- Speaker #0
Il m'a fallu un certain temps pour comprendre que je devais être davantage exigeant avec mes subordonnés. Et c'est quand je l'ai compris que j'ai commencé à avoir des résultats opérationnels dignes de ce nom. Et là, il se penche et il sort un carton, un grand carton blanc sur lequel il avait marqué un problème en interrogation, deux solutions, point d'exclamation. Et il m'a dit, vous avez une demi-heure pour me proposer deux solutions et je choisirai. Moi j'ai beaucoup progressé, à la fois professionnellement et humainement, quand j'ai accepté l'idée que j'avais peur. Il est allé poser son nez sur le bout du nez de chacun d'entre eux, donc c'est très impressionnant quand vous avez un grand costaud en fable de vous, et il a dit à chacun, répète après moi, je réussis ensemble.
- Speaker #1
Bienvenue sur Faites Entrer l'Expert, le podcast qui va littéralement vous métamorphoser en une meilleure version de vous-même. Je suis Laurent Pellé. ancien cadre dirigeant d'un grand groupe français reconverti dans la formation et la conférence professionnelle. Grâce à ce podcast, je vais pouvoir partir à la rencontre des meilleurs conférenciers, formateurs et meilleurs experts professionnels pour les questionner sur leur savoir et partager avec vous le fruit de nos échanges. Mon ambition sera de vous offrir une véritable boîte à outils que vous pourrez enrichir au fil des épisodes. A l'intérieur, des stratégies concrètes, des astuces et des méthodes. éprouver pour améliorer continuellement votre efficience et votre bien-être au travail comme dans la vie de tous les jours. Et maintenant, ouvrez grand vos oreilles et faites entrer l'expert. Eh bien bonjour à tous, aujourd'hui j'ai le grand plaisir de vous retrouver avec Guillaume de Cercy. Bonjour Guillaume.
- Speaker #0
Bonjour Laurent.
- Speaker #1
Alors Guillaume, tu vas bientôt te présenter mais moi j'avoue que j'ai été très impressionné quand je t'ai vu la première fois. C'était à Valence. pendant un événement de l'AFCP, l'Association Française des Conférenciers Professionnels. Tu étais sur scène et tu étais vraiment sur scène. Je peux dire que vraiment, c'était waouh. Et donc, moi, je suis toujours, bien sûr, à la recherche d'experts comme ça, qui vraiment ont des choses à transmettre et que j'ai envie de faire rencontrer à mes auditeurs. Donc, je suis venu te voir juste après ta prestation et tu m'as tout de suite dit oui. Donc, vraiment, merci beaucoup d'être venu jusqu'à chez moi. Et voilà, je vais te laisser te présenter pour que nos auditeurs sachent. qui est Guillaume de Cercey.
- Speaker #0
Je t'en prie, merci à toi pour cette présentation. J'ai 53 ans, j'ai été officier dans l'armée française pendant 30 ans et je suis civil depuis un an et demi. J'ai quitté l'armée en mai 2023. Aujourd'hui, je suis conférencier, consultant et coach sur des problématiques liées au leadership, à l'engagement, au sens, à la diversité culturelle et en m'appuyant sur ma carrière militaire que j'ai passée pour partie. Moi ça a été ma partie préférée au sein de la Légion étrangère. Dans ma carrière, il y a eu deux grands pôles. Il y a eu un pôle opérationnel. Donc j'ai passé 13 ans dans ce qu'on appelle des unités opérationnelles, c'est-à-dire, pour faire simple, des unités qu'on envoie en opération, qui sont soit des régiments d'un millier d'hommes, soit des états-majors. Donc sur ces 13 ans, j'en ai passé 9 à la Légion. Dans ce cadre-là, je suis parti 4 fois en mission sur 3 continents. Et puis il y a eu un pôle RH également important dans ma carrière, avec pas mal de formations. J'ai fait de la formation de jeune légionnaire au régiment d'instruction de la Légion étrangère à Castelnaudary, qui est une expérience humaine exceptionnelle et assez folklore, parce que nos légionnaires ne sont pas francophones, pour deux tiers d'entre eux quand ils nous rejoignent. Donc ça donne des trucs assez sympas. Et puis jusqu'à des officiers supérieurs dans le cadre de l'école de guerre. Et puis j'ai également fait des ressources humaines en administration centrale, alors ça, ça m'a beaucoup moins éclaté pour le coup. parce que c'était beaucoup plus techno, c'était du boulot de cadre sup en siège, et donc ça correspondait moins à mes appétences et à ce pourquoi j'étais rentré dans l'armée. Termes de formation, je suis Saint-Cyrien, et à 35 ans, quand on est officier, à 35 ans environ, on nous fait passer un concours, quel concours De l'école de guerre. Et donc j'ai fait l'école de guerre, et dans ce cadre-là, j'ai fait une scolarité civile à l'ESCP à Paris. en management des hommes et des organisations et puis plus récemment je me suis formé en coaching.
- Speaker #1
D'accord. Et donc ton grade quand tu étais à l'armée Alors je suis parti comme colonel.
- Speaker #0
Donc j'ai commencé comme élève officier évidemment, à Saint-Cyr et j'ai terminé comme colonel.
- Speaker #1
Alors avant de plonger dans le cœur du sujet, moi ça m'intéresserait de comprendre en fait comment est venue l'idée de cette conversion, pourquoi devenir coach, conférencier
- Speaker #0
Alors avant de répondre à cette question, si tu veux bien, je... Je voudrais dire un mot sur pourquoi devenir militaire. Oui. Parce que c'est quand même presque une drôle d'idée. En fait, j'ai eu l'impression de ne jamais avoir réellement le choix parce que aussi longtemps que je me souvienne, ma mère me disait que ce serait quand même dommage que dans la famille on s'arrête à six générations de Saint-Cyrien. Et donc j'avais une espèce de pression comme ça et j'ai eu de la chance de faire ce métier que j'ai adoré toute ma vie. J'ai eu cette chance inouïe de me lever tous les matins avec le sourire en me disant je sais que je vais bosser Donc il y a quand même assez peu de gens qui ont cette Ausha. Et donc je suis très content que ma vocation profonde, parce que c'était vraiment une vocation profonde, ait matché en quelque sorte avec les attentes de mon environnement. Ensuite, au sein de cette carrière, pourquoi la Légion Alors mon envie de rejoindre la Légion a fluctué dans ma vie. C'est-à-dire que quand je préparais Saint-Cyr, quand j'étais ado et ensuite plus tard en prépa... Je voyais la Légion comme la troupe d'élite ultime, le truc que je voulais absolument rejoindre, parce que ça me semblait être un engagement total, magnifique, avec des étrangers et tout. Il y avait plein de choses qui me mettaient des papillons dans le ventre. Et puis ensuite, arriver à Saint-Cyr, ça a été moins le cas, pour une raison toute bête, c'est que nous côtoyons des légionnaires quand on est élève officier à Saint-Cyr. Et à quelques reprises, on a eu des unités de la Légion. Mon sentiment, c'est que c'était vraiment le top. Enfin, que ça déroulait, c'était calme, c'était efficace, ça gueulait pas, c'était extrêmement pro. Les gens étaient rustiques. C'était vraiment chouette. Et je m'étais fait une petite règle de trois limitantes dans ma tête en me disant, moi en fait, ça fait partie des toutes meilleures unités qu'on a eu la chance de côtoyer. Et puis moi, je fais pas partie des tous meilleurs officiers de ma promo. Moi, dans ma promo, j'étais dans le milieu de classement. Donc, il y avait plein de gens qui étaient bien meilleurs que moi. Et donc, mon réflexe, ça a été de me dire, les super troupes, on va les laisser aux super élèves officiers et donc pas à moi. Et puis après, en école d'application, on a eu une journée complète qui a été consacrée à la présentation des régiments. Donc, c'est un peu comme les journées de l'étudiant où on avait des lieutenants qui étaient déjà en régiment depuis un an et puis qui revenaient nous voir. en nous disant Venez chez nous, c'est vachement bien Et puis, il parlait dans un amphi où il y avait 80 lieutenants qui les écoutaient. Alors, on avait un colonel au premier rang qui était très sévère et qui, au bout de 29 minutes, puisque les lieutenants avaient le droit à 30 minutes de présentation, au bout de 29 minutes, lui remontrait sa montre en disant Mon lieutenant, c'est l'heure Et donc, c'était 30 minutes, 30 minutes. Et puis, celui qui a présenté le régiment d'instruction de la Légion de Castelnaudary au bout de trois heures. de trois transparents, parce que c'était à l'époque Bénigny où il n'y avait pas de powerpoint, au bout de trois transparents, il nous regarde, il nous dit c'est chiant, et là il y a 80 têtes de lieutenant qui font oui avec la tête, et il a éteint le rétroprojecteur, et il a dit, bon maintenant je vais vous expliquer ce que c'est que la vie d'un lieutenant à la Légion. Et là, sans notes, sans préparation, sans rien, tout est sorti. Le fait d'en parler encore, ça me met tous les poils au garde-à-vous, parce que il parlait avec ses tripes. On n'était plus du tout dans le cérébral et il nous a embarqué. Et donc, en sortant de l'amphi, on a été un certain nombre à se dire, nous, c'est ça qu'on veut. Et puis, moi, j'ai eu la chance de pouvoir le choisir à la sortie. Et c'est un choix que je n'ai jamais regretté.
- Speaker #1
Les polos gardent à vous, j'adore. C'est ça, je l'ai gardé, ça. Merci pour ça.
- Speaker #0
OK,
- Speaker #1
donc du coup, l'idée, en fait, dans ta conversion à la fin de l'armée, de devenir conférencier, comment ça te vient
- Speaker #0
Bon, parce que j'ai toujours une certaine... Taine aisance, ça leur allait également à certains plaisirs pour m'adresser aux gens, donc ça c'est une première chose. Et puis c'est amusant parce que quand on est dans l'armée, en particulier pendant la vie de garnison, etc., on peut être tenté de considérer qu'on vit des choses normales. En fait de partir en opération pendant six mois sur des théâtres de guerre, tout va bien et puis tout le monde fait ça. Et en fait en élargissant un peu mon périmètre, je me suis rendu compte que c'était des choses très inhabituelles et dont je sais, dont je constate... qu'elles sont de façon très étonnante, très transposable. Parce qu'au fond, moi, quand je fais des interventions, je ne parle pas du tout ou peu d'histoire tactique, d'histoire technique, d'histoire de stratégie, de choses comme ça, parce que pour le coup, ce serait très peu transposable à l'entreprise. Moi, je parle juste d'histoire d'hommes et de femmes. Et pour le coup, si les dirigeants et managers qui m'écoutent et moi avons bien une chose en commun, c'est qu'on nous a confié la direction d'homme et de femme, avec deux bras, deux jambes, une tête, un cœur, et que c'est tout le cœur du sujet, justement.
- Speaker #1
Écoute, c'est parfait parce que justement, je voulais un peu cadrer cet entretien et dire qu'effectivement, moi, ce qui m'intéresse et je trouve qui est vraiment intéressant, c'est de pouvoir aller puiser dans tout ce que la Légion offre comme technique, comme valeur, comme méthode pour voir justement ce qui est transposable et ce que l'homme de l'entreprise, l'homme et la femme d'entreprise peuvent aller rechercher dans toutes ces manières de faire. Bien sûr, comme d'habitude, mes auditeurs le savent, c'est être très pragmatique. Je pense que j'ai la chance d'être en face d'un militiaire, donc on va être très pragmatique. Et vraiment, l'intention, c'est d'apporter des outils qui sont vraiment applicables pour nos dirigeants et managers qui nous écoutent. Très bien. Donc moi, ce que j'aimerais, c'est peut-être commencer justement par comprendre, parce que vraiment tout le monde a en tête que la Légion, c'est un corps spécial au sein de l'armée. Donc comment tu définirais les spécificités de la Légion puisque c'est ça qui t'a attiré finalement, tu as un peu expliqué. Donc quelles sont les grandes différences qu'on peut faire par rapport à l'armée classique
- Speaker #0
La Légion étrangère, c'est une composante à part entière de l'armée de terre française. Elle appartient à l'armée de terre, c'est 9000 hommes, ce qui correspond à 9 régiments. Et donc 9000 hommes, pour se représenter, on est sur 13% des forces combattantes de l'armée de terre. Et donc c'est quand même étonnant de se dire que 13% des soldats de l'armée de terre française sont des étrangers venus servir la France. Et c'est la troupe de la deuxième chance, parce qu'un peu contre toute espèce de prudence, nous accueillons dans nos rangs des gens qui ont connu des vies compliquées, et on leur dit si tu veux te refaire, viens chez nous, ça va être dur, et puis il va y avoir un très haut niveau d'exigence, mais on sera là pour toi, et puis on va te permettre de te reconstruire grâce à ça
- Speaker #1
Alors du coup, quelles sont les valeurs quand un légionnaire arrive et est prêt à se battre et même à mourir pour la France alors qu'il n'est pas français Qu'est-ce qui... Donc j'imagine qu'il doit y avoir quelque chose de spécial, une secret sauce de la légion étrangère pour dire ce gars-là en fait il va tout faire pour la France. Donc là c'est un premier sujet moi qui m'intéresse parce que bien entendu tout dirigeant d'entreprise a envie d'avoir des personnes qui sont engagées, quelle que soit leur provenance etc. Donc comment... Est-ce que là il y a déjà une première leçon à apprendre de ça
- Speaker #0
Oui absolument. La devise de la Légion étrangère, il y en a deux, en fait, aussi, étant donné que ça puisse paraître. La première, c'est honneur et fidélité. La fidélité à la parole donnée par tous ces étrangers de servir la France. Mais au-delà de ça, celle qui me semble la plus intéressante sous l'angle de ta question, c'est-à-dire de la transposabilité à l'entreprise, c'est la devise Legio Patria Nostra qui signifie La Légion est notre patrie Et en fait... elle est très intéressante, cette devise, pour au moins deux raisons. D'abord, le collectif est présent dès la devise. On ne dit pas Légio Patria Mea la Légion Emma, mais on dit Légio Patria Nostra C'est-à-dire qu'on n'est pas légionnaire tout seul. On fait nécessairement partie d'un collectif, et de ce fait, c'est présent dès la devise. Et la deuxième chose, tu auras noté que la devise ne dit pas France Patria Nostra Légio Patria Nostra c'est-à-dire qu'un Argentin raisonnablement patriote, qui veut venir faire un premier contrat à la Légion de 5 ans, et ensuite un deuxième contrat de 3 ans, comme ça se fait le plus souvent, et puis ensuite quitter nos rangs et rejoindre son pays. En fait, nous considérons que nous n'avons pas le droit de lui imposer de prendre la nationalité française. Et ce n'est pas nous qui dirons le contraire. Le sentiment de fierté et d'appartenance à une patrie, c'est très important et ça constitue. ça ça fait ce que nous sommes et donc on ne va pas imposer à ces étrangers qui nous rejoignent de revenir sur leur nationalité de l'ap de l'abdiquer en quelque sorte pour prendre la nôtre ceux qui voudront la prendre ils pourront à partir de six ans de présence dans nos rangs en fait comme d'autres étrangers qui arriveraient sur le territoire français mais nous ne voulons pas l'imposer ok
- Speaker #1
donc il ya autre chose qui me vient qui me vient en tête c'est que bien sûr quand on a un management militaire c'est un management par commandement donc quelque part quelqu'un qui nous écoute pourrait très bien dire ok mais moi je n'arrive pas à m'identifier parce que ok c'est pyramidal on a les mêmes structures comme tu l'as dit on a plusieurs couches mais en revanche moi mes gars si à un moment donné ils sont pas motivés ils se barrent ils me la font à l'envers etc alors que dans l'armée qui est tu signes et on sait que c'est très voilà c'est il ya des ordres quoi donc comment comment qu'est ce qu'on peut retirer de ce mode de management et qui est fondamentalement différent du mode de management en entreprise et qui pourtant est intéressant pour un manager de connaître, de comprendre, pour pouvoir en tirer quelque chose. Et c'est une transposition plutôt qu'une application.
- Speaker #0
Absolument. Dans ta question, il y a une chose que j'ai notée. Quand tu dis, oui, mais moi, les managers, ils disent, si mes mecs ne sont pas motivés, ils se barrent et me la font à l'envers. Mais nos légionnaires, c'est pareil. Si on ne réussit pas à maintenir leur motivation intacte, Ils nous font ce qu'on appelle le coup de cafard du légionnaire, c'est-à-dire qu'eux, ils désertent. et ils s'en vont. Et en fait, quand on est chef à la Légion, on a un très bon indicateur de la qualité du commandement, donc du management dans une unité, c'est le nombre de déserteurs. Pour revenir sur le centre de ta question, donc les recettes clés d'un bon management, je crois qu'il y a deux choses qui doivent être pratiquées, deux belles valeurs qui doivent être pratiquées de concert. à la légion. La première valeur avec laquelle à peu près tout le monde est d'accord, c'est l'exigence. L'exigence parce qu'évidemment, on n'aurait pas des résultats opérationnels pareils si on n'avait pas un haut degré d'exigence vis-à-vis de nos légionnaires. Et il y a une autre valeur qui est une valeur qui est très belle, mais qui est devenue un peu repoussoire pour le monde du management, qui est la bienveillance. Parce que c'est devenu une espèce de tarte à la crème ces dernières années, où vous avez des coachs ou des consultants qui vont voir des managers ou des dirigeants en activité. et qui leur disent, en fait, votre problème, c'est un problème de bienveillance dans votre organisation. Installez un baby-foot et puis vous verrez, ça ira tout de suite vachement mieux. En fait, c'est évidemment pas le sujet. Et il me semble que non seulement la bienveillance et l'exigence ne sont pas incompatibles, mais qu'on ne peut pas les exercer l'une sans l'autre. Et moi, je propose à nos auditeurs cette phrase qui explique réellement la façon dont on fonctionne à la Légion étrangère, qui est... L'exigence sans la bienveillance, c'est de la maltraitance, et la bienveillance sans exigence, c'est de la complaisance. Et évidemment que si on traite nos légionnaires en les maltraitant, donc si on maltraite nos légionnaires, ou si on les traite avec complaisance, on ne les embarque pas là où on les emmène. Et le plus souvent, les difficultés qu'on peut rencontrer dans le cadre du commandement d'une unité proviennent d'un défaut d'exigence de la part des chefs. Et moi-même, qui vous parle, quand j'étais jeune officier, il m'a fallu un certain temps pour comprendre que je devais être davantage exigeant avec mes subordonnés. Et c'est quand je l'ai compris que j'ai commencé à avoir des résultats opérationnels dignes de ce nom. Parce qu'auparavant, mes subordonnés disaient Ouais, le lieutenant, il est sympa, il est souriant, mais gentil, c'est pas un métier. La deuxième chose, c'est la question de la clarté. C'est indispensable la clarté dans notre commandement et notamment savoir exactement qui fait quoi, quel est le périmètre de chacun. Et c'est un peu le bon côté de la dimension pyramidale de notre commandement, c'est qu'il n'y a pas de flou. Et là où il y a un flou, il y a un loup. Et on se rend compte dans les organisations dans lesquelles j'interviens que... qui a beaucoup de difficultés imputables au fait qu'on ne sait plus très bien qui fait quoi. Dans ce cas-là, comment prendre ses responsabilités Qui est responsable quand ça ne marche pas Qui est ce qu'on félicite quand ça marche Quand tout est dilué, ça rend les choses compliquées parce qu'il n'y a plus personne pour assumer derrière. Et puis la troisième chose, qui va un peu avec la clarté, ou qui en tout cas en est une des conditions, C'est la question du courage, la question du courage managérial. Je vous ai dit que moi, en tout cas en début de carrière, je n'avais aucune leçon à donner sur ce sujet-là. Et j'aime beaucoup cette phrase de Napoléon qu'on nous avait apprise à Saint-Cyr, avec Napoléon qui disait Le courage est la seule vertu qu'on ne peut pas feindre Et en effet, on peut feindre d'être généreux, on peut feindre d'être fidèle, on peut feindre d'être optimiste, on peut feindre à peu près toutes les vertus, mais celle-là, il n'y a pas moyen. En fait, il faut accepter l'idée, et moi j'ai beaucoup progressé, à la fois professionnellement et humainement, quand j'ai accepté l'idée que j'avais peur, et que ça faisait partie de ma vie. En fait, la peur, on peut essayer de la combattre, on peut essayer d'en faire tout ce qu'on veut, mais elle est là, en tout cas. Nos peurs sont très différentes. Elle renvoie évidemment à notre enfance, etc. Et donc le courage, ce n'est pas de ne pas avoir peur, c'est de la dépasser d'une certaine manière et de la dépasser pour quelque chose qui nous dépasse également.
- Speaker #1
Avec cette définition, ça veut dire qu'à la limite, c'est celui qui a le plus peur qui a le plus de potentiel de courage. Parce que forcément, pour lui, si c'est dépassé ses peurs, en fait, il aura plein de peurs et donc il aura plus d'opportunités d'être courageux, en fait. Plutôt que le gars qui a peur de rien ou lui, s'il est peut-être brûlé, mais en fait, il ne sera pas courageux.
- Speaker #0
Oui, oui, ce n'est pas forcément faux, sachant que je crois de moins en moins aux gens qui n'ont peur de rien.
- Speaker #1
Oui, non, ça n'existe pas.
- Speaker #0
En fait, j'en suis revenu. J'ai eu des gens en début de carrière qui m'impressionnaient énormément parce que dans le milieu professionnel, parce que justement, ils semblaient avoir peur de rien. et que rien n'avait d'emprise sur eux, j'en suis bien revenu, parce qu'ils sont cabossés comme on peut tous l'être, et le progrès vient du fait de l'acceptation de cette peur et donc de cette forme de vulnérabilité.
- Speaker #1
Est-ce que quand tu es manager à la Légion, alors on ne dit pas manager à la Légion, mais que tu as des peurs justement, comment tu les traites par rapport à tes équipes C'est-à-dire, quand je commande des hommes qui sont sur le thème des opérations avec des vrais dangers et que moi j'ai peur, comment tu manages cette peur par rapport à tes équipes
- Speaker #0
Alors, c'est intéressant ta question, ça renvoie à la question du stress également, la peur, le stress, parce que tu ne dis pas comment est-ce qu'on l'élimine ou comment est-ce qu'on le met de côté, mais comment est-ce qu'on le gère Parce que le premier point, et c'est particulièrement vrai dans le domaine militaire, c'est qu'on a du bon stress, on a de l'adrénaline. Nous, ce qui nous permet de tenir sur la durée, ça nous sauve en opération. Ça nous permet une concentration maximale quand on est de garde ou en veille ou quand on fait du déminage, ce genre de choses, où on a besoin d'être très précis et d'être persévérant dans la précision. Et ça c'est central, donc c'est important que ce stress soit là. Ensuite, sur la question du stress ou de la peur, je distinguerais l'amont et l'aval de l'événement. En amont, la confiance est là entre nous et elle permet de beaucoup diminuer le niveau de stress parce que notre entraînement est dur et que nos légionnaires répètent les exercices et les entraînements jusqu'à la nausée. Parce qu'en opération, on ne peut compter que sur les actes réflexes et donc sur ce qui a été acquis par énormément de répétitions. Ensuite, il y a une forme de confiance également dans les chefs. Et il y a également la cohésion qui permet de diminuer le stress. Parce qu'en fait, quand vous êtes bien dans un groupe, quand vous vous y sentez protégé, vous n'êtes pas tout seul. Et puis, je reviens sur cette notion qui me semble tellement importante de clarté. Alors que... De toute façon, il y a une incertitude sur le champ de bataille. C'était Clausewitz, je crois, qui disait Le meilleur plan du monde ne résiste pas au premier coup de canon. Et c'est vrai qu'on peut prévoir tout ce qu'on veut. Dès que la bataille s'engage, tous les plans tombent à l'eau, mais il faut quand même les avoir faits. Donc si on veut faire une transposition sur cette partie amont avec l'entreprise, j'ai parlé de la dureté de l'entraînement, en fait, on retrouve la même chose en entreprise. Parce qu'avant... Avant... Un rendez-vous client important ou une réunion importante, on n'y part pas la fleur au fusil. Il y a un gros travail de préparation en amont. Et nous, nous disons entraînement difficile, guerre facile, ou en tout cas guerre moins difficile, parce qu'elle n'est jamais facile. Ça, c'est tout à fait transposable. Évidemment, pas avec les mêmes termes, avec ce qu'on peut connaître en entreprise. Et puis, sur le sujet du stress ou de la peur en aval, Nous avons beaucoup progressé depuis les années 2010 sur ce sujet-là, sur la gestion des stress post-traumatiques, donc quand nos soldats vivent des choses compliquées. Pour faire simple, quand ils sont confrontés à la mort, nous avons mis en place un certain nombre d'étapes qui se font juste après l'épisode compliqué, donc le contact avec l'ennemi ou le contact avec la mort, donc avec un diffusing à chaud, où vous avez le chef de proximité qui rassemble une dizaine de ses hommes autour de lui et qui lui dit Alors comment vous avez vécu ça aujourd'hui et il incite les gens à parler en vérité ensuite avant de quitter au moment où on quitte un théâtre d'opération et avant de rejoindre la France, il y a ce qu'on appelle le SAS qui est organisé à Chypre et où on est comme des coques en pâte, c'est sympa, pendant 3 jours dans un hôtel et où on est en contact avec des sophrologues, des psychologues et où on fait des debriefings de la mission au niveau groupe, au niveau individuel, etc et c'est hyper important parce que sinon on prend le risque d'être le matin sur un théâtre d'opération en mettant sa vie en jeu et d'être le soir en famille avec conjoint et enfant. Et ça, psychologiquement, c'est un truc qui est particulièrement dur à gérer. Et donc, c'est une vraie bonne intuition d'avoir mis en place ce SaaS.
- Speaker #1
Alors, quand on entend ça, on se dit qu'on est loin de l'entreprise parce qu'on ne risque pas sa vie en entreprise. Ceci dit, il y a beaucoup de casse, bien des burn-out. Bien sûr. Donc, est-ce que tu vois des choses qui pourraient être transposables dans tes conseils avec des chefs d'entreprise, des méthodes, justement, ça c'est tout bête, mais tu peux très bien imaginer justement des techniques comme ça qui viennent de ce domaine-là.
- Speaker #0
Il y a deux choses qui me viennent en première approche. La première, ce sont les retours d'expérience. On appelle ça les rétextes. Dès qu'on finit un exercice ou une opération, on se retrouve tous et selon un... Selon un processus très cadré, très identifié, on regarde ce qui a été, ce qui n'a pas été et ce qu'on peut mettre en œuvre pour que ça aille mieux la fois suivante.
- Speaker #1
Et chacun peut s'exprimer.
- Speaker #0
Exactement. C'est difficile de faire. Oui, tout à fait. Donc ça, c'est une première étape. Et puis la deuxième chose, quand j'étais lieutenant, je suis parti en Bosnie en mission comme chef de section. Donc je commandais 25 cadres et légionnaires. Et dans ce cadre-là, nous avons été briefés par un... par un médecin militaire qui était psychiatre et qui nous a dit, allez, je prends 10 minutes et je vais vous condenser 7 ans d'études de psychiatre. Et il nous a parlé de la règle des 4 R, qui pour le coup me semble parfaitement transposable à ce qu'on peut trouver en entreprise. Et alors qu'est-ce que c'est C'est une règle d'observation des déséquilibres sur un certain nombre de fonctions vitales chez soi et chez les gens autour de nous. Et donc qui permet de repérer les premiers signes de burn-out dans le cadre civil et dans le cadre militaire également, parce que nous en avons, et de stress post-traumatique dans notre cas. Et donc la règle des 4 R, c'est repas. Repos, relations et résultats. Repas, c'est-à-dire si vous vous mettez à beaucoup trop manger, beaucoup plus que d'habitude, ou beaucoup moins que d'habitude si vous perdez l'appétit, c'est un signe. Ensuite, repos, s'il vous faut une grue pour vous lever le matin alors que jusqu'alors vous étiez plus tôt du matin, ou à l'inverse, vous ne dormez pas du tout, c'est un sujet. Les relations. Moi j'ai vu des légionnaires qui, suite à des moments compliqués qu'ils avaient connus, se renfermaient complètement sur eux. Alors on a une chance, c'est que nous avons des clubs dans chaque unité où on prend un café le matin et une bière le soir. Et moi, mon agent de renseignement, c'était le clubman, c'était le légionnaire. Donc la fonction était de tenir le club et qu'il venait uniquement quand c'était nécessaire me dire Ah, mon lieutenant, il y a le légionnaire machin, il vient tous les soirs et puis à chaque fois il boit un coup de trop. Donc ça, il venait m'en parler, c'était évidemment pas pour que je sanctionne l'intéressé, mais dans ce cas-là, j'appelais le Toubib en lui disant, Toubib, est-ce que vous pouvez le convoquer pour voir ce qui se passe chez lui et pour le prendre en main Et puis à l'inverse, il y a ceux qu'on voyait régulièrement au club et qui, du jour au lendemain, n'y venaient plus du tout. Et ça également, c'est un déséquilibre et donc ça mérite d'y faire attention. Et puis, le R de résultat, qui en fait est la question de l'investissement. professionnel et de ce que les anglo-saxons appellent le work-life balance, combien de temps je consacre à mon travail dans ma vie. Là, encore une fois, on est sur une notion importante de déséquilibre parce qu'il n'y a pas de notion absolue. Ça doit être 7 heures par jour, en dessous t'es une faillasse et au-dessus t'es en burn-out. C'est pas le sujet. Nous avons tous un mode de fonctionnement, de travail et des besoins de réalisation également qui passe par un nombre d'heures qui nous est très personnel. Et bien si j'ai besoin en temps normal de bosser 12 heures et que là je ne suis pas bien si je n'en ai pas fait 14 ou 15, c'est que c'est un vrai sujet. A l'inverse, si j'ai du mal à m'y mettre, si je procrastine alors que je ne le faisais pas jusqu'à présent, c'est également une petite lampe qui s'allume.
- Speaker #1
Moi j'en parle dans ma conférence, justement, parce que moi j'ai une conférence sur l'équilibre vie pro-vie perso, et je dis que justement ce qui est important c'est d'être en contrôle. C'est-à-dire que si à un moment je dépasse le temps pro, je prends sur le perso. Si c'est en contrôle, ça va. Le problème, c'est quand c'est plus contrôlé et justement, tu te fais déborder. Donc, c'est vraiment la notion d'équilibre dont tu parles. Moi, ça me parle beaucoup. Ok, donc je vois que le temps file. Il y a quand même, j'aimerais revenir sur la cohésion, parce que bien sûr, quand on entend parler, quand on entend le mot légion, tout de suite, c'est ce qui vient en tête. C'est des gens tellement d'horizons, tellement différents et qui a un tel corps qui est créé. Donc ça, est-ce qu'il y a un... Quelque chose d'applicable en disant que tout le monde rêve d'avoir une team unie comme des légionnaires face aux difficultés, etc. Là, il y a quelque chose que tu peux nous donner Oui,
- Speaker #0
tout à fait. Nous avons deux parties prix. Le premier parti prix, il nous est imposé par la diversité culturelle de nos légionnaires. C'est-à-dire que ceux qui nous rejoignent, les deux tiers d'entre eux ne parlent pas un mot de français. C'est-à-dire que la maîtrise du français n'est pas une condition pour être recruté à la Légion étrangère. Heureusement, parce que sinon on passera à côté d'un certain nombre d'inserts. nombre de nos trésors et donc la conséquence directe de ça c'est que on va pas leur faire des grands discours on les on les amène à la cohésion par le quotidien et en leur faisant faire refaire défaire des choses qui reviendraient tout à l'heure et le et le deuxième le deuxième parti pris c'est un parti pris parce que presque philosophique alors que les philosophes qui nous écoutent m'excuse parce que ça va être une phase de filo pour les nuls Pour faire simple, il y a deux grandes façons de voir l'âme humaine et les relations humaines. Il y a Rousseau et Hobbes. Rousseau dit que l'homme est naturellement bon et c'est la société qui le pervertit. Hobbes dit que l'homme est un loup pour l'homme. Nous sommes plutôt Hobbesiens, c'est-à-dire que nous constatons, parce qu'on le voit en opération et dans la vie quotidienne et dans les choses superbes qui font que nos légionnaires sont capables de grandes choses, de beaux, de vrais, de biens, de justes, mais que... naturellement, ils ont des penchants qui les inclinent plutôt à l'inverse. Et donc, il faut que ces penchants soient éduqués pour les amener vers tout ce qui est beau, bien, bon, grand, etc. Et donc, petit exemple. Lorsque je suis arrivé en août 97 à Castelnaudary, dans le régiment d'instruction de la Légion où j'ai commencé, mon adjoint, qui était un sergent-chef britannique, vient me voir et me dit Mon lieutenant, ça vous intéresse de voir comment on fait pour la fraternité à la Légion étrangère je dis ouais carrément alors il appelle un caporal rasto et qui était bosniaque et il lui donne des ordres il y a un rastro il faut que dans 20 minutes les légionnaires il soit dans cette tenue alors il lui décrit la tenue et puis avec ça dans le musée tu les lui décris ce qu'il fallait mettre il faut qu'ils soient la piscine et que tu les présentes à l'adjudant machin tu as compris oui chef répète Parce qu'à chaque fois qu'on donne un ordre, on le fait répéter. Alors ça se justifie par le fait que nous avons une majorité de non-francophones, mais en fait qu'on y pense dans les organisations.
- Speaker #1
Oui,
- Speaker #0
c'est très intéressant. Quand on voit les distorsions qu'il peut y avoir entre ce qu'un manager demande et ce qui est réellement au bout, c'est considérable. Donc évidemment, il avait compris de travers, donc on a répété jusqu'à ce qu'il... jusqu'à ce qu'ils comprennent. Et ensuite, on l'a suivi dans la chambre des légionnaires, où les légionnaires étaient en train de ranger le pactage qu'ils avaient perçu le matin même. À grand coup de moulinet avec les bras, il les a rassemblés autour de lui, parce que je rappelle que les deux tiers d'entre eux, c'était leur premier jour à la Légion, on ne parlait pas un mot de français. Et puis, il leur répercute les ordres. Et il leur dit Vous compris Et alors les mecs, ils ont tous dit Oui Parce que s'il y a une chose que le légionnaire comprend vite, c'est qu'il faut qu'il dise Oui Donc... Et puis après, ce qui devait arriver arriva. On va dire qu'ils étaient 13, les francophones de la section. Ils se sont tout de suite mis dans la bonne tenue. Ils ont tout de suite mis ce qu'il fallait dans la musette. Et puis ils ont descendu les deux étages en courant. Et puis arrivés sur la place du rassemblement, ils sont tombés sur un sergent suédois qui ressemble à Schwarzenegger, qui est un énorme balèze. Et qui leur a dit, salut les gars. Alors avec un air très doux et très sympa. Salut les gars.
- Speaker #1
On y est.
- Speaker #0
je l'imagine que vous êtes les francophones de la section alors tous les mecs lui répondent en fièrement oui oui sergent ok on va attendre vos camarades et ils ont fait des pompes sur les points parce que ça fait plus mal et que c'est plus dur pendant 10 minutes le temps que le dernier arrive et en fait le sergent pour lui c'était fastoche parce que ses bras c'était des vérins parce qu'il les faisait avec lui parce que sinon c'est de la brimade alors que là ça relève de l'entraînement
- Speaker #1
ça aussi c'est il y a plein de choses à apprendre,
- Speaker #0
c'est incroyable ça me plaît beaucoup et donc les légionnaires en fonction de leur niveau, puisqu'on était au début de l'instruction au bout de 20 ou 30 ou 50 pompes et ils se retrouvaient avec la tête dans les graviers, ils n'en trouvaient plus et puis à la fin quand chacun d'entre eux, enfin quand le dernier est arrivé, il les a fait relever et il est allé poser son nez sur le bout du nez de chacun d'entre eux, donc c'est très impressionnant quand vous avez un grand costaud en face de vous et il a dit à chacun, répète après moi je réussis ensemble et ils ont tous répété je réussis ensemble les 13 et en fait cette phrase quand on y pense elle est énorme parce que je réussis ensemble c'est une faute de français oui mais un nom francophone de du sergent suédois parce que le verbe réussir ensemble a nécessairement un sujet au pluriel c'est forcément nous réussissons ensemble c'est plus simple mais je réussis ensemble ça veut rien dire sauf qu'en fait tout est là encore une fois on n'est pas légionnaire tout seul et alors un peu plus tard dans l'après midi Mon sergent-chef me dit, mon lieutenant, ça vous intéresse, la deuxième leçon pour la fraternité Alors je dis, oui, carrément. Alors il appelle le caporal, il fait, Rasto Il y a Rasto qui arrive en courant. Il lui redonne des ordres, il le fait répéter. Et puis on les suit, on suit Rasto dans la chambre, qui répercute les ordres dans la section. Et là, les francophones, pareil, se mettent dans la bonne tenue très vite, ils font tout très vite, et puis ils commencent à courir vers la porte. Et puis là, ils s'arrêtent tout d'un coup en se disant, ah il y a l'autre dingue qui va m'attendre en bas ils sont repartis dans l'autre sens et ils sont allés aider leurs copains et ils sont descendus tous 5 minutes plus tard, groupés et en bas, en effet, il y avait le sergent qui les attendait et qui me dit avec un petit sourire voyez mon lieutenant, c'est comme ça que ça marche donc nous amenons nos légionnaires à la cohésion à l'altruisme et à toutes ces belles choses en nous appuyant au départ du coup sur leur égoïsme en quelque sorte et sur leur intérêt bien compris Tu ne veux pas passer dix minutes à pomper, tu t'occupes des autres. Et après, là où c'est extrêmement vertueux, c'est que quand on contraint un légionnaire A à s'occuper d'un légionnaire B, le jour où le légionnaire A a un besoin, qu'on lui porte son sac pendant une marche épuisante, quand il a besoin d'eau parce qu'il a mal géré son stock d'eau, etc., c'est le légionnaire B qui...
- Speaker #1
Ça devient un réflexe, en fait. C'est ancré au fond des... Non, super. Vraiment super.
- Speaker #0
J'adore. Donc, c'est passé derrière.
- Speaker #1
Dis donc, c'est tellement waouh, je me demande ce que vont être les pépites. Parce que pour moi, c'est une pépite, déjà ça. Il y en a eu plusieurs. Donc, je te propose qu'on passe aux pépites de l'expert. La première pépite qui est un quick win, quelque chose qui est facile à mettre en place, rapide et avec des effets immédiats. Ça pourrait être quoi
- Speaker #0
Je peux raconter une histoire Bien sûr,
- Speaker #1
j'adore les histoires. Je pense que nos auditeurs aussi.
- Speaker #0
J'étais au régiment, donc à Castel-Laudary, parce que vraiment, mon début de carrière a été... tellement plein d'enseignements et je j'avais organisé une réunion où j'étais le patron de la réunion, j'étais le chef de section et j'avais 5 sous-officiers qui étaient là, mon adjoint et 4 sergents et au milieu de la réunion pour une raison qui m'échappe encore, il y a un des sergents qui se jette sur l'autre pour lui casser la gueule et donc ils ont roulé par terre bim bam boum ils se sont battus donc tous les autres on les a séparés j'en mets un dans 2 pièces différentes et puis je me dis bon ça c'est quand même pas neutre faut que j'aille en parler à mon capitaine Et donc je descends, je rentre dans le bureau du capitaine, enfin je toque, je rentre, il me dit oui, Cersei, qu'est-ce que je peux faire pour vous Alors je lui dis, mon capitaine, je vous rends compte que le sergent D et le sergent B viennent de se battre dans le bureau. Il me dit ouais, et je lui dis bah... et c'est quand même pas neutre donc voilà je vous rencontre il dit ouais et je me sentais de moins en moins bien et donc je bafouille je sais pas qu'est-ce que je fais moi et il me dit ah j'ai compris en fait vous voulez que ça devienne mon problème c'est à dire que vous pensez que j'en ai pas suffisamment à gérer moi qui commande 150 légionnaires et qu'il faut que je prenne les vôtres en plus et Et là, il se penche et il sort un carton, un grand carton blanc sur lequel il avait marqué un problème, point d'interrogation, deux solutions, point d'exclamation. Et il m'a dit, vous avez une demi-heure pour me proposer deux solutions et je choisirai une des deux. Et donc, je suis remonté dans mon bureau. J'ai vu mon adjoint qui m'attendait avec un petit sourire. Et je lui ai dit, pourquoi vous souriez Il me dit, euh... Il vous a fait le coup du un problème, deux solutions J'ai dit mais oui, mais pourquoi vous ne m'avez pas prévenu Et il dit oh non, mais c'est important la formation des jeunes officiers. Et donc on a réglé le problème qui n'était pas un gros, qui pour moi était un gros problème, mais qui objectivement n'était pas très compliqué. Je suis redescendu, je lui ai donné les deux solutions, et il a dit ok, je prends celle-là. Et en fait, ce procédé managérial, il est extrêmement vertueux, parce que combien de temps on passe quand on est manager, à s'occuper de problèmes qui peuvent être traités par d'autres. Et le fait d'exiger ces deux solutions quand il y a un problème qui arrive, en fait, c'est un filtre à problèmes énormes, parce que ça contraint le collaborateur à se poser la question, et donc le plus souvent il trouve la solution lui-même. Et puis, également, quand il a passé le... enfin, quand il vient quand même vous exposer les deux solutions, le fait que vous en choisissiez une, il y a ce qu'on appelle en sciences sociales l'effet Ikea. qui est hyper intéressant, c'est qu'on est toujours beaucoup plus fier d'une étagère, même brinque ballante qu'on a montée soi-même, qu'une étagère que quelqu'un a posée pour nous. Et donc, du fait que moi, collaborateur, j'ai participé à l'élaboration de la décision en apportant une solution, et oh, c'est une de mes deux solutions qui a été retenue, ça génère une adhésion beaucoup plus forte au projet, et donc quelqu'un qui met mieux en œuvre après.
- Speaker #1
Super pépite. D'autant plus que je l'utilise beaucoup moi en tant que manager, effectivement, c'est un C'est un classique, on va dire, de dire au manager, quand vous avez des équipes qui viennent avec des problèmes, dites-leur qu'il faut qu'ils viennent aussi avec des solutions. Vous venez pour brainstormer la solution, mais pas pour forwarder. Vous n'êtes pas des passeurs de plat. Donc, j'adhère tout à fait. Super.
- Speaker #0
J'aime bien l'expression de passeur de plat. Passeur de plat,
- Speaker #1
oui. Alors, surtout, après, moi, j'amplifie le truc en disant qu'il y a des passeurs de plat qui rajoutent du stress, d'autres qui essayent de faire tampon, etc. Mais tu as la manière de passer le plat aussi. Donc l'autre, c'est donc le longshot. Ça, tu as une idée de quelque chose de très puissant, peut-être un peu plus compliqué à mettre en place.
- Speaker #0
Oui, alors même qu'à proprement parler, on ne peut pas mettre en place, mais que je trouve très inspirant, c'est la définition du chef que m'a donné un de mes chefs, que j'adulais. Il m'a dit, le chef, c'est celui qui sait, qui connaît, qui commande et qui aime. Et ça c'est le programme d'une vie. Et quand j'accompagne des dirigeants ou des managers sur du coaching de leadership, pour leur apprendre à prendre de la hauteur sur leur... Enfin pas pour leur apprendre, pour les amener à prendre de la hauteur sur leur pratique de leader, ce sont quatre verbes sur lesquels je travaille avec eux, parce qu'en fait on n'a jamais fini de progresser. chacun de ces verbes, alors je ne vais pas tous les prendre parce que ce n'est pas le sujet, mais chacun de ces verbes contient une forme de piège également. C'est-à-dire qu'il faut bien définir ce dont on parle. Par exemple, le chef qui sait, ça ne t'aura pas échappé, ce n'est pas le chef qui sait tout. Oui, oui.
- Speaker #1
Celui-là m'a accroché.
- Speaker #0
Bien sûr. Moi,
- Speaker #1
j'aurais dit plutôt le chef qui apprend.
- Speaker #0
Bien sûr.
- Speaker #1
Tu écoutes avant de...
- Speaker #0
Oui, oui. Alors ça, c'est plutôt dans le... Le chef, c'est celui qui connaît. Voilà. Pour le coup, l'organe associé est l'oreille. Là où le chef qui sait, l'organe associé, c'est le cerveau. parce que c'est une question de compétence et qu'au départ du coup ce qu'on attend de nous avant toute autre chose, c'est qu'on fasse le job et comme on dit en mauvais français, qu'on délivre. Quand on est en responsabilité, moi ce qu'on attendait de moi quand j'étais colonel et que je commandais mon régiment, c'était que la partie qui ne relevait que de moi, je devais être incollable dessus, c'est-à-dire concevoir la préparation opérationnelle, l'organisation générale du régiment en vue d'un engagement opérationnel. Ça c'était mon boulot et personne ne devait pouvoir m'en remontrer. Et ensuite, il fallait que je sache le périmètre de chacun et les prérogatives de chacun. Parce que moi, dans mon régiment, comme dans tous les régiments de l'armée terrestre, j'avais 80 métiers. J'avais des infirmiers, des toubibs, des administratifs, des sportifs, des combattants, des administratifs, des cuistots. Et évidemment, je ne pouvais pas savoir tout ce qu'ils savaient. En revanche, j'avais le devoir, c'était une question de considération, de savoir quels étaient... leur pôle d'excellence, qu'elles étaient les endroits où il ne fallait pas les emmener pour ne pas les mettre en difficulté et ne pas mettre la manœuvre globale en danger. Donc il y a ces deux choses-là. Bien maîtriser mon périmètre à moi et connaître le périmètre des autres, pas en détail, mais savoir quelle île.
- Speaker #1
Ça, ça résonne beaucoup. Et moi, j'utilisais la métaphore du chef d'orchestre. Un chef d'orchestre ne sait pas jouer de tous les instruments. Par contre, c'est celui qui coordonne pour faire en sorte que tout le monde travaille ensemble pour une même œuvre qui est l'œuvre musicale. J'aime beaucoup. L'idée après, c'est de partager tes bons plans. Est-ce que les gens qui seraient intéressés de continuer à explorer tout ce que la Légion, l'armée, en termes de management, de leadership, peut amener à l'entreprise
- Speaker #0
Un livre que je pourrais recommander qui s'appelle La Lune éclaire. La Lune éclaire en deux mots. C'est le refrain d'un de nos chants. dans notre très beau champ et c'est un livre qui a été co écrit par neuf officiers qui raconte leurs opérations entre 2008 et 2018 et ça et ça ça éclaire beaucoup sur la façon dont fonctionne la légion contemporaine ça c'est pour la partie et ça inspire quand on est dans l'entreprise ah oui absolument d'accord oui oui oui tout à fait alors ça n'est ça n'est pas une recette de cuisine du bon manager Mais on est plutôt sur de l'inspiration. Ton terme est bien trouvé. Alors, ce n'est pas réellement un film, mais c'est un documentaire de Philippe Baudet qui suit Sylvain Tesson, vous savez, l'aventurier et écrivain, à la rencontre des légionnaires en Guyane. Et c'est un documentaire qui s'appelle Voyage au pays des hommes sans nom et qui est remarquable.
- Speaker #1
Il est en accès libre,
- Speaker #0
on peut mettre un lien Oui, je crois qu'il est en accès libre sur YouTube. Alors des extraits, c'est certain, et peut-être dans son intégralité.
- Speaker #1
On trouvera ça et on le mettra dans le descriptif.
- Speaker #0
Très bien.
- Speaker #1
Super. Et enfin, la pépite de la postérité. Tu es sur ton lit de mort et tu veux transmettre une dernière chose à ta descendance. Qu'est-ce que tu leur dis Un secret de vie
- Speaker #0
C'est une question plus qu'un conseil. Et cette question, c'est... et les autres, pour l'interrogation. Il y a 35 ans de ça, ou 33 ans de ça, j'étais avec des amis scouts dans une abbaye pas très loin de Paris, et nous avons eu la chance d'y rencontrer l'abbé Pierre. L'abbé Pierre dont nous avons appris récemment qu'il avait été l'auteur de gestes... Tout à fait inacceptable. Mais dont il ne faut pas oublier également que pendant des années, parce qu'on ne savait pas, il était la personnalité préférée des Français. Et en tout cas, on ne peut pas lui enlever le fait qu'il est à l'origine de loi en faveur des plus démunis et qu'il a fait à côté de trucs terribles des grandes et belles choses. Et ce jour-là, il nous a distribué à chacun une médaille porte-clés qui avait été gravée par un de ses amis sculpteurs. et qui montrait deux mains en train de rompre du pain, et écrit en dessous et les autres Sur le moment, je me suis dit, bon, venant d'un prêtre qui a consacré sa vie aux plus pauvres, c'est pas complètement idiot, c'est pas complètement incohérent. Et après coup, je me suis quand même rendu compte qu'une vie est belle quand elle est donnée. Et donner, ça peut être du temps, ça peut être de l'argent bien sûr, ça peut être de l'attention, de l'affection, de la tendresse, de l'amour. Moi les gens les plus manifestement heureux et profondément heureux, pas les faux joyeux que j'ai rencontrés dans ma vie, c'était des gens qui avaient une dimension don. dans leur vie. Et une dimension, osons le mot, verticale, dans le sens où leur vie avait du sens. Alors ça peut être spirituel, mais ça peut être également un engagement associatif, politique, syndical, pour une grande cause, pour la nature. Mais je crois profondément que le bonheur provient de cette capacité à dépasser son petit soi.
- Speaker #1
Quand j'entends ça, j'ai les poils au garde-à-vous. Je ne pensais pas l'utile à réutiliser plus aussi rapidement. Mais c'est vrai que moi, je m'y retrouve parce qu'avec ma ligne rouge, mon fil rouge qui est transmettre, c'est exactement ça. J'ai tellement envie de partager, de donner, etc. Donc, je suis complètement, j'ai les poils au garde-à-vous. Merci pour cette pépite pour la postérité. Génial. Donc, en fait, on arrive à la fin, malheureusement, je dirais, de cette conversation. que j'ai adoré et j'aimerais que nos auditeurs sachent s'ils souhaitent te rencontrer, te faire intervenir auprès des équipes, comment tu peux les aider qu'est-ce que tu proposes comme type,
- Speaker #0
alors tu as dit conférencier mais concrètement comment ça peut se matérialiser Donc les gens qui le souhaitent peuvent me contacter sur LinkedIn et donc je donne des conférences qui vont en français ou en anglais parce que j'ai eu cette chance d'habiter aux Etats-Unis quand j'étais enfant donc j'ai un anglais un peu plus fluide que la moyenne et des conférences qui vont de 40 minutes à 2 heures je fais également des accompagnements d'équipe sur la durée en passant par des interventions de 1, 2, 3 jours sur des collectifs dans une logique de... dans une logique de coaching d'équipe.
- Speaker #1
Et tu vas sur le terrain
- Speaker #0
Alors, j'ai eu le cas, parce que j'interviens dans une association de dirigeants qui est l'APM. Je connais très bien. Et j'ai eu le cas de gens qui venaient me voir à la fin et qui me disaient, mais c'est possible de faire des espèces de bootcamp Je voudrais emmener mes collaborateurs. Bon, si j'ai davantage de demandes, je pourrais peut-être monter un truc comme ça, mais pour l'instant, c'est pas dans mon catalogue. Et s'agissant du... public des conférences, j'interviens dans tous les types d'entreprises au profit de Codire ou de séminaires de managers ou de l'ensemble des équipes. Ça peut se faire également dans le cadre de séminaires annuels ou de conventions.
- Speaker #1
Ok, très bien. Maintenant que tu connais bien ce podcast, pour avoir été invité, est-ce qu'il y a des gens que tu verrais vraiment intéressants pour moi d'inviter pour discuter de leur expertise Ah oui,
- Speaker #0
il y a deux personnes auxquelles je pense. Une amie, Laurence Harpie. A-R-P-I, qui travaille sur le corps et qui est une artiste, qui est danseuse, metteur en scène et qui est, que je trouve, très pertinente et inspirante. Une femme très complète, elle est très futée aussi. Et puis un ami qui est Nicolas Duep, ça s'écrit D-H-U-E-P-E. et qui a écrit un livre qui s'appelle 53 et c'est un bonhomme c'est un ancien homme d'affaires très très qui a été couronné de succès dans toutes ses affaires et qui un jour a eu une crise cardiaque et donc il a été mort pendant 53 secondes c'est un double titre et qui a écrit un bouquin que je trouve super et très inspirant et qui parle de tout ça avec beaucoup de profondeur
- Speaker #1
Ok, très bien. Merci beaucoup. Prévient-les que je vais les contacter. Eh bien, écoute, c'était vraiment un très grand plaisir. Merci encore. C'est vraiment très, très, très enrichissant. Et puis, voilà, des témoignages, je trouve, très, très riches et puis très applicables pour les auditeurs qui nous écoutent, qui dirigent même leurs équipes.
- Speaker #0
Merci beaucoup. Merci. Et puis,
- Speaker #1
bonne continuation.
- Speaker #0
Merci. Au revoir.
- Speaker #1
Voilà. J'espère que cet épisode vous a plu et vous aura permis de garnir encore un peu plus. Votre boîte à outils qui vous aidera à devenir progressivement une meilleure version de vous-même. Vous suivez et aimez ce podcast Alors soyez généreux et partagez-le avec vos proches, vos collègues et vos équipes pour que eux aussi puissent profiter de ces pépites d'experts. Un autre moyen pour en faire profiter le plus grand nombre est de le faire augmenter en visibilité en le faisant remonter dans les classements. Pour faire ça, c'est très simple. Mettez simplement 5 étoiles et un commentaire qui donnera envie à d'autres de nous écouter. Enfin... Je vous rappelle que vous pouvez aussi vous abonner à ma newsletter dont j'ai mis le lien dans le descriptif. Grâce à ça, vous serez avertis avant tout le monde de la sortie d'un nouvel épisode et vous pourrez aussi bénéficier d'infos introuvables ailleurs. Alors maintenant, à vous de jouer