Speaker #1Bonjour, je suis donc Marie. J'ai bientôt 63 ans et je suis à la retraite depuis bientôt un an, depuis mes 62 ans. Il a eu un poste de secrétaire générale à Templin, à l'Ordre des architectes. Donc j'ai évidemment passé des entretiens comme d'autres et évidemment j'ai été bien sûr sélectionnée puisque j'avais non seulement les compétences du fond, c'est-à-dire sur l'architecture, j'avais fait des études d'architecture, j'avais travaillé pendant dix ans au syndicat des architectes, j'avais des compétences en communication. Quand j'étais au syndicat des architectes, je m'occupais également de la comptabilité du budget, enfin bon de tout, de tout ce qui concerne une entreprise. Voilà, donc je suis rentrée en 2005 à l'Ordre des architectes. Il faut savoir que l'Ordre des architectes, ce sont des architectes qui sont élus par leur père tous les trois ans. Tous les trois ans, ça se renouvelle par moitié. Et l'Ordre en général, que ce soit celui des architectes, des médecins, des avocats, etc., des professions libérales réglementées, Ce sont des égaux sur-surdimensionnés, assez machistes en général. Il n'y avait pas de femmes, très peu de femmes élues à l'ordre, très peu de femmes. Les femmes présentes, c'était celles qui étaient ce qu'ils appelaient les permanentes, c'est-à-dire qui faisaient le boulot administratif de l'ordre, la comptabilité, l'administratif, etc. Pas trop de représentation, parce que ce sont eux qui faisaient la représentation auprès des institutions, etc. Sauf que j'ai une... plutôt une forte personnalité, j'ai plutôt pas mal de compétences dans le domaine, et que j'ai pris pas mal de place. Et que le fait qu'il y ait un changement également tous les trois ans, fragilise la structure, quelque part. C'est-à-dire qu'on perd les connaissances, on perd les compétences. Certains élus qui ont acquis un certain nombre de compétences qu'ils n'avaient pas en arrivant, souvent, ils ne savent pas du tout ce que c'est l'ordre des architectes. disparaissent. Et en fait, j'étais la seule personne à conserver le fond. J'ai eu un souci avec... J'ai été embauchée par un président qui était là pendant deux ans. Et ensuite, il y avait un autre président qui ne voulait pas du tout que ce soit moi qui soit là. Il voulait qu'il y ait un copain à lui. Et donc, il m'avait un peu fait des misères pendant trois années. Après, ça s'est arrangé. Et puis, j'ai oublié de préciser, mais dans mes précédents jobs, ça s'est toujours... plutôt très, très bien passé. Je n'ai jamais eu de problème. Et donc, à l'ordre, il y a eu... Alors, pardonnez-moi, mais j'ai oublié un peu des dates, un peu volontairement, d'ailleurs. Mais il y a eu, dans le cadre du rapprochement des régions, c'était les régions en fusionnées. Donc, nous, nous étions la région Rhône-Alpes. Et la région Rhône-Alpes a fusionné avec la région Auvergne. Et là, mes ennuis ont commencé. Mes ennuis ont commencé pour deux raisons. Parce que... La première raison, ce sont deux régions complètement différentes, autant au niveau de la superficie qu'au niveau d'impact économique, donc au niveau du nombre d'architectes inscrits à l'Ordre, et puis au niveau du nombre d'élus, et évidemment au niveau du nombre de salariés qu'il y avait dans l'Ordre d'Auvergne. À l'Ordre d'Auvergne, il y avait également plus de femmes. Et tout à l'heure, j'ai parlé de l'ego des architectes. J'ai oublié, je ne sais pas si j'ai cité... Le machisme très, très, très, très, très développé, on va dire. Et donc, comme on peut le constater, je suis une femme et qui défend plutôt ce statut de femme. Enfin, non, je dis une bêtise, je ne défends pas ça du tout. Je ne le défendais pas. Mais à force d'être agressée là-dessus, oui, j'ai commencé à défendre ce statut. J'ai entendu des choses, bien avant MeToo, qui... étaient très désagréables et pour lesquels je regrette de ne pas avoir porté plainte, par exemple. Je ne parle pas de gestes ou d'actions, mais de mots très violents. La réunion Auvergne-Rhône-Alpes s'est plutôt pas très bien passée entre les élus. Et moi, j'étais un peu entre les deux. On a fait intervenir un auditeur externe. KPMG, bon là ça a été le caca, c'est sûr que quand on fait intervenir quelqu'un avec des directives précises, forcément sans tenir compte de ce que disent les salariés par exemple, ça ne peut pas fonctionner. J'ai oublié également de dire que, là j'ai parlé du président qui m'avait un peu enquiquiné quelques années auparavant et qui estimait que... Ma seule formation, mon Master 2 de communication et de marketing, ne suffisait pas à diriger du personnel. Donc j'ai fait une formation en management. J'ai fait un Master 2 en management des activités libérales réglementées, management socio-économique qui est dispensé à l'IAE de Lyon. Et j'ai fait cette formation que j'ai eu mon Master, au Master 2, bien sûr, haut la main. J'avais une certaine approche du management. Le management socio-économique prend en considération l'ensemble des salariés et se fait avec les salariés. Et moi, ça aurait dû se faire avec les élus, sauf que les élus n'étaient pas super motivés pour écouter ce que j'avais à dire et surtout pas du tout motivés pour suivre ce que j'avais à dire. Donc, je me suis quand même beaucoup débrouillée toute seule. Enfin bon, j'ai... tenu quand même au Lama l'ordre des architectes pendant un certain nombre d'années. Et cette réunion avec l'Auvergne, où il y avait un salarié, il y en avait un autre qui était au Prud'homme, un autre qui était en arrêt maladie depuis trois ans, il ne restait plus qu'une salariée, enfin bon, ce n'était pas une salariée à temps plein sur place. Et moi, j'avais dix salariés sous mes ordres. Et voilà, il y a eu un certain nombre de... Je ne sais pas. Je pense qu'il y a eu plein de choses qui ont été faites dans mon dos. Sur mon poste en particulier, on a voulu un peu me mettre dans un placard. On a voulu me mettre dans un placard. Et pour que j'arrête de mener l'ordre, continuer sur ces rails, que l'ordre fonctionne. J'ai beaucoup entendu que j'étais trop payée, beaucoup trop payée. J'ai beaucoup entendu que j'étais, bon, une femme quand même, voilà. Si on devait changer, il n'y avait que des femmes en tant que personnel administratif. Si on devait changer, de toute façon, on ne prendrait pas que des femmes, on prendrait beaucoup, on prendrait des hommes. Voilà, c'était ça tout le temps et surtout la dernière année. Donc moi, j'ai été en arrêt de travail en novembre 2017. La dernière année de septembre 2016 à novembre 2017, c'était l'horreur. C'est-à-dire que sans arrêt, on a remis en question ce que je disais. Je demandais à avoir des réunions avec mon président et mon secrétaire. On oubliait de venir, ils oubliaient de venir. Oh, ben oui, ben non, ils arrivaient à 15h, 14h. C'était sans cesse ça, une charge de travail qui augmentait, mais pas forcément à leur demande, mais plutôt moi qui suis rentrée dans une spirale. Ce qui m'a conduit finalement à perdre pied, à être toujours dans la recherche de la perfection, que ce soit toujours parfait. Ça l'était, mais à quel prix ? La formation que j'avais faite en management socio-économique, je l'ai faite sur deux ans. On ne m'a pas accordé de jour pour faire cette formation. Donc, je faisais la journée de la formation et mon travail le soir. Je suis arrivée à faire des semaines de 94 heures de travail. Parce qu'on était aussi normes ISO quelques années auparavant. tout était noté. Et 94 heures, c'est quand même pas mal par semaine. C'est même un peu trop, en fait. Mais ça, ça ne m'avait pas posé de problème à l'époque. Donc, je travaillais beaucoup. Je motivais beaucoup. J'entraînais beaucoup. Et finalement... Et finalement, on m'a dit, j'ai bâti tout un organigramme avec les salariés d'Auvergne et les salariés de Rhône-Alpes. Et puis finalement, on m'a dit OK pour cet organigramme, très bien. Donc, j'étais directrice et je gérais l'ensemble. Et finalement, la veille de mes vacances, on m'a dit, finalement, ce ne sera pas comme ça. Il n'y aura pas de directrice. Et puis toi, on verra à la rentrée. Donc, j'ai passé des super vacances. Évidemment, j'avais déjà eu droit à un avertissement auparavant parce que j'avais osé demander à un élu de me fournir des justificatifs originaux de ces déplacements. Ce qu'il n'a pas voulu, soutenu par les autres élus. Le commissaire au compte m'a dit « non, ce n'est pas possible » . On m'a répondu gentiment « tu n'as qu'à nous l'envoyer, le commissaire au compte, on va lui expliquer l'avis » . Ce qui ne se passe pas tout à fait comme ça, en fait. Voilà, je vais consulter un avocat. Et je lui ai expliqué tous mes problèmes, tous les problèmes que je rencontrais. L'avocat, au bout de deux heures, m'a dit, écoutez, très bien, il y a moyen de vous protéger, bien sûr. Avant cela, il faut que vous vous soigniez. Bon, je ne suis pas du tout malade, tout va très, très bien. Puis là, je pars trois semaines en vacances, ça va bien aller. Ben, OK, on se revoit plus tard. Elle m'a dit, OK, je suis partie en vacances. Et quand je suis rentrée de vacances, mon dernier jour de vacances, ma maman est décédée. Donc, je ne suis pas retournée travailler. ce qui, je pense, a été la première fissure dans ma carapace, le décès de ma maman. Je ne suis pas retournée travailler. Pendant une semaine, j'organisais des obsèques de ma maman. Et puis, il se trouve que j'avais rendez-vous chez mon médecin généraliste cette semaine-là. Et lui, il m'a dit, non mais, vous ne retournez pas travailler. Ça faisait déjà un an qu'il me disait qu'il voulait m'arrêter. Non, mais ça allait très, très bien. J'ai oublié de préciser quand même que les trois mois qui précédaient cela... J'allais régulièrement chez l'ostéopathe ou chez le médecin parce que je ne dormais pas, parce que j'étais complètement coincée, je ne pouvais plus bouger. Chez l'ostéopathe, un jour, elle m'a dit « mais comment vous faites pour respirer ? » En fait, je haletais en permanence. Je ne me rendais pas compte. J'ai été arrêtée 15 jours. Quand je suis revenue, je me suis pris une belle lettre de remontrance, comme quoi je n'avais pas fourni les éléments, les fiches de poste, etc. Ce qui était faux, j'avais fourni les fiches de poste, j'avais fourni tout ce qu'il fallait, mais ça ne leur allait pas. Donc voilà, je suis allée à l'APEC parce que je me suis dit c'est pas possible, je vais pas pouvoir continuer comme ça. À l'APEC, j'ai rencontré une dame absolument charmante avec qui on a parlé de mes compétences, qui n'était pas très inquiète. Même si j'avais 55 ans, moi j'étais inquiète quand même à 55 ans. Retrouver un job que j'adorais, qui me passionnait, que je faisais bien, plutôt très très bien même, avec un salaire qui était correct et qui n'était pas énorme et correct. Et je me disais, je ne retrouverai jamais un job comme ça. Donc, la PEC, elle me dit, écoutez, avant toute chose, il faut vous faire soigner, ça ne va pas du tout là. Deuxième fois, quand même, moi je vais bien quand même, ça va bien. Et bon, ça a mis un peu de temps. Un mois après, je me suis dit, j'ai une seule solution, c'est aller à la médecine du travail. En fait, pour demander de l'aide, je suis allée à la médecine du travail. Elle m'a dit « mais est-ce que vous avez songé à consulter un psy, un psychologue ? » Et je lui ai dit « ben non » . Alors que je ne suis pas du tout opposée à ça et que je suis plutôt ouverte d'esprit. Alors elle m'a dit « je vais vous envoyer vers un psychiatre qui va vous écouter et puis qui fera un rapport et puis on verra avec ce rapport » . Je continue à avoir des misères dans le cadre de mon travail. Quand je dis des misères, c'est vraiment très relatif, c'est pire. Et donc, je suis allée voir ce psy un matin, à 8h du matin, parce qu'il était extrêmement pris et qu'il n'avait pas beaucoup de disponibilité. Pour l'anecdote, son bureau était situé en dessous du bureau de mon trésorier. Donc, je ne voulais pas qu'il sache que je vais voir ce psy. Et donc, il a écouté. Il m'a posé des questions sur... ma formation, qu'est-ce que j'avais fait comme études, etc. Quels avaient été mes jobs, comme j'ai fait tout à l'heure. Et donc, je lui ai raconté. Et puis, je lui ai parlé de mon travail à l'ordre. Et bon, très bien, ça a duré peut-être 20 minutes, quelque chose comme ça. Et à la fin, il m'a dit, écoutez, je vais donc enregistrer le rapport pour que ma secrétaire puisse le taper. Donc, voilà, il avait pris quatre notes, vraiment quatre petites notes. Et donc il a tout ressorti et il dit « Je reçois ce jour Mme Cartier, qui est très bien de sa personne, je ne sais plus les termes qu'il avait employés, mais c'est quelque chose qu'il voulait dire comme ça, qui se positionne très bien, qui explique machin, etc. » Et alors nous arrivons au moment de son travail actuel et là, Mme Cartier se met à bégayer, hésite, ne trouve plus les mots, tremble. Je lui dis « Ça ne va pas, pas du tout ! » Il dit, vous ne me voyez pas ? Je dis, non, quand même. Il dit, écoutez, ça fait 35 ans que je fais ce métier. Donc, OK, je me suis tue. J'ai continué à l'écouter. Et donc, il a décrit ce que je vivais, en fait. Je ne me rendais pas compte. Mais je ne me suis pas rendue compte non plus à ce moment-là. Et à la fin, il m'a dit, moi, ce que je préconise, c'est six mois d'arrêt de travail. Je lui dis, alors là, ça ne va pas du tout. Je ne suis pas du tout d'accord. J'organise un séminaire dans 15 jours. hors de question que j'ai six mois d'arrêt de travail, même pas une semaine, même pas deux jours. Il m'a dit, il n'y a pas de souci dans le quartier. Je passe ma batte de baseball, puis vous la prenez, puis vous vous tapez sur la tête matin, midi et soir, même éventuellement pour le goûter, vous tapez sur la tête, et dans six mois, je vais vous voir à Léon Bérard. Léon Bérard, c'est l'hôpital où il y a les gens qui sont traités pour le cancer à Lyon. Je suis partie de chez lui, je ne sais pas ce que j'ai fait pendant 2-3 heures. J'ai erré dans la ville. Et ça, c'est toujours émouvant pour moi d'en parler. Donc, comme quoi, ça a été très, très dur. Bon, je suis retournée travailler le lundi. C'était un vendredi, je suis retournée travailler le lundi. Bon, j'avais mes enfants qui me disaient « Maman, arrête. Maman, fais-toi arrêter. Fais-toi arrêter, ça ne va pas du tout. Arrête ce job, ce n'est pas possible. » Et moi, non, je ne voulais pas arrêter. Je ne voulais pas arrêter. J'ai donc été convaincue à la médecine du travail qui m'a dit… J'ai eu plusieurs convocations à la médecine du travail. mon président, mon secrétaire, mon trésorier, tout le monde est au courant. Personne ne m'a demandé pourquoi. À aucun moment. À un moment, quand je suis rentrée après l'arrêt de travail du décès de ma maman, mon président qui est venu dans mon bureau, il me dit, donc j'ai été absente 5 semaines, 3 semaines de vacances et 15 jours d'arrêt. Il me dit, bon alors comment ça va ? Je dis, en fait ça ne va pas du tout. Il est parti de mon bureau. Voilà, point, terminé. Il m'a envoyé une belle lettre recommandée pour me dire que je n'étais pas à la hauteur du boulot, enfin que je n'avais pas fait le boulot qu'il fallait. Ok, donc médecin du travail, quand je suis arrivée, médecin du travail absolument très compétente, charmante, qui a très bien su me prendre et qui me dit écoutez, voilà, j'ai eu le rapport. Qu'est-ce que vous pensez de ce qu'il a dit ? Je lui ai dit n'importe quoi, enfin franchement. Il me dit vous savez, c'est quand même un psychiatre qui est quand même très spécialisé dans la souffrance au travail. Ah bon ? Je ne le savais pas. et un... Et elle me dit quand même là, il y a quand même quelques éléments, il faudrait peut-être songer à vous arrêter un petit peu. Je dis ah non, et je ne sais pas ce qu'elle m'a dit, je ne sais pas. Mais j'ai compris qu'il fallait que je sois arrêtée et j'étais d'accord. Et elle me dit alors donc je vais vous mettre inapte. Et par contre, elle me dit il faut que vous allez voir votre médecin qui vous donne des médicaments parce que là je ne dormais pas, je dormais deux heures par nuit. Je mangeais toute la journée, toute la journée j'étais en train de manger. Je ne faisais pas de repas, mais je mangeais, je grignotais. Et je ne dormais pas, j'avais du mal à respirer. Enfin bon, il n'y avait rien qui allait. Et donc, je lui ai dit, écoutez, ça tombe bien, j'ai rendez-vous ce soir. Elle m'a dit, attendez, ça change tout. Je vais lui faire une lettre pour que ce soit lui qui vous arrête. Comme ça, je ne vous mets pas inapte. Et donc, je suis devant mon médecin qui m'a dit, qui était ravi. Elle m'a dit, enfin, je peux enfin vous arrêter. donc il m'a dit je vous arrête 6 mois j'ai dit non Je dis non, non, je ne veux pas, je ne peux pas, ce n'est pas possible. Alors, il m'a dit c'est trois mois, pas négociable. OK, donc il m'a arrêté trois mois. Et là, donc, j'ai averti mon président. Je lui ai envoyé un SMS en lui disant que j'étais arrêtée trois mois, qu'il allait recevoir. Et mon séminaire commençait le lendemain. Et donc, voilà, j'avais en particulier une collaboratrice qui, je m'entendais très, très bien. Elle m'a dit le lendemain, pendant le séminaire, donc ils ont dit que je n'étais pas là. Et donc, ils cherchaient à me remplacer. Voilà, donc ils cherchaient tout de suite à me remplacer. Ça m'a quand même bien fichu un coup, franchement. Et là, je suis restée, en fait, coucher 15 jours. Je ne suis pratiquement pas sortie de chez moi. Vraiment, je ne pouvais pas. Enfin bon, voilà, je ne pouvais pas. Ce n'était pas possible. J'ai... J'ai pris des médicaments. Le médecin que j'allais voir, le médecin généraliste, était homéopathe, ostéopathe. Il avait plein de compétences en plus, complémentaires. Il m'avait donné du safran pour la dépression. Donc, j'ai pris mon safran. J'étais déprimée et en même temps soulagée. Je me suis posé beaucoup de questions. Je ne savais pas ce que j'allais faire, qu'est-ce que j'allais devenir. J'étais seule à l'époque, c'est-à-dire que je n'avais pas de compagnon. Donc, financièrement, comment j'allais faire ? C'était compliqué pour moi. Bon, je savais que j'avais quelques mois tranquilles avec l'arrêt de travail. J'avais en tout cas au moins trois mois pour essayer de me remettre sur pied, tout en me disant comment je vais faire pour revenir. Bon, après, ce n'était pas l'actualité, c'était le temps de se poser cette question. Et là, j'ai décidé de m'inscrire à une salle de sport qui était à côté de chez moi. Et du coup, j'ai fait un peu de sport, un peu, beaucoup même. Et j'ai été soutenue par mes enfants, peu par des amis, hormis mon ami Odile. Voilà, bon, ça me suffisait, je n'ai pas besoin de plus, en fait. Je pense que les gens ne comprennent pas trop, en fait, ce que c'est que le born-out. Même moi, c'était difficile de mettre un mot dessus. D'ailleurs, le psychiatre a toujours appelé ça un syndrome d'épuisement professionnel. Donc moi, je ne me trouvais pas trop épuisée, mais bon, en fait, si, je l'étais vraiment. Et donc, je me suis beaucoup reposée, j'ai fait du sport. Trois mois se sont écoulés, je suis partie un mois chez Odile en Espagne. Ça m'a fait beaucoup de bien, j'ai complètement décroché. Et quand je suis revenue, j'avais donc de nouveau mon rendez-vous chez le médecin, prolongation d'arrêt de travail. Donc, ils m'ont arrêtée de nouveau trois mois. Et là, dans ces trois mois, j'ai décidé de retourner voir le psychiatre que j'avais vu en premier, qui a voulu que je fasse un séjour dans l'hôpital psychiatrique qu'il a, et je n'ai pas voulu. C'était trop pour moi, je n'ai pas voulu. Et d'autant qu'il m'avait parlé qu'il ouvrirait, ça c'était à peu près peut-être avril, quelque chose comme ça. J'étais arrêtée depuis mi-novembre. En avril, il m'a dit qu'il ouvrirait en septembre un hôpital de jour à Lyon. juste pour les gens qui étaient en born-out, que pour ça, avec des soins adaptés, etc. Et donc, je me suis accrochée à ça. J'ai rencontré mon compagnon à ce moment-là. Je pense que je l'ai rencontré parce que j'avais enlevé toute ma carapace, toutes mes barrières. Du coup, lui, ça a été aussi un soutien important. Enfin, c'est-à-dire que... Il m'a soutenue sans forcer. Il était là simplement. Et donc, l'été s'est passé. J'allais voir ce psychiatre tous les 15 jours peut-être. Trois semaines, je ne sais pas. Je ne me souviens pas du tout. Et ça m'a quand même beaucoup aidée. J'ai continué à être en arrêt. Mon généraliste, lui, a été parti à la retraite. Donc, c'est le psychiatre qui a continué mes arrêts de travail. De deux mois, trois mois. Et il a donc ouvert son hôpital. Alors, son hôpital de jour, finalement, n'a été ouvert qu'en janvier de l'année suivante. Mais il a ouvert des groupes de paroles. Et je me suis retrouvée avec des cinglés, comme moi, au groupe de paroles pendant l'été 10. Ça a été épique. Vraiment, franchement, le groupe de paroles. Il se trouve que sur ce groupe de paroles de 10, on est cinq, on est toujours très, très amis. Même si ça n'a pas forcément bien commencé. C'est-à-dire qu'on s'appelle d'ailleurs le groupe des dingos. Ça, ça a été un vrai du bien. Ça nous a fait du bien parce qu'on avait tous les mêmes préoccupations. Alors, tous les mêmes préoccupations, pas tout à fait, parce qu'on a des âges différents. On est deux à avoir plutôt autour de 55-57 ans. Après, il y en avait deux autour de 40 ans et puis 50 ans. Donc, on n'a pas les mêmes préoccupations à 55 ans. quand on est une femme que quand on a 40 ans et qu'on est un homme. Ce n'est pas du tout la même chose. Mais malgré tout, on s'est beaucoup retrouvés. D'autant plus que ces groupes de parole avaient lieu toutes les semaines. Donc finalement, il y a un lien qui s'est créé assez rapidement. Le psychiatre qui nous suivait a eu beaucoup de doutes. Il a dit, de toute façon, c'est du lien relationnel immédiat, mais ça ne continuera pas dans l'avenir. Et en fait, là-dessus, il s'est complètement trompé parce que ce n'est pas du tout la réalité. Et il a ouvert son hôpital de jour en janvier. Donc là, j'ai eu des soins entre trois et quatre fois par semaine. Donc, il y avait des jeux, il y avait entretien avec lui, entretien avec des psychologues. Il y avait de la relaxation, il y avait du Qigong, il y avait du sport, il y avait des exercices, plein de choses. Et ça, ça a duré pendant un an. Et j'ai été en arrêt de travail jusqu'en juillet 2020. J'ai eu un entretien en octobre, je crois, 2019. Et là, on m'a dit que certainement, je serais en invalidité, ce qui finalement m'arrangeait pas mal. On a validité parce que depuis tout ce temps, finalement, c'était pas mal de ne pas travailler. C'était même carrément bien. Alors, je ne dis pas que c'est difficile de terminer sa carrière professionnelle sur cette note, c'est-à-dire sur... un échec parce que c'était un échec. Je n'ai pas réussi à conserver mon job, mais finalement, je n'en étais pas tellement responsable. On ne voulait plus de moi, tout simplement. Bon, j'étais vieille, c'est sûr, 55 ans, carrément, on a un pied dans la tombe, pratiquement, en tout cas pour certaines personnes. J'avais fait... Tout ce qu'il fallait professionnellement pour démontrer que j'étais compétente, je l'avais prouvé pendant plus de 20 ans, je ne vois pas ce que je pouvais faire de plus, il ne voulait plus de moi. Ce n'était pas possible. La relation était terminée et je devais, moi, l'accepter, sans en souffrir, sans... C'est plus facile à dire qu'à vivre. Et sans... En essayant de ne pas trop avoir la haine, et j'ai surtout trouvé, je sais que je suis faite, moi, de beaucoup de résilience. J'ai eu des malheurs dans ma vie qui ont fait que j'ai remondi. Et ça aussi, finalement, j'ai abondi. Encore une fois, je ne l'ai pas voulu. C'est parce que je n'ai pas décidé d'être résiliente et de vouloir m'en sortir. Ça s'est fait un peu naturellement, je dirais. Il se trouve que j'ai été en invalidité, donc financièrement sécurisée. en tout cas jusqu'à ma retraite. J'avais fait un prud'homme. Le prud'homme, donc, ils ont voulu négocier. Donc, on a négocié. J'ai accepté une somme misérable par rapport à ce que j'avais demandé et par rapport à ce que ça valait. Mais ils ont fait une page de conclusion en disant qu'ils n'étaient pas du tout d'accord avec ce que je disais, que j'avais tort là-dessus, que j'avais tort là-dessus, que j'avais tort là-dessus. J'avais tort sur tout, en fait. Mais quand même, ils me donnaient une somme d'argent. Donc ça, ça m'a quand même beaucoup fait sourire parce que je me suis dit, si ils sont vraiment pas d'accord, pourquoi me donner de l'argent ? Et c'était la fin, en fait. C'était vraiment terminer ce chapitre-là. J'ai été en invalidité peu de temps après. Et il se trouve qu'avec mon compagnon, on a acheté une maison et on l'a toute réhabilité. Ça fait quatre ans. Et le burn-out, merci. Parce que si j'avais continué à travailler... Comme je travaillais, mon Dieu, je ne sais pas si je serai là aujourd'hui. Ce que j'ai vécu était très, très dur. Vraiment, j'ai beaucoup souffert. Mais je me dis que c'est bien que j'ai vécu ça, en fait. Oui, je ne sais pas si on peut dire que c'est bien. Oui, je pense que j'ai peut-être plus de... de profondeur. Et puis aussi, ça fait le ménage dans mes amis. Il y avait déjà eu un divorce avant, ça fait un petit ménage. Voilà, c'est fini de le faire. Ça a balayé toutes les miettes qui restaient, terminé. Et ben voilà, tant mieux. Finalement, voilà. Il y a eu plusieurs parties dans ma vie. C'était une partie de ma vie. Maintenant, j'en vis une autre qui est loin d'être désagréable et j'en profite pleinement. Tout en ayant laissé... mes vieux bagages derrière, qui ne me servent plus à rien aujourd'hui. Je lis toujours des livres sur management. Ça m'intéresse quand même toujours un peu sur comment ça se passe dans les entreprises, etc. Quand même, ça, j'aime bien. Mais c'est un peu de loin.