#3 Vincent Benoît, agitateur de solidarités face à la menace démographique cover
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Finta! L'Aveyron par ses voix

#3 Vincent Benoît, agitateur de solidarités face à la menace démographique

#3 Vincent Benoît, agitateur de solidarités face à la menace démographique

27min |15/01/2021
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Finta! L'Aveyron par ses voix

#3 Vincent Benoît, agitateur de solidarités face à la menace démographique

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Description

👁️‍🗨️ Je vous emmène sur le Lévezou pour ce troisième épisode de Finta. C’est à Arvieu que j’ai rencontré Vincent Benoît.

Petit village de 800 âmes, Arvieu s’illustre comme un modèle de transition en ruralité. Parce que son déclin démographique menaçait son existence-même, Arvieu a réussi à impliquer tous ses habitants dans un projet inédit : la création d’un « tiers-lieu villageois ». Le premier en France. 

Ce tiers-lieu, c’est un écosystème véritablement vertueux qui a permis à Arvieu de conserver ses services de proximité, de créer des lieux de rencontre pour ses habitants et de fabriquer son autonomie « du faire-ensemble » pour demain.

💬 Tête pensante de la dynamique arvieunoise, depuis vingt ans, l’ingénieur et entrepreneur Vincent Benoît orchestre une méthode de « mayonnaise » agile et participative dont il a le secret. Et si le dynamisme d’Arvieu ne tient pas (qu’) à lui, c’est sûrement lui qui en parle le mieux.

Avec Vincent Benoît, on va causer solidarité villageoise, d’une « mayonnaise humaine » toute particulière et de créativité, quand les ressources viennent à manquer.  

📣 Pssssst ! Cet épisode, dans la forme, diffère des deux premiers. J’ai volontairement effacé la plupart de mes questions pour laisser Vincent Benoît dérouler et articuler son propos. C’est dense, il y a matière à cogiter et à s’inspirer. Vous m’en direz des nouvelles !



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Transcription

  • Speaker #0

    Finta, c'est le podcast qui nourrit des esprits, des envies d'agir et des espoirs très concrets à l'échelle locale. Finta part de l'Aveyron pour explorer les voies de la ruralité, à la rencontre de celles et ceux qui incarnent la diversité et l'incroyable vivacité de territoires que l'on croyait oubliés. Je m'appelle Lola Cross, je suis journaliste et je vous emmène bien de loin. Pour ce nouvel épisode de Finta, je suis partie sur le Lévesou, petit village de 800 âmes, Arvieux s'illustre comme un modèle de transition en ruralité. Parce que son déclin démographique menaçait son existence même, le village a réussi à impliquer tous ses habitants dans un projet inédit, la création du premier tiers-lieu villageois en France. À Arvieux, j'ai rencontré Vincent Benoît, tête pensante de la dynamique arviennoise. Vincent Benoît orchestre une méthode. agile et participative dont lui seul a le secret. Alors avec lui, on va causer de solidarité villageoise, d'une recette de mayonnaise humaine toute particulière et d'autonomie du faire-ensemble. On y va ? Alors si on doit revenir à l'histoire d'Arvieux, à cette aventure qui a été d'abord la tienne et qui est devenue collective, on est en 1998. Est-ce que tu peux nous raconter ce qui se passe à cette année-là ?

  • Speaker #1

    Alors déjà, c'est mon aventure aussi, mais c'est l'aventure collective, mais c'était une aventure qui avait commencé avant moi en fait, puisqu'Arvieux était un village qui avait déjà beaucoup de fêtes villageoises, et qui semble qu'à travers l'histoire, a toujours été un village à la fois isolé, à la fois ouvert et assez participatif. C'est vraiment pour dire que nous, quand on est arrivé en 98, on avait un projet et on a été accueillis à Arvieux, mais Arvieux était déjà un écosystème, un territoire très fertile. pour accueillir des jeunes qui avaient juste envie de créer leur vie plutôt que la consommer. Donc à 98, pourquoi on débarque là ? En fait, moi je finis mes études en 97, c'était des études d'ingénieur à Lyon, et j'ai deux convictions, même presque deux sentiments de révolte, c'est que si je dois trouver un boulot, ça va être forcément plutôt bien payé, mais forcément dans une zone urbaine, mais forcément plutôt dans une grande entreprise. Et j'avais tous mes amis dans la région du canton de Cassagne, Arvieux. Et on s'est dit pourquoi pas créer notre vie à mur rural. Et on arrive avec cette idée, c'est de créer notre vie à mur rural avec une activité à la numérique, avec l'entreprise Lightis que l'on a créée et avec cette idée qu'on voulait créer une entreprise qui appartenait à ceux qui travaillent. Donc on a d'emblée choisi le statut coopératif en fait. Et donc on s'est dit on va tenter notre chance, on va envoyer une lettre à toutes les mairies du canton de Cassagne pour avoir 40 mètres carrés, si possible gratuits pendant un an ou deux. pour nous aider à démarrer tout simplement, et pour créer notre entreprise. Et Harvey a répondu de suite, avec ce couvent libre avec 40 mètres carrés. On avait 24 ans, on n'avait jamais créé une entreprise, on créait un cousin numérique au statut coopératif. Je veux dire, on avait à peu près toutes les cases cochées pour dire, eux, normalement on doit se planter, tu vois. Et puis en plus, c'est la campagne, quoi, tu vois. Eux, ils nous ont fait confiance. La mairie, on a été très vite intégrés, invités chez l'un, chez l'autre. On a rencontré des élus, des gens du village. Le comité des fêtes et le festival, le Cap Festival à côté, étaient deux machines culturelles et associatives. Un de mes associés est devenu co-président du Cap Festival. Un autre de mes associés est devenu co-président du comité des fêtes. Et là on a commencé tout le travail rock'n'roll qui remplissait nos vies. C'est-à-dire qu'en fait tout ce qu'on faisait ça réussissait avec les jeunes de notre âge tu vois. C'est venir Trigan, Arvieux, l'héritage du Succo, puis ça finit par Manuccio etc. On créait le McDo de 1000 personnes la première année. Donc chacun on arrive avec nos compétences et puis on arrive à faire des trucs ensemble énormes, sans hiérarchie en fait. On était dans un comité des fêtes de 100 personnes qui participaient. avec des présidents de 25-28 ans qui changeaient tous les deux ans. Donc ça, ça te rend humble parce que tu as la structure de l'entreprise, on dit qu'il faut qu'elle soit hiérarchique, on dit que c'est une structure pas hiérarchique et pourtant hyper efficace. Donc il y a ce miracle à Rue-Loin, si tu veux, c'est de dire que celui-là, j'y crois à lui, et quand il doit se sortir les doigts, il le fait. Et mon rêve vraiment en venant à Mille Rurales, c'était de créer une petite Silicon Valley rurale en fait. Je voulais le bord et l'argent du bâtiment. Je voulais choisir mon lieu de vie. Et je disais souvent, je veux habiter dans le trou du cul du monde et voir le monde entier passer. C'était pour expliquer qu'en fait, je ne faisais pas le deuil de la culture, je ne faisais pas le deuil des rencontres, je ne faisais aucun deuil en fait. Je faisais juste l'idée que j'allais devoir créer. Donc je dis souvent, dans un petit village, si tu veux voir un concert, il te faut l'organiser. Qu'est-ce qui se passe dans un petit village où tout vient de t'en manquer ? Il te semble que tout vient te manquer, tu sors de la rue, tu veux faire un truc, tu vas commencer à dire quelles sont les ressources disponibles, c'est mes voisins. Mes voisins ne me ressemblent pas forcément, ils n'ont pas forcément un fait de même, tu ne les as pas forcément. Avec des gens très différents, tu construis un projet commun. Et c'est ça que je définis comme la taille humaine, c'est quand on commence à pouvoir raconter des histoires, le passé, les rencontres, etc. Pour expliquer comment ça s'est passé aujourd'hui. On est dans un environnement qui a pris les gens plutôt heureux parce qu'ils agissent sur leur environnement. Quand on agit sur son environnement et qu'on a l'impression de le contrôler, on montre que les angoisses partent. Et quand on produit de la culture ou de la valeur, connecté avec des gens, on montre que c'est à priori la base du bonheur ou en tout cas d'une satisfaction de vivre. C'est la qualité des relations humaines. Il y a un terrain fertile qui se crée. Finir par créer ce lieu dont tu parles, le jardin. Le jardin, on considère aujourd'hui que c'est sans doute le premier tiers-lieu villageois en France. Un tiers-lieu, c'est quoi ? C'est un espace idéal entre un espace de travail et un espace de vie. C'est-à-dire que là, tu es dans un pépinière et coworking entreprise, le rez-de-chaussée, c'est une cafette, un peu comme une auberge de jeunesse de travail. Donc là, tu vas autant rencontrer des gens qui sont du monde de la culture, vers 17h, que des gens qui sont en train de travailler, qui quittent leur boulot, qui travaillent dans les logiciels. Tu vas autant rencontrer dans le parc une mamie avec son petit-fils, qu'un mec qui bosse. Et tu es à deux pas, tu vois juste en face, des commerces. Des commerces que pendant 20 ans, on a dû se battre pour les sauver aussi. Donc tout est interconnecté. Dans une communauté à taille humaine, tu comprends tout ça. Tu comprends que la vie est agréable que s'il y a suffisamment de monde. Et en fait, on l'a compris. On est un village où il y a une menace démographique. C'est que s'il n'y a pas assez de monde, il y a moins de monde à l'école. S'il y a moins de monde à l'école, les commerces commencent à fermer. Si les commerces commencent à fermer, la vie devient désagréable. Il n'y a plus d'infirmières, les personnes âgées se sentent seules. Les infirmières ont moins de boulot. Et puis, il y a un effondrement. fait un effondrement qui est qui peut arriver très vite il suffit que la pompe à essence et donc Pendant un temps, on s'est toujours battu à dire qu'on gardera tous nos services, toutes nos autonomies et toutes nos compétences. Une communauté à taille humaine est rassurante si tu as toutes les compétences. Le boulanger pour le pain, le forgeron pour le fer, le menuisier pour le bois, etc. Et l'ensemble de ces compétences, elles atteignent une taille critique où on se sent en sécurité, où on est capable de créer sa fête, on est capable de créer sa maison, on est capable de réfléchir avec des gens à qui tu peux faire confiance. Donc tu connais les enfants. Un jour, tu as pris un enfant en stage dans ton entreprise. Si c'est le fils de menuisier, bien sûr, le jour où il ira voir le menuisier, il sera content. Il doit te rendre un service parce que tu lui as rendu service. C'est tout simple, c'est le don et le contre-don. Cet ensemble de liens que tu finis par tisser au bout de 20 ans, ça finit par devenir un réseau à ta humaine qui a une puissance de feu et qui donne envie d'aller encore plus loin. Aujourd'hui, on a réussi, avec ce tiers-lieu villageois, le jardin, à attirer plus de porteurs de projets que d'hébergement. On a un nouveau problème à résoudre sur ce mandat, puisque je suis aussi au conseil municipal, c'est trouver de nouvelles capacités d'hébergement pour attirer des porteurs de projets qui soient attirés par un concept simple, c'est un projet de vie. c'est à dire qu'ils choisissent pas La HETIS comme entreprise, ils ne choisissent pas le village, ils ne choisissent pas la nature, ils choisissent tout ça. Tu vois un peu l'écosystème. C'est-à-dire que nous, on embrasse des gens qui ont des enfants qui vont remplir l'école et qui vont utiliser le service public. Et nous, on devient attractif grâce au service public. Le service public peut continuer à vivre parce qu'il y a de nouveaux usagers. Donc on voit rien que tout ça, c'est l'écosystème. Et ça, tu le comprends avec tes tripes quand c'est petit. Je suis convaincu que « small is beautiful » , il y a quelqu'un qui a fait une théorie économique sur l'autonomie et le petit. voilà je pense que cette réaction fait Pour se sentir bien dans des sortes de tribus ou de communautés à taille humaine compréhensibles, qui ne sont pas abstraites. Si j'insulte mon voisin, ça finira par me coûter cher. Si je rends service à mon voisin, ça finira par me rendre service aussi. Peut-être pas par mon voisin, mais par quelqu'un d'autre, etc. Donc, à ce titre, tu comprends ce qu'on appelle la complexité, que tout est relié et que c'est dans le lien que se crée la nouveauté. Donc à deux pas, tu vois, c'est à 30 mètres. Là derrière, boucherie, boulangerie, fleuriste, magasin déco, tabac, deux bars, etc. Et en plus, maintenant, on rajoute une brique, c'est qu'il y a un château qui est à moins de 200 mètres, qui accueille six nouveaux arrivants. Donc on a même la brique hébergement qui s'est rajoutée. Donc le tiers-lieu villageois, tu vois, c'est tout ça, c'est tous ces éléments-là. Tu vois, j'ai décrié cet écosystème, c'est des lieux. Mais ça ne marche pas s'il n'y a pas des gens. Il y a des compétences qui vont se connecter, pas entre elles, mais qui doivent être... florissantes si possible. T'as l'Aïtis, 18 personnes, t'as les Locomotivés, c'est un circuit court de produits locaux qui a été créé il y a 8 ans, qui aujourd'hui livre 400 paniers par semaine, la moitié sur le Rétiennois. C'est un projet économique qui permet à des producteurs de faire 30 à 50% de leurs ventes. même plus, tu vois, donc c'est énorme. Et ça résolvait un problème de geek, puisqu'on a créé il y a 8 ans, on a posé juste un truc pour la vie qu'ils ont, on a dit, nous, on veut pouvoir consommer local sans y passer plus de 5 minutes et sans se déplacer. Et l'idée, c'était juste qu'on allait créer un système de commande à la ligne qui permettait d'avoir un panier alimentaire équilibré avec tout ce qu'il faut pour rester en bonne santé, mais sans devoir aller dans chaque ferme. Mais c'est surtout sans faire un déplacement en plus. Et par contre, on est super égoïste, on crée notre vie, quoi. En fait, on cherche pas à changer le monde ici, si on cherche à créer notre monde. Il y a les temps périscolaires à mettre en place, il faut occuper les enfants un jour avec des projets pédagogiques, et bien on a des ressources disponibles. C'est qui qui a rien à brailler là ? Ah, il y a des retraités, ils ont des compétences, une ancienne prof de mante, une ancienne pâtissière, etc. Et bien hop, ils se rencontrent, et ils finissent par construire ensemble un programme pédagogique autonome. Et donc, on fait rencontrer l'offre et la demande. Il y a des gens qui sont prêts à donner leur savoir, et des enfants qui adoreraient le recevoir. Et ça, on s'est arraché à nous remplir une année. Et c'est fabuleux, on a fait ça avec zéro franc, zéro euro. Donc tout ça, ça a rapporté dans ma main à la société, mais malheureusement... Les comptables On ne savent pas le mesurer puisqu'il ne mesure que quand ça coûte, et jamais quand ça rapporte, puisqu'en fait on va savoir combien coûte un infarctus, mais on ne va pas savoir combien coûte un infarctus évité. On peut supposer que le bien-vivre à un vieux augmente l'espérance de vie et de bonne santé de manière conséquente, et je pense que les chercheurs l'ont déjà démontré en fait. La société devient très violente sans faire esprit à partir du moment où des gens, à partir d'une taille critique, se mettent à raisonner au niveau macro, qui commence à appeler... Paul, Pierre ou Jacques consommateur, comment s'appeler Paul, Pierre ou Jacques électeur, avec un S. Tous ces concepts abstraits qui vont faire remplir des fichiers Excel avec des chiffres pour gérer la France, ce qu'il faut aussi, par ailleurs. Mais à certains moments, quand on touche à des aspects régaliens, la justice, la santé, les maisons de retraite, etc., deviennent des violences, en fait, parce qu'on peut trouver qu'une règle macro est absolument géniale, appliquer les normes à toute la France, et faire que des zones... autonomes qui auraient pu trouver des solutions, mais ne les trouvent plus parce que ça ne respecte pas les normes, parce qu'il faut respecter des normes internationales, dans l'alimentation nationale, dans l'alimentation par exemple. Tu peux faire une nourriture étatienne, mais si tu ne respectes pas les normes, tu ne peux pas la vendre. Les normes viennent d'un système industriel qui produit en quantité astronomique. Ici on peut résoudre des problèmes de santé rien qu'avec la solidarité locale. Ici on pourrait garder nos enfants nous-mêmes en partie. Parce qu'il y a des parents qui sont prêts à donner leur temps et à partager leur temps pour faire une crèche. C'est interdit de faire ça. Par exemple, aujourd'hui on a un scandale ici, c'est qu'on a une maison de petite enfance qui a coûté très cher, qui n'est utilisée parce qu'en fait il faut respecter des normes telles que les parents n'ont pas le droit de l'investir sans qu'il y ait quelqu'un de diplômé qui nettoie les jouets tous les jours. l'État peut jouer son rôle macro, mais il faut laisser les gens trouver leurs solutions dans leur écosystème. Et les solutions qu'on trouvera à Arvieux ne seront pas les mêmes que celles qu'on trouvera dans un autre village en France. Et quand tu donnes la puissance d'agir aux gens, ils l'apprennent. Et ils l'apprennent de manière un peu égoïste, ils l'apprennent pour changer leur vie. Les parents cherchent à trouver des solutions pour garder leurs enfants. Les personnes âgées cherchent des solutions pour trouver des logements de plein pied avec des gens à côté. C'est de l'altruisme de raison. Et ça, quand les ressources viennent à manquer, et c'est ça qui est bien mieux. En réalité, c'est qu'on n'a pas tous les services. C'est génial quand même Patrick Serres parce que c'est maintenant qu'on va se bouger le cul pour avoir une bonne vie. Et donc ce qu'on a choisi à Hervieux, c'est de partager un diagnostic, la plus grosse menace à la démographie, qui est que tous les villageois l'ont compris quasiment. Et donc maintenant, il faut qu'on ait une bonne vie, parce que si on a une bonne vie, les gens resteront, ou des nouveaux viendront. On n'a pas envie de changer le monde, on n'est pas des prosélytiques de « il faut vivre comme ça, comme ça » . D'abord on montre l'exemple, nous-mêmes, on vit nous-mêmes des solidarités, c'est de l'altrisme de raison. J'appelle ça l'altruisme de raison, c'est-à-dire que c'est moins con de faire à plusieurs que tout seul. Au fond, c'est moins con parce que... Quelqu'un qui regarde 3 heures la télé par jour, il se trompe le cerveau. Donc il vaudrait mieux que s'il regarde que 2 heures par jour et que le reste du temps il s'occupe de ses voisins. Soit apporter la foi à son voisin qui a du mal à marcher. Ou soit participer à faire de la trompette dans un cours de musique. Il sera plus heureux, il rendra les autres heureux. Donc c'est con d'avoir regardé la télé 1h de trop. Donc on a des ressources illimitées en milieu rural. Et partout en France, même du rural. 800 habitants en art vieux, 3h en moyenne d'exposition à la télé. Bon ben voilà, c'est leur don d'amitié. de sortir. Donc à chaque fois qu'on doit se débrouiller, je trouve ça réjouissant en fait, parce que dans se débrouiller avec peu, on est forcément créatif et c'est démontré dans tout ce qui est art ou création, c'est quand les ressources viennent à manquer qu'on est créatif. Ce que j'adore dans les zones rurales où la vie est quand même bien parce qu'on a accès à la nourriture, on a un toit, j'ai la base, souvent on a la base, mais quand les services publics se barrent et tout ça, c'est toujours une catastrophe aussi. Mais des fois c'est génial parce que quand les ressources viennent à manquer, la stratégie est la plus efficace. dans les systèmes, c'est la coopération. Donc on est contraint de coopérer. Ma théorie, c'est ce que j'appelle des leçons de mayonnaise. J'appelle ça leçon de mayonnaise, c'est qu'en fait, la plupart des territoires, ils ont tous les ingrédients pour faire de la mayonnaise. Tu vois, une mayonnaise, c'est pas compliqué, c'est que tu as de l'huile dans une bouteille, t'as un oeuf dans sa coquille, t'as de la moutarde dans son pot. La plupart des gens que je vois dans les entreprises ou ailleurs, je vois que l'huile reste dans sa bouteille, donc chacun garde son ego, tu vois. En gros, je suis l'huile et je reste l'huile, l'œuf reste dans sa coquille, je suis œuf et je reste œuf dans ma coquille, donc chacun reste soi avec sa structure. Donc dans tous les territoires, souvent, quand c'est pas trop la mort, que tout le monde n'est pas encore parti, on a tous les ingrédients, on a le menuisier, le boulanger, etc. Et souvent, je dis les territoires ou les entreprises ou les communautés, les groupes en général, sont pas très inspirés souvent, parce qu'en fait ils ont tous leurs ingrédients à leur sein, mais... Ils n'ont pas de bol. Pas de bol, c'est un jeu de mots. Ils n'ont pas de lieu pour se rencontrer, pour se mélanger. Et ils n'ont pas non plus de cuistot, c'est-à-dire de quelqu'un qui sait animer ça. Dans les villages, avant, on avait des animateurs. Quand on avait des animateurs, on peut aimer ou pas l'idée, mais en Aveyron, il y a 50 ans, il y avait 800 prêtres. d'ailleurs aujourd'hui à 30 Les prêtres dans la plupart des histoires, c'était des gens qui ont rempli une fonction d'animateur. Des fois ça a été l'instit à d'autres époques, ça a été aussi l'instit, des fois ça a été quelqu'un d'engagé, mais il y avait du temps pour la communauté, du temps institutionnalisé, il y avait des gens qui étaient pour la communauté et qui donc faisaient ce travail. Et il y a autre chose qu'on n'a pas souvent, c'est la méthode. C'est-à-dire que tu as le cristaux mais tu n'as pas la recette. Donc quand tu as le bol, tu vois, tu crées une pépite d'entreprise, une salle de spectacle, un café, c'est des lieux de rencontre. Donc tu as créé les lieux et les espaces. Après, les gens, ils vont commencer à se mélanger. Il y a deux choses importantes, c'est qu'il faut qu'on ait des apprentissages pour gérer notre ego, accepter de sortir de notre bouteille, de notre coquille, de se dire je veux me mélanger. Et pour aider à ça, il faut une autre pratique que l'art du faire ensemble. C'est comment on réussit à faire ensemble. Et on a développé une méthode participative qu'on pourrait appeler la méthode agile et participative. Très vite on a vu qu'en fait les gens quand ils avaient le pouvoir d'agir et qu'ils étaient informés, ça prend du temps d'informer au début puisque tout le monde doit avoir le même vocabulaire, donc ça tu as l'impression de perdre un peu d'attente au début, donc tout le monde demande ton niveau d'information, t'animes ça. Les gens se retrouvent dans le même endroit et on présente un projet. de salles de spectacle. L'architecte est là juste pour donner sa vision, et les gens disent, en tant qu'usager, moi j'ai besoin que les sièges soient grands, moi en tant qu'usager, j'ai besoin, j'entends pas, j'ai besoin d'un boucleau dur, etc. Et d'un moment, on fait travailler les gens autour d'un prototype qui a été fait par l'architecte. Mais c'est pas l'architecte qui anime la réunion, c'est quelqu'un qui l'aide. Et les gens, ils peuvent critiquer le prototype, ils ont le droit de le détruire ou pas. Et grâce à ça, on n'a plus de concours d'égo, tu vois. Les gens, ils se mettent à attaquer un objet. Donc, ils n'attaquent pas, ils se mettent à jouer. Et quand ils se mettent à attaquer un objet, Et quand ils se mettent autour, ils sont plus face à face, ils sont côte à côte. Et parce qu'ils sont côte à côte, ils commencent à jouer. Et l'idée de l'un amène à l'idée de l'autre. Et on finit par obtenir la mayonnaise. C'est que la contrainte de celui qui est gros, qui veut des sièges qui sont un peu plus larges, avec la contrainte de celui qui veut que les gens ne s'endorment pas, on finit par faire le design parfait du fauteuil. Et quand tu lèves toutes les critiques, tu as cette sensation de mayonnaise. Tu vois, en 2-3 minutes, tu as trouvé une solution. Une solution qui coûte moins cher, qui est mieux. Dis-moi dans les méthodes habituelles du numérique. si c'est possible de résoudre ce problème de design. Je ne pense pas. Parce qu'en fait, le maire va envoyer un mail à l'architecte en disant « Oui, il y a des artistes qui voudraient avoir des pratiques. » « Ok, donc l'architecte, il fait un truc, il renvoie au maire. » « Le maire représente à ses élus en conseil municipal. » « Il le redit plus ou moins aux artistes. » « Ah oui, l'architecte a prévu ça, c'est nul. » « Oh, vous faites chier, j'ai fait ce que vous avez. » Et ça, rien qu'avec des emails, même avec le numérique, c'est catastrophique. Il n'y a jamais les ingrédients mélangés. Et quand tu es élu, par contre, il faut... Voir ça comme une chambre, c'est pas comme un... une perte de pouvoir. Et quand tu es élu au début, tu peux le voir comme une perte de pouvoir. Tu te dis, mais pourquoi c'est eux qui décident ? Parce qu'ils savent mieux faire que toi. Tu t'en fous. Ton but, c'est d'être animateur. T'es maire, c'est pas d'avoir le pouvoir. Ton but, c'est que la mayonnaise, elle prenne. Et si tu ne sers à rien, c'est que tu as réussi. Si tu es animateur d'une communauté, que tu sois maire ou autre, et que ça marche sans toi, c'est la plus grande réussite. Tu as créé une autonomie du faire ensemble. Donc, il n'y a plus besoin de l'homme providentiel. Mais c'est ceux qui ont réussi à revue. ce qu'il faut comprendre, c'est que la démarche participative, Donc on ne va même pas l'appeler démarche participative, on va l'appeler fabrique de l'intérêt généreux. on pourrait l'appeler plutôt que de manger pas si pas de chien. Et retiens bien que quand on mélange de l'huile avec de l'huile, on n'a que de l'huile. Donc quand on mélange des gens qui se ressemblent, on fait pas beaucoup d'innovation et surtout le résultat est dégueulasse. Donc quand on rencontre que des militants du bio dans un circuit court, c'est chiant. Quand on rencontre que des conventionnels dans un circuit court, c'est chiant. Quand on rencontre que des gens qui pensent pareil, c'est chiant. Le problème c'est qu'en zone urbaine, tu peux rencontrer que les gens qui te ressemblent. Tu veux faire un café, tu veux organiser des soirées philosophiques sur Spinoza, tu peux trouver trente personnes pour faire ça pendant un an. Là, un vieux 800 habitants, si je veux faire des projets, je peux. Mais il va falloir que je fasse avec des gens qui ne me ressemblent pas. De mon point de vue, je ne vais pas me tromper, mais de mon point de vue, parce que tu es obligé de comprendre l'autre. Donc ta rigueur philosophique qui était d'abord basée sur des grands principes, par exemple, on pourrait dire le grand principe, il faut manger que bio. Je le pense plutôt, au fond. Je ne me permettrai pas de le dire et de l'imposer et de le croire aux gens qui sont autour de moi. J'ai des copains agriculteurs qui ne sont pas bio. Moi je demande juste à ce qu'on se respecte. C'est que si à un moment donné il a la connaissance technique que sa façon de cultiver peut nuire à la santé de ses voisins, il essaie de faire mieux demain. Je ne peux pas lui demander de changer sa production en un jour. Je ne peux pas lui dire que tu es un connard parce que tu es conventionnel. Et souvent, on fait ce genre de confusion. En mieux que le râle, si tu oublies un peu ton égo, à la place de les insulter, tu discutes. Et en discutant, tu te mets à comprendre. Et tu te poses en humilité la question, si j'étais à leur place, qu'est-ce que je ferais ? Et en te posant cette question, tu te rends compte que les problèmes sont souvent beaucoup plus complexes. Donc, dans un comité humain, sur des sujets aussi importants que l'alimentation, tu commences à comprendre que tout est beaucoup plus compliqué que ce que tu vois à la télé. Commence à comprendre ton voisin. Ça ne veut pas dire que tu vas l'aimer. Ça veut dire que si tu commences à le comprendre, tu vas comprendre qu'il y a des choses, que si tu veux que demain soit un peu mieux qu'aujourd'hui, ce n'est pas en disant aux gens que leur façon de faire, c'est de la merde. L'important, c'est de réussir ensemble. Et les conditions, elles sont importantes, mais elles relèvent, dans le débat public, elles relèvent de l'intimité religieuse presque, tu vois. Je peux réussir un acte solidaire avec des gens qui se disent racistes, par exemple. Pourtant, quand on doit faire un acte de solide, il a été compris, cela. Donc tout est beaucoup plus compliqué. Et ce que j'aime à mes rurals et dans la culture paysanne, c'est qu'on mesure la qualité des choses, souvent, dans notre culture aérienne en tout cas, au résultat des actes plus que des idées. Nous, on a l'art d'organiser le débat autour du projet. On parle économie, donc on pourrait dire plutôt droite, et on parle culture, plutôt gauche. Amur a tellement peu de ressources que chaque contrainte devient une opportunité. La culture devient une opportunité économique, et l'économie devient une opportunité culturelle, puisque c'est les commerçants du village qui financent, par le sponsoring, des activités culturelles. Donc, Albert Jacques a dit, nous sommes les liens que nous tissons. Au fond, si tu réfléchis pour toi ou pour les autres, tu n'es que la collection des autres, la langue que tu... parles, qui t'aident à penser, c'est que d'autres qui l'ont inventé avant toi. Tes peurs et tes joies, ça vient de ton histoire personnelle. Tes réflexes, ça vient de l'histoire de la vie. Voilà, enfin, dans un village, tu finis aussi par te rendre compte que ta capacité d'agir, ta puissance d'agir, elle est décuplée grâce aux autres.

  • Speaker #0

    Qu'est-ce qu'il reste à faire ? Quel regard est-ce que tu portes sur le village aujourd'hui ?

  • Speaker #1

    En vieillissant, je deviens plus radical. Je dirais qu'on n'est pas assez sobres, pas assez résilients, et pas assez radicaux dans l'autonomie. Parce qu'ici, je sais que par exemple, les gens ont assez d'argent et de compétences pour construire le village eux-mêmes et ne pas faire appel à des publics. Donc moi, j'aimerais qu'on envoie un message un peu bizarre. Je suis pour les services publics, si tu veux, mais la façon dont ils sont gérés, je doute un peu de leur avenir. Je suis désolé de dire ça, mais je trouve ça révoltant. Du coup, j'ai du mal à faire confiance à un pouvoir centralisé. Je serais pour un pouvoir qui fixe les règles du jeu, les droits de l'homme et les droits de la nature, et laisser chaque territoire, les régions d'abord, de dire par exemple l'Occitanie doit dérégler l'Occitanie. On a tous les écosystèmes d'Aquitaine, on a la mer, on a la montagne, on a les plaines, etc. On va surtaxer tout ce qui est déplacement de matière, parce que c'est du pétrole, voilà. Donc à chaque fois que la région se nourrit elle-même, elle va gagner. Donc l'État fixe des métalliques du jeu et laisse des zones autonomes se démerder. Pourquoi autonomes ? Parce que quand tu agis à petit niveau, tu reconnais les autres, tu as le circuit court d'information, le circuit court de matière. Ces circuits courts, ils te font comprendre qu'il faut être sobre, ils te font faire des économies et ils te font surtout reconnaître ton voisin. Un agriculteur qui sait qui. il nourrit fera de la meilleure nourriture que s'il pisse du lait pour des gens qu'il ne connaît pas. On est tous pareils, je veux dire. Je dis les agriculteurs, mais toi, moi, on est pareil. Quand on fait des trucs qui ont moins de sens, qu'on ne connaît pas l'impact, qu'on ne comprend pas l'impact, on finit par perdre notre éthique, puisqu'en fait, on ne connaît pas à qui ça va nuire. Ça devient abstrait, ça perd son sens. Je serais beaucoup plus radical pour envoyer cette idée, ce message, qu'en fait, ensemble, on peut créer notre vie et notre monde, et qu'on n'a pas besoin d'attendre l'arrivée d'un moment providentiel. On n'a pas besoin d'être de droite ou de gauche, on n'a pas besoin de faire partie d'un parti, on n'a pas besoin d'une loyauté aux idées. Si quelque chose marche, que ça ne correspond pas à nos idées, soyons scientifiques. Si quelque chose marche et a produit plutôt de la satisfaction de vivre aux gens autour de moi, mais que ce n'était pas dans mes idées, soyons humbles, l'expérience me montre que mes idées étaient fausses. Et je déteste donc ces moments symboliques des élections nationales, où des gens que j'apprécie ne pensent pas du tout comme moi, et pour cette raison-là, on pourrait se foutre sur la gueule alors qu'on a réussi 10 000 projets. Ça s'est passé aux élections présidentielles. Au conseil municipal, on avait pris notre équipe en disant pour quitter, et on s'était apprécié ou pas dans les projets en fonction de ça, mais c'était la guerre. Au bout d'un moment, je me suis dit à mon fond intérieur, mais on a réussi tellement de choses ensemble, c'est pas des gens qu'on connaît pas qui nous traitent comme des moutons électeurs, qui vont nous diviser. Donc au bout d'un moment, je me suis dit, ce que je crois relève de mon intimité religieuse, j'ai réussi des trucs avec les gens, je les apprécie comme ils sont, ceux qui pensent, c'est lié à leur histoire, pas plus. Et c'est lié à la mienne. Quand je suis au comité des fêtes, je me dis pas, Je me... Je mets les cateaux avec les cateaux, les athées avec les athées. Pareil en action politique, deux terrains.

  • Speaker #0

    J'ai l'habitude de poser comme dernière question, en quoi est-ce que tu crois ?

  • Speaker #1

    Quelle est ta plus grande conviction ? Que la condition humaine, c'est la solitude, c'est disparaître, la voie de la mort et tout ça. Et il semble que si on veut avoir une bonne vie, il y a deux choses fondamentales dont on a besoin. Trois choses fondamentales, c'est l'autonomie. Le besoin d'autonomie est un besoin, c'est sentir que j'ai la puissance de contrôler mon environnement seul. Mais c'est aussi le besoin de connexion, c'est-à-dire faire partie d'une communauté, sinon je déprime complètement. Je suis un être humain, et un être humain sans la reconnaissance de ses parents, il est mort. Donc depuis tout petit, tu as assimilé le fait que seul, tu es morte. Donc ton réflexe de survie, c'est de te connecter aux autres. Donc j'ai besoin d'autonomie, j'ai besoin de me connecter. et plutôt que réfléchir, agir. Parce qu'on montre qu'en fait, quand un être vivant agit sur son environnement et qu'il a l'impression d'être efficace sur son environnement, il se sent plutôt bien. Autonomie, connexion et puissance d'agir local, si tu as ces trois choses, normalement, tu es en bonne santé. Donc moi, je crois juste que je veux avoir une bonne vie. Et c'est très égoïste, mais je cherche par contre à avoir l'éthique de ne pas nuire aux autres. Et ça, c'est très ambitieux. Et donc, polluer la planète, c'est compliqué parce que à chaque fois que je mets de l'essence dans ma voiture, j'en ai besoin. je ne veux pas me marginaliser, je sais que je finance une économie de guerre. Et ça ne m'empêche pas de dormir. Je n'ai pas envie de culpabiliser les gens, on n'est pas dans la culpabilité. Mais je me dis que j'aimerais être dans une société où l'essence coûte cher et où un marché bio a un salaire deux fois plus élevé parce que lui, il n'utilise pas de pétrole. Ce n'est pas vrai. Je suis dans une société, dans un État, dans une économie qui a des règles du jeu, qui paie plus cher la nuisance que la bienfaisance. On l'a vu avec le Covid. Je trouve qu'on est dans une économie inversée, qui est contre nature. c'est-à-dire que ce qui fait du bien... n'ai pas compris ou mal rémunéré ou mal compté. Et ce qui est de la réparation ou a fait du mal, rattraper des mecs qui ont eu le cancer à cause de pesticides, au bout d'un moment, tu te dis, c'est qui qui doit payer ça ? J'ai envie de te dire, je suis plutôt pessimiste, et c'est ce qui me fait apprécier l'action dans l'instant présent. Qu'est-ce que j'ai de mieux à faire qu'à faire du mieux que je peux maintenant ? Ici et maintenant. Mais changer le monde, j'ai perdu un peu l'espoir, puisque le réchauffement climatique est annoncé depuis les années 70. Tu vois, donc je n'ai pas beaucoup d'espoir que l'humanité change sans un moment de crise majeur. Mais ça, ça me rassure beaucoup de gens. Donc, j'en parle pas trop. Donc oui je suis plutôt pessimiste mais pas résigné, je sais pas comment te dire. Je veux pas donner trop de sens à ce que je fais, tu vois, de sens ouais c'est de la générosité, c'est trop sérieux des autres tout ça, peut-être que j'ai tort mais je veux pas trop parler de ça, je veux juste avoir une bonne vie sans nuire à mes collègues. Et j'adore Brassens pour ça parce que Brassens il a dit que ça dans ses textes. Et il a une chanson qui s'appelle « Gloire à Don Juan » et il y a une phrase qui dit « Gloire à celui qui se borne à ne pas emmerder son voisin » . Je trouve que c'est une étiquette de vie hyper exigeante en fait. Parce que nos voisins, c'est nos voisins de palais, mais c'est... les gens qui sont en train de démigrer parce qu'on leur a foutu sur la gueule. Enfin, nos voisins, c'est tous les êtres humains, on va dire. Mais avant, c'est ce que j'avais dit aux locomotivés quand j'étais coprésident, j'ai dit nous sommes un groupe agissant, mais pas un groupe militant. Nous n'avons pas à dire aux gens, c'est nul d'aller au supermarché, ça c'est pas le truc. On doit rendre la distribution alimentaire tellement pratique qu'aller au supermarché, c'est moins intéressant. Ou alors, on doit convertir le supermarché pour qu'ils n'achètent que local. Si c'était ça la solution à la fin, pourquoi pas, tu vois ? on aurait résolu notre problème écologique. Si les producteurs sont bien payés, et que c'est le supermarché qui distribue à prix normal la nourriture, oui, pourquoi pas.

  • Speaker #0

    Merci.

  • Speaker #1

    Ok, merci à toi, Lola.

  • Speaker #0

    Merci. Vous êtes arrivés au bout de ce nouvel épisode de Finta. S'il vous a plu, parlez-en autour de vous, partagez-le à vos amis. C'est le meilleur soutien que vous puissiez apporter à Finta pour qu'il continue son chemin. Retrouvez Finta sur Instagram et sur Facebook. Finta. point le podcast pour ne rien rater des nouveaux épisodes et de leurs coulisses. On se retrouve dans 15 jours. D'ici là, gardez l'œil ouvert. Soyez curieux.

Description

👁️‍🗨️ Je vous emmène sur le Lévezou pour ce troisième épisode de Finta. C’est à Arvieu que j’ai rencontré Vincent Benoît.

Petit village de 800 âmes, Arvieu s’illustre comme un modèle de transition en ruralité. Parce que son déclin démographique menaçait son existence-même, Arvieu a réussi à impliquer tous ses habitants dans un projet inédit : la création d’un « tiers-lieu villageois ». Le premier en France. 

Ce tiers-lieu, c’est un écosystème véritablement vertueux qui a permis à Arvieu de conserver ses services de proximité, de créer des lieux de rencontre pour ses habitants et de fabriquer son autonomie « du faire-ensemble » pour demain.

💬 Tête pensante de la dynamique arvieunoise, depuis vingt ans, l’ingénieur et entrepreneur Vincent Benoît orchestre une méthode de « mayonnaise » agile et participative dont il a le secret. Et si le dynamisme d’Arvieu ne tient pas (qu’) à lui, c’est sûrement lui qui en parle le mieux.

Avec Vincent Benoît, on va causer solidarité villageoise, d’une « mayonnaise humaine » toute particulière et de créativité, quand les ressources viennent à manquer.  

📣 Pssssst ! Cet épisode, dans la forme, diffère des deux premiers. J’ai volontairement effacé la plupart de mes questions pour laisser Vincent Benoît dérouler et articuler son propos. C’est dense, il y a matière à cogiter et à s’inspirer. Vous m’en direz des nouvelles !



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Transcription

  • Speaker #0

    Finta, c'est le podcast qui nourrit des esprits, des envies d'agir et des espoirs très concrets à l'échelle locale. Finta part de l'Aveyron pour explorer les voies de la ruralité, à la rencontre de celles et ceux qui incarnent la diversité et l'incroyable vivacité de territoires que l'on croyait oubliés. Je m'appelle Lola Cross, je suis journaliste et je vous emmène bien de loin. Pour ce nouvel épisode de Finta, je suis partie sur le Lévesou, petit village de 800 âmes, Arvieux s'illustre comme un modèle de transition en ruralité. Parce que son déclin démographique menaçait son existence même, le village a réussi à impliquer tous ses habitants dans un projet inédit, la création du premier tiers-lieu villageois en France. À Arvieux, j'ai rencontré Vincent Benoît, tête pensante de la dynamique arviennoise. Vincent Benoît orchestre une méthode. agile et participative dont lui seul a le secret. Alors avec lui, on va causer de solidarité villageoise, d'une recette de mayonnaise humaine toute particulière et d'autonomie du faire-ensemble. On y va ? Alors si on doit revenir à l'histoire d'Arvieux, à cette aventure qui a été d'abord la tienne et qui est devenue collective, on est en 1998. Est-ce que tu peux nous raconter ce qui se passe à cette année-là ?

  • Speaker #1

    Alors déjà, c'est mon aventure aussi, mais c'est l'aventure collective, mais c'était une aventure qui avait commencé avant moi en fait, puisqu'Arvieux était un village qui avait déjà beaucoup de fêtes villageoises, et qui semble qu'à travers l'histoire, a toujours été un village à la fois isolé, à la fois ouvert et assez participatif. C'est vraiment pour dire que nous, quand on est arrivé en 98, on avait un projet et on a été accueillis à Arvieux, mais Arvieux était déjà un écosystème, un territoire très fertile. pour accueillir des jeunes qui avaient juste envie de créer leur vie plutôt que la consommer. Donc à 98, pourquoi on débarque là ? En fait, moi je finis mes études en 97, c'était des études d'ingénieur à Lyon, et j'ai deux convictions, même presque deux sentiments de révolte, c'est que si je dois trouver un boulot, ça va être forcément plutôt bien payé, mais forcément dans une zone urbaine, mais forcément plutôt dans une grande entreprise. Et j'avais tous mes amis dans la région du canton de Cassagne, Arvieux. Et on s'est dit pourquoi pas créer notre vie à mur rural. Et on arrive avec cette idée, c'est de créer notre vie à mur rural avec une activité à la numérique, avec l'entreprise Lightis que l'on a créée et avec cette idée qu'on voulait créer une entreprise qui appartenait à ceux qui travaillent. Donc on a d'emblée choisi le statut coopératif en fait. Et donc on s'est dit on va tenter notre chance, on va envoyer une lettre à toutes les mairies du canton de Cassagne pour avoir 40 mètres carrés, si possible gratuits pendant un an ou deux. pour nous aider à démarrer tout simplement, et pour créer notre entreprise. Et Harvey a répondu de suite, avec ce couvent libre avec 40 mètres carrés. On avait 24 ans, on n'avait jamais créé une entreprise, on créait un cousin numérique au statut coopératif. Je veux dire, on avait à peu près toutes les cases cochées pour dire, eux, normalement on doit se planter, tu vois. Et puis en plus, c'est la campagne, quoi, tu vois. Eux, ils nous ont fait confiance. La mairie, on a été très vite intégrés, invités chez l'un, chez l'autre. On a rencontré des élus, des gens du village. Le comité des fêtes et le festival, le Cap Festival à côté, étaient deux machines culturelles et associatives. Un de mes associés est devenu co-président du Cap Festival. Un autre de mes associés est devenu co-président du comité des fêtes. Et là on a commencé tout le travail rock'n'roll qui remplissait nos vies. C'est-à-dire qu'en fait tout ce qu'on faisait ça réussissait avec les jeunes de notre âge tu vois. C'est venir Trigan, Arvieux, l'héritage du Succo, puis ça finit par Manuccio etc. On créait le McDo de 1000 personnes la première année. Donc chacun on arrive avec nos compétences et puis on arrive à faire des trucs ensemble énormes, sans hiérarchie en fait. On était dans un comité des fêtes de 100 personnes qui participaient. avec des présidents de 25-28 ans qui changeaient tous les deux ans. Donc ça, ça te rend humble parce que tu as la structure de l'entreprise, on dit qu'il faut qu'elle soit hiérarchique, on dit que c'est une structure pas hiérarchique et pourtant hyper efficace. Donc il y a ce miracle à Rue-Loin, si tu veux, c'est de dire que celui-là, j'y crois à lui, et quand il doit se sortir les doigts, il le fait. Et mon rêve vraiment en venant à Mille Rurales, c'était de créer une petite Silicon Valley rurale en fait. Je voulais le bord et l'argent du bâtiment. Je voulais choisir mon lieu de vie. Et je disais souvent, je veux habiter dans le trou du cul du monde et voir le monde entier passer. C'était pour expliquer qu'en fait, je ne faisais pas le deuil de la culture, je ne faisais pas le deuil des rencontres, je ne faisais aucun deuil en fait. Je faisais juste l'idée que j'allais devoir créer. Donc je dis souvent, dans un petit village, si tu veux voir un concert, il te faut l'organiser. Qu'est-ce qui se passe dans un petit village où tout vient de t'en manquer ? Il te semble que tout vient te manquer, tu sors de la rue, tu veux faire un truc, tu vas commencer à dire quelles sont les ressources disponibles, c'est mes voisins. Mes voisins ne me ressemblent pas forcément, ils n'ont pas forcément un fait de même, tu ne les as pas forcément. Avec des gens très différents, tu construis un projet commun. Et c'est ça que je définis comme la taille humaine, c'est quand on commence à pouvoir raconter des histoires, le passé, les rencontres, etc. Pour expliquer comment ça s'est passé aujourd'hui. On est dans un environnement qui a pris les gens plutôt heureux parce qu'ils agissent sur leur environnement. Quand on agit sur son environnement et qu'on a l'impression de le contrôler, on montre que les angoisses partent. Et quand on produit de la culture ou de la valeur, connecté avec des gens, on montre que c'est à priori la base du bonheur ou en tout cas d'une satisfaction de vivre. C'est la qualité des relations humaines. Il y a un terrain fertile qui se crée. Finir par créer ce lieu dont tu parles, le jardin. Le jardin, on considère aujourd'hui que c'est sans doute le premier tiers-lieu villageois en France. Un tiers-lieu, c'est quoi ? C'est un espace idéal entre un espace de travail et un espace de vie. C'est-à-dire que là, tu es dans un pépinière et coworking entreprise, le rez-de-chaussée, c'est une cafette, un peu comme une auberge de jeunesse de travail. Donc là, tu vas autant rencontrer des gens qui sont du monde de la culture, vers 17h, que des gens qui sont en train de travailler, qui quittent leur boulot, qui travaillent dans les logiciels. Tu vas autant rencontrer dans le parc une mamie avec son petit-fils, qu'un mec qui bosse. Et tu es à deux pas, tu vois juste en face, des commerces. Des commerces que pendant 20 ans, on a dû se battre pour les sauver aussi. Donc tout est interconnecté. Dans une communauté à taille humaine, tu comprends tout ça. Tu comprends que la vie est agréable que s'il y a suffisamment de monde. Et en fait, on l'a compris. On est un village où il y a une menace démographique. C'est que s'il n'y a pas assez de monde, il y a moins de monde à l'école. S'il y a moins de monde à l'école, les commerces commencent à fermer. Si les commerces commencent à fermer, la vie devient désagréable. Il n'y a plus d'infirmières, les personnes âgées se sentent seules. Les infirmières ont moins de boulot. Et puis, il y a un effondrement. fait un effondrement qui est qui peut arriver très vite il suffit que la pompe à essence et donc Pendant un temps, on s'est toujours battu à dire qu'on gardera tous nos services, toutes nos autonomies et toutes nos compétences. Une communauté à taille humaine est rassurante si tu as toutes les compétences. Le boulanger pour le pain, le forgeron pour le fer, le menuisier pour le bois, etc. Et l'ensemble de ces compétences, elles atteignent une taille critique où on se sent en sécurité, où on est capable de créer sa fête, on est capable de créer sa maison, on est capable de réfléchir avec des gens à qui tu peux faire confiance. Donc tu connais les enfants. Un jour, tu as pris un enfant en stage dans ton entreprise. Si c'est le fils de menuisier, bien sûr, le jour où il ira voir le menuisier, il sera content. Il doit te rendre un service parce que tu lui as rendu service. C'est tout simple, c'est le don et le contre-don. Cet ensemble de liens que tu finis par tisser au bout de 20 ans, ça finit par devenir un réseau à ta humaine qui a une puissance de feu et qui donne envie d'aller encore plus loin. Aujourd'hui, on a réussi, avec ce tiers-lieu villageois, le jardin, à attirer plus de porteurs de projets que d'hébergement. On a un nouveau problème à résoudre sur ce mandat, puisque je suis aussi au conseil municipal, c'est trouver de nouvelles capacités d'hébergement pour attirer des porteurs de projets qui soient attirés par un concept simple, c'est un projet de vie. c'est à dire qu'ils choisissent pas La HETIS comme entreprise, ils ne choisissent pas le village, ils ne choisissent pas la nature, ils choisissent tout ça. Tu vois un peu l'écosystème. C'est-à-dire que nous, on embrasse des gens qui ont des enfants qui vont remplir l'école et qui vont utiliser le service public. Et nous, on devient attractif grâce au service public. Le service public peut continuer à vivre parce qu'il y a de nouveaux usagers. Donc on voit rien que tout ça, c'est l'écosystème. Et ça, tu le comprends avec tes tripes quand c'est petit. Je suis convaincu que « small is beautiful » , il y a quelqu'un qui a fait une théorie économique sur l'autonomie et le petit. voilà je pense que cette réaction fait Pour se sentir bien dans des sortes de tribus ou de communautés à taille humaine compréhensibles, qui ne sont pas abstraites. Si j'insulte mon voisin, ça finira par me coûter cher. Si je rends service à mon voisin, ça finira par me rendre service aussi. Peut-être pas par mon voisin, mais par quelqu'un d'autre, etc. Donc, à ce titre, tu comprends ce qu'on appelle la complexité, que tout est relié et que c'est dans le lien que se crée la nouveauté. Donc à deux pas, tu vois, c'est à 30 mètres. Là derrière, boucherie, boulangerie, fleuriste, magasin déco, tabac, deux bars, etc. Et en plus, maintenant, on rajoute une brique, c'est qu'il y a un château qui est à moins de 200 mètres, qui accueille six nouveaux arrivants. Donc on a même la brique hébergement qui s'est rajoutée. Donc le tiers-lieu villageois, tu vois, c'est tout ça, c'est tous ces éléments-là. Tu vois, j'ai décrié cet écosystème, c'est des lieux. Mais ça ne marche pas s'il n'y a pas des gens. Il y a des compétences qui vont se connecter, pas entre elles, mais qui doivent être... florissantes si possible. T'as l'Aïtis, 18 personnes, t'as les Locomotivés, c'est un circuit court de produits locaux qui a été créé il y a 8 ans, qui aujourd'hui livre 400 paniers par semaine, la moitié sur le Rétiennois. C'est un projet économique qui permet à des producteurs de faire 30 à 50% de leurs ventes. même plus, tu vois, donc c'est énorme. Et ça résolvait un problème de geek, puisqu'on a créé il y a 8 ans, on a posé juste un truc pour la vie qu'ils ont, on a dit, nous, on veut pouvoir consommer local sans y passer plus de 5 minutes et sans se déplacer. Et l'idée, c'était juste qu'on allait créer un système de commande à la ligne qui permettait d'avoir un panier alimentaire équilibré avec tout ce qu'il faut pour rester en bonne santé, mais sans devoir aller dans chaque ferme. Mais c'est surtout sans faire un déplacement en plus. Et par contre, on est super égoïste, on crée notre vie, quoi. En fait, on cherche pas à changer le monde ici, si on cherche à créer notre monde. Il y a les temps périscolaires à mettre en place, il faut occuper les enfants un jour avec des projets pédagogiques, et bien on a des ressources disponibles. C'est qui qui a rien à brailler là ? Ah, il y a des retraités, ils ont des compétences, une ancienne prof de mante, une ancienne pâtissière, etc. Et bien hop, ils se rencontrent, et ils finissent par construire ensemble un programme pédagogique autonome. Et donc, on fait rencontrer l'offre et la demande. Il y a des gens qui sont prêts à donner leur savoir, et des enfants qui adoreraient le recevoir. Et ça, on s'est arraché à nous remplir une année. Et c'est fabuleux, on a fait ça avec zéro franc, zéro euro. Donc tout ça, ça a rapporté dans ma main à la société, mais malheureusement... Les comptables On ne savent pas le mesurer puisqu'il ne mesure que quand ça coûte, et jamais quand ça rapporte, puisqu'en fait on va savoir combien coûte un infarctus, mais on ne va pas savoir combien coûte un infarctus évité. On peut supposer que le bien-vivre à un vieux augmente l'espérance de vie et de bonne santé de manière conséquente, et je pense que les chercheurs l'ont déjà démontré en fait. La société devient très violente sans faire esprit à partir du moment où des gens, à partir d'une taille critique, se mettent à raisonner au niveau macro, qui commence à appeler... Paul, Pierre ou Jacques consommateur, comment s'appeler Paul, Pierre ou Jacques électeur, avec un S. Tous ces concepts abstraits qui vont faire remplir des fichiers Excel avec des chiffres pour gérer la France, ce qu'il faut aussi, par ailleurs. Mais à certains moments, quand on touche à des aspects régaliens, la justice, la santé, les maisons de retraite, etc., deviennent des violences, en fait, parce qu'on peut trouver qu'une règle macro est absolument géniale, appliquer les normes à toute la France, et faire que des zones... autonomes qui auraient pu trouver des solutions, mais ne les trouvent plus parce que ça ne respecte pas les normes, parce qu'il faut respecter des normes internationales, dans l'alimentation nationale, dans l'alimentation par exemple. Tu peux faire une nourriture étatienne, mais si tu ne respectes pas les normes, tu ne peux pas la vendre. Les normes viennent d'un système industriel qui produit en quantité astronomique. Ici on peut résoudre des problèmes de santé rien qu'avec la solidarité locale. Ici on pourrait garder nos enfants nous-mêmes en partie. Parce qu'il y a des parents qui sont prêts à donner leur temps et à partager leur temps pour faire une crèche. C'est interdit de faire ça. Par exemple, aujourd'hui on a un scandale ici, c'est qu'on a une maison de petite enfance qui a coûté très cher, qui n'est utilisée parce qu'en fait il faut respecter des normes telles que les parents n'ont pas le droit de l'investir sans qu'il y ait quelqu'un de diplômé qui nettoie les jouets tous les jours. l'État peut jouer son rôle macro, mais il faut laisser les gens trouver leurs solutions dans leur écosystème. Et les solutions qu'on trouvera à Arvieux ne seront pas les mêmes que celles qu'on trouvera dans un autre village en France. Et quand tu donnes la puissance d'agir aux gens, ils l'apprennent. Et ils l'apprennent de manière un peu égoïste, ils l'apprennent pour changer leur vie. Les parents cherchent à trouver des solutions pour garder leurs enfants. Les personnes âgées cherchent des solutions pour trouver des logements de plein pied avec des gens à côté. C'est de l'altruisme de raison. Et ça, quand les ressources viennent à manquer, et c'est ça qui est bien mieux. En réalité, c'est qu'on n'a pas tous les services. C'est génial quand même Patrick Serres parce que c'est maintenant qu'on va se bouger le cul pour avoir une bonne vie. Et donc ce qu'on a choisi à Hervieux, c'est de partager un diagnostic, la plus grosse menace à la démographie, qui est que tous les villageois l'ont compris quasiment. Et donc maintenant, il faut qu'on ait une bonne vie, parce que si on a une bonne vie, les gens resteront, ou des nouveaux viendront. On n'a pas envie de changer le monde, on n'est pas des prosélytiques de « il faut vivre comme ça, comme ça » . D'abord on montre l'exemple, nous-mêmes, on vit nous-mêmes des solidarités, c'est de l'altrisme de raison. J'appelle ça l'altruisme de raison, c'est-à-dire que c'est moins con de faire à plusieurs que tout seul. Au fond, c'est moins con parce que... Quelqu'un qui regarde 3 heures la télé par jour, il se trompe le cerveau. Donc il vaudrait mieux que s'il regarde que 2 heures par jour et que le reste du temps il s'occupe de ses voisins. Soit apporter la foi à son voisin qui a du mal à marcher. Ou soit participer à faire de la trompette dans un cours de musique. Il sera plus heureux, il rendra les autres heureux. Donc c'est con d'avoir regardé la télé 1h de trop. Donc on a des ressources illimitées en milieu rural. Et partout en France, même du rural. 800 habitants en art vieux, 3h en moyenne d'exposition à la télé. Bon ben voilà, c'est leur don d'amitié. de sortir. Donc à chaque fois qu'on doit se débrouiller, je trouve ça réjouissant en fait, parce que dans se débrouiller avec peu, on est forcément créatif et c'est démontré dans tout ce qui est art ou création, c'est quand les ressources viennent à manquer qu'on est créatif. Ce que j'adore dans les zones rurales où la vie est quand même bien parce qu'on a accès à la nourriture, on a un toit, j'ai la base, souvent on a la base, mais quand les services publics se barrent et tout ça, c'est toujours une catastrophe aussi. Mais des fois c'est génial parce que quand les ressources viennent à manquer, la stratégie est la plus efficace. dans les systèmes, c'est la coopération. Donc on est contraint de coopérer. Ma théorie, c'est ce que j'appelle des leçons de mayonnaise. J'appelle ça leçon de mayonnaise, c'est qu'en fait, la plupart des territoires, ils ont tous les ingrédients pour faire de la mayonnaise. Tu vois, une mayonnaise, c'est pas compliqué, c'est que tu as de l'huile dans une bouteille, t'as un oeuf dans sa coquille, t'as de la moutarde dans son pot. La plupart des gens que je vois dans les entreprises ou ailleurs, je vois que l'huile reste dans sa bouteille, donc chacun garde son ego, tu vois. En gros, je suis l'huile et je reste l'huile, l'œuf reste dans sa coquille, je suis œuf et je reste œuf dans ma coquille, donc chacun reste soi avec sa structure. Donc dans tous les territoires, souvent, quand c'est pas trop la mort, que tout le monde n'est pas encore parti, on a tous les ingrédients, on a le menuisier, le boulanger, etc. Et souvent, je dis les territoires ou les entreprises ou les communautés, les groupes en général, sont pas très inspirés souvent, parce qu'en fait ils ont tous leurs ingrédients à leur sein, mais... Ils n'ont pas de bol. Pas de bol, c'est un jeu de mots. Ils n'ont pas de lieu pour se rencontrer, pour se mélanger. Et ils n'ont pas non plus de cuistot, c'est-à-dire de quelqu'un qui sait animer ça. Dans les villages, avant, on avait des animateurs. Quand on avait des animateurs, on peut aimer ou pas l'idée, mais en Aveyron, il y a 50 ans, il y avait 800 prêtres. d'ailleurs aujourd'hui à 30 Les prêtres dans la plupart des histoires, c'était des gens qui ont rempli une fonction d'animateur. Des fois ça a été l'instit à d'autres époques, ça a été aussi l'instit, des fois ça a été quelqu'un d'engagé, mais il y avait du temps pour la communauté, du temps institutionnalisé, il y avait des gens qui étaient pour la communauté et qui donc faisaient ce travail. Et il y a autre chose qu'on n'a pas souvent, c'est la méthode. C'est-à-dire que tu as le cristaux mais tu n'as pas la recette. Donc quand tu as le bol, tu vois, tu crées une pépite d'entreprise, une salle de spectacle, un café, c'est des lieux de rencontre. Donc tu as créé les lieux et les espaces. Après, les gens, ils vont commencer à se mélanger. Il y a deux choses importantes, c'est qu'il faut qu'on ait des apprentissages pour gérer notre ego, accepter de sortir de notre bouteille, de notre coquille, de se dire je veux me mélanger. Et pour aider à ça, il faut une autre pratique que l'art du faire ensemble. C'est comment on réussit à faire ensemble. Et on a développé une méthode participative qu'on pourrait appeler la méthode agile et participative. Très vite on a vu qu'en fait les gens quand ils avaient le pouvoir d'agir et qu'ils étaient informés, ça prend du temps d'informer au début puisque tout le monde doit avoir le même vocabulaire, donc ça tu as l'impression de perdre un peu d'attente au début, donc tout le monde demande ton niveau d'information, t'animes ça. Les gens se retrouvent dans le même endroit et on présente un projet. de salles de spectacle. L'architecte est là juste pour donner sa vision, et les gens disent, en tant qu'usager, moi j'ai besoin que les sièges soient grands, moi en tant qu'usager, j'ai besoin, j'entends pas, j'ai besoin d'un boucleau dur, etc. Et d'un moment, on fait travailler les gens autour d'un prototype qui a été fait par l'architecte. Mais c'est pas l'architecte qui anime la réunion, c'est quelqu'un qui l'aide. Et les gens, ils peuvent critiquer le prototype, ils ont le droit de le détruire ou pas. Et grâce à ça, on n'a plus de concours d'égo, tu vois. Les gens, ils se mettent à attaquer un objet. Donc, ils n'attaquent pas, ils se mettent à jouer. Et quand ils se mettent à attaquer un objet, Et quand ils se mettent autour, ils sont plus face à face, ils sont côte à côte. Et parce qu'ils sont côte à côte, ils commencent à jouer. Et l'idée de l'un amène à l'idée de l'autre. Et on finit par obtenir la mayonnaise. C'est que la contrainte de celui qui est gros, qui veut des sièges qui sont un peu plus larges, avec la contrainte de celui qui veut que les gens ne s'endorment pas, on finit par faire le design parfait du fauteuil. Et quand tu lèves toutes les critiques, tu as cette sensation de mayonnaise. Tu vois, en 2-3 minutes, tu as trouvé une solution. Une solution qui coûte moins cher, qui est mieux. Dis-moi dans les méthodes habituelles du numérique. si c'est possible de résoudre ce problème de design. Je ne pense pas. Parce qu'en fait, le maire va envoyer un mail à l'architecte en disant « Oui, il y a des artistes qui voudraient avoir des pratiques. » « Ok, donc l'architecte, il fait un truc, il renvoie au maire. » « Le maire représente à ses élus en conseil municipal. » « Il le redit plus ou moins aux artistes. » « Ah oui, l'architecte a prévu ça, c'est nul. » « Oh, vous faites chier, j'ai fait ce que vous avez. » Et ça, rien qu'avec des emails, même avec le numérique, c'est catastrophique. Il n'y a jamais les ingrédients mélangés. Et quand tu es élu, par contre, il faut... Voir ça comme une chambre, c'est pas comme un... une perte de pouvoir. Et quand tu es élu au début, tu peux le voir comme une perte de pouvoir. Tu te dis, mais pourquoi c'est eux qui décident ? Parce qu'ils savent mieux faire que toi. Tu t'en fous. Ton but, c'est d'être animateur. T'es maire, c'est pas d'avoir le pouvoir. Ton but, c'est que la mayonnaise, elle prenne. Et si tu ne sers à rien, c'est que tu as réussi. Si tu es animateur d'une communauté, que tu sois maire ou autre, et que ça marche sans toi, c'est la plus grande réussite. Tu as créé une autonomie du faire ensemble. Donc, il n'y a plus besoin de l'homme providentiel. Mais c'est ceux qui ont réussi à revue. ce qu'il faut comprendre, c'est que la démarche participative, Donc on ne va même pas l'appeler démarche participative, on va l'appeler fabrique de l'intérêt généreux. on pourrait l'appeler plutôt que de manger pas si pas de chien. Et retiens bien que quand on mélange de l'huile avec de l'huile, on n'a que de l'huile. Donc quand on mélange des gens qui se ressemblent, on fait pas beaucoup d'innovation et surtout le résultat est dégueulasse. Donc quand on rencontre que des militants du bio dans un circuit court, c'est chiant. Quand on rencontre que des conventionnels dans un circuit court, c'est chiant. Quand on rencontre que des gens qui pensent pareil, c'est chiant. Le problème c'est qu'en zone urbaine, tu peux rencontrer que les gens qui te ressemblent. Tu veux faire un café, tu veux organiser des soirées philosophiques sur Spinoza, tu peux trouver trente personnes pour faire ça pendant un an. Là, un vieux 800 habitants, si je veux faire des projets, je peux. Mais il va falloir que je fasse avec des gens qui ne me ressemblent pas. De mon point de vue, je ne vais pas me tromper, mais de mon point de vue, parce que tu es obligé de comprendre l'autre. Donc ta rigueur philosophique qui était d'abord basée sur des grands principes, par exemple, on pourrait dire le grand principe, il faut manger que bio. Je le pense plutôt, au fond. Je ne me permettrai pas de le dire et de l'imposer et de le croire aux gens qui sont autour de moi. J'ai des copains agriculteurs qui ne sont pas bio. Moi je demande juste à ce qu'on se respecte. C'est que si à un moment donné il a la connaissance technique que sa façon de cultiver peut nuire à la santé de ses voisins, il essaie de faire mieux demain. Je ne peux pas lui demander de changer sa production en un jour. Je ne peux pas lui dire que tu es un connard parce que tu es conventionnel. Et souvent, on fait ce genre de confusion. En mieux que le râle, si tu oublies un peu ton égo, à la place de les insulter, tu discutes. Et en discutant, tu te mets à comprendre. Et tu te poses en humilité la question, si j'étais à leur place, qu'est-ce que je ferais ? Et en te posant cette question, tu te rends compte que les problèmes sont souvent beaucoup plus complexes. Donc, dans un comité humain, sur des sujets aussi importants que l'alimentation, tu commences à comprendre que tout est beaucoup plus compliqué que ce que tu vois à la télé. Commence à comprendre ton voisin. Ça ne veut pas dire que tu vas l'aimer. Ça veut dire que si tu commences à le comprendre, tu vas comprendre qu'il y a des choses, que si tu veux que demain soit un peu mieux qu'aujourd'hui, ce n'est pas en disant aux gens que leur façon de faire, c'est de la merde. L'important, c'est de réussir ensemble. Et les conditions, elles sont importantes, mais elles relèvent, dans le débat public, elles relèvent de l'intimité religieuse presque, tu vois. Je peux réussir un acte solidaire avec des gens qui se disent racistes, par exemple. Pourtant, quand on doit faire un acte de solide, il a été compris, cela. Donc tout est beaucoup plus compliqué. Et ce que j'aime à mes rurals et dans la culture paysanne, c'est qu'on mesure la qualité des choses, souvent, dans notre culture aérienne en tout cas, au résultat des actes plus que des idées. Nous, on a l'art d'organiser le débat autour du projet. On parle économie, donc on pourrait dire plutôt droite, et on parle culture, plutôt gauche. Amur a tellement peu de ressources que chaque contrainte devient une opportunité. La culture devient une opportunité économique, et l'économie devient une opportunité culturelle, puisque c'est les commerçants du village qui financent, par le sponsoring, des activités culturelles. Donc, Albert Jacques a dit, nous sommes les liens que nous tissons. Au fond, si tu réfléchis pour toi ou pour les autres, tu n'es que la collection des autres, la langue que tu... parles, qui t'aident à penser, c'est que d'autres qui l'ont inventé avant toi. Tes peurs et tes joies, ça vient de ton histoire personnelle. Tes réflexes, ça vient de l'histoire de la vie. Voilà, enfin, dans un village, tu finis aussi par te rendre compte que ta capacité d'agir, ta puissance d'agir, elle est décuplée grâce aux autres.

  • Speaker #0

    Qu'est-ce qu'il reste à faire ? Quel regard est-ce que tu portes sur le village aujourd'hui ?

  • Speaker #1

    En vieillissant, je deviens plus radical. Je dirais qu'on n'est pas assez sobres, pas assez résilients, et pas assez radicaux dans l'autonomie. Parce qu'ici, je sais que par exemple, les gens ont assez d'argent et de compétences pour construire le village eux-mêmes et ne pas faire appel à des publics. Donc moi, j'aimerais qu'on envoie un message un peu bizarre. Je suis pour les services publics, si tu veux, mais la façon dont ils sont gérés, je doute un peu de leur avenir. Je suis désolé de dire ça, mais je trouve ça révoltant. Du coup, j'ai du mal à faire confiance à un pouvoir centralisé. Je serais pour un pouvoir qui fixe les règles du jeu, les droits de l'homme et les droits de la nature, et laisser chaque territoire, les régions d'abord, de dire par exemple l'Occitanie doit dérégler l'Occitanie. On a tous les écosystèmes d'Aquitaine, on a la mer, on a la montagne, on a les plaines, etc. On va surtaxer tout ce qui est déplacement de matière, parce que c'est du pétrole, voilà. Donc à chaque fois que la région se nourrit elle-même, elle va gagner. Donc l'État fixe des métalliques du jeu et laisse des zones autonomes se démerder. Pourquoi autonomes ? Parce que quand tu agis à petit niveau, tu reconnais les autres, tu as le circuit court d'information, le circuit court de matière. Ces circuits courts, ils te font comprendre qu'il faut être sobre, ils te font faire des économies et ils te font surtout reconnaître ton voisin. Un agriculteur qui sait qui. il nourrit fera de la meilleure nourriture que s'il pisse du lait pour des gens qu'il ne connaît pas. On est tous pareils, je veux dire. Je dis les agriculteurs, mais toi, moi, on est pareil. Quand on fait des trucs qui ont moins de sens, qu'on ne connaît pas l'impact, qu'on ne comprend pas l'impact, on finit par perdre notre éthique, puisqu'en fait, on ne connaît pas à qui ça va nuire. Ça devient abstrait, ça perd son sens. Je serais beaucoup plus radical pour envoyer cette idée, ce message, qu'en fait, ensemble, on peut créer notre vie et notre monde, et qu'on n'a pas besoin d'attendre l'arrivée d'un moment providentiel. On n'a pas besoin d'être de droite ou de gauche, on n'a pas besoin de faire partie d'un parti, on n'a pas besoin d'une loyauté aux idées. Si quelque chose marche, que ça ne correspond pas à nos idées, soyons scientifiques. Si quelque chose marche et a produit plutôt de la satisfaction de vivre aux gens autour de moi, mais que ce n'était pas dans mes idées, soyons humbles, l'expérience me montre que mes idées étaient fausses. Et je déteste donc ces moments symboliques des élections nationales, où des gens que j'apprécie ne pensent pas du tout comme moi, et pour cette raison-là, on pourrait se foutre sur la gueule alors qu'on a réussi 10 000 projets. Ça s'est passé aux élections présidentielles. Au conseil municipal, on avait pris notre équipe en disant pour quitter, et on s'était apprécié ou pas dans les projets en fonction de ça, mais c'était la guerre. Au bout d'un moment, je me suis dit à mon fond intérieur, mais on a réussi tellement de choses ensemble, c'est pas des gens qu'on connaît pas qui nous traitent comme des moutons électeurs, qui vont nous diviser. Donc au bout d'un moment, je me suis dit, ce que je crois relève de mon intimité religieuse, j'ai réussi des trucs avec les gens, je les apprécie comme ils sont, ceux qui pensent, c'est lié à leur histoire, pas plus. Et c'est lié à la mienne. Quand je suis au comité des fêtes, je me dis pas, Je me... Je mets les cateaux avec les cateaux, les athées avec les athées. Pareil en action politique, deux terrains.

  • Speaker #0

    J'ai l'habitude de poser comme dernière question, en quoi est-ce que tu crois ?

  • Speaker #1

    Quelle est ta plus grande conviction ? Que la condition humaine, c'est la solitude, c'est disparaître, la voie de la mort et tout ça. Et il semble que si on veut avoir une bonne vie, il y a deux choses fondamentales dont on a besoin. Trois choses fondamentales, c'est l'autonomie. Le besoin d'autonomie est un besoin, c'est sentir que j'ai la puissance de contrôler mon environnement seul. Mais c'est aussi le besoin de connexion, c'est-à-dire faire partie d'une communauté, sinon je déprime complètement. Je suis un être humain, et un être humain sans la reconnaissance de ses parents, il est mort. Donc depuis tout petit, tu as assimilé le fait que seul, tu es morte. Donc ton réflexe de survie, c'est de te connecter aux autres. Donc j'ai besoin d'autonomie, j'ai besoin de me connecter. et plutôt que réfléchir, agir. Parce qu'on montre qu'en fait, quand un être vivant agit sur son environnement et qu'il a l'impression d'être efficace sur son environnement, il se sent plutôt bien. Autonomie, connexion et puissance d'agir local, si tu as ces trois choses, normalement, tu es en bonne santé. Donc moi, je crois juste que je veux avoir une bonne vie. Et c'est très égoïste, mais je cherche par contre à avoir l'éthique de ne pas nuire aux autres. Et ça, c'est très ambitieux. Et donc, polluer la planète, c'est compliqué parce que à chaque fois que je mets de l'essence dans ma voiture, j'en ai besoin. je ne veux pas me marginaliser, je sais que je finance une économie de guerre. Et ça ne m'empêche pas de dormir. Je n'ai pas envie de culpabiliser les gens, on n'est pas dans la culpabilité. Mais je me dis que j'aimerais être dans une société où l'essence coûte cher et où un marché bio a un salaire deux fois plus élevé parce que lui, il n'utilise pas de pétrole. Ce n'est pas vrai. Je suis dans une société, dans un État, dans une économie qui a des règles du jeu, qui paie plus cher la nuisance que la bienfaisance. On l'a vu avec le Covid. Je trouve qu'on est dans une économie inversée, qui est contre nature. c'est-à-dire que ce qui fait du bien... n'ai pas compris ou mal rémunéré ou mal compté. Et ce qui est de la réparation ou a fait du mal, rattraper des mecs qui ont eu le cancer à cause de pesticides, au bout d'un moment, tu te dis, c'est qui qui doit payer ça ? J'ai envie de te dire, je suis plutôt pessimiste, et c'est ce qui me fait apprécier l'action dans l'instant présent. Qu'est-ce que j'ai de mieux à faire qu'à faire du mieux que je peux maintenant ? Ici et maintenant. Mais changer le monde, j'ai perdu un peu l'espoir, puisque le réchauffement climatique est annoncé depuis les années 70. Tu vois, donc je n'ai pas beaucoup d'espoir que l'humanité change sans un moment de crise majeur. Mais ça, ça me rassure beaucoup de gens. Donc, j'en parle pas trop. Donc oui je suis plutôt pessimiste mais pas résigné, je sais pas comment te dire. Je veux pas donner trop de sens à ce que je fais, tu vois, de sens ouais c'est de la générosité, c'est trop sérieux des autres tout ça, peut-être que j'ai tort mais je veux pas trop parler de ça, je veux juste avoir une bonne vie sans nuire à mes collègues. Et j'adore Brassens pour ça parce que Brassens il a dit que ça dans ses textes. Et il a une chanson qui s'appelle « Gloire à Don Juan » et il y a une phrase qui dit « Gloire à celui qui se borne à ne pas emmerder son voisin » . Je trouve que c'est une étiquette de vie hyper exigeante en fait. Parce que nos voisins, c'est nos voisins de palais, mais c'est... les gens qui sont en train de démigrer parce qu'on leur a foutu sur la gueule. Enfin, nos voisins, c'est tous les êtres humains, on va dire. Mais avant, c'est ce que j'avais dit aux locomotivés quand j'étais coprésident, j'ai dit nous sommes un groupe agissant, mais pas un groupe militant. Nous n'avons pas à dire aux gens, c'est nul d'aller au supermarché, ça c'est pas le truc. On doit rendre la distribution alimentaire tellement pratique qu'aller au supermarché, c'est moins intéressant. Ou alors, on doit convertir le supermarché pour qu'ils n'achètent que local. Si c'était ça la solution à la fin, pourquoi pas, tu vois ? on aurait résolu notre problème écologique. Si les producteurs sont bien payés, et que c'est le supermarché qui distribue à prix normal la nourriture, oui, pourquoi pas.

  • Speaker #0

    Merci.

  • Speaker #1

    Ok, merci à toi, Lola.

  • Speaker #0

    Merci. Vous êtes arrivés au bout de ce nouvel épisode de Finta. S'il vous a plu, parlez-en autour de vous, partagez-le à vos amis. C'est le meilleur soutien que vous puissiez apporter à Finta pour qu'il continue son chemin. Retrouvez Finta sur Instagram et sur Facebook. Finta. point le podcast pour ne rien rater des nouveaux épisodes et de leurs coulisses. On se retrouve dans 15 jours. D'ici là, gardez l'œil ouvert. Soyez curieux.

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Description

👁️‍🗨️ Je vous emmène sur le Lévezou pour ce troisième épisode de Finta. C’est à Arvieu que j’ai rencontré Vincent Benoît.

Petit village de 800 âmes, Arvieu s’illustre comme un modèle de transition en ruralité. Parce que son déclin démographique menaçait son existence-même, Arvieu a réussi à impliquer tous ses habitants dans un projet inédit : la création d’un « tiers-lieu villageois ». Le premier en France. 

Ce tiers-lieu, c’est un écosystème véritablement vertueux qui a permis à Arvieu de conserver ses services de proximité, de créer des lieux de rencontre pour ses habitants et de fabriquer son autonomie « du faire-ensemble » pour demain.

💬 Tête pensante de la dynamique arvieunoise, depuis vingt ans, l’ingénieur et entrepreneur Vincent Benoît orchestre une méthode de « mayonnaise » agile et participative dont il a le secret. Et si le dynamisme d’Arvieu ne tient pas (qu’) à lui, c’est sûrement lui qui en parle le mieux.

Avec Vincent Benoît, on va causer solidarité villageoise, d’une « mayonnaise humaine » toute particulière et de créativité, quand les ressources viennent à manquer.  

📣 Pssssst ! Cet épisode, dans la forme, diffère des deux premiers. J’ai volontairement effacé la plupart de mes questions pour laisser Vincent Benoît dérouler et articuler son propos. C’est dense, il y a matière à cogiter et à s’inspirer. Vous m’en direz des nouvelles !



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Transcription

  • Speaker #0

    Finta, c'est le podcast qui nourrit des esprits, des envies d'agir et des espoirs très concrets à l'échelle locale. Finta part de l'Aveyron pour explorer les voies de la ruralité, à la rencontre de celles et ceux qui incarnent la diversité et l'incroyable vivacité de territoires que l'on croyait oubliés. Je m'appelle Lola Cross, je suis journaliste et je vous emmène bien de loin. Pour ce nouvel épisode de Finta, je suis partie sur le Lévesou, petit village de 800 âmes, Arvieux s'illustre comme un modèle de transition en ruralité. Parce que son déclin démographique menaçait son existence même, le village a réussi à impliquer tous ses habitants dans un projet inédit, la création du premier tiers-lieu villageois en France. À Arvieux, j'ai rencontré Vincent Benoît, tête pensante de la dynamique arviennoise. Vincent Benoît orchestre une méthode. agile et participative dont lui seul a le secret. Alors avec lui, on va causer de solidarité villageoise, d'une recette de mayonnaise humaine toute particulière et d'autonomie du faire-ensemble. On y va ? Alors si on doit revenir à l'histoire d'Arvieux, à cette aventure qui a été d'abord la tienne et qui est devenue collective, on est en 1998. Est-ce que tu peux nous raconter ce qui se passe à cette année-là ?

  • Speaker #1

    Alors déjà, c'est mon aventure aussi, mais c'est l'aventure collective, mais c'était une aventure qui avait commencé avant moi en fait, puisqu'Arvieux était un village qui avait déjà beaucoup de fêtes villageoises, et qui semble qu'à travers l'histoire, a toujours été un village à la fois isolé, à la fois ouvert et assez participatif. C'est vraiment pour dire que nous, quand on est arrivé en 98, on avait un projet et on a été accueillis à Arvieux, mais Arvieux était déjà un écosystème, un territoire très fertile. pour accueillir des jeunes qui avaient juste envie de créer leur vie plutôt que la consommer. Donc à 98, pourquoi on débarque là ? En fait, moi je finis mes études en 97, c'était des études d'ingénieur à Lyon, et j'ai deux convictions, même presque deux sentiments de révolte, c'est que si je dois trouver un boulot, ça va être forcément plutôt bien payé, mais forcément dans une zone urbaine, mais forcément plutôt dans une grande entreprise. Et j'avais tous mes amis dans la région du canton de Cassagne, Arvieux. Et on s'est dit pourquoi pas créer notre vie à mur rural. Et on arrive avec cette idée, c'est de créer notre vie à mur rural avec une activité à la numérique, avec l'entreprise Lightis que l'on a créée et avec cette idée qu'on voulait créer une entreprise qui appartenait à ceux qui travaillent. Donc on a d'emblée choisi le statut coopératif en fait. Et donc on s'est dit on va tenter notre chance, on va envoyer une lettre à toutes les mairies du canton de Cassagne pour avoir 40 mètres carrés, si possible gratuits pendant un an ou deux. pour nous aider à démarrer tout simplement, et pour créer notre entreprise. Et Harvey a répondu de suite, avec ce couvent libre avec 40 mètres carrés. On avait 24 ans, on n'avait jamais créé une entreprise, on créait un cousin numérique au statut coopératif. Je veux dire, on avait à peu près toutes les cases cochées pour dire, eux, normalement on doit se planter, tu vois. Et puis en plus, c'est la campagne, quoi, tu vois. Eux, ils nous ont fait confiance. La mairie, on a été très vite intégrés, invités chez l'un, chez l'autre. On a rencontré des élus, des gens du village. Le comité des fêtes et le festival, le Cap Festival à côté, étaient deux machines culturelles et associatives. Un de mes associés est devenu co-président du Cap Festival. Un autre de mes associés est devenu co-président du comité des fêtes. Et là on a commencé tout le travail rock'n'roll qui remplissait nos vies. C'est-à-dire qu'en fait tout ce qu'on faisait ça réussissait avec les jeunes de notre âge tu vois. C'est venir Trigan, Arvieux, l'héritage du Succo, puis ça finit par Manuccio etc. On créait le McDo de 1000 personnes la première année. Donc chacun on arrive avec nos compétences et puis on arrive à faire des trucs ensemble énormes, sans hiérarchie en fait. On était dans un comité des fêtes de 100 personnes qui participaient. avec des présidents de 25-28 ans qui changeaient tous les deux ans. Donc ça, ça te rend humble parce que tu as la structure de l'entreprise, on dit qu'il faut qu'elle soit hiérarchique, on dit que c'est une structure pas hiérarchique et pourtant hyper efficace. Donc il y a ce miracle à Rue-Loin, si tu veux, c'est de dire que celui-là, j'y crois à lui, et quand il doit se sortir les doigts, il le fait. Et mon rêve vraiment en venant à Mille Rurales, c'était de créer une petite Silicon Valley rurale en fait. Je voulais le bord et l'argent du bâtiment. Je voulais choisir mon lieu de vie. Et je disais souvent, je veux habiter dans le trou du cul du monde et voir le monde entier passer. C'était pour expliquer qu'en fait, je ne faisais pas le deuil de la culture, je ne faisais pas le deuil des rencontres, je ne faisais aucun deuil en fait. Je faisais juste l'idée que j'allais devoir créer. Donc je dis souvent, dans un petit village, si tu veux voir un concert, il te faut l'organiser. Qu'est-ce qui se passe dans un petit village où tout vient de t'en manquer ? Il te semble que tout vient te manquer, tu sors de la rue, tu veux faire un truc, tu vas commencer à dire quelles sont les ressources disponibles, c'est mes voisins. Mes voisins ne me ressemblent pas forcément, ils n'ont pas forcément un fait de même, tu ne les as pas forcément. Avec des gens très différents, tu construis un projet commun. Et c'est ça que je définis comme la taille humaine, c'est quand on commence à pouvoir raconter des histoires, le passé, les rencontres, etc. Pour expliquer comment ça s'est passé aujourd'hui. On est dans un environnement qui a pris les gens plutôt heureux parce qu'ils agissent sur leur environnement. Quand on agit sur son environnement et qu'on a l'impression de le contrôler, on montre que les angoisses partent. Et quand on produit de la culture ou de la valeur, connecté avec des gens, on montre que c'est à priori la base du bonheur ou en tout cas d'une satisfaction de vivre. C'est la qualité des relations humaines. Il y a un terrain fertile qui se crée. Finir par créer ce lieu dont tu parles, le jardin. Le jardin, on considère aujourd'hui que c'est sans doute le premier tiers-lieu villageois en France. Un tiers-lieu, c'est quoi ? C'est un espace idéal entre un espace de travail et un espace de vie. C'est-à-dire que là, tu es dans un pépinière et coworking entreprise, le rez-de-chaussée, c'est une cafette, un peu comme une auberge de jeunesse de travail. Donc là, tu vas autant rencontrer des gens qui sont du monde de la culture, vers 17h, que des gens qui sont en train de travailler, qui quittent leur boulot, qui travaillent dans les logiciels. Tu vas autant rencontrer dans le parc une mamie avec son petit-fils, qu'un mec qui bosse. Et tu es à deux pas, tu vois juste en face, des commerces. Des commerces que pendant 20 ans, on a dû se battre pour les sauver aussi. Donc tout est interconnecté. Dans une communauté à taille humaine, tu comprends tout ça. Tu comprends que la vie est agréable que s'il y a suffisamment de monde. Et en fait, on l'a compris. On est un village où il y a une menace démographique. C'est que s'il n'y a pas assez de monde, il y a moins de monde à l'école. S'il y a moins de monde à l'école, les commerces commencent à fermer. Si les commerces commencent à fermer, la vie devient désagréable. Il n'y a plus d'infirmières, les personnes âgées se sentent seules. Les infirmières ont moins de boulot. Et puis, il y a un effondrement. fait un effondrement qui est qui peut arriver très vite il suffit que la pompe à essence et donc Pendant un temps, on s'est toujours battu à dire qu'on gardera tous nos services, toutes nos autonomies et toutes nos compétences. Une communauté à taille humaine est rassurante si tu as toutes les compétences. Le boulanger pour le pain, le forgeron pour le fer, le menuisier pour le bois, etc. Et l'ensemble de ces compétences, elles atteignent une taille critique où on se sent en sécurité, où on est capable de créer sa fête, on est capable de créer sa maison, on est capable de réfléchir avec des gens à qui tu peux faire confiance. Donc tu connais les enfants. Un jour, tu as pris un enfant en stage dans ton entreprise. Si c'est le fils de menuisier, bien sûr, le jour où il ira voir le menuisier, il sera content. Il doit te rendre un service parce que tu lui as rendu service. C'est tout simple, c'est le don et le contre-don. Cet ensemble de liens que tu finis par tisser au bout de 20 ans, ça finit par devenir un réseau à ta humaine qui a une puissance de feu et qui donne envie d'aller encore plus loin. Aujourd'hui, on a réussi, avec ce tiers-lieu villageois, le jardin, à attirer plus de porteurs de projets que d'hébergement. On a un nouveau problème à résoudre sur ce mandat, puisque je suis aussi au conseil municipal, c'est trouver de nouvelles capacités d'hébergement pour attirer des porteurs de projets qui soient attirés par un concept simple, c'est un projet de vie. c'est à dire qu'ils choisissent pas La HETIS comme entreprise, ils ne choisissent pas le village, ils ne choisissent pas la nature, ils choisissent tout ça. Tu vois un peu l'écosystème. C'est-à-dire que nous, on embrasse des gens qui ont des enfants qui vont remplir l'école et qui vont utiliser le service public. Et nous, on devient attractif grâce au service public. Le service public peut continuer à vivre parce qu'il y a de nouveaux usagers. Donc on voit rien que tout ça, c'est l'écosystème. Et ça, tu le comprends avec tes tripes quand c'est petit. Je suis convaincu que « small is beautiful » , il y a quelqu'un qui a fait une théorie économique sur l'autonomie et le petit. voilà je pense que cette réaction fait Pour se sentir bien dans des sortes de tribus ou de communautés à taille humaine compréhensibles, qui ne sont pas abstraites. Si j'insulte mon voisin, ça finira par me coûter cher. Si je rends service à mon voisin, ça finira par me rendre service aussi. Peut-être pas par mon voisin, mais par quelqu'un d'autre, etc. Donc, à ce titre, tu comprends ce qu'on appelle la complexité, que tout est relié et que c'est dans le lien que se crée la nouveauté. Donc à deux pas, tu vois, c'est à 30 mètres. Là derrière, boucherie, boulangerie, fleuriste, magasin déco, tabac, deux bars, etc. Et en plus, maintenant, on rajoute une brique, c'est qu'il y a un château qui est à moins de 200 mètres, qui accueille six nouveaux arrivants. Donc on a même la brique hébergement qui s'est rajoutée. Donc le tiers-lieu villageois, tu vois, c'est tout ça, c'est tous ces éléments-là. Tu vois, j'ai décrié cet écosystème, c'est des lieux. Mais ça ne marche pas s'il n'y a pas des gens. Il y a des compétences qui vont se connecter, pas entre elles, mais qui doivent être... florissantes si possible. T'as l'Aïtis, 18 personnes, t'as les Locomotivés, c'est un circuit court de produits locaux qui a été créé il y a 8 ans, qui aujourd'hui livre 400 paniers par semaine, la moitié sur le Rétiennois. C'est un projet économique qui permet à des producteurs de faire 30 à 50% de leurs ventes. même plus, tu vois, donc c'est énorme. Et ça résolvait un problème de geek, puisqu'on a créé il y a 8 ans, on a posé juste un truc pour la vie qu'ils ont, on a dit, nous, on veut pouvoir consommer local sans y passer plus de 5 minutes et sans se déplacer. Et l'idée, c'était juste qu'on allait créer un système de commande à la ligne qui permettait d'avoir un panier alimentaire équilibré avec tout ce qu'il faut pour rester en bonne santé, mais sans devoir aller dans chaque ferme. Mais c'est surtout sans faire un déplacement en plus. Et par contre, on est super égoïste, on crée notre vie, quoi. En fait, on cherche pas à changer le monde ici, si on cherche à créer notre monde. Il y a les temps périscolaires à mettre en place, il faut occuper les enfants un jour avec des projets pédagogiques, et bien on a des ressources disponibles. C'est qui qui a rien à brailler là ? Ah, il y a des retraités, ils ont des compétences, une ancienne prof de mante, une ancienne pâtissière, etc. Et bien hop, ils se rencontrent, et ils finissent par construire ensemble un programme pédagogique autonome. Et donc, on fait rencontrer l'offre et la demande. Il y a des gens qui sont prêts à donner leur savoir, et des enfants qui adoreraient le recevoir. Et ça, on s'est arraché à nous remplir une année. Et c'est fabuleux, on a fait ça avec zéro franc, zéro euro. Donc tout ça, ça a rapporté dans ma main à la société, mais malheureusement... Les comptables On ne savent pas le mesurer puisqu'il ne mesure que quand ça coûte, et jamais quand ça rapporte, puisqu'en fait on va savoir combien coûte un infarctus, mais on ne va pas savoir combien coûte un infarctus évité. On peut supposer que le bien-vivre à un vieux augmente l'espérance de vie et de bonne santé de manière conséquente, et je pense que les chercheurs l'ont déjà démontré en fait. La société devient très violente sans faire esprit à partir du moment où des gens, à partir d'une taille critique, se mettent à raisonner au niveau macro, qui commence à appeler... Paul, Pierre ou Jacques consommateur, comment s'appeler Paul, Pierre ou Jacques électeur, avec un S. Tous ces concepts abstraits qui vont faire remplir des fichiers Excel avec des chiffres pour gérer la France, ce qu'il faut aussi, par ailleurs. Mais à certains moments, quand on touche à des aspects régaliens, la justice, la santé, les maisons de retraite, etc., deviennent des violences, en fait, parce qu'on peut trouver qu'une règle macro est absolument géniale, appliquer les normes à toute la France, et faire que des zones... autonomes qui auraient pu trouver des solutions, mais ne les trouvent plus parce que ça ne respecte pas les normes, parce qu'il faut respecter des normes internationales, dans l'alimentation nationale, dans l'alimentation par exemple. Tu peux faire une nourriture étatienne, mais si tu ne respectes pas les normes, tu ne peux pas la vendre. Les normes viennent d'un système industriel qui produit en quantité astronomique. Ici on peut résoudre des problèmes de santé rien qu'avec la solidarité locale. Ici on pourrait garder nos enfants nous-mêmes en partie. Parce qu'il y a des parents qui sont prêts à donner leur temps et à partager leur temps pour faire une crèche. C'est interdit de faire ça. Par exemple, aujourd'hui on a un scandale ici, c'est qu'on a une maison de petite enfance qui a coûté très cher, qui n'est utilisée parce qu'en fait il faut respecter des normes telles que les parents n'ont pas le droit de l'investir sans qu'il y ait quelqu'un de diplômé qui nettoie les jouets tous les jours. l'État peut jouer son rôle macro, mais il faut laisser les gens trouver leurs solutions dans leur écosystème. Et les solutions qu'on trouvera à Arvieux ne seront pas les mêmes que celles qu'on trouvera dans un autre village en France. Et quand tu donnes la puissance d'agir aux gens, ils l'apprennent. Et ils l'apprennent de manière un peu égoïste, ils l'apprennent pour changer leur vie. Les parents cherchent à trouver des solutions pour garder leurs enfants. Les personnes âgées cherchent des solutions pour trouver des logements de plein pied avec des gens à côté. C'est de l'altruisme de raison. Et ça, quand les ressources viennent à manquer, et c'est ça qui est bien mieux. En réalité, c'est qu'on n'a pas tous les services. C'est génial quand même Patrick Serres parce que c'est maintenant qu'on va se bouger le cul pour avoir une bonne vie. Et donc ce qu'on a choisi à Hervieux, c'est de partager un diagnostic, la plus grosse menace à la démographie, qui est que tous les villageois l'ont compris quasiment. Et donc maintenant, il faut qu'on ait une bonne vie, parce que si on a une bonne vie, les gens resteront, ou des nouveaux viendront. On n'a pas envie de changer le monde, on n'est pas des prosélytiques de « il faut vivre comme ça, comme ça » . D'abord on montre l'exemple, nous-mêmes, on vit nous-mêmes des solidarités, c'est de l'altrisme de raison. J'appelle ça l'altruisme de raison, c'est-à-dire que c'est moins con de faire à plusieurs que tout seul. Au fond, c'est moins con parce que... Quelqu'un qui regarde 3 heures la télé par jour, il se trompe le cerveau. Donc il vaudrait mieux que s'il regarde que 2 heures par jour et que le reste du temps il s'occupe de ses voisins. Soit apporter la foi à son voisin qui a du mal à marcher. Ou soit participer à faire de la trompette dans un cours de musique. Il sera plus heureux, il rendra les autres heureux. Donc c'est con d'avoir regardé la télé 1h de trop. Donc on a des ressources illimitées en milieu rural. Et partout en France, même du rural. 800 habitants en art vieux, 3h en moyenne d'exposition à la télé. Bon ben voilà, c'est leur don d'amitié. de sortir. Donc à chaque fois qu'on doit se débrouiller, je trouve ça réjouissant en fait, parce que dans se débrouiller avec peu, on est forcément créatif et c'est démontré dans tout ce qui est art ou création, c'est quand les ressources viennent à manquer qu'on est créatif. Ce que j'adore dans les zones rurales où la vie est quand même bien parce qu'on a accès à la nourriture, on a un toit, j'ai la base, souvent on a la base, mais quand les services publics se barrent et tout ça, c'est toujours une catastrophe aussi. Mais des fois c'est génial parce que quand les ressources viennent à manquer, la stratégie est la plus efficace. dans les systèmes, c'est la coopération. Donc on est contraint de coopérer. Ma théorie, c'est ce que j'appelle des leçons de mayonnaise. J'appelle ça leçon de mayonnaise, c'est qu'en fait, la plupart des territoires, ils ont tous les ingrédients pour faire de la mayonnaise. Tu vois, une mayonnaise, c'est pas compliqué, c'est que tu as de l'huile dans une bouteille, t'as un oeuf dans sa coquille, t'as de la moutarde dans son pot. La plupart des gens que je vois dans les entreprises ou ailleurs, je vois que l'huile reste dans sa bouteille, donc chacun garde son ego, tu vois. En gros, je suis l'huile et je reste l'huile, l'œuf reste dans sa coquille, je suis œuf et je reste œuf dans ma coquille, donc chacun reste soi avec sa structure. Donc dans tous les territoires, souvent, quand c'est pas trop la mort, que tout le monde n'est pas encore parti, on a tous les ingrédients, on a le menuisier, le boulanger, etc. Et souvent, je dis les territoires ou les entreprises ou les communautés, les groupes en général, sont pas très inspirés souvent, parce qu'en fait ils ont tous leurs ingrédients à leur sein, mais... Ils n'ont pas de bol. Pas de bol, c'est un jeu de mots. Ils n'ont pas de lieu pour se rencontrer, pour se mélanger. Et ils n'ont pas non plus de cuistot, c'est-à-dire de quelqu'un qui sait animer ça. Dans les villages, avant, on avait des animateurs. Quand on avait des animateurs, on peut aimer ou pas l'idée, mais en Aveyron, il y a 50 ans, il y avait 800 prêtres. d'ailleurs aujourd'hui à 30 Les prêtres dans la plupart des histoires, c'était des gens qui ont rempli une fonction d'animateur. Des fois ça a été l'instit à d'autres époques, ça a été aussi l'instit, des fois ça a été quelqu'un d'engagé, mais il y avait du temps pour la communauté, du temps institutionnalisé, il y avait des gens qui étaient pour la communauté et qui donc faisaient ce travail. Et il y a autre chose qu'on n'a pas souvent, c'est la méthode. C'est-à-dire que tu as le cristaux mais tu n'as pas la recette. Donc quand tu as le bol, tu vois, tu crées une pépite d'entreprise, une salle de spectacle, un café, c'est des lieux de rencontre. Donc tu as créé les lieux et les espaces. Après, les gens, ils vont commencer à se mélanger. Il y a deux choses importantes, c'est qu'il faut qu'on ait des apprentissages pour gérer notre ego, accepter de sortir de notre bouteille, de notre coquille, de se dire je veux me mélanger. Et pour aider à ça, il faut une autre pratique que l'art du faire ensemble. C'est comment on réussit à faire ensemble. Et on a développé une méthode participative qu'on pourrait appeler la méthode agile et participative. Très vite on a vu qu'en fait les gens quand ils avaient le pouvoir d'agir et qu'ils étaient informés, ça prend du temps d'informer au début puisque tout le monde doit avoir le même vocabulaire, donc ça tu as l'impression de perdre un peu d'attente au début, donc tout le monde demande ton niveau d'information, t'animes ça. Les gens se retrouvent dans le même endroit et on présente un projet. de salles de spectacle. L'architecte est là juste pour donner sa vision, et les gens disent, en tant qu'usager, moi j'ai besoin que les sièges soient grands, moi en tant qu'usager, j'ai besoin, j'entends pas, j'ai besoin d'un boucleau dur, etc. Et d'un moment, on fait travailler les gens autour d'un prototype qui a été fait par l'architecte. Mais c'est pas l'architecte qui anime la réunion, c'est quelqu'un qui l'aide. Et les gens, ils peuvent critiquer le prototype, ils ont le droit de le détruire ou pas. Et grâce à ça, on n'a plus de concours d'égo, tu vois. Les gens, ils se mettent à attaquer un objet. Donc, ils n'attaquent pas, ils se mettent à jouer. Et quand ils se mettent à attaquer un objet, Et quand ils se mettent autour, ils sont plus face à face, ils sont côte à côte. Et parce qu'ils sont côte à côte, ils commencent à jouer. Et l'idée de l'un amène à l'idée de l'autre. Et on finit par obtenir la mayonnaise. C'est que la contrainte de celui qui est gros, qui veut des sièges qui sont un peu plus larges, avec la contrainte de celui qui veut que les gens ne s'endorment pas, on finit par faire le design parfait du fauteuil. Et quand tu lèves toutes les critiques, tu as cette sensation de mayonnaise. Tu vois, en 2-3 minutes, tu as trouvé une solution. Une solution qui coûte moins cher, qui est mieux. Dis-moi dans les méthodes habituelles du numérique. si c'est possible de résoudre ce problème de design. Je ne pense pas. Parce qu'en fait, le maire va envoyer un mail à l'architecte en disant « Oui, il y a des artistes qui voudraient avoir des pratiques. » « Ok, donc l'architecte, il fait un truc, il renvoie au maire. » « Le maire représente à ses élus en conseil municipal. » « Il le redit plus ou moins aux artistes. » « Ah oui, l'architecte a prévu ça, c'est nul. » « Oh, vous faites chier, j'ai fait ce que vous avez. » Et ça, rien qu'avec des emails, même avec le numérique, c'est catastrophique. Il n'y a jamais les ingrédients mélangés. Et quand tu es élu, par contre, il faut... Voir ça comme une chambre, c'est pas comme un... une perte de pouvoir. Et quand tu es élu au début, tu peux le voir comme une perte de pouvoir. Tu te dis, mais pourquoi c'est eux qui décident ? Parce qu'ils savent mieux faire que toi. Tu t'en fous. Ton but, c'est d'être animateur. T'es maire, c'est pas d'avoir le pouvoir. Ton but, c'est que la mayonnaise, elle prenne. Et si tu ne sers à rien, c'est que tu as réussi. Si tu es animateur d'une communauté, que tu sois maire ou autre, et que ça marche sans toi, c'est la plus grande réussite. Tu as créé une autonomie du faire ensemble. Donc, il n'y a plus besoin de l'homme providentiel. Mais c'est ceux qui ont réussi à revue. ce qu'il faut comprendre, c'est que la démarche participative, Donc on ne va même pas l'appeler démarche participative, on va l'appeler fabrique de l'intérêt généreux. on pourrait l'appeler plutôt que de manger pas si pas de chien. Et retiens bien que quand on mélange de l'huile avec de l'huile, on n'a que de l'huile. Donc quand on mélange des gens qui se ressemblent, on fait pas beaucoup d'innovation et surtout le résultat est dégueulasse. Donc quand on rencontre que des militants du bio dans un circuit court, c'est chiant. Quand on rencontre que des conventionnels dans un circuit court, c'est chiant. Quand on rencontre que des gens qui pensent pareil, c'est chiant. Le problème c'est qu'en zone urbaine, tu peux rencontrer que les gens qui te ressemblent. Tu veux faire un café, tu veux organiser des soirées philosophiques sur Spinoza, tu peux trouver trente personnes pour faire ça pendant un an. Là, un vieux 800 habitants, si je veux faire des projets, je peux. Mais il va falloir que je fasse avec des gens qui ne me ressemblent pas. De mon point de vue, je ne vais pas me tromper, mais de mon point de vue, parce que tu es obligé de comprendre l'autre. Donc ta rigueur philosophique qui était d'abord basée sur des grands principes, par exemple, on pourrait dire le grand principe, il faut manger que bio. Je le pense plutôt, au fond. Je ne me permettrai pas de le dire et de l'imposer et de le croire aux gens qui sont autour de moi. J'ai des copains agriculteurs qui ne sont pas bio. Moi je demande juste à ce qu'on se respecte. C'est que si à un moment donné il a la connaissance technique que sa façon de cultiver peut nuire à la santé de ses voisins, il essaie de faire mieux demain. Je ne peux pas lui demander de changer sa production en un jour. Je ne peux pas lui dire que tu es un connard parce que tu es conventionnel. Et souvent, on fait ce genre de confusion. En mieux que le râle, si tu oublies un peu ton égo, à la place de les insulter, tu discutes. Et en discutant, tu te mets à comprendre. Et tu te poses en humilité la question, si j'étais à leur place, qu'est-ce que je ferais ? Et en te posant cette question, tu te rends compte que les problèmes sont souvent beaucoup plus complexes. Donc, dans un comité humain, sur des sujets aussi importants que l'alimentation, tu commences à comprendre que tout est beaucoup plus compliqué que ce que tu vois à la télé. Commence à comprendre ton voisin. Ça ne veut pas dire que tu vas l'aimer. Ça veut dire que si tu commences à le comprendre, tu vas comprendre qu'il y a des choses, que si tu veux que demain soit un peu mieux qu'aujourd'hui, ce n'est pas en disant aux gens que leur façon de faire, c'est de la merde. L'important, c'est de réussir ensemble. Et les conditions, elles sont importantes, mais elles relèvent, dans le débat public, elles relèvent de l'intimité religieuse presque, tu vois. Je peux réussir un acte solidaire avec des gens qui se disent racistes, par exemple. Pourtant, quand on doit faire un acte de solide, il a été compris, cela. Donc tout est beaucoup plus compliqué. Et ce que j'aime à mes rurals et dans la culture paysanne, c'est qu'on mesure la qualité des choses, souvent, dans notre culture aérienne en tout cas, au résultat des actes plus que des idées. Nous, on a l'art d'organiser le débat autour du projet. On parle économie, donc on pourrait dire plutôt droite, et on parle culture, plutôt gauche. Amur a tellement peu de ressources que chaque contrainte devient une opportunité. La culture devient une opportunité économique, et l'économie devient une opportunité culturelle, puisque c'est les commerçants du village qui financent, par le sponsoring, des activités culturelles. Donc, Albert Jacques a dit, nous sommes les liens que nous tissons. Au fond, si tu réfléchis pour toi ou pour les autres, tu n'es que la collection des autres, la langue que tu... parles, qui t'aident à penser, c'est que d'autres qui l'ont inventé avant toi. Tes peurs et tes joies, ça vient de ton histoire personnelle. Tes réflexes, ça vient de l'histoire de la vie. Voilà, enfin, dans un village, tu finis aussi par te rendre compte que ta capacité d'agir, ta puissance d'agir, elle est décuplée grâce aux autres.

  • Speaker #0

    Qu'est-ce qu'il reste à faire ? Quel regard est-ce que tu portes sur le village aujourd'hui ?

  • Speaker #1

    En vieillissant, je deviens plus radical. Je dirais qu'on n'est pas assez sobres, pas assez résilients, et pas assez radicaux dans l'autonomie. Parce qu'ici, je sais que par exemple, les gens ont assez d'argent et de compétences pour construire le village eux-mêmes et ne pas faire appel à des publics. Donc moi, j'aimerais qu'on envoie un message un peu bizarre. Je suis pour les services publics, si tu veux, mais la façon dont ils sont gérés, je doute un peu de leur avenir. Je suis désolé de dire ça, mais je trouve ça révoltant. Du coup, j'ai du mal à faire confiance à un pouvoir centralisé. Je serais pour un pouvoir qui fixe les règles du jeu, les droits de l'homme et les droits de la nature, et laisser chaque territoire, les régions d'abord, de dire par exemple l'Occitanie doit dérégler l'Occitanie. On a tous les écosystèmes d'Aquitaine, on a la mer, on a la montagne, on a les plaines, etc. On va surtaxer tout ce qui est déplacement de matière, parce que c'est du pétrole, voilà. Donc à chaque fois que la région se nourrit elle-même, elle va gagner. Donc l'État fixe des métalliques du jeu et laisse des zones autonomes se démerder. Pourquoi autonomes ? Parce que quand tu agis à petit niveau, tu reconnais les autres, tu as le circuit court d'information, le circuit court de matière. Ces circuits courts, ils te font comprendre qu'il faut être sobre, ils te font faire des économies et ils te font surtout reconnaître ton voisin. Un agriculteur qui sait qui. il nourrit fera de la meilleure nourriture que s'il pisse du lait pour des gens qu'il ne connaît pas. On est tous pareils, je veux dire. Je dis les agriculteurs, mais toi, moi, on est pareil. Quand on fait des trucs qui ont moins de sens, qu'on ne connaît pas l'impact, qu'on ne comprend pas l'impact, on finit par perdre notre éthique, puisqu'en fait, on ne connaît pas à qui ça va nuire. Ça devient abstrait, ça perd son sens. Je serais beaucoup plus radical pour envoyer cette idée, ce message, qu'en fait, ensemble, on peut créer notre vie et notre monde, et qu'on n'a pas besoin d'attendre l'arrivée d'un moment providentiel. On n'a pas besoin d'être de droite ou de gauche, on n'a pas besoin de faire partie d'un parti, on n'a pas besoin d'une loyauté aux idées. Si quelque chose marche, que ça ne correspond pas à nos idées, soyons scientifiques. Si quelque chose marche et a produit plutôt de la satisfaction de vivre aux gens autour de moi, mais que ce n'était pas dans mes idées, soyons humbles, l'expérience me montre que mes idées étaient fausses. Et je déteste donc ces moments symboliques des élections nationales, où des gens que j'apprécie ne pensent pas du tout comme moi, et pour cette raison-là, on pourrait se foutre sur la gueule alors qu'on a réussi 10 000 projets. Ça s'est passé aux élections présidentielles. Au conseil municipal, on avait pris notre équipe en disant pour quitter, et on s'était apprécié ou pas dans les projets en fonction de ça, mais c'était la guerre. Au bout d'un moment, je me suis dit à mon fond intérieur, mais on a réussi tellement de choses ensemble, c'est pas des gens qu'on connaît pas qui nous traitent comme des moutons électeurs, qui vont nous diviser. Donc au bout d'un moment, je me suis dit, ce que je crois relève de mon intimité religieuse, j'ai réussi des trucs avec les gens, je les apprécie comme ils sont, ceux qui pensent, c'est lié à leur histoire, pas plus. Et c'est lié à la mienne. Quand je suis au comité des fêtes, je me dis pas, Je me... Je mets les cateaux avec les cateaux, les athées avec les athées. Pareil en action politique, deux terrains.

  • Speaker #0

    J'ai l'habitude de poser comme dernière question, en quoi est-ce que tu crois ?

  • Speaker #1

    Quelle est ta plus grande conviction ? Que la condition humaine, c'est la solitude, c'est disparaître, la voie de la mort et tout ça. Et il semble que si on veut avoir une bonne vie, il y a deux choses fondamentales dont on a besoin. Trois choses fondamentales, c'est l'autonomie. Le besoin d'autonomie est un besoin, c'est sentir que j'ai la puissance de contrôler mon environnement seul. Mais c'est aussi le besoin de connexion, c'est-à-dire faire partie d'une communauté, sinon je déprime complètement. Je suis un être humain, et un être humain sans la reconnaissance de ses parents, il est mort. Donc depuis tout petit, tu as assimilé le fait que seul, tu es morte. Donc ton réflexe de survie, c'est de te connecter aux autres. Donc j'ai besoin d'autonomie, j'ai besoin de me connecter. et plutôt que réfléchir, agir. Parce qu'on montre qu'en fait, quand un être vivant agit sur son environnement et qu'il a l'impression d'être efficace sur son environnement, il se sent plutôt bien. Autonomie, connexion et puissance d'agir local, si tu as ces trois choses, normalement, tu es en bonne santé. Donc moi, je crois juste que je veux avoir une bonne vie. Et c'est très égoïste, mais je cherche par contre à avoir l'éthique de ne pas nuire aux autres. Et ça, c'est très ambitieux. Et donc, polluer la planète, c'est compliqué parce que à chaque fois que je mets de l'essence dans ma voiture, j'en ai besoin. je ne veux pas me marginaliser, je sais que je finance une économie de guerre. Et ça ne m'empêche pas de dormir. Je n'ai pas envie de culpabiliser les gens, on n'est pas dans la culpabilité. Mais je me dis que j'aimerais être dans une société où l'essence coûte cher et où un marché bio a un salaire deux fois plus élevé parce que lui, il n'utilise pas de pétrole. Ce n'est pas vrai. Je suis dans une société, dans un État, dans une économie qui a des règles du jeu, qui paie plus cher la nuisance que la bienfaisance. On l'a vu avec le Covid. Je trouve qu'on est dans une économie inversée, qui est contre nature. c'est-à-dire que ce qui fait du bien... n'ai pas compris ou mal rémunéré ou mal compté. Et ce qui est de la réparation ou a fait du mal, rattraper des mecs qui ont eu le cancer à cause de pesticides, au bout d'un moment, tu te dis, c'est qui qui doit payer ça ? J'ai envie de te dire, je suis plutôt pessimiste, et c'est ce qui me fait apprécier l'action dans l'instant présent. Qu'est-ce que j'ai de mieux à faire qu'à faire du mieux que je peux maintenant ? Ici et maintenant. Mais changer le monde, j'ai perdu un peu l'espoir, puisque le réchauffement climatique est annoncé depuis les années 70. Tu vois, donc je n'ai pas beaucoup d'espoir que l'humanité change sans un moment de crise majeur. Mais ça, ça me rassure beaucoup de gens. Donc, j'en parle pas trop. Donc oui je suis plutôt pessimiste mais pas résigné, je sais pas comment te dire. Je veux pas donner trop de sens à ce que je fais, tu vois, de sens ouais c'est de la générosité, c'est trop sérieux des autres tout ça, peut-être que j'ai tort mais je veux pas trop parler de ça, je veux juste avoir une bonne vie sans nuire à mes collègues. Et j'adore Brassens pour ça parce que Brassens il a dit que ça dans ses textes. Et il a une chanson qui s'appelle « Gloire à Don Juan » et il y a une phrase qui dit « Gloire à celui qui se borne à ne pas emmerder son voisin » . Je trouve que c'est une étiquette de vie hyper exigeante en fait. Parce que nos voisins, c'est nos voisins de palais, mais c'est... les gens qui sont en train de démigrer parce qu'on leur a foutu sur la gueule. Enfin, nos voisins, c'est tous les êtres humains, on va dire. Mais avant, c'est ce que j'avais dit aux locomotivés quand j'étais coprésident, j'ai dit nous sommes un groupe agissant, mais pas un groupe militant. Nous n'avons pas à dire aux gens, c'est nul d'aller au supermarché, ça c'est pas le truc. On doit rendre la distribution alimentaire tellement pratique qu'aller au supermarché, c'est moins intéressant. Ou alors, on doit convertir le supermarché pour qu'ils n'achètent que local. Si c'était ça la solution à la fin, pourquoi pas, tu vois ? on aurait résolu notre problème écologique. Si les producteurs sont bien payés, et que c'est le supermarché qui distribue à prix normal la nourriture, oui, pourquoi pas.

  • Speaker #0

    Merci.

  • Speaker #1

    Ok, merci à toi, Lola.

  • Speaker #0

    Merci. Vous êtes arrivés au bout de ce nouvel épisode de Finta. S'il vous a plu, parlez-en autour de vous, partagez-le à vos amis. C'est le meilleur soutien que vous puissiez apporter à Finta pour qu'il continue son chemin. Retrouvez Finta sur Instagram et sur Facebook. Finta. point le podcast pour ne rien rater des nouveaux épisodes et de leurs coulisses. On se retrouve dans 15 jours. D'ici là, gardez l'œil ouvert. Soyez curieux.

Description

👁️‍🗨️ Je vous emmène sur le Lévezou pour ce troisième épisode de Finta. C’est à Arvieu que j’ai rencontré Vincent Benoît.

Petit village de 800 âmes, Arvieu s’illustre comme un modèle de transition en ruralité. Parce que son déclin démographique menaçait son existence-même, Arvieu a réussi à impliquer tous ses habitants dans un projet inédit : la création d’un « tiers-lieu villageois ». Le premier en France. 

Ce tiers-lieu, c’est un écosystème véritablement vertueux qui a permis à Arvieu de conserver ses services de proximité, de créer des lieux de rencontre pour ses habitants et de fabriquer son autonomie « du faire-ensemble » pour demain.

💬 Tête pensante de la dynamique arvieunoise, depuis vingt ans, l’ingénieur et entrepreneur Vincent Benoît orchestre une méthode de « mayonnaise » agile et participative dont il a le secret. Et si le dynamisme d’Arvieu ne tient pas (qu’) à lui, c’est sûrement lui qui en parle le mieux.

Avec Vincent Benoît, on va causer solidarité villageoise, d’une « mayonnaise humaine » toute particulière et de créativité, quand les ressources viennent à manquer.  

📣 Pssssst ! Cet épisode, dans la forme, diffère des deux premiers. J’ai volontairement effacé la plupart de mes questions pour laisser Vincent Benoît dérouler et articuler son propos. C’est dense, il y a matière à cogiter et à s’inspirer. Vous m’en direz des nouvelles !



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Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Finta, c'est le podcast qui nourrit des esprits, des envies d'agir et des espoirs très concrets à l'échelle locale. Finta part de l'Aveyron pour explorer les voies de la ruralité, à la rencontre de celles et ceux qui incarnent la diversité et l'incroyable vivacité de territoires que l'on croyait oubliés. Je m'appelle Lola Cross, je suis journaliste et je vous emmène bien de loin. Pour ce nouvel épisode de Finta, je suis partie sur le Lévesou, petit village de 800 âmes, Arvieux s'illustre comme un modèle de transition en ruralité. Parce que son déclin démographique menaçait son existence même, le village a réussi à impliquer tous ses habitants dans un projet inédit, la création du premier tiers-lieu villageois en France. À Arvieux, j'ai rencontré Vincent Benoît, tête pensante de la dynamique arviennoise. Vincent Benoît orchestre une méthode. agile et participative dont lui seul a le secret. Alors avec lui, on va causer de solidarité villageoise, d'une recette de mayonnaise humaine toute particulière et d'autonomie du faire-ensemble. On y va ? Alors si on doit revenir à l'histoire d'Arvieux, à cette aventure qui a été d'abord la tienne et qui est devenue collective, on est en 1998. Est-ce que tu peux nous raconter ce qui se passe à cette année-là ?

  • Speaker #1

    Alors déjà, c'est mon aventure aussi, mais c'est l'aventure collective, mais c'était une aventure qui avait commencé avant moi en fait, puisqu'Arvieux était un village qui avait déjà beaucoup de fêtes villageoises, et qui semble qu'à travers l'histoire, a toujours été un village à la fois isolé, à la fois ouvert et assez participatif. C'est vraiment pour dire que nous, quand on est arrivé en 98, on avait un projet et on a été accueillis à Arvieux, mais Arvieux était déjà un écosystème, un territoire très fertile. pour accueillir des jeunes qui avaient juste envie de créer leur vie plutôt que la consommer. Donc à 98, pourquoi on débarque là ? En fait, moi je finis mes études en 97, c'était des études d'ingénieur à Lyon, et j'ai deux convictions, même presque deux sentiments de révolte, c'est que si je dois trouver un boulot, ça va être forcément plutôt bien payé, mais forcément dans une zone urbaine, mais forcément plutôt dans une grande entreprise. Et j'avais tous mes amis dans la région du canton de Cassagne, Arvieux. Et on s'est dit pourquoi pas créer notre vie à mur rural. Et on arrive avec cette idée, c'est de créer notre vie à mur rural avec une activité à la numérique, avec l'entreprise Lightis que l'on a créée et avec cette idée qu'on voulait créer une entreprise qui appartenait à ceux qui travaillent. Donc on a d'emblée choisi le statut coopératif en fait. Et donc on s'est dit on va tenter notre chance, on va envoyer une lettre à toutes les mairies du canton de Cassagne pour avoir 40 mètres carrés, si possible gratuits pendant un an ou deux. pour nous aider à démarrer tout simplement, et pour créer notre entreprise. Et Harvey a répondu de suite, avec ce couvent libre avec 40 mètres carrés. On avait 24 ans, on n'avait jamais créé une entreprise, on créait un cousin numérique au statut coopératif. Je veux dire, on avait à peu près toutes les cases cochées pour dire, eux, normalement on doit se planter, tu vois. Et puis en plus, c'est la campagne, quoi, tu vois. Eux, ils nous ont fait confiance. La mairie, on a été très vite intégrés, invités chez l'un, chez l'autre. On a rencontré des élus, des gens du village. Le comité des fêtes et le festival, le Cap Festival à côté, étaient deux machines culturelles et associatives. Un de mes associés est devenu co-président du Cap Festival. Un autre de mes associés est devenu co-président du comité des fêtes. Et là on a commencé tout le travail rock'n'roll qui remplissait nos vies. C'est-à-dire qu'en fait tout ce qu'on faisait ça réussissait avec les jeunes de notre âge tu vois. C'est venir Trigan, Arvieux, l'héritage du Succo, puis ça finit par Manuccio etc. On créait le McDo de 1000 personnes la première année. Donc chacun on arrive avec nos compétences et puis on arrive à faire des trucs ensemble énormes, sans hiérarchie en fait. On était dans un comité des fêtes de 100 personnes qui participaient. avec des présidents de 25-28 ans qui changeaient tous les deux ans. Donc ça, ça te rend humble parce que tu as la structure de l'entreprise, on dit qu'il faut qu'elle soit hiérarchique, on dit que c'est une structure pas hiérarchique et pourtant hyper efficace. Donc il y a ce miracle à Rue-Loin, si tu veux, c'est de dire que celui-là, j'y crois à lui, et quand il doit se sortir les doigts, il le fait. Et mon rêve vraiment en venant à Mille Rurales, c'était de créer une petite Silicon Valley rurale en fait. Je voulais le bord et l'argent du bâtiment. Je voulais choisir mon lieu de vie. Et je disais souvent, je veux habiter dans le trou du cul du monde et voir le monde entier passer. C'était pour expliquer qu'en fait, je ne faisais pas le deuil de la culture, je ne faisais pas le deuil des rencontres, je ne faisais aucun deuil en fait. Je faisais juste l'idée que j'allais devoir créer. Donc je dis souvent, dans un petit village, si tu veux voir un concert, il te faut l'organiser. Qu'est-ce qui se passe dans un petit village où tout vient de t'en manquer ? Il te semble que tout vient te manquer, tu sors de la rue, tu veux faire un truc, tu vas commencer à dire quelles sont les ressources disponibles, c'est mes voisins. Mes voisins ne me ressemblent pas forcément, ils n'ont pas forcément un fait de même, tu ne les as pas forcément. Avec des gens très différents, tu construis un projet commun. Et c'est ça que je définis comme la taille humaine, c'est quand on commence à pouvoir raconter des histoires, le passé, les rencontres, etc. Pour expliquer comment ça s'est passé aujourd'hui. On est dans un environnement qui a pris les gens plutôt heureux parce qu'ils agissent sur leur environnement. Quand on agit sur son environnement et qu'on a l'impression de le contrôler, on montre que les angoisses partent. Et quand on produit de la culture ou de la valeur, connecté avec des gens, on montre que c'est à priori la base du bonheur ou en tout cas d'une satisfaction de vivre. C'est la qualité des relations humaines. Il y a un terrain fertile qui se crée. Finir par créer ce lieu dont tu parles, le jardin. Le jardin, on considère aujourd'hui que c'est sans doute le premier tiers-lieu villageois en France. Un tiers-lieu, c'est quoi ? C'est un espace idéal entre un espace de travail et un espace de vie. C'est-à-dire que là, tu es dans un pépinière et coworking entreprise, le rez-de-chaussée, c'est une cafette, un peu comme une auberge de jeunesse de travail. Donc là, tu vas autant rencontrer des gens qui sont du monde de la culture, vers 17h, que des gens qui sont en train de travailler, qui quittent leur boulot, qui travaillent dans les logiciels. Tu vas autant rencontrer dans le parc une mamie avec son petit-fils, qu'un mec qui bosse. Et tu es à deux pas, tu vois juste en face, des commerces. Des commerces que pendant 20 ans, on a dû se battre pour les sauver aussi. Donc tout est interconnecté. Dans une communauté à taille humaine, tu comprends tout ça. Tu comprends que la vie est agréable que s'il y a suffisamment de monde. Et en fait, on l'a compris. On est un village où il y a une menace démographique. C'est que s'il n'y a pas assez de monde, il y a moins de monde à l'école. S'il y a moins de monde à l'école, les commerces commencent à fermer. Si les commerces commencent à fermer, la vie devient désagréable. Il n'y a plus d'infirmières, les personnes âgées se sentent seules. Les infirmières ont moins de boulot. Et puis, il y a un effondrement. fait un effondrement qui est qui peut arriver très vite il suffit que la pompe à essence et donc Pendant un temps, on s'est toujours battu à dire qu'on gardera tous nos services, toutes nos autonomies et toutes nos compétences. Une communauté à taille humaine est rassurante si tu as toutes les compétences. Le boulanger pour le pain, le forgeron pour le fer, le menuisier pour le bois, etc. Et l'ensemble de ces compétences, elles atteignent une taille critique où on se sent en sécurité, où on est capable de créer sa fête, on est capable de créer sa maison, on est capable de réfléchir avec des gens à qui tu peux faire confiance. Donc tu connais les enfants. Un jour, tu as pris un enfant en stage dans ton entreprise. Si c'est le fils de menuisier, bien sûr, le jour où il ira voir le menuisier, il sera content. Il doit te rendre un service parce que tu lui as rendu service. C'est tout simple, c'est le don et le contre-don. Cet ensemble de liens que tu finis par tisser au bout de 20 ans, ça finit par devenir un réseau à ta humaine qui a une puissance de feu et qui donne envie d'aller encore plus loin. Aujourd'hui, on a réussi, avec ce tiers-lieu villageois, le jardin, à attirer plus de porteurs de projets que d'hébergement. On a un nouveau problème à résoudre sur ce mandat, puisque je suis aussi au conseil municipal, c'est trouver de nouvelles capacités d'hébergement pour attirer des porteurs de projets qui soient attirés par un concept simple, c'est un projet de vie. c'est à dire qu'ils choisissent pas La HETIS comme entreprise, ils ne choisissent pas le village, ils ne choisissent pas la nature, ils choisissent tout ça. Tu vois un peu l'écosystème. C'est-à-dire que nous, on embrasse des gens qui ont des enfants qui vont remplir l'école et qui vont utiliser le service public. Et nous, on devient attractif grâce au service public. Le service public peut continuer à vivre parce qu'il y a de nouveaux usagers. Donc on voit rien que tout ça, c'est l'écosystème. Et ça, tu le comprends avec tes tripes quand c'est petit. Je suis convaincu que « small is beautiful » , il y a quelqu'un qui a fait une théorie économique sur l'autonomie et le petit. voilà je pense que cette réaction fait Pour se sentir bien dans des sortes de tribus ou de communautés à taille humaine compréhensibles, qui ne sont pas abstraites. Si j'insulte mon voisin, ça finira par me coûter cher. Si je rends service à mon voisin, ça finira par me rendre service aussi. Peut-être pas par mon voisin, mais par quelqu'un d'autre, etc. Donc, à ce titre, tu comprends ce qu'on appelle la complexité, que tout est relié et que c'est dans le lien que se crée la nouveauté. Donc à deux pas, tu vois, c'est à 30 mètres. Là derrière, boucherie, boulangerie, fleuriste, magasin déco, tabac, deux bars, etc. Et en plus, maintenant, on rajoute une brique, c'est qu'il y a un château qui est à moins de 200 mètres, qui accueille six nouveaux arrivants. Donc on a même la brique hébergement qui s'est rajoutée. Donc le tiers-lieu villageois, tu vois, c'est tout ça, c'est tous ces éléments-là. Tu vois, j'ai décrié cet écosystème, c'est des lieux. Mais ça ne marche pas s'il n'y a pas des gens. Il y a des compétences qui vont se connecter, pas entre elles, mais qui doivent être... florissantes si possible. T'as l'Aïtis, 18 personnes, t'as les Locomotivés, c'est un circuit court de produits locaux qui a été créé il y a 8 ans, qui aujourd'hui livre 400 paniers par semaine, la moitié sur le Rétiennois. C'est un projet économique qui permet à des producteurs de faire 30 à 50% de leurs ventes. même plus, tu vois, donc c'est énorme. Et ça résolvait un problème de geek, puisqu'on a créé il y a 8 ans, on a posé juste un truc pour la vie qu'ils ont, on a dit, nous, on veut pouvoir consommer local sans y passer plus de 5 minutes et sans se déplacer. Et l'idée, c'était juste qu'on allait créer un système de commande à la ligne qui permettait d'avoir un panier alimentaire équilibré avec tout ce qu'il faut pour rester en bonne santé, mais sans devoir aller dans chaque ferme. Mais c'est surtout sans faire un déplacement en plus. Et par contre, on est super égoïste, on crée notre vie, quoi. En fait, on cherche pas à changer le monde ici, si on cherche à créer notre monde. Il y a les temps périscolaires à mettre en place, il faut occuper les enfants un jour avec des projets pédagogiques, et bien on a des ressources disponibles. C'est qui qui a rien à brailler là ? Ah, il y a des retraités, ils ont des compétences, une ancienne prof de mante, une ancienne pâtissière, etc. Et bien hop, ils se rencontrent, et ils finissent par construire ensemble un programme pédagogique autonome. Et donc, on fait rencontrer l'offre et la demande. Il y a des gens qui sont prêts à donner leur savoir, et des enfants qui adoreraient le recevoir. Et ça, on s'est arraché à nous remplir une année. Et c'est fabuleux, on a fait ça avec zéro franc, zéro euro. Donc tout ça, ça a rapporté dans ma main à la société, mais malheureusement... Les comptables On ne savent pas le mesurer puisqu'il ne mesure que quand ça coûte, et jamais quand ça rapporte, puisqu'en fait on va savoir combien coûte un infarctus, mais on ne va pas savoir combien coûte un infarctus évité. On peut supposer que le bien-vivre à un vieux augmente l'espérance de vie et de bonne santé de manière conséquente, et je pense que les chercheurs l'ont déjà démontré en fait. La société devient très violente sans faire esprit à partir du moment où des gens, à partir d'une taille critique, se mettent à raisonner au niveau macro, qui commence à appeler... Paul, Pierre ou Jacques consommateur, comment s'appeler Paul, Pierre ou Jacques électeur, avec un S. Tous ces concepts abstraits qui vont faire remplir des fichiers Excel avec des chiffres pour gérer la France, ce qu'il faut aussi, par ailleurs. Mais à certains moments, quand on touche à des aspects régaliens, la justice, la santé, les maisons de retraite, etc., deviennent des violences, en fait, parce qu'on peut trouver qu'une règle macro est absolument géniale, appliquer les normes à toute la France, et faire que des zones... autonomes qui auraient pu trouver des solutions, mais ne les trouvent plus parce que ça ne respecte pas les normes, parce qu'il faut respecter des normes internationales, dans l'alimentation nationale, dans l'alimentation par exemple. Tu peux faire une nourriture étatienne, mais si tu ne respectes pas les normes, tu ne peux pas la vendre. Les normes viennent d'un système industriel qui produit en quantité astronomique. Ici on peut résoudre des problèmes de santé rien qu'avec la solidarité locale. Ici on pourrait garder nos enfants nous-mêmes en partie. Parce qu'il y a des parents qui sont prêts à donner leur temps et à partager leur temps pour faire une crèche. C'est interdit de faire ça. Par exemple, aujourd'hui on a un scandale ici, c'est qu'on a une maison de petite enfance qui a coûté très cher, qui n'est utilisée parce qu'en fait il faut respecter des normes telles que les parents n'ont pas le droit de l'investir sans qu'il y ait quelqu'un de diplômé qui nettoie les jouets tous les jours. l'État peut jouer son rôle macro, mais il faut laisser les gens trouver leurs solutions dans leur écosystème. Et les solutions qu'on trouvera à Arvieux ne seront pas les mêmes que celles qu'on trouvera dans un autre village en France. Et quand tu donnes la puissance d'agir aux gens, ils l'apprennent. Et ils l'apprennent de manière un peu égoïste, ils l'apprennent pour changer leur vie. Les parents cherchent à trouver des solutions pour garder leurs enfants. Les personnes âgées cherchent des solutions pour trouver des logements de plein pied avec des gens à côté. C'est de l'altruisme de raison. Et ça, quand les ressources viennent à manquer, et c'est ça qui est bien mieux. En réalité, c'est qu'on n'a pas tous les services. C'est génial quand même Patrick Serres parce que c'est maintenant qu'on va se bouger le cul pour avoir une bonne vie. Et donc ce qu'on a choisi à Hervieux, c'est de partager un diagnostic, la plus grosse menace à la démographie, qui est que tous les villageois l'ont compris quasiment. Et donc maintenant, il faut qu'on ait une bonne vie, parce que si on a une bonne vie, les gens resteront, ou des nouveaux viendront. On n'a pas envie de changer le monde, on n'est pas des prosélytiques de « il faut vivre comme ça, comme ça » . D'abord on montre l'exemple, nous-mêmes, on vit nous-mêmes des solidarités, c'est de l'altrisme de raison. J'appelle ça l'altruisme de raison, c'est-à-dire que c'est moins con de faire à plusieurs que tout seul. Au fond, c'est moins con parce que... Quelqu'un qui regarde 3 heures la télé par jour, il se trompe le cerveau. Donc il vaudrait mieux que s'il regarde que 2 heures par jour et que le reste du temps il s'occupe de ses voisins. Soit apporter la foi à son voisin qui a du mal à marcher. Ou soit participer à faire de la trompette dans un cours de musique. Il sera plus heureux, il rendra les autres heureux. Donc c'est con d'avoir regardé la télé 1h de trop. Donc on a des ressources illimitées en milieu rural. Et partout en France, même du rural. 800 habitants en art vieux, 3h en moyenne d'exposition à la télé. Bon ben voilà, c'est leur don d'amitié. de sortir. Donc à chaque fois qu'on doit se débrouiller, je trouve ça réjouissant en fait, parce que dans se débrouiller avec peu, on est forcément créatif et c'est démontré dans tout ce qui est art ou création, c'est quand les ressources viennent à manquer qu'on est créatif. Ce que j'adore dans les zones rurales où la vie est quand même bien parce qu'on a accès à la nourriture, on a un toit, j'ai la base, souvent on a la base, mais quand les services publics se barrent et tout ça, c'est toujours une catastrophe aussi. Mais des fois c'est génial parce que quand les ressources viennent à manquer, la stratégie est la plus efficace. dans les systèmes, c'est la coopération. Donc on est contraint de coopérer. Ma théorie, c'est ce que j'appelle des leçons de mayonnaise. J'appelle ça leçon de mayonnaise, c'est qu'en fait, la plupart des territoires, ils ont tous les ingrédients pour faire de la mayonnaise. Tu vois, une mayonnaise, c'est pas compliqué, c'est que tu as de l'huile dans une bouteille, t'as un oeuf dans sa coquille, t'as de la moutarde dans son pot. La plupart des gens que je vois dans les entreprises ou ailleurs, je vois que l'huile reste dans sa bouteille, donc chacun garde son ego, tu vois. En gros, je suis l'huile et je reste l'huile, l'œuf reste dans sa coquille, je suis œuf et je reste œuf dans ma coquille, donc chacun reste soi avec sa structure. Donc dans tous les territoires, souvent, quand c'est pas trop la mort, que tout le monde n'est pas encore parti, on a tous les ingrédients, on a le menuisier, le boulanger, etc. Et souvent, je dis les territoires ou les entreprises ou les communautés, les groupes en général, sont pas très inspirés souvent, parce qu'en fait ils ont tous leurs ingrédients à leur sein, mais... Ils n'ont pas de bol. Pas de bol, c'est un jeu de mots. Ils n'ont pas de lieu pour se rencontrer, pour se mélanger. Et ils n'ont pas non plus de cuistot, c'est-à-dire de quelqu'un qui sait animer ça. Dans les villages, avant, on avait des animateurs. Quand on avait des animateurs, on peut aimer ou pas l'idée, mais en Aveyron, il y a 50 ans, il y avait 800 prêtres. d'ailleurs aujourd'hui à 30 Les prêtres dans la plupart des histoires, c'était des gens qui ont rempli une fonction d'animateur. Des fois ça a été l'instit à d'autres époques, ça a été aussi l'instit, des fois ça a été quelqu'un d'engagé, mais il y avait du temps pour la communauté, du temps institutionnalisé, il y avait des gens qui étaient pour la communauté et qui donc faisaient ce travail. Et il y a autre chose qu'on n'a pas souvent, c'est la méthode. C'est-à-dire que tu as le cristaux mais tu n'as pas la recette. Donc quand tu as le bol, tu vois, tu crées une pépite d'entreprise, une salle de spectacle, un café, c'est des lieux de rencontre. Donc tu as créé les lieux et les espaces. Après, les gens, ils vont commencer à se mélanger. Il y a deux choses importantes, c'est qu'il faut qu'on ait des apprentissages pour gérer notre ego, accepter de sortir de notre bouteille, de notre coquille, de se dire je veux me mélanger. Et pour aider à ça, il faut une autre pratique que l'art du faire ensemble. C'est comment on réussit à faire ensemble. Et on a développé une méthode participative qu'on pourrait appeler la méthode agile et participative. Très vite on a vu qu'en fait les gens quand ils avaient le pouvoir d'agir et qu'ils étaient informés, ça prend du temps d'informer au début puisque tout le monde doit avoir le même vocabulaire, donc ça tu as l'impression de perdre un peu d'attente au début, donc tout le monde demande ton niveau d'information, t'animes ça. Les gens se retrouvent dans le même endroit et on présente un projet. de salles de spectacle. L'architecte est là juste pour donner sa vision, et les gens disent, en tant qu'usager, moi j'ai besoin que les sièges soient grands, moi en tant qu'usager, j'ai besoin, j'entends pas, j'ai besoin d'un boucleau dur, etc. Et d'un moment, on fait travailler les gens autour d'un prototype qui a été fait par l'architecte. Mais c'est pas l'architecte qui anime la réunion, c'est quelqu'un qui l'aide. Et les gens, ils peuvent critiquer le prototype, ils ont le droit de le détruire ou pas. Et grâce à ça, on n'a plus de concours d'égo, tu vois. Les gens, ils se mettent à attaquer un objet. Donc, ils n'attaquent pas, ils se mettent à jouer. Et quand ils se mettent à attaquer un objet, Et quand ils se mettent autour, ils sont plus face à face, ils sont côte à côte. Et parce qu'ils sont côte à côte, ils commencent à jouer. Et l'idée de l'un amène à l'idée de l'autre. Et on finit par obtenir la mayonnaise. C'est que la contrainte de celui qui est gros, qui veut des sièges qui sont un peu plus larges, avec la contrainte de celui qui veut que les gens ne s'endorment pas, on finit par faire le design parfait du fauteuil. Et quand tu lèves toutes les critiques, tu as cette sensation de mayonnaise. Tu vois, en 2-3 minutes, tu as trouvé une solution. Une solution qui coûte moins cher, qui est mieux. Dis-moi dans les méthodes habituelles du numérique. si c'est possible de résoudre ce problème de design. Je ne pense pas. Parce qu'en fait, le maire va envoyer un mail à l'architecte en disant « Oui, il y a des artistes qui voudraient avoir des pratiques. » « Ok, donc l'architecte, il fait un truc, il renvoie au maire. » « Le maire représente à ses élus en conseil municipal. » « Il le redit plus ou moins aux artistes. » « Ah oui, l'architecte a prévu ça, c'est nul. » « Oh, vous faites chier, j'ai fait ce que vous avez. » Et ça, rien qu'avec des emails, même avec le numérique, c'est catastrophique. Il n'y a jamais les ingrédients mélangés. Et quand tu es élu, par contre, il faut... Voir ça comme une chambre, c'est pas comme un... une perte de pouvoir. Et quand tu es élu au début, tu peux le voir comme une perte de pouvoir. Tu te dis, mais pourquoi c'est eux qui décident ? Parce qu'ils savent mieux faire que toi. Tu t'en fous. Ton but, c'est d'être animateur. T'es maire, c'est pas d'avoir le pouvoir. Ton but, c'est que la mayonnaise, elle prenne. Et si tu ne sers à rien, c'est que tu as réussi. Si tu es animateur d'une communauté, que tu sois maire ou autre, et que ça marche sans toi, c'est la plus grande réussite. Tu as créé une autonomie du faire ensemble. Donc, il n'y a plus besoin de l'homme providentiel. Mais c'est ceux qui ont réussi à revue. ce qu'il faut comprendre, c'est que la démarche participative, Donc on ne va même pas l'appeler démarche participative, on va l'appeler fabrique de l'intérêt généreux. on pourrait l'appeler plutôt que de manger pas si pas de chien. Et retiens bien que quand on mélange de l'huile avec de l'huile, on n'a que de l'huile. Donc quand on mélange des gens qui se ressemblent, on fait pas beaucoup d'innovation et surtout le résultat est dégueulasse. Donc quand on rencontre que des militants du bio dans un circuit court, c'est chiant. Quand on rencontre que des conventionnels dans un circuit court, c'est chiant. Quand on rencontre que des gens qui pensent pareil, c'est chiant. Le problème c'est qu'en zone urbaine, tu peux rencontrer que les gens qui te ressemblent. Tu veux faire un café, tu veux organiser des soirées philosophiques sur Spinoza, tu peux trouver trente personnes pour faire ça pendant un an. Là, un vieux 800 habitants, si je veux faire des projets, je peux. Mais il va falloir que je fasse avec des gens qui ne me ressemblent pas. De mon point de vue, je ne vais pas me tromper, mais de mon point de vue, parce que tu es obligé de comprendre l'autre. Donc ta rigueur philosophique qui était d'abord basée sur des grands principes, par exemple, on pourrait dire le grand principe, il faut manger que bio. Je le pense plutôt, au fond. Je ne me permettrai pas de le dire et de l'imposer et de le croire aux gens qui sont autour de moi. J'ai des copains agriculteurs qui ne sont pas bio. Moi je demande juste à ce qu'on se respecte. C'est que si à un moment donné il a la connaissance technique que sa façon de cultiver peut nuire à la santé de ses voisins, il essaie de faire mieux demain. Je ne peux pas lui demander de changer sa production en un jour. Je ne peux pas lui dire que tu es un connard parce que tu es conventionnel. Et souvent, on fait ce genre de confusion. En mieux que le râle, si tu oublies un peu ton égo, à la place de les insulter, tu discutes. Et en discutant, tu te mets à comprendre. Et tu te poses en humilité la question, si j'étais à leur place, qu'est-ce que je ferais ? Et en te posant cette question, tu te rends compte que les problèmes sont souvent beaucoup plus complexes. Donc, dans un comité humain, sur des sujets aussi importants que l'alimentation, tu commences à comprendre que tout est beaucoup plus compliqué que ce que tu vois à la télé. Commence à comprendre ton voisin. Ça ne veut pas dire que tu vas l'aimer. Ça veut dire que si tu commences à le comprendre, tu vas comprendre qu'il y a des choses, que si tu veux que demain soit un peu mieux qu'aujourd'hui, ce n'est pas en disant aux gens que leur façon de faire, c'est de la merde. L'important, c'est de réussir ensemble. Et les conditions, elles sont importantes, mais elles relèvent, dans le débat public, elles relèvent de l'intimité religieuse presque, tu vois. Je peux réussir un acte solidaire avec des gens qui se disent racistes, par exemple. Pourtant, quand on doit faire un acte de solide, il a été compris, cela. Donc tout est beaucoup plus compliqué. Et ce que j'aime à mes rurals et dans la culture paysanne, c'est qu'on mesure la qualité des choses, souvent, dans notre culture aérienne en tout cas, au résultat des actes plus que des idées. Nous, on a l'art d'organiser le débat autour du projet. On parle économie, donc on pourrait dire plutôt droite, et on parle culture, plutôt gauche. Amur a tellement peu de ressources que chaque contrainte devient une opportunité. La culture devient une opportunité économique, et l'économie devient une opportunité culturelle, puisque c'est les commerçants du village qui financent, par le sponsoring, des activités culturelles. Donc, Albert Jacques a dit, nous sommes les liens que nous tissons. Au fond, si tu réfléchis pour toi ou pour les autres, tu n'es que la collection des autres, la langue que tu... parles, qui t'aident à penser, c'est que d'autres qui l'ont inventé avant toi. Tes peurs et tes joies, ça vient de ton histoire personnelle. Tes réflexes, ça vient de l'histoire de la vie. Voilà, enfin, dans un village, tu finis aussi par te rendre compte que ta capacité d'agir, ta puissance d'agir, elle est décuplée grâce aux autres.

  • Speaker #0

    Qu'est-ce qu'il reste à faire ? Quel regard est-ce que tu portes sur le village aujourd'hui ?

  • Speaker #1

    En vieillissant, je deviens plus radical. Je dirais qu'on n'est pas assez sobres, pas assez résilients, et pas assez radicaux dans l'autonomie. Parce qu'ici, je sais que par exemple, les gens ont assez d'argent et de compétences pour construire le village eux-mêmes et ne pas faire appel à des publics. Donc moi, j'aimerais qu'on envoie un message un peu bizarre. Je suis pour les services publics, si tu veux, mais la façon dont ils sont gérés, je doute un peu de leur avenir. Je suis désolé de dire ça, mais je trouve ça révoltant. Du coup, j'ai du mal à faire confiance à un pouvoir centralisé. Je serais pour un pouvoir qui fixe les règles du jeu, les droits de l'homme et les droits de la nature, et laisser chaque territoire, les régions d'abord, de dire par exemple l'Occitanie doit dérégler l'Occitanie. On a tous les écosystèmes d'Aquitaine, on a la mer, on a la montagne, on a les plaines, etc. On va surtaxer tout ce qui est déplacement de matière, parce que c'est du pétrole, voilà. Donc à chaque fois que la région se nourrit elle-même, elle va gagner. Donc l'État fixe des métalliques du jeu et laisse des zones autonomes se démerder. Pourquoi autonomes ? Parce que quand tu agis à petit niveau, tu reconnais les autres, tu as le circuit court d'information, le circuit court de matière. Ces circuits courts, ils te font comprendre qu'il faut être sobre, ils te font faire des économies et ils te font surtout reconnaître ton voisin. Un agriculteur qui sait qui. il nourrit fera de la meilleure nourriture que s'il pisse du lait pour des gens qu'il ne connaît pas. On est tous pareils, je veux dire. Je dis les agriculteurs, mais toi, moi, on est pareil. Quand on fait des trucs qui ont moins de sens, qu'on ne connaît pas l'impact, qu'on ne comprend pas l'impact, on finit par perdre notre éthique, puisqu'en fait, on ne connaît pas à qui ça va nuire. Ça devient abstrait, ça perd son sens. Je serais beaucoup plus radical pour envoyer cette idée, ce message, qu'en fait, ensemble, on peut créer notre vie et notre monde, et qu'on n'a pas besoin d'attendre l'arrivée d'un moment providentiel. On n'a pas besoin d'être de droite ou de gauche, on n'a pas besoin de faire partie d'un parti, on n'a pas besoin d'une loyauté aux idées. Si quelque chose marche, que ça ne correspond pas à nos idées, soyons scientifiques. Si quelque chose marche et a produit plutôt de la satisfaction de vivre aux gens autour de moi, mais que ce n'était pas dans mes idées, soyons humbles, l'expérience me montre que mes idées étaient fausses. Et je déteste donc ces moments symboliques des élections nationales, où des gens que j'apprécie ne pensent pas du tout comme moi, et pour cette raison-là, on pourrait se foutre sur la gueule alors qu'on a réussi 10 000 projets. Ça s'est passé aux élections présidentielles. Au conseil municipal, on avait pris notre équipe en disant pour quitter, et on s'était apprécié ou pas dans les projets en fonction de ça, mais c'était la guerre. Au bout d'un moment, je me suis dit à mon fond intérieur, mais on a réussi tellement de choses ensemble, c'est pas des gens qu'on connaît pas qui nous traitent comme des moutons électeurs, qui vont nous diviser. Donc au bout d'un moment, je me suis dit, ce que je crois relève de mon intimité religieuse, j'ai réussi des trucs avec les gens, je les apprécie comme ils sont, ceux qui pensent, c'est lié à leur histoire, pas plus. Et c'est lié à la mienne. Quand je suis au comité des fêtes, je me dis pas, Je me... Je mets les cateaux avec les cateaux, les athées avec les athées. Pareil en action politique, deux terrains.

  • Speaker #0

    J'ai l'habitude de poser comme dernière question, en quoi est-ce que tu crois ?

  • Speaker #1

    Quelle est ta plus grande conviction ? Que la condition humaine, c'est la solitude, c'est disparaître, la voie de la mort et tout ça. Et il semble que si on veut avoir une bonne vie, il y a deux choses fondamentales dont on a besoin. Trois choses fondamentales, c'est l'autonomie. Le besoin d'autonomie est un besoin, c'est sentir que j'ai la puissance de contrôler mon environnement seul. Mais c'est aussi le besoin de connexion, c'est-à-dire faire partie d'une communauté, sinon je déprime complètement. Je suis un être humain, et un être humain sans la reconnaissance de ses parents, il est mort. Donc depuis tout petit, tu as assimilé le fait que seul, tu es morte. Donc ton réflexe de survie, c'est de te connecter aux autres. Donc j'ai besoin d'autonomie, j'ai besoin de me connecter. et plutôt que réfléchir, agir. Parce qu'on montre qu'en fait, quand un être vivant agit sur son environnement et qu'il a l'impression d'être efficace sur son environnement, il se sent plutôt bien. Autonomie, connexion et puissance d'agir local, si tu as ces trois choses, normalement, tu es en bonne santé. Donc moi, je crois juste que je veux avoir une bonne vie. Et c'est très égoïste, mais je cherche par contre à avoir l'éthique de ne pas nuire aux autres. Et ça, c'est très ambitieux. Et donc, polluer la planète, c'est compliqué parce que à chaque fois que je mets de l'essence dans ma voiture, j'en ai besoin. je ne veux pas me marginaliser, je sais que je finance une économie de guerre. Et ça ne m'empêche pas de dormir. Je n'ai pas envie de culpabiliser les gens, on n'est pas dans la culpabilité. Mais je me dis que j'aimerais être dans une société où l'essence coûte cher et où un marché bio a un salaire deux fois plus élevé parce que lui, il n'utilise pas de pétrole. Ce n'est pas vrai. Je suis dans une société, dans un État, dans une économie qui a des règles du jeu, qui paie plus cher la nuisance que la bienfaisance. On l'a vu avec le Covid. Je trouve qu'on est dans une économie inversée, qui est contre nature. c'est-à-dire que ce qui fait du bien... n'ai pas compris ou mal rémunéré ou mal compté. Et ce qui est de la réparation ou a fait du mal, rattraper des mecs qui ont eu le cancer à cause de pesticides, au bout d'un moment, tu te dis, c'est qui qui doit payer ça ? J'ai envie de te dire, je suis plutôt pessimiste, et c'est ce qui me fait apprécier l'action dans l'instant présent. Qu'est-ce que j'ai de mieux à faire qu'à faire du mieux que je peux maintenant ? Ici et maintenant. Mais changer le monde, j'ai perdu un peu l'espoir, puisque le réchauffement climatique est annoncé depuis les années 70. Tu vois, donc je n'ai pas beaucoup d'espoir que l'humanité change sans un moment de crise majeur. Mais ça, ça me rassure beaucoup de gens. Donc, j'en parle pas trop. Donc oui je suis plutôt pessimiste mais pas résigné, je sais pas comment te dire. Je veux pas donner trop de sens à ce que je fais, tu vois, de sens ouais c'est de la générosité, c'est trop sérieux des autres tout ça, peut-être que j'ai tort mais je veux pas trop parler de ça, je veux juste avoir une bonne vie sans nuire à mes collègues. Et j'adore Brassens pour ça parce que Brassens il a dit que ça dans ses textes. Et il a une chanson qui s'appelle « Gloire à Don Juan » et il y a une phrase qui dit « Gloire à celui qui se borne à ne pas emmerder son voisin » . Je trouve que c'est une étiquette de vie hyper exigeante en fait. Parce que nos voisins, c'est nos voisins de palais, mais c'est... les gens qui sont en train de démigrer parce qu'on leur a foutu sur la gueule. Enfin, nos voisins, c'est tous les êtres humains, on va dire. Mais avant, c'est ce que j'avais dit aux locomotivés quand j'étais coprésident, j'ai dit nous sommes un groupe agissant, mais pas un groupe militant. Nous n'avons pas à dire aux gens, c'est nul d'aller au supermarché, ça c'est pas le truc. On doit rendre la distribution alimentaire tellement pratique qu'aller au supermarché, c'est moins intéressant. Ou alors, on doit convertir le supermarché pour qu'ils n'achètent que local. Si c'était ça la solution à la fin, pourquoi pas, tu vois ? on aurait résolu notre problème écologique. Si les producteurs sont bien payés, et que c'est le supermarché qui distribue à prix normal la nourriture, oui, pourquoi pas.

  • Speaker #0

    Merci.

  • Speaker #1

    Ok, merci à toi, Lola.

  • Speaker #0

    Merci. Vous êtes arrivés au bout de ce nouvel épisode de Finta. S'il vous a plu, parlez-en autour de vous, partagez-le à vos amis. C'est le meilleur soutien que vous puissiez apporter à Finta pour qu'il continue son chemin. Retrouvez Finta sur Instagram et sur Facebook. Finta. point le podcast pour ne rien rater des nouveaux épisodes et de leurs coulisses. On se retrouve dans 15 jours. D'ici là, gardez l'œil ouvert. Soyez curieux.

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