussi pour justifier des actions thérapeutiques. Retenez aussi que le risque dépend du temps. En cardiologie, on raisonne souvent à 10 ans. C'est une échelle de temps qui est intéressante pour voir des effets à plus long terme. Les scores qu'on utilise viennent justement de grandes bases de données. Ce n'est pas une boule de cristal. Ils donnent une estimation qui est basée sur des gens qui vous ressemblent. Mais ça reste une probabilité, ce n'est pas une prédiction individuelle. C'est pour cela qu'il faut garder une certaine distance critique face aux témoignages anecdotiques qu'on va pouvoir voir circuler sur les réseaux sociaux. Typiquement, vous l'avez déjà vu, la mamie qui boit du whisky à tous les repas, qui fume depuis 60 ans, et qui vous dit avec un petit sourire un peu de défiance qu'elle est en pleine forme à 95 ans. Évidemment, ces cas particuliers font sourire, ils sont l'exception, et ça n'est évidemment pas la règle. Ne vous laissez donc pas piéger par ces anecdotes. Elles sont amusantes, mais scientifiquement, elles sont assez peu informatives. Car si vous tirez une conclusion à partir d'un seul cas, c'est justement là où vous tombez dans le biais de confirmation. En prévention, ce qui compte, c'est ce que disent les grandes tendances, ça n'est pas les exceptions. Et en termes de statistiques, une probabilité, ça n'est pas une destinée. Par contre, réduire son risque, c'est vraiment tirer et mettre les bonnes cartes de son côté. Voilà tout. Voyons maintenant comment votre médecin détermine ce risque. Comment donc les médecins vont mesurer aussi votre risque cardiovasculaire ? En pratique, ils vont passer en revue vos facteurs de risque individuels, puis éventuellement utiliser des outils de calcul que l'on appelle des scores, et enfin s'appuyer sur quelques examens cliniques ou complémentaires pour affiner leur réévaluation. On va donc détailler ces étapes. Parlons des facteurs de risque cardiovasculaire. Je ferai un épisode dédié car c'est important de ne pas survoler cet aspect de la cardiologie tellement ça tient une place centrale. Mais pour faire simple, retenez qu'un facteur de risque cardiovasculaire, c'est toute caractéristique ou habitude de vie qui va augmenter la probabilité de développer une maladie cardiovasculaire. Certains facteurs de risque ne sont pas modifiables, c'est pour ça que nous ne sommes pas égaux et en tout cas on ne peut pas agir dessus directement. Ça va être le cas de l'âge, plus on vieillit, plus le risque cardiovasculaire augmente. Et aussi chez les hommes, sachez que ça commence assez tôt, dès l'âge globalement de 35 ans, on voit des courbes en tout cas différentes par rapport à avant 35 ans. Et chez les femmes, ça grimpe surtout. après la ménopause, qui est donc une période qui devient à risque pour les femmes. Il y a également le sexe. Les hommes sont plus à risque que les femmes, qui évidemment, comme je vous l'ai dit, vont les rattraper surtout à la ménopause. Et puis, il y a les antécédents familiaux. Si votre père a eu un infarctus avant 50-55 ans, ou votre mère avant 60-65 ans, vous avez un risque plus élevé. On n'hérite donc pas que des maisons. on hérite aussi parfois d'une fragilité cardiovasculaire. Mais heureusement, il y a aussi des facteurs modifiables sur lesquels on peut agir. Le tabac tout d'abord, vous le savez, j'ouvre en tout cas et j'enfonce une porte ouverte, le tabac abîme les artères. Et même quelques cigarettes par jour, ça compte. Il y a l'effet dose, à savoir... combien de cigarettes vous fumez et l'effet temps, à savoir depuis combien de temps. Et la bonne nouvelle, c'est qu'un an après l'arrêt du tabac, le risque d'infarctus est déjà divisé par deux. C'est énorme ! L'hypertension artérielle, qu'on appelle aussi parfois le tueur silencieux, the silent killer pour les anglo-saxons, l'hypertension artérielle va user les artères sans bruit et elle va pouvoir mener à l'infarctus, à l'accident vasculaire cérébral, à de l'insuffisance cardiaque, et donc c'est vraiment à surveiller de près. Le diabète, surtout s'il s'agit d'un diabète de type 2, ancien, maltraité, trop de sucre, dans le sens, ça va abîmer les vaisseaux. Et c'est tellement lié au cœur qu'on le considère presque comme une maladie cardiovasculaire à part entière. L'hypercholestérolémie, surtout le LDL en excès, je ne vous l'apprends plus puisqu'on est au huitième épisode que je fais sur le cholestérol. Eh bien, ce cholestérol va se déposer dans les artères et former des plaques d'athérome. Encore une fois, je ne vous l'apprends plus. Et si le HDL, en tout cas le bon cholestérol, est trop bas, également, ça n'est pas top non plus. Et puis, il y a le manque d'activité physique, le surpoids ou l'obésité, surtout s'il y a un syndrome métabolique avec un périmètre abdominal augmenté qui va donc dépasser 102 cm de tour de taille au niveau du nombril chez l'homme et 88 cm chez la femme. Également, une alimentation déséquilibrée, le stress, des troubles du sommeil comme le syndrome d'apnée du sommeil. Et pareil, j'ai déjà fait un épisode que vous pouvez retrouver par ici. et bien... Tout cela pèse lourd sur la balance du risque. Enfin, il y a quelques facteurs de risque qui sont moins connus, mais qui sont tout aussi importants, dont on parle vraiment de plus en plus. Ça va être les maladies inflammatoires chroniques, comme le psoriasis, la polyarthrite rhumatoïde, les maladies inflammatoires chroniques de l'intestin, que l'on appelle les MICI, la BPCO pour bronchopneumopathie chronique obstructive, l'insuffisance rénale, qui est vraiment très particulière et qu'il faut vraiment dépister. certaines maladies psychiatriques également, de même que l'isolement social, la précarité ou encore la pollution de l'air. Bref, vous voyez qu'il y a des facteurs que l'on ne va pas pouvoir changer et donc on va devoir évidemment les surveiller, mais en tout cas, il y a tout ce que l'on peut changer et c'est là qu'il faut agir. Parce que oui, vous avez vraiment du pouvoir sur votre risque cardiovasculaire. Après cette revue des facteurs de risque cardiovasculaire, vous comprenez que chacun de ces facteurs augmente votre risque global. Et souvenez-vous, lorsqu'ils sont combinés, le risque monte en flèche de manière exponentielle. Par exemple, un fumeur hypertendu diabétique cumule sur le papier trois facteurs de risque majeurs, mais en réalité, son risque est bien plus que triple par rapport à quelqu'un qui n'en a aucun. A l'extrême, on parle de personnes à très haut risque quand elles ont déjà fait un accident cardiovasculaire ou qu'elles cumulent un diabète avec d'autres facteurs de risque cardiovasculaire, etc. On va le détailler prochainement et dans ces cas, on sait que leur probabilité de récidive ou d'événement futur est très élevée. Parlons maintenant des scores et des calculatrices de risque global. Pour aider à quantifier ce risque, les médecins ont mis au point des scores de risque. Ce sont des outils sous forme de tableaux, d'applications ou même de calculatrices en ligne que vous pouvez retrouver facilement, qui vont intégrer plusieurs facteurs de risque à la fois pour donner un pourcentage de risque. Mais pour comprendre cela, je voudrais vous parler des jalons historiques du concept de risque cardiovasculaire. C'est important pour comprendre ce vers quoi on va. Et c'est peut-être aussi pour ça qu'on dit que l'avenir est un long passé. Le concept de risque cardiovasculaire global, il n'a pas toujours existé tel quel. Il s'est développé au cours du XXe siècle à mesure que la science médicale progressait et que nos sociétés étaient confrontées à une épidémie de maladies cardiaques. Un petit retour en arrière va permettre de comprendre d'où viennent nos connaissances actuelles sur ces facteurs de risque. Au début du XXe siècle, les crises cardiaques étaient mal comprises. On ne savait pas très bien pourquoi un tel faisait un infarctus et pas son voisin. C'est vraiment après la Seconde Guerre mondiale qu'ont démarré de grandes études épidémiologiques pour percer ce mystère. La plus célèbre est sans doute l'étude de Framingham, du nom d'une petite ville du Massachusetts aux Etats-Unis. En 1948, on a commencé à suivre... toute la population adulte de cette ville, génération après génération, en enregistrant leur état de santé, leurs habitudes de vie et en notant ce qui développait des problèmes cardiaques. Au fil des années, Framingham a révélé des corrélations claires. Les personnes hypertendues et celles avec un cholestérol élevé avaient bien plus d'infarctus que les autres. Ce furent donc les premiers facteurs de risque identifiés au début des années 60. Et par la suite, Framingham en a développé d'autres, comme l'impact du tabagisme, du diabète, l'importance de l'activité physique. Ils ont dévoilé tous ces facteurs. Et d'ailleurs, c'est dans les publications de l'étude de Framingham qu'est apparu pour la première fois le terme facteur de risque au sens médical. C'était une vraie révolution conceptuelle, on passait d'une vision plutôt fataliste, à savoir la crise cardiaque, ça vous tombe dessus par malchance, à une vision plus préventive, à savoir on peut estimer et réduire ce risque. D'autres travaux fondateurs ont suivi à travers le monde, il y a eu l'étude des 7 pays menés par Hansel Kies, qui a lié la diète alimentaire, majoritairement les graisses saturées, au cholestérol et aux maladies cardiaques. Aussi, des études en Europe, en Asie, etc. vont confirmer et compléter Framingham. En Europe, dans les années 80-90, des cohortes comme l'étude MONICA de l'OMS ou l'étude prospective cardiologique de Mulhouse en France ont affiné notre connaissance de l'épidémiologie cardiovasculaire. Tout cela a abouti à la création de tables de risque, les premières tables de risque globales, vont dériver de Framingham, qui est donc la plus connue et qui reste le fameux score de Framingham. Puis l'Europe a développé sa propre table que l'on appelle SCORE, S-C-O-R-E, au début des années 2000. Les recommandations européennes publiées en 2003 formalisaient ce score, oui ça semble un peu redondant, pour estimer justement le risque de décès cardiovasculaire à 10 ans. C'était évidemment un tournant. Désormais, les cardiologues avaient un outil chiffré pour parler de risque aux patients et décider des traitements préventifs. Depuis, ce score a été mis à jour avec une version en 2021 que l'on appelle Score 2. Donc plus récente, elle intègre aussi le risque d'événements non fatales, pas uniquement le risque de décès mais le risque aussi de maladies. Et cela s'adapte mieux au pays selon leur taille et le taux de maladies cardiovasculaires. En France, la notion de risque cardiovasculaire global est entrée dans le langage courant des médecins, surtout à partir des années 2000 avec les campagnes de prévention et les guides de la Haute Autorité de Santé qui incitent à évaluer ce risque à chaque consultation de médecine générale pour les patients d'un certain âge. On peut aussi mentionner l'étude SCORE France, dérivée donc de SCORE, qui a calibré le score pour la population française. Bref. En quelques décennies, on est passé d'une cardiologie qui réagissait aux accidents à une cardiologie qui va tenter de les prédire et de les prévenir. Et personnellement, je trouve ça plutôt fascinant. Ce changement de paradigme a sauvé des millions de vies, littéralement. Les statistiques en témoignent, la mortalité par infarctus a chuté dans les pays développés, en partie grâce à la diminution du tabagisme, au meilleur contrôle aussi des facteurs de risque. et à certains médicaments, dont les statines. Pour l'anecdote historique, avant ces grandes études, certaines idées fausses régnaient. Par exemple, et vous pouvez le retrouver encore sur internet, au début du XXe siècle, on pensait que la personnalité de type A, à savoir stressé, compétitif, était la cause principale des infarctus. Ou alors, on accusait principalement l'hérédité. Et c'est donc à partir des données de Framingham qu'on a pu dire, non Dans ce qui ressort, il y a la tension artérielle, le cholestérol, etc. Le concept de multifactorialité du risque a émergé de là, et aujourd'hui, on continue d'enrichir ce concept. Par exemple, on va étudier des nouveaux facteurs de risque comme certaines particules sanguines, des marqueurs d'inflammation, ou encore le rôle du microbiote intestinal, ces fameuses bactéries que l'on a dans notre intestin, et je pourrais aborder ça avec vous dans une autre émission. Le développement de concepts de risques cardiovasculaires, c'est donc une histoire en évolution, et ça a commencé au XXe siècle, et heureusement, ça continue avec des outils modernes. Détaillons un peu le dernier score de risques cardiovasculaires utilisés en médecine cardiovasculaire en Europe. L'un des plus utilisés s'appelait avant 2021 le score SCORE. SCORE, ça voulait dire Systematic Coronary Risk. Evaluation. Ce modèle de 2003, il est passé après les recommandations de la Société Européenne de Cardiologie à une version bien plus complète en 2021 donc, qui s'appelle SCORE 2. Pourquoi ce changement ? Parce que l'outil SCORE mis en place par la Société Européenne de Cardiologie datait de 2003 et elle permettait d'estimer pour une personne entre 40 et 65 ans le risque de décéder d'un accident cardiovasculaire dans les 10 prochaines années. Il utilisait des données simples, à savoir l'âge, le sexe, le tabac, la pression artérielle et le cholestérol. On obtenait alors un pourcentage, par exemple, 5% de risque de décès d'infarctus ou d'AVC dans les 10 ans. On le représentait souvent avec une grille de couleur, vert si le risque était très faible, à moins de 1%, rouge foncé si le risque était élevé, à plus de 15% sur 10 ans, etc. C'était plutôt simple, mais c'était incomplet. Et donc, pourquoi est-on passé à SCORE2 ? Car la médecine a changé. On vit plus longtemps, on traite mieux l'hypertension, le diabète, le cholestérol, et surtout, on veut éviter les maladies, on ne veut pas seulement des morts. Donc SCORE, ça ne prenait pas en compte la mortalité et les maladies, comme les infarctus, non fatales surtout, et les ABC dont on survit, mais qui peuvent évidemment laisser des séquelles. C'est comme si on disait, si vous ne mourrez pas, tout va bien. Et ça, évidemment, ça n'est plus acceptable. Donc, en 2021, les experts ont mis à jour cet outil qui est donc le SCORE2. Ce SCORE2, c'est la nouvelle génération de calculs de risques cardiovasculaires. Ça prend en compte les décès, mais aussi les infarctus, les AVC non fatales, les événements graves qui sont donc évitables. Cette cohorte a intégré plus de 700 000 patients qui sont issus de 45 cohortes européennes avec des données. Plus actuel, plus représentatif de nos modes de vie aujourd'hui. Et surtout, score 2 s'est adapté aussi à d'autres tranches d'âge. On va avoir le score 2 classique, entre 40 et 69 ans, et le score 2 OP pour older person, de 70 à 89 ans. On évalue donc mieux aussi les seniors qui étaient un peu oubliés du score initial. Autre nouveauté, le score 2 s'adapte à la... région de résidence. Attention, ça n'est pas l'origine ethnique ni le pays de naissance. Car oui, le risque cardiovasculaire, il n'est clairement pas le même selon l'endroit où vous vivez, comme en Norvège ou la France, l'Europe de l'Est. Et ça, est-ce que vous le saviez ? Si vous étiez au courant, n'hésitez pas à me le faire part dans les commentaires. Score 2, il va classer les pays en 4 niveaux de risque. Très bas, bas, modéré et élevé, et ça permet donc d'avoir une estimation plus juste et plus réaliste. Et si cela vous amuse, vous pouvez retrouver justement chaque pays et son niveau de risque particulier. Ça, évidemment, c'est sur Internet. Le score 2 a aussi intégré la notion de cholestérol HDL dans son calcul, ce qui permet finalement de mieux isoler la part réellement athérogène des lipoprotéines, c'est-à-dire toutes celles en dehors du HDL qui lui joue un rôle plutôt protecteur. Et donc, la question que vous vous posez certainement, pourquoi SCORE2 n'intègre pas d'autres facteurs de risque connus comme les antécédents familiaux de maladies cardiovasculaires précoces, le diabète, notamment chez les diabétiques, on va utiliser en tout cas SCORE2 diabète spécifiquement, mais aussi l'obésité avec l'IMC, la sédentarité, la fonction rénale à travers le DFG pour le débit. de filtration glomérulaire, le niveau socio-économique, etc. Eh bien, le but de SCORE2, c'est de rester simple et utilisable par tous. Ça permet un outil rapide, reproductible et applicable, surtout à grande échelle, même en première ligne de soins. Un patient avec un SCORE2 à 4%, mais qui a un père qui est décédé d'un infarctus à 45 ans et qui serait fumeur, obèse et sédentaire, n'aura... évidemment pas le même profil de risque qu'un autre qui aurait 4% sur son score 2, sans ces facteurs de risque évidemment. C'est pourquoi les recommandations ESC 2021 précisent bien que le score 2, il donne une base, mais qu'il doit être évidemment ajusté en fonction du profil global du patient. Alors, bien sûr, score 2 ne fait pas tout. Il ne connaît pas votre histoire familiale, ni votre niveau d'activité physique, etc. Ce qu'on a vu. Mais pourtant, ces éléments vont compter énormément. Et c'est pour ça qu'on ne soigne pas un score, on soigne une personne. Et ce score, on l'utilise comme un point de départ pour réfléchir ensemble à la meilleure stratégie de prévention. Sachez aussi que même s'ils ne sont pas intégrés directement dans le score, ces facteurs sont pris en compte évidemment pour affiner la prise en charge. Concrètement, ça veut dire qu'on peut mieux estimer votre risque global même si vous êtes jeune ou si vous avez juste un peu d'hypertension ou un cholestérol limite. Et surtout, ça va aider votre cardiologue pour décider justement à savoir est-ce qu'on commence un traitement ? Est-ce qu'on insiste sur l'alimentation ou l'activité physique ? Est-ce qu'on surveille ou est-ce qu'on agit tout de suite ? Vous voyez qu'avec SCORE2, on ne va plus traiter un chiffre isolé, mais on traite un risque global et ça, ça change tout. Mais alors, quand on dit qu'un patient est à haut risque ou à bas risque cardiovasculaire, cela dépend... du risque selon score 2 avant 70 ans ou score 2 OP après 70 ans. Et donc, on va distinguer 4 grandes catégories de risques. Risques faibles à modérer, en tout cas 1 et 2, en dessous de 5% de risque, donc de score 2 à 10 ans chez les moins de 50 ans, score 2 en dessous de 7,5% chez les 5 ans de 69 ans, et score 2 en dessous de 10% après 70 ans. au-dessus de ces seuils, mais sans autre facteur aggravant majeur. On entend par là que si vous avez ces facteurs, vous passez directement dans la catégorie de risque très élevé. Ça va être le cas chez les patients qui ont déjà une maladie cardiovasculaire avérée, un antécédent d'infarctus du myocarde, de pose de stent, d'AVC ischémique, d'artérie des membres inférieurs. D'anévrismes au niveau de la horte abdominale, des plaques hétéromatocynificatives au niveau des artères qui sont retrouvées sur des examens d'imagerie comme un scanner ou un Doppler, un diabète qui serait compliqué, un taux de LDL très élevé comme dans l'hypercholestérolémie familiale ou une insuffisance rénale sévère. Ces seuils, vous l'avez compris, ils aident à décider du niveau d'intervention nécessaire. Plutôt hygiène de vie seule, Traitement médicamenteux, quel sera alors l'objectif de LDL ? Est-ce qu'il sera plus strict ? Et donc vous verrez que ça sera l'objet de la prochaine émission pour comprendre les analyses sanguines et les fameux tableaux que vous pouvez voir quand on parle de taux de cholestérol attendu puisque ça va dépendre directement de ce niveau de risque cardiovasculaire. Encore une fois, plus on vieillit, plus on tolère un risque un peu plus élevé. Mais ce qui nous intéresse, c'est de savoir si vous êtes au-dessus. de la moyenne pour votre âge. Retenez bien qu'on n'évalue pas chaque facteur individuellement, on va le mettre en perspective les uns avec les autres pour estimer ce fameux risque total à 10 ans et adapter la prise en charge au bon niveau. Et c'est pour ça qu'on ne traite pas juste une tension ou un cholestérol. On traite ce niveau de risque cardiovasculaire global, ça change tout, ça permet de personnaliser la prévention, ça permet de ne pas médicaliser à tort, mais aussi de ne pas rater ceux qui ont besoin d'un vrai coup de main. Donc n'imaginez pas, comme on l'entend souvent, que votre médecin ou votre cardiologue dégaine son stylo et son ordonnancier à la première occasion. il vous restera en tout cas si vous êtes à non très haut risque cardiovasculaire, et une chance d'éviter le médicament, s'il n'y a pas déjà en tout cas cette maladie cardiovasculaire avérée, et encore, faut-il que les actions soient entreprises activement par les patients. Maintenant qu'on a vu ce qu'était le risque cardiovasculaire et son évaluation, je voudrais prêcher un peu pour ma paroisse et vous faire comprendre pourquoi cette notion de risque cardiovasculaire est cruciale en cardiologie. On peut se demander, est-ce qu'après tout, ce calcul de risque, c'est vraiment utile ? Eh bien, la réponse, c'est oui. Et c'est même un pilier de la cardiologie moderne. Le risque cardiovasculaire, c'est ce qui guide le diagnostic, la prévention et les traitements. En ce qui concerne le risque et le diagnostic tout d'abord, on va prendre deux patients qui arrivent aux urgences avec une douleur thoracique. D'un côté, vous avez un homme de 65 ans qui fume, qui a de l'hypertension artérielle, qui a du cholestérol. Et de l'autre côté, vous avez une femme de 30 ans sans antécédent. Ils viennent pour une douleur dans la poitrine. Même symptôme, mais pas du tout le même niveau de suspicion. Chez le premier, l'hypothèse d'un infarctus est beaucoup plus probable. C'est ça le rôle du risque, affiner les priorités et ajuster le niveau de vigilance. Même chose chez un diabétique par exemple hyper tendu de 55 ans qui se plaindrait d'essoufflement. On va évidemment penser à un problème de cœur, alors que chez un jeune sportif par exemple, qui aurait arrêté un peu l'activité physique et qui se plaint d'essoufflement, eh bien on va plutôt penser à un problème respiratoire ou à un déconditionnement musculaire. Vous comprenez que cette notion de risque, elle oriente un peu comme un indice dans une enquête. Ensuite, parlons du risque cardiovasculaire en prévention. C'est un peu ce qu'on a vu. Vous avez compris que le concept ici va prendre toute sa signification. Identifier les facteurs de risque, c'est pouvoir agir avant que la maladie ne se déclare. Et ça fonctionne. En France, La mortalité cardiovasculaire a été divisée par 3 depuis les années 80 grâce à la prévention et au traitement. Donc, agir sur le risque, c'est vraiment aider quelqu'un à arrêter de fumer, traiter une pression artérielle qui serait trop élevée, équilibrer un diabète, prescrire une statine pour faire baisser son taux de cholestérol. Et les chiffres sont clairs. Baisser le LDL de 1 millimole par litre, ça diminue le risque cardiovasculaire d'environ 20%. Et faire baisser la pression artérielle de 10 millimètres de mercure, ça réduit le risque d'AVC de 35%. C'est énorme. Donc, si votre médecin vous... propose un traitement alors que vous vous sentez bien, c'est justement pour prévenir un futur accident. Le niveau de risque va aussi permettre d'adapter l'intensité des mesures. Un patient qui est à faible risque pourra se contenter de mesures simples alors qu'à l'inverse quelqu'un qui est à très haut risque comme après un infarctus, et bien cette personne aura besoin d'un traitement plus poussé. Statine, aspirine, etc. Tout va être question d'équilibre bénéfice. Ensuite, le score de risque, c'est devenu un outil essentiel qui permet de personnaliser la prévention et aussi d'éviter à la fois de surtraiter et de passer à côté de ceux qui en ont vraiment besoin. C'est un impact massif. En France, 15 millions de personnes sont suivies pour des maladies cardiovasculaires ou pour leurs facteurs de risque. C'est énorme et grâce à cette approche, des vies sont sauvées chaque jour. Côté traitement, même chez un patient qui serait déjà malade, on continue à évaluer le risque pour adapter le suivi. Par exemple, après un infarctus, il faut maîtriser tous les facteurs de risque pour éviter une récidive. Arrêter de fumer, par exemple, ça va réduire le risque de décès de plus d'un tiers. C'est aussi important... que les médicaments. Le risque intervient également dans la stratégie de certains traitements plus lourds. Par exemple, pour décider de faire une intervention de chirurgie cardiaque non urgente, votre cardiologue va évaluer un risque opératoire et on va le mettre en balance avec le bénéfice attendu. Vous comprenez que, là encore, c'est une autre facette de la notion de risque en cardiologie, calculer le risque de l'intervention en lui-même. En résumé, le risque cardiovasculaire, c'est une boussole. Pour diagnostiquer, pour prévenir, pour traiter. Et votre cardiologue, il l'a toujours en tête. Même s'il reste des inconnus dans l'équation, il sait sur quoi il peut agir et il le fait. Terminons l'épisode avec quelques perspectives intéressantes. Intelligence artificielle. C'est très à la mode, mais c'est très puissant et très intéressant pour les années à venir, surtout quand on l'associe avec le big data, c'est-à-dire la tripotée d'informations qu'on peut vraiment avoir et mettre dans des algorithmes pour essayer de retirer des facteurs de risque, notamment pour de la médecine préventive personnalisée. En tout cas, c'est vraiment le futur de l'évaluation du risque en quelque sorte. Tournons-nous un petit peu vers l'avenir et voyons ce que ça pourrait donner pour évaluer un risque cardiovasculaire dans 10 ou 20 ans. Eh bien, sachez que grâce aux nouvelles technologies, on va entrer dans l'ère passionnante de l'intelligence artificielle et du big data pour prédire de manière plus fine un risque et de manière aussi plus personnalisée. Par exemple, aujourd'hui, on va utiliser ce que l'on appelle le score calcique. C'est un scanner au niveau du massif cardiaque qui va calculer, selon des algorithmes en tout cas, un score qui est lié à la charge calcique de vos artères. On sait que plus les plaques athéromateuses, ces fameux dépôts qu'il y a au niveau des artères, sont calcifiées, plus il y a des mécanismes d'inflammation et plus il y a de risques cardiovasculaires à long terme. Pareil. Des chercheurs ont déjà développé des algorithmes qui sont capables d'analyser des scanners cardiaques et de repérer des signes invisibles à l'œil nu. Par exemple, une équipe britannique a montré que l'IA pouvait détecter une inflammation discrète autour des artères qui serait invisible pour un radiologue, mais quand elle est présente, cela multiplie par 10 le risque d'infarctus chez des patients qui seraient pourtant considérés comme à faible risque. Et donc, avec ce genre d'approche, On va pouvoir éviter jusqu'à un infarctus sur 5 simplement en identifiant ces fameux patients à risque caché. Ça n'est pas encore au goût du jour, mais en tout cas c'est en développement. Et ça ne s'arrête pas là. Demain, le risque pourrait être calculé à partir d'un mélange de données classiques, comme la pression artérielle, le cholestérol, mais aussi des données génétiques, des données biologiques, des données également comportementales, voire issues du microbiote. C'est autant fascinant que terrifiant. Il y a également toute une panoplie d'objets connectés qui vont pouvoir suivre des constantes en temps. temps réel et qui vont pouvoir aussi vous alerter dès que le risque augmente. C'est un peu cette fameuse médecine de précision qui est en action avec un suivi sur mesure et en continu. Ça soulève évidemment des questions un peu philosophiques et éthiques, mais en tout cas, on parle de plus en plus de sortir du modèle un score pour tous pour aller vers une évolution dynamique, évolutive donc, individualisée et deux personnes avec des même chiffre aujourd'hui. pourraient donc avoir des risques très différents si l'on prend en compte leur gêne ou leur environnement social. Aussi, le big data, ça permet de révéler des associations inattendues. Par exemple, certaines maladies inflammatoires ou le niveau socio-économique, par exemple, vont pouvoir influencer, et on le sait déjà, le risque de maladies cardiovasculaires. On va peut-être, grâce à ça, pouvoir mieux comprendre les liens et donc mieux cibler les actions de santé publique. Autre évolution probable, la surveillance continue comme on l'a un peu vu, à savoir, plutôt que de faire un check-up une fois par an, on pourrait bientôt suivre en direct l'impact d'un changement d'habitude, comme l'alimentation, le sport, l'arrêt du tabac, tout ça en réel et en live. Ce serait vraiment une vraie révolution, en tout cas dans la prévention cardiovasculaire. Comme on l'a dit, ces innovations vont poser des questions sur la fiabilité des algorithmes, sur la confidentialité des données, sur leurs coûts et des règles éthiques également à mettre en place. L'IA évidemment ne remplacera pas le médecin, mais ça pourra devenir en tout cas un outil assez puissant pour l'aider et l'assister dans ses décisions. En résumé, on va garder en tout cas ce même objectif qu'au temps de l'étude de Framingham, à savoir... prévenir les maladies du cœur et des vaisseaux avant qu'elles ne frappent. Mais vous comprenez que ces outils, ils changent, ils sont en constante évolution, ils s'affinent et ils deviennent plus précis. Et si évidemment on n'atteindra jamais le risque zéro, car il faut bien mourir de quelque chose, comme on dit, et bien chaque progrès dans la prédiction, c'est potentiellement une vie sauvée ou en tout cas des années de vie gagnées en bonne santé. et c'est ça en tout cas qui est aussi important et qui n'est certainement pas anecdotique. Voilà, nous arrivons au terme de cet épisode sur le risque cardiovasculaire. J'espère que ce voyage au cœur de la prévention vous aura éclairé sans vous paraître trop compliqué car c'est un sujet qui est quand même assez technique et déjà spécialisé. Mais retenez une chose, le risque cardiovasculaire, ça n'est pas une fatalité. C'est un indicateur qui nous donne le pouvoir d'agir. Connaître ces facteurs de risque, c'est déjà un premier pas pour mieux les maîtriser. Alors, parlez-en à votre médecin, faites un petit bilan comme on dit si ça n'est pas encore fait, et surtout, ne voyez pas ces chiffres comme abstraits. Ce sont des réels outils pour prendre soin de vous, maintenant et pour les années à venir. Grâce aux efforts de chacun, sachez qu'on a déjà réussi à faire reculer la maladie des artères, comme on l'appelle, qui paraissait inéluctable il y a un siècle. Et avec les nouvelles avancées, intelligence artificielle et big data, on peut espérer aller encore plus loin. Mais cette révolution, elle passera autant par la technologie que par des gestes simples qui ne pourront pas se substituer à cette technologie, à savoir arrêter le tabac, mieux manger, bouger plus. surveiller sa pression artérielle. La haute technologie, évidemment, oui, mais toujours main dans la main avec le bon sens. Dans cette logique de prévention, il y a donc un examen que vous avez certainement déjà dû faire, qui est la fameuse prise de sang pour analyser votre bilan lipidique, que l'on appelle aussi EAL, pour exploration d'une anomalie lipidique. Vous allez y voir évidemment des petites étoiles, des résultats en gras, en gros des codes couleurs, etc. C'est souvent source d'inquiétude, à juste titre ou pas. Donc dans 15 jours, je vous expliquerai comment on lit ces analyses de sang, cholestérol total, HDL, LDL, VLDL, des ratios par exemple, ratio cholestérol total sur LDL ou ratio HDL sur LDL, apolipoprotéine B. Est-ce que aussi 2,2 g de cholestérol par litre de sang ou cholestérol total, c'est grave ? Est-ce qu'un bon HDL va pouvoir compenser un mauvais LDL ? Et pourquoi on ne dose pas plutôt le LDL oxydé ? Autant de questions donc qu'on va éclaircir ensemble. Car au fond, vous l'avez encore une fois compris, après tous ces épisodes, ce que votre médecin va traiter, ça n'est pas un chiffre, notamment sur votre prise de sang, c'est avant tout une personne, et particulièrement ce qui concerne le cholestérol, en réalité il va traiter un niveau de risque cardiovasculaire. Voilà, c'est la fin de ce nouvel épisode. Merci à toutes et à tous d'avoir écouté en plein cœur. Retrouvez-moi sur les réseaux sociaux, Instagram, LinkedIn, YouTube ou TikTok. Et si vous avez aimé l'émission, likez, partagez cet épisode autour de vous. Laissez-moi aussi un commentaire pour me faire part des sujets que vous souhaiteriez que j'aborde, car c'est vous qui faites vivre le cœur de ce podcast. Et rappelez-vous... Si les sujets sur la cardiologie vous intéressent, je vous donne rendez-vous dans 15 jours pour continuer cette aventure ensemble. D'ici là, je vous souhaite une bonne semaine, prenez soin de votre cœur.