- Speaker #0
Vous écoutez En Substance, un podcast d'Addiction France.
- Speaker #1
Bonjour, vous êtes en relation avec le répondeur téléphonique du centre CAP14, antenne du XAPA de l'association Addiction France.
- Speaker #0
Bienvenue dans le quatrième épisode d'En Substance, un podcast produit par l'association Addiction France et réalisé par moi-même, Sylvain Pinot. Merci beaucoup pour vos retours sur le projet et n'hésitez pas à en parler autour de vous. Après avoir abordé différentes thématiques autour de la parentalité et les addictions, on se concentre cette fois... sur une question centrale, celle du tabou. Des Ausha familiaux dénis solidement ancrés, en passant par l'impact des tabous sur le bon suivi thérapeutique, on en parle ouvertement et parfois même avec le sourire. Ces échanges abordent des sujets parfois sensibles, donc si vous cherchez de l'aide ou plus d'informations, vous trouverez des liens utiles en description. Bonne écoute
- Speaker #1
Ah, peut-être la dame qu'on attend. Bonjour. Bonjour ma belle.
- Speaker #0
Désolée, Arme. Pardon Merci. On va commencer par un petit tour de table pour des prénoms. Commencez par ma gauche.
- Speaker #1
Louise.
- Speaker #0
Patrick.
- Speaker #1
Tatiana. Julie. Tu trouves que je me tiens pas bien Voilà, donc j'ai 83 ans.
- Speaker #0
Déjà, on va peut-être commencer par une définition pour vous du tabou, ce que ça représente dans votre parcours. Est-ce que vous pourriez le définir, en tout cas me dire un peu ce que ça représente pour vous, le tabou, peut-être à travers une anecdote ou un épisode spécifique La première image du tabou, c'est que ça me bloque, ça me coupe la parole. Je sais que je n'ai pas le droit de dire une chose, donc je vais être obligé de couper ma phrase ou changer de sujet. Et ce que je connais beaucoup mieux au quotidien, c'est le déni, le mensonge, l'évitement. Mais le tabou pour moi, c'est le gros blanc qui arrive en plein milieu de la conversation. Ce qu'on a bien entendu juste avant. Oui,
- Speaker #1
on a eu un beau blanc là.
- Speaker #2
Pour moi, le tabou, je suis d'accord, c'est comme un gros blanc qui s'impose. Moi, c'est beaucoup le mensonge. C'est-à-dire que même j'ai souvent ressenti un tabou avec mes problèmes de bipolarité où je me retrouvais à l'hôpital et je ne le disais pas à ma famille parce que soit je ne voulais pas les inquiéter et du coup, après, à un moment, j'oublie que je ne l'ai pas dit et je le dis. Et du coup, je me sens encore plus honteuse. Et au niveau de l'addiction, c'est pareil, c'est plus... J'ai peur des répercussions, de la peur, etc.
- Speaker #1
C'est plutôt une peur de ce que ça peut engendrer, quoi.
- Speaker #2
Ouais, voilà.
- Speaker #3
Moi, je rejoins un peu Patrick. Le tabou, pour moi, c'est confus dans ma tête et c'est plutôt relié, en fait, au non-dit. Au déni, pardon, au déni, quand par exemple on me dit ah ben t'as bu aujourd'hui et tout mon premier réflexe c'est de dire non, non, non, la personne qui s'occupe de moi est une personne très fine et très éclairée, et elle me démasque tout de suite et ça me fout la honte. Tout de suite, je réponds par le négatif. Même encore maintenant, je n'ai jamais dit oui.
- Speaker #4
Moi, ce que ça m'évoque, c'est... Je ne sais pas pourquoi, d'office, c'est religieux et moral et lourd. Mais c'est sûr que dans ma famille, le problème que j'ai d'addiction était très tabou. Parce que ni mon père, ni ma mère, ni mes grands-parents, ni personne autour. Personne, je ne suis pas sûre, mais elle avait le même problème que moi. Donc, quand j'ai commencé, puisque j'avais une relation très fusionnelle avec ma mère, à lui faire partie de mon problème, elle voulait bien l'entendre, elle voulait le comprendre, mais elle ne le comprenait pas, elle ne l'acceptait pas, et elle me cachait, elle me cachait même de cousins lointains, par peur que ce jour-là, si je vais en... Pennsylvanie, je me retrouvais dans cette fête en train de boire. Alors le tabou en fait, il venait pas vraiment de moi parce que j'ai deux enfants et très tôt je leur ai fait part. D'abord elles le voyaient et il faut pas prendre les enfants pour des cons et donc j'ai décidé de pas mentir dans ces cas-là parce que je trouvais que c'était malhonnête de dire à des enfants vous mentez pas et donc de mentir par la suite. Mais c'est vrai que dans d'autres situations, on est bien obligé, parfois dans le milieu professionnel, de ne rien dire, puisque c'est tabou. Et quand j'ai regardé la définition, la définition La Rouge, je crois, entre autres, il y avait l'alcool, mais il y avait tout. L'homosexualité, l'alcool, bien sûr, l'inceste et le cannibalisme. Mais dans quel ordre mettons tout ça Parce que le cannibalisme, c'est quand même très sérieusement un tabou, je crois que pour tout le monde, sauf si on est dans une montagne où il n'y a plus rien à manger, et qu'on est tombé d'un avion, qu'on n'a pas le choix. Tout ça, c'est un vrai tabou. Mais c'est vrai que le tabou d'un alcoolique qui a réussi à accepter qu'il l'était, et qui a décidé de dire autour de lui que c'est ça, que c'est ça le problème, que voilà. ça veut pas dire parce que je te le dis j'arrête de boire et je crois que les gens ils se disent ah puisque tu me le dis c'est qu'en fait tu bois plus non c'est pas ça, c'est je te le dis parce que c'est comme ça que c'est mais très vite cette confiance qu'on accorde à cette personne et qui se sent très flattée parce qu'elle est mise dans la confidence elle revient dans ses tabous elle revient dans ses trucs, dans cette famille y'a pas ça, dans cette... voilà Donc c'est compliqué. Je considère que le tabou, il n'est vraiment pas en moi. Je ne mangerai pas d'autres personnes, c'est sûr. Mais le tabou, il est plutôt chez les autres qui veulent absolument certaines foines. pas ouvrir ou accepter d'autres choses qui ne soient pas aussi radicales que ce que je viens de dire.
- Speaker #1
Oui, justement, parce qu'on parle de la famille dans ce podcast, du cercle familial plutôt. Quels sont les non-dits ou les tabous les plus courants dans les familles, selon vous
- Speaker #2
Dans ma famille, j'ai eu la chance d'avoir une mère qui n'a jamais voulu qu'il y ait de tabous ou de choses non dites. Je ne lui parle quand même pas de mes problèmes de drogue. Mais ça, j'ai l'impression que c'est moi, ma propre honte qui le met. Parce qu'elle m'en a déjà parlé elle-même en me disant est-ce que et je lui disais bah non Parce que j'ai aussi envie que mon processus de guérison ne se fasse pas à travers les autres. Et j'ai peur que si je lui dis le processus de guérison va être pour elle et pas pour moi Mais je sais qu'il y a eu... Je suis descendante d'une inceste très lointaine. Et ma mère nous l'a dit très jeune, pas non plus trop jeune, mais elle nous l'a dit parce qu'elle ne voulait pas qu'il y ait ce trauma intergénérationnel qui reste. Elle, elle en avait beaucoup souffert et elle ne voulait pas que ce soit violent. Mais après, l'inceste, c'est quand même un gros tabou dans beaucoup de familles. Mais moi, je les suis très jeunes et je pense que c'était important de savoir aussi d'où... d'où je venais en fait.
- Speaker #0
Pour Patrick, c'est très simple. Je suis le plus beau, le plus fort, le plus intelligent parce que j'appartiens à une famille parfaite. Chez nous, il n'y a jamais aucun problème, aucun problème de santé, aucun problème de performance. Je ne sais pas, je n'ai jamais grillé un feu rouge, je n'ai jamais raté un stop. J'ai jamais eu d'accident, même avec 3 grammes d'alcool, enfin voilà. Et en famille, ce qu'on apprend, c'est à noter le sujet qui fâche. Faut surtout pas se fâcher. Donc il arrive qu'on trouve un sujet qui fâche, qu'on claque des portes, et l'apprentissage, c'est ce sujet, on ne l'abordera plus jamais. Et au bout de 5-6 ans, on atteint la famille parfaite. Voilà. Et donc ça peut être de la santé, ça peut être des incidents à l'école, ça peut être tout. Tu rentres à la maison, tout va bien, il ne s'est rien passé, c'est génial. C'est la famille parfaite, tout va bien. Et j'ai dû expliquer ça à un psychiatre, après un sevrage difficile, aidé par une admission par la police nationale. Donc j'ai fait cinq semaines en milieu fermé, hospitalisé, et à la fin j'ai dit, je fais partie de la famille tout va bien, de la famille parfaite.
- Speaker #1
Du coup on met tout sous le tapis.
- Speaker #0
Exactement. S'il y a quelque chose qui rattache au tabou, moi je pense au crime d'honneur. J'ai eu une spécialité qui n'a pas duré très longtemps, c'est... d'être le premier à 3 grammes dans un mariage, c'est-à-dire à la moitié de l'apéro. Donc, évacuer sur une civière, peut-être pas, puisqu'on n'a pas le matériel comme sur un match de foot, mais ça fait partie de mes capacités en public.
- Speaker #3
Alors, pour moi, le tabou n'est pas lié du fait de l'alcool. Il est lié de mon enfance. Ce qui était tabou, c'est que je n'ai pas connu mon père. Ça a été caché pendant des années. C'était vraiment tabou. À l'école, je n'avais pas de père. J'étais très indisciplinée. Il fallait que je bouge, qu'on me remarque. Je me suis fait virer de l'école trois fois. J'ai toujours voulu savoir d'où je venais. Et quand ma mère s'est mariée, mon beau-père, j'avais 10 ans, 11 ans, on est allé se promener, comme on faisait le dimanche. Ma mère était malade. Et là, de but en blanc, il m'a dit, tu sais qui est ton père Et il me dit, c'est ton oncle. Et alors là, je suis tombée sur le cul, bien sûr. Et puis... Point final, on n'a plus parlé de rien. Ça a été un pavé qui a été jeté dans la main. Moi, j'ai toujours, toujours, toujours, toujours été perturbée du fait que je me suis toujours demandé si j'étais... victime d'un inceste ou si j'étais victime d'un plaisir partagé. Je n'ai jamais su ça, jamais personne ne l'a. Et j'ai toujours eu ça en moi. Et j'ai partagé un temps avec une compagne. C'était formidable, on avait une grande liberté, on faisait plein de choses ensemble. On a découvert que je l'ai emmenée faire de la montagne, je l'ai emmenée et tout ça. Et elle est tombée amoureuse d'un mec absolument épouvantable qui buvait. Et elle aussi donc par la même occasion. Et en fait elle m'a larguée comme ça. Et pour moi ça a été... j'ai été abandonnée pour la deuxième fois. Et alors là ça a été l'horreur. Et c'est là que j'ai commencé à picoler dans le boulot. Et puis après, toujours toute seule. Parce que je suis enfant unique, célibataire et sans enfant. J'ai toujours été le vilain canard de la famille, qui parlait trop fort, qui bougeait trop, qui me faisait taire et tout, alors que les autres étaient parfaits et tout. Et pour que j'admette le fait que j'étais alcoolique, pour moi, c'était pas... Je n'étais pas admissible. Non, je ne suis pas alcoolique. Oui, d'accord, j'aime picoler. Même en perdre la tête. De toute façon, je ne sais même pas si je n'ai pas fait des comas alcooliques. Et donc, j'ai été prise en main par des psychiatres qui ne m'ont absolument pas aidée, qui m'ont bourrée de médicaments. J'avais une liste comme ça de tranquillisants, de trucs et tout. J'ai bouffé tout ce qu'ils m'ont donné et ça n'a servi à rien. Parce qu'il n'y avait pas de paroles, il n'y avait pas de mots qui m'ont été mis dessus.
- Speaker #4
Ça a été un truc par étapes. Alors je suis un enfant qui a été adopté. Bien sûr au début c'est... Le premier mensonge, c'est on t'a choisi tes parents sont morts et voilà. Donc ça, c'est vers 3-4 ans, donc il faut qu'on l'intègre pour pas que quelqu'un d'autre vienne nous le dire, et alors ça, c'est un traumatisme, parce que mentir à un enfant, c'est pas un traumatisme par la suite. Et ainsi de suite, jusqu'au jour où j'ai su, en fait, il fallait que je demande un acte de naissance pour je sais pas quoi, chose que j'avais jamais eue entre mes mains, mes filles devaient avoir... 3-4 ans et je reçois mon acte de naissance où je suis née Tatiana, d'une italienne. Donc elle n'est pas morte du tout. Voilà. Donc toutes ces choses pour dire que tous ces tabous qu'on nous met pour soi-disant. Voilà, c'est les non-dits. On recommence avec les non-dits. On essaye de protéger les... C'est pour ça, je crois, que j'ai dit à mes filles que... Enfin, j'ai essayé de ne pas cacher les bouteilles. J'ai essayé de minimiser les choses, mais je ne cachais pas. Ce qui m'est arrivé, parce que je croyais que c'était inutile et que ça aurait fait plus de mal que de bien. Mais le fait d'avoir caché des éléments qui étaient essentiels, sous l'idée qu'on protège un enfant en lui disant des mensonges, c'est complètement fou. Si on trouve les bons mots, on peut dire à un enfant à peu près n'importe quoi. Enfin, les choses qui sont réelles, sans dramatiser. Parce que sinon, ça mène vraiment, quand on se pose pendant très très longtemps, et même si c'est... inconscient, c'est tout le temps là, la question d'où je viens, d'où je viens, d'où je viens, parce que combien de chansons, poèmes ou autres disent, tu sauras où tu vas quand tu sais d'où tu viens. Alors là, on est un peu coincé, je peux vous le dire, alors, ben voilà, le carburant aide à soit croire qu'on y va, soit à se dire, bon ben, c'est pas pour aujourd'hui que je vais le savoir. Mais voilà, donc tous ces trucs tabous qui semblent assez innocents, protecteurs, acteurs, etc. Je crois que ça crée, pour des personnes qui sont particulièrement sensibles, ça crée un terrain très propice pour les addictions.
- Speaker #1
Pour en revenir à l'addiction, on y est toujours. Pourquoi selon vous les familles choisissent souvent de le garder comme ça sous secret, de ne pas en parler, d'entretenir un tabou au sein même de la famille, du cercle familial Moi j'ai l'impression que...
- Speaker #2
Quand il y a des tabous comme ça, c'est aussi pour ne pas donner d'idées aux autres. J'ai l'impression que la personne qui perpétue le tabou, le silence, ne veut pas donner d'idées aux autres. Moi, personnellement, j'ai des problèmes de santé mentale depuis que je suis enfant. Et en fait, la première fois que j'ai vu un psy à 4 ans, la première fois qu'une psy m'a demandé si j'avais envie de mourir, j'en avais 18. Sauf que depuis mes 4 ans, j'avais envie de mourir. Et en fait, ça me semblait... normal en fait parce que personne m'avait dit que c'était pas normal et en même temps j'ai l'impression qu'il y avait un tabou sur le fait que en fait si on me pose la question ça va me donner envie comme si et j'ai l'impression qu'il ya beaucoup de familles qui pensent que si je parle de mes enfants de mes problèmes d'alcool de mes problèmes ça va leur donner envie de faire pareil mais je pense pas que ce soit vrai que cacher quelque chose donne pas envie On n'en parlait pas, parce que si on n'en parle pas, ça n'existe pas. Pour être la famille parfaite, il ne faut pas en parler pour pas que ça existe. C'est toujours la faute de la personne qui va mal, et c'est pour ça que moi je n'arrive pas à leur parler de mes problèmes de drogue, c'est que je sais que ça va être ma faute, ça va être la faute de mes amis, alors que je considère que c'est aussi une maladie, enfin c'est une maladie l'addiction. Et moi je sais aussi que... J'ai des addictions depuis que j'ai 8 ans, mais j'avais des troubles du comportement alimentaire, donc j'ai commencé à faire de la boulimie à 8 ans. Et en fait, j'ai réalisé qu'il y a 2 mois que c'était une forme d'addiction. Et en fait, personne ne m'a soigné de la boulimie à 8 ans, et du coup, on ne se pose pas... C'est juste une chose qui remplace une autre, qui remplace une autre, qui remplace une autre. Et si on ne parle pas de la première chose, comment on peut parler de la dernière
- Speaker #0
Le truc qui nous soulage, nous, dans l'addiction, c'est au moment où on nous dit Effectivement, il y a une part... héréditaire dans les addictions, dans les vulnérabilités, à certains produits en particulier. Mais on nous dit maintenant, depuis récemment, que ce n'est qu'une part. Ce n'est pas obligatoire. Mais cette hérédité, quelle que soit la maladie, la qualité, le défaut, d'où ça vient On s'arrange toujours pour savoir d'où vient le défaut, donc la culpabilité. Elle vient de quels parents De quelles grand-mères De quels oncles D'où je viens Et dans le d'où je viens, il y a... et l'hérédité et la culpabilité. Et il y a un truc un peu mieux qu'on a en famille, avec les amis, avec les collègues, c'est un autre truc qui s'appelle l'exemple. Mais, dans les deux premiers exemples que vous avez dans votre famille, il y a votre père, il y a votre mère, votre grand frère, votre grande sœur, mais la famille, elle regroupe tous ces trucs-là. On n'a que ça pour faire sa personnalité au début. On n'a vraiment que ses parents, ses frangins. Moi, ça m'a fait vraiment du bien quand on a dit que l'ADN, c'est bien gentil. Mais ça ne suffit pas. On dit que les addictions, c'est des maladies de l'environnement. C'est-à-dire qu'il y a non seulement la famille, il va y avoir les amis, l'école, mais vous pouvez avoir des polluants, vous pouvez avoir un métier qui fait que votre mère n'est jamais là, un métier qui fait que votre père est nerveux ou il passe sa journée à dormir, ou il travaille de nuit, je ne sais pas. Il y a une part, c'est l'hérédité directe qu'aujourd'hui on en est revenu un petit peu, de l'ADN. Il y a une part qui est un peu plus construite, moi je dirais l'exemple, mais le pire je crois c'est la culpabilité. Et malheureusement elle a été très très longtemps amplifiée par la religion qu'on avait à la campagne. La religion elle a été remplacée par l'instituteur, et moi j'ai vu mon père remplacer la religion et l'instituteur par le médecin. Aujourd'hui c'est le médecin qui fait la morale aux gens âgés et malades, et vous avez mal fait ça dans votre vie. Vous avez mal élevé vos enfants, vous avez mal ceci, vous avez mal cela. On n'en peut plus.
- Speaker #2
La première psychiatre que j'ai eue, elle m'a dit, il faut aller à l'école, ça ira mieux. Sauf que ça faisait quatre ans que je n'arrivais pas à y aller. Ça faisait quatre ans que je pleurais tous les matins, que je vomissais d'angoisse. Et on me dit, vas-y, ça ira mieux. Et du coup, j'ai l'impression aussi que le psychiatre, qui est cette parole absolue, s'il dit à tes parents, oui, il faut faire ça, ça ira mieux, après les parents te mettent une pression en plus, en disant, la psychiatre a dit ça, ça va aider. Et au final, ça rajoute un tabou parce qu'on ne peut pas dire comment on se sent, parce que la psychiatre, elle a la parole suprême. Et en fait, on est encore plus au fond du trou. J'ai été hospitalisée plusieurs fois et à chaque fois en fait on me shoot. de médocs, de Valium, à 100 gouttes par jour. Et au final, en fait, ça découle vers de l'addiction parce que moi, quand j'étais sous Valium, je me disais, j'ai jamais été autant en paix de ma vie. Et après, quand on sort, on n'a plus la prescription. Qu'est-ce qu'on fait Moi, je prenais de la drogue pour compenser, en fait. Ça a commencé comme ça. Après, c'était tous les soirs chez moi parce que je faisais des crises d'angoisse et que c'était le seul moyen de me calmer. Et au final, j'ai eu d'autres psys plus tard qui m'ont donné des clés. qui n'étaient pas médicamenteuses et qui m'ont beaucoup plus aidée que de me shooter au Valium, en fait.
- Speaker #1
Donc c'était une sorte d'automédication anxiolytique Ouais.
- Speaker #3
Mon premier contact avec un psychiatre... Ça n'a pas été très long. J'ai fait des cures de désintoxication, mon pauvre, je ne sais plus combien j'en ai fait. Et des postes de cure, c'est pareil, qui n'ont jamais servi à rien.
- Speaker #1
Comment ça se fait,
- Speaker #3
du coup À part la poterie et un peu d'espoir, et puis la vie à la campagne.
- Speaker #1
Et pour toi, ça ne t'a pas aidé du tout Non,
- Speaker #3
absolument pas. Je rentrais, je recommençais à picoler. Ça ne m'a jamais empêchée.
- Speaker #1
Qu'est-ce qui t'a aidée à passer à l'épouse
- Speaker #3
Quand j'ai consulté avec mon édictologue, parce que j'étais hospitalisée en urgence à Saint-Jean, dans un état mon pauvre. Et puis là, je suis tombée sur une psychiatre très gentille. Et puis, elle m'a donné l'adresse. d'une clinique, sept mois là-dedans. Pas un jour, pas un médecin. Psy m'a parlé de l'alcool, m'a mis devant, j'étais allé venir pour ça.
- Speaker #0
C'est le tabou entre le médecin et l'alcoolique. Moi, le plus fort que je connaisse, c'est le généraliste qui ne veut pas voir que la femme... Elle veut parler d'alcool, mais il ne veut pas accepter qu'une femme boive de l'alcool. Parce qu'on est éduqué comme ça. Une femme, il faut lui pardonner si elle boit. Et je me suis demandé dans ta question, est-ce que le tabou est de ton côté Parce que tu aurais pu dire à ton docteur, je crois que c'était un psychiatre, mais vous savez, mon problème c'est l'alcool.
- Speaker #1
C'est ça,
- Speaker #0
il a trois minutes. Pourquoi tu dis mon problème Juste quand il te tourne le dos, tu pourrais lui dire mon problème c'est l'alcool au fait docteur
- Speaker #3
Oui, mais ça passait pas
- Speaker #0
C'était un vrai tabou, on est tous les deux d'accord qu'il faut pas en parler, comme je vous disais dans la famille Parfait il y a un sujet qu'il faut éviter à tout prix on est tous d'accord pour l'éviter
- Speaker #4
Moi quand j'ai dit à ma mère l'alcoolisme est une maladie jusqu'au bout, je crois qu'elle ne m'a jamais cru. Elle me disait oui, parce qu'elle m'adorait, je suis fille unique, mais qu'en fait, dans sa tête, c'était faire un effort. Des fois, je sentais qu'il y avait le... Oui, ok, c'est une maladie, parce qu'un étholondiste, pour elle, c'était une espèce de mode. C'est une espèce de mode. Mais voilà, encore un tabou, quand mes filles ont appelé ma mère pour lui dire, maman, elle est à l'hôpital parce qu'elle a essayé de... Elle a fait une thèse. chose que ma mère n'aurait pas compris, le TS. Mais bon, elle a dit, ah oui, c'est terrible, c'est terrible. Elle n'est jamais venue me voir. Ça, c'était, ça, je ne veux pas voir. Je ne sais pas, je ne connais pas. Même si mes filles lui ont dit, mais vraiment, que tu vis Quoi, c'est ta fille Non, c'est impossible, impossible. Ça, c'était, s'il fallait affronter l'alcoolisme, c'était moyen, moyen, parce qu'on faisait souvent des... des dîners super sympas et arrosés et machin truc, mais affronter ça, c'était mais hors de question. Ça, ça n'existe pas. Je ne veux pas entendre, j'ai jamais vu, on n'a jamais vu ça dans notre vie, et stop, quoi. C'était la fin. Ça, c'est le plus grand tabou de nous.
- Speaker #1
Plus que les cannibales,
- Speaker #4
je pense. Je crois que là, un enfant qui essaie de se supprimer, une mère, soit elle fait tout ce qu'elle peut pour aller l'aider, pour essayer de comprendre. Soit elle fait... Bon, j'imagine qu'il y a des millions de façons de faire. Mais soit il fait comme ma mère qui a toujours fait ça. J'étais toujours la plus belle, la plus intelligente, la plus tout ça. Mais il y a des trucs... Non, ça non. Enfin non, ça n'existe pas. C'est impossible. Même quand ses petites filles lui ont dit il faut que tu viennes. C'était impossible. Moi, ça ne m'a même pas choquée. C'est plus tard quand mes filles m'ont dit, mais on lui a dit, je ne peux pas comprendre qu'elle ne soit pas venue. Ça ne m'a pas choquée parce qu'il y avait encore un téléphone, genre comme ça, où j'appelais ma mère. La première fois, c'était à Cochin, et la deuxième fois, c'était à La Salpette. Mais un téléphone où j'appelais ma mère, et je lui disais, écoute, je suis à l'hôpital, mais est-ce que tu peux me rappeler parce que ça m'a coûté très cher, alors je te donne le numéro. Et alors, elle m'appelait dans la petite cabine pour donner des nouvelles. Mais les nouvelles, c'était pas... Elle m'a jamais demandé...
- Speaker #1
Elle parlait du tout, sauf de...
- Speaker #4
Est-ce que tu vas mieux Ou qu'est-ce qui se passe Rien. C'était juste pour les nouvelles, et puis c'était les partiels de mes enfants, les trucs comme ça. Voilà quoi, enfin, c'est tout. C'est quand même fou, non Mais bon... Ça, c'est un gros tabou, quand même.
- Speaker #1
Je pense qu'on a rien à toucher.
- Speaker #2
Moi, je pense que le tabou familial, il vient de plus loin encore. C'est-à-dire que la famille, c'est une structure qui est créée aussi par la société. Et en fait, je pense qu'au sein d'une famille, on recrée aussi la structure sociétale dans laquelle on vit. Quand on voit par exemple que pendant les Jeux Olympiques, tous les patients d'hôpital psychiatrique de Paris ont été interdits d'avoir des permissions de sortie. tout le long des Jeux Olympiques, je pense que c'est normal, après qu'il y ait des tabous familiales, s'il y a un tabou aussi grand que les fous n'ont pas le droit de sortir, parce que ça ferait honte à la France, ça ferait honte à Paris. Et donc forcément, si déjà à cette échelle-là, c'est la honte, c'est un tabou, forcément après, à l'échelle de la famille, on recopie ce qu'il y a autour aussi. Je pense que la famille, il faut s'attaquer à ça aussi, mais je pense qu'il faut s'attaquer à plus grand aussi pour démystifier le tabou.
- Speaker #4
Mais toi, tu parlais, oui, de la structure de la société, mais tu te dis, ma mère, par exemple, elle n'a pas vécu toute sa vie à Paris. Et donc, elle est née en Belgique, après elle a déménagé à plusieurs endroits à cause de la guerre, et elle a fini au Mexique. Et au Mexique, elle a rencontré mon père, donc en gros, la société dans laquelle elle vivait, c'était une réfugiée au Mexique. Quand en général, c'est les Mexicains maintenant qui sont réfugiés. Mais bon... Donc cette structure-là de je veux rien voir, rien savoir, je crois que ça venait déjà de ses parents. Ou peut-être qu'une personne qui a frôlé la mort de la façon dont elle l'a frôlé, c'est-à-dire les Allemands qui sont rentrés, patati patata, s'est dit un enfant que j'ai adopté ne peut pas choisir de se donner l'âme. Il y a quelque chose qui est de l'ordre de l'inacceptable, probablement. Je ne sais pas. Mais enfin le fait est que... Toute son histoire à elle, elle n'en parlait jamais, elle ne semblait pas du tout traumatisée. Enfin, tout ça n'était pas possible. Mais pourtant, ce l'était. Donc, c'est là où on se dit, mais réveille-toi. Enfin,
- Speaker #3
tout se manque. Tout ce manque d'attention, d'affection et tout, j'ai tout converti dans mon boulot, dans mes investissements, dans mes démarches personnelles et tout. Et c'est ça qui m'a aidé à tenir le cap, qui m'a sauvé. Mais je suis toujours à la recherche d'affection, de tendresse. Tout ça, c'est un vide absolument. abyssal. Et c'est là où j'ai cherché, avec ma compagne, un moment où c'était super, c'était bien et tout. Et puis, ça s'est mal terminé, c'est ça qui est terrible. Mais là, j'avais donné tout ce que je pouvais donner.
- Speaker #1
Et tu te trompes de l'affection ici Ah oui,
- Speaker #3
oui, oui. La reconnaissance et tout.
- Speaker #1
La reconnaissance, oui.
- Speaker #3
Et à Noël, j'ai eu une chance absolument extraordinaire. J'étais invitée dans une famille de six enfants. C'est une des deux associations qui sont implantées sur le site où je vis. On est devenus amis très, très, très rapidement. Et ils m'ont invité à Noël. Et j'ai passé trois journées de bonheur avec ces gens. Avec tout, plein d'intentions. Les pichounets qui me tenaient par la taille pour que je marche, pour m'aider à marcher droit. Tout le monde essayait de faire plein de choses pour que je sois bien et tout. Et il y avait de l'amour et il y avait tout ça. Oh là là, quel beau cadeau. c'était magnifique magnifique je pense qu'on est tous contents ça fait plaisir à entendre
- Speaker #1
Comment selon vous les préjugés sociaux liés au tabou l'environnement social et les préjugés qui tournent autour de ça influencent l'accès aux soins. Enfin, ils peuvent influencer l'accès aux soins.
- Speaker #2
Je pense que déjà, la honte, elle joue une grande part. C'est-à-dire qu'on a vu qu'il y a une stigmatisation, on a très honte. Se cacher, c'est le premier instinct, en fait. Et de ne pas en parler. Moi, au final, ce qui m'a aidée... à en parler, c'est qu'un jour, j'en parle à une amie, je lui dis, ah, mais moi, j'ai jamais fait de redescente de drogue. Et elle me dit, mais c'est parce que t'en prends tous les jours, donc forcément, tu fais pas de redescente parce que t'es complètement addict et que si t'en prends pas, tu lui feras une redescente, tu feras même un sevrage, quoi. Et je me suis dit, mais... Et ça m'a mis une claque. Et j'étais contente de lui en avoir parlé, parce que c'est ça qui m'a poussée à aller demander de l'aide, et de l'aide, je l'ai demandé par moi-même. Mais je pense que si je n'avais pas eu cette discussion avec elle, parce que je savais qu'elle en avait déjà pris aussi, je n'aurais pas demandé de l'aide, parce que je serais restée dans mon truc, dans le déni, de me dire, moi je peux prendre sans redescente tous les jours. En fait, je peux prendre tous les jours et ça va, parce que je ne fais pas de redescente. Mais en fait, que j'étais totalement dans le déni. Et j'avais honte aussi. En vrai, j'avais vraiment honte. Parce que quand je sortais pour aller me chercher à manger, pour faire mes courses et que je marchais pas droit et que je suis là, il y a quelqu'un qui me parle en me disant c'est marrant, tu marches pas trop droit, c'est à cause de tes talons Et je suis là ouais, ouais, c'est les talons, t'inquiète Alors qu'en fait, j'étais juste complètement défoncée. C'est pas honteux, mais j'avais très honte.
- Speaker #1
On se construit tout un système de... de justification de ça, je sais pas, tu vois, en environnement, mais on sait très bien qu'il y a un problème, enfin du coup il y a une honte.
- Speaker #2
Mais je pense aussi qu'on n'a pas forcément envie qu'on nous dise qu'il y a un problème aussi. Parce que moi je voulais pas qu'on me dise qu'il y a un problème, quand on me l'a dit c'était quand même la claque, mais je voulais pas qu'on me le dise parce que je voulais pas être face à ça et je voulais, en fait j'avais pas envie de guérir, j'avais pas envie parce que je m'étais jamais sentie aussi vivante de toute ma vie qu'en prenant de la drogue, et au final, Quand j'ai arrêté, là, ça fait cinq mois que je suis sobre, maintenant, avec le recul, je me dis, mais en fait, j'avais jamais été aussi proche de la mort. Mais je me sentais plus vivante que jamais, mais en fait, j'ai jamais été aussi proche de la mort. Et maintenant, je me dis, mais en fait, la vie, c'est pas ça. Mais ça prend son chemin, quoi. J'ai l'impression qu'en arrêtant la drogue, je revis. Alors que je me sentais jamais plus vivante que ça quand j'y étais dessous, mais en fait, c'est factice, quoi.
- Speaker #1
Oui. C'est un dilemme incroyable. Oui. et qui est très dur à expliquer, je pense, à des gens qui ne le connaissent pas. Ce sujet-là, parce qu'il y a encore ce rapport à la norme et se dire Ah mais tu l'as choisi,
- Speaker #3
tu manques de volonté.
- Speaker #2
J'ai l'impression que c'est un peu ça aussi, le manque de volonté, le choix. En fait, on nous dit qu'on l'a choisi, mais moi, je connais des gens qui ont pris de la drogue une fois, ils en prennent une fois par an en soirée. Mais voilà, moi, je ne suis pas capable. Aussi, il y a un truc dont j'ai réalisé que c'était un deuil. En fait, c'est... En fait, arrêter, c'est faire le deuil. Et le moment où j'ai compris que c'était un deuil, c'était plus simple de faire mon deuil. Parce que j'avais conscience que c'était un deuil à faire. Parce que je ne pourrais jamais consommer raisonnablement. Et en fait, au début, je me disais, peut-être dans un an, je pourrais reprendre pour le nouvel an. Et après, je me suis dit, je sais que si je reprends de temps en temps, c'est fini, je recommence. Parce que je ne peux pas consommer raisonnablement. Et maintenant que j'ai vraiment entamé ce processus de deuil, Et c'est plus simple, quoi.
- Speaker #1
Donc, tu as dû lever les tabous et accepter la gravité de l'addiction, de la consommation.
- Speaker #2
Oui.
- Speaker #1
pour pouvoir faire le deuil.
- Speaker #2
Ouais,
- Speaker #1
c'est ça. Si on se dit qu'il n'y a pas de problème et qu'on est dans un environnement qui consomme et que du coup, c'est hyper banalisé, ce qui est le cas dans plein de milieux festifs.
- Speaker #2
Moi, je me suis rendu compte que c'était grave en faisant un test sur Internet. Je ne sais plus, j'ai une amie qui... Non, je ne sais même personne. Un jour, je me suis dit, tiens, est-ce que j'ai un degré d'addiction sévère Parce que moi, je ne pensais même pas que j'étais addict. En fait, pour moi, c'était juste mon passe-temps. Je m'ennuyais, je prenais toute la journée, après je dormais, après le matin je recommençais. Et en fait, j'ai fait un test qui disait Là, c'est grave, il faut demander de l'aide, et en fait, ça va impacter vos relations, etc. Et je me suis du coup rappelée qu'à l'époque, je suis sortie avec une fille qui était venue me voir, j'habitais dans une autre ville, et en fait, tout le week-end, j'étais défoncée, elle ne le savait pas. En fait, j'allais aux toilettes pour prendre de la drogue. Et je ressortais de là comme ça, elle me disait, oh, t'as l'air un peu bourrée. Oui, oui, je suis fatiguée. Et en fait, je me rends compte que je n'ai pas du tout profité du week-end. Et je me dis, bah oui, ça impacte mes relations. Quand j'ai vu ce test et que ça m'a rappelé ce moment-là, je me suis dit, bah oui, ça impacte mes relations et je n'ai pas envie que ça les impacte encore plus. Je ne sais pas si c'est vraiment un choix de guérir. Je pense que... Parce que pour moi, ce n'est pas un choix d'être addict, donc je ne sais pas si c'est Je ne sais pas si c'est un choix, mais en tout cas, moi, j'ai l'impression que c'était un choix pour moi.
- Speaker #3
Et comme tu dis, faire le deuil. Moi, quand je pense en me disant, fini, fini, fini, il faut arrêter, il n'y a plus une chose. C'est impossible, ce n'est pas possible que j'arrête. Et restons. restons un peu dans les clous pour pas que ça se voit trop si tu arrives à rester dans les clous mais ce qui est bien aussi c'est que dans des maisons comme ici on n'a vraiment pas peur on parle très librement de nos addictions on parle très librement de l'alcool et maintenant ça devient pas un sujet banal mais ça fait partie de notre vie, de notre quotidien et qu'il faut faire avec quoi Il faudra faire ça.
- Speaker #1
Du coup, le fait de ne pas avoir de préjugés ici.
- Speaker #3
Oui, et de ne pas être jugé. De ne pas être jugé,
- Speaker #1
voilà.
- Speaker #3
Ça c'est important. D'être respecté, ça c'est important.
- Speaker #1
Et donc de se respecter soi-même. Oui, ça aide. Patrick
- Speaker #0
La drogue c'est pas bien, on ne dit pas la drogue, on commence quand on est jeune, on dit le tabac c'est pas bien, c'est interdit de fumer. Donc dans un premier temps, le premier truc qu'il faut cacher, c'est-à-dire pour fumer, je fume en cachette. Fumer, personne ne m'a jamais demandé d'être suivi ou quoi que ce soit. Maintenant, après la séance, je fume, donc je fume, il n'y a pas de problème. Je bois, ça cause des problèmes, parce que je bois vraiment trop, ça se voit. Donc là, on va me demander, est-ce que tu vois quelqu'un Est-ce que tu es suivi Et on entre dans l'addiction, et aujourd'hui, le professionnel que je devrais aller voir, c'est un psychiatre. Donc, plutôt que d'être handicapé avec un fauteuil, je vais être handicapé mental. Il y a toute la stigmatisation. Là déjà, ça me monte la barrière, simplement, le bon spécialiste, ça me va pas du tout. Je veux bien aller voir un généraliste, je veux bien aller voir un chaman, une voyante, tout ce que vous voulez, mais un psychiatre, c'est trop dur. Donc on dit pas qu'on va voir le psychiatre, on dit, je vois quelqu'un qui me fait suivre. C'est le sketch de Franck Dibos que je crois. Pour moi, ça a été le plus dur, et il a fallu que je sois obligé. Sinon, j'étais dans le déni de la maladie, c'est-à-dire je ne suis pas malade, simplement la stigmatisation. Et là, je n'ai pas besoin de mes parents. Si, j'ai l'image que je me fais de moi-même, elle vient de quelque part. Demander de l'aide, c'est le plus grand pas que j'ai fait dans ma vie. Il a fallu 34 ans pour que je demande de l'aide. Il a fallu que j'ai l'âge de 34 ans.
- Speaker #1
Vous êtes déjà bien.
- Speaker #0
C'est mieux que 54.
- Speaker #1
Merci. Et Tatiana
- Speaker #4
J'étais étudiante et je crois que j'avais 23 ans. Et je suis allée voir ce généraliste qu'on m'avait conseillé, à qui j'ai dit Je crois que j'ai un petit problème de consommation d'alcool parce que je suis toujours la dernière à partir. Mais c'était quand il y avait des fêtes et tout, j'étais à l'université. Donc mes amis m'avaient déjà... J'ai des petites remarques. comme quoi je voulais finir les verres qui traînaient. Et puis, si il n'y en avait plus, est-ce qu'on peut aller en chercher Et puis, voilà. Et à cette époque, la seule chose qu'il m'avait proposée, c'était quelque chose qui existe encore, qui s'appelle de l'espéral. Et quand on le prend, on ne peut pas boire, parce qu'on a une réaction tellement violente que ça... Donc je lui ai dit, merci beaucoup, j'ai 23 ans, je vais faire autrement et je verrai comment je ferai plus tard. Merci, ciao. On passe quelques années et puis... J'ai deux filles qui ont un an et demi, mais je vais à une soirée chez des amis à Pigalle. Le papa des enfants garde les enfants ce soir-là. Et pour revenir, puisque c'était tard, je décide de prendre un taxi, parce que c'est normal. Mais je dis au taxi, est-ce qu'on peut s'arrêter à un distributeur, parce que je ne suis pas sûre d'avoir l'argent nécessaire pour payer le taxi. Il m'amène directement au commissariat de police du 14e arrondissement. où on me fait descendre du taxi deux jeunes flics, dont un avec un pistolet, et on me menotte, et on me met dans la salle de déguisement, j'imagine, mais moi je ne comprends pas, et comme je n'ai jamais vécu ça, j'ai dit est-ce que je peux passer un coup de fil Enfin, j'ai vu des trucs à la télé, quoi. Et ils m'ont dit non, pas du tout Donc je passe ma soirée à hurler, d'abord parce que je ne pouvais pas supporter d'être enfermée, et parce qu'il fallait que j'emmène mes filles à la crèche le lendemain. Et je sors de là, mais j'ai encore des marques, des menottes aux mains. Donc, je vais voir mon généraliste et je lui explique tout le truc. Et voilà, je lui dis, voilà, j'aimerais juste que vous constatiez, parce que, nanana, que j'ai ça et ça et ça. Je lui dis, mais parce que, oui, j'avais beaucoup consommé d'alcool, donc le taxi s'est dit, voilà, elle ne va pas me payer. Je ne sais pas ce qu'il s'est dit, mais le fait est que, voilà, j'ai fini. Mais ce qui était chouette, c'est de tomber sur un généraliste à cette époque-là qui, tout de suite... a vu le problème et qui a su me diriger vers les bonnes personnes, quand c'était déjà mon généraliste, sans qu'il sache toute l'histoire. Bon, l'autre généraliste que j'avais eu des années auparavant, les solutions qu'ils avaient à l'époque, c'était, oui, arrêter de voir prenait de l'espéral, comme ça, mais à 23 ans, c'est inconcevable, en deuxième année de fac ou troisième année de fac, quoi, je vais aller... Je vais aller à des fêtes et je vais boire du Perrier. Non, mais non, c'est pas... Enfin bon, voilà quoi. Comme quoi, ça évolue, ça change. Et puis, ça dépend sur qui on tourne.
- Speaker #1
En général, parfois, on donne des conseils, mais je ne sais pas si on a trop le temps, là. Je ne suis pas un mini conseil à donner si quelqu'un est empêtré dans des tabous.
- Speaker #3
En fait, c'est de jamais rester seul. D'avoir la conscience qu'on ne peut pas rester seul face à ça et qu'on ne peut pas s'en sortir seul.
- Speaker #2
J'allais dire ça aussi, c'est en parler à quelqu'un, même si ce n'est pas de la famille, pas rester seul avec ça. Moi, je sais que j'ai réussi à en parler à une personne de ma famille, c'est mon grand frère. qui est secouriste, en fait. Et je sais que quand je me suis retrouvée plusieurs fois aux urgences pour épisode psychotique, c'est lui que la psychiatre a appelé pour pas que mes parents soient au courant. Mais du coup, oui, en parler à quelqu'un, au moins une personne, et même si ça va pas tout de suite dans un parcours de soins, pour se sentir moins seule.
- Speaker #0
C'est tout à fait normal que ce soit la famille le dernier endroit pour en parler. Et heureusement qu'il y a des soignants, donc on a râlé sur les soignants, mais c'est le soignant qui est le plus neutre et qui attend que ça qu'on lui demande de l'aide. Vous pouvez voir un soignant, si vous ne lui demandez pas d'aide, ça va être très dur. Il va attendre que vous le demandiez. Moi j'ai mis beaucoup beaucoup de temps et donc en famille c'est pas la peine. Le soignant lui, il vous attend.
- Speaker #1
Wow, on dirait un slogan. Tu vas refaire le slogan du texte à pas. Non, c'est bon, attention là, on en a dit assez. Eh bien, merci beaucoup à tous. Merci à vous aussi. On peut applaudir.
- Speaker #3
Franchement, il y a quelqu'un au-dessus qui veut que je fasse encore quelque chose. En tout cas, tu vas faire un beau podcast.
- Speaker #1
Tu crois Ben oui. Ah bon J'ai mis.
- Speaker #3
Les trépieds, tu les mets où les trépieds Là-dedans j'arrive après la bataille ouais je suis super assistante t'as vu ça un peu la meilleure elle est efficace est-ce que vous voulez que je vous raccompagne non jusque chez vous non je vais rentrer je vais marcher tout doucement sinon vous me dites je vous raccompagne non non vous êtes sûr
- Speaker #1
C'était En Substance, un podcast écrit et réalisé par Sylvain Pinault avec une musique originale de Toco Verviche. L'illustration est signée Mathilde Fian et la production assurée par l'équipe de Cap 14, une antenne d'Addiction France. Abonnez-vous pour ne pas manquer les prochains épisodes et laissez-nous quelques étoiles ou même un commentaire. Ça vous a plu, servi ou aimé Ça nous aidera beaucoup à le faire connaître. Prenez soin de vous et de vos proches et à bientôt.