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Histoire du Pire

Prisonniers des glaces : le Mystère de l'expédition Franklin

Prisonniers des glaces : le Mystère de l'expédition Franklin

10min |15/11/2025
Play
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10min |15/11/2025
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Description

Dans cet épisode d’Histoire du Pire, on vous emmène au cœur de l’Arctique, là où deux navires britanniques ont disparu en 1845, laissant derrière eux l’un des plus grands mystères de l’exploration polaire. Entre ambitions impériales, silence de glace et découvertes aussi troublantes qu’inattendues, l’expédition Franklin révèle une histoire où rien ne se passe comme prévu… et où la nature finit par remporter la partie.

Un récit documenté, intense, parfois grinçant, qui vous prouve que même les plus grandes expéditions peuvent virer au cauchemar.

Enfilez vos moufles, on part dans le froid.


Sources :

Frozen In time Owen Beattie

https://www.nationalgeographic.fr/histoire/2019/08/lexpedition-franklin-histoire-dune-aventure-polaire-maudite

https://thecanadianencyclopedia.ca/fr/article/recherche-de-lexpedition-franklin

https://www.bbc.com/news/magazine-14847091


Credits : 

Music by Andrii Makurin from Pixabay

Sound Effect by Samuel F. Johanns from Pixabay


Voix off additionnelle : Jordan Gallois-Garreignot

 

Instagram : @histoire_du_pire

Bluesky : @histoiredupire.bsky.social


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Musique

  • Speaker #1

    L'Arctique du vent Musique de la glace et un silence qu'on pourrait presque entendre crier. En 1845, Sir John Franklin et ses 128 compagnons prennent le large. Officiellement, leur mission est simple. Trouver le passage du Nord-Ouest, ce raccourci mythique censé rallier l'Atlantique au Pacifique, devenant ainsi les Christophe Colomb du Grand Nord. En réalité... Ils vont surtout découvrir un passage direct vers la mort. Et pas une mort rapide, non. Une mort lente. Très lente. Le genre qu'on ne trouve que dans la glace. La faim. Et la folie. Mai 1845, Angleterre. Deux navires flambant neufs quittent le port de Greenhithe. Le HMS Erebus et le HMS Terror. Oui, Terror. On ne pouvait pas mieux trouver. À bord, 129 hommes, 3 ans de vivre, des moteurs à vapeur, du chauffage, une bibliothèque de 2900 livres, bref, la crème de la technologie victorienne. On y trouvait même des fours pour faire fondre la glace, approvisionnant ainsi l'équipage en eau potable. John Franklin, 59 ans, se voit déjà en héros polaire. Il part pour la gloire, il reviendra en héros. Sauf qu'il ne reviendra pas du tout. Après une escale au Groenland, les navires sont aperçus pour la dernière fois en août dans la baie de Baffin. Et puis, plus rien. Silence radio. Les deux frégates se sont volatilisées. Deux ans passent. L'amirauté s'impatiente. Lady Jane Franklin écrit des lettres enflammées et bientôt, toute l'Angleterre a un nouveau hobby. Chercher Franklin, mort ou vif, mais plutôt mort. Entre 1847 et 1850, plus de 30 expéditions sillonnent l'Arctique. Des marins, des aventuriers, des scientifiques et quelques têtes brûlées attirées par la promesse d'une belle récompense. Et ce qu'ils vont trouver dépasse tout. tout ce que l'imagination victorienne pouvait supporter. D'abord, trois tombes sur Beachay Island. Trois hommes morts dès le premier hiver. John Torrington, mort le 1er janvier 1846 à 20 ans. John Hartnell, mort le 4 janvier 1846 à 25 ans. Et William Brain, mort le 3 avril 1846 à 32 ans. Ils seront exhumés en 1981 par l'anthropologue Owen Beatty. Leur peau est intacte, leur visage figé, les yeux ouverts, comme s'ils attendaient encore de l'aide. Si vous avez vu la série ABC The Terror, les images de ces dépouilles sont très fidèles à la réalité des découvertes. Leur corps raconte tout, le plomb, le froid, la maladie. Bien qu'ils aient trouvé la mort avant le pire, au moment du premier hivernage, Ils font figure de présage funeste pour l'avenir de l'expédition. En 1854, le cartographe John Ray interroge les Inuits habitant l'île du roi Guillaume. Il raconte avoir vu des hommes blancs affamés, perdus et des restes humains découpés.

  • Speaker #0

    D'après les mutilations de plusieurs corps et le contenu des marmites, il est évident que nos infortunés compatriotes ont dû se résoudre à la dernière ressource pour tenter de survivre.

  • Speaker #1

    L'équipage aurait pratiqué le cannibalisme pour survivre. Ray rapporte les faits, l'Angleterre s'étouffe dans son thé. Lady Franklin hurle aux mensongers à la calomnie. Charles Dickens, lui, prend la plume pour défendre l'honneur britannique et accuse les Inuits d'avoir mangé les explorateurs.

  • Speaker #0

    Ce n'est que Babille d'une poignée de primitifs nourris au sang et à la graisse de baleine.

  • Speaker #1

    160 ans plus tard... La science lui donnera tort, les britanniques furent bien mangés par d'autres britanniques. En 1859, l'expédition McClintock trouve enfin une note, coincée dans un cerne de pierre à Victory Point. Dans un cylindre, un papier jauni, rongé par le gel. D'un côté,

  • Speaker #0

    28 mai 1847, tout va bien. Sir John Franklin commande l'expédition. Les navires sont pris dans la glace depuis septembre 1846.

  • Speaker #1

    De l'autre, un an plus tard.

  • Speaker #0

    25 avril 1848. Les navires abandonnés. Franklin mort. 24 hommes morts. Nous partons vers la rivière Bac.

  • Speaker #1

    Fin du message. Fin de l'espoir. Quand Franklin meurt, un homme prend la relève. Francis Crozier, Irlandais, marin aguerri, c'est le capitaine du HMS Terra. Un homme respecté, mais rongé par le doute. Il sait que la situation est désespérée. Il sait que la glace ne lâchera pas. Les navires sont pris dans les glaces à hauteur de l'île du roi Guillaume depuis deux ans. Alors il tente l'impossible, mener les survivants à pied vers le sud, vers la rivière Bac. 1500 kilomètres dans le froid. Sous le vent, malgré l'épuisement, attirés de lourds traîneaux avec leur maigre possession et le peu de vivres restants. Crozier marche en tête. Il prend des notes, il garde la discipline, il promet la survie. Mais la glace, elle, ne promet rien. On ne sait pas exactement où Crozier est mort. Peut-être sur la côte, peut-être plus loin. Certains Inuits disent l'avoir vu, amaigri, épuisé, mais vivant. Avant de disparaître tout à fait. Pas plus que Franklin, Crozier n'a trouvé le passage nord-ouest. Il a trouvé le passage vers l'oubli. Mais qu'est-ce qui a tué l'équipage de l'Erebus et de Tara ? Tout. Absolument tout. Le froid d'abord. Moins 40 degrés Celsius, un vent cinglant, les doigts qui gèlent en serrant une cuillère. La faim, ensuite. Provisions épuisées, corps amégris, esprit délirant. Mais surtout, le plomb. Les conserves de l'époque étaient soudées au plomb, et les analyses modernes montrent des taux astronomiques dans les eaux des marins. À ce stade, ce n'est plus de la chair humaine, c'est de la plomberie. Et on connaît les symptômes du saturnisme. Hallucinations, paralysie, démence. Ajoutez à ça le scorbut, le botulisme des conserves approximatives, les plaies qui pourrissent, les infections qui empestent, Et vous obtenez un cocktail d'horreur que même les manuels de survie ne veulent pas raconter. Et puis il y a l'épreuve, qu'on ne voulait pas voir. Des os brisés pour extraire la moelle, des traces de cuisson. Oui, ils ont bel et bien mangé les morts. Pas par cruauté, par instinct de survie. Et parce que les Inuits n'ont pas pu les aider à la hauteur de leurs besoins. Aider cette centaine d'hommes affamés, c'était compromettre leur propre survie. Pendant des décennies, les Inuits ont été ignorés, méprisés, effacés. Par racisme et colonialisme ? Peut-être. Par déni ? Sans doute. Et pourtant, ce sont eux qui détenaient la vérité. Ils racontaient les traîneaux trop lourds, les fusils, les corps abandonnés près de la rivière Bac. Ils savaient où étaient les bateaux. Et devinez quoi ? En 2014, l'épave de l'Erebus est retrouvée exactement là où les Inuits l'avaient indiquée. Deux ans plus tard, celle du Tara, dans la baie du même nom. Il aura fallu 170 ans pour admettre que ceux que l'on accusait de barbarie étaient en fait les témoins lucides d'un désastre blanc. L'historien Inuit Louis Kamoukak le résumera en une seule phrase. « They die because they didn't listen. » Ils sont morts. parce qu'ils n'ont pas écouté. Un siècle et demi plus tard, la fiction s'empare de cette tragédie. En 2007, Dan Simmons publie The Terror. Même décor, même homme, même mot. Un monstre en plus. Le Toonback, cette créature mythique inuite, traque les marins dans la nuit polaire sous la forme d'un énorme ours polaire. Ou presque. Fantaisie horrifique ? Pas tout à fait. Le monstre est une métaphore, il incarne le froid, la peur, la faim, la folie. Parce que dans cette histoire, il n'y avait pas de bêtes, juste des hommes, dévorés par le désespoir. L'expédition Franklin, c'est l'histoire d'un rêve gelé, une gloire impériale réduite à des eaux blanchies et des boîtes de conserve empoisonnées. C'est le moment où la technologie croit dompter la nature, et où la nature ne l'entend pas de cette oreille. Un échec monumental, figé dans le temps et devenu légendaire. On se retrouve bientôt pour un nouvel épisode d'Histoire du Pire. Et d'ici là, restez au frais !

Description

Dans cet épisode d’Histoire du Pire, on vous emmène au cœur de l’Arctique, là où deux navires britanniques ont disparu en 1845, laissant derrière eux l’un des plus grands mystères de l’exploration polaire. Entre ambitions impériales, silence de glace et découvertes aussi troublantes qu’inattendues, l’expédition Franklin révèle une histoire où rien ne se passe comme prévu… et où la nature finit par remporter la partie.

Un récit documenté, intense, parfois grinçant, qui vous prouve que même les plus grandes expéditions peuvent virer au cauchemar.

Enfilez vos moufles, on part dans le froid.


Sources :

Frozen In time Owen Beattie

https://www.nationalgeographic.fr/histoire/2019/08/lexpedition-franklin-histoire-dune-aventure-polaire-maudite

https://thecanadianencyclopedia.ca/fr/article/recherche-de-lexpedition-franklin

https://www.bbc.com/news/magazine-14847091


Credits : 

Music by Andrii Makurin from Pixabay

Sound Effect by Samuel F. Johanns from Pixabay


Voix off additionnelle : Jordan Gallois-Garreignot

 

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Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

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  • Speaker #0

    Musique

  • Speaker #1

    L'Arctique du vent Musique de la glace et un silence qu'on pourrait presque entendre crier. En 1845, Sir John Franklin et ses 128 compagnons prennent le large. Officiellement, leur mission est simple. Trouver le passage du Nord-Ouest, ce raccourci mythique censé rallier l'Atlantique au Pacifique, devenant ainsi les Christophe Colomb du Grand Nord. En réalité... Ils vont surtout découvrir un passage direct vers la mort. Et pas une mort rapide, non. Une mort lente. Très lente. Le genre qu'on ne trouve que dans la glace. La faim. Et la folie. Mai 1845, Angleterre. Deux navires flambant neufs quittent le port de Greenhithe. Le HMS Erebus et le HMS Terror. Oui, Terror. On ne pouvait pas mieux trouver. À bord, 129 hommes, 3 ans de vivre, des moteurs à vapeur, du chauffage, une bibliothèque de 2900 livres, bref, la crème de la technologie victorienne. On y trouvait même des fours pour faire fondre la glace, approvisionnant ainsi l'équipage en eau potable. John Franklin, 59 ans, se voit déjà en héros polaire. Il part pour la gloire, il reviendra en héros. Sauf qu'il ne reviendra pas du tout. Après une escale au Groenland, les navires sont aperçus pour la dernière fois en août dans la baie de Baffin. Et puis, plus rien. Silence radio. Les deux frégates se sont volatilisées. Deux ans passent. L'amirauté s'impatiente. Lady Jane Franklin écrit des lettres enflammées et bientôt, toute l'Angleterre a un nouveau hobby. Chercher Franklin, mort ou vif, mais plutôt mort. Entre 1847 et 1850, plus de 30 expéditions sillonnent l'Arctique. Des marins, des aventuriers, des scientifiques et quelques têtes brûlées attirées par la promesse d'une belle récompense. Et ce qu'ils vont trouver dépasse tout. tout ce que l'imagination victorienne pouvait supporter. D'abord, trois tombes sur Beachay Island. Trois hommes morts dès le premier hiver. John Torrington, mort le 1er janvier 1846 à 20 ans. John Hartnell, mort le 4 janvier 1846 à 25 ans. Et William Brain, mort le 3 avril 1846 à 32 ans. Ils seront exhumés en 1981 par l'anthropologue Owen Beatty. Leur peau est intacte, leur visage figé, les yeux ouverts, comme s'ils attendaient encore de l'aide. Si vous avez vu la série ABC The Terror, les images de ces dépouilles sont très fidèles à la réalité des découvertes. Leur corps raconte tout, le plomb, le froid, la maladie. Bien qu'ils aient trouvé la mort avant le pire, au moment du premier hivernage, Ils font figure de présage funeste pour l'avenir de l'expédition. En 1854, le cartographe John Ray interroge les Inuits habitant l'île du roi Guillaume. Il raconte avoir vu des hommes blancs affamés, perdus et des restes humains découpés.

  • Speaker #0

    D'après les mutilations de plusieurs corps et le contenu des marmites, il est évident que nos infortunés compatriotes ont dû se résoudre à la dernière ressource pour tenter de survivre.

  • Speaker #1

    L'équipage aurait pratiqué le cannibalisme pour survivre. Ray rapporte les faits, l'Angleterre s'étouffe dans son thé. Lady Franklin hurle aux mensongers à la calomnie. Charles Dickens, lui, prend la plume pour défendre l'honneur britannique et accuse les Inuits d'avoir mangé les explorateurs.

  • Speaker #0

    Ce n'est que Babille d'une poignée de primitifs nourris au sang et à la graisse de baleine.

  • Speaker #1

    160 ans plus tard... La science lui donnera tort, les britanniques furent bien mangés par d'autres britanniques. En 1859, l'expédition McClintock trouve enfin une note, coincée dans un cerne de pierre à Victory Point. Dans un cylindre, un papier jauni, rongé par le gel. D'un côté,

  • Speaker #0

    28 mai 1847, tout va bien. Sir John Franklin commande l'expédition. Les navires sont pris dans la glace depuis septembre 1846.

  • Speaker #1

    De l'autre, un an plus tard.

  • Speaker #0

    25 avril 1848. Les navires abandonnés. Franklin mort. 24 hommes morts. Nous partons vers la rivière Bac.

  • Speaker #1

    Fin du message. Fin de l'espoir. Quand Franklin meurt, un homme prend la relève. Francis Crozier, Irlandais, marin aguerri, c'est le capitaine du HMS Terra. Un homme respecté, mais rongé par le doute. Il sait que la situation est désespérée. Il sait que la glace ne lâchera pas. Les navires sont pris dans les glaces à hauteur de l'île du roi Guillaume depuis deux ans. Alors il tente l'impossible, mener les survivants à pied vers le sud, vers la rivière Bac. 1500 kilomètres dans le froid. Sous le vent, malgré l'épuisement, attirés de lourds traîneaux avec leur maigre possession et le peu de vivres restants. Crozier marche en tête. Il prend des notes, il garde la discipline, il promet la survie. Mais la glace, elle, ne promet rien. On ne sait pas exactement où Crozier est mort. Peut-être sur la côte, peut-être plus loin. Certains Inuits disent l'avoir vu, amaigri, épuisé, mais vivant. Avant de disparaître tout à fait. Pas plus que Franklin, Crozier n'a trouvé le passage nord-ouest. Il a trouvé le passage vers l'oubli. Mais qu'est-ce qui a tué l'équipage de l'Erebus et de Tara ? Tout. Absolument tout. Le froid d'abord. Moins 40 degrés Celsius, un vent cinglant, les doigts qui gèlent en serrant une cuillère. La faim, ensuite. Provisions épuisées, corps amégris, esprit délirant. Mais surtout, le plomb. Les conserves de l'époque étaient soudées au plomb, et les analyses modernes montrent des taux astronomiques dans les eaux des marins. À ce stade, ce n'est plus de la chair humaine, c'est de la plomberie. Et on connaît les symptômes du saturnisme. Hallucinations, paralysie, démence. Ajoutez à ça le scorbut, le botulisme des conserves approximatives, les plaies qui pourrissent, les infections qui empestent, Et vous obtenez un cocktail d'horreur que même les manuels de survie ne veulent pas raconter. Et puis il y a l'épreuve, qu'on ne voulait pas voir. Des os brisés pour extraire la moelle, des traces de cuisson. Oui, ils ont bel et bien mangé les morts. Pas par cruauté, par instinct de survie. Et parce que les Inuits n'ont pas pu les aider à la hauteur de leurs besoins. Aider cette centaine d'hommes affamés, c'était compromettre leur propre survie. Pendant des décennies, les Inuits ont été ignorés, méprisés, effacés. Par racisme et colonialisme ? Peut-être. Par déni ? Sans doute. Et pourtant, ce sont eux qui détenaient la vérité. Ils racontaient les traîneaux trop lourds, les fusils, les corps abandonnés près de la rivière Bac. Ils savaient où étaient les bateaux. Et devinez quoi ? En 2014, l'épave de l'Erebus est retrouvée exactement là où les Inuits l'avaient indiquée. Deux ans plus tard, celle du Tara, dans la baie du même nom. Il aura fallu 170 ans pour admettre que ceux que l'on accusait de barbarie étaient en fait les témoins lucides d'un désastre blanc. L'historien Inuit Louis Kamoukak le résumera en une seule phrase. « They die because they didn't listen. » Ils sont morts. parce qu'ils n'ont pas écouté. Un siècle et demi plus tard, la fiction s'empare de cette tragédie. En 2007, Dan Simmons publie The Terror. Même décor, même homme, même mot. Un monstre en plus. Le Toonback, cette créature mythique inuite, traque les marins dans la nuit polaire sous la forme d'un énorme ours polaire. Ou presque. Fantaisie horrifique ? Pas tout à fait. Le monstre est une métaphore, il incarne le froid, la peur, la faim, la folie. Parce que dans cette histoire, il n'y avait pas de bêtes, juste des hommes, dévorés par le désespoir. L'expédition Franklin, c'est l'histoire d'un rêve gelé, une gloire impériale réduite à des eaux blanchies et des boîtes de conserve empoisonnées. C'est le moment où la technologie croit dompter la nature, et où la nature ne l'entend pas de cette oreille. Un échec monumental, figé dans le temps et devenu légendaire. On se retrouve bientôt pour un nouvel épisode d'Histoire du Pire. Et d'ici là, restez au frais !

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Dans cet épisode d’Histoire du Pire, on vous emmène au cœur de l’Arctique, là où deux navires britanniques ont disparu en 1845, laissant derrière eux l’un des plus grands mystères de l’exploration polaire. Entre ambitions impériales, silence de glace et découvertes aussi troublantes qu’inattendues, l’expédition Franklin révèle une histoire où rien ne se passe comme prévu… et où la nature finit par remporter la partie.

Un récit documenté, intense, parfois grinçant, qui vous prouve que même les plus grandes expéditions peuvent virer au cauchemar.

Enfilez vos moufles, on part dans le froid.


Sources :

Frozen In time Owen Beattie

https://www.nationalgeographic.fr/histoire/2019/08/lexpedition-franklin-histoire-dune-aventure-polaire-maudite

https://thecanadianencyclopedia.ca/fr/article/recherche-de-lexpedition-franklin

https://www.bbc.com/news/magazine-14847091


Credits : 

Music by Andrii Makurin from Pixabay

Sound Effect by Samuel F. Johanns from Pixabay


Voix off additionnelle : Jordan Gallois-Garreignot

 

Instagram : @histoire_du_pire

Bluesky : @histoiredupire.bsky.social


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Musique

  • Speaker #1

    L'Arctique du vent Musique de la glace et un silence qu'on pourrait presque entendre crier. En 1845, Sir John Franklin et ses 128 compagnons prennent le large. Officiellement, leur mission est simple. Trouver le passage du Nord-Ouest, ce raccourci mythique censé rallier l'Atlantique au Pacifique, devenant ainsi les Christophe Colomb du Grand Nord. En réalité... Ils vont surtout découvrir un passage direct vers la mort. Et pas une mort rapide, non. Une mort lente. Très lente. Le genre qu'on ne trouve que dans la glace. La faim. Et la folie. Mai 1845, Angleterre. Deux navires flambant neufs quittent le port de Greenhithe. Le HMS Erebus et le HMS Terror. Oui, Terror. On ne pouvait pas mieux trouver. À bord, 129 hommes, 3 ans de vivre, des moteurs à vapeur, du chauffage, une bibliothèque de 2900 livres, bref, la crème de la technologie victorienne. On y trouvait même des fours pour faire fondre la glace, approvisionnant ainsi l'équipage en eau potable. John Franklin, 59 ans, se voit déjà en héros polaire. Il part pour la gloire, il reviendra en héros. Sauf qu'il ne reviendra pas du tout. Après une escale au Groenland, les navires sont aperçus pour la dernière fois en août dans la baie de Baffin. Et puis, plus rien. Silence radio. Les deux frégates se sont volatilisées. Deux ans passent. L'amirauté s'impatiente. Lady Jane Franklin écrit des lettres enflammées et bientôt, toute l'Angleterre a un nouveau hobby. Chercher Franklin, mort ou vif, mais plutôt mort. Entre 1847 et 1850, plus de 30 expéditions sillonnent l'Arctique. Des marins, des aventuriers, des scientifiques et quelques têtes brûlées attirées par la promesse d'une belle récompense. Et ce qu'ils vont trouver dépasse tout. tout ce que l'imagination victorienne pouvait supporter. D'abord, trois tombes sur Beachay Island. Trois hommes morts dès le premier hiver. John Torrington, mort le 1er janvier 1846 à 20 ans. John Hartnell, mort le 4 janvier 1846 à 25 ans. Et William Brain, mort le 3 avril 1846 à 32 ans. Ils seront exhumés en 1981 par l'anthropologue Owen Beatty. Leur peau est intacte, leur visage figé, les yeux ouverts, comme s'ils attendaient encore de l'aide. Si vous avez vu la série ABC The Terror, les images de ces dépouilles sont très fidèles à la réalité des découvertes. Leur corps raconte tout, le plomb, le froid, la maladie. Bien qu'ils aient trouvé la mort avant le pire, au moment du premier hivernage, Ils font figure de présage funeste pour l'avenir de l'expédition. En 1854, le cartographe John Ray interroge les Inuits habitant l'île du roi Guillaume. Il raconte avoir vu des hommes blancs affamés, perdus et des restes humains découpés.

  • Speaker #0

    D'après les mutilations de plusieurs corps et le contenu des marmites, il est évident que nos infortunés compatriotes ont dû se résoudre à la dernière ressource pour tenter de survivre.

  • Speaker #1

    L'équipage aurait pratiqué le cannibalisme pour survivre. Ray rapporte les faits, l'Angleterre s'étouffe dans son thé. Lady Franklin hurle aux mensongers à la calomnie. Charles Dickens, lui, prend la plume pour défendre l'honneur britannique et accuse les Inuits d'avoir mangé les explorateurs.

  • Speaker #0

    Ce n'est que Babille d'une poignée de primitifs nourris au sang et à la graisse de baleine.

  • Speaker #1

    160 ans plus tard... La science lui donnera tort, les britanniques furent bien mangés par d'autres britanniques. En 1859, l'expédition McClintock trouve enfin une note, coincée dans un cerne de pierre à Victory Point. Dans un cylindre, un papier jauni, rongé par le gel. D'un côté,

  • Speaker #0

    28 mai 1847, tout va bien. Sir John Franklin commande l'expédition. Les navires sont pris dans la glace depuis septembre 1846.

  • Speaker #1

    De l'autre, un an plus tard.

  • Speaker #0

    25 avril 1848. Les navires abandonnés. Franklin mort. 24 hommes morts. Nous partons vers la rivière Bac.

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    Fin du message. Fin de l'espoir. Quand Franklin meurt, un homme prend la relève. Francis Crozier, Irlandais, marin aguerri, c'est le capitaine du HMS Terra. Un homme respecté, mais rongé par le doute. Il sait que la situation est désespérée. Il sait que la glace ne lâchera pas. Les navires sont pris dans les glaces à hauteur de l'île du roi Guillaume depuis deux ans. Alors il tente l'impossible, mener les survivants à pied vers le sud, vers la rivière Bac. 1500 kilomètres dans le froid. Sous le vent, malgré l'épuisement, attirés de lourds traîneaux avec leur maigre possession et le peu de vivres restants. Crozier marche en tête. Il prend des notes, il garde la discipline, il promet la survie. Mais la glace, elle, ne promet rien. On ne sait pas exactement où Crozier est mort. Peut-être sur la côte, peut-être plus loin. Certains Inuits disent l'avoir vu, amaigri, épuisé, mais vivant. Avant de disparaître tout à fait. Pas plus que Franklin, Crozier n'a trouvé le passage nord-ouest. Il a trouvé le passage vers l'oubli. Mais qu'est-ce qui a tué l'équipage de l'Erebus et de Tara ? Tout. Absolument tout. Le froid d'abord. Moins 40 degrés Celsius, un vent cinglant, les doigts qui gèlent en serrant une cuillère. La faim, ensuite. Provisions épuisées, corps amégris, esprit délirant. Mais surtout, le plomb. Les conserves de l'époque étaient soudées au plomb, et les analyses modernes montrent des taux astronomiques dans les eaux des marins. À ce stade, ce n'est plus de la chair humaine, c'est de la plomberie. Et on connaît les symptômes du saturnisme. Hallucinations, paralysie, démence. Ajoutez à ça le scorbut, le botulisme des conserves approximatives, les plaies qui pourrissent, les infections qui empestent, Et vous obtenez un cocktail d'horreur que même les manuels de survie ne veulent pas raconter. Et puis il y a l'épreuve, qu'on ne voulait pas voir. Des os brisés pour extraire la moelle, des traces de cuisson. Oui, ils ont bel et bien mangé les morts. Pas par cruauté, par instinct de survie. Et parce que les Inuits n'ont pas pu les aider à la hauteur de leurs besoins. Aider cette centaine d'hommes affamés, c'était compromettre leur propre survie. Pendant des décennies, les Inuits ont été ignorés, méprisés, effacés. Par racisme et colonialisme ? Peut-être. Par déni ? Sans doute. Et pourtant, ce sont eux qui détenaient la vérité. Ils racontaient les traîneaux trop lourds, les fusils, les corps abandonnés près de la rivière Bac. Ils savaient où étaient les bateaux. Et devinez quoi ? En 2014, l'épave de l'Erebus est retrouvée exactement là où les Inuits l'avaient indiquée. Deux ans plus tard, celle du Tara, dans la baie du même nom. Il aura fallu 170 ans pour admettre que ceux que l'on accusait de barbarie étaient en fait les témoins lucides d'un désastre blanc. L'historien Inuit Louis Kamoukak le résumera en une seule phrase. « They die because they didn't listen. » Ils sont morts. parce qu'ils n'ont pas écouté. Un siècle et demi plus tard, la fiction s'empare de cette tragédie. En 2007, Dan Simmons publie The Terror. Même décor, même homme, même mot. Un monstre en plus. Le Toonback, cette créature mythique inuite, traque les marins dans la nuit polaire sous la forme d'un énorme ours polaire. Ou presque. Fantaisie horrifique ? Pas tout à fait. Le monstre est une métaphore, il incarne le froid, la peur, la faim, la folie. Parce que dans cette histoire, il n'y avait pas de bêtes, juste des hommes, dévorés par le désespoir. L'expédition Franklin, c'est l'histoire d'un rêve gelé, une gloire impériale réduite à des eaux blanchies et des boîtes de conserve empoisonnées. C'est le moment où la technologie croit dompter la nature, et où la nature ne l'entend pas de cette oreille. Un échec monumental, figé dans le temps et devenu légendaire. On se retrouve bientôt pour un nouvel épisode d'Histoire du Pire. Et d'ici là, restez au frais !

Description

Dans cet épisode d’Histoire du Pire, on vous emmène au cœur de l’Arctique, là où deux navires britanniques ont disparu en 1845, laissant derrière eux l’un des plus grands mystères de l’exploration polaire. Entre ambitions impériales, silence de glace et découvertes aussi troublantes qu’inattendues, l’expédition Franklin révèle une histoire où rien ne se passe comme prévu… et où la nature finit par remporter la partie.

Un récit documenté, intense, parfois grinçant, qui vous prouve que même les plus grandes expéditions peuvent virer au cauchemar.

Enfilez vos moufles, on part dans le froid.


Sources :

Frozen In time Owen Beattie

https://www.nationalgeographic.fr/histoire/2019/08/lexpedition-franklin-histoire-dune-aventure-polaire-maudite

https://thecanadianencyclopedia.ca/fr/article/recherche-de-lexpedition-franklin

https://www.bbc.com/news/magazine-14847091


Credits : 

Music by Andrii Makurin from Pixabay

Sound Effect by Samuel F. Johanns from Pixabay


Voix off additionnelle : Jordan Gallois-Garreignot

 

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Bluesky : @histoiredupire.bsky.social


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

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    Musique

  • Speaker #1

    L'Arctique du vent Musique de la glace et un silence qu'on pourrait presque entendre crier. En 1845, Sir John Franklin et ses 128 compagnons prennent le large. Officiellement, leur mission est simple. Trouver le passage du Nord-Ouest, ce raccourci mythique censé rallier l'Atlantique au Pacifique, devenant ainsi les Christophe Colomb du Grand Nord. En réalité... Ils vont surtout découvrir un passage direct vers la mort. Et pas une mort rapide, non. Une mort lente. Très lente. Le genre qu'on ne trouve que dans la glace. La faim. Et la folie. Mai 1845, Angleterre. Deux navires flambant neufs quittent le port de Greenhithe. Le HMS Erebus et le HMS Terror. Oui, Terror. On ne pouvait pas mieux trouver. À bord, 129 hommes, 3 ans de vivre, des moteurs à vapeur, du chauffage, une bibliothèque de 2900 livres, bref, la crème de la technologie victorienne. On y trouvait même des fours pour faire fondre la glace, approvisionnant ainsi l'équipage en eau potable. John Franklin, 59 ans, se voit déjà en héros polaire. Il part pour la gloire, il reviendra en héros. Sauf qu'il ne reviendra pas du tout. Après une escale au Groenland, les navires sont aperçus pour la dernière fois en août dans la baie de Baffin. Et puis, plus rien. Silence radio. Les deux frégates se sont volatilisées. Deux ans passent. L'amirauté s'impatiente. Lady Jane Franklin écrit des lettres enflammées et bientôt, toute l'Angleterre a un nouveau hobby. Chercher Franklin, mort ou vif, mais plutôt mort. Entre 1847 et 1850, plus de 30 expéditions sillonnent l'Arctique. Des marins, des aventuriers, des scientifiques et quelques têtes brûlées attirées par la promesse d'une belle récompense. Et ce qu'ils vont trouver dépasse tout. tout ce que l'imagination victorienne pouvait supporter. D'abord, trois tombes sur Beachay Island. Trois hommes morts dès le premier hiver. John Torrington, mort le 1er janvier 1846 à 20 ans. John Hartnell, mort le 4 janvier 1846 à 25 ans. Et William Brain, mort le 3 avril 1846 à 32 ans. Ils seront exhumés en 1981 par l'anthropologue Owen Beatty. Leur peau est intacte, leur visage figé, les yeux ouverts, comme s'ils attendaient encore de l'aide. Si vous avez vu la série ABC The Terror, les images de ces dépouilles sont très fidèles à la réalité des découvertes. Leur corps raconte tout, le plomb, le froid, la maladie. Bien qu'ils aient trouvé la mort avant le pire, au moment du premier hivernage, Ils font figure de présage funeste pour l'avenir de l'expédition. En 1854, le cartographe John Ray interroge les Inuits habitant l'île du roi Guillaume. Il raconte avoir vu des hommes blancs affamés, perdus et des restes humains découpés.

  • Speaker #0

    D'après les mutilations de plusieurs corps et le contenu des marmites, il est évident que nos infortunés compatriotes ont dû se résoudre à la dernière ressource pour tenter de survivre.

  • Speaker #1

    L'équipage aurait pratiqué le cannibalisme pour survivre. Ray rapporte les faits, l'Angleterre s'étouffe dans son thé. Lady Franklin hurle aux mensongers à la calomnie. Charles Dickens, lui, prend la plume pour défendre l'honneur britannique et accuse les Inuits d'avoir mangé les explorateurs.

  • Speaker #0

    Ce n'est que Babille d'une poignée de primitifs nourris au sang et à la graisse de baleine.

  • Speaker #1

    160 ans plus tard... La science lui donnera tort, les britanniques furent bien mangés par d'autres britanniques. En 1859, l'expédition McClintock trouve enfin une note, coincée dans un cerne de pierre à Victory Point. Dans un cylindre, un papier jauni, rongé par le gel. D'un côté,

  • Speaker #0

    28 mai 1847, tout va bien. Sir John Franklin commande l'expédition. Les navires sont pris dans la glace depuis septembre 1846.

  • Speaker #1

    De l'autre, un an plus tard.

  • Speaker #0

    25 avril 1848. Les navires abandonnés. Franklin mort. 24 hommes morts. Nous partons vers la rivière Bac.

  • Speaker #1

    Fin du message. Fin de l'espoir. Quand Franklin meurt, un homme prend la relève. Francis Crozier, Irlandais, marin aguerri, c'est le capitaine du HMS Terra. Un homme respecté, mais rongé par le doute. Il sait que la situation est désespérée. Il sait que la glace ne lâchera pas. Les navires sont pris dans les glaces à hauteur de l'île du roi Guillaume depuis deux ans. Alors il tente l'impossible, mener les survivants à pied vers le sud, vers la rivière Bac. 1500 kilomètres dans le froid. Sous le vent, malgré l'épuisement, attirés de lourds traîneaux avec leur maigre possession et le peu de vivres restants. Crozier marche en tête. Il prend des notes, il garde la discipline, il promet la survie. Mais la glace, elle, ne promet rien. On ne sait pas exactement où Crozier est mort. Peut-être sur la côte, peut-être plus loin. Certains Inuits disent l'avoir vu, amaigri, épuisé, mais vivant. Avant de disparaître tout à fait. Pas plus que Franklin, Crozier n'a trouvé le passage nord-ouest. Il a trouvé le passage vers l'oubli. Mais qu'est-ce qui a tué l'équipage de l'Erebus et de Tara ? Tout. Absolument tout. Le froid d'abord. Moins 40 degrés Celsius, un vent cinglant, les doigts qui gèlent en serrant une cuillère. La faim, ensuite. Provisions épuisées, corps amégris, esprit délirant. Mais surtout, le plomb. Les conserves de l'époque étaient soudées au plomb, et les analyses modernes montrent des taux astronomiques dans les eaux des marins. À ce stade, ce n'est plus de la chair humaine, c'est de la plomberie. Et on connaît les symptômes du saturnisme. Hallucinations, paralysie, démence. Ajoutez à ça le scorbut, le botulisme des conserves approximatives, les plaies qui pourrissent, les infections qui empestent, Et vous obtenez un cocktail d'horreur que même les manuels de survie ne veulent pas raconter. Et puis il y a l'épreuve, qu'on ne voulait pas voir. Des os brisés pour extraire la moelle, des traces de cuisson. Oui, ils ont bel et bien mangé les morts. Pas par cruauté, par instinct de survie. Et parce que les Inuits n'ont pas pu les aider à la hauteur de leurs besoins. Aider cette centaine d'hommes affamés, c'était compromettre leur propre survie. Pendant des décennies, les Inuits ont été ignorés, méprisés, effacés. Par racisme et colonialisme ? Peut-être. Par déni ? Sans doute. Et pourtant, ce sont eux qui détenaient la vérité. Ils racontaient les traîneaux trop lourds, les fusils, les corps abandonnés près de la rivière Bac. Ils savaient où étaient les bateaux. Et devinez quoi ? En 2014, l'épave de l'Erebus est retrouvée exactement là où les Inuits l'avaient indiquée. Deux ans plus tard, celle du Tara, dans la baie du même nom. Il aura fallu 170 ans pour admettre que ceux que l'on accusait de barbarie étaient en fait les témoins lucides d'un désastre blanc. L'historien Inuit Louis Kamoukak le résumera en une seule phrase. « They die because they didn't listen. » Ils sont morts. parce qu'ils n'ont pas écouté. Un siècle et demi plus tard, la fiction s'empare de cette tragédie. En 2007, Dan Simmons publie The Terror. Même décor, même homme, même mot. Un monstre en plus. Le Toonback, cette créature mythique inuite, traque les marins dans la nuit polaire sous la forme d'un énorme ours polaire. Ou presque. Fantaisie horrifique ? Pas tout à fait. Le monstre est une métaphore, il incarne le froid, la peur, la faim, la folie. Parce que dans cette histoire, il n'y avait pas de bêtes, juste des hommes, dévorés par le désespoir. L'expédition Franklin, c'est l'histoire d'un rêve gelé, une gloire impériale réduite à des eaux blanchies et des boîtes de conserve empoisonnées. C'est le moment où la technologie croit dompter la nature, et où la nature ne l'entend pas de cette oreille. Un échec monumental, figé dans le temps et devenu légendaire. On se retrouve bientôt pour un nouvel épisode d'Histoire du Pire. Et d'ici là, restez au frais !

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