- Speaker #0
Bonjour, bienvenue à tous, à tous ceux qui se sont rendus physiquement dans la salle de l'Aubette et ceux qui nous écoutent via
- Speaker #1
Internet.
- Speaker #0
Première session de l'après-midi de ce Forum européen de bioéthique qui a pour thématique la santé mentale et la bioéthique. Je vais laisser tout de suite la parole à Catherine Rongière, qui est gynécologue, membre du conseil d'administration,
- Speaker #1
du conseil scientifique et à nos côtés au Forum européen de bioéthique depuis toujours. Catherine,
- Speaker #0
je te laisse la parole. Merci beaucoup Aurélien, merci à tous d'être présents et en visio aussi, je crois qu'il y a une visio directe. Donc, faut-il être fou pour être artiste ? Nombreux sont les artistes célèbres ou les grands savants qui auraient souffert de graves troubles mentaux. Donc, quelle part la folie tient-elle dans la créativité ? Pas de génie sans un grain de folie, aurait écrit Aristote. Honoré de Balzac et Virginia Woolf ont probablement présenté une psychose malinco-dépressive qu'on appelle aujourd'hui bipolarité. John Nash, un génie mathématicien, était atteint de schizophrénie. Paul Vernon était alcoolique, mais beaucoup d'écrivains étaient alcooliques. Antonin Arthaud souffrait d'hallucinations. Vincent Van Gogh aurait souffert d'accès psychotique, etc. Il existe une idée forte que la souffrance psychique serait le prix à payer. pour connaître un destin d'exception. Michel-Ange, Mozart, Nietzsche, Einstein, Hugo, tant d'autres prodigieux personnages ont-ils souffert de maladies mentales ? La créativité haut de gamme n'est-elle des désordres de l'esprit ? Mais la créativité ne s'exprime pas seulement dans le domaine de l'art, on la retrouve également dans d'autres champs, la science, l'industrie, la politique, et lorsque l'on s'intéresse à ces autres domaines, on s'aperçoit que les données sur la créativité et les troubles mentaux sont beaucoup moins consensuels. La créativité serait autant reliée à des mesures de psychopathologie qu'à des mesures de bien-être psychologique. Vous voyez que le champ est vaste et nous allons pour cela avoir la chance de pouvoir en discuter avec nos invités. David Gruson, qui est membre du comité de direction de la chaire santé de Sciences Po Paris, est fondateur de l'initiative Éthique IA. Gilles Berti, qui est professeur de psychiatrie et chef de service aux hôpitaux universitaires de Strasbourg, spécialiste des troubles de l'humeur et du TDAH de l'adulte, avec les travaux de recherche qui ont porté sur le processus de pensée pour les troubles bipolaires. Et enfin Anne-Marie Dubois, qui est médecin psychiatre, ancien praticien hospitalier à la CMME, à l'hôpital Saint-Anne, responsable de l'unité des psychothérapies à médiation artistique. parallèlement responsable scientifique et vice-présidente du musée d'art et d'histoire de l'hôpital Saint Anne et du centre d'études de l'expression. Malheureusement pour des raisons de santé Raphaël Gaillard ne sera pas présent ni en présence ni en visio. Et donc je vais laisser la parole justement à Anne-Marie Dubois parce que je crois qu'on aurait beaucoup à apprendre de l'historique en fait et de l'évolution des liens entre l'art et la folie.
- Speaker #1
Je vous remercie infiniment, je vous remercie beaucoup pour cette belle manifestation et je suis absolument ravie d'être là. Effectivement, les questions que vous soulevez vont rencontrer ce que je vais essayer de raconter, à savoir l'historique des liens ou des non-liens entre maladie mentale et... et création, tout en sachant que création et créativité, ce n'est pas du tout la même chose. En tout cas, le premier à avoir posé la question, c'est Aristote avec le problème 30. Et il disait très justement que pour être créatif, il ne fallait pas forcément être malade. mais qu'il fallait avoir vécu quelque chose qui pouvait avoir trait à une difficulté à un moment donné. Les grands épisodes psychotiques, schizophréniques, dépressifs, etc. ne sont jamais créatifs. Là-dessus, il faut être clair. Je peux vous en donner plein d'exemples. Mais si on revient à la psychiatrie, l'intérêt pour les productions des malades mentaux date de très longtemps, depuis à peu près le milieu du XIXe siècle. Art et psychiatrie, c'est une chose très ancienne et inscrite dans l'histoire de l'hôpital Saint-Anne, maintenant appelée GHU. depuis au moins le début du XXe siècle. Toutefois, cet intérêt, ou ce lien entre art et psychiatrie, a été très variable au cours des dernières années, car ce lien, art et psychiatrie, repose soit sur des croyances, soit sur des concepts théoriques différents. Au cours du XXe siècle, trois concepts furent au premier plan. Je vais y revenir. Ils parlaient des mêmes œuvres, des mêmes choses, mais avec des points de vue différents. Le premier, historiquement, ça a été l'art des fous. C'est ainsi que les psychiatres appelaient les productions spontanées. bien sûr, de leurs malades au début du 20e siècle comme l'ombroso, le docteur Marie, Réja, etc. C'était aussi le terme qu'a utilisé André Breton, le fameux surréaliste, qui a écrit un texte qui s'appelait L'art des fous ou la clé des champs. Parce qu'il s'est très vite passionné pour ce qu'il a rencontré dans les hôpitaux psychiatriques en termes de production et surtout en termes d'écriture automatique. Il a très vite lié les productions spontanées de certains malades mentaux avec le mouvement surréaliste et certaines expositions ont été organisées avec ces œuvres-là et des œuvres d'André Breton. jusqu'aux années 40, on parlait d'art des fous. Ils pensaient que, d'une certaine façon, la folie était visible ou repérable au travers des œuvres produites par les malades. Enfin, ça, c'était surtout du côté des psychiatres. Néanmoins, à cette époque-là, il y avait un réel intérêt accordé aux qualités artistiques de ces productions. C'est-à-dire que le côté test projectif n'était pas prévalent. Évidemment, vous pensez bien que je mets des guillemets au terme test projectif. Ensuite, sur deux périodes qui se regroupent chronologiquement, il y a eu l'invention du terme art brut par Jean Dubuffet et l'invention du terme art psychopathologique par les psychiatres. Dubuffet connaissait Breton, il connaissait aussi ce qui se passait à Saint-Anne en 1946 et en 1950, c'est-à-dire deux grandes expositions d'œuvres de malades à cette époque-là qui ont été très médiatisées. Simplement, de Buffet a voulu se singulariser par rapport au mouvement psychiatrique. Il a collectionné des œuvres dans l'Europe entière qui provenaient essentiellement d'hôpitaux psychiatriques, mais dans le même temps, il refusait d'appartenir au même mouvement que les psychiatres quant à l'intérêt qu'ils pouvaient avoir. C'était une position très ambivalente. étudier un échange de lettres avec Robert Vollmer en 1950, quand Dubuffet, Vollmer a voulu le convaincre de participer à cette exposition de 1950, et Dubuffet n'a pas voulu. Il voulait être le seul à pouvoir identifier certaines productions comme des productions d'art brut. Il faut dire que le point de départ de la définition de l'art brut, c'était un art exempt de toute référence culturelle. C'est-à-dire que ce n'est pas défini par un style. C'est défini par les caractéristiques de l'auteur ou l'origine de l'auteur. Pour les psychiatres, l'auteur était malade et pour Dubuffet, l'auteur était un culte, si je caricature. Dans les deux cas, c'était très stigmatisant. Très vite, il y a eu une assimilation dans l'idée, globalement, à la fois chez les psychiatres et chez les artistes, il y a eu une assimilation art brut et art défaut. Or, cette assimilation est fausse, et on essaiera de démontrer pourquoi, ou on en reparlera en tout cas. En tout cas, les œuvres de la collection Sainte-Anne dont je m'occupe, puisque je dirige le musée d'art et d'histoire de la France, L'hôpital Saint-Anne, depuis de nombreuses années, démontre très clairement que la plupart des artistes phares de la collection, s'ils ont eu des épisodes pathologiques à certains moments de leur existence, ce ne sont pas des artistes qui ont été écrits par les artistes. ce n'est pas pendant l'épisode aigu qu'ils ont pu être créatifs, et par ailleurs, ils ne sont en aucun cas exempts de références culturelles, comme les œuvres d'art brut tendraient à le faire penser, en tout cas, telles que Dubuffet le définissait. D'ailleurs, les productions les plus anciennes de la collection Sainte-Anne, comme les œuvres de la collection Prinzhorn à Heidelberg, qui étaient des œuvres spontanées, ces deux musées qui sont... qui se ressemblent, n'ont pas été réalisées sur l'incitation des psychiatres ou bien dans des ateliers. Ce sont des désirs spontanés des patients dans des périodes d'accalmie en général. Donc il y a eu l'art des fous et ensuite l'art brut. Et ce qui a été appelé à partir des années 1950 l'art psychopathologique. C'est d'ailleurs le terme de la thèse de Vollmer, qui était un de mes prédécesseurs et qui a écrit un livre très important sur cet art psychopathologique. Même si ce terme était utilisé et qu'il était à la mode à ce moment-là, Vollmer n'en oubliait pas pour autant. l'aspect esthétique et l'aspect humaniste de ces productions-là, ce qui a été beaucoup moins le cas par la suite. Car cette notion d'art psychopathologique entre les années 60 et 80 C'est radicalisé, c'est-à-dire que les psychiatres de ces époques-là voulaient ou pensaient pouvoir décrire des symptômes dans les œuvres des patients, comme on décrivait des symptômes en écoutant par exemple leur discours. Il crée ainsi une sorte de correspondance directe entre signes essentiellement plastiques et symptômes sur le domaine de la psychopathologie. Ce qui est au fond... méconnaître que le processus de transformation, c'est ce qui est inhérent à toute démarche créative et que la démarche créative n'est pas une projection de quelque chose d'intérieur. Autre chose qu'on a beaucoup remarqué dans le musée dont je m'occupe, c'est que lors des expositions, les visiteurs, par rapport aux visiteurs, ils étaient... C'est évident que le fait de savoir qu'une œuvre était regardée dans un musée hospitalier changeait le regard du spectateur. C'est un autre aspect des choses. C'est-à-dire qu'à partir du moment où on pense que telle ou telle œuvre a été réalisée par quelqu'un qui avait une pathologie mentale, le regard change. Parce qu'on ne regarde plus l'œuvre, on cherche la maladie. Or, les patients qui ont des compétences artistiques véritables ont un véritable style, qui ne s'exprime pas forcément toujours, comme je l'ai dit, pas forcément quand ils sont en période aiguë, mais ils ont un véritable style, ils peuvent avoir une véritable carrière artistique. Après, dans les années 2000, les choses ont quand même changé. La composante artistique des œuvres des patients, pour autant qu'ils aient une qualité artistique, ce n'est pas parce qu'on est malade qu'on va faire des choses artistiquement intéressantes. L'aspect artistique a été à nouveau considéré. Ce que le patient artiste représente... On a pu dire à ce moment-là, en tout cas nous à Saint-Anne, on a essayé de le démontrer, que ça n'était pas nécessairement la volonté de montrer quelque chose de soi. Ce peut être au contraire la volonté de montrer ce que l'on n'est pas, dans une perspective de recréation d'un monde idéal ou de réparation d'un mode dérangeant, comme une façon de se recréer soi-même, se réparer, parce qu'on est artiste, en construisant quelque chose de beau ou de joli. D'ailleurs, pour... pour essayer de démontrer cette chose qui paraît étrange au regard des fantasmes qui ont existé depuis un siècle. Nous avons organisé il y a quelques années une exposition qu'on avait appelée de façon provoquante Brut et Jolie En tout cas, l'émission du Musée d'art et d'histoire de l'hôpital Saint-Anne, qui a été définie dans son projet scientifique et culturel réalisé entre 2013 et 2014. 2013 et 2015 sont de cet ordre-là, c'est-à-dire montrer que les œuvres qui ont traversé le temps, les plus anciennes datant de la dernière partie du 19e siècle, ont été conservées car elles ont un véritable sens. D'abord, pour comprendre le processus de création, et je dis bien un processus de création de leurs auteurs. Et d'autre part, parce que ces œuvres, à partir du moment où elles s'inscrivent dans un processus de création, elles peuvent aussi s'inscrire dans une histoire de l'art et dans une histoire de l'esthétique. Donc, les expositions que nous organisons régulièrement, deux fois par an, dans le musée, ont pour but... Pas de montrer une maladie mentale, pas de montrer une folie, pas de montrer une angoisse au travers d'une production, mais de montrer au contraire, de redonner au contraire une place à ses œuvres en tant qu'œuvre et à ses auteurs en tant qu'auteurs de ses œuvres. Tant il est vrai que la personne, l'artiste malade rentre dans un processus de réduction. de création avec sa partie saine et pas forcément avec sa partie malade. C'est ainsi que notre mission est de déstigmatiser non seulement la maladie mentale mais aussi les productions des malades. Je vous remercie.
- Speaker #0
Merci infiniment. On pourra revenir aussi un petit peu sur l'arthérapie, qui est un autre sujet tout en étant un quand même. Gérard Garouste a été diagnostiqué bipolaire et lui-même écrit dans son livre d'intranquille, mais aussi... aussi dans ses interviews, que finalement, ces troubles freinaient dans sa créativité et que finalement, il a très peu gardé de choses qu'il avait faites pendant ses crises. Peut-être un ou deux, dit-il. Mais que c'est la maladie mentale qui enferme et pas le fait d'être à l'hôpital psychiatrique non plus. Donc, vous souhaitiez justement poser la question de ce ralentissement et de cette accélération dans les processus des troubles de l'humeur et leur lien avec la créativité. Je vous laisse la parole, professeur Berti.
- Speaker #2
Merci, merci pour l'invitation et cette occasion de partager ces choses. Je suis un spécialiste des troubles de l'humeur, des pressions, des troubles bipolaires. C'est sous cet angle-là que je veux apporter ma contribution. à la discussion. Je ne vais pas vous faire un cours sur les troubles bipolaires mais je rappellerai pour un minimum qu'on les appelle bipolaires parce que les patients présentent tantôt des... épisodes de dépression et tantôt des épisodes de manie, ou quand ils sont modérés, de paumanie, qu'on peut décrire comme l'image en miroir de la dépression, des symptômes qui, pour l'essentiel, sont l'opposé. Et cette question des liens avec la créativité est une question qui a été beaucoup abordée, qui a fait l'objet de travaux, travaux épidémiologiques, parce qu'effectivement, il y a ya quelque chose qui relie particulièrement le champ des troubles bipolaires à celui de la créativité. Par exemple, on sait que les personnes qui sont considérées comme des grands créatifs dans les différents domaines artistiques, on a fait référence à la peinture, à la littérature, le monde de la musique, dans une perspective plus moderne, le monde du cinéma, du théâtre, etc. Et bien, il y a... Il y a un lien. Ces grands créatifs ont plus souvent que le reste de la population des choses qui ont à voir avec les troubles de l'humeur. On sait qu'en particulier les troubles bipolaires sont aussi liés à des prédispositions génétiques, ça n'en fait pas des maladies génétiques. J'évoque ça pour dire aussi que cette question du lien avec la créativité se retrouve dans une perspective familiale. C'est-à-dire que quand on étudie dans la perspective des études qu'on appelle épidémiologiques, les familles de patients qui s'ouvrent de troubles bipolaires et qu'on les compare à des familles de sujets contrôlent des sujets qui n'ont pas de troubles bipolaires, on retrouve plus de gens impliqués dans différentes formes de créativité. On pourrait même élargir ce spectre-là au-delà de la créativité artistique, pour parler d'autres formes de créativité, la créativité scientifique, la créativité entrepreneuriale, la créativité leadership, etc. Il y a donc quelque chose qui lie les deux. En fait, On parle de trouble de l'humeur, mais c'est une vision un peu simplifiée des choses, à un degré de complexité largement répandue. C'est plutôt dire que dans un trouble de l'humeur, que ce soit une dépression ou un épisode hypomanoumaniaque, il y a trois dimensions du point de vue des processus psychiques qui sont à distinguer. Il y a ce qui se passe sur le plan, à proprement parler, de l'humeur, c'est-à-dire des états affectifs et des contenus affectifs des pensées. Dans la dépression, des choses tristes. Dans la manie ou l'hypomanie, des choses qui peuvent être euphoriques. Et puis, il y a un deuxième volet qui est celui de la motivation et de l'énergie. Dans la dépression, il n'y a pas de motivation, il n'y a pas d'énergie. Dans la manie, il y a beaucoup trop d'énergie et de motivation. Et enfin, il y a un troisième volet qui est celui... n'ont pas des contenus des processus mentaux, c'est-à-dire est-ce que je pense à des choses tristes ou est-ce que je pense à des choses gais, mais des processus de pensée eux-mêmes qui peuvent, dans la dépression, très souvent être beaucoup ralentis, au point même, à un certain moment, je dirais d'être au point mort. Et puis, dans les états hippomanes et maniaques, il y a au contraire une accélération de ces processus de pensée. Et c'est certainement aussi... Je dis aussi pour dire que je ne résume surtout pas cela, ça, qu'il y a là quelque chose qui est un des contributeurs qui favorise la créativité chez les personnes bipolaires. Mais comme l'a souligné Anne-Marie Dubois, il ne faut pas tomber du tout dans ce cliché qui est de penser que les grands épisodes, pour parler des épisodes psychotiques, même pour presser dans les trous bipolaires, les grands épisodes maniaques, sont des périodes productives et créatrices. Non. Mais il faut sortir de cette idée qu'il y a soit un état d'humeur qui serait l'état de M. et Mme Tout-le-Monde. D'ailleurs, M. et Mme Tout-le-Monde, on n'a pas des états d'humeur stables non plus, et puis que des grands épisodes. Il y a toutes les nuances de l'intensité, et c'est plutôt dans les phases de légère accélération. Les petits états hippomanes modérés, qu'il y a un phénomène d'accélération, de facilitation, de fluidification. Indépendamment de la création artistique, les patients vont bien pouvoir dire qu'ils vivent dans ces moments-là l'impression que tout est facile, fluide, clair. On s'empare d'un problème, on l'analyse très vite, les solutions coulent de source. Je m'intéresse et je vous parle aujourd'hui de tout ça parce que j'ai mené en... avec un certain nombre de collègues au fil de ma carrière, qui s'approche un peu de la fin, des travaux de recherche sur ces questions de processus mentaux dans les états maniaques. Et on a bien retrouvé ce qui vient étayer ce qu'a dit ma collègue, que ce phénomène d'accélération s'accompagne d'une fluidité, d'une plus grande facilité de la pensée, et donc on peut en faire l'hypothèse de la créativité. que pour autant que la symptomatologie reste encore très modérée. Dès que ça monte un peu plus en intensité, que le patient devient bien plus excité, ça va se traduire par le fait qu'il est volubile, que ses états d'humeur sont excessifs, changeants, etc. Dès qu'on est dans le trop, les processus de pensée s'embrouillent dans tous les sens et finalement là, il n'y a pas de productivité ou il y a une productivité anarchique. le plus souvent sans intérêt. Mais c'est certainement dans ces petits moments qui peuvent parfois être des états relativement durables. Il y a eu des biographies qui ont reconstitué ça de façon très claire, en montrant bien, par exemple, chez certains musiciens, leur capacité d'avoir une intensité de créativité et de composition concentrée sur l'une ou l'autre année de leur vie. Donc ça, c'est une perspective qu'il est, à mon avis, important de souligner, même si, du coup, les états affectifs... Les états émotionnels particuliers de souffrance, de détresse, de questionnement existentiel, douloureux ou de perspective au contraire, d'une intuition plutôt euphorique, de regard sur la vie et le monde, vont aussi nourrir la réflexion qui débouchera peut-être sur la création. Mais cette question des processus de pensée est certainement importante. D'ailleurs, ceci nous a... Amener parce que par contiguïté, quand on s'intéresse aux troubles de l'humeur, on est amené à s'intéresser aux troubles des physiques de l'attention chez les patients adultes. Moi, je suis un psychiatre d'adulte, parce que les deux sont relativement souvent associés, en tout cas beaucoup plus que ce que voudrait une simple coïncidence. Et c'est intéressant de voir que les mêmes outils cliniques que nous avons pu construire, notamment une échelle d'évaluation, pour évaluer cette accélération des pensées, On utilise d'ailleurs le terme tachypsychie tout comme les cardiologues parlent de tachycardie quand le cœur bat trop vite, mais on parle de tachypsychie quand la pensée va plus vite. Mais on retrouve des choses de cet ordre-là de façon très marquée, aussi chez les personnes qui ont un trouble déficit de l'attention et de l'hyperactivité. Ils sont aussi des personnes qui peuvent avoir des caractéristiques de créativité importantes aussi. Ce qui montre le lien, d'ailleurs c'est plus anecdotique parce qu'on n'a fait qu'un travail là-dessus, c'est présent aussi ces phénomènes de trop penser et penser trop vite chez les gens qui ont des insomnies d'endormissement. Ils n'arrivent pas à s'endormir parce qu'ils pensent trop le soir. On sait qu'il y a des fois des choses un peu circonstancielles, mais il y a des gens qui ont des problèmes d'insomnie chronique et qui pensent vraiment beaucoup trop. Alors ça ouvre une perspective dans laquelle je ne m'engouffrerai pas, qui est ce qu'on fait quand on ne dort pas. et ce qu'on crée. Certains grands créatifs vous diront que leurs nuits ont été occupées à cela aussi. Voilà le caractère que je voulais vous apporter et sur lequel on pourra revenir.
- Speaker #0
Merci infiniment. Je voulais donc m'adresser à David Gruson sur les fous des maths. Alors vous allez comprendre pourquoi. En préparant cette modération, en fait, j'ai revu, même si je connaissais. Alors je vous parle de Georges Cantor, qui est un Allemand qui a travaillé sur l'infini et transformé le fondement des mathématiques dans la deuxième moitié du 19e siècle, qui a terminé ses jours à l'asile. Kurt Godel, dont je vous conseille de lire La déesse des petites victoires de Yannick Granek, qui a un magnifique livre sur ce qu'il a été, même s'il a été relativement discret, mais qui a quand même été connu pour son double théorème d'incomplétude et qui était convaincu qu'il y avait des fantômes dans l'université de Princeton et qui surtout est mort de faim, en fait, puisque quand sa femme est décédée, qu'elle ne goûtait plus ses plats, il arrêtait de manger et il faisait moins de 30 kilos quand il est... quand il est décédé et persuadé qu'on l'empoisonnait. John Nash, dont vous avez certainement vu le film Un homme d'exception avec Russell Crowe, ce maticien américain qui souffrait de schizophrénie. Et puis Gregory Perelman également, qui a résolu la conjecture de Poincaré, qui s'est complètement isolé, qui a coupé quasiment tout contact avec le monde extérieur, qui a refusé la médaille de Fields, un million de dollars qui a été donné par... La clé Mathematic Institute qui prétextait que comme il savait gouverner l'univers, il n'avait pas besoin d'argent. Donc pour moi les maths, l'intelligence artificielle, tout ça, ça fait partie un peu d'un système qui m'est inconnu, un très peu où j'ai beaucoup de mal à... Et justement, la folle histoire de l'irruption de l'intelligence artificielle, est-ce qu'elle peut être à la fois permettre de démultiplier la créativité ou au contraire la bloquer ?
- Speaker #2
C'est une question très profonde. Merci.
- Speaker #0
A Aurélien Spénoïd, il serait un disant de leur invitation. Ça doit être la sixième année que je viens au Forum européen de bioéthique et à chaque fois, vous me posez des questions de plus en plus loin de mon domaine. Mais en fait, quand j'essaie d'y répondre, à chaque fois, ça me fait du bien. Et en plus, cette année, il y a des psychiatres dans la salle, donc je parle sous leur contrôle. Et ce, d'autant plus que vous avez à côté de moi les représentants de deux des établissements qui sont les plus avancés sur le recours à l'IA en santé mentale. Ce n'est pas l'objet de la session, mais il y a beaucoup de cas d'usage de recours à l'intelligence artificielle dans la prise en charge des patients, les agents conversationnels dans le champ de la santé mentale, les techniques de reconnaissance profonde d'images pour aller détecter les facteurs d'émergence des troubles neurodégénératifs en amont. Mais ce n'est pas ça le sujet, évidemment, vous ne vouliez pas me mettre dans ma zone de confort. Vous m'amenez sur le terrain de la créativité. Quand je réfléchissais à créativité, IA et santé mentale, j'avais deux ordres de réflexion. Le premier, pour vous partager une expérience, parce qu'en fait, cette année, les 60 ans de l'agent conversationnel Elisa. Et c'est cette année, évidemment, aussi, quand on se projette en 2025, l'année de la percée. Chez GPT, maintenant, vous avez vu DeepSeek, qui est le système d'agents conversationnels chinois. Ça date très vite, tout ça. Mais ce qu'on a peut-être un peu oublié, c'est qu'en 1965, un algorithme lycéen de génie qui lui était un vrai mathématicien, Joseph Weizenbaum, élabore l'agent conversationnel ELISA. Alors, il a une vie incroyable. Weizenbaum, il fuit l'Allemagne de parents juifs en 1936 et puis il devient chercheur au MIT et il met en place cet agent conversationnel qui... Et il met en jeu une expérience, alors que sans doute, aujourd'hui, on considérerait comme plus tout à fait politiquement correcte. Il prend un groupe de 100 dépressifs que vous n'êtes pas, parce que vous êtes au Forum européen de biéthique. Mais essayez de vous représenter un peu l'idée. Donc, il y a le groupe A, le groupe B. Et il écrit un programme en disant, voilà, vous allez échanger des messages écrits avec Elisa, qui est une psychothérapeute rogérienne. Alors, vous m'expliquerez peut-être, professeur, ce que c'est. Et vous devinez la suite de l'expérience, le groupe A échange vraiment des messages avec une vraie psychothérapeute et le groupe B échange des messages avec l'agent conversationnel Elisa. On est en 65, c'est évidemment pas du tout ChatGPT, c'est des questions préenregistrées. Comment allez-vous ? Et la famille ? Et le seul truc que peut faire Elisa, c'est que quand je lui amène une réponse, il le reformule. Je suis un petit peu fatigué cette semaine. Vous êtes un peu fatigué mais... Pourriez-vous m'en dire davantage ? Vous voyez, des questions de ce type. Et à la fin, Weizenbaum fait une enquête de satisfaction et il demande au groupe A et au groupe B Est-ce que ça vous a fait du bien ? Évidemment, vous avez deviné la chute, c'est que le taux de satisfaction des deux groupes est exactement équivalent. Et donc, du coup, il pourrait en conclure, Weizenbaum, à l'inutilité radicale de la psychothérapie, ce que je ne ferai évidemment pas du tout devant vous, j'ai beaucoup de respect pour elle. la santé mentale, mais il va plus loin. Et donc il reprend le groupe B, celui qui a joué avec l'agent conversationnel, et il leur demande, est-ce que vous aviez réalisé que l'agent avec lequel vous interagissiez n'était pas un humain ? Et en fait, dès 1965, deux tiers des participants avaient réalisé effectivement que ce avec quoi ils échangeaient, sans trop en comprendre la nature, n'était pas humain. Et donc ce sur quoi je veux venir, c'est que quand on se projette 60 ans plus tard, c'est que... On a maintenant des opérateurs de ce type qui sont immergés très profondément dans chacun des ressorts de notre vie courante. Vous avez vu les études qui sont sorties très récemment. Vous avez 40% de nos enfants qui utilisent ChatGPT et 90% tous les jours. On a des outils de ce type qui se sont immergés dans chacun de nos réflexes de création, de production. Et avec sur ces points, évidemment, je serai incapable de vous en expliquer les effets. sur le plan d'un santé mentale, si ce n'est pour vous inviter à lire L'Homme augmenté de Raphaël Gaillard, et avoir une réflexion qui est une réflexion un peu partagée, peut-être avec Aurélien qui voudra réagir. On a aussi cette petite activité d'auteur de fiction. Alors moi, je suis un auteur, mais sous contrainte. Et les livres, les fictions que j'ai écrits sur l'IA, je les ai écrits en réaction à des contextes de contrainte. Et ce qui me semblait intéressant comme fil peut-être à tirer, c'est qu'il faut sans doute mettre en discussion la notion que l'éruption de tous ces objets viendrait restreindre nécessairement notre champ de créativité. Pour une partie, oui, sans doute. La réflexion pré-mâchée, des systèmes qui sont des robots pré-entraînés, qui ne produisent que sur la base de données de matière première qui leur sont fournies. Et pour une autre, oui, effectivement, ces agents informatiques créent. Et on a là une forme de plus en plus rapide, évolutive, de créativité non humaine, qui nous interpelle et qui, d'une certaine manière, prend de plus en plus d'espace. à mesure que peut-être se réduit notre espace de créativité propre. Et puis de l'autre côté, l'apparition de ces systèmes d'IA et de cette créativité sous contrainte peut-être laisse penser que dans le ressort de la créativité ou de la création, la contrainte est aussi créatrice. Et notamment dans l'interaction avec la... la machine ou l'objet machine, la contrainte qu'induit la machine est aussi source de créativité. Pour préparer la session, j'ai discuté avec un ami à moi qui est en fait un grand compositeur et interprète d'un instrument de musique qui est assez peu connu, qui s'appelle le cristal baché. Alors ça s'écrit B-A-S-C-H-E-T. Pour vous figurer l'instrument, si vous me réinvitez la septième fois, je lui demanderai de venir et de jouer du cristal baché. En écho exact à ce que vous disiez, Madame, les frères bachés, c'était des ingénieurs qui étaient spécialisés dans la fabrication de grandes structures à partir de métal et de verre. Ils ont fait comme ça des objets en produisant de la vibration, la musique créée par frottement. mais sans avoir d'intention de création. C'était un geste de création artistique. Et donc ce compositeur-interprète qui s'appelle Michel Deneuve est reparti d'une de leurs créations. Alors il faut se figurer le cristal bâché, en fait c'est une structure en métal avec des tubes de verre en cristal. Et la manière de produire du son, de faire frotter les doigts sur le tube. Et vous avez en fait les concepteurs même, les créateurs même de cet objet en métal pensaient que la gamme de son qu'il était susceptible de produire était extrêmement étroite. Et en fait cette interprète a inventé de nouvelles techniques de frottement très humaines pour pouvoir produire un éventail de son qui a porté l'instrument très au-delà de lui-même. Et il a créé un répertoire au cristal baché à la fois en propre et en adaptation. Par exemple il a adapté autre... artistes avec des sujets de santé mentale, tout le répertoire d'Eric Satie joué au cristal. Et donc ce que je veux dire à travers cet exemple-là, c'est que peut-être l'IA de 2025, si on l'apprend bien, ça peut être notre cristal bâché. C'est-à-dire qu'elle peut nous ouvrir des spectres de créativité qui sont tout à fait majeurs. C'est-à-dire de la même manière que vous avez aujourd'hui 10% de la population de l'Inde, C'était l'étude de cette semaine. 10% des contenus qui vous sont proposés sur Deezer, qui a eu le mérite, Deezer, de rendre public ces chiffres, 10% des contenus qu'on vous envoie dans une boucle Deezer sont aujourd'hui intégralement produits par IA. Fermeture de la créativité et de l'autre côté, extension des champs des possibles. Quelle est la voie entre les deux ? Quel est l'espace qui nous... qui nous est préservé et qui nous est réservé, c'est à nous de le construire. Et en fait, dans le fil rouge des échanges qu'on a dans ce forum sous votre égide, il y a une notion qui a été créée ici, dans cette pièce, à partir de nos discussions, c'est la notion de garantie humaine de l'IA. Comment est-ce qu'on garde l'humain au centre du dispositif ? Et donc 2025, c'est l'année des 60 ans d'Elisa, mais c'est aussi l'année... de l'entrée en vigueur du règlement européen sur l'intelligence artificielle. Cette notion de garantie humaine, qui est une AOC du Forum européen du Ethique, c'est devenu un principe juridique qui entrera en dur dans le droit européen le 1er août prochain et qui va imposer pour tous les agents conversationnels en santé d'apporter la preuve dans les domaines à haut risque, la culture étant considérée, c'est intéressant, un domaine à haut risque, à cause de l'EI Act. Apporter des preuves de garantie humaine de l'IA, c'est-à-dire de supervision régulière. On va devoir, quand on écoutera un contenu, être informé de ce que ce contenu a été créé par une machine sans supervision humaine. Et on va avoir en santé, dans l'IA en santé mentale, à superviser ces outils. Et j'en terminerai par là, et pardon d'avoir été un peu long sur le premier propos, c'est qu'il ne faut pas entendre cette notion de garantie humaine, et c'est là que vous avez compris un point central, comme une notion un peu monolithique de mise sous surveillance de tous ces algorithmes. Vous voyez, on n'est pas en surplomb. Ce que l'on opère avec Ethic IA, c'est des dispositifs de collégialité de garantie humaine, associant des professionnels de santé, des concepteurs de systèmes d'IA et des représentants des patients, pour avoir un dialogue collégial autour de la conception et de l'usage de ces outils. Et en fait, on s'aperçoit assez souvent que la machine est supérieure à l'humain, dans des interprétations diagnostiques, dans des synthèses de textes, mais d'une certaine manière, la performance brute... elle est à la fois intéressante à évaluer, c'est pas ce qu'il y a de plus important, c'est la synergie homme-machine qui produit le meilleur résultat au final, et on en a maintenant des résultats. On a publié en juillet une étude avec le think tank Terra Nova sur l'IA en santé, alors c'est un domaine qui n'est pas la santé mentale. Une étude un peu contre-intuitive sur les systèmes d'IA d'interprétation de mammographie. Et en fait on s'aperçoit que le système peut avoir une performance diagnostique supérieure à l'humain en performance pure, mais que néanmoins si on le laisse tourner en dérivant, l'humain qui au départ a des performances diagnostiques dans l'absolu inférieur va éviter des grosses bêtises que l'IA pourrait faire. Et qu'en réalité quand on fait le couple IA... plus humain, la performance diagnostique des deux est supérieure de 25% à celle de l'humain seul. Et donc vous voyez, on arrive à des combos qui génèrent une forme de créativité dans la prise en charge médicale supérieure. C'est cet alliage-là, cette alliance qu'il faut réussir à essayer de construire. Et vous avez compris que ce n'est pas une petite affaire.
- Speaker #1
Merci Aurélien, tu voulais prendre la parole.
- Speaker #2
C'était peut-être juste pour donner une perspective encore un tout petit peu différente, puisque la question, c'était la question de la folie et de la créativité. C'est vrai qu'on a tendance parfois à cantonner la folie à la psychiatrie, mais c'est vrai qu'en neurologie qui est ma discipline, on a parfois des passerelles qui ne sont pas si lointaines. Et je me dis que vous donner quelques exemples pourront peut-être aussi susciter des questions dans le public ou chez les personnes qu'on vient d'entendre et qui sont tout à fait passionnants. C'est vrai qu'en... D'abord, qu'est-ce que c'est que la créativité ? Peut-être que la créativité, c'est le fait de décrire le réel sous un angle un peu différent. C'est une définition qui n'est pas une définition universelle, c'est peut-être juste la mienne. Mais dans ce cadre-là, le fait de voir les choses différemment, c'est quelque chose auquel on peut accéder dans un certain nombre de situations neurologiques. Je vais vous en donner quelques-unes. On parle beaucoup en ce moment, ça marque un peu l'actualité, les patients qui ont une maladie de Parkinson. et que l'on va traiter avec des médicaments que l'on appelle des agonistes de la dopamine. Alors il n'y a pas le mot agonie dans agoniste, agoniste ça veut dire que ça agit comme la dopamine. Et ça défraye la chronique parce qu'en ce moment on entend parler de certains excès avec notamment ce patient qui tuait des Ausha ou de plus en plus de Ausha en fonction du taux de médicaments qu'il recevait. Mais ce qu'on sait nous en tant que neurologues et les psychiatres le savent tout autant, c'est que les médicaments agonistes de la dopamine sont susceptibles d'induire une augmentation. Alors, on parle de créativité. Est-ce que c'est vraiment de la créativité ? Mais dans les pathologies mentales, ce n'est pas toujours non plus au sens strict de la créativité. Mais là, c'est quelque chose dont on avertit le patient parce qu'on lui dit pour une fois, vous allez avoir un médicament qui peut avoir des effets secondaires, qui peuvent être relativement bénéfiques. Et il n'est pas rare. Moi, je me souviens quand j'étais interne aux hôpitaux de Strasbourg, je travaillais avec Christian Maresco. Et en fait, la question de la créativité m'intéressait beaucoup. Et il m'avait donné... des cartons, plusieurs cartons de production artistique de patients parkinsoniens. Et il est vrai qu'on le constate, les patients reviennent avec parfois, ils se sont mis à la peinture, ils se sont mis à la photographie, parfois avec du talent, parfois même jusqu'à exposer ou vendre des œuvres par la suite, alors qu'ils n'avaient pas d'appétence particulière. Donc, vous voyez déjà qu'on n'est pas forcément toujours dans le registre directement de la pathologie mentale ou de la santé mentale, mais pour peu que la biochimie du cerveau soit un petit peu modifiée, on peut avoir des... une créativité un peu différente. Il y a d'autres exemples. C'est vrai que voir le monde autrement, c'est aussi toute la question de la neurodiversité, d'être plus ou moins éloigné dans la courbe de Gauss de ce qu'on appelle le trouble du spectre autistique. Et il est vrai aussi que chez un certain nombre de patients... qui présentent un trouble du spectre autistique sans déficit intellectuel, puisque là encore, lorsque la pathologie est trop marquée, il est très difficile de produire quoi que ce soit malheureusement, et bien chez ces patients-là, on peut observer aussi, dans leur manière tout à fait normale pour eux de voir le monde, qui est une manière qui nous, nous paraît anormale, et que l'on va donc interpréter comme quelque chose d'artistique, tout simplement parce qu'ils ont une perception du monde qui est un peu différente. J'emprunte aussi un autre exemple que j'avais entendu de Jean-Claude Amaisen. qui décrivaient une autre forme de créativité, notamment chez certains patients qui ont des difficultés à reconnaître les visages. On appelle ça la prosopagnosie. Il prenait l'exemple de deux personnes connues, Jane Goodale, qui est donc la primatologue dont on a parlé brièvement hier, et Oliver Sacks, qui était un neurologue, qui lui aussi est allé explorer les confins de ce qu'il fait l'être humain. Et en fait, tous les deux avaient au départ cette difficulté à reconnaître les visages. Et on se posait la question de savoir si le fait... d'avoir de manière native cette difficulté à reconnaître les émotions chez les autres, ça ne pouvait pas aussi inciter la personne qui n'est pas totalement malade d'aller s'intéresser à des champs, d'aller explorer des choses, que ce soit chez le chimpanzé ou que ce soit chez l'être humain, de s'intéresser et finalement de créer aussi un art nouveau. Et puis les deux derniers exemples, l'épilepsie, ça aussi c'est le fait de pouvoir vivre une expérience sensorielle. qui n'est pas du tout normal, on peut sortir d'une crise d'épilepsie avec une perception du monde qui est un peu altérée et ça peut donner lieu à une forme de création artistique par la suite. Et le dernier exemple qui est là pour le coup des patients qui n'ont pas directement de registre psychiatrique, mais je donne l'exemple d'une patiente que je suivais pour des douleurs chroniques et chez qui on a fait un certain nombre de psychothérapies, qui a fait de l'art-thérapie et qui finalement est allée puiser. dans l'expérience qu'elle avait de sa douleur et dans les ressources qu'on a mis à sa disposition, l'envie de créer, de faire de la poésie. Et maintenant, elle se produit, elle fait des poèmes qui sont a priori reconnus comme de grande qualité. Tout ça pour dire que dans le spectre de la créativité, il y a effectivement ce qui est très saillant et très visible, ce qui est de l'ordre de la folie ou de la pathologie mentale. Mais il y a aussi tout un nuancier qui va de simplement l'expérience vécue. qui n'a rien de bouleversant sur le plan de la biochimie du cerveau, jusqu'à des patients qui vont avoir fait une crise d'épilepsie, un accident vasculaire cérébral ou bénéficier d'un traitement spécifique qui vont susciter cette envie. Après, la question, est-ce que c'est vraiment de l'art ? Ça, je ne me permettrai pas. Je ne suis pas suffisamment avancé pour vous dire ça, mais c'était simplement pour vous apporter une petite dimension supplémentaire.
- Speaker #1
Oui, c'est intéressant parce que je m'étais posé la question, par exemple, pour les grands artistes, les grands acteurs, les réalisateurs qui font finalement des choses incroyables. qui ont des idées folles, en fait. Je me dis ça aussi, c'est quand même de la création. Alors justement, je voulais revenir sur ce que vous disiez. Quand vous disiez créativité et création, ce n'est pas la même chose. Vous pourriez nous en dire plus ?
- Speaker #3
Oui, peut-être, oui. Déjà, j'aurais voulu, par rapport à l'instrument que vous avez décrit, qui est tout à fait... passionnant vous savez que mozart avait créé le glace harmonica et le glace harmonica ça ressemble exactement à ce que est ce que vous avez décrit content de vous présenter je lui demanderai de devenir le présenter à saint anne il ya même des il a écrit pour glace harmonica donc on peut trouver des disques des infos pas beaucoup mais il y en a quand même donc c'est intéressant comme filiation voilà Par ailleurs, la création c'est le fait d'arriver à produire quelque chose. La création, la première création c'est le monde, Dieu a créé le monde, c'est d'arriver à produire quelque chose. La créativité, je ne sais plus qui en a parlé entre vous, c'est davantage une potentialité à rendre, à transformer. C'est un processus la créativité, c'est pas le fait de faire. Donc c'est comme dans les psychothérapies, c'est pour ça effectivement vous utilisiez tout à l'heure le terme d'art-thérapie, c'est pas l'art qui peut apporter un bénéfice quelconque, c'est le fait de s'engager dans un processus de création, c'est pas du tout la même chose. Donc la différence entre créativité... et création c'est ça par ailleurs il y a eu une professeure de psychiatrie je ne sais plus de Montréal qui s'appelle Charlotte Vadel qui a fait une méta-analyse sur les processus de création et qui a qui a essayé qui a étudié énormément de d'articles sur le sujet et qui parlent de la créativité, pas uniquement au sens de la production artistique, qui parlent de la créativité au sens d'être productif, d'être inventif, donc la créativité c'est quelque chose qui peut se... s'appliquer à énormément d'activités. Donc, effectivement, ce qui est, pour revenir à ce que vous disiez aussi, c'est que tout est dans la nuance. J'aime bien le terme de nuance, parce que... Et ce processus de transformation qu'on peut associer à la créativité, vous parliez des difficultés par lesquelles était passée telle ou telle personne, je crois que c'est effectivement dans l'après-coup, et pour autant qu'on peut piocher dans sa propre inventivité, créativité, qu'on peut transformer ce qu'on a vécu de désagréable ou pathologique en quelque chose d'autre. C'est ça le processus de transformation ou de création, ce qui ressemble un peu au processus psychothérapeutique.
- Speaker #1
J'ai une question justement, alors j'ai plusieurs questions, mais j'en ai une sur est-ce qu'il faut finalement, est-ce qu'il faut avoir vécu quelque chose de terrible, est-ce qu'il faut avoir une maladie grave, est-ce qu'il faut... avoir eu dans l'enfance des difficultés. Enfin, je veux dire, est-ce qu'une personne qui aurait vécu finalement une vie tout à fait banale, ordinaire, sans forcément de difficultés, pourrait créer ?
- Speaker #4
Vous n'avez pas une autre question ? Parce que moi, j'aurais de la peine à répondre. D'abord parce que on sait par exemple quand on prend les choses sous l'angle de qu'est-ce qui a été traumatisant dans la vie de... quelqu'un, qu'il y a des notions qui peuvent être extrêmement relatives. Et donc, à la question de savoir si une vie qui est une mer d'huile, où il n'y a jamais eu la moindre vague, le moindre remous, d'abord, est-ce que ça existe ? Et puis, est-ce que ce qui est une petite vague pour quelqu'un peut être une grosse vague pour un autre ? Est-ce que c'est déterminant pour qu'à un moment donné, ça mobilise des choses ? Comme ça, on serait tenté de dire oui, mais je ne suis sûr de rien.
- Speaker #3
Moi je pense véritablement que le terme de traumatisme ça veut pas dire grand chose dans l'absolu. Il y a des choses qui sont traumatiques pour certains et pas du tout pour d'autres. Il y a dans une même famille des enfants qui vivent les mêmes... dysfonctionnements et qui les appréhendent de façon totalement différente et Dieu merci il n'y a pas de avec les étudiants dont je m'occupe je fais toujours extrêmement attention à leur façon d'être dans une situation une causalité directe. La causalité, elle est toujours multiforme. On ne peut pas être dans une causalité directe. Donc, pour moi, il n'y a pas un événement plus qu'un autre. C'est... C'est... les gènes, il y a des gènes positifs, des gènes... ou des éducations, ou... et puis pour une même éducation, il y a des gens qui captent, il y a des gens qui ne captent pas. Je ne pense pas qu'il faille forcément avoir eu ou avoir... des difficultés particulières pour être très créatif ou faire des créations extraordinaires. A l'inverse, tous ceux qui ont des pathologies psychiatriques ne sont absolument pas... Il n'y a pas de proportion supérieure de créateurs chez les gens qui ont des pathologies psychiatriques. En soi, ça n'est pas un facteur favorisant.
- Speaker #2
Mais moi, je poserais la question à David, parce qu'il a écrit plusieurs livres qui font oeuvre quand même d'une grande créativité et d'un grand talent. Et je pense qu'il l'a dit avant qu'il l'a fait sous contrainte, c'est-à-dire qu'en... En fait, c'est la vie qui lui a presque imposé, enfin qui en tout cas... imposé à son esprit probablement un petit peu malade d'aller écrire quelque chose. Quand tu disais la contrainte, peut-être que c'est de ça dont il s'agit.
- Speaker #0
Merci de la question Aurélien. Vous avez vu, j'ai pris mes distances vis-à-vis de lui. On n'a pas répété, mais ça me permet, ça me fait du bien en général, le forum de biotique. Et là, ça va me permettre d'exorciser une expérience traumatisante avec des neurologues et des neurochirurgiens. Il se baisse les pensées. C'est pour ça qu'il faut garder la distance. Il y a quelques années, il y a plus de dix ans, j'étais directeur du CHU de La Réunion. Et donc on structurait la filière de neurochirurgie du CHU et donc je fais venir une délégation de grands spécialistes de neurochirurgie et je leur fais un programme de visite du CHU avec des activités professionnelles et puis je leur fais voir des choses un peu hors cadre. Et on se retrouve à dîner, ils étaient trois autour de moi et moi j'étais au milieu. Et à un moment, il y a un des trois qui me dit mais vous êtes un peu original. Et là, il y a une série de questions de plus en plus étranges. D'après la question, vous êtes droitier ou vous êtes gaucher ? Oui, je suis gaucher. Et vous jouez au tennis ? Oui. Mais vous jouez de quelle main ? Je joue de la main droite. Et vous faites du foot ? Oui, je joue du foot. Mais vous jouez de quel pied ? Je suis gaucher. Et la réponse était... C'est très intéressant, avec une réflexion sous-jacente que peut-être Aurélien va réussir à décrypter sur les hémisphères du cerveau. Mais en tout cas, pour moi, c'était un profond moment d'angoisse parce qu'ils avaient quand même des couteaux en main. On était à table et je me suis dit là, il va y avoir une ponction encéphalique en temps réel. Donc, ça me fait du bien de vous partager cette expérience. Tu auras peut-être une explication à ça, parce qu'il y a des hémisphères plus de la créativité, du sérieux, c'est ça le rationnel ?
- Speaker #2
Alors la phrénologie de la création artistique, je crois qu'on va tous abandonner cette hypothèse-là, c'est des choses beaucoup plus compliquées. Mais non, non, effectivement, il y a parfois, en tout cas à la question de Catherine, je pense que sans expérience, personne n'a rien à raconter, personne n'a rien à créer. L'expérience, elle peut être extérieure, elle peut être tout aussi intérieure pour certains patients, avec une perception du monde. Mais je pense que le jour où un artiste ou quelqu'un crée quelque chose qui a une utilité ou qui parle à la personne qu'il regarde ou qu'il écoute, c'est que forcément, il y a une forme de transmission d'une certaine expérience. Après, c'est beaucoup plus compliqué de définir ce qu'est l'expérience.
- Speaker #1
J'avais une question pour David Grison par rapport à la technologie, à l'IA et au matériel. Est-ce que ça... Est-ce que ça ouvre des perspectives de créativité à des gens qui n'en avaient pas jusque-là ? C'est-à-dire qui vont leur donner les moyens de pouvoir s'exprimer avec un outil qu'ils n'avaient pas jusque-là ?
- Speaker #0
Oui, c'est ce que Raphaël Gaillard montre bien dans son ouvrage, notamment une augmentation du geste, une augmentation des capacités de création. Et après, toute la difficulté est là. C'est-à-dire que le... Jusqu'où va la machine dans la création ? Est-ce qu'elle se substitue à moi ou est-ce que c'est finalement un composé ou un composite ? Et vous voyez qu'on est là dans un sujet qui va devenir de plus en plus celui de notre temps, qui d'ailleurs n'est pas complètement nouveau. Et quand on parle, vous voyez dans les idées qui me venaient en venant vous rejoindre, Autour de la notion de création, dans le champ lexical de la création, on n'est pas très loin du mot créature. Et là, évidemment, l'ouvrage de fiction qui vient tout de suite en tête, c'est Frankenstein. Et dans notre esprit collectif, quand on parle Frankenstein, quand on évoque le mot Frankenstein, on a d'abord l'image de la créature. Alors que dans le livre de Marie Shelley, Frankenstein, c'est le concepteur, c'est le créateur. Et donc, vous voyez, dans... les choses qui impriment et le résultat qui est produit, on a de plus en plus une image composite. Après, beaucoup plus concrètement, je crois beaucoup à la création à partir de l'intelligence humaine et que cet outil d'IA est un outil d'aide à la fabrication ou d'aide à la création. Je vais prendre un exemple très prosaïque. Je suis par ailleurs directeur du programme santé à domicile de la Poste et en fait dans un atelier comme ça de réflexion avec des acteurs de systèmes de santé on a réfléchi à ce que pouvait être des cas d'usage de l'IA générative ou l'IA qui génère des contenus dans le domaine de la santé et c'est comme ça à partir des demandes des professionnels qu'on a inventé un outil de l'IA de synthèse du dossier médical qui en fait compacte les documents, produit une synthèse. Il n'a pas encore été testé en psychiatrie, il faudrait le faire. Je pense que c'est un bon, si vous voulez, on en parlera professeur, un bon cas d'usage de pertinence. Mais ça a été fait sur des... Le champ cardio, on va l'avancer dans le domaine de l'urgence pour gagner du temps. Et c'est quand on a expliqué aux professionnels quels étaient les cas d'usage intéressants de l'IA générative, la synthèse du dossier médical. Bon sang, mais c'est bien sûr. Et ça a été créé, après l'IA l'a mis en œuvre et après rétroagit sur la pratique médicale.
- Speaker #1
C'est une vertige, je voulais aussi poser une question parce que j'ai beaucoup de patients. qui viennent me parler de leurs enfants hyperactifs, avec cette sous-entendue qu'ils ont peut-être un QI supérieur aux autres. Je crois que vous avez beaucoup de passion et que vous en voyez souvent. Qu'est-ce que ça vous inspire par rapport à cette idée que ces enfants seraient géniaux, d'une certaine façon ?
- Speaker #2
Oui, alors je rappelle que du coup... Du coup, moi, je ne suis pas psychiatre d'enfants et d'adolescents, donc je ne les vois pas, ces enfants-là. Par contre, je les vois soit parce que je vois un parent qui me parle de leurs enfants, soit que je les vois comme jeunes adultes et qu'ils me parlent de ce qu'a été leur histoire quand ils étaient dans l'enfant et dans l'adolescent. J'évoquais que je suis venu à m'intéresser au TDAH à partir de l'intérêt pour le trouble bipolaire. Et pendant longtemps... Donc ces questions d'enfants qu'on a appelées tantôt surdoués, au potentiel, au potentiel intellectuel, puis on a créé des notions de potentiel émotionnel. D'abord, ce ne sont pas des diagnostics médicaux, mais ce sont des concepts qui ont rencontré un public. qui s'est porté par certains professionnels, psychologues, etc. Quand je dis ça, ce n'est pas pour dire que ça ne veut rien dire, mais ce n'est pas en soi une maladie, c'est un profil. Alors, j'ai dû finir par ouvrir grand mes yeux pour me dire, mais oui, il y a une réalité clinique qui existe, qui d'ailleurs est venue prendre à rebrousse-poil l'idée qu'on avait des enfants TDAH, quand on considérait ailleurs que c'était qu'un problème. de l'enfance, puisque c'était plus présent quand ils étaient adultes, qui est celle du stéréotype du petit garçon turbulent qui ne tient pas en place et qui portait un bonnet d'âne sur les photos d'école ancienne parce qu'il perturbait la classe, il n'était pas bon en classe, etc. Et puis, on connaît mieux maintenant que dans ce registre, il y a des enfants qui ont pu être turbulents, mais qui ont pu ne pas être turbulents du tout, être très discrets, en particulier aussi des... des filles, mais avec des grandes capacités ou des capacités particulières sur le point intellectuel qui sont attestables par des tests d'évaluation, mais qui peuvent nous parler sur la facilité avec laquelle ils ont avancé longtemps dans leur parcours scolaire sans jamais travailler. Alors, il y a quelque chose qui est à voir et ça... Je vais vous permettre de citer à nouveau Raphaël Gaillard, qui nous manque, mais qui est bien présent parce qu'on se réfère beaucoup à lui, sur la question d'un cerveau qui travaille beaucoup et qui travaille tout le temps. Et il y a quelque chose sur une forme de pensée accélérée, qui est aussi une pensée arborescente, qui est au cœur de la problématique clinique du TDAH, mais qu'on retrouve aussi dans ces problématiques d'enfants et... qui ont besoin de faire des choses créatives, qui ont beaucoup de peine à faire des choses ennuyeuses, qui ont beaucoup de peine à faire des choses qui sont faites sous la contrainte. Le cliché, c'est ces patients avec ce profil-là qui ont lu Zola à 8 ou 10 ans, qui dévoraient les livres des médiathèques ou des bibliothèques de village, etc. Mais en troisième, quand il a fallu lire le livre que le professeur de français demandaient de lire, là ils n'ont pas pu. Parce que lire sous la contrainte, c'est impensable. Donc c'est dans ce Ausha qu'il y a effectivement un enjeu, la question de cerveau qui pense sans arrêt, beaucoup, avec beaucoup de rapidité, et qui nous renvoie aussi, je cite à nouveau Raphaël Gaillard, à la question de pourquoi il y a tellement de gens qui sont en souffrance dans le monde actuel. Dans un monde qui laisse jamais nos cerveaux, ou rarement nos cerveaux tranquilles. Dans cette intranquillité-là, il y a la place pour la créativité, mais il y a aussi la place pour pas mal de souffrance.
- Speaker #0
Merci. Ce qu'évoque Gilbert Schild m'amène peut-être à poser un autre concept qui est important à partir de l'idée d'accélération. L'IA, l'accélération des flux d'échanges, des communications, élèvent aussi le degré de sérendipité. Vous savez, c'est la création par le hasard, c'est la tarte tatin. Et donc, en fait, notre monde contemporain est un monde d'accélération d'échanges, de flux, une espèce de shaker géant. qui multiplient les occasions de sérendipité. Plus on se rencontre, plus on se croise, plus on s'entrechoque, plus du hasard de ces interactions peut émerger de l'inattendu et de la création inattendue.
- Speaker #1
Avant de donner la parole à la salle, je voulais juste soulever une question que j'avais qui vient justement du livre de Raphaël Gaillard, où il dit que finalement les pathologies psychiatriques sont fréquentes. et donc finalement pourquoi comme vous avez dit tout à l'heure il n'y a pas plus d'artistes donc c'est normal que finalement il y a aussi des artistes qui ont des troubles de psychiatrie par contre il avait l'air de dire je ne vais pas reprendre toute sa démonstration mais que finalement ça a été des traits qui ont été conservés au fil du temps et de l'évolution comme si on sait qu'en général L'humain est assez économe et quand il n'a pas besoin de quelque chose, il essaie de s'en débarrasser. Là, au contraire, ça aurait été conservé. Donc, est-ce que cette conservation veut dire quelque chose ou est-ce que c'est juste une fausse idée ? Est-ce que ça apporte finalement quelque chose à l'humanité ?
- Speaker #2
Très impatiente. Oui, je peux me lancer au sens d'une réflexion sur la question. Je n'ai pas mené de travaux de recherche, mais un peu des synthèses, j'ai écrit des choses sur les liens entre les théories de l'évolution et la vulnérabilité de l'homme à la dépression. Au fond, il me semble que la réflexion la plus balancée sur tout ça, c'est de sortir de l'idée qu'on parle de quelque chose qui est un trait particulier de l'humain, derrière lequel il y aurait un gène qui expliquerait ce trait. Puis à partir de là, on se dit, mais pourquoi alors on a sélectionné des variants génétiques qui nous sont nuisibles ? En fait, qu'on parle de la régulation de l'humeur, qu'on parle de la capacité à avoir un esprit qui part dans toutes les directions à la fois, on est sur des choses extrêmement complexes qui sont, du point de vue de la prédisposition génétique, déterminées par de très nombreux gènes. Et donc, une population... humaine a eu intérêt à avoir un certain nombre de ses prédispositions génétiques pour avoir en moyenne quelque chose qui lui a permis d'avancer, de progresser dans la direction de ce qu'est notre évolution. Mais que du coup dans ce multiplicité de gènes, l'équilibre n'est pas toujours parfait. Puisqu'il y a des gens qui qui ont un peu trop du numéro ou de la version qui tire un peu trop dans certains sens. Et donc, du coup, il y a des excès. Je vais sortir de l'exemple de la créativité sans être trop long pour prendre celui de la sensibilité. Être sensible non seulement à ce qu'on ressent, mais à ce que ressent l'autre. On est bien d'accord que c'est une dimension extrêmement importante. de nos caractéristiques humaines. Du coup, dans cette distribution statistique, il y a des extrêmes où il y a des gens qui sont plutôt dépourvus de cette sensibilité-là. Parfois, ça fait un peu peur. Je ne ferai pas de lien avec de l'actualité internationale sur ce sujet-là. Et puis, il y a des gens qui en ont un peu trop. Les gens qui en ont un peu trop, ils peuvent être des gens particulièrement généreux, particulièrement engagés, particulièrement sensibles, mais du coup peut-être aussi particulièrement vulnérables à la dépression. Tout est une question un peu d'équilibre.
- Speaker #3
J'aurais aimé, si vous le permettez, reprendre deux ou trois termes en particulier par rapport à la potentialité créative. C'est le terme de contrainte, c'est-à-dire que je crois réellement que la créativité naît de la contrainte, souvent. Alors, on connaît certains mouvements littéraires, par exemple, comme les groupes de Loulipo, etc., qui s'imposaient à un certain nombre de contraintes. Et puis, j'ai rencontré aussi un certain nombre de... de prisonniers qui, au sein d'une incarcération, avaient pu capter quelque chose de cette possibilité-là de créer. Et puis, je parlais des œuvres qui étaient créées de façon spontanée dans les asiles avant les années 50, en gros, avant les neuroleptiques, avant 52. Et ce sont des personnes qui avaient... Une forme de contrainte, parce qu'ils n'étaient pas hospitalisés trois semaines et puis repartaient chez eux. Ce n'était pas tout à fait ça à l'époque. Et puis, une forme d'ennui. Moi, je serais beaucoup pour la promotion de l'ennui. L'ennui, c'est ce qui permet justement, quand on est en mesure de capter ce qui nous entoure, c'est un moteur de créativité. et de pensée, et que dans une forme de supermarché de l'information, de l'assimilation des enfants qui doivent avoir des emplois du temps extrêmement remplis, etc. On n'a plus cette place pour l'ennui, c'est-à-dire pour se laisser porter par ce qu'on voit, ce qu'on entend, se laisser penser, etc. Donc tout ça, je trouve que c'est la contrainte, l'ennui, capter l'inconnu. connues, c'est des choses qui ont attrait pour moi à cette potentialité créatrice.
- Speaker #4
En tout cas, on ne s'est pas ennuyé pendant vos présentations et on va maintenant laisser la parole au public.
- Speaker #2
C'est une question pour Madame Dubois. Vous avez semblé dire que vous êtes capable de discerner la part saine et la part malade d'un artiste... dont vous présentez les oeuvres. J'aimerais savoir comment vous faites ça.
- Speaker #3
Je n'ai pas dit que je discernais. J'ai dit que je pensais que c'était avec la partie scène qu'on pouvait être créateur. et que si quelqu'un est étiqueté comme schizophrène, il n'est pas que schizophrène. Il y a quelque chose en lui qui n'est pas sa maladie. Un homme n'est pas assimilé à sa maladie. C'est ça que ça voulait dire. Ce n'est pas moi qui suis apte à discerner ce qui est sain et ce qui n'est pas sain. Je voulais simplement dire que c'était stigmateur. d'assimiler une personne à une pathologie et qu'il y avait toujours quelque chose chez cette personne qui pouvait émerger à un moment donné et que c'était peut-être ça sa partie saine. Mais je ne suis absolument pas en mesure, moi, de déterminer ce genre de choses. C'est très différent. Bonjour à tous, c'est un honneur d'être ici avec vous aujourd'hui, merci beaucoup. J'avais juste une question par rapport à justement cette expression artistique. est-ce qu'elle a une importance aussi dans des enjeux de diagnostic et aussi dans la rencontre, puisqu'on sait que la psychiatrie est une discipline clinique ? Merci beaucoup.
- Speaker #2
Est-ce qu'il y a un enjeu ? Si j'ai bien compris la question, sur le plan diagnostique, est-ce qu'au fond, je dirais plutôt globalement non, si ce n'est que... une bonne clinique psychiatrique Parfois, dans les temps qui courent, c'est dur d'avoir une bonne pratique de clinique psychiatrique sous la pression des très nombreux patients qui ont besoin de soins et qui nous obligent parfois à aller vite. Mais on ne fait pas un bon diagnostic sans avoir rencontré une personne, sans avoir une histoire de qui elle est, de comment elle s'est construite, de quoi est sa vie. Et dans cette perspective-là, Le fait qu'il y ait une activité artistique, une activité créative fait partie de la vision globale de cette personne chez laquelle on peut être amené à investiguer la recherche d'un trouble psychiatrique.
- Speaker #3
J'ai l'impression d'avoir un petit peu abordé cette Ausha tout à l'heure en disant que... Il y a une période, dans les années 2000 à peu près, où on parlait d'art psychopathologique, c'est-à-dire qu'on pensait que les productions, quelles qu'elles soient, artistiques des patients, pouvaient être assimilées à des éléments projectifs de leur pensée. Or, on s'est rendu compte que ce n'était pas vrai, et que certains éléments, enfin, je ne vais pas rentrer dans les détails, mais à certaines époques, dans les années 80, des des simples... Le tome a été décrit dans des œuvres qui ne tiennent absolument pas à la lecture d'un historien d'art, par exemple, ou de ce qui était appelé stéréotypie peut être appelé répétition. Il y a eu une tentative d'utilisation diagnostique des productions. Je pense que c'était totalement erroné. Et puis en plus, ça rentre dans cette forme de stigmatisation. à laquelle je suis très attachée à cette déstigmatisation à la fois des patients et à la fois de leur production.
- Speaker #2
Oui, je fais partie d'une génération qui lisait Freud. Et chez Freud, il y a toute une théorie de la créativité qui repose sur le refoulement de la libido, pour dire les choses très très simplement. Dans le fond, et je pense qu'il y avait aussi un usage diagnostique des œuvres d'art, en tout cas dans certaines œuvres de Freud, est-ce qu'il en reste quelque chose, c'est une voie de garage, ou est-ce qu'on utilise encore ce type d'approche ?
- Speaker #3
Les trois oeuvres de Freud, parce que je dois être de cette génération-là aussi, tu as lu Freud, les trois oeuvres où on parle de choses artistiques, c'est avec Léonard, avec... le Moïse et avec l'agrave divin, grosso modo. Ce sont des fantaisies interprétatives freudiennes. Ce n'est pas une grille de lecture. Il a fait des hypothèses diagnostiques, mais c'est comme les mêmes écueils. Dieu sait si. Je pense que la création de son mode de lecture humaniste, humain, etc., est très utile. Autant, je pense que son travail par rapport à Léonard de Vinci, est quelque chose de l'ordre d'une expérimentation, mais... mais de la même façon qu'on ne peut pas donner des interprétations ou comprendre un patient qu'on n'a pas rencontré, la psychobiographie ou la psychanalyse via une œuvre ou via une biographie, comme c'était le cas pour Léonard ou pour Michel-Ange, ça a une portée exemplaire dans le cheminement de la pensée freudienne, mais ça n'a pas de réalité. Voilà. Mais je pense qu'on peut utiliser les théories freudiennes pour beaucoup de choses, mais pas forcément pour ça.
- Speaker #1
Bonjour. Dans votre tentative d'écrire la créativité, vous avez parlé d'écrire le réel différemment. Et du coup, ma question, c'était différemment de quoi ? Je prends un peu d'avance sur le sujet, sur la norme, je pense, mais je veux bien votre avis à ce propos là.
- Speaker #4
J'étais intervenu comme ça un petit peu à brûle pour point sans avoir préparé quoi que ce soit. Mais disons que c'est très important différemment de quoi, différemment de rien, différemment les uns des autres. C'est le fait d'observer. Le monde, d'observer un objet, d'observer un comportement qui ne correspond pas forcément à la moyenne statistique, ça va donner la possibilité de le décrire, de le dessiner, de le chanter, de le composer d'une manière qui va... non pas heurter, mais interpeller la personne qui va l'écouter. Donc il n'y a aucun jugement dans l'idée de voir le monde différemment, mais il est certain qu'on voit tous le monde relativement différemment les uns des autres, mais avec peut-être une amplitude qui me semble, en tout cas dans ma clinique, qui me semble un peu différente selon les profils, mais sans aucun jugement de valeur, bien évidemment. Chacun perçoit le monde différemment, et c'est parfois important de le dire, parce qu'on a l'impression que tout le monde perçoit la chose. de la même manière et moi c'est ce que je trouve extraordinaire dans ce qu'on appelle la neurodiversité, c'est justement de laisser la possibilité à chacun d'apporter sa pierre à l'édifice, au grand édifice de l'humanité et je vais rebondir sur ce que vous me dites pour poser moi aussi une petite question qui est le sens inverse et finalement l'utilisation des médicaments, que ce soit des antidépresseurs ou que ce soit peut-être plus particulièrement les neuroleptiques, on le sait parfois ont un effet sur l'envie, sur la créativité. Est-ce que ça vous arrive qu'avec certains patients ou patientes, vous soyez obligé de prendre en considération cet aspect-là pour que, dans son bien-être, il puisse continuer à percevoir le monde un peu comme il le désire ? Parce que finalement, c'est aussi quelque chose qui lui apporte une source de satisfaction. Je ne sais pas si ma question est très claire.
- Speaker #2
Elle est très claire. Je mesure mes mots pour ne pas répondre en 20 minutes parce que c'est extrêmement riche tout ce qu'on pourrait ouvrir. très claires, par exemple, dans le domaine de la bipolarité, justement par rapport à ces questions de fluidité mentale, mais aussi de ressentis émotionnels. Il y a un psychologue, un professeur de psychiatrie américaine, qui a beaucoup fait de travaux sur la créativité des troubles bipolaires, qui était une sommité américaine dans le domaine des troubles bipolaires, qui elle-même souffre de troubles bipolaires. polaire, qui est Jameson, et qui a beaucoup parlé de son expérience avec le lithium, qu'elle prend bien, mais qu'elle a choisi, à un moment donné, d'utiliser de façon un petit peu moins dosée, parce qu'elle se rendait compte qu'elle avait sous lithium une normalisation un peu excessive, et qu'elle préférait pouvoir vivre ces petits moments où ça vibre, ça... sa phosphore, etc. Il t'a payé le prix d'avoir des moments un peu plus difficiles, un peu plus gris de subdépression. On touche à tout ça. De façon anecdotique, à propos du TDAH, deux histoires authentiques. Une chercheuse qui était en grande difficulté à cause d'un TDAH non diagnostiqué, qui allait beaucoup mieux avec le traitement médical qui lui a permis de... de bien se relancer professionnellement, mais qui m'a dit, OK, mais pas le dimanche, parce que le dimanche, c'est avec mes copains. Puis mes copains, ils ont l'habitude d'avoir une fille un peu faufole avec eux. Et donc, pas le traitement, comme c'est un traitement qui fait effet quand on le prend, qui s'arrête, il n'y a pas de souci. Et puis, un homme d'église qui avait des enfants jeunes adultes, qui avait des problèmes de TDAH, il était évident que... Lui-même était concerné aussi, à un moment donné il a voulu essayer le traitement, il l'a pris plusieurs années, puis il est revenu me voir et il m'a dit c'était vraiment intéressant mais j'ai arrêté parce que ça nuisait à ma créativité pour préparer mes prêches
- Speaker #5
Vous avez tous deux ou deux d'entre vous ont parlé de la contrainte comme une nécessité d'évolution de l'humain d'une manière générale. Mais l'humain a un défaut, c'est qu'il est assez paresseux et que quand une machine vient le soulager d'un certain nombre de ses fonctions, qui d'entre nous sait encore un numéro de téléphone quand on a dans la poche un véritable annuaire ? On n'a plus besoin de faire fonctionner nos mémoires, ou beaucoup moins, ou pour d'autres choses. Et en matière de... D'IA en particulier, on parle de contrôle humain. Mais est-ce qu'elle ne va pas se mettre à la place de l'humain qui de fait n'aura plus qu'à la faire marcher ?
- Speaker #0
C'est toute la question. Et à contrario, son usage libère, si on voulait filer la métaphore informatique, des gigaoctets de mémoire ouverte. Je suis très content de ne plus connaître... une pile de numéros de téléphone. Ta question est fondamentale et elle fait peut-être un écho à la question juste avant où vous avez utilisé, Madame, la notion du réel et de la norme. Moi, j'ajoute un point qui est que dans le sujet créativité, santé mentale, IA, je suis toujours très, très... Dubitatif, quand on utilise des métaphores un peu rapides. Par exemple, vous avez déjà entendu cette expression quand on parle de système d'IA générative. On parle quand le système ne produit pas ce qu'il doit produire, d'hallucination du modèle. Le fait d'utiliser ce mot dit peut-être quelque chose de plus profond, qui renvoie à quelque chose qui était aussi analysé hier, et je ne serai pas long. assez longtemps par un auteur de l'école de Palo Alto qui s'appelle Paul Valslavik, c'est un texte qui remonte, qui était aussi psychothérapeute, et qui a écrit un bouquin qui s'appelle La réalité de la réalité, en 1978. Et il a dans cet ouvrage qui est fondamental une intuition vraiment incroyable. Il dit qu'il y a un seuil d'accumulation d'échanges d'informations dans la société contemporaine. Au-delà duquel, et ce qu'il observe lui, c'est les échanges de téléphone à l'époque, il est en 78, il y a un seuil d'intensité d'échanges d'informations au-delà duquel ça génère des effets de brouillage tels que je vais finir, nous allons finir par douter de notre propre capacité à percevoir le réel. Et en fait finalement on est dans un monde où on a collectivement des hallucinations permanentes avec tout ce qui est produit en deepfake, faux contenus, fausses informations. Quelle est la norme ? Quel est le réel ? Quel est le standard sur lequel je peux établir la certitude que je suis dans le normal et pas dans le pathologique si l'idée même d'un réel est questionnée ? Vous voyez, il y a là des enjeux qui, je pense, vont sans doute avoir des prolongements dans vos disciplines. Ils n'en ont pas déjà très rapidement.
- Speaker #1
Une dernière question.
- Speaker #0
La contrainte que moi, j'oppose à la liberté. Est-ce que justement, la créativité, ce n'est pas exprimer sa liberté ? Oui, bien. ou l'inversement. Vous faisiez référence à Loulipo et à Georges Perrec qui, lui, se mettait vraiment sous contrainte pour stimuler sa créativité. Alors, il le faisait, une contrainte choisie. Mais si vous demandez à un moteur d'IA générative d'écrire un livre de 200 pages sans utiliser la lettre E, vous n'aurez pas la disparition. Élisée la disparition aujourd'hui et vous avez un exemple de ce qui est la sublimation de la liberté dans la contrainte. Mais vous avez raison, il y a un point qu'il ne faut pas perdre de vue. Et tant que ça reste une technique de stimulation créative, c'est bien. Mais en sous-jacent du recours à ces systèmes d'IA, vous pouvez avoir aussi d'autres modes de contraintes plus autoritaires qui s'imposent à nous et qui ne sont pas choisis. Et il faut être lucide par rapport à ça.
- Speaker #3
Je ne parlais pas de l'IA, je parlais de certaines formes d'enfermement qui, plus ou moins favorablement, pouvaient générer des envies créatrices.
- Speaker #1
La dernière question.
- Speaker #6
Si vous me permettez, pour Georges Pérec, le choix de la contrainte dans la réalité externe a pour fonction majeure de contenir son monde interne. Ce n'est pas une contrainte comme ça pour une contrainte. S'il n'y a pas de E dans la disparition, c'est pour mettre en exergue l'omniprésence de l'absence de E, sa mère, de E, ce qui était dans les concentrations. Donc la contrainte c'est contre le monde interne, contre l'inconscient. L'intelligence artificielle n'a pas de corps, n'a pas d'émotion, n'a pas d'inconscient. L'intelligence artificielle n'a pas d'artifice. Elle ne pourra jamais dire l'interdit, les sous-titres, les intertitres. Donc sa créativité, et pas sa création, n'est pas de même nature qu'une création incarnée.
- Speaker #2
Ça fait trois heures.
- Speaker #3
Non, non, mais moi je suis...
- Speaker #1
On va conclure. Je voulais juste, en préparant, j'ai lu aussi un livre qui s'appelle... de Julie Kerninon qui s'appelle Le chaos ne produit pas de chef-d'oeuvre. Donc elle a travaillé sur des artistes et sur des auteurs en particulier comme Fitzgerald et Mingwei sur leur mode de fonctionnement et finalement il y avait quand même beaucoup de sérieux dans ce qu'ils essayaient quand ils écrivaient en fait, même s'ils buvaient beaucoup et s'ils avaient d'autres soucis. Donc un petit mot de conclusion ?
- Speaker #0
Mais vous n'êtes pas obligé. En tout cas, on vous remercie infiniment pour votre participation. Et nous, on va se retrouver dans quelques minutes à 16h pour facteurs environnementaux et santé mentale. A tout de suite.