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Histoires d'Alchimistes

9 | De 20 ans de crack à un vélo, une voix, et une route qui inspire

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40min |24/06/2025
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9 | De 20 ans de crack à un vélo, une voix, et une route qui inspire

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Description

🎧 20 ans sous crack. Et un jour, Antoine a décidé de marcher vers lui-même.
Pas vers la guérison miracle. Vers quelque chose de plus vrai, plus humble, plus tenace : du sens, de la liberté, et le désir de transmettre.

💬 Chef de cuisine, Antoine a cohabité pendant deux décennies avec une addiction qui grignotait tout : ses nuits, ses relations, ses silences.

Il était enfermé Dedans, c’est-à-dire dans le besoin de plaire, dans la peur d’être vu, dans le crack. Jusqu’au jour où il parle. Il parle à son père. Il parle à ses proches. Il parle sur Instagram. Et il se met en mouvement. Littéralement.


Aujourd’hui, il roule vers le monde sur son vélo, avec une envie simple : aider, inspirer, réparer ce qui peut l’être.
Cet épisode, c’est l’histoire d’un homme qui a décidé de transformer 20 ans de silence et d’addiction en une parole vivante. Antoine raconte comment il a choisi d’agir, de transmettre, et de donner un sens à ce qu’il a traversé — pour ne plus fuir, mais avancer.


🌀 Tu découvriras :

  • Comment Antoine a vécu 20 ans d’addiction tout en maintenant une façade « normale »

  • Le moment exact où tout a basculé : une chanson, des larmes, une promesse

  • Ce que ça fait de dire la vérité après deux décennies de camouflage

  • Pourquoi il a décidé de traverser le monde sans avion, et de créer une association

  • Les pièges de l’après-cure : quand le vrai travail commence

  • Comment il transforme aujourd’hui son histoire en levier pour aider d’autres à s’en sortir


🌟 Ce n’est pas une histoire de réussite. C’est une histoire de vérité. Une histoire de sens, de sueur, et de lumière qu’on rallume, doucement, quand on a passé trop longtemps dans le noir.


📲 Retrouve Antoine ici :
Instagram : @antopihen


💪🏻 Ensemble, on est plus forts.

Si tu veux soutenir ce podcast, fais passer l'étincelle à quelqu’un qui en a besoin et laisse une note ou un avis sur ta plateforme d’écoute préférée.

Parce que certaines histoires méritent d’être entendues… et pourraient bien changer une vie. ✨


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Bienvenue sur Histoire d'Alchimiste, le podcast qui explore comment transformer nos épreuves en tremplin et révèle des parcours de vie où l'impossible s'est teinté d'espoir, où chaque épreuve a laissé une empreinte riche de sens. Je suis Sandra et toutes les deux semaines, je pars à la rencontre d'âmes audacieuses qui ont su transformer leurs blessures en force et leur histoire en élan de vie. Parce que peu importe d'où tu viens, Peu importe ce que tu as traversé, toi aussi, tu peux réveiller l'alchimiste qui est en toi et faire de ton parcours un moteur de sens, de contribution et de changement. Alors, prépare-toi à ressentir, à questionner et à laisser ces histoires souffler sur les braises de ta propre transformation. Aujourd'hui, je te propose d'aller rencontrer Antoine, un chef de cuisine, mais surtout un homme qui a connu l'enfer du crack pendant 20 ans. avant de choisir de vivre, pas de manière tiède non, mais avec intensité, et sans besoin de s'en sortir et d'aider à partir de ce qu'il a traversé. Il est passé de la paranoïa à la liberté, du silence au drapeau accroché à l'arrière d'un vélo, un vélo avec lequel il a déjà parcouru de nombreux kilomètres, et projette de traverser les frontières pour faire le tour du monde sans avion et offrir des cadeaux à ceux qui n'en reçoivent que trop peu. Ce qui m'a bouleversée chez Antoine, c'est ce moment où il m'a dit « Je pense que si je suis tombée dans le krach, c'est pour comprendre, pour aider les autres à mon tour. Et si mon histoire peut aider, alors ça valait le coup. » Antoine cherche à aimer mieux, à se réparer et réparer un peu le monde. Avec son vélo et une force de vie qui dit « Reste pas seul avec ton chaos. Si toi aussi tu portes une douleur en cachette, Si tu t'es déjà demandé pourquoi tu t'en es sorti, comment t'en sortir ? Si t'as envie de croire qu'un chemin est possible, même dans le chaos, même quand tu touches le fond, alors cet épisode va forcément te parler. Prépare-toi à un échange bouleversant avec Antoine, un ancien accro au crack qui trace aujourd'hui sa route, à pied, à vélo, sans masque et surtout sans cam, mais avec une force de vie fulgurante. Salut Antoine, comment tu vas aujourd'hui ?

  • Speaker #1

    Très bien et toi Sandra ?

  • Speaker #0

    Merci de me recevoir chez toi. Alors, on est où ici ?

  • Speaker #1

    On est à Saint-Philibert, dans le Morbihan, en Bretagne.

  • Speaker #0

    Ok, donc là on est entouré d'arbres, il y a les oiseaux.

  • Speaker #1

    Ouais, là on est dans le trou du cul du monde.

  • Speaker #0

    Alors avant de commencer, je vais te proposer un petit jeu. T'es dans un poste de contrôle abandonné, presque irréel. Autour de toi, des centaines de petites télés. Sur chaque écran, un fragment de ta vie. des souvenirs, des galères, des visages, des décisions. Et puis au centre, un écran noir. Un code erreur clignote. Pour revenir chez toi, pour te réveiller, tu dois l'activer. Alors tu t'approches et une voix sort du haut-parleur. Tu dois inscrire sur cet écran trois forces de vie. Celles qui pulsent à l'intérieur. Celles qui t'ont mis des coups de pied aux fesses. Celles qui t'ont fait traverser les tempêtes, les chutes. Alors tu choisis quoi ?

  • Speaker #1

    Je choisirais en premier la liberté. pouvoir faire ce que je veux, voyager, vivre pour moi. Après, ma famille et l'envie d'aider. Et mon histoire peut servir à d'autres, alors c'est pas pour rien.

  • Speaker #0

    C'est de belles forces, ça. Ouais. Et quand tu te lèves le matin aujourd'hui, c'est quoi la chose qui te traverse en premier ? Une pensée, un élan, une angoisse peut-être ?

  • Speaker #1

    Non, non, non, quand je me réveille, je suis pas angoissé. Je dors très mal, mais je suis pas angoissé. Mais malheureusement, encore la première chose à laquelle je pense en me réveillant, c'est la clope.

  • Speaker #0

    Tu as aussi arrêté la cigarette.

  • Speaker #1

    Oui, la cure que j'ai faite a été sans tabac. Et quand je me suis inscrit, je m'étais dit que j'arrêtais tout. Quand je suis arrivé, je m'étais dit que c'était trop. Au final, je me suis rendu compte que c'était possible. Et voilà, donc du coup, la première pensée le matin, c'est toujours la clope. Mais je te mets mes petits patchs. Et du coup, ça passe au bout d'une heure.

  • Speaker #0

    Donc, tu es tombé dans le crack il y a 20 ans. Oui. Et est-ce que tu te souviens de la première fois ?

  • Speaker #1

    Ouais, c'était sur un parking de boîte à l'âge de Zoclub, à Pec.

  • Speaker #0

    En Belgique ? Ouais. Ah ben mince alors !

  • Speaker #1

    Bah c'est là où j'ai commencé toutes mes conneries.

  • Speaker #0

    Ah bah c'est là où il se passe beaucoup de conneries, ouais. Ouais.

  • Speaker #1

    Et j'avais rencontré un mec qui était plus vieux que moi, qui était un ancien dealer des parkings de boîte en Belgique. Ça sort de mes 18 ans, il me propose une trace de coke, je lui dis que j'ai pas envie, parce que ça me fait peur de sniffer. Il m'a dit « Ah t'inquiète, ça se fume si tu veux » . puis Et puis il m'a fait du crack parce qu'en fait le... Le crack, c'est un dérivé de la cocaïne. Tu fais du crack avec la cocaïne. Et moi, je ne savais pas ce que c'était. Je n'ai pas vu ce qu'il faisait devant. Et puis, j'ai bien aimé tout de suite.

  • Speaker #0

    Et après, ça a été quelque chose que tu as refait encore et encore pendant 20 ans.

  • Speaker #1

    Après, au début, au final, je n'en consommais pas tant que ça. Mais je me suis rendu compte au fur et à mesure des années que je gardais tout. Parce que je prenais beaucoup de coke en soirée et d'autres trucs. Et je me rendais compte qu'au final, à chaque fois, je gardais un peu pour... pour me faire du crack à la maison en rentrant. Et au fur et à mesure des années, ça devenait de plus en plus...

  • Speaker #0

    Et la dernière fois, tu t'en souviens ?

  • Speaker #1

    Ouais. Alors, je ne sais plus, en novembre, si c'est 30 ou 31 jours, c'est 30. Donc, c'était le 30 novembre. Le matin, je lui ai dit à ma mère que je prenais du crack. Et le soir, j'ai pris mon dernier gramme de crack.

  • Speaker #0

    Et donc, tu as pris cette décision comme ça ?

  • Speaker #1

    Non, sur le coup, non. Moi, je l'avais dit à mon père un mois avant. Et je l'avais dit, on ne le dit pas à maman pour l'instant, parce que j'ai peur de la tuer en lui disant. Et je ne sais pas, ce matin, je me suis réveillé, je me suis dit, il faut que je lui dise. Donc, quand je me dis un truc, je le fais tout de suite. Je l'ai appelé, je lui ai tout dit, donc ça a duré quelques heures quand même. Et je ne l'ai pas tué. Mais quand je lui ai dit, je lui ai dit « Maman, je suis intoxicot, dans trois jours j'ai rendez-vous dans une cure, enfin dans un hôpital psychiatrique, et s'il faut que je dise que je suis suicidaire pour qu'il me garde, je le ferai parce que je pense à ça matin, midi et soir, depuis un mois où je l'ai dit à papa, c'est dans ma tête comme jamais ça l'était avant. » Le lendemain matin, je me réveille, je descends les escaliers, papa me dit qu'il va avoir son pote garage-liste, et là je mets ma playlist sur l'enceinte de la maison, il y a une musique qui passe. Et là, j'ai pleuré comme jamais j'ai pleuré dans ma vie. Pour moi, je me rends compte que j'ai beaucoup pleuré. Indirectement pour moi, mais pas directement. Je ne sais pas trop comment expliquer. Et là, j'ai vu 20 ans de ma vie, mais c'était un film. Tout, tout, tout, tout est passé. Et là, j'ai dit, c'est fini. Et il y a deux autres musiques qui sont passées après. Donc ça a duré bien 15, 20 minutes au final. J'ai continué à chialer après tout ça. Mon père qui arrive et qui me fait « qu'est-ce qu'il y a ? » Ça va parler de choses. Je me suis dit « si, si, ça va trop bien justement. » Je pleure de joie.

  • Speaker #0

    Est-ce que tu penses que c'était comme un signe, un appel, cette chanson ?

  • Speaker #1

    C'est marrant parce que je l'avais chasamée quelques jours avant. Elle passait par hasard à la radio, je l'avais déjà entendue. Et elle m'a marqué cette musique. Et là, à ce moment-là, ce n'était pas le bon moment encore. Et là, elle est arrivée ce jour-là et ce n'est pas par hasard.

  • Speaker #0

    C'est ouf ce déclic. Et entre ces deux événements, le début et la fin, est-ce qu'il y a eu des tentatives d'arrêter ?

  • Speaker #1

    En fait, entre le jour où j'ai dit à mon père et le jour où j'ai dit à ma mère, j'en prenais tous les jours. Je l'ai caché à mon père, il ne le sait pas. Il doit commencer à le savoir, je crois que je l'ai dit maintenant. Mais il croyait que j'étais clean. Je trouvais des moyens. Je lui avais donné ma carte bleue, mon téléphone. Enfin, pas mon téléphone, mais les applications qui permettaient d'acheter de la drogue. Mais je trouve encore des moyens, je ne vais pas dire lesquels, mais je trouvais des moyens de m'en procurer. Et j'ai réussi à m'acheter un gramme par jour pendant un mois. Et après, par contre, depuis, si c'était la question, d'entre le 1er décembre et aujourd'hui, j'y pense tous les jours.

  • Speaker #0

    Donc c'est encore dur, même si ça fait six mois.

  • Speaker #1

    Il y a eu en six mois, il y a eu plein d'étapes. Il y a eu les deux premiers mois où... où je m'en sortais, je n'y pensais pas, mais je savais qu'il fallait que je fasse gaffe. Il y a eu deux mois où pour moi c'était derrière. Je me suis même retrouvé dans une soirée en Inde où il y a un saladier de coke qui est arrivé et je leur ai dégagé la gueule en mode « c'est quoi votre merde ? » . Et depuis la cure, c'est vraiment difficile. C'est marrant parce que je pense, en fait la cure ça te fait repasser. J'étais dans un monde parallèle depuis quatre mois, voyage. enfermé avec mon père, enfin enfermé en plus guillemets, et retournant au cure, en fait, c'était retrouver des personnes qui sont dans le même, dans la même maladie que moi, et en fait, aller chercher de la complication, parce qu'on va trop parler, j'ai eu des trucs, c'était qui ton dealer, comment tu fumais ça, à la canette ou à la bouteille, enfin.

  • Speaker #0

    On passe par le mental, et quand t'es passé en Inde, je pense que là, t'es passé par quelque chose de spirituel. qui te dépasse totalement et qui te raccorde à quelque chose qui te prend directement au cœur.

  • Speaker #1

    Ah bah oui, il se fait mal aussi. En fait, je ne sais pas, mais du coup, j'y pense beaucoup plus depuis que je suis passé par là. Mais c'était trop facile jusqu'à là, en fait. Tout le monde me dit, ça a l'air trop facile pour toi. À ce moment-là, c'était facile. Là, depuis deux mois, c'est redifficile, tu vois.

  • Speaker #0

    Est-ce que tu penses que le voyage que tu vas entreprendre là en vélo... Ça va beaucoup t'aider aussi ?

  • Speaker #1

    Je me suis toujours rendu compte, dès le début, quand j'ai vu les médecins, parce qu'au début, pendant trois mois, jusqu'à ce qu'on parte en Inde, j'avais trois rendez-vous par semaine. Et les gars, ils me disaient, enfin les médecins, il ne faut pas que tu fuis la réalité. Mais en fait, ma vie, c'est ça.

  • Speaker #0

    Mais ta réalité, c'est toi qui te l'as créée ? Oui,

  • Speaker #1

    voilà, c'est ça.

  • Speaker #0

    Ce n'est pas parce que ce n'est pas la leur que...

  • Speaker #1

    C'est pas la leur, mais moi, je sais depuis toujours que... que j'ai envie de faire ce tour du monde et que d'aller voir tout ce qui se passe dans le monde me fait oublier cette drogue.

  • Speaker #0

    Et ça te transforme ?

  • Speaker #1

    Ouais.

  • Speaker #0

    Et donc, qu'est-ce qui te fait tenir encore aujourd'hui ?

  • Speaker #1

    Ce qui me fait tenir, c'est en premier mes parents, enfin moi, parce que je suis quand même beau. En premier, moi. Je dis toujours mes parents avant, mais il faut que je les dise moi. Parce que je ne suis pas fier d'être tombé dedans, mais je commence à être fier de m'en sortir. Parce que tous les médecins, ils disent que quand on en a parlé autour de nous, ils nous ont dit à mes parents, vous aurez un toxico dans votre vie. Je serai un toxico toute ma vie parce que j'en aurai.

  • Speaker #0

    C'est un peu encourageant ça. Ouais,

  • Speaker #1

    ouais, ouais, mais c'est lucide aussi. Je ne sais pas si c'est le bon mot lucide, mais c'est la vérité. C'est que cette drogue, je l'ai su dès le début. Enfin, pas à 18 ans, parce qu'à 18 ans, j'avais encore douleur dans ma tête. Mais à 25 ans, je me suis dit, elle fera partie de moi toute ma vie, cette drogue. J'espère que je m'en défraie, mais elle fera partie de moi toute ma vie.

  • Speaker #0

    C'est comme une connexion qui se fait dans le cerveau. Oui,

  • Speaker #1

    une connexion de merde. Je ne vais pas avoir une connexion avec une fille qui se partage ma vie, mais non, c'est avec la drogue.

  • Speaker #0

    Eh bien, il faudra remplacer cette accoutumance par celle de l'amour, peut-être. Qui sait ?

  • Speaker #1

    Inch'Allah.

  • Speaker #0

    Carrément. Et si on revient un peu sur les journées que tu passais à l'époque ? Quand tu étais dépendant, c'était quoi une journée type ?

  • Speaker #1

    Après 20 ans, les journées, elles changent. Ouais,

  • Speaker #0

    je me doute.

  • Speaker #1

    Au début, c'était une journée classique de mec normal qui, de temps en temps, va déconner. Et c'est la dernière année où là, ça a vraiment été... J'en rêvais la nuit. Donc, on ne peut pas dire que c'est un rêve, mais plus un cauchemar, du coup. Je rêvais que je prenais du crack la nuit, je me réveillais le matin comme si j'en avais pris, donc en manque. Donc dès le matin, je me réveillais, il fallait que j'ai ma dose. Il fallait que j'appelle le dealer dès le matin, on va trouver un dealer à 8h du mat.

  • Speaker #0

    Parce que tu n'en avais déjà plus de la vie ?

  • Speaker #1

    Ah bah non, quand je commence quelque chose, je le finis.

  • Speaker #0

    Donc tous les matins, c'était la même galère ?

  • Speaker #1

    Il y avait des matins où ça allait, enfin bref. Mais avant 14h, j'avais mon gramme.

  • Speaker #0

    Et comment ça s'organisait au niveau de la vie pro ?

  • Speaker #1

    J'ai eu la chance d'être très bon dans mon métier et j'arrivais quand même à gérer les deux. Mais du coup, j'étais quand même beaucoup moins productif quand je ne trouvais pas ma dose le matin parce que j'étais plus sur mon téléphone à envoyer des messages aux 40 dealers que j'avais sur mon téléphone qu'à faire ma mise en place et à préparer mon service pour le midi.

  • Speaker #0

    Alors même si je n'aime pas les étiquettes et que je n'aime pas qu'on parle de soi à travers un métier, ça me rend curieuse. Qu'est-ce que tu faisais avant dans la cuisine ? Ah,

  • Speaker #1

    je faisais de la cuisine.

  • Speaker #0

    Ok.

  • Speaker #1

    20 ans de cuisine, 20 ans de crack. Jusqu'à il y a deux mois, je me disais que c'était inhumain de faire ça. Et les médecins, parce que j'étais diagnostiqué TDAH, je n'aime pas trop ce mot, mais ils me disaient qu'en fait, cette drogue me canalisait et c'était mon médicament. C'est encore un bon conseil. Et le traitement qu'ils te proposent pour le TDAH, c'est de la méthamphétamine.

  • Speaker #0

    On remplace un dealer par un autre.

  • Speaker #1

    Oui, voilà. Et puis, en fait, tu te dis, je fais quoi ? Je continue à me... Mais le TDAH, c'est un cerveau qui va un peu à mille à l'heure. Et je pense que jusqu'à il y a six mois, je n'étais pas capable de gérer mon cerveau. Et aujourd'hui, je le gère et je n'en ai plus besoin. Enfin, je n'en ai plus besoin. Non, je n'en ai jamais eu besoin, mais je n'étais pas capable de gérer mon cerveau avant. En fait, j'ai eu besoin de faire plein de trucs en même temps, donc de me droguer et de faire de la bouffe, par exemple.

  • Speaker #0

    Et aujourd'hui, tu gères ton TDAH beaucoup mieux, mais sans traitement alors ?

  • Speaker #1

    Oui, non, j'ai refusé le traitement. Je leur ai dit, je n'ai pas envie d'arrêter une drogue pour une autre. Le gérer, vu que j'ai quand même... Une partie du cerveau qui est quand même beaucoup moins remplie par la recherche de drogue, me permet de me concentrer sur les tâches à faire. Parce que du coup, vu que je dois faire plein de choses en même temps, je m'éparpille et je me perds. Donc à l'époque, je m'éparpillais et je me perdais. Vu que je prenais du crack à côté, j'oubliais ce que je devais faire à la base.

  • Speaker #0

    D'accord.

  • Speaker #1

    Aujourd'hui, je l'oublie toujours. mais dans la journée ça revient et j'y repense donc en fait Avant, j'oubliais. Là, dans la journée, ça revient et je le refais.

  • Speaker #0

    D'accord.

  • Speaker #1

    Donc, je suis à jour sur mes tâches administratives, tout ça.

  • Speaker #0

    Ça, ça donne aussi un bon sentiment de tranquillité parce que tu as plein de fichiers ouverts dans le fait.

  • Speaker #1

    Oui, c'est ça. Le partenaire met tous les rendez-vous. En fait, c'est un stress que tu as en plus et que j'ai moins aujourd'hui. Je n'ai jamais réussi à gérer ça pendant toute ma vie. Et franchement, je suis trop content de réussir à gérer ce truc-là. Ça paraît banal pour certaines personnes. Mais pour moi et pour tous les gens qui sont TDAH, je pense qu'entendre dire que tu réussis un peu mieux à gérer ta vie...

  • Speaker #0

    C'est un combat. Moi, je le suis aussi et c'est un combat quotidien. Moi, je me bats aussi avec la montre. Et toi, c'est quoi ton rapport à la montre ?

  • Speaker #1

    La montre ?

  • Speaker #0

    Ouais. Au temps.

  • Speaker #1

    Au temps ? Je gère très bien le temps. C'est vrai ? Ouais. Tu vois, par rapport à ton arrivée, j'étais timing. Il me restait deux toasts à faire pour que je sois prêt. Mais non, après, c'est mon métier aussi qui m'a forgé à bien gérer le temps, parce que tout est à la mieux. Tout est une question de minutes en cuisine. Je pense que c'est grâce à ça aussi. Je n'ai pas trop de problèmes avec ma montre.

  • Speaker #0

    Si je comprends bien, tu as toujours gardé un pied dans la réalité à travers ton travail, qui t'a ancré quand même, et un pied dans la folie de la drogue.

  • Speaker #1

    Oui, j'ai un côté où je suis le plus gentil. Je ne parle plus d'anti du monde, mais je suis quelqu'un de très gentil, qui est très humain, qui aime aider les personnes. Alors ça s'est souvent retourné contre moi, mais je pense que la drogue, elle y était aussi pour quelque chose, parce que je devais mal exprimer ce que je voulais faire de base. Dans mes couples, j'ai toujours voulu aider et en fait, ça s'est retourné contre moi, par exemple. J'ai oublié les questions du coup, de base.

  • Speaker #0

    Mais ce n'est pas grave.

  • Speaker #1

    La question de base,

  • Speaker #0

    elle est imprévue. de moi aussi je l'ai oublié bienvenue chez les TDA et ben tu sais quoi on va passer à la suivante dans tout ça est-ce qu'il y a eu un moment où t'as senti que t'existais plus vraiment dans cette vie là ouais l'année dernière j'étais

  • Speaker #1

    en couple et autour de moi tout le monde pensait que je m'étais calmé sur la fête parce que je suis un fêtard de base et que je m'étais rangé Et je me rendais compte que je longeais les murs parce que cette drogue, elle te rend vraiment parano. Et je me cachais un peu derrière ma meuf en mode je suis clean, je suis sage, tout ça. Et mais moi dans ma tête, et je pense que ça a été le avant du déclic, c'est que tous les jours je me disais en fait je ne sers plus à rien sur cette terre. En cuisine, je ne progresse plus, même si je progressais encore. Je n'ai plus rien à apporter. Et quelqu'un d'autre mérite plus sa place que moi. Je ne suis pas croyant, je ne suis pas baptisé ou quoi que ce soit. Mais je crois en quelque chose. Et je m'étais dit, il va me prendre ma vie, elle ne sert plus à rien. Être là pour donner de l'argent à des dealers et à trouiner le cerveau, ça ne sert à rien.

  • Speaker #0

    Donc il y a eu une grosse perte de sens et c'est à ce moment-là que tu as senti que tu n'existais plus vraiment dans ta vie ?

  • Speaker #1

    En fait j'existais mais je n'existais plus non plus.

  • Speaker #0

    Et c'est quoi ce truc qui résistait en toi, même tout au fond à ce moment-là, qui fait que tu tenais bon quand même ?

  • Speaker #1

    J'ai toujours su que j'étais quelqu'un de particulier et qu'on m'a toujours dit que je l'avais dans mes mains. Je suis doué dans pas mal de trucs et je me suis dit, en fait je n'avais plus trop d'espoir. Mais je n'arrêtais pas de me dire, putain Antoine, c'est du gâchis, c'est du gâchis, c'est du gâchis. Donc à ce moment-là, je ne me rendais pas compte. Mais aujourd'hui, avec du recul, en fait, j'avais toujours ce truc-là en moi qui me disait, Antoine, tu dois faire quelque chose de ta vie.

  • Speaker #0

    Et quand tu parles de faire quelque chose de ta vie, est-ce que c'est lui donner un sens ? Et si oui, est-ce qu'aujourd'hui, tu as senti que tu voulais donner un sens à ce que tu as vécu ?

  • Speaker #1

    Oui, en fait... Le sens il est venu quand j'ai fait mon... En fait je suis de Lille, et ma cure elle est en Bretagne, et un matin je me suis réveillé, je lui ai dit je prends mon vélo et je pars en Bretagne. Et je voulais voir déjà si mon corps il était encore apte à... Parce que j'ai jamais fait de vélo en vrai, le vélo je l'ai acheté, j'avais fait 50 bornes avec mon frère la veille, et je voulais voir si mon corps il était encore au paix quoi. Et sur la route, à un moment, moi j'ai fait 1200 barres dans 9 jours quand même. C'est minable,

  • Speaker #0

    t'avais la rage. Ouais,

  • Speaker #1

    j'ai pas vu le paysage, j'étais peut-être dans le guidon, je chantais, je faisais le con, mais sinon j'ai rien vu. Et à un moment, je passe devant Action. À ce moment-là, avec ma famille, il y a des gens très proches qui étaient au courant. Et j'ai quand même beaucoup, beaucoup de potes. Et je savais que ça allait se savoir. Et je ne voulais pas que ça se sache par téléphone arabe. Je voulais que ça se sache à ma façon, de le dire moi-même. Mais je n'avais pas envie non plus d'avoir le regard des gens. Je me suis dit, allez, j'achète un drapeau. Et j'ai écrit l'île Bretagne des Intox.

  • Speaker #0

    C'est génial.

  • Speaker #1

    Donc je suis rentré à Action, j'ai dit vous vendez drapeau ? Ils m'ont dit non, donc j'ai acheté un manche à balai et deux têtes d'oreiller. Je me suis mis sur le trottoir, j'ai acheté trois feux de kiki, bref. Et là je me suis mis sur le trottoir à mettre mon drapeau et j'ai dit, bon bah si je le mets sur mon vélo, je vais faire un post sur Insta et je vais raconter ma vie.

  • Speaker #0

    Et c'est là que ça a commencé.

  • Speaker #1

    Et là, en fait, sur le coup, c'était égoïste parce que je me suis rendu compte que mon déclic, que je l'ai eu grâce au fait de le dire à mes parents. Ça a pris un peu de temps. Mais donc il y a la musique, mais le déclic c'est quand même les parents avant. La musique a fait que le déclic se lance. Et du coup je me suis dit, je vais le dire à tout le monde comme ça, comme ça ils ne vont pas me regarder. Si les gens me détestent, ils me supprimeront, ils me bloqueront, ils m'enverront des messages de haine, mais ça ne me fait rien les messages. Avoir quelqu'un en face de moi qui me dit que je suis une merde, j'ai un peu plus de mal. Et en fait ça a pris de l'ampleur cette histoire. Et je me suis rendu compte qu'en fait on a tous une addiction.

  • Speaker #0

    Et tu te sentis moins seul ?

  • Speaker #1

    Je me sentis moins seul et je me suis rendu compte qu'en fait, plein de gens m'envoyaient des messages en me disant « Moi j'ai ça, moi j'ai ci, moi j'ai ça. » Et je me suis dit « En fait, peut-être que mon histoire, elle peut aider. » Donc ça donne un sens à ma vie.

  • Speaker #0

    Et à partir de là, il y a eu une autre énergie dans ce chemin que tu entreprends ?

  • Speaker #1

    L'autre énergie, elle s'est créée en Inde. Quand j'étais en Inde, je ne voulais pas aller dans ce pays à la base. En fait, mon père, il devait aller au Sri Lanka, parce que je l'ai fait avec mon ex. On avait loué un tuktuk à deux et on avait fait le tour du Sri Lanka pendant un mois et demi. Et j'avais vraiment trouvé ce pays incroyable. C'est le pays le plus gentil du monde. C'est incroyable. Les mecs, tous les jours, ils doivent faire une BA. Et on l'a ressenti pendant notre voyage. Moi, j'ai des varices. Un jour, j'arrive à un Airbnb. Le mec, il me dit, ah, t'as des varices. Je t'emmène à l'hôpital ayurvédique. Tu sais, le truc de plantes.

  • Speaker #0

    Ouais.

  • Speaker #1

    On a fait une heure de route, on est arrivé à l'hôpital, l'hôpital gratuit, ils me donnent un traitement à base de plantes et des massages à faire. Bon, je n'ai jamais fait ce que c'était dans la drogue, mais le truc, il marchait, quoi.

  • Speaker #0

    Incroyable.

  • Speaker #1

    Un mec gratuitement comme ça, tu lui demandes, tu lui donnes de l'argent et il te dit non. Après l'Inde, ça est encore... On ne peut pas comparer deux pays. Mais pour en revenir à la question, du coup, en Inde, je ne sais pas ce qui se passait, mais en fait, j'ai vu la misère. Ce n'est pas ce qui m'a marqué sur le voyage, parce que tout le monde dit « tu prends un coup en étant là-bas » . Moi, je n'ai pas pris un coup parce que tout le monde était heureux, qu'ils soient riches ou pauvres. Tout le monde se mélange.

  • Speaker #0

    Il y a une puissance du cœur même au creux, pas d'isère profonde.

  • Speaker #1

    J'en ai des frissons rien qu'en parler. Les gens ne se mélangent pas entre eux, mais communiquent entre eux. Nous, par exemple à Lille, on ne verra jamais un Français de Marc-Andre Barrel parler à un Roubaisien. un rebus roubé.

  • Speaker #0

    C'est le système de caste.

  • Speaker #1

    Là-bas, il y a les castes, mais ils parlent. J'ai déjà vu des millionnaires demander leur route à un tuktuk et ils mettent un quart d'heure à... Tu ne sais pas ce qu'ils se disent, mais ils parlent pendant un quart d'heure. Ça sourit, ça rigole et tout. Je pense que tu ne verras jamais chez nous. Ça, les bidonvilles, je ne voulais pas les faire non plus. En fait, tu vois que tous les déchets de France, ils arrivent là-bas. Dans le bidonville en question que j'ai fait à Mombé, C'est 10% des déchets mondiaux qui arrivent.

  • Speaker #0

    Incroyable !

  • Speaker #1

    Donc on leur achète leurs fringues et on leur rend nos merdes. Et plein de trucs. Et en fait, les gens venaient vachement me voir, je ne sais pas pourquoi. Après j'ai rencontré un gourou qui m'a dit que dans une autre vie j'étais un chaman indien. Je ne crois pas trop, enfin je y crois sans y croire. Mais je ne sais pas, il y a quelque chose qui s'est fait et je me suis dit, putain, je rentre à pied d'Inde. Et puis après, il y avait la cure, tout ça. Et je me suis dit, c'est un truc qui se prépare, donc je ne l'ai pas fait. Mais du coup, j'ai envie de partir faire le tour du monde sans prendre l'avion.

  • Speaker #0

    C'est énorme. Et toujours, en fait, dans ce mouvement d'aider à travers...

  • Speaker #1

    Ouais, mais en fait, avec les idées qui me fuitent dans tous les sens. C'est avant, je pars en Ouganda, ce n'est jamais été en Afrique. Et je me suis dit que je me suis allé créer une asso. Moi, je vais partir là-bas. J'ai vu qu'en fait, dans l'avion, j'avais le droit de prendre deux valises. Donc j'en ai mis avec mes fringues et une avec des cadeaux, des bouquins, des crayons, des trucs comme ça. Et en fait, l'idée, c'est d'arriver avec des cadeaux. Moi, au courrier, les premiers, tu vois, aller voir un mec dans la rue, n'importe quoi. Et du coup, un cadeau qui grandit où en fait, moi, j'offre le premier. Et puis après, à l'assaut, s'il y a des gens qui veulent donner un peu d'argent. Après, je vais voir par exemple une famille. Si on réussit à faire un cadeau à une famille qui est un peu plus gros. Après, aller voir une école et monter. Après, je ne sais pas si ça prendra, mais tu vois, toujours pas arriver en mode touriste. Je veux voir ton pays, mais...

  • Speaker #0

    un système de...

  • Speaker #1

    Tourisme, je veux voir mon pays et si je peux aider à... Toi, même rester une semaine dans un truc, à bricoler, à faire n'importe quoi, enfin, je ne suis pas un grand bricoleur, mais pas qu'être là en tant que touriste, mais apporter un truc aussi si je peux, quoi.

  • Speaker #0

    Et dans tout ce que tu fais, donc ton projet d'assos, le fait de partir en vélo, les voyages et la cure, qu'est-ce qui t'a le plus aidé ?

  • Speaker #1

    Le voyage. La cure, elle m'a pas aidé. La cure, elle m'a... La cure, elle m'a aidé à me rendre compte que j'en étais pas sorti et qu'il fallait que je fasse attention toute ma vie. Donc elle m'a aidé d'un côté quand même, parce que sans ça, peut-être qu'un jour, je serais tombé sur un dealer et j'aurais dit oui. La cure m'a conforté dans l'idée où il faut que je fasse vraiment attention. Mais le voyage m'a fait rendre compte qu'en fait, quand je suis en voyage, j'oublie toute cette merde et que même si on peut dire que c'est fuir le truc, en fait, je veux bien le fuir. Pour l'instant, à part ma famille, je n'ai pas d'attache ici. Et puis peut-être qu'un jour, en voyageant, j'aurai une attache quelque part.

  • Speaker #0

    Est-ce que le Antoine qui part est le même que le Antoine qui revient ?

  • Speaker #1

    Oui, le Antoine, il ne change pas. Franchement, le Antoine, il ne change pas. Il réussit avec la drogue en moins à avoir son cerveau qui marche mieux pour savoir un peu plus où il va.

  • Speaker #0

    C'est pas mal dit ça.

  • Speaker #1

    Ouais, ouais, ouais. Parce que j'ai toujours rêvé de faire ce tour du monde. Mais la drogue, dès que je rentrais de voyage, j'étais allé à l'aéroport dans le pays avant d'arriver en France. Je pensais déjà à appeler le dealer. Ou je l'avais déjà même appelé. Là, aujourd'hui, je dois juste penser à ne pas en prendre. Je ne dois pas penser à comment en avoir. Ça prend beaucoup moins de temps à dire non, j'en prends pas qu'à prendre ton téléphone, à trouver un dealer. Et puis après, quand tu te drogues, tu n'as plus de cerveau. et tu penses à tout sauf à ça. En fait, aujourd'hui, vu que je suis en arrêt de travail, j'ai quand même vachement de temps pour réfléchir à tout ce que je vais faire une fois que je partirai.

  • Speaker #0

    Et t'as dû lâcher quoi pour t'en sortir ? Des connaissances ?

  • Speaker #1

    Des amis ? Personne n'était au courant. Jusqu'au jour où je disais à mon père que j'étais le seul au courant, à part les dealers. Donc j'ai pas dû... Après, j'ai fait quand même un tri. Le tri, c'est pas en mode j'ai pris mon répertoire et j'ai supprimé des gens, mais il y a des gens que t'enlèves de ta vie parce que en fait, la drogue, elle te fait avoir moins conscience de la personne que t'es en face de toi et que quand t'es clean et que t'as tout ton cerveau, tu lui dis en fait, ce mec-là, il m'apporte rien. C'est des trucs qui se font naturellement. Du coup, lâcher... Non, lâcher mon métier. Lâcher la cuisine, ça me fait un bien flou. Ça fait 20 ans que je cours, que je me mets dans des missions tout le temps impossibles parce que j'ai toujours eu la pression de mon père pour le boulot. Et vu que je faisais le coin à côté, je pense que pour remettre le pendule à l'heure, je me lançais sur des missions de ouf pour le rendre fier. Mais des missions qui m'ont bouffé ma vie. Là, ça fait six mois que je ne travaille pas.

  • Speaker #0

    Le rêve ?

  • Speaker #1

    C'est le bonheur.

  • Speaker #0

    Je m'adouce.

  • Speaker #1

    C'est le bonheur. Après, je veux vraiment me débarrasser de cet arrêt de travail parce que je n'ai pas 100% de ma liberté, du coup, parce que je ne peux pas faire ce que je veux, parce que je suis fliqué quand même par mon boss, qui a appelé la sécu pendant que j'étais en Inde pour leur dire que j'étais en vacances pendant mon arrêt maladie, des trucs comme ça, pour que je les rembourse, alors que je gagne moins que le SMIC. Enfin bref. Et voilà, du coup... Vous savez, je suis perdu. Mais du coup, je n'ai pas dû me séparer de grand-chose, juste de mon métier. Et pour la première fois de ma vie, je n'ai plus la pression. Mon père m'a dit, en fait, tu t'es mis une pression pour rien, de ce qu'il dit.

  • Speaker #0

    Ça t'a libéré,

  • Speaker #1

    ça ? Et du coup, ce truc-là de mon père, qu'il ne soit pas derrière moi, et qu'il me dise, prends ton temps. Et qu'aujourd'hui, même quand je lui dis, parce qu'avant, il y a un an, j'aurais dit, je veux partir faire le tour du monde à pied. il m'aurait dit non tu bosses quoi Aujourd'hui, il a compris que j'étais différent, qu'il fallait accepter que j'ai des projets différents que la moyenne.

  • Speaker #0

    Est-ce que tu penses que c'est ça aussi qui t'a fait tomber dans la drogue, ce besoin d'être quelqu'un d'autre ?

  • Speaker #1

    Je suis tombé dans la drogue parce que je voulais toujours montrer que j'étais capable de bouffer le plus de tasses possible dans la soirée, d'être le plus con en gros. Le plus con ? Le plus con, c'est con de faire des concours de celui qui se défonce le plus la gueule.

  • Speaker #0

    D'accord.

  • Speaker #1

    J'ai toujours voulu... Je suis quelqu'un qui aime bien plaire. Et ma façon de plaire à l'époque, c'était d'être le plus fou.

  • Speaker #0

    D'accord. Tu étais dans ce personnage-là. Aujourd'hui, tu te rends compte que c'était un rôle que tu jouais ou c'était vraiment réel à l'époque ?

  • Speaker #1

    Non, j'en ai trop fait. Mais je reste quand même qui je suis. Et je sais que de temps en temps, j'ai besoin de lâcher les chevaux et de mettre une perche.

  • Speaker #0

    Et quand tu es du maître une perche,

  • Speaker #1

    c'est... Pas aller boire des coups avec des potes.

  • Speaker #0

    De lâcher la pression.

  • Speaker #1

    En fait, je m'en rends compte quand même. Mais c'est pas bien. Enfin, il faut pas... Parce que l'alcool, c'est quand même le meilleur ami de la tentation d'après de faire des conneries. Donc, il faudrait que je sois abstinent total d'alcool. Enfin, pas me mettre...

  • Speaker #0

    Mais là, ça te met une pression dingue aussi. Ça te met une pression folle.

  • Speaker #1

    Oui, en fait, c'est ça. C'est tout arrêté. Et en fait, j'ai tellement bossé dans ma tête pendant six mois que je sais que je ne tomberai plus dans la cam. Je n'en ai jamais repris jusqu'à aujourd'hui. Mais si il y a un matin où je me réveille et je me suis pris une timbale et que je me rends compte que j'en ai pris, je ne retomberai pas dedans le lendemain. Ce n'est pas du tout un bon conseil, mais moi, personnellement, je sais que...

  • Speaker #0

    Parce que tu as fait assez de chemin pour voir...

  • Speaker #1

    En fait, je me suis rendu compte qu'avant, dès que j'avais l'envie, j'appelais le dealer et je ne réfléchissais pas au reste. Aujourd'hui, je sais que j'en ai envie tous les jours, mais que je ne le fais pas. Et que même si un matin, en fait, si un matin où je me réveille, que je vois un sachet à côté de moi, je vais culpabiliser, ça me fera chier. Mais justement, en fait, encore plus, ça me dira non, mais tu l'as fait hier, tu ne le refais plus.

  • Speaker #0

    Donc, tu as l'impression, tu as cette impression d'être plus fort aujourd'hui, plus vrai aussi.

  • Speaker #1

    Ouais, ouais, ouais. Non, mais aujourd'hui, je suis 100% moi-même et j'ai plus... J'ai plus ce truc-là où j'ai envie de plaire ou pas plaire aux gens. Aujourd'hui, tu peux me dire que tu m'aimes pas, ça me dérange pas.

  • Speaker #0

    Moi, ça m'a beaucoup frappée sur ton profil Insta. En fait, c'est ce qui a percuté en premier. Tu utilises un langage des fois cru, très vrai, et il n'y a pas ce besoin de se conformer à se dire « mais non, il faut que je parle de telle manière, il faut que j'utilise tel ton » .

  • Speaker #1

    C'est ça, après, pour moi, avoir un maximum d'abonnés, c'est de toucher un maximum de monde pour un maximum aidé. Que j'en ai... pas combien, je m'en fous, à chaque fois on me dit t'as 11K ou je sais pas quoi, je regarde même pas, je m'en fous. Mais quand je vois que ça monte, je me dis putain, en fait...

  • Speaker #0

    Ça parle.

  • Speaker #1

    Ça parle plus, enfin ça peut aider. C'est que ça interpelle et si ça interpelle, c'est que ça touche.

  • Speaker #0

    Après, bien sûr, c'est hyper important parce qu'au plus, comme tu le dis, au plus il y aura de monde qui va entendre ton message, au plus il y aura d'impact. Mais si cet impact est créé autour de la personne que tu n'es pas, autour d'un masque,

  • Speaker #1

    il n'a plus d'importance. Non, du coup, je ne peux pas le m'envoi. C'est comme là, je te dis que je pourrais me réveiller un matin en ayant pris. Normalement, j'aimerais dire plus jamais, plus jamais, plus jamais. Mais je sais dans ma tête que plus jamais, je retomberai dedans. Mais que ce n'est pas parce qu'il y a un jour où je me réveille que je l'ai fait, que je retomberai.

  • Speaker #0

    La vie, j'ai l'impression que c'est un peu ça aussi. C'est des fois, tu fais trois pas en avant, t'en fais même dix, et puis paf, il arrive un truc et t'en fais deux en arrière.

  • Speaker #1

    Toi, il vaut mieux se dire, ça peut être arrivé, mais c'est pas parce que ça réarrive que je retomberai dedans. Plutôt que de se dire que je ne retomberai jamais dedans. Et en fait, il y a un jour où tu craques et là, t'es reparti comme en 40 et que c'est encore pire. Parce que quand tu retombes, quand t'arrêtes et que tu reprends, tu reprends pire à chaque fois. Mais par contre, du coup, je me repense à un truc, est-ce qu'Antoine change ? Bah oui, du coup, j'ai changé. Parce qu'avant, le regard des gens était important pour moi. Aujourd'hui, j'en ai plus rien. Mais je parle du personnage intérieur.

  • Speaker #0

    Tes valeurs qui tu es, ça bouge pas. Et si tu pouvais retourner parler au petit Antoine, au jeune Antoine d'il y a 20 ans, tu lui dirais quoi ?

  • Speaker #1

    Trache la route. Franchement, je lui dirais rien parce que je te le disais tout à l'heure, je me suis posé la question Toute ma vie, putain, pourquoi cette drogue est arrivée sur ma route ? J'ai eu la réponse il y a quelques jours où, en fait, je pense que je suis arrivé sur Terre pour tomber dedans, pour comprendre comment ça marche et pour aider les gens à peut-être s'en sortir.

  • Speaker #0

    C'est de donner un sens et transformer ce que tu as vécu. Et si tu pouvais laisser une parole à quelqu'un qui est encore dedans, qui est encore sur le chemin, tu lui dirais quoi à cette personne ?

  • Speaker #1

    Chaque personne est différente. Pour ceux qui font ça en cachette et qui se cachent derrière ça, parlez-en. Même si vous avez peur comme moi de tuer vos parents ou quoi que ce soit, en fait, on est tous solides. Après, si vous n'avez pas de parents, pas de famille, allez voir... Des proches, si vous n'avez pas trop de proches, les hôpitaux, ils sont quand même là pour vous.

  • Speaker #0

    Tu ne leur conseillerais pas de prendre un billet d'avion ?

  • Speaker #1

    Si, prendre un billet d'avion. Après, le truc, c'est que quand tu es dans la drogue, tu n'as pas d'argent. Oui, c'est vrai. Mais franchement, les addictos, ils sont bons. Moi, je n'ai pas passé la meilleure des cures, mais tous les médecins que j'ai vus avant, psychologues, alors allez voir un psychologue, parce que le psychologue, il te fait aller chercher un peu de loin. J'ai vu une psy qui, j'avais l'impression qu'elle ne m'avait rien apporté. Et en fait, je me rends compte qu'elle m'a apporté. Le fait de parler, en fait. Le fait de tout lâcher à quelqu'un où, pour le coup, même si tu as peur du regard des gens, lui, tu t'en fous parce que c'est son métier. Moi, ça m'avait fait vachement de bien. Aller voir les centres d'addictos. Moi, je t'ai reçu au début par un infirmier, après par un addicto et pareil. Ils te parlent, ils s'y connaissent dans le truc, donc ça aide. Et fais-t'y croire. Parce que si tu n'y crois pas, tu ne peux pas y arriver. Tout le monde me dit « c'est trop dur, je n'y arrive pas » . Si tu dis que c'est trop dur et que tu n'y arrives pas, tu n'y arriveras pas. Si tu te dis « je peux le faire » , et tu peux le faire, tout le monde peut le faire. On a une force en nous qu'on ne connaît pas. Moi, j'ai rendu compte en vélo, en fait, le vélo, les 1200 bornes en vélo, je ne pensais pas que j'allais y arriver en partant.

  • Speaker #0

    Donc, c'est aussi de se prouver qu'on peut faire plus que ça, qu'on est plus que ça.

  • Speaker #1

    Oui, si tu as réussi à tomber dedans, c'est que c'était pour ton chemin. Mais tu peux y arriver. Tu peux y arriver et ce n'est pas parce que tu retombes dedans de temps en temps. Moi, j'ai mis 20 ans à m'en sortir. Il ne faut pas croire que pendant 20 ans, je n'ai pas essayé de m'en sortir. J'ai essayé de m'en sortir tout seul. Mais je ne me donnais pas les bons moyens. Je faisais ça une fois que je n'avais plus rien, à 4-5 heures du mat, et que je regardais sur Internet. Et là, tu n'as pas ton cerveau. Mais pense-y clean. Regarde bien sur Internet. Tu mets Addicto. Tu vois, il y a des centres partout. Moi, quand j'étais en cure de désintox à Auré, pour moi, c'était un village le truc. En fait, tu as une cure de désintox. Donc, tu as des trucs d'Addicto dans toutes les villes de France, je pense.

  • Speaker #0

    Mais qu'est-ce que tu dirais à cette personne qui a essayé, mais qui a échoué et qui se sent un peu... Comme si il n'y arriverait jamais.

  • Speaker #1

    Tout le monde peut y arriver. Si tu as réussi à tomber dedans, tu peux réussir à t'en sortir. Si tu as dit oui, il faut y aller pour dire oui à ces drogues-là quand même. Donc si tu l'as fait, montre-toi que tu peux t'en sortir.

  • Speaker #0

    Et c'est quoi ton conseil d'alchimiste ? Le truc qui aide à transformer la douleur en matière, la chute en force.

  • Speaker #1

    Parle, écris, bouge. Ne reste pas tout seul avec ton chaos et recommence demain.

  • Speaker #0

    C'est un super conseil ça. Alors avant qu'on termine, j'ai encore une dernière petite question à te poser. Mais ce n'est pas réellement une question. C'est plutôt un petit rituel que je fais avec chaque invité. Alors je vais tendre cette fiole d'alchimiste que voici. Avec sa poudre dorée. Et cette fiole a le pouvoir de réaliser trois T-souhaits. Sans aucune limite. Alors si tout était possible, quels seraient tes trois vœux ?

  • Speaker #1

    De ne plus retomber dans la cam, même si j'y crois déjà. De pouvoir bien, bien, bien entamer mon tour du monde à pied et en vélo. Et le troisième, que mes parents soient heureux.

  • Speaker #0

    Je te souhaite que ces trois vœux se réalisent et je te dis un grand merci Antoine.

  • Speaker #1

    Avec grand plaisir, merci à toi.

  • Speaker #0

    Et bien voilà.

  • Speaker #1

    Et bien ouais, ça a roulé.

  • Speaker #2

    Merci d'avoir écouté cet épisode. Prends quelques secondes, ferme les yeux et respire. Ce que tu viens d'entendre, c'est pas juste un témoignage, c'est une preuve que l'impossible peut être sublimé et que l'humain est capable de renaître encore et encore. Alors si cet épisode t'a apporté quelque chose, Partage-le avec quelqu'un qui en a besoin. Et pense à t'abonner pour ne pas manquer les prochains récits d'Alchimiste. Et toi, quelle part de ton histoire peux-tu transformer aujourd'hui ? Si tu veux prolonger la discussion, viens me retrouver sur Instagram sur Histoire d'Alchimiste. Je serai ravie d'échanger avec toi. Et surtout, souviens-toi, c'est dans tes failles que brille ton éclat le plus précieux. Alors... On se retrouve dans 15 jours pour une nouvelle histoire d'alchimiste.

Description

🎧 20 ans sous crack. Et un jour, Antoine a décidé de marcher vers lui-même.
Pas vers la guérison miracle. Vers quelque chose de plus vrai, plus humble, plus tenace : du sens, de la liberté, et le désir de transmettre.

💬 Chef de cuisine, Antoine a cohabité pendant deux décennies avec une addiction qui grignotait tout : ses nuits, ses relations, ses silences.

Il était enfermé Dedans, c’est-à-dire dans le besoin de plaire, dans la peur d’être vu, dans le crack. Jusqu’au jour où il parle. Il parle à son père. Il parle à ses proches. Il parle sur Instagram. Et il se met en mouvement. Littéralement.


Aujourd’hui, il roule vers le monde sur son vélo, avec une envie simple : aider, inspirer, réparer ce qui peut l’être.
Cet épisode, c’est l’histoire d’un homme qui a décidé de transformer 20 ans de silence et d’addiction en une parole vivante. Antoine raconte comment il a choisi d’agir, de transmettre, et de donner un sens à ce qu’il a traversé — pour ne plus fuir, mais avancer.


🌀 Tu découvriras :

  • Comment Antoine a vécu 20 ans d’addiction tout en maintenant une façade « normale »

  • Le moment exact où tout a basculé : une chanson, des larmes, une promesse

  • Ce que ça fait de dire la vérité après deux décennies de camouflage

  • Pourquoi il a décidé de traverser le monde sans avion, et de créer une association

  • Les pièges de l’après-cure : quand le vrai travail commence

  • Comment il transforme aujourd’hui son histoire en levier pour aider d’autres à s’en sortir


🌟 Ce n’est pas une histoire de réussite. C’est une histoire de vérité. Une histoire de sens, de sueur, et de lumière qu’on rallume, doucement, quand on a passé trop longtemps dans le noir.


📲 Retrouve Antoine ici :
Instagram : @antopihen


💪🏻 Ensemble, on est plus forts.

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Parce que certaines histoires méritent d’être entendues… et pourraient bien changer une vie. ✨


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Bienvenue sur Histoire d'Alchimiste, le podcast qui explore comment transformer nos épreuves en tremplin et révèle des parcours de vie où l'impossible s'est teinté d'espoir, où chaque épreuve a laissé une empreinte riche de sens. Je suis Sandra et toutes les deux semaines, je pars à la rencontre d'âmes audacieuses qui ont su transformer leurs blessures en force et leur histoire en élan de vie. Parce que peu importe d'où tu viens, Peu importe ce que tu as traversé, toi aussi, tu peux réveiller l'alchimiste qui est en toi et faire de ton parcours un moteur de sens, de contribution et de changement. Alors, prépare-toi à ressentir, à questionner et à laisser ces histoires souffler sur les braises de ta propre transformation. Aujourd'hui, je te propose d'aller rencontrer Antoine, un chef de cuisine, mais surtout un homme qui a connu l'enfer du crack pendant 20 ans. avant de choisir de vivre, pas de manière tiède non, mais avec intensité, et sans besoin de s'en sortir et d'aider à partir de ce qu'il a traversé. Il est passé de la paranoïa à la liberté, du silence au drapeau accroché à l'arrière d'un vélo, un vélo avec lequel il a déjà parcouru de nombreux kilomètres, et projette de traverser les frontières pour faire le tour du monde sans avion et offrir des cadeaux à ceux qui n'en reçoivent que trop peu. Ce qui m'a bouleversée chez Antoine, c'est ce moment où il m'a dit « Je pense que si je suis tombée dans le krach, c'est pour comprendre, pour aider les autres à mon tour. Et si mon histoire peut aider, alors ça valait le coup. » Antoine cherche à aimer mieux, à se réparer et réparer un peu le monde. Avec son vélo et une force de vie qui dit « Reste pas seul avec ton chaos. Si toi aussi tu portes une douleur en cachette, Si tu t'es déjà demandé pourquoi tu t'en es sorti, comment t'en sortir ? Si t'as envie de croire qu'un chemin est possible, même dans le chaos, même quand tu touches le fond, alors cet épisode va forcément te parler. Prépare-toi à un échange bouleversant avec Antoine, un ancien accro au crack qui trace aujourd'hui sa route, à pied, à vélo, sans masque et surtout sans cam, mais avec une force de vie fulgurante. Salut Antoine, comment tu vas aujourd'hui ?

  • Speaker #1

    Très bien et toi Sandra ?

  • Speaker #0

    Merci de me recevoir chez toi. Alors, on est où ici ?

  • Speaker #1

    On est à Saint-Philibert, dans le Morbihan, en Bretagne.

  • Speaker #0

    Ok, donc là on est entouré d'arbres, il y a les oiseaux.

  • Speaker #1

    Ouais, là on est dans le trou du cul du monde.

  • Speaker #0

    Alors avant de commencer, je vais te proposer un petit jeu. T'es dans un poste de contrôle abandonné, presque irréel. Autour de toi, des centaines de petites télés. Sur chaque écran, un fragment de ta vie. des souvenirs, des galères, des visages, des décisions. Et puis au centre, un écran noir. Un code erreur clignote. Pour revenir chez toi, pour te réveiller, tu dois l'activer. Alors tu t'approches et une voix sort du haut-parleur. Tu dois inscrire sur cet écran trois forces de vie. Celles qui pulsent à l'intérieur. Celles qui t'ont mis des coups de pied aux fesses. Celles qui t'ont fait traverser les tempêtes, les chutes. Alors tu choisis quoi ?

  • Speaker #1

    Je choisirais en premier la liberté. pouvoir faire ce que je veux, voyager, vivre pour moi. Après, ma famille et l'envie d'aider. Et mon histoire peut servir à d'autres, alors c'est pas pour rien.

  • Speaker #0

    C'est de belles forces, ça. Ouais. Et quand tu te lèves le matin aujourd'hui, c'est quoi la chose qui te traverse en premier ? Une pensée, un élan, une angoisse peut-être ?

  • Speaker #1

    Non, non, non, quand je me réveille, je suis pas angoissé. Je dors très mal, mais je suis pas angoissé. Mais malheureusement, encore la première chose à laquelle je pense en me réveillant, c'est la clope.

  • Speaker #0

    Tu as aussi arrêté la cigarette.

  • Speaker #1

    Oui, la cure que j'ai faite a été sans tabac. Et quand je me suis inscrit, je m'étais dit que j'arrêtais tout. Quand je suis arrivé, je m'étais dit que c'était trop. Au final, je me suis rendu compte que c'était possible. Et voilà, donc du coup, la première pensée le matin, c'est toujours la clope. Mais je te mets mes petits patchs. Et du coup, ça passe au bout d'une heure.

  • Speaker #0

    Donc, tu es tombé dans le crack il y a 20 ans. Oui. Et est-ce que tu te souviens de la première fois ?

  • Speaker #1

    Ouais, c'était sur un parking de boîte à l'âge de Zoclub, à Pec.

  • Speaker #0

    En Belgique ? Ouais. Ah ben mince alors !

  • Speaker #1

    Bah c'est là où j'ai commencé toutes mes conneries.

  • Speaker #0

    Ah bah c'est là où il se passe beaucoup de conneries, ouais. Ouais.

  • Speaker #1

    Et j'avais rencontré un mec qui était plus vieux que moi, qui était un ancien dealer des parkings de boîte en Belgique. Ça sort de mes 18 ans, il me propose une trace de coke, je lui dis que j'ai pas envie, parce que ça me fait peur de sniffer. Il m'a dit « Ah t'inquiète, ça se fume si tu veux » . puis Et puis il m'a fait du crack parce qu'en fait le... Le crack, c'est un dérivé de la cocaïne. Tu fais du crack avec la cocaïne. Et moi, je ne savais pas ce que c'était. Je n'ai pas vu ce qu'il faisait devant. Et puis, j'ai bien aimé tout de suite.

  • Speaker #0

    Et après, ça a été quelque chose que tu as refait encore et encore pendant 20 ans.

  • Speaker #1

    Après, au début, au final, je n'en consommais pas tant que ça. Mais je me suis rendu compte au fur et à mesure des années que je gardais tout. Parce que je prenais beaucoup de coke en soirée et d'autres trucs. Et je me rendais compte qu'au final, à chaque fois, je gardais un peu pour... pour me faire du crack à la maison en rentrant. Et au fur et à mesure des années, ça devenait de plus en plus...

  • Speaker #0

    Et la dernière fois, tu t'en souviens ?

  • Speaker #1

    Ouais. Alors, je ne sais plus, en novembre, si c'est 30 ou 31 jours, c'est 30. Donc, c'était le 30 novembre. Le matin, je lui ai dit à ma mère que je prenais du crack. Et le soir, j'ai pris mon dernier gramme de crack.

  • Speaker #0

    Et donc, tu as pris cette décision comme ça ?

  • Speaker #1

    Non, sur le coup, non. Moi, je l'avais dit à mon père un mois avant. Et je l'avais dit, on ne le dit pas à maman pour l'instant, parce que j'ai peur de la tuer en lui disant. Et je ne sais pas, ce matin, je me suis réveillé, je me suis dit, il faut que je lui dise. Donc, quand je me dis un truc, je le fais tout de suite. Je l'ai appelé, je lui ai tout dit, donc ça a duré quelques heures quand même. Et je ne l'ai pas tué. Mais quand je lui ai dit, je lui ai dit « Maman, je suis intoxicot, dans trois jours j'ai rendez-vous dans une cure, enfin dans un hôpital psychiatrique, et s'il faut que je dise que je suis suicidaire pour qu'il me garde, je le ferai parce que je pense à ça matin, midi et soir, depuis un mois où je l'ai dit à papa, c'est dans ma tête comme jamais ça l'était avant. » Le lendemain matin, je me réveille, je descends les escaliers, papa me dit qu'il va avoir son pote garage-liste, et là je mets ma playlist sur l'enceinte de la maison, il y a une musique qui passe. Et là, j'ai pleuré comme jamais j'ai pleuré dans ma vie. Pour moi, je me rends compte que j'ai beaucoup pleuré. Indirectement pour moi, mais pas directement. Je ne sais pas trop comment expliquer. Et là, j'ai vu 20 ans de ma vie, mais c'était un film. Tout, tout, tout, tout est passé. Et là, j'ai dit, c'est fini. Et il y a deux autres musiques qui sont passées après. Donc ça a duré bien 15, 20 minutes au final. J'ai continué à chialer après tout ça. Mon père qui arrive et qui me fait « qu'est-ce qu'il y a ? » Ça va parler de choses. Je me suis dit « si, si, ça va trop bien justement. » Je pleure de joie.

  • Speaker #0

    Est-ce que tu penses que c'était comme un signe, un appel, cette chanson ?

  • Speaker #1

    C'est marrant parce que je l'avais chasamée quelques jours avant. Elle passait par hasard à la radio, je l'avais déjà entendue. Et elle m'a marqué cette musique. Et là, à ce moment-là, ce n'était pas le bon moment encore. Et là, elle est arrivée ce jour-là et ce n'est pas par hasard.

  • Speaker #0

    C'est ouf ce déclic. Et entre ces deux événements, le début et la fin, est-ce qu'il y a eu des tentatives d'arrêter ?

  • Speaker #1

    En fait, entre le jour où j'ai dit à mon père et le jour où j'ai dit à ma mère, j'en prenais tous les jours. Je l'ai caché à mon père, il ne le sait pas. Il doit commencer à le savoir, je crois que je l'ai dit maintenant. Mais il croyait que j'étais clean. Je trouvais des moyens. Je lui avais donné ma carte bleue, mon téléphone. Enfin, pas mon téléphone, mais les applications qui permettaient d'acheter de la drogue. Mais je trouve encore des moyens, je ne vais pas dire lesquels, mais je trouvais des moyens de m'en procurer. Et j'ai réussi à m'acheter un gramme par jour pendant un mois. Et après, par contre, depuis, si c'était la question, d'entre le 1er décembre et aujourd'hui, j'y pense tous les jours.

  • Speaker #0

    Donc c'est encore dur, même si ça fait six mois.

  • Speaker #1

    Il y a eu en six mois, il y a eu plein d'étapes. Il y a eu les deux premiers mois où... où je m'en sortais, je n'y pensais pas, mais je savais qu'il fallait que je fasse gaffe. Il y a eu deux mois où pour moi c'était derrière. Je me suis même retrouvé dans une soirée en Inde où il y a un saladier de coke qui est arrivé et je leur ai dégagé la gueule en mode « c'est quoi votre merde ? » . Et depuis la cure, c'est vraiment difficile. C'est marrant parce que je pense, en fait la cure ça te fait repasser. J'étais dans un monde parallèle depuis quatre mois, voyage. enfermé avec mon père, enfin enfermé en plus guillemets, et retournant au cure, en fait, c'était retrouver des personnes qui sont dans le même, dans la même maladie que moi, et en fait, aller chercher de la complication, parce qu'on va trop parler, j'ai eu des trucs, c'était qui ton dealer, comment tu fumais ça, à la canette ou à la bouteille, enfin.

  • Speaker #0

    On passe par le mental, et quand t'es passé en Inde, je pense que là, t'es passé par quelque chose de spirituel. qui te dépasse totalement et qui te raccorde à quelque chose qui te prend directement au cœur.

  • Speaker #1

    Ah bah oui, il se fait mal aussi. En fait, je ne sais pas, mais du coup, j'y pense beaucoup plus depuis que je suis passé par là. Mais c'était trop facile jusqu'à là, en fait. Tout le monde me dit, ça a l'air trop facile pour toi. À ce moment-là, c'était facile. Là, depuis deux mois, c'est redifficile, tu vois.

  • Speaker #0

    Est-ce que tu penses que le voyage que tu vas entreprendre là en vélo... Ça va beaucoup t'aider aussi ?

  • Speaker #1

    Je me suis toujours rendu compte, dès le début, quand j'ai vu les médecins, parce qu'au début, pendant trois mois, jusqu'à ce qu'on parte en Inde, j'avais trois rendez-vous par semaine. Et les gars, ils me disaient, enfin les médecins, il ne faut pas que tu fuis la réalité. Mais en fait, ma vie, c'est ça.

  • Speaker #0

    Mais ta réalité, c'est toi qui te l'as créée ? Oui,

  • Speaker #1

    voilà, c'est ça.

  • Speaker #0

    Ce n'est pas parce que ce n'est pas la leur que...

  • Speaker #1

    C'est pas la leur, mais moi, je sais depuis toujours que... que j'ai envie de faire ce tour du monde et que d'aller voir tout ce qui se passe dans le monde me fait oublier cette drogue.

  • Speaker #0

    Et ça te transforme ?

  • Speaker #1

    Ouais.

  • Speaker #0

    Et donc, qu'est-ce qui te fait tenir encore aujourd'hui ?

  • Speaker #1

    Ce qui me fait tenir, c'est en premier mes parents, enfin moi, parce que je suis quand même beau. En premier, moi. Je dis toujours mes parents avant, mais il faut que je les dise moi. Parce que je ne suis pas fier d'être tombé dedans, mais je commence à être fier de m'en sortir. Parce que tous les médecins, ils disent que quand on en a parlé autour de nous, ils nous ont dit à mes parents, vous aurez un toxico dans votre vie. Je serai un toxico toute ma vie parce que j'en aurai.

  • Speaker #0

    C'est un peu encourageant ça. Ouais,

  • Speaker #1

    ouais, ouais, mais c'est lucide aussi. Je ne sais pas si c'est le bon mot lucide, mais c'est la vérité. C'est que cette drogue, je l'ai su dès le début. Enfin, pas à 18 ans, parce qu'à 18 ans, j'avais encore douleur dans ma tête. Mais à 25 ans, je me suis dit, elle fera partie de moi toute ma vie, cette drogue. J'espère que je m'en défraie, mais elle fera partie de moi toute ma vie.

  • Speaker #0

    C'est comme une connexion qui se fait dans le cerveau. Oui,

  • Speaker #1

    une connexion de merde. Je ne vais pas avoir une connexion avec une fille qui se partage ma vie, mais non, c'est avec la drogue.

  • Speaker #0

    Eh bien, il faudra remplacer cette accoutumance par celle de l'amour, peut-être. Qui sait ?

  • Speaker #1

    Inch'Allah.

  • Speaker #0

    Carrément. Et si on revient un peu sur les journées que tu passais à l'époque ? Quand tu étais dépendant, c'était quoi une journée type ?

  • Speaker #1

    Après 20 ans, les journées, elles changent. Ouais,

  • Speaker #0

    je me doute.

  • Speaker #1

    Au début, c'était une journée classique de mec normal qui, de temps en temps, va déconner. Et c'est la dernière année où là, ça a vraiment été... J'en rêvais la nuit. Donc, on ne peut pas dire que c'est un rêve, mais plus un cauchemar, du coup. Je rêvais que je prenais du crack la nuit, je me réveillais le matin comme si j'en avais pris, donc en manque. Donc dès le matin, je me réveillais, il fallait que j'ai ma dose. Il fallait que j'appelle le dealer dès le matin, on va trouver un dealer à 8h du mat.

  • Speaker #0

    Parce que tu n'en avais déjà plus de la vie ?

  • Speaker #1

    Ah bah non, quand je commence quelque chose, je le finis.

  • Speaker #0

    Donc tous les matins, c'était la même galère ?

  • Speaker #1

    Il y avait des matins où ça allait, enfin bref. Mais avant 14h, j'avais mon gramme.

  • Speaker #0

    Et comment ça s'organisait au niveau de la vie pro ?

  • Speaker #1

    J'ai eu la chance d'être très bon dans mon métier et j'arrivais quand même à gérer les deux. Mais du coup, j'étais quand même beaucoup moins productif quand je ne trouvais pas ma dose le matin parce que j'étais plus sur mon téléphone à envoyer des messages aux 40 dealers que j'avais sur mon téléphone qu'à faire ma mise en place et à préparer mon service pour le midi.

  • Speaker #0

    Alors même si je n'aime pas les étiquettes et que je n'aime pas qu'on parle de soi à travers un métier, ça me rend curieuse. Qu'est-ce que tu faisais avant dans la cuisine ? Ah,

  • Speaker #1

    je faisais de la cuisine.

  • Speaker #0

    Ok.

  • Speaker #1

    20 ans de cuisine, 20 ans de crack. Jusqu'à il y a deux mois, je me disais que c'était inhumain de faire ça. Et les médecins, parce que j'étais diagnostiqué TDAH, je n'aime pas trop ce mot, mais ils me disaient qu'en fait, cette drogue me canalisait et c'était mon médicament. C'est encore un bon conseil. Et le traitement qu'ils te proposent pour le TDAH, c'est de la méthamphétamine.

  • Speaker #0

    On remplace un dealer par un autre.

  • Speaker #1

    Oui, voilà. Et puis, en fait, tu te dis, je fais quoi ? Je continue à me... Mais le TDAH, c'est un cerveau qui va un peu à mille à l'heure. Et je pense que jusqu'à il y a six mois, je n'étais pas capable de gérer mon cerveau. Et aujourd'hui, je le gère et je n'en ai plus besoin. Enfin, je n'en ai plus besoin. Non, je n'en ai jamais eu besoin, mais je n'étais pas capable de gérer mon cerveau avant. En fait, j'ai eu besoin de faire plein de trucs en même temps, donc de me droguer et de faire de la bouffe, par exemple.

  • Speaker #0

    Et aujourd'hui, tu gères ton TDAH beaucoup mieux, mais sans traitement alors ?

  • Speaker #1

    Oui, non, j'ai refusé le traitement. Je leur ai dit, je n'ai pas envie d'arrêter une drogue pour une autre. Le gérer, vu que j'ai quand même... Une partie du cerveau qui est quand même beaucoup moins remplie par la recherche de drogue, me permet de me concentrer sur les tâches à faire. Parce que du coup, vu que je dois faire plein de choses en même temps, je m'éparpille et je me perds. Donc à l'époque, je m'éparpillais et je me perdais. Vu que je prenais du crack à côté, j'oubliais ce que je devais faire à la base.

  • Speaker #0

    D'accord.

  • Speaker #1

    Aujourd'hui, je l'oublie toujours. mais dans la journée ça revient et j'y repense donc en fait Avant, j'oubliais. Là, dans la journée, ça revient et je le refais.

  • Speaker #0

    D'accord.

  • Speaker #1

    Donc, je suis à jour sur mes tâches administratives, tout ça.

  • Speaker #0

    Ça, ça donne aussi un bon sentiment de tranquillité parce que tu as plein de fichiers ouverts dans le fait.

  • Speaker #1

    Oui, c'est ça. Le partenaire met tous les rendez-vous. En fait, c'est un stress que tu as en plus et que j'ai moins aujourd'hui. Je n'ai jamais réussi à gérer ça pendant toute ma vie. Et franchement, je suis trop content de réussir à gérer ce truc-là. Ça paraît banal pour certaines personnes. Mais pour moi et pour tous les gens qui sont TDAH, je pense qu'entendre dire que tu réussis un peu mieux à gérer ta vie...

  • Speaker #0

    C'est un combat. Moi, je le suis aussi et c'est un combat quotidien. Moi, je me bats aussi avec la montre. Et toi, c'est quoi ton rapport à la montre ?

  • Speaker #1

    La montre ?

  • Speaker #0

    Ouais. Au temps.

  • Speaker #1

    Au temps ? Je gère très bien le temps. C'est vrai ? Ouais. Tu vois, par rapport à ton arrivée, j'étais timing. Il me restait deux toasts à faire pour que je sois prêt. Mais non, après, c'est mon métier aussi qui m'a forgé à bien gérer le temps, parce que tout est à la mieux. Tout est une question de minutes en cuisine. Je pense que c'est grâce à ça aussi. Je n'ai pas trop de problèmes avec ma montre.

  • Speaker #0

    Si je comprends bien, tu as toujours gardé un pied dans la réalité à travers ton travail, qui t'a ancré quand même, et un pied dans la folie de la drogue.

  • Speaker #1

    Oui, j'ai un côté où je suis le plus gentil. Je ne parle plus d'anti du monde, mais je suis quelqu'un de très gentil, qui est très humain, qui aime aider les personnes. Alors ça s'est souvent retourné contre moi, mais je pense que la drogue, elle y était aussi pour quelque chose, parce que je devais mal exprimer ce que je voulais faire de base. Dans mes couples, j'ai toujours voulu aider et en fait, ça s'est retourné contre moi, par exemple. J'ai oublié les questions du coup, de base.

  • Speaker #0

    Mais ce n'est pas grave.

  • Speaker #1

    La question de base,

  • Speaker #0

    elle est imprévue. de moi aussi je l'ai oublié bienvenue chez les TDA et ben tu sais quoi on va passer à la suivante dans tout ça est-ce qu'il y a eu un moment où t'as senti que t'existais plus vraiment dans cette vie là ouais l'année dernière j'étais

  • Speaker #1

    en couple et autour de moi tout le monde pensait que je m'étais calmé sur la fête parce que je suis un fêtard de base et que je m'étais rangé Et je me rendais compte que je longeais les murs parce que cette drogue, elle te rend vraiment parano. Et je me cachais un peu derrière ma meuf en mode je suis clean, je suis sage, tout ça. Et mais moi dans ma tête, et je pense que ça a été le avant du déclic, c'est que tous les jours je me disais en fait je ne sers plus à rien sur cette terre. En cuisine, je ne progresse plus, même si je progressais encore. Je n'ai plus rien à apporter. Et quelqu'un d'autre mérite plus sa place que moi. Je ne suis pas croyant, je ne suis pas baptisé ou quoi que ce soit. Mais je crois en quelque chose. Et je m'étais dit, il va me prendre ma vie, elle ne sert plus à rien. Être là pour donner de l'argent à des dealers et à trouiner le cerveau, ça ne sert à rien.

  • Speaker #0

    Donc il y a eu une grosse perte de sens et c'est à ce moment-là que tu as senti que tu n'existais plus vraiment dans ta vie ?

  • Speaker #1

    En fait j'existais mais je n'existais plus non plus.

  • Speaker #0

    Et c'est quoi ce truc qui résistait en toi, même tout au fond à ce moment-là, qui fait que tu tenais bon quand même ?

  • Speaker #1

    J'ai toujours su que j'étais quelqu'un de particulier et qu'on m'a toujours dit que je l'avais dans mes mains. Je suis doué dans pas mal de trucs et je me suis dit, en fait je n'avais plus trop d'espoir. Mais je n'arrêtais pas de me dire, putain Antoine, c'est du gâchis, c'est du gâchis, c'est du gâchis. Donc à ce moment-là, je ne me rendais pas compte. Mais aujourd'hui, avec du recul, en fait, j'avais toujours ce truc-là en moi qui me disait, Antoine, tu dois faire quelque chose de ta vie.

  • Speaker #0

    Et quand tu parles de faire quelque chose de ta vie, est-ce que c'est lui donner un sens ? Et si oui, est-ce qu'aujourd'hui, tu as senti que tu voulais donner un sens à ce que tu as vécu ?

  • Speaker #1

    Oui, en fait... Le sens il est venu quand j'ai fait mon... En fait je suis de Lille, et ma cure elle est en Bretagne, et un matin je me suis réveillé, je lui ai dit je prends mon vélo et je pars en Bretagne. Et je voulais voir déjà si mon corps il était encore apte à... Parce que j'ai jamais fait de vélo en vrai, le vélo je l'ai acheté, j'avais fait 50 bornes avec mon frère la veille, et je voulais voir si mon corps il était encore au paix quoi. Et sur la route, à un moment, moi j'ai fait 1200 barres dans 9 jours quand même. C'est minable,

  • Speaker #0

    t'avais la rage. Ouais,

  • Speaker #1

    j'ai pas vu le paysage, j'étais peut-être dans le guidon, je chantais, je faisais le con, mais sinon j'ai rien vu. Et à un moment, je passe devant Action. À ce moment-là, avec ma famille, il y a des gens très proches qui étaient au courant. Et j'ai quand même beaucoup, beaucoup de potes. Et je savais que ça allait se savoir. Et je ne voulais pas que ça se sache par téléphone arabe. Je voulais que ça se sache à ma façon, de le dire moi-même. Mais je n'avais pas envie non plus d'avoir le regard des gens. Je me suis dit, allez, j'achète un drapeau. Et j'ai écrit l'île Bretagne des Intox.

  • Speaker #0

    C'est génial.

  • Speaker #1

    Donc je suis rentré à Action, j'ai dit vous vendez drapeau ? Ils m'ont dit non, donc j'ai acheté un manche à balai et deux têtes d'oreiller. Je me suis mis sur le trottoir, j'ai acheté trois feux de kiki, bref. Et là je me suis mis sur le trottoir à mettre mon drapeau et j'ai dit, bon bah si je le mets sur mon vélo, je vais faire un post sur Insta et je vais raconter ma vie.

  • Speaker #0

    Et c'est là que ça a commencé.

  • Speaker #1

    Et là, en fait, sur le coup, c'était égoïste parce que je me suis rendu compte que mon déclic, que je l'ai eu grâce au fait de le dire à mes parents. Ça a pris un peu de temps. Mais donc il y a la musique, mais le déclic c'est quand même les parents avant. La musique a fait que le déclic se lance. Et du coup je me suis dit, je vais le dire à tout le monde comme ça, comme ça ils ne vont pas me regarder. Si les gens me détestent, ils me supprimeront, ils me bloqueront, ils m'enverront des messages de haine, mais ça ne me fait rien les messages. Avoir quelqu'un en face de moi qui me dit que je suis une merde, j'ai un peu plus de mal. Et en fait ça a pris de l'ampleur cette histoire. Et je me suis rendu compte qu'en fait on a tous une addiction.

  • Speaker #0

    Et tu te sentis moins seul ?

  • Speaker #1

    Je me sentis moins seul et je me suis rendu compte qu'en fait, plein de gens m'envoyaient des messages en me disant « Moi j'ai ça, moi j'ai ci, moi j'ai ça. » Et je me suis dit « En fait, peut-être que mon histoire, elle peut aider. » Donc ça donne un sens à ma vie.

  • Speaker #0

    Et à partir de là, il y a eu une autre énergie dans ce chemin que tu entreprends ?

  • Speaker #1

    L'autre énergie, elle s'est créée en Inde. Quand j'étais en Inde, je ne voulais pas aller dans ce pays à la base. En fait, mon père, il devait aller au Sri Lanka, parce que je l'ai fait avec mon ex. On avait loué un tuktuk à deux et on avait fait le tour du Sri Lanka pendant un mois et demi. Et j'avais vraiment trouvé ce pays incroyable. C'est le pays le plus gentil du monde. C'est incroyable. Les mecs, tous les jours, ils doivent faire une BA. Et on l'a ressenti pendant notre voyage. Moi, j'ai des varices. Un jour, j'arrive à un Airbnb. Le mec, il me dit, ah, t'as des varices. Je t'emmène à l'hôpital ayurvédique. Tu sais, le truc de plantes.

  • Speaker #0

    Ouais.

  • Speaker #1

    On a fait une heure de route, on est arrivé à l'hôpital, l'hôpital gratuit, ils me donnent un traitement à base de plantes et des massages à faire. Bon, je n'ai jamais fait ce que c'était dans la drogue, mais le truc, il marchait, quoi.

  • Speaker #0

    Incroyable.

  • Speaker #1

    Un mec gratuitement comme ça, tu lui demandes, tu lui donnes de l'argent et il te dit non. Après l'Inde, ça est encore... On ne peut pas comparer deux pays. Mais pour en revenir à la question, du coup, en Inde, je ne sais pas ce qui se passait, mais en fait, j'ai vu la misère. Ce n'est pas ce qui m'a marqué sur le voyage, parce que tout le monde dit « tu prends un coup en étant là-bas » . Moi, je n'ai pas pris un coup parce que tout le monde était heureux, qu'ils soient riches ou pauvres. Tout le monde se mélange.

  • Speaker #0

    Il y a une puissance du cœur même au creux, pas d'isère profonde.

  • Speaker #1

    J'en ai des frissons rien qu'en parler. Les gens ne se mélangent pas entre eux, mais communiquent entre eux. Nous, par exemple à Lille, on ne verra jamais un Français de Marc-Andre Barrel parler à un Roubaisien. un rebus roubé.

  • Speaker #0

    C'est le système de caste.

  • Speaker #1

    Là-bas, il y a les castes, mais ils parlent. J'ai déjà vu des millionnaires demander leur route à un tuktuk et ils mettent un quart d'heure à... Tu ne sais pas ce qu'ils se disent, mais ils parlent pendant un quart d'heure. Ça sourit, ça rigole et tout. Je pense que tu ne verras jamais chez nous. Ça, les bidonvilles, je ne voulais pas les faire non plus. En fait, tu vois que tous les déchets de France, ils arrivent là-bas. Dans le bidonville en question que j'ai fait à Mombé, C'est 10% des déchets mondiaux qui arrivent.

  • Speaker #0

    Incroyable !

  • Speaker #1

    Donc on leur achète leurs fringues et on leur rend nos merdes. Et plein de trucs. Et en fait, les gens venaient vachement me voir, je ne sais pas pourquoi. Après j'ai rencontré un gourou qui m'a dit que dans une autre vie j'étais un chaman indien. Je ne crois pas trop, enfin je y crois sans y croire. Mais je ne sais pas, il y a quelque chose qui s'est fait et je me suis dit, putain, je rentre à pied d'Inde. Et puis après, il y avait la cure, tout ça. Et je me suis dit, c'est un truc qui se prépare, donc je ne l'ai pas fait. Mais du coup, j'ai envie de partir faire le tour du monde sans prendre l'avion.

  • Speaker #0

    C'est énorme. Et toujours, en fait, dans ce mouvement d'aider à travers...

  • Speaker #1

    Ouais, mais en fait, avec les idées qui me fuitent dans tous les sens. C'est avant, je pars en Ouganda, ce n'est jamais été en Afrique. Et je me suis dit que je me suis allé créer une asso. Moi, je vais partir là-bas. J'ai vu qu'en fait, dans l'avion, j'avais le droit de prendre deux valises. Donc j'en ai mis avec mes fringues et une avec des cadeaux, des bouquins, des crayons, des trucs comme ça. Et en fait, l'idée, c'est d'arriver avec des cadeaux. Moi, au courrier, les premiers, tu vois, aller voir un mec dans la rue, n'importe quoi. Et du coup, un cadeau qui grandit où en fait, moi, j'offre le premier. Et puis après, à l'assaut, s'il y a des gens qui veulent donner un peu d'argent. Après, je vais voir par exemple une famille. Si on réussit à faire un cadeau à une famille qui est un peu plus gros. Après, aller voir une école et monter. Après, je ne sais pas si ça prendra, mais tu vois, toujours pas arriver en mode touriste. Je veux voir ton pays, mais...

  • Speaker #0

    un système de...

  • Speaker #1

    Tourisme, je veux voir mon pays et si je peux aider à... Toi, même rester une semaine dans un truc, à bricoler, à faire n'importe quoi, enfin, je ne suis pas un grand bricoleur, mais pas qu'être là en tant que touriste, mais apporter un truc aussi si je peux, quoi.

  • Speaker #0

    Et dans tout ce que tu fais, donc ton projet d'assos, le fait de partir en vélo, les voyages et la cure, qu'est-ce qui t'a le plus aidé ?

  • Speaker #1

    Le voyage. La cure, elle m'a pas aidé. La cure, elle m'a... La cure, elle m'a aidé à me rendre compte que j'en étais pas sorti et qu'il fallait que je fasse attention toute ma vie. Donc elle m'a aidé d'un côté quand même, parce que sans ça, peut-être qu'un jour, je serais tombé sur un dealer et j'aurais dit oui. La cure m'a conforté dans l'idée où il faut que je fasse vraiment attention. Mais le voyage m'a fait rendre compte qu'en fait, quand je suis en voyage, j'oublie toute cette merde et que même si on peut dire que c'est fuir le truc, en fait, je veux bien le fuir. Pour l'instant, à part ma famille, je n'ai pas d'attache ici. Et puis peut-être qu'un jour, en voyageant, j'aurai une attache quelque part.

  • Speaker #0

    Est-ce que le Antoine qui part est le même que le Antoine qui revient ?

  • Speaker #1

    Oui, le Antoine, il ne change pas. Franchement, le Antoine, il ne change pas. Il réussit avec la drogue en moins à avoir son cerveau qui marche mieux pour savoir un peu plus où il va.

  • Speaker #0

    C'est pas mal dit ça.

  • Speaker #1

    Ouais, ouais, ouais. Parce que j'ai toujours rêvé de faire ce tour du monde. Mais la drogue, dès que je rentrais de voyage, j'étais allé à l'aéroport dans le pays avant d'arriver en France. Je pensais déjà à appeler le dealer. Ou je l'avais déjà même appelé. Là, aujourd'hui, je dois juste penser à ne pas en prendre. Je ne dois pas penser à comment en avoir. Ça prend beaucoup moins de temps à dire non, j'en prends pas qu'à prendre ton téléphone, à trouver un dealer. Et puis après, quand tu te drogues, tu n'as plus de cerveau. et tu penses à tout sauf à ça. En fait, aujourd'hui, vu que je suis en arrêt de travail, j'ai quand même vachement de temps pour réfléchir à tout ce que je vais faire une fois que je partirai.

  • Speaker #0

    Et t'as dû lâcher quoi pour t'en sortir ? Des connaissances ?

  • Speaker #1

    Des amis ? Personne n'était au courant. Jusqu'au jour où je disais à mon père que j'étais le seul au courant, à part les dealers. Donc j'ai pas dû... Après, j'ai fait quand même un tri. Le tri, c'est pas en mode j'ai pris mon répertoire et j'ai supprimé des gens, mais il y a des gens que t'enlèves de ta vie parce que en fait, la drogue, elle te fait avoir moins conscience de la personne que t'es en face de toi et que quand t'es clean et que t'as tout ton cerveau, tu lui dis en fait, ce mec-là, il m'apporte rien. C'est des trucs qui se font naturellement. Du coup, lâcher... Non, lâcher mon métier. Lâcher la cuisine, ça me fait un bien flou. Ça fait 20 ans que je cours, que je me mets dans des missions tout le temps impossibles parce que j'ai toujours eu la pression de mon père pour le boulot. Et vu que je faisais le coin à côté, je pense que pour remettre le pendule à l'heure, je me lançais sur des missions de ouf pour le rendre fier. Mais des missions qui m'ont bouffé ma vie. Là, ça fait six mois que je ne travaille pas.

  • Speaker #0

    Le rêve ?

  • Speaker #1

    C'est le bonheur.

  • Speaker #0

    Je m'adouce.

  • Speaker #1

    C'est le bonheur. Après, je veux vraiment me débarrasser de cet arrêt de travail parce que je n'ai pas 100% de ma liberté, du coup, parce que je ne peux pas faire ce que je veux, parce que je suis fliqué quand même par mon boss, qui a appelé la sécu pendant que j'étais en Inde pour leur dire que j'étais en vacances pendant mon arrêt maladie, des trucs comme ça, pour que je les rembourse, alors que je gagne moins que le SMIC. Enfin bref. Et voilà, du coup... Vous savez, je suis perdu. Mais du coup, je n'ai pas dû me séparer de grand-chose, juste de mon métier. Et pour la première fois de ma vie, je n'ai plus la pression. Mon père m'a dit, en fait, tu t'es mis une pression pour rien, de ce qu'il dit.

  • Speaker #0

    Ça t'a libéré,

  • Speaker #1

    ça ? Et du coup, ce truc-là de mon père, qu'il ne soit pas derrière moi, et qu'il me dise, prends ton temps. Et qu'aujourd'hui, même quand je lui dis, parce qu'avant, il y a un an, j'aurais dit, je veux partir faire le tour du monde à pied. il m'aurait dit non tu bosses quoi Aujourd'hui, il a compris que j'étais différent, qu'il fallait accepter que j'ai des projets différents que la moyenne.

  • Speaker #0

    Est-ce que tu penses que c'est ça aussi qui t'a fait tomber dans la drogue, ce besoin d'être quelqu'un d'autre ?

  • Speaker #1

    Je suis tombé dans la drogue parce que je voulais toujours montrer que j'étais capable de bouffer le plus de tasses possible dans la soirée, d'être le plus con en gros. Le plus con ? Le plus con, c'est con de faire des concours de celui qui se défonce le plus la gueule.

  • Speaker #0

    D'accord.

  • Speaker #1

    J'ai toujours voulu... Je suis quelqu'un qui aime bien plaire. Et ma façon de plaire à l'époque, c'était d'être le plus fou.

  • Speaker #0

    D'accord. Tu étais dans ce personnage-là. Aujourd'hui, tu te rends compte que c'était un rôle que tu jouais ou c'était vraiment réel à l'époque ?

  • Speaker #1

    Non, j'en ai trop fait. Mais je reste quand même qui je suis. Et je sais que de temps en temps, j'ai besoin de lâcher les chevaux et de mettre une perche.

  • Speaker #0

    Et quand tu es du maître une perche,

  • Speaker #1

    c'est... Pas aller boire des coups avec des potes.

  • Speaker #0

    De lâcher la pression.

  • Speaker #1

    En fait, je m'en rends compte quand même. Mais c'est pas bien. Enfin, il faut pas... Parce que l'alcool, c'est quand même le meilleur ami de la tentation d'après de faire des conneries. Donc, il faudrait que je sois abstinent total d'alcool. Enfin, pas me mettre...

  • Speaker #0

    Mais là, ça te met une pression dingue aussi. Ça te met une pression folle.

  • Speaker #1

    Oui, en fait, c'est ça. C'est tout arrêté. Et en fait, j'ai tellement bossé dans ma tête pendant six mois que je sais que je ne tomberai plus dans la cam. Je n'en ai jamais repris jusqu'à aujourd'hui. Mais si il y a un matin où je me réveille et je me suis pris une timbale et que je me rends compte que j'en ai pris, je ne retomberai pas dedans le lendemain. Ce n'est pas du tout un bon conseil, mais moi, personnellement, je sais que...

  • Speaker #0

    Parce que tu as fait assez de chemin pour voir...

  • Speaker #1

    En fait, je me suis rendu compte qu'avant, dès que j'avais l'envie, j'appelais le dealer et je ne réfléchissais pas au reste. Aujourd'hui, je sais que j'en ai envie tous les jours, mais que je ne le fais pas. Et que même si un matin, en fait, si un matin où je me réveille, que je vois un sachet à côté de moi, je vais culpabiliser, ça me fera chier. Mais justement, en fait, encore plus, ça me dira non, mais tu l'as fait hier, tu ne le refais plus.

  • Speaker #0

    Donc, tu as l'impression, tu as cette impression d'être plus fort aujourd'hui, plus vrai aussi.

  • Speaker #1

    Ouais, ouais, ouais. Non, mais aujourd'hui, je suis 100% moi-même et j'ai plus... J'ai plus ce truc-là où j'ai envie de plaire ou pas plaire aux gens. Aujourd'hui, tu peux me dire que tu m'aimes pas, ça me dérange pas.

  • Speaker #0

    Moi, ça m'a beaucoup frappée sur ton profil Insta. En fait, c'est ce qui a percuté en premier. Tu utilises un langage des fois cru, très vrai, et il n'y a pas ce besoin de se conformer à se dire « mais non, il faut que je parle de telle manière, il faut que j'utilise tel ton » .

  • Speaker #1

    C'est ça, après, pour moi, avoir un maximum d'abonnés, c'est de toucher un maximum de monde pour un maximum aidé. Que j'en ai... pas combien, je m'en fous, à chaque fois on me dit t'as 11K ou je sais pas quoi, je regarde même pas, je m'en fous. Mais quand je vois que ça monte, je me dis putain, en fait...

  • Speaker #0

    Ça parle.

  • Speaker #1

    Ça parle plus, enfin ça peut aider. C'est que ça interpelle et si ça interpelle, c'est que ça touche.

  • Speaker #0

    Après, bien sûr, c'est hyper important parce qu'au plus, comme tu le dis, au plus il y aura de monde qui va entendre ton message, au plus il y aura d'impact. Mais si cet impact est créé autour de la personne que tu n'es pas, autour d'un masque,

  • Speaker #1

    il n'a plus d'importance. Non, du coup, je ne peux pas le m'envoi. C'est comme là, je te dis que je pourrais me réveiller un matin en ayant pris. Normalement, j'aimerais dire plus jamais, plus jamais, plus jamais. Mais je sais dans ma tête que plus jamais, je retomberai dedans. Mais que ce n'est pas parce qu'il y a un jour où je me réveille que je l'ai fait, que je retomberai.

  • Speaker #0

    La vie, j'ai l'impression que c'est un peu ça aussi. C'est des fois, tu fais trois pas en avant, t'en fais même dix, et puis paf, il arrive un truc et t'en fais deux en arrière.

  • Speaker #1

    Toi, il vaut mieux se dire, ça peut être arrivé, mais c'est pas parce que ça réarrive que je retomberai dedans. Plutôt que de se dire que je ne retomberai jamais dedans. Et en fait, il y a un jour où tu craques et là, t'es reparti comme en 40 et que c'est encore pire. Parce que quand tu retombes, quand t'arrêtes et que tu reprends, tu reprends pire à chaque fois. Mais par contre, du coup, je me repense à un truc, est-ce qu'Antoine change ? Bah oui, du coup, j'ai changé. Parce qu'avant, le regard des gens était important pour moi. Aujourd'hui, j'en ai plus rien. Mais je parle du personnage intérieur.

  • Speaker #0

    Tes valeurs qui tu es, ça bouge pas. Et si tu pouvais retourner parler au petit Antoine, au jeune Antoine d'il y a 20 ans, tu lui dirais quoi ?

  • Speaker #1

    Trache la route. Franchement, je lui dirais rien parce que je te le disais tout à l'heure, je me suis posé la question Toute ma vie, putain, pourquoi cette drogue est arrivée sur ma route ? J'ai eu la réponse il y a quelques jours où, en fait, je pense que je suis arrivé sur Terre pour tomber dedans, pour comprendre comment ça marche et pour aider les gens à peut-être s'en sortir.

  • Speaker #0

    C'est de donner un sens et transformer ce que tu as vécu. Et si tu pouvais laisser une parole à quelqu'un qui est encore dedans, qui est encore sur le chemin, tu lui dirais quoi à cette personne ?

  • Speaker #1

    Chaque personne est différente. Pour ceux qui font ça en cachette et qui se cachent derrière ça, parlez-en. Même si vous avez peur comme moi de tuer vos parents ou quoi que ce soit, en fait, on est tous solides. Après, si vous n'avez pas de parents, pas de famille, allez voir... Des proches, si vous n'avez pas trop de proches, les hôpitaux, ils sont quand même là pour vous.

  • Speaker #0

    Tu ne leur conseillerais pas de prendre un billet d'avion ?

  • Speaker #1

    Si, prendre un billet d'avion. Après, le truc, c'est que quand tu es dans la drogue, tu n'as pas d'argent. Oui, c'est vrai. Mais franchement, les addictos, ils sont bons. Moi, je n'ai pas passé la meilleure des cures, mais tous les médecins que j'ai vus avant, psychologues, alors allez voir un psychologue, parce que le psychologue, il te fait aller chercher un peu de loin. J'ai vu une psy qui, j'avais l'impression qu'elle ne m'avait rien apporté. Et en fait, je me rends compte qu'elle m'a apporté. Le fait de parler, en fait. Le fait de tout lâcher à quelqu'un où, pour le coup, même si tu as peur du regard des gens, lui, tu t'en fous parce que c'est son métier. Moi, ça m'avait fait vachement de bien. Aller voir les centres d'addictos. Moi, je t'ai reçu au début par un infirmier, après par un addicto et pareil. Ils te parlent, ils s'y connaissent dans le truc, donc ça aide. Et fais-t'y croire. Parce que si tu n'y crois pas, tu ne peux pas y arriver. Tout le monde me dit « c'est trop dur, je n'y arrive pas » . Si tu dis que c'est trop dur et que tu n'y arrives pas, tu n'y arriveras pas. Si tu te dis « je peux le faire » , et tu peux le faire, tout le monde peut le faire. On a une force en nous qu'on ne connaît pas. Moi, j'ai rendu compte en vélo, en fait, le vélo, les 1200 bornes en vélo, je ne pensais pas que j'allais y arriver en partant.

  • Speaker #0

    Donc, c'est aussi de se prouver qu'on peut faire plus que ça, qu'on est plus que ça.

  • Speaker #1

    Oui, si tu as réussi à tomber dedans, c'est que c'était pour ton chemin. Mais tu peux y arriver. Tu peux y arriver et ce n'est pas parce que tu retombes dedans de temps en temps. Moi, j'ai mis 20 ans à m'en sortir. Il ne faut pas croire que pendant 20 ans, je n'ai pas essayé de m'en sortir. J'ai essayé de m'en sortir tout seul. Mais je ne me donnais pas les bons moyens. Je faisais ça une fois que je n'avais plus rien, à 4-5 heures du mat, et que je regardais sur Internet. Et là, tu n'as pas ton cerveau. Mais pense-y clean. Regarde bien sur Internet. Tu mets Addicto. Tu vois, il y a des centres partout. Moi, quand j'étais en cure de désintox à Auré, pour moi, c'était un village le truc. En fait, tu as une cure de désintox. Donc, tu as des trucs d'Addicto dans toutes les villes de France, je pense.

  • Speaker #0

    Mais qu'est-ce que tu dirais à cette personne qui a essayé, mais qui a échoué et qui se sent un peu... Comme si il n'y arriverait jamais.

  • Speaker #1

    Tout le monde peut y arriver. Si tu as réussi à tomber dedans, tu peux réussir à t'en sortir. Si tu as dit oui, il faut y aller pour dire oui à ces drogues-là quand même. Donc si tu l'as fait, montre-toi que tu peux t'en sortir.

  • Speaker #0

    Et c'est quoi ton conseil d'alchimiste ? Le truc qui aide à transformer la douleur en matière, la chute en force.

  • Speaker #1

    Parle, écris, bouge. Ne reste pas tout seul avec ton chaos et recommence demain.

  • Speaker #0

    C'est un super conseil ça. Alors avant qu'on termine, j'ai encore une dernière petite question à te poser. Mais ce n'est pas réellement une question. C'est plutôt un petit rituel que je fais avec chaque invité. Alors je vais tendre cette fiole d'alchimiste que voici. Avec sa poudre dorée. Et cette fiole a le pouvoir de réaliser trois T-souhaits. Sans aucune limite. Alors si tout était possible, quels seraient tes trois vœux ?

  • Speaker #1

    De ne plus retomber dans la cam, même si j'y crois déjà. De pouvoir bien, bien, bien entamer mon tour du monde à pied et en vélo. Et le troisième, que mes parents soient heureux.

  • Speaker #0

    Je te souhaite que ces trois vœux se réalisent et je te dis un grand merci Antoine.

  • Speaker #1

    Avec grand plaisir, merci à toi.

  • Speaker #0

    Et bien voilà.

  • Speaker #1

    Et bien ouais, ça a roulé.

  • Speaker #2

    Merci d'avoir écouté cet épisode. Prends quelques secondes, ferme les yeux et respire. Ce que tu viens d'entendre, c'est pas juste un témoignage, c'est une preuve que l'impossible peut être sublimé et que l'humain est capable de renaître encore et encore. Alors si cet épisode t'a apporté quelque chose, Partage-le avec quelqu'un qui en a besoin. Et pense à t'abonner pour ne pas manquer les prochains récits d'Alchimiste. Et toi, quelle part de ton histoire peux-tu transformer aujourd'hui ? Si tu veux prolonger la discussion, viens me retrouver sur Instagram sur Histoire d'Alchimiste. Je serai ravie d'échanger avec toi. Et surtout, souviens-toi, c'est dans tes failles que brille ton éclat le plus précieux. Alors... On se retrouve dans 15 jours pour une nouvelle histoire d'alchimiste.

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Description

🎧 20 ans sous crack. Et un jour, Antoine a décidé de marcher vers lui-même.
Pas vers la guérison miracle. Vers quelque chose de plus vrai, plus humble, plus tenace : du sens, de la liberté, et le désir de transmettre.

💬 Chef de cuisine, Antoine a cohabité pendant deux décennies avec une addiction qui grignotait tout : ses nuits, ses relations, ses silences.

Il était enfermé Dedans, c’est-à-dire dans le besoin de plaire, dans la peur d’être vu, dans le crack. Jusqu’au jour où il parle. Il parle à son père. Il parle à ses proches. Il parle sur Instagram. Et il se met en mouvement. Littéralement.


Aujourd’hui, il roule vers le monde sur son vélo, avec une envie simple : aider, inspirer, réparer ce qui peut l’être.
Cet épisode, c’est l’histoire d’un homme qui a décidé de transformer 20 ans de silence et d’addiction en une parole vivante. Antoine raconte comment il a choisi d’agir, de transmettre, et de donner un sens à ce qu’il a traversé — pour ne plus fuir, mais avancer.


🌀 Tu découvriras :

  • Comment Antoine a vécu 20 ans d’addiction tout en maintenant une façade « normale »

  • Le moment exact où tout a basculé : une chanson, des larmes, une promesse

  • Ce que ça fait de dire la vérité après deux décennies de camouflage

  • Pourquoi il a décidé de traverser le monde sans avion, et de créer une association

  • Les pièges de l’après-cure : quand le vrai travail commence

  • Comment il transforme aujourd’hui son histoire en levier pour aider d’autres à s’en sortir


🌟 Ce n’est pas une histoire de réussite. C’est une histoire de vérité. Une histoire de sens, de sueur, et de lumière qu’on rallume, doucement, quand on a passé trop longtemps dans le noir.


📲 Retrouve Antoine ici :
Instagram : @antopihen


💪🏻 Ensemble, on est plus forts.

Si tu veux soutenir ce podcast, fais passer l'étincelle à quelqu’un qui en a besoin et laisse une note ou un avis sur ta plateforme d’écoute préférée.

Parce que certaines histoires méritent d’être entendues… et pourraient bien changer une vie. ✨


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Bienvenue sur Histoire d'Alchimiste, le podcast qui explore comment transformer nos épreuves en tremplin et révèle des parcours de vie où l'impossible s'est teinté d'espoir, où chaque épreuve a laissé une empreinte riche de sens. Je suis Sandra et toutes les deux semaines, je pars à la rencontre d'âmes audacieuses qui ont su transformer leurs blessures en force et leur histoire en élan de vie. Parce que peu importe d'où tu viens, Peu importe ce que tu as traversé, toi aussi, tu peux réveiller l'alchimiste qui est en toi et faire de ton parcours un moteur de sens, de contribution et de changement. Alors, prépare-toi à ressentir, à questionner et à laisser ces histoires souffler sur les braises de ta propre transformation. Aujourd'hui, je te propose d'aller rencontrer Antoine, un chef de cuisine, mais surtout un homme qui a connu l'enfer du crack pendant 20 ans. avant de choisir de vivre, pas de manière tiède non, mais avec intensité, et sans besoin de s'en sortir et d'aider à partir de ce qu'il a traversé. Il est passé de la paranoïa à la liberté, du silence au drapeau accroché à l'arrière d'un vélo, un vélo avec lequel il a déjà parcouru de nombreux kilomètres, et projette de traverser les frontières pour faire le tour du monde sans avion et offrir des cadeaux à ceux qui n'en reçoivent que trop peu. Ce qui m'a bouleversée chez Antoine, c'est ce moment où il m'a dit « Je pense que si je suis tombée dans le krach, c'est pour comprendre, pour aider les autres à mon tour. Et si mon histoire peut aider, alors ça valait le coup. » Antoine cherche à aimer mieux, à se réparer et réparer un peu le monde. Avec son vélo et une force de vie qui dit « Reste pas seul avec ton chaos. Si toi aussi tu portes une douleur en cachette, Si tu t'es déjà demandé pourquoi tu t'en es sorti, comment t'en sortir ? Si t'as envie de croire qu'un chemin est possible, même dans le chaos, même quand tu touches le fond, alors cet épisode va forcément te parler. Prépare-toi à un échange bouleversant avec Antoine, un ancien accro au crack qui trace aujourd'hui sa route, à pied, à vélo, sans masque et surtout sans cam, mais avec une force de vie fulgurante. Salut Antoine, comment tu vas aujourd'hui ?

  • Speaker #1

    Très bien et toi Sandra ?

  • Speaker #0

    Merci de me recevoir chez toi. Alors, on est où ici ?

  • Speaker #1

    On est à Saint-Philibert, dans le Morbihan, en Bretagne.

  • Speaker #0

    Ok, donc là on est entouré d'arbres, il y a les oiseaux.

  • Speaker #1

    Ouais, là on est dans le trou du cul du monde.

  • Speaker #0

    Alors avant de commencer, je vais te proposer un petit jeu. T'es dans un poste de contrôle abandonné, presque irréel. Autour de toi, des centaines de petites télés. Sur chaque écran, un fragment de ta vie. des souvenirs, des galères, des visages, des décisions. Et puis au centre, un écran noir. Un code erreur clignote. Pour revenir chez toi, pour te réveiller, tu dois l'activer. Alors tu t'approches et une voix sort du haut-parleur. Tu dois inscrire sur cet écran trois forces de vie. Celles qui pulsent à l'intérieur. Celles qui t'ont mis des coups de pied aux fesses. Celles qui t'ont fait traverser les tempêtes, les chutes. Alors tu choisis quoi ?

  • Speaker #1

    Je choisirais en premier la liberté. pouvoir faire ce que je veux, voyager, vivre pour moi. Après, ma famille et l'envie d'aider. Et mon histoire peut servir à d'autres, alors c'est pas pour rien.

  • Speaker #0

    C'est de belles forces, ça. Ouais. Et quand tu te lèves le matin aujourd'hui, c'est quoi la chose qui te traverse en premier ? Une pensée, un élan, une angoisse peut-être ?

  • Speaker #1

    Non, non, non, quand je me réveille, je suis pas angoissé. Je dors très mal, mais je suis pas angoissé. Mais malheureusement, encore la première chose à laquelle je pense en me réveillant, c'est la clope.

  • Speaker #0

    Tu as aussi arrêté la cigarette.

  • Speaker #1

    Oui, la cure que j'ai faite a été sans tabac. Et quand je me suis inscrit, je m'étais dit que j'arrêtais tout. Quand je suis arrivé, je m'étais dit que c'était trop. Au final, je me suis rendu compte que c'était possible. Et voilà, donc du coup, la première pensée le matin, c'est toujours la clope. Mais je te mets mes petits patchs. Et du coup, ça passe au bout d'une heure.

  • Speaker #0

    Donc, tu es tombé dans le crack il y a 20 ans. Oui. Et est-ce que tu te souviens de la première fois ?

  • Speaker #1

    Ouais, c'était sur un parking de boîte à l'âge de Zoclub, à Pec.

  • Speaker #0

    En Belgique ? Ouais. Ah ben mince alors !

  • Speaker #1

    Bah c'est là où j'ai commencé toutes mes conneries.

  • Speaker #0

    Ah bah c'est là où il se passe beaucoup de conneries, ouais. Ouais.

  • Speaker #1

    Et j'avais rencontré un mec qui était plus vieux que moi, qui était un ancien dealer des parkings de boîte en Belgique. Ça sort de mes 18 ans, il me propose une trace de coke, je lui dis que j'ai pas envie, parce que ça me fait peur de sniffer. Il m'a dit « Ah t'inquiète, ça se fume si tu veux » . puis Et puis il m'a fait du crack parce qu'en fait le... Le crack, c'est un dérivé de la cocaïne. Tu fais du crack avec la cocaïne. Et moi, je ne savais pas ce que c'était. Je n'ai pas vu ce qu'il faisait devant. Et puis, j'ai bien aimé tout de suite.

  • Speaker #0

    Et après, ça a été quelque chose que tu as refait encore et encore pendant 20 ans.

  • Speaker #1

    Après, au début, au final, je n'en consommais pas tant que ça. Mais je me suis rendu compte au fur et à mesure des années que je gardais tout. Parce que je prenais beaucoup de coke en soirée et d'autres trucs. Et je me rendais compte qu'au final, à chaque fois, je gardais un peu pour... pour me faire du crack à la maison en rentrant. Et au fur et à mesure des années, ça devenait de plus en plus...

  • Speaker #0

    Et la dernière fois, tu t'en souviens ?

  • Speaker #1

    Ouais. Alors, je ne sais plus, en novembre, si c'est 30 ou 31 jours, c'est 30. Donc, c'était le 30 novembre. Le matin, je lui ai dit à ma mère que je prenais du crack. Et le soir, j'ai pris mon dernier gramme de crack.

  • Speaker #0

    Et donc, tu as pris cette décision comme ça ?

  • Speaker #1

    Non, sur le coup, non. Moi, je l'avais dit à mon père un mois avant. Et je l'avais dit, on ne le dit pas à maman pour l'instant, parce que j'ai peur de la tuer en lui disant. Et je ne sais pas, ce matin, je me suis réveillé, je me suis dit, il faut que je lui dise. Donc, quand je me dis un truc, je le fais tout de suite. Je l'ai appelé, je lui ai tout dit, donc ça a duré quelques heures quand même. Et je ne l'ai pas tué. Mais quand je lui ai dit, je lui ai dit « Maman, je suis intoxicot, dans trois jours j'ai rendez-vous dans une cure, enfin dans un hôpital psychiatrique, et s'il faut que je dise que je suis suicidaire pour qu'il me garde, je le ferai parce que je pense à ça matin, midi et soir, depuis un mois où je l'ai dit à papa, c'est dans ma tête comme jamais ça l'était avant. » Le lendemain matin, je me réveille, je descends les escaliers, papa me dit qu'il va avoir son pote garage-liste, et là je mets ma playlist sur l'enceinte de la maison, il y a une musique qui passe. Et là, j'ai pleuré comme jamais j'ai pleuré dans ma vie. Pour moi, je me rends compte que j'ai beaucoup pleuré. Indirectement pour moi, mais pas directement. Je ne sais pas trop comment expliquer. Et là, j'ai vu 20 ans de ma vie, mais c'était un film. Tout, tout, tout, tout est passé. Et là, j'ai dit, c'est fini. Et il y a deux autres musiques qui sont passées après. Donc ça a duré bien 15, 20 minutes au final. J'ai continué à chialer après tout ça. Mon père qui arrive et qui me fait « qu'est-ce qu'il y a ? » Ça va parler de choses. Je me suis dit « si, si, ça va trop bien justement. » Je pleure de joie.

  • Speaker #0

    Est-ce que tu penses que c'était comme un signe, un appel, cette chanson ?

  • Speaker #1

    C'est marrant parce que je l'avais chasamée quelques jours avant. Elle passait par hasard à la radio, je l'avais déjà entendue. Et elle m'a marqué cette musique. Et là, à ce moment-là, ce n'était pas le bon moment encore. Et là, elle est arrivée ce jour-là et ce n'est pas par hasard.

  • Speaker #0

    C'est ouf ce déclic. Et entre ces deux événements, le début et la fin, est-ce qu'il y a eu des tentatives d'arrêter ?

  • Speaker #1

    En fait, entre le jour où j'ai dit à mon père et le jour où j'ai dit à ma mère, j'en prenais tous les jours. Je l'ai caché à mon père, il ne le sait pas. Il doit commencer à le savoir, je crois que je l'ai dit maintenant. Mais il croyait que j'étais clean. Je trouvais des moyens. Je lui avais donné ma carte bleue, mon téléphone. Enfin, pas mon téléphone, mais les applications qui permettaient d'acheter de la drogue. Mais je trouve encore des moyens, je ne vais pas dire lesquels, mais je trouvais des moyens de m'en procurer. Et j'ai réussi à m'acheter un gramme par jour pendant un mois. Et après, par contre, depuis, si c'était la question, d'entre le 1er décembre et aujourd'hui, j'y pense tous les jours.

  • Speaker #0

    Donc c'est encore dur, même si ça fait six mois.

  • Speaker #1

    Il y a eu en six mois, il y a eu plein d'étapes. Il y a eu les deux premiers mois où... où je m'en sortais, je n'y pensais pas, mais je savais qu'il fallait que je fasse gaffe. Il y a eu deux mois où pour moi c'était derrière. Je me suis même retrouvé dans une soirée en Inde où il y a un saladier de coke qui est arrivé et je leur ai dégagé la gueule en mode « c'est quoi votre merde ? » . Et depuis la cure, c'est vraiment difficile. C'est marrant parce que je pense, en fait la cure ça te fait repasser. J'étais dans un monde parallèle depuis quatre mois, voyage. enfermé avec mon père, enfin enfermé en plus guillemets, et retournant au cure, en fait, c'était retrouver des personnes qui sont dans le même, dans la même maladie que moi, et en fait, aller chercher de la complication, parce qu'on va trop parler, j'ai eu des trucs, c'était qui ton dealer, comment tu fumais ça, à la canette ou à la bouteille, enfin.

  • Speaker #0

    On passe par le mental, et quand t'es passé en Inde, je pense que là, t'es passé par quelque chose de spirituel. qui te dépasse totalement et qui te raccorde à quelque chose qui te prend directement au cœur.

  • Speaker #1

    Ah bah oui, il se fait mal aussi. En fait, je ne sais pas, mais du coup, j'y pense beaucoup plus depuis que je suis passé par là. Mais c'était trop facile jusqu'à là, en fait. Tout le monde me dit, ça a l'air trop facile pour toi. À ce moment-là, c'était facile. Là, depuis deux mois, c'est redifficile, tu vois.

  • Speaker #0

    Est-ce que tu penses que le voyage que tu vas entreprendre là en vélo... Ça va beaucoup t'aider aussi ?

  • Speaker #1

    Je me suis toujours rendu compte, dès le début, quand j'ai vu les médecins, parce qu'au début, pendant trois mois, jusqu'à ce qu'on parte en Inde, j'avais trois rendez-vous par semaine. Et les gars, ils me disaient, enfin les médecins, il ne faut pas que tu fuis la réalité. Mais en fait, ma vie, c'est ça.

  • Speaker #0

    Mais ta réalité, c'est toi qui te l'as créée ? Oui,

  • Speaker #1

    voilà, c'est ça.

  • Speaker #0

    Ce n'est pas parce que ce n'est pas la leur que...

  • Speaker #1

    C'est pas la leur, mais moi, je sais depuis toujours que... que j'ai envie de faire ce tour du monde et que d'aller voir tout ce qui se passe dans le monde me fait oublier cette drogue.

  • Speaker #0

    Et ça te transforme ?

  • Speaker #1

    Ouais.

  • Speaker #0

    Et donc, qu'est-ce qui te fait tenir encore aujourd'hui ?

  • Speaker #1

    Ce qui me fait tenir, c'est en premier mes parents, enfin moi, parce que je suis quand même beau. En premier, moi. Je dis toujours mes parents avant, mais il faut que je les dise moi. Parce que je ne suis pas fier d'être tombé dedans, mais je commence à être fier de m'en sortir. Parce que tous les médecins, ils disent que quand on en a parlé autour de nous, ils nous ont dit à mes parents, vous aurez un toxico dans votre vie. Je serai un toxico toute ma vie parce que j'en aurai.

  • Speaker #0

    C'est un peu encourageant ça. Ouais,

  • Speaker #1

    ouais, ouais, mais c'est lucide aussi. Je ne sais pas si c'est le bon mot lucide, mais c'est la vérité. C'est que cette drogue, je l'ai su dès le début. Enfin, pas à 18 ans, parce qu'à 18 ans, j'avais encore douleur dans ma tête. Mais à 25 ans, je me suis dit, elle fera partie de moi toute ma vie, cette drogue. J'espère que je m'en défraie, mais elle fera partie de moi toute ma vie.

  • Speaker #0

    C'est comme une connexion qui se fait dans le cerveau. Oui,

  • Speaker #1

    une connexion de merde. Je ne vais pas avoir une connexion avec une fille qui se partage ma vie, mais non, c'est avec la drogue.

  • Speaker #0

    Eh bien, il faudra remplacer cette accoutumance par celle de l'amour, peut-être. Qui sait ?

  • Speaker #1

    Inch'Allah.

  • Speaker #0

    Carrément. Et si on revient un peu sur les journées que tu passais à l'époque ? Quand tu étais dépendant, c'était quoi une journée type ?

  • Speaker #1

    Après 20 ans, les journées, elles changent. Ouais,

  • Speaker #0

    je me doute.

  • Speaker #1

    Au début, c'était une journée classique de mec normal qui, de temps en temps, va déconner. Et c'est la dernière année où là, ça a vraiment été... J'en rêvais la nuit. Donc, on ne peut pas dire que c'est un rêve, mais plus un cauchemar, du coup. Je rêvais que je prenais du crack la nuit, je me réveillais le matin comme si j'en avais pris, donc en manque. Donc dès le matin, je me réveillais, il fallait que j'ai ma dose. Il fallait que j'appelle le dealer dès le matin, on va trouver un dealer à 8h du mat.

  • Speaker #0

    Parce que tu n'en avais déjà plus de la vie ?

  • Speaker #1

    Ah bah non, quand je commence quelque chose, je le finis.

  • Speaker #0

    Donc tous les matins, c'était la même galère ?

  • Speaker #1

    Il y avait des matins où ça allait, enfin bref. Mais avant 14h, j'avais mon gramme.

  • Speaker #0

    Et comment ça s'organisait au niveau de la vie pro ?

  • Speaker #1

    J'ai eu la chance d'être très bon dans mon métier et j'arrivais quand même à gérer les deux. Mais du coup, j'étais quand même beaucoup moins productif quand je ne trouvais pas ma dose le matin parce que j'étais plus sur mon téléphone à envoyer des messages aux 40 dealers que j'avais sur mon téléphone qu'à faire ma mise en place et à préparer mon service pour le midi.

  • Speaker #0

    Alors même si je n'aime pas les étiquettes et que je n'aime pas qu'on parle de soi à travers un métier, ça me rend curieuse. Qu'est-ce que tu faisais avant dans la cuisine ? Ah,

  • Speaker #1

    je faisais de la cuisine.

  • Speaker #0

    Ok.

  • Speaker #1

    20 ans de cuisine, 20 ans de crack. Jusqu'à il y a deux mois, je me disais que c'était inhumain de faire ça. Et les médecins, parce que j'étais diagnostiqué TDAH, je n'aime pas trop ce mot, mais ils me disaient qu'en fait, cette drogue me canalisait et c'était mon médicament. C'est encore un bon conseil. Et le traitement qu'ils te proposent pour le TDAH, c'est de la méthamphétamine.

  • Speaker #0

    On remplace un dealer par un autre.

  • Speaker #1

    Oui, voilà. Et puis, en fait, tu te dis, je fais quoi ? Je continue à me... Mais le TDAH, c'est un cerveau qui va un peu à mille à l'heure. Et je pense que jusqu'à il y a six mois, je n'étais pas capable de gérer mon cerveau. Et aujourd'hui, je le gère et je n'en ai plus besoin. Enfin, je n'en ai plus besoin. Non, je n'en ai jamais eu besoin, mais je n'étais pas capable de gérer mon cerveau avant. En fait, j'ai eu besoin de faire plein de trucs en même temps, donc de me droguer et de faire de la bouffe, par exemple.

  • Speaker #0

    Et aujourd'hui, tu gères ton TDAH beaucoup mieux, mais sans traitement alors ?

  • Speaker #1

    Oui, non, j'ai refusé le traitement. Je leur ai dit, je n'ai pas envie d'arrêter une drogue pour une autre. Le gérer, vu que j'ai quand même... Une partie du cerveau qui est quand même beaucoup moins remplie par la recherche de drogue, me permet de me concentrer sur les tâches à faire. Parce que du coup, vu que je dois faire plein de choses en même temps, je m'éparpille et je me perds. Donc à l'époque, je m'éparpillais et je me perdais. Vu que je prenais du crack à côté, j'oubliais ce que je devais faire à la base.

  • Speaker #0

    D'accord.

  • Speaker #1

    Aujourd'hui, je l'oublie toujours. mais dans la journée ça revient et j'y repense donc en fait Avant, j'oubliais. Là, dans la journée, ça revient et je le refais.

  • Speaker #0

    D'accord.

  • Speaker #1

    Donc, je suis à jour sur mes tâches administratives, tout ça.

  • Speaker #0

    Ça, ça donne aussi un bon sentiment de tranquillité parce que tu as plein de fichiers ouverts dans le fait.

  • Speaker #1

    Oui, c'est ça. Le partenaire met tous les rendez-vous. En fait, c'est un stress que tu as en plus et que j'ai moins aujourd'hui. Je n'ai jamais réussi à gérer ça pendant toute ma vie. Et franchement, je suis trop content de réussir à gérer ce truc-là. Ça paraît banal pour certaines personnes. Mais pour moi et pour tous les gens qui sont TDAH, je pense qu'entendre dire que tu réussis un peu mieux à gérer ta vie...

  • Speaker #0

    C'est un combat. Moi, je le suis aussi et c'est un combat quotidien. Moi, je me bats aussi avec la montre. Et toi, c'est quoi ton rapport à la montre ?

  • Speaker #1

    La montre ?

  • Speaker #0

    Ouais. Au temps.

  • Speaker #1

    Au temps ? Je gère très bien le temps. C'est vrai ? Ouais. Tu vois, par rapport à ton arrivée, j'étais timing. Il me restait deux toasts à faire pour que je sois prêt. Mais non, après, c'est mon métier aussi qui m'a forgé à bien gérer le temps, parce que tout est à la mieux. Tout est une question de minutes en cuisine. Je pense que c'est grâce à ça aussi. Je n'ai pas trop de problèmes avec ma montre.

  • Speaker #0

    Si je comprends bien, tu as toujours gardé un pied dans la réalité à travers ton travail, qui t'a ancré quand même, et un pied dans la folie de la drogue.

  • Speaker #1

    Oui, j'ai un côté où je suis le plus gentil. Je ne parle plus d'anti du monde, mais je suis quelqu'un de très gentil, qui est très humain, qui aime aider les personnes. Alors ça s'est souvent retourné contre moi, mais je pense que la drogue, elle y était aussi pour quelque chose, parce que je devais mal exprimer ce que je voulais faire de base. Dans mes couples, j'ai toujours voulu aider et en fait, ça s'est retourné contre moi, par exemple. J'ai oublié les questions du coup, de base.

  • Speaker #0

    Mais ce n'est pas grave.

  • Speaker #1

    La question de base,

  • Speaker #0

    elle est imprévue. de moi aussi je l'ai oublié bienvenue chez les TDA et ben tu sais quoi on va passer à la suivante dans tout ça est-ce qu'il y a eu un moment où t'as senti que t'existais plus vraiment dans cette vie là ouais l'année dernière j'étais

  • Speaker #1

    en couple et autour de moi tout le monde pensait que je m'étais calmé sur la fête parce que je suis un fêtard de base et que je m'étais rangé Et je me rendais compte que je longeais les murs parce que cette drogue, elle te rend vraiment parano. Et je me cachais un peu derrière ma meuf en mode je suis clean, je suis sage, tout ça. Et mais moi dans ma tête, et je pense que ça a été le avant du déclic, c'est que tous les jours je me disais en fait je ne sers plus à rien sur cette terre. En cuisine, je ne progresse plus, même si je progressais encore. Je n'ai plus rien à apporter. Et quelqu'un d'autre mérite plus sa place que moi. Je ne suis pas croyant, je ne suis pas baptisé ou quoi que ce soit. Mais je crois en quelque chose. Et je m'étais dit, il va me prendre ma vie, elle ne sert plus à rien. Être là pour donner de l'argent à des dealers et à trouiner le cerveau, ça ne sert à rien.

  • Speaker #0

    Donc il y a eu une grosse perte de sens et c'est à ce moment-là que tu as senti que tu n'existais plus vraiment dans ta vie ?

  • Speaker #1

    En fait j'existais mais je n'existais plus non plus.

  • Speaker #0

    Et c'est quoi ce truc qui résistait en toi, même tout au fond à ce moment-là, qui fait que tu tenais bon quand même ?

  • Speaker #1

    J'ai toujours su que j'étais quelqu'un de particulier et qu'on m'a toujours dit que je l'avais dans mes mains. Je suis doué dans pas mal de trucs et je me suis dit, en fait je n'avais plus trop d'espoir. Mais je n'arrêtais pas de me dire, putain Antoine, c'est du gâchis, c'est du gâchis, c'est du gâchis. Donc à ce moment-là, je ne me rendais pas compte. Mais aujourd'hui, avec du recul, en fait, j'avais toujours ce truc-là en moi qui me disait, Antoine, tu dois faire quelque chose de ta vie.

  • Speaker #0

    Et quand tu parles de faire quelque chose de ta vie, est-ce que c'est lui donner un sens ? Et si oui, est-ce qu'aujourd'hui, tu as senti que tu voulais donner un sens à ce que tu as vécu ?

  • Speaker #1

    Oui, en fait... Le sens il est venu quand j'ai fait mon... En fait je suis de Lille, et ma cure elle est en Bretagne, et un matin je me suis réveillé, je lui ai dit je prends mon vélo et je pars en Bretagne. Et je voulais voir déjà si mon corps il était encore apte à... Parce que j'ai jamais fait de vélo en vrai, le vélo je l'ai acheté, j'avais fait 50 bornes avec mon frère la veille, et je voulais voir si mon corps il était encore au paix quoi. Et sur la route, à un moment, moi j'ai fait 1200 barres dans 9 jours quand même. C'est minable,

  • Speaker #0

    t'avais la rage. Ouais,

  • Speaker #1

    j'ai pas vu le paysage, j'étais peut-être dans le guidon, je chantais, je faisais le con, mais sinon j'ai rien vu. Et à un moment, je passe devant Action. À ce moment-là, avec ma famille, il y a des gens très proches qui étaient au courant. Et j'ai quand même beaucoup, beaucoup de potes. Et je savais que ça allait se savoir. Et je ne voulais pas que ça se sache par téléphone arabe. Je voulais que ça se sache à ma façon, de le dire moi-même. Mais je n'avais pas envie non plus d'avoir le regard des gens. Je me suis dit, allez, j'achète un drapeau. Et j'ai écrit l'île Bretagne des Intox.

  • Speaker #0

    C'est génial.

  • Speaker #1

    Donc je suis rentré à Action, j'ai dit vous vendez drapeau ? Ils m'ont dit non, donc j'ai acheté un manche à balai et deux têtes d'oreiller. Je me suis mis sur le trottoir, j'ai acheté trois feux de kiki, bref. Et là je me suis mis sur le trottoir à mettre mon drapeau et j'ai dit, bon bah si je le mets sur mon vélo, je vais faire un post sur Insta et je vais raconter ma vie.

  • Speaker #0

    Et c'est là que ça a commencé.

  • Speaker #1

    Et là, en fait, sur le coup, c'était égoïste parce que je me suis rendu compte que mon déclic, que je l'ai eu grâce au fait de le dire à mes parents. Ça a pris un peu de temps. Mais donc il y a la musique, mais le déclic c'est quand même les parents avant. La musique a fait que le déclic se lance. Et du coup je me suis dit, je vais le dire à tout le monde comme ça, comme ça ils ne vont pas me regarder. Si les gens me détestent, ils me supprimeront, ils me bloqueront, ils m'enverront des messages de haine, mais ça ne me fait rien les messages. Avoir quelqu'un en face de moi qui me dit que je suis une merde, j'ai un peu plus de mal. Et en fait ça a pris de l'ampleur cette histoire. Et je me suis rendu compte qu'en fait on a tous une addiction.

  • Speaker #0

    Et tu te sentis moins seul ?

  • Speaker #1

    Je me sentis moins seul et je me suis rendu compte qu'en fait, plein de gens m'envoyaient des messages en me disant « Moi j'ai ça, moi j'ai ci, moi j'ai ça. » Et je me suis dit « En fait, peut-être que mon histoire, elle peut aider. » Donc ça donne un sens à ma vie.

  • Speaker #0

    Et à partir de là, il y a eu une autre énergie dans ce chemin que tu entreprends ?

  • Speaker #1

    L'autre énergie, elle s'est créée en Inde. Quand j'étais en Inde, je ne voulais pas aller dans ce pays à la base. En fait, mon père, il devait aller au Sri Lanka, parce que je l'ai fait avec mon ex. On avait loué un tuktuk à deux et on avait fait le tour du Sri Lanka pendant un mois et demi. Et j'avais vraiment trouvé ce pays incroyable. C'est le pays le plus gentil du monde. C'est incroyable. Les mecs, tous les jours, ils doivent faire une BA. Et on l'a ressenti pendant notre voyage. Moi, j'ai des varices. Un jour, j'arrive à un Airbnb. Le mec, il me dit, ah, t'as des varices. Je t'emmène à l'hôpital ayurvédique. Tu sais, le truc de plantes.

  • Speaker #0

    Ouais.

  • Speaker #1

    On a fait une heure de route, on est arrivé à l'hôpital, l'hôpital gratuit, ils me donnent un traitement à base de plantes et des massages à faire. Bon, je n'ai jamais fait ce que c'était dans la drogue, mais le truc, il marchait, quoi.

  • Speaker #0

    Incroyable.

  • Speaker #1

    Un mec gratuitement comme ça, tu lui demandes, tu lui donnes de l'argent et il te dit non. Après l'Inde, ça est encore... On ne peut pas comparer deux pays. Mais pour en revenir à la question, du coup, en Inde, je ne sais pas ce qui se passait, mais en fait, j'ai vu la misère. Ce n'est pas ce qui m'a marqué sur le voyage, parce que tout le monde dit « tu prends un coup en étant là-bas » . Moi, je n'ai pas pris un coup parce que tout le monde était heureux, qu'ils soient riches ou pauvres. Tout le monde se mélange.

  • Speaker #0

    Il y a une puissance du cœur même au creux, pas d'isère profonde.

  • Speaker #1

    J'en ai des frissons rien qu'en parler. Les gens ne se mélangent pas entre eux, mais communiquent entre eux. Nous, par exemple à Lille, on ne verra jamais un Français de Marc-Andre Barrel parler à un Roubaisien. un rebus roubé.

  • Speaker #0

    C'est le système de caste.

  • Speaker #1

    Là-bas, il y a les castes, mais ils parlent. J'ai déjà vu des millionnaires demander leur route à un tuktuk et ils mettent un quart d'heure à... Tu ne sais pas ce qu'ils se disent, mais ils parlent pendant un quart d'heure. Ça sourit, ça rigole et tout. Je pense que tu ne verras jamais chez nous. Ça, les bidonvilles, je ne voulais pas les faire non plus. En fait, tu vois que tous les déchets de France, ils arrivent là-bas. Dans le bidonville en question que j'ai fait à Mombé, C'est 10% des déchets mondiaux qui arrivent.

  • Speaker #0

    Incroyable !

  • Speaker #1

    Donc on leur achète leurs fringues et on leur rend nos merdes. Et plein de trucs. Et en fait, les gens venaient vachement me voir, je ne sais pas pourquoi. Après j'ai rencontré un gourou qui m'a dit que dans une autre vie j'étais un chaman indien. Je ne crois pas trop, enfin je y crois sans y croire. Mais je ne sais pas, il y a quelque chose qui s'est fait et je me suis dit, putain, je rentre à pied d'Inde. Et puis après, il y avait la cure, tout ça. Et je me suis dit, c'est un truc qui se prépare, donc je ne l'ai pas fait. Mais du coup, j'ai envie de partir faire le tour du monde sans prendre l'avion.

  • Speaker #0

    C'est énorme. Et toujours, en fait, dans ce mouvement d'aider à travers...

  • Speaker #1

    Ouais, mais en fait, avec les idées qui me fuitent dans tous les sens. C'est avant, je pars en Ouganda, ce n'est jamais été en Afrique. Et je me suis dit que je me suis allé créer une asso. Moi, je vais partir là-bas. J'ai vu qu'en fait, dans l'avion, j'avais le droit de prendre deux valises. Donc j'en ai mis avec mes fringues et une avec des cadeaux, des bouquins, des crayons, des trucs comme ça. Et en fait, l'idée, c'est d'arriver avec des cadeaux. Moi, au courrier, les premiers, tu vois, aller voir un mec dans la rue, n'importe quoi. Et du coup, un cadeau qui grandit où en fait, moi, j'offre le premier. Et puis après, à l'assaut, s'il y a des gens qui veulent donner un peu d'argent. Après, je vais voir par exemple une famille. Si on réussit à faire un cadeau à une famille qui est un peu plus gros. Après, aller voir une école et monter. Après, je ne sais pas si ça prendra, mais tu vois, toujours pas arriver en mode touriste. Je veux voir ton pays, mais...

  • Speaker #0

    un système de...

  • Speaker #1

    Tourisme, je veux voir mon pays et si je peux aider à... Toi, même rester une semaine dans un truc, à bricoler, à faire n'importe quoi, enfin, je ne suis pas un grand bricoleur, mais pas qu'être là en tant que touriste, mais apporter un truc aussi si je peux, quoi.

  • Speaker #0

    Et dans tout ce que tu fais, donc ton projet d'assos, le fait de partir en vélo, les voyages et la cure, qu'est-ce qui t'a le plus aidé ?

  • Speaker #1

    Le voyage. La cure, elle m'a pas aidé. La cure, elle m'a... La cure, elle m'a aidé à me rendre compte que j'en étais pas sorti et qu'il fallait que je fasse attention toute ma vie. Donc elle m'a aidé d'un côté quand même, parce que sans ça, peut-être qu'un jour, je serais tombé sur un dealer et j'aurais dit oui. La cure m'a conforté dans l'idée où il faut que je fasse vraiment attention. Mais le voyage m'a fait rendre compte qu'en fait, quand je suis en voyage, j'oublie toute cette merde et que même si on peut dire que c'est fuir le truc, en fait, je veux bien le fuir. Pour l'instant, à part ma famille, je n'ai pas d'attache ici. Et puis peut-être qu'un jour, en voyageant, j'aurai une attache quelque part.

  • Speaker #0

    Est-ce que le Antoine qui part est le même que le Antoine qui revient ?

  • Speaker #1

    Oui, le Antoine, il ne change pas. Franchement, le Antoine, il ne change pas. Il réussit avec la drogue en moins à avoir son cerveau qui marche mieux pour savoir un peu plus où il va.

  • Speaker #0

    C'est pas mal dit ça.

  • Speaker #1

    Ouais, ouais, ouais. Parce que j'ai toujours rêvé de faire ce tour du monde. Mais la drogue, dès que je rentrais de voyage, j'étais allé à l'aéroport dans le pays avant d'arriver en France. Je pensais déjà à appeler le dealer. Ou je l'avais déjà même appelé. Là, aujourd'hui, je dois juste penser à ne pas en prendre. Je ne dois pas penser à comment en avoir. Ça prend beaucoup moins de temps à dire non, j'en prends pas qu'à prendre ton téléphone, à trouver un dealer. Et puis après, quand tu te drogues, tu n'as plus de cerveau. et tu penses à tout sauf à ça. En fait, aujourd'hui, vu que je suis en arrêt de travail, j'ai quand même vachement de temps pour réfléchir à tout ce que je vais faire une fois que je partirai.

  • Speaker #0

    Et t'as dû lâcher quoi pour t'en sortir ? Des connaissances ?

  • Speaker #1

    Des amis ? Personne n'était au courant. Jusqu'au jour où je disais à mon père que j'étais le seul au courant, à part les dealers. Donc j'ai pas dû... Après, j'ai fait quand même un tri. Le tri, c'est pas en mode j'ai pris mon répertoire et j'ai supprimé des gens, mais il y a des gens que t'enlèves de ta vie parce que en fait, la drogue, elle te fait avoir moins conscience de la personne que t'es en face de toi et que quand t'es clean et que t'as tout ton cerveau, tu lui dis en fait, ce mec-là, il m'apporte rien. C'est des trucs qui se font naturellement. Du coup, lâcher... Non, lâcher mon métier. Lâcher la cuisine, ça me fait un bien flou. Ça fait 20 ans que je cours, que je me mets dans des missions tout le temps impossibles parce que j'ai toujours eu la pression de mon père pour le boulot. Et vu que je faisais le coin à côté, je pense que pour remettre le pendule à l'heure, je me lançais sur des missions de ouf pour le rendre fier. Mais des missions qui m'ont bouffé ma vie. Là, ça fait six mois que je ne travaille pas.

  • Speaker #0

    Le rêve ?

  • Speaker #1

    C'est le bonheur.

  • Speaker #0

    Je m'adouce.

  • Speaker #1

    C'est le bonheur. Après, je veux vraiment me débarrasser de cet arrêt de travail parce que je n'ai pas 100% de ma liberté, du coup, parce que je ne peux pas faire ce que je veux, parce que je suis fliqué quand même par mon boss, qui a appelé la sécu pendant que j'étais en Inde pour leur dire que j'étais en vacances pendant mon arrêt maladie, des trucs comme ça, pour que je les rembourse, alors que je gagne moins que le SMIC. Enfin bref. Et voilà, du coup... Vous savez, je suis perdu. Mais du coup, je n'ai pas dû me séparer de grand-chose, juste de mon métier. Et pour la première fois de ma vie, je n'ai plus la pression. Mon père m'a dit, en fait, tu t'es mis une pression pour rien, de ce qu'il dit.

  • Speaker #0

    Ça t'a libéré,

  • Speaker #1

    ça ? Et du coup, ce truc-là de mon père, qu'il ne soit pas derrière moi, et qu'il me dise, prends ton temps. Et qu'aujourd'hui, même quand je lui dis, parce qu'avant, il y a un an, j'aurais dit, je veux partir faire le tour du monde à pied. il m'aurait dit non tu bosses quoi Aujourd'hui, il a compris que j'étais différent, qu'il fallait accepter que j'ai des projets différents que la moyenne.

  • Speaker #0

    Est-ce que tu penses que c'est ça aussi qui t'a fait tomber dans la drogue, ce besoin d'être quelqu'un d'autre ?

  • Speaker #1

    Je suis tombé dans la drogue parce que je voulais toujours montrer que j'étais capable de bouffer le plus de tasses possible dans la soirée, d'être le plus con en gros. Le plus con ? Le plus con, c'est con de faire des concours de celui qui se défonce le plus la gueule.

  • Speaker #0

    D'accord.

  • Speaker #1

    J'ai toujours voulu... Je suis quelqu'un qui aime bien plaire. Et ma façon de plaire à l'époque, c'était d'être le plus fou.

  • Speaker #0

    D'accord. Tu étais dans ce personnage-là. Aujourd'hui, tu te rends compte que c'était un rôle que tu jouais ou c'était vraiment réel à l'époque ?

  • Speaker #1

    Non, j'en ai trop fait. Mais je reste quand même qui je suis. Et je sais que de temps en temps, j'ai besoin de lâcher les chevaux et de mettre une perche.

  • Speaker #0

    Et quand tu es du maître une perche,

  • Speaker #1

    c'est... Pas aller boire des coups avec des potes.

  • Speaker #0

    De lâcher la pression.

  • Speaker #1

    En fait, je m'en rends compte quand même. Mais c'est pas bien. Enfin, il faut pas... Parce que l'alcool, c'est quand même le meilleur ami de la tentation d'après de faire des conneries. Donc, il faudrait que je sois abstinent total d'alcool. Enfin, pas me mettre...

  • Speaker #0

    Mais là, ça te met une pression dingue aussi. Ça te met une pression folle.

  • Speaker #1

    Oui, en fait, c'est ça. C'est tout arrêté. Et en fait, j'ai tellement bossé dans ma tête pendant six mois que je sais que je ne tomberai plus dans la cam. Je n'en ai jamais repris jusqu'à aujourd'hui. Mais si il y a un matin où je me réveille et je me suis pris une timbale et que je me rends compte que j'en ai pris, je ne retomberai pas dedans le lendemain. Ce n'est pas du tout un bon conseil, mais moi, personnellement, je sais que...

  • Speaker #0

    Parce que tu as fait assez de chemin pour voir...

  • Speaker #1

    En fait, je me suis rendu compte qu'avant, dès que j'avais l'envie, j'appelais le dealer et je ne réfléchissais pas au reste. Aujourd'hui, je sais que j'en ai envie tous les jours, mais que je ne le fais pas. Et que même si un matin, en fait, si un matin où je me réveille, que je vois un sachet à côté de moi, je vais culpabiliser, ça me fera chier. Mais justement, en fait, encore plus, ça me dira non, mais tu l'as fait hier, tu ne le refais plus.

  • Speaker #0

    Donc, tu as l'impression, tu as cette impression d'être plus fort aujourd'hui, plus vrai aussi.

  • Speaker #1

    Ouais, ouais, ouais. Non, mais aujourd'hui, je suis 100% moi-même et j'ai plus... J'ai plus ce truc-là où j'ai envie de plaire ou pas plaire aux gens. Aujourd'hui, tu peux me dire que tu m'aimes pas, ça me dérange pas.

  • Speaker #0

    Moi, ça m'a beaucoup frappée sur ton profil Insta. En fait, c'est ce qui a percuté en premier. Tu utilises un langage des fois cru, très vrai, et il n'y a pas ce besoin de se conformer à se dire « mais non, il faut que je parle de telle manière, il faut que j'utilise tel ton » .

  • Speaker #1

    C'est ça, après, pour moi, avoir un maximum d'abonnés, c'est de toucher un maximum de monde pour un maximum aidé. Que j'en ai... pas combien, je m'en fous, à chaque fois on me dit t'as 11K ou je sais pas quoi, je regarde même pas, je m'en fous. Mais quand je vois que ça monte, je me dis putain, en fait...

  • Speaker #0

    Ça parle.

  • Speaker #1

    Ça parle plus, enfin ça peut aider. C'est que ça interpelle et si ça interpelle, c'est que ça touche.

  • Speaker #0

    Après, bien sûr, c'est hyper important parce qu'au plus, comme tu le dis, au plus il y aura de monde qui va entendre ton message, au plus il y aura d'impact. Mais si cet impact est créé autour de la personne que tu n'es pas, autour d'un masque,

  • Speaker #1

    il n'a plus d'importance. Non, du coup, je ne peux pas le m'envoi. C'est comme là, je te dis que je pourrais me réveiller un matin en ayant pris. Normalement, j'aimerais dire plus jamais, plus jamais, plus jamais. Mais je sais dans ma tête que plus jamais, je retomberai dedans. Mais que ce n'est pas parce qu'il y a un jour où je me réveille que je l'ai fait, que je retomberai.

  • Speaker #0

    La vie, j'ai l'impression que c'est un peu ça aussi. C'est des fois, tu fais trois pas en avant, t'en fais même dix, et puis paf, il arrive un truc et t'en fais deux en arrière.

  • Speaker #1

    Toi, il vaut mieux se dire, ça peut être arrivé, mais c'est pas parce que ça réarrive que je retomberai dedans. Plutôt que de se dire que je ne retomberai jamais dedans. Et en fait, il y a un jour où tu craques et là, t'es reparti comme en 40 et que c'est encore pire. Parce que quand tu retombes, quand t'arrêtes et que tu reprends, tu reprends pire à chaque fois. Mais par contre, du coup, je me repense à un truc, est-ce qu'Antoine change ? Bah oui, du coup, j'ai changé. Parce qu'avant, le regard des gens était important pour moi. Aujourd'hui, j'en ai plus rien. Mais je parle du personnage intérieur.

  • Speaker #0

    Tes valeurs qui tu es, ça bouge pas. Et si tu pouvais retourner parler au petit Antoine, au jeune Antoine d'il y a 20 ans, tu lui dirais quoi ?

  • Speaker #1

    Trache la route. Franchement, je lui dirais rien parce que je te le disais tout à l'heure, je me suis posé la question Toute ma vie, putain, pourquoi cette drogue est arrivée sur ma route ? J'ai eu la réponse il y a quelques jours où, en fait, je pense que je suis arrivé sur Terre pour tomber dedans, pour comprendre comment ça marche et pour aider les gens à peut-être s'en sortir.

  • Speaker #0

    C'est de donner un sens et transformer ce que tu as vécu. Et si tu pouvais laisser une parole à quelqu'un qui est encore dedans, qui est encore sur le chemin, tu lui dirais quoi à cette personne ?

  • Speaker #1

    Chaque personne est différente. Pour ceux qui font ça en cachette et qui se cachent derrière ça, parlez-en. Même si vous avez peur comme moi de tuer vos parents ou quoi que ce soit, en fait, on est tous solides. Après, si vous n'avez pas de parents, pas de famille, allez voir... Des proches, si vous n'avez pas trop de proches, les hôpitaux, ils sont quand même là pour vous.

  • Speaker #0

    Tu ne leur conseillerais pas de prendre un billet d'avion ?

  • Speaker #1

    Si, prendre un billet d'avion. Après, le truc, c'est que quand tu es dans la drogue, tu n'as pas d'argent. Oui, c'est vrai. Mais franchement, les addictos, ils sont bons. Moi, je n'ai pas passé la meilleure des cures, mais tous les médecins que j'ai vus avant, psychologues, alors allez voir un psychologue, parce que le psychologue, il te fait aller chercher un peu de loin. J'ai vu une psy qui, j'avais l'impression qu'elle ne m'avait rien apporté. Et en fait, je me rends compte qu'elle m'a apporté. Le fait de parler, en fait. Le fait de tout lâcher à quelqu'un où, pour le coup, même si tu as peur du regard des gens, lui, tu t'en fous parce que c'est son métier. Moi, ça m'avait fait vachement de bien. Aller voir les centres d'addictos. Moi, je t'ai reçu au début par un infirmier, après par un addicto et pareil. Ils te parlent, ils s'y connaissent dans le truc, donc ça aide. Et fais-t'y croire. Parce que si tu n'y crois pas, tu ne peux pas y arriver. Tout le monde me dit « c'est trop dur, je n'y arrive pas » . Si tu dis que c'est trop dur et que tu n'y arrives pas, tu n'y arriveras pas. Si tu te dis « je peux le faire » , et tu peux le faire, tout le monde peut le faire. On a une force en nous qu'on ne connaît pas. Moi, j'ai rendu compte en vélo, en fait, le vélo, les 1200 bornes en vélo, je ne pensais pas que j'allais y arriver en partant.

  • Speaker #0

    Donc, c'est aussi de se prouver qu'on peut faire plus que ça, qu'on est plus que ça.

  • Speaker #1

    Oui, si tu as réussi à tomber dedans, c'est que c'était pour ton chemin. Mais tu peux y arriver. Tu peux y arriver et ce n'est pas parce que tu retombes dedans de temps en temps. Moi, j'ai mis 20 ans à m'en sortir. Il ne faut pas croire que pendant 20 ans, je n'ai pas essayé de m'en sortir. J'ai essayé de m'en sortir tout seul. Mais je ne me donnais pas les bons moyens. Je faisais ça une fois que je n'avais plus rien, à 4-5 heures du mat, et que je regardais sur Internet. Et là, tu n'as pas ton cerveau. Mais pense-y clean. Regarde bien sur Internet. Tu mets Addicto. Tu vois, il y a des centres partout. Moi, quand j'étais en cure de désintox à Auré, pour moi, c'était un village le truc. En fait, tu as une cure de désintox. Donc, tu as des trucs d'Addicto dans toutes les villes de France, je pense.

  • Speaker #0

    Mais qu'est-ce que tu dirais à cette personne qui a essayé, mais qui a échoué et qui se sent un peu... Comme si il n'y arriverait jamais.

  • Speaker #1

    Tout le monde peut y arriver. Si tu as réussi à tomber dedans, tu peux réussir à t'en sortir. Si tu as dit oui, il faut y aller pour dire oui à ces drogues-là quand même. Donc si tu l'as fait, montre-toi que tu peux t'en sortir.

  • Speaker #0

    Et c'est quoi ton conseil d'alchimiste ? Le truc qui aide à transformer la douleur en matière, la chute en force.

  • Speaker #1

    Parle, écris, bouge. Ne reste pas tout seul avec ton chaos et recommence demain.

  • Speaker #0

    C'est un super conseil ça. Alors avant qu'on termine, j'ai encore une dernière petite question à te poser. Mais ce n'est pas réellement une question. C'est plutôt un petit rituel que je fais avec chaque invité. Alors je vais tendre cette fiole d'alchimiste que voici. Avec sa poudre dorée. Et cette fiole a le pouvoir de réaliser trois T-souhaits. Sans aucune limite. Alors si tout était possible, quels seraient tes trois vœux ?

  • Speaker #1

    De ne plus retomber dans la cam, même si j'y crois déjà. De pouvoir bien, bien, bien entamer mon tour du monde à pied et en vélo. Et le troisième, que mes parents soient heureux.

  • Speaker #0

    Je te souhaite que ces trois vœux se réalisent et je te dis un grand merci Antoine.

  • Speaker #1

    Avec grand plaisir, merci à toi.

  • Speaker #0

    Et bien voilà.

  • Speaker #1

    Et bien ouais, ça a roulé.

  • Speaker #2

    Merci d'avoir écouté cet épisode. Prends quelques secondes, ferme les yeux et respire. Ce que tu viens d'entendre, c'est pas juste un témoignage, c'est une preuve que l'impossible peut être sublimé et que l'humain est capable de renaître encore et encore. Alors si cet épisode t'a apporté quelque chose, Partage-le avec quelqu'un qui en a besoin. Et pense à t'abonner pour ne pas manquer les prochains récits d'Alchimiste. Et toi, quelle part de ton histoire peux-tu transformer aujourd'hui ? Si tu veux prolonger la discussion, viens me retrouver sur Instagram sur Histoire d'Alchimiste. Je serai ravie d'échanger avec toi. Et surtout, souviens-toi, c'est dans tes failles que brille ton éclat le plus précieux. Alors... On se retrouve dans 15 jours pour une nouvelle histoire d'alchimiste.

Description

🎧 20 ans sous crack. Et un jour, Antoine a décidé de marcher vers lui-même.
Pas vers la guérison miracle. Vers quelque chose de plus vrai, plus humble, plus tenace : du sens, de la liberté, et le désir de transmettre.

💬 Chef de cuisine, Antoine a cohabité pendant deux décennies avec une addiction qui grignotait tout : ses nuits, ses relations, ses silences.

Il était enfermé Dedans, c’est-à-dire dans le besoin de plaire, dans la peur d’être vu, dans le crack. Jusqu’au jour où il parle. Il parle à son père. Il parle à ses proches. Il parle sur Instagram. Et il se met en mouvement. Littéralement.


Aujourd’hui, il roule vers le monde sur son vélo, avec une envie simple : aider, inspirer, réparer ce qui peut l’être.
Cet épisode, c’est l’histoire d’un homme qui a décidé de transformer 20 ans de silence et d’addiction en une parole vivante. Antoine raconte comment il a choisi d’agir, de transmettre, et de donner un sens à ce qu’il a traversé — pour ne plus fuir, mais avancer.


🌀 Tu découvriras :

  • Comment Antoine a vécu 20 ans d’addiction tout en maintenant une façade « normale »

  • Le moment exact où tout a basculé : une chanson, des larmes, une promesse

  • Ce que ça fait de dire la vérité après deux décennies de camouflage

  • Pourquoi il a décidé de traverser le monde sans avion, et de créer une association

  • Les pièges de l’après-cure : quand le vrai travail commence

  • Comment il transforme aujourd’hui son histoire en levier pour aider d’autres à s’en sortir


🌟 Ce n’est pas une histoire de réussite. C’est une histoire de vérité. Une histoire de sens, de sueur, et de lumière qu’on rallume, doucement, quand on a passé trop longtemps dans le noir.


📲 Retrouve Antoine ici :
Instagram : @antopihen


💪🏻 Ensemble, on est plus forts.

Si tu veux soutenir ce podcast, fais passer l'étincelle à quelqu’un qui en a besoin et laisse une note ou un avis sur ta plateforme d’écoute préférée.

Parce que certaines histoires méritent d’être entendues… et pourraient bien changer une vie. ✨


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Bienvenue sur Histoire d'Alchimiste, le podcast qui explore comment transformer nos épreuves en tremplin et révèle des parcours de vie où l'impossible s'est teinté d'espoir, où chaque épreuve a laissé une empreinte riche de sens. Je suis Sandra et toutes les deux semaines, je pars à la rencontre d'âmes audacieuses qui ont su transformer leurs blessures en force et leur histoire en élan de vie. Parce que peu importe d'où tu viens, Peu importe ce que tu as traversé, toi aussi, tu peux réveiller l'alchimiste qui est en toi et faire de ton parcours un moteur de sens, de contribution et de changement. Alors, prépare-toi à ressentir, à questionner et à laisser ces histoires souffler sur les braises de ta propre transformation. Aujourd'hui, je te propose d'aller rencontrer Antoine, un chef de cuisine, mais surtout un homme qui a connu l'enfer du crack pendant 20 ans. avant de choisir de vivre, pas de manière tiède non, mais avec intensité, et sans besoin de s'en sortir et d'aider à partir de ce qu'il a traversé. Il est passé de la paranoïa à la liberté, du silence au drapeau accroché à l'arrière d'un vélo, un vélo avec lequel il a déjà parcouru de nombreux kilomètres, et projette de traverser les frontières pour faire le tour du monde sans avion et offrir des cadeaux à ceux qui n'en reçoivent que trop peu. Ce qui m'a bouleversée chez Antoine, c'est ce moment où il m'a dit « Je pense que si je suis tombée dans le krach, c'est pour comprendre, pour aider les autres à mon tour. Et si mon histoire peut aider, alors ça valait le coup. » Antoine cherche à aimer mieux, à se réparer et réparer un peu le monde. Avec son vélo et une force de vie qui dit « Reste pas seul avec ton chaos. Si toi aussi tu portes une douleur en cachette, Si tu t'es déjà demandé pourquoi tu t'en es sorti, comment t'en sortir ? Si t'as envie de croire qu'un chemin est possible, même dans le chaos, même quand tu touches le fond, alors cet épisode va forcément te parler. Prépare-toi à un échange bouleversant avec Antoine, un ancien accro au crack qui trace aujourd'hui sa route, à pied, à vélo, sans masque et surtout sans cam, mais avec une force de vie fulgurante. Salut Antoine, comment tu vas aujourd'hui ?

  • Speaker #1

    Très bien et toi Sandra ?

  • Speaker #0

    Merci de me recevoir chez toi. Alors, on est où ici ?

  • Speaker #1

    On est à Saint-Philibert, dans le Morbihan, en Bretagne.

  • Speaker #0

    Ok, donc là on est entouré d'arbres, il y a les oiseaux.

  • Speaker #1

    Ouais, là on est dans le trou du cul du monde.

  • Speaker #0

    Alors avant de commencer, je vais te proposer un petit jeu. T'es dans un poste de contrôle abandonné, presque irréel. Autour de toi, des centaines de petites télés. Sur chaque écran, un fragment de ta vie. des souvenirs, des galères, des visages, des décisions. Et puis au centre, un écran noir. Un code erreur clignote. Pour revenir chez toi, pour te réveiller, tu dois l'activer. Alors tu t'approches et une voix sort du haut-parleur. Tu dois inscrire sur cet écran trois forces de vie. Celles qui pulsent à l'intérieur. Celles qui t'ont mis des coups de pied aux fesses. Celles qui t'ont fait traverser les tempêtes, les chutes. Alors tu choisis quoi ?

  • Speaker #1

    Je choisirais en premier la liberté. pouvoir faire ce que je veux, voyager, vivre pour moi. Après, ma famille et l'envie d'aider. Et mon histoire peut servir à d'autres, alors c'est pas pour rien.

  • Speaker #0

    C'est de belles forces, ça. Ouais. Et quand tu te lèves le matin aujourd'hui, c'est quoi la chose qui te traverse en premier ? Une pensée, un élan, une angoisse peut-être ?

  • Speaker #1

    Non, non, non, quand je me réveille, je suis pas angoissé. Je dors très mal, mais je suis pas angoissé. Mais malheureusement, encore la première chose à laquelle je pense en me réveillant, c'est la clope.

  • Speaker #0

    Tu as aussi arrêté la cigarette.

  • Speaker #1

    Oui, la cure que j'ai faite a été sans tabac. Et quand je me suis inscrit, je m'étais dit que j'arrêtais tout. Quand je suis arrivé, je m'étais dit que c'était trop. Au final, je me suis rendu compte que c'était possible. Et voilà, donc du coup, la première pensée le matin, c'est toujours la clope. Mais je te mets mes petits patchs. Et du coup, ça passe au bout d'une heure.

  • Speaker #0

    Donc, tu es tombé dans le crack il y a 20 ans. Oui. Et est-ce que tu te souviens de la première fois ?

  • Speaker #1

    Ouais, c'était sur un parking de boîte à l'âge de Zoclub, à Pec.

  • Speaker #0

    En Belgique ? Ouais. Ah ben mince alors !

  • Speaker #1

    Bah c'est là où j'ai commencé toutes mes conneries.

  • Speaker #0

    Ah bah c'est là où il se passe beaucoup de conneries, ouais. Ouais.

  • Speaker #1

    Et j'avais rencontré un mec qui était plus vieux que moi, qui était un ancien dealer des parkings de boîte en Belgique. Ça sort de mes 18 ans, il me propose une trace de coke, je lui dis que j'ai pas envie, parce que ça me fait peur de sniffer. Il m'a dit « Ah t'inquiète, ça se fume si tu veux » . puis Et puis il m'a fait du crack parce qu'en fait le... Le crack, c'est un dérivé de la cocaïne. Tu fais du crack avec la cocaïne. Et moi, je ne savais pas ce que c'était. Je n'ai pas vu ce qu'il faisait devant. Et puis, j'ai bien aimé tout de suite.

  • Speaker #0

    Et après, ça a été quelque chose que tu as refait encore et encore pendant 20 ans.

  • Speaker #1

    Après, au début, au final, je n'en consommais pas tant que ça. Mais je me suis rendu compte au fur et à mesure des années que je gardais tout. Parce que je prenais beaucoup de coke en soirée et d'autres trucs. Et je me rendais compte qu'au final, à chaque fois, je gardais un peu pour... pour me faire du crack à la maison en rentrant. Et au fur et à mesure des années, ça devenait de plus en plus...

  • Speaker #0

    Et la dernière fois, tu t'en souviens ?

  • Speaker #1

    Ouais. Alors, je ne sais plus, en novembre, si c'est 30 ou 31 jours, c'est 30. Donc, c'était le 30 novembre. Le matin, je lui ai dit à ma mère que je prenais du crack. Et le soir, j'ai pris mon dernier gramme de crack.

  • Speaker #0

    Et donc, tu as pris cette décision comme ça ?

  • Speaker #1

    Non, sur le coup, non. Moi, je l'avais dit à mon père un mois avant. Et je l'avais dit, on ne le dit pas à maman pour l'instant, parce que j'ai peur de la tuer en lui disant. Et je ne sais pas, ce matin, je me suis réveillé, je me suis dit, il faut que je lui dise. Donc, quand je me dis un truc, je le fais tout de suite. Je l'ai appelé, je lui ai tout dit, donc ça a duré quelques heures quand même. Et je ne l'ai pas tué. Mais quand je lui ai dit, je lui ai dit « Maman, je suis intoxicot, dans trois jours j'ai rendez-vous dans une cure, enfin dans un hôpital psychiatrique, et s'il faut que je dise que je suis suicidaire pour qu'il me garde, je le ferai parce que je pense à ça matin, midi et soir, depuis un mois où je l'ai dit à papa, c'est dans ma tête comme jamais ça l'était avant. » Le lendemain matin, je me réveille, je descends les escaliers, papa me dit qu'il va avoir son pote garage-liste, et là je mets ma playlist sur l'enceinte de la maison, il y a une musique qui passe. Et là, j'ai pleuré comme jamais j'ai pleuré dans ma vie. Pour moi, je me rends compte que j'ai beaucoup pleuré. Indirectement pour moi, mais pas directement. Je ne sais pas trop comment expliquer. Et là, j'ai vu 20 ans de ma vie, mais c'était un film. Tout, tout, tout, tout est passé. Et là, j'ai dit, c'est fini. Et il y a deux autres musiques qui sont passées après. Donc ça a duré bien 15, 20 minutes au final. J'ai continué à chialer après tout ça. Mon père qui arrive et qui me fait « qu'est-ce qu'il y a ? » Ça va parler de choses. Je me suis dit « si, si, ça va trop bien justement. » Je pleure de joie.

  • Speaker #0

    Est-ce que tu penses que c'était comme un signe, un appel, cette chanson ?

  • Speaker #1

    C'est marrant parce que je l'avais chasamée quelques jours avant. Elle passait par hasard à la radio, je l'avais déjà entendue. Et elle m'a marqué cette musique. Et là, à ce moment-là, ce n'était pas le bon moment encore. Et là, elle est arrivée ce jour-là et ce n'est pas par hasard.

  • Speaker #0

    C'est ouf ce déclic. Et entre ces deux événements, le début et la fin, est-ce qu'il y a eu des tentatives d'arrêter ?

  • Speaker #1

    En fait, entre le jour où j'ai dit à mon père et le jour où j'ai dit à ma mère, j'en prenais tous les jours. Je l'ai caché à mon père, il ne le sait pas. Il doit commencer à le savoir, je crois que je l'ai dit maintenant. Mais il croyait que j'étais clean. Je trouvais des moyens. Je lui avais donné ma carte bleue, mon téléphone. Enfin, pas mon téléphone, mais les applications qui permettaient d'acheter de la drogue. Mais je trouve encore des moyens, je ne vais pas dire lesquels, mais je trouvais des moyens de m'en procurer. Et j'ai réussi à m'acheter un gramme par jour pendant un mois. Et après, par contre, depuis, si c'était la question, d'entre le 1er décembre et aujourd'hui, j'y pense tous les jours.

  • Speaker #0

    Donc c'est encore dur, même si ça fait six mois.

  • Speaker #1

    Il y a eu en six mois, il y a eu plein d'étapes. Il y a eu les deux premiers mois où... où je m'en sortais, je n'y pensais pas, mais je savais qu'il fallait que je fasse gaffe. Il y a eu deux mois où pour moi c'était derrière. Je me suis même retrouvé dans une soirée en Inde où il y a un saladier de coke qui est arrivé et je leur ai dégagé la gueule en mode « c'est quoi votre merde ? » . Et depuis la cure, c'est vraiment difficile. C'est marrant parce que je pense, en fait la cure ça te fait repasser. J'étais dans un monde parallèle depuis quatre mois, voyage. enfermé avec mon père, enfin enfermé en plus guillemets, et retournant au cure, en fait, c'était retrouver des personnes qui sont dans le même, dans la même maladie que moi, et en fait, aller chercher de la complication, parce qu'on va trop parler, j'ai eu des trucs, c'était qui ton dealer, comment tu fumais ça, à la canette ou à la bouteille, enfin.

  • Speaker #0

    On passe par le mental, et quand t'es passé en Inde, je pense que là, t'es passé par quelque chose de spirituel. qui te dépasse totalement et qui te raccorde à quelque chose qui te prend directement au cœur.

  • Speaker #1

    Ah bah oui, il se fait mal aussi. En fait, je ne sais pas, mais du coup, j'y pense beaucoup plus depuis que je suis passé par là. Mais c'était trop facile jusqu'à là, en fait. Tout le monde me dit, ça a l'air trop facile pour toi. À ce moment-là, c'était facile. Là, depuis deux mois, c'est redifficile, tu vois.

  • Speaker #0

    Est-ce que tu penses que le voyage que tu vas entreprendre là en vélo... Ça va beaucoup t'aider aussi ?

  • Speaker #1

    Je me suis toujours rendu compte, dès le début, quand j'ai vu les médecins, parce qu'au début, pendant trois mois, jusqu'à ce qu'on parte en Inde, j'avais trois rendez-vous par semaine. Et les gars, ils me disaient, enfin les médecins, il ne faut pas que tu fuis la réalité. Mais en fait, ma vie, c'est ça.

  • Speaker #0

    Mais ta réalité, c'est toi qui te l'as créée ? Oui,

  • Speaker #1

    voilà, c'est ça.

  • Speaker #0

    Ce n'est pas parce que ce n'est pas la leur que...

  • Speaker #1

    C'est pas la leur, mais moi, je sais depuis toujours que... que j'ai envie de faire ce tour du monde et que d'aller voir tout ce qui se passe dans le monde me fait oublier cette drogue.

  • Speaker #0

    Et ça te transforme ?

  • Speaker #1

    Ouais.

  • Speaker #0

    Et donc, qu'est-ce qui te fait tenir encore aujourd'hui ?

  • Speaker #1

    Ce qui me fait tenir, c'est en premier mes parents, enfin moi, parce que je suis quand même beau. En premier, moi. Je dis toujours mes parents avant, mais il faut que je les dise moi. Parce que je ne suis pas fier d'être tombé dedans, mais je commence à être fier de m'en sortir. Parce que tous les médecins, ils disent que quand on en a parlé autour de nous, ils nous ont dit à mes parents, vous aurez un toxico dans votre vie. Je serai un toxico toute ma vie parce que j'en aurai.

  • Speaker #0

    C'est un peu encourageant ça. Ouais,

  • Speaker #1

    ouais, ouais, mais c'est lucide aussi. Je ne sais pas si c'est le bon mot lucide, mais c'est la vérité. C'est que cette drogue, je l'ai su dès le début. Enfin, pas à 18 ans, parce qu'à 18 ans, j'avais encore douleur dans ma tête. Mais à 25 ans, je me suis dit, elle fera partie de moi toute ma vie, cette drogue. J'espère que je m'en défraie, mais elle fera partie de moi toute ma vie.

  • Speaker #0

    C'est comme une connexion qui se fait dans le cerveau. Oui,

  • Speaker #1

    une connexion de merde. Je ne vais pas avoir une connexion avec une fille qui se partage ma vie, mais non, c'est avec la drogue.

  • Speaker #0

    Eh bien, il faudra remplacer cette accoutumance par celle de l'amour, peut-être. Qui sait ?

  • Speaker #1

    Inch'Allah.

  • Speaker #0

    Carrément. Et si on revient un peu sur les journées que tu passais à l'époque ? Quand tu étais dépendant, c'était quoi une journée type ?

  • Speaker #1

    Après 20 ans, les journées, elles changent. Ouais,

  • Speaker #0

    je me doute.

  • Speaker #1

    Au début, c'était une journée classique de mec normal qui, de temps en temps, va déconner. Et c'est la dernière année où là, ça a vraiment été... J'en rêvais la nuit. Donc, on ne peut pas dire que c'est un rêve, mais plus un cauchemar, du coup. Je rêvais que je prenais du crack la nuit, je me réveillais le matin comme si j'en avais pris, donc en manque. Donc dès le matin, je me réveillais, il fallait que j'ai ma dose. Il fallait que j'appelle le dealer dès le matin, on va trouver un dealer à 8h du mat.

  • Speaker #0

    Parce que tu n'en avais déjà plus de la vie ?

  • Speaker #1

    Ah bah non, quand je commence quelque chose, je le finis.

  • Speaker #0

    Donc tous les matins, c'était la même galère ?

  • Speaker #1

    Il y avait des matins où ça allait, enfin bref. Mais avant 14h, j'avais mon gramme.

  • Speaker #0

    Et comment ça s'organisait au niveau de la vie pro ?

  • Speaker #1

    J'ai eu la chance d'être très bon dans mon métier et j'arrivais quand même à gérer les deux. Mais du coup, j'étais quand même beaucoup moins productif quand je ne trouvais pas ma dose le matin parce que j'étais plus sur mon téléphone à envoyer des messages aux 40 dealers que j'avais sur mon téléphone qu'à faire ma mise en place et à préparer mon service pour le midi.

  • Speaker #0

    Alors même si je n'aime pas les étiquettes et que je n'aime pas qu'on parle de soi à travers un métier, ça me rend curieuse. Qu'est-ce que tu faisais avant dans la cuisine ? Ah,

  • Speaker #1

    je faisais de la cuisine.

  • Speaker #0

    Ok.

  • Speaker #1

    20 ans de cuisine, 20 ans de crack. Jusqu'à il y a deux mois, je me disais que c'était inhumain de faire ça. Et les médecins, parce que j'étais diagnostiqué TDAH, je n'aime pas trop ce mot, mais ils me disaient qu'en fait, cette drogue me canalisait et c'était mon médicament. C'est encore un bon conseil. Et le traitement qu'ils te proposent pour le TDAH, c'est de la méthamphétamine.

  • Speaker #0

    On remplace un dealer par un autre.

  • Speaker #1

    Oui, voilà. Et puis, en fait, tu te dis, je fais quoi ? Je continue à me... Mais le TDAH, c'est un cerveau qui va un peu à mille à l'heure. Et je pense que jusqu'à il y a six mois, je n'étais pas capable de gérer mon cerveau. Et aujourd'hui, je le gère et je n'en ai plus besoin. Enfin, je n'en ai plus besoin. Non, je n'en ai jamais eu besoin, mais je n'étais pas capable de gérer mon cerveau avant. En fait, j'ai eu besoin de faire plein de trucs en même temps, donc de me droguer et de faire de la bouffe, par exemple.

  • Speaker #0

    Et aujourd'hui, tu gères ton TDAH beaucoup mieux, mais sans traitement alors ?

  • Speaker #1

    Oui, non, j'ai refusé le traitement. Je leur ai dit, je n'ai pas envie d'arrêter une drogue pour une autre. Le gérer, vu que j'ai quand même... Une partie du cerveau qui est quand même beaucoup moins remplie par la recherche de drogue, me permet de me concentrer sur les tâches à faire. Parce que du coup, vu que je dois faire plein de choses en même temps, je m'éparpille et je me perds. Donc à l'époque, je m'éparpillais et je me perdais. Vu que je prenais du crack à côté, j'oubliais ce que je devais faire à la base.

  • Speaker #0

    D'accord.

  • Speaker #1

    Aujourd'hui, je l'oublie toujours. mais dans la journée ça revient et j'y repense donc en fait Avant, j'oubliais. Là, dans la journée, ça revient et je le refais.

  • Speaker #0

    D'accord.

  • Speaker #1

    Donc, je suis à jour sur mes tâches administratives, tout ça.

  • Speaker #0

    Ça, ça donne aussi un bon sentiment de tranquillité parce que tu as plein de fichiers ouverts dans le fait.

  • Speaker #1

    Oui, c'est ça. Le partenaire met tous les rendez-vous. En fait, c'est un stress que tu as en plus et que j'ai moins aujourd'hui. Je n'ai jamais réussi à gérer ça pendant toute ma vie. Et franchement, je suis trop content de réussir à gérer ce truc-là. Ça paraît banal pour certaines personnes. Mais pour moi et pour tous les gens qui sont TDAH, je pense qu'entendre dire que tu réussis un peu mieux à gérer ta vie...

  • Speaker #0

    C'est un combat. Moi, je le suis aussi et c'est un combat quotidien. Moi, je me bats aussi avec la montre. Et toi, c'est quoi ton rapport à la montre ?

  • Speaker #1

    La montre ?

  • Speaker #0

    Ouais. Au temps.

  • Speaker #1

    Au temps ? Je gère très bien le temps. C'est vrai ? Ouais. Tu vois, par rapport à ton arrivée, j'étais timing. Il me restait deux toasts à faire pour que je sois prêt. Mais non, après, c'est mon métier aussi qui m'a forgé à bien gérer le temps, parce que tout est à la mieux. Tout est une question de minutes en cuisine. Je pense que c'est grâce à ça aussi. Je n'ai pas trop de problèmes avec ma montre.

  • Speaker #0

    Si je comprends bien, tu as toujours gardé un pied dans la réalité à travers ton travail, qui t'a ancré quand même, et un pied dans la folie de la drogue.

  • Speaker #1

    Oui, j'ai un côté où je suis le plus gentil. Je ne parle plus d'anti du monde, mais je suis quelqu'un de très gentil, qui est très humain, qui aime aider les personnes. Alors ça s'est souvent retourné contre moi, mais je pense que la drogue, elle y était aussi pour quelque chose, parce que je devais mal exprimer ce que je voulais faire de base. Dans mes couples, j'ai toujours voulu aider et en fait, ça s'est retourné contre moi, par exemple. J'ai oublié les questions du coup, de base.

  • Speaker #0

    Mais ce n'est pas grave.

  • Speaker #1

    La question de base,

  • Speaker #0

    elle est imprévue. de moi aussi je l'ai oublié bienvenue chez les TDA et ben tu sais quoi on va passer à la suivante dans tout ça est-ce qu'il y a eu un moment où t'as senti que t'existais plus vraiment dans cette vie là ouais l'année dernière j'étais

  • Speaker #1

    en couple et autour de moi tout le monde pensait que je m'étais calmé sur la fête parce que je suis un fêtard de base et que je m'étais rangé Et je me rendais compte que je longeais les murs parce que cette drogue, elle te rend vraiment parano. Et je me cachais un peu derrière ma meuf en mode je suis clean, je suis sage, tout ça. Et mais moi dans ma tête, et je pense que ça a été le avant du déclic, c'est que tous les jours je me disais en fait je ne sers plus à rien sur cette terre. En cuisine, je ne progresse plus, même si je progressais encore. Je n'ai plus rien à apporter. Et quelqu'un d'autre mérite plus sa place que moi. Je ne suis pas croyant, je ne suis pas baptisé ou quoi que ce soit. Mais je crois en quelque chose. Et je m'étais dit, il va me prendre ma vie, elle ne sert plus à rien. Être là pour donner de l'argent à des dealers et à trouiner le cerveau, ça ne sert à rien.

  • Speaker #0

    Donc il y a eu une grosse perte de sens et c'est à ce moment-là que tu as senti que tu n'existais plus vraiment dans ta vie ?

  • Speaker #1

    En fait j'existais mais je n'existais plus non plus.

  • Speaker #0

    Et c'est quoi ce truc qui résistait en toi, même tout au fond à ce moment-là, qui fait que tu tenais bon quand même ?

  • Speaker #1

    J'ai toujours su que j'étais quelqu'un de particulier et qu'on m'a toujours dit que je l'avais dans mes mains. Je suis doué dans pas mal de trucs et je me suis dit, en fait je n'avais plus trop d'espoir. Mais je n'arrêtais pas de me dire, putain Antoine, c'est du gâchis, c'est du gâchis, c'est du gâchis. Donc à ce moment-là, je ne me rendais pas compte. Mais aujourd'hui, avec du recul, en fait, j'avais toujours ce truc-là en moi qui me disait, Antoine, tu dois faire quelque chose de ta vie.

  • Speaker #0

    Et quand tu parles de faire quelque chose de ta vie, est-ce que c'est lui donner un sens ? Et si oui, est-ce qu'aujourd'hui, tu as senti que tu voulais donner un sens à ce que tu as vécu ?

  • Speaker #1

    Oui, en fait... Le sens il est venu quand j'ai fait mon... En fait je suis de Lille, et ma cure elle est en Bretagne, et un matin je me suis réveillé, je lui ai dit je prends mon vélo et je pars en Bretagne. Et je voulais voir déjà si mon corps il était encore apte à... Parce que j'ai jamais fait de vélo en vrai, le vélo je l'ai acheté, j'avais fait 50 bornes avec mon frère la veille, et je voulais voir si mon corps il était encore au paix quoi. Et sur la route, à un moment, moi j'ai fait 1200 barres dans 9 jours quand même. C'est minable,

  • Speaker #0

    t'avais la rage. Ouais,

  • Speaker #1

    j'ai pas vu le paysage, j'étais peut-être dans le guidon, je chantais, je faisais le con, mais sinon j'ai rien vu. Et à un moment, je passe devant Action. À ce moment-là, avec ma famille, il y a des gens très proches qui étaient au courant. Et j'ai quand même beaucoup, beaucoup de potes. Et je savais que ça allait se savoir. Et je ne voulais pas que ça se sache par téléphone arabe. Je voulais que ça se sache à ma façon, de le dire moi-même. Mais je n'avais pas envie non plus d'avoir le regard des gens. Je me suis dit, allez, j'achète un drapeau. Et j'ai écrit l'île Bretagne des Intox.

  • Speaker #0

    C'est génial.

  • Speaker #1

    Donc je suis rentré à Action, j'ai dit vous vendez drapeau ? Ils m'ont dit non, donc j'ai acheté un manche à balai et deux têtes d'oreiller. Je me suis mis sur le trottoir, j'ai acheté trois feux de kiki, bref. Et là je me suis mis sur le trottoir à mettre mon drapeau et j'ai dit, bon bah si je le mets sur mon vélo, je vais faire un post sur Insta et je vais raconter ma vie.

  • Speaker #0

    Et c'est là que ça a commencé.

  • Speaker #1

    Et là, en fait, sur le coup, c'était égoïste parce que je me suis rendu compte que mon déclic, que je l'ai eu grâce au fait de le dire à mes parents. Ça a pris un peu de temps. Mais donc il y a la musique, mais le déclic c'est quand même les parents avant. La musique a fait que le déclic se lance. Et du coup je me suis dit, je vais le dire à tout le monde comme ça, comme ça ils ne vont pas me regarder. Si les gens me détestent, ils me supprimeront, ils me bloqueront, ils m'enverront des messages de haine, mais ça ne me fait rien les messages. Avoir quelqu'un en face de moi qui me dit que je suis une merde, j'ai un peu plus de mal. Et en fait ça a pris de l'ampleur cette histoire. Et je me suis rendu compte qu'en fait on a tous une addiction.

  • Speaker #0

    Et tu te sentis moins seul ?

  • Speaker #1

    Je me sentis moins seul et je me suis rendu compte qu'en fait, plein de gens m'envoyaient des messages en me disant « Moi j'ai ça, moi j'ai ci, moi j'ai ça. » Et je me suis dit « En fait, peut-être que mon histoire, elle peut aider. » Donc ça donne un sens à ma vie.

  • Speaker #0

    Et à partir de là, il y a eu une autre énergie dans ce chemin que tu entreprends ?

  • Speaker #1

    L'autre énergie, elle s'est créée en Inde. Quand j'étais en Inde, je ne voulais pas aller dans ce pays à la base. En fait, mon père, il devait aller au Sri Lanka, parce que je l'ai fait avec mon ex. On avait loué un tuktuk à deux et on avait fait le tour du Sri Lanka pendant un mois et demi. Et j'avais vraiment trouvé ce pays incroyable. C'est le pays le plus gentil du monde. C'est incroyable. Les mecs, tous les jours, ils doivent faire une BA. Et on l'a ressenti pendant notre voyage. Moi, j'ai des varices. Un jour, j'arrive à un Airbnb. Le mec, il me dit, ah, t'as des varices. Je t'emmène à l'hôpital ayurvédique. Tu sais, le truc de plantes.

  • Speaker #0

    Ouais.

  • Speaker #1

    On a fait une heure de route, on est arrivé à l'hôpital, l'hôpital gratuit, ils me donnent un traitement à base de plantes et des massages à faire. Bon, je n'ai jamais fait ce que c'était dans la drogue, mais le truc, il marchait, quoi.

  • Speaker #0

    Incroyable.

  • Speaker #1

    Un mec gratuitement comme ça, tu lui demandes, tu lui donnes de l'argent et il te dit non. Après l'Inde, ça est encore... On ne peut pas comparer deux pays. Mais pour en revenir à la question, du coup, en Inde, je ne sais pas ce qui se passait, mais en fait, j'ai vu la misère. Ce n'est pas ce qui m'a marqué sur le voyage, parce que tout le monde dit « tu prends un coup en étant là-bas » . Moi, je n'ai pas pris un coup parce que tout le monde était heureux, qu'ils soient riches ou pauvres. Tout le monde se mélange.

  • Speaker #0

    Il y a une puissance du cœur même au creux, pas d'isère profonde.

  • Speaker #1

    J'en ai des frissons rien qu'en parler. Les gens ne se mélangent pas entre eux, mais communiquent entre eux. Nous, par exemple à Lille, on ne verra jamais un Français de Marc-Andre Barrel parler à un Roubaisien. un rebus roubé.

  • Speaker #0

    C'est le système de caste.

  • Speaker #1

    Là-bas, il y a les castes, mais ils parlent. J'ai déjà vu des millionnaires demander leur route à un tuktuk et ils mettent un quart d'heure à... Tu ne sais pas ce qu'ils se disent, mais ils parlent pendant un quart d'heure. Ça sourit, ça rigole et tout. Je pense que tu ne verras jamais chez nous. Ça, les bidonvilles, je ne voulais pas les faire non plus. En fait, tu vois que tous les déchets de France, ils arrivent là-bas. Dans le bidonville en question que j'ai fait à Mombé, C'est 10% des déchets mondiaux qui arrivent.

  • Speaker #0

    Incroyable !

  • Speaker #1

    Donc on leur achète leurs fringues et on leur rend nos merdes. Et plein de trucs. Et en fait, les gens venaient vachement me voir, je ne sais pas pourquoi. Après j'ai rencontré un gourou qui m'a dit que dans une autre vie j'étais un chaman indien. Je ne crois pas trop, enfin je y crois sans y croire. Mais je ne sais pas, il y a quelque chose qui s'est fait et je me suis dit, putain, je rentre à pied d'Inde. Et puis après, il y avait la cure, tout ça. Et je me suis dit, c'est un truc qui se prépare, donc je ne l'ai pas fait. Mais du coup, j'ai envie de partir faire le tour du monde sans prendre l'avion.

  • Speaker #0

    C'est énorme. Et toujours, en fait, dans ce mouvement d'aider à travers...

  • Speaker #1

    Ouais, mais en fait, avec les idées qui me fuitent dans tous les sens. C'est avant, je pars en Ouganda, ce n'est jamais été en Afrique. Et je me suis dit que je me suis allé créer une asso. Moi, je vais partir là-bas. J'ai vu qu'en fait, dans l'avion, j'avais le droit de prendre deux valises. Donc j'en ai mis avec mes fringues et une avec des cadeaux, des bouquins, des crayons, des trucs comme ça. Et en fait, l'idée, c'est d'arriver avec des cadeaux. Moi, au courrier, les premiers, tu vois, aller voir un mec dans la rue, n'importe quoi. Et du coup, un cadeau qui grandit où en fait, moi, j'offre le premier. Et puis après, à l'assaut, s'il y a des gens qui veulent donner un peu d'argent. Après, je vais voir par exemple une famille. Si on réussit à faire un cadeau à une famille qui est un peu plus gros. Après, aller voir une école et monter. Après, je ne sais pas si ça prendra, mais tu vois, toujours pas arriver en mode touriste. Je veux voir ton pays, mais...

  • Speaker #0

    un système de...

  • Speaker #1

    Tourisme, je veux voir mon pays et si je peux aider à... Toi, même rester une semaine dans un truc, à bricoler, à faire n'importe quoi, enfin, je ne suis pas un grand bricoleur, mais pas qu'être là en tant que touriste, mais apporter un truc aussi si je peux, quoi.

  • Speaker #0

    Et dans tout ce que tu fais, donc ton projet d'assos, le fait de partir en vélo, les voyages et la cure, qu'est-ce qui t'a le plus aidé ?

  • Speaker #1

    Le voyage. La cure, elle m'a pas aidé. La cure, elle m'a... La cure, elle m'a aidé à me rendre compte que j'en étais pas sorti et qu'il fallait que je fasse attention toute ma vie. Donc elle m'a aidé d'un côté quand même, parce que sans ça, peut-être qu'un jour, je serais tombé sur un dealer et j'aurais dit oui. La cure m'a conforté dans l'idée où il faut que je fasse vraiment attention. Mais le voyage m'a fait rendre compte qu'en fait, quand je suis en voyage, j'oublie toute cette merde et que même si on peut dire que c'est fuir le truc, en fait, je veux bien le fuir. Pour l'instant, à part ma famille, je n'ai pas d'attache ici. Et puis peut-être qu'un jour, en voyageant, j'aurai une attache quelque part.

  • Speaker #0

    Est-ce que le Antoine qui part est le même que le Antoine qui revient ?

  • Speaker #1

    Oui, le Antoine, il ne change pas. Franchement, le Antoine, il ne change pas. Il réussit avec la drogue en moins à avoir son cerveau qui marche mieux pour savoir un peu plus où il va.

  • Speaker #0

    C'est pas mal dit ça.

  • Speaker #1

    Ouais, ouais, ouais. Parce que j'ai toujours rêvé de faire ce tour du monde. Mais la drogue, dès que je rentrais de voyage, j'étais allé à l'aéroport dans le pays avant d'arriver en France. Je pensais déjà à appeler le dealer. Ou je l'avais déjà même appelé. Là, aujourd'hui, je dois juste penser à ne pas en prendre. Je ne dois pas penser à comment en avoir. Ça prend beaucoup moins de temps à dire non, j'en prends pas qu'à prendre ton téléphone, à trouver un dealer. Et puis après, quand tu te drogues, tu n'as plus de cerveau. et tu penses à tout sauf à ça. En fait, aujourd'hui, vu que je suis en arrêt de travail, j'ai quand même vachement de temps pour réfléchir à tout ce que je vais faire une fois que je partirai.

  • Speaker #0

    Et t'as dû lâcher quoi pour t'en sortir ? Des connaissances ?

  • Speaker #1

    Des amis ? Personne n'était au courant. Jusqu'au jour où je disais à mon père que j'étais le seul au courant, à part les dealers. Donc j'ai pas dû... Après, j'ai fait quand même un tri. Le tri, c'est pas en mode j'ai pris mon répertoire et j'ai supprimé des gens, mais il y a des gens que t'enlèves de ta vie parce que en fait, la drogue, elle te fait avoir moins conscience de la personne que t'es en face de toi et que quand t'es clean et que t'as tout ton cerveau, tu lui dis en fait, ce mec-là, il m'apporte rien. C'est des trucs qui se font naturellement. Du coup, lâcher... Non, lâcher mon métier. Lâcher la cuisine, ça me fait un bien flou. Ça fait 20 ans que je cours, que je me mets dans des missions tout le temps impossibles parce que j'ai toujours eu la pression de mon père pour le boulot. Et vu que je faisais le coin à côté, je pense que pour remettre le pendule à l'heure, je me lançais sur des missions de ouf pour le rendre fier. Mais des missions qui m'ont bouffé ma vie. Là, ça fait six mois que je ne travaille pas.

  • Speaker #0

    Le rêve ?

  • Speaker #1

    C'est le bonheur.

  • Speaker #0

    Je m'adouce.

  • Speaker #1

    C'est le bonheur. Après, je veux vraiment me débarrasser de cet arrêt de travail parce que je n'ai pas 100% de ma liberté, du coup, parce que je ne peux pas faire ce que je veux, parce que je suis fliqué quand même par mon boss, qui a appelé la sécu pendant que j'étais en Inde pour leur dire que j'étais en vacances pendant mon arrêt maladie, des trucs comme ça, pour que je les rembourse, alors que je gagne moins que le SMIC. Enfin bref. Et voilà, du coup... Vous savez, je suis perdu. Mais du coup, je n'ai pas dû me séparer de grand-chose, juste de mon métier. Et pour la première fois de ma vie, je n'ai plus la pression. Mon père m'a dit, en fait, tu t'es mis une pression pour rien, de ce qu'il dit.

  • Speaker #0

    Ça t'a libéré,

  • Speaker #1

    ça ? Et du coup, ce truc-là de mon père, qu'il ne soit pas derrière moi, et qu'il me dise, prends ton temps. Et qu'aujourd'hui, même quand je lui dis, parce qu'avant, il y a un an, j'aurais dit, je veux partir faire le tour du monde à pied. il m'aurait dit non tu bosses quoi Aujourd'hui, il a compris que j'étais différent, qu'il fallait accepter que j'ai des projets différents que la moyenne.

  • Speaker #0

    Est-ce que tu penses que c'est ça aussi qui t'a fait tomber dans la drogue, ce besoin d'être quelqu'un d'autre ?

  • Speaker #1

    Je suis tombé dans la drogue parce que je voulais toujours montrer que j'étais capable de bouffer le plus de tasses possible dans la soirée, d'être le plus con en gros. Le plus con ? Le plus con, c'est con de faire des concours de celui qui se défonce le plus la gueule.

  • Speaker #0

    D'accord.

  • Speaker #1

    J'ai toujours voulu... Je suis quelqu'un qui aime bien plaire. Et ma façon de plaire à l'époque, c'était d'être le plus fou.

  • Speaker #0

    D'accord. Tu étais dans ce personnage-là. Aujourd'hui, tu te rends compte que c'était un rôle que tu jouais ou c'était vraiment réel à l'époque ?

  • Speaker #1

    Non, j'en ai trop fait. Mais je reste quand même qui je suis. Et je sais que de temps en temps, j'ai besoin de lâcher les chevaux et de mettre une perche.

  • Speaker #0

    Et quand tu es du maître une perche,

  • Speaker #1

    c'est... Pas aller boire des coups avec des potes.

  • Speaker #0

    De lâcher la pression.

  • Speaker #1

    En fait, je m'en rends compte quand même. Mais c'est pas bien. Enfin, il faut pas... Parce que l'alcool, c'est quand même le meilleur ami de la tentation d'après de faire des conneries. Donc, il faudrait que je sois abstinent total d'alcool. Enfin, pas me mettre...

  • Speaker #0

    Mais là, ça te met une pression dingue aussi. Ça te met une pression folle.

  • Speaker #1

    Oui, en fait, c'est ça. C'est tout arrêté. Et en fait, j'ai tellement bossé dans ma tête pendant six mois que je sais que je ne tomberai plus dans la cam. Je n'en ai jamais repris jusqu'à aujourd'hui. Mais si il y a un matin où je me réveille et je me suis pris une timbale et que je me rends compte que j'en ai pris, je ne retomberai pas dedans le lendemain. Ce n'est pas du tout un bon conseil, mais moi, personnellement, je sais que...

  • Speaker #0

    Parce que tu as fait assez de chemin pour voir...

  • Speaker #1

    En fait, je me suis rendu compte qu'avant, dès que j'avais l'envie, j'appelais le dealer et je ne réfléchissais pas au reste. Aujourd'hui, je sais que j'en ai envie tous les jours, mais que je ne le fais pas. Et que même si un matin, en fait, si un matin où je me réveille, que je vois un sachet à côté de moi, je vais culpabiliser, ça me fera chier. Mais justement, en fait, encore plus, ça me dira non, mais tu l'as fait hier, tu ne le refais plus.

  • Speaker #0

    Donc, tu as l'impression, tu as cette impression d'être plus fort aujourd'hui, plus vrai aussi.

  • Speaker #1

    Ouais, ouais, ouais. Non, mais aujourd'hui, je suis 100% moi-même et j'ai plus... J'ai plus ce truc-là où j'ai envie de plaire ou pas plaire aux gens. Aujourd'hui, tu peux me dire que tu m'aimes pas, ça me dérange pas.

  • Speaker #0

    Moi, ça m'a beaucoup frappée sur ton profil Insta. En fait, c'est ce qui a percuté en premier. Tu utilises un langage des fois cru, très vrai, et il n'y a pas ce besoin de se conformer à se dire « mais non, il faut que je parle de telle manière, il faut que j'utilise tel ton » .

  • Speaker #1

    C'est ça, après, pour moi, avoir un maximum d'abonnés, c'est de toucher un maximum de monde pour un maximum aidé. Que j'en ai... pas combien, je m'en fous, à chaque fois on me dit t'as 11K ou je sais pas quoi, je regarde même pas, je m'en fous. Mais quand je vois que ça monte, je me dis putain, en fait...

  • Speaker #0

    Ça parle.

  • Speaker #1

    Ça parle plus, enfin ça peut aider. C'est que ça interpelle et si ça interpelle, c'est que ça touche.

  • Speaker #0

    Après, bien sûr, c'est hyper important parce qu'au plus, comme tu le dis, au plus il y aura de monde qui va entendre ton message, au plus il y aura d'impact. Mais si cet impact est créé autour de la personne que tu n'es pas, autour d'un masque,

  • Speaker #1

    il n'a plus d'importance. Non, du coup, je ne peux pas le m'envoi. C'est comme là, je te dis que je pourrais me réveiller un matin en ayant pris. Normalement, j'aimerais dire plus jamais, plus jamais, plus jamais. Mais je sais dans ma tête que plus jamais, je retomberai dedans. Mais que ce n'est pas parce qu'il y a un jour où je me réveille que je l'ai fait, que je retomberai.

  • Speaker #0

    La vie, j'ai l'impression que c'est un peu ça aussi. C'est des fois, tu fais trois pas en avant, t'en fais même dix, et puis paf, il arrive un truc et t'en fais deux en arrière.

  • Speaker #1

    Toi, il vaut mieux se dire, ça peut être arrivé, mais c'est pas parce que ça réarrive que je retomberai dedans. Plutôt que de se dire que je ne retomberai jamais dedans. Et en fait, il y a un jour où tu craques et là, t'es reparti comme en 40 et que c'est encore pire. Parce que quand tu retombes, quand t'arrêtes et que tu reprends, tu reprends pire à chaque fois. Mais par contre, du coup, je me repense à un truc, est-ce qu'Antoine change ? Bah oui, du coup, j'ai changé. Parce qu'avant, le regard des gens était important pour moi. Aujourd'hui, j'en ai plus rien. Mais je parle du personnage intérieur.

  • Speaker #0

    Tes valeurs qui tu es, ça bouge pas. Et si tu pouvais retourner parler au petit Antoine, au jeune Antoine d'il y a 20 ans, tu lui dirais quoi ?

  • Speaker #1

    Trache la route. Franchement, je lui dirais rien parce que je te le disais tout à l'heure, je me suis posé la question Toute ma vie, putain, pourquoi cette drogue est arrivée sur ma route ? J'ai eu la réponse il y a quelques jours où, en fait, je pense que je suis arrivé sur Terre pour tomber dedans, pour comprendre comment ça marche et pour aider les gens à peut-être s'en sortir.

  • Speaker #0

    C'est de donner un sens et transformer ce que tu as vécu. Et si tu pouvais laisser une parole à quelqu'un qui est encore dedans, qui est encore sur le chemin, tu lui dirais quoi à cette personne ?

  • Speaker #1

    Chaque personne est différente. Pour ceux qui font ça en cachette et qui se cachent derrière ça, parlez-en. Même si vous avez peur comme moi de tuer vos parents ou quoi que ce soit, en fait, on est tous solides. Après, si vous n'avez pas de parents, pas de famille, allez voir... Des proches, si vous n'avez pas trop de proches, les hôpitaux, ils sont quand même là pour vous.

  • Speaker #0

    Tu ne leur conseillerais pas de prendre un billet d'avion ?

  • Speaker #1

    Si, prendre un billet d'avion. Après, le truc, c'est que quand tu es dans la drogue, tu n'as pas d'argent. Oui, c'est vrai. Mais franchement, les addictos, ils sont bons. Moi, je n'ai pas passé la meilleure des cures, mais tous les médecins que j'ai vus avant, psychologues, alors allez voir un psychologue, parce que le psychologue, il te fait aller chercher un peu de loin. J'ai vu une psy qui, j'avais l'impression qu'elle ne m'avait rien apporté. Et en fait, je me rends compte qu'elle m'a apporté. Le fait de parler, en fait. Le fait de tout lâcher à quelqu'un où, pour le coup, même si tu as peur du regard des gens, lui, tu t'en fous parce que c'est son métier. Moi, ça m'avait fait vachement de bien. Aller voir les centres d'addictos. Moi, je t'ai reçu au début par un infirmier, après par un addicto et pareil. Ils te parlent, ils s'y connaissent dans le truc, donc ça aide. Et fais-t'y croire. Parce que si tu n'y crois pas, tu ne peux pas y arriver. Tout le monde me dit « c'est trop dur, je n'y arrive pas » . Si tu dis que c'est trop dur et que tu n'y arrives pas, tu n'y arriveras pas. Si tu te dis « je peux le faire » , et tu peux le faire, tout le monde peut le faire. On a une force en nous qu'on ne connaît pas. Moi, j'ai rendu compte en vélo, en fait, le vélo, les 1200 bornes en vélo, je ne pensais pas que j'allais y arriver en partant.

  • Speaker #0

    Donc, c'est aussi de se prouver qu'on peut faire plus que ça, qu'on est plus que ça.

  • Speaker #1

    Oui, si tu as réussi à tomber dedans, c'est que c'était pour ton chemin. Mais tu peux y arriver. Tu peux y arriver et ce n'est pas parce que tu retombes dedans de temps en temps. Moi, j'ai mis 20 ans à m'en sortir. Il ne faut pas croire que pendant 20 ans, je n'ai pas essayé de m'en sortir. J'ai essayé de m'en sortir tout seul. Mais je ne me donnais pas les bons moyens. Je faisais ça une fois que je n'avais plus rien, à 4-5 heures du mat, et que je regardais sur Internet. Et là, tu n'as pas ton cerveau. Mais pense-y clean. Regarde bien sur Internet. Tu mets Addicto. Tu vois, il y a des centres partout. Moi, quand j'étais en cure de désintox à Auré, pour moi, c'était un village le truc. En fait, tu as une cure de désintox. Donc, tu as des trucs d'Addicto dans toutes les villes de France, je pense.

  • Speaker #0

    Mais qu'est-ce que tu dirais à cette personne qui a essayé, mais qui a échoué et qui se sent un peu... Comme si il n'y arriverait jamais.

  • Speaker #1

    Tout le monde peut y arriver. Si tu as réussi à tomber dedans, tu peux réussir à t'en sortir. Si tu as dit oui, il faut y aller pour dire oui à ces drogues-là quand même. Donc si tu l'as fait, montre-toi que tu peux t'en sortir.

  • Speaker #0

    Et c'est quoi ton conseil d'alchimiste ? Le truc qui aide à transformer la douleur en matière, la chute en force.

  • Speaker #1

    Parle, écris, bouge. Ne reste pas tout seul avec ton chaos et recommence demain.

  • Speaker #0

    C'est un super conseil ça. Alors avant qu'on termine, j'ai encore une dernière petite question à te poser. Mais ce n'est pas réellement une question. C'est plutôt un petit rituel que je fais avec chaque invité. Alors je vais tendre cette fiole d'alchimiste que voici. Avec sa poudre dorée. Et cette fiole a le pouvoir de réaliser trois T-souhaits. Sans aucune limite. Alors si tout était possible, quels seraient tes trois vœux ?

  • Speaker #1

    De ne plus retomber dans la cam, même si j'y crois déjà. De pouvoir bien, bien, bien entamer mon tour du monde à pied et en vélo. Et le troisième, que mes parents soient heureux.

  • Speaker #0

    Je te souhaite que ces trois vœux se réalisent et je te dis un grand merci Antoine.

  • Speaker #1

    Avec grand plaisir, merci à toi.

  • Speaker #0

    Et bien voilà.

  • Speaker #1

    Et bien ouais, ça a roulé.

  • Speaker #2

    Merci d'avoir écouté cet épisode. Prends quelques secondes, ferme les yeux et respire. Ce que tu viens d'entendre, c'est pas juste un témoignage, c'est une preuve que l'impossible peut être sublimé et que l'humain est capable de renaître encore et encore. Alors si cet épisode t'a apporté quelque chose, Partage-le avec quelqu'un qui en a besoin. Et pense à t'abonner pour ne pas manquer les prochains récits d'Alchimiste. Et toi, quelle part de ton histoire peux-tu transformer aujourd'hui ? Si tu veux prolonger la discussion, viens me retrouver sur Instagram sur Histoire d'Alchimiste. Je serai ravie d'échanger avec toi. Et surtout, souviens-toi, c'est dans tes failles que brille ton éclat le plus précieux. Alors... On se retrouve dans 15 jours pour une nouvelle histoire d'alchimiste.

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